Nouvelles ressources électroniques pour l'histoire littéraire féministe Présentation de quelquessites webAuthor(s): Nadine BarreiroSource: Nouvelles Questions Féministes, Vol. 22, No. 2, Féminisme et littérature (2003), pp.117-121Published by: Nouvelles Questions Féministes & Questions Feministes and Editions AntipodesStable URL: http://www.jstor.org/stable/40619959 .

Accessed: 15/06/2014 19:21

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Nouvelles ressources électroniques pour l'histoire littéraire féministe Présentation de quelques sites web Nadine Barreiro

Véritable bibliothèque virtuelle, l'internet est un formidable outil de travail pour les critiques littéraires. Finies les recherches fastidieuses: quelques minutes passées sur le web suffisent pour avoir accès à des cen- taines de textes. De par sa nature même, l'internet présente l'avantage de la diversité: des auteur-e-s de périodes littéraires et d'horizons géogra- phiques très variés en arrivent à se côtoyer. Mieux encore : le web permet à bien des auteur-e-s traditionnellement sous-représenté-e-s dans les antholo- gies de devenir plus visibles et, par là même, plus connu-e-s. En particulier, l'internet permettra peut-être aux écrivaines de retrouver peu à peu la place qui leur est due dans l'histoire littéraire. Bien des sites leur sont en effet consacrés : je me propose précisément, dans cet article, d'en présenter quelques-uns.

Si l'internet offre de multiples avantages, il comporte également un inconvénient de taille : pas facile, en effet, de s'y retrouver parmi la masse d'informations mises à disposition sur le web. La présentation qui suit a pour but de proposer quelques pistes à l'utilisateur ou l'utilisatrice. Élabo- rée dans une perspective pragmatique plutôt que critique, cette introduc- tion est par ailleurs loin d'être exhaustive. La plupart des sites mentionnés offrent cependant des liens vers d'autres sites et peuvent être considérés comme d'excellents points de départ: libre à chacun-e d'orienter ensuite ses recherches selon ses intérêts particuliers. Je me dois toutefois d'insister d'emblée sur le problème central auquel je me suis trouvée confrontée lors de la conception de cet article: fort peu de sites internet sont pour le moment consacrés aux écrivaines d'expression française. Bien des progrès restent à accomplir dans ce domaine : n'est-il pas paradoxal que ce soit un site développé par des chercheurs et des chercheuses américain-e-s qui offre actuellement le plus vaste répertoire de textes d'autrices franco- phones? Si elle est décevante, cette constatation reflète pourtant bien l'écart des formes prises par la recherche féministe en anglais et en français.

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Les sites dédiés aux autrices anglophones sont bien plus nombreux et généralement plus fournis. Deux sites en particulier apparaissent comme incontournables lorsqu'il s'agit d'avoir un accès direct aux textes. Dans un cas comme dans l'autre, la réalisation de ces sites est extrêmement professionnelle: la différence principale réside dans l'ac- cès, payant ou gratuit. Pour commencer par le site ouvert au public, il s'agit de celui de l'Université de Virginie et l'adresse en est la suivante : http://etext.lib.virginia.edu/subjects/Women-Writers.html. Plus de 450 textes d'environ 170 autrices sont proposés à cette adresse. Toutes ces produc- tions sont immédiatement consultables en ligne et la période couverte s'étend du XVIIIe au XXe siècle. S'intéresse-t-on à un sujet en particulier? Pas de problème. Le moteur de recherche du site permet de trouver les occurrences du mot désiré. De plus, l'envergure de la recherche peut être définie à volonté : il est ainsi possible de sélectionner un domaine d'intérêt (comme par exemple les textes en prose par opposition aux textes poé- tiques), une période spécifique, ou encore un texte particulier.

Non moins impressionnant, le site créé par l'Université de Brown (Providence, RI): http://www.wwp.brown.edu/ offre lui aussi un accès direct à une multitude de productions. S'il est nécessaire de payer une taxe pour pouvoir consulter les textes, le site est cependant fort bien réa- lisé. Très clair dans sa présentation, il offre plus de 230 textes d'autrices écrits entre 1330 et 1830. Les détails sont soignés: par exemple, il est à tout moment possible de consulter les notes de renvoi. Un simple clic per- met d'ouvrir une petite fenêtre dans laquelle la note désirée s'affiche. De plus, chaque texte est précédé d'une fiche qui indique non seulement la source qui a été choisie pour l'édition, mais également la bibliothèque dans laquelle le livre se trouve. Ici aussi, il est possible de faire une recherche sur un seul texte ou sur plusieurs. Le domaine d'intérêt peut être spécifié et différents critères de recherche sont proposés, qu'il s'agisse du nom de Fautrice, de la date de la publication, de l'éditeur, ou encore de la longueur du texte.

Mais le lecteur ou la lectrice qui tirera le plus de profit de ce site sera sans doute celui ou celle qui s'intéresse à la littérature de la Renaissance. En effet, le site comprend, outre sa section principale, une subdivision consacrée exclusivement aux écrivaines de la Renaissance : http://www.wwp.brown.edu/texts/rwoentry.html. Cent vingt-trois textes sont ici proposés, une partie de ces textes se trouvant également dans le répertoire principal. En guise de cerise sur le gâteau, 106 de ces produc- tions sont introduites par une dissertation écrite par un spécialiste. Ainsi, le ou la novice pourra plus facilement se familiariser avec des textes peu connus. Dans le même but, une autre page - encore peu développée - propose 14 études sur des sujets thématiques en lien avec la littérature de la Renaissance.

Les sites mentionnés jusqu'à présent ont pour but d'offrir des collec- tions électroniques de textes littéraires écrits par des femmes. Mais d'autres

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conceptions sont également possibles. Trois sites d'accès gratuit méritent en particulier d'être mentionnés. Le premier, intitulé «A Celebration of Women Writers» et accessible à l'adresse: http://digital.library.upenn.edu/women/, se caractérise surtout par l'ampleur de ses ambitions. En effet, le site réper- torie les noms d'autrices écrivant dans tous les domaines, qu'il s'agisse de littérature, de science politique ou d'économie, par exemple. Les autrices choisies appartiennent également à des périodes historiques et à des cultures très diverses. Quant aux recherches, elles peuvent s'effectuer selon plusieurs critères, comme le nom de Fautrice, le siècle, ou le pays. Cepen- dant, contrairement aux sites précédemment décrits, celui-ci a avant tout pour objectif de fournir des informations à caractère biographique ou bibliographique sur les autrices. Par ailleurs, les responsables du site ne se préoccupent pas d'éditer des textes premiers, mais proposent simplement des liens vers d'autres pages web où ces écrits sont accessibles.

Le projet Corvey, quant à lui, permet de découvrir la très riche collec- tion de textes se trouvant dans la bibliothèque de Corvey en Allemagne. En effet, grâce aux intérêts littéraires de son premier propriétaire, cette biblio- thèque possède l'une des plus larges collections au monde d'œuvres de la période romantique. Depuis 1996, l'université britannique de Sheffield Hal- lam travaille sur les œuvres en anglais de la collection et en a acquis une édition en microfiches. Très vite, un projet est apparu sur le web, destiné à mieux faire connaître ces textes: http://www2.shu.ac.uk/corvey/CW3/. Consacré aux autrices écrivant entre 1790 et 1835, le projet se veut avant tout un répertoire des œuvres se trouvant dans la bibliothèque de Corvey. Par conséquent, le site n'offre pas d'accès direct aux textes sources. En revanche, des résumés des œuvres, des bibliographies ou encore des textes critiques issus de revues de l'époque sont proposés pour une grande partie des 1071 titres. Pour chaque œuvre se trouvant à Corvey, une fiche com- plète est fournie, mentionnant entre autres l'éditeur, le nombre de volumes et de pages, ainsi que le numéro ISBN du livre. La recherche peut se faire à partir du répertoire alphabétique des 417 autrices, mais le chercheur ou la chercheuse appréciera tout particulièrement le moteur de recherche très sophistiqué du site. Il est en effet possible de sélectionner un titre, une autrice, un éditeur, une période ou un genre littéraire en particulier. Mieux encore, cette recherche de base peut être affinée à l'aide de mots clés appartenant à diverses catégories (comme par exemple un thème, un sous- genre ou un lieu géographique).

Enfin, le projet Orlando: http://www.ualberta.ca/ORLANDO/ tente avant tout de produire une histoire littéraire des écrivaines dans les îles Britanniques. Encore à l'état d'ébauche pour le moment, le site semble néanmoins prometteur. Les participant-e-s au projet appartiennent à diffé- rentes universités au Canada, aux États-Unis, en Angleterre et en Austra- lie. À terme, leur but est de publier quatre volumes d'histoire littéraire cou- vrant la période entre 1330 et 1960. Toute cette information sera bien entendu également accessible sur le web et un moteur de recherche très performant sera mis à disposition. De plus, le site devrait aussi comprendre

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des notices critiques et biographiques sur les autrices, ainsi qu'une chro- nologie active permettant d'intégrer histoire littéraire et histoire sociale ou politique.

Qu'en est-il des sites web spécifiquement consacrés aux autrices écrivant dans d'autres langues que l'anglais? Force est de constater que la plupart des sites ne s'intéressent qu'aux autrices anglophones ou, lorsqu'ils offrent un accès à d'autres textes, ne les reproduisent qu'en traduction anglaise. L'Uni- versité de Chicago: http://humanities.uchicago.edu/orgs/ARTFL/ propose cependant un excellent site exclusivement dédié aux autrices de langue française Κ D'accès payant, le site comprend actuellement près de 100 textes en langue française écrits par 37 autrices et couvre une période allant du XVIe au XIXe siècle. Ces pages web constituent en réalité une subdivision du site principal d'ARTFL consacré à la littérature française et proposant près de 1880 textes. Ce projet étant réalisé en collaboration avec le Centre d'analyse et de traitement informatique de la langue française (ATILF)2, les textes seront à terme également disponibles sur le site d'ATILF en France (en effet, pour l'instant, les lecteurs et les lectrices situés en Europe n'ont pas accès au site ARTFL)3. Sous sa forme actuelle, le site est fort bien réalisé et assez simple à utiliser. Plusieurs possibilités sont offertes pour les recherches par mots clés qui peuvent par exemple porter sur une autrice, un titre ou une période particulière. Quant aux résultats de la recherche, ils peuvent être triés selon la fréquence par titre ou par autrice. Seul inconvénient pour le lecteur ou la lectrice francophone : toutes les explications nécessaires à l'utilisation du moteur de recherche sont don- nées en anglais.

Par ailleurs, le site d'ARTFL propose également de nombreux liens vers d'autres sites web consacrés aux écrivaines. En particulier, le lien vers la section intitulée EFTS (Electronic Full Text Sources) offre bien des possibili- tés. Si la plupart des accès sont malheureusement réservés à l'Université de Chicago, quelques sites sont toutefois accessibles à tous. Parmi ces sites, je me contenterai ici d'en mentionner deux, l'un consacré aux autrices écri- vant en allemand: http://humanities.byu.edu/sophie/home.htm et l'autre dédié aux autrices italophones: http://www.lib.uchicago.edu/efts/IWW/. Ces sites ne proposent pour le moment que peu de textes à consulter en ligne, mais sont néanmoins fort bien conçus et retranscrivent les œuvres dans leur langue originale. Dans les deux cas, la liste des textes qui seront inclus à terme est impressionnante.

1. Nous tenons à remercier l'équipe du projet, et notamment Mark Olsen, de nous avoir donné accès au site pour préparer ce compte rendu. 2. Les textes, écrits autant par des écrivaines que par des écrivains, sont retenus pour ATILF sur la base de leur richesse linguistique, l'objectif à long terme étant de réaliser un nouveau dictionnaire de

la langue française. C'est à partir de cette sélection que ARTFL propose une compilation dédiée aux seules autrices. 3. Il est fort probable que cette situation changera dès juin 2003, date à partir de laquelle les abonné-e-s européen-ne-s d'ATILF pourront aussi consulter cette base de données.

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Si une grande partie des projets mentionnés au cours de cet article sont encore en plein développement, ce bref tour d'horizon permet cependant de constater que l'existence de ces sites constitue un important pas en avant pour les études féministes. Quelques questions méritent pourtant d'être sou- levées. Par exemple, les critères selon lesquels les textes sont choisis sont loin d'être systématiquement explicités, et la proportion entre textes connus et textes à découvrir varie considérablement d'un site à l'autre. Il est par conséquent difficile de savoir si les écrits sont sélectionnés pour leur valeur littéraire, à titre représentatif, ou encore par souci d'exhaustivité. Par ailleurs, en développant des sites exclusivement dédiés aux écrivaines, ne risque-t-on pas de retomber dans une certaine ségrégation de l'écriture féminine? En effet, un accès facilité aux textes de ces autrices ne garantit pas pour autant leur réhabilitation dans le canon littéraire. Dans cette pers- pective, ne faudrait-il pas plutôt envisager des sites offrant un certain équi- libre entre écriture féminine et écriture masculine?

Dans tous les cas, le travail à accomplir reste immense, mais le défi est relevé. L'internet offre en effet une chance unique de redessiner les contours de l'histoire littéraire et permettra peut-être à terme de redonner aux écrivaines la place qui leur est due au sein du canon. ■

D'autres sites à consulter

The Victorian Women Writers Project : http ://www.indiana.edu/~letrs/vwwp/

British Women Romantic Poets, 1789-1832 : http://www.lib.ucdavis.edu/English/BWRP/

Women Romantic-Era Writers : http://www.nottingham.ac.uk/~aezacweb/wrew.htm

Emory Women Writers Resource Project : http://chaucer.library.emory.edu/wwrp/

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