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1/92 U.F.R. DE SCIENCES JURIDIQUES, ADMINISTRATIVES ET POLITIQUES L1- UP A Année universitaire 2012-2013 DROIT CONSTITUTIONNEL Cours de M. Le Professeur Jean-Marie Denquin DOSSIER DE TRAVAUX DIRIGES 2 nd SEMESTRE

Fiche de Td Second Semestre 2013

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U.F.R. DE SCIENCES JURIDIQUES, ADMINISTRATIVES ET

POLITIQUES

L1- UP A

Année universitaire 2012-2013

DROIT CONSTITUTIONNEL

Cours de M. Le Professeur Jean-Marie Denquin

DOSSIER DE TRAVAUX

DIRIGES

2nd

SEMESTRE

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SEANCES DE TRAVAUX DIRIGES

TD n°1 La participation des citoyens à la vie politique

Elections et référendum

TD n°2 L’exécutif sous la Vème

République (I) :

La fonction présidentielle

TD n°3 L’exécutif sous la Vème

République (II) :

Le Premier ministre, le gouvernement, la cohabitation

TD n°4 L’exécutif sous la Vème

République (III) :

La responsabilité des gouvernants

TD n°5 Le Parlement sous la Vème

République (I) :

Organisation et procédure législative

TD n°6 Le Parlement sous la Vème

République (II) :

Le contrôle parlementaire

TD n°7 La révision constitutionnelle

TD n°8 Le Conseil Constitutionnel (I) :

Organisation et contrôle de constitutionnalité

TD n°9 Le Conseil Constitutionnel (II) :

Les méthodes du conseil constitutionnel

TD n°10 La constitution et l’union européenne

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MODALITES DE CONTROLE DES CONNAISSANCES

Le droit constitutionnel enseigné en première année de D.E..U.G. correspond à l'unité

fondamentale A.3 (UF A3).

l/ Les conditions d'assiduité.

Les étudiants disposent de 3 absences maximum. Au-delà, les étudiants ne pourront plus

avoir le bénéfice du contrôle continu, même s'ils sont venus au partiel.

Les étudiants absents plus de 3 fois sont donc considérés comme défaillants et devront se

soumettre au contrôle terminal lors de la session de septembre.

2/ Le contrôle continu.

Les étudiants devront satisfaire à l'exigence d'un minimum de 4 notes, 3 notes constituées par

des travaux déterminés par le chargé de travaux dirigés, une note résultant d’un partiel

organisé en amphithéâtre. Le partiel du second semestre comportera deux sujets au choix que

les étudiants traiteront en trois heures. La Constitution de 1958 sera autorisée. Elle ne devra

comprendre aucun ajout et / ou annotation.

INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUES GENERALES

Outre les références bibliographiques figurant dans le document de travaux dirigés du premier

semestre (fiche de TD, pp. 3-5), les étudiants pourront consulter la bibliographie suivante :

AVRIL (P.), La Vème

République. Histoire politique et constitutionnelle, PUF, Paris, 2ème

éd.1994.

AVRIL (P.), Le régime politique de la Vème

République, 1972.

CARCASSONNE (G.), La Constitution, Seuil, Paris, 2004 (Collection Points).

De GAULLE (Ch.), Discours et Messages, Plon, Paris, 1970, T. II et III.

DEBRE (J.-L.), La Constitution de la Vème

République, PUF, Paris, 1975.

DENQUIN (J.-M.), La genèse de la Vème

République, 1988.

DENQUIN (J.-M.), La monarchie aléatoire, PUF, 2001.

DUHAMEL (0.), La gauche et la Vème

République, 1993.

DUVERGER (M.), Les régimes semi-présidentiels, PUF, Paris, 1986.

GEORGEL (J.), La Vème

République: une démonarchie, LGDJ, Paris, 1990 (Collection

Systèmes).

GICQUEL (J.), Essai sur la pratique de la Vème

République, LGDJ, Paris, 1977.

GUCHET (Y.), La Vème

République, Economica, 1994.

JEAN (P.) La Constitution de la Ve république, réflexions pour un cinquantenaire, 2008, La

Documentation Française, Paris

LACHARRIERE de (R.), La Vème

, quelle République ? 1983.

Page 4: Fiche de Td Second Semestre 2013

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LACOUTURE (J.), De Gaulle, Seuil, Paris, T. II (Le politique).

LUCHAIRE (F.) et CONAC (G.), La Constitution de la Vème

République, 1987.

MENY (Y.), Le système politique français, Clef Montchrestien, dernière édition

POMPIDOU (G.), Le nœud gordien.

QUERMONNE (J.-L.), Le gouvernement de la France sous la Vème

République.

ROUVILLOIS (F.) Droit constitutionnel, La Vème

République, Flammarion 2001.

Code Constitutionnel Thierry Renou et Michel de Viliers, 2001.

Le numéro spécial de la RDP, 40 ans de Vème

République 1998.

Le numéro spécial de la RDP, La VIème

République ?, 2002.

La nouvelle Vème

République, Pouvoirs, n°99, Le Seuil, 2001.

La Vème

République, permanence et mutations, La documentation française, n°300, 2001.

Pour une approche comparée :

LAUVAUX( P.) Les grandes démocraties contemporaines, PUF, 3ème

édition, mai 2004.

MENY (Y.) et SUREL (Y.) Politique comparée, les démocraties, Allemagne, Etats-Unis, France,

Grande-Bretagne, Italie, Montchrestien, 7ème éd., nov. 2004.

Recueil de documents : en plus de documents signalés dans la fiche du 1er semestre, vous pouvez

consulter CATSIAPIS (J.) Le guide de la Vème

République, Ellipses, 2004.

Outre ces références, les sites intenet des institutions françaises regorgent de fiches, analyses et

explications diverses. Nous ne saurions que trop conseiller aux étudiants de préférer ces sites à

wikipedia.

Sujets juin 2011

La dissolution sous la Vème république

L'influence du fait majoritaire sur les pouvoirs du président de la République et du Premier

ministre sous la Vème République.

Sujets septembre 2011

La procédure de révision de la Constitution de 1958 vous parait-elle satisfaisante ?

Le Sénat sous la Vème république

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FICHE N° 1

LA PARTICIPATION DES CITOYENS A LA VIE POLITIQUE

Les consultations sous la Vème

République

I/ DOCUMENTS REPRODUITS 1. Les modes de scrutin des élections en France

2. L’abstention aux élections législatives sous la Vème

République

3. Les référendums sous la Vème

République et leurs résultats.

4. Débat du 4 octobre 1962 relatif à l’utilisation de l’article 11 pour modifier la constitution.

5. Décision n°62-20 du Conseil constitutionnel du 6 novembre 1962, « Loi référendaire »

6. quelques éléments sur la Loi n° 2000-493 et plus généralement le problème de la parité

7. Exemple de paradoxe de vote

8. extrait du chapitre VII « l’extinction du référendum » par Olivier Duhamel in « Le Pouvoir

Politique en France », PUF

9. Extrait de la synthèse du rapport du comité constitutionnel : les nouveaux droits du citoyen

II/ bibliographie

Le Président de la République de la Vème

République, Documents d’études, La Documentation

française, 1993, n°1-6, pp. 7-15.

DOUBLET (Y-M), « L’argent des élections présidentielles », Pouvoirs, 1994, n°70, pp. 43-50.

CAMBY (J.P.), Le Conseil constitutionnel, juge électoral, Dalloz, 1996, p. 235.

Le Référendum, Revue Pouvoirs, n°77, 1996.

DENQUIN (J.M.), Le déclin du référendum sous la Vème

République, RDP, 1998, pp 1582-1610.

DENQUIN (J.-M.), « L’initiative du référendum : la décision de consulter le peuple du Second Empire

à nos jours », in Le processus électoral. Permanences et évolutions. Actes du colloque réuni au Sénat

le 22 novembre 2005, (B. Owen dir.), Studyrama, 2006, p. 81-91

DENQUIN (J.-M.), « Quelques réflexions sur l’idée de démocratie par le droit », Jus politicum, n°1,

Dalloz, 2009, p. 19-29

DIEMERT (S.), Textes constitutionnels sur le référendum, Coll. Que sais-je ?, PUF, 1993.

HAMON (F.) Le référendum, LGDJ, 1995

NUSS (P.), Référendum et initiative populaire en France, RDP, 2000, pp 1441-1494.

Le référendum en Europe. Bilan et perspectives. L’Harmattan, 2001.

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III/ NOTIONS A CONNAITRE

Le régime représentatif, le fait majoritaire.

Scrutin majoritaire, scrutin proportionnel, scrutin uninominal, scrutin de liste, vote utile.

Alliance pré-électorale, postélectorale.

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) Le référendum en France

b) A l’aide d’exemples pris en France et à l’étranger, comparez les notions de démocratie

directe et de démocratie représentative

* * * *

Document 1 : Les modes de scrutin des élections en France

1. Elections municipales (dans le cadre de la

commune)

* Tous les six ans

* Suffrage universel direct pour désigner les

membres du conseil municipal qui, à leur tour,

éliront le maire (et ses adjoints) :

- communes de moins de 3 500 habitants :

scrutin majoritaire plurinominal à deux tours.

- communes de 3 500 habitants et plus : scrutin

proportionnel de liste à deux tours (sans

aucune modification possible de la liste).

- Paris, Lyon et Marseille :

Scrutin proportionnel de liste à deux tours dans

le cadre de secteurs électoraux.

Les électeurs élisent en même temps un conseil

municipal et des conseils d'arrondissement

(selon les mêmes règles que pour les

communes de 3 500 habitants et plus).

2. Elections cantonales (dans le cadre du

canton)

* Tous les six ans

* Pour désigner les membres du conseil

général du département, qui élisent à leur tour,

pour trois ans, un président.

* Le conseil général est renouvelé par moitié

tous les trois ans

* Suffrage universel direct, scrutin

uninominal majoritaire à 2 tours, à raison d'un

conseiller par canton.

3. Elections régionales (dans le cadre de la

région avec des sections départementales)

* Tous les six ans (à partir de 2004)

* Pour élire les conseillers régionaux qui

élisent à leur tour un président pour six ans

* Suffrage universel direct, au scrutin de

liste à deux tours.

4. Elections législatives

* Tous les cinq ans (mais l'Assemblée

nationale peut être dissoute par le Président de

la République ce qui provoque des élections

anticipées)

* Pour élire les 577 députés à raison d'un

député par circonscription législative.

* Suffrage universel direct, au scrutin

majoritaire uninominal à deux tours.

Page 7: Fiche de Td Second Semestre 2013

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5. Elections sénatoriales

* Tous les six ans

* Pour élire les 346 sénateurs (348 en 2011)

dans les départements, les territoires d'outre-

mer et parmi les Français établis hors de

France.

* Le Sénat est renouvelé par moitié tous les

trois ans

* Suffrage universel indirect, scrutin

majoritaire à deux tours ou représentation

proportionnelle selon le nombre de sénateurs à

élire dans le département. Les électeurs sont,

dans chaque département, les députés, les

conseillers régionaux, les conseillers généraux

et des délégués des conseils municipaux.

6. Election présidentielle

* Tous les cinq ans

* Pour élire le Président de la République

* Suffrage universel direct, scrutin

uninominal majoritaire à deux tours.

7. Elections européennes

* Tous les cinq ans

* Pour désigner les 78 représentants français

(sur 669) au Parlement européen de

Strasbourg. A partir de 2004, l'élection aura

lieu dans le cadre de huit circonscriptions

regroupant des régions.

* Suffrage universel direct, scrutin de liste à

un seul tour à la représentation proportionnelle.

8. referendum

* Procédure exceptionnelle par laquelle les

citoyens sont appelés à se prononcer

directement sur un projet de loi ou sur un

projet de révision de la Constitution. Vote par

oui ou par non à la majorité des suffrages

exprimés.

Document 2 : l’abstention aux élections législatives depuis 1958

en % 1986* 1988 1993 1997 2002 2007

- 1er Tour 21,5 34,3 30,8 32 35,6 39,5

- 2nd Tour - 30,1 32,4 28,9 39,7 -

en % 1958 1962 1967 1968 1973 1978 1981

- 1er Tour 22,8 31,3 18,9 20 18,7 16,8 29,1

- 2nd Tour 25,2 27,9 20,3 22,2 18,2 15,1 24,9

* Scrutin proportionnel de liste dans le cadre départemental.

Document 3 : les référendums sous la Ve république et leurs résultats

Neuf référendums ont été organisés sous la Ve

République depuis l’adoption de la constitution

de 1958, tous sur décision du chef de l’État et,

pour la plupart, selon la procédure prévue à

l’article 11 de la constitution. Seul le

référendum du 24 septembre 2000 sur le

quinquennat a été organisé en application de

l’article 89 du texte constitutionnel.

1. Le référendum du 8 janvier 1961

Un référendum est organisé afin de valider la

politique d’autodétermination du général de

Gaulle en Algérie. Le résultat est favorable au

« oui » dans une proportion de près de 74,99 %

des suffrages exprimés. L’abstention est assez

faible puisqu’elle se limite à un taux de

26,24 %.

2. Le référendum du 8 avril 1962

Page 8: Fiche de Td Second Semestre 2013

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Une nouvelle consultation référendaire,

toujours sur le dossier algérien. Il s’agit cette

fois d’autoriser le Président de la République à

négocier un traité avec le futur gouvernement

algérien. Derrière ces formules quelque peu

complexes, le référendum a en fait pour but de

faire approuver par les Français les accords

d’Evian. Dans un climat de soulagement créé

par la perspective de la fin de la guerre

d’Algérie, les « oui » l’emportent avec 90,8 %

des suffrages exprimés, alors même que le taux

d’abstention n’est que de 24,66 %.

3. Le référendum du 28 octobre 1962

Ce référendum porte sur une révision

constitutionnelle de très grande ampleur :

l’élection du Président de la République au

suffrage universel direct. La campagne est

extrêmement agitée, les débats portant aussi

bien sur le bien-fondé de la réforme que sur

l’utilisation de l’article 11 de la constitution.

Ce procédé est dénoncé par beaucoup comme

une violation du texte fondamental. En effet, la

procédure « normale » de révision des

institutions est celle définie par l’article 89 de

la constitution, qui nécessite au préalable une

approbation de chacune des deux chambres.

Or, les électeurs sont convoqués sur le

fondement de l’article 11, sur proposition de

l’Exécutif et donc sans aucun vote

parlementaire qui aurait certainement été

négatif. En raison d’une forte mobilisation des

différents partis en présence, le taux

d’abstention est peu élevé (23,03 %). Les

« oui » l’emportent finalement avec 62,2 % des

suffrages exprimés.

4. Le référendum du 27 avril 1969

Les électeurs doivent se prononcer sur la

création des régions et sur la réforme du

Sénat. Le débat porte en réalité surtout sur le

maintien ou non du général de Gaulle au

pouvoir. En définitive, le « non » l’emporte

avec 52,41 % des suffrages exprimés. En

raison de l’enjeu politique majeur de la

consultation, le taux d’abstention est le plus

faible de tous les référendums organisés sous

la Cinquième République : seulement 19,87 %.

5. Le référendum du 23 avril 1972

Un référendum est organisé afin de permettre

la ratification du traité d’élargissement de la

Communauté économique européenne. Les

pays concernés sont le Danemark, la Norvège

(qui finalement n’entrera pas dans la

Communauté), l’Irlande et la Grande-Bretagne

(dont l’entrée était refusée par le général de

Gaulle). Le résultat est favorable à l’adhésion,

dans une proportion de 68,31 % des suffrages

exprimés. Mais le taux d’abstention est très

élevé : 39,76 %. Ceci s’explique

essentiellement par l’absence d’engagement

décisif du chef de l’Etat, le faible intérêt des

citoyens pour la question posée et la décision

du Parti socialiste d’appeler à l’abstention.

6. Le référendum du 6 novembre 1988

Les électeurs sont appelés aux urnes pour

adopter le nouveau statut de la Nouvelle-

Calédonie, qui fait suite aux « accords de

Matignon » entre l’Etat, le RPCR

(Rassemblement pour la Calédonie dans la

République) et le FLNKS (Front de libération

nationale kanak et socialiste). Les résultats du

vote sont très favorables au nouveau statut

(79,99 % des suffrages exprimés). Mais le taux

d’abstention, une fois encore, est

particulièrement élevé, puisqu’il atteint

63,11 %. Ce chiffre s’explique par plusieurs

éléments : le manque d’intérêt des Français

pour le thème choisi, d’autant plus que les

accords de Matignon laissaient présager un

résultat positif, mais aussi la consigne

d’abstention donnée par le RPR.

7. Le référendum du 20 septembre 1992

Le référendum a pour objet la ratification du

Traité sur l’Union européenne (communément

appelé « traité de Maastricht) ». La

campagne est extrêmement animée, et le débat,

de manière assez inattendue pour un sujet aussi

ardu, passionne les Français. C’est à l’évidence

ce qui explique le faible taux d’abstention

enregistré à cette occasion (30,30 %) par

rapport aux taux constatés lors des deux

référendums précédents. Le « oui » l’emporte

de justesse avec un taux de 51,04 % des

suffrages exprimés.

8. Le référendum du 24 septembre 2000

Page 9: Fiche de Td Second Semestre 2013

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Les électeurs doivent se prononcer sur la

réduction du mandat présidentiel à cinq

ans, sans qu’aucune autre réforme

constitutionnelle ne soit votée à cette occasion

(c’est le « quinquennat sec »). Le « oui »

l’emporte avec 73,21 % des suffrages

exprimés. Mais le taux d’abstention est à

nouveau très élevé et atteint 69,8 %. Ce faible

taux de participation s’explique par la quasi-

certitude qu’avaient les électeurs d’une

réponse positive, par l’absence d’engagement

personnel du chef de l’État en faveur du

« oui » et par le message brouillé qu’il avait

exprimé quelques mois avant le référendum,

puisqu’il excluait alors de réformer la

constitution dans le sens du quinquennat.

9. Le référendum du 29 mai 2005

Un référendum est organisé afin de permettre

la ratification du traité établissant une

constitution pour l’Europe. Pour la seconde

fois dans l’histoire de la Ve République, le

« non » l’emporte à un référendum avec

54,67 % des suffrages exprimés. La France, un

des pays fondateurs de la construction

européenne, devient ainsi le premier pays de

l’Union européenne à rejeter le traité

constitutionnel, avant les Pays-Bas le 1er juin

2005 (en 2007, ce sont toujours les deux seuls

États à avoir voté non). Le taux de

participation au référendum s’élève à 69,37 %.

Les électeurs se sont rendus aux urnes suite à

une campagne animée, mais parfois confuse.

Une grande partie des débats s’est focalisée en

effet sur le bilan des politiques du

gouvernement Raffarin – ce qui a desservi très

largement le camp du « oui », de nombreux

électeurs ayant voté « non » en réaction à la

politique gouvernementale –, ou sur des

thèmes juridiquement étrangers au référendum

(comme la directive dite Bolkestein ou

l’adhésion de la Turquie à l’Union

européenne). Le référendum soulève par

ailleurs de nombreuses contradictions au sein

des partis en bouleversant les clivages

politiques traditionnels. La victoire du « non »

tient essentiellement à la mobilisation d’une

partie de la gauche. Estimant les Français

« directement concernés » par le sujet, le

président de la République avait choisi en

juillet 2004 de faire ratifier le traité par

référendum. Il aurait pu aussi opter pour la

voie parlementaire. Malgré le désaveu sévère

des Français, et à la différence du général de

Gaulle en 1969, Jacques Chirac remplace le

chef de gouvernement, mais reste en fonction.

© La Documentation française

Document 4 : débat du 4 octobre 1962 relatif à l’utilisation de l’article 11 pour modifier la

constitution

Intervention de M. Paul Reynaud

Aujourd'hui, en face de la Constitution violée,

comme l'a dit hier le Conseil d'Etat et comme

le dira officiellement le Conseil

constitutionnel, je dis : non. Et je m'explique.

Alors que la Constitution dit à l'Assemblée

nationale: «Tu as la parole », je n'admets pas

qu'un homme, quel qu'il soit, lui dise: «Je te la

retire ».

Je ne ferai pas à l'Assemblée l'injure de

démontrer que la Constitution est violée. Qu'il

me suffise de lui dire que j'ai demandé à une

haute autorité en matière de droit

constitutionnel : «De tous les professeurs de la

faculté de droit de Paris, y en a-t-il un seul qui

ne pense pas que la Constitution est violée ?

« Pas un seul », m'a-t-il répondu.

La question qui nous est posée aujourd'hui est

la plus grave qui ait été posée ici depuis la

Guerre. La Constitution est en effet la base

même de l'Etat et la première victime du coup

de force contre elle, c'est le peuple; c'est lui qui

est trompé.

En 1958, on a dit au peuple: «Tu peux voter

cette Constitution, elle sera stable - ce qui est

la qualité première d'une Constitution - car,

pour la réviser, il faudra qu'un nouveau texte

soit voté par les deux chambres du Parlement

».

Et voici qu'après quatre ans seulement vous

manquez à la parole donnée, vous supprimez

d'un trait de plume la principale garantie de la

stabilité: le débat contradictoire et public dans

les deux assemblées, celui qui doit instruire le

peuple et lui permettre de voter en

connaissance de cause !

Page 10: Fiche de Td Second Semestre 2013

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Et vous voulez qu'il ait confiance dans les

promesses que vous lui faites aujourd'hui?

Vous ne mesurez pas combien il est malsain

dans une démocratie que le pouvoir donne

l'exemple de violer la loi et surtout la loi

suprême, la Constitution.

Et pourquoi cet acte si grave? Le général de

Gaulle nous l'a dit dans son allocution télévisée

du 20 septembre, à laquelle je veux me référer

- car elle est beaucoup plus complète que celle

de tout à l'heure -: pour faire élire au suffrage

universel, au terme de son mandat, soit lui-

même, soit un inconnu qui, pendant sept ans -

et le mandat est renouvelable - aura, je cite :

«les responsabilités suprêmes », prendra «sur

le rapport des ministres» - tel Louis XIV - et je

cite encore: « toutes les décisions importantes

de l'Etat» et qui, je cite de nouveau,: «dans les

domaines essentiels de la politique extérieure

et de la sécurité nationale» sera « tenu à une

action directe ».

[...]

Ainsi donc, voilà un Président de la

République, élu au suffrage universel, qui

décidera de la vie ou de la mort de la France

suivant qu'il fera une bonne ou une mauvaise

politique militaire, une bonne ou une mauvaise

politique étrangère.

Cet inconnu tout-puissant ne sera responsable

devant personne. L'Assemblée ? Il la

congédiera à sa guise. Au-dessous de lui, les

ministres. Pourront-:ils vraiment être

responsables devant le Parlement d'une

politique qui n'est pas la leur, qui est celle de

leur maître intouchable? Les malheureux

joueront le rôle qui était, à la cour de France,

celui des menins que l'on fouettait lorsque le

petit dauphin faisait des sottises.

Mesdames, messieurs, on peut être partisan du

régime présidentiel ou du régime

parlementaire, mais je vous défie de trouver

parmi les peuples du monde libre un seul

citoyen qui accepte pour son pays un régime

aussi extravagant et aussi dangereux.

Or le général de Gaulle veut enchâsser ce

personnage, ce Président de la République élu

au suffrage universel, dans la Constitution

actuelle sans rien changer d'autre à celle-ci.

Est-ce que notre Constitution est telle qu'elle

puisse tolérer ce nouveau venu?

Aussi, depuis quatre ans, en dépit de l'article

20 de la Constitution, la France est-elle

gouvernée par le Président de la République,

ce qui fut accepté par les uns, toléré par les

autres, en raison de la cruelle épreuve que la

France subissait en Algérie.

Le général de Gaulle avait un tel souci d'agir

qu'il s'est défié du Parlement.

Or, dans tous les pays civilisés, le Parlement

est considéré comme représentatif de la nation,

avec ses qualités et ses défauts, avec ses

diversités, ses contradictions même. Mais,

lorsque les élus assemblés délibèrent et votent,

ils sont investis de cette qualité éminente de

représentants de la nation.

Je vous dis que pour nous, républicains, la

France est ici et non ailleurs.

Voilà le conflit. Admettre qu'il en soit

autrement, c'est admettre la fin de la

République. Le conflit entre le général de

Gaulle et nous est là. Voilà ce qui l'a fait

glisser sur la pente du pouvoir personnel. La

tentation de faire élire le Président de la

République par le suffrage universel vient de

là.

Il avait renoncé à son projet, M. le Premier

ministre me l'avait dit.

Il avait renoncé à son projet lorsque, le 22

août, ce fut l'atroce attentat du Petit-Clamart.

Dans les jours qui suivirent, on prêta d'abord

au Président de la République l'idée de faire

nommer tout de suite un vice-président de la

République pour assurer la succession. Puis

l'émotion provoquée par l'attentat étant grande,

on pensa en haut lieu qu'elle permettait de

revenir au grand projet, esquissé, dès 1961,

dans une conférence de presse; si les

parlementaires protestent, on dira qu'ils sont

inconsolables de la mort de la IVe République

et qu'ils veulent revenir à leur vomissement.

Nous savons qu'aujourd'hui ceux qu'on traite

d'hommes de la Quatrième, ce sont les

républicains!

La question, la seule question, la question

précise qui vous est posée par la motion de

censure est celle-ci: La Constitution est violée,

le Parlement dépouillé. Je vous demande alors

: allez-vous courber la tête et, fuyant le scrutin,

allez-vous dire à voix basse: « Oui, je

l'accepte» ? Nous, nous disons « Non ! »

Quant à ceux qui vont murmurant avec des

yeux effrayés: « Et, s'il s'en allait », je les prie

Page 11: Fiche de Td Second Semestre 2013

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de réfléchir que cet effroi n'est justifié que

dans la mesure où l'on se laisse aller à douter

de la France. Ce n'est pas un patriotisme bien

fort celui qui consiste à désespérer de tous les

Français, sauf un !

[...]

Depuis 1789, les représentants du peuple, si

décriés aujourd'hui, savent bien qu'ils ne sont,

pris isolément, que des porte-parole modestes,

précaires, faillibles, vilipendés souvent. Mais

ils savent aussi qu'ensemble ils sont la nation

et qu'il n'y a pas d'expression plus haute de la

volonté du peuple que le vote qu'ils émettent

après une délibération publique.

C'est cette foi qui rassemble aujourd'hui, pour

l'honneur de la République, des élus de toutes

croyances et de toutes appartenances

politiques...

Des hommes opposés sur beaucoup de

problèmes...

... ont constaté qu'ils ont cette foi commune et

se sont réunis.

Je ne puis m'empêcher de penser à une phrase

qu'a écrite; je grand écrivain qu'est le général

de Gaulle, dans Au fil de l'épée. Il a dit: «

L'autorité ne va pas sans prestige, ni le prestige

sans éloignement ».

Aujourd'hui, malgré les ovations populaires, il

doit constater que l'éloignement de toutes les

élites ouvrières, intellectuelles et politiques

crée le désert.

Quant à nous, notre volonté de faire front pour

la défense de la Constitution, c'est la

conjuration de toutes nos traditions populaires

et d'une longue tradition parlementaire.

C'est la République qui répond «non» à votre

projet car le scrutin d'aujourd'hui comptera

dans l'histoire.

Pendant longtemps on dira d'un homme

politique: «Comment a-t-il voté le 4 octobre?

». C'est notre honneur de parlementaires qui

est en cause.

Aussi, monsieur le Premier ministre, allez dire

à l'Elysée que notre admiration pour le passé

reste intacte mais que cette Assemblée n'est

pas assez dégénérée pour renier la République.

J.O. A.N. 4-10-1962

Intervention de M. Georges Pompidou,

Premier ministre

Essayons, mesdames, messieurs, d'analyser

notre Constitution.

A la base, il y a la souveraineté du peuple.

L'article 2 définit le principe de la République:

gouvernement du peuple, par le peuple et pour

le peuple.

Cette souveraineté ne peut être abdiquée.

Autrement dit, le peuple ne peut en aucun cas

s'en dessaisir dans des conditions telles qu'il lui

soit impossible de s'en servir s'il le juge

nécessaire. A une époque où la souveraineté,

dans notre droit constitutionnel, s'exerçait

uniquement par délégation au Parlement, c'est

en vertu de ces principes que le pays a

condamné le dessaisissement de 1940 au profit

du maréchal Pétain.

Dans notre Constitution, l'article 3 prévoit que

le peuple exerce sa souveraineté par deux voies

: par ses représentants et par le référendum.

C'est à la lumière de cette règle générale que

doivent être examinées les dispositions

particulières, avec une double préoccupation, à

savoir que le lieu des textes et leur

interprétation ne puisse en aucun cas, ni les

conduire à une paralysie absurde des

institutions, ni vider telle ou telle disposition

expresse de toute signification.

Or je dois dire que, à mon avis, l'interprétation

que beaucoup ont donnée des articles 11 et 89

de la Constitution me paraît conduire

fatalement à ces deux inconvénients majeurs.

Tout d'abord, le premier.

Admettons, mesdames, messieurs, que le

Président de la République, le Gouvernement,

l'Assemblée issue du suffrage universel soient

d'accord sur la nécessité de modifier telle ou

telle disposition de la Constitution, il suffirait

que le Sénat, assemblée à laquelle la

Constitution n'a pas voulu permettre qu'elle pût

s'opposer à l'aboutissement d'une loi, même

ordinaire, il suffirait, dis-je, que le Sénat fasse

obstacle pour qu'aucune réforme

constitutionnelle ne puisse jamais aboutir.

Une telle situation serait si absurde, elle

résisterait si peu à la réalité des faits qu'on voit

mal comment on pourrait même la défendre, à

moins de recourir à la notion de «Sénat

conservateur », gardien de la Constitution,

Page 12: Fiche de Td Second Semestre 2013

12/92

notion qui appartient aux régimes

napoléoniens.

J'entends bien que certains ont suggéré qu'on

aurait pu faire pression sur le Sénat.

Mais, outre le fait que cela me paraît discutable

au regard, précisément, de la Constitution,

c'eût été un moyen indigne; de même,

d'ailleurs, un appel au référendum contre une

décision de l'Assemblée nationale - autre

hypothèse évoquée - aurait ajouté aux

difficultés juridiques dont nous débattons un

immense inconvénient politique puisque c'eût

été organiser délibérément le référendum

comme un combat entre l'exécutif et le

législatif.

Si, comme nous le verrons, le référendum est

prévu dans certains cas par la Constitution

comme un élément d'arbitrage, il est d'une

importance majeure que ce recours soit

exceptionnel, tant pour la stabilité de nos

institutions que pour la sauvegarde de nos

libertés.

Le deuxième inconvénient, mesdames,

messieurs, est de vider de tout sens une

disposition expresse et importante de notre

Constitution. Je fais ici allusion à l'article 11

de la Constitution qui confie au Président de la

République, sur proposition soit du

Gouvernement, soit des deux assemblées, la

possibilité de « soumettre au référendum tout

projet de loi portant sur l'organisation des

pouvoirs publics ».

Que peut-on appeler « organisation des

pouvoirs publics» si l'ensemble des

dispositions incluses dans la Constitution en

est exclu ?

Vous le savez, la loi constitutionnelle de 1875,

qui réglait notamment l'élection du Président

de la République, s'appelait «loi sur

l'organisation des pouvoirs publics ».

J'entends bien que les titres n'ont pas de valeur

juridique en eux-mêmes. C'est un argument qui

se retourne, notez-le, contre l'exégèse, par

exemple, faite si abondamment, du titre XIV

de notre Constitution. On ne peut tirer du titre

qu'une présomption; je l'admets pour la loi de

1875 comme pour le titre XIV.

Mais, quoi qu'il en soit, qu'appelle-t-on

organisation des pouvoirs publics?

Si l'article 89 exclut toutes les dispositions

constitutionnelles quelles qu'elles soient du

domaine de l'article 11, que restera-t-il à ce

dernier ? Le domaine des lois organiques ?

Mais l'article 46 a prévu une procédure

législative spéciale, aussi précise que celle de

l'article 89, sinon plus. Et d'ailleurs,

j'entendais tout à l'heure invoquer des

autorités selon lesquelles il ne s'agit pas non

plus de lois organiques.

Dès lors, mesdames, messieurs, cet article 11

qui se trouve parmi les tout premiers de notre

Constitution, ce qui n'est pas sans signification,

qui constitue une innovation considérable

puisque, pour la première fois depuis 1793, il

fait dans nos institutions une place à la

démocratie directe...

... cet article 11, qui a été un des plus discutés

devant ce comité, cet article 11 qui fut voulu

expressément par le Président du conseil de

l'époque dont vous voudrez bien m'accorder

qu'il est l'un des auteurs de la Constitution, cet

article 11 se trouverait vide de toute substance,

dépourvu de toute signification.

Comment alors auriez-vous pu l'accepter lors

des deux référendums sur l'affaire algérienne?

En tout cas, comment pourriez-vous soutenir

que, alors que la Constitution remplaçait dans

des conditions dramatiques et avec la

signification historique que l'on sait, la

Constitution de la IVe République, les auteurs

de la Constitution et d'abord le premier

auraient voulu ou accepté d'y introduire une

disposition aussi nouvelle pour la vider ensuite

de tout son sens?

Pour l'instant, permettez-moi de reprendre cet

article 11, que l'on a dépouillé de toute

vigueur, et cet article 89 au nom duquel on le

dépouille.

N'y a-t-il pas une pétition de principe à décider

que l'article 89 domine l'article 11, ce que leur

place respective dans la Constitution, je le

répète, ne justifie pas.

Ne pourrait-on aussi bien soutenir, surtout par

référence à l'article 3, que l'article 11 et l'article

89 sont sur le même plan et ne peuvent

s'exclure mutuellement à moins de précision

expresse?

On a objecté, il est vrai, que le référendum est

prévu à l'article 89. Sur ce point, je dirai en

passant que la thèse vaguement ébauchée dans

la motion de censure et selon laquelle le «

peuple français, avant référendum, devrait être

éclairé par les débats parlementaires» est en

Page 13: Fiche de Td Second Semestre 2013

13/92

tant qu'interprétation de l'article 89 proprement

insoutenable. Permettez-moi d'observer,

d'ailleurs, que si notre peuple a besoin d'être

éclairé par des débats parlementaires, vous êtes

en train de le faire amplement et qu'il n'y a pas

besoin pour cela de la procédure de l'article 89.

Vous me fournissez ainsi, au passage, la

démonstration de la thèse que j'ai plusieurs fois

soutenue déjà à cette tribune et selon laquelle

l'équilibre des pouvoirs repose essentiellement,

du côté législatif, sur la motion de censure,

arme redoutable et redoutée, parfaitement

adaptée à son objet, aussi bien pour contrôler

le Gouvernement que comme moyen pour

l'Assemblée de faire appel à l'opinion, grâce

aux élections générales qu'elle risque

d'entraîner.

Mais, pour en venir à une interprétation plus

sérieuse de l'article 89, on a soutenu qu'en

introduisant le référendum après le vote d'une

révision constitutionnelle par les deux

assemblées le constituant aurait par là même

fixé les limites du référendum en la matière.

Cet argument a son poids mais je le crois faux.

L'article 89 - il suffit de le lire - n'a pas

entendu, en introduisant le référendum, limiter

l'usage de celui-ci. C'est le pouvoir des

assemblées en matière constitutionnelle qu'il a

entendu borner.

Si les assemblées sont d'accord pour voter dans

les mêmes termes un texte de révision

constitutionnelle, ce texte n'a néanmoins

aucune valeur tant qu'il n'a pas été ratifié par

référendum.

Et ce même article 89 sous-entend

expressément qu'en la matière le Président de

la République a des responsabilités

particulières, car, si ce dernier estime qu'un

projet de révision est conforme à la volonté et

à la nécessité nationale, il peut, en convoquant

les chambres en Congrès, dispenser leur projet

de la ratification par référendum.

C'est dire que l'article 89 n'entend nullement

abandonner au seul Parlement la possibilité

d'une révision constitutionnelle, et que le

Président de la République est juge de la

possibilité qu'il y a de se passer de référendum.

Il ressort donc de l'article 89 - et ce

raisonnement a été fait par des juristes avant

moi - que ses rédacteurs ont voulu que la

révision constitutionnelle pût intervenir soit

sans référendum par accord du pouvoir

exécutif et du pouvoir législatif, soit, s'il y a

désaccord entre les deux et que le pouvoir

législatif seul soit favorable à la révision, avec

l'obligation du référendum, qui joue ainsi le

rôle d'arbitrage dont je viens de parler.

[...]

Document 5 : décision du conseil constitutionnel du 6 novembre 1962

Loi relative à l'élection du Président de la

République au suffrage universel direct,

adoptée par le référendum du 28 octobre 1962

Article 61 alinéa 2 Président du Sénat

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant

loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

1. Considérant que la compétence du Conseil

constitutionnel est strictement délimitée par la

Constitution ainsi que par les dispositions de la

loi organique du 7 novembre 1958 sur le

Conseil constitutionnel prise pour l'application

du titre VII de celle-ci ; que le Conseil ne

saurait donc être appelé à se prononcer sur

d'autres cas que ceux qui sont limitativement

prévus par ces textes ;

2. Considérant que, si l'article 61 de la

Constitution donne au Conseil constitutionnel

mission d'apprécier la conformité à la

Constitution des lois organiques et des lois

ordinaires qui, respectivement, doivent ou

peuvent être soumises à son examen, sans

préciser si cette compétence s'étend à

l'ensemble des textes de caractère législatif,

qu'ils aient été adoptés par le peuple à la suite

d'un référendum ou qu'ils aient été votés par le

Parlement, ou si, au contraire, elle est limitée

seulement à cette dernière catégorie, il résulte

de l'esprit de la Constitution qui a fait du

Conseil constitutionnel un organe régulateur de

l'activité des pouvoirs publics que les lois que

la Constitution a entendu viser dans son article

61 sont uniquement les lois votées par le

Parlement et non point celles qui, adoptées par

le Peuple à la suite d'un référendum,

constituent l'expression directe de la

souveraineté nationale ;

Page 14: Fiche de Td Second Semestre 2013

14/92

3. Considérant que cette interprétation résulte

également des dispositions expresses de la

Constitution et notamment de son article 60

qui détermine le rôle du Conseil

constitutionnel en matière du référendum et de

l'article 11 qui ne prévoit aucune formalité

entre l'adoption d'un projet de loi par le peuple

et sa promulgation par le Président de la

République ;

4. Considérant, enfin, que cette même

interprétation est encore expressément

confirmée par les dispositions de l'article 17 de

la loi organique susmentionnée du 7 novembre

1958 qui ne fait état que des "lois adoptées par

le Parlement" ainsi que par celles de l'article 23

de ladite loi qui prévoit que "dans le cas où le

Conseil constitutionnel déclare que la loi dont

il est saisi contient une disposition contraire à

la Constitution sans constater en même temps

qu'elle est inséparable de l'ensemble de la loi,

le Président de la République peut promulguer

la loi à l'exception de cette disposition, soit

demander aux Chambres une nouvelle lecture"

;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède

qu'aucune des dispositions de la Constitution

ni de la loi organique précitée prise en vue de

son application ne donne compétence au

Conseil constitutionnel pour se prononcer sur

la demande susvisée par laquelle le Président

du Sénat lui a déféré aux fins d'appréciation de

sa conformité à la Constitution le projet de loi

adopté par le Peuple français par voie de

référendum le 28 octobre 1962 ;

Décide :

ARTICLE PREMIER - Le Conseil

constitutionnel n'a pas compétence pour se

prononcer sur la demande susvisée du

Président du Sénat.

ARTICLE 2 - La présente décision sera

publiée au Journal officiel de la République

française.

Document 6 : quelques éléments sur la parité

Juillet 1999 Loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999 : Les articles 3 et 4 de la Constitution de

1958 sont modifiés. Il est ajouté à l’article 3 que la loi " favorise l’égal accès des hommes et des

femmes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ", et précisé dans l’article 4 que " les partis

et groupements politiques contribuent à la mise en œuvre de ce principe ".

Juin 2000 Loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 : la loi dite sur " la parité " est promulguée. Elle oblige les

partis politiques à présenter un nombre égal d’hommes et de femmes pour les élections régionales,

municipales (dans les communes de 3500 habitants et plus), sénatoriales (à la proportionnelle) et

européennes. Elle prévoit aussi de pénaliser financièrement les partis ou groupements politiques qui ne

respectent pas le principe de parité lors de la désignation des candidats pour les élections législatives.

Avril 2003 Loi n° 2003-327 du 11 avril 2003 : les modes de scrutin des élections régionales et

européennes sont modifiés. La loi introduit des sections départementales au sein des élections

régionales et 8 régions pour les européennes, dont les listes doivent comporter une stricte alternance

entre hommes et femmes.

Janvier 2007 : La loi n° 2007-128 du 31 janvier 2007 "tendant à promouvoir l’égal accès des femmes

et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives" est parue au Journal Officiel n°27 du 1er

février 2007. La principale nouveauté, qui s’appliquera lors des élections municipales de mars 2008

pour les communes de plus de 3 500 habitants, réside dans l’obligation pour chaque liste qui

présentera des candidats d’y inscrire autant d’hommes que de femmes. Au niveau du département,

chaque conseiller général devra avoir un remplaçant du sexe opposé.

Cette loi renforce aussi les sanctions financières en ce qui concerne les élections législatives :

L’art. 5 de la loi prévoit un renforcement des pénalités financières pour les partis politiques

contrevenant aux dispositions relatives à la parité lors des élections législatives. Le premier alinéa de

l’art. 9-1 de la loi n°88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique

déclarait :

« Lorsque, pour un parti ou un groupement politique, l'écart entre le nombre de candidats de chaque

sexe ayant déclaré se rattacher à ce parti ou groupement, lors du dernier renouvellement général de

Page 15: Fiche de Td Second Semestre 2013

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l'Assemblée nationale, conformément au cinquième alinéa de l'article 9, dépasse 2 % du nombre total

de ces candidats, le montant de la première fraction qui lui est attribué en application des articles 8 et 9

est diminué d'un pourcentage égal à la moitié de cet écart rapporté au nombre total de ces candidats. »

Désormais, à la place de « à la moitié », il faut lire « aux trois quarts ». Autrement dit, il faut inciter les

partis politiques à respecter la parité. Cette incitation pourrait se comprendre en raison d’un dilemme

du prisonnier en la matière.

Quelques chiffres sur la parité aux élections législatives de 2007 :

UMP: 26,6% de candidates (19,6% en

2002)

UDF Modem: 36,9% de candidates

PS: 45,5% de candidates

PC: 46,5% de candidates

Les Verts : 50,4%

LO: 49,8%

LCR: 49,6%

MPF: 49,3%

Front national : 48,8%

Depuis 2007, la France compte 18,7% de

femmes à l’assemblée nationale.

Document 6 : exemple de paradoxe de vote : le paradoxe de Condorcet

23 votants préfèrent : A > B > C

17 votants préfèrent : B > C > A

2 votants préfèrent : B > A > C

10 votants préfèrent : C > A > B

8 votants préfèrent : C > B > A

Dans les comparaisons majoritaires par

paires, on obtient :

33 préfèrent A > B contre 27 pour B >

A

42 préfèrent B > C contre 18 pour C >

B

35 préfèrent C > A contre 25 pour A >

C

Qui devrait remporter l’élection ?

Document 7 : extrait du chapitre VII « l’extinction du référendum » par Olivier

Duhamel in « Le Pouvoir Politique en France », PUF

Au principe du référendum, la démocratie

hésite à objecter. Il lui est permis de

rappeler que la démocratie ne se limite pas

à la souveraineté du peuple mais exige

également le respect et le développement

des droits de l'homme, à la fois condition

de l'exercice libre de la souveraineté et

horizon de l'aménagement d'une cité

commune. La démocratie ne se reconnaît

ni dans le lynchage, ni par l'acquiescement

global à un homme, fut-ce sous l'apparence

de l'adhésion au projet qu'il soumet, ni par

la ratification d'une demande démagogique

dont la promotion aura été habilement

assurée par un charlatan de passage. Le

peuple peut devenir liberticide : les

Bonaparte en ont été la preuve. Se pose

alors la question de la compatibilité entre

décision référendaire et respect des

libertés, qui n'est ni simple, ni insoluble.

Mobiliser ne saurait cependant permettre

n'importe quoi. Nul doute que les électeurs

se déplaceraient pour rétablir la peine de

mort, et plus encore pour découper en

rondelles sur la place publique les

assassins d'enfants. Est-ce une raison pour

l'accepter ? Toute barbarie ne devient pas

acceptable pour cela seul que le peuple la

demande"

Page 16: Fiche de Td Second Semestre 2013

16/92

Document 8 : extrait de la synthèse du rapport du comité constitutionnel : les nouveaux

droits des citoyens

2. Des droits nouveaux pour les citoyens

Poussant sa réflexion au-delà des équilibres

entre pouvoirs constitués, le Comité a

d’abord recherché les moyens de favoriser

une vie publique plus ouverte sur la société.

• Afin d’assurer une meilleure représentation

des courants politiques minoritaires et de

leur garantir une tribune dans les enceintes

démocratiques, le Comité croit, dans sa

majorité, nécessaire d’introduire une part

limitée de représentation proportionnelle

dans l’élection des députés, 20 à 30 sièges,

sur un total inchangé de 577, pouvant dans

cette perspective être répartis entre les partis

défavorisés par le scrutin majoritaire.

• Le corps électoral du Sénat verrait, pour sa

part, sa composition modifiée pour mieux

tenir compte des évolutions démographiques

et rééquilibrer la représentation des diverses

collectivités locales, les zones urbaines ayant

aujourd’hui un poids relatif insuffisant.

• Le Comité préconise en outre que le

découpage des circonscriptions électorales et

la répartition des sièges entre

circonscriptions soient revus tous les dix ans

dans le cadre d’une procédure faisant une

place à une commission indépendante, de

manière à ce que ne subsiste aucun doute sur

l’impartialité des évolutions proposées.

• Le Comité formule des propositions

tendant à moderniser la composition du

Conseil économique et social et à instituer

une forme d’initiative populaire. Le peuple

pourrait par ailleurs être appelé à trancher en

matière de révision constitutionnelle lorsque

les deux assemblées ne se sont pas mises

d’accord sur un projet mais que l’une a

adopté le texte à la majorité des trois

cinquièmes.

• Le Comité a enfin vu dans la réforme du

Conseil supérieur de la magistrature un

élément majeur de la modernisation des

institutions. Le Président de la République et

le Garde des sceaux n’en feraient plus partie,

de manière à mieux garantir l’indépendance

de l’autorité judiciaire ; les magistrats y

seraient minoritaires, pour prévenir toute

dérive corporatiste ; les justiciables eux-

mêmes pourraient le saisir à titre

disciplinaire, de sorte que les

dysfonctionnements éventuels seraient plus

systématiquement sanctionnés.

Sans modifier la substance même des droits

fondamentaux reconnus par la Constitution,

le Comité s’est par ailleurs attaché à en

rendre la garantie plus effective par des

mécanismes appropriés.

Ainsi en irait-il de la possibilité donnée au

justiciable de faire vérifier la conformité aux

droits et libertés garantis par la Constitution

de la loi dont il lui a été fait application.

Cette procédure nouvelle marquerait un

progrès de notre Etat de droit sans porter de

réelle atteinte à la sécurité juridique dont le

pays a besoin.

La proposition relative à l’institution d’un

Défenseur des droits fondamentaux poursuit

le même objectif. Cet organe nouveau, qui se

substituerait à un ensemble d’autorités

administratives aux compétences mal

délimitées, aurait pour mission de veiller, de

sa propre initiative ou sur saisine, au respect

des droits fondamentaux ; sur réclamation

des intéressés, il s’assurerait également du

bon fonctionnement des administrations ou

organismes investis d’une mission de service

public. Lui serait également reconnue la

faculté de saisir le Conseil constitutionnel

des lois non encore promulguées.

Le Comité souhaite enfin ancrer dans la loi

fondamentale un Conseil du pluralisme

chargé notamment de veiller, dans le respect

de la liberté d’expression, au pluralisme des

courants de pensée et d’opinion dans

l’information et la communication

audiovisuelles mais doté de compétences

élargies par rapport à l’actuel CSA.

Page 17: Fiche de Td Second Semestre 2013

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FICHE N° 2

L’EXECUTIF (I)

Le Président de la République

I/ DOCUMENTS REPRODUITS 1. Discours de Michel Debré devant le Conseil d’Etat du 27 août 1958 (extrait).

2. Déclaration du général de Gaulle sur le rôle du Président de la République du 31 janvier 1964.

3. Projet de loi constitutionnel portant modification du titre IX de la Constitution.

4. Le quinquennat (issu de la documentation française).

5. Comment est financée la campagne électorale ?

6. Extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur le problème des parrainages

7. Extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur la question de la limitation du

nombre des mandats du président de la république

II/ bibliographie ARDANT (Ph.), « Le pouvoir du Chef de l’Etat français : régime parlementaire ou régime

présidentiel », R.I.D.C., Journées S.L.C., vol. 11 (1989), pp. 261-279.

COHENDET (M.A.), Le Président de la République, Dalloz, 2002.

LAUVAUX (P.), Destins du présidentialisme, PUF, 2002.

MASS0T (J.), L’arbitre et le capitaine, essai sur la responsabilité présidentielle, Flammarion, Coll.

Champs, 1987.

MASSOT (J.), Chef de l’Etat et Chef de gouvernement – Dyarchie et hiérarchie, La Documentation

française, 1993.

MOREAU (A.), « La haute trahison du Président de la République sous la Vème

République », R.D.P.,

1987, pp. 1541-1602.

ZARKA (J-C.) Le Président de la République, Ellipses, dernière édition

Elire un Président, Pouvoirs n°14, 1980.

Le Président, Pouvoirs n°41, 1987.

Le quinquennat, numéro spécial de la RDP, 4, 2000.

III/ NOTIONS A CONNAITRE

Pouvoirs propres, pouvoirs partagés. Contreseing.

Fait majoritaire.

Les ruptures de 1962.

Page 18: Fiche de Td Second Semestre 2013

18/92

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) L’institution du Président de la République

b) Commentaire : conférence de pesse du 31 janvier 1964 (document 2).

c) Commentaire du projet de loi constitutionnelle du 10 septembre 1973 (document 5).

* * * *

Document 1 : Discours de Michel Debré devant le Conseil d’Etat du 27 août 1958

(extrait)

Le Président de la République

Si vous me permettez une image empruntée à

l'architecture, je dirai qu'à ce régime

parlementaire neuf, et à cette Communauté qui

commence à s'ébaucher, il faut une clef de

voûte. Cette clef de voûte, c'est le Président de

la République.

Ses pouvoirs

Chaque fois, vous le savez, qu'il est question,

dans notre histoire constitutionnelle, des

pouvoirs du Président de la République, un

curieux mouvement a pu être observé : une

certaine conception de la démocratie voit, a

priori, dans tout Président de la République,

chef de l'Etat, un danger et une menace pour la

République. Ce mouvement existe encore de

nos jours. N'épiloguons pas et admirons plutôt

la permanence des idéologies

constitutionnelles.

Le Président de la République doit être la clef

de voûte de notre régime parlementaire. Faute

d'un vrai chef d'Etat, le Gouvernement, en

l'état actuel de notre opinion, en fonction de

nos querelles historiques, manque d'un soutien

qui lui est normalement nécessaire. C'est dire

que le Président de notre République ne peut

être seulement, comme en tout régime

parlementaire, le chef d'Etat qui désigne le

Premier ministre, voire les autres ministres, au

nom de qui les négociations internationales

sont conduites et les traités signés, sous

l'autorité duquel sont placées l'armée et

l'administration. Il est, dans notre France, où

les divisions intestines ont un tel pouvoir sur la

scène politique, le juge supérieur de l'intérêt

national. A ce titre, il demande, s'il estime

utile, une deuxième lecture des lois dans le

délai de leur promulgation (disposition déjà

prévue et désormais classique) ; il peut

également (et ces pouvoirs nouveaux sont d'un

intérêt considérable) saisir le Comité

constitutionnel s'il a des doutes sur la valeur de

la loi au regard de la Constitution. Il peut

apprécier si le référendum, qui doit lui être

demandé par le Premier ministre ou les

présidents des assemblées, correspond à une

exigence nationale. Enfin, il dispose de cette

arme capitale de tout régime parlementaire qui

est la dissolution.

Est-il besoin d'insister sur ce que représente la

dissolution ? Elle est l'instrument de la stabilité

gouvernementale. Elle peut être la récompense

d'un Gouvernement qui paraît avoir réussi, la

sanction d'un Gouvernement qui paraît avoir

échoué. Elle permet entre le chef de l'Etat et la

nation un bref dialogue qui peut régler un

conflit ou faire entendre la voix du peuple à

une heure décisive.

Ce tableau rapidement esquissé montre que le

Président de la République, comme il se doit,

n'a pas d'autre pouvoir que celui de solliciter

un autre pouvoir : il sollicite le Parlement, il

sollicite le Comité constitutionnel, il sollicite le

suffrage universel. Mais cette possibilité de

solliciter est fondamentale.

En tant que Président de la Communauté, le

Président de la République dispose de pouvoirs

qui ne sont pas de même nature, car il n'est

plus, là, le chef d'un Etat parlementaire. Il est

le chef d'un régime politique collégial, destiné

par l'autorité de son Président, et par l'autorité

des gouvernements membres, à faciliter la

création d'une politique commune. Le

Président de la Communauté représente toute

Page 19: Fiche de Td Second Semestre 2013

19/92

la Communauté et c'est à cet égard que son

autorité en matière de défense nationale et

d'affaires étrangères est essentielle. Il préside

le Conseil exécutif, il saisit le Sénat de la

Communauté.

A ces pouvoirs normaux de chef de l'Etat, soit

en tant que Président de la République

parlementaire, soit en tant que Président de la

Communauté, le projet de Constitution ajoute

des pouvoirs exceptionnels. On en a tant parlé

qu'on n'en parle plus, car, sans doute, certains

esprits s'étaient un peu hâtés de critiquer avant

de lire attentivement. Quand des circonstances

graves, intérieures ou extérieures, et nettement

définies par un texte précis, empêchent le

fonctionnement des pouvoirs publics, il est

normal à notre époque dramatique, de chercher

à donner une base légitime à l'action de celui

qui représente la légitimité. Il est également

normal, il est même indispensable, de fixer à

l'avance certaines responsabilités

fondamentales. A propos de cet article on a

beaucoup parlé du passé. On a moins parlé de

l'avenir, et c'est pourtant pour l'avenir qu'il est

fait. Doit-on, en 1958, faire abstraction des

formes modernes de guerre ? A cette question

la réponse est claire : on n'a pas le droit, ni

pour ce cas ni pour d'autres, d'éliminer

l'hypothèse de troubles profonds dans notre vie

constitutionnelle. C'est pour l'hypothèse de ces

troubles profonds qu'il faut solennellement

marquer où sont les responsabilités, c'est-à-dire

les possibilités d'action.

Sa désignation

Cette responsabilité normale du chef de l'Etat

en régime parlementaire, cette responsabilité

normale du chef de l'Etat à la tête de la

Communauté, cette responsabilité

exceptionnelle du chef de l'Etat en période

tragique, voilà qui exige que sa désignation

soit entourée de soins particuliers.

Peut-on continuer, selon la tradition depuis

1875, de le faire désigner par les deux

chambres du Parlement ? Nous savons où

mène un tel collège électoral : le Président de

la République est un arbitre entre les partis

membres du Parlement, et cet arbitre, quelle

que soit sa valeur morale, éprouve beaucoup

de mal à sortir de l'étroit domaine où il est

enfermé moins par les textes que par son mode

d'élection. Il faut à la République et à la

Communauté une personnalité qui soit bien

plus qu'un arbitre entre les partis et il est peu

probable qu'un collège électoral réduit au seul

Parlement puisse aboutir au résultat souhaité.

Au surplus, le Parlement, demain, sera la

République seule, c'est-à-dire la métropole, les

départements d'outre-mer, quelques territoires.

Or des représentants de la Communauté

doivent être présents si l'on veut marquer au

départ la double fonction du Président de la

République.

Le suffrage universel ne donne pas un corps

électoral normal dans un régime parlementaire.

Le Président qui est l'élu du suffrage universel

est un chef politique attaché à l'œuvre

quotidienne du gouvernement et du

commandement ; recourir au suffrage

universel, c'est recourir à la constitution

présidentielle qui a été écartée pour les raisons

qui ont été dites au début de cet exposé.

On est alors mené par la force des choses à un

collège composé d'élus politiques qui ne soient

pas seulement les parlementaires : les

conseillers généraux, les conseillers

municipaux. La seule difficulté de ce collège

est constituée par le grand nombre de petites

communes et la représentation relativement

faible des grandes villes. Ce problème est un

problème politique, mais il faut bien voir qu'il

est posé par une caractéristique nationale que

nous devons admettre à moins de sombrer dans

l'idéologie. La France est composée de milliers

et de milliers de communes : ce fait est un fait

français, un des aspects fondamentaux de notre

sociologie. Les inconvénients de cette force

considérable des petites communes doivent, il

est vrai, être corrigés. Le projet qui vous est

soumis accorde aux grandes villes une

représentation équitable en donnant à leurs

conseils municipaux la possibilité d'élire des

électeurs supplémentaires proportionnellement

à leur population ; en réduisant par ailleurs la

représentation des conseils municipaux des

communes et des petites villes soit au maire

seul, soit au maire et à ses adjoints, le projet

rétablit un équilibre raisonnable. En même

temps, sur des bases identiques, également très

valables, on peut parvenir à une représentation,

dans le collège électoral du Président de la

République, des territoires et des futurs Etats

de la Communauté.

Pour assurer la légitimité du chef de la

République française, il faut donner à son

corps électoral une image aussi conforme que

possible à ce qu'est la France politique. Pour

Page 20: Fiche de Td Second Semestre 2013

20/92

assurer la légitimité du futur chef de la

Communauté, il faut assurer une participation

raisonnable des Etats membres à ce corps

électoral. Le projet s'est attaché à répondre à

cette double préoccupation ; il n'aboutit donc

pas, comme vous le voyez, à un mécanisme

qui aurait été inventé pour élire le général de

Gaulle, lequel n'a pas besoin d'un tel

mécanisme ! Le projet a pour ambition

d'établir l'élection du Président de la

République sur des bases telles qu'il réponde

aux nécessités de notre siècle.

Document 2 : Conférence de presse du général de Gaulle 31 janvier 1964

... Une Constitution, c'est un esprit, des

institutions, une pratique.

Pour ce qui est de la nôtre, son esprit procède

de la nécessité d'assurer aux pouvoirs publics

l'efficacité, la stabilité et la responsabilité, dont

ils manquaient organiquement sous la

Troisième et sous la Quatrième République.

Sans doute, le déclenchement de la réforme, en

1958, a-t-il été déterminé par la secousse

survenue à Alger, étalant l'impuissance du

régime d'alors à surmonter un drame où était

en train de sombrer notre unité nationale.

D'ailleurs, en 1940, dans des circonstances

beaucoup plus tragiques encore, on avait déjà

vu abdiquer un régime semblable. Mais, même

en dehors de ces brutales démonstrations, nul

ne doutait, et depuis longtemps, qu'un système,

qui mettait le pouvoir à la discrétion des partis,

végétait dans les compromis, s'absorbait dans

ses propres crises, était inapte à mener les

affaires de notre pays. C'est pourquoi l'esprit

de la Constitution nouvelle consiste, tout en

gardant un Parlement législatif, à faire en sorte

que le pouvoir ne soit plus la chose des

partisans, mais qu'il procède directement du

peuple, ce qui implique que le chef de l'Etat,

élu par la nation, en soit la source et le

détenteur. C'est ce qui fut réalisé au vu et au su

de tout le monde quand je repris la direction

des affaires, puis quand j'assumai les fonctions

de Président. C'est ce qui a été simplement

précisé par le dernier référendum. Il ne semble

pas que, depuis qu'elle s'applique, cette

conception ait été méconnue par les

responsables, ni rejetée par le peuple, ni

infirmée par les événements.

Quant à la répartition des pouvoirs, elle a été

observée suivant ce que prévoit notre

Constitution. Les rôles attribués

respectivement : au Président, garant du destin

de la France et de celui de la République,

chargé par conséquent de graves devoirs et

disposant de droits étendus ; au Gouvernement,

nommé par le chef de l'Etat, siégeant autour de

lui pour la détermination et la mise en œuvre

de la politique et dirigeant l'administration ; au

Parlement, exerçant le pouvoir législatif et

contrôlant l'action du ministère, ont été remplis

ainsi que l'exigeaient la volonté du pays, les

conditions où nous nous trouvions, l'obligation

de mener les affaires d'une manière active,

ferme et continue.

Il est vrai que, concurremment avec l'esprit et

avec le texte, il y a eu la pratique. Celle-ci a

naturellement tenu pour une part aux hommes.

Pour ce qui est du chef de l'Etat, il est bien

évident que son équation personnelle a compté

et je doute que, dès l'origine, on ne s'y attendît

pas. Quant aux ministres et, d'abord, aux

Premiers : successivement M. Michel Debré et

M. Georges Pompidou, ils ont agi avec une

évidente efficacité, mais chacun à sa façon et

qui n'était pas la même. Enfin, le Parlement a

imprimé à sa tâche et à son attitude un

caractère différent, suivant que, dans l'actuel

régime, il ait vécu sa première ou sa deuxième

législature. Il faut dire aussi que nos

institutions ont eu à jouer, depuis plus de cinq

ans, dans des conditions très variables, y

compris à certains moments sous le coup de

graves tentatives de subversion. Mais,

justement, l'épreuve des hommes et des

circonstances a montré que l'instrument répond

à son objet, non point seulement pour ce qui

concerne la marche ordinaire des affaires, mais

encore en ce qui a trait aux situations difficiles,

auxquelles la Constitution actuelle offre, on l'a

vu, les moyens de faire face : référendum,

article 16, dissolution de l'Assemblée

nationale.

Sans doute, cette réussite tient-elle

essentiellement à ceci que nos institutions

nouvelles répondent aux exigences de

l'époque, autant qu'à la nature du peuple

français et à ce qu'il souhaite réellement.

Cependant, certains, trouvant peut-être la

mariée trop belle, suggèrent des changements

qui, en fait, bouleverseraient le système de

fond en comble.

Page 21: Fiche de Td Second Semestre 2013

21/92

C'est ainsi que quelques-uns préconisent un "

gouvernement de législature ". L'Assemblée

nationale, quand elle aurait, une fois, donné sa

confiance au ministère, ne pourrait plus le

renverser sans qu'il soit procédé à la

dissolution automatique. De cette façon, le

chef de l'Etat - et c'est bien là, sans doute, le

but essentiel du projet - n'aurait pas à

intervenir. Mais par là même, les partis

auraient beau jeu de faire en sorte que la

désignation du Premier ministre et, au moment

choisi par eux, son remplacement en souplesse,

la composition du cabinet, puis ses divisions

provoquées du dehors ainsi que ses

remaniements, la politique adoptée en

apparence, ensuite ses fluctuations, soient de

nouveau les objets de leurs jeux et de leurs

combinaisons, tandis que leur savoir-faire

éviterait à volonté qu'une crise en bonne et due

forme n'imposât la dissolution. Ainsi en

reviendrait-on au régime d'assemblée.

D'autres, faisant contre mauvaise fortune bon

cœur, font profession d'accepter l'existence

d'un chef de l'Etat qui en soit un, mais à la

condition que le Parlement soit, de son côté,

érigé en citadelle inexpugnable où les partis

retrouveraient leur empire et leur sûreté. Ceux-

là témoignent d'un préférence, assez nouvelle

de leur part, en faveur d'un régime qualifié de "

présidentiel " et qui serait analogue à celui des

Etats-Unis. " Que le Président, disent-ils, soit

élu par le peuple en même temps que

l'Assemblée nationale et assume en personne le

pouvoir exécutif, mais que, d'autre part, le

Parlement exerce intégralement le pouvoir

législatif. Surtout, que chacun des deux,

strictement enfermé dans son domaine, n'ait

aucune prise sur l'autre : le Président ne

pouvant dissoudre, ni le Parlement renverser. "

Ainsi, allèguent ces néophytes, le

Gouvernement serait concentré entre les mains

d'un seul, ce qui obvierait aux inconvénients

d'une autorité divisée entre un Président et un

Premier ministre, tandis que le Parlement, se

trouvant intangible, voterait, ou non, les lois et

le budget comme il le jugerait bon.

On ne saurait méconnaître qu'une Constitution

de cette sorte a pu, jusqu'à présent, fonctionner

cahin-caha aux Etats-Unis, c'est-à-dire dans un

pays qui, en raison de sa composition ethnique,

de ses richesses économiques, de sa situation

géographique, n'a connu aucune invasion, ni

même, depuis un siècle, aucune révolution ;

dans un pays qui comprend deux partis

politiques seulement, lesquels ne sont opposés

par rien d'essentiel dans aucun domaine :

national, social, moral ou international ; dans

un pays fédéral, enfin, où le Gouvernement

n'assume que les tâches générales : défense,

diplomatie, finances, tandis qu'il appartient aux

cinquante Etats de l'Union de pourvoir à tout le

reste. Mais comment ce régime conviendrait-il

à la nation française, très fortement centralisée

par le long effort des siècles, victime de toutes

les secousses intérieures et extérieures depuis

sept générations, toujours exposée à en subir

d'autres, et où les multiples partis politiques, à

l'exception de celui qui pousse au

bouleversement, sont divisés et inconsistants ?

Tout d'abord, parce que la France est ce qu'elle

est, il ne faut pas que le Président soit élu

simultanément avec les députés, ce qui

mêlerait sa désignation à la lutte directe des

partis, altérerait le caractère et abrégerait la

durée de sa fonction de chef de l'Etat. D'autre

part, il est normal chez nous que le Président

de la République et le Premier ministre ne

soient pas un seul et même homme. Certes, on

ne saurait accepter qu'une dyarchie existât au

sommet. Mais, justement, il n'en est rien. En

effet, le Président, qui, suivant notre

Constitution, est l'homme de la nation, mis en

place par elle-même pour répondre de son

destin ; le Président, qui choisit le Premier

ministre, qui le nomme ainsi que les autres

membres du Gouvernement, qui a la faculté de

le changer, soit parce que se trouve achevée la

tâche qu'il lui destinait et qu'il veuille s'en faire

une réserve en vue d'une phase ultérieure, soit

parce qu'il ne l'approuverait plus ; le Président,

qui arrête les décisions prises dans les

Conseils, promulgue les lois, négocie et signe

les traités, décrète ou non les mesures qui lui

sont proposées, est le chef des armées, nomme

aux emplois publics ; le Président, qui, en cas

de péril, doit prendre sur lui de faire tout ce

qu'il faut ; le Président est évidemment seul à

détenir et à déléguer l'autorité de l'Etat. Mais,

précisément, la nature, l'étendue, la durée de sa

tâche impliquent qu'il ne soit pas absorbé, sans

relâche et sans limite, par la conjoncture,

politique, parlementaire, économique et

administrative. Au contraire, c'est là le lot,

aussi complexe et méritoire qu'essentiel, du

Premier ministre français.

Certes, il ne saurait y avoir de séparation

étanche entre les deux plans, dans lesquels,

d'une part le Président, d'autre part celui qui le

Page 22: Fiche de Td Second Semestre 2013

22/92

seconde, exercent quotidiennement leurs

attributions. D'ailleurs, les Conseils et les

entretiens sont là pour permettre au chef de

l'Etat de définir à mesure l'orientation de la

politique nationale et aux membres du

Gouvernement, à commencer par le Premier,

de faire connaître leurs points de vue, de

préciser leur action, de rendre compte de

l'exécution. Parfois, les deux plans sont

confondus quand il s'agit d'un sujet dont

l'importance engage tout et, dans ce cas, le

Président procède à la répartition comme il le

juge nécessaire. Mais, s'il doit être évidemment

entendu que l'autorité indivisible de l'Etat est

confiée tout entière au Président par le peuple

qui l'a élu, qu'il n'en existe aucune autre, ni

ministérielle, ni civile, ni militaire, ni judiciaire

qui ne soit conférée et maintenue par lui, enfin

qu'il lui appartient d'ajuster le domaine

suprême qui lui est propre avec ceux dont il

attribue la gestion à d'autres, tout commande,

dans les temps ordinaires, de maintenir la

distinction entre la fonction et le champ

d'action du chef de l'Etat et ceux du Premier

ministre.

Pourtant, objectent parfois ceux qui ne se sont

pas encore défaits de la conception de jadis, le

Gouvernement, qui est celui du Président, est

en même temps responsable devant le

Parlement. Comment concilier cela ?

Répondons que le peuple souverain, en élisant

le Président, l'investit de sa confiance. C'est là,

d'ailleurs, le fond des choses et l'essentiel du

changement accompli. De ce fait, le

Gouvernement, nommé par le chef de l'Etat et

dont au surplus les membres ne peuvent être

des parlementaires, n'est plus du tout, vis-à-vis

des chambres, ce qu'il était à l'époque où il ne

procédait que de combinaisons de groupes.

Aussi, les rapports entre le ministère et le

Parlement, tels qu'ils sont réglés par la

Constitution, ne prévoient la censure que dans

des conditions qui donnent à cette rupture un

caractère d'extraordinaire gravité. En ce cas

extrême, le Président, qui a la charge d'assurer

la continuité de l'Etat, a aussi les moyens de le

faire, puisqu'il peut recourir à la nation pour la

faire juge du litige par voie de nouvelles

élections, ou par celle du référendum, ou par

les deux. Ainsi, y a-t-il toujours une issue

démocratique. Au contraire, si nous adoptions

le système américain, il n'y en aurait aucune.

Dans un pays comme le nôtre, le fait que le

chef de l'Etat serait aussi Premier ministre et

l'impossibilité où il se trouverait, dans

l'hypothèse d'une obstruction législative et

budgétaire, de s'en remettre aux électeurs, alors

que le Parlement ne pourrait le renverser lui-

même, aboutirait fatalement à une opposition

chronique entre deux pouvoirs intangibles. Il

en résulterait, ou bien la paralysie générale, ou

bien des situations qui ne seraient tranchées

que par des pronunciamientos, ou bien, enfin,

la résignation d'un Président mal assuré qui,

sous prétexte d'éviter le pire, choisirait de s'y

abandonner, en se pliant, comme autrefois, aux

volontés des partisans. On peut penser que

c'est cette troisième hypothèse que caressent le

plus volontiers les champions imprévus du "

régime présidentiel ".

Notre Constitution est bonne. Elle a fait ses

preuves depuis plus de cinq années, aussi bien

dans des moments menaçants pour la

République qu'en des périodes de tranquillité.

Sans doute, d'autres circonstances et d'autres

hommes donneront-ils plus tard à son

application un tour, un style, plus ou moins

différents. Sans doute, l'évolution de la société

française nous amènera-t-elle, en notre temps

de progrès, de développement et de

planification, à reconsidérer l'une de ses

dispositions. Je veux parler de celle qui

concerne le rôle et la composition du Conseil

économique et social. Mais, en dehors de cette

précision, qui ne bouleversera pas l'économie

de la Constitution, gardons celle-ci telle qu'elle

est. Assurément, on s'explique que ne s'en

accommodent volontiers ni les nostalgiques,

avoués ou non, de la confusion de naguère, ni

cette entreprise qui vise au régime totalitaire et

qui voudrait créer chez nous un trouble

politique d'où sa dictature sortirait. Mais le

pays, lui, a choisi et je crois, pour ma part, qu'il

l'a fait définitivement. (...)

Document 3 : Projet de loi constitutionnelle portant modification du titre IX de la

Constitution

Exposé des motifs

Page 23: Fiche de Td Second Semestre 2013

23/92

Mesdames, Messieurs,

Les règles posées par le titre IX de la

Constitution du 4 octobre 1958, relatives à la

responsabilité pénale du chef de l'État, ont

soulevé certaines difficultés d'interprétation.

Le Conseil constitutionnel et la Cour de

cassation ont ainsi procédé à des lectures de

l'article 68 de la Constitution peu compatibles

entre elles. Selon le Conseil constitutionnel,

hors le cas de haute trahison, le président de la

République bénéficie d'une immunité pour les

actes accomplis dans l'exercice de ses

fonctions. En ce qui concerne les actes

antérieurs à celles-ci ou ceux qui en sont

détachables, sa responsabilité pénale ne saurait

être recherchée que selon la procédure prévue

par l'article 68 de la Constitution (C.C., 22

janvier 1999, décision n° 98-408 DC).

L'assemblée plénière de la Cour de cassation

considère, pour sa part, que la compétence de

la Haute Cour de Justice, en application de

l'article 68 de la Constitution, est limitée au

crime de haute trahison. S'agissant des autres

infractions, commises avant ou pendant

l'exercice de ses fonctions, le président de la

République est protégé par une immunité

absolue, la prescription étant simplement

suspendue pendant la durée du mandat

présidentiel (Cass., Ass. plén., 10 octobre

2001, Breisacher : Bull. n° 11). S'agissant de

l'application de la réforme constitutionnelle

dans le temps, le texte proposé ne prévoit

aucune disposition spécifique à cet égard. En

conséquence, la révision constitutionnelle

s'appliquera au mandat en cours.

Dans ce contexte, le chef de l'État a demandé à

Monsieur le Professeur Pierre Avril de présider

une commission chargée de réfléchir au statut

pénal du Président de la République et de

formuler, le cas échéant, les propositions de

réforme qui lui paraîtraient appropriées. La

commission a remis le 12 décembre 2002 au

chef de l'État un rapport qui préconise la

modification du titre IX de la Constitution.

Aux termes de celui-ci, le principe de

l'irresponsabilité du Président de la République

pour les actes commis dans l'exercice de ses

fonctions demeurerait. En outre, durant son

mandat, et en application de l'immunité dont il

bénéficierait, il ne pourrait être contraint à

aucun témoignage et ne pourrait faire l'objet

d'aucun acte d'information, d'instruction ou de

poursuite devant une juridiction ou devant une

autorité administrative. Dans le cadre des

fonctions présidentielles, la responsabilité

serait limitée, d'une part, à l'hypothèse, d'ores

et déjà prévue par l'article 53-2 de la

Constitution, dans laquelle serait compétente la

Cour pénale internationale, et, d'autre part, au

cas de manquement à ses devoirs

manifestement incompatible avec l'exercice du

mandat de chef de l'État. La sanction, le cas

échéant prononcée par le Parlement réuni en

Haute Cour, serait la destitution du Président

de la République. Le présent projet de loi

reprend les propositions formulées par la

commission dans son rapport. Il repose sur

trois principes : le Président de la République,

agissant dans l'exercice de ses fonctions, n'est

pas un justiciable ordinaire (I) ; son immunité

n'est pas totale (II) ; la juridiction appelée à

connaître des manquements commis dans le

cadre de ses fonctions est composée, afin de

respecter l'équilibre démocratique né du

fonctionnement des pouvoirs publics sous la

Cinquième République, par les élus de la

Nation (III).

I.- La responsabilité du Président de la

République déroge au droit commun.

Les auteurs du rapport ont mis l'accent sur la

nécessité de ne pas faire du Président de la

République un justiciable ordinaire, eu égard

au risque d'affaiblissement qu'entraînerait pour

la fonction présidentielle une mise en cause de

la responsabilité du chef de l'État dans les

conditions du droit commun. En cours de

mandat, seuls les manquements manifestement

incompatibles avec l'exercice de la fonction

présidentielle pourront donc être sanctionnés,

selon une procédure spécifique. S'agissant des

actes accomplis avant le début de son mandat,

ou dépourvus de lien avec celui-ci, toute mise

en cause éventuelle du Président de la

République devant une juridiction pénale sera

suspendue durant l'exercice de son mandat.

II.- L'immunité proposée n'est toutefois pas

totale.

En premier lieu, afin de clarifier le texte

constitutionnel, la rédaction du motif qui

permet l'engagement de la responsabilité «

politique » du Président de la République est

revue, et, aux termes de « haute trahison »

inscrits à l'actuel article 68 de la Constitution,

sont substitués ceux de « manquement à ses

devoirs manifestement incompatible avec

l'exercice de son mandat ». En second lieu,

pour les actes qui ne sont pas accomplis par le

Page 24: Fiche de Td Second Semestre 2013

24/92

chef de l'État en cette qualité, et pour ceux qui

sont antérieurs à ses fonctions, l'immunité n'est

que temporaire, les procédures pouvant être

engagées ou reprises à l'expiration d'un délai

d'un mois suivant la cessation de ses fonctions.

III.- Le Parlement, constitué en Haute Cour,

est compétent pour connaître, le cas échéant,

des actes accomplis par le Président de la

République dans l'exercice de ses fonctions.

Conformément aux recommandations de la

commission, le projet de loi constitutionnelle

s'attache à éviter le double écueil, d'une part,

du recours aux juridictions ordinaires, d'autre

part, de la création d'une juridiction ad hoc.

Ainsi, c'est au Parlement tout entier réuni, se

prononçant à la majorité de ses membres, et

non plus à des membres élus en son sein, qu'est

attribuée la compétence pour se prononcer sur

la destitution éventuelle du Président de la

République. Enfin, la procédure prévue, qui

suppose que la proposition de réunion de la

Haute Cour soit votée par chacune des deux

assemblées, respecte l'équilibre inhérent au

bicamérisme.

Projet de loi constitutionnelle

Le président de la République,

Sur la proposition du Premier ministre,

Vu l'article 89 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi constitutionnelle

portant modification du titre IX de la

Constitution, délibéré en Conseil des ministres

après avis du Conseil d'État, sera présenté à

l'Assemblée nationale par le garde des sceaux,

ministre de la justice, qui est chargé d'en

exposer les motifs et d'en soutenir la

discussion.

Article unique

Le titre IX de la Constitution est remplacé par

les dispositions suivantes :

« Titre IX « La Haute Cour »

« Article 67. - Le président de la République

n'est pas responsable des actes accomplis en

cette qualité, sous réserve des dispositions des

articles 53-2 et 68.

« Il ne peut, durant son mandat et devant

aucune juridiction ou autorité administrative

française, être requis de témoigner non plus

que faire l'objet d'un acte d'information,

d'instruction ou de poursuite.

« Les instances et procédures auxquelles il est

ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou

engagées contre lui à l'expiration d'un délai

d'un mois suivant la cessation des fonctions. »

« Article 68. - Le président de la République

ne peut être destitué qu'en cas de manquement

à ses devoirs manifestement incompatible avec

l'exercice de son mandat. La destitution est

prononcée par le Parlement constitué en Haute

Cour.

« La proposition de réunion de la Haute Cour

adoptée par une des assemblées du Parlement

est aussitôt transmise à l'autre qui se prononce

dans les quinze jours.

« La décision de réunir la Haute Cour emporte

empêchement du Président de la République

dont les fonctions sont exercées dans les

conditions prévues au quatrième alinéa de

l'article 7. Cet empêchement prend fin au plus

tard à l'expiration du délai prévu à l'alinéa

suivant.

« La Haute Cour est présidée par le président

de l'Assemblée nationale. Elle statue dans les

deux mois, à bulletins secrets, sur la

destitution. Sa décision est d'effet immédiat.

« Les décisions prises en application du

présent article le sont à la majorité des

membres composant l'assemblée concernée ou

la Haute Cour. Seuls sont recensés les votes

favorables à la proposition de réunion de la

Haute Cour ou à la destitution.

« Une loi organique fixe les conditions

d'application du présent article. »

Document 4 : le quinquennat

Le quinquennat, c’est-à-dire l’établissement à

cinq ans de la durée du mandat présidentiel, a

été introduit dans la constitution par la loi

constitutionnelle no 2000-964 du 2 octobre

Page 25: Fiche de Td Second Semestre 2013

25/92

2000. Il vise à mettre en place un

renouvellement plus fréquent du mandat

présidentiel et à aligner sa durée sur celle

du mandat des députés (cinq ans) afin de

diminuer les risques de cohabitation. Cette

révision de la constitution n’écarte cependant

pas toute possibilité de cohabitation (en cas de

démission ou de décès du président de la

République, ou en cas de dissolution de

l’Assemblée nationale) et pourrait, à terme,

modifier l’équilibre entre les différentes

institutions.

Le septennat : fruit du hasard ?

L’institution récente du quinquennat rompt

avec la durée du mandat présidentiel, prévue

par les constitutions de 1875, 1946 et 1958,

fixé à sept ans. Le septennat a, cependant,

davantage été imposé par les circonstances que

par une véritable réflexion constitutionnelle. Il

était néanmoins entré dans la tradition

républicaine française. Le contexte dans lequel

le mandat présidentiel a été fixé à sept ans

montre d’ailleurs qu’il est plus un héritage du

principe monarchiste qu’une mise en œuvre de

la doctrine républicaine. Celle-ci est en effet

attachée à des mandats courts, afin de

permettre l’expression la plus fréquente

possible des électeurs.

L’Assemblée nationale, élue le 8 février 1871

après la chute du Second Empire, était

dominée par les monarchistes divisés en deux

tendances antagonistes. Les légitimistes,

partisans d’un retour à l’Ancien Régime,

soutenaient les Bourbons en la personne du

comte de Chambord, petit-fils de Charles X.

Les orléanistes, favorables à l’institution d’une

monarchie constitutionnelle et acceptant

l’héritage de 1789, défendaient pour leur part

le comte de Paris, petit-fils de Louis-Philippe.

Les monarchistes comptaient sur le temps pour

regrouper leurs forces face aux républicains et

choisir entre les deux prétendants. Après avoir

contraint Adolphe Thiers, chef de l’Exécutif, à

la démission le 24 mai 1873, du fait de son

ralliement aux idées républicaines, les

royalistes portèrent à la présidence de la

République le maréchal de Mac-Mahon, en

souhaitant qu’il laisse ultérieurement sa place

au monarque.

Le comte de Chambord n’ayant pas de

descendance, la majorité retint une solution

d’attente afin que le temps tranche le conflit

entre les deux branches de la dynastie. Le

rapporteur du texte relatif à la durée du mandat

du chef de l’État, Laboulaye, proposait un

mandat d’une durée de cinq ans. Mac-Mahon,

quant à lui, défendait l’idée d’un décennat, par

référence aux dispositions de la constitution de

l’an VIII (1799). La majorité s’accorda sur la

durée médiane. La loi du 20 novembre 1873

devait ainsi disposer dans un souci de

compromis que « Le pouvoir exécutif est

confié pour sept ans au maréchal de Mac-

Mahon, duc de Magenta ».

Ce principe devait être confirmé par les lois

constitutionnelles de 1875, définissant les

institutions de la IIIe République, et par la

constitution de 1946, instituant la IVe

République. Mais, la pratique des institutions

de la IIIe République et la lettre des

dispositions de la constitution du 27 octobre

1946 ont considérablement limité les

prérogatives du chef de l’État. En effet, sa

principale fonction était de nommer le chef du

Gouvernement en tenant compte de l’équilibre

politique au sein de la majorité parlementaire.

Le septennat n’avait donc pas été jugé

incompatible avec la tradition républicaine,

puisque le président, élu par les

parlementaires, disposait alors d’une légitimité

moindre que ces derniers, élus par le peuple, et

qu’il n’exerçait pas de véritables fonctions

exécutives.

Le septennat sous la Ve République : un

président au-dessus des partis

Le septennat va cependant acquérir une

signification nouvelle sous la Ve République.

Si la constitution de 1958 reprend la durée du

mandat présidentiel existant sous les deux

républiques précédentes, elle renforce dans le

même temps considérablement les pouvoirs du

chef de l’État. Elle lui donne ainsi le rôle

« d’arbitre au-dessus des contingences

politiques » appelé de ses vœux par le général

de Gaulle dans son discours de Bayeux du 16

juin 1946. La durée du mandat présidentiel lui

confère ainsi une fonction propre et distincte

de celle assignée au Gouvernement et au

Parlement.

Le chef de l’État incarne l’unité nationale et la

continuité des institutions. La durée de son

mandat lui permet d’inscrire son action au-delà

du mandat de l’Assemblée nationale. Dans sa

conférence de presse du 31 janvier 1964, le

général de Gaulle devait d’ailleurs préciser

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l’intérêt que la durée du mandat du président

de la République ne coïncide pas avec celui de

l’Assemblée nationale : « il ne faut pas que le

président soit élu simultanément avec les

députés, ce qui mêlerait sa désignation à la

lutte directe des partis, altérerait le caractère et

abrégerait la durée de sa fonction de chef de

l’État. »

Cependant, la révision de 1962, instituant

l’élection du président au suffrage universel

direct, a peu à peu remis en cause cette idée

d’un chef de l’État au-dessus des partis

politiques. Dès l’élection de 1965, le président

de la République est en effet apparu comme le

chef d’une majorité politique disposant par

ailleurs de la majorité au Parlement.

Le quinquennat : pour renouveler la légitimité

présidentielle et éviter les cohabitations

La durée du mandat, qui compensait entre

1875 et 1958 le manque de pouvoirs et la

faible légitimité du président de la République,

perdait dès lors une grande partie de sa

justification. Elle devait même poser un

problème d’érosion de la légitimité

présidentielle, surtout en cas de réélection à un

second mandat.

Afin de remédier à cette situation, le général de

Gaulle a utilisé l’ensemble des prérogatives

que lui conférait la constitution pour consulter

le peuple au cours de ses fonctions. En 1968 il

a procédé à une dissolution de l’Assemblée

nationale, puis organisé, l’année suivante, un

référendum sur un projet de loi réformant le

Sénat et mettant en place la régionalisation.

Malgré la victoire de la majorité présidentielle

aux élections législatives de 1968, le président

devait être désavoué lors de la consultation

référendaire de 1969, alors que l’opposition

mettait en avant le slogan « dix ans, ça suffit ».

La longueur du mandat présidentiel

soulevait des difficultés nouvelles liées à

l’existence d’une responsabilité directe du

président de la République devant le peuple

depuis la réforme de 1962.

La réforme inachevée de 1973

Pour cette raison, et peut-être également pour

d’autres liées à son état de santé, le président

Pompidou devait tenter en 1973 de réviser

la constitution pour instaurer le

quinquennat renouvelable une fois.

Le projet de loi constitutionnelle, déposé le 6

septembre 1973 par le chef de l’État, a été voté

le 16 octobre de la même année par

l’Assemblée nationale (par 270 voix contre

211) et le 19 octobre par le Sénat (par 162 voix

contre 112). Le président, ne souhaitant pas

consulter le pays par référendum sur un tel

sujet, devait finalement renoncer à soumettre le

projet de révision aux deux chambres réunies

en Congrès. Les faibles majorités qui se sont

dégagées en faveur du texte dans les deux

assemblées ne permettaient pas, en effet, de

réunir la majorité de trois cinquième requise

par l’article 89 de la constitution. Le projet de

loi constitutionnelle devait ainsi être ajourné sine die. Le président Valéry Giscard

d’Estaing, qui succéda à Georges Pompidou,

n’a pas envisagé au cours de son septennat de

lui donner une quelconque suite.

La Commission Vedel de 1992

La question de la réduction du mandat

présidentiel devait ensuite faire l’objet de

plusieurs déclarations d’intention du président

Mitterrand. Il a lancé différentes pistes de

réforme en la matière, défendant tour à tour le

septennat non renouvelable, le mandat de cinq

ou de six ans.

Le débat sur la durée du mandat

présidentiel devait en fait prendre

davantage de consistance après la première

cohabitation (1986-1988). Le président

François Mitterrand en a d’ailleurs saisi la

commission Vedel, créée à son initiative le 2

décembre 1992, pour faire des propositions de

révision de la constitution.

Dans sa lettre de mission adressée à ce comité

consultatif, il a fait part de sa position

personnelle sur la durée du mandat

présidentiel : « Le débat d’actualité, ouvert

dans l’opinion publique, porte, on le sait, sur la

durée du mandat présidentiel. La constitution a

fixé celui-ci à sept ans et autorise son

renouvellement. Dans ce dernier cas, beaucoup

pensent que quatorze années, c’est trop.

M. Pompidou avait fait adopter par les

Assemblées le mandat de cinq ans

renouvelable une fois. Mais il n’a pas poussé la

procédure à son terme, c’est-à-dire jusqu’au

vote du Congrès. De nombreuses initiatives ont

repris ce projet. Diverses personnalités

préfèrent un mandat de sept ans non

renouvelable et certaines d’entre elles

suggèrent six ans renouvelables une fois. Ma

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préférence va à un mandat d’une durée plus

longue que celle d’un député et au moins aussi

longue que celle d’un maire ou d’un conseiller

général. N’oublions pas que le président de la

République a, en raison de l’article 5, un

pouvoir d’arbitrage et qu’il n’est pas lié aux

changements de majorité parlementaire. »

La commission Vedel devait en définitive

évoquer très prudemment la question de la

réforme du septennat pour conclure au statu

quo.

Les arguments avancés par le comité

consultatif en faveur d’une réduction de la

durée du mandat sont les suivants :

Le septennat est trop long au regard des

exigences des démocraties modernes. Si le

général de Gaulle a choisi une durée de sept

ans pour le mandat présidentiel, c’est en

l’accompagnant de recours fréquents au peuple

par voie de référendum pour s’assurer de son

adhésion ;

Le cumul des principes contradictoires de

l’autorité et de l’irresponsabilité du chef de

l’État serait atténué par une consultation plus

fréquente des électeurs.

Ceux avancés en faveur du septennat sont les

suivants :

Le quinquennat aboutirait à faire du

président le véritable chef de la majorité

parlementaire et susciterait l’effacement du

Premier ministre ;

La fonction arbitrale du chef de l’État serait

affectée ;

La durée de sept ans conforte la crédibilité

du président sur la scène internationale ;

La tenue des élections législatives dans les

cinq années suivant l’élection présidentielle

permet aux citoyens d’exprimer ou non leur

adhésion à l’action du chef de l’État.

Le comité consultatif devait par ailleurs

recommander de ne pas limiter le

renouvellement du mandat présidentiel en

estimant qu’une telle mesure heurtait le

principe de la souveraineté du peuple.

Les cohabitations : l’affaiblissement possible

de l’autorité du président

La répétition des cohabitations depuis 1986

devait réactualiser le débat sur la durée du

mandat présidentiel. Celles-ci ont en effet eu

pour conséquence d’amoindrir la fonction

présidentielle en conférant au chef de l’État le

statut de leader de l’opposition, qui est peu

conforme à l’esprit des institutions.

Le président François Mitterrand n’aura

effectivement exercé la plénitude de ses

fonctions présidentielles que pour la durée de

deux législatures, soit dix ans, puisque ses

deux septennats se sont achevés par l’échec de

la majorité présidentielle à l’élection

législative.

Certes, la dissolution de l’Assemblée en début

de mandat présidentiel donne au président les

moyens de mettre en œuvre son projet, mais la

différence entre la durée du mandat

présidentiel et celle des députés peut être

source de difficultés pour les deux dernières

années de son mandat.

La situation de cohabitation longue dans

laquelle s’est retrouvée la France après l’échec

de la majorité présidentielle aux élections

législatives de 1997 a finalement incité les

deux têtes de l’Exécutif à proposer une

réforme afin de faire coïncider la durée du

mandat présidentiel et celle du mandat des

députés.

L’adoption du quinquennat

Le projet de loi constitutionnelle relative à la

durée du mandat présidentiel a été adopté par

l’Assemblée nationale, le 15 juin 2000, et par

le Sénat, le 29 juin de la même année. Le

président de la République a décidé de

soumettre cette révision constitutionnelle au

référendum en application des dispositions de

l’article 89 de la constitution. Elle a été

adoptée le 24 septembre 2000 par 7 407 697

« oui », contre 2 710 651 « non », pour 39 941

192 électeurs inscrits et 12 058 688 votants.

Avec une abstention atteignant 69,3 %, ce

référendum devait révéler le faible intérêt des

citoyens pour une réforme institutionnelle, qui,

il est vrai, avait été présentée comme un

aménagement de nature technique.

Le prochain mandat présidentiel devrait

permettre de juger de l’impact de cette

réforme, dont certains estiment qu’elle

renforce le caractère présidentialiste des

institutions au détriment du Premier ministre.

Quoi qu’il en soit, le quinquennat devrait

permettre d’éviter une nouvelle cohabitation à

court terme. Mais, une telle situation peut

néanmoins se produire de nouveau à l’avenir,

Page 28: Fiche de Td Second Semestre 2013

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que ce soit en cas de démission ou de décès du

président de la République, ou bien en cas de

dissolution de l’Assemblée nationale.

Document 5 : comment est financée la campagne électorale ?

La campagne électorale est financée selon deux modalités :

un financement public, organisé par la loi organique du 6 novembre 1962, modifiée pour ces

aspects par les LO du 5 février 2001 et du 5 avril 2006, et par les lois organiques concernant le

financement des partis politiques de 1988, 1990, et 1995 ;

un financement privé, provenant en majorité des partis (cotisations), mais aussi de personnes

privées.

Chaque candidat doit respecter un certain nombre de règles :

La tenue d’un compte de campagne qui retrace très précisément l’origine des recettes et la nature

des dépenses engagées. Le candidat ne peut pas le gérer personnellement et doit nommer un

intermédiaire financier (mandataire). Depuis la loi organique du 5 avril 2006, le compte doit être

déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

(CNCCFP) – et non plus au Conseil constitutionnel – au plus tard le neuvième vendredi suivant le

second tour de scrutin, afin d’en vérifier la régularité ;

Le plafonnement des dépenses, dont le montant, actualisé tous les trois ans par décret, s’élevait

en 2007 à 16,16 millions d’euros pour les candidats au premier tour et à 21,59 millions pour ceux

du second tour. Un remboursement des frais de campagne est prévu. Pour les candidats présents au

1er tour, il s’élève au 20e du plafond des dépenses du premier tour pour ceux ayant obtenu moins

de 5 % des suffrages exprimés (808 000 euros en 2007) et, depuis 2001, à la moitié de ce plafond

pour ceux ayant recueilli plus de 5 % des voix (8,08 millions d’euros en 2007). Pour les candidats

présents au second tour, il s’élève à la moitié du plafond des dépenses du second tour (10,79

millions d’euros en 2007). Dans tous les cas, ces remboursements ne peuvent pas être plus

importants que les dépenses déclarées par les candidats ;

La limitation des dons des personnes privées à 4600 euros, tout don égal ou supérieur à 150 euros

devant être fait par chèque. En 1995, les dons des entreprises privées ont été interdits.

Des sanctions pécuniaires et pénales sont prévues en cas d’infraction. Ainsi un candidat ayant

dépassé le plafond des dépenses doit verser au Trésor public le montant du dépassement. Mais un

candidat à l’élection présidentielle ne peut pas être déclaré inéligible.

Document 6 : extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur le

problème des parrainages

Le régime actuel ne limite que faiblement le nombre de candidatures à l’élection présidentielle. Faut-

il, au nom du pluralisme, assumer la fonction tribunitienne de l’acte de candidature ? Faut-il au

contraire aller plus loin dans le filtrage pour clarifier la confrontation démocratique des projets,

compte tenu notamment des règles gouvernant le déroulement de la campagne électorale à la

télévision ?

• Quelle est la part qui revient, dans l’inflation des candidatures, aux règles de parrainage d’une part et

aux autres facteurs (contexte politique, règles de financement…) d’autre part ?

• Encore que le risque se concrétise rarement, la loi en vigueur peut avoir pour effet d’exclure de la

compétition présidentielle certains courants d’opinion qui trouvent un écho dans la vie de la nation

mais qui sont marginalement représentés au sein du collège des présentateurs. Y a-t-il là une anomalie

démocratique, ou l’incapacité à obtenir 500 signatures parmi 42000 élus, soit 1.2% du collège, est-elle

un critère légitime d’élimination ?

Page 29: Fiche de Td Second Semestre 2013

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• Quel est le sens de la « présentation » : soutien politique ? reconnaissance de la légitimité

démocratique ? simple manière de prendre acte de la nécessité d’une participation au débat ?

• Conviendrait-il d’augmenter le nombre de parrainages nécessaires ?

• Y a-t-il moyen d’éviter l’instrumentalisation stratégique de la procédure et les manœuvres diverses

auxquelles donne lieu la collecte des signatures, soit pour empêcher l’émergence d’une candidature,

soit pour la favoriser ?

• Une telle mesure devrait-elle s’accompagner de l’introduction d’un parrainage par les citoyens eux-

mêmes, à titre cumulatif ou à titre alternatif ? Un mécanisme de cette nature se heurterait-il à des

obstacles techniques (notamment en cas d’élection anticipée) ? Surtout, n’y aurait-il pas un risque de

décalage entre « candidats des élus » et « candidats des citoyens » et de transformation de la procédure

de parrainage en premier tour de l’élection présidentielle ? Les intérêts corporatistes y trouveraient-ils

un terrain favorable ?

• Les règles relatives à la publicité des présentations sont-elles satisfaisantes en termes d’efficacité et

de lisibilité ? Faut-il envisager d’en revenir au secret pour libérer les élus des pressions extérieures, au

risque de les soustraire au contrôle de leurs administrés ? Doit-on au contraire privilégier le principe

simple de la publication intégrale ?

• Faudrait-il plutôt changer de logique en modifiant la composition du collège des parrains, soit en le

limitant aux parlementaires, soit au contraire en l’élargissant ? Dans cette dernière hypothèse, la

recherche des signatures des intéressés resterait-elle une procédure appropriée ?

Document 7. Extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur la question

de la limitation du nombre des mandats du président de la république

Le passage au quinquennat rend l’hypothèse du troisième mandat moins théorique que par le passé.

Dans ce contexte, les termes du débat sont simples ; seule l’appréciation de leur poids relatif ne l’est

pas. Dans le sens du maintien de la règle actuelle :

- le primat de la liberté de l’électeur et la possibilité que la limitation du nombre de mandats prive la

nation de la personnalité la mieux à même de présider à ses destinées ;

- le risque d’un affaiblissement de l’autorité du Président de la République à la fin du second mandat.

Dans le sens de la limitation du nombre de mandats présidentiels :

- la nécessité de favoriser le renouvellement du personnel et des idées politiques ;

- le risque d’un essoufflement dans l’action après dix ans d’exercice des responsabilités suprêmes et le

décalage par rapport au rythme général de la société ;

- le souci de ne pas favoriser les dérives monarchiques.

S’il était décidé de s’engager dans la voie de la limitation du nombre de mandats, se poserait encore la

question de savoir s’il faut limiter à deux le nombre de mandats consécutifs ou le nombre total de

mandats.

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FICHE N° 3

L’EXECUTIF (II)

Le Premier ministre, le gouvernement, la cohabitation

I/ DOCUMENTS REPRODUITS 1. Message de François Mitterrand au parlement, 8 avril 1986 sur le fonctionnement des institutions en

cas de cohabitation

2. Intervention télévisée de Jacques Chirac du 14 juillet 1997

3. Effectif total des cabinets ministériel (site du premier ministre)

4. les gouvernements de la Ve république

5. Extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur la structure du gouvernement

6. Extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur la clarification des rôles entre le

président de la république et le premier ministre

Voir aussi la composition du gouvernement :

http://www.premier-ministre.gouv.fr/acteurs/gouvernement/

II/ bibliographie CARCASONNE (G.), « Ce que fait Matignon », Pouvoirs, n°68, 1994, pp. 31-41.

CARCASONNE (G.), « Les rapports du Président français et du Premier ministre », R.F.A.P., 1997,

n°83, pp. 397-409.

COHENDET (M.-A.), La cohabitation, leçons d’une expérience, PUF, Paris, 1993.

DAUGERON (B.) : « La cohabitation et ses faux-semblants : réflexions sur le présidentialisme

minoritaire », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger (RDP) 2004,

n°1, p. 67-109.

GICQUEL (J.), « De la cohabitation », Pouvoirs, n°49, pp. 69-79.

GUEDON (M.-J.), « Décrets et Constitution », in Mélanges Dupuis, LGDJ, Paris, 1997, pp. 125-138.

GUETTIER, Le président de la République, Que sais-je, PUF, 1995.

GUILLAUME (G.) les dysfonctionnements de la Vème

République, mélanges P. Gélard, Montchrestien,

1999.

LE GALL (J.), La 3ème

cohabitation : quelle pratique des institutions de la Vème

République, RDP,

2000, pp 101-120.

MASS0T (J.) L’arbitre et le capitaine, essai sur la responsabilité présidentielle, Flammarion, 1987.

MASSOT (J.) La Vème

République est-elle soluble dans la cohabitation ?, Mélanges P. Ardant, LGDJ,

1999

STIRN (B.), Les sources constitutionnelles du droit administratif, LGDJ, Coll. Systèmes, Paris, 1995.

La cohabitation, Pouvoirs n° 91, 1999.

Le Président de la République, documents réunis par C. Bigaut, la documentation française, 2000.

Page 31: Fiche de Td Second Semestre 2013

31/92

III/ NOTIONS A CONNAITRE

a) Chef de l’exécutif, du gouvernement, de la majorité parlementaire.

b) Pouvoir réglementaire, d’exécution des lois.

c) Pouvoir de nomination.

d) Fait majoritaire

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) Le couple Président - Premier ministre.

b) Comparez la conception du rôle du Premier ministre inscrite dans chacun des documents

reproduits.

* * * *

Document 1 : Message de François Mitterrand au parlement, 8 avril 1986

Mesdames et messieurs, je vous prie d'agréer,

en ce début de législature, les vœux que je

forme pour vous, aussi bien dans votre vie

personnelle que dans l'exercice de votre

mandat ; pour le Parlement, où j'ai siégé

longtemps et qui m'est toujours apparu comme

la pierre angulaire de notre démocratie ; pour

la France que nous représentons tous

ensemble.

Les Français avaient déjà choisi en 1981

l'alternance politique. Ils viennent en majorité

de marquer à nouveau, mais en sens contraire,

leur volonté de changement. Dépassons

l'événement que chacun jugera selon ses

convictions.

Réussir l'alternance aujourd'hui comme hier,

demain comme aujourd'hui, donnera à notre

pays l'équilibre dont il a besoin pour répondre,

dans le temps - et, je l'espère, à temps -, aux

aspirations des forces sociales qui le

composent. Mon devoir était d'assurer la

continuité de l'Etat et le fonctionnement

régulier des institutions. Je l'ai fait sans retard

et la nation sans crise. Le Premier ministre

nommé et le gouvernement mis en place sont

désormais en mesure de mener leur action.

Mais nos institutions sont à l'épreuve des faits.

Depuis 1958 et jusqu'à ce jour, le Président de

la République a pu remplir sa mission en

s'appuyant sur une majorité et un

gouvernement qui se réclamaient des mêmes

options que lui. Tout autre, nul ne l'ignore, est

la situation issue des dernières élections

législatives.

Pour la première fois la majorité parlementaire

relève de tendances politiques différentes de

celles qui s'étaient rassemblées lors de

l'élection présidentielle, ce que la composition

du gouvernement exprime, comme il se doit.

Devant un tel état de choses, qu'ils ont pourtant

voulu, beaucoup de nos concitoyens se posent

la question de savoir comment fonctionneront

les pouvoirs publics. A cette question, je ne

connais qu'une réponse, la seule possible, la

seule raisonnable, la seule conforme aux

intérêts de la nation : la Constitution, rien que

la Constitution, toute la Constitution.

Quelqu'idée qu'on en ait - et je n'oublie pas

moi-même ni mon refus initial, ni les réformes

qu'au nom d'un vaste mouvement d'opinion j'ai

naguère proposées et que je continue de croire

souhaitables -, elle est la loi fondamentale. Il

n'y a pas, en la matière, d'autre source du droit.

Tenons-nous en à cette règle.

Les circonstances qui ont accompagné la

naissance de la Ve République, la réforme de

1962 sur l'élection du chef de l'Etat au suffrage

universel et une durable identité de vues entre

la majorité parlementaire et le Président de la

République ont créé et développé des usages

Page 32: Fiche de Td Second Semestre 2013

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qui, au-delà des textes, ont accru le rôle de ce

dernier dans les affaires publiques. La novation

qui vient de se produire requiert de part et

d'autre une pratique nouvelle.

Je ne m'attarderai pas ici sur l'énoncé de

compétences présentes, je le suppose, à votre

esprit. Je rappellerai seulement que la

Constitution attribue au chef de l'Etat des

pouvoirs que ne peut en rien affecter une

consultation électorale où sa fonction n'est pas

en cause.

Fonctionnement régulier des pouvoirs publics,

continuité de l'Etat, intégrité du territoire,

respect des traités, l'article 5 désigne de la sorte

- et les dispositions qui en découlent précisent

- les domaines où s'exercent son autorité ou

bien son arbitrage. A quoi s'ajoute l'obligation

pour lui de garantir l'indépendance de la justice

et de veiller aux droits et libertés définis par la

Déclaration de 1789 et le préambule de la

Constitution de 1946.

Le gouvernement, de son côté, a pour charge,

aux termes de l'article 20, de déterminer et de

conduire la politique de la nation. Il assume,

sous réserve des prérogatives du Président de

la République et de la confiance de

l'Assemblée, la mise en œuvre des décisions

qui l'engagent devant les Français. Cette

responsabilité est la sienne.

Cela étant clairement établi, Président et

gouvernement ont à rechercher, en toutes

circonstances, les moyens qui leur permettront

de servir au mieux et d'un commun accord les

grands intérêts du pays.

Mais, mesdames et messieurs, qu'en est-il du

Parlement ? Pouvoir législatif, il garde et doit

garder la plénitude de ses droits. Certes,

l'article 38 autorise les ordonnances et la

plupart des gouvernements, y compris dans la

période récente, ont eu recours à cette

procédure.

Aussi n'ai-je pas cru devoir en refuser la

faculté au gouvernement actuel, après lui avoir

rappelé cependant que de grandes réformes de

la précédente législature, comme la

décentralisation, les nationalisations, les droits

des travailleurs, les nouvelles libertés,

l'aménagement du temps de travail, avaient

suivi la voie législative normale.

Je pense donc que les ordonnances, dont j'ai

déjà dit qu'elles ne pourraient revenir sur les

acquis sociaux, devront être peu nombreuses et

les lois d'habilitation suffisamment précises

pour que le Parlement et le Conseil

constitutionnel se prononcent en connaissance

de cause. J'ai fait part de cette observation à M.

le Premier ministre, lorsque m'ont été présentés

les deux projets de loi qui seront examinés

demain par le Conseil des ministres.

Elle me paraît d'autant plus nécessaire que la

combinaison des ordonnances et de l'article 49,

3e alinéa, de la Constitution risquerait en fin de

compte de réduire à l'excès la délibération des

assemblées.

Mesdames et messieurs, s'il est une constante

depuis plusieurs décennies pour tout

gouvernement et toute majorité, c'est bien

d'avoir à faire face à l'une des plus profondes

révolutions scientifiques et techniques des

temps modernes. La tâche de votre assemblée

sera de contribuer à son tour à en dominer les

effets.

Parachever le redressement économique qui a

connu d'importants succès dans les années

passées exigera encore beaucoup d'efforts et de

ténacité. Nul ne s'en tiendra quitte tant que le

chômage restera la pire de nos plaies sociales.

Souhaitons que la bonne santé de notre

économie et l'action persévérante de la

solidarité nationale offrent une base solide aux

politiques qui seront entreprises.

Sachons également qu'il n'y aura de

redressement économique sans justice sociale

et que de cette justice ne peut, ne doit être

exclu aucun de ceux qui contribuent, par leur

travail et leurs capacités créatrices, à

l'expansion et à la grandeur de notre pays.

Le rayonnement de la France dépend plus

qu'on ne croit de sa façon d'être à l'égard des

siens. Ce rayonnement, qui nous vaut d'être

reconnus parmi les grands peuples de la Terre,

nous le servirons, unis et résolus, en continuant

d'agir là où l'Histoire nous fixe rendez-vous :

l'Europe, le droit des peuples à disposer d'eux-

mêmes, le développement des pays pauvres, la

paix.

Vive la République ! Vive la France !

Document 2 : intervention télévisée de Jacques Chirac 14 juillet 1997

Page 33: Fiche de Td Second Semestre 2013

33/92

A. Chabot - (...). Comment qualifiez-vous cette

cohabitation ? On se souvient qu'en 1986, vous

étiez de l'autre côté, vous étiez Premier

ministre. Cela avait commencé effectivement

difficilement, un 14 juillet, par le refus du

Président de la République, de signer des

ordonnances. On avait dit " cohabitation dure

". Après, avec Edouard Balladur, on avait dit "

cohabitation courtoise ". Alors quel est

l'adjectif que vous employez, pour qualifier la

cohabitation avec Lionel JOSPIN ?

le Président - Je crois, d'abord, qu'il faut

attendre un peu, pour voir comment les choses

se déroulent. La courtoisie, naturellement, va

de soi. Mais ce n'est pas le fond du problème.

Dans nos institutions, dans la Constitution,

dans leur pratique, il y a des rôles à peu près

définis entre le Président de la République et le

Gouvernement. Le Président de la République

ayant, notamment, des responsabilités pour ce

qui concerne tous les grands aspects essentiels

de la vie internationale et interne de la Nation.

Nous avons pour objectif d'assurer ce que je

disais tout à l'heure, à la fois un renforcement

de la cohésion nationale, sociale et une

adaptation, une modernisation de notre pays

qui est indispensable et qui ne peut s'obtenir

que par un retour à plus de liberté des uns et

des autres, notamment dans le domaine

économique. Si ces objectifs sont bien ceux du

Gouvernement, alors il n'y aura pas de

problème, naturellement il le fera à sa manière,

avec ses convictions et sa différence par

rapport à l'ancien Gouvernement. Je respecte

cela. Dans cette hypothèse, naturellement, ce

serait, puisque vous voulez que je la

caractérise, une " cohabitation constructive ".

A. Chabot - Est-ce que vous vous calez un peu

sur la position de François Mitterrand en

quelque sorte, c'est-à-dire les institutions, rien

que les institutions ?

le Président - Oui, je crois que M. Mitterrand

avait parfaitement défini, mais enfin, il s'était

contenté de lire la Constitution et d'affirmer

qu'il l'appliquerait, je crois qu'il avait dit : "

toute la Constitution et rien que la Constitution

".

P. Poivre d'Arvor - Mais cette fois-ci, est-ce

que la fonction présidentielle n'est pas un petit

peu affaiblie, malgré que ce soit vous qui ayez

décidé cette dissolution ?

le Président - Pourquoi ? Parce que je serais

plus faible qu'un autre ?

P. Poivre d'Arvor - Jusqu'alors, cela allait

jusqu'au terme des mandats qui avaient été

décidés par la Constitution.

le Président - Cela ne modifie en rien la nature

de la cohabitation.

A. Chabot - Alors, autre qualificatif, comment

sont vos relations avec Lionel Jospin et est-ce

que votre jugement sur l'homme, que vous

connaissez depuis peu, a changé ?

le Président - Je n'ai pas pour habitude

d'inscrire dans un contexte d'intimité les

relations entre le Président de la République et

le Premier ministre. Je suis persuadé que c'est

également son sentiment. Il est le Premier

ministre. Il assume ses fonctions. J'assume les

miennes. Et je souhaite que ce soit dans

l'intérêt de la France.

A. Chabot - Vous aviez dit, l'autre jour, que les

relations personnelles avec vous étaient faciles.

Est-ce que vous dites la même chose ?

le Président - Je ne suis pas quelqu'un

d'agressif. Je n'ai pas noté, non plus, chez lui

une agressivité particulière. Par conséquent,

cela se passe entre gens, dirai-je, de bonne

compagnie.

A. Chabot - Est-ce qu'on peut savoir un peu

comment vous travaillez ?

le Président - Cela n'enlève rien aux

conceptions, aux convictions de chacun.

A. Chabot - Comment travaillez-vous

ensemble ? Le Premier ministre a indiqué, par

exemple, que dernièrement au Sommet

d'Amsterdam, vous aviez dit que la France

avait pris un engagement fort sur le Pacte de

stabilité, que vous tiendriez cet engagement. Il

vous a fait part de ses préoccupations sociales.

Est-ce qu'il y a des dialogues aussi simples et

aussi francs que cela ?

le Président - Tout à fait. Vous savez, j'avais

noté que le Président de la République, de par

la Constitution cette fois-ci, je crois que c'est

son article 5, est, entre autres choses, garant du

respect des traités. Un traité doit être respecté.

P. Poivre d'Arvor - Cela vous paraissait normal

qu'il annonce lui-même le fait qu'il avait été

nommé Premier ministre, désigné par vous-

même, sur le perron de l'Elysée ?

Page 34: Fiche de Td Second Semestre 2013

34/92

le Président - Je dirai que c'est un détail.

Chacun a bien imaginé qu'ayant fait savoir que

je l'appelais, ce n'était pas simplement pour le

consulter.

P. Poivre d'Arvor - Est-ce que vous ne vous

sentez pas un petit peu seul, de temps en temps

le mercredi, en Conseil des ministres, au

milieu de vos adversaires ou anciens

adversaires ?

le Président - C'est une situation qui ne

m'émeut pas particulièrement.

P. Poivre d'Arvor - La première fois, cela n'a

pas été un petit peu plus difficile ?

le Président - Non. Cela s'est passé, là-aussi,

dans la compréhension.

(...)

P. Poivre d'Arvor - Dans les ministres que

vous retrouvez chaque mercredi, il y a deux

communistes. Est-ce que vous trouvez que

c'est une incongruité dans ce pays occidental ?

le Président - Je souhaite que l'on parle des

problèmes -et ils sont nombreux- auxquels

nous sommes confrontés, je n'ai pas de

jugement à porter sur la façon dont M. Jospin a

constitué son Gouvernement. J'étais attentif à

certains postes.

P. Poivre d'Arvor - Lesquels ?

le Président - Tout naturellement et

traditionnellement, la défense et les affaires

étrangères, la justice aussi. Pour ce qui

concerne les autres postes, je n'ai pas de

jugement à apporter sur les choix de M. Jospin.

A. Chabot - Justement, quelle est votre

expression favorite ? S'agit-il de : domaine

réservé ou domaine partagé, comme l'utilisait

l'ancien Président sous la cohabitation ?

le Président - Je ne crois pas qu'il y ait de

domaine réservé ou un domaine partagé. La

Constitution prévoit des choses et ces choses

donnent, notamment, une prééminence, et je

dirais, donnant un peu le dernier mot au

Président de la République. Je vous l'ai dit,

tout à l'heure, en parlant des traités, j'aurais pu

parler de la même façon de l'indépendance

nationale, de l'intégrité, etc. Je veux bien

revenir sur la conception que je me fais de la

cohabitation, mais ce n'est pas un domaine

réservé. Le Gouvernement a aussi ses

responsabilités naturellement.(...)

Document 3 : effectif total des cabinets ministériels

Lors de la formation de son Gouvernement, le Premier ministre, François Fillon, a donné des

instructions à ses ministres, en accord avec le président de la République, pour que la taille

des cabinets ministériels soit contenue dans des limites raisonnables, afin de favoriser un

travail d’équipe fructueux.

Après composition de ces cabinets, l’effectif total s’établit à ce jour à un total de 537

membres, tous cabinets confondus.

Document 4 : les gouvernements de la Ve république

présidence gouvernements

Charles de Gaulle

Gouvernement Michel Debré 08/01/1959 - 14/04/1962

Gouvernement Georges Pompidou I 14/04/1962 - 28/11/1962

Gouvernement Georges Pompidou II 28/11/1962 - 08/01/1966

Gouvernement Georges Pompidou III 08/01/1966 - 01/04/1967

Gouvernement Georges Pompidou IV 06/04/1967 - 31/05/1968

Gouvernement Georges Pompidou IV remanié 31/05/1968 - 10/07/1968

Gouvernement Maurice Couve de Murville 10/07/1968 - 20/06/1969

Georges Pompidou Gouvernement Jacques Chaban-Delmas 20/06/1969 - 05/07/1972

Page 35: Fiche de Td Second Semestre 2013

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Gouvernement Pierre Messmer I 05/07/1972 - 28/03/1973

Gouvernement Pierre Messmer II 02/04/1973 - 27/02/1974

Gouvernement Pierre Messmer III 27/02/1974 - 27/05/1974

Valéry Giscard d'Estaing

Gouvernement Jacques Chirac 27/05/1974 - 25/08/1976

Gouvernement Raymond Barre I 25/08/1976 - 29/03/1977

Gouvernement Raymond Barre II 29/03/1977 - 31/03/1978

Gouvernement Raymond Barre III 03/04/1978 - 13/05/1981

François Mitterrand

Gouvernement Pierre Mauroy I 21/05/1981 - 22/06/1981

Gouvernement Pierre Mauroy II 22/06/1981 - 22/03/1983

Gouvernement Pierre Mauroy III 22/03/1983 - 17/07/1984

Gouvernement Laurent Fabius 17/07/1984 - 20/03/1986

Gouvernement Jacques Chirac * 20/03/1986 - 10/05/1988

Gouvernement Michel Rocard I 10/05/1988 - 22/06/1988

Gouvernement Michel Rocard II 23/06/1988 - 15/05/1991

Gouvernement Edith Cresson 15/05/1991 - 02/04/1992

Gouvernement Pierre Bérégovoy 03/04/1992 - 29/03/1993

Gouvernement Édouard Balladur * 29/03/1993 - 11/05/1995

Jacques Chirac

Gouvernement Alain Juppé I 07/05/1995 - 07/11/1995

Gouvernement Alain Juppé II 07/11/1995 - 02/06/1997

Gouvernement Lionel Jospin * 02/06/1997 - 07/05/2002

Gouvernement Jean-Pierre Raffarin I 07/05/2002 - 17/06/2002

Gouvernement Jean-Pierre Raffarin II 17/06/2002 - 30/03/2004

Gouvernement Jean-Pierre Raffarin III 31/03/2004 - 30/05/2005

Gouvernement Dominique de Villepin 30/05/2005 -15/05/2007

Nicolas Sarkozy Gouvernement François Fillon I 18/05/2007 - 18/06/2007

Gouvernement François Fillon II 19/06/2007 - ...

Document 5 : Extrait d’un document de travail sur la structure du gouvernement

Est-il opportun de limiter pour l’avenir le nombre de membres du gouvernement ?

• Si oui, la fixation du nombre – et le cas échéant du rang – des ministres doit-elle être fixée au niveau

constitutionnel ?

• Ne relève-t-elle pas plutôt de la loi organique ?

• Faut-il laisser hors du champ de cette limitation les ministres délégués et secrétaires d’Etat ?

• Cette limitation peut-elle ne concerner que les ministres chargés des fonctions régaliennes ?

• Serait-il envisageable et utile de fixer au niveau d’une loi organique non seulement le nombre

maximal, mais encore les principales attributions des ministres de plein exercice ?

• Le principe de la parité hommes/femmes devrait-il, le cas échéant, être pris en compte par les

dispositions normatives afférentes à la structure du gouvernement ?

Document 6 : extrait d’un document de travail du comité constitutionnel sur la

clarification des rôles entre le président de la république et le premier ministre

Faut-il prévoir dans la Constitution que le Président de la République détermine la politique de la

nation ?

Page 36: Fiche de Td Second Semestre 2013

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- Une telle modification de l’article 20 de la Constitution devrait-elle conduire à modifier également

l’article 5, qui fait du Président de la République un arbitre ?

- Le Premier ministre aurait-il alors pour mission de conduire cette politique ? de la mettre en œuvre ?

ou seulement de coordonner l’action des ministres ?

- Ne faudrait-il pas modifier aussi l’article 21 de la Constitution, aux termes duquel le Premier

ministre dirige l’action du Gouvernement et est responsable de la défense nationale ?

• Le Président de la République doit-il pouvoir mettre fin aux fonctions du Premier ministre sans que

celui-ci lui présente formellement la démission de son gouvernement, comme le prévoit actuellement

l’article 8 de la Constitution ?

• Le Président de la République peut-il se passer de « l’écran » du Premier ministre face aux difficultés

quotidiennes du gouvernement du pays ? Ne risque-t-il pas de mettre à mal son autorité ?

• Que se passerait-il en cas de cohabitation ?

- En inscrivant dans la Constitution que le Président de la République détermine (et conduit ?) la

politique de la nation, ne risque-t-on pas de rendre la cohabitation impossible, le Premier ministre issu

d’une majorité parlementaire hostile au Président de la République n’ayant plus la charge de la

politique de la nation ? Faut-il alors craindre une crise de régime ?

- Faut-il prendre des mesures pour rendre cette hypothèse moins probable qu’elle ne l’est aujourd’hui,

notamment en cas de démission ou de décès du Président de la République avant le terme de son

mandat ?

• Le Président de la République peut-il déterminer la politique de la nation sans que soient introduites

de nouvelles modalités de mise en jeu de la responsabilité politique du chef de l’Etat ?

- Si, en particulier, l’Assemblée nationale renversait le Gouvernement, quelles en seraient les

conséquences pour le Président de la République dont le Gouvernement procéderait directement ?

- Faut-il le contraindre à se présenter à nouveau devant le suffrage universel pour restaurer sa

légitimité ?

- Faut-il prévoir une dissolution automatique de l’Assemblée nationale pour que le peuple tranche la

question ?

- En cas d’échec de la dissolution pour le chef de l’Etat, faut-il le contraindre à se retirer ?

- Un tel dispositif, qui introduirait un mécanisme de responsabilité directe devant le peuple, n’aurait-il

pas un caractère plébiscitaire ?

Page 37: Fiche de Td Second Semestre 2013

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FICHE N° 4

L’EXECUTIF (III)

La responsabilité des gouvernants

I/ DOCUMENTS REPRODUITS 1. Discours du garde des sceaux concernant le projet de loi constitutionnel au Sénat

2. La Haute Cour et la Cour de Justice de la république présentée par l’assemblée nationale

3. Hervé Morin plaide pour une réforme du statut pénal du président, Nouvel observateur, 29 octobre

2007

4. Note de synthèse du Sénat relative à la responsabilité des gouvernants

II/ bibliographie AUVRET (P.), « La responsabilité du Chef de l’Etat sous la V

ème République », R.D.P., 1988, pp. 77-

117.

CARCASSONNE (G.), « Typologie des cabinets », Pouvoirs, n°36, 196, pp. 85-91.

CHENAT (B.), « Le ministre, chef d'une administration », Pouvoirs, n°36, 1986, pp. 79-84.

FOYER (J.), « Les ministres entre eux », Pouvoirs, n°36, pp. 102-116.

LIMOUZY (J.), « Les rapports du ministre avec le Parlement et les partis », Pouvoirs, n°36, pp. 1986,

pp. 93-101.

MAUS (D.), « Démissions et révocations des ministres sous la V ème

République », Pouvoirs,

n°36,1986, pp. 117-134.

QUERMONNE (J.-L.), « Les cabinets ministériels », Pouvoirs, n°68, 1994, pp. 61-76.

SEGUR (P.) Gouvernants : quelle responsabilité ?, L'Harmattan, 2001

III/ NOTIONS A CONNAITRE

a) Hiérarchie, incompatibilités et solidarité gouvernementale.

b) Ministre d’Etat, ministres, ministre délégué, secrétaire d’Etat.

c) Le Conseil des Ministres, conseil de cabinet.

d) L’ordre du jour du conseil des Ministres.

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) Responsabilité personnelle et responsabilité collégiale.

b) La responsabilité pénale des ministres sous la Vème

République.

c) Gouvernement et partis politiques.

d) Le « dédoublement fonctionnel » des ministres.

Page 38: Fiche de Td Second Semestre 2013

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e) L’organisation du travail gouvernemental.

Document 1 : discours du garde des sceaux concernant le projet de loi constitutionnelle

au Sénat

Responsabilité pénale du Président de la

République

Discours du garde des Sceaux concernant le

Projet de loi constitutionnelle au Sénat

Monsieur le Président,

Monsieur le Rapporteur,

Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

Le régime de la responsabilité du chef de l’Etat

interpelle tous les démocrates, quelle que soit

leur époque. Au vieux principe monarchique

selon lequel « le Roi ne peut mal faire », la IIe

République avait instauré un régime de

responsabilité politique très large du Président,

sa constitution précisant que celui-ci est

responsable des « actes du gouvernement et de

l'administration ».

Depuis les lois constitutionnelles de 1875, la

responsabilité politique du Chef de l’Etat ne

peut être mise en cause devant les assemblées

parlementaires à raison des actes qu’il

accomplit en cette qualité. Le Président n’est

responsable politiquement que devant le

peuple qui lui a donné son mandat et peut

choisir de ne pas lui renouveler.

La tradition constitutionnelle conduit dans le

même temps à ce que la responsabilité pénale

du Chef de l’Etat ne puisse être mise en jeu

qu’en cas de « haute trahison ». La

Constitution du 4 octobre 1958 dispose, dans

son article 68, que « le Président de la

République (…) ne peut être mis en accusation

que par les deux assemblées statuant par un

vote identique au scrutin public et à la

majorité absolue des membres les composant ;

il est jugé par la Haute Cour de Justice. ».

Ainsi rappelées, ces règles posées par le Titre

IX de notre Constitution semblent simples.

Elles sont pourtant apparues, à l’expérience,

sources d’ambiguïtés.

Par sa décision du 22 janvier 1999, relative à la

Cour pénale internationale, le Conseil

constitutionnel a interprété l’article 68 comme

instituant un privilège de juridiction. Il a en

effet précisé que pendant la durée de ses

fonctions, la responsabilité pénale du Président

de la République ne peut être mise en cause

que devant la Haute Cour de Justice selon les

modalités fixées par le même article.

Ainsi, pour le juge constitutionnel, la Haute

Cour a compétence pour connaître de

l’ensemble de la responsabilité pénale du

Président de la République, y compris

s’agissant des actes antérieurs ou détachables

de l’exercice de ses fonctions. Le Chef de

l’Etat bénéficie d’un privilège de juridiction de

portée générale.

Par son arrêt du 10 octobre 2001, la Cour de

cassation a confirmé que le Président de la

République, hors le cas de haute trahison, ne

peut être poursuivi devant aucune juridiction

pendant l’exercice de son mandat et ce y

compris à raison de faits antérieurs à son

élection ou sans rapport avec l’exercice de ses

fonctions. Pour autant, elle a estimé que le

Chef de l’Etat ne bénéficiait pas d’un privilège

de juridiction.

Elle a en effet jugé que : « la Haute Cour de

justice n'étant compétente que pour connaître

des actes de haute trahison du Président de la

République commis dans l'exercice de ses

fonctions, les poursuites pour tous les autres

actes devant les juridictions pénales de droit

commun ne peuvent être exercées pendant la

durée du mandat présidentiel, la prescription

de l'action publique étant alors suspendue ».

Pour l’autorité judiciaire, le Chef de l’Etat est

donc passible, hors le cas de haute trahison,

des tribunaux de droit commun, mais il

bénéficie d’une inviolabilité temporaire

pendant la durée de son mandat, la prescription

étant suspendue pendant le même temps.

Ainsi, d’une part, les deux juridictions

s’accordent sur l’essentiel : le Président de la

République, hors le cas de haute trahison, ne

saurait, pendant son mandat, être mis en cause

devant aucune juridiction pénale de droit

commun. Mais, d’autre part, une divergence

d’analyse révèle un doute sur la portée exacte

des dispositions de l’article 68 de la

Constitution. Par ailleurs, les termes de cet

article nécessitent d’être précisés, notamment

ceux de « haute trahison ».

Page 39: Fiche de Td Second Semestre 2013

39/92

Toutes ces considérations ont conduit le

Président de la République, conformément à

l’engagement exprimé devant l’ensemble de

nos concitoyens, à demander à une

commission présidée par le Professeur Pierre

AVRIL, de « réfléchir et [lui] faire, le cas

échéant, des propositions sur le statut pénal du

Président de la République ».

Cette commission a proposé une révision

complète du Titre IX de la Constitution,

procédant à une réécriture intégrale des articles

67 et 68. Le Chef de l’Etat et le Gouvernement

ont choisi de faire leurs les propositions de la

commission dont les principaux éléments

peuvent être résumés comme suit :

réaffirmation du principe d’immunité du

Président pour les actes accomplis en cette

qualité,

inviolabilité durant le mandat pour les

autres actes avec cependant la possibilité, de

destitution « en cas de manquement à ses

devoirs manifestement incompatible avec

l’exercice de son mandat ».

L’article unique du projet de loi qui vous est

présenté modifie l’intitulé du Titre IX actuel de

la Constitution, « la Haute Cour de Justice »,

remplacé par « la Haute Cour ». Ce Titre est

toujours composé des articles 67 et 68, mais

ceux-ci sont totalement ré-écrits.

L’article 67 nouveau pose les règles de fond

applicables à la responsabilité du chef de

l’Etat. Il est constitué de trois alinéas.

Le premier réaffirme le principe traditionnel

d’immunité du Président de la République

pour les actes accomplis en cette qualité. La

rédaction ainsi retenue fait disparaître

l’ambiguïté de l’expression « dans l’exercice

de ses fonctions ». Ainsi, pour tous les actes

accomplis par le Chef de l’Etat pendant la

durée de son mandat, l’irresponsabilité est la

règle.

Deux limites sont toutefois posées à ce

principe : celle qui résulte de l’instauration, par

l’article 68 nouveau, d’une procédure de

destitution et celle qui procède de la

compétence, déjà reconnue à l’article 53-2 de

la Constitution, de la Cour pénale

internationale.

Le second alinéa est consacré à tous les autres

actes du Président de la République, c’est à

dire à ceux accomplis pendant la durée de son

mandat, mais sans lien avec celui-ci et ceux

commis antérieurement à son élection. Il pose

un principe d’inviolabilité de portée générale.

L’Assemblée Nationale a adopté, avec l’accord

du Gouvernement, deux amendements

précisant la portée de ce principe.

Le premier amendement permet d’expliciter

que, durant son mandat, toute action à

l’encontre du Président est exclue, quels qu’en

soient l’objet ou la finalité, devant toute

juridiction y compris civile ou autorité

administrative.

Le Président ne peut notamment pas être requis

de témoigner, ce qui ne fait nullement obstacle

à un témoignage spontané. De manière

générale, aucun acte de procédure ne peut être

imposé au Chef de l’Etat, mais il lui est

toujours loisible d’y répondre.

Le second amendement consiste à préciser que

les délais de prescription et de forclusion sont

suspendus pendant la durée du mandat.

Le projet de texte proposé par la commission

Avril comportait à cet alinéa un renvoi au

législateur organique afin qu’il définisse les

conditions dans lesquelles doit se réaliser le

retour à l’application du droit commun à

l’issue du mandat. Il est toutefois apparu au

Gouvernement que la détermination de ces

conditions constituait un point fondamental de

la réforme qui méritait de figurer dans la

Constitution elle-même. C’est la raison pour

laquelle ce renvoi a été remplacé par un

troisième alinéa qui fixe à un mois après la

cessation des fonctions le délai à l’issue duquel

prend fin la suspension des procédures et des

prescriptions.

L’article 68 nouveau est sensiblement plus

novateur. Composé de six alinéas, il introduit

dans nos institutions une procédure de

destitution.

Cette destitution du Président de la République

ne pourra, compte tenu du rôle éminent qui est

le sien, être décidée qu’« en cas de

manquement à ses devoirs manifestement

incompatible avec l’exercice de son mandat ».

La notion de « haute trahison », aux contours

incertains, est abandonnée au profit d’une

expression qui, sans qualifier ce manquement,

ni par référence à sa nature, ni par le degré de

sa gravité, consacre un critère tenant

exclusivement au fait que ce manquement

Page 40: Fiche de Td Second Semestre 2013

40/92

serait incompatible avec la poursuite du

mandat, c’est-à-dire, avec la dignité de la

fonction. Le recours à l’adverbe «

manifestement » marque que la reconnaissance

de ce manquement ne saurait procéder d’une

logique partisane et qu’elle doit transcender les

clivages politiques.

Le caractère unique de cette responsabilité, qui

suppose l’appréciation du comportement d’un

homme au regard des exigences de ses

fonctions, imposait qu’elle fut mise en cause

devant un organe non juridictionnel et qui soit

doté d’une légitimité démocratique égale à

celle du Chef de l’Etat. C’est ce qui a conduit à

conférer ce pouvoir au Parlement, siégeant,

dans son intégralité, en Haute Cour.

La procédure est aménagée en deux temps. La

proposition de réunion de la Haute Cour doit

d’abord être successivement adoptée par

chacune des deux assemblées. La Haute Cour,

présidée par le président de l’Assemblée

nationale, statue ensuite par un vote à bulletins

secrets.

Cette procédure a été améliorée sur deux

points très importants par l’Assemblée

Nationale.

D’abord, afin de d’éviter les dérives partisanes,

les votes intervenant en application de ce

dispositif devront être acquis à la majorité

qualifiée des deux tiers. Cette modification est

parfaitement en adéquation avec l’objectif

poursuivi, qui est de sanctionner des

comportements tout à fait incompatibles avec

l’exercice de la fonction présidentielle,

indépendamment de toute logique politicienne.

Ensuite, toute délégation de vote est désormais

interdite. La mise en œuvre de la procédure

suppose en effet une appréciation délicate de la

compatibilité de faits avec l’exercice de la

fonction présidentielle.

Une telle appréciation ne peut être que

personnelle et ne saurait se faire par

procuration. Au surplus, la gravité des

conséquences qui pourraient s’attacher à la

mise en œuvre de cette procédure implique que

chacun soit amené à se déterminer en

conscience lors des deux phases de la

procédure.

L’Assemblée Nationale a également modifié,

avec l’accord du Gouvernement, les

conséquences qui s’attachent à la décision

conjointe des deux chambres de réunir la

Haute Cour. Il est en effet apparu difficile de

prévoir une période suspension du Président de

la République pendant le déroulement de la

procédure parlementaire. Si cette procédure ne

devait pas aboutir à la destitution du Chef de

l’Etat, son autorité, après une période de

suspension, serait affaiblie.

Dans le même temps, il n’est pas souhaitable

que le Président de la République demeure trop

longtemps sous la menace d’une éventuelle

destitution. C’est pourquoi il est apparu

nécessaire de réduire de deux à un mois le

délai imparti à la Haute Cour pour se

prononcer.

La décision de la Haute Cour, de destituer, ou

pas, le Président est d’effet immédiat. En cas

de destitution, il est définitivement mis fin au

mandat en cours du Président, qui redevient

par le même fait un justiciable ordinaire.

Enfin, l’article 68 habilite le législateur

organique à fixer ses conditions d’application.

Celle-ci pourra notamment, et conformément

aux propositions de la commission Avril,

prévoir des règles relatives à la recevabilité des

propositions de résolutions tendant à la réunion

de la Haute Cour, imposer des délais, afin que

ne dure trop longtemps la période de mise en

cause du chef de l’Etat, ainsi qu’imposer des

précautions afin que celui-ci puisse assurer sa

défense.

Le texte ne prévoyant pas de disposition

transitoire ou d’application différée, les règles

qu’il fixe à l’article 67 trouveront à s’appliquer

au mandat en cours. Celles relatives à la Haute

Cour deviendront applicables dès l’entrée en

vigueur de la loi organique nécessaire à sa

mise en œuvre.

Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

Le projet de loi constitutionnelle qui vous est

présenté est inspiré par la volonté de dissocier

les logiques judiciaire et politique. De ce fait,

il confie aux représentants du peuple, et pas à

une juridiction spéciale, la responsabilité de

destituer, le cas échéant, le Chef de l’Etat élu

au suffrage universel direct. Il ne s’agit

nullement là de changer la nature du régime ni

même d’en modifier l’équilibre. Au contraire,

ce choix s’inscrit dans le prolongement des

constituants de 1875, 1946 et 1958. Il s’agit,

pour l’essentiel, d’apporter des précisions

nécessaires quant à l’irresponsabilité du Chef

Page 41: Fiche de Td Second Semestre 2013

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de l’Etat et de consacrer la simple suspension

de la prescription en ce qui concerne son

inviolabilité.

Le dispositif proposé par le Gouvernement a

été amélioré de manière consensuelle par

l’Assemblée Nationale, sans que son équilibre

ne soit remis en cause.

Certains parlementaires se sont interrogés sur

l’opportunité de présenter une réforme

constitutionnelle sur cette question à la fin de

la législature. Permettez-moi cependant de

souligner son intérêt.

D’abord, il s’agit là d’un engagement du

Président de la République pris lors de la

campagne présidentielle. Chacun a à cœur de

montrer que les engagements électoraux de

notre majorité ont vocation à être respectés.

Ensuite, cette réforme clarifie un point de droit

et supprime, dès lors, une polémique politique

stérile. Elle permettra donc aux Français de se

prononcer, en conscience, sur les vrais enjeux

de la campagne présidentielle.

Enfin, ce projet est l’occasion de montrer

qu’au-delà de nos clivages, nous partageons un

même respect pour la fonction présidentielle et

la règle du jeu démocratique.

Pour toutes ces raisons, je vous invite à adopter

ce projet de loi constitutionnelle.

Document 2 : la Haute Cour et la Cour de Justice présentée par l’assemblée nationale

La Haute Cour

La Haute Cour succède à la Haute Cour de

justice - tribunal pénal particulier compétent

pour juger le Président de la République -

créée par les lois constitutionnelles de la

Troisième République.

Selon les dispositions initiales de la

Constitution le tribunal était composé de

membres élus, en leur sein et en nombre égal,

par l'Assemblée nationale et par le Sénat.

L'ordonnance n° 59-1 du 2 janvier 1959

portant loi organique sur la Haute Cour de

justice précisait que les 24 juges étaient élus

pour la durée de leur mandat parlementaire et

qu'ils prêtaient serment devant l'assemblée

dont ils étaient membres.

L'article 68 de la Constitution disposait

initialement que le Président de la République

n'était responsable des actes accomplis dans

l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute

trahison, ne pouvant être mis en accusation que

par les deux assemblées statuant par un vote

identique au scrutin public et à la majorité

absolue des membres les composant, et étant

jugé par la Haute Cour de justice.

Dans une décision n° 98-408 DC du 22 janvier

1999 - Traité portant Statut de la Cour pénale

internationale (document sur le site du

Conseil), le Conseil constitutionnel a indiqué

"qu'il résulte de l'article 68 de la Constitution

que le Président de la République, pour les

actes accomplis dans l'exercice de ses

fonctions et hors le cas de haute trahison,

bénéficie d'une immunité ; qu'au surplus,

pendant la durée de ses fonctions, sa

responsabilité pénale ne peut être mise en

cause que devant la Haute Cour de justice,

selon les modalités fixées par le même

article..."

Si les deux assemblées du Parlement devaient

adopter dans les mêmes termes une résolution

portant mise en accusation du Président de la

République, une commission composée de

5 magistrats de la Cour de cassation avait à

instruire les faits incriminés et à décider du

renvoi de l'affaire devant la Haute Cour de

justice.

Les débats devant cette Cour devaient suivre

les règles du code de procédure pénale en

matière criminelle. Toutefois, l'arrêt de la

Haute Cour de justice n'était susceptible ni

d'appel, ni de pourvoi en cassation.

La révision constitutionnelle du 23 février

2007 (Loi constitutionnelle n° 2007-238 du 23

février 2007 portant modification du titre IX de

la Constitution publiée au Journal Officiel du

24 février 2007 [sur le site Légifrance]) a

profondément transformé le régime de

responsabilité du Président de la République

qui se traduisait antérieurement par une

irresponsabilité de principe, sauf le cas de

haute trahison, et avait donné lieu à des

interprétations divergentes du Conseil

constitutionnel (décision n° 98-408 DC du 22

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42/92

janvier 1999) et de la Cour de cassation (Cass.

plén. 10 octobre 2001 M. Breisacher).

L’article 67 de la Constitution prévoit

désormais que le Président de la République

est irresponsable pour les actes accomplis en

cette qualité sauf dans les hypothèses de

compétence de la Cour pénale internationale

(art. 53-2) ou de la Haute Cour (art. 68). En

outre, s’agissant des actes accomplis avant le

début de son mandat ou dépourvus de lien avec

celui-ci, le Président de la République ne peut,

durant son mandat et devant aucune juridiction

ou autorité administrative française, être requis

de témoigner non plus que de faire l’objet

d’une action, d’un acte d’information,

d’instruction ou de poursuite. Cette

inviolabilité temporaire couvre ainsi tant le

champ civil et administratif que le champ

pénal, la réparation et la sanction. En

contrepartie, il est expressément prévu que tout

délai de prescription et de forclusion est

suspendu et que les instances et procédures

auxquelles il est ainsi fait obstacle pourront

reprendre un mois après la cessation des

fonctions du Président de la République.

L’article 68 institue une procédure originale de

destitution du Président de la République en

cas de manquement à ses devoirs

manifestement incompatible avec l’exercice de

son mandat, notion qui n’est définie ni par la

nature, ni par la gravité du manquement mais

par son caractère inconciliable avec la

poursuite du mandat. Afin d’en souligner le

caractère politique, la destitution est prononcée

par le Parlement tout entier réuni en Haute

Cour, instance qui remplace la Haute Cour de

justice.

La procédure de saisine et de décision de la

Haute Cour obéit à des règles particulièrement

strictes et exigeantes. La Haute Cour doit être

saisie par une résolution adoptée par chacune

des deux assemblées. Une fois réunie, elle se

prononce à bulletins secrets sur la destitution

dans un délai d’un mois. Les décisions de

réunion de la Haute Cour et de destitution

doivent être prises à la majorité des deux tiers

des membres composant l’assemblée

concernée ou la Haute Cour, sans délégation

de vote, et seuls les votes favorables à la

décision étant recensés.

Les dispositions de cet article seront précisées

par une loi organique.

La cour de justice de la république

A l'occasion de la révision introduite par la loi

constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet 1993,

le titre X de la Constitution, relatif à la

responsabilité pénale des membres du

Gouvernement, a substitué à leur jugement par

la Haute Cour de Justice pour les crimes et

délits commis dans l'exercice de leur fonction,

une procédure devant une nouvelle juridiction

pénale, la Cour de justice de la République.

L'article 68-3 prévoit que cette nouvelle

procédure s'applique rétroactivement aux faits

commis avant son adoption.

L'article 68-1 indique que les membres du

Gouvernement sont pénalement responsables

des actes accomplis dans l'exercice de leurs

fonctions et qualifiés crimes ou délits au

moment où ils ont été commis, qu'ils sont

jugés par la Cour de justice de la République

qui, à la différence de la Haute Cour de justice,

est liée par la définition des crimes et délits

ainsi que par la détermination des peines telles

qu'elles résultent de la loi.

Selon l'article 68-2, la Cour de justice de la

République comprend quinze juges : douze

parlementaires élus, en leur sein et en nombre

égal, par l'Assemblée nationale et par le Sénat

et trois magistrats du siège à la Cour de

cassation, dont l'un préside la Cour.

Toute personne qui se prétend lésée par un

crime ou un délit commis par un membre du

Gouvernement dans l'exercice de ses fonctions

peut porter plainte auprès d'une commission

des requêtes composée de magistrats. Cette

commission ordonne soit le classement de la

procédure, soit sa transmission au procureur

général près la Cour de cassation aux fins de

saisine de la Cour de justice de la République.

Le procureur général près la Cour de cassation

peut aussi saisir d'office la Cour de justice de

la République sur avis conforme de la

commission des requêtes.

La loi organique n° 93-1252 du 23 novembre

1993 prévoit que la Cour de justice de la

République vote, après la clôture des débats,

sur chaque chef d'accusation à la majorité

absolue par bulletins secrets puis sur

l'application de la peine infligée à un accusé

déclaré coupable. Son arrêt peut faire l'objet

d'un pourvoi en cassation. Si l'arrêt est cassé, la

Page 43: Fiche de Td Second Semestre 2013

43/92

Cour de justice doit être entièrement

recomposée avant de juger à nouveau l'affaire.

Voir aussi : le décret n° 95-692 du 9 mai 1995

relatif au régime indemnitaire des membres de

la Cour de justice de la République, de la

commission d'instruction et de la commission

des requêtes instituées près cette juridiction

ainsi que des magistrats y exerçant le ministère

public

Document 3 : Hervé Morin plaide pour une réforme du statut pénal du président,

Nouvel observateur, 29 octobre 2007

Le ministre de la Défense et président du Nouveau Centre était auditionné par le comité Balladur sur la

réforme des institutions.

Le ministre de la Défense et président du Nouveau Centre, Hervé Morin, s'est prononcé devant le

comité Balladur sur la réforme des institutions en faveur d'"une remise à plat " de la responsabilité

pénale du chef de l'Etat. Estimant que le dispositif actuel est "totalement bancal" et quasiment

inopérant", il a expliqué "les conditions de la mise en œuvre de la responsabilité pénale du chef de

l'Etat méritent selon moi d'être reposées, dans des termes qui permettent, quand il le faut, que la justice

puisse suivre son cours".

Et d'ajouter toutefois : "Bien entendu, il faut des protections, mais le système tel qu'il a été arrêté" en

2007 par le Parlement, "de toute évidence est totalement bancal et quasiment inopérant", a-t-il jugé.

Une mise en cause pénale impossible

Hervé Morin a estimé que le système de la majorité des deux tiers, requis en cas de procédure de

destitution par le Parlement, "rend impossible la mise en cause de la responsabilité pénale du chef de

l'Etat". Par ailleurs, "on explique que les parlementaires peuvent engager une procédure, sans qu'il y

ait d'instruction préalable", a-t-il ajouté. "On ne voit pas bien comment le système peut s'articuler".

Enfin, le ministre de la Défense a estimé que la distinction des actes "détachables et non détachables"

de la fonction présidentielle, pendant le mandat du chef de l'Etat, était "extrêmement difficile à

apprécier".

Document 4 : note de synthèse du Sénat relative à la responsabilité des gouvernants

En France, la responsabilité pénale du

président de la République fait l'objet de

l'article 68 de la Constitution, qui énonce :

« Le président de la République n'est

responsable des actes accomplis dans

l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute

trahison. Il ne peut être mis en accusation que

par les deux assemblées statuant par un vote

identique au scrutin public et à la majorité

absolue des membres les composant ; il est

jugé par la Haute cour de justice. »

Il apparaît donc clairement que, pour les actes

accomplis dans l'exercice de ses fonctions, la

responsabilité pénale du chef de l'État ne peut

pas être engagée, sauf cas de haute trahison.

Pour les autres actes, qu'ils aient été commis

avant le début du mandat ou en cours de

mandat, l'ambiguïté de la formulation

constitutionnelle a provoqué un débat

doctrinal. Toutefois, le Conseil

constitutionnel a estimé le 22 janvier 1999,

dans sa décision 98-408, relative à la Cour

pénale internationale, que, pendant la durée

de son mandat, la responsabilité pénale du

président de la République ne pouvait être

mise en cause que devant la Haute cour de

justice, selon la procédure prévue par

l'article 68 de la Constitution, aussi bien pour

les actes commis dans l'exercice de ses

fonctions et qualifiables de haute trahison que

pour tous les autres actes.

D'après l'interprétation du Conseil

constitutionnel, le président de la

République serait donc soumis à un régime

dérogatoire au droit commun pendant toute

Page 44: Fiche de Td Second Semestre 2013

44/92

la durée de son mandat pour l'ensemble des

infractions qu'il aurait pu commettre.

L'interprétation que le Conseil constitutionnel

a donnée à l'article 68 de la Constitution a

entraîné le dépôt à l'Assemblée nationale d'une

proposition de loi constitutionnelle tendant à

modifier l'article 68 de la Constitution.

Adoptée à l'Assemblée nationale le 19 juin

2001, elle sera prochainement discutée au

Sénat. Cette proposition ne modifie pas le

régime de la responsabilité pénale du président

de la République pour les actes commis dans

l'exercice des fonctions présidentielles. En

revanche, pour les autres infractions, commises

avant ou pendant le mandat, elle prévoit

d'appliquer le droit commun, en introduisant

seulement un dispositif judiciaire spécifique de

filtrage visant à éliminer les demandes

infondées.

Dans les pays voisins, la question est résolue

de manière différente selon qu'il s'agit d'une

monarchie ou d'une république. Dans les

monarchies constitutionnelles, les souverains

jouissent en effet d'une immunité absolue.

Pour cette raison, la présente étude analyse

également le régime de la responsabilité pénale

des chefs de gouvernement. Elle prend en

compte dix pays européens, parmi lesquels

cinq sont des républiques et cinq des

monarchies : l'Allemagne, l'Autriche, la

Belgique, le Danemark, l'Espagne, la Grèce,

l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal et le

Royaume-Uni.

L'analyse des règles en vigueur dans ces dix

pays permet de mettre en évidence que :

- à la différence des monarques, les

présidents de la République ne jouissent pas

d'une immunité absolue, mais ils bénéficient

d'un régime dérogatoire au droit commun

tant pour les infractions commises dans

l'exercice des fonctions présidentielles que

pour les autres infractions ;

- dans les monarchies parlementaires, la

responsabilité pénale du Premier ministre

relève parfois d'une procédure dérogatoire

au droit commun pour les infractions

commises dans l'exercice de ses fonctions,

tandis que, pour les autres infractions, elle

est partout, sauf en Belgique, engagée selon

la procédure de droit commun.

1) À la différence des monarques, les

présidents de la République ne jouissent pas

d'une immunité absolue, mais ils bénéficient

d'un régime dérogatoire au droit commun

tant pour les infractions commises dans

l'exercice des fonctions présidentielles que

pour les autres infractions

a) Les infractions commises dans l'exercice

des fonctions présidentielles

Dans chacune des cinq républiques étudiées, la

responsabilité pénale du président de la

République pour des infractions commises

dans l'exercice de ses fonctions peut être mise

en cause seulement après que le Parlement a

adopté une décision de mise en accusation. De

plus, lorsque le Parlement est bicaméral,

l'accord des deux assemblées est nécessaire,

sauf en Allemagne.

Si le Parlement se prononce sur la mise en

accusation dans tous les pays, l'étendue de

la responsabilité et la juridiction de

jugement diffèrent d'un pays à l'autre.

En Grèce et en Italie, le président de la

République n'est responsable des actes

accomplis dans l'exercice de ses fonctions

qu'en cas de haute trahison ou de violation de

la Constitution. Il est alors jugé par une

juridiction ad hoc, composée en Grèce de

hauts magistrats de l'ordre judiciaire et en Italie

des membres de la Cour constitutionnelle et de

citoyens.

En revanche, d'après les autres Constitutions,

les possibilités de mettre en cause la

responsabilité pénale du président de la

République pour des actes commis dans

l'exercice de ses fonctions sont plus

nombreuses :

- la Loi fondamentale allemande évoque les

violations délibérées, non seulement de Loi

fondamentale, mais aussi des autres lois

fédérales ;

- la Constitution fédérale autrichienne

distingue deux procédures, l'une applicable aux

« violations » de son texte et l'autre aux « actes

passibles de poursuites pénales (...) en rapport

avec l'exercice de ses fonctions » ;

Page 45: Fiche de Td Second Semestre 2013

45/92

- la Constitution portugaise mentionne

seulement les délits commis dans l'exercice de

ses fonctions sans autre précision.

En Allemagne et en Autriche, le président de la

République est alors jugé par la Cour

constitutionnelle, tandis qu'au Portugal il est

jugé par la juridiction suprême de l'ordre

judiciaire.

b) Les infractions commises hors de l'exercice

des fonctions présidentielles

Le président de la République est partout

soumis à un régime dérogatoire : dans

certains pays, aucune procédure ne peut

commencer en cours de mandat sans

l'accord du législateur et, dans les autres, les

infractions commises hors de l'exercice des

fonctions présidentielles ne peuvent être

jugées qu'après la fin du mandat.

En Allemagne, où le régime de l'immunité

parlementaire s'applique au président de la

République « par analogie », aucune poursuite

n'est possible sans l'accord du Bundestag. De

même, en Autriche, le consentement de

l'Assemblée fédérale, c'est-à-dire des deux

chambres réunies, est nécessaire à

l'engagement des poursuites.

En revanche, les constitutions grecque et

portugaise prévoient la suspension de la

procédure pénale pendant la durée du mandat.

En Italie, où la question n'est pas

définitivement tranchée, la doctrine semble

admettre la même solution.

2) Dans les monarchies parlementaires, la

responsabilité pénale du Premier ministre

relève parfois d'une procédure dérogatoire

au droit commun pour les infractions

commises dans l'exercice de ses fonctions,

tandis que, pour les autres infractions, elle

est partout, sauf en Belgique, engagée selon

la procédure de droit commun

a) Les infractions commises dans l'exercice

des fonctions ministérielles

Les infractions commises dans l'exercice des

fonctions ministérielles sont jugées selon le

droit commun au Royaume-Uni et au

Danemark.

Au Royaume-Uni, les infractions commises

par le Premier ministre relèvent, quelle que

soit leur nature, de la procédure pénale

ordinaire, les ministres ne jouissant d'aucune

immunité et d'aucun privilège de juridiction.

Au Danemark, il existe une loi relative à la

responsabilité des ministres, qui s'applique

notamment au chef du gouvernement. Elle

considère comme une infraction commise dans

l'exercice des fonctions ministérielles le fait de

manquer à ses obligations, intentionnellement

ou par négligence grave, et limite la peine

maximale à un emprisonnement de deux ans,

mais sans prévoir de procédure spécifique.

En revanche, dans les autres monarchies

parlementaires, les infractions commises

dans l'exercice des fonctions ministérielles

sont jugées selon une procédure dérogatoire

au droit commun. En Belgique et aux Pays-

Bas, ce régime spécifique s'applique à toutes

les infractions liées à la fonction, alors que, en

Espagne, il ne concerne que les plus graves.

En Belgique, les dispositions constitutionnelles

relatives à la responsabilité pénale des

ministres ont été modifiées par la loi

constitutionnelle du 12 juin 1998. Avant la

réforme, les ministres étaient mis en accusation

par la Chambre des représentants et jugés par

la Cour de cassation. Le nouveau régime se

rapproche du droit commun, les ministres étant

jugés par la cour d'appel après que le parquet a

intenté l'action pénale. Cependant, la Chambre

des représentants vérifie que la requête du

ministère public tendant à demander la saisine

de la chambre des mises en accusation est

fondée. Elle doit également autoriser toute

arrestation.

Aux Pays-Bas, les infractions commises par les

ministres dans l'exercice de leurs fonctions

sont jugées selon une procédure spécifique,

après autorisation du Parlement.

En Espagne, le statut pénal dérogatoire des

ministres ne s'applique qu'aux atteintes à la

sûreté de l'État, qui sont alors jugées par le

tribunal suprême de l'ordre judiciaire après que

le Congrès des députés a pris l'initiative de la

mise en accusation et l'a approuvée.

b) Les infractions commises hors de l'exercice

des fonctions ministérielles La Belgique est le

seul pays qui prévoie une procédure

dérogatoire au droit commun pour les

infractions commises par les ministres en

Page 46: Fiche de Td Second Semestre 2013

46/92

dehors de leurs fonctions. En effet, le régime

mis en place par la loi constitutionnelle du

12 juin 1998 s'applique à toutes les infractions

commises par les ministres en exercice,

qu'elles soient ou non liées à leurs fonctions.

Ce régime particulier subordonne notamment

la saisine de la chambre des mises en

accusation à une décision de la Chambre des

représentants. Toutefois, les infractions

commises avant le début de leurs fonctions

ministérielles par des ministres en exercice

sont jugées selon le droit commun. Dans les

autres monarchies parlementaires, les

infractions commises hors de l'exercice des

fonctions ministérielles relèvent de la

procédure pénale ordinaire et sont jugées sans

que le Parlement intervienne à aucun moment

de la procédure. Elles sont jugées par les

juridictions de droit commun, sauf en Espagne,

où les affaires impliquant des membres du

gouvernement ne peuvent être instruites et

jugées que par la chambre pénale du Tribunal

suprême.

*

Les présidents de la République allemand,

autrichien, grec, italien et portugais se

trouvent donc dans une situation

comparable à celle du président français. En

revanche, dans les monarchies, où les

souverains jouissent d'une immunité

absolue, les chefs de gouvernement sont

soumis au même régime que les autres

ministres et bénéficient d'une protection

limitée, notamment pour les infractions

commises en dehors de leurs fonctions.

Page 47: Fiche de Td Second Semestre 2013

47/92

FICHE N° 5

LE PARLEMENT (I)

Organisation et procédure législative

I/ DOCUMENTS REPRODUITS 1. Schéma de la procédure législative

2. Composition de l’actuelle assemblée nationale élue en 2007

3. Extrait du rapport du comité constitutionnel : mieux préparer la loi

4. Extrait de la synthèse du rapport du comité constitutionnel : un parlement renforcé

II/ bibliographie AVRIL (P.) « Le parlementarisme rationalisé », RDP, 1998, pp 1508-1515.

AVRIL (P.), GICQUEL (J.) Droit parlementaire, Montchrestien, 3ème

édition, 2004.

CARCASSONNE (G.), « Réhabiliter le Parlement », Pouvoirs, n°49, 1989, pp. 37-49.

DUPRAT (J.-P.), « La crise des assemblée parlementaires françaises », in Mélanges Auby, 1992.

MAUS (D.), « Parlements », in Dictionnaire Constitutionnel, pp. 698-702.

MENY (Y.), « Cumul des mandats ou impossibles séparation des pouvoirs », Pouvoirs, n°64, 1993,

pp. 129-136.

Le Sénat, Pouvoirs, n°44, 1988.

L'Assemblée Nationale, Pouvoirs, n°34, 1985.

Le Parlement, Pouvoirs, n°64, 1993.

Voir aussi :

http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/procedure.asp

http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/fiches_synthese/index.asp

III/ NOTIONS A Connaître

a) Bureau de l’Assemblée, conférence des présidents, groupe parlementaire.

b) Commissions législatives (spéciale, permanente).

c) Incompatibilité, immunité, irresponsabilité et inviolabilité.

d) Ordre du jour, session parlementaire (ordinaire, extraordinaire, de plein droit).

e) Domaine de la loi, domaine du règlement.

f) Fait majoritaire.

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) Les moyens d’oppositions au sein du Parlement sous la Vème

République.

b) La majorité au Parlement sous la Vème

République.

c) Le député de la Vème

République.

d) Le Sénat a-t-il encore une raison d’être ?

e) Commentez la décision n°961 du 19 décembre 1996.

f) Réalisez un tableau des effectifs de l'Assemblée par groupe politique.

Document 1 : Schéma de la procédure législative

Page 48: Fiche de Td Second Semestre 2013

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1. INITIATIVE DE LA LOI

Premier ministre Députés Sénateurs

↓ ↓ ↓

Projet de loi Proposition

de loi Proposition

de loi

↓ ↓ ↓

Délibération en Conseil

des ministres, après avis du

Conseil d'État

Contrôle de la recevabilité financière

de la proposition de loi par le Bureau

de l'Assemblée nationale ou du Sénat

↓ ↓

2. EXAMEN DU PROJET OU DE LA PROPOSITION DE LOI PAR LE PARLEMENT

EN COMMISSION ET EN SÉANCE PUBLIQUE ↓

Dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale ou du Sénat

Examen en 1ère

lecture par l'une des six commissions permanentes ou par

une commission spéciale, de l'Assemblée ou du Sénat, constituée à cet effet.

Publication d'un rapport écrit.

Discussion en 1ère

lecture en séance publique et vote

Transmission à l'autre assemblée qui n'était pas saisie en premier

Examen en 1ère

lecture par l'une des six commissions permanentes (ou par

une commission spéciale) du Sénat ou de l'Assemblée nationale. Publication

d'un rapport écrit

Discussion en 1ère

lecture en séance publique et vote

En cas d'accord entre les assemblées... ↓

Adoption du texte dans les mêmes termes par les deux assemblées

A défaut d'accord entre les deux assemblées ...

A défaut d'accord entre les deux assemblées, après

une première lecture, transmission du texte à la

première assemblée saisie

ou Après deux lectures dans chaque assemblée, à la

demande du Premier ministre, réunion d'une

commission mixte paritaire (CMP), composée de

7 députés et de 7 sénateurs, sur les dispositions

restant en discussion.

Si l'urgence a été déclarée, la CMP peut

Page 49: Fiche de Td Second Semestre 2013

49/92

être réunie après une seule lecture par

chacune des assemblées.

↓ ↓

2ème

lecture : Examen en commission, discussion en

séance publique et vote, nouvelle transmission à

l'autre assemblée

Examen et vote par chacune des deux assemblées

du texte élaboré par la CMP ou, en cas d'échec de

la CMP ou de rejet du texte de la CMP, nouvelle

lecture par chaque assemblée

↓ ↓ Poursuite de la « navette » (nouvelles lectures

successives par les deux assemblées) : examens,

votes et nouvelles transmissions

Après une nouvelle lecture par chacune des

assemblées, le Gouvernement peut demander à

l'Assemblée nationale de statuer définitivement

↓ ↓

Texte définitif adopté dans les mêmes termes par les

deux assemblées

Texte définitif adopté dans les mêmes termes par

les deux assemblées ou adopté par l'Assemblée

nationale statuant à titre définitif

↓ ↓

3. CONTRÔLE DE CONSTITUTIONNALITÉ ET PROMULGATION DE LA LOI

Saisine éventuelle du Conseil constitutionnel par le Président

de la République, le Premier ministre, le Président de l'Assemblée nationale,

le Président du Sénat ou 60 députés ou 60 sénateurs

↓ Décision du Conseil constitutionnel, en cas de saisine

↓ Promulgation de la loi par le Président de la République

et publication au Journal officiel de la République française

Document 2 : composition de l’actuelle assemblée nationale

Page 50: Fiche de Td Second Semestre 2013

50/92

Document 3 : extrait du rapport du comité constitutionnel : mieux préparer la loi

Le Comité a relevé que les défauts qui

entachent la loi ne peuvent être imputés au seul

Parlement. La plupart des textes adoptés par

les assemblées sont d’origine gouvernementale

et bien des amendements défendus en séance

publique par des membres du Parlement

auxquels il est fréquemment fait reproche de

dénaturer la loi ou d’en augmenter le volume

sont, en fait « inspirés » par le Gouvernement.

Le phénomène est trop connu pour qu’on s’y

attarde davantage.

Deux séries de propositions ont paru au

Comité devoir s’imposer.

a) Les études d’impact

En premier lieu, le Conseil d’Etat a mis en

relief, dans deux études, la nécessité d’assortir

les projets de loi d’une étude d’impact

préalable analysant avec une précision

suffisante les raisons pour lesquelles, compte

tenu des effets de la législation existante, il est

utile de légiférer à nouveau. Le Comité a

souhaité faire siennes les conclusions de ces

études. Il recommande en particulier, que

l’existence de ces études d’impact soit une

condition de la recevabilité d’un projet de loi

au Parlement, à charge pour le Conseil

constitutionnel de vérifier, juste après le dépôt

du texte et à la demande de soixante députés

ou de soixante sénateurs, que ce document

satisfait aux exigences qu’une loi organique

pourrait prévoir (Proposition n° 25). Si la

décision du Conseil constitutionnel statuant

dans un délai de huit jours, emportait

constatation du défaut d’étude préalable au

sens de ces dispositions, le projet de loi serait

réputé non déposé et le Gouvernement devrait

régulariser la présentation de son texte.

b) Un contrôleur juridique par ministère

En deuxième lieu, le Comité a estimé que des

mesures drastiques devaient être prises pour

éviter la prolifération des normes législatives

comme réglementaires. A cet effet, il demande

instamment que dans chaque ministère soit

installé un « contrôleur juridique », nommé

pour une période déterminée qui soit chargé de

donner son visa à l’édiction des textes

normatifs comme le fait le contrôleur financier

dans le domaine qui est le sien (Proposition n°

26). Aucun texte ne pourrait émaner du

ministère sans son visa exprès. Ce contrôleur

pourrait être un membre du Conseil d’Etat qui

assurerait une liaison étroite entre le ministère

et la section administrative à laquelle il

appartient. Il aurait ainsi l’autorité nécessaire

pour éviter l’édiction de normes inutiles ou

redondantes et serait en situation d’aider à une

programmation raisonnable des travaux du

Gouvernement.

c) Les avis du Conseil d’Etat sur les projets et

les propositions de loi

En troisième lieu, le Comité a estimé qu’il

serait utile à la qualité du travail législatif que

les avis émis par le Conseil d’Etat sur les

projets de loi dont il est saisi en application de

l’article 39 de la Constitution soient rendus

publics. Ainsi serait mis un terme aux rumeurs

qui entourent ces avis, dont la publication n’est

autorisée, au cas par cas, par le Gouvernement,

qu’à la fin de chaque année (Proposition n°

27). Dans le même esprit, le Comité souhaite

que le Conseil d’Etat puisse être saisi pour avis

de celles des propositions de loi qui sont

inscrites à l’ordre du jour de l’une ou l’autre

assemblée (Proposition n° 28).

Document 4 : extrait de la synthèse du rapport du comité constitutionnel : un parlement

renforcé

Rééquilibrer les institutions suppose de

renforcer le Parlement en donnant à ce

dernier une plus grande maîtrise dans la

conduite de ses travaux.

A ce titre, le Comité propose d’abord de

donner aux assemblées parlementaires

davantage de marges de manœuvre dans la

fixation de leur ordre du jour. Il préconise à

cet effet que soit limitée à la moitié du temps

de séance la faculté pour le Gouvernement

d’imposer l’examen des textes préparés ou

acceptés par lui. Le reste du temps serait à la

libre disposition des assemblées et partagé

Page 51: Fiche de Td Second Semestre 2013

51/92

entre les fonctions législatives et les fonctions

de contrôle, avec chaque fois une place

substantiellement accrue pour l’opposition.

Il est également apparu au Comité que le

moment était venu de donner davantage de

souplesse au Parlement dans son organisation

interne, en relevant de six à dix le nombre de

commissions permanentes que chacune des

assemblées peut instituer en son sein.

Le Comité estime enfin nécessaire que le

recours à l’article 49, al. 3 de la Constitution

– qui permet au Gouvernement d’obtenir, sauf

motion de censure, l’adoption d’un texte sans

vote – soit limité aux projets de loi de finances

et de financement de la sécurité sociale. Une

telle évolution marquerait un rééquilibrage

dans les relations entre le Gouvernement et la

majorité qui le soutient à l’Assemblée

nationale, les problèmes liés aux tentatives

d’obstruction de l’opposition étant par ailleurs

traités par l’institution d’un système de crédit-

temps dans l’examen des textes.

Cette dernière mesure s’inscrit dans une

réflexion plus générale sur les moyens

d’améliorer le travail législatif.

L’inspiration générale des propositions du

Comité consiste à cet égard à légiférer

moins mais de manière plus efficace.

Ceci exige d’abord d’assumer et de valoriser

le temps nécessaire à l’examen d’un texte,

en encadrant le recours à la procédure

d’urgence définie à l’article 45 de la

Constitution et en imposant, à moins que le

Gouvernement et l’assemblée intéressée le

décident conjointement, un délai de deux mois

entre le dépôt d’un texte et son premier

examen en séance publique. La faculté pour le

Gouvernement de déposer des articles

additionnels serait par ailleurs strictement

limitée.

La discussion doit ensuite gagner en

efficacité. C’est pourquoi le Comité propose

que le texte examiné en séance publique soit

celui qui est issu des travaux de la commission

parlementaire qui l’a préalablement étudié, et

non comme aujourd’hui le projet initial du

Gouvernement. Il lui est également apparu

nécessaire de développer les procédures

simplifiées pour l’adoption des textes

présentant le moins d’enjeux politiques,

l’assemblée se bornant alors à ratifier le texte

élaboré par la commission. Il propose enfin

que les avis du Conseil d’Etat sur les projets de

loi du Gouvernement soient transmis au

Parlement.

L’amélioration du travail normatif passe en

dernier lieu par des progrès dans

l’élaboration même des textes. Prolongeant

des travaux récents, le Comité préconise que

tout projet de loi soit assorti d’une évaluation

préalable établissant le besoin de légiférer et

mesurant l’impact attendu des mesures

proposées. Des contrôleurs juridiques placés

auprès des différents ministères s’assureraient

notamment du respect de cette obligation, qui

serait par ailleurs contrôlée par le Conseil

constitutionnel selon une procédure spécifique.

Les propositions de loi émanant du Parlement

pourraient enfin être soumises pour avis au

Conseil d’Etat.

Il reste que, comme dans toutes les

démocraties contemporaines, l’affirmation

du Parlement trouvera sa source principale

dans le renforcement de ses fonctions de

contrôle et d’évaluation, qui gagneraient du

reste à être expressément consacrées par le

texte même de la Constitution.

Au-delà des mécanismes juridiques de mise en

cause de la responsabilité du Gouvernement,

dont on connaît les limites, plusieurs

évolutions paraissent s’imposer :

• La mission d’évaluation des politiques

publiques est appelée à prendre une

importance croissante, au croisement de la

fonction législative et de la fonction de

contrôle. Aussi serait-il souhaitable, aux yeux

du Comité, que chacune des assemblées

parlementaires se dote des instruments

adéquats avec l’institution en leur sein d’un

organisme d’audit et d’évaluation réunissant

des représentants de l’ensemble des

commissions permanentes, définissant un

programme coordonné de contrôle, chargeant

les institutions ou organismes appropriés de

mener à bien les études correspondantes et

organisant le débat public sur les suites à y

donner.

• Le Comité propose ensuite que chacune des

assemblées parlementaires puisse, en tout

domaine, adopter des résolutions marquant

l’expression d’un vœu et n’ayant pas de portée

contraignante.

• Cette faculté trouverait notamment son utilité

en matière de politique étrangère et de défense.

Page 52: Fiche de Td Second Semestre 2013

52/92

S’agissant de la défense nationale, le Comité

propose par ailleurs que les opérations

militaires extérieures soient soumises à un

régime de contrôle entièrement nouveau : une

information immédiate serait apportée au

Parlement, qui serait ultérieurement appelé à

donner son autorisation pour la prolongation

de l’intervention au-delà de trois mois.

• L’existence, au sein de chaque assemblée,

d’un comité spécialement chargé des affaires

européennes, pourrait être constitutionnalisée,

l’obligation de transmission au Parlement des

documents émanant des institutions de l’Union

européenne étant parallèlement élargie et

systématisée. La procédure de ratification des

traités relatifs à l’élargissement de l’Union

européenne serait par ailleurs alignée sur le

régime applicable aux révisions

constitutionnelles internes.

• Le Parlement pourrait enfin renforcer le

contrôle sur l’exécution des lois votées, le

rapporteur du texte et un membre de

l’opposition s’associant pour veiller à la

parution des décrets d’application et les

contrôleurs juridiques déjà mentionnés lui

rendant compte à intervalles réguliers au titre

du ministère auquel ils seraient rattachés.

Dans l’esprit du Comité, les droits nouveaux

qui seraient ainsi reconnus au Parlement

n’ont de chances de produire leurs effets sur

l’équilibre des institutions que si les

parlementaires sont pleinement mis à même

de s’en saisir.

Cela suppose, en premier lieu, que les droits

de l’opposition soient mieux reconnus, l’effet

de discipline qui s’attache au fait majoritaire

limitant la portée des prérogatives

théoriquement reconnues au Parlement. Aussi

le Comité propose-t-il que soient surmontés les

obstacles juridiques nécessaires à la garantie

de droits nouveaux pour ceux des partis

politiques ou groupes parlementaires qui

n’auraient pas déclaré leur soutien au

Gouvernement : possibilité, par exemple, de

disposer de la moitié du temps de parole dans

les séances de questions au gouvernement ;

assurance que soit le président soit le

rapporteur des commissions d’enquête et

missions d’information soit issu de leurs rangs

; facilités accrues pour créer de telles

commissions ; répartition des présidences de

commissions à la proportionnelle des groupes ;

association étroite aux procédures de contrôle

de l’application des lois par l’administration.

Le Comité préconise, en second lieu, une

stricte limitation du cumul des mandats qui,

aussi longtemps qu’il ne sera pas

juridiquement interdit, restera politiquement

obligatoire pour les élus. Le Comité

recommande à tout le moins que les

parlementaires ne puissent exercer quelque

fonction exécutive locale que ce soit.

Page 53: Fiche de Td Second Semestre 2013

53/92

FICHE N° 6

LE PARLEMENT SOUS LA Vème

REPUBLIQUE (II)

Le contrôle parlementaire

I/ DOCUMENTS REPRODUITS

1. La motion de censure, un véritable moyen de contrôle (la documentation française)

2. L'utilisation de l'article 49 alinéa l de la Constitution.

3. L'utilisation de l'article 49 alinéa 2 de la Constitution.

4. L'utilisation de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

5. Motion de censure du 4 octobre 1962

6. La 104e motion de censure depuis 1958

II/ bibliographie DELCAMP (A.), BERGEL (J-L.), DUPAS (A.), Contrôle parlementaire et évaluation,

Documentation française, 1995.

DENQUIN (J-M.), « Recherches sur la notion de majorité sous la Vème

République », RDP, 1993,

p.949.

MASCLET (J-C.), Un député pour quoi faire ?, PUF, 1982.

LUCHAIRE (F.), « la loi constitutionnelle du 4 août 1995. une avancée pour la démocratie ? », RDP.,

1995, pp. 1411-1443.

LUCHAIRE (F.), « Les conséquences de la réforme constitutionnelle du 4 août 1995 », RDP, 1996,

pp.330-353.

Le Parlement français sous trois présidents : 1958-1980, RFSP 1981, n° l.

Voir aussi :

http://www.assemblee-nationale.fr/encyclopedie/controle.asp

III/ Notions à connaître

Question de confiance

Questions parlementaires écrites, orales

Motion de censure spontanée, provoquée

Commissions d’enquête, spéciales.

IV/ EXERCICES SUGGERES

Les commissions d'enquête.

Page 54: Fiche de Td Second Semestre 2013

54/92

Le contrôle exercé par le parlement sur le gouvernement est-il efficace ?

La réforme constitutionnelle de 1995 et le contrôle parlementaire.

Qui contrôle les institutions chargées des contrôles ?

* * * *

Document 1 : la motion de censure, un véritable moyen de contrôle ?

La motion de censure : véritable moyen de

contrôle ?

La motion de censure constitue le symbole

de la fonction de contrôle exercée par la

chambre basse du Parlement : cette dernière

a théoriquement droit de vie ou de mort sur un

gouvernement.

Sous la IIIème et la IVème Républiques, cette

fonction de sanction s’exerçait pleinement

dans la mesure où les députés n’hésitaient pas

à renverser le gouvernement, même si cela

résultait davantage d’une initiative prise par

celui-ci (question de confiance) que d’un acte

engagé par les parlementaires eux-mêmes

(motion de censure).

Le parlementarisme rationalisé de la Vème

République a rompu avec cette pratique pour

inaugurer une "symbolique de l’arme absolue"

(Yves Mény) : hormis un cas, la motion de

censure est davantage devenue un support de

débat et de cristallisation d’un affrontement

entre l’opposition et la majorité qu’un moyen

pour les députés de censurer vraiment le

gouvernement.

1. Les différents types de motions de censure

La Constitution de 1958 a prévu deux types

de motions de censure : la motion de

censure spontanée ou offensive (article 49

alinéa 2) et la motion de censure provoquée

(article 49 alinéa 3).

La première résulte de la seule initiative des

députés. Afin de bien la distinguer des

interpellations des Républiques précédentes,

qui résultaient d’un seul parlementaire, elle

doit être le fruit d’une volonté collective. Son

dépôt nécessite ainsi la signature du dixième

des membres de l’Assemblée nationale, soit

58 députés aujourd’hui. Depuis la réforme de

1995 instaurant la session unique, aucun

député ne peut signer plus de trois motions de

censure au cours de la session ordinaire et plus

d’une au cours d’une session extraordinaire

(auparavant, c’était limité à une au cours d’une

même session). 48 heures séparent le dépôt de

la motion de censure de sa discussion. Ce délai

se justifie pour permettre au gouvernement de

convaincre d’éventuels indécis et aux députés

de se prononcer dans la sérénité. Le règlement

de l’Assemblée nationale précise que le débat

et le vote ne peuvent avoir lieu plus de trois

jours de séance après l’échéance de ces 48

heures. Ceci permet d’éviter que la motion ne

soit jamais inscrite à l’ordre du jour. La

motion de censure doit réunir les voix de la

majorité absolue des membres composant

l’Assemblée, soit aujourd’hui 289 voix. Cette

condition se justifie pour éviter qu’une

majorité simple liée à des abstentions massives

ne permette, comme ce fut le cas sous les

Républiques précédentes, de renverser un

gouvernement. Seules les voix "pour"

comptent donc. Les députés qui s’abstiennent

ou ne prennent pas part au vote sont censés

soutenir le gouvernement. En cas d’adoption

d’une motion de censure, le Premier ministre

doit remettre au Président de la République la

démission de son gouvernement (article 50 de

la Constitution).

La motion de censure provoquée s’inscrit

dans le cadre de l’alinéa 3 de l’article 49. Elle résulte à l’origine de la décision du

gouvernement d’engager sa responsabilité sur

tout ou partie d’un texte au cours de la

discussion législative. Il est alors réputé adopté

sans débat sauf dépôt d’une motion de censure

dans les vingt-quatre heures. Celle-ci requiert,

comme la précédente, la signature du dixième

des membres de l’Assemblée (un député peut

en signer autant qu’il veut au cours d’une

session). Elle est alors discutée et votée

comme la motion de censure. Son adoption-

cas qui ne s’est jamais produit depuis 1958-

entraîne la démission du gouvernement et le

Page 55: Fiche de Td Second Semestre 2013

55/92

rejet du texte sur lequel il avait engagé sa

responsabilité.

2. La pratique sous la Ve République

La pratique révèle à la fois la grande

utilisation et la faible utilité pratique de la

motion de censure dans la mesure où une

seule fut adoptée depuis 1958. Ainsi, le 5

octobre 1962, pour protester contre la décision

du général de Gaulle de soumettre à

référendum la révision constitutionnelle

prévoyant l’élection au suffrage universel

direct du Président de la République, 280

députés sur 480 adoptent une motion de

censure. Le Premier ministre, Georges

Pompidou présente alors la démission de son

gouvernement. Le général de Gaulle le nomme

à nouveau et dissout l’Assemblée nationale le

9 octobre. Les élections législatives se

traduiront par une large victoire gaulliste.

Après ce cas unique, aucune motion de

censure n’a plus atteint la majorité

constitutionnelle. Ceci ne signifie pas, loin

s’en faut, que l’instrument ne fut pas utilisé.

L’opposition ne s’est pas privée de déposer des

motions de censure, sans se faire d’illusion sur

le résultat final, mais afin d’acter au cours d’un

débat parlementaire son désaccord avec la

politique suivie par le gouvernement et sa

majorité. Toutes les tentatives ne sont pas

définitivement vouées à l’échec : en 1992, le

gouvernement de Michel Rocard évita de

quelques voix d’être renversé par une majorité

composite de députés de droite et de députés

communistes. Les députés n’ont pas non plus

manqué de déposer des motions de censure

après l’utilisation de l’article 49 alinéa 3 par un

gouvernement, leur permettant de dénoncer

l’occultation du débat parlementaire (le 49.3

arrête toute discussion), et de mettre en avant

leurs arguments contre le texte proposé.

La motion de censure ne constitue donc pas

un instrument pleinement efficace de

contrôle de l’action du gouvernement par

l’Assemblée nationale. Mais cela s’explique

moins par l’instrument lui-même, que par la

logique des institutions assises sur le fait

majoritaire. Cela ne signifie pas pour autant

que cet instrument soit désuet ou inefficace. Il

s’avère aux mains de l’opposition un outil

efficace de débat public sur l’action du

gouvernement. Cette pratique de la motion de

censure n’est d’ailleurs pas propre à la France.

Depuis la Libération, l’Allemagne, la Grande-

Bretagne et l’Italie n’ont ainsi vu qu’une seule

motion de censure adoptée et provoquer la

chute d’un gouvernement.

© La Documentation française

Document 2 : utilisation de l’article 49-1 de la constitution

Premier ministre Engagements de

responsabilité

Michel Debré (1959-

1962) 2

Georges Pompidou

(1962-1968) 2

Maurice Couve de

Murville (1968-1969) 0

Jacques Chaban-

Delmas (1969-1972) 3

Pierre Messmer (1972-

1974) 1

Jacques Chirac (1974-

1976) 1

Raymond Barre

(1976-1981) 2

Pierre Mauroy (1981-

1984) 5

Laurent Fabius

(1984- 1986) 1

Jacques Chirac

(1986-1988) 3

Michel Rocard

(1988-1991 1

Edith Cresson (1991-

1992) 0

Pierre Bérégovoy 1

Page 56: Fiche de Td Second Semestre 2013

56/92

(1992-1993)

Édouard Balladur

(1993-1995) 2

Alain Juppé (1995-

1997) 3

Lionel Jospin (1997-

2002) 1

Jean-Pierre Raffarin

(2002-2005) 2

Dominique de Villepin

(2005-2007) 1

François Fillon (2007-

) 1

Total 32

© Assemblée nationale

Document 3 : utilisation de l’article 49-2 de la constitution

Premier ministre Nombre de motions de

censure "spontanées"

Michel Debré (1959-

1962) 2

Georges Pompidou

(1962-1968) 7

Maurice Couve de

Murville (1968-1969) 0

Jacques Chaban-

Delmas (1969-1972) 1

Pierre Messmer (1972-

1974 3

Jacques Chirac (1974-

1976) 2

Raymond Barre

(1976-1981) 7

Pierre Mauroy

(1981-1984) 7

Laurent Fabius

(1984- 1986) 1

Jacques Chirac 1

(1986-1988)

Michel Rocard

(1988-1991 6

Edith Cresson (1991-

1992) 2

Pierre Bérégovoy

(1992-1993) 2

Édouard Balladur

(1993-1995) 1

Alain Juppé (1995-

1997) 2

Lionel Jospin (1997-

2002) 2

Jean-Pierre Raffarin

(2002-2005) 2

Dominique de

Villepin (2005-

2007) 3

Total 51

© Assemblée nationale

Document 4 : utilisation de l’article 49-3 de la constitution

Premier

ministre Nombre

d'engagement

Nombre

de textes

Nombr

e

s

de

responsabilit

concerné

s

de

motion

s de

Page 57: Fiche de Td Second Semestre 2013

57/92

é censure

Michel

Debré

(1959-

1962)

4 2 4

Georges

Pompidou

(1962-

1968)

6 2 4

Maurice

Couve de

Murville

(1968-

1969)

0 0 0

Jacques

Chaban-

Delmas

(1969-

1972)

0 0 0

Pierre

Messmer

(1972-

1974

0 0 0

Jacques

Chirac

(1974-

1976)

0 0 0

Raymond

Barre

(1976-

1981)

8 5 13

Pierre

Mauroy

(1981-

1984)

7 5 6

Laurent

Fabius

(1984-

1986)

4 2 1

Jacques

Chirac

(1986-

1988)

8 7 7

Michel

Rocard

(1988-

1991)

28 12 5

Edith

Cresson

(1991-

1992)

8 4 2

Pierre

Bérégovo

y (1992-

1993)

3 3 1

Édouard

Balladur

(1993-

1995)

1 1 1

Alain

Juppé

(1995-

1997)

2 2 2

Lionel

Jospin

(1997-2002)

0 0 0

Jean-

Pierre

Raffarin

(2002-

2005)

2 2 2

Dominiqu

e de

Villepin

(2005-

2007)

1 1 3

Total 81 47 51

© Assemblée nationale

Document 5 : motion de censure du 4 octobre 1962

L'Assemblée nationale, Considérant que la démocratie suppose le

respect de la loi et, par dessus tout, de la loi

suprême qu'est la Constitution ;

Page 58: Fiche de Td Second Semestre 2013

58/92

Considérant que, le peuple français étant

souverain, la Constitution a précisément pour

objet de définir la manière dont s'exerce sa

souveraineté, soit par la voie des représentants

du peuple, soit par le peuple lui-même ;

Considérant que la Constitution, dont le

général de Gaulle est l'auteur et qu'il a fait

approuver, en 1958, par le peuple français,

prescrit formellement dans un titre spécial

qu'une proposition de révision devra être :

1° Votée par les deux chambres du Parlement ;

2° Approuvée par un référendum, le peuple

français ayant été éclairé par les débats

parlementaires ;

Considérant qu'en écartant le vote par les deux

chambres, le président de la République viole

la Constitution dont il est le gardien ;

Considérant qu'il ouvre ainsi une brèche par

laquelle un aventurier pourrait passer un jour,

pour renverser la République et supprimer les

libertés ;

Considérant que le président de la République

n'a pu agir que sur la « proposition » du

Gouvernement ;

Censure le Gouvernement conformément à

l'article 49, alinéa 2, de la Constitution.

Document 6 : La 104e motion de censure depuis 1958

AP | 25.01.2009 | 16:00

La motion de censure contre la politique

économique et sociale du gouvernement,

débattue mardi en application de l'article 49-2

de la Constitution, est la 104e déposée depuis

1958.

Une seule a abouti à la démission du

gouvernement. Le 5 octobre 1962, l'Assemblée

nationale avait renversé le gouvernement

Pompidou en réaction à la décision du général

de Gaulle d'instituer l'élection du président de

la République au suffrage universel direct.

Suite à cette censure, l'Assemblée nationale fut

dissoute.

Les motions de censure peuvent être déposées

en application de l'article 49-2 de la

Constitution, ou en réponse à l'engagement de

responsabilité du gouvernement sur un texte

(article 49-3). A ce jour, 53 motions ont été

déposées au titre de l'article 49-2 et 51 en

réponse à un 49-3.

Pour être recevable, une motion de censure

doit être déposée par un dixième des députés,

soit 58. Afin d'éviter les motions à répétition,

chaque signataire ne peut signer que trois

motions durant la session ordinaire et une

durant une session extraordinaire.

Un délai minimum de 48 heures est imposé

avant son examen en séance. La date de la

discussion ne peut avoir lieu au-delà du

troisième jour de séance suivant l'expiration de

ce délai.

Après le débat, le scrutin est organisé dans les

salles voisines de l'hémicycle. Sa durée est

fixée par la conférence des présidents.

Seuls les députés favorables à la censure

participent au scrutin, ce qui fait que la

majorité peut repousser la motion sans même

avoir à se déplacer. La motion n'est adoptée

que si elle est votée par la majorité absolue des

membres composant l'Assemblée, soit 289

députés.

Les dispositions de l'article 49-2 n'ont pas été

modifiées par la révision constitutionnelle du

23 juillet 2008. L'article 49-3, qui permet au

gouvernement d'engager sa responsabilité sur

un projet de loi, a en revanche été réécrit. A

partir du 1er mars, l'utilisation de cet article

sera limitée aux budgets de l'Etat et de la

Sécurité sociale, ainsi qu'à un texte par session.

Hormis le précédent de 1962, la motion de

censure est principalement une arme de

procédure permettant à l'opposition de

provoquer un débat solennel interrompant

l'ordre du jour fixé par le gouvernement.

La dernière remonte au 8 avril 2008. Déposée

par le PS contre la politique d'"alignement

atlantiste" de Nicolas Sarkozy, elle avait

recueilli 227 voix, celles de la gauche et du

souverainiste Nicolas Dupont-Aignan. AP

Page 59: Fiche de Td Second Semestre 2013

59/92

FICHE N° 7 LA REVISION CONSTITUTIONNELLE

I/ DOCUMENTS REPRODUITS

1. Les révisions de la constitution de la Ve république

2. Extrait de l’introduction du rapport du comité constitutionnel

3. les révisions de la constitution sous la Ve république par Dominique Rousseau

4. Décret du 17 juillet 2008 tendant à soumettre un projet de loi constitutionnelle au parlement

réuni en Congrès

II/ bibliographie ARNE (S.), Existe-t-il des normes supra-constitutionnelles ? Contribution à l'étude des droits

fondamentaux et de la constitutionnalité, RDP., 1993, pp. 459-512.

BEAUD (0.), La souveraineté de l'Etat, le pouvoir constituant et le Traité de Maastricht, RFDA., 1993,

pp. 1045-1068.

BEAUD (0.), La puissance de l'Etat, Paris, PUF, Coll. Leviathan, 1994, pp. 307-357 et 377-402.

BIGAULT (C.), Les révisions de la Constitution de 1958, Documents d'études, Documentation

française, n° 1-20, 2000, pp. 3-59.

BRANCHET (B.), La révision de la Constitution sous la Vème

République, LGDJ, 1994, Coll.

Systèmes.

FAVOREU (L.), Souveraineté et supra-constitutionnalité, Pouvoirs, 1993, n° 67, pp. 71-77.

GONDOUIN (G.) Le conseil constitutionnel et la révision de la constitution, RDP, 2001, pp 489-530.

TROPER (M.), La notion de principes supra-constitutionnels, RJDC, Journées SLC, vol. 15 (1993),

pp. 337-358.

VEDEL (G.), Souveraineté et supra-constitutionnalité, Pouvoirs, 1993, n° 67, pp. 79-97.

Association française des constitutionnalistes, La révision de la Constitution, Journées d'études des 20

mars et 16 décembre 1992, Paris, Economica, 1993.

« Rapport du Comité consultatif pour la révision de la Constitution », Code constitutionnel, Litec,

1995, pp. 1198-1248.

La révision de la constitution de 1958, RFDC n°14, 1993.

III/ NOTIONS A CONNAITRE

Pouvoir constituant (originaire, dérivé), pouvoir constitué

Constitution rigide, constitution souple.

Page 60: Fiche de Td Second Semestre 2013

60/92

Supra-constitutionnalité.

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) La supra-constitutionnalité.

b) Le contrôle de la révision constitutionnelle.

c) Les articles 11 et 89 de la Constitution de 1958 : des voies de révision constitutionnelles

concurrentes ?

* * * *

Document 1 : les révisions de la constitution de la Ve république

Juin 1960 selon une procédure dérogatoire de

révision concernant les dispositions relatives à

la « Communauté », c'est-à-dire à l'ensemble

géopolitique associant la France à ses

anciennes colonies d'Afrique (procédure

abrogée par la loi constitutionnelle du 4 août

1995) :

· Loi constitutionnelle n° 60-525 du 4 juin

1960 tendant à compléter les dispositions du

titre XXI de la Constitution (pour

l'indépendance des États africains et malgache

membres de la Communauté).

- Octobre 1962, par référendum en application

de l'article 11 de la Constitution :

· Loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative

à l'élection du Président de la République au

suffrage universel.

- Décembre 1963, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 63-1327 du 30

décembre 1963 portant modification des

dispositions de l'article 28 de la Constitution

(pour la modification de la date des sessions

parlementaires).

- Octobre 1974, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 74-904 du 29 octobre

1974 portant révision de l'article 61 de la

Constitution (pour l'extension du droit de

saisine du Conseil constitutionnel à 60 députés

ou 60 sénateurs).

- Juin 1976, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 76-527 du 18 juin

1976 modifiant l'article 7 de la Constitution

(pour la modification des règles de la

campagne électorale des élections

présidentielles - en cas de décès ou

d'empêchement d'un candidat).

- Juin 1992, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 92-554 du 25 juin

1992 ajoutant à la Constitution un titre : « Des

Communautés européennes et de l'Union

européenne » (pour la ratification du traité de

Maastricht).

- Juillet 1993, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet

1993 portant révision de la Constitution du

4 octobre 1958 et modifiant ses titres VIII, IX,

X et XVI (pour la création de la Cour de

justice de la République, chargée de juger de la

responsabilité pénale des membres du

gouvernement).

- Novembre 1993, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 93-1256 du 25

novembre 1993 relative aux accords

internationaux en matière de droit d'asile.

- Juillet 1995, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 95-880 du 4 août

1995 portant extension du champ d'application

du référendum, instituant une session

parlementaire ordinaire unique, modifiant le

régime de l'inviolabilité parlementaire et

abrogeant les dispositions relatives à la

Communauté et les dispositions transitoires.

- Février 1996, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 96-138 du 22 février

1996 instituant les lois de financement de la

sécurité sociale.

- Juillet 1998, par le Congrès :

Page 61: Fiche de Td Second Semestre 2013

61/92

· Loi constitutionnelle n° 98-610 du 20 juillet

1998 relative à la Nouvelle-Calédonie.

- Janvier 1999, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 99-49 du 25 janvier

1999 modifiant les articles 88-2 et 88-4 de la

Constitution (modification de dispositions

concernant l'Union européenne).

- Juillet 1999, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 99-568 du 8 juillet

1999 insérant, au titre VI de la Constitution, un

article 53 - 2 reconnaissant la Cour pénale

internationale.

· Loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet

1999 relative à l'égalité entre les femmes et les

hommes.

- Septembre - octobre 2000, par référendum :

· Loi constitutionnelle n° 2000-964 du 2

octobre 2000 relative à la durée du mandat du

Président de la République.

- Mars 2003, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 2003-267 du 25 mars

2003 relative au mandat d'arrêt européen.

· Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars

2003 relative à l'organisation décentralisée de

la République.

- Mars 2005, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 2005-204 du 1er mars

2005 modifiant le titre XV de la Constitution.

· Loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars

2005 relative à la charte de l'environnement.

- Février 2007, par le Congrès :

· Loi constitutionnelle n° 2007-237 du 23

février 2007 modifiant l'article 77 de la

Constitution.

· Loi constitutionnelle n° 2007-238 du 23

février 2007 portant modification du titre IX de

la Constitution.

· Loi constitutionnelle n° 2007-239 du 23

février 2007 relative à l'interdiction de la peine

de mort.

- Loi constitutionnelle n° 2008-103 du 4

février 2008 modifiant le titre XV de la

Constitution

- Loi n°2008-724 du 23 juillet 2008 : loi

constitutionnelle de modernisation des

institutions de la Ve république

Document 2 : Extrait de l’introduction du rapport du comité constitutionnel

La Constitution du 4 octobre 1958 est entrée

dans sa cinquantième année ; elle a traversé

bien des épreuves, dont celle, à trois reprises,

de la « cohabitation » ; elle a fait montre de sa

souplesse et de sa solidité ; elle a doté notre

pays d’institutions stables et efficaces ; elle a

élargi l’assise du régime républicain en

démontrant, à la faveur de cinq alternances, sa

capacité à fonctionner au service de tendances

politiques différentes qui toutes se sont bien

trouvé des moyens qu’elle a mis à leur

disposition.

Pour autant, force est de constater que les

institutions de la Ve

République ne

fonctionnent pas de manière pleinement

satisfaisante. En dépit des nombreuses

révisions constitutionnelles intervenues ces

dernières années – la Constitution a été révisée

vingt-deux fois depuis 1958, dont quinze fois

au cours des douze dernières années – les

institutions peinent à s’adapter aux exigences

actuelles de la démocratie.

Surtout, la présidentialisation du régime,

entamée en 1962 avec l’élection du Président

de la République au suffrage universel direct,

s’est développée sans que la loi fondamentale

évolue de telle manière que des contrepoids au

pouvoir présidentiel soient mis en place.

Certes, la possibilité de saisine du Conseil

constitutionnel par soixante parlementaires,

intervenue en 1974, a tempéré la toute

puissance du pouvoir politique. Mais le

Parlement demeure enfermé dans les règles

d’un « parlementarisme rationalisé »,

caractérisé par la quasi-tutelle du pouvoir

exécutif sur le pouvoir législatif, dont il n’est

pas contestable qu’il avait son utilité en 1958,

au sortir de douze années de régime

d’assemblée, mais qui participe, aujourd’hui,

d’une singularité française peu enviable au

regard des principes mêmes de la démocratie.

L’acception présidentialiste du régime a été

définie par le Général de Gaulle lors de sa

célèbre conférence de presse du 31 janvier

1964. La pratique suivie par ses successeurs

Page 62: Fiche de Td Second Semestre 2013

62/92

n’a guère démenti cette lecture des institutions,

à la notable exception des périodes de

cohabitation, au cours desquelles la lettre de la

Constitution a prévalu sur son esprit et la

réalité du pouvoir exécutif est passée, pour

l’essentiel, entre les mains du Premier

ministre.

L’adoption du quinquennat et ce qu’il est

convenu d’appeler l’ « inversion du calendrier

électoral » qui, depuis 2002, a pour effet de lier

étroitement le scrutin présidentiel et les

élections législatives, ont accentué la

présidentialisation du régime. Même si cette

évolution semble rencontrer l’adhésion de

l’opinion publique, elle demeure fragile et

porte la marque d’un déséquilibre

institutionnel préoccupant. Elle est fragile car

la concordance des scrutins qui favorise celle

des majorités, présidentielle et parlementaire,

ne la garantit pas et demeure tributaire du

décès ou de la démission du Président de la

République comme de l’exercice de son droit

de dissolution de l’Assemblée nationale. Elle

est déséquilibrée dans la mesure où les

attributions du Président de la République

s’exercent sans contrepouvoirs suffisants et

sans que la responsabilité politique de celui

que les Français ont élu pour décider de la

politique de la nation puisse être engagée.

Il s’en déduit que le rééquilibrage des

institutions passe d’abord, dans le cadre du

régime tel qu’il fonctionne aujourd’hui, par un

accroissement des attributions et du rôle du

Parlement.

Telle a été la première constatation du Comité.

La deuxième est relative à la nécessité,

apparue du fait de la survenance des

expériences dites de « cohabitation », de

clarifier les attributions respectives du

Président de la République et du Premier

ministre. La présidentialisation de la Ve

République s’est traduite, dans les temps

ordinaires, par une double responsabilité du

Premier ministre, devant l’Assemblée

nationale, comme le prévoient les articles 20 et

49 de la Constitution, mais aussi devant le

Président de la République, comme ne le

prévoit pas l’article 8 de la même Constitution.

De même, chacun sait qu’en dehors des

périodes de « cohabitation », ce n’est pas le

Gouvernement qui, comme en dispose l’article

20 de la Constitution, « détermine (…) la

politique de la nation » mais le Président de la

République. Dans ces conditions, il est apparu

au Comité que sa réflexion devait porter sur la

clarification des rôles au sein du pouvoir

exécutif. Les travaux qu’il a conduits sur cette

question se situent – c’est l’hypothèse qui

recueille un large accord en son sein – dans le

cadre du régime actuel, caractérisé par la

responsabilité du Gouvernement devant

l’Assemblée nationale. Mais le Comité ne s’est

pas interdit, dans ses discussions, d’envisager

l’hypothèse d’une évolution vers un régime

nettement présidentiel, dans lequel la

responsabilité gouvernementale devant le

Parlement n’a plus sa place.

Troisième constatation du Comité : les

institutions de la Ve

République ne

reconnaissent pas aux citoyens des droits

suffisants ni suffisamment garantis.

L’impossibilité de saisir le Conseil

constitutionnel de la conformité d’une loi déjà

promulguée à la Constitution, la difficulté à

saisir le Médiateur de la République des

différends qui opposent les citoyens aux

administrations publiques, la prolifération de

normes législatives et réglementaires, parfois

rétroactives, l’instabilité de la règle de droit, la

place de la justice dans le fonctionnement des

institutions, les modes de scrutin par le biais

desquels s’expriment les choix du peuple

souverain sont autant de sujets sur lesquels le

Comité s’est penché. Les propositions qu’il

formule à ce titre portent la marque d’une

volonté de modernisation et de démocratisation

de nos institutions.

Document 3 : les révisions de la Constitution sous la Ve république

Après quarante ans, la Constitution de 1958 se

reconnaît-elle ?

En 1958, le Parlement se réunissait en deux

sessions ordinaires de trois mois par an ;

aujourd'hui il se réunit en une session unique

continue de neuf mois. En 1958, le président

était élu par un collège de 80000 grands

électeurs ; aujourd'hui, il est directement élu

par le peuple. En 1958, le Conseil

constitutionnel était limité au rôle de gardien

Page 63: Fiche de Td Second Semestre 2013

63/92

des prérogatives normatives du gouvernement ;

aujourd'hui, il veille au respect des droits

fondamentaux. En 1958, la souveraineté

nationale était jugée intangible ; aujourd'hui,

elle ne fait plus obstacle à des transferts de

compétences dans des domaines aussi

sensibles que la monnaie ou la politique

d'immigration. En 1958, ... Cette présentation

en opposition pourrait encore se prolonger

puisque la Constitution de 1958 a "subi", à ce

jour [29 mars 2003], dix-sept révisions, et

d'autres révisions sont en perspective. En

d'autres termes, si la France vit depuis 1958

avec la même Constitution - ce qui représente,

au regard de son histoire, un petit exploit -

cette Constitution n'est plus aujourd'hui ce

qu'elle était en 1958 !

Rien d'anormal à cela. Toute Constitution

prévoit toujours que ses dispositions peuvent

être modifiées, complétées ou supprimées.

Aussi fiers soient-ils de leur œuvre, les

constituants restent assez sages pour savoir que

leur travail n'est jamais parfait, que l'usage du

texte peut faire apparaître des difficultés

inédites ou imprévisibles au moment de sa

conception, ou encore que la marche du temps

et l'évolution de la société peuvent susciter de

nouvelles exigences constitutionnelles. Cette

sagesse, au demeurant, se nourrit d'une

philosophie politique, celle qui fait de la nation

souveraine l'origine de tout et qui postule, en

conséquence, sa totale et permanente liberté :

la nation n'est pas faite par la Constitution,

c'est elle qui fait la Constitution et reste

constamment maître de son contenu. SIEYES,

dans "Qu'est-ce que le Tiers Etat ? ", l'affirme

sans détour : "il serait ridicule de supposer la

nation liée elle-même par la Constitution à

laquelle elle a assujetti ses mandataires. Non

seulement la nation n'est pas soumise à une

Constitution, mais elle ne peut pas l'être, mais

elle ne doit pas l'être, ce qui équivaut encore à

dire qu'elle ne l'est pas". Et, dans son article

28, la mythique Constitution du 24 juin 1793

traduit cette philosophie en un principe clair : "

un peuple a toujours le droit de revoir, de

réformer et de changer sa Constitution. Une

génération ne peut assujettir à ses lois les

générations futures".

Cette totale liberté constituante du peuple,

parfaitement compréhensible dans son principe

démocratique, rencontre cependant sur son

chemin d'autres exigences, également

démocratiques, qui justifient une codification

du pouvoir de révision. Une Constitution, en

effet, n'est pas un texte ordinaire ; c'est la Loi

des lois, l'acte solennel par lequel une société

déclare les principes qui la fondent, qui la

rassemblent et qui l'organisent. Ce texte-là ne

peut être changé aussi facilement qu'une loi

ordinaire ; il faut une procédure particulière,

plus solennelle, plus exigeante, qui

corresponde à la qualité de l'acte à modifier ; il

faut distinguer le pouvoir de faire les lois du

pouvoir de réviser la Loi. Comme la plupart

des Constitutions, celle de 1958 opère cette

distinction en réservant un titre spécial à la

révision constitutionnelle - le titre XVI - et un

article unique - l'article 89.

Ces dispositions particulières règlent quatre

questions :

- L'initiative de la révision. Elle appartient

"concurremment au Président de la République

sur proposition du Premier ministre et aux

membres du Parlement". Initiative partagée

donc entre les parlementaires et l'exécutif, mais

surtout au sein même de l'exécutif : ni le

Président ni le premier ministre ne peuvent

engager seul une procédure de révision ; le

Président doit attendre - ou solliciter - la

proposition du Premier ministre, et, en retour,

le Premier ministre doit attendre - ou

provoquer - la réponse du Président à sa

proposition. Quand l'initiative de la révision

vient de l'exécutif, l'accord du Président et du

Premier ministre est ainsi nécessaire ; exigence

relativement facile à satisfaire si l'un et l'autre

appartiennent à la même famille politique,

beaucoup moins dans l'hypothèse d'une

cohabitation au sommet de l'Etat.

- L'adoption du projet ou de la proposition.

Qu'il vienne de l'exécutif - projet - ou des

parlementaires - proposition - le texte doit être

voté par chacune des deux assemblées "en

termes identiques". La précision est

importante. A la différence de la procédure

législative ordinaire où le Premier ministre

peut, en cas de désaccord persistant entre les

deux chambres, provoquer la réunion d'une

commission mixte paritaire pour tenter

d'aboutir à un texte commun - et même

demander à l'Assemblée nationale de statuer

définitivement - la procédure de révision ne

prévoit aucun moyen de forcer l'accord entre

députés et sénateurs. Ici, les deux assemblées

ont un égal pouvoir ; en maintenant sa

rédaction, en refusant de prendre en compte les

Page 64: Fiche de Td Second Semestre 2013

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modifications de l'autre, chacune peut faire

durer les débats indéfiniment et, de fait,

bloquer la révision. Plusieurs projets ont ainsi

échoué à ce stade, par obstruction du Sénat :

l'extension du champ du référendum (1984),

l'extension aux personnes du droit de

provoquer le contrôle de la conformité d'une

loi aux droits fondamentaux (1990, 1993) ...

- La ratification. Deux situations doivent être

distinguées : ou les parlementaires sont à

l'origine de la révision, et la ratification se fait

obligatoirement par référendum ; ou l'exécutif

est à l'origine, et le Président de la République

a le choix entre la ratification par référendum

ou la ratification par le Congrès. Le Congrès

est la réunion, dans une même salle et au

château de Versailles, des députés et des

sénateurs qui doivent voter le projet à la

majorité des trois cinquièmes des suffrages

exprimés pour qu'il soit ratifié. La raison de

cette différence de traitement entre projet et

proposition est, évidemment, politique : le

général de Gaulle craignait que les initiatives

parlementaires de révision aient pour objet de

détruire son œuvre ; aussi, connaissant la très

grande réserve des députés et sénateurs à

l'égard de la pratique référendaire, il espérait

limiter leurs "envies" de révision en les

soumettant obligatoirement au référendum. Il

n'avait pas tort.

- Les limites de la révision. Elles peuvent être

classées en deux catégories principales.

D'abord, les limites justifiées par les

circonstances ; pour éviter que les révisions se

fassent sous la pression de l'occupant ou d'un

conflit, il est interdit d'engager ou de

poursuivre une procédure de révision "lorsqu'il

est porté atteinte à l'intégrité du territoire" ;

pour éviter aussi qu'un Président "intérimaire"

ne profite de la situation, l'usage de l'article 89

est interdit "durant la vacance de la Présidence

de la République" ; pour éviter encore qu'un

Président en exercice ne saisisse l'occasion

d'une crise exceptionnelle, il lui est interdit -

par la décision du Conseil constitutionnel du 2

septembre 1992 - de changer la Constitution

lorsqu'il fait application des pouvoirs de

l'article 16. Ensuite, des limites portant sur le

contenu : "la forme républicaine du

gouvernement, précise le dernier alinéa de

l'article 89, ne peut faire l'objet d'une révision".

Si l'obligation de respecter la "forme

républicaine" signifie l'interdiction de rétablir

la monarchie ou l'empire, la limite imposée au

pouvoir de révision est faible car le risque d'un

tel rétablissement est lui-même faible ; si, en

revanche, l'expression signifie obligation de

respecter les valeurs et principes qui donnent à

un régime sa "forme républicaine" - par

exemple, la laïcité, le service public, l'égalité,

la fraternité; - la liberté du pouvoir constituant

se trouverait fortement réduite. Si cette

question d'interprétation reste en suspens, le

Conseil constitutionnel a rappelé, dans sa

décision du 2 septembre 1992, l'ensemble de

ces limites et laissé entendre qu'il pourrait, le

cas échéant, sanctionner leur non-respect.

Mais, l'article 89 n'interdisant pas une révision

des limites qu'il pose, le pouvoir constituant

pourrait parfaitement les supprimer et

retrouver ainsi une totale liberté de décision, y

compris pour modifier la forme républicaine

du gouvernement ...

Et l'article 11 ? Une révision de la Constitution

est-elle possible par le moyen de l'article 11 ?

En 1958, chacun s'accordait pour considérer

que la Constitution définissait une seule

procédure de révision, celle prévue à l'article

89. Mais, en 1962, l'utilisation par le général

de Gaulle de l'article 11 pour modifier le mode

d'élection du Président de la République oblige

à reprendre la lecture de cet article, et en

particulier de la disposition prévoyant que peut

être soumis au référendum "tout projet de loi

portant sur l'organisation des pouvoirs

publics". Or, juridiquement, il est clair qu'un

des objets principaux d'une Constitution est

d'organiser les pouvoirs publics ; la première

loi constitutionnelle de la IIIè République est,

d'ailleurs, intitulée "loi relative à l'organisation

des pouvoirs publics". La possibilité d'une

révision par le moyen de l'article 11 est donc

constitutionnellement défendable. Pourtant, ce

sont surtout des considérations politiques qui

ont été avancées pour justifier l'usage de

l'article 11. La procédure qu'il institue procure,

en effet, deux "avantages" - qui peuvent être

lus aussi comme deux "inconvénients" :

- La mise hors jeu du Parlement. Avec l'article

11, le projet de révision, présenté par le

Président de la République sur proposition du

Premier ministre, n'est ni discuté ni voté par les

chambres ; il est directement soumis au vote

du peuple par référendum. La seule obligation

pour le gouvernement est de faire sa

proposition de révision pendant la durée des

sessions parlementaires et de l'accompagner

d'une déclaration suivie d'un débat dans

Page 65: Fiche de Td Second Semestre 2013

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chacune des deux assemblées ; mais aucun

travail ni, a fortiori, aucun vote sur le projet

lui-même ne sont prévus. Un Parlement en

désaccord avec le projet ne pourrait manifester

son opposition que par le dépôt et le vote d'une

motion de censure.

- La suppression des limites. L'article 11 ne

prévoit aucune limite de circonstances ou de

contenu à l'exercice du pouvoir de modifier

directement par référendum l'organisation des

pouvoirs publics. Sauf à considérer que les

limites énoncées à l'article 89 sont également

valables pour l'article 11 - mais aucun renvoi

n'est fait d'un article à l'autre - le pouvoir de

révision est, ici, totalement libre.

Au fond, l'article 11 ne s'est imposé comme

modalité possible de révision que parce que

l'article 89 donne au Sénat, chambre haute

issue d'un suffrage indirect, un pouvoir de

blocage ; hostile, en 1962, à l'élection

populaire du Chef de l'Etat, il n'aurait jamais

laissé "passer" cette révision par la procédure

de l'article 89. Contourner le refus prévisible

du Sénat fut sans doute, à cette époque, la

véritable raison du recours à l'article 11.

Au demeurant, l'article 11 n'a été utilisé que

deux fois comme moyen de révision, en 1962

et, sans succès, en 1969, alors que l'article 89

l'a été à neuf reprises ; ce dernier reste ainsi la

procédure de droit commun de la révision

constitutionnelle. Mais, article 11 ou article 89,

à trop souvent changer la Constitution il arrive

qu'un pays change, sans s'en apercevoir, de

Constitution; la meilleure solution, alors, est

peut-être que le peuple reprenne, dans sa

globalité, son pouvoir constituant.

Document 4 : DÉCRET DU 17 JUILLET 2008 TENDANT À SOUMETTRE UN

PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE AU PARLEMENT RÉUNI EN CONGRÈS

NOR : HRUX0817196D

Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre,

Vu l’article 89 de la Constitution,

Décrète :

Art. 1er. − Le projet de loi constitutionnelle de

modernisation des institutions de la Ve

République, voté en termes identiques par

l’Assemblée nationale lors de sa séance du 9

juillet 2008 et par le Sénat lors de sa séance du

16 juillet 2008, dont le texte est annexé au

présent décret, est soumis au Parlement

convoqué en Congrès le

21 juillet 2008.

Art. 2. − L’ordre du jour du Congrès est fixé

ainsi qu’il suit :

Vote sur le projet de loi constitutionnelle de

modernisation des institutions de la Ve

République.

Art. 3. − Le présent décret sera publié au

Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 17 juillet 2008.

NICOLAS SARKOZY

Par le Président de la République :

Le Premier ministre,

FRANÇOIS FILLON

A

Page 66: Fiche de Td Second Semestre 2013

66/92

FICHE N° 8 LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL (I)

Organisation, contrôle de constitutionnalité a piori et QPC

I/ DOCUMENTS REPRODUITS

1. Les membres du Conseil Constitutionnel

2. Les services du Conseil Constitutionnel

3. Georges Vedel, 9 ans au Conseil Constitutionnel, extraits

4. La QPC en bref (site de la cour de cassation)

II/ bibliographie AVRIL (P.), GICQUEL (J.), Le Conseil constitutionnel, Montchrestien, Clefs, 1992.

FAVOREU (L.), La politique saisie par le droit, Paris, Economica, 1988.

FAVOREU (L.), PHILIP (L.), Le Conseil constitutionnel, Paris, PUF, « Que sais-je ? » n° 1724, 199l.

GENEVOIS (B.), « L'influence du Conseil constitutionnel », Pouvoirs, D' 49, 1989, pp. 47-56.

HAMON (L.), Les juges de la loi, naissance et rôle d'un contre-pouvoir: le Conseil constitutionnel,

Fayard, 1987.

LUCHAIRE (F.), Le Conseil constitutionnel, Paris, Economica, 1980 & 2ème édition refondue,

Economica, 1997.

POULLAIN (B.), La pratique française de la justice constitutionnelle, Paris, Economica, 1990.

ROUSSILLON (H.), Le conseil constitutionnel, Dalloz, 2000, 3ème

édition.

STIRN (B.), Les sources constitutionnelles du droit administratif, Paris, LGDJ, 1995.

TURPIN (D.), Le Conseil constitutionnel, son rôle. sa jurisprudence, Hachette, 1995.

Les grandes décisions du Conseil Constitutionnel, Favoreu et Philip Sirey, Dalloz.

Revue Pouvoirs sur le Conseil Constitutionnel, 1989 et 2003 (n°105).

III/ Notions à connaître

Bloc de constitutionnalité - Principes de valeur constitutionnelle - Principes fondamentaux

reconnus par les lois de la République - Principes généraux du droit

IV/ EXERCICES SUGGERES

a) Le Conseil constitutionnel, une innovation dans l’histoire constitutionnelle de France ?

b) Le Conseil constitutionnel, un « gouvernement des juges » ?

Page 67: Fiche de Td Second Semestre 2013

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c) Le bloc de constitutionnalité : notion et évolution.

d) Le contrôle constitutionnel en France et à l’étranger : forces et faiblesses du modèle

français.

e) Le Conseil constitutionnel, une institution perfectible ?

Document 1 : Les membres du Conseil Constitutionnel

Jean-Louis DEBRÉ, nommé par le Président de la République en février 2007

Valéry GISCARD D'ESTAING, membre de droit

Jacques CHIRAC, membre de droit

Pierre STEINMETZ, nommé par le Président de la République en février 2004

Jacqueline de GUILLENCHMIDT, nommée par le Président du Sénat en février 2004

Renaud DENOIX de SAINT MARC, nommé par le Président du Sénat en février

2007

Guy CANIVET, nommé par le Président de l'Assemblée nationale en février 2007

Michel CHARASSE, nommé par le Président de la République en février 2010

Hubert HAENEL, nommé par le Président du Sénat en février 2010

Jacques BARROT, nommé par le Président de l'Assemblée nationale en février 2010

Claire BAZY-MALAURIE, nommée par le Président de l'Assemblée nationale en août

2010

Document 2 : les services du Conseil Constitutionnel

Le Conseil constitutionnel est organisé en cinq services placés sous l'autorité directe du Secrétaire

général :

1) Le service administratif et financier comporte un chef de service, Trésorier du Conseil

constitutionnel et sept personnes dont : trois secrétaires, un responsable des achats, un responsable du

service intérieur, un technicien de maintenance et un agent de sécurité

2) Le service juridique comporte trois membres : un magistrat de l'ordre judiciaire, un magistrat de

l'ordre administratif et un fonctionnaire du Parlement, assistés de trois secrétaires.

3) Le service de bibliothèque et de documentation comporte un chef de service, un webmestre, deux

documentalistes et deux aide-documentalistes ; ce service accueille des stagiaires en thèse de droit

public.

4) Le service des relations extérieures comporte un chef de service, trois chargées de mission et une

secrétaire.

5) Le service du greffe et de l'informatique comprend trois collaborateurs sous l'autorité du greffier du

Conseil constitutionnel, chef de service.

Il faut signaler aussi les personnels spécialisés dont : les chauffeurs ; le majordome et les huissiers ; les

hôtesses ; la cuisine ; l'entretien des locaux ; le secrétariat de la Présidence ; les secrétariats des

membres et du conseiller technique.

L'ensemble des services du Conseil compte 55 personnes au 1er janvier 2006.

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Document 3 : Georges Vedel, 9 ans au Conseil Constitutionnel, extrait

Le Débat. - Vous venez de Quitter le Conseil

constitutionnel. Quel bilan faites-vous de

l'expérience que vous venez de vivre ?

Georges Vedel. - Je commencerai par dire, à

titre personnel, si vous me le permettez, que

j'ai été parfaitement heureux au Conseil

constitutionnel. J'y ai rempli une fonction qui

était l'épanouissement d'une carrière de juriste

et m'a fait passer de la réflexion, de la critique

et de la proposition à la décision proprement

dite, ou, du moins, à ma part de décision au

sein du Conseil.

J'y ai bénéficié d'autre part d'une expérience

étendue, puisque ces neuf ans ont vu deux

élections présidentielles, trois élections

législatives, trois présidents successifs du

Conseil constitutionnel lui-même. La vie

politique, en forme d'alternance (1981, 1986,

1988), a offert de véritables conditions de

laboratoire pour observer l'institution.

Au total, celle-ci me paraît avoir bien

fonctionné. Je retiendrai à cet égard deux

notations principales.

La première, c'est qu'il a été possible, non pas

en dépit, mais à la faveur de ces changements

politiques engendrant des questions de

principe, de poser des règles permanentes et

objectives, susceptibles d'opérer

indépendamment de la nature du pouvoir en

place, qu'il soit de droite ou de gauche. Tout ce

que le Conseil a pu formuler par exemple dans

sa décision en matière de liberté de la presse à

propos de la loi Fillioud en 1984 a pu être

réaffirmé littéralement à propos de la loi

Léotard après l'alternance de 1986. La part de

censure ou d'approbation s'appliquait dans le

premier cas à des textes de gauche, dans le

second cas à des textes de droite, mais le

même cap a été tenu. De même, la doctrine

développée sur l'égalité démographique des

circonscriptions électorales, à propos d'une loi

sur la Nouvelle-Calédonie votée par la gauche,

a été appliquée ensuite au redécoupage des

circonscriptions en France métropolitaine

conduit par la droite. J'ai donc eu

véritablement le sentiment réconfortant, pour

un juriste, que la construction d'un contrôle de

constitutionnalité n'est pas une œuvre de

fantaisie. Elle s'appuie, dans un pays comme la

France sur des textes (non seulement la

Constitution, mais la Déclaration des droits de

l'homme et du citoyen, le Préambule de 1946)

qui ont une valeur objective et permanente.

J'ajoute que, dans le même temps, nous ne

sommes pas tombés dans le « gouvernement

des juges ». Nous nous sommes refusés,

contrairement à ce qu'a fait jadis la Cour

suprême des Etats-Unis ou à ce que fait parfois

la Cour constitutionnelle allemande, à

invoquer des principes non puisés dans les

textes, mais résultant de la philosophie

politique ou morale reconnue par les juges. Le

gouvernement des juges commence quand

ceux-ci ne se contentent pas d'appliquer ou

d'interpréter des textes, mais imposent des

normes qui sont en réalité des produits de leur

propre esprit. Je ne crois pas dans l'ensemble

que nous ayons succombé à cette tentation.

Je voudrais en second lieu corriger une erreur

d'interprétation fréquente en ce qui concerne le

rôle du Conseil constitutionnel. On constate

qu'il a été également désagréable à des

gouvernements de gauche et à des

gouvernements de droite et on en conclut que

le Conseil joue un rôle de régulateur chargé de

combattre les extrêmes de la vie politique.

Certains le louent de cette sage modération.

D'autres le critiquent, estimant anormal que

des changements électoraux importants voient

leurs effets limité par les décisions de neuf

personnes siégeant au Palais-Royal. L'une et

l'autre vision reviennent à faire du Conseil

constitutionnel une sorte de Sénat de la IIIe

République, chargé de freiner le balancier pour

qu'il n'aille ni trop à droite ni trop à gauche.

Cette façon de voir est profondément erronée.

Le Conseil constitutionnel n'intervient pas au

nom d'une doctrine politique qui serait quelque

chose comme : « II ne faut pas aller trop loin ».

Il se borne à constater que, à un moment

donné, la Constitution ne permet pas au

législateur d'aller au-delà de certaines limites

dans un sens ou dans l'autre. Ces limites sont

tracées non par ce qui serait politiquement

excessif, mais par le fait que certaines mesures

exigent une révision constitutionnelle. Tout le

système constitutionnel repose en effet sur

l'idée d'un consensus fondamental, en forme de

pacte, portant sur de grands principes, et qui ne

peut être modifié que dans des conditions

solennelles, à des majorités renforcées ou par

référendum - ce que traduit le mécanisme des

révisions constitutionnelles. Ces exigences

juridiques inhérentes à l'idée même de

Page 69: Fiche de Td Second Semestre 2013

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constitution ont pour conséquence qu'une

majorité parlementaire ne puisse pas tout faire

si elle n'est pas assez forte pour engager une

révision contrôlée par un référendum. Sans

doute les électeurs confèrent un mandat à des

partis mais les partis majorent généralement ce

mandat. Les partis ont toujours tendance à

vouloir aller plus loin que les électeurs. Il est

clair qu'en 1981 le corps électoral n'avait

nullement donné aux socialistes un mandat de

rupture avec le capitalisme, pas plus qu'il

n'avait donné à la droite en 1986 le mandat de

promouvoir un libéralisme tous azimuts. Le

rôle du Conseil constitutionnel n'est pas du

tout en soi de combattre les positions extrêmes

mais l'agencement juridique qu'il met en œuvre

aboutit, politiquement et par lui-même, à

prévenir les usurpations que les appareils

politiques pourraient commettre par abus du

mandat qu'ils ont réellement reçu des électeurs.

Le Débat. - Vous avez été le témoin de la

période de montée en puissance du Conseil

constitutionnel. Comment avez-vous suivi de

l'intérieur ce renforcement à la fois symbolique

et réel de l'institution ?

G. V. - Lorsque je suis arrivé en 1980, un

certain nombre de choses essentielles étaient

déjà en place. Il était acquis d'abord que, pour

le Conseil constitutionnel, faisaient partie de la

Constitution, de façon intégrale, la Déclaration

des droits de 1789, le Préambule de 1946 et les

principes fondamentaux reconnus par les lois

de la République (auxquels renvoie le

Préambule de 1946). On le savait avec

certitude depuis la fameuse décision de 1971

concernant le droit d'association. C'est un

acquis d'autant plus important que les écrivains

(je dis bien les « écrivains » et non pas les

auteurs de la Constitution) ne l'avaient pas

prévu. Second acquis des années soixante-dix :

la révision constitutionnelle de 1974 fait

pratiquement passer la saisine du Conseil en

matière de contrôle de constitutionnalité des

lois des mains des quatre Grands (président de

la République, Premier ministre, présidents des

assemblées) aux mains de l'opposition quelle

qu'en soit la couleur. À mon arrivée, en 1980,

les socialistes alors dans l'opposition avaient

pris l'habitude de déférer au Conseil toutes les

lois de quelque importance.

Un élan nouveau a été donné en 1981 par le

changement de président de la République et le

changement de majorité parlementaire. Tout

un train législatif a été mis en route : contre-

pied des lois votées par l'ancienne majorité ;

questions nouvelles, comme les

nationalisations par exemple. Chaque session

de l'Assemblée a mis sur le tapis du Conseil

des lois nouvelles et des problèmes nouveaux.

Par exemple, jusqu'en 1981, la liberté de la

presse était quelque chose d'assez simple : elle

consistait en ceci qu'il n'y avait pas de censure.

À partir de 1982, il a fallu se poser le problème

de savoir si la liberté de la presse se réduisait à

l'absence de censure. Ne comporte-t-elle pas

des corollaires (transparence financière,

pluralisme) qu'il incombe au législateur

d'organiser, non pour limiter la liberté de la

presse, mais pour la rendre effective ? Autre

exemple : les nationalisations étaient devenues

depuis 1946 une matière théorique. En 1981,

elles ont fait surgir une série de problèmes:

pourquoi nationaliser ? Que peut-on

nationaliser ? Comment faut-il indemniser ? Et

en sens inverse, cinq ans après : peut-on «

dénationaliser » ? Dans quelles conditions ?

Les problèmes tant de principe que de

technique juridique se sont multipliés. Comme

si des hypothèses théoriques du temps de paix

étaient éprouvées sur le terrain en temps de

guerre.

Le Débat. - Cette période a été aussi celle où le

rôle d'une institution jusqu'alors assez

confidentielle a été perçu par l'opinion

publique, ne serait-ce qu'à la faveur des

controverses dont elle s'est mise à faire

l'objet...

G. V. - En effet, et cela a d'ailleurs entraîné le

Conseil à faire œuvre pédagogique, même si

cela ne concerne qu'un public restreint.

Jusque-là, la tradition dans les rédactions du

Conseil, à l'instar de celles du Conseil d'État,

allait dans le sens de la brièveté. A partir du

moment où la contestation des décisions par le

monde politique est devenue vive, le Conseil a

entrepris de manière systématique un travail

juridico-pédagogique d'explication. Par

exemple la décision du 16 janvier 1982 sur les

nationalisations comporte, non pas une longue

dissertation érudite à la manière de la Cour

allemande ou italienne, mais tout de même une

explication substantielle des motifs et des

choix. Actuellement le Conseil a pour habitude

de rédiger ses motifs en trois points :

l'argumentation de ceux qui critiquent la loi ;

ce que l'on peut ou non leur répondre ; ce qu'il

Page 70: Fiche de Td Second Semestre 2013

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faut décider. Dans le même sens, et afin de

faire bien comprendre à l'opinion que le

Conseil n'est pas une troisième chambre

politique, les décisions citent les textes

constitutionnels leur servant de base.

Le Débat. - Vous avez l'impression que cet

effort pédagogique a porté ses fruits et que le

principe du contrôle de la constitutionnalité

des lois est entré dans les mœurs françaises, en

rupture avec une tradition deux fois séculaire

de souveraineté parlementaire ?

G. V. - Je crois qu'il y est entré. De même

qu'on annonçait que les Français seraient

horrifiés à l'idée d'élire eux-mêmes leur

président de la République alors qu'ils s'en sont

montrés plutôt satisfaits, de même on nous

disait que les Français seraient horrifiés à l'idée

que le législateur puisse être contrôlé. Or, ils

ont l'air de trouver, là aussi, que ce n'est pas

une mauvaise chose. Le contrôle de

constitutionnalité fait partie, si je puis

employer une expression familière, du confort

moderne des démocraties. Nous sommes venus

à l'instar de nos voisins européens, comme on

est venu à la machine à laver et à la salle d'eau

non par simple mode, mais pour vivre mieux.

De plus, le contrôle de constitutionnalité, et

c'est un aspect vraiment important, nous met

au niveau des exigences internationales.

L'opinion n'est pas encore consciente - ce sera

sa prochaine découverte - de l'importance

pratique que prend la Convention européenne

des droits de l'homme. La Cour européenne

des droits de l'homme tape avec désinvolture

sur les doigts des législateurs nationaux. Les

Suisses ont eu la surprise voici un an par

exemple, de voir censurer dans leur loi sur le

divorce une disposition qui permettait au juge

d'interdire pendant un certain temps le

remariage de gens qui avaient abusé du

divorce. L'un des mérites du Conseil

constitutionnel, c'est que, comme il existe une

convergence très grande entre les principes de

1789 et de 1946, tels qu'il les interprète, et la

jurisprudence de la Cour de Strasbourg, son

intervention évite les recours à La juridiction

européenne. En 1981, les cabinets d'avocats

internationaux s'attendaient à un vaste

contentieux international sur le principe des

nationalisations et sur les indemnisations de

celles-ci. Finalement il n'y a presque pas eu de

procès, parce que la décision du Conseil a

conduit le législateur à revoir ses méthodes

d'évaluation et a ainsi coupé court au

contentieux international. Je ne peux pas dire

en mon âme et conscience qu'il n'y a pas de

démocratie sans contrôle de constitutionnalité,

puisque les Anglais s'en passent fort bien et

qu'on ne peut pas récuser leur démocratie.

Mais je pense que le contrôle de

constitutionnalité est un élément important du

confort démocratique et c'est bien ainsi que les

Français l'ont compris et adopté.

Le Débat. - Que pensez-vous de la perspective

d'un élargissement de la saisine de Conseil

constitutionnel, tel qu'il a été récemment

évoqué ?

G. V. - Je suis tout à fait d'accord sur ce point

avec les idées exprimées par le président

Robert Badinter et sur l'analyse qui les sous-

tend. Je le rejoins pour penser que nous avons

peut-être le meilleur système de contrôle de

constitutionnalité, à une réserve près.

L'avantage du système français tient à son

caractère préventif : c'est avant sa

promulgation que la loi est déférée au Conseil.

Certes cela va parfois déchaîner les

polémiques mais pendant au maximum un

mois. En outre, une fois que la décision sera

prise, l'expérience le prouve, au bout de quinze

jours, personne n'en parlera plus. Enfin si la loi

n'est pas censurée, tout le monde est fixé sur sa

validité : les particuliers, l'administration, le

législateur. Chacun peut vaquer à sa tâche sans

se demander si quatre ou cinq ans après,

comme ce peut être le cas dans d'autres

système de contrôle, on ne va pas remettre en

cause la constitutionnalité de la loi et donc la

sécurité juridique. Le caractère rustique de

notre instrument en fait le mérite.

Il y a toutefois une lacune, et Robert Badinter

la dénonce avec raison : c'est que le système

peut laisser passer des lois inconstitutionnelles.

C'est d'abord le cas des lois anciennes

antérieures à 1958 qui ont nécessairement

échappé à tout contrôle. Une parenthèse : le

Conseil constitutionnel et les juristes se

penchent avec beaucoup d'attention sur les

atteintes possibles à la liberté individuelle en

cas de garde à vue, de vérification d'identité,

de fouille des véhicules, etc. Dans le même

temps, on oublie que, sur n'importe quel point

du territoire, un monsieur qui vous dit

«Douane» et n'invoque d'ailleurs aucun motif

particulier de suspicion peut non seulement

fouiller votre voiture, mais vous avec, sans

aucune restriction ! II y a aussi le problème des

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lois postérieures à 1958 et qui ne sont pas

déférées au Conseil parce que les saisissants se

rendraient impopulaires. Il conviendrait donc

de prévoir une soupape de sûreté permettant de

remettre en cause les textes ainsi rescapés. Il

ne faut pas pour autant en faire une procédure

d'accès facile, auquel cas le Conseil serait

destiné à devenir une machine énorme. Mais

lorsque dans un procès, en fin de parcours,

devant la Cour de cassation ou le Conseil

d'État, une exception sérieuse

d'inconstitutionnalité serait élevée, on pourrait

envisager que la Cour ou le Conseil d'État en

réfère au Conseil constitutionnel. Ce

perfectionnement ne serait pas très lourd et

n'exigerait pas un renforcement des moyens du

Conseil. Car, pour employer un langage

mercantile, le rapport qualité/prix est excellent

! Avec neuf membres, un secrétaire général et

quatre collaborateurs, plus un personnel

administratif ou de service (quarante personnes

en tout), on reste très loin de l'appareil

majestueux de la Cour constitutionnelle

allemande, italienne ou espagnole.

Le Débat. - Que pensez-vous de la critique qui

met en cause le caractère peu démocratique

résultant du secret des délibérations du

Conseil, par opposition, par exemple, au

système de la publication des opinions

dissidentes aux États-Unis ?

G. V. -Le secret du délibéré n'est pas un tout. Il

a des degrés divers. Dans la tradition juridique

française, l'audience est publique, comme les

plaidoiries, les rapports ou les conclusions du

ministère public ou du commissaire du

gouvernement. La délibération des juges, en

revanche, est chez nous secrète. Mais il est des

pays où le délibéré est public. Je l'ai vu

pratiqué au Brésil, par exemple. Il existe

encore une autre forme de publicité comme

c'est le cas pour les juridictions (américaine,

notamment) qui admettent le dissent, l'opinion

dissidente. Je nuancerai donc ma réponse. Je

serais assez d'avis personnellement que le

Conseil puisse connaître une forme de

publicité élémentaire. Sans qu'il soit besoin de

tenir des audiences publiques, il serait admis

qu'il n'y a pas de pièce qui ait préparé la

décision qui ne puisse être publiée. Nous avons

fait d'ailleurs un pas en ce sens sous la

présidence de M. Daniel Mayer qui a assuré la

publication de la saisine. Les autres formes de

publicité me paraissent poser un problème

d'habitude. Les opinions dissidentes sont en

général plus fortement motivées que les

décisions de la majorité, pour la simple raison

que la décision majoritaire est nécessairement

synthétique. La rédaction qui rassemblera les

idées de huit juges sur neuf, avec leurs

nuances, aura beaucoup moins de « punch »

que l'opinion du seul opposant qui pourra se

déployer dans toute sa logique. Il y aurait

incontestablement en France un

affaiblissement de la décision par la

publication de l'opinion dissidente. Dans un

pays qui en a l'habitude, l'effet du dissent est

émoussé. Je me demande en revanche si en

France on ne parlerait pas beaucoup plus de

l'opinion dissidente que de la décision

majoritaire ! Sans doute l'accoutumance

finirait-elle par se produire, mais nous ne

savons pas ce que serait la transition. Il est plus

facile de rapprocher le tabouret du piano que

de rapprocher le piano du tabouret. De même il

est plus facile de rapprocher une constitution

des Français tels qu'ils sont que de rapprocher

les Français d'une constitution idéale. Notre

tradition judiciaire ne va pas dans le sens de la

publicité du dissentiment, et l'on ne peut pas

savoir quels dégâts produirait le changement,

le temps qu'il prendrait à s'acclimater et les

effets inattendus qu'il entraînerait. C'est le

même problème que celui du scrutin à un tour.

Bien sûr, en France, au bout de trente ans

d'usage paisible, le scrutin à un tour aboutirait

à une structure de partis à l'anglaise. Mais que

se passerait-il en fait pendant ces trente ans ?

Le Débat. - Vous faisiez tout à l'heure une

distinction entre les écrivains et les auteurs de

la Constitution. Pourriez-vous préciser ce que

vous entendiez par là ?

G. V.- C'est très simple. On est actuellement en

train de publier les travaux préparatoires de la

Constitution. Ces matériaux sont passionnants

du point de vue historique et politique. Mais

cette publication ouvre une tentation juridique

qu'il faut résolument repousser. De même

qu'on interprète les lois, quand elles ne sont

pas claires, d'après les travaux préparatoires,

on serait tenté d'interpréter la Constitution à la

lumière des documents qui arrivent maintenant

au jour. Mais une différence fondamentale

interdit ce parallélisme. Ce qui fonde la prise

en considération des travaux préparatoires

d'une loi, c'est le fait que les décideurs, c'est-à-

dire les votants, députés ou sénateurs, ont

connu les rapports des commissions, les

interventions dans le débat, etc., et qu'on peut

Page 72: Fiche de Td Second Semestre 2013

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savoir s'ils y ont ou non adhéré. C'est à partir

de là qu'on reconstitue l'intention du

législateur. En revanche, dans le système

d'élaboration de la Constitution de 1958, les

travaux préparatoires ont été conduits dans le

secret, qu'il s'agisse des délibérations

gouvernementales, des délibérations du comité

interministériel, de celles du groupe de travail,

du comité consultatif constitutionnel ou du

Conseil d'Etat.

Or quel était le décideur ? C'était le peuple

français. Le peuple français, quand il a voté,

n'avait sous les yeux que le texte de la

Constitution qu'il s'agit d'interpréter et le

discours du général de Gaulle, place de la

République le 4 septembre 1958. Ce que nous

découvrons aujourd'hui comme travaux

préparatoires lui était rigoureusement inconnu,

et ne saurait avoir de ce fait aucune portée

juridique. Leur portée historique est certes

considérable. Pour autant, on ne saurait donner

aux opinions individuelles, dont nous

apprenons ainsi l'existence, valeur de

directives pour l'interprétation de la

Constitution. Voilà pourquoi je me refuse à

parler des auteurs de la Constitution à propos

du général de Gaulle, de Michel Debré ou des

membres des différents conseils ou comités. Je

leur réserve l'appellation d'« écrivains » de la

Constitution. Les auteurs, ce sont les millions

de citoyens qui l'ont approuvée, et qui

n'avaient pas de travaux préparatoires à se

mettre sous la dent.

Document 4. La QPC en bref

La loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la

Constitution a été publiée au Journal o fficiel le 11 Décembre 2009. Cette loi, en vigueur à compter

du 1 er mars 2010, est applicable aux instances en cours . Le Conseil constitutionnel, saisi de sa

conformité à la Constitution, a validé le 03 décembre 2009 l’ensemble du texte voté. L’économie

générale du dispositif proposé tend à permettre au justiciable de contester la constitutionnalité

d’une disposition législative lors d'une instance en cours devant une juridiction lorsqu’il estime

que ce texte, applicable au litige ou à la procédure, ou constituant le fondement des poursuites, porte

atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit.

Rôle des juridictions du fond

La loi organique prévoit ainsi la faculté de soulever une question prioritaire de constitutionnalité au

cours de toute instance introduite devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat ou de la Cour de

cassation, y compris pour la première fois en cause d’appel ou en cassation. Le moyen

d’inconstitutionnalité ne peut être relevé d'office par le juge.

Au cours d’une information judiciaire, la question soulevée devant le juge d’instruction est portée

devant la juridiction d'instruction du second degré. La loi organique exclut en outre que la question

puisse être posée devant la Cour d'assises. Elle peut néanmoins être posée à l’occasion d’un appel

interjeté à l’encontre d'un arrêt rendu par une telle cour.

La juridiction devant laquelle le moyen d’inconstitutionnalité est soulevé doit procéder à un premier

examen, de nature limitée. Elle doit vérifier :

- que la disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement

des poursuites,

- que la disposition dont la constitutionnalité est contestée n'a pas déjà été déclarée conforme à la

Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf

changement des circonstances,

- que la question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.

Le mécanisme mis en œuvre impose à chaque étape de la procédure qu'il soit sursis à statuer sur le

litige ou le procès pénal. Des exceptions sont toutefois prévues, notamment lorsqu'une personne est

privée de liberté à raison de l'instance.

Page 73: Fiche de Td Second Semestre 2013

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En outre, le juge du fond n’est pas tenu de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité

mettant en cause, par les même motifs, une disposition dont la Cour de cassation ou le Conseil

constitutionnel est déjà saisi. En cas d’absence de transmission pour ce motif, elle sursoit à statuer

sur le fond, jusqu’à ce qu’elle soit informée de la décision de la Cour de cassation ou du Conseil

constitutionnel. Un tableau des questions posées est en ligne sur leurs sites Internet respectifs.

Rôle des cours suprêmes des deux ordres

Si la question soulevée satisfait à ces conditions, la juridiction la transmet, dans les huit jours de son

prononcé, à la juridiction suprême dont elle relève, laquelle doit à son tour se prononcer dans les

trois mois suivant la transmission. En l’absence de décision rendue dans les délais prévus, la

question est automatiquement transmise au Conseil constitutionnel.

L’arrêt de la Cour de cassation est rendu par une formation spécifique présidée par le premier

président et composée des présidents des chambres et de deux conseillers appartenant à chaque

chambre spécialement concernée.

Le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation saisit le Conseil constitutionnel de la question de

constitutionnalité si le moyen soulève, au delà des deux premiers critères guidant l’analyse des juges

du fond, une question nouvelle ou présentant un caractère sérieux.

Rôle du Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer, au terme d’une

procédure contradictoire tenue, sauf exception, en audience publique, par décision motivée et

publiée au Journal officiel. Aux termes de l’article 62 de la Constitution, une disposition déclarée

inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la

décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision.

Le Conseil constitutionnel détermine en outre les conditions et limites dans lesquelles les effets que la

disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause.

Un contrôle prioritaire de constitutionnalité

En tout état de cause, la juridiction du fond de même que les juridictions suprêmes, doivent, lorsqu'elle

sont saisies de moyens contestant la conformité d'une disposition législative d'une part aux droits et

libertés garantis par la Constitution et d'autre part aux engagements internationaux de la France, se

prononcer en premier sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'État

ou à la Cour de cassation.

Le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions confirmaient la place de la Constitution au

sommet de l'ordre juridique interne français sans méconnaître les engagements internationaux de la

France.

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FICHE N° 9 LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL (II)

Les méthodes du conseil constitutionnel

I/ DOCUMENTS REPRODUITS (extraits)

1. Noelle Lenoir, Le métier de Juge constitutionnel, extraits

2. la typologie des décisions du Conseil constitutionnel

3. CC, décision n° 71-44 DC, 16 juillet 197l, « Liberté d'association ».

4. CC, décision n°75-54 DC, 15 janvier 1975, « Interruption volontaire de grossesse ».

5. CC, décision n°83-165 DC, 20 janvier 1984 "enseignement supérieur".

6. CC, décision n°84-181 DC, 10 octobre 1984 "entreprises de presse", extraits.

7. CC, décision n°94-343 DC, 27 juillet 1994 "bioéthique".

II/ bibliographie

« Le contrôle de constitutionnalité - l », Documents d'études, Documentation française, n° 1-

15, 1994, pp. 13-50.

« Le contrôle de constitutionnalité - II », Documents d'études. Documentation française, n° l-

16, 1994.

CHAMPEIL-DESPLATS (V.) « Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la

République » , Economica, 2001.

DEBENE (M.), « Le Conseil constitutionnel et les principes particulièrement nécessaires à

notre temps», AJDA., 1978. 5 3 1.

DRAGO (G.) Contentieux constitutionnel, PUF, Thémis, 1998.

FAURE (B.), « Les objectifs de valeur constitutionnelle », RFDC., 1995.47.

GENEVOIS (B.), La jurisprudence du Conseil constitutionnel. Ed. STH, 1988.

JEANNEAU (B.), « Juridicisation et actualisation de la Déclaration des droits de 1789 »,

RDP., 1989, pp. 635-663.

LE MIRE (P.), « La jurisprudence du Conseil constitutionnel et les principes généraux du

droit », Mélanges Charlier, 1984, pp. 171 et s.

LUCHAIRE (F.), « Le contrôle préalable de constitutionnalité en France », RIDC., Journées

SLC, vol. 12 (1990), pp. 11-24.

MEUNIER (J.) Le pouvoir du CC, essai d’analyse stratégique, L.G.D.J.

III/ NOTIONS A CONNAITRE

Contrôle abstrait / concret - a priori / a posteriori - obligatoire / facultatif – spécialisé.

Statuer ultra petita, statuer infra petita. Bloc de constitutionnalité

IV/ EXERCICES SUGGERES

Le juge constitutionnel et la Déclaration des droits de l'homme.

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Le juge constitutionnel et les Traités.

Document 1 : Noelle Lenoir, Le métier de juge constitutionnel, extraits

Le Débat. - Mais au-delà de cette légitimité

morale, à partir de quoi le Conseil construit-il

ses décisions en droit ?

N. L. - Le socle de ces décisions est le " bloc

de constitutionnalité ", lequel comprend, on l'a

vu, la Constitution de 1958 elle-même, la

Déclaration des droits de l'homme et du

citoyen de 1789 d'inspiration libérale et le

préambule de la Constitution de 1946 qui

définit les droits économiques et sociaux. Ces

textes sont plus ou moins anciens et donc plus

ou moins adaptés aux défis actuels. Ceci

n'empêche pas le Conseil constitutionnel d'en

tirer les principes " nécessaires à notre temps "

pour reprendre la formule du préambule de

1946. Par exemple, dans sa décision de 1994

sur les lois de bioéthique, le Conseil a dégagé

le principe de la dignité de la personne

humaine à partir d'une simple phrase du

préambule de 1946. Or cette phrase ne parle

pas de la dignité qu'elle suggère seulement en

évoquant - c'était après la guerre - " les

régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader

la personne humaine... ". Identifier ainsi les

normes de référence applicables correspond à

la première étape du raisonnement du juge

constitutionnel français. Ensuite, il s'attache à

confronter les dispositions de la loi à ces

normes constitutionnelles.

Fonder une décision en droit répond à trois

impératifs.. La première obligation que

s'assigne le juge constitutionnel qu'il soit

d'ailleurs français ou non, est de se reporter à

sa jurisprudence, c'est à dire aux précédents.

Dans l'intitulé d'une chronique publiée il y a

dix ans, Bruno Genevois, ancien secrétaire

général du Conseil, se demandait : " La

jurisprudence du Conseil constitutionnel est-

elle imprévisible ? ". La réponse est nuancée.

D'un côté, la décision finale n'est pas donnée

d'avance. En particulier, le choix entre la

censure et la réserve d'interprétation dite

neutralisante reste dans la majorité des cas

toujours ouvert. D'un autre côté, les concepts et

les modes de raisonnement sur lesquels

s'appuie la jurisprudence sont la plupart du

temps les mêmes. Je ne suis pas loin de voir

dans le " culte du précédent " un impératif

kantien pour le juge constitutionnel. Le respect

du précédent est une garantie pour le

législateur dont les actes sont contrôlés, une

sécurité pour les citoyens dont les droits

fondamentaux sont protégés et un facteur de

légitimité pour le juge mis ainsi à l'abri du

reproche d’arbitraire. Les revirements de

jurisprudence ne sont bien sûr pas interdits et

même parfois souhaitables, à mes yeux ; mais

ils sont peu nombreux. Ils interviennent en

pratique moins souvent sur le fond qu'en

matière de procédure. Un exemple récent en

témoigne. En 1999, le Conseil est revenu sur

sa jurisprudence pour limiter la possibilité

d'amender un texte de loi adopté au Parlement

en commission mixte paritaire afin d'empêcher

le gouvernement de remettre en cause l'accord

intervenu entre les assemblées. J'ajoute que le

Conseil constitutionnel procède rarement par

ruptures. Il infléchit plutôt sa jurisprudence.

La deuxième règle d'or est plus spécifique à la

France et à un moindre degré à l'Italie. Elle est

que le juge doit s'abstenir de créer du droit. La

conception du rôle du juge n'est plus tout à fait

celle qui prévalait du temps de Montesquieu,

pour qui que le juge était la " bouche de la

loi ". Pour autant le juge français est l'un des

rares à ne pouvoir avouer qu'appliquer la loi,

c'est l'interpréter et donc contribuer à créer la

norme. Pour ce qui est du Conseil

constitutionnel, cela se traduit par l'affirmation

d'un respect scrupuleux des sources écrites de

la Constitution. Et ce, même si, en se fondant

sur ces dispositions écrites, le juge dispose en

fait d'une grande latitude pour faire émerger de

nouveaux principes, (la liberté contractuelle ou

le droit à un recours juridictionnel effectif pour

citer deux exemples récents).

Le troisième impératif est commun à toutes les

cours constitutionnelles. C'est ce que l'on

désigne habituellement comme le « self

restraint » que l'on peut traduire par le mot

« autolimitation ». Le juge constitutionnel

apprécie en droit les lois, et n'est en effet pas

habilité à porter sur elles un jugement en

opportunité politique. En rappelant dans

certaines décisions qu'il n'a pas " un pouvoir de

décision et d'appréciation de même nature que

celui du Parlement ", le Conseil ne cherche pas

seulement à se protéger. Il entend se

positionner en juge alors même que le contrôle

de constitutionnalité peut l'amener à interférer

Page 76: Fiche de Td Second Semestre 2013

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dans l'action gouvernementale. Ainsi, lorsqu'il

procède à un " test de proportionnalité " entre

les mesures prévues par la loi et les objectifs

poursuivis par le législateur, le Conseil

constitutionnel mentionne-t-il qu'il " ne saurait

rechercher si les objectifs que s'est assignés le

législateur auraient pu être atteints par d'autres

voies, dès lors que les modalités retenues par la

loi ne sont pas manifestement inappropriées ".

D'autres cours, comme la Cour suprême du

Canada, sont bien plus directives. Le Conseil

constitutionnel s'abstient en revanche

d'indiquer au législateur les moyens de

remédier à une inconstitutionnalité. Est-ce

pour atténuer la brutalité d'un contrôle de

constitutionnalité exercée " à chaud " ?

Le Débat. - Vous avez souligné à plusieurs

reprises l'évolution du contentieux soumis au

Conseil constitutionnel. Pourriez-vous préciser

les contours de cette évolution de la

jurisprudence ?

N. L. - Au cours des neuf années de mon

mandat, entre 1992 et 2001, plusieurs facteurs

semblent avoir influencé cette évolution : le

contexte politique lié aux changements de

majorités; mais surtout l'infléchissement du

rôle de l'État et donc de la loi ; les

transformations dans le paysage international ;

enfin les renouvellements dans la composition

du Conseil lui-même. Force est de constater

que les problèmes sur lesquels le Conseil a du

se pencher n'ont plus été les mêmes à quelques

années d'intervalle. Au début, les recours qui

émanaient alors de l'opposition de gauche,

étaient dirigés principalement contre des lois à

tendance sécuritaire : contrôles d'identité,

maîtrise de l'immigration, garde à vue des

mineurs, restriction des conditions d'accès à la

nationalité française , par exemple. Les

censures du Conseil consistaient alors à limiter

les restrictions pesant sur les libertés. Les

décisions étaient parfois vivement critiquées,

mais elles s'inscrivaient dans le droit fil de ce

qu'on attend d'une Cour constitutionnelle

chargée de protéger les droits fondamentaux.

La décision du 13 août 1993 sur l'immigration

est célèbre parce qu'elle a provoqué une crise

politique à cause de son interprétation libérale

du droit d'asile. Mais cette décision est à mon

avis surtout marquante en ce qu'elle a créé un

véritable droit constitutionnel des libertés

publiques pour les étrangers, alors que la

Constitution ne garantit expressément que les

" libertés fondamentales des citoyens ". A

partir de 1997, la matière des lois soumises au

Conseil a changé. Leur caractère économique,

fiscal ou social rend la tâche du Conseil plus

compliquée. D'une part, et notamment dans le

cadre du contrôle a priori, les subtilités de la

législation sociale ou fiscale en France ne

facilitent guère leur compréhension par le juge

même s'il prend soin de consulter des experts

chevronnés D'autre part et surtout, une

censure, peut sembler retirer des droits sociaux

alors que ce n'est ni l'intention du Conseil, ni la

réalité de la décision. Je songe par exemple

aux décisions en matière de réquisition de

logements pour les sans abri ou d'exonération

fiscale pour les plus démunis, qui ont pu

s'avérer moins facilement compréhensibles par

le public par rapport à la vocation d'une cour

constitutionnelle.

La jurisprudence du Conseil a elle-même

sensiblement évolué. Sans doute tient-elle

compte de la libéralisation de l'économie. Elle

fait valoir en tous les cas des principes qui

imposent à l'Etat de nouvelles règles de

comportement. Le principe constitutionnel

d'intelligibilité de la loi en particulier, inspiré

du droit allemand et du droit communautaire,

repose sur l'idée que les acteurs de la société

doivent pouvoir se déterminer par rapport aux

droits et obligations découlant de la législation.

Pour que ce droit à l'autodétermination puisse

s'exercer, encore faut-il que l'Etat fixe des

règles du jeu claires et que la loi soit

accessible. Dans le même esprit, le Conseil

constitutionnel a reconnu récemment la valeur

constitutionnelle de la liberté contractuelle.

C'est une nouveauté. Désormais, le juge

français a les mêmes outils conceptuels que les

autres juges constitutionnels. La liberté

contractuelle est par exemple l'un des quatre

grands piliers du droit constitutionnel

américain, à côté de l'equal protection

(principe d'égalité), le due process of law

(ingérence limitée de l'Etat dans le domaine

des droits et libertés des citoyens), et de la

reasonableness (destinée à éviter l'arbitraire).

Affirmée dans son principe par le Conseil

Constitutionnel en 1998, dans la décision sur la

loi Aubry I, la liberté contractuelle a été dans

la loi Aubry II le fondement de l'annulation de

dispositions qui remettaient en cause des

conventions sur la réduction du temps de

travail conclues sous l'empire de la loi

précédente. Le Conseil a ainsi fait primer la

négociation sur la loi. Autre signe d'une

Page 77: Fiche de Td Second Semestre 2013

77/92

sensibilisation accrue aux nécessités

économiques, le Conseil a renforcé la portée

de la liberté d'entreprendre en tant que liberté

constitutionnellement protégée. Il ne se

contente plus de s'assurer que la loi n'a pas

pour effet de la " dénaturer ", c'est à dire de

l'anéantir ; il veille à présent à ce que la liberté

d'entreprendre ne fasse pas l'objet d'atteintes

excessives. Cette jurisprudence tient compte de

la nouvelle donne d'une société ouverte à la

concurrence, dont les acteurs sont plus

autonomes et où il revient en premier lieu au

droit d'apporter une forme de stabilité à

l'organisation des rapports que peuvent

librement entretenir ces acteurs entre eux, et

avec l'Etat.

Parallèlement, le Conseil se montre plus

rigoureux en ce qui concerne la gestion de

l'État. Certes l'intérêt général incarné par l'Etat

induit des prérogatives de puissance publique,

mais sans que cela justifie des privilèges

exorbitants, en d'autres termes

disproportionnés par rapport aux missions

conférées à l'Etat. Telle est l'idée qui sous-tend

l'exigence de sincérité budgétaire. En

consacrant ce principe constitutionnel, le

Conseil a aussi cherché à renforcer les

pouvoirs de contrôle du Parlement, en tant que

représentation élue de la Nation. L'article 15 de

la Déclaration de 1789 ne précise-t-il pas que

" la société a droit de demander compte à tout

agent public de son administration " ? Dans la

même façon, le Conseil s'en est pris à la

pratique bien française des " validations

législatives ". Celles-ci étaient à l'origine

destinées à permettre de valider des opérations

de concours dans la fonction publique pour

éviter de porter préjudice aux candidats déjà

nommés. Mais elles servent de plus en plus à

légaliser rétroactivement des dispositions dont

l'application risque de faire condamner en

justice l'Etat pour le contraindre à verser des

sommes dues ou à rembourser des sommes

indûment perçues. Depuis 1995, le seul intérêt

de ménager les deniers de l'État ne justifie plus

que la loi interfère ainsi dans le déroulement

de procédures juridictionnelles en cours.

On peut rattacher au même souci de recentrage

du rôle de l'Etat une plus grande ouverture aux

aspirations décentralisatrices. A ce sujet, la

décision de 1991 sur le statut de la Corse, dont

on a surtout retenu la censure de la notion de

" peuple corse comme composante du peuple

français ", donne souvent lieu à une

interprétation inexacte. Cette décision

réaffirme l'indivisibilité de la République et

pour les mêmes motifs que ceux fondant la

décision de 1999 sur la Charte des langues

régionales du Conseil de l'Europe, elle regarde

comme incompatible avec nos fondements

constitutionnels, toute organisation

communautaire accordant des droits propres à

des groupes d'appartenance ethnique ou

linguistique. Pour autant, la décision de 1991

sur la Corse renforce la signification de

l'autonomie locale. En admettant la

particularité de la collectivité de Corse qui est

sans équivalent sur le plan national, elle ouvre

la voie à la diversité des modes de gestion

territoriale en renonçant à l'idée que l'unité de

la République impliquerait une uniformité

administrative. La portée du principe

constitutionnel de libre administration des

collectivités locales établi par la Constitution

se trouve encore élargie de par l'incorporation

récente de la notion d'autonomie fiscale. Cette

notion, validée au niveau constitutionnel par

une décision rendue en l'an 2000, interdit

désormais au législateur de diminuer la part

des ressources propres - notamment fiscales-

des collectivités locales dans leurs recettes au

point de porter atteinte à leur libre

administration.

Dans un autre ordre d'idées, le Conseil a traité

des questions de responsabilité qui sont au

coeur des débats de notre société : notamment

dans trois décisions toutes datées de 1999, il a

précisé la procédure de mise en jeu éventuelle

de la responsabilité pénale du chef de l'Etat -

devant la Haute Cour de Justice- , les

conditions générales de la responsabilité

pénale - en posant en principe que " nul n'est

responsable que de son propre fait " -, érigé en

principe constitutionnel le droit à réparation

des dommages dans le cadre de la

responsabilité civile.

Document 2. La typologie des décisions du Conseil constitutionnel (présentation par le

Sénat)

Page 78: Fiche de Td Second Semestre 2013

78/92

Hors le cas où le Conseil se déclare incompétent (sur une loi référendaire, par exemple), quatre types

de décisions sont susceptibles d'être rendues par le Conseil constitutionnel, dans le délai d'un mois qui

lui est imparti à compter de la date de saisine (pouvant être ramené à huit jours en cas d'urgence à la

demande du Gouvernement) :

les décisions de conformité (ou de non contrariété à la Constitution) ;

les décisions de conformité sous réserves d'interprétation [neutralisante, directive,

constructives ;

les décisions déclarant la loi déférée partiellement contraire à la Constitution ;

les décisions déclarant la loi déférée intégralement contraire à la Constitution.

En cas d'invalidation partielle, le Conseil peut décider que la disposition invalidée est inséparable de

l'ensemble de la loi ; en ce cas, celle-ci, comme en cas d'invalidation totale, ne peut être promulguée.

Dans le cas contraire, le Président de la République peut soit la promulguer (tronquée des articles

inconstitutionnels), soit demander, en application de l'article 10 de la constitution, une nouvelle

délibération au Parlement (par exemple : sur la loi sur l'évolution de la Nouvelle-Calédonie en 1985

ou, en avril 2003, sur l'article 4 de la loi relative au mode de scrutin pour les élections régionales).

Document 3 : Décision du 16 juillet 1971, Liberté d’association

Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971

Loi complétant les dispositions des articles 5 et

7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au

contrat d'association

Article 61 alinéa 2

Président du Sénat

Vu la Constitution et notamment son

préambule ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant

loi organique sur le Conseil constitutionnel,

notamment le chapitre II du titre II de ladite

ordonnance ;

Vu la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat

d'association, modifiée ;

Vu la loi du 10 janvier 1936 relative aux

groupes de combat et milices privées ;

1. Considérant que la loi déférée à l'examen du

Conseil constitutionnel a été soumise au vote

des deux assemblées, dans le respect d'une des

procédures prévues par la Constitution, au

cours de la session du Parlement ouverte le 2

avril 1971 ;

2. Considérant qu'au nombre des principes

fondamentaux reconnus par les lois de la

République et solennellement réaffirmés par le

préambule de la Constitution il y a lieu de

ranger le principe de la liberté d'association ;

que ce principe est à la base des dispositions

générales de la loi du 1er juillet 1901 relative

au contrat d'association ; qu'en vertu de ce

principe les associations se constituent

librement et peuvent être rendues publiques

sous la seule réserve du dépôt d'une déclaration

préalable ; qu'ainsi, à l'exception des mesures

susceptibles d'être prises à l'égard de catégories

particulières d'associations, la constitution

d'associations, alors même qu'elles paraîtraient

entachées de nullité ou auraient un objet

illicite, ne peut être soumise pour sa validité à

l'intervention préalable de l'autorité

administrative ou même de l'autorité judiciaire

;

3. Considérant que, si rien n'est changé en ce

qui concerne la constitution même des

associations non déclarées, les dispositions de

l'article 3 de la loi dont le texte est, avant sa

promulgation, soumis au Conseil

constitutionnel pour examen de sa conformité

à la Constitution, ont pour objet d'instituer une

procédure d'après laquelle l'acquisition de la

capacité juridique des associations déclarées

pourra être subordonnée à un contrôle

préalable par l'autorité judiciaire de leur

conformité à la loi ;

4. Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de

déclarer non conformes à la Constitution les

dispositions de l'article 3 de la loi soumise à

l'examen du Conseil constitutionnel

complétant l'article 7 de la loi du 1er juillet

1901, ainsi, par voie de conséquence, que la

disposition de la dernière phrase de l'alinéa 2

de l'article 1er de la loi soumise au Conseil

constitutionnel leur faisant référence ;

Page 79: Fiche de Td Second Semestre 2013

79/92

5. Considérant qu'il ne résulte ni du texte dont

il s'agit, tel qu'il a été rédigé et adopté, ni des

débats auxquels la discussion du projet de loi a

donné lieu devant le Parlement, que les

dispositions précitées soient inséparables de

l'ensemble du texte de la loi soumise au

Conseil ;

6. Considérant, enfin, que les autres

dispositions de ce texte ne sont contraires à

aucune disposition de la Constitution ;

Décide :

ARTICLE PREMIER - Sont déclarées non

conformes à la Constitution les dispositions de

l'article 3 de la loi soumise à l'examen du

Conseil constitutionnel complétant les

dispositions de l'article 7 de la loi du 1er juillet

1901 ainsi que les dispositions de l'article 1er

de la loi soumise au Conseil leur faisant

référence.

ARTICLE 2 - Les autres dispositions dudit

texte de loi sont déclarées conformes à la

Constitution.

ARTICLE 3 - La présente décision sera

publiée au Journal officiel de la République

française.

Document 4 : Décision du 15 janvier 1975, IVG

Considérant que l'article 61 de la

Constitution ne confère pas au Conseil

constitutionnel un pouvoir général

d'appréciation et de décision identique à

celui du Parlement, mais lui donne

seulement compétence pour se prononcer

sur la conformité à la Constitution des lois

déférées à son examen ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux

termes de l'article 55 de la Constitution :

"Les traités ou accords régulièrement

ratifiés ou approuvés ont, dès leur

publication, une autorité supérieure à celle

des lois, sous réserve, pour chaque accord

ou traité, de son application par l'autre

partie." ;

Considérant que, si ces dispositions

confèrent aux traités, dans les conditions

qu'elles définissent, une autorité supérieure

à celle des lois, elles ne prescrivent ni

n'impliquent que le respect de ce principe

doive être assuré dans le cadre du contrôle

de la conformité des lois à la Constitution

prévu à l'article de celle-ci ;

Considérant, en effet, que les décisions

prises en application de l'article 61 de la

Constitution revêtent un caractère absolu et

définitif, ainsi qu'il résulte de l'article 62

qui fait obstacle à la promulgation et à la

mise en application de toute disposition

déclarée inconstitutionnelle ; qu'au

contraire, la supériorité des traités sur les

lois, dont le principe est posé à l'article 55

précité, présente un caractère à la fois

relatif et contingent, tenant, d'une part, à ce

qu'elle est limitée au champ d'application

du traité et, d'autre part, à ce qu'elle est

subordonnée à une condition de réciprocité

dont la réalisation peut varier selon le

comportement du ou des Etats signataires

du traité et le moment où doit s'apprécier le

respect de cette condition ;

Considérant qu'une loi contraire à un traité

ne serait pas, pour autant, contraire à la

Constitution ;

Considérant qu'ainsi le contrôle du respect

du principe énoncé à l'article 55 de la

Constitution ne saurait s'exercer dans le

cadre de l'examen prévu à l'article 61, en

raison de la différence de nature de ces

deux contrôles ;

Considérant que, dans ces conditions, il

n'appartient pas au Conseil constitutionnel,

lorsqu'il est saisi en application de l'article

61 de la Constitution, d'examiner la

conformité d'une loi aux stipulations d'un

traité ou d'un accord international ;

Considérant, en second lieu, que la loi

relative à l'interruption volontaire de la

grossesse respecte la liberté des personnes

appelées à recourir ou à participer à une

interruption de grossesse, qu'il s'agisse

Page 80: Fiche de Td Second Semestre 2013

80/92

d'une situation de détresse ou d'un motif

thérapeutique ; que, dès lors, elle ne porte

pas atteinte au principe de liberté posé à

l'article 2 de la Déclaration des droits de

l'homme et du citoyen ;

Considérant que la loi déférée au Conseil

constitutionnel n'admet qu'il soit porté

atteinte au principe du respect de tout être

humain dès le commencement de la vie,

rappelé dans son article 1er, qu'en cas de

nécessité et selon les conditions et

limitations qu'elles définit ;

Considérant qu'aucune des dérogations

prévues par cette loi n'est, en l'état,

contraire à l'un des principes

fondamentaux reconnus par les lois de la

République ni ne méconnaît le principe

énoncé dans le préambule de la

Constitution du 27 octobre 1946, selon

lequel la nation garantit à l'enfant la

protection de la santé, non plus qu'aucune

des autres dispositions ayant valeur

constitutionnelle édictées par le même

texte ;

Considérant, en conséquence, que la loi

relative à l'interruption volontaire de la

grossesse ne contredit pas les textes

auxquels la Constitution du 4 octobre 1958

fait référence dans son préambule non plus

qu'aucun des articles de la Constitution ;

Décide :

ARTICLE PREMIER - Les dispositions de

la loi relative à l'interruption volontaire de

la grossesse, déférée au Conseil

constitutionnel, ne sont pas contraires à la

Constitution.

ARTICLE 2 - La présente décision sera

publiée au Journal officiel de la

République française.

Document 5 : Décision du 20 janvier 1984, Enseignement Supérieur

[…]

Sur les dispositions relatives à la composition

des organes assurant l'administration des

universités :

[…]

En ce qui concerne les principes applicables à

l'examen des dispositions critiquées :

Considérant que les dispositions critiquées ne

touchent pas à la liberté de l'enseignement

mais sont relatives à l'organisation d'un service

public et aux droits et obligations des

enseignants et chercheurs chargés de

l'exécution de ce service et associés à sa

gestion et, comme tels, relevant d'un statut

différent de celui des personnes privées ; que

cependant ce statut ne saurait limiter le droit à

la libre communication des pensées et des

opinions garanti par l'article 11 de la

Déclaration des droits de l'homme et du

citoyen que dans la seule mesure des exigences

du service public en cause ;

Considérant que, selon les termes de l'article 3

de la loi soumise à l'examen du Conseil

constitutionnel : "Le service public de

l'enseignement supérieur est laïc et

indépendant de toute emprise politique,

économique, religieuse ou idéologique ; il tend

à l'objectivité du savoir ; il respecte la diversité

des opinions. Il doit garantir à l'enseignement

et à la recherche leurs possibilités de libre

développement scientifique, créateur et

critique" ;

Considérant dès lors que, par leur nature

même, les fonctions d'enseignement et de

recherche non seulement permettent mais

demandent, dans l'intérêt même du service, que

la libre expression et l'indépendance des

personnels soient garanties par les dispositions

qui leur sont applicables ; que l'article 57 de la

loi fait, dans leur principe, droit à ces

exigences en disposant : "Les enseignants-

chercheurs, les enseignants et les chercheurs

jouissent d'une pleine indépendance et d'une

entière liberté d'expression dans l'exercice de

leurs fonctions d'enseignement et dans leurs

activités de recherche, sous les réserves que

leur imposent, conformément aux traditions

universitaires et aux dispositions de la présente

loi, les principes de tolérance et d'objectivité" ;

Considérant qu'en ce qui concerne les

professeurs, auxquels l'article 55 de la loi

confie des responsabilités particulières, la

garantie de l'indépendance résulte en outre d'un

principe fondamental reconnu par les lois de la

Page 81: Fiche de Td Second Semestre 2013

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République, et notamment par les dispositions

relatives à la réglementation des

incompatibilités entre le mandat parlementaire

et les fonctions publiques ;

Considérant que c'est à la lumière de ces

principes que doivent être examinées les

critiques adressées aux diverses dispositions

mises en cause par l'une et l'autre saisine ;

En ce qui concerne la composition du conseil

scientifique et du conseil des études et de la vie

universitaire (art 30 et 31 de la loi) :

Considérant que le conseil scientifique, eu

égard à ses attributions, ne comporte pas de

représentants des personnels administratifs,

techniques, ouvriers et de service et ne fait

place, pour les étudiants, qu'à une

représentation des étudiants de troisième cycle,

et donc engagés dans la recherche, dans une

proportion maximale de 12,5 p 100 ; qu'ainsi le

grief manque en fait et que l'article 30 n'est pas

contraire à la Constitution ;

Considérant que, si la composition du conseil

des études et de la vie universitaire comporte

une participation des étudiants dans une

proportion maximale de 40 p 100 au regard

d'une participation égale des enseignants-

chercheurs et une participation maximale de 15

p 100 des personnels administratifs,

techniques, ouvriers et de service, cette

composition, eu égard à la nature et au

caractère purement consultatif des attributions

dudit conseil, n'est pas de nature à porter

atteinte à la liberté et à l'indépendance des

enseignants-chercheurs et notamment des

professeurs ; qu'ainsi l'article 31 n'est pas

contraire à la Constitution ;

En ce qui concerne l'article 39 (alinéa 2) de la

loi :

Considérant qu'il résulte des dispositions

combinées des alinéas 2 et 3 de l'article 39 que

si, dans la représentation des enseignants-

chercheurs, le nombre des professeurs doit être

égal à celui des autres enseignants-chercheurs,

la désignation de l'ensemble des représentants

des enseignants-chercheurs se fait par un

collège électoral unique, sous la seule réserve

des règles particulières concernant le conseil

scientifique ;

Considérant qu'il est constant que, en raison de

la disproportion numérique existant entre le

corps des professeurs et celui des autres corps

d'enseignants-chercheurs, l'indépendance des

professeurs serait menacée à divers points de

vue par le système ainsi institué ; que,

notamment, le libre exercice des

responsabilités particulières qui leur sont

attribuées par l'article 55, avant-dernier alinéa,

en ce qui concerne la préparation des

programmes, l'orientation des étudiants et la

coordination des équipes pédagogiques et par

leur participation obligatoire aux décisions

individuelles concernant la carrière des autres

enseignants-chercheurs prévue à l'article 56

(alinéa 2) serait altéré par l'existence d'un

collège électoral unique ; que cette

indépendance serait d'autant plus atteinte du

fait qu'au sein de la juridiction disciplinaire

prévue par l'article 29 de la loi, les professeurs

devant composer la formation chargée de juger

les professeurs seraient désignés par l'ensemble

des représentants des enseignants-chercheurs

eux-mêmes élus par l'ensemble des

enseignants-chercheurs toutes catégories

confondues, sans que, parmi leurs juges, les

professeurs puissent compter des représentants

émanant de leur propre vote ;

Considérant, d'autre part, que l'indépendance

des enseignants-chercheurs autres que les

professeurs et la sincérité de leur suffrage

risquerait elle-même, compte tenu des articles

55, avant-dernier alinéa, et 56, alinéa 2, sus

rappelés, d'être mise en cause dans le cadre

d'un collège électoral unique ;

Considérant que l'indépendance des

professeurs comme celle des enseignants-

chercheurs ayant une autre qualité suppose,

pour chacun de ces deux ensembles, une

représentation propre et authentique dans les

conseils de la communauté universitaire ;

Considérant dès lors que, sans qu'il soit besoin

d'examiner la portée que pourrait avoir un

"principe de représentation" de caractère

général, l'alinéa 2 de l'article 39 et l'alinéa 2 de

l'article 29 ne sont pas conformes à la

Constitution ;

[…]

Sur le reste de la loi :

Considérant qu'en l'espèce, il n'y a lieu pour le

Conseil constitutionnel de soulever d'office

aucune question de conformité à la

Constitution en ce qui concerne les autres

dispositions de la loi soumise à son examen,

Décide :

Page 82: Fiche de Td Second Semestre 2013

82/92

Article 1er - Sont déclarés non conformes à la

Constitution le deuxième alinéa de l'article 29,

le deuxième alinéa de l'article 39, le premier

alinéa de l'article 68, le membre de phrase de

l'avant-dernier alinéa de l'article 68 ainsi conçu

: "apportés par voie de décret en Conseil

d'Etat" et l'article 70 de la loi sur

l'enseignement supérieur.

Article 2 - Les autres dispositions de la loi sur

l'enseignement supérieur sont déclarées

conformes à la Constitution.

Article 3 - La présente décision sera publiée au

Journal officiel de la République française.

Document 6 : Décision des 10 et 11 octobre 1984, Liberté de la presse, extraits

Considérant que l'article 11 de la Déclaration

des droits de l'homme et du citoyen de 1789

énonce : « La libre communication des pensées

et des opinions est un des droits les plus

précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc

parler, écrire, imprimer librement sauf à

répondre de l'abus de cette liberté dans les cas

déterminés par la loi » ;

Considérant que le principe ainsi proclamé ne

s'oppose point à ce que le législateur,

compétent aux termes de l'article 34 de la

Constitution pour fixer « les règles concernant

les droits civiques et les garanties

fondamentales accordées aux citoyens pour

l'exercice des libertés publiques », édicte des

règles concernant l'exercice du droit de libre

communication et de la liberté de parler, écrire

et imprimer ;

Considérant que, cependant, s'agissant d'une

liberté fondamentale, d'autant plus précieuse

que son exercice est l'une des garanties

essentielles du respect des autres droits et

libertés et de la souveraineté nationale, la loi

ne peut en réglementer l'exercice qu'en vue de

le rendre plus effectif ou de le concilier avec

celui d'autres règles ou principes de valeur

constitutionnelle ;

Considérant que le pluralisme des quotidiens

d'information politique et générale auquel sont

consacrées les dispositions du titre II de la loi

est en lui-même un objectif de valeur

constitutionnelle ; qu'en effet la libre

communication des pensées et des opinions,

garantie par l'article 11 de la Déclaration des

droits de l'homme et du citoyen de 1789, ne

serait pas effective si le public auquel

s'adressent ces quotidiens n'était pas à même

de disposer d'un nombre suffisant de

publications de tendances et de caractères

différents ; qu'en définitive l'objectif à réaliser

est que les lecteurs qui sont au nombre des

destinataires essentiels de la liberté proclamée

par l'article 11 de la Déclaration de 1789 soient

à même d'exercer leur libre choix sans que ni

les intérêts privés ni les pouvoirs publics

puissent y substituer leurs propres décisions ni

qu'on puisse en faire l'objet d'un marché ;

(…)

Considérant que, s'il est loisible au législateur,

lorsqu'il organise l'exercice d'une liberté

publique en usant des pouvoirs que lui confère

l'article 34 de la Constitution, d'adopter pour

l'avenir, s'il l'estime nécessaire, des règles plus

rigoureuses que celles qui étaient auparavant

en vigueur, il ne peut, s'agissant de situations

existantes intéressant une liberté publique, les

remettre en cause que dans deux hypothèses :

celle où ces situations auraient été illégalement

acquises ; celle où leur remise en cause serait

réellement nécessaire pour assurer la

réalisation de l'objectif constitutionnel

poursuivi ;

Document 7 : Décision du 27 juillet 1994, Bioéthique

Considérant que les saisines adressées au

Conseil constitutionnel par le Président de

l'Assemblée nationale en premier lieu, par 68

députés en second lieu concernent les mêmes

lois ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer

par une seule décision ;

- SUR LES NORMES DE

CONSTITUTIONNALITE APPLICABLES

AU CONTROLE DES LOIS DEFEREES :

Considérant que le Préambule de la

Constitution de 1946 a réaffirmé et proclamé

des droits, libertés et principes constitutionnels

en soulignant d'emblée que : "Au lendemain de

Page 83: Fiche de Td Second Semestre 2013

83/92

la victoire remportée par les peuples libres sur

les régimes qui ont tenté d'asservir et de

dégrader la personne humaine, le peuple

français proclame à nouveau que tout être

humain, sans distinction de race, de religion ni

de croyance, possède des droits inaliénables et

sacrés" ; qu'il en ressort que la sauvegarde de

la dignité de la personne humaine contre toute

forme d'asservissement et de dégradation est

un principe à valeur constitutionnelle ;

Considérant que la liberté individuelle est

proclamée par les articles 1, 2 et 4 de la

Déclaration des droits de l'homme et du

citoyen ; qu'elle doit toutefois être conciliée

avec les autres principes de valeur

constitutionnelle ;

Considérant qu'aux termes du dixième alinéa

du Préambule de la Constitution de 1946 : "La

nation assure à l'individu et à la famille les

conditions nécessaires à leur développement"

et qu'aux termes de son onzième alinéa : "Elle

garantit à tous, notamment à l'enfant, à la

mère..., la protection de la santé" ;

- SUR LES DISPOSITIONS CONTESTEES

PAR LES DEPUTES AUTEURS DE LA

SECONDE SAISINE :

. En ce qui concerne les articles 8 et 9 de la loi

relative au don et à l'utilisation des éléments et

produits du corps humain, à l'assistance

médicale à la procréation et au diagnostic

prénatal :

Considérant que l'article 8 insère, après le

chapitre II du titre premier du livre II du code

de la santé publique, un chapitre II bis nouveau

intitulé "assistance médicale à la procréation"

et comprenant dix articles L. 152-1 à L. 152-10

;

Considérant que l'article L. 152-1 définit

l'assistance médicale à la procréation en faisant

référence aux pratiques cliniques et

biologiques permettant la conception in vitro,

le transfert d'embryons et l'insémination

artificielle, ainsi qu'à toute technique d'effet

équivalent permettant la procréation en dehors

du processus naturel ; que l'article L. 152-2

dispose que cette assistance médicale, destinée

à répondre à la demande parentale d'un couple,

a pour objet soit de remédier à une infertilité

dont le caractère pathologique a été

médicalement diagnostiqué, soit d'éviter la

transmission à l'enfant d'une maladie d'une

particulière gravité ; que le même article

impose que l'homme et la femme formant le

couple soient vivants, en âge de procréer,

mariés ou en mesure d'apporter la preuve d'une

vie commune d'au moins deux ans, et

consentant préalablement au transfert des

embryons ou à l'insémination ; que l'article L.

152-3 prévoit que compte tenu de l'état des

techniques médicales, les deux membres du

couple peuvent décider par écrit que sera

tentée la fécondation d'un nombre d'ovocytes

pouvant rendre nécessaire la conservation

d'embryons dans l'intention de réaliser leur

demande parentale dans un délai de cinq ans et

qu'ils sont alors consultés chaque année

pendant cinq ans sur le point de savoir s'ils

maintiennent leur demande parentale ; qu'il

pose la règle générale selon laquelle un

embryon ne peut être conçu avec des gamètes

ne provenant pas d'un au moins des deux

membres du couple ; que toutefois l'article L.

152-4 dispose qu'à titre exceptionnel les deux

membres du couple peuvent consentir par écrit

à ce que les embryons conservés soient

accueillis par un autre couple ; que l'article L.

152-5 en fixe les conditions à savoir que ce

dernier couple réponde aux exigences

formulées par l'article L. 152-2 et qu'il ne

puisse bénéficier d'une assistance médicale à la

procréation sans recours à un "tiers donneur" ;

qu'il organise une procédure soumettant

l'accueil de l'embryon à une décision de

l'autorité judiciaire ; qu'il pose le principe

selon lequel le couple accueillant l'embryon et

celui y ayant renoncé ne peuvent connaître

leurs identités respectives ; que l'article L. 152-

6 souligne que l'assistance médicale à la

procréation avec "tiers donneur" ne peut être

pratiquée que comme ultime indication lorsque

la procréation médicalement assistée à

l'intérieur du couple ne peut aboutir ; qu'aux

termes de l'article L. 152-7 : "Un embryon

humain ne peut être conçu ni utilisé à des fins

commerciales ou industrielles" ; que l'article L.

152-8 dispose que la conception in vitro

d'embryons humains à des fins d'étude, de

recherche ou d'expérimentation est interdite de

même que toute expérimentation sur l'embryon

; qu'il prévoit toutefois qu'à titre exceptionnel

l'homme et la femme formant le couple

peuvent accepter par écrit que soient menées

des études sur leurs embryons ; que ces études

doivent alors avoir une finalité médicale et ne

peuvent porter atteinte à l'embryon ; qu'elles ne

peuvent être entreprises qu'après avis conforme

d'une commission nationale de médecine et de

Page 84: Fiche de Td Second Semestre 2013

84/92

biologie de la reproduction et du diagnostic

prénatal instituée par l'article 11 de la loi

insérant dans le code de la santé publique un

nouvel article L. 184-3 ; que l'article L. 152-9 a

trait à l'agrément des praticiens habilités à

pratiquer ces actes biologiques et cliniques et

que l'article L. 152-10 organise une procédure

imposée préalablement aux demandeurs ;

Considérant que l'article 9 de la loi dispose que

les embryons existant à la date de sa

promulgation et dont il a été vérifié qu'ils ne

font l'objet ni d'une demande parentale ni d'une

opposition à un accueil par un couple tiers et

qu'ils satisfont aux règles de sécurité sanitaire

en vigueur au jour de leur transfert pourront

être confiés à un couple remplissant les

conditions prévues à l'article L. 152-5 et qu'il

ajoute que "si leur accueil est impossible et si

la durée de leur conservation est au moins

égale à cinq ans, il est mis fin à cette

conservation" ;

Considérant que les députés auteurs de la

seconde saisine soutiennent que cette dernière

disposition porte atteinte au droit à la vie des

embryons qui selon eux possèdent dès la

conception tous les attributs de la personne

humaine ; qu'elle établit une discrimination

rompant le principe d'égalité entre les

embryons selon qu'ils auront été conçus avant

ou après la date de la promulgation de la loi ;

que de même la loi ne pouvait sans

méconnaître le principe d'égalité entre

embryons humains d'un couple autoriser les

parents et le corps médical à "sélectionner

ceux des embryons qui seront réimplantés de

ceux qui ne le seront pas" et "à sélectionner

ceux des embryons qui seront donnés à des

couples tiers de ceux qui ne le seront pas" ; que

la possibilité ménagée par la loi de mener des

études sur les embryons porte atteinte au

respect de l'intégrité de la personne et du corps

humain ; que la sélection des embryons

méconnaît le principe à valeur

constitutionnelle de la protection du patrimoine

génétique de l'humanité ; que la possibilité

d'avoir des enfants dont le parent naturel est un

"tiers donneur" met en cause les droits de la

famille tels qu'ils ont été conçus et garantis par

le Préambule de la Constitution de 1946 ; que

l'interdiction faite aux enfants qui seront nés

d'une fécondation in vitro faisant intervenir un

"tiers donneur" de connaître leur identité

génétique et leurs parents naturels porte

atteinte au droit à la santé de l'enfant et au libre

épanouissement de sa personnalité ; que le

législateur ne pouvait reconnaître à la

commission nationale de médecine et de

biologie de la reproduction et du diagnostic

prénatal un pouvoir d'avis conforme sans

violer le principe constitutionnel de séparation

des pouvoirs d'autant plus qu'il a renvoyé au

pouvoir réglementaire la détermination de la

composition de cette commission ;

Considérant que le législateur a assorti la

conception, l'implantation et la conservation

des embryons fécondés in vitro de nombreuses

garanties ; que cependant, il n'a pas considéré

que devait être assurée la conservation, en

toutes circonstances, et pour une durée

indéterminée, de tous les embryons déjà

formés ; qu'il a estimé que le principe du

respect de tout être humain dès le

commencement de sa vie ne leur était pas

applicable ; qu'il a par suite nécessairement

considéré que le principe d'égalité n'était pas

non plus applicable à ces embryons ;

Considérant qu'il n'appartient pas au Conseil

constitutionnel, qui ne détient pas un pouvoir

d'appréciation et de décision identique à celui

du Parlement, de remettre en cause, au regard

de l'état des connaissances et des techniques,

les dispositions ainsi prises par le législateur ;

Considérant que, s'agissant de la sélection des

embryons, il n'existe, contrairement à ce que

soutiennent les saisissants, aucune disposition

ni aucun principe à valeur constitutionnelle

consacrant la protection du patrimoine

génétique de l'humanité ; qu'aucune disposition

du Préambule de la Constitution de 1946 ne

fait obstacle à ce que les conditions du

développement de la famille soient assurées

par des dons de gamètes ou d'embryons dans

les conditions prévues par la loi ; que

l'interdiction de donner les moyens aux enfants

ainsi conçus de connaître l'identité des

donneurs ne saurait être regardée comme

portant atteinte à la protection de la santé telle

qu'elle est garantie par ce Préambule ; qu'enfin,

s'agissant des décisions individuelles relatives

à des études à finalité médicale, l'exigence de

l'avis conforme d'une commission

administrative, dont les règles générales de

composition sont définies par l'article L. 184-3

nouveau du code de la santé publique et qui

doit notamment s'assurer qu'il n'est pas porté

atteinte à l'embryon, pouvait être prévue par le

Page 85: Fiche de Td Second Semestre 2013

85/92

législateur sans qu'il méconnaisse par là sa

propre compétence ;

. En ce qui concerne les articles 12 et 14 de la

même loi :

Considérant que l'article 12 de la loi insère au

début du chapitre IV du titre premier du livre II

du code de la santé publique un article L. 162-

16 ; que celui-ci organise un diagnostic

prénatal ayant pour but de détecter in utero

chez l'embryon ou le fœtus une affection d'une

particulière gravité ; que l'article 14 de la loi

insère un article L. 162-17 qui pose les

conditions auxquelles peut être effectué un

diagnostic biologique à partir de cellules

prélevées sur l'embryon in vitro ;

Considérant que les députés, auteurs de la

seconde saisine, prétendent que ces

dispositions qui faciliteraient le recours à

l'interruption volontaire de grossesse, portent

atteinte au droit à la vie ;

Considérant que l'article L. 162-16 qui

concerne le diagnostic prénatal in utero

n'autorise aucun cas nouveau d'interruption de

grossesse ; que l'article L. 162-17 ne concerne

que les diagnostics effectués à partir de

cellules prélevées sur l'embryon in vitro ; que

dès lors le grief invoqué manque en fait ;

. En ce qui concerne l'article 10 de la loi

relative au respect du corps humain :

Considérant que l'article 10 de la loi insère au

chapitre premier du titre VII du livre premier

du code civil une section 4 intitulée "De la

procréation médicalement assistée"

comprenant deux articles nouveaux 311-19 et

311-20 ; que l'article 311-19 dispose qu'en cas

de procréation médicalement assistée avec

"tiers donneur", aucun lien de filiation ne peut

être établi entre l'auteur du don et l'enfant issu

de la procréation et qu'aucune action en

responsabilité ne peut être exercée à l'encontre

du donneur ; que l'article 311-20 régit les

conditions dans lesquelles les époux et

concubins demandeurs doivent préalablement

donner leur consentement à un juge ou un

notaire qui les informe des engagements qu'ils

prennent de ce fait au regard de la filiation ;

Considérant que les députés auteurs de la

saisine mettent en cause l'anonymat des

donneurs de gamètes vis à vis de l'enfant à

naître au regard du principe de responsabilité

personnelle posé par l'article 1382 du code

civil ; qu'ils font valoir en outre l'existence d'un

principe fondamental reconnu par les lois de la

République qui procèderait des dispositions de

la loi du 16 novembre 1912 permettant à

l'enfant de rechercher la paternité hors mariage

à certaines conditions ;

Considérant que les dispositions de cette loi

n'ont eu ni pour objet ni pour effet de régir les

conditions d'attribution de paternité en cas

d'assistance médicale à la procréation ;

qu'aucune disposition ni aucun principe à

valeur constitutionnelle ne prohibe les

interdictions prescrites par le législateur

d'établir un lien de filiation entre l'enfant issu

de la procréation et l'auteur du don et d'exercer

une action en responsabilité à l'encontre de

celui-ci ; que par suite les griefs des requérants

ne sauraient qu'être écartés ;

- SUR L'ENSEMBLE DES DISPOSITIONS

DES LOIS SOUMISES A L'EXAMEN DU

CONSEIL CONSTITUTIONNEL :

Considérant que lesdites lois énoncent un

ensemble de principes au nombre desquels

figurent la primauté de la personne humaine, le

respect de l'être humain dès le commencement

de sa vie, l'inviolabilité, l'intégrité et l'absence

de caractère patrimonial du corps humain ainsi

que l'intégrité de l'espèce humaine ; que les

principes ainsi affirmés tendent à assurer le

respect du principe constitutionnel de

sauvegarde de la dignité de la personne

humaine ;

Considérant que l'ensemble des dispositions de

ces lois mettent en œuvre, en les conciliant et

sans en méconnaître la portée, les normes à

valeur constitutionnelle applicables ;

Page 86: Fiche de Td Second Semestre 2013

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FICHE N° 10 LA CONSTITUTION ET L’UNION EUROPEENNE

I/ DOCUMENTS REPRODUITS

0. Décision IVG (voire fiche précédente)

1. Extrait de la décision de la CJCE du 17 décembre 1970, Internationale Handelgesellschaft

2. Document 2 : extrait de l’arrêt du Conseil d’Etat du 30 octobre 1998 Sarran, Levacher et

autres

3. Extrait de la décision Davdsi du 27 juillet 2006

4. Communiqué de presse relative à la Décision n° 2007-560 DC du 20 décembre 2007

5. Extrait du rapport du comité constitutionnel

II/ bibliographie GAILLARD (M.), L’application de l’article 88-4 de la Constitution, RFDC n°16, pp 707-740, 1993.

LUCHAIRE (F.), L'Union Européenne et la Constitution, RDP., 1992, pp. 589-616; 933-955, 956- 981

; 1587-1624.

VEDEL (G.), Schengen et Maastricht, RFDA., 1992, pp. 173-180.

QUERMONNE (J.C.), L’adaptation de l’Etat à l’intégration européenne, RDP, pp 1405-1420, 1998.

MARRE (B.), L’interférence européenne, Pouvoirs n°99, 2001.

La Constitution et l’Europe, Montchrestien, 1992, actes d'un colloque.

Site de la convention : http://www.european-convention.eu.int/

III/ NOTIONS A CONNAITRE

Supra nationalité, transfert et délégation de souveraineté.

Contrôle de conventionalité, de constitutionalité.

Constitution européenne, principe de subsidiarité.

IV/ EXERCICES SUGGERES

Fédéralisme et souveraineté nationale.

Le déficit démocratique de l’Europe.

La participation des citoyens à la construction européenne.

Page 87: Fiche de Td Second Semestre 2013

87/92

* * * *

Document 1 : extrait de la décision de la CJCE du 17 décembre 1970 Internationale

Handelgesellschaft

3 ATTENDU QUE LE RECOURS A DES

REGLES OU NOTIONS JURIDIQUES DU

DROIT NATIONAL , POUR L '

APPRECIATION DE LA VALIDITE DES

ACTES ARRETES PAR LES INSTITUTIONS

DE LA COMMUNAUTE , AURAIT POUR

EFFET DE PORTER ATTEINTE A L ' UNITE

ET A L ' EFFICACITE DU DROIT

COMMUNAUTAIRE ;

QUE LA VALIDITE DE TELS ACTES NE

SAURAIT ETRE APPRECIEE QU ' EN

FONCTION DU DROIT COMMUNAUTAIRE

;

QU ' EN EFFET , LE DROIT NE DU TRAITE

, ISSU D ' UNE SOURCE AUTONOME , NE

POURRAIT , EN RAISON DE SA NATURE ,

SE VOIR JUDICIAIREMENT OPPOSER DES

REGLES DE DROIT NATIONAL QUELLES

QU ' ELLES SOIENT , SANS PERDRE SON

CARACTERE COMMUNAUTAIRE ET SANS

QUE SOIT MISE EN CAUSE LA BASE

JURIDIQUE DE LA COMMUNAUTE ELLE-

MEME ;

QUE , DES LORS , L ' INVOCATION D '

ATTEINTES PORTEES , SOIT AUX DROITS

FONDAMENTAUX TELS QU ' ILS SONT

FORMULES PAR LA CONSTITUTION D '

UN ETAT MEMBRE , SOIT AUX PRINCIPES

D ' UNE STRUCTURE

CONSTITUTIONNELLE NATIONALE , NE

SAURAIT AFFECTER LA VALIDITE D ' UN

ACTE DE LA COMMUNAUTE OU SON

EFFET SUR LE TERRITOIRE DE CET ETAT

;

Document 2 : extrait de l’arrêt du Conseil d’Etat du 30 octobre 1998 Sarran, Levacher

et autres

Considérant que si l’article 55 de la Constitution dispose que "les traités ou accords

régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle

des lois sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie", la

suprématie ainsi conférée aux engagements internationaux ne s’applique pas, dans l’ordre

interne, aux dispositions de nature constitutionnelle ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que le

décret attaqué, en ce qu’il méconnaîtrait les stipulations d’engagements internationaux

régulièrement introduits dans l’ordre interne, serait par là même contraire à l’article 55 de la

Constitution, ne peut lui aussi qu’être écarté ;

Document 3 : Extrait de la Décision Davdsi du 27 juillet 2006

16. Considérant que le titre Ier de la loi déférée

a pour objet de transposer la directive du 22

mai 2001 susvisée sur l'harmonisation de

certains aspects du droit d'auteur et des droits

voisins dans la société de l'information ;

17. Considérant qu'aux termes du premier

alinéa de l'article 88-1 de la Constitution : " La

République participe aux Communautés

européennes et à l'Union européenne,

constituées d'États qui ont choisi librement, en

vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer

en commun certaines de leurs compétences " ;

qu'ainsi, la transposition en droit interne d'une

directive communautaire résulte d'une

exigence constitutionnelle ;

18. Considérant qu'il appartient par suite au

Conseil constitutionnel, saisi dans les

conditions prévues par l'article 61 de la

Constitution d'une loi ayant pour objet de

transposer en droit interne une directive

communautaire, de veiller au respect de cette

exigence ; que, toutefois, le contrôle qu'il

exerce à cet effet est soumis à une double

limite ;

19. Considérant, en premier lieu, que la

transposition d'une directive ne saurait aller à

l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent

à l'identité constitutionnelle de la France, sauf

à ce que le constituant y ait consenti ;

Page 88: Fiche de Td Second Semestre 2013

88/92

20. Considérant, en second lieu, que, devant

statuer avant la promulgation de la loi dans le

délai prévu par l'article 61 de la Constitution,

le Conseil constitutionnel ne peut saisir la Cour

de justice des Communautés européennes de la

question préjudicielle prévue par l'article 234

du traité instituant la Communauté européenne

; qu'il ne saurait en conséquence déclarer non

conforme à l'article 88-1 de la Constitution

qu'une disposition législative manifestement

incompatible avec la directive qu'elle a pour

objet de transposer ; qu'en tout état de cause, il

revient aux autorités juridictionnelles

nationales, le cas échéant, de saisir la Cour de

justice des Communautés européennes à titre

préjudiciel ;

21. Considérant que la directive du 22 mai

2001 susvisée dispose en son article 2, relatif

au droit de reproduction, que : " Les États

membres prévoient le droit exclusif d'autoriser

ou d'interdire la reproduction directe ou

indirecte, provisoire ou permanente, par

quelque moyen et sous quelque forme que ce

soit, en tout ou en partie : - a) pour les auteurs,

de leurs œuvres ; - b) pour les artistes

interprètes ou exécutants, des fixations de leurs

exécutions ; - c) pour les producteurs de

phonogrammes, de leurs phonogrammes ; - d)

pour les producteurs des premières fixations de

films, de l'original et de copies de leurs films ;

- e) pour les organismes de radiodiffusion, des

fixations de leurs émissions, qu'elles soient

diffusées par fil ou sans fil, y compris par

câble ou par satellite " ;

22. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article

3 de la directive, relatif au droit de

communication au public pour ce qui concerne

les auteurs : " Les États membres prévoient

pour les auteurs le droit exclusif d'autoriser ou

d'interdire toute communication au public de

leurs œuvres, par fil ou sans fil, y compris la

mise à la disposition du public de leurs œuvres

de manière que chacun puisse y avoir accès de

l'endroit et au moment qu'il choisit

individuellement " ;

23. Considérant qu'aux termes du 2 du même

article, relatif à la communication au public

pour ce qui concerne les titulaires de droits

voisins : " Les États membres prévoient le

droit exclusif d'autoriser ou d'interdire la mise

à la disposition du public, par fil ou sans fil, de

manière que chacun puisse y avoir accès de

l'endroit et au moment qu'il choisit

individuellement : - a) pour les artistes

interprètes ou exécutants, des fixations de leurs

exécutions ; - b) pour les producteurs de

phonogrammes, de leurs phonogrammes ; - c)

pour les producteurs des premières fixations de

films, de l'original et de copies de leurs films ;

- d) pour les organismes de radiodiffusion, des

fixations de leurs émissions, qu'elles soient

diffusées par fil ou sans fil, y compris par

câble ou par satellite " ;

24. Considérant qu'en son article 5, la directive

dresse une liste limitative des exceptions

pouvant être apportées à ces droits exclusifs,

tout en subordonnant leur exercice, au 5 de cet

article, à la condition qu'elles " ne portent pas

atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ou

autre objet protégé ni ne causent un préjudice

injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du

droit " ;

25. Considérant que le 1 de l'article 6 de la

directive impose aux États membres de prévoir

" une protection juridique appropriée contre le

contournement de toute mesure technique

efficace, que la personne effectue en sachant,

ou en ayant des raisons valables de penser,

qu'elle poursuit cet objectif " ; qu'aux termes

du 2 du même article : " Les États membres

prévoient une protection juridique appropriée

contre la fabrication, l'importation, la

distribution, la vente, la location, la publicité

en vue de la vente ou de la location, ou la

possession à des fins commerciales de

dispositifs, produits ou composants ou la

prestation de services qui : - a) font l'objet

d'une promotion, d'une publicité ou d'une

commercialisation, dans le but de contourner la

protection, ou - b) n'ont qu'un but commercial

limité ou une utilisation limitée autre que de

contourner la protection, ou - c) sont

principalement conçus, produits, adaptés ou

réalisés dans le but de permettre ou de faciliter

le contournement de la protection de toute

mesure technique efficace " ;

26. Considérant, s'agissant de l'exception au

droit de reproduction pour l'usage privé du

copiste, que le 4 de l'article 6 de la directive

permet à un État membre de prendre des

mesures appropriées pour assurer l'exercice

effectif de cette exception " à moins que la

reproduction à usage privé ait déjà été rendue

possible par les titulaires de droits dans la

mesure nécessaire pour bénéficier de

l'exception ou de la limitation concernée... sans

Page 89: Fiche de Td Second Semestre 2013

89/92

empêcher les titulaires de droits d'adopter des

mesures adéquates en ce qui concerne le

nombre de reproductions conformément à ces

dispositions " ;

27. Considérant que le troisième alinéa du 4 de

l'article 6 de la directive ajoute que : " Les

mesures techniques appliquées volontairement

par les titulaires de droits, y compris celles

mises en œuvre en application d'accords

volontaires, et les mesures techniques mises en

œuvre en application des mesures prises par les

États membres, jouissent de la protection

juridique prévue au paragraphe 1 " ;

28. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces

dispositions que la directive du 22 mai 2001

susvisée, qui n'est contraire à aucune règle ni à

aucun principe inhérent à l'identité

constitutionnelle de la France, comporte des

dispositions inconditionnelles et précises,

notamment le 5 de son article 5 ;

29. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des

dispositions de la directive, éclairées par ses

propres considérants, qu'afin de sauvegarder

l'économie de la création et d'assurer

l'harmonisation des échanges de biens et

services culturels dans l'Union européenne, les

États membres doivent faire prévaloir les

droits des auteurs et des titulaires de droits

voisins ;

30. Considérant, dès lors, que la loi française

de transposition serait contraire à l'exigence

constitutionnelle qui résulte de l'article 88-1 de

la Constitution si elle portait atteinte aux

prérogatives que la directive reconnaît aux

auteurs ou aux titulaires de droits voisins en

matière de reproduction et de communication

au public de leurs œuvres ou prestations ; qu'en

pareil cas, en effet, elle méconnaîtrait

manifestement tant l'objectif général poursuivi

par la directive que ses dispositions

inconditionnelles ;

31. Considérant, en conséquence, que les

mesures de conciliation adoptées par le

législateur entre droit d'auteur et droits voisins,

d'une part, objectif d'" interopérabilité ",

d'autre part, ne sauraient porter atteinte aux

prérogatives des auteurs et des titulaires de

droits voisins sans méconnaître l'exigence

constitutionnelle de transposition ; que la

même considération vaut pour les mesures de

conciliation arrêtées par la loi déférée entre les

droits des auteurs et des titulaires de droits

voisins, d'une part, et l'exercice effectif de

l'exception pour copie privée, d'autre part ;

Document 4 : Communiqué de presse relatif à la décision 2007-560 DC du 20 décembre

2007

Le 20 décembre 2007, par sa décision n° 2007-

560 DC, le Conseil constitutionnel s’est

prononcé sur le traité modifiant le traité sur

l’Union européenne et le traité instituant la

Communauté européenne signé à Lisbonne le

13 décembre 2007.

1) Le Conseil constitutionnel a estimé que

les dispositions relatives aux droits

fondamentaux de l’Union n’appelaient pas

de révision constitutionnelle.

D’une part, le Conseil a constaté que le traité

de Lisbonne donne même valeur juridique au

traité et à la Charte des droits fondamentaux de

l’Union et que cette Charte est inchangée. Dès

lors, il a estimé que, pour les mêmes motifs

que ceux énoncés par sa décision n° 2004-505

DC du 19 novembre 2004 relative à l’ancien

traité établissant une Constitution pour

l’Europe (TECE), la Charte n’appelle de

révision de la Constitution ni par le contenu de

ses articles, ni par ses effets sur les conditions

essentielles d’exercice de la souveraineté.

D’autre part, le traité de Lisbonne prévoit que

l’Union adhère à la Convention européenne de

sauvegarde des droits de l’Homme. La

conclusion de l’accord portant adhésion de

l’Union à cette Convention entrera en vigueur

après son approbation par les Etats membres

conformément à leurs règles constitutionnelles

respectives. Le Conseil a estimé que cette

référence renvoie, dans le cas de la France, à

l’autorisation législative prévue par l’article 53

de la Constitution.

2) Des dispositions relatives aux

compétences et au fonctionnement de

l’Union appellent une révision

constitutionnelle.

Le traité de Lisbonne comprend des

dispositions relatives aux compétences et au

fonctionnement de l’Union parfois identiques

Page 90: Fiche de Td Second Semestre 2013

90/92

et parfois différentes de celles figurant dans

l’ancien TECE.

D’une part, certaines de ses dispositions

reprennent celles du TECE que le Conseil

constitutionnel avait jugé contraires à la

Constitution dans sa décision 2004-505 DC du

19 novembre 2004. Il en va notamment ainsi

des dispositions relatives à des matières

« régaliennes » qui réaménagent les modalités

d’exercice de compétences déjà transférées

(s’agissant notamment du passage de

l’unanimité à la majorité qualifiée au sein du

Conseil des ministres européen). Dans ce cas,

le Conseil constitutionnel a constaté l’identité

des dispositions entre les deux traités et a, pour

les mêmes motifs que ceux énoncés par sa

décision du 19 novembre 2004, estimé que ces

dispositions du traité de Lisbonne appelaient

une révision constitutionnelle.

D’autre part, le traité de Lisbonne comprend

également des dispositions relatives aux

compétences et au fonctionnement de l’Union

qui ne sont pas identiques à celles ayant le

même objet figurant dans le TECE. Ainsi le

Conseil a relevé notamment les dispositions

relatives à des matières régaliennes (tels

« l’espace de liberté, de sécurité et de justice »)

qui transfèrent des compétences à l’Union. Le

Conseil a alors jugé que ces dispositions

appellent une révision de la Constitution dès

lors que sont affectées « les conditions

essentielles d’exercice de la souveraineté

nationale ».

3) Les pouvoirs nouveaux reconnus aux

parlements nationaux appellent également

une révision constitutionnelle.

D’une part, le Conseil constitutionnel a, là

aussi, constaté que le traité de Lisbonne

reprend des dispositions du TECE relatives

aux pouvoirs reconnus aux parlements

nationaux pour s’opposer à une révision

simplifiée ou faire respecter le principe de

subsidiarité. Il a estimé qu’une révision de la

Constitution était nécessaire pour les mêmes

motifs que ceux énoncés dans la décision n°

2004-505 DC du 19 novembre 2004.

D’autre part, le traité de Lisbonne innove en

conférant d’autres pouvoirs aux parlements

nationaux. Il leur reconnaît notamment celui de

s’opposer à ce que le droit de la famille soit

régi à la majorité qualifiée et non à

l’unanimité. Il leur confère aussi des moyens

nouveaux pour veiller au respect du principe

de subsidiarité. Le Conseil a estimé que ces

dispositions rendaient nécessaires une révision

constitutionnelle, la Constitution devant être

complétée pour permettre l’exercice effectif de

ces prérogatives par les députés et les

sénateurs.

4) Le Conseil constitutionnel n’a pas eu à se

prononcer, contrairement à ce qui fut le cas en

2004, sur le principe de primauté du droit de

l’Union sur le droit national. Ce principe, qui

était compris dans le traité établissant une

Constitution pour l’Europe, ne figure plus dans

le traité de Lisbonne.

Document 5 : Extrait du rapport du comité constitutionnel : faire du parlement un

acteur de la politique européenne

4 – Faire du Parlement un acteur de la

politique européenne

Le Titre XV de la Constitution, issu de

révisions successives faisant mention de

chacun des traités qui ont jalonné les étapes de

la construction européenne, n’est pas un

modèle de clarté. Il en ressort toutefois que s’il

est un domaine dans lequel le rôle du

Parlement est insuffisant, c’est bien celui des

affaires européennes. Le Comité ne plaide

nullement pour l’instauration d’un «

diplomatie parlementaire » qui viendrait

remettre en cause les dispositions de l’article

52 de la Constitution aux termes duquel : « le

Président de la République négocie et ratifie

les traités », mais il s’est accordé sur un

constat : en dépit des dispositions de l’article

88-4 de la Constitution, le pouvoir exécutif

n’est guère l’objet, en matière européenne,

d’un contrôle réellement utile du Parlement, à

la différence de la situation qui prévaut dans

l’ensemble des Parlements des Etats membres

de l’Union européenne. Des débats au

Parlement ont certes été instaurés, dans les

années récentes, à la veille des « sommets

européens ». Il s’agit toutefois d’un progrès

insuffisant, une succession de discours sans

vote ne permettant à la représentation nationale

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ni de peser sur les choix que fait le

Gouvernement dans l’exercice quotidien de

son pouvoir de négociation auprès des

instances européennes ni de le renforcer.

Celui-ci n’est donc soumis, à ce titre, qu’aux

procédures de contrôle de droit commun dont

on a vu qu’elles étaient peu satisfaisantes.

a) La création d’un Comité des affaires

européennes

Pour ce qui concerne, en premier lieu, le rôle

des délégations pour l’Union européenne qui

existent au sein de chacune des deux

assemblées, le Comité a relevé qu’il était peu

satisfaisant. Elles ont pour mission, aux termes

de l’ordonnance du 17 novembre 1958

modifiée, de « suivre les travaux conduits par

les institutions de l’Union européenne afin

d’assurer l’information de leurs assemblées

respectives ». Force est cependant de constater

que les délégations n’exercent que de manière

imparfaite ce rôle d’alerte et de veille des

assemblées et de leurs commissions

permanentes. Elles se comportent bien

davantage en « commissions » de plein

exercice, traitant de l’ensemble des questions

européennes sans réussir à établir des liens

étroits avec les commissions permanentes qui

traitent, au fond, des dossiers sur lesquels

l’influence des décisions prises à l’échelon

européen est de plus en plus déterminante et,

notamment, des transpositions de directives.

Un tel cloisonnement est évidemment

préjudiciable à l’exercice par le Parlement

d’un rôle efficace en matière européenne.

C’est pourquoi le Comité recommande que le

rôle des délégations – dont il souhaite que,

pour éviter toute confusion avec les

commissions permanentes au sens de l’article

43 de la Constitution, elles reçoivent

l’appellation de « comité des affaires

européennes » – soit mieux précisé

(Proposition n° 49). Ces comités placés sous

l’autorité directe du président de l’Assemblée

nationale pour l’un, et du Sénat pour l’autre,

exerceraient un rôle de veille et de tri des

questions à transmettre aux commissions

permanentes. Ils interviendraient en amont

pour alerter ces dernières sur certains dossiers

européens jugés sensibles. Ils prépareraient,

comme aujourd’hui, des propositions de

résolution soumises à ces commissions. La

double appartenance des parlementaires aux

délégations et aux commissions permanentes

serait maintenue pour favoriser une meilleure

connaissance des questions européennes.

Ces instances auraient également pour mission

d’exercer le contrôle du respect, par les

institutions européennes, du principe de

subsidiarité, contrôle que le traité en cours de

négociation entend confier aux Parlements

nationaux. La réorientation du rôle des

délégations irait de pair avec la mise en place,

au sein de chaque commission permanente, de

groupes de suivi des questions européennes,

composés de parlementaires également

membres du Comité des affaires européennes

c) La possibilité de voter des résolutions sur

tout sujet européen

S’agissant, en troisième lieu, de la procédure

instaurée à l’article 88-4 de la Constitution, le

Comité a constaté qu’elle ne pouvait être

maintenue en l’état, ne serait-ce qu’au regard

des principes politiques de l’Union

européenne, qui tendent, comme on vient de le

voir à consacrer les droits des parlements

nationaux.

Tel qu’il est aujourd’hui rédigé, l’article 88-4

de la Constitution oblige le Gouvernement à

soumettre au Parlement les projets ou

propositions d’actes européens comportant des

dispositions de nature législative au sens

français du terme, précision sans portée dans la

hiérarchie des normes européennes.

Il autorise le Gouvernement, à soumettre au

Parlement les autres projets, propositions ou

documents comme les livres blancs ou verts et

les communications de la Commission

européenne, mais sans qu’il soit obligé de

procéder à cette transmission, alors que celle-ci

est l’acte de procédure qui peut seul déclencher

le processus qui permet au Parlement de voter

des résolutions, à l’initiative de la délégation

pour l’Union européenne ou d’un

parlementaire.

En d’autres termes, même si la Commission

européenne transmet désormais au Parlement

l’ensemble des projets d’actes, de nature

législative ou non – ce qui n’ouvre pas le droit

de voter des résolutions –, il faut, aujourd’hui

encore, un accord du Gouvernement pour que

les deux assemblées soient autorisées à

délibérer sur des questions, comme la

négociation d’un traité européen, qui ne

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prennent pas la forme d’un projet d’acte

européen comportant des dispositions de

nature législative au sens national du terme.

Le Comité considère que cette situation n’est

pas satisfaisante et propose que soit modifié

l’article 88-4 de la Constitution de telle

manière, d’une part que soient supprimées

celles de ses dispositions qui limitent

l’obligation faite au Gouvernement de

transmettre l’ensemble des documents

européens et, d’autre part, que le Parlement

puisse adopter des résolutions sur toutes les

questions européennes (Proposition n° 51).

d) La transposition plus rapide des directives

En quatrième lieu, le Comité a estimé que la

procédure de transposition des directives

devait être revue afin de trouver un meilleur

équilibre entre les exigences contradictoires de

la rapidité et d’un examen approfondi.

Point n’est besoin d’insister sur l’influence

grandissante des directives communautaires

sur le droit national, notamment pour ce qui

concerne les textes de nature législative.

Pourtant, l’exercice de transposition auquel

donnent lieu les directives est mal vécu par les

parlementaires, qui n’interviennent qu’en fin

de parcours, sans avoir été complètement

informés des négociations dont procèdent ces

textes. Ils répugnent à s’exprimer en séance

publique sur des questions techniques qui

n’ont qu’une faible portée politique. D’un

autre côté, nombre de transpositions

empruntent la voie des ordonnances de l’article

38 de la Constitution, de sorte que le Parlement

est dessaisi de questions importantes qui ne

sont pas toutes, il s’en faut de beaucoup,

dépourvues d’incidence proprement politique.

C’est assez dire combien la procédure de

transposition des directives doit être améliorée.

Les propositions formulées plus haut vont dans

ce sens. Mais le Comité insiste pour que soit

pleinement utilisée, en cette matière, la

procédure simplifiée d’examen en commission,

sauf difficulté particulière signalée par le

Comité des affaires européennes (Proposition

n° 52). Ainsi seraient réservées à la discussion

publique les questions les plus importantes et

revalorisé le rôle du Parlement.