Fiche TD L1 Droit Civil 2nd Sem Bonnard 2013 2014

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    Universit de Paris 8 Saint-Denis. UFR de Droit Licence 1re (L1) Anne 2013/2014 Droit civil : la preuve, les personnes Cours de Mme Christelle Chalas en remplacement du Professeur Jrme Bonnard

    Thmes des dossiers de travaux dirigs

    Dossier n 1 : Conseils, bibliographie et plan de cours* Dossier n 2 : Mthodologie : la fiche de jurisprudence* Dossier n 3 : La dure de la personnalit juridique Dossier n 4 : La capacit des personnes physiques Dossier n 5 : Lidentification des personnes physiques Dossier n 6 : Les personnes morales Dossier n 7 : Les droits extra-patrimoniaux : le droit au respect de la vie prive Dossier n 8 : Les droits extra-patrimoniaux : le droit au respect du corps humain Dossier n 9 : La charge de la preuve Dossier n 10 : Les moyens de preuve

    * En principe, la premire sance de travaux dirigs permettra de commenter et expliquer les thmes des dossiers n 1 et n 2.

    Dossier n 1 : Conseils, bibliographie et plan de cours

    Support du cours. Le cours dispens par Mme Chalas, en remplacement du Professeur Bonnard, repose en grande partie sur le cours de ce dernier, lequel lui a trs gentiment donn lautorisation de lutiliser. Mme Chalas se rserve au demeurant la libert de modifier en certains endroits le cours de M. Bonnard, dy ajouter ou dy retrancher.

    Le cours donn en amphithtre reposera donc pour lessentiel, mais pas seulement, sur le cours de M. Bonnard. Celui-ci est entirement inclus dans la 4me dition de son manuel dIntroduction au droit, qui est parue en juin 2010. Cet ouvrage prsente non seulement les questions traditionnellement rattaches toute introduction gnrale au droit, en particulier la preuve, mais aussi celles qui relvent du droit des personnes (personnalit juridique ; personnes physiques et morales, droits extra-patrimoniaux avec le droit au respect de la vie prive et le droit au respect du corps humain).

    Jrme Bonnard Introduction au droit Editeur : Ellipses, Collection : Universits, manuel Droit ISBN : 978-2-7298-5448-5. 4me dition, 352 pages Parution : 06/2010 (23 )

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    Autres manuels :

    Muriel Fabre-Magnan. Introduction gnrale au droit Droit des personnes Mthodologie juridique. PUF, coll. Licence Doit. 298 pages, aot 2011

    P. Malinvaud, Introduction ltude du droit, Manuel, LexisNexis, 13me d., 2011.

    Type de contrle. Ecrit en premire et seconde session dexamen Lcrit de la premire session pourra prendre la forme de cas pratiques, de questions de cours et/ou de commentaires darrts. Un seul sujet sera propos.

    Conseils de mthodologie

    Pour matriser les divers types dexercices donns lexamen et aux travaux dirigs, vous pouvez vous aider de manuels de mthodologie. Parmi ceux-ci :

    Jrme Bonnard Mthode de travail de ltudiant en droit Hachette Suprieur, collection Les Fondamentaux 6me dition. 2013 (11,90 euros) (en ePub ou eBook numrique : 8,49 euros)

    Plan de cet ouvrage :

    Les livres et les revues Les documents numriques La prparation et la rdaction d'une dissertation La construction d'un plan La lecture d'une dcision de justice La fiche et le commentaire d'arrt Le cas pratique et la consultation L'expos oral et la note de synthse

    Plan du cours

    Titre I La classification des droits subjectifs Chapitre I La source des droits subjectifs Section I Lacte juridique Sous-section I Les catgories dactes juridiques Sous-section II Le fondement des actes juridiques Section II Le fait juridique

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    Sous-section I Les faits de lhomme illicites Sous-section II Les faits de lhomme licites

    Chapitre II Les titulaires des droits subjectifs Section I Les personnes physiques

    Sous-section I La dure de la personnalit juridique Sous-section II La capacit des personnes physiques

    Sous-section III Lidentification des personnes et ltat civil

    Section II Les personnes morales

    Sous-section I La dfinition des personnes morales

    Sous-section II La nature juridique des personnes morales Sous-section III Les catgories de personnes morales

    Chapitre III Les droits des personnes

    Section I Les droits patrimoniaux des personnes

    Sous-section I La notion de patrimoine

    Sous-section II le lien entre le patrimoine et les personnes

    Section II Les droits extra-patrimoniaux des personnes

    Sous-section I Le droit au respect de la vie prive Sous-section II Le droit au respect du corps humain

    Titre II La preuve des droits subjectifs Chapitre I L'objet de la preuve Section I La preuve du fait

    Section II Les caractres du fait

    Chapitre II La charge de la preuve

    Section I Le rle des parties dans la recherche des preuves

    Sous-section I Le principe de l'article 1315 du Code civil

    Sous-section II Les prsomptions lgales

    Section II Le rle du juge dans la recherche des preuves Sous-section I Le caractre accusatoire de la procdure civile

    Sous-section II L'largissement des prrogatives du juge

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    Chapitre III Les moyens de preuve

    Section I L'numration des modes de preuve

    Sous-section I Les preuves prconstitues : les crits

    Sous-section II Les preuves constitues a posteriori

    Section II L'utilisation des modes de preuve

    Sous-section I La preuve des actes juridiques Sous-section II La preuve des faits juridiques

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    Dossier n 2 : Structure des arrts de la Cour de cassation et fiche de jurisprudence

    STRUCTURE DES ARRTS DE LA COUR DE CASSATION Un arrt de la Cour de cassation est dune extrme concision. Les faits sont prsents en quelques mots, et les motifs sont souvent elliptiques, en particulier lorsquil sagit dun arrt de cassation. Larrt est rdig en une phrase unique, dont le sujet figure en tte : La Cour, ... , et le verbe (rejette ou casse et annule), la fin, dans le dispositif. Le sujet et le verbe sont spars par plusieurs propositions introduites par la locution : Attendu que... . Dans ce cadre, larrt sarticule en deux parties : la premire comporte les motifs dans lesquels sont exposes les raisons qui justifient la dcision; la deuxime, en fin darrt, forme le dispositif qui contient la solution retenue par la cour de cassation. Par exemple : Par ces motifs, rejette le pourvoi form contre larrt rendu le... ; Par ces motifs, casse et annule larrt rendu le... et renvoi devant... .

    Structure type dun arrt de rejet

    Exemple dun arrt de rejet. Il sagit de larrt Blieck, rendu par lAssemble Plnire de la Cour de cassation, le 29 mars 1991. Cet arrt a cr un principe gnral de responsabilit du fait dautrui sur le fondement de lalina 1er de larticle 1384 du Code civil.

    La Cour, Sur le moyen unique : Attendu, selon larrt confirmatif attaqu (Limoges, 23 mars 1989), que Jol

    Weevauters, handicap mental, plac au Centre daide par le travail de Sornac, a mis le feu une fort appartenant aux consorts Blieck; que ceux-ci ont demand lAssociation des centres ducatifs du Limousin, qui gre le centre de Sornac, et son assureur, la rparation de leur prjudice;

    La Cour, Attendu quil rsulte des nonciations de larrt (ou du jugement) attaqu...

    Dans cette proposition, seront gnralement exposs succinctement les faits de lespce, ventuellement la procdure suivie jusque l, et bien entendu la dcision qui a t rendue par larrt ou le jugement attaqu.

    Attendu quil est fait grief larrt attaqu (ou Attendu quil est reproch larrt attaqu...), davoir ainsi statu, alors que... Dans cette proposition sont cits les moyens du pourvoi, cest--dire les arguments, les critiques formules par le demandeur au pourvoi lencontre de la dcision attaque.

    Mais attendu que... bon droit la Cour dappel a dcid que...(ou : Mais attendu que suivi de lnonc du principe sur lequel sappuie la cour de cassation)...do il suit que le moyen ne peut tre accueilli (ou que les juges du fond ont ainsi pu dcider...); Dans cette proposition, la cour de cassation rfute les griefs formuls par lauteur du pourvoi et donne sa propre opinion. En somme, la cour de cassation se fait le dfenseur de la dcision attaque. Par ces motifs, rejette le pourvoi form contre larrt rendu le...

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    Attendu quil est fait grief larrt davoir condamn ces derniers des dommages-intrts par application de larticle 1384, alina 1er, du code civil, alors quil ny aurait de responsabilit du fait dautrui que dans les cas prvus par la loi et que la cour dappel naurait pas constat quel titre lassociation devrait rpondre du fait des personnes qui lui sont confies;

    Mais attendu que larrt relve que le centre gr par lassociation tait destin recevoir des personnes handicapes mentales, encadres dans un milieu protg; et que Jol Weevauters tait soumis un rgime comportant une totale libert de circulation dans la journe; quen ltat de ces constatations, do il rsulte que lassociation avait accept la charge dorganiser et de contrler, titre permanent, le mode de vie de ce handicap, la cour dappel a dcid, bon droit, quelle devait rpondre de celui-ci, au sens de larticle 1384, al. 1er, du code civil, et quelle tait tenue de rparer les dommages quil avait causs; do il suit que le moyen nest pas fond;

    Par ces motifs, rejette.

    Structure type dun arrt de cassation

    EXERCICE. Mettre sous la forme dune fiche de jurisprudence, larrt Perruche rendu en Assemble Plnire, le 17 novembre 2000. Pour vous aider comprendre ce clbre arrt, ainsi que ses prolongements jusqu lanne 2011 comprise, vous trouverez ci-aprs le canevas de ce long feuilleton judiciaire sans fin (Source. Jrme Bonnard. Mise

    La Cour, Vu larticle...

    Dans cette proposition que lon appelle le visa, la cour de cassation vise, cest--dire cite le numro de larticle, le titre de la loi ou le principe discut. Attendu quil rsulte de ce texte... Il sagit du chapeau de larrt. La cour de cassation cite le texte mme de larticle ou formule le grand principe quelle entend appliquer. Parfois, le chapeau figure dans lattendu prcdent le dispositif. Attendu quil rsulte des nonciations de larrt attaqu que...; Dans la premire partie de cette proposition, la cour de cassation rappelle les faits. que...(ou Attendu que...) larrt attaqu a dcid que... Dans cette deuxime partie de la proposition, la cour de cassation rappelle la dcision et les arguments retenus par la cour dappel. Attendu quen statuant ainsi (ou : de la sorte), alors que... (autre formule: Attendu cependant quil ne peut... do il suit quen statuant comme elle la fait la Cour dappel a viol le texte susvis). Dans cette proposition, sont indiques les raisons pour lesquelles, selon la cour de cassation, larrt attaqu encourt la cassation. Contrairement aux arrts de rejet, on ne trouve pas dans les arrts de cassation les griefs formuls par lauteur du pourvoi contre larrt quil attaque. Toutefois, on peut admettre que ses griefs se confondent avec les arguments de la cour de cassation noncs dans son arrt. Par ces motifs, casse et annule larrt rendu le... et renvoie devant...

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    jour du manuel Introduction au droit, n 490. Blog nos-facs-de-droit , catgories articles et mises jour manuel dIntroduction au droit). Par ailleurs, pour savoir comment faire une fiche de jurisprudence, vous trouverez des conseils de mthodologie la fin de ce second dossier de travaux dirigs.

    Dans cet arrt, le principe nonc par la Cour de cassation figure non pas aprs le visa des articles en cause, mais dans lattendu qui prcde le dispositif. En outre, laffaire a t renvoye par la cour de cassation devant la mme cour dappel que celle dont larrt a t cass, mais compose diffremment.

    La Cour, Sur le deuxime moyen, pris en sa premire branche du pourvoi principal form par les poux X, et le deuxime moyen du pourvoi provoqu, runis, form par la Caisse primaire dassurance maladie de Z;

    Vu les articles 1165 et 1382 du code civil;

    Attendu quun arrt rendu le 17 dcembre 1993 par la cour dappel dOrlans a jug, de premire part, que M. Y, mdecin, et le Laboratoire de biologie mdicale de B, avaient commis des fautes contractuelles loccasion de recherches danticorps de la rubole chez Mme X alors quelle tait enceinte, de deuxime part, que le prjudice de cette dernire, dont lenfant avait dvelopp de graves squelles conscutives une atteinte in utero par la rubole, devait tre rpar ds lors quelle avait dcid de recourir une interruption volontaire de grossesse en cas datteinte rubolique et que les fautes commises lui avaient fait croire tort quelle tait immunise contre cette maladie, de troisime part, que le prjudice de lenfant ntait pas en relation de causalit avec ces fautes; que cet arrt ayant t cass en sa seule disposition relative au prjudice de lenfant, larrt attaqu de la cour de renvoi dit que lenfant N. X ne subit pas un prjudice indemnisable en relation de causalit avec les fautes commises par des motifs tirs de la circonstance que les squelles dont il tait atteint avaient pour seule cause la rubole transmise par sa mre et non ces fautes et quil ne pouvait se prvaloir de la dcision de ses parents quant une interruption de grossesse;

    Attendu, cependant, que ds lors que les fautes commises par le mdecin et le laboratoire dans lexcution des contrats forms avec Mme X avaient empch celle-ci dexercer son choix dinterrompre sa grossesse afin dviter la naissance dun enfant atteint dun handicap, ce dernier peut demander la rparation du prjudice rsultant de ce handicap et caus par les fautes retenues;

    Par ces motifs, ..., casse larrt de la Cour dappel dOrlans, du 5 fvr. 1999, et renvoie devant la cour dappel dOrlans, autrement compose ...

    Le feuilleton judiciaire de laffaire Perruche. Le clbre arrt Perruche, rendu par lAssemble plnire de la Cour de cassation, le 17 novembre 2000, illustre le droulement dun procs ayant fait lobjet de deux pourvois successifs.

    Pendant sa grossesse, une femme consulte un mdecin et subit des analyses. Le mdecin commet une erreur de diagnostic, et le laboratoire une erreur danalyse dun rsultat sanguin. En raison de ces fautes, la femme na pu tre informe de la rubole quelle avait contracte, et elle a donn naissance un enfant affect dun grave handicap. Or, si elle

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    avait eu connaissance de sa maladie, cette femme aurait pu dcider davorter, puisque la loi autorise linterruption volontaire de grossesse pour des raisons thrapeutiques (Code de la sant publique, art. L. 2213-1). La mre rclamait donc, au nom de lenfant, la rparation du prjudice rsultant du handicap de celui-ci.

    1) Le tribunal de grande instance dvry, le 13 janvier 1992, a condamn le mdecin et le laboratoire indemniser le prjudice caus lenfant en raison de leurs fautes respectives.

    2) La Cour dappel de Paris, le 17 dcembre 1993, a rform ce jugement, considrant que le handicap de lenfant avait pour cause directe la rubole que lui avait transmise sa mre in utero et non les fautes releves contre le mdecin et le laboratoire. En effet, en droit de la responsabilit, une personne nest responsable que de ses fautes, qui sont la cause directe du dommage de la victime. Or, en lespce, pour les juges dappel, rien ne permettait de prjuger que si la mre avait t correctement informe, elle aurait dcid davorter. En somme, la causalit tant rduite une simple hypothse, elle ntait pas directe.

    3) Sur un premier pourvoi, la premire chambre civile de la Cour de cassation, le 26 mars 1996, a cass la dcision de la Cour dappel de Paris. Pour la Cour de cassation, il existait un lien de causalit entre le dommage subi par lenfant et les fautes du mdecin et du laboratoire, car si la mre avait t informe de sa maladie elle aurait pu avorter, empchant par l mme lenfant de natre. Ainsi la Cour de cassation admettait-elle que le lien de causalit entre la faute et le dommage ne soit pas toujours direct.

    4) Sur renvoi de cassation, la Cour dappel dOrlans, le 5 fvrier 1999, a refus de sincliner, considrant que lenfant navait pas subi de prjudice indemnisable en relation de causalit avec les fautes commises.

    5) Un nouveau pourvoi ayant t form, lAssemble plnire de la Cour de cassation, par un arrt du 17 novembre 2000, sous le visa des articles 1165 et 1382 du Code civil, a cass larrt de la Cour dappel dOrlans, et renvoy laffaire devant cette mme Cour dappel dans une formation autrement compose. Le principe de lindemnisation du prjudice personnel subi par un enfant n handicap est alors formul par la Cour de cassation, en ces termes : Ds lors que les fautes commises par le mdecin et le laboratoire [] avaient empch Mme Perruche dexercer son choix dinterrompre sa grossesse afin dviter la naissance dun enfant atteint dun handicap, ce dernier peut demander la rparation du prjudice rsultant de ce handicap et caus par les fautes retenues .

    6) La seconde Cour dappel de renvoi aurait d appliquer cette interprtation de la rgle de droit pose par la Cour de cassation aux faits de lespce, et condamner le mdecin et le laboratoire indemniser le prjudice rsultant du handicap de lenfant. Mais la procdure a t suspendue en raison de lentre en vigueur de la loi Kouchner du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, dont larticle premier nonce : Nul ne peut se prvaloir dun prjudice du seul fait de sa naissance [] Lorsque la responsabilit dun professionnel est engage vis--vis des parents dun enfant n avec un handicap non dcel pendant la grossesse la suite dune faute caractrise, les parents peuvent demander une indemnit de leur seul prjudice . Cette loi, dite anti-Perruche, avait t vote en catastrophe par le Parlement sous la pression mdiatique et les critiques virulentes des milieux juridiques, mdicaux et politiques. Ceux-ci considraient que la Cour de

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    cassation, en autorisant les victimes se prvaloir dun prjudice du fait de leurs naissances, incitait leuthanasie prnatale ! Toujours est-il que, pour mettre un terme la jurisprudence Perruche, le Parlement a prvu lapplication immdiate des dispositions de la loi Kouchner aux instances en cours, donc au procs Perruche. Aussitt, tous les dossiers en cours ont t ferms . 7) Seulement, ils ont d tre rouverts la suite de la condamnation du caractre rtroactif de cette loi par les plus hautes juridictions, quil sagisse des juridictions franaises avec la Cour de cassation (Civ. 1re., 24 janv. 2006, Bull. n 30) et le Conseil dEtat (C.E., 24 fvr. 2006, n 250167, publi au recueil Lebon), ou des juridictions europennes avec la Cour Europenne des Droits de lHomme (Cour EDH, 6 oct. 2005, Maurice c. France, requte n 11810/03). Pour ces juridictions, en supprimant, avec effet rtroactif, une partie essentielle des crances en rparation que les parents auraient pu faire valoir, le lgislateur les a privs dune valeur patrimoniale prexistante et faisant partie de leurs biens, savoir une crance en rparation tablie dont ils pouvaient lgitimement dterminer le montant. La loi franaise ntait donc pas conforme au protocole n 1 de la Convention Europenne des Droits de lHomme selon lequel toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens .

    8) Le Conseil constitutionnel, le 11 juin 2010, son tour, a condamn le caractre rtroactif de la loi Kouchner (Dcision n 2010 QPC du 11 juin 2010, JO du 12 juin). Dans sa dcision, le Conseil constitutionnel a commenc par juger conforme la Constitution la rgle selon laquelle Nul ne peut se prvaloir dun prjudice du seul fait de sa naissance . En revanche, il a jug contraire la Constitution lapplication de cette rgle aux instances en cours au moment du vote de la loi de 2002. Pour le Conseil constitutionnel, si des motifs d'intrt gnral peuvent justifier que les nouvelles rgles soient rendues applicables aux instances venir relatives aux situations juridiques nes antrieurement, ils ne peuvent justifier des modifications aussi importantes aux droits des personnes qui ont, antrieurement cette date, engag une procdure en vue d'obtenir la rparation de leur prjudice.

    9) Toutefois, le 13 mai 2011, le Conseil d'tat, qui connat du contentieux de la responsabilit mdicale des tablissements publics, a aussitt considr que cette annulation par le Conseil constitutionnel navait pas eu pour consquence de rendre indemnisable le prjudice personnel subit par un enfant avant lentre en vigueur de cette loi, selon la jurisprudence antrieure (CE, 13 mai 2011, Mme L., n 329290. Dans le mme sens : CE, 18 juill. 2011, n 328881). Pour le Conseil d'tat, les enfants concerns ne peuvent donc tre indemniss de leur prjudice personnel que si une action en rparation a t engage avant lentre en vigueur de la loi du 4 mars 2002. Dans le cas contraire, ces enfants relvent du dispositif de larticle L. 114-5 du Code de laction sociale et de la famille, issu de la loi Kouchner, qui interdit quiconque de se prvaloir dun prjudice du seul fait de sa naissance. Cette interprtation a minima de la dcision du Conseil constitutionnel du 11 juin 2010 par la Haute juridiction administrative na pas trouv grce auprs de la Haute juridiction judiciaire.

    10). En effet, la Cour de cassation, le 15 dcembre 2011, a rejet le pourvoi form contre un arrt de la Cour dappel dAmiens qui avait cart lapplication de larticle 1er la loi du 4 mars 2002, pour admettre laction en responsabilit, introduite en 2006, lencontre du mdecin et dune clinique prive, par les parents dun enfant n en 1998 (Cass. 1re civ., 15 dc. 2011, n 10-27473, paratre au Bulletin).

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    Pour la Cour de cassation, sagissant dun dommage survenu antrieurement la loi de 2002, l'article 1er de cette loi ntait pas applicable, indpendamment de la date de lintroduction de la demande en justice. Pour justifier cette solution favorable aux victimes, la Cour de cassation a habill sa dcision dune leon de droit constitutionnel : attendu que si l'autorit absolue que la Constitution confre la dcision du Conseil constitutionnel s'attache non seulement son dispositif mais aussi ses motifs, c'est la condition que ceux-ci soient le support ncessaire de celui-l ; que le dispositif de la dcision 2010-2 QPC du 11 juin 2010 nonce que le 2 du paragraphe II de l'article 2 de la loi n 2005-102 du 11 fvrier 2005 pour l'galit des droits et des chances, la participation et la citoyennet des personnes handicapes est contraire la Constitution [larticle 2 de la loi du 11 fvrier 2005 avait transfr dans le Code de laction sociale et des familles larticle premier de la loi Kouchner de 2002]; que, ds lors, faute de mention d'une quelconque limitation du champ de cette abrogation, soit dans le dispositif, soit dans des motifs clairs et prcis qui en seraient indissociables, il ne peut tre affirm qu'une telle dclaration d'inconstitutionnalit n'aurait effet que dans une mesure limite, incompatible avec la dcision de la cour d'appel de refuser d'appliquer au litige les dispositions de l'article L. 114-5 du code de l'action sociale et des familles. Plus simplement dit, pour la Cour de cassation lautorit des dcisions du Conseil constitutionnel sattache non seulement au dispositif, mais galement aux motifs ds lors quils en sont le support ncessaire : les motifs clairs et prcis dune dcision du Conseil constitutionnel font corps avec le dispositif (dj en ce sens : Cons. const., 16 janv. 1962, dcis. no 61-18, Loi dorientation agricole ; Crim. 10 oct. 2001, n 01-84.922, Bull. crim. no 206).

    11). Une merveille dabsurdit. Aujourdhui, deux solutions diffrentes rgissent les dommages survenus avant lentre en vigueur de la loi du 4 mars 2002. Dun ct, en matire de responsabilit mdicale prive, la jurisprudence Perruche sapplique toutes les actions en justice, introduites ou venir, pour les enfants ns avant le 7 mars 2002. De lautre, en matire de responsabilit mdicale publique, elle ne sapplique qu lgard des actions engages avant lentre en vigueur de la mme loi de 2002.

    La voie choisit par la Cour de cassation est la plus humaine dans la mesure o elle nopre aucune exclusion pour les victimes selon la date dintroduction de leur instance, dautant plus que, en pratique, ces victimes attendent souvent trs longtemps avant de se dcider agir. Cest sans doute la raison pour laquelle cette voie a t suivie par plusieurs Cours administratives dappel pour lesquelles la condamnation de la rtroactivit de la loi Perruche par la Cour Europenne des Droits de lHomme, le 6 octobre 2005, avait eu pour effet dcarter lapplication de ses dispositions transitoires aux enfants ns avant son entre en vigueur, peu important la date dintroduction des actions en justice (CAA Lyon, 7 avr. 2009, req. n 05LY00016, CAA Douai, 16 nov. 2010, req. n 09DA00402). On peut esprer que cette solution soit galement adopte lavenir par le Conseil dtat, afin que les dispositions transitoires uniques de la mme loi du 4 mars 2002 cessent de donner lieu deux rgimes diffrents selon la qualit publique ou prive du responsable.

    LA FICHE DE JURISPRUDENCE

    La fiche de jurisprudence ne constitue ni un commentaire dune dcision, ni une dissertation : il sagit dune simple fiche technique danalyse dune dcision afin den discerner les divers lments. Elle doit tenir en moins dune page et contenir 8 rubriques.

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    1 Nom et date de la dcision. Eventuellement, il convient de mentionner les rfrences des revues o la dcision a t publie suivies des noms de ceux qui en ont fait le commentaire.

    2 Nom des parties. Dabord, le nom du demandeur. Ensuite, le nom du dfendeur. Il est inutile de faire prcder le patronyme des parties des mots : sieur, dame, demoiselle. Les abrviations : M.; Mme; Mlle, suffisent.

    3 Domaine juridique concern : Ex. : Application dune loi nouvelle aux effets futurs dun contrat en cours dexcution .

    4 Les faits. Il sagit de rsumer succinctement ce qui sest pass, en respectant lordre chronologique, sans y introduire dlments de droit, et en retirant les dtails inutiles. Dans les arrts de la cour de cassation, les faits sont dj rsums lextrme en une courte phrase quil suffit souvent de recopier. On peut terminer la prsentation des lments de fait par lnonc de ce que lune des parties rclame lautre.

    5 La procdure. Il sagit dindiquer les diffrentes phases de la procdure suivie, en commenant par le dbut de linstance. Pour chacune des juridictions saisies, il convient de prciser qui est demandeur et qui est dfendeur. En outre, il convient de prciser en faveur de qui ces juridictions ont statu. Dans les arrts de la cour de cassation, la procdure antrieure, en particulier la dcision des premiers juges, est rarement mentionne. Cependant, si la cour de cassation voque un arrt confirmatif dune cour dappel ou, au contraire, un arrt infirmatif, ces termes suffisent pour dduire le sens de la dcision des premiers juges.

    6 Arguments des parties. Il sagit dindiquer les arguments ou prtentions de chacune des parties en commenant par ceux dvelopps par le demandeur, avant dexposer ceux du dfendeur. Dans les arrts de la cour de cassation, les arguments du dfendeur ne sont pas toujours reproduits, la diffrence de ceux du demandeur qui constituent les moyens du pourvoi. Cependant, on peut supposer que les arguments du dfendeur se confondent avec les motifs de la dcision des juges du fond, du moins lorsque ces motifs sont reproduits dans larrt de la cour de cassation, ce qui nest pas toujours le cas.

    7 Le (s) problme (s) de droit. Il sagit de lexercice le plus difficile. Dabord, il faut souvent lidentifier. Ensuite, il doit tre formul exactement en une ou deux phrases interrogatives. Exemple : Une loi nouvelle dordre public sapplique-t-elle systmatiquement aux effets futurs dun contrat en cours dexcution ?

    8 La solution du problme. Il sagit dindiquer la rponse donne par la dcision au problme de droit, ainsi que ses motifs. Exemple : La cour de cassation considre que la circonstance quune loi nouvelle est dordre public ne saurait elle seule justifier son application immdiate aux effets futurs dun contrat en cours dexcution. Pour la cour de cassation, seule une volont expresse ou implicite du lgislateur pour des raisons imprieuses duniformit des solutions et dquilibre social peut justifier lapplication immdiate de la loi nouvelle .

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    Dossier n 3 : La dure de la personnalit juridique

    I. Le commencement de la personnalit juridique

    1) Le principe : un enfant n vivant et viable

    La personnalit juridique commence la naissance, sous rserve que l'enfant soit n vivant et viable (C. civ., art. 318, 725 et 906). Lorsque l'intrt de l'enfant l'exige, on admet que la personnalit juridique lui soit reconnue ds sa conception, sous rserve qu'il naisse ultrieurement vivant et viable.

    C. civ., art. 318 : Aucune action nest reue quant la filiation dun enfant qui nest pas n viable C. civ., art. 725 : Pour succder, il faut exister linstant de louverture de la succession ou, ayant dj t conu, natre viable . C. civ., art. 906 : Pour tre capable de recevoir entre vifs, il suffit d'tre conu au moment de la donation. Pour tre capable de recevoir par testament, il suffit d'tre conu l'poque du dcs du testateur. Nanmoins, la donation ou le testament n'auront leur effet qu'autant que l'enfant sera n viable .

    2) Le statut de l'embryon et du ftus

    Summa divisio des personnes et des choses. Du point de vue juridique, on ne peut tre que personne ou chose, de sorte que les variations sur la personne humaine potentielle ou en devenir, la chose personnifie ou sacre, voire la personne rifie (fcondation in vitro) ny changent rien (le Comit consultatif national dthique, dans un avis du 22 mai 1984, a affirm que : lembryon ou le ftus doit tre reconnu comme une personne humaine potentielle qui est ou a t vivante et dont le respect simpose tous ). Cette distinction remonte au droit romain. Elle a t exprime dans les Institutes (manuels de droit) de Gaius et Justinien. Ces ouvrages exposaient les rgles de droit en examinant successivement les personnes (personae), les choses (res), et les actions en justice que les premires peuvent accomplir sur les secondes. Notre Code de 1804 a repris cette division dans ses trois Livres ( Des personnes ; Des biens ; Des diffrentes modifications de la proprit ).

    Un produit innom . Fidle cette distinction, notre lgislateur s'est bien gard de qualifier juridiquement l'embryon et le ftus. dfaut dtre ns vivants et viables, ils sont tous deux des choses, peu important quils soient vivants.

    La loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain na donn aucun statut juridique clair et prcis l'embryon et les lois qui ont rvis la matire le 6 aot 2004 et le 7 juillet 2011 nont pas examin cette question. Dans le Code civil, les nouveaux articles issus de loi du 29 juillet 1994, toujours en vigueur, se contentent dutiliser les concepts dtre ou de corps humain (V. C. civ., art. 16 et 16-1). Or, nulle part, il nest prcis si ces concepts comprennent lembryon et le ftus. De surcrot, ils nont pas plus de valeur juridique que ceux dembryon et de ftus. Aussi existe-t-il, toujours en droit franais, un dcalage complet entre le commencement biologique de la vie, et le commencement de la personnalit juridique ds la naissance de lenfant.

    Code civil : Livre 1, Chapitre II : Du respect du corps humain (L. 29 juill. 1994).

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    Article 16 : La loi assure la primaut de la personne, interdit toute atteinte la dignit de celle-ci et garantit le respect de l'tre humain ds le commencement de sa vie .

    Article 16-1 : Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses lments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial.

    Article 16-1-1 : Le respect d au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes dcdes, y compris les cendres de celles dont le corps a donn lieu crmation, doivent tre traits avec respect, dignit et dcence .

    Article 16-2 : Le juge peut prescrire toutes mesures propres empcher ou faire cesser une atteinte illicite au corps humain ou des agissements illicites portant sur des lments ou des produits de celui-ci, y compris aprs la mort .

    Article 16-3 : Il ne peut tre port atteinte l'intgrit du corps humain qu'en cas de ncessit mdicale pour la personne ou titre exceptionnel dans l'intrt thrapeutique d'autrui. Le consentement de l'intress doit tre recueilli pralablement hors le cas o son tat rend ncessaire une intervention thrapeutique laquelle il n'est pas mme de consentir .

    Article 16-4 : Nul ne peut porter atteinte l'intgrit de l'espce humaine. Toute pratique eugnique tendant l'organisation de la slection des personnes est interdite. Est interdite toute intervention ayant pour but de faire natre un enfant gntiquement identique une autre personne vivante ou dcde. Sans prjudice des recherches tendant la prvention et au traitement des maladies gntiques, aucune transformation ne peut tre apporte aux caractres gntiques dans le but de modifier la descendance de la personne.

    Art. 16-9 : Les dispositions du prsent chapitre sont dordre public .

    Homicide involontaire et ftus : Ass. plnire de la Cour de cassation, 29 juin 2001.

    Faire une fiche de jurisprudence.

    Sur les deux moyens runis du procureur gnral prs la cour dappel de Metz et de Mme X... : Attendu que le 29 juillet 1995 un vhicule conduit par M. Z... a heurt celui conduit par Mme X..., enceinte de six mois, qui a t blesse et a perdu des suites du choc le foetus quelle portait ; que larrt attaqu (Metz, 3 septembre 1998) a notamment condamn M. Z... du chef de blessures involontaires sur la personne de Mme X..., avec circonstance aggravante de conduite sous lempire dun tat alcoolique, mais la relax du chef datteinte involontaire la vie de lenfant natre ;

    Attendu quil est fait grief larrt attaqu davoir ainsi statu, alors que, dune part, larticle 221-6 du Code pnal rprimant le fait de causer la mort dautrui nexclut pas de son champ dapplication lenfant natre et viable, quen limitant la porte de ce texte lenfant dont le cur battait la naissance et qui a respir, la cour dappel a ajout une condition non prvue par la loi, et alors que, dautre part, le fait de provoquer involontairement la mort dun enfant natre constitue le dlit dhomicide involontaire ds lors que celui-ci tait viable au moment des faits quand bien mme il naurait pas respir lorsquil a t spar de la mre, de sorte quauraient t viols les articles 111-3, 111-4 et 221-6 du Code pnal et 593 du Code de procdure pnale ;

    Mais attendu que le principe de la lgalit des dlits et des peines, qui impose une

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    interprtation stricte de la loi pnale, soppose ce que lincrimination prvue par larticle 221-6 du Code pnal, rprimant lhomicide involontaire dautrui, soit tendue au cas de lenfant natre dont le rgime juridique relve de textes particuliers sur lembryon ou le ftus ;

    Do il suit que larrt attaqu a fait une exacte application des textes viss par le moyen ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

    II. La disparition de la personnalit juridique : leuthanasie

    En matire deuthanasie, lanne 2011 a t marque par de nombreux vnements mdiatiques : laffaire du Docteur Bonnemaison qui a inject des produits mortels plusieurs patients gs de lhpital de Bayonne; un arrt de la Cour europenne des droits de lhomme, du 20 janvier 2011, qui a maintenu son opposition lgard de leuthanasie ; le refus du Snat, les 25 et 26 janvier 2011, de voter une proposition de loi sur leuthanasie reconnaissant un malade en fin de vie le bnfice dune assistance mdicalise permettant, par un acte dlibr, une mort rapide et sans douleur ; la loi du 7 juillet 2011 relative la biothique qui sest abstenue dintroduire les dispositions pour amliorer le rgime en crise de nos soins palliatifs, souhaites par lassemble gnrale du Conseil dtat ; et une circulaire du ministre de la Justice et des Liberts du 20 octobre 2011 concernant la mise en uvre de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et la fin de vie et de traitement judiciaire des affaires dites de fin de vie. Ces vnements nombreux, en si peu de temps, montrent, si cela est ncessaire, quil est bien difficile, pour aider les victimes dun drame humain, de trouver un point dquilibre, en priode lectorale, entre le droit, dune part, et lthique et la thologie, dautre part.

    Effectuez une recherche dans les revues juridiques des articles de doctrine se rapportant leuthanasie (droit dun tiers de faire mourir ou de laisser mourir une personne atteinte dune maladie incurable). tablissez une liste des crits qui vous paraissent les plus significatifs et prenez-en connaissance. Quelle est la position des lgislations franaises et trangres sur cette question. Que dit la jurisprudence franaise et europenne ? Que disent les grands courants de pense (glise, etc.) et professionnels (mdecins, etc.), etc.

    Pour vous aider, vous pouvez prendre connaissance du texte de la circulaire du 31 octobre 2011sur le traitement des affaires de fin de vie . En effet, pour pallier les imprcisions et lacunes de la loi Leonetti, le Ministre de la Justice et des Liberts a publi cette circulaire concernant la mise en uvre de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et la fin de vie et de traitement judiciaire des affaires dites de fin de vie (BOMJL n 2011-10 du 31 octobre 2011, en ligne, sur Legifrance). Il sagit dune sorte de guide pour aider les magistrats dans le traitement des affaires deuthanasie active quant lopportunit des poursuites, le choix des qualifications, lorientation de la procdure ou encore la gestion humaine et mdiatique de laffaire. Toutefois, la circulaire prend soin, au pralable, de rappeler que chaque affaire est singulire et quil ne saurait tre donn des instructions gnrales et absolues . Les magistrats sont donc laisss leur triste sort !

    http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2011/10/cir_33987.pdf

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    Rdigez une introduction et un plan sur le sujet : Le droit de faire mourir et de laisser mourir . Rassemblez les lments du sujet autour dides essentielles, et construisez un plan en deux parties ( la limite trois), comme sil sagissait dun devoir ou dun expos. Utilisez des intituls explicites. leur lecture, il doit tre possible de comprendre votre position. Vous rdigerez intgralement lintroduction.

    Conseil de mthodologie : Comment rdiger une introduction.

    Il faut se garder de commencer lintroduction dun devoir de droit par lannonce du plan des parties. Cette annonce doit tre livre en fin dintroduction. Il convient, partir dune ide gnrale, de resserrer sans cesse largumentation, afin de dmontrer que lintrt du problme conduit la division des parties que lon annonce effectivement en fin de lintroduction. Lintroduction doit runir plusieurs lments :

    Premirement : Lnonciation du sujet

    Il convient de centrer progressivement lattention sur le sujet et de le dlimiter. En somme, cette partie de lintroduction doit vous permettre de rpondre la question suivante : De quoi dois-je parler ?

    Vous pouvez amener le sujet au moyen dune ide gnrale.

    Soit le sujet: Lapplication de la loi dans le temps en matire de contrats . Demble, vous pouvez souligner lampleur de la production lgislative contemporaine et les modifications successives du rgime de situations juridiques dtermines qui en rsultent.

    Vous devez replacer le sujet dans lensemble de la discipline considre.

    Par exemple, pour le sujet prcdent, vous voquez dabord dune manire gnrale les conflits de lois dans le temps en droit priv, puis, de manire plus prcise, en matire de contrats.

    Enfin, il faut expliquer la manire dont vous comprenez le sujet. Dabord, en analysant et en dfinissant les termes du sujet. Ensuite, en prcisant son domaine, cest--dire en expliquant ce quil comprend et ventuellement ce quil ne comprend pas. Cest loccasion de justifier lacceptation retenue dun sujet ambigu ou lexclusion dun lment non essentiel du sujet.

    Deuximement : Lintrt du sujet

    Dsormais, il faut faire ressortir lintrt du sujet, autrement dit il convient de rpondre la question suivante : Pourquoi dois-je parler de ce sujet ? Il faut donc rechercher pourquoi le sujet a t donn. Ces intrts peuvent tre dordre pratique et/ou thorique : actualit lgislative ; hiatus entre la lgislation existante et les besoins pratiques ; aspects sociologiques ; conflit dans les sources du droit ; volution dun fondement du droit

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    ventuellement, on peut retracer ce stade lvolution du sujet dans le temps (historique) et dans lespace (droit compar). Parfois, on rserve les lments de droit compar pour la conclusion.

    Troisimement : La positivit de la question

    Il convient de prciser si le sujet relve du droit normatif (lois, rglementation), de la coutume, de principes gnraux du droit non crits, de la jurisprudence, et/ou de la doctrine. Cependant, il faut se garder dentrer dans le dtail pour ne pas dflorer le sujet. Cest ainsi que les dcisions de jurisprudence et les opinions doctrinales ne doivent pas tre cites ce stade.

    Quatrimement : Lide ou les ides directrice(s)

    Afin de personnaliser et de rendre dynamique votre devoir, il faut vous approprier le sujet pour en faire ressortir les ides fortes comme une ambigut, une contradiction, un paradoxe, une svrit, une libralisation, une mesure de contrle, une lgalisation, le renforcement dune protection, la suppression dune ingalit, une harmonisation, etc. En somme, cette partie de lintroduction doit vous permettre de rpondre la question suivante : Comment vais-je parler du sujet ?

    Cinquimement : Lannonce du plan

    Il faut dsormais annoncer le plan qui rsulte des considrations prcdentes. Ce plan va tre le fil conducteur du devoir. Il est command par lide directrice qui domine le sujet et il doit sarticuler logiquement autour des lments qui se rattachent au sujet. Il est souhaitable den justifier le dcoupage juste avant lannonce prcise qui ne porte que sur les deux (ou trois) grandes parties. Pour vous aider, voici diverses formules dannonces dont vous pouvez vous inspirer :

    Il convient dabord de prciser la porte de larticle.... sur le droit particulier de... (I), pour mieux saisir les consquences de ce texte sur le droit gnral de... (II).

    Afin de dterminer sil existe une diffrence de... entre les deux notions, il convient dabord danalyser le fondement de ces deux notions ((I), avant den prciser les effets (II).

    Alors que dans leur domaine les deux notions se ressemblent (I) en revanche, elles sopposent nettement dans leur mise en uvre (II).

    Le double rle du ... apparat tant dans les conditions de sa nomination et de sa rvocation (I) que dans ses pouvoirs et sa responsabilit (II).

    Lquilibre entre ces intrts contradictoires est dsormais assur par le droit positif qui a formul deux rgles: dune part,... (I); dautre part,.... (II).

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    Dossier n 4. La capacit des personnes physiques

    I. Le mineur chef dentreprise depuis le 1er janvier 2011

    Une loi du 1er janvier 2011 donne au mineur de 16 ans, mme non mancip, la possibilit de crer et grer une entreprise en son nom propre sous le statut de lentreprise individuelle responsabilit limite (C. civ., art. 389-8 [L. 2010-618 du 4 juin 2010]). Lautorisation doit tre donne, par acte sous seing priv ou notari, par ses deux parents qui exercent en commun lautorit parentale ou par son administrateur lgal sous contrle judiciaire avec lautorisation du juge des tutelles, ou, dfaut son administrateur lgal ou son tuteur. Elle comporte la liste des actes dadministration ncessaires pour les besoins de la cration et de la gestion de lentreprise par le mineur. Quant aux actes de disposition, ils ne peuvent tre effectus que par ses deux parents ou, dfaut, par son administrateur lgal sous contrle judiciaire avec lautorisation du juge des tutelles (avant, 2011, les personnes de moins de 25 ans devaient sassocier un adulte pour crer leur entreprise et ils ne pouvaient la grer).

    Depuis 1er janvier 2011, le mineur de 16 ans, mme non mancip, peut galement adopter le rgime de lauto-entrepreneur responsabilit limite (AERL). Grce ce rgime, il peut cumuler les avantages de lauto-entreprise (formalits de constitution dune grande simplicit), et ceux de lentreprise individuelle responsabilit limite (EIRL), savoir la sparation de son patrimoine personnel et du patrimoine spcialement affect laffaire, en cas de cessation des paiements, les biens personnels du mineur quil a dcid de ne pas affecter son entreprise seront insaisissables par les cranciers de celle-ci.

    Toutefois, le mineur g de 16 ans ne peut tre commerant que sil est mancip (C. civ., art. C. civ., art. 413-8, C. com., art. L. 121-2 [L. 2010-618 du 4 juin 2010]). Il doit alors obtenir lautorisation du juge des tutelles au moment de la dcision dmancipation et du prsident du tribunal de grande instance sil formule cette demande aprs avoir t mancip (ibid.). On doit donc considrer qu dfaut de recourir la procdure dmancipation en raison de sa complexit et de sa longueur (plusieurs mois), le mineur non mancip auto-entrepreneur individuel ne saurait exercer des actes de commerce et en faire sa profession habituelle (C. com., art. L. 121-1). Il ne lui reste donc plus que des activits civiles, lesquelles ncessitent souvent des titres, des diplmes et des ressources quun mineur de 16 ans ne dtient pas encore (mdecin, dentiste, architecte, recherche, enseignement, activits immobilires ou agricoles).

    II. La capacit, au cas par cas des mineurs

    En principe, le mineur est incapable et il ne peut exercer seuls des droits le concernant. Ces droits sont exercs en son nom et pour son compte par ses pre et mre qui exercent lautorit parentale, voire par un tuteur. Cependant, divers textes permettent au mineur non mancip dagir seul aussi bien en matire contractuelle (ex. actes de la vie courante, etc.), quen matire extrapatrimoniale (ex. contraception, IVG, etc.).

    Actualit. Larticle 2 de la loi du 15 juin 2010 relative lentreprise individuelle responsabilit limite (EIRL) permet aux mineurs, sous certaines conditions, dexercer une

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    activit professionnelle indpendante, y compris commerciale. Une autre loi n 2011-893 du 28 juillet 2011 a insr dans la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat dassociation un article 2 bis permettant aux mineurs de seize ans rvolus de constituer librement une association. Une fois lassociation cre, le mineur peut, sous rserve dun accord crit pralable de son reprsentant lgal, accomplir tous les actes utiles son administration, lexception des actes de disposition (par ex. la cession dun bien meuble ou immeuble.

    Exercice. tablissez une liste de ces divers actes. Recherchez les textes et les dcisions jurisprudentielles ventuelles qui les mentionnent. Puis rpondez aux questions suivantes :

    Un mineur g de 17 ans peut-il ouvrir un compte en banque pour dposer largent dun job et utiliser ce compte. Peut-il louer un appartement. Peut-il conclure une convention de stage ou un contrat de travail ? Peut-il crer et grer une entreprise dachat et revente de CD et DVD doccasion?

    Un enfant de 10 ans peut-il acheter des cigarettes et des bonbons ? Un mineur de 16 ans peut-il prendre une assurance pour sa moto. Peut-il vendre le

    vlo de course de 1 000 euros quil a reu Nol ? Peut-il acheter une montre Rolex ? Une mineure peut-elle bnficier dune IVG en cachette de ses parents ? Peut-on

    obliger une mineure subir une IVG ? Peut-elle obtenir des contraceptifs, sans autorisation des parents ?

    En cas de sparation de ses parents, un enfant de 12 ans peut-il choisir le titulaire du droit dhbergement et de visite ? Si cet enfant faisait partie dune famille recompose, a-t-il le droit dentretenir des relations avec son beau-parent, dsormais spar de sa mre ?

    III. Lincapacit gnrale des mineurs (et des majeurs en tutelle)

    Sauf exceptions prvues par la loi, le mineur est incapable. Il fait alors lobjet dun rgime de reprsentation. Cela signifie quune autre personne est dsigne pour agir au nom et pour le compte du mineur. Selon les circonstances, il sagit dun administrateur lgal (en fait les pre et mre) ou dun tuteur (souvent lorsquil na plus ses pre et mre). Les pouvoirs de l'administrateur lgal ou du tuteur dans la gestion des biens du mineur (ou du majeur en tutelle) diffrent selon le type dactes. Lon oppose alors les actes de disposition et les actes d'administration. Pour les actes de disposition, en rgime dadministration lgale, les parents les accomplissent ensemble, sans information pralable du juge des tutelles (C. civ., art. 389-5, al. 1er). En cas de dsaccord, lacte doit tre autoris par le juge des tutelles (C. civ., art. 389-5, al. 2). En rgime de tutelle, le tuteur ne peut les accomplir quavec lautorisation du conseil de famille ou, dfaut, du juge des tutelles (C. civ., art. 502). Pour les actes dadministration, en rgime dadministration lgale, chaque parent peut les passer seul, sans autorisation (C. civ., art. 389-4). En rgime de tutelle, ils sont accomplis par le tuteur seul (C. civ., art. 504, al. 1er).

    Les actes de disposition sont les plus graves, dans la mesure o ils peuvent porter atteinte au patrimoine du mineur. Un dcret du 22 dcembre 2008 applicable aux mineurs ainsi quaux majeurs en tutelle (JO du 31 dc.), les dfinit comme des : actes qui engagent le patrimoine de la personne protge, pour le prsent ou lavenir, par une modification importante de son contenu, une dprciation significative de sa valeur en capital ou une altration durable des prrogatives de son titulaire (art. 2). Il distingue les actes qui sont ncessairement de disposition et ceux dont cette qualification parat tre laisse

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    lapprciation du tuteur et du juge des tutelles, selon les circonstances despce , autrement dit selon le montant.

    Parmi les actes qui sont toujours de disposition, on mentionnera divers actes titre onreux ou gratuit : vente et apport en socit dun immeuble ou dun fonds de commerce ; constitution dune hypothque ; conclusion et renouvellement de baux ruraux ou commerciaux ; ouverture dun nouveau compte ou livret (autre que le premier compte ou livret); vente dinstruments financiers (actions, obligations) ; souscription dun emprunt, souscription ou rachat dune assurance-vie ; donation, partage amiable ; acceptation et renonciation une succession ou un legs ;

    Parmi les actes de disposition sauf circonstances despces , on retiendra : le prlvement dargent sur un capital lexclusion du paiement des dettes ; lemprunt de sommes dargent ; le prt consenti par la personne protge ; lacquisition et la cession dinstruments financiers non inclus dans un portefeuille

    Les actes dadministration concernent la gestion courante d'un bien. Le dcret de 2008 voque des actes dexploitation ou de mise en valeur du patrimoine dnus de risque anormal (art. 1er). Il en est ainsi, par exemple, de la conclusion d'un bail de neuf ans au plus (C. civ., art. 595) ; de louverture dun premier compte ou livret (C . civ., art. 427, al. 4) ; de lemploi de sommes dargent qui ne sont ni des capitaux ni des excdents de revenus ; de lacceptation dune succession concurrence de lactif net (C. civ., art. 507-1) ; de louage, prt, vente, et achat de meubles dusage courant et de faible valeur ; de la conclusion dune assurance de biens ou de responsabilit ; du paiement de dettes ; de la cession de titres dun portefeuille condition quelle soit suivie de leur remplacement

    IV. Ladministration lgale des biens des mineurs Code civil. Livre Premier. Titre IX Chapitre II : De l'autorit parentale

    relativement aux biens de l'enfant

    Article 371-1. L'autorit parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalit l'intrt de l'enfant. Elle appartient aux pre et mre jusqu' la majorit ou l'mancipation de l'enfant pour le protger dans sa scurit, sa sant et sa moralit, pour assurer son ducation et permettre son dveloppement, dans le respect d sa personne. Les parents associent l'enfant aux dcisions qui le concernent, selon son ge et son degr de maturit.

    Article 382. Les pre et mre ont, sous les distinctions qui suivent, l'administration et la jouissance des biens de leur enfant.

    Article 383. L'administration lgale est exerce conjointement par le pre et la mre lorsqu'ils exercent en commun l'autorit parentale et, dans les autres cas, sous le contrle du juge, soit par le pre, soit par la mre, selon les dispositions du chapitre prcdent. La jouissance lgale est attache l'administration lgale : elle appartient soit aux deux parents conjointement, soit celui des pre et mre qui a la charge de l'administration.

    Article 384. Le droit de jouissance cesse : 1 Ds que l'enfant a seize ans accomplis, ou mme plus tt quand il contracte mariage ; 2 Par les causes qui mettent fin l'autorit parentale, ou mme plus spcialement par celles qui mettent fin l'administration lgale ; 3 Par les causes qui emportent l'extinction de tout usufruit.

    Article 385. Les charges de cette jouissance sont : 1 Celles auxquelles sont tenus en gnral les usufruitiers ; 2 La nourriture, l'entretien et l'ducation de l'enfant, selon sa fortune ;

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    3 Les dettes grevant la succession recueillie par l'enfant en tant qu'elles auraient d tre acquittes sur les revenus.

    Article 386. Cette jouissance n'aura pas lieu au profit de l'poux survivant qui aurait omis de faire inventaire, authentique ou sous seing priv, des biens chus au mineur.

    Article 387. La jouissance lgale ne s'tend pas aux biens que l'enfant peut acqurir par son travail, ni ceux qui lui sont donns ou lgus sous la condition expresse que les pre et mre n'en jouiront pas.

    Exercice. Rdigez une fiche de jurisprudence et proposez un bon plan de commentaire de cet arrt de la 1re Chambre civile de la Cour de cassation du 9 janvier 2008 (Bulletin civil I. n 7).

    Attendu que M. Cdric Y..., n le 24 octobre 1977, a t confi la garde de sa mre, Mme Z..., par le jugement de divorce de ses parents du 23 octobre 1984 ;qu compter de fvrier 1994, il a travaill en qualit dapprenti et peru des salaires, des indemnits journalires de la caisse primaire dassurance maladie, une allocation de formation professionnelle et un capital rente accident du travail ; que ces revenus ont t dposs sur un compte bancaire multilion junior, ouvert le 19 mai 1994, son nom, auprs du Crdit lyonnais par sa mre, qui exerait seule lautorit parentale son gard ; que par acte du 7 juin 2000, M. Cdric Y... a fait assigner sa mre, le second mari de celle-ci, M. X..., son frre an, M. Jean-Cyril Y..., et la banque Crdit lyonnais aux fins dobtenir le remboursement dune somme de 90 300 francs (soit 13 766 euros) correspondant divers prlvements, selon lui abusifs, effectus sur son compte bancaire par sa mre, tant durant sa minorit quaprs sa majorit, entre mai 1994 et septembre 1997 ; Sur le premier moyen pris en ses trois branches : Attendu que M. Cdric Y... fait grief larrt attaqu de lavoir dbout de sa demande tendant la condamnation de Mme Z... pouse X..., M. X... et M. Jean-Cyril Y... lui rembourser la somme de 5 863,19 euros prleve sur son compte bancaire durant sa minorit, outre la somme de 3 048,98 euros en rparation de son prjudice moral alors, selon le moyen: - 1/ que le droit de jouissance des parents sur les biens de leur enfant, ne stend pas aux biens que lenfant peut acqurir par son travail et cesse ds quil a seize ans accomplis ; quil rsulte de larrt attaqu que Mme Z... a effectu divers prlvements sur le compte ouvert au nom de son fils mineur n en 1977 et aliment par ses salaires, et ce au moins jusquau mois de septembre 1997 ; quen dboutant cependant M. Cdric Y... de ses demandes en remboursement des sommes ainsi prleves, la cour dappel a viol les articles 384 et 387 du code civil ; - 2/ que lobligation alimentaire de lenfant lgard de ses ascendants nexiste qu lgard des ascendants dans le besoin ; quen se bornant relever la modicit des revenus de Mme Z..., pour en dduire le bien-fond des prlvements effectus sur le compte de son fils, sans constater que Mme Z... et son second mari ntaient pas en mesure dassurer leur subsistance, la cour dappel a priv sa dcision de base lgale au regard de larticle 205 du code civil, ensemble les articles 212 et 214 du mme code ; - 3/ que lenfant na pas dobligation alimentaire envers le second mari de sa mre ; quen retenant cependant le bien fond des prlvements oprs par Mme Z... sur le compte de son fils au profit de son second mari, la cour dappel a viol larticle 205 du code civil ; Mais attendu dabord, que labsence de droit de jouissance lgale sur les gains et salaires de lenfant mineur ninterdit pas aux administrateurs lgaux daffecter tout ou partie de ces revenus son entretien et son ducation, seul lexcdent devant revenir au mineur ; ensuite, que larrt relve par motifs propres et par une apprciation souveraine quil rsulte des diffrentes pices verses aux dbats que Mme Z..., dont les ressources taient modiques et

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    qui hbergeait son fils sous son toit, a effectu divers prlvements sur le compte ouvert au nom du mineur afin de satisfaire aux ncessits de son entretien ; que le moyen qui manque en fait en ses deux dernires branches pour critiquer des motifs du jugement que la cour dappel na pas adopts, ne peut tre accueilli ; Mais sur le second moyen : Vu les articles 371-1, 382, 383, 488 et 1147 du code civil ; Attendu quil rsulte de ces textes que ladministration lgale des biens de lenfant mineur par ses parents cesse de plein droit sa majorit ; que le banquier ne peut excuter un ordre de paiement mis par une personne qui na pas qualit pour reprsenter le titulaire du compte; Attendu que pour dbouter M. Cdric Y... de sa demande tendant la condamnation de Mme Z... pouse X..., M. X... et M. Jean-Cyril Y... solidairement avec le Crdit lyonnais lui rembourser la somme de 7 896,86 euros prleve sur son compte bancaire aprs sa majorit et pour juger que la banque navait commis aucune faute, les juges du fond ont retenu que le compte avait t ouvert par Mme Z..., reprsentante lgale de son fils alors mineur, que les prlvements effectus visaient satisfaire aux ncessits de lentretien de M. Cdric Y..., que celui-ci navait manifest aucun dsaccord jusqu son courrier du 10 septembre 1997 et quil nexistait aucune clause expresse interdisant de faire fonctionner le compte par le reprsentant lgal partir de la majorit ; Quen statuant par des motifs impropres justifier sa dcision, alors qu la majorit de lenfant, les pouvoirs de ladministrateur lgal avaient cess, la cour dappel a viol les textes susviss ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, larrt rendu le 3 juin 2004, entre les parties, par la cour dappel dAix-en-Provence ;

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    Dossier n 5 : Lidentification des personnes physiques

    I. Le nom de famille de lenfant

    Code civil, art. 311-21. Lorsque la filiation d'un enfant est tablie l'gard de ses deux parents au plus tard le jour de la dclaration de sa naissance ou par la suite mais simultanment, ces derniers choisissent le nom de famille qui lui est dvolu : soit le nom du pre, soit le nom de la mre, soit leurs deux noms accols dans l'ordre choisi par eux dans la limite d'un nom de famille pour chacun d'eux. En l'absence de dclaration conjointe l'officier de l'tat civil mentionnant le choix du nom de l'enfant, celui-ci prend le nom de celui de ses parents l'gard duquel sa filiation est tablie en premier lieu et le nom de son pre si sa filiation est tablie simultanment l'gard de l'un et de l'autre.

    En cas de naissance l'tranger d'un enfant dont l'un au moins des parents est franais, les parents qui n'ont pas us de la facult de choix du nom dans les conditions du prcdent alina peuvent effectuer une telle dclaration lors de la demande de transcription de l'acte, au plus tard dans les trois ans de la naissance de l'enfant.

    Lorsqu'il a dj t fait application du prsent article ou du deuxime alina de l'article 311-23 l'gard d'un enfant commun, le nom prcdemment dvolu ou choisi vaut pour les autres enfants communs. Lorsque les parents ou l'un d'entre eux portent un double nom de famille, ils peuvent, par une dclaration crite conjointe, ne transmettre qu'un seul nom leurs enfants .

    Exercice. Amar Ego pouse Genevive Centrique le 1er janvier 2010. Le 1er janvier 2011, la petite Sabrina voit le jour. Quel sera le nom de famille de Sabrina ? Quel sera le nom de famille de la gnration suivante dans lhypothse o Sabrina garde le nom de ses deux parents et a un petit garon avec Charles Henry Poulard-Dubois de Thourotte ?

    II. Limprescriptibilit du nom

    En principe, le nom ne peut sacqurir par usage prolong. Toutefois, la jurisprudence admet quune famille puisse conserver le nom quelle utilise par erreur, sous rserve dtablir une possession prolonge (plusieurs gnrations), et la bonne foi de celui qui, lorigine, avait commis lerreur en sattribuant le nom. Cest ainsi que Monsieur Louis P. de F. a d cesser de porter le nom de F., qui avait t pris par sa mre au lendemain de la seconde guerre mondiale et enregistr comme tel dans les actes de naissance de ses enfants (Civ. 1re, 11 juill. 2006).

    Cour de cassation, chambre civile 1, 11 juillet 2006 : P.de F.

    Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

    Attendu qu la requte du procureur de la Rpublique prs le tribunal de grande instance de Nanterre, les actes de naissance et de mariage de M. Xavier X... de Y... et les actes de naissance de ses enfants Adle et Agathe ont t rectifis en ce sens que le nom de X... devait se substituer celui de X... de Y... qui tait le nom donn par son pre son fils Xavier sa naissance en 1961 ;

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    Attendu que M. Xavier X... de Y... fait grief larrt attaqu (Versailles, 24 octobre 2002) davoir dit quil se nommait en ralit X..., alors, selon le moyen : 1 quen amputant abruptement le patronyme, de ladjonction de Y... au seul prtexte inactuel que le principe dimmutabilit du nom aurait empch le pre de lexposant, n Louis X..., de transmettre en 1961 le nom X... de Y... et en remettant ainsi en cause une situation personnelle tablie depuis 40 ans, o lexposant a fait usage du nom de X... de Y... et la dores et dj transmis son pouse et ses descendants, la cour dappel a commis une ingrence dans la vie prive et familiale de M. Xavier X... de Y... manifestement disproportionne au but poursuivi par lapplication du principe dimmutabilit du nom, en violation de larticle 8 de la Convention europenne de sauvegarde des droits de lhomme et des liberts fondamentales ; 2 quen apprciant les consquences du rtablissement de lexacte identit patronymique de lexposant sans tenir compte que le nom quil portait tait associ llection de Miss France vnement de grande renomme, et que lamputation de ladjonction de Y... lui serait dautant plus pnible en raison de la rsonnance mdiatique et lexposerait des sarcasmes, la cour dappel a viol le mme texte ;

    Mais attendu quayant souverainement relev que les consquences rsultant pour M. Xavier X... de Y... du rtablissement de lexacte identit patronymique taient relatives tant pour lui-mme que pour sa famille ds lors quil tait notoire que son nom tait issu dun patronyme adopt sciemment par son pre dans la Rsistance, que son mariage clbr en 1996 et la naissance de ses filles en 1996 et 2000 taient rcents et que le risque de dconstruction de la personnalit et de lourdes rpercussions psychologiques tait peu srieux, la cour dappel, qui a tenu compte des consquences mdiatiques, a pu retenir que, malgr latteinte porte la vie prive des demandeurs, la rectification de son tat civil prvue par la loi simposait pour la protection de lintrt gnral ; Do il suit que le moyen nest pas fond ; Par ces motifs : REJETTE le pourvoi.

    III. Protection du nom en droit civil en cas dutilisation par un tiers

    Cour de cassation, chambre civile 1, 26 mai 1970 : DOP

    Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches : attendu quil rsulte des nonciations de larrt attaqu, quen 1934, la socit lOral a dpos la marque dop... , destine a distinguer tous produits de parfumerie dhygine et de beaut; quen 1965, Franois Dop... a assign cette socit a leffet de sentendre interdire sous astreinte lusage de la marque orthographie comme son nom patronymique; attendu quil est fait grief aux juges du fond davoir rejet cette demande, alors que le titulaire dun nom patronymique dispose du droit de faire obstacle a une appropriation indue de ce nom, sans avoir a justifier dun risque de confusion; quil est encore soutenu que le nom de dop ne serait ni banal, ni rpandu et quil importe peu que les parents du demandeur naient pas cru devoir se plaindre avant lui; quenfin, la cour dappel naurait pas rpondu aux conclusions faisant ressortir limprudence fautive de la socit lOral qui, avant de faire sa publicit intensive sur le nom de dop... quelle ridiculisait, aurait du vrifier que personne ne pouvait tre appel a en souffrir;

    Mais attendu quaprs avoir rappel bon droit que le demandeur est tenu de justifier de lexistence dune confusion possible a laquelle il a intrt a mettre fin, lorsque, comme en

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    lespce, le nom patronymique est utilise a des fins commerciales ou publicitaires, les juges dappel, statuant tant par des motifs propres que par ceux du jugement entrepris, ont relev que le nom de dop... figure dans les dictionnaires comme nom commun et que, sil nest pas banal comme nom propre, il est cependant porte par plusieurs personnes, non seulement en France et notamment dans la rgion parisienne, mais aussi a ltranger ;

    Que larrt constate encore que lemploi de ce mot dans une rengaine frquemment rpte dans la presse ou par la radio constitue un procd habituel et normal de publicit sans que celle-ci ait eu pour rsultat davilir le nom de x... au point de le rendre ridicule ; quil souligne aussi que les parents de Dop... nont pas proteste contre lutilisation commerciale de leur nom et que lui-mme a attendu plus de quatre ans aprs sa majorit pour saviser de faire dfense, par justice, a la socit lOral de se servir de la marque sous laquelle elle vend ses produits depuis plus de trente ans ; Que de ces constatations, la cour dappel a souverainement dduit que lutilisation de la marque Dop... par la socit lOral navait pas cre un risque de confusion avec Franois Dop; quenfin, rpondant aux conclusions dont elle tait saisie, elle a pu estimer que rien ni dans le choix, ni dans lutilisation de la marque Dop... par ladite socit, ne prsente de caractre fautif ; Quainsi, le moyen ne saurait tre accueilli; par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre larrt rendu, le 4 juin 1968, par la cour dappel de paris

    IV. Indisponibilit de ltat civil et transsexualisme

    Cour de cassation, assemble plnire, 11 dcembre 1992 (Bull. n 13).

    Sur le moyen unique : Vu l'article 8 de la Convention europenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberts fondamentales, les articles 9 et 57 du Code civil et le principe de l'indisponibilit de l'tat des personnes ;Attendu que lorsque, la suite d'un traitement mdico-chirurgical, subi dans un but thrapeutique, une personne prsentant le syndrome du transsexualisme ne possde plus tous les caractres de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect d la vie prive justifie que son Etat civil indique dsormais le sexe dont elle a l'apparence ; que le principe de l'indisponibilit de l'tat des personnes ne fait pas obstacle une telle modification ;

    Attendu que M. Ren X..., n le 3 mars 1957, a t dclar sur les registres de l'Etat civil comme tant du sexe masculin ; que, s'tant depuis l'enfance considr comme une fille, il s'est, ds l'ge de 20 ans, soumis un traitement hormonal et a subi, 30 ans, l'ablation de ses organes gnitaux externes avec cration d'un no-vagin ; qu' la suite de cette opration, il a saisi le tribunal de grande instance de demandes tendant la substitution, sur son acte de naissance, de la mention " sexe fminin " celle de " sexe masculin " ainsi qu'au changement de son prnom ; que le Tribunal a dcid que M. X... se prnommerait Rene, mais a rejet ses autres prtentions ; que l'arrt attaqu a confirm la dcision des premiers juges aux motifs que la conviction intime de l'intress d'appartenir au sexe fminin et sa volont de se comporter comme tel ne sauraient suffire pour faire reconnatre qu'il tait devenu une femme, et que le principe de l'indisponibilit de l'tat des personnes s'opposait ce qu'il soit tenu compte des transformations obtenues l'aide d'oprations volontairement provoques ;

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    Attendu, cependant, que la cour d'appel a d'abord constat, en entrinant les conclusions de l'expert-psychiatre commis par le Tribunal, que M. X... prsentait tous les caractres du transsexualisme et que le traitement mdico-chirurgical auquel il avait t soumis lui avait donn une apparence physique telle que son nouvel tat se rapprochait davantage du sexe fminin que du sexe masculin ; qu'elle a nonc, ensuite, que l'insertion sociale de l'intress tait conforme au sexe dont il avait l'apparence ; d'o il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, elle n'a pas tir de ses constatations les consquences lgales qui s'en dduisaient ;

    Par ces motifs : casse et annule larrt rendu le 15 novembre 1990 par la cour dappel dAix-en-Provence

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    Dossier 6 : Les personnes morales ; le lien entre le patrimoine et la personne

    I. La nature juridique de la personnalit morale

    La thorie de la fiction

    Selon cette thorie, seules les personnes physiques sont dotes, par nature, de la personnalit juridique. Il n'en est pas de mme pour les personnes morales. En effet, la personnalit juridique ne saurait tre de l'essence d'un groupement, qui ne constitue qu'une entit abstraite. Il appartient donc la loi, et elle seule, de confrer ou non la personnalit juridique une catgorie de groupement. dfaut d'une telle reconnaissance, un groupement ne saurait tre dot de la personnalit juridique ou morale. En somme, tout dpend du bon vouloir du lgislateur. Seule la loi peut crer, par pure fiction, ces personnes juridiques, et il n'y a pas d'autres personnes morales que celles dcides par la loi. Quant au juge, il n'a aucun pouvoir pour complter la liste lgale des personnes morales, puisque cette liste est limitative.

    Socits. Article 1842 du Code civil : Les socits autres que les socits en participation jouissent de la personnalit morale compter de leur immatriculation . Article 1871 du Code civil : Les associs peuvent convenir que la socit ne sera point immatricule. La socit est dite alors socit en participation. Elle nest pas une personne morale et nest pas soumise publicit. Elle peut tre prouve par tous moyens. Les associs conviennent librement de lobjet, du fonctionnement et des conditions de la socit en participation, sous rserve de ne pas droger aux dispositions des articles.

    Associations. L. 1er juillet 1901 : art. 2 : Les associations de personnes pourront se former librement sans autorisation ni dclaration pralable, mais elles ne jouiront de la capacit civile (ce terme est synonyme de personnalit juridique), qui si elles se sont conformes aux dispositions de larticle 5 . Art. 5 : Toute association qui voudra obtenir la capacit juridique prvue par larticle 6 devra tre rendue publique par les soins de ses fondateurs. La dclaration pralable en sera faite la prfecture ou la sous-prfecture o lassociation a son sige social .

    La thorie de la ralit

    Avec cette thorie, la personnalit morale des groupements est une ralit inhrente aux groupements de personnes ou de biens, de la mme manire que la personnalit juridique est inhrente aux personnes physiques. Autrement dit, les personnes morales ne sont plus des tres fictifs, des crations artificielles de la loi : ce sont des tres rels. Chaque fois que l'on est en prsence d'un groupement anim d'une volont collective, voire d'une organisation dfendant des intrts collectifs , le juge, mme dans le silence de la loi, doit reconnatre la personnalit morale d'un tel groupement, puisque c'est une ralit.

    Cour de Cassation, Chambre civile 2, 28 janvier 1954

    Sur le moyen unique pris en sa seconde branche : Vu les articles 1er paragraphe 2 et 21 de l'ordonnance lgislative du 22 fvrier 1945, 1er du dcret du 2 novembre 1945;

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    Attendu que la personnalit civile n'est pas une cration de la loi ; qu'elle appartient, en principe, tout groupement pourvu d'une possibilit d'expression collective pour la dfense d'intrts licites, dignes, par suite, d'tre juridiquement reconnus et protgs ; Que, si le lgislateur a le pouvoir, dans un but de haute police, de priver de la personnalit civile telle catgorie dtermine de groupements, il en reconnat, au contraire, implicitement mais ncessairement, l'existence en faveur d'organismes crs par la loi elle-mme avec mission de grer certains intrts collectifs prsentant ainsi le caractre de droits susceptibles d'tre dduits en justice ;

    Attendu qu'aprs avoir, en son article 1er, institu des comits d'entreprises dans toutes les entreprises qu'elle nonce, l'ordonnance susvise dispose : "le comit d'entreprise coopre avec la direction l'amlioration des conditions collectives du travail et de vie du personnel, ainsi que des rglements qui s'y rapportent" ; "Le comit d'entreprise assure ou contrle la gestion de toutes les uvres sociales tablies dans l'entreprise au bnfice des salaris ou de leurs familles ou participe cette gestion ... dans les conditions qui seront fixes par un dcret pris en Conseil d'Etat" ; "Le dcret dterminera notamment les rgles d'octroi et l'tendue de la personnalit civile des comits d'entreprises" ;

    Attendu que l'article 21 de la mme ordonnance est ainsi conu : "Dans les entreprises comportant des tablissements distincts, il sera cr des comits d'tablissements dont la composition et le fonctionnement seront identiques ceux des comits d'entreprises dfinis aux articles ci-dessus, qui auront les mmes attributions que les comits d'entreprises dans la limite des pouvoirs confis aux chefs de ces tablissements ; "Le comit central d'entreprise sera compos de dlgus lus des comits d'tablissements" ;

    Attendu que, pour dclarer irrecevable l'action intente contre le sieur X..., en remboursement du prix d'un march de vtements prtendu non excut par le Comit d'tablissement de Saint-Chamond de la Compagnie des Forges et Aciries de la Marine et d'Homcourt, reprsent par son Prsident, le sieur Y..., l'arrt attaqu nonce qu'un groupement n'a la personnalit civile que si celle-ci lui a t expressment attribue ; que le silence de la loi relativement aux comits d'tablissements dans une matire ou une disposition expresse est indispensable ne peut s'interprter que comme tant l'expression de la volont de n'attribuer la personnalit civile qu'aux seuls comits d'entreprises, l'existence et le fonctionnement des comits d'tablissements devant se confondre avec la personnalit des comits centraux d'entreprises et les comits d'tablissements ne pouvant contracter ou agir en justice que par l'intermdiaire de ces derniers ;

    Mais, attendu que, d'aprs l'article 21 prcit, la composition et le fonctionnement des comits d'tablissements sont identiques ceux des comits d'entreprises et ont les mmes attributions que ces derniers dans les limites des pouvoirs confis aux chefs de ces tablissements ; Et attendu que si les dispositions de l'article 1er du dcret du 2 novembre 1945, prises en application de l'article 2, alina 2 de l'ordonnance lgislative, ne visent expressment que les comits d'entreprises, elles impliquent ncessairement reconnaissance de la personnalit civile des comits d'tablissements, celle-ci n'tant pas moins indispensable l'exercice d'attributions et la ralisation de buts identiques, dans le champ d'action qui leur est dvolu par ladite ordonnance elle-mme ; D'o il suit qu'en dclarant, pour les motifs qu'elle a admis, l'action dudit comit d'tablissement irrecevable, la Cour d'appel a faussement appliqu, et par suite, viol les articles invoqus au moyen ;

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    PAR CES MOTIFS : CASSE et ANNULE l'arrt rendu entre les parties par la Cour d'Appel de Lyon, et les renvoie devant la Cour d'Appel de Riom.

    II. Le lien entre la personne et le patrimoine

    La conception franaise classique du patrimoine. Le patrimoine est-il dissociable ou non des personnes juridiques. En clair, le patrimoine peut-il exister indpendamment d'une personne ? La conception franaise classique du patrimoine le refuse. Pour Aubry et Rau, auteurs du XIXme sicle, le patrimoine est une manation de la personnalit : il ne se cre pas. Par nature, toute personne, physique ou morale, est dote d'un patrimoine : le patrimoine est inn la personne juridique, il fait corps avec elle, il en est indissociable. Aubry et Rau en dduisent trois consquences : seules les personnes juridiques ont un patrimoine ; toute personne a ncessairement un patrimoine; toute personne n'a qu'un patrimoine. Il rsulte de cette unit du patrimoine quune personne ne peut fractionner son patrimoine en plusieurs patrimoines distincts dont chacun aurait son actif et son passif. On dit encore que le patrimoine est indivisible. Aussi lorsquune personne envisage dexercer une activit conomique sous la forme dune exploitation individuelle, et quelle y affecte une partie de ses biens, elle ne donne pas naissance un nouveau patrimoine : cette personne na toujours quun patrimoine, dont lactif rpond dsormais des dettes de laffaire. Pour contourner la consquence de l'unit du patrimoine, il suffit alors de crer une personne morale, telle une socit, dont l'objet est l'activit conomique envisage par ses fondateurs. Cette personne morale, comme toute personne juridique, a un propre patrimoine, distinct de celui de chacun des associs.

    Code civil, art 2284 : Quiconque s'est oblig personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, prsents et venir . Art. 2285 : Les biens du dbiteur sont le gage commun de ses cranciers ; et le prix s'en distribue entre eux par contribution, moins qu'il n'y ait entre les cranciers des causes lgitimes de prfrence .

    La conscration du patrimoine daffectation. La conception classique du patrimoine soppose la conception du patrimoine daffectation. Cette conception admet l'existence d'un patrimoine sans sujets de droits. Pour crer un patrimoine, dans lequel l'actif rpond du passif, il suffit d'affecter certains biens un but commun. Et, consquence mme de l'indissociabilit de l'actif et du passif, les biens affects cette activit rpondent seuls des dettes nes de lactivit. En somme, un entrepreneur pourrait constituer autant de patrimoines distincts que d'activits conomiques diffrentes sans avoir crer de personnes morales nouvelles ni engager son patrimoine personnel originel. Pendant, longtemps, le lgislateur a t rticent admettre le patrimoine daffectation. Aujourdhui, plusieurs sries de dispositions montrent quil a quasiment mis en uvre cette thorie.

    1. Linsaisissabilit des biens immobiliers de lentrepreneur individuel En raison du principe de lindivisibilit du patrimoine, un exploitant individuel, comme toute personne physique, na quun seul et unique patrimoine dont les lments actifs rpondent du passif, y compris celui gnr par son activit professionnelle. Pourtant, depuis la loi de Modernisation de lEconomie, du 4 aot 2008, lentrepreneur individuel peut faire chapper la plupart de ses biens immobiliers une saisie,

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    lexception de ceux affects son usage professionnel (L.526-1, al.1er). Il en est ainsi de sa rsidence principale et de tout bien foncier bti ou non quil na pas affect son usage professionnel. Cependant, le chef dentreprise peut renoncer cette insaisissabilit au profit de cranciers dtermins, dont les crances sont nes loccasion de laffaire (L.526-3, al.4). On notera que cette mesure, toujours en vigueur malgr la loi du 15 juin 2010 instituant lentreprise individuelle responsabilit limite, ne fait qulargir le domaine de lactif insaisissable de lentrepreneur individuel qui avait t prcdemment pos par une loi du 1er aot 2003 (L.526-1 L.526-4). En effet, cette loi donnait dj la possibilit lentrepreneur individuel de rendre insaisissables ses droits sur limmeuble destin sa rsidence principale, par une simple dclaration notarie publie la Conservation des hypothques.

    2. Le patrimoine fiduciaire

    Linstitution de la fiducie. Cre par une loi du 19 fvrier 2007, et renforce par petites touches successives par la loi de modernisation de l'conomie du 4 aot 2008, et deux ordonnances du 18 dcembre 2008 et du 30 janvier 2009, la fiducie permet une personne, le constituant, de confier des actifs (biens, droits, srets) une autre personne, le fiduciaire (du latin fiducia: confiance), charge pour celle-ci de les rtrocder, aprs un certain temps, un bnficiaire (C.civ., art.2011) ; ce dernier pouvant tre aussi bien un vrai tiers que le constituant ou le fiduciaire (C.civ., art.2016).

    Toute personne physique ou morale peut recourir la fiducie en tant que constituant. Les particuliers et les entrepreneurs individuels peuvent ainsi utiliser ce mcanisme pour pallier des problmes de sant. En outre, seuls peuvent exercer les fonctions de fiduciaire les tablissements de crdit, les entreprises dinvestissement et dassurances, La Banque postale, la Caisse des dpts et consignations, et mme les avocats (C.civ., art.2015, al.2), les notaires tant curieusement carts.

    Une condition, qui nexiste pas dans le mcanisme quivalent du trust anglo-saxon, limite lusage de la fiducie: lopration doit rpondre un but dtermin tranger toute intention librale (C. civ., art. 2013). On ne peut donc y recourir des fins successorales (fiducie-libralit). En revanche, elle peut permettre une entreprise disoler des actifs dans un patrimoine autonome afin de garantir le remboursement dun crdit (fiducie-sret). Cette fiducie-sret fait l'objet des articles 2372-1 2372-6 du Code civil, issus d'une ordonnance du 30 janvier 2009. La fiducie peut aussi permettre dassurer la gestion dactifs suivie de leur transmission au profit dun bnficiaire (fiducie-gestion). Cette fiducie ne fait pour l'instant l'objet d'aucune disposition autonome dans le Code civil.

    Linsaisissabilit du patrimoine fiduciaire. Les actifs transfrs au fiduciaire sont spars des patrimoines propres du constituant et du fiduciaire (C.civ., art.2011). Ils ne peuvent donc tre saisis ni par les cranciers du fiduciaire, ni par ceux du constituant soumis une procdure collective (C.civ., art.2024). De cette faon, la fiducie peut tre utilise par des entreprises pour mettre des actifs labri des actions de leurs cranciers.

    3. Lentreprise individuelle responsabilit limite (EIRL)

    Le Big-Bang du droit franais. Une loi n 2010-658 du 15 juin 2010 relative lEIRL a opr une rvolution du droit franais relguant au muse des antiquits juridiques la thorie d'Aubry et Rau. Cette loi, applicable depuis le 1er janvier 2011, consacre un patrimoine affect lactivit professionnelle de lentrepreneur individuel, spar de son

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    patrimoine personnel (C. com., art. L. 526-6, al. 1er). LEIRL est ouverte aux commerants, artisans, agriculteurs et leveurs, ainsi quaux personnes physiques exerant une activit professionnelle indpendante, y compris librale (mdecin, avocat). Elle leur permet dtre titulaires de deux patrimoines : lun personnel et lautre affect lexercice de lactivit professionnelle, sans avoir crer une personne morale ad hoc ( compter du 1er janvier 2013, un mme entrepreneur individuel pourra constituer plusieurs patrimoines affects). Il suffit lentrepreneur individuel de dclarer la constitution du patrimoine affect dans un registre de publicit lgale, en joignant lvaluation par un professionnel des actifs en nature dune valeur dclare suprieure 30 000 euros (C. com., art. R. 526-5). Les biens affects ce patrimoine constituent aussitt le seul gage gnral des cranciers de laffaire (C. com., art. L. 526-12). En revanche, les biens personnels, meubles et immeubles, de cet entrepreneur chappent toute saisie des cranciers de laffaire. Certes, les entrepreneurs peuvent obtenir un rsultat similaire en adoptant le cadre juridique de lEURL ou de la SASU, dont ils sont lassoci unique. Toutefois, ils vitent ces structures socitaires qui, la diffrence de lEIRL, sont rgies par une rglementation complexe et ne les mettent pas labri de poursuites pour abus de biens sociaux.

    On notera que le statut de lEIRL peut tre combin avec celui de lauto-entrepreneur, sous la forme du statut de lauto-entrepreneur responsabilit limite (AERL). Ainsi les auto-entrepreneurs peuvent-ils cumuler les avantages de lauto-entreprise (formalits de constitution dune grande simplicit), et ceux de lEIRL (sparation du patrimoine personnel et du patrimoine de laffaire). Ce statut est accessible aux mineurs de 16 ans, crateurs dentreprises, dans les conditions fixes par les articles 389-8 et suivants du Code civil (voir dossier n 6).

    Lentrepreneur sans risque. LEIRL repose sur une pense librale de limitation du risque entrepreneurial. Cette doctrine d'une autre poque mconnat que la scurit absolue du chef dentreprise nest gure compatible avec la prennit de laffaire. Labsence de fonds propres et la dresponsabilisation du chef dentreprise fragilisent laffaire. Dun ct, les banques sont rticentes fournir du crdit aux personnes qui organisent leur insolvabilit. De lautre, les fournisseurs, premiers dispensateurs de crdits aux entreprises avec des dlais de paiement, en principe, de deux mois maximum (L. 441-6), ont intrt exiger un paiement au comptant. Pis, cette rforme ne porte aucun intrt au sort des cranciers qui, pour rcuprer le montant de leurs crances, ne trouveront quasiment rien dans le patrimoine de lEIRL. Au demeurant, tous les cranciers ne seront pas victimes de lEIRL. Les tablissements de crdit sont suffisamment aviss pour subordonner leurs financements des garanties personnelles du chef dentreprise. En revanche, les clients qui avancent de largent lentrepreneur pour des travaux, des biens et des services quils ne verront jamais, nauront aucune chance dtre rembourss. Cela est dautant plus regrettable que les difficults des entreprises ne sont pas toujours la consquence dun contexte conomique difficile dont serait victime le chef dentreprise, mais souvent de ses fautes de gestion.

    Dsillusions. Au 1er janvier 2012, soit un an aprs lentre en vigueur du statut de lEIRL, ladministration faisait tat de seulement 1 300 dclarations daffectation ! Sans doute parce que ltiquette dentrepreneur irresponsable accole lEIRL est nuisible lgard de ses cranciers.

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    Exercice. Il vous est demand de faire une recherche en bibliothque ou sur les bases de donnes de la BU pour recenser les articles consacrs lEIRL dans les principales revues juridiques et dtablir une liste dlments favorables et/ou dfavorables soutenus par les auteurs. A partir de cette recherche, forgez-vous une opinion et, selon celle-ci, rdigez entirement lintroduction dun devoir sur LEIRL et la protection patrimoine personnel de lentrepreneur , avec lannonce du plan de celui-ci. Pour le contenu, vous vous limiterez poser les intituls expressifs des parties et des sous parties en numrant pour chacune dentre elles les lments qui les justifient.

    Code de commerce : Chapitre VI : De la protection de l'entrepreneur individuel et du conjoint.

    Article L. 526-1. Par drogation aux articles 2284 et 2285 du code civil, une personne physique immatricule un registre de publicit lgale caractre professionnel ou exerant une activit professionnelle agricole ou indpendante peut dclarer insaisissables ses droits sur l'immeuble o est fixe sa rsidence principale ainsi que sur tout bien foncier bti ou non bti qu'elle n'a pas affect son usage professionnel. Cette dclaration, publie au bureau des hypothques ou, dans les dpartements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au livre foncier, n'a d'effet qu' l'gard des cranciers dont les droits naissent, postrieurement la publication, l'occasion de l'activit professionnelle du dclarant. Lorsque le bien foncier n'est pas utilis en totalit pour un usage professionnel, la partie non affecte un usage professionnel ne peut faire l'objet de la dclaration que si elle est dsigne dans un tat descriptif de division. La domiciliation du dclarant dans son local d'habitation en application de l'article L. 123-10 ne fait pas obstacle ce que ce local fasse l'objet de la dclaration, sans qu'un tat descriptif de division soit ncessaire.

    A