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Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique (2013) 99, 739—744 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com MÉMOIRE ORIGINAL Fracture de l’humérus distal chez le sujet âgé : le traitement conservateur a-t-il toujours sa place ? Distal humerus fracture in the elderly: Does conservative treatment still have a role? L. Pidhorz a,, P. Alligand-Perrin a , E. De Keating a , T. Fabre b , P. Mansat c , la SoFCOT d a Service d’orthopédie-traumatologie, centre hospitalier du Mans, 194, avenue Rubillard, 72000 Le Mans, France b Service d’orthopédie-traumatologie, hôpital Pèllegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex, France c Centre hospitalier universitaire de Toulouse, institut de l’appareil locomoteur, place du Dr-Baylac, 31059 Toulouse, France d Société franc ¸aise de chirurgie orthopédique et traumatologie, 56, rue Boissonnade, 75014 Paris, France Acceptation définitive le : 19 aoˆ ut 2013 MOTS CLÉS Fracture humérus distal ; Immobilisation ; Traitement conservateur ; Cal vicieux ; Arthrose Résumé Introduction. Le traitement orthopédique reste un traitement d’exception des fractures de l’extrémité distale de l’humérus du sujet de plus de 65 ans. Cependant, dans une population sélectionnée, ce traitement peut être une option thérapeutique séduisante. Patients et méthode. Une étude prospective et une étude rétrospective ont permis d’inclure 56 patients d’âge moyen 84,7 ans (68—100) dans cette série. Tous les patients ont été traités par immobilisation brachio-anté-brachio-palmaire pendant 6 à 8 semaines sans réduction de la fracture. Il s’agissait de fracture de type A selon l’AO dans 18 cas, de type B dans 8 cas, et de type C dans 30 cas. Résultats. Au recul moyen de 20,2 mois dans la série rétrospective et de 8,6 mois dans la série prospective, le score MEPS était de 83 points avec 75 % de résultats satisfaisants, et de 86 points avec 83 % de résultats satisfaisants respectivement. Le Quick-DASH étaient de 31,3 et de 34,4 points respectivement. Une pseudarthrose a été constatée dans 3 cas. Soixante-dix pour DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.otsr.2013.10.001. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics & Traumatology: Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (L. Pidhorz). 1877-0517/$ see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.rcot.2013.08.008

Fracture de l’humérus distal chez le sujet âgé : le traitement conservateur a-t-il toujours sa place ?

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Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique (2013) 99, 739—744

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

MÉMOIRE ORIGINAL

Fracture de l’humérus distal chez le sujetâgé : le traitement conservateur a-t-iltoujours sa place ?�

Distal humerus fracture in the elderly: Does conservativetreatment still have a role?

L. Pidhorza,∗, P. Alligand-Perrina, E. De Keatinga, T. Fabreb,P. Mansatc, la SoFCOTd

a Service d’orthopédie-traumatologie, centre hospitalier du Mans, 194, avenue Rubillard, 72000 Le Mans,Franceb Service d’orthopédie-traumatologie, hôpital Pèllegrin, place Amélie-Raba-Léon, 33076 Bordeaux cedex,Francec Centre hospitalier universitaire de Toulouse, institut de l’appareil locomoteur, place du Dr-Baylac, 31059Toulouse, Franced Société francaise de chirurgie orthopédique et traumatologie, 56, rue Boissonnade, 75014 Paris, France

Acceptation définitive le : 19 aout 2013

MOTS CLÉSFracture humérusdistal ;Immobilisation ;Traitementconservateur ;Cal vicieux ;Arthrose

RésuméIntroduction. — Le traitement orthopédique reste un traitement d’exception des fractures del’extrémité distale de l’humérus du sujet de plus de 65 ans. Cependant, dans une populationsélectionnée, ce traitement peut être une option thérapeutique séduisante.Patients et méthode. — Une étude prospective et une étude rétrospective ont permis d’inclure56 patients d’âge moyen 84,7 ans (68—100) dans cette série. Tous les patients ont été traitéspar immobilisation brachio-anté-brachio-palmaire pendant 6 à 8 semaines sans réduction de lafracture. Il s’agissait de fracture de type A selon l’AO dans 18 cas, de type B dans 8 cas, et detype C dans 30 cas.

Résultats. — Au recul moyen de 20,2 mois dans la série rétrospective et de 8,6 mois dans lasérie prospective, le score MEPS était de 83 points avec 75 % de résultats satisfaisants, et de86 points avec 83 % de résultats satisfaisants respectivement. Le Quick-DASH étaient de 31,3 etde 34,4 points respectivement. Une pseudarthrose a été constatée dans 3 cas. Soixante-dix pour

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.otsr.2013.10.001.� Ne pas utiliser, pour citation, la référence francaise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Orthopaedics & Traumatology:

Surgery & Research, en utilisant le DOI ci-dessus.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (L. Pidhorz).

1877-0517/$ – see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.http://dx.doi.org/10.1016/j.rcot.2013.08.008

740 L. Pidhorz et al.

cent des patients présentaient un cal vicieux extra-articulaire, et 65 % un cal vicieux articulairedans la série rétrospective contre 16 % dans la série prospective. L’arthrose augmentait avecle recul avec plus de 50 % des patients présentant une arthrose de stade 2 ou 3 dans la sérierétrospective au recul. Trois complications étaient notées : 2 hématomes et 1 lésion cutanée(escarre localisée). Dans 3 cas, il a été constaté un déplacement de la fracture qui n’a pasnécessité de changement de traitement.Discussion. — Le traitement orthopédique des fractures de l’humérus distal chez le sujet de plusde 65 ans reste une thérapeutique d’exception. Il permet de conserver une autonomie de vie etdonne un résultat clinique satisfaisant, avec l’absence d’enraidissement important articulaireou d’instabilité du coude. Cependant, il faut savoir accepter d’avoir une radiographie nonanatomique.Niveau de preuve. — IV.

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(sépsàsélnc(tnpB ou C, c’est-à-dire touchant la surface articulaire [5].

Traitement

Le traitement orthopédique a été dans la majo-rité des cas une simple immobilisation plâtrée

Tableau 1 Épidémiologie du collectif de l’étude.

Sérieprospective(22 patients)

Sérierétrospective(34 patients)

Âge 87,4 84,7Âge > 80 ans 64 % 65 %Sex-ratio 20 F/2 H 29 F/5 HLieu de vie = domicile 55 % 70 %ATC fracture 36 % 27 %

© 2013 Publié par Elsevier

ntroduction

ors du symposium de la SOFCOT (1979) sur les fracturese l’extrémité distale de l’humérus, Pierre Lecestre citaitne phrase de Monsieur le Dr Albin Lambotte, qui affir-ait en 1913 : « Presque toutes les fractures du coude sont

usticiables du traitement opératoire qui seul permet uneéparation parfaite » [1].

Un siècle plus tard, cette phrase reste-t-elle d’actualité ?e traitement orthopédique a-t-il encore une place dansotre arsenal de chirurgien orthopédiste moderne, c’est-à-ire très voire peut-être trop interventionniste ? Cette prisen charge représente-t-elle un traitement par défaut dansertaines situations ou existe-t-il des indications précises ?’étude de la bibliographie sur un tel sujet ne permet pas dee faire une idée précise car il n’y a que peu de publicationspécifiques anglo-saxonnes ou francaises.

Lors du symposium SOFCOT 2012, nous avons essayé deépondre à 3 questions importantes : Quelle est la placeéelle de ce traitement et ses modalités ? Quel est le typee patient chez lequel on peut retenir un traitement consi-éré par beaucoup comme suranné, à côté de la chirurgie ?i on opte pour une telle prise en charge, quel est le résultat

escompter et donc à annoncer aux familles en début deraitement ?

atients et méthode

ollectif

e symposium de 2012 de la Société francaise de chirur-ie orthopédique et traumatologie (SOFCOT) a analysé leésultat de la prise en charge des fractures de l’extrémitéistale de l’humérus, isolées, non pathologiques survenanthez des sujets âgés de 65 ans ou plus. Il s’agissait d’unetude multicentrique intégrant 19 centres hospitaliers ouospitalo-universitaires dite observationnelle.

Les sujets ont été divisés en 2 séries : une série rétros-ective qui incluait les patients traités entre le 1er janvier000 et le 31 décembre 2010 ; une série prospective quincluait les patients traités entre le 15 juin 2010 et le

5 octobre 2011. Le recul nécessaire à l’inclusion des sujetstait de 6 mois au minimum.

La série du symposium de la SOFCOT 2012 a permis’isoler 56 patients ayant eu un traitement orthopédique de

n SAS.

eur fracture de l’extrémité distale de l’humérus, soit 11 %u total des patients étudiés lors de ce symposium. Parallè-ement, 69 % de fractures ont été traitées par ostéosynthèset 20 % par prothèse de coude. Parmi les 56 patients, 34 ontté revus rétrospectivement et traités dans 12 des 19 centrest 22 patients ont été traités prospectivement dans 8 des9 centres. Les caractéristiques des patients sont résuméesans le Tableau 1.

L’âge moyen des patients des 2 séries était de 84,7 ans68—100), 65 % des patients ayant plus de 80 ans, avec uncore ASA à 1, 2 ou 3 dans 92 % des cas [2]. Le sexe féminintait prédominant (49 femmes sur 56 patients). Un tiers desatients avait un antécédent de fracture ostéoporotique. Lecore de Katz était quasi identique dans les 2 séries, c’est--dire de 4,5 pour la série rétrospective et de 4,8 pour laérie prospective [3]. Une seule complication immédiate até notée. Il s’agissait d’une fracture ouverte Gustilo 1 dansa série rétrospective [4]. Aucune complication vasculaire ouerveuse n’a été relevée, ni a fortiori aucune lésion asso-iée, critère d’exclusion de l’étude. Sur le plan radiologiqueTableau 2), tous les types de fractures étaient représentésant extra-articulaires qu’articulaires. Il y avait proportion-ellement moins de traitement orthopédique dans la sérierospective que rétrospective quand la fracture est de type

ostéoporotiqueScore ASA (1, 2, 3) 90 % 94 %

ATC : antécédent.

Fracture de l’humérus distal chez le sujet âgé 741

Tableau 2 Répartition du type des fractures de l’extrémité distale de l’humérus traitées orthopédiquement.

Classification AO Série prospective(22 patients)

Série rétrospective(34 patients)

Type A (extra-articulaire) 10 (45 %) 8 (23 %)

Type B (articulaire partielle) 4 (18 %) 4 (12 %)

Type C (articulaire totale)C1 4 8 (36 %) 12 22 (64 %)C2 3 7C3 1 3

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Sddp2leérsldans 85 %. Dans la série prospective, les chiffres étaient res-pectivement de 120◦, 26◦, 80 % et 80 %. L’axe huméro-ulnaireétait toujours considéré cliniquement dévié en varus ou envalgus sauf dans 2 cas. La force musculaire en flexion était

Tableau 3 Résultats cliniques des patients traités demanière orthopédique.

Sérieprospective(22 patients)

Sérierétrospective(34 patients)

Recul 8,6 mois 20,2 moisKatz pré-Ttt/post-Ttt 4,8/4,3 4,5/4,2MEPS 86 pts 83 ptsQuick-DASH 34,4 points 31,3 pointsFlexion 120◦ 110◦

◦ ◦

Selon la classification radiologique de l’AO [5].

brachio-anté-brachio-palmaire (BABP). Trois immobili-sations coude au corps, une immobilisation coude fléchià plus de 90◦ et 5 traitements fonctionnels après unecourte période d’immobilisation ont complété ce collec-tif non opératoire. La durée d’hospitalisation a été de6 jours en moyenne dans les 2 séries. La durée moyenned’immobilisation a été identique dans les 2 séries soit7 semaines avec des extrêmes à 15 et 120 jours.

Évaluation

L’étude de la population a consisté en l’étude classique del’épidémiologie (âge, sexe, score ASA [2], antécédents defracture ostéoporotique, lieu de vie, score de Katz [3], quireflète le niveau d’autonomie du patient) mais égalementen l’étude des spécificités de ces fractures. Les résultatsse sont attachés à décrire les durées d’hospitalisation etd’immobilisation, les complications, les scores de Katz audernier recul, le lieu de vie au dernier recul, le Mayo ElbowPerformance Score ou MEPS [6] et le score quick-DASH [7].Des radiographies du coude de face et de profil ont per-mis d’évaluer l’existence d’une consolidation de la fracture,l’existence de cal vicieux articulaires ou extra-articulaireset la survenue d’une arthrose selon les critères de Bröberget Morrey [8].

Analyse statistique

Une analyse univariée des résultats a été effectuée à l’aidedu logiciel STATA® version 11.0 (www.stata.com ; StataCorpLP, College Station, TX 77845, États-Unis). La comparaisondes données pré-thérapeutique et au dernier recul a étéeffectuée grâce au test de Mann-Whitney. Le test du Chi2 aété utilisé pour la comparaison des valeurs par catégorie.Le taux de signification lors la comparaison de paramètres aété fixé à 5 %. Les 2 séries n’ont pas été fusionnées pour desraisons de validité statistiques.

Résultats

Résultats globaux

Les patients ont été revus au recul moyen de 20,2 mois pourla série rétrospective (extrêmes, 6 et 92 mois) et de 8,6 moispour la série prospective (extrêmes, 6 et 20 mois). Le score

e Katz était quasi identique dans les 2 séries au dernierecul soit 4,2 dans la série rétrospective et 4,3 dans la sérierospective. Le MEPS au dernier recul était également quasidentique entre les 2 séries. Il était de 86 points dans laérie prospective avec 83 % de bons ou excellents résul-ats et de 83 points dans la série rétrospective avec 75 % deons ou excellents résultats. Le Quick-DASH au dernier recultait de 31,3 points dans la série rétrospective (extrêmes,

et 72,7 points) et de 34,4 points dans celle prospectiveextrêmes, 0 et 77,3 points). Les résultats sont résumés danse Tableau 3.

ésultats cliniques

elon les critères du MEPS, la douleur était absente dans 75 %e la série prospective et 79 % de la série rétrospective, l’arce mobilité était coté à 15 points dans 60 % de la série pros-ective et 51 % de la série rétrospective et à 20 points dans0 % de la série prospective et 36 % de la série rétrospective,a stabilité était à 10 points dans 95 % de la série prospectivet 91 % de la série rétrospective et la capacité fonctionnelletait de 17,8 dans la série prospective et 16,7 dans la sérieétrospective. Les amplitudes articulaires étaient dans laérie rétrospective de 110◦ de flexion pour un flessum de 29◦,a pronation étant normale dans 91 % des cas et la supination

Flessum 26 29Pronation 80 % normale 91 % normaleSupination 80 % normale 85 % normale

pré-Ttt : pré-traumatique ; post-Ttt : post-traumatique.

742

Tableau 4 Incidence de l’arthrose au recul (les résultatssont exprimés en pourcentage).

Stade Série prospective Série rétrospective

0 50 181 20 332 25 423 5 6

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Selon la classification de Bröberg et Morrey [8].

onsidérée normale ou légèrement diminuée dans 93 % desas dans les 2 séries. Cette force en extension était consi-érée normale ou légèrement diminuée dans 85 % des casans les 2 séries. Les résultats cliniques sont résumés danse Tableau 3.

ésultats radiographiques

ne pseudarthrose a été constatée dans 3 cas (5,3 %).oixante-dix pour cent des patients présentaient un calicieux extra-articulaire, 62 % avaient un cal vicieux danse plan frontal supérieur à 15◦, 46 % avaient un cal vicieuxans le plan sagittal supérieur à 10◦. Il existait un cal vicieuxrticulaire dans 65 % des cas de la série rétrospective et dans6 % des cas dans la série prospective. Une ossification a étéetrouvée dans 47 % des cas de la série rétrospective et dans4 % des cas de la série prospective.

La présence d’arthrose évaluée selon la classification deröberg et Morrey [8] est rapportée dans le Tableau 4. Ainsi,lus le recul était élevé ce qui est le cas de la série rétros-ective plus l’arthrose était fréquente puisque presque 50 %es patients avaient une arthrose stade 2 ou 3 dans cetteérie.

Si la consolidation radiologique anatomique est choi-ie comme critère de jugement, le taux de réussite duraitement orthopédique était évalué à 15 %. Si seule’existence d’une consolidation radiologique, quelle que soit’orientation, est choisie comme critère de jugement radio-ogique, le taux de réussite était de 94 %. Si l’existence’une consolidation radiologique est associée aux bons ouxcellents résultats cliniques comme critères d’évaluation,e taux de réussite du traitement orthopédique était de3 %.

omplications

es complications du traitement orthopédique dans les séries étaient bénignes et comprenaient 2 hématomes et lésion cutanée (escarre localisée). Dans 3 cas, il a étéonstaté un déplacement de la fracture qui n’a pas nécessitée changement de traitement.

iscussion

e traitement orthopédique des fractures de l’extrémité dis-ale de l’humérus chez le sujet âgé est un traitement ancienui était le plus souvent réservé aux formes de fracture nonccessibles aux autres techniques ou aux patients dont le

nddr

L. Pidhorz et al.

errain contre-indiquait un geste chirurgical. Le traitementrthopédique consiste en une immobilisation d’une duréelus ou moins longue (6 à 12 semaines) par résine ou fixateurigide, le coude à 90◦ de flexion. Certains préconisaient laraction trans-olécranienne puis immobilisation plâtrée [9].e traitement fonctionnel reposant sur le principe de mobili-ation précoce a été proposé par Eastwood en 1937 [10], puisrown et Morgan en 1971 [11]. Le même traitement peutgalement être effectué par la mise en place d’un fixateurxterne que l’on verrouille entre les séances de mobilisation12].

Le traitement orthopédique effectué dans cette étude consisté dans la majorité des cas en une immobilisa-ion par plâtre BABP. Aucune traction trans-olécrânienne’a été réalisée qui aurait confiné au lit ces patients âgésvec les risques de complications de décubitus bien connus.ucune réduction de la fracture n’a été réalisée au blocpératoire, laissant la fracture en l’état, une fois la déci-ion prise de la traiter de facon orthopédique. Il ne nous

pas été possible de savoir si cette immobilisation BABPtait isolée ou associée à une immobilisation de l’épauleans un gilet manufacturé ou dans un bandage type Dujar-ier.

Nous prônons une immobilisation plâtrée BABP initialen insistant sur le matelassage au niveau du coude pourne durée globale de 6 à 8 semaines selon l’évolution radio-ogique. L’épaule doit être bloquée dans un bandage typeujarrier, gage du blocage effectif de l’épaule, le giletmovible étant à notre sens source de non-observancee l’immobilisation de l’épaule. La durée d’immobilisatione l’épaule est en général de 3 à 4 semaines. À la 3e oue semaine de l’immobilisation, le plâtre peut être rem-lacé par une résine BABP plus légère à supporter chezes sujets âgés. La périodicité du suivi en consultationst celui des traitements orthopédiques de nos fractures

savoir hebdomadaire pendant les 3 premières semainesuis à la 6e semaine, le reste du suivi étant affaire’habitude.

Le petit nombre de patients inclus dans cette série deraitement orthopédique a plusieurs explications. Le dogmerès présent encore de nos jours que ces fractures doiventtre traitées chirurgicalement, dogme défendu depuis leébut des années 1900 par Mr Lambotte et rappelé dans’introduction du symposium SOFCOT de 1979 par Lecestre1]. Dans la série rétrospective qui couvrait 11 ans de pra-ique, le petit nombre relatif de patients était dû à ceue les données dans le Programme de Médicalisation desystèmes d’Information (PMSI) de nos hôpitaux étaient dif-cilement accessibles ou les patients pas assez bien codés

cette période. De plus, il s’agissait souvent de patientsxternes donc non tracés dans les bases de données. Dansa série prospective qui couvrait les 16 mois d’inclusion, lerand nombre relatif de patients était explicable par laigilance des équipes à pister tous les patients externest hospitalisés pour cette fracture particulière. La duréeu recul afin d’admettre les patients dans l’étude était de

mois. Nombre de patients surtout dans la période rétros-ective ont été suivi moins de 6 mois car les chirurgiense convoquaient pas systématiquement ces sujets âgés à

istance une fois la consolidation obtenue, d’où des per-us de vue avant 6 mois. Le critère d’inclusion était trèsestrictif à savoir qu’il n’y avait que les fractures isolées

C

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Reliability of a visual analog version of the Quick DASH. J BoneJoint Surg Am 2006;88:1782—7.

Fracture de l’humérus distal chez le sujet âgé

qui étaient concernées, éliminant de fait les sujets ayantd’autres lésions associées. Le point positif à cette inclusionrestrictive est l’absence d’élément extérieur interférant surl’interprétation du résultat.

Lors du symposium de la SOFCOT en 1979 [1], le trai-tement orthopédique a été utilisé dans 115 cas (23 %). Unrésultat satisfaisant a été obtenu dans 66 % des cas. Lescomplications étaient rares en dehors des raideurs (22 %des cas). En 2007, la SOO a également étudié le résul-tat du traitement orthopédique pour la prise en chargedes fractures articulaires complexes de l’extrémité distalede l’humérus chez le sujet âgé [13]. Les traitements nonchirurgicaux ont été utilisés dans 19 cas (8 %). L’indicationa été posée le plus souvent en rapport avec des fac-teurs de terrain (demande fonctionnelle réduite, os trèsostéopénique). De fait, l’âge moyen des patients était de86 ans, répartis pour deux-tiers en ASA 3 ou 4 [2], ayantun score de Katz moyen de 4,5 [3]. Les fractures, clas-sées dans trois quarts des cas type A (A2-3, A3) [5], nereprésentaient pas un élément déterminant dans le choixdu traitement. Au recul, les traitements orthopédiques ontpermis d’obtenir la moitié de résultats satisfaisants selon leMEPS [6].

Le score de Katz [3] reflète le niveau d’autonomie dupatient. Ce score ne s’est pratiquement pas modifié entrela période pré-traumatique et le dernier recul dans notresérie. Cette observation démontre que dans certains cas quenous allons définir, le traitement orthopédique n’altère enaucun cas la qualité de la vie de ces patients. Le MEPS, scorespécifique du coude, a objectivé un score total fort respec-table puisque environ 80 % des sujets dans les 2 séries sontconsidérés comme ayant eu un bon ou un excellent résultat.Les amplitudes articulaires retrouvées ont été satisfaisantescorroborant le bon score MEPS. La force musculaire dans les2 séries n’est que peu altérée après ce traitement orthopé-dique. Le Quick-DASH d’environ 33 sur 100 dans les 2 sériesreprésente un résultat correct, 100 étant l’incapacité maxi-male.

La radiographie a retrouvé de nombreux cals vicieux,apanage du traitement orthopédique. Le nombre élevé decal vicieux articulaire dans la série rétrospective est lereflet du recrutement différent des patients, c’est-à-direavec un nombre plus important de fractures articulairestraitées dans la série rétrospective par rapport à la sérieprospective. L’évolution arthrosique des coudes ainsi trai-tée va être inéluctable et progressive, à savoir que plusle recul est important, plus les signes d’arthrose sont pré-sents.

Ainsi, une photographie instantanée du patient ayantbénéficié du traitement orthopédique dans ce travail peutêtre défini : il s’agit d’une femme octogénaire, vivant leplus souvent à domicile, ayant un score ASA faible [2], unbon score de Katz [3], n’ayant aucun antécédent fractu-raire et ayant une fracture sans grand déplacement et sanscomplication grave. Sa durée d’immobilisation sera alors de49 jours. Ce patient ainsi dépeint pourra alors espérer uneconservation de son score de Katz, un bon score MEPS [6],une amplitude de flexion—extension de 80 à 90◦ avec uneprono-supination normale, un axe huméro-ulnaire toujoursdévié et un cal vicieux quasi certain. Ce cal vicieux n’aura

que peu de retentissement sur la fonction du membre supé-rieur.

743

onclusion

e traitement orthopédique des fractures de l’humérus dis-al chez le sujet de plus de 65 ans reste une thérapeutique’exception. Une évidence : l’innocuité connue et confirméee ce traitement non opératoire car aucune complicationrave n’a été relevé. Le traitement orthopédique permete conserver une autonomie de vie et donne un résul-at clinique satisfaisant, avec l’absence d’enraidissementmportant articulaire ou d’instabilité du coude. Cependant,l faut savoir accepter d’avoir une radiographie que l’on peutéfinir comme désagréable, c’est-à-dire non anatomique.n 2013, le traitement orthopédique doit garder une placeans notre arsenal thérapeutique. Ainsi dans des cas sélec-ionnés, il faut « savoir ne pas opérer » comme le disait le Prvan Kempf lors d’un entretien dans les Dernières Nouvelles’Alsace lors de son départ à la retraite.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

emerciements

es auteurs veulent remercier l’ensemble des participantsu symposium qui ont permis d’effectuer cette étude :. Hubert, F. Mallard et N. Bigorre (Angers), A. GabrionAmiens), L. Obert et M. Ferrier (Besancon), T. Fabre et. Demezon (Bordeaux), C. Hulet, B. Lebel et F. Dordain

Caen), D. Saragaglia et M. Milaire (Grenoble), J. Tonetti, A.jahangiri et A. Cikes (Lausanne), L. Pidhorz, P. Alligand et. De Keating (Le Mans), J.L. Charissoux et M. BenassayagLimoges), G. Herzberg (Lyon), B. Coulet (Montpellier), F.irveaux et A. Jacquot (Nancy), A. Galey et B. AugereauHEGP-Paris), S. Levante, N. Mebtouche et T. Begué (Paris),. Duparc (Rouen), P. Clavert et G. Ducrot (Strasbourg), P.ansat et H. Nouaille Degorce (Toulouse), L. Favard et J.runet (Tours).

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