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GREENPEACE MEMBER 2014, Nº 4 Résistance, pour sauver la liberté p. 14 Leibstadt et Gösgen, bilans truqués p. 11 Avec Twitter et Facebook contre la mine d’or p. 19 Aspirations libertaires après le Printemps arabe p. 44 Apiculture proche de la nature: trois méthodes p. 48

Greenpeace Magazine 2014/04

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G R E E N P E AC E M E M B E R 2 0 1 4 , Nº 4

— Résistance, pour sauver la liberté p. 14

Leibstadt et Gösgen, bilans truqués p. 11Avec Twitter et Facebook contre la mine d’or p. 19Aspirations libertaires après le Printemps arabe p. 44 Apiculture proche de la nature: trois méthodes p. 48

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Éditorial — Il est bon quelquefois de changer de perspective. Nous avons donc choisi de tourner la mise en page de cette édition de 90°. Une décision qui a demandé un peu de courage à la rédaction. Mais ce n’est rien à côté du courage que doit mobiliser la Péruvienne Máxima Acuña de Chaupe, qui lutte depuis dix ans contre de puissantes sociétés minières et son propre gouvernement. Ceux-ci prévoient de raser des mon-tagnes pour construire la plus grande mine d’Amérique latine, de chambouler les paysages et de détourner les sources d’eau pourtant nécessaires aux familles paysannes. La cabane de Máxima se situe au milieu du site d’extraction prévu (cf. dos-sier sur la résistance à partir de la page 14).

Savez-vous ce qu’est une loi sur l’écocide? Avec une telle loi, les responsables de scandales environnementaux comme la catastrophe pétrolière du golfe du Mexique ou la pollution nu-cléaire de Tchernobyl pourraient être sanctionnés. Cette loi profiterait aussi aux écologistes qui ne risqueraient plus la pri-son quand ils dénoncent des crimes contre l’environnement. Leur action serait légitimée par la loi et ils obtiendraient davan-tage de pouvoir. Depuis des années, l’avocate britannique Polly Higgins lutte pour faire inscrire l’écocide comme crime dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale à La Haye (voir l’entretien page 29).

Les crimes contre l’environnement ne sont pas l’apanage du Sud. Il n’y a qu’à voir les centrales nucléaires vétustes de Leibstadt et Gösgen, toujours en service, avec leurs bilans tru-qués pour faire croire qu’il s’agit toujours du mode de produc-tion électrique le moins cher. Si cette comptabilité était correc-tement établie, le courant nucléaire coûterait quatre à cinq fois plus et ne serait plus compétitif. L’expert financier Kaspar Müller retrace les détails de cette affaire en page 11.

L’apiculture n’est pas uniforme. Les trois méthodes naturelles labellisées Bourgeon bio, Demeter et FreeTheBees sont aussi riches et complexes que les communautés d’abeilles elles-mêmes (page 48).

La rédaction

PS: Un dernier mot nous concernant. En novembre, Greenpeace Suisse a fêté son 30e anniversaire. Vous souhaitez nous faire un cadeau? Alors, o� rez-nous des frais d’envoi postal! Demande inhabituelle de notre part, nous en convenons. Mais en tant qu’organisation indépendante, il nous faut en permanence de nouveaux adhérents et les envois publicitaires sont très onéreux. Pourquoi ne pas détacher les quatre bulletins de ver-sement au milieu de ce magazine et les jeter dans les boîtes aux lettresde votre choix? Ce serait là un cadeau fort apprécié. Nous vous en remercions par avance.

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Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

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Photoreportage Une marée noire rampante 58 dans la république russe des Komis

Entretien Bilans truqués des centrales nucléaires 11 de Gösgen et Leibstadt: l’opinion de l’expert financier Kaspar Müller

Apiculture proche de la natureUNE MÊME INTENTION, TROIS MÉTHODES 48

EntretienNON AU SECOND TUBE ROUTIER AU GOTHAR D: R ENCONTR E AVEC ANDR EAS WEISSEN 53

Succession TESTAMENTS EN FAVEUR DE GR EENPEACE À TR AVER S LE MONDE 56

En a� ion 2Mentions légales 10Le mot de la dire� ion 10Campagnes 66Brèves 69Mots fl échés écologiques 72

DOSSIER: R É S I S T A N C E S p. 14

p. 16 R E C H E R C H E S C I E N T I F I Q U E

Le succès est du côté de la résistance non violente

p. 19 C O N T E X T E

Les médias sociaux contre l’avidité de l’industrie minière

p. 29 E N T R E T I E N

Une loi sur l’écocide: légitimation des actions des militants écologistes?

p. 33 R E P O R T A G E

Six exemples de résistance créative p. 42 L A C A R T E

Accaparement des terres

p. 44 E S S A I

Thomas Schmid, expert pour le Proche-Orient, commente les aspirations du Printemps arabe

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Alp Oberbärgli, Suisse, 25 août 2014

Bénédi� ion alpine pour l’Ar� iqueSur les hauteurs de Kander� eg (BE), la chanteuse bernoise Chri� ine Lauterburg soutient la lu� e de Greenpeace contre les géants pétroliers Gazprom et Shell avec leurs projets de forages en Ar� ique. Le porte-voix traditionnel fait retentir le message de la performance: les glaces, les animaux et les habitants du pôle Nord «sont uniques pour l’éternité».

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© G R E E N P E AC E / N I C O L A S F O J T U

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Riau, Indonésie, 15 septembre 2014

Contre la mort des tourbièresUn linceul symbolique couvert de fl eurs pour prote� er contre le feu mis aux tourbières d’Indonésie. Les militants de Greenpeace s’opposent ainsi à la progres-sion des cultures d’huile de palme et demandent au gouvernement de durcir la législation environne-mentale.

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© G R E E N P E AC E / S E B A S T I A N PA N I

Salta, Argentine, 4 o� obre 2014 A� ion � e� aculaireCinq militants de Greenpeace campent durant 25 jours dans la forêt du nord de l’Argentine pour bloquer les bulldozers des entreprises fore� ières. Arrêtés par la police, ils seront relâchés au bout de quelques heures. L’a� ion vise à inciter le gouvernement à faire re� e� er la loi nationale sur la forêt.

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Batang, Indonésie, 23 septembre 2014 Exi� ences menacéesDes paysans, des pêcheurs et des militants de Greenpeace prote� ent dans une rizière contre une énorme centrale au charbon projetée par le gouvernement dans la province du Java central. La centrale menacerait l’alimentation, mais aussi la nature, la qualité de vie et les droits humains, signalent les pancartes.

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© Y U D H I M A H AT M A / G R E E N P E AC E

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10Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Près d’un demi-siècle après le mouvement de 1968 et son slogan «anti-adultes», les droits et les libertés conquises depuis cette époque sont aujourd’hui menacés. Dans le sillage de la guerre contre le terrorisme lancée au début du siècle, les services secrets ne se gênent pas pour enregistrer et dépouiller nos données électroniques. Les populations pourtant hostiles à ces pratiques n’ex-priment pas d’indignation collective. Pas de grands remous non plus autour des accords commerciaux, comme le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI). Ceux-ci menacent pourtant la démocratie et l’État de droit, notamment en abaissant les normes dans des domaines aussi variés que le travail, les garanties sociales, l’environ-nement, la protection des données et les droits des consommateurs, et en dérégulant les services publics (comme la distribution d’eau potable). Et la majorité de la population suisse ignore proba-blement que la liberté d’expression et de réunion est souvent remise en cause par les coûts considé-rables mis à la charge des manifestants (par exemple

pour une présence policière disproportionnée). Qui osera encore appeler à une manifestation spontanée ou à une action non violente dans ces con ditions?

Durant vingt-neuf ans, Greenpeace Suisse a lutté contre les injustices. Aujourd’hui nous franchis-sons l’étape des 30 ans. Une table ronde organisée en novembre sur le thème de la résistance non violente a été l’occasion de marquer le jour anniversaire de la fondation de notre organisation. Si l’action déve-loppée par Greenpeace à l’échelle mondiale s’avère e� cace, la légitimité de la désobéissance civile est néanmoins remise en cause. Une banderole suspen-due sans autorisation préalable des autorités – un «délit» du même poids qu’une amende de stationne-ment – su� t à faire bondir la jeunesse d’un parti zurichois. C’est le signe d’une intolérance qui se fait sentir également en Suisse. À travers le monde, les dérives se multipli ent: restriction de la liberté de manifester ou de la liberté de la presse, et crimi-nalisation croissante des activistes des mouvements environnementaux. L’Espagne prévoit ainsi de restreindre le droit de manifester; le Japon s’attaque à l’égalité femmes-hommes, à la liberté de la presse et au droit à l’information ; aux États-Unis et au Cana-da, le militantisme écologique est souvent assimilé au terrorisme. Sans parler du cas de la Russie, qui aligne les ONG sur la politique de l’État, quand elle les tolère encore. L’Inde, le Brésil, l’Australie et d’autres pays ne sont pas en reste.

Méritons-nous encore votre con� ance, chères adhérentes et chers adhérents de Greenpeace, même après le seuil des 30 ans d’existence? À vous de trancher! Il nous semble que ce n’est pas le moment de baisser les bras. Continuons de lutter pour un monde équitable et paci� que, en con� ance avec vous, si vous le voulez bien.

Co-directionMarkus Allemann et Verena Mühlberger

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Éditeur / adresse de la rédaction:Greenpeace SuisseBadenerstrasse 171Case postale 93208036 ZurichTéléphone 044 447 41 41Téléfax 044 447 41 [email protected]

Changements d’adresse: [email protected]

Équipe de rédaction: Tanja Keller (responsable), Hina Struever, Barbara Lukesch, Samuel Schlae� i, Marc RüeggerAuteurs:Esther Banz,Susan Boos, Rita Emch, Hannes Grassegger, Martina Huber, Thomas Niederberger, Samuel Schlae� i, Thomas Schmid, Daniela SchweglerPhotographes:Enrique Castro-Mendivil, Sava Hlavacek, Daniel Müller, Denis SinyakovTraduction en français:Nicole Viaud et Karin VogtMaquette:Hubertus Design

Impression:Stämp� i Publikationen AG, BernePapier couverture et intérieur:100% recycléTirage:103 000 en allemand, 22 000 en françaisParution:quatre fois par année

Le magazine Greenpeace est adres-sé à tous les adhérents (cotisation annuelle à partir de 72 francs). Il peut re� éter des opinions qui divergent des positions o� cielles de Greenpeace.

Pour des raisons de lisibilité, nous renonçons à mentionner systé-matiquement les deux sexes dans les textes du magazine. La forme masculine désigne implicitement les personnes des deux sexes, et vice-versa.

Dons:compte postal 80-6222-8Dons en ligne:www.greenpeace.ch/dons

Dons par SMS:envoyer GP et le montant en francs au 488 (par exemple, pour donner 10 francs: «GP 10»)

NE FAIS PAS CONFIANCE AUX PLUS

DE TRENTE ANS!

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11Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

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NGreenpeace: M. Müller, vous avez analysé le bilan des centrales nucléaires suisses. Quellessont vos conclusions?

Kaspar Müller: Mes conclusions sont presque incroyables. La centrale nucléaire de Leibstadt et celle de Gösgen-Däniken manipulent leur bilan et contreviennent manifestement au Code des obligations. Tout ceci avec la bé-nédiction des sociétés de révision KPMG et Ernst & Young. Je peine à comprendre comment les autres experts en � nances, comptabilité et droit ou les universités peuvent se taire à ce sujet.Pourquoi Gösgen et Leibstadt manipule-raient-elles leur bilan?

Premièrement, ces bilans truqués leur per-mettent d’aboutir à un prix de revient modeste pour le courant nucléaire. Deuxièmement, cette manipulation sert à masquer la situation économique désastreuse des sociétés, qui devraient en principe être en redressement � nancier.Comment avez-vous eu l’idée de vous pencher sur cette thématique?

Il y a six ans, j’ai e� ectué un mandat intéressant pour l’Union européenne. Il s’agis-sait de comparer les di� érents fonds de gestion des déchets nucléaires et de désa� ecta-tion des pays de l’UE. J’ai eu la chance de rédiger une grande partie de ce rapport et donc de travailler le sujet à fond. Ensuite, j’ai étudié les rapports annuels de Leibstadt et Gös-gen. Les chi� res ne me paraissaient pas cohérents. J’ai donc passé beaucoup de temps à décortiquer les documents. Bénévolement, je précise. Je l’ai fait à titre privé, pour compren-dre ce qui se passe. Et quels sont les problèmes?

Je ne peux pas me prononcer sur les ques-tions techniques et de sécurité. Ce sont les questions de comptabilité et de � nancement qui ont retenu mon attention. C’est mon domaine de travail depuis plus de trente ans. Mais d’abord un mot sur la structure éco-nomique: les deux centrales nucléaires sont des sociétés par actions. Les actions sont ma-joritairement en possession des géants énergé-tiques Axpo, Alpiq ou FMB, et donc d’une série de cantons et de villes. Personne ne dis po se d’une majorité dans ces sociétés par actions, et personne ne va donc endosser la respon-sabilité en cas de di� culté économique d’une société de centrale nucléaire. Pour ce cas de

«LE NUCLÉAIRE N’A JAMAIS ÉTÉ

RENTABLE ET NE LE SERA JAMAIS»

Kaspar Müller, expert financier indépendant, dévoile de graves défauts dans le bilan des deux centrales nucléaires de Leibstadt et Gösgen. Il en résulte un prix artificielle-ment bas pour le courant nucléaire et une tromperie des contribuables.

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� gure, la loi prévoit que les autres exploitants de centrales nucléaires injectent de l’argent, s’ils sont en mesure de le faire. Or, la loi sur l’énergie nucléaire dit aussi que la Confé dération doit faire face à ces obligations � nan cières au cas où elles représenteraient pour les exploitants «une charge économique insupportable». Ceci équivaut à une garantie étatique en faveur des centrales nucléaires.Une centrale nucléaire en faillite sera donc à la charge de la collectivité?

Oui, c’est bien ça. Et ce serait dramatique, car les cantons qui ont déjà décidé la sortie du nucléaire – Bâle-Ville, par exemple – ne voudront certainement pas payer. Or une insol-vabilité des centrales nucléaires est très vraisemblable. Les coûts de production du cou-rant nucléaire, mais aussi de désa� ectation et de gestion des déchets sont totalement sous-estimés. La Confédération estime que le scellement du dépôt � nal pour déchets de haute activité interviendra en 2116. Où trou-ver l’argent pour couvrir les frais pour les cent prochaines années? En calculant correcte-ment, on arrive à une somme d’au moins 26 milliards uniquement pour les dix-huit an-nées à venir. Pour l’instant, les fonds comptent 5 milliards d’avoirs. Il manque donc encore 20 milliards.Pourquoi cette situation absurde?

Les calculs des dernières années étaient trop optimistes. On pensait réaliser des rendements juteux sur l’argent déjà versé aux fonds. La Confédération a récemment adapté les exigences de versement pour les dix-huit années à venir, constatant justement que les calculs se basaient sur des prévisions trop optimistes.Après ce délai, Gösgen et Leibstadt devraient être désa� ectées.

Oui. La Confédération prévoit une in� ation de 1,5% en moyenne et un rendement de place-ments de 3,5%. Et elle instaure à juste titre une marge de sécurité de 30% pour les coûts. Il est clair que les déchets nucléaires doivent être gérés et que cela va coûter. Mais le coût devrait être assumé par le pollueur et non par les contribuables.Pourquoi n’y a-t-il pas davantage d’argent dans ces fonds ? Cela fait quand même une trentaine d’années que les centrales sont en activité.

Les centrales n’ont commencé leurs verse-ments au fonds de désa� ectation qu’en 1985. Cet argent devrait servir au démantèlement des centrales. Le fonds de gestion des déchets – qui doit couvrir les coûts du stockage des déchets nucléaires sur le long terme – n’a été instauré qu’en 2001. Le principe de précaution n’a pas été respecté. C’est irresponsable, c’est de la mau-vaise gestion. De plus cette manœuvre a biaisé le coût du nucléaire, qui a pu être présenté comme plus bas qu’il ne l’est en réalité. L’énergie nu-cléaire n’a jamais été rentable et ne le sera jamais. En outre, les centrales peinent aujourd’hui à écouler leur courant trop cher, malgré un prix de revient prétendument très modeste. Avec un calcul correct, le nucléaire ne coûterait pas 4 ou 5 centimes, mais bien au-delà de 10 et même plutôt 20 centimes par kWh. Ensuite, les installa-tions ne sont pas correctement assurées, sinon le courant serait encore beaucoup plus cher.Revenons au bilan. Quelles sont les manipu-lations?

Il y a plusieurs problèmes graves. Première-ment, la valeur des titres versés au fonds de désa� ectation et au fonds de gestion des dé-

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N«Avec un calcul correct, le nucléaire ne coûterait pas 4 ou 5 centimes, mais 10 à 20 centimes par kWh.»

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13Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

chets n’est pas correctement déclarée au bilan. Gösgen et Leibstadt ne déclarent pas la valeur de marché réelle, mais une valeur hypo-thétique beaucoup plus élevée, qui pourrait théoriquement être un jour réalisée en Bourse. Ce procédé est illégal, le Code des obligations ne le permet pas. Pour les centrales de Beznau et de Mühleberg, les valeurs a� chées sont en revanche correctes. Les sociétés de révision sont d’ailleurs les mêmes, elles savent donc que la comptabilité de Leibstadt et Gösgen est contraire à la loi.Greenpeace et l’Association trinationale de protection nucléaire ont porté plainte contre Gösgen et Leibstadt il y a deux ans. Mais la procédure en justice n’a pas abouti.

Oui, c’est incompréhensible. Dans son ordonnance de non-lieu, le ministère public du canton de Soleure admet que le capital propre de Gösgen serait déjà épuisé à hauteur de 80% et que «des mesures de redressement � -nancier auraient été inévitables». Il partage donc mon analyse sur le fond. Or il poursuit: «Mais comme il s’agit de pertes strictement compta bles et que la liquidité de l’entreprise n’est pas mise en cause, les mesures de redressement � nancier prévues par le Code des obligations ne font pas sens.» Il décide donc un non-lieu. C’est in-croyable! Le ministère public n’est pas chargé d’interpréter la loi, il doit l’appliquer! C’est comme un automobiliste qui traverserait un village à 100 à l’heure parce qu’il est pressé. La police l’arrête, mais décide que la loi ne s’ap-plique pas dans son cas, sinon il aurait été en retard. L’ordonnance de non-lieu du ministère public du canton d’Argovie concernant Leib-stadt était d’ailleurs identique.Les centrales de Beznau et Mühleberg pré-sentent un bilan correct. C’est surprenant.

Oui, d’après ce que je vois. Mais il n’y a pas de chi� res détaillés, car les deux centrales ne sont pas des sociétés par actions autonomes. Elles sont intégrées à leur maison mère, Axpo ou FMB.Vous évoquez encore d’autres manquements. De quoi s’agit-il?

Le compte de résultats a� che des rende-ments calculatoires sur les titres, donc des rendements que l’on n’a pas réalisés. Sans ces rendements � ctifs, Leibstadt et Gösgen n’auraient pas pu verser de dividendes. Et les bilans de ces deux centrales présentent

à l’actif des éléments intitulés «coûts à amortir pour la fermeture, la désa� ectation et le traitement des déchets». Il est contraire au Code des obligations de porter ces coûts à l’actif. C’est tout simplement illicite!Quel est donc le manque à gagner pour Gös-gen et Leibstadt, au total?

À la � n 2011, c’était 969 millions de francs pour Gösgen et 868 millions pour Leibstadt. Selon la loi, le conseil d’administration devrait se déclarer en faillite ou prendre immédiatement des mesures de redressement � nancier. Les ac-tionnaires, donc les cantons, devraient alors assu-mer le problème et déclarer à leurs contribuables qu’ils doivent injecter environ un milliard de capital dans chacune des deux centrales. Mais ils se refusent à le faire.Alors, quel avenir?

Il est important que les contribuables comprennent qu’il y là de graves infractions à la loi, qui devraient être sanctionnées pour n’importe quelle entreprise. Ce sont d’ailleurs des délits poursuivis d’o� ce. Les ministères publics doivent donc intervenir de leur propre initiative contre les exploitants de Gösgen et Leibstadt. Les sociétés d’audit doivent elles aussi réagir, si elles ne veulent pas être complices d’entreprises qui contreviennent au Code des obligations.Propos recueillis par Susan Boos.

Ka� ar Müller, 62 ans, vit à Bâle. Économi� e et expert fi nancier indépendant, il e� aussi président de la fondation Ethos à Genève. De 1991 à 2012, il était membre de la commission Swiss GAAP RPC qui émet des recommandations relatives à la présentation des comptes.

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ce c

ontr

e le

s m

ouve

men

ts d

e ré

sist

ance

qui

peu

vent

êtr

e ra

pide

men

t réc

upér

és p

ar d

es fo

rces

div

erse

s.

Mai

s l’e

spoi

r exi

ste.

Nou

s po

uvon

s to

us s

uivr

e de

prè

s l’é

volu

tion

de c

es m

ouve

men

ts. E

t des

cen

-ta

ines

de

mill

iers

, voi

re d

es m

illio

ns d

e pe

rson

nes

ont f

ait l

’exp

érie

nce

que

leur

s pr

otes

tatio

ns

loca

les

étai

ent e

nten

dues

à tr

aver

s le

mon

de.

Page 18: Greenpeace Magazine 2014/04

16Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

RE

CH

ERC

HE

SC

IEN

TIFI

QU

E

Dan

s div

erse

s con

trib

utio

ns su

r la

rési

stan

ce n

on v

iole

nte,

le

s aut

eure

s con

stat

ent q

ue le

s esp

oirs

liés

aux

soul

ève-

men

ts d

ans l

e m

onde

ara

be se

mbl

ent à

pre

miè

re v

ue b

risés

: l’i

dée

que

le «

pouv

oir p

opul

aire

» po

urra

it dé

� er l

es

régi

mes

dic

tato

riau

x po

ur le

s rem

plac

er p

ar d

e m

eille

urs

gouv

erne

men

ts se

mbl

e en

dér

oute

. Le

bain

de

sang

qu

i con

tinue

en

Syri

e, l’

inst

abili

té n

otoi

re d

e la

Lib

ye, l

a co

ntre

-rév

olut

ion

sang

lant

e en

Égy

pte,

mai

s aus

si la

pres

sion

vio

lent

e de

s pro

test

atio

ns e

n U

krai

ne d

ress

ent

un ta

blea

u so

mbr

e de

s per

spec

tives

de

la ré

sist

ance

no

n vi

olen

te fa

ce a

ux ré

gim

es ré

pres

sifs

. Un

scep

ticis

me

«com

préh

ensi

ble

au v

u de

s évé

nem

ents

, mai

s err

oné»

, éc

rive

nt le

s che

rche

uses

.

La

mei

lleur

e ré

pons

e à

l’opp

ress

ion

Eric

a C

heno

wet

h et

Mar

ia J.

Ste

phan

sout

ienn

ent q

ue le

bi

lan

hist

oriq

ue d

ress

é en

2011

rest

e va

lide:

la ré

sis-

tanc

e ci

vile

est

la m

eille

ure

répo

nse

à l’o

ppre

ssio

n et

la

stra

tégi

e ga

gnan

te p

our u

n ch

ange

men

t soc

ial e

t pol

itiqu

e.

Selo

n le

s aut

eure

s, le

s évé

nem

ents

dra

mat

ique

s de

ces d

erni

ers t

emps

pro

uven

t sur

tout

que

les m

ouve

men

ts

qui m

isen

t sur

la v

iole

nce

«déc

lenc

hent

souv

ent d

es

dest

ruct

ions

terr

ible

s et d

es b

ains

de

sang

, san

s atte

indr

e

Pour

obt

enir

un c

hang

emen

t pol

itiqu

e, la

ré-

sist

ance

civ

ile n

on v

iole

nte

a pl

us d

e ch

ance

sd’

abou

tir q

ue la

rési

stan

ce a

rmée

. C’e

st

la c

oncl

usio

n de

deu

x ch

erch

euse

s am

éric

ai-

nes,

Eric

a C

heno

wet

h et

Mar

ia J.

Ste

phan

, qu

i ont

réce

mm

ent c

ompl

été

leur

ouv

rage

W

hy C

ivil

Res

ista

nce

Wor

ks, p

aru

en 2

011

, pa

r une

ana

lyse

des

lutt

es s

angl

ante

s qu

i co

ntin

uent

de

seco

uer l

e m

onde

ara

be.

Elle

s co

nclu

ent q

ue le

sce

ptic

ism

e op

posé

à

leur

s hy

poth

èses

est

com

préh

ensi

ble,

m

ais

erro

né. P

ar R

ita E

mch

LA R

ÉSIS

TAN

CE

NO

N

VIO

LEN

TE E

ST L

A

MEI

LLEU

RE

OPT

ION

Page 19: Greenpeace Magazine 2014/04

17R É S I S T A N C E S

leur

obj

ectif

pre

mie

r.» L

e bi

lan

du p

oten

tiel d

e la

rési

s -ta

nce

non

viol

ente

doi

t êtr

e fa

it su

r une

pér

iode

plu

s lon

gue.

Pour

leur

étu

de, l

es ch

erch

euse

s ont

dép

ouill

é le

s do

nnée

s his

toriq

ues d

e 32

3 cam

pagn

es d

e ré

sist

ance

– 21

8 vi

olen

tes e

t 105

non

vio

lent

es –

men

ées p

our l

e dr

oit à

l’a

utod

éter

min

atio

n, la

des

titut

ion

d’un

diri

gean

t pol

itiqu

e ou

l’év

ictio

n d’

une

forc

e m

ilita

ire d

’occ

upat

ion

sur l

a pé

riode

alla

nt d

e 19

00 à

2006

. L’a

naly

se in

clut

des

mill

iers

de

doc

umen

ts su

r des

mou

vem

ents

de

prot

esta

tion

et d

e dé

sobé

issa

nce

civi

le, d

es ra

ppor

ts d

’exp

erts

, des

sond

ages

, de

s réc

its su

r les

soul

èvem

ents

vio

lent

s et n

on v

iole

nts,

no

tam

men

t en

Inde

sous

dom

inat

ion

brita

nniq

ue a

vec

le

mou

vem

ent d

e M

ahat

ma

Gan

dhi p

our l

’indé

pend

ance

, ou

enc

ore

en T

haïla

nde

avec

le m

ouve

men

t de

prot

esta

tion

qui a

ent

raîn

é la

chut

e du

gou

vern

emen

t Tha

ksin

Shi

na-

wat

ra. S

elon

le c

onst

at d

es d

eux

cher

cheu

ses,

c’e

st la

rési

s -ta

nce

non

viol

ente

qui

, dan

s une

per

spec

tive

hist

oriq

ue,

a le

plu

s sou

vent

per

mis

le p

assa

ge à

un

syst

ème

gouv

erne

-m

enta

l plu

s dur

able

et à

une

soci

été

moi

ns v

iole

nte.

Le

taux

de

«réu

ssite

» de

s cam

pagn

es n

on v

iole

ntes

sera

it de

ux fo

is p

lus é

levé

, et l

a pr

obab

ilité

du

reto

ur à

une

si

tuat

ion

de g

uerr

e ci

vile

, net

tem

ent p

lus f

aibl

e. S

eule

ex -

cept

ion

au ta

blea

u, le

s mou

vem

ents

de

séce

ssio

n,

donc

les l

utte

s d’in

dépe

ndan

ce d

’une

com

posa

nte

d’un

pay

s.

Dan

s ce

cas d

e � g

ure,

l’in

dépe

ndan

ce n

’a p

ratiq

uem

ent

jam

ais é

té co

nqui

se, q

ue la

stra

tégi

e m

ise

en œ

uvre

ait

été

viol

ente

ou

non

viol

ente

.

Des

fa�

eurs

de

succ

ès id

entiq

ues

La rè

gle

de la

plu

s gra

nde

e� c

acité

de

la ré

sist

ance

ci

vile

se v

éri�

e m

ême

dans

le c

as d

es ré

gim

es le

s pl

us b

ruta

ux e

t les

plu

s rép

ress

ifs. P

rote

stat

ions

, boy

cotts

, dé

sobé

issa

nce

civi

le e

t aut

res f

orm

es d

’act

ions

non

vi

olen

tes c

ontr

ibue

nt à

min

er la

loya

uté

des p

rinci

paux

so

utie

ns a

ux ré

gim

es q

ui se

trou

vent

ain

si a

� aib

lis.

Un

phén

omèn

e qu

i s’o

bser

ve m

ême

en Ir

an, a

u M

yanm

ar

ou a

ux P

hilip

pine

s. «

Con

trai

rem

ent a

ux id

ées r

eçue

s,

010

20

30

40

50

6070Nom

bre

de c

ampa

gnes

et p

art d

es s

uccè

s no

n vi

olen

ts d

e 19

40

à 2

00

6

Nom

bre

de c

ampa

gnes

Suc

cès

en %

1940—19491950—19591960—19691970—19791980—19891990—19992000—2006

SOURCES: WHY CIVIL RESISTANCE WORKS (COLUMBIA UNIVERSITY PRESS, 2011); DROP YOUR WEAPONS (FOREIGN AFFAIRS, JULY/AUGUST 2014, EN LIGNE)

Page 20: Greenpeace Magazine 2014/04

Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

aucu

ne st

ruct

ure

soci

étal

e, é

cono

miq

ue o

u po

litiq

ue n

’est

en

mes

ure

d’em

pêch

er sy

stém

atiq

uem

ent l

’ém

erge

nce

des

mou

vem

ents

non

vio

lent

s et l

eur s

uccè

s», p

réci

sent

les

aute

ures

. Grè

ves,

pro

test

atio

ns, s

it-in

et b

oyco

tts: l

a ré

sis -

tanc

e ci

vile

rest

e «l

a m

eille

ure

stra

tégi

e po

ur le

chan

ge-

men

t soc

ial e

t pol

itiqu

e». U

n él

émen

t im

port

ant d

u su

ccès

d’

un m

ouve

men

t rés

ide

dans

un

larg

e so

utie

n de

la p

art

de la

pop

ulat

ion.

Si le

s tro

uble

s et l

a pe

ur p

ersi

sten

t auj

ourd

’hui

du

Cai

re

jusq

u’à

Kie

v, le

s rai

sons

d’ê

tre

prud

emm

ent o

ptim

iste

co

ncer

nant

les p

ersp

ectiv

es d

e la

rési

stan

ce c

ivile

ces

pro

-ch

aine

s ann

ées s

ont n

ombr

euse

s. L

’e�

caci

té d

e la

ré -

sist

ance

civ

ile e

st p

rinc

ipal

emen

t due

au

fait

qu’e

lle se

ra

susc

eptib

le d

e m

obili

ser u

ne b

ase

plus

larg

e de

par

tici-

pant

es e

t par

ticip

ants

pro

vena

nt d

e m

ilieu

x pl

us v

arié

s. E

t po

ur u

n ré

gim

e, la

dés

obéi

ssan

ce c

ivile

est

aus

si u

ne

plus

gra

nde

men

ace

que

la lu

tte

arm

ée e

n ra

ison

des

coû

ts

élev

és su

r la

duré

e. L

es c

ampa

gnes

de

rési

stan

ce c

ivile

e�

cac

es o

nt g

énér

alem

ent t

rois

cho

ses e

n co

mm

un: u

ne

part

icip

atio

n m

assi

ve d

e la

pop

ulat

ion,

une

tact

ique

soup

le

et la

capa

cité

d’a

ttire

r éga

lem

ent d

es m

ilieu

x pr

oche

s du

régi

me.

Ces

fact

eurs

de

succ

ès so

nt le

s mêm

es p

arto

ut

dans

le m

onde

, dis

ent E

rica

Che

now

eth

et M

aria

J. S

te-

phan

, qui

ont

spéc

iale

men

t étu

dié

cet a

spec

t pou

r les

di

� ére

ntes

régi

ons d

u gl

obe:

«N

ous n

e co

nsta

tons

auc

une

di� é

renc

e sy

stém

atiq

ue e

ntre

les m

ouve

men

ts d

e ré

sist

ance

vic

torie

ux d

u Su

d pa

r rap

port

à c

eux

du N

ord.

»

La

rési

� an

ce, u

ne te

chni

que

de lu

� e

com

plex

e Il

est v

rai q

ue le

s per

sonn

es q

ui v

iven

t sou

s des

régi

mes

au

torit

aire

s son

t plu

s enc

lines

à to

mbe

r dan

s l’il

léga

lité

que

les p

opul

atio

ns d

es p

ays d

émoc

ratiq

ues,

les p

rote

s-ta

tions

sont

léga

les.

Les

dém

ocra

ties p

ossè

dent

en

outr

e de

s sou

pape

s de

sécu

rité

sous

la fo

rme

de p

roce

ssus

él

ecto

raux

qui

per

met

tent

l’ex

pres

sion

du

méc

onte

n -te

men

t pop

ulai

re. L

a pr

essi

on p

oliti

que

venu

e d’

en b

as e

st

donc

moi

ndre

que

pou

r les

régi

mes

aut

orita

ires,

qui

pr

ésen

tent

un

terr

ain

plus

favo

rabl

e au

x ca

mpa

gnes

de

rési

stan

ce.

Eric

a C

heno

wet

h ra

ppel

le q

ue le

s soc

iété

s civ

iles s

ont

très

di�

éren

tes l

es u

nes d

es a

utre

s en

ce q

ui co

ncer

ne

leur

forc

e in

térie

ure

et le

ur té

naci

té. L

a cr

oiss

ance

gén

éral

e de

la ré

sist

ance

civi

le à

l’he

ure

actu

elle

ne

sign

i� e

pour

-ta

nt p

as q

ue le

s soc

iété

s civ

iles s

e re

nfor

cent

dan

s leu

r en

sem

ble.

La

rési

stan

ce c

ivile

rest

e un

e te

chni

que

de lu

tte

com

plex

e. S

i elle

o� r

e pl

us d

e ch

ance

s de

succ

ès q

ue

les a

ctio

ns v

iole

ntes

, un

préa

labl

e im

port

ant d

e la

réus

site

es

t la

patie

nce:

«La

réso

lutio

n de

pro

blèm

es m

ême

urge

nts

pren

d so

uven

t bea

ucou

p de

tem

ps.»

Dan

s le

cadr

e d’

une

cam

pagn

e de

rési

stan

ce c

ivile

, «il

faut

don

c s’a

ssur

er

que

ceux

qui

s’en

gage

nt su

r cet

te v

oie

sont

cons

cien

ts d

es

réal

ités d

’une

long

ue lu

tte e

n fa

veur

de

la ju

stic

e.»

«Les

mou

vem

ents

de

rési

stan

ce c

ivile

ef

ficac

es o

nt tr

ois

chos

es e

n co

mm

un: u

ne

part

icip

atio

n m

assi

ve d

e la

pop

ulat

ion,

un

e ta

ctiq

ue s

oupl

e et

la c

apac

ité d

’att

irer

des

mili

eux

proc

hes

du ré

gim

e.»

Page 21: Greenpeace Magazine 2014/04

19

Pho

to

Máx

ima

Acu

ña d

e C

haup

e, p

aysa

nne

péru

vien

ne, r

efus

e de

puis

des

ann

ées

de c

éder

ses

qua

tre

hect

ares

de

terr

e à

la s

ocié

té q

ui v

eut e

n ex

trai

re d

e l’o

r et d

e l’a

rgen

t.

CO

NTE

XTE

Des

mill

iers

de

pays

ans

auto

chto

nes

du P

érou

lutt

ent p

our p

rése

rver

des

sou

rces

d’

eau

qu’u

ne s

ocié

té m

iniè

re v

eut a

ssé -

cher

pou

r l’e

xtra

ctio

n d’

or. L

e m

ouve

men

t es

t sou

tenu

par

un

rése

au m

ondi

al d

e m

ilita

nts

qui s

’eng

agen

t con

tre

l’arb

itrai

re

des

État

s et

de

l’ind

ustr

ie d

es m

atiè

res

prem

ière

s. L

eurs

out

ils?

Des

doc

umen

tai-

res,

des

con

trib

utio

ns a

ux m

édia

s so

ciau

x et

des

pét

ition

s en

lign

e. P

ar S

amue

l S

chla

efli

AVEC

TW

ITTE

R E

T FA

CEB

OO

K C

ON

TRE

LA M

INE

D’O

R

R É S I S T A N C E S© ALEX LUNA

Page 22: Greenpeace Magazine 2014/04

20Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Petit

e de

stat

ure

et b

urin

ée p

ar le

sole

il, le

ven

t et l

a pl

uie,

M

áxim

a A

cuña

de

Cha

upe

a le

rega

rd �

er e

t per

çant

. Av

ec so

n m

ari,

ses q

uatr

e en

fant

s et l

a �a

ncée

d’u

n de

ses

�ls,

cet

te fe

mm

e da

ns la

qua

rant

aine

vit

sur l

e ha

ut

plat

eau

péru

vien

de

Trag

ader

o G

rand

e, d

ans u

ne p

etite

m

aiso

n en

terr

e sa

ns fe

nêtr

es e

t au

toit

en tô

le o

ndul

ée.

La jo

urné

e, M

áxim

a A

cuña

de

Cha

upe

est d

ehor

s,

s’occ

upe

de so

n ch

amp

de p

omm

es d

e te

rre,

surv

eille

son

trou

peau

de

mou

tons

et t

rait

ses v

ache

s. S

itué

à 40

00 m

è -

tres

d’a

ltitu

de, l

e pl

atea

u es

t bor

dé p

ar le

s dou

ces c

ollin

es

herb

euse

s de

Jalc

a, d

ans l

es A

ndes

pér

uvie

nnes

. Il y

a

auss

i un

lac

de m

onta

gne

appe

lé L

agun

a A

zul q

ui fo

urni

t pa

rfoi

s un

pois

son

à m

ange

r et l

’eau

pou

r boi

re, c

uisi

ner e

t la

ver l

e lin

ge. C

’est

une

vie

mod

este

, mai

s Máx

ima

ne

voud

rait

pas v

ivre

aut

rem

ent.

Cui

vre,

arg

ent,

mol

ybdè

ne, o

r Le

pla

teau

de

Trag

ader

o G

rand

e fa

it pa

rtie

de

la ré

gion

de

Caj

amar

ca, d

ans l

e no

rd d

u Pé

rou,

prè

s de

la fr

ontiè

re

équa

tori

enne

. Les

trei

ze p

rovi

nces

de

la ré

gion

com

p -te

nt p

arm

i les

plu

s pau

vres

de

pays

. Plu

s de

la m

oitié

de

la

popu

latio

n, so

uven

t des

fam

illes

pay

sann

es, v

it en

de

ssou

s du

seui

l de

pauv

reté

. Pou

rtan

t le

sol e

st ri

che

en

cuiv

re, a

rgen

t, m

olyb

dène

et o

r. C

’est

en

1993

, peu

ap

rès l

a lib

éral

isat

ion

de l’

écon

omie

pér

uvie

nne

aux

con d

i- tio

ns �

xées

par

le F

onds

mon

étai

re in

tern

atio

nal

et la

Ban

que

mon

dial

e qu

e l’e

ntre

pris

e Ya

naco

cha

ouvr

e sa

pre

miè

re m

ine

dans

le C

ajam

arca

. Ce

cong

lom

érat

m

inie

r est

dét

enu

par l

’ent

repr

ise

New

mon

t (51

,35%

), ba

sée

aux

État

s-U

nis,

par

la so

ciét

é m

iniè

re p

éruv

ienn

e Bu

enav

entu

ra (4

3,65

%) e

t par

la B

anqu

e m

ondi

ale

(5%

). Le

s mei

lleur

es a

nnée

s de

prod

uctio

n, Y

anac

ocha

pr

odui

t plu

s de

100

tonn

es d

’or s

ur c

e si

te. U

n vo

lum

e qu

i est

tom

bé à

40

tonn

es e

n 20

11. A

près

plu

s de

ving

t ans

d’

extr

actio

n au

x ex

plos

ifs e

t pel

lete

uses

, le

rend

emen

t es

t auj

ourd

’hui

en

dim

inut

ion,

et l

e pr

ix d

e l’o

r s’e

st

e�on

dré

en 20

12.

Pour

mai

nten

ir le

s bén

é�ce

s, il

faut

don

c au

gmen

ter

l’e�

caci

té d

e l’e

xtra

ctio

n de

l’or

. À 23

km

au

nord

-est

de

la m

ine

exis

tant

e, u

ne d

euxi

ème

min

e, a

ppel

ée C

onga

, es

t dés

orm

ais p

révu

e. N

ewm

ont p

rom

et d

’eng

ager

70

00 tr

avai

lleur

s pou

r la

cons

truc

tion

et 16

00 p

our

l’exp

loita

tion

du si

te. D

es e

mpl

ois d

ont l

a ré

gion

aur

ait v

rai -

men

t bes

oin,

dit

la so

ciét

é m

iniè

re. L

es in

vest

isse

-m

ents

pré

vus s

e m

onte

nt à

4,8

mill

iard

s de

dolla

rs p

our

31 k

m2 d

e te

rre,

env

iron

la su

rfac

e du

cant

on d

e Bâ

le-

Vill

e. D

eux

énor

mes

foss

es –

de 19

00 m

ètre

s de

larg

eur e

t de

600

mèt

res d

e pr

ofon

deur

pou

r la

plus

gra

nde

– se

raie

nt cr

eusé

es p

our a

ccéd

er a

ux g

isem

ents

. Cha

que

jour

, 18

4 00

0 to

nnes

de

min

erai

ext

raite

s par

des

pel

lete

uses

ante

s ser

aien

t bro

yées

dan

s des

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tiers

et r

édui

tes à

l’é

tat d

e sa

ble

�n, p

our e

nsui

te ê

tre

lavé

es a

vec u

ne so

lutio

n de

cya

nure

de

sodi

um tr

ès to

xiqu

e. L

es p

hoto

s de

la

min

e à

ciel

ouv

ert d

e C

ajam

arca

tém

oign

ent d

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dis

pari-

tion

de m

onta

gnes

ent

ière

s et d

u ch

ambo

ulem

ent

du p

aysa

ge. I

l en

résu

lte u

ne v

aste

zone

dés

ertiq

ue m

ême

visi

ble

sur p

hoto

sate

llite

. La

nouv

elle

min

e d’

or d

e C

onga

dév

orer

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e do

uble

de

surf

ace

et se

rait

la p

lus v

aste

d’

Am

ériq

ue la

tine.

La

petit

e m

aiso

n de

Máx

ima

Acu

ña

de C

haup

e se

trou

ve a

u be

au m

ilieu

de

la zo

ne co

nvoi

tée.

Cou

ps d

e pi

ed d

es a

utor

ités

Dep

uis q

ue le

gou

vern

emen

t pér

uvie

n a

caut

ionn

é sa

ns

cille

r l’é

tude

d’im

pact

env

ironn

emen

tal e

n oc

tobr

e 20

10,

le p

roje

t de

min

e bo

ulev

erse

la v

ie su

r le

plat

eau

de

Trag

ader

o G

rand

e. E

n m

ai 20

11, d

es fo

rces

priv

ées

de sé

curit

é et

des

pol

icie

rs d

e la

div

isio

n na

tiona

le d

es o

pé -

ratio

ns sp

écia

les d

étru

isen

t l’h

abita

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de M

áxim

a Ac

uña

de C

haup

e so

us le

s yeu

x de

s ing

énie

urs d

e Ya

naco

-ch

a. M

ais M

áxim

a re

fuse

de

quitt

er le

s lie

ux, p

asse

sorm

ais l

a nu

it de

hors

et r

econ

stru

it un

e hu

tte, a

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’aid

e de

que

lque

s am

is. A

u m

ois d

’aoû

t, le

s uni

tés s

péci

ales

et

les f

orce

s de

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rité

réap

para

isse

nt p

our b

ruta

liser

M

áxim

a, so

n �l

s Dan

iel e

t sa

�lle

Gild

a, q

ui p

erd

conn

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Pho

to

Rési

stan

ce a

ctiv

e: le

s ha

bita

nts

Rés

ista

nce

activ

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s ha

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nts

détr

uise

nt le

mur

d’u

n de

s qu

atre

serv

oirs

con

stru

its p

ar le

gra

nd

grou

pe N

ewm

ont p

our y

dév

ier l

’eau

pr

oven

ant d

u la

c de

Per

ol.

CO

NTE

XTE

Page 23: Greenpeace Magazine 2014/04

21Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014P

hoto

© ENRIQUE CASTRO-MENDIVIL

Page 24: Greenpeace Magazine 2014/04

22Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

CO

NTE

XTE

© ENRIQUE CASTRO-MENDIVIL

Page 25: Greenpeace Magazine 2014/04

23

OR

ÉQ

UIT

AB

LE G

CE

AU

CO

MM

ERC

E É

QU

ITA

BLE

? D

e 8

5 à

90%

de

l’or n

égoc

ié à

l’éc

helle

mon

dial

e so

nt e

x -tr

aits

par

de

gran

ds c

onso

rtiu

ms

min

iers

, occ

upan

t se

ulem

ent 1

0%

des

sal

arié

s de

s m

ines

d’o

r à c

iel o

uver

t. Le

re�

e de

s qu

elqu

e 15

mill

ions

d’o

uvri

ers

trav

aille

da

ns d

e pe

tites

min

es o

ù l’e

xtra

�io

n de

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re�

e un

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ail

man

uel.

Les

cond

ition

s de

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ail d

e ce

s ou

vrie

rs d

ans

les

min

es d

’Am

ériq

ue la

tine

ou d

’Afr

ique

son

t gén

éral

emen

t ca

ta�

roph

ique

s. B

eauc

oup

n’on

t pas

l’âg

e de

maj

orité

, le

s ac

cide

nts

sont

fréq

uent

s et

les

sala

ires

insu

�sa

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pour

m

ener

une

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déc

ente

. L’in

itiat

ive

brita

nniq

ue F

airt

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G

old

and

Prec

ious

Met

als

ente

nd in

terv

enir

en

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issa

nt

des

norm

es é

quita

bles

. Le

trav

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es e

nfan

ts d

oit ê

tre

bann

i et

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orga

nisa

tions

syn

dica

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renf

orcé

es. L

e la

bel

Fair

Trad

e, q

ue l’

on c

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ît po

ur le

s ba

nane

s ou

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afé,

doi

t ga

rant

ir a

ux tr

avai

lleur

s un

pri

x m

inim

al p

our l

eur p

ro-

du�

ion.

Et l

’ach

eteu

r s’a

cqui

�e

d’un

sup

plém

ent d

’env

iron

190

0 fr

ancs

par

kilo

d’o

r, qu

i ser

a a�

e�é

à de

s pr

ojet

s de

dév

elop

pem

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ocia

l, éc

olog

ique

ou

écon

omiq

ue e

n fa

veur

des

com

mun

auté

s. M

ais

l’or é

quita

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n’e�

pa

s né

cess

aire

men

t un

or é

colo

giqu

e. C

omm

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s gr

ande

s co

mpa

gnie

s m

iniè

res,

les

petit

es m

ines

util

isen

t du

mer

cure

ou

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yanu

re p

our i

sole

r l’o

r du

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erai

. Le

s no

rmes

Fai

r Tra

de s

e bo

rnen

t à d

eman

der q

ue le

s su

bs -

tanc

es c

him

ique

s so

ient

rédu

ites

au m

inim

um e

t que

le

s dé

chet

s so

ient

cor

re�

emen

t élim

inés

. À l’

heur

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-tu

elle

, seu

les

deux

pet

ites

min

es o

nt re

çu le

labe

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r Tr

ade,

tout

es d

eux

au P

érou

. Une

min

e d’

Afr

ique

de

l’E�

de

vrai

t s’y

ajo

uter

en

2015

.

Pho

to

Posi

tions

inég

ales

: un

pays

an

Po

sitio

ns in

égal

es: u

n pa

ysan

au

toch

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s’a

dres

se à

un

polic

ier

lors

d’u

ne m

arch

e de

pro

test

atio

n co

ntre

le p

roje

t de

la m

ine

de C

onga

qu

i se

chiff

re à

35

mill

iard

s de

dol

lars

.

sanc

e su

ite à

un

coup

de

cros

se d

e fu

sil s

ur la

tête

. Le

s que

lque

s bie

ns m

atér

iels

sont

con�

squé

s et l

a fa

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e es

t cha

ssée

. Mai

s Máx

ima

ne lâ

che

pas p

rise

et ré

in -

tègr

e le

s lie

ux. D

epui

s, le

har

cèle

men

t est

cont

inu:

surv

eil-

lanc

e vi

déo,

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aces

de

mor

t par

télé

phon

e, co

ntrô

le

des p

erso

nnes

qui

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nnen

t en

visi

te.

La so

ciét

é Ya

naco

cha

peut

com

pter

sur l

e so

utie

n in

dé -

fect

ible

des

aut

orité

s qua

nd il

s’ag

it de

chas

ser d

es fa

mill

es

pays

anne

s ou

de ré

prim

er le

s pro

test

atio

ns. E

n 20

13,

des r

eche

rche

s dév

oila

ient

que

la p

olic

e na

tiona

le p

éru-

vien

ne a

vait

conc

lu a

u m

oins

trei

ze co

ntra

ts lu

crat

ifs

avec

des

soci

étés

d’e

xtra

ctio

n de

mat

ière

s pre

miè

res,

don

t Ya

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cha.

Les

min

es so

nt su

rvei

llées

en

perm

a -ne

nce

et le

s exp

loita

nts p

euve

nt d

eman

der d

es u

nité

s de

polic

e lo

rsqu

’ils c

raig

nent

les p

rote

stat

ions

. La

polic

e se

m

et d

onc

au se

rvic

e de

s mul

tinat

iona

les p

our r

épri -

mer

sa p

ropr

e po

pula

tion.

Pou

r le

gouv

erne

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t, l’e

ssen

tiel

est q

ue le

s inv

estis

seur

s int

erna

tiona

ux re

sten

t pré

sent

s au

Péro

u et

con

tinue

nt d

e co

nstr

uire

des

min

es. E

n e�

et,

l’ext

ract

ion

de l’

or a

limen

te le

s �na

nces

du

pays

et s

timul

e l’é

cono

mie

qui

con

naît

ces c

inq

dern

ière

s ann

ées u

ne

croi

ssan

ce m

oyen

ne d

e 5,6

% p

ar a

nnée

. La

petit

e pa

ysan

ne

têtu

e du

Tra

gade

ro G

ran d

e dé

rang

e do

nc à

la fo

is le

go

uver

nem

ent d

e Li

ma

et le

s pro

mot

eurs

du

proj

et C

onga

.

Sym

bole

de

la ré

si�

ance

mon

dial

isée

M

áxim

a A

cuña

de

Cha

upe

est d

even

ue u

n vé

ritab

le

sym

bole

, tan

t pou

r les

pet

its p

aysa

ns d

e C

ajam

arca

qu

i cra

igne

nt la

per

te d

e le

urs t

erre

s que

pou

r un

rése

au

glob

al d

e m

ilita

nts e

n fa

veur

de

l’env

ironn

emen

t et

des

dro

its h

umai

ns. L

’ém

erge

nce

de ce

tte �

gure

sym

bo-

lique

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aus

si d

ue à

un

clic

hé p

ris p

ar le

pho

togr

aphe

ruvi

en A

lexa

nder

Lun

a en

déc

embr

e 20

12. L

a ph

oto

repr

ésen

te M

áxim

a de

bout

sur s

es te

rres

, le

poin

g le

vé, l

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urire

aux

lèvr

es, s

ûre

de sa

vic

toire

. Le

phot

ogra

phe

s’éta

it re

ndu

à C

ajam

arca

pou

r tém

oign

er d

u m

ouve

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t de

pro

test

atio

n co

ntre

le p

roje

t de

min

e de

Con

ga.

R É S I S T A N C E S

Page 26: Greenpeace Magazine 2014/04

24

CO

NTE

XTE

Sol

idar

ité ré

gion

ale

et m

ondi

ale

au te

mps

du

Web

2.0

1

25

43

Page 27: Greenpeace Magazine 2014/04

25R É S I S T A N C E S

A

CTE

UR

S:

1 C

itoye

n di

rect

emen

t con

cern

é:

Máx

ima

Acu

ña

2 O

NG

et a

ssoc

iatio

ns m

ilita

ntes

loca

les:

G

rufid

es

3 O

NG

nat

iona

les

lutt

ant p

our l

es d

roits

hum

ains

et

l’e

nviro

nnem

ent:

C

ordi

nado

ra N

atio

nal d

e D

erec

hos

Hum

anos

4

Mili

tant

s et

initi

ativ

es in

tern

atio

nale

s in

dépe

ndan

tes:

G

uard

iane

s de

l Agu

a

5 O

NG

inte

rnat

iona

les:

S

auvo

ns la

forê

t, A

mne

sty

inte

rnat

iona

l

IN

STR

UM

ENTS

• R

ésis

tanc

e ph

ysiq

ue, b

loca

ges

de ro

utes

, grè

ves

• M

ise

en ré

seau

sur

Fac

eboo

k, T

witt

er, b

logs

• Im

ages

et r

écits

sou

s fo

rme

de d

ocum

enta

ires,

pho

tos,

con

trib

utio

ns Y

ouTu

be, r

epor

tage

s

Pétit

ions

inte

rnat

iona

les,

info

rmat

ion

aux

méd

ias

inte

rnat

iona

ux

• In

form

atio

n au

x m

édia

s na

tiona

ux, i

nter

pella

tion

du g

ouve

rnem

ent

Page 28: Greenpeace Magazine 2014/04

Que

lque

s moi

s aup

arav

ant,

la p

olic

e av

ait a

batt

u ci

nq

man

ifest

ants

. Ces

ar M

edin

a A

guila

r, 16

ans

, ava

it ét

é tu

é pa

r une

bal

le ti

rée

d’un

hél

icop

tère

de

polic

e qu

i to

urno

yait

au-d

essu

s du

rass

embl

emen

t. Il

n’y

a pa

s eu

d’e

nquê

te. L

e pr

ésid

ent O

llant

a H

umal

a a

décl

aré

l’éta

t d’

urge

nce

pour

troi

s pro

vinc

es e

t don

c su

spen

du le

dr

oit d

e ré

unio

n. L

es p

aysa

ns p

arle

nt d

’une

gue

rre

du g

ou -

vern

emen

t con

tre

son

prop

re p

eupl

e, a

u pr

o�t d

’une

m

ultin

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nale

.La

pho

to a

été

lanc

ée d

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e ca

dre

d’un

e ca

mpa

gne

qui a

abo

uti à

l’él

ectio

n de

Máx

ima

«fem

me

de

l’ann

ée 20

12».

La

di�u

sion

de

l’im

age

sur F

aceb

ook,

Tw

it -te

r et d

es b

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a re

ncon

tré

un é

norm

e su

ccès

et

les p

hoto

s d’A

lexa

nder

Lun

a so

nt a

ujou

rd’h

ui v

isib

les s

ur

des d

ouza

ines

de

blog

s et d

e si

tes d

e ca

mpa

gnes

d’

ON

G in

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nale

s. L

a Re

publ

ica,

l’un

des

rare

s jo

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ux p

oliti

quem

ent e

t éco

nom

ique

men

t ind

épen

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s au

Pér

ou, e

nvoi

e se

s jou

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iste

s en

repo

rtag

e et

pub

lie

un a

rtic

le d

e de

ux p

ages

sur M

áxim

a A

cuña

de

Cha

upe.

C

elle

-ci e

st a

lors

invi

tée

à la

télé

visi

on e

t en

tour

née

inte

rnat

iona

le ju

squ’

en A

llem

agne

et e

n Su

isse

. Sa

page

Fa

cebo

ok c

ompt

e pl

us d

e 15

00 a

mis

, bie

n qu

’elle

ne

sach

e ni

lire

ni é

crire

, qu’

elle

n’a

it pa

s la

télé

visi

on e

t n’a

it en

core

jam

ais t

ouch

é un

ord

i nat

eur.

Son

site

est

gér

é pa

r de

jeun

es m

ilita

nts b

ien

form

és, p

arm

i eux

le p

hoto

grap

he

Ale

xand

er L

una.

Ils s

aven

t util

iser

Inte

rnet

pou

r sen

si-

bilis

er le

gra

nd p

ublic

à la

lutt

e de

s cam

pesin

os.

Entr

e-te

mps

, Ale

xand

er L

una

a la

ncé

son

proj

et d

e do

cum

enta

ire G

uard

iane

s del

Agua

(Gar

dien

s de

l’eau

), qu

i do

it re

trac

er l’

hist

oire

de

Máx

ima

Acu

ña d

e C

haup

e et

de

Caj

amar

ca. L

a re

cher

che

de fo

nds p

our l

e m

onta

ge e

t la

pos

tpro

duct

ion

de l’

énor

me

quan

tité

de m

atér

iel s

e fa

it pa

r une

cam

pagn

e de

�na

ncem

ent c

omm

unau

taire

(c

row

dfun

ding

) sur

Inte

rnet

. Le

�lm

dev

rait

sort

ir e

n 20

15

et le

s pre

miè

res s

éque

nces

sont

déj

à vi

sibl

es su

r Vim

eo.

Sur l

eurs

blo

gs e

t leu

rs si

tes I

nter

net,

les i

nitia

teur

s se

sont

as

suré

le so

utie

n de

l’or

gani

satio

n de

fem

mes

Uni

on

L’O

R P

ÉRU

VIE

N E

T LA

SU

ISS

E L

a S

uiss

e jo

ue

un rô

le c

lé d

ans

le n

égoc

e et

la tr

ansf

orm

atio

n de

l’or

. La

Déc

lara

tion

de B

erne

e�

im

e qu

e l’o

r rep

rése

ntai

t 9

9%

des

impo

rtat

ions

su

isse

s en

pro

vena

nce

des

And

es ju

squ’

à ce

s de

rniè

res

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es. Q

uatr

e de

s pl

us

impo

rtan

tes

ra�

neri

es d

’or

au m

onde

se

trou

vent

en

Sui

sse.

Leu

r cap

acité

cu

mu l

ée d

’a�

nage

de

l’or

e�

d’en

viro

n 21

00

tonn

es

par a

nnée

, ce

qui r

e-pr

ésen

te p

rès

de 5

0%

de

l’or n

égoc

ié à

l’éc

helle

m

ondi

ale.

Les

ra�

neri

es

tran

sfor

men

t l’o

r des

min

es

et fo

nden

t du

viei

l or p

our

la re

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e. L

a so

ciét

é N

ew-

mon

t, d

u C

olor

ado,

qui

po

ssèd

e la

maj

orité

des

pa

rts

de Y

anac

ocha

au

Pé-

rou,

e�

aus

si p

ropr

iéta

ire

de la

ra�

neri

e te

ssin

oise

Va

lcam

bi. D

’apr

ès la

Soc

iété

po

ur le

s pe

uple

s m

enac

és,

Valc

ambi

a a

� né

146

tonn

es

d’or

pou

r New

mon

t en

2011

, do

nt a

u m

oins

10 to

nnes

en

prov

enan

ce d

e Ya

naco

cha.

S

elon

la m

ême

sour

ce,

la S

uiss

e a

impo

rté

envi

ron

190

tonn

es d

’or p

éruv

ien

en 2

011

, don

t 55

tonn

es d

e P

hoto

Une

fem

me

boit

l’eau

du

lac

de P

erol

, dan

s le

s A

ndes

, qui

est

men

acé

Une

fem

me

boit

l’eau

du

lac

de P

erol

, dan

s le

s A

ndes

, qui

est

men

acé

par u

n pr

ojet

de

gran

de e

nver

gure

de

la s

ocié

té a

urifè

re N

ewm

ont.

CO

NTE

XTE

© ENRIQUE CASTRO-MENDIVIL

Page 29: Greenpeace Magazine 2014/04

Latin

oam

eric

a de

Muj

eres

. L’h

isto

ire d

e M

áxim

a et

de

sa

lutte

en

fave

ur d

’un

espa

ce d

e vi

e m

enac

é es

t dés

or -

mai

s acc

essi

ble

au m

onde

ent

ier.

Sont

aus

si d

évoi

lés l

es

proj

ets d

e Ya

naco

cha

pour

ass

éche

r qua

tre

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sur l

e pl

atea

u de

Tra

gade

ro G

rand

e, e

xtra

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e l’o

r de

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des

fo

sses

et r

empl

ir le

s deu

x au

tres

de

débl

ais.

En

guis

e fo

sses

et r

empl

ir le

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x au

tres

de

débl

ais.

En

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e de

com

pens

atio

n, la

soci

été

prév

oit d

e cr

éer d

eux

lacs

art

i -de

com

pens

atio

n, la

soci

été

prév

oit d

e cr

éer d

eux

lacs

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i -�c

iels

à l’

exté

rieur

du

site

de

la m

ine.

Des

spéc

ialis

tes

inte

rnat

iona

ux e

stim

ent q

ue l’

étud

e d’

impa

ct e

nviro

n-ne

men

tal f

ourn

ie e

st u

n do

cum

ent p

urem

ent p

rom

otio

nnel

. Le

pro

jet c

once

rner

ait p

lus d

e 60

0 so

urce

s et c

ours

d’

eau,

car l

’exp

loita

tion

dévo

rera

it de

s mas

ses d

’eau

cons

i -dé

rabl

es: i

l fau

t env

iron

260

000

tonn

es d

’eau

pou

r la

ver u

ne to

nne

d’or

bru

t. Ya

naco

cha

estim

e la

con

som

ma-

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d’ea

u de

Con

ga à

deu

x m

illia

rds d

e lit

res p

ar

anné

e. L

es h

abita

nts d

e C

ajam

arca

redo

uten

t la

dest

ruct

ion

de l’

ense

mbl

e du

syst

ème

hydr

olog

ique

du

haut

pla

teau

. La

napp

e ph

réat

ique

pou

rrai

t s’a

bais

ser e

t ass

éche

r les

so

urce

s néc

essa

ires a

ux 20

000

pay

sans

des

env

irons

. Les

fa

mill

es p

aysa

nnes

pro

test

ent e

n ra

ppel

ant:

«L’o

r ne

se b

oit p

as!»

Elle

s cra

igne

nt a

ussi

les d

éche

ts to

xiqu

es. L

’eau

po

tabl

e de

la v

ille

de C

ajam

arca

est

d’o

res e

t déj

à po

lluée

par

du

chlo

rure

, du

cyan

ure

et d

es m

étau

x lo

urds

pr

oven

ant d

e la

min

e ex

ista

nte.

La

rési

stan

ce d

e M

áxim

a es

t don

c bi

en p

lus q

u’un

e lu

tte

pour

pré

serv

er u

n pe

tit co

in d

e te

rre

idyl

lique

. Il s

’agi

t de

sauv

er l’

eau

pota

ble

de C

ajam

arca

.

Tis

ser d

es ré

seau

x en

tre

mili

tant

s La

cons

titut

ion

d’un

rése

au m

ondi

al a

u m

oyen

d’In

ter-

net e

t des

méd

ias s

ocia

ux p

ro�t

e ég

alem

ent a

ux

mili

tant

s loc

aux

à C

ajam

arca

. Le

plus

con

nu d

’ent

re e

ux,

le p

rêtr

e M

arco

Ara

na, p

rêch

e la

rési

stan

ce n

on

viol

ente

. En

2009

, Tim

e Mag

azin

e cél

ébra

it en

lui u

n «H

ero

of th

e En

viro

nmen

t». D

epui

s plu

s de

dix

ans –

bie

n av

ant

la v

ague

de

solid

arité

mon

dial

e au

tour

de

Máx

ima

– so

n as

soci

atio

n G

ru�d

es ré

unis

sant

une

dou

zain

e de

mili

-

tant

s lut

te p

our l

a pr

otec

tion

de l’

envi

ronn

emen

t et

la ju

stic

e so

cial

e à

Caj

amar

ca. L

e 4

juill

et 20

12, u

n m

ois

aprè

s le

débu

t d’u

ne g

rève

qu’

il av

ait l

ancé

e av

ec

d’au

tres

pol

itici

ens e

t mili

tant

s de

la p

rovi

nce,

Mar

co A

rana

es

t arr

êté

par l

a po

lice

lors

d’u

ne m

anife

stat

ion

paci

�que

et

bat

tu p

enda

nt so

n tr

ansf

ert v

ers l

a pr

ison

. Il p

ar -

vien

t à d

onne

r l’a

lert

e su

r Tw

itter

: «Ils

m’o

nt a

rrêt

é et

bat

tu. A

u st

ade,

j’ai

à n

ouve

au re

çu d

es c

oups

sur l

e vi

-sa

ge, l

es re

ins,

et d

es in

jure

s.»

Sur I

nter

net,

l’ind

igna

-tio

n fu

se. L

’arr

esta

tion

arbi

trai

re �

lmée

par

un

port

able

est

po

stée

sur Y

ouTu

be. L

es im

ages

sont

di�

usée

s sur

les

méd

ias s

ocia

ux p

ar d

es o

rgan

isat

ions

de

défe

nse

de d

roits

hu

mai

ns e

t des

mili

tant

s; le

bur

eau

du p

rési

dent

ruvi

en e

st in

terp

ellé

par

télé

phon

e. L

a C

oord

inad

ora

Nac

iona

l de

Der

echo

s Hum

anos

(CN

DD

HH

) dép

ê -ch

e im

méd

iate

men

t un

avoc

at à

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amar

ca. T

reiz

e he

ures

ap

rès s

on a

rres

tatio

n, M

arco

Ara

na e

st li

béré

et p

eut

se fa

ire so

igne

r à l’

hôpi

tal.

La to

ile e

st d

even

ue u

ne v

itrin

e m

ondi

ale

pour

dén

once

r le

s vio

latio

ns d

es d

roits

hum

ains

. Qua

nd le

s lut

tes

loca

les s

’insc

riven

t dan

s un

cont

exte

supr

arég

iona

l ou

mêm

e m

ondi

al, c

’est

un

avan

tage

indé

niab

le p

our l

es

mili

tant

s. L

ynda

Sul

livan

sait

s’y

pren

dre

pour

don

-ne

r une

vis

ibili

té m

ondi

ale

aux

lutt

es. C

ette

Irla

ndai

se d

e 32

ans

vit

depu

is d

eux

ans à

Cel

endi

n, li

eu d

’impl

an -

tatio

n pr

évu

de la

min

e de

Con

ga. E

lle ti

re p

ro�t

d’In

tern

et

pour

tiss

er d

es li

ens e

ntre

Con

ga e

t d’a

utre

s lut

tes

de la

soci

été

civi

le e

n A

mér

ique

latin

e. R

écem

men

t, el

le a

in

vité

Máx

ima

pour

un

entr

etie

n re

tran

smis

en

dire

ct su

r In

tern

et. D

es m

ilita

nts d

u M

exiq

ue, d

e C

olom

bie

et

d’A

rgen

tine

ont p

u ai

nsi d

ialo

guer

ave

c el

le. L

ynda

Sul

livan

en

tend

reno

uvel

er ce

tte e

xpér

ienc

e à

un ry

thm

e bi

-m

ensu

el, a

vec

di�é

rent

s gro

upes

d’A

mér

ique

latin

e pr

ésen

-ta

nt le

urs l

utte

s. C

e qu

i sem

blai

t aup

arav

ant t

rès d

i�ci

le à

at

tein

dre

devi

ent s

ouda

in co

ncre

t: la

solid

arité

inte

rnat

io-

nale

. Les

fam

illes

pay

sann

es d

e C

ajam

arca

réal

isen

t qu

’elle

s ne

sont

pas

seul

es. D

es m

illio

ns d

e pe

rson

nes à

la m

ine

de Y

anac

ocha

. La

tran

sfor

mat

ion

de l’

or e

donc

larg

emen

t dom

inée

pa

r la

Sui

sse.

L’in

du�

rie

horl

ogèr

e e�

au

ssi l

’un

des

prin

cipa

ux a

chet

eurs

pu

isqu

’elle

con

som

me

plus

de

la m

oitié

de

l’or r

a� n

é.

De

leur

côt

é, le

s m

arch

és

fi nan

cier

s en

abs

orbe

nt

35%

, les

plu

s gr

ands

ach

e-te

urs

sont

Juliu

s B

är,

la B

anqu

e ca

nton

ale

zuri

-ch

oise

, Cre

dit S

uiss

e et

l’U

BS

. L’o

r a�

e� é

à la

pr

odu�

ion

indu

� ri

elle

, no

tam

men

t en

éle�

ron

ique

, ne

repr

ésen

te q

ue 1

1%

de la

pro

du�

ion

mon

dial

e.

Page 30: Greenpeace Magazine 2014/04

28Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

trav

ers l

e m

onde

refu

sent

de

voir

leur

s ter

res d

even

ir le

s dép

otoi

rs d

e la

mon

dial

isat

ion

et n

’acc

epte

nt p

as q

ue

les m

ultin

atio

nale

s agi

ssen

t dan

s les

régi

ons d

u Su

d co

mm

e el

les n

’ose

raie

nt ja

mai

s le

faire

dan

s leu

r pay

s d’

orig

ine.

Ces

per

sonn

es in

terp

elle

nt le

s Éta

ts p

our q

u’ils

fa

ssen

t res

pect

er le

s dro

its d

e le

urs p

opul

atio

ns a

u lie

u de

favo

riser

les b

éné�

ces d

es in

vest

isse

urs é

tran

gers

.lie

u de

favo

riser

les b

éné�

ces d

es in

vest

isse

urs é

tran

gers

.

L’o

ptim

ism

e m

algr

é la

répr

essi

on

Mai

s que

lle e

st l’

e�ca

cité

des

mob

ilisa

tions

par

In

tern

et, d

e la

tran

spar

ence

et d

e la

solid

arité

? Le

creu

se-

men

t de

la m

ine

de C

onga

pou

rrai

t bie

n co

mm

ence

r à la

�n

de ce

tte a

nnée

ou

au d

ébut

de

l’ann

ée p

roch

aine

. Et

ce n

’est

pas

�ni

: tou

te u

ne sé

rie d

e pr

ojet

s min

iers

sont

pr

évus

au

Péro

u. L

a C

hine

veu

t inv

estir

2,5 m

illia

rds

de d

olla

rs d

ans l

e pr

ojet

El G

alen

o po

ur l’

expl

oita

tion

de l’

or

et d

u cu

ivre

. En

2011

, le

gouv

erne

men

t acc

orda

it tr

ois

fois

plu

s de

conc

essi

ons m

iniè

res q

ue d

ix a

ns a

upar

avan

t. Pa

rallè

lem

ent,

les c

ompé

tenc

es d

e l’a

utor

ité e

nvi-

ronn

emen

tale

ont

été

cons

idér

able

men

t réd

uite

s. L

e dé

lai

impa

rti p

our s

e pr

onon

cer s

ur le

s étu

des d

’impa

ct

envi

ronn

emen

tal n

’est

plu

s que

de

45 jo

urs,

alo

rs q

ue p

our

Con

ga ce

doc

umen

t com

ptai

t plu

s de

9000

pag

es.

Et la

répr

essi

on a

ugm

ente

. En

août

2014

, Máx

ima

Acu

ña

de C

haup

e a

été

cond

amné

e à

32 m

ois d

e pr

ison

et

au

paie

men

t d’u

ne a

men

de d

e 19

40 d

olla

rs à

la so

ciét

é Ya

naco

cha,

une

som

me

qui r

epré

sent

e un

e fo

rtun

e po

ur la

pay

sann

e. S

on a

voca

te M

irth

a Va

sque

z, d

e l’a

sso-

ciat

ion

Gru

�des

, a fa

it ap

pel d

e ce

juge

men

t, ce

qui

pe

rmet

à la

fam

ille

de M

áxim

a de

rest

er su

r le

plat

eau

de

Trag

ader

o G

rand

e ju

squ’

à l’e

xécu

tion

de la

sent

ence

.M

ais l

es m

ilita

nts d

e C

onga

ne

dése

spèr

ent p

as: «

Il y

a vi

ngt a

ns, a

ucun

d’e

ntre

nou

s n’a

urai

t app

ris le

des

tin

d’un

e pa

ysan

ne p

auvr

e du

Tra

gade

ro G

rand

e», d

it G

uada

-lu

pe R

odrig

uez.

Dep

uis l

’Esp

agne

, elle

gèr

e la

cam

pagn

e de

Máx

ima

pour

l’O

NG

Sau

vons

la fo

rêt.

Plus

de

82 0

00

pers

onne

s ont

déj

à si

gné

la p

étiti

on e

n lig

ne d

eman

dant

au

gouv

erne

men

t pér

uvie

n de

retir

er le

pro

jet d

e C

onga

et

de

clas

ser l

a pl

aint

e dé

posé

e co

ntre

Máx

ima.

Sur

You

-Tu

be, p

lus d

’une

cent

aine

de

vidé

os co

ncer

nent

cette

a�

aire

. Cat

herin

e G

rèze

, coo

rdin

atric

e de

la co

mm

issi

on d

u dé

velo

ppem

ent d

u Pa

rlem

ent e

urop

éen,

s’es

t adr

essé

e au

pré

side

nt H

umal

a l’a

n de

rnie

r pou

r lui

dem

ande

r de

met

tre

�n a

u pr

ojet

. Et l

es in

form

atio

ns d

e l’a

genc

e Re

uter

s au

x in

vest

isse

urs m

entio

nnen

t auj

ourd

’hui

que

les

plac

emen

ts �

nanc

iers

dan

s les

soci

étés

min

ière

s act

ives

au

Péro

u de

vien

nent

peu

sûrs

en

rais

on d

es so

ulèv

emen

ts

loca

ux e

t des

reta

rds d

es p

roje

ts. G

uada

lupe

Rod

rigue

z se

mon

tre

conv

ainc

ue: «

Si n

ous n

’avi

ons p

as co

mm

encé

, il

y a

quat

re a

ns, à

nou

s mob

ilise

r con

tre

ce p

roje

t de

Con

ga,

le T

raga

dero

Gra

nde

sera

it dé

jà tr

ansf

orm

é en

une

imm

ense

fo

sse.

»

CO

MP

LÉM

EN

T P

ER

SO

NN

EL

DU

PH

OTO

GR

AP

HE

A

LEX

AN

DE

R L

UN

A:«

Mêm

e si

Máx

ima

re�

ire le

cou

rage

et

la jo

ie s

ur le

s ph

otos

et d

ans

les

renc

ontr

es p

erso

nnel

les,

la

situ

atio

n qu

’elle

vit

depu

is d

es a

nnée

s e�

nibl

e po

ur e

lle. S

on te

mpé

ram

ent g

ai s

’en

ress

ent.

Elle

e�

par

fois

tir

aillé

e en

tre

la p

eur d

e l’a

veni

r et l

’opt

imis

me.

La fo

rce

de c

ontin

uer,

elle

la p

uise

dan

s so

n se

ns d

e la

ju

� ic

e, s

a fa

mill

e et

le s

outie

n de

ses

am

is e

t des

mili

tant

s.»

CO

NTE

XTE

Page 31: Greenpeace Magazine 2014/04

29

Un

jour

, alo

rs q

u’el

le é

tait

char

gée

de d

éfen

dre

un o

uvrie

rgr

iève

men

t ble

ssé

lors

d’u

n ac

cide

nt d

u tr

avai

l, l’a

voca

te

écos

sais

e Po

lly H

iggi

ns re

gard

e di

stra

item

ent p

ar la

fenê

tre

les

arbr

es d

evan

t le

bâtim

ent.

Elle

com

pren

d so

udai

n qu

e la

Te

rre

peut

elle

aus

si ê

tre

bles

sée

lors

d’u

n ac

cide

nt. M

ais

qui e

st lé

gale

men

t res

pon-

sabl

e de

s gr

ande

s ca

tas-

trop

hes

envi

ronn

emen

tale

s?

Que

lles

lois

pou

r pro

tége

r la

nat

ure?

Ce

jour

-là,

Pol

ly

Hig

gins

déc

ou vr

e sa

mis

sion

. Pr

opos

recu

eilli

s pa

r Han

nes

Gra

sseg

ger

UN

E LO

I SU

R

L’ÉC

OC

IDE

: «P

LUS

DE

POU

VOIR

PO

UR

LE

S

MIL

ITA

NTS

»ENTR

ETIE

N

R É S I S T A N C E S

Page 32: Greenpeace Magazine 2014/04

30Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Cet

te id

ée d

ate

en fa

it de

1972

. Dès

la p

rem

ière

gra

nde

conf

éren

ce in

tern

atio

nale

sur l

’env

ironn

emen

t, O

lof P

alm

e, le

pre

mie

r min

istr

e su

édoi

s de

l’épo

que,

pro

po -

sait

de fa

ire d

e la

dég

rada

tion

de l’

envi

ronn

emen

t un

crim

e au

sens

du

droi

t int

erna

tiona

l. Bi

en q

ue so

n id

ée

ait r

eçu

un la

rge

sout

ien,

not

amm

ent d

e la

par

t d’I

ndira

G

andh

i et m

ême

de la

Chi

ne, l

a dé

mar

che

n’a

pas

abou

ti.Vo

us re

me�

ez

aujo

urd’

hui c

e� e

pro

posi

tion

sur l

e de

vant

de

la s

cène

par

ce q

ue v

ous

pens

ez q

ue c

’e�

le b

on

mom

ent.

D’o

ù vi

ent c

et o

ptim

ism

e?Au

niv

eau

hum

ain,

nou

s som

mes

en

trai

n de

reco

nnaî

tre

que

notr

e un

iver

s est

régi

par

des

inte

ract

ions

ent

re

tout

es se

s com

posa

ntes

, un

cons

tat d

e pl

us e

n pl

us é

tayé

sc

ient

i� qu

emen

t. N

os a

ctes

in� u

ent s

ur a

utru

i, no

n se

ulem

ent s

ur le

s êtr

es h

umai

ns, m

ais a

ussi

sur l

a pl

anèt

e to

ut e

ntiè

re. T

out e

st in

terc

onne

cté.

La

mor

t des

ab

eille

s a u

n im

pact

sur l

’êtr

e hu

mai

n, m

ais e

ndom

mag

e au

ssi l

es é

cosy

stèm

es. L

a lo

i doi

t en�

n te

nir c

ompt

e de

cette

dim

ensi

on h

olis

tique

.Q

uelle

e�

vot

re �

rat

égie

pou

r me�

re

l’éco

cide

à l’

ordr

e du

jo

ur d

es n

égoc

iatio

ns?

Je re

nds a

cces

sibl

es to

us m

es tr

avau

x. T

oute

s mes

pu

blic

atio

ns se

font

sous

lice

nce

Cre

ativ

e C

omm

ons,

sans

dr

oits

d’a

uteu

r, et

sont

ouv

erte

s et u

tilis

able

s par

tous

. Je

met

s l’a

ccen

t sur

la tr

ansp

aren

ce. U

ne lo

i de

1996

pré

-vo

yait

par e

xem

ple

de fa

ire d

e l’é

coci

de u

n cr

ime

du d

roit

inte

rnat

iona

l. M

ais à

la d

erni

ère

min

ute,

les É

tats

- U

nis,

la G

rand

e-Br

etag

ne, l

a Fr

ance

et l

a H

olla

nde

ont o

rgan

isé

une

oppo

sitio

n se

crèt

e à

cett

e lo

i, qu

i a é

aban

donn

ée. P

erso

nne

ne le

sava

it. C

’est

là q

ue je

ve

ux in

terv

enir

: inf

orm

er le

s gen

s. L

a ré

surg

ence

du

co

n cep

t d’é

coci

de in

diqu

e qu

e le

tem

ps e

st p

roba

blem

ent

venu

d’e

n fa

ire u

ne d

ispo

sitio

n co

ntra

igna

nte.

La

seul

e

ques

tion

est d

e sa

voir

qua

nd c

ela

se fe

ra.

Qui

sou

tient

vot

re d

émar

che?

Les b

oudd

hist

es, p

ar e

xem

ple;

ce so

nt p

rès d

e 70

0 m

illio

ns

Gre

enpe

ace:

Mad

ame

Hig

gins

, on

dit q

ue v

ous

lu�

ez p

our

une

re�

onsa

bilit

é pé

nale

en

cas

d’éc

ocid

e. M

ais

qu’e

� -c

e qu

’un

écoc

ide?

Polly

Hig

gins

: L’é

coci

de, c

’est

la d

estr

uctio

n à

gran

de é

chel

le

d’es

pace

s de

vie

natu

rels

, qui

por

te o

u po

rter

a at

tein

te

à le

ur u

tilis

atio

n pa

ci� q

ue p

ar le

s hab

itant

s. U

n éc

ocid

e pe

ut

être

pro

voqu

é pa

r les

êtr

es h

umai

ns, p

ar e

xem

ple

dans

le

cas

d’u

ne e

xplo

itatio

n pé

trol

ière

qui

pol

lue

l’env

ironn

e-m

ent.

Mai

s il p

eut a

ussi

êtr

e d’

orig

ine

natu

relle

, com

me

en ca

s d’in

onda

tion

ou d

e fo

rte

tem

pête

.Vo

us v

oule

z fa

ire in

scri

re le

cri

me

d’éc

ocid

e da

ns le

S

tatu

t de

Rom

e de

la C

our p

énal

e in

tern

atio

nale

à L

a H

aye.

Po

urqu

oi a

voir

cho

isi c

e ca

dre

juri

diqu

e?Le

Sta

tut d

e R

ome

dé� n

it le

s crim

es q

ui re

lève

nt d

e la

co

mpé

tenc

e de

la C

our p

énal

e in

tern

atio

nale

. Pou

r l’i

nsta

nt, i

l y e

n a

quat

re: l

e gé

noci

de, l

e cr

ime

de g

uerr

e,

le c

rime

cont

re l’

hum

anité

et l

e cr

ime

d’ag

ress

ion,

c’

est-à

-dire

l’atta

que

viol

ente

d’u

n au

tre

État

. La

dest

ruct

ion

envi

ronn

emen

tale

gra

ve e

st à

mon

sens

le m

aillo

n qu

i m

anqu

e da

ns ce

tte ch

aîne

. Il e

st in

cohé

rent

que

l’éc

ocid

e n’

ait p

as d

e su

ites p

énal

es à

l’he

ure

actu

elle

.Q

uel s

erai

t l’im

pa�

d’u

ne te

lle d

i� o

sitio

n su

r l’é

coci

de?

Pour

les c

atas

trop

hes n

atur

elle

s, le

s Éta

ts si

gnat

aire

s se

raie

nt te

nus,

en

vert

u du

Sta

tut d

e R

ome,

de

veni

r en

aid

e au

x vi

ctim

es. E

n ca

s de

dest

ruct

ion

envi

ronn

emen

-ta

le ca

usée

par

un

com

port

emen

t crim

inel

de

l’êtr

e hu

mai

n, la

resp

onsa

bilit

é pé

nale

des

pol

lueu

rs se

rait

enga

gée.

Ce

n’es

t pas

nou

veau

en

soi:

la m

odi�

catio

n de

l’e

nviro

nnem

ent «

ayan

t des

e� e

ts é

tend

us, d

urab

les

ou g

rave

s» p

eut d

éjà

être

pou

rsui

vie

com

me

crim

e au

sens

du

dro

it in

tern

atio

nal,

mai

s mal

heur

euse

men

t seu

le -

men

t dan

s des

situ

atio

ns d

e gu

erre

. L’id

ée e

st d

’éte

ndre

ce

tte d

ispo

sitio

n en

tem

ps d

e pa

ix. H

isto

rique

men

t, il

étai

t pré

vu d

’insc

rire

l’éco

cide

dan

s le

Stat

ut d

e R

ome.

C

’est

par

cons

éque

nt u

n re

tour

aux

sour

ces q

ue je

pro

pose

.L’

idée

de

pour

suiv

re p

énal

emen

t la

de�

ru�

ion

envi

-ro

nnem

enta

le n

’e�

don

c pa

s un

e id

ée q

ui v

ous

e�

prop

re?

ENTR

ETIE

N

Page 33: Greenpeace Magazine 2014/04

31

de p

erso

nnes

dan

s le

mon

de q

ui co

mpr

enne

nt l’

appr

oche

ho

listiq

ue. E

nsui

te le

s pop

ulat

ions

aut

ocht

ones

, so

it 75

0 m

illio

ns d

’indi

vidu

s au

tota

l. M

ais j

e pe

nse

que

nous

som

mes

enc

ore

bien

plu

s nom

breu

x, à

trav

ers

le m

onde

, à re

conn

aîtr

e l’é

coci

de c

omm

e un

crim

e.Et

qui

son

t les

enn

emis

nat

urel

s de

vot

re p

roje

t?Je

ne

sais

pas

. Ces

gen

s-là

refu

sent

le d

ialo

gue

avec

moi

.Po

sons

la q

ue�

ion

à l’e

nver

s: p

ouve

z-vo

us in

diqu

er u

ne

mul

tinat

iona

le q

ui s

outie

ndra

it vo

s e�

ort

s?Le

s gra

ndes

idée

s ne

pren

nent

pas

raci

ne d

ans l

es m

ilieu

x bi

en é

tabl

is, m

ais p

lutô

t aux

mar

ges d

e la

soci

été.

L’

écon

omie

suiv

ra. M

ais G

reen

peac

e po

urra

it s’o

uvrir

à ce

tte

idée

. Il e

st e

ssen

tiel q

ue le

s ON

G p

renn

ent l

’initi

ativ

e da

ns ce

dom

aine

.U

ne in

scri

ptio

n de

l’éc

ocid

e da

ns la

loi s

erai

t-el

le u

tile

aux

ON

G?

Avec

une

telle

dis

posi

tion

léga

le, l

es m

ilita

nts d

e G

reen

-pe

ace

n’en

cour

raie

nt p

lus d

e pe

ine

de p

rison

pou

r le

urs a

ctio

ns e

n fa

veur

de

la n

atur

e et

de

l’env

ironn

emen

t. Ils

pou

rrai

ent d

énon

cer l

es a

ttei

ntes

à l’

envi

ronn

e -m

ent e

n pr

enan

t net

tem

ent m

oins

de

risqu

es. C

ar le

s Éta

ts

sera

ient

tenu

s d’in

terv

enir

jurid

ique

men

t con

tre

les

pollu

eurs

dès

que

Gre

enpe

ace

sign

ale

un é

coci

de.

Mai

s si

les

État

s as

sum

aien

t leu

rs re

� on

sabi

lités

, les

ON

G

écol

ogi�

es

n’au

raie

nt p

lus

de rô

le à

joue

r?Il

faut

se p

oser

la q

uest

ion

des o

bjec

tifs d

e fo

nd d

es o

rga -

nisa

tions

de

défe

nse

de l’

envi

ronn

emen

t! Si

leur

bu

t est

dav

anta

ge d

e cr

éer d

es e

mpl

ois q

ue d

e ch

ange

r le

mon

de, a

lors

elle

s von

t for

cém

ent s

’opp

oser

à m

on

proj

et. M

ais j

e pe

nse

que

Gre

enpe

ace

souh

aite

vér

itabl

e-m

ent u

n m

onde

mei

lleur

. La

disp

ositi

on d

e lo

i que

je

pro

pose

don

nera

it pl

us d

e po

uvoi

r aux

mili

tant

s. L

’ins-

crip

tion

de l’

écoc

ide

dans

la lo

i ren

forc

erai

t les

ON

G

et le

s mili

tant

s. G

reen

peac

e po

urra

it en

� n s’

appu

yer s

ur la

lo

i pou

r son

form

idab

le tr

avai

l. Et

les O

NG

pou

rrai

ent

a� e

cter

dav

anta

ge d

e m

oyen

s à la

dén

onci

atio

n de

s pol

-lu

eurs

.

PO

LLY

HIG

GIN

S E

n m

ars

2010

, ce�

e ju

ri�

e éc

ossa

ise

de 4

6 an

s dé

pose

aux

Nat

ions

U

nies

la p

ropo

sitio

n de

reco

nnaî

tre

l’éco

cide

com

me

crim

e au

sen

s du

dro

it in

tern

atio

nal.

C’e

� a

ussi

le la

ncem

ent d

e sa

cam

pagn

e m

ondi

ale

qu’e

lle p

rése

nte

dans

deu

x pu

bli c

atio

ns: E

radi

catin

g E

coci

de: L

aws

and

Gov

erna

nce

to P

reve

nt th

e D

e� r

u� i

on o

f ou

r Pla

net (

2010

) et E

arth

is o

ur B

usin

ess:

Cha

ngin

g th

e R

ules

of t

he G

ame

(20

12).

Dep

uis

le p

rin t

emps

20

14, e

lle e

� re

� on

sabl

e de

la c

ampa

gne

Sto

p éc

ocid

e po

ur l’

e� a

ce

germ

anop

hone

.

R É S I S T A N C E S

© RICHARD PILNICK

Page 34: Greenpeace Magazine 2014/04

32Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Que

pro

voqu

erai

t con

crèt

emen

t une

reco

nnai

ssan

ce d

e l’é

coci

de d

ans

le S

tatu

t de

Rom

e?To

us le

s Éta

ts m

embr

es d

es N

atio

ns U

nies

dev

raie

nt re

pren

-dr

e ce

conc

ept d

ans l

eurs

lois

nat

iona

les.

Ce

sera

it do

nc

une

oblig

atio

n m

ondi

ale

de p

unir

les p

ollu

eurs

et d

e pr

oté -

ger o

u d’

aide

r les

vic

times

. Dan

s le

cas d

’un

État

qui

n’

endo

sser

ait p

as sa

resp

onsa

bilit

é, ce

sera

it à

la C

our i

nter

-na

tiona

le d

’inte

rven

ir. C

hacu

n po

urra

it po

rter

pla

inte

po

ur é

coci

de, l

a po

lice

sera

it te

nue

d’en

quêt

er, i

l y a

urai

t des

in

culp

atio

ns, d

es a

udie

nces

et d

es ju

gem

ents

, il s

erai

t po

ssib

le d

e st

oppe

r les

pro

jets

dom

mag

eabl

es p

our l

’env

i-ro

nnem

ent.

À te

rme,

les p

ays p

rogr

essi

stes

met

trai

ent

en p

lace

des

mes

ures

de

prév

entio

n, co

mm

e po

ur le

s aut

res

délit

s, e

t ren

forc

erai

ent l

’édu

catio

n en

viro

nnem

enta

le.

Qui

e�

hab

ilité

à in

scri

re l’

écoc

ide

au S

tatu

t de

Rom

e?L’

artic

le 12

1 du

Stat

ut st

ipul

e qu

’un

élar

giss

emen

t des

com

-pé

tenc

es d

e la

Cou

r pén

ale

inte

rnat

iona

le e

st p

ossi

ble.

Po

ur la

ncer

la p

rocé

dure

, il s

u� t

qu’

un d

es 12

2 Éta

ts m

em -

bres

en

fass

e la

pro

posi

tion.

Nou

s esp

éron

s que

cet É

tat

sera

l’Aut

riche

. Les

Ver

ts e

t Gre

enpe

ace

font

act

uelle

men

t ca

mpa

gne

dans

ce se

ns.

Plus

ieur

s pa

ys, n

otam

men

t la

Col

ombi

e, o

nt d

éjà

une

norm

e pé

nale

com

para

ble.

Que

lles

sont

leur

s ex

péri

ence

s?La

des

truc

tion

envi

ronn

emen

tale

est

un

phén

omèn

e tr

ans -

natio

nal.

Il fa

ut d

onc

une

disp

ositi

on d

u dr

oit i

nter

na -

tiona

l pou

r lut

ter c

ontr

e ce

� éa

u. L

’éco

cide

doi

t êtr

e in

scrit

da

ns u

ne so

rte

de lo

i d’o

rdre

supé

rieur

.

Vous

évo

quie

z to

ut à

l’he

ure

le p

héno

mèn

e de

l’in

terd

é-pe

ndan

ce. I

mag

inon

s un

in�

ant q

ue le

s ju

ges

d’in

� ru

� io

n ét

ablis

sent

une

re�

onsa

bilit

é gé

néra

le d

e l’h

uman

ité

conc

erna

nt la

de�

ru�

ion

env

ironn

emen

tale

. Fin

irons

-nou

s to

us e

n pr

ison

?N

on. D

epui

s les

pro

cès d

e N

urem

berg

cont

re le

régi

me

nazi

, il

y a

un p

rinci

pe d

e dr

oit s

elon

lequ

el se

uls c

eux

qui

port

ent u

ne re

spon

sabi

lité

part

icul

ière

sont

pou

rsui

vis,

ceux

qu

i ont

les m

oyen

s de

chan

ger l

e co

urs d

es ch

oses

.Po

urqu

oi p

ense

z-vo

us q

u’un

e dé

mar

che

léga

le p

erm

e� r

ait

de ré

soud

re n

os p

robl

èmes

env

ironn

emen

taux

?Pa

rce

que

tout

ce q

ui s’

est f

ait j

usqu

’ici a

éch

oué.

La

dest

ruc-

tion

envi

ronn

emen

tale

ava

nce

et e

mpi

re. A

vez-

vous

lu

le d

erni

er ra

ppor

t du

WW

F su

r la

biod

iver

sité

? Dep

uis

l’ann

ée d

e m

a na

issa

nce,

la m

oitié

des

esp

èces

ont

dis

-pa

ru. Q

ue fa

ut-il

de

plus

pou

r nou

s fai

re ré

agir?

Une

loi s

ur

l’éco

cide

sera

it un

e én

orm

e av

ancé

e po

ur u

n m

onde

m

eille

ur.

«Ave

c un

e lo

i sur

l’éco

cide

, les

mili

tant

s de

G

reen

peac

e n’

enco

urra

ient

plu

s de

pe

ine

de p

rison

pou

r leu

rs a

ctio

ns e

n fa

veur

de

la n

atur

e et

de

l’env

ironn

emen

t.» REP

OR

TAG

E

Page 35: Greenpeace Magazine 2014/04

33

SIX

EX

EMPL

ES D

E R

ÉSIS

TAN

CE

INTE

LLIG

ENTE

ET

NO

N V

IOLE

NTE

REP

OR

TAG

E

R É S I S T A N C E S

Les

popu

latio

ns d

u S

ud q

ui s

e m

obili

sent

con

tre

la d

estr

uctio

n de

leur

s co

n diti

ons

de v

ie fo

nt p

reuv

e de

cou

rage

, de

déte

rmin

atio

n et

de

téna

cité

. E

lles

enco

uren

t l’a

rres

tatio

n, la

mol

esta

tion,

voi

re la

mor

t. Il

leur

man

que

parf

ois

les

moy

ens

les

plus

élé

men

taire

s po

ur fa

ire v

aloi

r leu

rs d

roits

: l’a

rgen

t pou

r pay

er le

télé

phon

e po

rtab

le, p

our c

ouvr

ir le

s fr

ais

d’av

ocat

, les

fr

ais

de d

épla

cem

ent e

n bu

s ou

les

rede

vanc

es p

our e

nreg

istr

er d

es

droi

ts d

e pr

oprié

té s

ur u

n lo

pin

de te

rre.

Du

côté

des

adv

ersa

ires,

les

mul

ti-na

tiona

les

font

tout

pou

r s’a

ssur

er la

bie

nvei

llanc

e de

s au

torit

és. M

algr

é le

s ob

stac

les,

il a

rriv

e ré

guliè

rem

ent q

u’un

mou

vem

ent p

arvi

enne

à m

ener

un

e lu

tte

effic

ace

et à

eng

rang

er d

es s

uccè

s d’

étap

e. In

tern

et e

t les

méd

ias

soci

aux

perm

ette

nt d

e m

obili

ser u

n so

utie

n su

prar

égio

nal o

u in

tern

atio

nal.

Tour

d’h

oriz

on d

e la

rési

stan

ce c

réat

ive

à l’a

ide

de s

ix e

xem

ples

. Par

Tho

mas

N

iede

rber

ger

Page 36: Greenpeace Magazine 2014/04

34Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Pho

to L

utte

sile

ncie

use:

en

nove

mbr

e 20

06,

Ale

ta B

aun

(à g

auch

e) e

t ses

com

pagn

es

s’in

stal

lent

dan

s de

s ca

rriè

res

de m

arbr

e au

Tim

or o

ccid

enta

l. El

les

tiend

ront

tout

e un

e an

née.

1.

Ale

ta B

aun:

«N

ous

voul

ons

rapp

eler

que

nou

s vi

vons

de

la n

atur

e et

que

no

us d

evrio

ns la

resp

ecte

r. N

os h

abits

pro

vien

nent

de

la n

atur

e. N

ous

devo

ns

la p

roté

ger,

sino

n no

us n

ous

retr

ouve

rons

nus

REP

OR

TAG

E

© DARI BERBAGAI SUMBER

Page 37: Greenpeace Magazine 2014/04

35

1.

Des

tiss

euse

s �

oppe

nt l’

extr

a�io

n de

mar

bre

au T

imor

oc

cide

ntal

, Ind

onés

ieLe

s mon

tagn

es d

u Ti

mor

occ

iden

tal a

brite

nt u

ne ri

che

bio -

dive

rsité

de

plan

tes e

t d’a

nim

aux.

C’e

st là

que

pre

nnen

t leu

r so

urce

les p

rinci

pale

s riv

ière

s d’a

limen

tatio

n en

eau

po

tabl

e et

d’ir

rigat

ion

des t

erre

s des

pop

ulat

ions

aut

och-

tone

s Mol

lo. P

our c

es p

opul

atio

ns, c

’est

une

régi

on

sacr

ée q

ui le

ur fo

urni

t dep

uis d

es g

énér

atio

ns d

es a

limen

ts,

des p

lant

es m

édic

inal

es e

t les

pig

men

ts n

atur

els p

our

leur

s tis

sage

s tra

ditio

nnel

s. D

ans l

es a

nnée

s 198

0, le

gou

-ve

rnem

ent d

u di

stric

t a a

utor

isé

des �

rmes

étr

angè

res

à ex

trai

re d

u m

arbr

e de

s mon

tagn

es, s

ans c

onsu

lter l

es

habi

tant

s. L

es co

nséq

uenc

es fu

rent

dra

mat

ique

s: d

éboi

se-

men

t, éb

oule

men

ts e

t pol

lutio

n de

s eau

x.M

ais u

n jo

ur, l

es M

ollo

s déc

iden

t de

se d

éfen

dre.

À

l’in

itiat

ive

d’A

leta

Bau

n, il

s von

t de

villa

ge e

n vi

llage

pou

r or

gani

ser u

n m

ouve

men

t de

prot

esta

tion.

Les

fem

mes

so

nt e

n pr

emiè

re li

gne.

Plu

s tar

d, e

lles s

e re

ndro

nt d

ans l

es

carr

ière

s ave

c le

urs m

étie

rs à

tiss

er p

our p

ours

uivr

e le

ur tr

avai

l sur

pla

ce. C

’est

une

form

e pa

rtic

uliè

re d

e ré

sis -

tanc

e qu

e ce

lle d

’Ale

ta B

aun

et d

e se

s col

lègu

es: «

Nou

s vo

ulon

s rap

pele

r que

nou

s viv

ons d

e la

nat

ure

et q

ue n

ous

devr

ions

la re

spec

ter.

Nos

hab

its p

rovi

enne

nt d

e la

nat

ure.

Nou

s dev

ons l

a pr

otég

er, s

inon

nou

s nou

s ret

rou -

ver o

ns n

us.»

Dur

ant e

nviro

n un

e an

née,

les t

isse

uses

re

sten

t prè

s des

car

rière

s. P

enda

nt c

e te

mps

, les

hom

mes

as

sum

ent l

e tr

avai

l dom

estiq

ue e

t les

soin

s aux

en -

fant

s. L’

actio

n pa

r vie

nt à

susc

iter l

’atte

ntio

n du

gra

nd p

ublic

. Fi

nale

men

t, la

pre

ssio

n fo

rce

les p

rodu

cteu

rs d

e m

arbr

e

à qu

itter

les l

ieux

en

2010

. Les

conc

essi

ons q

u’on

leur

ava

it ac

cord

ées n

e co

rres

pond

aien

t d’a

illeu

rs p

as a

ux n

orm

es.

En 20

13, A

leta

Bau

n ob

tient

le p

rest

igie

ux P

rix

Gol

dman

pou

r l’e

nviro

nnem

ent.

Sa m

otiv

atio

n po

ur a

gir

tient

en

quel

ques

mot

s: «

J’éta

is b

less

ée e

t ind

igné

e.»

Dep

uis,

Mam

a A

leta

, com

me

on l’

appe

lle a

ussi

, con

seill

e d’

autr

es c

omm

unau

tés a

utoc

hton

es a

u Ti

mor

occ

iden

tal

qui s

’opp

osen

t à la

des

truc

tion

de l’

envi

ronn

emen

t.

R É S I S T A N C E S

Page 38: Greenpeace Magazine 2014/04

36Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Une

Intif

ada

vert

e cu

ltive

la ré

si�

ance

en

Pale

� in

eM

urad

Al K

hu� a

sh, f

onda

teur

de

l’exp

loita

tion

agri

-co

le M

arda

, s’a

ttelle

à la

cons

truc

tion

d’un

e no

uvel

le fo

rme

de ré

sist

ance

en

Pale

stin

e. À

la ch

aîne

de

télé

visi

on

Al J

azee

ra, i

l déc

lare

: «Q

uand

les g

ens c

ultiv

ent l

eurs

pro

-pr

es a

limen

ts, i

ls so

nt in

dépe

ndan

ts d

es im

port

atio

ns

d’Is

raël

. C’e

st u

n ac

te d

e ré

sist

ance

cont

re l’

occu

patio

n.»

Il pr

atiq

ue la

per

mac

ultu

re, q

ue ce

rtai

nes a

ppel

lent

un

e «I

ntifa

da v

erte

». L

e te

rme

vien

t de

l’ang

lais

per

ma-

nent

agr

icul

ture

. Les

pro

jets

mod

èles

com

me

la fe

rme

Mar

da o

u l’e

xplo

itatio

n Bu

stan

Qar

aaqa

, prè

s de

Jéru

sale

m,

ense

igne

nt à

la p

opul

atio

n lo

cale

et a

ux é

tran

gers

in

tére

ssés

com

men

t cul

tiver

des

jard

ins s

ur d

e pe

tites

sur -

face

s, m

algr

é de

s con

ditio

ns p

oliti

ques

et c

limat

ique

s di

� ci

les.

Dan

s les

loca

lités

pal

estin

ienn

es d

e C

isjo

rdan

ie, l

’agr

i -cu

lture

trad

ition

nelle

est

fort

emen

t ent

ravé

e, c

ar

les a

utor

ités i

sraé

lienn

es c

ontr

ôlen

t l’e

au e

t con

� squ

ent

souv

ent l

es te

rres

ou

en in

terd

isen

t l’a

ccès

. La

perm

a-cu

lture

, est

ime

Mur

ad A

l Khu

� ash

, s’in

scrit

dan

s la

rési

s -ta

nce

cont

re l’

occu

patio

n, m

ais e

st a

ussi

une

phi

loso

phie

de

la c

oexi

sten

ce h

arm

onie

use

des ê

tres

hum

ains

et

de la

nat

ure.

C’e

st d

onc

une

mis

e en

œuv

re c

oncr

ète

de la

2.

Mau

vais

exe

mpl

e: m

ine

d’ur

aniu

m d

e la

SO

MA

ÏR à

Arl

it, a

u N

iger

, exp

loité

e pa

r le

grou

pe in

dust

riel

fran

çais

Are

va. L

a m

ine

au M

ali a

urai

t le

mêm

e ef

fet s

ur

le p

aysa

ge.

REP

OR

TAG

E

Un

mig

rant

dén

once

un

proj

et d

e m

ine

d’ur

aniu

m

à Fa

lea,

Mal

iL’

hist

oire

com

men

ce e

n Eu

rope

, mai

s se

pass

e en

fait

en

Afr

ique

. Un

jour

, un

mig

rant

don

t on

ne co

nnaî

t pas

l’i

dent

ité ta

pe su

r Goo

gle

le n

om d

e sa

com

mun

e d’

orig

ine,

Fa

lea,

dan

s le

sud

du M

ali.

Il dé

couv

re a

lors

le n

om

de l’

entr

epris

e ca

nadi

enne

Roc

kgat

e C

apita

l (au

jour

d’hu

i D

enis

on M

ines

) spé

cial

isée

dan

s la

pros

pect

ion

d’ur

aniu

m.

Cet

te e

ntre

pris

e co

ndui

t app

arem

men

t des

fora

ges

d’ex

plor

atio

n à

Fale

a. M

ais n

i la

mul

tinat

iona

le n

i le

gou -

vern

emen

t n’o

nt tr

ouvé

opp

ortu

n d’

info

rmer

les q

uel -

que

15 0

00 h

abita

nts d

e la

rais

on d

’êtr

e de

s pui

ts d

e fo

rage

. U

n pr

océd

é ty

piqu

e du

sect

eur d

e la

pro

spec

tion.

On

mèn

e la

pol

itiqu

e du

fait

acco

mpl

i fac

e à

une

popu

latio

n pr

éten

dum

ent t

rop

peu

inst

ruite

pou

r en

com

pren

dre

les e

njeu

x. E

n ca

s de

déco

uver

te d

e gi

sem

ents

, le

proj

et e

st

vend

u à

une

soci

été

min

ière

qui

pro

met

tra

des p

roje

ts

de d

ével

oppe

men

t et v

eille

ra à

s’as

sure

r l’a

ccor

d de

s déc

i -de

urs l

ocau

x.3.

© GREENPEACE / PHILIP REYNAERS

Page 39: Greenpeace Magazine 2014/04

polit

ique

de

paix

. La

clôt

ure

faite

de

vieu

x pn

eus q

ui

prot

ège

son

cham

p co

ntre

les s

angl

iers

a d

’aill

eurs

été

co

n str

uite

par

des

vol

onta

ires i

sraé

liens

.

À F

alea

, cet

te d

émar

che

sem

ble

néan

moi

ns é

chou

er.

Une

alli

ance

ent

re u

n gr

oupe

d’h

abita

nts e

t des

as-

soci

atio

ns d

e so

utie

n à

l’étr

ange

r s’e

st �

xé p

our o

bjec

tif

d’in

form

er la

pop

ulat

ion.

Une

stat

ion

de ra

dio

est

mis

e en

pla

ce e

t un

�lm

est

tour

né a

u su

jet d

es co

nséq

uen-

ces c

atas

trop

hiqu

es d

e la

pro

duct

ion

d’ur

aniu

m d

ans

le p

ays v

oisi

n qu

’est

le N

iger

. Et u

ne co

nfér

ence

crit

ique

sur

l’ura

nium

est

org

anis

ée à

Bam

ako,

capi

tale

du

pays

. D

essi

ner u

n av

enir

sans

ext

ract

ion

d’ur

aniu

m, v

oici

la v

oca -

tion

de c

ette

cam

pagn

e qu

i lan

ce d

es p

roje

ts d

’aid

e co

ncre

ts, p

ar e

xem

ple

en a

ssur

ant l

e �n

ance

men

t d’u

ne je

ep

pour

le tr

ansp

ort a

mbu

lanc

ier o

u en

core

en

prom

ouva

nt

des a

ctiv

ités é

cono

miq

ues d

urab

les à

l’éc

helle

loca

le.

La ca

mpa

gne

est a

idée

par

la b

aiss

e dr

astiq

ue d

u pr

ix d

e l’u

rani

um in

terv

enue

ent

re-t

emps

. En

tous

cas

, cel

a fa

it lo

ngte

mps

que

les g

ens d

e Fa

lea

n’on

t plu

s vu

de re

pré -

sent

ants

de

la so

ciét

é m

iniè

re d

ans l

a ré

gion

.

Mur

ad A

l Khu

ffash

: «Q

uand

le

s ge

ns c

ultiv

ent l

eurs

pr

opre

s al

imen

ts, i

ls s

ont i

ndé-

pend

ants

des

impo

rtat

ions

d’

Isra

ël. C

’est

un

acte

de

rési

s-ta

nce

cont

re l’o

ccup

atio

n.»

© UNKNOWN

Page 40: Greenpeace Magazine 2014/04

38Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

5.Le

mou

vem

ent M

ahan

et G

reen

peac

e sa

uven

t pr

ovis

oire

men

t le

villa

ge in

dien

d’A

mel

iaD

ébut

oct

obre

2014

, Rad

io S

angh

arsh

reço

it un

app

el

télé

pho n

ique

. C’e

st V

irend

ra K

umar

Sin

gh q

ui a

ppel

le a

vec

son

port

able

dep

uis l

a pl

ace

du v

illag

e d’

Am

elia

, où

sont

rass

embl

és e

nviro

n 20

00 m

embr

es d

e l’a

ssoc

iatio

n M

ahan

San

ghar

sh S

amiti

. Ils

fête

nt u

ne d

écis

ion

de

la H

aute

Cou

r de

Del

hi, q

ui v

ient

d’a

nnul

er 21

4 co

nces

sion

s d’

extr

actio

n de

char

bon,

don

t cel

le q

ui co

ncer

ne la

forê

t de

Mah

an e

t qui

aur

ait f

ait d

ispa

raîtr

e le

vill

age

d’A

mel

ia.

Le p

roje

t des

soci

étés

indi

enne

s Ess

ar e

t Hin

dalc

o m

enac

e le

s moy

ens d

e su

bsis

tanc

e de

plu

s de

14 0

00 p

erso

n -ne

s à A

mel

ia e

t dan

s les

vill

ages

ale

ntou

r. C

’est

don

c un

répi

t po

ur le

mou

vem

ent M

ahan

San

ghar

sh S

amiti

.Le

s fon

ctio

nnai

res i

ndie

ns e

t les

repr

ésen

tant

s des

gr

ands

gro

upes

rech

igne

nt à

reco

nnaî

tre

les d

roits

des

hab

i -ta

nts d

es ré

gion

s for

estiè

res.

Grâ

ce a

ux re

vend

icat

ions

ex

prim

ées p

enda

nt d

es a

nnée

s par

div

ers m

ouve

men

ts, u

ne

nouv

elle

loi s

ur la

forê

t a é

té v

otée

en

2006

. Cet

te lo

i exi

ge

En M

alai

sie,

un

DJ t

ient

tête

au

gouv

erne

ur

du S

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akLe

gou

vern

emen

t de

la p

rovi

nce

mal

aisi

enne

du

Sara

wak

a

élev

é le

DJ P

eter

John

Jaba

n au

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d’e

nnem

i prin

-ci

pal.

Sur l

e si

te d

e R

epor

ters

sans

fron

tière

s, la

réac

tion

de

l’int

éres

sé se

fait

sarc

astiq

ue: «

J’app

réci

e be

auco

up ce

t ho

nneu

r, no

tam

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t par

ce q

ue ce

type

de

noto

riété

pou

r -ra

it m

’aid

er e

n ca

s d’a

rres

tatio

n.»

Le to

rse

tato

ué e

t le

sour

ire e

spiè

gle,

Pet

er Jo

hn Ja

ban

est d

even

u l’a

dver

saire

di

rect

du

gouv

erne

ur T

aib

Mah

mud

. À la

tête

de

l’Éta

t du

Sar

awak

dep

uis 1

981,

celu

i-ci e

st re

spon

sabl

e de

la

dest

ruct

ion

de la

forê

t plu

vial

e et

du

dépl

acem

ent d

es p

opu -

latio

ns a

utoc

hton

es. L

e Fo

nds B

runo

Man

ser e

stim

e qu

e sa

fort

une

pers

onne

lle s’

élèv

e à

15 m

illia

rds d

e do

llars

.D

epui

s qua

tre

ans,

Pet

er Jo

hn Ja

ban

di� u

se ch

aque

so

ir su

r Rad

io F

ree

Sara

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des

nou

velle

s éch

appa

nt à

la

cens

ure

et a

cces

sibl

es a

ux v

illag

es le

s plu

s rec

ulés

. Le

s méd

ias l

ocau

x ét

ant à

la b

otte

du

gouv

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t, la

sta -

tion

de ra

dio

et le

site

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repo

rt.o

rg so

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even

us u

ne

réfé

renc

e in

cont

ourn

able

pou

r tou

s ceu

x qu

i se

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cien

t du

débo

isem

ent,

de la

des

truc

tion

envi

ronn

emen

tale

et

de

la co

rrup

tion.

Il e

st m

ême

arriv

é qu

’un

chef

de

trib

u au

toch

tone

s’ad

ress

e di

rect

emen

t au

stud

io lo

ndon

ien

par t

élép

hone

por

tabl

e. P

our d

es ra

ison

s de

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rité,

la

radi

o es

t en

e� e

t bas

ée e

n ex

il, à

l’in

itiat

ive

de C

lare

Rew

-ca

stle

Bro

wn,

spéc

ialis

te e

n jo

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lism

e d’

inve

stig

atio

n.

La sœ

ur d

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ncie

n Pr

emie

r min

istr

e br

itann

ique

Gor

don

Brow

n fa

it ai

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ouer

son

rése

au d

e re

latio

ns a

u pr

o� t

du p

roje

t.

HIN

TER

GR

UN

D

Ani

ta

Kus

hwah

a:

«Nou

s vi

vons

ic

i dep

uis

des

géné

ratio

ns

et n

otre

sur

vie

dépe

nd d

e la

forê

t. N

ous

avon

s do

nc

le d

roit

de

© AVIK ROY / GREENPEACE

REP

OR

TAG

ER

EPO

RTA

GE

4.

Page 41: Greenpeace Magazine 2014/04

39

Pete

r Joh

n Ja

ban:

«J’a

ppré

cie

beau

coup

cet

hon

neur

, no

tam

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t par

ce q

ue c

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pe

de n

otor

iété

pou

rrai

t m’a

ider

en

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d’a

rres

tatio

n.»

déci

der d

e so

n so

rt.»

Pe

ter J

ohn

Jaba

n lu

i-mêm

e es

t rev

enu

au S

araw

ak

en 20

12. U

n re

tour

mot

ivé

par l

e m

al d

u pa

ys. M

algr

é le

dan

ger,

il co

ntin

ue d

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� use

r des

info

rmat

ions

, no

tam

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t sur

le b

loca

ge d

u pr

ojet

de

barr

age

de B

aram

qu

i con

trai

ndra

it 20

000

per

sonn

es à

l’ex

il. S

’il d

e-va

it lu

i arr

iver

mal

heur

, ce

sera

it un

scan

dale

pou

r le

gou -

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eur T

aib

Mah

mud

. Peu

t-êt

re le

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de

trop

. Se

s man

igan

ces s

usci

tent

une

crit

ique

cro

issa

nte

dans

les

mili

eux

inte

rnat

iona

ux. E

t au

pays

, nom

breu

x so

nt

ceux

qui

suiv

ent l

’exe

mpl

e de

Pet

er Jo

hn Ja

ban

et é

lève

nt

la v

oix.

la c

onsu

ltatio

n de

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sem

blée

du

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ge –

appe

lée

Gra

m

Sabh

a – e

n ca

s de

proj

et d

’util

isat

ion

de la

forê

t à

des �

ns i

ndus

trie

lles.

La

cons

ulta

tion

s’est

avé

rée

part

icu-

lière

men

t pro

blém

atiq

ue d

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n vi

llage

com

me

Am

elia

, don

t les

hab

itant

s éta

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app

elés

à v

oter

sur l

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prop

re d

éloc

alis

atio

n m

oyen

nant

une

inde

mni

satio

n dé

risoi

re. L

es a

rchi

ves e

n lig

ne d

e R

adio

San

ghar

sh p

er -

met

tent

de

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re l’

évol

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n de

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aire

à l’

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de

docu

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ts é

crits

et d

’enr

egis

trem

ents

aud

io. O

n y

déco

uvre

l’ac

hat d

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a m

anip

ulat

ion,

l’in

timid

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n,

la c

rimin

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atio

n et

mêm

e le

s ten

tativ

es d

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ntre

-fa

çon

mis

es e

n œ

uvre

pou

r obt

enir

l’acc

ord

des h

abita

nts.

Sa

ns su

ccès

pou

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stan

t! «N

ous v

ivon

s ici

dep

uis

des g

énér

atio

ns e

t not

re su

rvie

dép

end

de la

forê

t. N

ous

avon

s don

c le

dro

it de

déc

ider

de

son

sort

», a

� rm

e A

nita

Kus

hwah

a, u

ne h

abita

nte

d’A

mel

ia.

C’e

st n

otam

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t grâ

ce à

l’ac

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de G

reen

peac

e In

de

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de

Rad

io S

angh

arsh

, qui

a p

erm

is d

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� use

r pu

bliq

uem

ent l

a dé

nonc

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n de

s abu

s loc

aux,

que

le m

es -

sage

de

Vire

ndra

, Ani

ta e

t leu

rs a

lliés

a é

té e

nten

du

par l

a H

aute

Cou

r de

Del

hi…

et s

ur In

tern

et. L

a ca

mpa

gne

de so

utie

n de

Gre

enpe

ace

assu

re é

gale

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t le

� nan

cem

ent

de l’

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jurid

ique

, des

ban

dero

les e

t des

act

ions

de

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les m

inis

tère

s. E

t une

pét

ition

a re

cuei

lli p

lus d

’un

mill

ion

de si

gnat

ures

.M

ais G

reen

peac

e es

t mai

nten

ant l

a ci

ble

de p

lain

tes

dépo

sées

par

la so

ciét

é én

ergé

tique

Ess

ar e

t de

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pos d

i� am

atoi

res d

e la

par

t de

polit

icie

ns e

t des

serv

ices

se

cret

s ind

iens

. Le

nouv

eau

gouv

erne

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t du

Prem

ier

min

istr

e N

aren

dra

Mod

i s’e

� orc

e de

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ncer

les

proj

ets d

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ines

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uelle

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t blo

qués

. La

nouv

elle

loi s

ur

la fo

rêt p

ourr

ait ê

tre

susp

endu

e ou

du

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ns a

� aib

lie.

Les h

abita

nts d

e la

forê

t de

Mah

an o

nt d

e bo

nnes

rais

ons

de re

ster

vig

ilant

s.

R É S I S T A N C E S

© RADIO SARAWAK

Page 42: Greenpeace Magazine 2014/04

40Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

6.

REP

OR

TAG

ER

EPO

RTA

GE

© UNKNOWN

24 m

ai 2

014

: Bla

kk R

asta

à A

ccra

pen

dant

la jo

urné

e de

pro

test

atio

n co

ntre

M

onsa

nto

qui a

mob

ilisé

des

mill

iers

de

man

ifest

ants

dan

s 4

00

loca

lités

de

52

pays

.

Page 43: Greenpeace Magazine 2014/04

41

6.U

n G

hané

en s

’opp

ose

au g

éant

am

éric

ain

Mon

sant

o«N

ous a

llons

faire

bea

ucou

p de

bru

it s’

ils c

ontin

uent

, dé

clar

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mus

icie

n de

regg

ae B

lakk

Ras

ta à

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aîne

TV

Saha

ra. S

i néc

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ire, n

ous i

rons

jusq

u’à

utili

ser d

es

moy

ens s

pirit

uels

.» E

n to

ute

con�

den

tialit

é, le

Par

lem

ent

du G

hana

s’ap

prêt

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ava

liser

une

loi s

ur la

cul

ture

de

pla

ntes

, con

nue

sous

le n

om d

e «l

oi M

onsa

nto»

. U

ne d

épêc

he d

e 20

10 p

ublié

e su

r Wik

ileak

s ret

race

les

e� o

rts d

e l’a

mba

ssad

e de

s Éta

ts-U

nis p

our o

uvri

r le

mar

ché

afric

ain

aux

sem

ence

s tra

nsgé

niqu

es. L

es m

ulti -

natio

nale

s com

me

Mon

sant

o ou

Syn

gent

a s’

inté

ress

ent d

e pl

us e

n pl

us à

l’Afr

ique

pou

r y im

plan

ter d

es c

ultu

res à

la

rge

éche

lle. D

e no

uvel

les l

ois d

oive

nt to

utef

ois ê

tre

voté

es

pour

leur

ouv

rir le

s por

tes d

u m

arch

é.«C

’est

une

nou

velle

col

onis

atio

n, m

ais p

ire q

ue la

pre

-m

ière

. Ils

veu

lent

nou

s im

pose

r ce

que

nous

dev

ons

man

ger»

, s’in

dign

e A

li-M

asm

adi,

de l’

orga

nisa

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Food

So

vere

ignt

y G

hana

. Ce

grou

pe co

ordo

nne

la ca

mpa

gne

anti-

OG

M q

ui a

réus

si à

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ajo

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r la

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u Pa

rlem

ent à

A

ccra

.Bl

akk

Ras

ta e

t ses

rast

afar

is o

nt c

réé

des a

� ch

es d

e to

mat

es g

éant

es. L

eur t

rava

il s’

insc

rit d

ans u

ne la

rge

coal

ition

qui

incl

ut n

otam

men

t la

polit

icie

nne

d’op

posi

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très

con

nue

Sam

ia N

krum

ah, �

lle

de K

wam

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ah,

lead

er d

u m

ouve

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t d’in

dépe

ndan

ce d

écéd

é de

puis

. D

iver

ses a

ssoc

iatio

ns p

aysa

nnes

, des

chef

s tra

ditio

nnel

s et

plus

ieur

s féd

érat

ions

relig

ieus

es d

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rétie

ns e

t de

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ulm

ans s

’ass

ocie

nt à

une

dyn

amiq

ue lo

cale

uni

que

pour

une

thém

atiq

ue g

loba

le. L

e 24

mai

2014

, Foo

d So

vere

ignt

y G

hana

org

anis

ait u

ne jo

urné

e de

pro

test

atio

n à

Acc

ra, c

apita

le d

u pa

ys. L

e m

ême

jour

, la

«Mar

che

cont

re M

onsa

nto»

a m

obili

sé d

es m

anife

stan

ts d

ans

400

loca

lités

de

52 p

ays.

Bla

kk R

asta

: «S

i néc

essa

ire,

nous

iron

s ju

squ’

à ut

ilise

r des

m

oyen

s sp

iritu

els.

»

R É S I S T A N C E S

Page 44: Greenpeace Magazine 2014/04

42Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

LA C

AR

TE

AC

CA

PAR

EMEN

T D

ES T

ERR

ESL’

acca

pare

men

t des

terr

es, o

u la

ndgr

abbi

ng, d

ésig

ne

la p

ratiq

ue p

robl

émat

ique

des

inve

stis

seur

s ét

rang

ers,

no

tam

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t en

Afr

ique

et e

n A

sie,

qui

ach

èten

t ou

pren

nent

à b

ail d

e gr

ande

s su

rfac

es d

e te

rre

arab

le. C

ela

cond

uit p

arfo

is a

u dé

plac

emen

t des

pop

ulat

ions

lo

cale

s sa

ns c

ompe

nsat

ion

pour

l’ex

prop

riatio

n de

s te

rres

.Fa

its e

t chi

ffre

s ra

ssem

blés

par

Mar

tina

Hub

er

Éta

ts-U

nis

7,1

Mal

aisi

e 3

,6

Sin

gapo

ur

2,9

Sin

gapo

ur

2,9

Sin

gapo

ur

2,9

Sin

gapo

ur

2,9

Sin

gapo

ur

2,9

Ém

irats

ara

bes

unis

2

,8É

mira

ts a

rabe

s un

is

2,8

Ém

irats

ara

bes

unis

2

,8É

mira

ts a

rabe

s un

is

2,8

Ém

irats

ara

bes

unis

2

,8

Gra

nde-

Bre

tagn

e et

Ir

land

e du

Nor

d 2

,3

Inde

2

,1

Can

ada

2,1

Prin

cipa

ux p

ays

inve

� is

seur

sTr

ansa

� io

ns c

oncl

ues

en m

illio

ns d

’ha

Pap

ouas

ie-N

ouve

lle-

Gui

née

3,8

Indo

nési

e 3

,6

Rép

ubliq

ue d

u S

ouda

n du

Sud

3

,5du

Sud

3

,5du

Sud

3

,5

Rép

ubliq

ue d

émoc

ratiq

ue

Rép

ubliq

ue d

émoc

ratiq

ue

Rép

ubliq

ue d

émoc

ratiq

ue

Rép

ubliq

ue d

émoc

ratiq

ue

du C

ongo

2

,8du

Con

go

2,8

du C

ongo

2

,8

Rép

ubliq

ue d

u M

ozam

biqu

e

2,2

Rép

ubliq

ue d

u C

ongo

2

,1R

épub

lique

du

Con

go

2,1

Bré

sil

1,8

Bré

sil

1,8

Bré

sil

1,8

Pay

s ci

bles

Tran

sa�

ions

con

clue

s en

mill

ions

d’h

a

Page 45: Greenpeace Magazine 2014/04

43

La b

anqu

e de

don

nées

Lan

d M

atrix

rece

nse

plus

de

100

0 tr

ansa

ctio

ns p

our u

ne s

urfa

ce d

e pr

ès d

e 4

0 m

illio

ns d

’hec

tare

s, c

e qu

i cor

resp

ond

envi

ron

à la

sur

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de

l’Alle

mag

ne e

t de

la S

uiss

e. N

e so

nt p

as

pris

es e

n co

mpt

e le

s tr

ansa

ctio

ns s

ur d

es s

urfa

ces

de m

oins

de

200

hec

tare

s et

cel

les

conc

erna

nt d

es

inve

stis

seur

s du

pay

s m

ême.

Au

Bré

sil,

les

tran

sact

ions

sur

la te

rre

men

ées

par d

es in

vest

isse

urs

étra

nger

sco

ncer

nent

1,8

mill

ion

d’he

ctar

es, t

andi

s qu

e ce

lles

impl

iqua

nt d

es in

vest

isse

urs

brés

ilien

s po

rten

t su

r 1,4

mill

ion

d’he

ctar

es e

t que

les

tran

sact

ions

exc

lusi

vem

ent m

enée

s pa

r des

inve

stis

seur

s br

ésili

ens

repr

ésen

tent

0,7

mill

ion

d’he

ctar

es.

La ru

ée v

ers

les

terr

es fe

rtile

s —

Les

pay

s pa

uvre

s au

x st

ruct

ures

éta

tique

s fa

ible

s, o

ù le

s po

pula

tions

pe

inen

t à fa

ire v

aloi

r leu

rs d

roits

, son

t par

ticul

ière

men

t int

éres

sant

s po

ur le

s in

vest

isse

urs

étra

nger

s. L

es

terr

es c

onvo

itées

ne

sont

pas

des

sur

face

s in

utili

sées

, mai

s de

s te

rres

ara

bles

, fac

ilem

ent a

cces

sibl

es,

à pr

oxim

ité d

e ce

ntre

s ur

bain

s, s

ouve

nt c

ultiv

ées

par d

es fa

mill

es p

aysa

nnes

du

pays

. Deu

x tie

rs d

es

surf

aces

ara

bles

vis

ées

se s

ituen

t dan

s de

s pa

ys c

onna

issa

nt d

e gr

aves

pro

blèm

es d

e fa

min

e. P

uisq

ue le

s in

vest

isse

urs

étra

nger

s s’

inté

ress

ent p

rinci

pale

men

t aux

cul

ture

s de

pro

duits

d’e

xpor

tatio

n, le

pro

blèm

e de

la fa

im d

evra

it en

core

s’a

ggra

ver.

Qu’

est-

ce q

ui e

st c

ultiv

é? —

La

moi

tié d

es in

vest

isse

urs

inte

rnat

iona

ux d

ans

le d

omai

ne d

e la

terr

e vi

sent

la

pro

duct

ion

agric

ole,

sui

vis

de c

eux

qui p

ratiq

uent

l’ex

ploi

tatio

n fo

rest

ière

. À p

lus

petit

e éc

helle

, les

tr

ansa

ctio

ns p

euve

nt c

once

rner

le to

uris

me,

l’in

dust

rie, l

es ré

serv

es n

atur

elle

s ou

les

éner

gies

reno

uvel

a-bl

es. C

erta

ines

tran

sact

ions

ne

décl

aren

t pas

l’af

fect

atio

n de

s te

rres

con

cern

ées.

Les

sur

face

s ag

ricol

es

serv

ent e

n pr

emie

r lie

u à

la p

rodu

ctio

n al

imen

taire

, mai

s au

ssi à

la p

rodu

ctio

n d’

agro

carb

uran

ts o

u de

pr

odui

ts c

omm

e le

cot

on o

u le

cao

utch

ouc.

La d

eman

de c

rois

sant

e po

ur le

s ag

roca

rbur

ants

— P

our l

es a

groc

arbu

rant

s, le

s in

vest

isse

urs

euro

péen

s jo

uent

un

rôle

maj

eur —

pro

babl

emen

t par

ce q

ue l’

Uni

on e

urop

éenn

e ve

ut a

xer u

n ci

nqui

ème

de s

a co

nsom

mat

ion

d’én

ergi

e su

r les

reno

uvel

able

s d’

ici à

20

20. P

our l

es tr

ansa

ctio

ns s

ur la

terr

e vi

sant

exc

lu-

sive

men

t la

prod

uctio

n d’

agro

carb

uran

ts, l

es P

ays-

Bas

son

t le

prin

cipa

l inv

estis

seur

, sui

vis

de la

G

rand

e-B

reta

gne

et d

e l’I

rland

e du

Nor

d. L

a Fr

ance

se

situ

e au

cin

quiè

me

rang

, l’It

alie

au

sept

ièm

e. L

a R

oum

anie

et l

’Esp

agne

sui

vent

en

neuv

ièm

e et

dix

ièm

e po

sitio

ns. P

our l

es tr

ansa

ctio

ns v

isan

t au

moi

ns p

artie

llem

ent l

a pr

oduc

tion

d’ag

roca

rbur

ants

, la

Gra

nde-

Bre

tagn

e et

l’Ir

land

e du

Nor

d se

cla

ssen

t au

pre

mie

r ran

g. L

e pr

ocha

in p

ays

euro

péen

de

la li

ste

est l

e Po

rtug

al, e

n hu

itièm

e po

sitio

n. L

a S

uiss

e se

trou

ve a

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xièm

e ra

ng.

La

li� e

de

s pa

ys

inve

� is

-se

urs

e�

men

ée

par

les

Éta

ts-U

nis.

Dep

uis

20

00

, les

in

ve�

isse

urs

amér

icai

ns o

nt

conc

lu d

es t

rans

a� i

ons

sur

7,1

m

illio

ns

d’he

� ar

es

de

terr

e, c

e qu

i cor

re�

ond

envi

-ro

n à

la s

uper

fi cie

de

l’Irla

n de.

S

i la

Chi

ne n

e fa

it pl

us p

artie

de

s di

x pr

emie

rs p

ays

inve

s-tis

seur

s, e

lle jo

ue to

ujou

rs u

n gr

and

rôle

dan

s l’a

ccap

are-

men

t de

s te

rres

en

Asi

e du

S

ud-E

� .

La P

apou

asie

-Nou

velle

-Gui

-né

e ar

rive

en t

ête

de l

a li�

e

des

pays

cib

les:

les

inve

� is

-se

urs

y on

t ac

heté

ou

pris

à

bail

3,8

mill

ions

d’h

e� a

res

ce q

ui é

quiv

aut

à pl

us d

e 8

%

de

la

surf

ace

du

pay

s et

pr

esqu

e à

la s

uper

fi cie

de

la

Sui

sse

— p

our

y cu

ltive

r pr

in-

cipa

lem

ent

l’hui

le d

e pa

lme,

le

cao

utch

ouc,

le c

acao

et

la

cann

e à

sucr

e. C

es d

erni

ères

an

nées

, le

pays

a é

té s

ecou

é pa

r pl

usie

urs

scan

dale

s de

co

rrup

tion.

Prè

s de

40

% d

e la

po

pula

tion

vive

nt a

u-de

ssou

s du

seu

il na

tiona

l de

pauv

reté

. O

utre

les

dix

pre

mie

rs p

ays

cibl

es, d

’aut

res

pays

afr

icai

ns

com

me

l’Éth

iopi

e, M

adag

as-

car,

le N

igér

ia e

t le

Gha

na fo

nt

égal

emen

t par

tie d

es p

ays

les

plus

du

rem

ent

cibl

és.

Les

élite

s af

ricai

nes

sont

re�

on-

sabl

es d

’un

nom

bre

croi

ssan

t de

pet

its a

chat

s de

terr

es.

La S

uiss

e es

t par

tie p

rena

nte

des

opér

atio

ns d

’acc

apar

emen

t de

s te

rres

. La

banq

ue d

e do

nnée

s La

nd M

atrix

* com

ptab

ilise

18

tran

sact

ions

pou

r un

tota

l de

235

826

hec

tare

s. L

a pl

us im

port

ante

co

ncer

ne d

es te

rres

ara

bles

de

80

00

0 h

ecta

res

en U

krai

ne,

cons

acré

es à

la p

ro du

ctio

n de

den

rées

alim

enta

ires

et d

’agr

ocar

-bu

rant

s, p

our l

e co

mpt

e de

Gle

ncor

e X

stra

ta. L

a fir

me

Add

ax B

ioen

ergy

, ét

ablie

à G

enèv

e, a

sig

né u

n co

ntra

t pou

r la

prod

uctio

n de

can

ne

à su

cre

sur 4

4 0

00

hec

tare

s au

Sie

rra

Leon

e. L

a pl

us p

etite

sur

face

co

ncer

ne u

ne tr

ansa

ctio

n su

r 263

hec

tare

s en

Tan

zani

e po

ur

l’ass

ocia

tion

HS

T, q

ui p

révo

it d’

affe

cter

ces

terr

es à

un

proj

et d

e pr

o-du

ctio

n de

riz

pour

app

orte

r une

aid

e à

la p

opul

atio

n pa

uvre

.

Pay

s-B

as

1,7

Rus

sie

1,6

Ara

bie

saou

dite

1

,6

Rus

sie

1,7

Rus

sie

1,7

Rus

sie

1,7

Ukr

aine

1

,6

Libé

ria

1,3

*SOURCE: LAND MATRIX, UNE BANQUE DE DONNÉES EN LIGNE CRÉÉE EN 2012, VISE À PRÉSENTER LES DIMENSIONS DU PROBLÈME ET À FAVORISER LA TRANSPARENCE. ELLE RECENSE LES DONNÉES DE TOUTES LES TRANSACTIONS CONCERNANT LA TERRE DEPUIS 2000, À PARTIR D’UNE SURFACE DE 200 HECTARES. LAND MATRIX EST PORTÉE PAR PLUSIEURS GRANDES ORGANISATIONS DU DOMAINE DE LA POLITIQUE ET DE LA RECHERCHE SUR LE DÉVELOPPEMENT.

R É S I S T A N C E S

Page 46: Greenpeace Magazine 2014/04

Voilà

bie

ntôt

qua

tre

ans q

ue, d

ans l

a pe

tite

ville

tuni

sien

ne d

e Si

di B

ouzi

d, le

mar

chan

d de

légu

mes

Moh

amed

Bou

aziz

i s’e

st a

sper

gé d

’ess

ence

. L’a

llum

ette

qu’

il a

utili

sée

pour

s’im

mol

er, c

e 17

déc

embr

e 20

10, a

llait

décl

ench

er u

n in

cend

ie q

ui e

mbr

aser

a to

ut

le m

onde

ara

be. E

n ja

nvie

r 201

1, le

dic

tate

ur tu

nisi

en B

en A

li, a

u po

uvoi

r dep

uis

ving

t-tr

ois a

ns, s

’exi

le, f

uyan

t la

révo

lte d

e so

n pe

uple

. En

févr

ier,

des m

anife

stat

ions

co

ntra

igne

nt H

osni

Mou

bara

k, p

rési

dent

de

l’Égy

pte

dura

nt v

ingt

-neu

f ans

, à d

émis

sion

-ne

r. Le

mêm

e m

ois,

des

man

ifest

atio

ns é

clat

ent e

n Li

bye,

et,

en o

ctob

re, a

près

qua

-ra

nte-

deux

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de

dom

inat

ion

inco

nditi

onne

lle, M

ouam

mar

Kad

hafi

est t

ué p

ar d

es

rebe

lles.

En

mar

s 201

1, e

n Sy

rie,

des

ado

lesc

ents

écr

iven

t sur

les m

urs d

es m

aiso

ns

des s

loga

ns h

ostil

es a

u go

uver

nem

ent.

Ils se

ront

tort

urés

. Que

lque

s moi

s plu

s tar

d, le

pa

ys so

mbr

e da

ns u

ne g

uerr

e ci

vile

qui

dur

e en

core

.A

près

l’eu

phor

ie d

u Pr

inte

mps

ara

be v

ient

l’he

ure

de la

dés

illus

ion;

les e

spoi

rs

imm

ense

s ser

ont s

uivi

s de

crue

lles d

écep

tions

. Qu’

est-

ce q

ue la

révo

lte a

app

orté

? En

Syr

ie, l

a gu

erre

a fa

it pr

ès d

e 20

0 00

0 m

orts

; plu

s de

troi

s mill

ions

d’h

abita

nts s

e so

nt

réfu

giés

à l’

étra

nger

, six

mill

ions

et d

emi s

ont e

n fu

ite d

ans l

eur p

ropr

e pa

ys. E

n Li

bye,

les m

ilice

s s’a

ffro

nten

t, il

y a

déso

rmai

s deu

x pa

rlem

ents

et d

eux

gouv

erne

men

ts.

En É

gypt

e, le

s mili

taire

s ont

repr

is le

pou

voir.

Seu

le la

Tun

isie

lais

se q

uelq

ue e

spoi

r... O

n ne

se ti

re p

as d

essu

s, o

n vo

te.

L’er

reur

de

l’Occ

iden

tLe

bila

n es

t acc

abla

nt. L

e ch

aos r

ègne

. Et p

lus d

’un

regr

ette

le «

bon

vieu

x te

mps

»,

lors

que

ces p

ays j

ouis

saie

nt e

ncor

e d’

une

stab

ilité

tant

app

réci

ée p

ar le

s res

pons

able

s

ESS

AI

DES

ES

POIR

S, D

E L’

EU-

PHO

RIE

, DES

DÉC

EPTI

ON

S

ET D

ES M

OR

TSQ

uel j

ugem

ent p

orte

ra -

t-on

, rét

rosp

ectiv

e-m

ent,

sur l

e Pr

inte

mps

ar

abe?

Une

cho

se e

st

sûre

: les

évé

nem

ents

dr

amat

ique

s qu

i se

sont

pro

duits

en

Tuni

sie,

en

Égy

pte,

en

Liby

e et

en

Syr

ie c

onst

ituen

t un

e ru

ptur

e hi

sto -

rique

dan

s la

quel

le la

so

ciét

é ci

vile

a jo

un rô

le c

ruci

al. E

ssai

de

Tho

mas

Sch

mid

Page 47: Greenpeace Magazine 2014/04

L’er

reur

de

l’Occ

iden

t

45

polit

ique

s occ

iden

taux

. Tro

is jo

urs a

vant

la fu

ite d

u di

ctat

eur t

unis

ien

Ben

Ali,

sous

le

règn

e du

quel

le p

ays é

tait

deve

nu u

n Ét

at p

olic

ier m

afie

ux, l

a Fr

ance

ava

it pr

opos

é de

l’aid

er à

ass

urer

«le

mai

ntie

n de

l’or

dre»

. Les

Éta

ts-U

nis a

vaie

nt, d

e le

ur cô

té, s

oute

nu

Hos

ni M

ouba

rak

en lu

i fou

rnis

sant

une

aid

e m

ilita

ire d

e 1,

3 mill

iard

de

dolla

rs e

t 70

0 m

illio

ns d

’aid

e éc

onom

ique

par

an.

Ils n

e pr

endr

ont l

eurs

dis

tanc

es q

ue lo

rsqu

e sa

ch

ute

s’avé

rera

imm

inen

te. Q

uant

au

régi

me

brut

al d

u co

lone

l Kad

hafi,

il ét

ait a

rmé

par d

es m

ultin

atio

nale

s eur

opée

nnes

.L’

Occ

iden

t ava

it m

isé

sur l

a st

abili

té, r

emar

quan

t tro

p ta

rd q

ue la

dic

tatu

re p

orte

pr

écis

émen

t en

elle

le g

erm

e de

l’in

stab

ilité

. Le

chao

s n’e

st q

u’un

e co

nséq

uenc

e de

l’o

rdre

impo

sé. L

’impu

ter a

ux re

belle

s, c

’est

com

me

si l’

on v

oula

it re

ndre

les r

évol

utio

n-na

ires f

ranç

ais d

e 17

89 re

spon

sabl

es d

e la

Ter

reur

de

Rob

espi

erre

en

1794

. Ce

qui

s’est

dér

oulé

dur

ant c

e Pr

inte

mps

ara

be e

st u

ne ru

ptur

e qu

i fer

a da

te, e

t don

t l’is

sue

n’es

t pa

s pré

visi

ble.

Ce

boul

ever

sem

ent h

isto

riqu

e es

t com

para

ble,

par

son

impo

rtan

ce,

au ré

veil

arab

e ap

rès l

’eff

ondr

emen

t de

l’Em

pire

ott

oman

, à la

fin

de la

Pre

miè

re G

uerr

e m

ondi

ale,

et a

u pa

nara

bism

e ap

rès l

a Se

cond

e G

uerr

e m

ondi

ale

– une

rupt

ure

anti-

colo

nial

iste

qui

déb

ouch

era

sur l

’avè

nem

ent d

’aut

ocra

tes d

éplo

yant

tous

leur

s eff

orts

pou

r em

pêch

er l’

émer

genc

e d’

une

soci

été

civi

le d

ans l

eurs

pay

s.La

Tun

isie

, où

le P

rint

emps

ara

be a

com

men

cé, a

ado

pté

la co

nstit

utio

n la

plu

s dé

moc

ratiq

ue d

u m

onde

ara

be. E

n oc

tobr

e, p

our l

a pr

emiè

re fo

is d

e so

n hi

stoi

re,

le p

eupl

e a

pu é

lire

son

Parle

men

t. Le

s isl

amis

tes q

ui a

vaie

nt g

ouve

rné

le p

ays d

uran

t deu

x an

s ont

été

sanc

tionn

és p

ar le

s urn

es. N

idaa

Tou

nes,

un

part

i laï

c qu

i réu

nit u

ne

vast

e pa

lette

de

cour

ants

, alla

nt d

e la

gau

che

mod

érée

aux

cons

erva

teur

s, l’a

em

port

é ha

ut

la m

ain.

Un

prés

iden

t ser

a él

u fin

nov

embr

e. D

iffér

ente

s rai

sons

exp

lique

nt p

our -

quoi

– m

algr

é to

utes

les i

ncer

titud

es –

le p

roce

ssus

de

tran

sfor

mat

ion

sem

ble

réus

sir e

n Tu

nisi

e. L

e pa

ys n

’a q

u’un

e fa

ible

impo

rtan

ce d

u po

int d

e vu

e gé

ostr

atég

ique

– à

la

diff

éren

ce d

e l’É

gypt

e, p

ar e

xem

ple.

Il n

’a p

as d

’impo

rtan

tes r

éser

ves d

e ga

z nat

urel

ou

de

pétr

ole

– con

trai

rem

ent à

l’Alg

érie

ou

à la

Lib

ye. S

on a

rmée

ne

doit

pas,

com

me

celle

de

l’Ég

ypte

, déf

endr

e se

s pri

vilè

ges e

t n’a

, par

cons

éque

nt, p

as d

’am

bitio

ns p

oliti

ques

. Et

surt

out,

la T

unis

ie p

ossè

de u

ne so

ciét

é ci

vile

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Page 49: Greenpeace Magazine 2014/04

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Page 50: Greenpeace Magazine 2014/04

48Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

Il y a 150 ans, l’homme redé-couvrit l’apiculture et chercha à la rendre plus efficace. Résultat: les abeilles vont aujourd’hui plus mal que jamais. De plus en plus d’api-culteurs aimeraient élever leurs abeilles «le plus naturel-lement possible». En quoi les pratiques et les philoso-phies se différencient-elles? Réponse de trois apiculteurs engagés.

Par Esther Banz

Professeur de l’école Rudolf Steiner à la retraite, Hans Studerus est aussi musicien professionnel. À la mort de son père, il dut s’occuper de la ferme familiale alors qu’il était encore adoles-cent. L’apiculture fait partie de sa vie. Tout petit, il devait attraper les essaims. «Je n’aimais pas ça, car si le voile était percé, à chaque fois, j’étais piqué.» Adulte, il élèvera ses propres colonies. Il pratique d’abord une apiculture conventionnelle, mais «avec le temps, je me suis rendu compte que l’alimentation, la repro-duction et l’habitat – trois aspects cruciaux de tout élevage – étaient devenus de plus en plus arti� ciels et nocifs pour les abeilles». Un siècle et demi plus tôt, les abeilles se nourris-saient exclusivement de nectar, de miel, de pollen et d’eau. Elles ne se reproduisaient qu’au moyen de l’essaim et avaient un lieu de nidi� ca-tion stable. Puis, l’homme a voulu rentabiliser l’apiculture...

Nous sommes en Argovie, sur une pente surplombant l’Aar. Studerus se tient devant ses dix ruches, des «ruches populaires» de type Warré. Ce sont des armoires en bois spécialementconçues pour une apiculture naturelle. L’asso-

ciation Free TheBees, dont Studerus est un membre dirigeant, les a perfectionnées. Tout en haut de la ruche, il a déposé la nourriture des abeilles, un mélange d’eau sucrée, de miel et de thé. La norme veut que les abeilles soient nourries par l’apiculteur, y compris dans l’api-culture naturelle. Or, pour les membres de FreeTheBees qui veulent recréer le plus possible les conditions régnant dans la nature, toute alimentation arti� cielle devrait être proscrite (voir graphique p. 50). Mais à chacun de décider jusqu’à quel point, relativise Studerus.

Des abeilles «surprotégées»Le «retour aux sources» et l’élevage «natu-

rel» sont des termes qui sonnent bien. Mais voilà, il y a un hic dans ce retour radical à la na-ture tel que le prône FreeTheBees: sur son site Internet, on peut lire qu’il faut compter avec des pertes pouvant atteindre 90% pour les colonies élevées de manière absolument na-turelle. Sur dix colonies, donc, une seule survit – dans le meilleur des cas. Les autres sont victimes du parasite varroa qui suce le sang des abeilles, du moins celles qui n’ont pas déjà succombé aux bactérioses ou à la faim.

L’être humain et l’agriculture intensive en sont les principaux responsables. Les mono-cultures, très répandues, limitent considérable-ment l’o� re de nourriture, même en été. En Suisse, il n’existe plus d’abeilles mellifères sauvages (à ne pas confondre avec les abeilles sauvages solitaires). Ce sont du reste des apiculteurs qui ont introduit le varroa. Entre-temps, les conditions de vie des abeilles se sont tellement détériorées que des mesures d’urgence sont nécessaires pour les aider. Il s’agit notamment d’éradiquer le parasite et, les années comme celle-ci, où la production de miel a chuté, de les nourrir avec de l’eau su-crée. Sans notre aide, les abeilles mourront vraisemblablement.

Pour FreeTheBees, la conséquence logique est que «les colonies d’abeilles doivent ap-prendre à survivre sans traitement contre la var-roase, et donc à lutter seules contre le parasite»,

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LES ABEILLES, ENTRE LIBERTÉ ET PROTECTION

Page 51: Greenpeace Magazine 2014/04

49Magazine GreenpeaceN° 4 — 2014

explique Studerus. Il pense qu’elles y arriveront si on leur en laisse le temps. Toutefois, le processus d’adaptation pourrait durer une bonne centaine d’années – aussi longtemps que l’apiculture moderne a mis pour rendre la vie confortable aux abeilles et les «surprotéger»: «Elles n’avaient plus qu’à fournir le plus de miel possible; elles ont ‹désappris› le reste, car on faisait le travail à leur place, notamment construire les alvéoles.»

Studerus ouvre l’une de ses ruches Warré. Huit rayons y sont suspendus. À la di� érence de l’apiculture conventionnelle, ses abeilles construisent elles-mêmes leurs rayons. Il expli-que: «C’est ce qu’on appelle le processus naturel de construction d’alvéoles. C’est la première tâche de l’essaim au printemps – auparavant la boîte est complètement vide. Le seul soutien que je leur apporte, c’est un peu de cire que je glisse dans la fente tout en haut. C’est là qu’elles construisent leurs premières alvéoles.

Laisser mourir les colonies trop faiblesQuelques jours plus tard, à environ soixante

kilomètres plus au nord, dans le Jura soleurois, Martin Dettli retire lui aussi de ses ruches des rayons «construits avec la cire que les abeilles ont produite et exsudée elles-mêmes», a� n de faire une démonstration. Dettli est président du groupe de travail AGNI (Arbeitsgruppe Naturgemässe Imkerei). Il a son propre site In-ternet, tient une chronique dans la Revue suisse d’apiculture et, à partir de l’an prochain, donnera des cours aux étudiants de la nouvelle � lière de formation continue préparant au diplôme d’apiculteur avec brevet fédéral. Dettli a tout le respect de Hans Studerus, qui, comme lui, défend la philosophie de l’asso-ciation Demeter concernant les populations d’abeilles, à savoir qu’une colonie est un orga- nis me et que la gaufre d’alvéoles en est un or-gane. C’est la raison pour laquelle Dettli renonce aux parois arti� cielles: «Je ne voudrais pas d’un organe étranger dans la ruche.»

La construction des alvéoles par les abeilles elles-mêmes est une caractéristique de l’api-culture prônée par Demeter. En outre, la repro-duction doit se faire par essaimage naturel. L’objectif, c’est que «les colonies restent ensem-ble et ne suivent pas une reine provenant de n’importe où». Martin Dettli est convaincu que les abeilles se retransmettent des informations:

«Les colonies d’abeilles doivent apprendre à survivre sans traitement contre la varroase.»

Hans Studerus

Page 52: Greenpeace Magazine 2014/04

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Élever naturellement les abeilles:une même intention, trois méthodes

Idée fondamentale et philosophie Pratique Interdi� ions

Label «Bourgeon bio»

• Élever et nourrir les abeilles en re� e� ant leur bien-être.

• Soigner les abeilles résist antes.• Utiliser des moyens naturels.• Promouvoir la diversité et un

éco syst ème vivant.

• Le rayon de collect e doit être limité à des zones non polluées, où l’on trouve de nombreuses e� èces. Le miel bio provient donc souvent de régions de montagne et de pays où pratiquement aucun pest icide n’est utilisé dans l’agriculture.

• La vieille reine peut être remplacée par une nouvelle – de préférence au moyen de l’essaimage naturel.

• Les parois médianes sont autorisées, avec de la cire de produ� ion biologique.

• Dans les ruches, sauf pour lutt er contre des maladies et des épidémies, seules des subst ances naturelles comme la propolis, la cire et les huiles végétales sont autorisées.

• Les acides oxalique et formique sont permis pour traiter la varroase.

• Pour passer l’hiver, il faut laisser d’impor-tantes réserves de miel et de pollen dans les rayons à couvain.

• L’alimentation artifi cielle des colonies est autorisée lorsque les réserves const ituées par les abeilles ne sont pas su� santes.

• Le miel crist allisé peut être réchauff é.

• Pour lutt er contre la varroase, aucune huile essentielle (p. ex. du thymol de synthèse) ne doit être utilisée.

• Les rayons qui renferment du couvain ne doivent pas servir à la product ion de miel.

• La dest ruct ion des abeilles dans les rayons ne doit pas être utilisée comme méthode associée à la récolte des produits coupées.

• Les ailes de la reine ne doivent pas être mutilées ou taillées.

• Il est interdit d’utiliser des abeilles génétiquement modifi ées.

• Le couvain des faux-bourdons ne doit pas être détruit (sauf comme moyen d’enrayer la varroase).

• Le pollen ne peut être récolté que si le ravitaillement des colonies n’est pas menacé. Il est interdit d’inst aller des pièges à pollen dans le trou d’envol.

Demeter

• La ruchée const itue dans son ensemble une entité. La reine est l’utérus de la colonie d’abeilles.

• La ruchée doit pouvoir se déve-lopper de manière organique.

• Une colonie d’abeilles doit pouvoir réguler elle-même un équilibre détruit; les mesures visent à encourager les méca-nismes d’autoguérison.

• Const ruct ion naturelle impérative.• Nombre limité de colonies d’abeilles dans

un même lieu.• Lors du choix de l’emplacement idéal pour

les ruches, privilégier les surfaces exploi-tées de manière biologique et dynamique.

• Reproduct ion et élevage uniquement par essaimage, sans formation de nou-veaux essaims.

• Les préparations proviennent de l’agricul-ture biodynamique.

• Le miel butiné par les abeilles doit const i-tuer une part essentielle des réserves d’hi-ver.

• Pas de miellée intermédiaire, c.-à-d. pas d’eau sucrée après la récolte de miel au printemps.

• Le miel doit être mis en bocaux sans être réchauff é.

• Ni l’élevage de reines et de larves ni l’insémination artifi cielle ne sont au-torisés.

• L’achat de reines sans colonie est interdit (l’achat avec colonie est pos-sible, mais elles doivent provenir uniquement d’élevages d’abeilles Demeter ou équivalents).

• Les méthodes visant à accroître la récolte de miel sont interdites.

• La cire ne doit pas présenter plus de 5 mg/kg de résidus de thymol (provient du traitement contre la varroase avec des huiles essentielles).

• Seules des races européennes sont autorisées, et donc pas de croisement avec des races d’autres continents.

FreeTheBees

• On suppose que l’abeille apprend au conta� de la nature et peut s’adapter aux change-ments.

• FreeTheBees cherche dès lors à copier le plus possible les conditions naturelles et à laisser la plus grande liberté possible aux abeilles.

• Lieu de nidifi cation st able.• Aucune mesure visant à accroître les rende-

ments.• Renoncement à toutes les interventions

possibles, y compris les compléments alimentaires. Les abeilles doivent se nourrir uniquement de ne� ar, de miel et d’eau, comme il y a 150 ans.

• Reproduct ion uniquement par essaimage.• Aucun traitement des colonies faibles ou

malades.

Aucune, uniquement des recommandations:

• L’apiculture doit être diversifi ée.• Les élevages mixtes sont encouragés.• La capacité d’adaptation des abeilles

aux modifi cations environnementales doit être favorisée (sélect ion naturelle).

Page 53: Greenpeace Magazine 2014/04

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«Le fait qu’elles constituent un organisme et leur savoir commun sont des éléments cru-ciaux pour moi.» Il n’y a pas de problème d’endogamie, «car les abeilles vont loin et sont fécondées par divers faux-bourdons». Dans cette méthode naturelle de reproduction, il est parfois nécessaire de dissoudre une colonie: «Tu ne peux pas protéger tout ce que la nature propose, il faut aussi � xer des limites.» Dettli fait donc ce que la nature ferait aussi: laisser mourir les colonies faibles. Mais, contrairement aux membres de l’association FreeTheBees, il permet aux plus fortes de survivre grâce à des soins et à une alimentation ciblés.

Martin Dettli explique: «De nos jours, l’apiculture est toujours un compromis extrême.» Avec le soutien de l’Institut de recherche de l’agriculture biologique (FiBL), cet agronome de formation s’est intéressé au traitement de la varroase. Ses conclusions con� rment la thèse de FreeTheBees selon laquelle les abeilles seraient en mesure de venir elles-mêmes à bout de ce parasite qui les menace. Avec une réserve de taille toutefois: «Dans notre environnement actuel, les colonies d’abeilles ne peuvent y arriver qu’avec l’aide de l’homme. Sans lui, il y aurait trop peu de nourriture.» Dettli en est convaincu: «Plus les conditions extérieures sont di� ciles, plus les apiculteurs doivent intervenir pour com-penser les lacunes.» Le fait que Martin Dettli prenne à ses colonies la plus grande partie de leurs réserves de miel – comme le font tous les apiculteurs à l’exception des représentants de FreeTheBees – et leur donne en échange de l’eau sucrée ne constitue pas une contradiction pour ce membre de Demeter. Il déclare: «Dans ce partenariat spécial, l’homme a droit au miel et aux autres produits des abeilles tels que la propolis et le pollen.» Pourquoi? «Dé-jà uniquement d’un point de vue médical, ces produits sont pour nous un don de la nature.»

Élever des superabeilles?La propolis est célébrée par les experts

fédéraux d’Agroscope comme le «plus puissant antibiotique naturel». Marco Paroni rentre dans le cabanon pour chercher un peu de ce pro-duit qu’il transforme, comme Martin Dettli et d’autres apiculteurs, en une teinture. Paroni exploite une centaine de colonies. Ses ruches sont placées à di� érents endroits, mais jamais plus de 17 à la fois et toutes à quelques mètres de

«Tu ne peux pas protéger tout ce que la nature propose, il faut aussi fixer des limites.»

Martin De� li

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distance les unes des autres. Il est l’un des rares apiculteurs professionnels en Suisse. Il peut en vivre, déclare-t-il non sans � erté. Paroni est apiculteur certi� é bio, ce qui ne signi� e pas que ses méthodes fassent l’unanimité. Au contraire: les représentants de FreeTheBees sont ses plus violents détracteurs. La raison? Il élève ses propres reines et ne laisse pas les colonies décider quand et comment elles vont se reproduire, mais intervient pour améliorer la génétique de ses abeilles mellifè-res – une méthode inadmissible pour de nombreux adeptes de l’apiculture naturelle, mais aussi pour Demeter.

Marco Paroni est toutefois convaincu du bien-fondé de cette approche et n’aurait pas peur d’un débat public sur le sujet, s’il y en avait un. Selon lui, sa méthode est la plus judicieuse pour assurer la survie des abeilles mellifères: «Avec l’élevage, l’homme a maintenu en vie des abeilles que la nature aurait éliminées. Le résultat, ce sont les abeilles faibles que nous avonsaujourd’hui. C’est pour moi l’une des raisons principales de la mort des abeilles et ce qui me conduit à élever des abeilles qui répondent aux exigences actuelles.»

Créer une superabeille, capable de braver les menaces causées par l’homme? Marco Paroni n’est pas le seul à caresser cette idée. Au fond, la philosophie de FreeTheBees va elle aussi dans ce sens, même si elle n’admet aucune intervention arti� cielle: dans une nature hostile aux abeilles, seules les plus résistantes doivent survivre. Pour Hans Studerus, il faudrait aller plus loin: «Ne devrait-on pas mo-di� er aussi cet environnement néfaste et créer un biotope dans lequel les abeilles et les autres insectes pourraient à nouveau exister?» s’interroge-t-il en regardant le paysage verdoyant mais traité aux pesticides et où, vers l’ouest, pointe la silhouette de la centrale nucléaire de Gösgen. www.freethebees.chwww.paronihonig.chwww.summ-summ.ch

Greenpeace s’engage pour une agriculture sans pe� icides: vidéos et infos sous protegeonsabeilles.ch.

Marco Paroni

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Greenpeace: Andreas Weissen, vous reprenez la lutte pour la protection des Alpes. Qu’est-ce qui vous y pousse?

Andreas Weissen: Les régions de montagne sont un biotope merveilleux, mais extrêmement sensible. Si le deuxième tube est réalisé, la protection des Alpes sera du pipeau. Je veux em-pêcher cela.L’article 84 de la Constitution exige que la Confédération «protège les Alpes contre les e� ets négatifs du tra� c de transit» et qu’elle limite les nuisances à un niveau qui ne porte pas atteinte aux êtres humains, aux animaux, aux plantes et à leurs espaces vitaux. Est-ce le cas?

Sûrement pas. Au lieu des cinq millions de tonnes de marchandises qui transitaient autrefois par la Suisse, on en a aujourd’hui envi-ron trois fois plus! Et voilà que le Conseil fédéral veut encore doubler la capacité du tun-nel en construisant un deuxième tube…Le Conseil fédéral dit qu’il souhaite ce deuxième tube seulement pour assainir le tunnel qui aura bientôt 35 ans.

C’est uniquement un prétexte pour imposer un second tube. Après le rejet massif du contre- projet Avanti prôné par le Conseil fédéral en 2004, qui prévoyait un assouplissement de l’article sur la protection des Alpes et aurait

FAIRE UN PIED DE NEZ AU DIABLE

POUR LA TROISIÈME FOISLe Conseil fédéral propose la construction d’un second tube au tunnel autoroutier du Gothard, non pas pour accroître les capacités de transport, mais pour permettre la réfection du premier tunnel. Andreas Weissen, père de l’initiative sur la protection des Alpes approuvée par le peuple en 1994, est de nouveau sur le pied de guerre. Responsable de la campagne contre un deuxième tube, il veut empêcher qu’avec l’augmentation du trafic routier, la protection des Alpes ne tourne à la farce.

Une a� ion de Greenpeace à l’entrée nord du tunnel du Gothard en 1990

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N permis la construction d’un deuxième tunnel au Gothard, il essaie maintenant de nous vendre la chose sous un autre emballage.Il nous jouerait un mauvais tour?

Très mauvais. La conseillère fédérale Doris Leuthard déclare qu’il s’agit d’un projet de réfection comme n’importe quel autre. En réalité, il s’agit d’un doublement de l’infrastructure. La protection des Alpes, décidée par le peuple, sera complètement laminée.Comment faire, sinon, pour résoudre le pro-blème de l’assainissement?

Au moyen d’une autoroute ferroviaire: les voitures et les poids lourds peuvent être pro-visoirement transportés par des trains. À moyen terme, le transport des marchandises devra de toute façon être assuré par le rail dans des conteneurs. On a quand même investi 24 milliards de francs dans les NLFA et les nouvelles infrastructures ferroviaires destinées à assurer ce transfert! La ministre des Transports a� rme que la capacité ne sera pas accrue, car, après l’ouverture du second tube en 2027, les tun-nels ne pourront être utilisés que sur une voie dans les deux sens.

Madame Leuthard peut dire ce qu’elle veut. Lorsqu’elles auront été construites, les quatre voies seront utilisées. L’ancien conseiller fédéral Hans Hürlimann avait promis, lors de l’ouver-ture du tunnel, qu’il ne deviendrait jamais un corridor à poids lourds. Les conseillers fédéraux partent, les camions arrivent.Vous ne croyez pas Doris Leuthard?

Une fois que le deuxième tunnel sera là, on se dira: pourquoi avoir construit un second tube qui n’est utilisé qu’à moitié et devant lequel les voitures bouchonnent? La Constitution et la loi seront alors rapidement modi� ées avec, comme conséquence, qu’on aura au Gothard deux fois plus de camions qu’aujourd’hui. Au Brenner, on en compte deux millions. Chez nous, il y en aura bientôt autant au lieu des 1,3 million actuels. Le tra� c de transit entre Bâle et Chiasso deviendra infernal. Les accidents et la pollution atmosphérique augmenteront massivement. Deux tunnels ne seraient pas plus sûrs? D’après les normes de l’UE, il est même inter-dit d’en construire à une seule voie.

Au contraire. Les accidents augmenteraient, car, en doublant la capacité du Gothard, le tra� c

de transit progresserait fortement. De plus, le second tunnel coûtera trois milliards de plus qu’un assainissement avec une autoroute ferroviaire. De l’argent qu’on aurait pu a� ecter ailleurs, pour résoudre des problèmes de circulation plus urgents dans les aggloméra-tions – y compris des mesures pour améliorer la sécurité. Il y a régulièrement des bouchons au Gothard. Ne faut-il pas y remédier?

Les problèmes de tra� c les plus graves ne se trouvent pas au Gothard, avec les bouchons le week-end et lors des départs en vacances, mais chaque matin et chaque soir, à la périphérie des villes. D’ailleurs, au Gothard, les conteneurs pourraient déjà être chargés sur le rail.Pourquoi un routier devrait-il se convertir au transport ferroviaire?

C’est le moyen de transport le plus écolo-gique, le plus sûr et le plus e� cace. Mais comme le rail paie des salaires décents, cela coûtera plus cher que les salaires de misère des chauf-feurs de poids lourds d’Europe de l’Est qui traversent la Suisse.Le conseiller national UDC Ulrich Giezen-danner, qui est patron d’une entreprise de transport, prétend qu’il n’y a pas assez de capacités pour transporter toutes les mar-chandises sur le rail.

«Au lieu des 1,3 million de camions actuels, on en aura bientôt 2 millions. Les accidents et la pollution atmosphérique augmenteront massivement.»

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Les capacités existent. Avec les nouveaux tunnels de base au Lötschberg et au Gothard, on pourrait transporter 30 millions de tonnes par le train. Pour résoudre les problèmes au Gothard, vous proposez une Bourse du transit alpin, une sorte de système de réservation.

Oui, cela fonctionne parfaitement avec le tunnel sous la Manche: celui qui a un billet peut emprunter le tunnel en train. Dans le tra� c alpin, on pourrait aussi introduire un système de réservation et négocier les droits de passage. Le prix serait plus ou moins élevé suivant la demande.Un tel système de sas ne revient-il pas à tor-piller la libre circulation des marchandises dans l’UE?

On aurait une libre circulation des marchan-dises cadencée selon les capacités des routes. D’ailleurs, peu importe aux bananes si elles sont transportées par le train ou par camion. Les marchandises peuvent être échangées librement, mais sur de longues distances, il convient d’utiliser le moyen de transport le moins nocif pour l’homme, la faune et la � ore. Or, c’est le train.De toute façon, de nombreux transports de marchandises sont un non-sens écono-mique, n’est-ce pas?

Naturellement! L’eau minérale, qui est trans-portée d’un côté du Gothard vers l’autre, en fournit un exemple. Le tunnel du Mont-Blanc, où des camions chargés de San Pellegrino croisent ceux qui transportent de l’Evian. Le lait traverse la moitié de l’Europe pour être transfor-mé en yaourt. Des porcs vivants sont trans-portés de Belgique en Italie dans des camions à bestiaux; au bout d’un mois, on peut les abattre et vendre leur viande comme jambon de Parme d’origine contrôlée. Au moins le transport de produits in-� ammables est interdit dans les tunnels des Alpes…

…avec pour résultat que 90% des matières dangereuses traversent le col du Simplon à 2000 mètres d’altitude. C’est une vraie bombe à retardement. Mais la conseillère fédérale Doris Leuthard ne veut rien entendre d’un trans-fert vers le rail. Ainsi, chaque jour, nous nous attendons à ce qu’une grande catastrophe écolo-gique arrive si les freins d’un camion lâchent.Donc, adieu la route et vive le rail?

Certainement! Qu’il s’agisse de bananes ou de produits dangereux, le transport ferroviaire est mille fois plus sûr que la route.Quelle légende aimeriez-vous raconter après la votation contre le deuxième tube?

Que nous avons pu, pour la troisième fois, faire un pied de nez au diable. Lors de la construction du pont de Schöllenen, les Uranais avaient récompensé le diable de son aide, non pas en lui livrant une âme, comme il était convenu, mais un bouc. Toutefois, assoi� é de vengeance, le diable enverra des siècles plus tard des colonnes de poids lourds nauséa-bondes au travers du Gothard. Avec l’Initiative des Alpes, les citoyens suisses ont mis un terme à ce dessein diabolique en 1994. Après la votation, j’aimerais pouvoir raconter qu’avec le non au deuxième tunnel, nous avons préservé le pays d’un tra� c de transit infernal.Propos recueillis par Daniela Schwegler.

Greenpeace Suisse e� l’une des cinquante or-ganisations nationales et régionales à faire partie de l’association «Non au 2e tube au Gothard», qui veut empêcher une pollution inutile des Alpes. Le délai référendaire expire le 15 janvier 2015. Téléchargez donc dès maintenant les formulaires de signature, remplissez-les et envoyez-les à: www.initiative-des-alpes.ch.

Le militant valaisan Andreas Weissen, âgé de 57 ans, dirige la campagne de l’association «Non au 2e tube au Gothard». Il s’e� fait connaître comme président et militant de l’Initiative des Alpes (jusqu’en 2009) et comme re� onsable du Programme alpin du WWF (de 2001 à 2005). De 2007 à 2009, il était membre du Conseil de fondation de Greenpeace Suisse. Andreas Weissen a fait des études de journalisme, de pé-dagogie et d’hi� oire économique et sociale à Berne et à Fribourg. Il aime le cor des Alpes et les randonnées en montagne, et adore raconter des légendes. www.andreas-weissen.ch

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Des sympathisants du monde entier couchent Greenpeace sur leur te� ament

Une nouvelle communauté e� en train de se con� ituer. Ceux qui en font partie ne se connaissent pas forcément. Mais tous sont unis, aux quatre coins de la Terre, par un vœu commun: celui que leur soutien à Greenpeace soit également e� cace à l’avenir grâce à leur te� ament.

Qu’il s’agisse de Mary Ambrose, femme d’a� aires cana-dienne à la retraite, de Bob Do� erho� , père de famille hollan-

dais, de Jürg Heep, prote� eur de l’environnement au� ralien, ou de la chimi� e et hygiéni� e du travail Barbara Martens, en Suisse, toutes et tous se trouvent, person nellement, dans une situation familiale ou un environnement culturel di� érents. Pourtant, une même motivation les anime: ils souhaitent la paix, la durabilité et la prote� ion de la planète.

Comment pourrions-nous remercier tous ceux qui nous soutiennent? En utilisant les fonds qu’ils nous ont légués pour fi nancer notre travail quotidien: lu� er contre le changement

LE DÉSIR COMMUN D’UN AVENIR VERT ET PACIFIQUE

Mary AmbroseCANADA

«J’ai décidé de léguer mon argent à des amis qui ont tra-vaillé dans des professions mal payées et à Greenpeace. Comment ne pas soutenir une approche non violente pour sauver la planète d’une de� ru� ion irréversible? J’ai travaillé pour Greenpeace et j’ai vu comment l’organisa-tion s’engage, en notre nom, contre la convoitise et la bêtise. Je soutiens Greenpeace — de mon vivant et après.»

Barbara F.ÉTATS-UNIS

«Je ne peux pas m’imaginer une meilleure façon de mourir qu’en sachant que l’on a tout fait pour soutenir et conserver ce qui nous a ren-dus heureux. Et ce, non seulement pendant notre vie, mais aussi après. On peut utiliser sa propre fortune pour préserver et renforcer ce qui nous tient à cœur. Notre vie sur Terre e� éphémère. Donnons-lui un sens — dès maintenant, mais aussi pour l’avenir!»

Bob Do� erho� PAYS-BAS

Il était clair pour Bob qu’une partie de son héritage irait à une cause ju� e. Son choix s’e� porté sans hésiter sur Greenpeace qu’il soute-nait fi dèlement. «J’ai aimé la nature dès mon plus jeune âge. Aujourd’hui encore, l’endroit où je me sens le mieux, c’e� la forêt. Je peux re� er allongé des heures durant sur le sol et jouir des odeurs, des couleurs et des bruits qui m’environnent.» Barbara Martens

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«Les animaux, la prote� ion de la nature et le bonheur des enfants issus de milieux défavorisés sont importants pour moi. Je me suis décidée pour Greenpeace, parce que le courage et la désobéis-sance civile m’impres-sionnent, et parce que cela corre� ond à ma person-nalité.»

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climatique, défendre l’Ar� ique d’une exploitation abusive, pro-téger les océans de la planète et nos forêts primaires ainsi que leurs habitants.

Greenpeace apprécie toute forme de don. Mais un don sous forme de legs va au-delà du simple soutien fi nancier. Il s’agit d’un message hautement moral et porteur de valeurs à ceux qui détiennent aujourd’hui le pouvoir, mais aussi aux générations futures, dont la tâche e� de préserver la na-ture.

De plus en plus de gens suivent cet exemple et couchent Greenpeace sur leur te� ament.

Si vous souhaitez en savoir plus à ce sujet, veuillez conta� er Muriel Bonnardin par téléphone au numéro 044 447 41 64 ou par courriel à l’adresse: claudia.� [email protected]. Vous trouverez un aperçu des possibilités exi� antes sur notre site Internet: www.greenpeace.ch/legs.

LE DÉSIR COMMUN D’UN AVENIR VERT ET PACIFIQUE

Francine ToussaintBELGIQUE

«J’ai rédigé ce te� ament en faveur de Greenpeace, car j’aimerais m’engager pour l’avenir de notre société et de notre environnement. Green-peace e� l’une des rares organisations qui s’en sou-cient et qui lu� ent pour cela.»

Pascal BoriesFRANCE

«La prote� ion de l’environ-nement me tient à cœur. Je ne peux pas comprendre pourquoi les êtres humains détruisent la planète dans une logique de profi t à court terme. Cela m’a� ri� e.»

Maike et Stephan BöhmALLEMAGNE

«Nous n’avons pas d’enfants et nous aimons beaucoup la nature. Il allait donc de soi pour nous de faire un legs à Greenpeace en tant qu’or-ganisation écologique en-gagée et puissante.»

Fabrizio GobbiITALIE

«Notre vie e� trop courte pour que nous puissions en-core voir le monde guéri de toutes ses blessures. Avec un legs en faveur de Green-peace, j’aide les prochaines générations à continuer de protéger notre planète. Nous n’en avons qu’une à notre di� osition, non comme un moyen, mais comme une fi n en soi.»

Jürg Heep († 2011)AUSTRALIE

Sa compagne Imogen témoigne: «La plénitude de la vie de Jürg témoigne de sa générosité, de son expérience de la vie et de son engagement pour la prote� ion de l’environnement. La nature était sa grande passion et la préservation des lagunes à l’e� du Gippsland aura été son plus beau cadeau à ses proches.»

Anders BjerkénSUÈDE

«Mes hobbies ont toujours été liés à la nature: faire de la voile ou du canoë-kayak, plonger. La mer me tient à cœur. Je soutiens Greenpeace depuis des années, car c’e� une organisation remar-quable, qui fait du bon travail. Mais la défense de l’environ-nement ne connaît pas de limites temporelles et doit se poursuivre après ma mort. C’e� pourquoi Greenpeace fi gure parmi mes légataires.»

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Depuis les années 1960, l’industrie pétrolière russe est responsable d’une

marée noire insidieuse dans la République des Komis, située à 2000 km à l’est de

Moscou, aux portes de l’Arctique. Elle y exploite trois immenses champs pétro-

lifères sans se soucier de la nature ni des habitants.

Photos: Daniel Müller et Denis Sinyakov

Aujourd’hui, le territoire des Komis est truffé de trous de forage – plus de 3000! –, sillonné de milliers de kilomètres d’oléoducs et de nombreuses routes et installations utilisées par les grands groupes pétroliers.

La section russe de Greenpeace opère dans cette région depuis des années. En août 2014, une Oil Spill Patrol composée de 44 militants et bénévoles originaires de treize pays s’est rendue sur place pour localiser, étudier et nettoyer les fuites de pétrole.

Au bout d’une semaine, ils avaient repéré 25 sites pollués et récupéré 50 tonnes de pétrole. Avec la popula-tion, des militants locaux et des représentants des grands groupes pétroliers, ils ont élaboré des recomman-dations à l’attention des autorités locales.

Les autochtones de Sibérie et de Russie septentrionale et orientale – environ 250 000 personnes – sont l’un des groupes les plus menacés. Leur économie et leurs formes de vie traditionnelles dépendent directement de la pêche, de la chasse et de l’élevage des rennes. Les activités pétrolières ont des conséquences sociales catastrophiques pour eux.

Le taux de suicide en Russie est déjà un problème national. Dans la République des Komis, il est presque deux fois plus élevé – et trois fois plus dans les communau-tés indigènes.

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Greenpeace Russie

Greenpeace Russie a documenté plus de 200 cas de fuites de pétrole dans la République des Komis et transmis en 2011 les preuves correspondantes à Rospri-rodnadzor, le service régional responsable de la gestion des res-sources naturelles. Ce dernier a véri� é et con� rmé neuf cas de fuites à proximité d’Usinsk et de Vozisky. Il a ensuite demandé à Lukoil de remédier aux dégâts provoqués. Le grand groupe pétro-lier n’ayant ni pris en charge les coûts occasionnés ni nettoyé les zones polluées, le cas a été trans-mis à un tribunal.

La tentative de Lukoil* de contester ce jugement a échoué. L’amende, d’un montant de 13,5 millions d’euros est en soi un succès pour Greenpeace Russie, car les amendes in� igées pour de tels accidents pétroliers sont rare-ment supérieures à 1000 euros. Face à une jurisprudence aussi laxiste, les compagnies pétrolières ne se sentent pas obligées de changer quoi que ce soit à leurs pratiques irresponsables sur le territoire komi. C’est la raison pour laquelle les accidents pétro-liers y sont si fréquents.* Le groupe Lukoil, qui exploite les oléoducs, est exclusivement représen-té par sa � liale Litasco SA, dont le siège se trouve à Genève. Litasco est responsable de la commercialisation mondiale du pétrole provenant de l’exploitation en Russie et du � nan-cement du groupe.

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1 et 4 Idylle trompeuse: la Kolva a l’air propre, mais elle e� régulièrement polluée par des ruptures d’oléoducs — il y a 17 ans, 100 000 tonnes de pétrole se sont écoulées dans ce� e rivière.

2 Poison: les habitants du village se ravitaillent en eau à un réservoir contaminé. L’eau a une odeur nauséabonde et un goût de métal.

3 Maigre prise: «Il y a quarante ans, les saumons qu’on pêchait avaient la longueur de mon bras», explique ce pêcheur des bords de la Kolva. Aujourd’hui, ils sont rares et contiennent un taux anormalement élevé de sub� ances toxiques.

5 Situation préoccupante: à 84 ans, l’ancien éleveur de rennes Viacheslav Vasilievich aide encore à cultiver des pommes de terre. «Les récoltes diminuent depuis des années à cause du pétrole», se lamente-t-il.

6 Passé révolu: Vasilievich montre une photo de l’époque où ses 2000 rennes paissaient encore sur des terres non polluées. Aujourd’hui, les 3000 trous de forage rendent l’élevage impos-sible.

7 Pauvreté: bien qu’il n’ait que 200 euros par mois pour vivre, il e� le 70e sur la li� e d’a� ente de la maison de retraite. Les nombreuses décora-tions qui lui ont été décernées en tant qu’éleveur de rennes ne lui sont d’aucune aide.

8 Travail ingrat: deux bénévoles de la Oil Spill Patrol ne� oient une étendue d’eau près d’Usinsk, une a� ivité pénible et salissante.

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Photo Award:les gagnants

Cet été, Greenpeace a lancé, avec le magazine Geo, un concours s’adressant aux photographes professionnels de Suisse et d’Allemagne. Nous leur avons demandé de soume� re des projets de reportage inédits portant sur le thème de l’environ-nement et se di� inguant par un regard novateur sur le sujet. Sur plus de cent projets reçus, le jury en a nominé huit qui ont été notés par 6000 visi-teurs du site www.photo-award.org. Le Prix du public a été décerné à Manuel Bauer pour son reportage intitulé Sam Dzong — un vil-lage déménage. Manuel Bauer décrit Sam Dzong, dans l’ancien royaume du Mu� ang, comme «le plus bel endroit du monde». Avec ses photos, mais aussi au moyen de dons, il s’engage pour des gens que le changement climatique a contraints de qui� er leur village et de recon� ruire leurs mai-sons dans une autre vallée. «Nous avons le projet ambitieux d’inaugurer le nouveau village vers le 20 mai 2015», explique Manuel Bauer. Le projet se prolongera au-delà: le déménagement se fera progressivement. «Il faudra encore plusieurs an-nées jusqu’à ce que les nouveaux champs soient fertiles.» Les deux Prix du jury sont allés à Dmitri Leltschuk, avec Mémoires d’un chasseur, et Uwe H. Martin, avec Landrush — Green Revolution 2.0. Ce dernier reportage présente des images radicales sur un sujet tragique: en Inde, de plus en plus de per-sonnes sont a� eintes de cancers à cause de l’uti-lisation de pe� icides. À bord du «train du cancer», Uwe H. Martin montre le prix que la société paie pour le progrès de l’agriculture. Dans ses Mémoires d’un chasseur, Dmitri Leltschuk se penche sur le changement clima-tique dans l’Ar� ique. La fonte de la banquise pousse les ours blancs de plus en plus près des zones habitées. Les photos de Leltschuk montrent des ours dont la fourrure e� râpée aux «coudes»

parce qu’ils ont dû nager trop longtemps, ou une patrouille � écialisée, dont le chef, un chasseur de la vieille école, e� devenu le prote� eur des ours et des hommes. Les prix � onsorisés par Greenpeace en 2015 per-me� ront aux trois photographes de réaliser leurs projets. Les deux Prix du jury, d’un montant de 10 000 euros chacun, seront publiés pour la pre-mière fois dans Geo; les photos du Prix du pu-blic, de 8000 euros, paraîtront dans le magazine Greenpeace. Le Greenpeace Photo Award e� organisé en partenariat avec le magazine Geo. Le jury de ce� e année se composait de Peter Pfrunder (dire� eur de la Fondation suisse pour la photographie), Ingo Taubhorn (conservateur aux Deichtorhallen, à Hambourg) et Ruth Eichhorn (réda� rice photo à Geo).Informations complémentaires: www.photo- award.org

Public EyeLife-time Award

Depuis 2005, Public Eye je� e un regard critique sur les pratiques commerciales de certaines en-treprises et o� re, avec ses «Awards», une plate-forme pour dénoncer publiquement les violations des droits humains, les conditions de travail dé-gradantes, la de� ru� ion de l’environnement ou la corruption. Les prix sont décernés chaque année durant le World Economic Forum (WEF) de Davos. Ils montrent aux a� eurs de l’économie mondiale que les pratiques commerciales méprisant la di-gnité humaine et polluant l’environnement ont des conséquences, pour les personnes concernées, mais aussi pour l’image de marque des entreprises. En 2015, nous dresserons un bilan. Nous voulons évoquer les succès, mais aussi montrer ce qui re� e à faire en matière de re� onsabilité des en-treprises. Le jury a séle� ionné des photos d’an-ciens «lauréats» pour lesquels les internautes peuvent voter en ligne depuis le 19 novembre 2014. L’entreprise qui aura obtenu le plus de voix se verra décerner le Public Eye Lifetime Award à Davos.Vous souhaitez voter? Parmi les pires entreprises, vous avez le choix entre Walmart (commerce de détail), Chevron (énergie), Dow Chemical (chimie) et Goldman Sachs (fi nance), mais aussi le géant suisse des matières premières Glencore et le grand groupe énergétique russe Gazprom.Pour en savoir plus sur les nominés et voter, ren-dez-vous sur www.publiceye.ch.

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La prote� ion des forêts à la croisée des chemins

Par Stefan Kerschbaumer. Le label FSC e� censé préserver les dernières forêts primaires et garantir une exploitation fore� ière sociale et écologique. Dans une étude, Greenpeace a révélé de graves anomalies au niveau de la certifi cation. Après d’âpres négociations, le label devrait être renforcé. La demande de bois certifi é FSC augmente. Cela semble une bonne nouvelle. Le Fore� Steward-ship Council (FSC), fondé il y a une vingtaine d’années, n’avait-il pas pour obje� if d’établir une norme internationale pour une ge� ion durable des forêts? «Or, la demande de bois FSC e� supé-rieure à l’o� re. Les gros acheteurs européens, en particulier, exigent des garanties de durabilité et font confi ance au label FSC», explique A� i Roesle, � éciali� e des forêts auprès de Greenpeace. Pre-nant l’exemple de la Russie, elle explique com-ment ce� e situation peut transformer le label en une menace pour les forêts au lieu de les protéger. La Russie e� , après le Canada, le deuxième plus gros fournisseur de bois certifi é FSC. Les fore� iers exploitent une surface de 38,5 millions d’he� ares, une région plus grande que l’Allemagne. Toutefois, contrairement à l’obje� if initial du label, ils pra-tiquent des coupes à blanc dans de nombreuses forêts certifi ées FSC de la taïga russe. Des ONG locales parlent déjà de «wood mining», et donc d’aba� age des arbres plutôt que d’exploitation fo-re� ière. De nombreuses entreprises russes surex-ploitent sy� ématiquement la forêt et pillent ses réserves sans vergogne. À cause du climat rude, les forêts ne se régénèrent que très lentement et le re-boisement n’e� pas rentable. Pour être malgré tout en mesure de répondre à la demande en bois label-lisé FSC et continuer d’exporter, les exploitants ont commencé à aba� re des forêts primaires encore préservées. «Sans le label, de nombreux produc-teurs qui exploitent des forêts méritant d’être pro-tégées n’auraient pas de clients», ajoute Roesle.

Lors de l’Assemblée générale de septembre, Greenpeace a expliqué aux membres du FSC que la prote� ion des dernières forêts inta� es dans le cadre de la certifi cation était insu� sante. Faute d’alternatives, le label FSC re� e toutefois l’in� ru-ment le plus puissant pour garantir une exploita-tion fore� ière durable. C’e� la raison pour laquelle Greenpeace s’e� ba� ue pour que le label soit ren-forcé – avec succès: FSC doit prendre des me-sures, surtout pour conserver les dernières forêts primaires inta� es. Il s’agit notamment de cher-cher d’autres formes d’exploitation fore� ière, avec des entreprises plus petites. Greenpeace s’enga-gera pour que ce� e décision soit rapidement mise en œuvre et pour que le FSC redevienne un label qui assure une prote� ion e� cace des forêts. Greenpeace Suisse recommande aux consom-mateurs de privilégier en premier lieu le bois FSC suisse, puis le bois suisse sans label ou le bois FSC en provenance d’Allemagne.

Plutôt que des comprimés d’iode — fermons

les centrales!Cet automne, près de cinq millions de Suisses ont trouvé dans leur boîte aux le� res un cadeau inat-tendu: une boîte de comprimés d’iode. En orga-nisant ce� e di� ribution, les autorités adme� ent qu’un accident dans une centrale nucléaire peut se produire à tout moment. Il e� e� arant de voir la manière dont les représentants o� ciels laissent entendre que ces comprimés protégeraient la po-pulation en cas d’urgence. Greenpeace ne pouvait laisser passer un message aussi incomplet. Pen-dant plus d’un mois, nous avons sensibilisé la po-pulation au problème — notamment en di� ribuant un fl yer provocateur — et avons exigé une réa� ion. Un travail médiatique ciblé et un site Internet com-plet ont permis de relancer avec succès le débat concernant l’utilité des comprimés d’iode et les risques d’accident nucléaire. La petite graine ger-mera... Greenpeace continuera de se mobiliser pour que la sortie du nucléaire se concrétise.

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Jeunesse Solaire à Köniz, Trubschachen et Langnau

Jeunesse Solaire a déployé une grande a� ivité ces derniers mois. Trois projets ont été mis sur pied coup sur coup. Lors de la Semaine solaire organi-sée à Trubschachen dans l’Emmental, plus de 130 écoliers ont pu s’initier théoriquement, pratique-ment et de manière ludique à l’énergie solaire. La cuisine solaire n’a désormais plus de secrets pour eux. Ils ont en outre réalisé des expériences et aidé à recenser le potentiel solaire de la commune: après avoir mesuré les toitures des maisons du vil-lage, ils ont calculé, à l’aide du site www.o� ensive-solaire.ch, le potentiel de produ� ion de courant et de chau� age solaire.Le principal projet de la semaine était l’in� allation de la centrale photovoltaïque d’une puissance de plus de 130 kWp sur le toit de l’école Hasenlehn. Guidés par un pro, Hans Wiedmer (www.dach- wiedmer.ch), les élèves ont monté les panneaux solaires: ils ont fi xé la sub� ru� ure au toit, puis hissé les panneaux qu’ils ont ensuite raccordés au réseau éle� rique. La Fête solaire a eu lieu à l’école le 22 août, à l’occasion de l’inauguration de la centrale. Les résultats de ce� e semaine ont été présentés aux parents, aux habitants et autres in-téressés. Le conseiller national PBD Hans Grunder était l’orateur invité. Le deuxième projet s’e� déroulé à Langnau, toujours dans l’Emmental, où deux écoles ont réalisé chacune une semaine d’a� ivités sur le thème de l’énergie solaire. Sous la dire� ion du bureau Weichen � ellen (www.weichen� ellen.ch) et de Jeunesse Solaire, les élèves ont recensé le potentiel des toits pour le cada� re solaire de la commune et appris un tas de choses précieuses sur les énergies renouvelables. Pour la première semaine organisée à l’école d’Oberfri� enbach, il faisait un temps idéal. Après avoir recensé le po-tentiel des toitures, les élèves ont encore pu cuire des brownies et du pop-corn avec un four solaire. La deuxième semaine, les élèves de l’école Ilfi s ont parcouru à vélo les collines de Langnau pour recenser le potentiel solaire des derniers toits de la commune. Les deux classes pourront aider à con� ruire une centrale solaire en novembre. Les scouts Falken� ein de Köniz ont joué un rôle crucial dans le troisième projet. Très tôt déjà, ils avaient compris l’intera� ion entre pédagogie et durabilité, eux qui ont reçu le Prix de l’énergie du canton de Berne et qui ont con� ruit la première

cabane de scout de Suisse à recevoir le label Minergie. Les entraînements di� ensés à l’Inter-national Scout Center de Kander� eg devraient perme� re à ce� e � ratégie de faire tache d’huile à l’échelle internationale.Informations complémentaires sur: www.greenpeace.org/switzerland/de/Themen/Jugendsolar (en allemand).

Lego met un frein à Shell Une campagne de Greenpeace a rencontré un grand succès: Lego a résilié un contrat conclu avec Shell en 2011 portant sur 100 millions de francs après s’être rendu compte que le géant du pétrole avait surtout cherché à collaborer avec Lego pour redorer son image. Des boîtes de briques Lego avec lesquelles on pouvait fabriquer, par exemple, des petites voitures de course ornées du sigle de la compagnie pétrolière étaient vendues dans les � ations Shell. En juillet dernier, Greenpeace a di� usé sur YouTube une vidéo me� ant en scène un paysage polaire, con� ruit en briques Lego et peuplé d’Inuits, d’ours polaires et de chiens de traîneaux, bientôt recouverts par une marée noire. La pétition qui l’accompagne a recueilli plus d’un million de signatures dans le monde.

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Hommage

Rachel Carson – pionnière du mouvement écologiste

«Imaginez un printemps silencieux...»

Il y a cinquante ans disparaissait «l’une des femmes les plus influentes de son temps par la puissance de son savoir et la beauté de sa langue», pour repren-dre les termes du New York Times. Biologiste marine, Rachel Carson doit sa notoriété non seulement à l’étendue de ses connaissances et à un sens exception-nel de l’observation des phénomènes naturels, mais aussi à des ouvrages qui conjuguent rigueur scien-tifique et sensibilité poétique. Ses livres et articles sur la vie au fond et autour des océans seront des best- sellers et feront connaître la jeune naturaliste améri-caine dans tout le pays. Mais c’est surtout dans son ouvrage majeur, Silent Spring (Printemps silencieux, (Printemps silencieux, ( Paris, Plon, 1963), où elle attire l’attention sur l’utilisation inconsidérée des pesticides et sur ses conséquences, qu’elle expose sa vision écologique de l’environnement. Cette femme courageuse et engagée sera à l’origine du mili-tantisme écologique et de la création de nombreuses associations de protection de l’environnement – qui aboutiront à la création de l’Agence de protection de l’environnement aux États-Unis, en 1970, et à une prise de conscience plus aiguë des risques liés à l’utilisation des produits chimiques dans l’agriculture. Signalons la parution d’une biographie détaillée en allemand: Dieter Steiner: Rachel Carson — Pionierin der Ökologie bewegung, Oekom Verlag, Munich, 2014, ISBN-13: 978-3-86581-467-8, CHF 37,90

Agriculture

Lancement de l’initiative pour les

vaches à cornes C’est parti! La cause défendue dans la pétition en faveur du «franc pour les cornes» n’ayant pas été intégrée dans la politique agricole 2014–2017, l’infatigable agricul-teur de montagne jurassien Armin Capaul vient de lancer, avec le groupement d’intérêts Hornkuh, l’initiative populaire «Pour la dignité des animaux de rente agri-coles». Il s’agit de récolter 100 000 signatures d’ici au 23 mars 2016. L’initiative demande à la Confédération de créer des me-sures économiquement incitatives à l’égard des formes d’exploitation naturelles et respectueuses de l’environnement et des animaux. Les propriétaires de vaches, taureaux reproducteurs, chèvres et boucs reproducteurs doivent, en particulier, être soutenus � nan-cièrement, à condition que les animaux adultes conservent leurs cornes.Vous aussi, faites un ge� e en faveur des vaches cornues et signez ce� e initiative sur www.valengiron.ch.

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Cinéma

Everyday Rebellion Un � lm d’Arash et Arman T. Riahi

Un documentaire et un projet de cross-media sur le potentiel de l’activisme non violent et de la dés-obéissance civile moderne. Les méthodes de résistance les plus insolites et créatives constituent le � l rouge de ce � lm qui présente la vie et le travail d’activistes aux quatre coins du monde. Ce faisant, ils risquent souvent leur vie dans leur lutte pour un avenir meilleur.Le DVD du fi lm n’e� pas encore di� onible. www.everydayrebellion.com

Engagement

La prochaine marée noire aux Baléares?

Les associations de voyagistes suisses et allemandes s’inquiètent du projet du grand groupe pétrolier britannique Cairn Energy. Celui-ci veut faire des forages pétroliers et gaziers en Méditerranée, au large d’Ibiza. Plus de 125 000 ci-toyens espagnols s’opposent à cette décision. Dans l’espace ger-manophone, plus de 210 000 per-sonnes ont signé la protestation d’OceanCare visant à empêcher les risques de marée noire et de pollution sonore sous-marine, fatales pour les animaux marins.www.oceancare.orgwww.silentoceans.org

Livre

LE CAPITALISME CONTRE LE CLIMAT

Dans son dernier ouvrage, This Changes Everything: Capitalism vs. the Climate, l’influente essayiste canadienne Naomi Klein dénonce les liens entre économie capitaliste et dérèglement climatique. Elle appelle à une transformation radicale de notre économie et de nos façons de penser.

Dans ce dernier ouvrage, qui paraîtra ce printemps en français aux éditions Actes Sud, Naomi Klein soutient que les processus de dérégulation des échanges internationaux sont indissociables de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre. L’auteure de No logo: la tyrannie des marques et de La stratégie du choc: montée d’un capitalisme du désastre démontre comment la quête incessante de la croissance nous a enfermés dans un système qui n’est pas compatible avec la pérennité du climat.

La réalité indéniable du réchauffement climatique confronte aujourd’hui la civilisation à un choix difficile: continuer à faire comme si de rien n’était, en aggravant les inégalités, car les conséquences du changement climatique affectent en premier les plus pauvres, ou essayer une voie radicalement différente de penser notre rapport au monde. Malheureusement, «il est toujours plus facile de nier la réalité que d’abandonner notre vision du monde», écrit l’auteure. Naomi Klein, This Changes Everything: Capitalism vs. the Climate, New York, Simon & Schu� er, 2014, 566 pp. ISBN-13: 978-1-45169-738-4

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ÉnergieÉnergie

Vignette solaire 2015: du courant vert pour votre vélo

électrique La vignette solaire est un autocol-lant pour votre vélo électrique (50 francs), votre téléphone mobile ou votre ordinateur (10 francs) qui montre que votre appareil est alimenté par du courant solaire. Grâce à la vente de chaque vignette solaire, Solafrica garantit la pro-duction d’autant de courant solaire qu’un vélo électrique, un ordina-teur ou un téléphone mobile en consomme durant une année. Les gains ainsi enregistrés lui per-mettent de soutenir des projets de promotion de l’énergie solaire en Afrique.

Voilà comment cela fonctionne: vous rechargez la batterie de votre vélo électrique à une prise de courant à votre domicile. Des centrales solaires de Suisse pro-duisent l’électricité pour cette vignette et l’injectent dans le ré-seau public. En contrepartie, Solafrica reçoit de Swissgrid le certi� cat d’origine correspondant. L’achat de la vignette solaire permet de � nancer la valeur ajou-tée écologique du courant solaire par rapport au courant tradi-tionnel provenant des centrales nucléaires ou des centrales à gaz. Les centrales solaires sont construites par Greenpeace en collaboration avec Jeunesse Solaire. La toute dernière centrale

a été réalisée avec des scouts du monde entier à l’International Scout Center de Kandersteg.

Le produit de la vignette solaire est a� ecté à des projets de forma-tion de techniciens solaires en Afrique. Au Kenya, Solafrica gère, par exemple, le Sarah Obama Solar Learning Centre, où une vingtaine de jeunes Kényans – garçons et � lles – reçoivent chaque année une formation à la tech-nique du solaire. Parallèlement, Solafrica soutient les jeunes gens désireux de créer leur propre entreprise solaire au Kenya, au Cameroun ou en République démocratique du Congo.La vigne� e peut être commandée sur www.solarvigne� e.ch.

Drame

Des Indiens Asháninka assassinés

au PérouQuatre chefs indigènes Asháninka connus pour leur engagement contre la déforestation illégale de la forêt amazonienne ont été assassinés en septembre dernier près de leur village dans l’est du Pérou.

Edwin Chota, Jorge Ríos Pérez, Leoncio Quinticima Meléndez et Francisco Pinedo venaient de quitter leur commune de Saweto, proche de la frontière, pour se

rendre à une réunion avec d’autres dirigeants indigènes au Brésil. Les quatre hommes n’étant pas arrivés au rendez-vous, un groupe est parti à leur recherche et a retrouvé leurs corps criblés de balles.

Edwin Chota, l’un des militants tués, avait consacré sa vie à la lutte contre la déforestation illégale a� n d’empêcher la destruction de leur territoire. Bien qu’il ait reçu à plusieurs reprises des menaces de mort de la part des bûcherons ces dernières années, les autorités n’ont «rien fait» pour le protéger, a expliqué l’organisation indigène Aidesep.

Les femmes Asháninka de Saweto gèrent désormais elles-mêmes leurs communes. Elles continueront de se battre pour sauver leur territoire menacé et assurer l’avenir de leurs enfants.

Le ministre de la Culture péruvien a annoncé qu’il allait en-voyer une équipe à Saweto pour enquêter sur l’assassinat des mili-tants.Source: www.survivalinternational.org

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Thule TuvaluLe metteur en scène du � lm

Thule Tuvalu, Matthias von Gunten, nous a signalé une erreur dans l’article qui lui était consacré, à la page 71 du Magazine 3/2014. Le niveau de la mer n’a pas monté de deux mètres, comme nous l’avons écrit dans le texte, mais de 20 centimètres. Veuillez accepter nos excuses.

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À gagner: trois ballons de football écologiques pour la paix!L’enveloppe du ballon, ornée du mot «Paix» écrit en 28 langues, est en latex FSC robuste et de fabrica-tion équitable. Envoyez la solution jusqu’au 31 janvier 2015 par courriel à [email protected] ou par voie postale à Greenpeace Suisse, rédaction magazine, mots � échés écolos, case postale 9320, 8036 Zurich. La date du timbre postal ou de réception du courriel fait foi. La voie juridique est exclue. Il ne sera entretenu aucune correspondance.

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Comité qui a lancéune initiative pour ladignité des animaux

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voyage

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Passe àWroctlaw

Mollusque

Régionallemande

Gâteauimbibé

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Pré�xeCapitale

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Titanrévolté

Être grandouvert

Blanc d’im-primeur

Poignardà lamee¤lée

Capitaledu Ban-gladeshTouché

PossessifÉlément

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Politiqueallemand

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Langageinform.

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Val desPyrénées

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StewardshipCouncil

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SAINTE DORIS, DEVENEZ LA PATRONNE DU CLIMAT

Madame la conseillère fédérale,

Partout sur la planète, les changements climatiques font déjà d’innombrables victimes et sont la cause de dom-mages immenses à l’environnement. Cette situation touche tout particulièrement les pays les plus pauvres, alors que ce sont eux qui y ont le moins contribué. En tant que ministre de l’environnement d’un des pays les plus riches, c’est à vous de donner l’exemple et de vous engager au sein du Conseil fédéral pour une politique climatique suisse plus équitable. Nous lançons cette pétition pour vous montrer à quel point la population suisse vous soutient dans cette volonté.

Apportez votre soutien à sainte Doris et signez la pétition sur:

alliance-climatique.ch

suisse

allianceclimatique

MADAME LEUTHARD:

IL FAUT RÉDUIRE LE CO2 DE 60%

EN SUISSE D’ICI 2030!

Votre adresse e� -elle toujours valable? Prévoyez-vous un déménagement? N’hésitez pas à nous communiquer vos changements d’adresse par courriel à [email protected] ou par téléphone au 044 447 41 71. Merci pour votre soutien.