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UNION COMMUNISTE (trotskyste) Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ISSN 0024-7650 Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre 2007 - prix : 1 - DOM 1,50 p 3

Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre

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Page 1: Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre

UNION COMMUNISTE ( t ro tskys te )

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !

ISSN 0024-7650

Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre 2007 - prix : 1 € - DOM 1,50 €

p 3

Page 2: Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre

2�Lutte Ouvrière n° 2047 � 26 octobre 2007

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Jean-Paul Rigollet a été déclaré le 23décembre 1994 mandataire financierdu parti Lutte Ouvrière conformé-ment à la loi. Celle-ci dispose qu’ilest seul habilité à recueillir les donsde personnes identifiées. Les donsd’une personne physique à un partipolitique sont plafonnés à7 500 euros par an. Tout don supé-rieur à 150 euros doit être versé parchèque. Seuls les dons versés parchèque ouvrent droit à la réductionfiscale prévue par la loi.

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LUTTE OUVRIÈRE(Union Communiste (Trotskyste)

membre de l’Union Communiste Internationaliste)

L’Union Communiste trotskyste qui publie Lutte Ouvrière, sous le nom duquel elle estconnue en tant qu’organisation politique, regroupe des militants pour qui communismeet socialisme sont le seul avenir pour l’humanité menacée par les crises, l’épuisement desmatières premières et des milieux naturels et les guerres dus à l’anarchie de la sociétéactuelle divisée en classes sociales, qui repose sur la concurrence économique etl’égoïsme individuel

Nous sommes convaincus que les travailleurs peuvent remplacer le capitalisme parune société libre, fraternelle et humaine car ils constituent la majorité de la population etn’ont aucun intérêt personnel au maintien de l’actuelle société. Pour cela ils devront rem-placer l’État de la bourgeoisie pour créer un régime où les masses populaires exercerontelles-mêmes le pouvoir en assurant un contrôle démocratique sur tous les rouages dupouvoir économique et politique. Nous disons aussi que les travailleurs n’ont pas depatrie et qu’un peuple qui en opprime un autre ne peut être un peuple libre.

Les militants qui animent ce journal s’affirment trotskystes, du nom du compagnon etcontinuateur de Lénine, qui a combattu le stalinisme dès son origine et a péri assassinépour n’avoir jamais cédé.

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Lutte Ouvrière est édité par la société Éditions d’Avron – 6, rue Florian 93500 Pantin – Télé-phone : 01 48 10 86 20 - SARL au capital de 7 622,45 euros, durée cinquante ans à partir du1er janvier 1970 – Gérant : Michel Rodinson. Associés : René Marmaros, Isaac Szmulewicz,Jean-Claude Hamon. Directeur de la publication et responsable de la rédaction : MichelRodinson. – Tirage : 14 000 exemplaires. Impression : Rotos 93 – 3, rue du Parc 93150 LeBlanc-Mesnil, téléphone : 01 48 14 21 65. – Commission paritaire des publicationsn° 1009 I 85576.

Lutte Ouvrière c/o Editions d’Avron 6, rue Florian - 93500 Pantin. Lutte Ouvrière (Ile-de-France)c/o Editions d’Avron 153-155 Avenue Jean-Lolive - 93500 Pantin.

Adresser toute correspondance à :LUTTE OUVRIÈRE - Bp. 233 - 75865 PARIS CEDEX

Lutte Ouvrière sur Internet :www.lutte-ouvriere.org

www.union-communiste.orge-mail : [email protected]

Téléphone : 01 48 10 86 20Télécopie : 01 48 10 86 26

Leur société

p. 4 � Loi Hortefeux : non à latraite des immigrés !

� Pour la relaxe d’un militantRESF

� La commission Balladur-Lang sur la Constitution

p. 5 � La conférence sur l’emploi etle pouvoir d’achat

� Hausse des prix : la faute auxmatières premières ?

p. 6 � Les grandes surfaces seremplissent le porte-monnaie

p. 7 � ISF réduit pour les patrons� L’argent de la restauration

collective

� Projet de décret sur lesstages

� Alstom et Veolia en Israël

p. 10 � Amiante : un médecin dutravail mis en examen

� Renault Technocentre -Guyancourt (78)

� L’Ordre des médecins deParis compromis

Tribune

p. 6 � « La grève, ce n’est pas fini »

Dans le monde

p. 8/9 � Pologne : la victoire du partide Tusk

� Europe : un « mini-traité »pour le capital

� Maroc : la visite de Sarkozy

� L’affaire Ben Barka dérangeencore

� L’armée française et l’Algérie

p. 16 � Turquie : l’armée sur le piedde guerre

� Pakistan : Benazir Bhuttofera-t-elle illusion ?

Après la journée du 18

p. 11 � Quelle suite pour le18 octobre ?

� SNCF : les travailleursréfléchissent à la suite

p. 12 � La grève chez les cheminots :échos de divers secteurs

p. 13 � Les grèves de 1995 et de 2003� La grève du 18 octobre à la

RATP

� EDF-GDF : succès de lajournée du 18

Dans les entreprises

p. 14 � Air France : grève annoncée� Faurecia - Cergy-la-Tour

(Nièvre)

� ADDSEA

� Industrie pharmaceutique

p. 15 � Goodyear-Dunlop. - Amiens� La Poste - Mulhouse

� La Redoute - Wattrelos(Nord)

� MGEN - Grand-Quevilly(Seine-Maritime)

SommaireFêtes

régionalesde LutteOuvrière

FOURMIESSamedi 27 octobreà partir de 17 heuresSalle de bal du Théâtre

GRENOBLEDimanche 11novembreà partir de 11 h 30Le Prisme

Seyssins

Terminus du tram C

LO

� Caisse noire paronale

Les ripoux de l’UIMMLe feuilleton de la caissenoire de l’UIMM (l’Union[patronale] des industrieset des métiers de lamétallurgie) s’enrichitchaque semaine d’unnouvel épisode.

I l y a deux semainesétaient révélés les retraits descaisses de l’UIMM de 17 à20 mil l ions d’euros enliquide par son président,Gautier-Sauvagnac, numérodeux du Medef. Pour arroserqui ? Des journaux se sontempressés de désigner dessyndicalistes, voire des syndi-cats... Lesquels ? Mystère.

Mais depuis, il s’avéreraitque ces retraits, effectuésdepuis 2000, étaient plus fré-quents avant chaque électionet que les partis politiques

feraient donc certainementpartie des bénéficiaires.

Enfin, épisode suivant dece feuilleton, il sembleraitque la caisse noire était des-tinée à voler au secours despatrons confrontés à des grè-ves prolongées. Les pauvresavaient besoin de secours !Cette caisse était alimentée,depuis Mai 68, par des cotisa-tions patronales. Elle auraitreçu 290 millions d’euros decotisations secrètes et auraitversé 170 millions de presta-tions. Mais les enquêteurs dela Brigade financière esti-ment que le magot s’est forti-f ié et qu’ i l s ’é lèvera i taujourd’hui à 600 millions !

Les dernières révélations,suite aux perquisitions des

enquêteurs, portent sur leversement, de la main à lamain, d’une multitude deprimes en liquide destinées àdes responsables del’UIMM : « prime de cabi-net », « frais de présenta-tion », « complément deretraite », « complément derémunération »...

Des patrons qui s’enri-chissent sur le dos des sala-riés, on connaît ! C’est mêmela règle. Mais les patrons quisiègent à la tête de l’UIMMfont plus fort : ils s’appro-prient, semble-t-il, l’argentdes autres patrons qui coti-sent à leur caisse. Il est vraique c’est encore de l’argentdes salariés.

Louis BASTILLE

Abus de langageet mauvaises raisons

Pour justifier l’absence detoute comptabilité écrite, leprésident de l’UIMM, DenisGautier-Sauvagnac, impli-qué dans l’affaire de la caissenoire de l ’organisat ionpatronale, s’est abrité der-rière la loi de 1884 qui légali-sait le syndicalisme ouvrier.

Il y a là, sur le plan du rai-sonnement, une doubleescroquerie. Appeler « syndi-cat » une organisation patro-nale est un abus de langage,car tout un chacun, quand ilentend ce mot, pense auxorganisations de salariés, pasaux employeurs.

Mais surtout, si la loi de

1884 ne faisait pas obligationaux syndicats de tenir unecomptabilité publique, c’estparce que cela aurait eu pourconséquence d’annuler aus-sitôt le but même de la loi,qui était de rendre légal lesyndicalisme ouvrier. Publierla comptabilité d’un syndi-cat, c’est-à-dire la liste de sesadhérents, à une époque oùles syndicats ne vivaient quede leurs cotisations, cela seserait terminé dans la majo-rité des entreprises par lelicenciement de tous les syn-diqués, ainsi exposés à larépression patronale.

Aujourd’hui encore, dans

bien des entreprises, les syn-diqués qui ne bénéficient pasde la relative protection d’unmandat syndical risquentleur emploi s’ils affichentleur appartenance syndicale.

Ce n’est évidemmentpas ce genre de risque qui aamené Gautier-Sauvagnacà détruire d’une année surl’autre la comptabilité del ’UIMM. Mais on com-prend qu’il ait préféré res-ter discret sur les moyensque lui et ses semblablesmettent en commun pours’opposer aux revendica-tions des travailleurs.

F.D.

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Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �3

Il faut une suiteau 18 octobre

La grève des travailleurs de la SNCF,de la RATP, d’EDF et de GDF du 18octobre a été d’une ampleur excep-tionnelle. Les manifestations ont étébien suivies et ont été souvent rejoin-tes par des travailleurs de secteurs déjàvictimes des mesures que le gouverne-ment veut imposer aux régimes spé-ciaux. Ceux-là ont témoigné qu’ilsavaient conscience que l’enjeu de lalutte dépasse largement les seuls che-

minots, électriciens ou gaziers.Malgré le bourrage de crâne entrepris par les minis-

tres et répercuté par la télévision, les travailleurs n’ontpas marché dans la propagande gouvernementalevisant à opposer ceux qui étaient en grève etl’ensemble des salariés. Comment croire que les che-minots sont des privilégiés, lorsque plus d’un tiersd’entre eux partent à la retraite avec 1 100 euros netpar mois ?

Et le gouvernement, qui a le culot de se poser enchevalier blanc combattant les privilèges, est celuidont le premier geste a été d’accorder 15 milliardsd’euros de baisses d’impôts à la bourgeoisie, aux vraisprivilégiés.

Les travailleurs savent que l’attaque contre les régi-mes spéciaux sera suivie par d’autres concernant lerégime général : 42 ans de cotisation pour tous etl’âge de la retraite repoussé à 62 ans, voire à 65 ans. Etpour ceux qui n’auront pas le nombre d’annuitésnécessaire, quelle qu’en soit la raison, cela annoncedes retraites amputées qui permettront tout juste desurvivre, mal, après une vie de travail.

La démolition des retraites n’est qu’un des frontssur lesquels le patronat et le gouvernement attaquentl’ensemble du monde du travail, pour permettre à laclasse riche d’accaparer, directement ou avec l’aide del’État, toujours plus d’argent au détriment des sala-riés. Il y a tout le reste : le blocage des salaires alorsque les prix augmentent, à commencer par l’essenceet le fioul ; la généralisation de la précarité et la paiealéatoire qui va avec. Il y a toutes ces mesures commeles franchises médicales, les déremboursements, leforfait hospitalier, qui font que les assurés sociaux

cotisent de plus en plus pour être de moins en moinsremboursés et de plus en plus mal soignés.

Sans parler de l’aggravation de l’exploitation auquotidien, de l’augmentation du rythme de travail, lapression permanente pour faire faire plus de travailavec moins de personnel, en supprimant des emplois.

Les travailleurs sentent par la dégradation de leursconditions d’existence, dans leur chair, que cela nepeut pas continuer ainsi. Or, si cela ne dépend que dupatronat et du gouvernement à sa botte, cela conti-nuera, pour que les capitalistes puissent dégager tou-jours plus de profit, qu’ils gaspillent dans des spécula-tions financières, sans créer d’emplois.

La seule façon d’y mettre un coup d’arrêt est queles patrons et le gouvernement se heurtent àl’ensemble du monde du travail, décidé à ne pas selaisser réduire à la pauvreté. Tout le passé prouveamplement que c’est lorsque les patrons ont craintpour leurs profits, et craint vraiment, qu’ils ont incitéleurs laquais au gouvernement à céder devant lesrevendications des travailleurs.

Nombreux sont, certes, les travailleurs qui necroient pas encore aujourd’hui à la possibilité d’unelutte large, et encore moins à ce qu’elle puisse êtrevictorieuse. Mais l’exemple de la préparation et de laréussite du 18 octobre montre que le climat, cela sechange.

Grande est, dans ce domaine, la responsabilité desdirections syndicales. Le 18 octobre, les travailleursont répondu présents à leur appel. Aucune d’entreelles ne peut prétexter la difficulté de mobilisationpour refuser une suite au 18 octobre. Leurs tergiver-sations pour annoncer une nouvelle étape sont inac-ceptables. Préparer la suite, faire en sorte qu’elle soitplus ample, qu’elle entraîne dans la lutte de nou-veaux contingents de travailleurs, est une nécessitévitale.

L’offensive générale du patronat et du gouverne-ment aggrave les conditions d’existence de tous lestravailleurs, retraités et chômeurs. Il ne faut pas leslaisser faire. La contre-offensive doit être celle del’ensemble du monde du travail !

Arlette LAGUILLER

L’éditorial

d’Arlette LaguillerÉditorial des bulletins d’entreprisedu 22 octobre

� Grenelle de l’environnement

Quand Sarkozy et Borloo lavent plus blancJeudi 25 octobre Sarkozy

présentera les conclusions du« Grenelle de l’environne-ment », le feuilleton écologiquelancé juste après son élection.Des commissions, mises enplace il y a six mois, avaient pré-senté leurs travaux le 27 sep-tembre. Leurs propositionsavaient été soumises au public,appelé à se prononcer dans desréunions régionales et sur Inter-net.

À la veille de l’ouverture dusommet, 70 organisations écolo-giques regroupées dans

l’Alliance pour la Planète, dontGreenpeace ou WWF-France,demandaient aux usagers decouper le courant pendant cinqminutes pour « montrer laconviction écologique des Fran-çais ». Le 1er février 2007, enpleine campagne présidentielle,elles avaient déjà lancé une opé-ration du même type sous lenom de « cinq minutes pour laplanète ». Trois millions d’usa-gers, en éteignant leurs lumières,auraient fait baisser la consom-mation d’électricité de 1 %,l’équivalent de la consommation

d’une ville comme Lyon.Mais, au-delà de cette opéra-

tion symbolique et un peu déri-soire pour faire pression sur lesparticipants du « Grenelle », onse demande ce qu’on peutattendre de cette grand-messeaux accents sarko-écologistes.Yannick Jadot, de GreenpeaceFrance, craint que Grenelle nereste « comme un long cataloguede déclarations d’intentions, quela lessiveuse administrative etlégislative délavera ». NicolasHulot, lui, a annoncé la mise enplace d’un « comité de suivi du

Grenelle de l’environnementpour vérifier l’application desmesures annoncées ». Il a aussimaintenu sa demande de don-ner « un prix au carbone », cequi signifie en clair la créationd’une nouvelle taxe sur les car-burants. Sur ce point Sarkozylui donnera peut-être satisfac-tion puisque, de toute façon, ceseront les usagers qui paieront.Il lui accordera aussi peut-êtrela création d’une écotaxe pourles véhicules polluants, une despropositions présentées le 27septembre. Restent d’autres

sujets, comme la pollutionindustrielle, celle des transportsroutiers, les pesticides ou lesOGM. Et là ce sont les intérêtsdes industriels de l’agro-ali-mentaire, de la chimie, qui sonten jeu. Nul doute que ce ne sontpas Sarkozy et Borloo qui s’yattaqueront. Leur conceptionde la « défense de la planète » neva pas jusqu’à s’en prendre auxintérêts des grands groupescapitalistes, les premiers res-ponsables de la pollution.

Cédric DUVAL

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4�Lutte Ouvrière n° 2047�26 octobre 2007

Leur société� Loi Hortefeux

Non à la traitedes immigrés !Samedi 20 octobre, des manifestations contre la loiHortefeux ont eu lieu dans plus de trente villes. Lamanifestation parisienne a rassemblé des milliers depersonnes, dont de nombreux sans-papiers venus avecleurs collectifs.

Arlette Laguiller, présente àla manifestation, est intervenueen dénonçant « la volonté dugouvernement de flatter l’électo-rat d’extrême droite » avec l’ins-tauration des tests ADN, maisaussi avec toutes les autresmesures discriminatoires quivisent à empêcher le regroupe-ment familial pour les étrangersvivant et travaillant en France.

Des possibilités de régulari-sation de salariés sans papiersont été introduites dans la loi etsuscitent quelques espoirs.Cependant , comme notrecamarade l’a dénoncé, ces régu-larisations ne seraient que d’unan, au cas par cas et liées à laprésentation de contrats de tra-

vail, après que les Chambres decommerce et d’industrie patro-nales aient fait savoir aux préfetsleurs besoins, par profession etpar région.

Dans le cadre de cette immi-gration « choisie » par le patro-nat, le gouvernement com-mence d’ailleurs à passer descontrats d’importation demain-d’œuvre. Le 18 octobre, ila signé un accord avec le gou-vernement philippin pourautoriser l’arrivée d’un quota detravailleurs dans les domainesde la santé, de l’hôtellerie, de larestauration, des services à lapersonne et de l’informatique.De leur côté, les entreprises detravail temporaire félicitent le

gouvernement, car elles vontêtre autorisées à recruter desintérimaires en CDD venant del’étranger.

Tous ces travailleurs aurontdonc des titres de séjour provi-soires, dépendant de la durée deleur contrat de travail, et serontdonc encore plus dépendantsdu bon vouloir des employeurs.

Une intersyndicale CGT-CFDT-FSU et l’associationDroits devant ! appellent à unnouveau rassemblement devantle ministère du Travail, ven-dredi 26 octobre à 15 heures : lalutte doit continuer, contre laloi Hortefeux, pour imposer larégularisation et réclamer larégularisation, sans condition,de tous les travailleurs sanspapiers.

Louis BASTILLE

� Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône)

Pour la relaxe d’un militant de RESFPrès de 3 000 personnes ont

manifesté à Aix-en-Provence,lundi 22 octobre, pour la relaxede Florimond Guimard, un ins-tituteur militant de RESF(Réseau éducation sans frontiè-res), qui passait en correction-nelle sous l’inculpation de « vio-lences volontaires sans incapacitéavec arme par destination sur undépositaire de la force publique ».

En fait, il avait suivi avec savoiture le véhicule de police qui,le 11 novembre 2006, emmenaitle père de deux fillettes scolari-

sées à l’aéroport de Marignanepour l’expulser, car il était sanspapiers. Deux jours plus tôt, lesmarins de la SNCM avaientrefusé son embarquement. Àl’aéroport les policiers, trèsgênés par les quelque 200 mani-festants qui s’opposaient à cetteexpulsion, tournaient autourd’un rond-point en attendantles instructions de leurs supé-rieurs. Bien que durant cesquelque quinze tours demanège ils n’aient jamais étéheurtés par la voiture de Flori-

mond Guimard, c’est el le« l’arme par destination ». Il fautpourtant dire qu’un des poli-ciers s’était heurté le pouce àune barrière, ce pour quoi il adéposé plainte.

Les manifestants qui dèsmidi ont occupé la place de laRotonde à Aix, puis défilé sur lecours Mirabeau jusqu’au tribu-nal de grande Instance où setenait le procès, réclamaient larelaxe pour Florimond Gui-mard, affirmaient que la solida-rité n’est pas un délit et deman-

daient la régularisation de tousles sans-papiers.

Outre les représentants de laCGT, de la FSU, de RESF et debien d’autres, Arlette Laguilleret Alain Krivine avaient tenu àparticiper à cette manifestation.

Le procureur lui-même n’apas été très convaincu, puisqu’ila requalifié l’accusation en« rébellion » et qu’il a requis unepeine de deux mois de prisonavec sursis, après avoir estiméque la « procédure (n’était) nifaite, ni à faire » et que les idées

de RESF sont « à l’évidence émi-nemment respectables ». Il resteà savoir ce qu’il résultera dudélibéré qui se tiendra le 21décembre.

Quant à l’expulsion du pèrede famille algérien, elle demeurepossible puisqu’il reste sous lecoup de poursuites.

Contre cet te pol i t iqued’expulsions, le combat est loind’être terminé.

Correspondant L.O

� Commission Balladur-Lang

La « république » des petits amisLes principales propositions

de la commiss ion sur la« modernisation des institu-tions », mise sur pied par Sar-kozy au lendemain de son élec-tion, viennent d’être connues.Cette commission, qui est pré-sidée par Balladur, l’ancien Pre-mier ministre UMP, mais com-prend aussi Jack Lang, devaitfaire des propositions pour« renforcer la démocratie »,« élargir les droits du Parle-ment », et autres déclamationsdu même acabit. Mais ses pro-positions renforceraient encorele caractère personnel du pou-voir présidentiel et pourraient

aboutir à donner le monopolede l’élection présidentielle auxdeux grands partis, UMP et PS.

Sur les institutions, c’est leprésident de la République qui,en lieu et place du Premierministre, « conduirait la poli-tique du pays », et ne pourraitdonc pas être censuré par le Par-lement pendant toute la duréede son mandat. En lot de conso-lation, les députés auraient toutjuste le droit de bavarder un peuplus qu’aujourd’hui.

Quant au dossier de « démo-cratisation des élections », c’estencore mieux. En ce quiconcerne les élections législati-

ves, pour atténuer le « caractèreinjuste » du scrutin majoritaire,la commission propose d’élire...30 députés à la proportionnelle(sur 577). Pour avoir un seuldéputé élu, selon ce système, unparti devrait obtenir 3,34 % devoix à l’échelle nationale... alorsqu’à la proportionnelle inté-grale il disposerait de 17 sièges.

Mais le système proposépour les élections présidentiel-les aboutirait, lui, à une sélec-tion radicale. Un collège de100 000 grands électeurs seraitinstauré, eux-mêmes désignéspar l’ensemble des élus. Ce col-lège serait donc sous le contrôle

des plus grands partis, car il estévident que les maires de petitescommunes n’y seraient guèrereprésentés. C’est devant cesgrands électeurs que chaquepostulant à l’élection présiden-tielle devrait faire acte de candi-dature. Celui qui ne réuniraitpas 2 % des suffrages de cesgrands électeurs ne pourrait passe présenter à la présidentielle.

On pourrait ainsi aboutir àun système encore plus ver-rouillé qu’aux États-Unis, quiréserverait l’élection présiden-tielle aux grands partis qui ras-semblent la cohorte des nota-bles installés.

Cette république bourgeoisequi de haut en bas, dans toutesses administrations et institu-tions, est faite pour servir lesintérêts de la petite clique desplus riches, n’apprécie pas queles élections puissent donnerune opportunité aux travail-leurs et à une fraction de lapopulation de faire entendreune voix différente. Alors, lespartis bien installés, de droite etde gauche, qui considèrent quele gouvernement doit leur reve-nir de droit, voudraient toutnaturellement ramener cela à laportion congrue.

Paul SOREL

LOLO

Dans la manifestation du20 octobre contre la loiHortefeux à Paris.

Page 5: Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre

Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �5

Leur société

� Hausse des prix

La fauteaux matières premières ?Le prix des matières premières, du pétrole au blé, duplomb au lait, du charbon au soja, est en augmentationrapide. La conséquence immédiate est l’augmentationdu prix des produits finis (essence, pain, lessive, repasà la cantine, etc.).

Des économistes savantsexpliquent au public que, siles matières premières aug-mentent, c’est parce que lademande mondiale aug-mente, en part icul ier lademande liée au développe-

ment de l’économie chinoise.Certes, l’économie mondialeforme un tout. Mais il est toutde même trop commode dedire que c’est simplementparce que la Chineconsomme plus de pétroleque le prix de la baguette aug-mente à Romorantin.

Le prix des matières pre-mières est en partie déterminépar la spéculation, c’est-à-dire par l’activité des groupesfinanciers. Une hausse descours, quelle qu’en soit la rai-son matérielle (mauvaiserécolte, accident ou augmen-tation de la demande réelle),attire les banquiers. Leursachats font à nouveau monterles cours, suscitent donc denouveaux achats, etc., aupoint que les « spécialistes »des matières premières discu-tent aujourd’hui pourconnaître leur « vrai prix ».En attendant, elles se vendentau prix du marché, qui peutmonter jusqu’à un éventueleffondrement de la spécula-tion, comme on l’a vu dansl’affaire des prêts immobiliersaux États-Unis.

D’autre part, les matièrespremières entrent pour une

partie minime dans le prix desbiens des produits del’industrie (15 % par exempledans le prix de la fabricationde l’aluminium et encore bienmoins évidemment dansl’industrie qui utilise l’alumi-

nium). C’est d’ailleurs pour-quoi ce sont les pays indus-trialisés qui dominent les paysqui n’ont que des matièrespremières à vendre, et non lecontraire. Ce qui fait aug-menter les prix à la consom-mation est donc bien plus leprix de la transformationindustrielle que celui desmatières premières. Les salai-res augmentant bien peu, et leplus souvent moins que laproductivité, la cause del’augmentation des prix est àrechercher dans l’augmenta-tion des profits des industrielset dans la spéculation finan-cière. Voire, tout simplement,dans le goût des capitalistespour le profit facile obtenupar une augmentation pure etsimple des prix.

Mais comme il faut bienque quelqu’un paie en finalepour le parasitisme des finan-ciers et des industriels, ce seradonc aux consommateurs depayer, c’est-à-dire essentielle-ment aux travailleurs : lesmêmes qui désespèrent devoir le chiffre situé au bas deleur feuille de paye augmenterau même rythme que les prix.

Paul GALOIS

� Conférence sur l’emploi et le pouvoir d’achat

C’est du ventLa conférence surl’emploi et le pouvoird’achat s’est ouvertemardi 23 octobre àl’initiative dugouvernement, quivoudrait ainsi faire croirequ’il se préoccupe de laquestion.

« Vous avez des branchesdans lesquelles les minimasont encore inférieurs au smic,ça va durer combien detemps ? Pas très longtemps, jepeux vous le garantir », amême déclaré le ministre duTravail, Xavier Bertrand,lundi 22 octobre. Sur FranceInter, le même jour, il a pré-cisé qu’il a « quelques idées etdes propositions à faire pourque, sur les salaires, on ne secontente pas de parler d’aug-mentations, mais qu’on sedonne les moyens d’être opéra-tionnels et efficaces ». Mais

qui croit-il tromper avec detelles déclarations ?

Il faudrait donc, d’après leministre du Travail, « ne passe contenter de parler d’aug-mentations de salaire » ! Maisla nouvelle proposition dugouvernement ne contientque du vieux puisqu’il s’agi-rait, entre autres, d’alléger lescotisations patronales. Cesallégements seraient « réser-vés » aux employeurs quinégocient sur les salaires. Labelle affaire ! Négocier sur lessalaires, les patrons peuventle faire sans problème, il suf-fit de parler sans pour autantaugmenter réellement lessalaires.

Par ailleurs, ces « char-ges » qu’il serait question unenouvelle fois d’alléger consti-tuent la part du salaire quin’est pas reversée au salarié,parce qu’elle est censée être

redistribuée aux différentescaisses. C’est donc une partde leur salaire tout de mêmeet, diminuer cette part, c’estdiminuer le salaire. C’estdonc faire un cadeau auxpatrons pour qu’ils cèdent0,5 % ou 1 % d’augmenta-tion de salaire... peut-être.

La grande majorité despatrons ont tout à fait lesmoyens d’augmenter subs-tantiellement les salaires. Lesprofits ne cessent d’augmen-ter. Ils sont tirés du travail deceux qui font fonctionner lesentreprises. Il ne serait quenormal qu’une partie de cesprofits serve à augmenter lessalaires et maintenir lesemplois.

Voilà ce qui serait « opé-rationnel et efficace »... dupoint de vue des travailleurs.

Aline RETESSE

� Pouvoir d’achat

La chute libreLes statistiques disent ce

que tous dans les quartiers etcités populaires savent parcequ’ils le vivent, de plus en plusde salariés sont mal payés. Laproportion de salariés rémuné-rés au niveau du smic est passéede 8,6 % en 1991 à 15, 1 % en2006. Et il y a tous ceux qui sontprécaires et tous les travailleursà temps partiel imposé. Entout, selon l’Insee, ce sont 38 %des salariés qui percevraientmoins de 1,3 fois le smic, selon

un chiffre de 2002 qui a proba-blement augmenté depuis.

Les hauts revenus, parcontre, ont augmenté entre1998 et 2005. Ainsi, 3500 foyersles plus riches de France – surun total de 35 millions defoyers fiscaux – qui ont déclaréen 2005 un revenu moyen de1,88 million, ont vu leur revenuréel progresser de 42,6 % aucours de ces huit années.

L ’écar t des revenus secreuse donc de plus en plus.

D’autant que pour les travail-leurs la part des dépenses« contraintes » – logement,primes d’assurance, impôts,remboursements de crédits –augmente. Elle est passée de22 % à 45 % dans la mêmepériode, entre 1998 et 2005. Etencore, il ne s’agit que d’unemoyenne, car, dans le cas desménages les plus modestes, cesdépenses absorbent 75 % durevenu.

A.R.

À cause du « bouclierfiscal » qui plafonne à 60 %de leurs revenus les impôtsdes plus riches, l’État leurdoit de l’argent. En effet, lesimpôts qu’ils avaient verséspour l’année 2006 ayant étécalculés selon les ancienscritères, ils avaient versédes sommes allant au-delàd u « bouc l i e r f i s c a l » .L’État s’était donc engagé àles rembourser.

Fin août, les chiffresfournis par le ministère des

Finances montraient que121 mi l l ions d ’eurosavaient été reversés à cetitre à 2 400 contribuables,so i t une moyenne de50 000 euros par foyer fis-cal. Un mois plus tard, au30 septembre, le ministèredes Finances constatait queseuls 2 722 rembourse-ments avaient été effectués,sur les 100 000 grosses for-tunes y ayant potentielle-ment droit, peut-être parceque les intéréssés ne veu-

lent pas t rop at t i re rl’attention du fisc. La dis-crétion avant tout ! EricWoerth, le ministre duBudget, veut réparer cequ’il considère sans doutecomme une injustice et, parconséquent, il va envoyerune lettre aux 97 278 autrespour leur dire de se mani-fester et de réclamer leurpart du gâteau fiscal quel’État leur offre. Des foisqu’ils auraient oublié...

M.L.

Aux petits soinspour les grosses fortunes

LO

Ce serait la Chine qui ferait grimper le prix du blé ?

Page 6: Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre

6�Lutte Ouvrière n° 2047�26 octobre 2007

« Les grèves,ce n’est pas fini »

C’est ce que titrait le Parisien du 23octobre à la Une, au lendemain de larencontre entre les 8 fédérations decheminots qui ont posé des jalons pourune suite au mouvement. Certes, toutest manœuvres entre ces dirigeantssyndicaux, et le sera pire encore quandils vont passer un à un devant leministre Xavier Bertrand. Sur quoi sediront-ils prêts à transiger, dans le dosdes cheminots ? Tout est à craindre.

À l’image des dirigeants de laFGAAC (syndicat corporatiste deconducteurs), qui bien qu’ils aientappelé à une grève reconductible, ren-contraient la direction de la SNCF ausoir du 18, pour ficeler une prétendue« victoire » se soldant par... 5 ans detravail en plus ! Huées parmi les grévis-tes.

À l’image des dirigeants de laCFDT, qui ressassent qu’effectivementles retraites devraient être réformées àla baisse, comme le dit le gouverne-ment... Chérèque répétant Notat en1995 !

À l’image aussi des dirigeants de laCGT qui certes disent que le gouverne-ment doit « revoir sa copie », mais nes’affirment pas clairement contre touteréforme des retraites. Ne disent pas quele seul véritable problème, partout, estcelui de la baisse des salaires, del’hémorragie des effectifs, des prélève-ments patronaux éhontés qui vident lescaisses sociales. Car il n’y a pas trop deretraités par rapport aux actifs, maisplus assez d’actifs par rapport auxretraités. Et cela, partout dans le publicou le privé. D’où la nécessité d’embau-ches massives et d’augmentation dessalaires et des retraites (avec le retourdéjà aux 37,5 ans de cotisation pourtous).

Et les directions de SUD ou de FOqui ont déposé des préavis reconducti-bles pour après le 18, ont certes lemérite d’avoir permis à des cheminotsde poursuivre, mais affichent des vuesaussi corporatistes que radicales enapparence, limitant l’horizon à « pastouche aux régimes spéciaux », sansfixer comme perspective l’élargisse-ment nécessaire du mouvement àd’autres travailleurs du privé et dupublic.

Toutes les fédérations mettent aupremier plan la préservation jalouse deleur enseigne, contre les voisines. Enréponse à une question sur l’éventuelleconvergence de lutte entre cheminotset fonctionnaires (dont les fédérationsviennent d’annoncer une journée de

grève le 20 novembre prochain), DidierLe Reste, secrétaire général de la CGT-Cheminots, répond significativement :« Pour l’instant, chacun conserve l’auto-nomie et la maîtrise de ses mouvementsrevendicatifs ».

Un dirigeant conscient des intérêtsdes travailleurs engagés, par cette grèvedu 18, dans un bras de fer avec le patro-nat et le gouvernement, ne pourrait-ilspontanément et immédiatement seréjouir qu’effectivement une conver-gence soit possible, à terme pas si loin-tain ? Et y répondre aussitôt favorable-ment ? Surtout que cette journée desfonctionnaires concernera les ensei-gnants, les hospitaliers, et tous lesautres travailleurs de la fonctionpublique.

Les directions syndicales ne sontpas jalouses de leur « autonomie » seu-lement à l’égard des boutiques rivales.Elles le sont surtout à l’égard des tra-vailleurs et de leurs propres syndiquésqui, ces derniers jours à la Sncf, Ratp,Edf ou Gdf, ont assuré un succès quifrisait l’incontrôlable, en particulierune reconduction minoritaire maiscinglante. Et la stratégie de grèvelimitée à 24 heures a été sacrémentcontestée, en particulier dans les rangsde la CGT.

Ce succès, les discussions serréesdepuis plusieurs semaines, les assem-blées tenues, les décisions pesées etvotées, et partout le sentiment partagéque rien n’était fini et qu’il fallait conti-nuer à s’organiser pour préparer lasuite, bref ce goût de mouvementvivant n’a guère été prisé par les chefssyndicaux.

Depuis le 18 octobre, il n’y a pas de« retour à la normale ». Tous les arti-sans du succès immense préparent lasuite, en particulier dans la perspectivede cette nouvelle journée certes pasencore décidée en haut lieu, pour la mi-novembre, aux côtés des fonctionnai-res. Et quoi de mieux pour la réussitedu prochain rendez-vous que de pour-suivre la mobilisation, les discussions,les assemblées, et aussi les contacts etadresses à d’autres catégories de tra-vailleurs du public et du privé ?

Toute la classe ouvrière est visée parles attaques du patronat et du gouver-nement. C’est bien une offensive géné-rale du monde du travail qu’il faut pré-parer, à partir des positions pas si mau-vaises acquises par les cheminots, élec-triciens et gaziers depuis le 18 octobre.

Michelle VERDIER

Depuis plusieurs années, il existe au sein de notre organisation une tendance minoritaire. Cettetendance soumet des textes différents de ceux de la majorité au vote de nos camarades lors de nosconférences nationales. Mais elle s’est exprimée aussi, à chaque fois qu’elle l’a désiré, dans les bulle-tins intérieurs de notre organisation.

Ces camarades ont demandé à se constituer en tendance structurée ou, autrement dit, en frac-tion.

C’est pourquoi ils s’expriment chaque semaine à cet endroit, dans les colonnes de notre hebdo-madaire, parfois pour défendre des opinions identiques ou semblables à celles de la majorité, parfoispour défendre des points de vue différents.

TRIBUNE

Convergences Révolutionnaires n° 53 (septembre-octobre 2007)

Bimestriel publié par la FractionDossier : Industrie pharmaceutique : les rouages de la machine à profits

Articles : Pour un nouveau parti révolutionnaire – Pouvoir d’achat, retraites, droit degrève... des cheminots et des autres : à attaque globale réponse globale ! – Peugeot-

Citroën : des milliers de licenciements programmés – Universités : la réforme ou la casse ? –Allemagne : la grève bradée des cheminots – Belgique : le communautarisme contre les

travailleurs.

Pour se procurer ce numéro, 1,5 euro, ou s’abonner (1 an : 9 euros ; de soutien : 15 euros) écrire à :LO, pour la Fraction, BP 233-75865 Paris Cedex 18

ou Les Amis de Convergences, BP 128-75921 Paris Cedex 19Sur le Net : http ://www.convergencesrevolutionnaires.org

Leur société� Grandes surfaces

Vider les porte-monnaie,remplirles tiroirs-caisses

Les hypermarchés Leclerc se sontpayé des pleines pages de publicité dansla presse quotidienne pour dénoncer lahausse des prix. Leclerc accuse les indus-triels d’exagérer et donne des exemplesfrappants : Président augmente le prix deson camembert de 18,24 %, Barilla celuide ses spaghetti de 32,29 %. Ces haussessont en effet sans commune mesure avecla hausse du prix des matières premièresqui leur sert de prétexte.

La campagne publicitaire de Leclercfait suite aux tribunes publiées sur lemême sujet par des dirigeants de Carre-four et d’Auchan. Les trois géants de ladistribution revendiquent que la loi Gal-land, qui limite leurs possibilités d’agirsur les prix, soit changée afin qu’ils puis-sent fixer ceux-ci comme ils l’entendentet négocier librement avec leurs fournis-seurs. Ils assurent, la main sur le cœur,que cela aurait pour effet de faire baisserles prix et donc de préserver le pouvoir

d’achat des consommateurs.

En fait, rien n’est moins sûr, car cesgroupes qui se disent contraints d’aug-menter leurs prix n’ont jamais songé àles baisser... en réduisant leur margebénéficiaire. Il y aurait pourtant de quoifaire : les trois distributeurs, qui bénéfi-cient d’un quasi-monopole, ont chacunun chiffre d’affaires compris entre 30 et40 milliards d’euros et Carrefour, parexemple, a réalisé 741 millions de béné-fice au premier semestre 2007.

Il y a toutefois une part de vérité dansleur campagne : ils défendent vraimentle pouvoir d’achat des familles. Il fautsimplement préciser qu’il s’agit desfamilles Mulliez, propriétaire d’Auchan,Halley, actionnaire principal de Carre-four, et Leclerc, des centres du mêmenom

Paul GALOIS

Distribution aux patrons...de la distribution

Le gouvernement, pourtant totale-ment au service des patrons, n’en faitdécidément jamais assez à leurs yeux. Entémoigne cette fronde des patrons de lagrande distribution contre le nouveaucalcul des allégements des « charges »sur les bas salaires, la loi « tepa », votéecet été et qui vient de s’appliquer. Ce cal-cul doit être fondé sur le temps de travaileffectif. Or dans la distribution les pauseset le temps d’habillage, qui représentent5 % du temps de travail, sont rémunérés.Le salaire payé à ce titre ne bénéficiedonc pas, depuis le 1er octobre, de cesallégements de charges.

La Fédération du commerce et de ladistribution a déclaré qu’elle perdait

ainsi 250 millions d’euros. Mais ce n’estque le retrour à la situation prévalantavant le 1er janvier 2006, dans laquelle lestemps de pause étaient en effet déjàexclus du calcul des allégements. Qu’àcela ne tienne, les patrons de la distribu-tion en profitent tout de même pourmenacer de paralyser les négociationssalariales... et ce, dans un secteur où lessalaires sont déjà particulièrement bas.

Le gouvernement a déclaré que des« réflexions » étaient en cours. Nuldoute qu’il trouvera rapidement lemoyen de satisfaire ces pauvres patronsde la grande distribution.

A.R.

� Rugby

On a perdu la coupe...et on a pris Laporte !

Comme annoncé par Sarkozy, Ber-nard Laporte est passé immédiatementdu poste de sélectionneur de l’équipe deFrance de rugby à celui de secrétaired’État aux Sports. Parcours à moitiéréussi, car le nouveau promu n’auraobtenu que la moitié du titre promis etne s’occupera que du sport, et pas de lajeunesse.

On s’interroge sur les raisons de cettesemi-disgrâce. Est-ce parce que l’onpénaliserait le sélectionneur pour lapiètre performance de son équipe lorsdu récent mondial ? Est-ce parce que le

journal l’Équipe-magazine a révélé laveille de la nomination de Laporte que cedernier était soupçonné par le fisc d’êtreimpliqué dans des affaires douteuses ?

À y réfléchir, aucune de ces hypothè-ses ne tient la route. Sarkozy n’aurait passanctionné son ami pour si peu. Lereproche d’avoir trempé dans des affai-res peu avouables est bien peu plausible.On l’a vu à maintes reprises, traîner descasseroles de ce type n’a jamais été unhandicap pour se retrouver dans un gou-vernement. Au contraire...

J.-P. V.

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Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �7

Leur société

� Projet de décret sur les stages

Un vol légaliséLe ministre du Travail

Xavier Bertrand a rendu publicun nouveau projet de décretsur la rémunération des stagesétudiants en entreprise. Appli-cable début 2008, il ne prévoitaucun salaire pendant troismois et seulement 29,6 % du

smic, soit un peu moins de 380euros mensuels, à partir duquatrième mois de stage, avecexonération de cotisationssociales pour l’employeur.

Des associations et syndicatsd’étudiants ont immédiatementdénoncé ce texte qui reste très

en deçà de ce qu’ils revendi-quent depuis deux ans : unminimum de 50 % du smic,payable dès le premier jour destage et avec une progression enfonction du niveau d’études.

En outre, il est à craindre queles patrons contournent ce décret

en multipliant les stages d’unedurée inférieure à trois mois.

En fait, les stages – dont laministre de l’Enseignementsupérieur, Valérie Pécresse,souhaite qu’il y en ait un obli-gatoire dans chaque cursus –continueront à fournir une

main-d’œuvre quasi gratuiteaux patrons qui pourront– comme ils le font déjà –enchaîner stage sur stage afind’éviter les embauches et éviterd’avoir à payer de véritablessalaires.

R.M.

Alstom et Veolia-Connex participentà l’occupationisraélienne

L’Organisation de Libéra-tion de la Palestine (OLP)s’est associée à la plaintedéposée devant le tribunal degrande instance de Nanterrepar l’Association France-Palestine Solidarité (AFPS)contre les entreprises Alstomet Veolia-Connex.

Les deux entreprises fran-çaises, qui ont constitué leconsortium City Pass, avaientété retenues pour la construc-tion et l’exploitation pendanttrente ans du tramway deJérusalem. Or, son tracé estconçu de telle manière qu’ilserpente en Cisjordanie pourrelier entre elles différentescolonies israéliennes qui ysont implantées, au méprisdes Palestiniens. L’AFPSs’appuie sur la résolution 242du Conseil de sécurité desNations unies qui, même sielle n’a jamais été appliquée,considère que Jérusalem-Estest un territoire palestinien etcondamne l’occupation faitepar Israël depuis 1967 de cettepartie de la ville. La construc-tion du tramway, qui partagele territoire palestinien, diviseles communautés et s’estaccompagnée de l’expulsionsde Palestiniens et de la des-truction de nombre de leurshabitations, renforce encore

la mainmise d’Israël sur ceterritoire.

Pour leur défense, lessociétés françaises font valoirqu’elles ne se considèrent pasen situation illégale et préten-dent que la construction dutramway serait un moyen dedéveloppement de la zone quiprofiterait aux deux commu-nautés. Comme s’il n’était pasévident que l’objectif desautorités israéliennes estexactement le contraire !

Quant au gouvernementfrançais, il déplore parfois surla scène internationale lapoursuite de l’occupation desterritoires palestiniens parIsraël. Mais concernant cetteaf fa ire impl iquant deuxentreprises françaises, il seretranche derrière le fait queVeolia-Connex et Alstomsont des entreprises privées.Pourtant, en mars 2005, c’estbien le chef du gouvernementfrançais, à l’époque Jean-Pierre Raffarin, qui s’était féli-cité de l’accord conclu, et lecontrat avait été signé quel-ques mois plus tard dans lesbureaux du Premier ministreisraélien d’alors, Ariel Sha-ron, en présence de l’ambas-sadeur de France...

Marianne LAMIRAL

LO

La restauration collectivefait son beurre

Sous prétexte de la haussedu prix des matières premièresalimentaires, les cantines vontaugmenter leurs tarifs de 8,5 à10 %. Il ne s’agit pas du chef etdes trois cantinières d’ungroupe scolaire qui achètentleurs produits au supermar-ché : cela n’existe pratique-ment plus. Le marché de larestauration collective ( écoles,entreprises, hôpitaux etc.) estdominé à 75 % par trois grou-pes dont Sodexho, le plusgrand groupe mondial. Laseule Sodexho sert un millionet demi de repas tous les joursen France.

Pour un groupe de cettetaille l’approvisionnement nereprésente qu’une petite partiedu prix de revient des repas.Donc une hausse de 10 % desproduits laitiers, de la farineetc., se traduit par une haussebien moindre du prix durepas. De plus la Sodexho faitde confortables profits (325millions d’euros en 2006, enhausse de 50 % par rapport à2005), bénéficie des marchéspublics et, comme tous lesgrands groupes capitalistes,des multiples dégrèvements et

cadeaux divers de l’État.Comme toutes les entrepriseségalement, Sodexho et sesdeux compères font sans cessedes économies sur le dos deleurs employés. D’après lejournal Le Figaro, ces « gainsde productivité » se monte-raient à 60 millions d’eurospar an. Elle n’a donc nul« besoin » d’augmenter lesprix des repas, même pas pro-bablement pour maintenir sesprofits.

L’augmentation de 10 %du prix des repas dans les can-tines ferait rentrer plus de 300millions d’euros supplémen-taires dans les caisses de cestrois sociétés. Un pactole dontla plus grande partie, sinon latotalité, serait un bénéfice sup-plémentaire, obtenu en ran-çonnant les consommateurssous l’œil bienveillant despouvoirs publics.

P.G.

� ISF réduit pour les patrons

Doublement gagnantsLe gouvernement a beau

avoir toutes les complaisancespour les plus riches, les dépu-tés ont estimé que ce n’étaitpas assez puisque, lors de ladiscussion du budget 2008, ilsont voté un amendement quiles avantage encore un peuplus.

Le projet de budget pré-senté par le gouvernementprévoyait déjà que les chefsd’entreprises puissent bénéfi-cier d’une réduction de l’ISF

s’ils investissaient dans unePME, à condition cependantque ce ne soit pas la leur, nicelle de leur conjoint. Avecl’amendement voté par lamajorité, cette condition sauteet les patrons des entreprisesde moins de 250 salariés peu-vent bénéficier des mêmesavantages en investissant dansleur propre société. Cela leurpermettra de réduire leurimpôt de solidarité sur la for-tune de 75 % de la somme

versée, à concurrence de50 000 euros.

Le Medef a bien évidem-ment applaudi à une tellemesure qui, selon sa prési-dente, est « une idée forte,simple et efficace ». Efficacepour s’enrichir encore pluspuisque, en se versant del’argent à eux-mêmes, lespatrons des PME verront leursimpôts diminuer !

M.L.

LO

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8�Lutte Ouvrière n° 2047�26 octobre 2007

Dans le monde

� Maroc

Sarkozy, commis voyageurLe 23 octobre, Sarkozy est

parti pour trois jours au Maroc,en visite « d’État », c’est-à-dire« d’affaires », car le président dela République n’est que le VRPen chef des patrons français. Il apris soin en effet d’emmeneravec lui soixante-dix chefsd’entreprise, et plusieurs con-trats sont déjà signés, dont unpour la réalisation d’une ligne deTGV au départ de Tanger etl’achat de locomotives, au béné-fice de la SNCF et d’Alstom. LaPDG d’Areva a également signéun protocole d’accord pour une

coopération en matière derecherche dans l’extraction del’uranium et le développementdu nucléaire civil. Et dans ledomaine militaire, la France vavendre une frégate au Maroc etmoderniser les hélicoptères et lesblindés de l’armée royale.

Le marchand d’armes fran-çais Dassault, lui, vient de man-quer un contrat royal : pressentien effet pour acheter une ving-taine d’avions de chasse Rafale,le gouvernement marocain afinalement opté pour des F-16américains dont l’offre était plus

avantageuse. En France, lapresse économique le déplore, lepatronat aussi, à la pensée quepresque deux milliards d’euroslui sont ainsi passés sous le nez.

Cependant les contrats con-clus se montent déjà eux aussi àdeux milliards. Des milliardsraflés dans les caisses d’un payspauvre avec la bénédiction dupouvoir royal, et dont la plusgrande partie n’auront aucuneretombée positive pour la popu-lation marocaine.

Sylvie MARÉCHAL

L’affaire Ben Barka dLe juge Patrick Ramaël,

chargé du dossier concernant ladisparition en 1965 de l’oppo-sant marocain Ben Barka, vientde signer des mandats d’arrêtconcernant cinq Marocains,dont le chef de la gendarmerieroyale, l’ancien patron des ren-seignements militaires et troismembres des services secrets. Aumoment où Sarkozy est en visiteofficielle au Maroc, cela ne passepas inaperçu, même si aucuncommentaire n’est fait officielle-ment.

Et pourtant, si un événementrévè le de façon éclatantejusqu’où a pu aller la collabora-

tion franco-marocaine au niveaupolicier, c’est bien l’affaire BenBarka. Le fait qu’elle n’ait pas étéélucidée, depuis quarante-deuxans, est aussi révélateur de lafaçon dont les secrets d’État sontprotégés par tous les gouverne-ments.

Mehdi Ben Barka fut enlevéen plein Paris, le 29 octobre1965. Opposant au roi du MarocHassan II, père de l’actuel Moha-med VI, Ben Barka était aussicélèbre au niveau internationalcomme leader tiers-mondiste,défenseur de la cause palesti-nienne, ami de Fidel Castro et denombreux dirigeants de mouve-

� Pologne

Les jumeaux suivis par leurs semblablesLes élections anticipées du 21 octobre en Pologne ont amenéla victoire de Donald Tusk et de son parti PO (Plate-formecitoyenne) qui a recueilli 41,51 % des voix. Dans les milieuxpopulaires particulièrement, le départ d’un des jumeauxKaczynski, le Premier ministre sortant, en a certainementréjoui plus d’un. Car, même dans ce pays très catholiquequ’est la Pologne, on supporte mal que les culs-bénis dictentleur loi dans tous les domaines.

Petite satisfaction aussi, lesformations d’extrême droite, quiparticipaient au gouvernement,ont recueilli moins de 3 % desvoix. Mais au-delà de cela, leschangements pour la populationseront bien maigres.

L’alliance au pouvoir du partiPiS (Droit et Justice) des frèresKaczynski avec la LPR (Ligue desfamilles polonaises) et Samoo-brona (Autodéfense, du popu-liste et démagogue Lepper), touten ne remettant pas en causel’intégration dans l’Union euro-péenne, avait contesté le nou-veau Traité européen et ne dédai-gnait pas une certaine démagogieanti-européenne. Donald Tusk,lui, nouveau prétendant au postede Premier ministre, était le can-didat préféré des milieux d’affai-res, en particulier pour son pro-européanisme. Ce n’est pourtantpas un opposant à la politique deses prédécesseurs. Il ne s’étaitopposé à Jaroslaw Kaczynski queparce que leurs deux partisn’avaient pas réussi à s’entendre,après les dernières élections à laDiète en 2005, pour faire unecoalition gouvernementale. PiS,le parti des jumeaux, avait eu 155sièges, contre 133 au PO de Tusk,et PiS avait préféré l’alliance avecla droite extrême.

Lors de la campagne électo-rale, Tusk par exemple ne s’estguère démarqué des frères Kac-zynski, tenant à dire qu’il nereviendrait pas sur la législationréactionnaire anti-avortementen vigueur en Pologne. Ce poli-

ticien se proclame « libéral »bien sûr seulement sur le planéconomique. Sur ce point, ils’est déclaré partisan de labaisse de la fiscalité... pour lesriches, proposant l’abaissementde la tranche d’imposition à30 %, qui s’applique actuelle-ment aux revenus les plus élevésjusqu’au taux de 18 %, jusque-là réservé aux revenus les plusmodestes.

Le choix politique offert dansces élections n’en était donc pasvraiment un. Pour écarter la coa-lition de droite, beaucoup de tra-vailleurs, électeurs traditionnelsde la gauche, ont cependant votéTusk. Il faut dire que, du côté despartis de gauche, les ex-diri-geants du POUP (le parti au pou-voir avant 1989) recyclés ensociaux-démocrates étaient alliésentre autres à l’Union du Travailet à l’Union de la Liberté, mouve-ments issus de Solidarité, le der-nier cité étant il y a quelquesannées allié avec... Donald Tusk.Dans les jours précédant l’élec-tion, le porte-parole de la gauche,Marek Borowski, se disait lui-même prêt à collaborer avec ungouvernement présidé par Tusk.Les électeurs l’ont entendu et ontvoté « utile » : la LiD (Gauche etdémocratie), la coalition degauche, est ainsi descendue à13 % (17 % en 2005).

Ce discrédit est aussi dû, biensûr, aux mauvais souvenirs lais-sés par les sociaux-démocrates.Chaque fois qu’ils ont été au gou-vernement, ils ont mené une

politique anti-ouvrière, privati-sant à tour de bras, offrant auxcapitalistes internationaux lesmarchés et les entreprises dupays.

Tusk va donc maintenantpouvoir gouverner avec... leparti paysan PSL (9 % des voix)de Wlademar Pawlak, qui a étéde nombreuses fois ministreavec des coalitions marquées àgauche ou à droite. Tout laisseprévoir qu’ i l mènera pourl’essentiel la même politique queses prédécesseurs, voire pire.Heureusement, il n’est pas ditque les travailleurs n’en aientpas rapidement assez de cesconteurs du charme du capita-lisme, avec ou sans eau bénite, etde les voir occuper le devant dela scène.

Samuel LATAN

La combat iv i té qu’ontmontrée les travailleurs polo-nais des années 1970 à 1989aurait pu donner bien d’autresrésultats sur le plan politique etsocial. La classe ouvrière polo-naise a payé au prix fort l’ouver-ture au capitalisme occidentalaprès la « chute du mur ». Cesdernières années une partie destravailleurs polonais, évaluée àplus de 500 000 personnes, s’estexi lée, principalement enIrlande et au Royaume-Uni,mais aussi dans les autres paysd’Europe, pour trouver un tra-vail parfois un peu mieux payé,mais dans des condit ionsdignes quelquefois de l’escla-vage. C’est seulement cettemigration qui explique qu’endeux ans le taux de chômage ait

baissé de 18 à 12 % en Pologne.En revanche aujourd’hui, les

prix de la plupart des marchan-dises en Pologne sont au niveaudu reste de l’Europe occidentale,alors que les salaires moyens

sont autour de 300 euros et queles revenus de retraités peuvents’élever à 100 euros seulement,voire moins.

S.L.

L’ouverture au capitalisme

LOLO

Donald Tusk était le favorides milieux d’affaires.

En Pologne, les prix de la plupart des marchandises sont auniveau de l’Europe occidentale... mais pas les salaires.

Page 9: Hebdomadaire - paraît le vendredi - n° 2047 - 26 octobre

Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �9

Dans le monde

Au sommaire de

Lutte de Classe n° 107(octobre 2007)

FranceSarkozy a les mainslibres à l’Assemblée,il ne les a pas dans lepaysLa « modernisation » duParti socialiste :l’art de faire du neufavec du vieux

Saint-Martin etSaint-Barthélémy

Les bricolages politico-administratifsde l’impérialismefrançais aux Antilles

TurquieAprès les élections du 22juillet :un succès des« islamistes » sur leslaïques ?

De la crise dansl’immobilier à la crisefinancièrePetit glossaire

Tribune de la minoritéLettre ouverte à Lutteouvrièreet à la Ligue communisterévolutionnaire

dérange encorements anti-impérialistes. Outrela police secrète marocaine, denombreux services secrets – etles États qu’ils servaient – pou-vaient avoir intérêt à le voir dis-paraître : cela allait de la CIA auMossad israélien, sans oublier leSDECE, les services secrets fran-çais, où se retrouvaient de nom-breux sympathisants de l’OAS.

L’enlèvement fut comman-dité par les services secrets maro-cains, réalisé par des truandsfrançais, anciens de la Gestapofrançaise, plus ou moins proté-gés par les services de de Gaulle.De Gaulle lui-même, qui devaitrencontrer Ben Barka et discuter

avec lui, fut mis devant le faitaccompl i , mais i l couvr i tl’affaire. Car on pouvait remon-ter très haut dans l’appareild’État : du côté marocain, trèsvite, circulèrent les noms d’Ouf-kir, ministre de l’Intérieur, deDlimi, chef de la Sûreté natio-nale, et du côté français ceux deRoger Frey, ministre de la Jus-tice, et de Jacques Foccart,conseiller du président pour lesaffaires africaines. Quelquescomparses furent condamnés,ainsi qu’Oufkir, mais, lui, parcontumace.

Il a fallu attendre la dispari-tion de tous ces personnages,

morts par « suicide », dans un« accident » ou dans leur lit,pour que les documents offi-ciels sortent des cartons.

En France, aucun respon-sable n’a jamais été traîné enjustice. Le « secret défense »sur les archives a été levé endeux temps, en 2000 puis en2004, par la gauche puis par ladroite.

Mais l’annonce de quel-ques mandats d’arrêt a suffi àrendre soudain muets des res-ponsables politiques... pour-tant bien bavards d’habitude !

S.M.

� AlgérieL’armée françaisedonne l’emplacementde ses champs demines... 45 ans après !

En visite à Alger, le chefd’état-major des armées fran-çaises a remis au gouvernementalgérien les plans des champs demines créés à l’époque de laguerre d’indépendance.

Pour empêcher les com-battants du FLN de s’infiltrer àpartir de leurs bases situées auMaroc et en Tunisie, l’arméefrançaise avait enterré entre1956 et 1959 des millions demines antipersonnel le longdes centaines de kilomètres defrontière séparant l’Algérie deses deux voisins. Selon le gou-vernement algérien, trois mil-lions de mines auraient ainsiété dispersées.

Cela fait quarante-cinq ansque la France a dû reconnaîtrele droit à l’indépendance del’Algérie, au terme d’une saleguerre qui, en huit ans, a faitprès d’un million de mortsdans la population algérienne.Combien de victimes supplé-mentaires auraient pu êtreépargnées si, en quittant lepays, l’armée française avaitenlevé ses mines ou, à défaut,remis aux autorités algérien-nes les plans des sites minés ?

Parce que l’armée françaisen’avait que mépris et rancuneenvers la population algé-rienne, cette sale guerre auraeu un prolongement de qua-rante-cinq ans, faisant proba-blement des dizaines de mil-liers de victimes supplémen-taires. Cette remise des plansest d’ailleurs encore un gesteminimum, car l’armée et lesautorités françaises actuellesn’ont pas été jusqu’à proposer,même avec beaucoup deretard, d’aider l’Algérie à net-toyer son sol !

Roger MEYNIER

Prix : 1,50 euro – Envoi contre quatre timbres à 0,54 euro.

� Europe

Un « mini-traité » pour le grand capital« L’Europe est sortie de lacrise institutionnelle et prêteà affronter les défis dufutur », a affirmé le Premierministre portugais, à l’issuedu sommet de Lisbonne. Lesreprésentants des 27 États del’Union européenne venaientd’y parvenir à un accord surce qui doit remplacer leprojet de Constitutioneuropéenne, rejeté auprintemps 2005 en France etaux Pays-Bas respectivementpar 55 % et 62 % desélecteurs.

Ce projet de traité dit « modi-ficatif » forme un texte de plu-sieurs centaines de pages, queSarkozy qualifie sans rire de« mini-traité ». Y sont énumé-rées les 297 modifications destraités existants, à quoi s’ajoutentdouze protocoles et quelquesdizaines de déclarations, sansque jamais le texte du traité soitpublié en tant que tel. Il y a ainsiencore moins de risques de voirde trop nombreux habitants del’Union européenne aller ymettre leur nez. De peur qu’ils ytrouvent un air de déjà vu. Etpour cause : de Giscardd’Estaing, père de la défunteConstitution européenne, àAngela Merkel, Romano Prodi etquelques autres dirigeants euro-péens, c’est à qui répétera, telZapatero, que « nous n’avons pasabandonné un seul point essentielde la Constitution ».

Mais certains de leurs collè-gues, en France, aux Pays-Bas, enPologne notamment , ontd’autres problèmes vis-à-vis deleur opinion, à laquelle ils nepeuvent pas le dire aussi crû-ment. Alors, il a fallu trouver untruc et, pour citer un ministrebelge : « Ce traité devait être obs-cur. C’est un succès. »

Mais, obscure ou pas, c’estbien la même soupe qu’on noussert qu’en 2005. Dès le préam-bule de ce qui ne s’appelle doncplus Constitution, le projet réaf-firme le rôle essentiel de « l’héri-tage rel igieux » en Europe.L’expression « concurrence libreet non faussée », qui figurait dansle projet de Constitution, a dis-paru du traité, mais c’est à toutbout de champ qu’y est réaffirméle rôle de la concurrence capita-liste, à laquelle notammentdevraient être soumis les services

publics. Et il n’est pas plus ques-tion qu’auparavant d’harmoni-sation sociale par le haut enEurope. La Grande-Bretagne etla Pologne ont d’ailleurs obtenud’être dispensées d’appliquer lepeu de « droits fondamentaux »dont la Charte européenne dumême nom ne fait que parler.S ’ag issant des droi ts del’Homme, ce traité présente, defait, la chasse aux sans-papierscomme un des objectifs del’Union. Quant au militarisme, ilest toujours aussi présent, le

traité engageant « les États-mem-bres à améliorer progressivementleurs capacités militaires ».

Par crainte d’être désavouécomme Chirac en 2005, Sarkozyrefuse un référendum sur cetraité, dont il réserve la ratifica-tion aux parlementaires. Il peutcompter en cela sur l’appui duParti Socialiste. Car sa directionsoutient majoritairement cetraité, comme elle soutenait leprojet de Constitution précé-dent. Et on la voit osciller entre laperspective d’un vote « pour » auParlement et celle d’une absten-tion hypocrite, qui lui éviteraitd’apparaître comme se rallianttrop ouvertement à Sarkozy, sansempêcher l’adoption du traité.

Le morcellement de l’Europe,en un nombre d’États qui n’acessé de grandir au fil des derniè-res décennies, et les égoïsmesnationaux, qui continuent àopposer les différentes bourgeoi-sies nationales au sein même del’Union européenne, sont unnon-sens... que ce traité ne ferapas disparaître. Il ne fait aucunpas en cette direction, pas plusque le projet de Constitution quil’avait précédé. Il vise seulementà établir des règles de cohabita-tion entre les différents États-membres de l’Union, en privilé-giant les plus puissants.

Faire disparaître complète-ment les frontières qui déchirentl’Europe, tout en permettant àtous les peuples qui y vivent et àleurs cultures de s’épanouir, celane pourra se réaliser que sous laforme d’une Europe socialiste,œuvrant pour le bien communde tous ses habitants, et non pourles profits des groupes capitalis-tes aussi adversaires qu’alliés.

Pierre LAFFITTE

LO

Des manifestants, lors du 1er mai 2005.

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10�Lutte Ouvrière n° 2047�26 octobre 2007

Leur société

� Ordre des médecins de Paris

Les blouses nesont pas blanches

Un rapport de l’Inspec-tion générale des affairessociales (IGAS) vient de mon-trer qu’au conseil de l’ordredes médecins de Paris, les res-ponsables avaient pris l’habi-tude de bien se soigner. Alorsque le président, le secrétaire-généra l , les secréta ires-adjoints et le trésorier sontformellement bénévoles, ilstouchaient des indemnitésconséquentes pour leur fonc-tion au sein du conseil, allantjusqu’à 82 600 euros par an,sans compter d’autres indem-nités versées en fin de mandatet totalement exonérées decharges sociales. Tout celapour une activité qui corres-pondait au plus à un mi-temps, d’après le rapport del’IGAS qui pointe aussi dudoigt des honoraires d’avo-cats très importants, des tra-vaux effectués sans appeld’offres et l’usage régulier descartes bancaires.

À la suite de ce rapportqu’elle a jugé « accablant », laministre de la Santé, RoselyneBachelot, a demandé la disso-lution de l’Ordre départe-

mental de Paris. Mais leconseil national de l’ordre desmédecins, dont dépend leconseil départemental fait lasourde oreille. Il dit attendrele rapport définitif car les pro-pos de Bachelot « outrepasse-raient ses conclusions ». Il pré-tend que c’est au préfet de dis-soudre l’Ordre départemen-tal, en oubliant que celui-ci nepeut le faire qu’après un avisfavorable de l’Ordre desmédecins.

L’Ordre des médecins aété créé sous Pétain, soi-disant pour défendre au seindu corps médical les bonnespratiques déontologiques, enl’occurrence, à l’époque,« Travail, famille, patrie ». Aulong de son histoire, il a tou-jours pris des positions réac-tionnaires, s ’opposant àl’avortement par exemple.Mais visiblement on peut à lafois être un tenant de l’ordremoral et couvrir les pratiquesfinancières douteuses des res-ponsables de l’Ordre de Paris.

Cédric DUVAL

� Renault Technocentre – Guyancourt (Yvelines)

Une enquêtesur les conditions de travailqui ne changera pas grand-chose !

Sur les 11 500 salariés quitravaillent au TechnocentreRenault de Guyancourt (dont2 400 dans des sociétés de sous-traitance), la moitié se composed’ingénieurs et cadres. On yconçoit et développe les futursprojets de véhicules. Dans lecontexte du contrat 2009 du P-DG Ghosn, Renault projette desortir 26 nouveaux véhiculesd’ici deux ans et les délais ontété considérablement réduits : ilfallait 3 ans et demi en 1993pour développer la Laguna 2 ; ila fallu deux ans pour la nouvelleLaguna 3.

Suite aux suicides survenusfin 2006 et début 2007, à lademande d’un CHS-CT duTechnocentre (Comitéd’hygiène et sécurité - condi-tions de travail), un cabinetindépendant a mené uneenquête sur les conditions detravail. 64 % des travailleurs deRenault et des sociétés de sous-traitance ont répondu. Ce quel’on savait déjà se confirme :plus des 2/3 des salariés travail-lent plus de 9 heures par jour.18 % se disent stressés et sûre-ment davantage le sont, compte

tenu que tous les employésn’ont pas répondu à l’enquête.De nombreux ingénieurs ,cadres et techniciens restenttard au Technocentre et emmè-nent en plus du travail chez eux.

Face à ce constat, la direc-tion de Renault a annoncé desmesures afin de « maîtriser letemps de travail ». Des affichet-tes ont été collées sur les portil-lons pour indiquer que les heu-res « d’ ouverture » du site sontde 7 heures à 20 h 30, au lieu de5 h 30 à 22 h 30. Mais en réalité,on peut toujours entrer dans leTechnocentre avant 7 heures eten sortir bien après 20 h 30. Demême, les réunions nedevraient pas être organiséesaprès 18 heures ; du coup, cer-tains chefs les programment de12 heures à 14 heures avec pla-teau-repas obligatoire pourtous les participants. La direc-tion a laissé entendre qu’ellepaierait certaines heures sup-plémentaires mais lorsque dessalariés demandent à se les fairepayer certains chefs répondent :« Mais, moi, je ne vous ai riendemandé ». D’autres répondentqu’« il y a moyen de s’arranger

pour les récupérer ou les payer enheures de roulage » (c’est-à-direles heures de déplacement envoiture qui sont parfois indem-nisées), quant aux rapportsentre chefs et employés, il y apeu de chance que cela s’amé-liore. Car pour tous les respon-sables, l’objectif, le seul objectif,l’objectif suprême c’est tou-jours : tenir les objectifs !

À propos des effectifs, ladirection a annoncé qu’il yaurait 110 embauches ; maiselles ne concernent pas unique-ment le Technocentre et tou-chent aussi Rueil et Lardy.Quant aux « 240 ressourcessupplémentaires « , il ne s’agitpas d’embauches mais de muta-tions. Et pour les intérimaires,c’est toujours la précarité.

L’enquête conclut que « lesmesures du plan de soutien auxéquipes sont significatives et bienorientées », ce dont la directionse félicite. Mais le sentimentgénéral, c’est que Renault com-munique beaucoup, multiplieles effets d’annonce et qu’enréalité, rien ne change.

Correspondant LO

Bien sûr qu’ils savaient !1906 – Un inspecteur du

travail de Caen fait état de cin-quante décès survenus en cinqans dans une usine de filatureet de tissage d’amiante deCondé-sur-Noireau à cause« des poussières siliceuses pro-duites par les divers métiers. »

1918 – Aux États-Unis, descompagnies d’assurance refu-sent d’assurer sur la vie les tra-vailleurs de l’amiante.

1930 – La responsabilitédes poussières d’amiante dansla survenue de l’asbestose(f ibrose pulmonaire) estdémontrée.

1945 – L’asbestose estenf in reconnue commemaladie professionnelle enFrance.

1960 – Plusieurs enquêtesrévèlent le caractère cancéro-gène de l’amiante.

1976 – Les cancers liés àl’exposition professionnelle àl’amiante sont enfin reconnuscomme maladies profession-nelles en France.

1977 – Premiers textesdéf inissant les mesuresd’hygiène, de protection et decontrôle et interdisant les flo-cages contenant de l’amiante.

1997 – Interdiction del’amiante

� Le scandale de l’amiante

Un médecin du travail mis en examenUn ancien médecin du tra-

vail des usines Ferodo-Valéode Condé-sur-Noireau, spé-cialisées dans le travail del’amiante, est mis en examenpour « non-assistance à per-sonnes en péril ». Il n’était passans savoir que l’amiante tuaità petit feu les ouvriers qui res-piraient les poussières morbi-des. Quant à l’État et aux pou-voirs publics, ils le savaient euxaussi.

Depuis le début duXX e s ièc le , on sai t quel’amiante provoque des mala-dies pulmonaires comparablesà la silicose des mineurs et,depuis plus de cinquante ans,on sait qu’elle est cancérogène.Il n’empêche, cela ne fait quedix ans que l’amiante est tota-lement interdite. Entre-temps,en toute connaissance decause, les industr ie l s del’amiante, des médecins dutravail à leur botte et les res-ponsables de l’État à leur ser-vice ont laissé des milliersd’ouvriers s’empoisonner.Pire, ils ont milité pour que les

mesures de protection soientretardées. Bilan, rien qu’àCondé-sur-Noireau, des mil-liers d’ouvriers y ont déjà laisséleur peau, et on estime queplus de 3 000 devraient enmourir dans les dix à vingtprochaines années.

La juge qui a convoquél’ancien médecin du travailavait déjà, en 2006, mis en exa-men sept anciens directeursdes sites Ferodo-Valéo pour« homicides et blessures invo-lontaires ». Ceux-là ont beaujeu de se défendre en affirmantqu’ils n’avaient fait que « res-pecter la loi et les normes ».

L’ancien médecin du tra-vail, lui, est soupçonné de« passivité ». D’anciens sala-r iés témoignent qu’ i l secontentait de leur conseiller :« Buvez du lait », ce qui n’avaitévidemment aucun effet pro-tecteur. D’autres rappellentqu’il était membre du Comitépermanent amiante, le CPA,où il intervenait commeexpert. Cet organisme mis enplace par les industriels de

l’amiante en 1983, intervintpendant encore des annéespour retarder l’interdiction dela fibre afin de ne pas amputerles bénéfices des industriels.

Ne serait-ce que par sonsilence, ce médecin a laisséfaire et donc participé à l’héca-tombe. Mais les industrielsl’ont sciemment provoquée,bénis par les responsables del’État et des pouvoirs publics.

Sophie GARGAN

LO

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Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �11

Après la journée du 18

Les travailleurs ont montré leur forceIl faut maintenant s’en servir !

La grève massive du 18 octobre a montré que lestravailleurs répondaient présent et étaient prêts à engagerla lutte. Il était évident pour tous qu’une seule journée nepouvait suffire à faire reculer le gouvernement. Fortes dece succès, dans de nombreux secteurs, tant à la SNCF qu’àla RATP, des assemblées qui se sont tenues le 19 ontdécidé de continuer la grève. Si la fédération CGTn’appelait pas à cette continuation, bien des militants CGT,eux, ont tenu à être aux côtés de ceux qui restaient engrève.

Ceux qui continuaient ainsila grève ont voulu montrer leurdétermination non seulementau gouvernement mais aussi, età juste titre, aux organisationssyndicales. Et même dans lessecteurs qui n’ont pas choisi dereconduire la grève, beaucoupattendaient une suite et sedisaient prêts pour les prochai-nes étapes, espérant que de laréunion des fédérations de che-minots prévue pour le 22octobre allait sortir un appelferme à la poursuite de l’action.

Mais, prétextant une nou-velle semaine de discussionsavec le ministre, la réunionprévue pour le 22 octobre n’adébouché que sur un appel... àune nouvelle réunion le 31octobre. Aucune date, aucuncalendrier, aucun plan de mobi-lisation n’ont été fixés, seule uneaction vers la mi-novembre a

été évoquée.Plutôt que d’annoncer

d’ores et déjà la prochaineétape de la mobilisation, lesdirections syndicales s’en vontdonc discuter avec le gouver-nement, sans le mettre sous lapression d’un mouvement déjàdécidé et enclenché. Dans ces

conditions le gouvernement necédera rien, si ce n’est les quel-ques broutilles qu’il a déjàprévu d’accorder.

Mais si les dirigeants syndi-caux semblent se satisfaire durôle d’interlocuteurs du gou-vernement et de négociateursattitrés, ils n’en va pas de même

pour les travailleurs. Les travail-leurs, eux, jouent aujourd’huil’avenir de leur retraite. C’est unsujet trop grave pour qu’ils nes’en mêlent pas.

L’élan du 18 octobre n’estpas retombé et il ne doit pas lefaire.

Correspondant LO

� SNCF

Après le succès du 18,les travailleurs réfléchissent à la suiteLe 18 octobre, de multiples assemblées de grévistes sesont réunies partout dans le pays, pour discuter decomment contrer l’attaque contre les régimes spéciaux deretraite. Bien souvent ces assemblées étaient appelées pardes militants de SUD-Rail ou de FO, mais parfois par desmilitants de la CGT en opposition avec la politique de leurfédération. Beaucoup pensaient que cette puissantejournée, tant parmi le personnel d’exécution qu’au sein dela maîtrise et l’encadrement, ne pouvait pas rester sanslendemain.

Ces assemblées sur unmême secteur ont souventregroupé des cheminots de dif-férents services, tels que descontrôleurs, des conducteurs,des vendeurs dans les gares, etc.Mais il y eut aussi des assem-blées de grévistes dans les ate-liers, les triages, les dépôts.Nombre d’entre elles ont décidéde reconduire la grève, enattente de ce que faisaientd’autres secteurs, à la SNCFmais aussi à la RATP. Des mili-tants et des adhérents de la CGTs’y sont quelquefois exprimés,pour faire part de leur incom-préhension devant la politiquede leur direction qui privilégiela négociation et non la créationd’un rapport de force indispen-

sable pour faire reculer le gou-vernement. Pour eux, l’attaquedu gouvernement n’est pasnégociable et, face à la fermetéaffichée par Sarkozy et sesministres, on ne peut répondreque par autant de fermeté.

Lorsque le 19 octobre lafédération FGAAC (syndicatcatégor ie l des agents deconduite) a fait savoir qu’elleretirait son préavis reconduc-tible, suite à un accord obtenuavec la direction de la SNCFsoutenue par le gouvernement,bien des militants et adhérentsde ce syndicat ont non seule-ment exprimé leur réprobation,mais sont restés en grève. Eneffet cet accord prévoit que lesconducteurs devront travailler

cinq ans de plus et partir enretraite à 55 ans au lieu de50 ans.

Le 19 octobre, bien desassemblées ont donc reconduitla grève, y compris jusqu’au 22,date de la rencontre interfédé-rale. Certes le nombre de grévis-tes baissait de jour en jour, maisle moral était là. Certainsdisant : « On s’est préparé à fairetrois semaines ou un mois degrève, on peut donc tenir deux,trois ou quatre jours ». Et là oùles mi l i tants de la CGTn’avaient appelé qu’à 24 heuresle 18, des adhérents de ce syndi-cat restaient en grève, disantqu’ils ne casseraient pas celle-ci,même s’ i l s n ’éta ient pasd’accord sur tout avec leurscamarades qui continuaient.

Dans le même temps lapresse rabâchait que la circula-tion serait normale le 19 après-midi, puis le 20 en soirée, puis le22, puis... ! En fait les cheminotsvoulaient faire savoir au gou-vernement ainsi qu’aux direc-tions syndicales qu’ils étaientprêts à continuer.

Le lundi 22 octobre au soir,beaucoup de cheminots encoreen grève ou ayant repris le tra-vail attendaient qu’un appelprécis à une grève illimitée soitproposé par les fédérations syn-dicales. Et lorsqu’ils ont prisconnaissance de l’absence deproposition, lorsqu’ils ont suqu’ i l fa l la i t a t tendre le31 octobre pour que les fédéra-tions se rencontrent à nouveauet appellent peut-être à uneéventuelle journée pour la mi-novembre (au cas où les négo-ciations du 24 octobre avec leministre du Travail n’abouti-raient pas), il n’y a pas eud’abattement ni de démoralisa-tion. Beaucoup se sont alorsdemandé comment faire pourrepartir, tout en attendant cequi va être proposé.

Aujourd’hui, chez les mili-tants de la CGT il y a un certainmalaise, car depuis plusieurssemaines ils attendent un plande mobilisation précis. Ils necomprennent pas pourquoi lestravailleurs de la fonctionpublique seraient appelés le

20 novembre et eux le seraientpeut-être le 15. Et le fait que lesecrétaire de la CGT cheminotsait annoncé que la réforme desretraites n’était pas négociable,tout en réclamant aussitôt denégocier le système des décotes,leur semble paradoxal, puisqu’ils’agit là d’un tout.

Suite à cette interfédérale du22 octobre, des militants de laCGT de plusieurs secteursdisent vouloir écrire à leur fédé-ration pour réclamer des datesprécises afin d’entrer de nou-veau en grève, en précisant quela réforme des retraites n’est pasnégociable. Certains secteursCGT menacent même de seregrouper et de déposer despréavis reconductibles. Le sec-teur de Toulouse par exemple aécrit à la fédération que, si riende sérieux n’était proposé rapi-dement, il appellerait à la grèveillimitée dès le 6 novembre.

Partout les discutions conti-nuent. Partout le moral est bon.

Correspondant LO

LO

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12�Lutte Ouvrière n° 2047�26 octobre 2007

Après la journée du 18

La détermination des cheminots(Correspondance LO – SNCF)À la Garede Paris-Nord

A Paris Nord, nous sommesrestés en grève jusqu’au 23octobre. La veille encore, 40 %des conducteurs n’avaient pasrepris le travail.

Pendant ces cinq jours, desassemblées inter-services ontété organisées, regroupantjusqu’à 130 personnes, agentsde conduite et agents des garesconfondus, ce qui ne s’était pasvu depuis les grèves de 1995. Endépit des directives de la CGT etde la FGAAC appelant àreprendre le travail dès le 19,bien des grévistes, y compris dessyndiqués de ces organisations,ont choisi de rester en grève.

Les part ic ipants àl’assemblée du 22 ont voté àl’unanimité une motion exi-geant des syndicats un plan demobil isat ion daté, précis ,reconductible et qui concerne-rait les travailleurs du public etdu privé, pour construire lasuite nécessaire.

Si aucun gréviste ne regretted’avoir continué la grève aprèsle 18, beaucoup s’interrogentsur la possibilité de regrouper ànouveau autant de grévistes laprochaine fois. D’autant que lespositions on ne peut plusvagues des fédérations ne sontpas faites pour rassurer.

Il n’empêche que nous som-mes toujours là, décidés à toutfaire pour que la prochainegrève soit une réussite afind’obliger le gouvernement àrembal ler son projet deréforme.

Aux Ateliersdu Landy(Seine-Saint-Denis)

Aux Ateliers du Landy, oùsont entretenus les TGV Nord,la reprise du travail a été votée lemardi 23 octobre par une petiteassemblée d’une quarantained’agents.

Les grévistes, qui avaientcessé le travail depuis le 18, nesont pas découragés. Ils atten-daient certes un appel ferme dela part des organisations syndi-cales, mais se disent prêts àcontinuer, même à la mi-novembre, si c’est cela qui estdécidé. L’ambiance n’est pas audécouragement.

Région de LyonDans la région de Lyon, la

grève du 18 octobre a été massi-vement suivie, y compris chezles cadres. La manifestationétait dynamique, de nombreuxcheminots, bien sûr, mais aussi

des grévistes d’EDF GDF, deFrance Télécom et de La Poste,des enseignants et des travail-leurs du privé comme ceux deRhodia et Famar.

Chez les cheminots, tousdiscutaient de la suite à donner.Les dirigeants CGT faisaientpression pour que la grèves’arrête le 18, allant jusqu’àorganiser des assemblées sépa-rées dans certains secteurs.Cependant bien des syndiquéset militants CGT n’approu-vaient pas cette position et cer-tains ont voté la poursuite de lagrève, faisant ainsi connaîtreénergiquement leur désaccord.

Au Triage de Sibelin, à Fey-zin, comme au Dépôt de Vénis-sieux, les assemblées des grévis-tes ont voté la poursuite dès lejeudi matin. Même chose le len-demain. Aux Ateliers d’Oullins,la grève s’est poursuivie égale-ment le vendredi 19. La reprisedu travail n’a été décidée qu’àl ’assemblée du lundi22 octobre.

À la gare de la Part-Dieu oùla grève n’a pas été reconduiteainsi qu’à la gare de Perrache,où la reprise s’est faite partielle-ment et progressivement, lesTER ont continué à ne pas cir-culer, remplacés par des carstoute la journée de samedi et enpartie le dimanche.

Beaucoup de cheminotspensaient que le 22 octobre ausoir les syndicats al la ientannoncer une suite immédiate.Ce ne fut pas le cas et certainsont eu du mal à comprendre. Leclimat n’est cependant pas àl’abattement. Pour la plupart laconviction reste qu’il va falloirune grève plus dure si les chemi-nots ne veulent pas se faire volerleurs retra i tes et que le31 octobre les syndicats doiventannoncer la grève.

À LimogesLa manifestation du 18

octobre a regroupé plusieursmilliers de salariés, dont 800cheminots. Parmi les sloganscriés, on a pu entendre : « Tra-vailler plus pour gagner moins,NON ! » ou « 37 ans et demipour tous les salariés, c’est çal’égalité ». Puis, la grève a étéreconduite pour la journée duvendredi, tant à Limoges qu’àBrive.

Bien des grévis tes quiavaient repris le travail à l’atelieret sur les chantiers pensaientqu’il aurait été juste de conti-nuer la grève, mais ne sevoyaient pas le faire sans lamajorité des cheminots et sansla CGT, le syndicat majoritaire.Les responsables CGT étaientpour leur part opposés même àla tenue d’assemblées que desadhérents leur demandaient. Ilslaissaient seulement entendreque la prochaine grève seraitreconductible. Mais, au soir du22, lorsque les cheminots appri-rent que rien de concret ne sor-tait de la rencontre entre lesfédérations, c’est la perplexité etla méfiance qui dominèrentchez ceux qui attendaient que lesyndicat annonce la grève. Lescheminots se demandent si lesdirections syndicales ont vrai-ment l’intention de relancer unmouvement fort, tant il paraîtévident à beaucoup qu’il n’y arien à attendre de la négociationavec le gouvernement.

Beaucoup n’y renoncentcependant pas : l ’énergiedéployée le 18 est toujours là etles cheminots ont encore bienl’intention de s’en servir.

À RennesPrès de 80 % des cheminots

de la région Bretagne ont faitgrève le 18 octobre dont beau-coup de jeunes qui refusentaussi que l’on s’attaque auxretraites. Pour beaucoup, c’étaitleur première grève, leur pre-mière manifestation. Certainsl’expliquaient ainsi : « On en adéjà marre des conditions de tra-vail et des salaires minables, cen’est pas pour accepter des retrai-tes encore plus basses. »

La réussite de la grève du 18a été telle que nombreux sontceux qui se disent aujourd’huiqu’on ne peut en rester là. Cequi inquiète par contre, c’est leflou organisé par les fédérationssyndicales. La plupart des che-minots et en particulier ceuxproches de la CGT, attendaientune date précise pour conti-nuer, voire amplifier la mobili-sation. Mais rien n’est vraimentvenu, à part une éventuelleact ion à la mi-novembre.Quand exactement ? Mystère.

Toujours est-il que le moraldes agents est toujours élevé.Certains se disent déterminés àne pas s’en laisser conter etenvisagent d’aider aux tournéesde chantiers pour convaincre leplus grand nombre que le com-bat engagé ne pourra pas s’arrê-ter là.

À NantesSur la région de Nantes, les

grévistes étaient un peu plus de80 % le 18 octobre, ce qui est unsuccès.

La grève a été reconduitejusqu’au lendemain 9 heures etc’est tous ensemble, à 800, quenous sommes partis en cortègeau centre-ville rejoindre lamanifestation inter-profession-

nelle.

Cette manifestation a regon-flé tout le monde, car en plusdes cheminots il y avait le restede la Fonction publique avec uncortège important d’électricienset de gaziers, d’enseignants, desalariés territoriaux ou du CHUet aussi de fortes délégations duprivé comme ceux de Trelle-borg, d’Airbus ou encore ceuxdes magasins Leclerc.

Le lendemain, l’assemblée adécidé de suspendre le mouve-ment.

Ce premier tour de chauffe,ressenti positivement par tous,a été l’occasion de discuter dessuites à donner au mouvementet de nouer des contacts qui ser-viront sûrement dans les pro-chains jours à construire lariposte nécessaire.

Aux ateliersde Quatre-mares(près de Rouen)

Aux Ateliers de Quatre-Mares (environs 800 chemi-nots) la grève du 18 octobreavait été préparée par desassemblées générales régulières.Dès 6 h 30 de très nombreuxouvriers ont participé auxpiquets. Mis à part quelquescadres, pratiquement tout lemonde était en grève ce jour-là.

Après l’assemblée généraleet un dépôt de motion, les che-minots ont rejoint les mécani-ciens du Dépôt de Sotteville etensemble se sont rendus à lamanifestation où quelque 1 000cheminots ont défilé.

À l’assemblée du lendemainmatin des discussions houleu-ses ont opposé des grévistes àcertains syndicalistes qui vou-laient faire reprendre tout desuite. La grève a été reconduiteavec un rendez-vous lundi22 octobre au matin pour fairele point.

Ce jour là, le travail a reprisbien que de nombreux chemi-nots présents à l’assemblée nevoulaient en aucun cas en resterlà. Le sentiment que les direc-tions syndicales ne sont pas à lahauteur est largement partagé.Comme l’est aussi la conscienceque pour faire reculer le gouver-nement il est nécessaire que lemouvement s’amplifie.

Une nouvelle assembléeaura lieu jeudi 25 octobre.Beaucoup de cheminots parminous sentent qu’il va falloir, dèsmaintenant , discuter desmoyens de développer le mou-vement. C’est d’ailleurs le seulmoyen d’entraîner ceux quihésitent.

LO

Manifestation du 18 octobre à Marseille.

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Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �13

Dans les entreprises� Les grèves de 1995 et de 2003

Rendre victorieux un mouvement...ou le faire capoter

1995 : la riposteau plan Juppé

En novembre 1995, le Pre-mier ministre Alain Juppé pré-sentait son plan de réforme de laSécurité sociale, comportantentre autres une mise à mal desrégimes spéciaux de retraite etde ceux de la fonction publique,avec l’allongement de la duréede cotisation de 37,5 ans à 40ans pour une retraite à tauxplein.

Aussitôt, sept fédérations defonctionnaires, de cheminots etd’agents de la RATP appelèrentà une grève générale, le 24novembre.

La CGT, sans craindre d’êtredébordée, favorisa les assem-blées inter-secteurs, inter-entreprises, mélangeant chemi-nots, agents de la RATP, ensei-gnants, postiers, poussant lessecteurs les plus combatifs àrendre visite à ceux qui l’étaientmoins. « Tous ensemble ! » étaitle slogan du mouvement.

Le 28, lors de la nouvellejournée, la grève était totale à laSNCF et la RATP. Elle s’éten-dait ou se maintenait les jourssuivants à La Poste, à EDF-GDF, à France Télécom et chezles enseignants. Alors que Juppécontinuait à se dire « droit dansses bottes », les syndicats appelè-rent pour le 5 décembre à une« puissante journée d’actionnationale dans les secteurs privé

et public ». La veille, les princi-paux syndicats de cheminotsboycottèrent les travaux de lacommission chargée de discuterde la réforme des régimes spé-ciaux. Le 5 décembre, entre700 000 et un million de travail-leurs défilèrent dans tout lepays. La plupart étaient des sala-riés du public, mais dans lesmanifestations nombreux aussiétaient les travailleurs du privé.

Les journées d’action, parcequ’elles étaient suffisammentrapprochées et annoncées àl’avance, loin d’être des jour-nées sans lendemain, étaient aucontraire perçues comme despoints d’appui réels permettantaux secteurs déjà en grève d’yrester et aux autres de s’y rallier.Le 11 décembre, Juppé annonçane plus toucher à l’âge de départen retraite des employés de la

SNCF et de la RATP, avant deretirer sa réforme des retraitespour l’ensemble de la fonctionpublique.

En trois semaines, les tra-vailleurs étaient parvenus à fairereculer le gouvernement.

2003 : les syndicatsdésorganisent la grève

Le gouvernement attendit2003 avant de revenir à lacharge. Mais cette fois il obtintsatisfaction, non pas parce queles travailleurs furent moinscombatifs qu’en 1995, maisparce que les fédération syndi-cales, et en premier lieu la CGT,eurent une politique contraireaux intérêts du mouvement.

À EDF-GDF, la grève et lamanifestation du 3 octobre2002 contre la réforme de leur

régime de retraite surprirenttout le monde par leur ampleur.Mais le lendemain, les organisa-t ions syndica les , lo in des’appuyer sur la mobilisationqu’elles avaient créée, enta-maient des négociations avec ladirection.

Contre la réforme des retrai-tes de Fillon, les enseignantsentamèrent la grève dès le moisd’avril 2003. Le 13 mai, eut lieuune journée de grève, à la SNCFet à la RATP. Elle fut un succèsénorme. Seulement, au lieu des’appuyer sur l’élan donné parcette journée, les principalesfédérations syndicales, dont laCGT, n’appelèrent qu’à unemanifestation pour le dimanche25 mai puis à une grève le 3 juin,prélude, disaient-elles, à unmouvement reconductible quine vint jamais.

Contrairement à 1995, laCGT se garda alors de réclamerle retrait du plan Fillon, secontentant de réclamer « uneautre réforme des retraites ». Deplus, elle s’opposait à toutes lesassemblées communes, cher-chant au contraire à isoler lessecteurs les uns des autres.

Le mouvement se terminaitpiteusement le 10 juin. Laréforme était appliquée pour laseule fonction publique. Maistout le monde savait que le répitserait de courte durée pour lesrégimes spéciaux.

C.B.

� EDF-GDF

Le succès dela journéedu 18, enattendantla suite

Selon la direction (maisc’est toujours elle qui publiece genre de chiffres) lenombre des grévistes, chezEDF, au plan national, étaitde 65,22 % par rapport àl’effectif qui aurait dû êtreréellement présent le 18. Il yavait donc pratiquementdeux tiers du personnel engrève. Pour Gaz de France, ladirection n’a donné que lepourcentage par rapport àl’effectif théorique (qui com-prend les agents en stage, enRTT, etc.) lequel est très légè-rement supérieur à ce mêmepourcentage pour EDF. Onpeut donc supposer que lenombre des grévistes, à GDF,était au moins égal, et peut-être même légèrement supé-rieur. Enfin pour le RTE,Réseau de transport d’élec-tricité (puisqu’il s’agit main-tenant d’une sociétéséparée), les grévistes étaient68,21 %.

Dans les centra lesnucléaires (comptabiliséesdans EDF), le pourcentagedes grévistes par rapport àceux qui devaient être pré-sents s’établit à 69 %. Et il yaurait eu, selon la CGT, unebaisse de charge considé-rable, de 10 000 mégawatts.Compte tenu qu’une centralenucléaire a une puissance del’ordre de 1 300 mégawatts,cela représente donc l’équi-valent de sept à huit centralesmises à l’arrêt.

Dans la région parisiennela grève a été très bien suivie.À Paris même, les trois cen-tres existants (Paris Nord,Paris Aurore et Paris TourEiffel) s’échelonnaient entre68 % et 74 % de grévistes.

C’est un incontestablesuccès donc.

Maintenant il paraît évi-dent à ceux qui ont fait grèvequ’une seule journée ne suf-fira pas. Les grévistes du 18attendent donc l’annonced’une nouvelle journée degrève, et en particulier que lessyndicats de l’énergie ali-gnent leurs propositions surcelles des syndicats de chemi-nots.

Correspondants LO

Le 18 octobre, à la RATP, lagrève a été un franc succès :60 % de grévistes à la mainte-nance, 70 % parmi les travail-leurs du métro, 80 % parmiceux des bus et du RER, soit autotal environ 30 000 grévistes.

Dans le métro, des assem-blées de grévistes se sonttenues qui, malgré les réticen-ces syndicales, ont voté pour lacontinuation de la grève levendredi 19, avec appel à denouvelles assemblées. Dans laplupart des cas, il s’agissaitd’un rendez-vous pour savoirce qui allait être fait dans lesautres secteurs et à la SNCF.Au terminus de la Porte-de-Saint-Cloud par exemple, lesgrévistes se sont retrouvés àenviron 300, venus de diffé-rents secteurs : Porte-de-Saint-Cloud bien sûr mais

aussi Pont-de-Sèvres, Auteuil,Balard, ainsi que des dépôts debus de Croix-Nivert et Point-du-Jour (15e arrondissementde Paris).

La grève a aussi été trèssuivie dans tous les dépôts debus (y compris par la maîtrise)et les piquets de grève au matindu 18 étaient très nombreux.Au dépôt des Li las par

exemple, la mobilisation et lacolère étaient au plus fort et àcelui de Nanterre, avec 98 %de grévistes et 250 conducteursau piquet de grève, c’était dujamais vu ! Le lendemain, deséquipes de grévistes sont alléesvers les autres dépôts pourfaire connaître leur décision depoursuivre la grève. Et si celle-ci a finalement été suspendue

le samedi 20, les travailleursont tenu à exprimer qu’ils’agissait maintenant d’orga-niser et de préparer la pro-chaine grève. Autre exempleencore, le dépôt de Montrougeoù la grève a été très suivie :97 % chez les conducteurs debus et les ouvriers de la main-tenance.

Ainsi, la grève du 18 etmême les journées qui l’ontsuivie ont fait la démonstra-tion qu’à la RATP, comme à laSNCF, les travailleurs sontmobilisés et ont répondu mas-sivement à l’appel des syndi-cats. Aujourd’hui, tous sontconscients de l’importance del’enjeu autant que de l’impor-tance de la lutte qu’il faudramener pour faire reculer gou-vernement et directions.

Correspondants LO

� La grève du 18 octobre à la RATP

Un succès remarquable

B.Rondeau

LO

Manifestation en décembre 1995.

Une AG commune du 18 octobre RATP métro-bus.

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14�Lutte Ouvrière n° 2047�26 octobre 2007

Dans les entreprises

� ADDSEABesançon

Nouvellejournée degrève le26 octobre

À l’ADDSEA, structuredu secteur social qui emploie500 salariés sur le départe-ment du Doubs, on se batdepuis des années pour lepassage aux 35 heures. En1999 la direction avait consi-déré que, du fait des congésconventionnels en plus descinq semaines de congéspayés, nous serions déjà aux35 heures. Une quarantainede salariés, appelés un temps« les 40 voleurs » par la direc-tion générale, avaient saisi lesPrud’hommes et gagné.Selon leur jugement, l’entre-prise devait réduire le tempsde travail et nous payer 4heures supplémentaires parsemaine effectuée sur cinqans (soit plus de cinq mil-lions d’euros au total).

Dans un premier temps,comme l’ADDSEA est unestructure associative de droitprivé, mais qui ne tourne quegrâce à de l’argent public(Conseil général, État, Pro-tection judiciaire de la jeu-nesse ), la direction généralea affirmé qu’elle refuserait dedemander les fonds nécessai-res pour payer le passif quinous est dû et les créations depostes nécessa ires . Lajournée de grève massive du21 mai dernier, où de nom-breux services étaient fermés,avait débloqué un peu lasituation. Depuis, le Conseilgénéral a promis 1,5 milliond’euros pour verser le passifdû aux salariés. Mais il n’y atoujours pas de réponse de lapart de l’État et, en ce quiconcerne la réduction dutemps de travail, la directiongénérale se contente de reco-pier les textes législatifs etconventionnels en vigueur,en cherchant à y ajouter, iciou là, des dispositions moinsfavorables aux salariés...comme par exemple un droitde réquisition des salariés encas de grève !

Réunis en assembléegénérale le 12 octobre, unenouvelle journée de grève aété décidée pour le 26, jourdu conseil d’administrationde l’ADDSEA, avec rassem-blement devant le conseild’administration, et manifes-tation jusqu’à la préfecture.

Correspondant LO

� Industrie pharmaceutique

L’intérêt des patients ou celui des trustsLa société pharmaceutique

américaine Genentech com-mercialise aux États-Unis deuxproduits très voisins contre lapousse anarchique des vais-seaux sanguins dans certainesaffections.

Le premier, le Lucentis, estutilisé contre une affection de larétine qui rend aveugles desmillions de vieilles personnes,

une forme de la dégénérescencemaculaire liée à l’âge. Il coûteplus de 2 000 dollars l’injection,injection qu’il faut répéter neuffois.

Le second, l’Avastin, plusancien, est utilisé contre le can-cer. Il coûte bien moins cher.

Or il se trouve que des oph-talmologues ont eu l’idée deremplacer le Lucentis par

l’Avastin, ce qui semble trèsbien fonctionner. Entre 2 000dollars l’injection pour l’un, etmoins de 70 dollars pourl’autre, le choix des ophtalmo-logues et surtout des patients aété vite fait. Du coup, les ventesdu Lucentis ont montré un sou-dain accès de faiblesse.

Mais que faire, quand on estun industriel de la pharmacie,

lorsqu’un traitement coûtetrente fois moins cher qu’unautre pour le même résultat ?Genentech a trouvé : aux États-Unis, le prix de l’Avastin vientd’être multiplié par dix chez lesophtalmologues. Qui a dit que,pour les trusts pharmaceuti-ques, le progrès n’avait pas deprix ?

R.L.

� Faurecia – Cergy-la-Tour (Nièvre)

Les préretraites remises en causeEn juin 2006, le groupe Fau-

recia annonçait la suppressionde 690 emplois sur toute laFrance pour 2007 et 2008. Aprèsles usines de Nogent-sur-Seine,Beaugency, Brières, le centrerecherche et développement deNogent-sur-Vernisson, c’estl’usine de Celles-sur-Plainedans les Vosges qui vient de fer-mer. 97 travailleurs vont seretrouver sans emploi.

À Cercy-la-Tour, la direc-tion avait annoncé la suppres-sion de 140 emplois et desdéparts en préretraite. Les pre-miers devaient partir avant la fin

de l’année 2007. Mais voilà que,tout d’un coup, la directionnous réunit pour annoncer descommandes urgentes : il y a uneaugmentation de la charge detravail jusqu’à la fin de l’année,alors pas de départs en prére-traite.

Pourtant, après des dizainesd’années de travail harassant,les travailleurs concernés pen-saient bien pouvoir profiterd’un peu de repos et s’étaientorganisés pour cela. Mais ladirection les considère commedes pions et, selon son bon vou-loir, ils n’ont aucune garantie

sur ce qui va se passer en 2008.La direction voudrait mettre

en place la précarité au travailpour tous. Il y a déjà des dizai-nes d’intérimaires (et des nou-veaux viennent d’arriver) qui nesavent pas sur combien de moisde salaire ils vont pouvoircompter.

Peugeot, l’actionnaire majo-ritaire de Faurecia, veut faire deséconomies de main-d’œuvrepour maintenir, voire mêmeaugmenter ses bénéfices.

Au premier semestre 2007,le groupe Faurecia a mis de côté39,9 millions d’euros pour

payer ses restructurations(c’est-à-dire des licenciements).À Villiers-la-Montagne, en Lor-raine, il a bénéficié gratuite-ment de l’ancienne usine Dae-woo, avec une remise en étatpayée par le Conseil régional.

Licencier des centaines detravailleurs, faire travailler pluset dans la précarité ceux qui res-tent tout en bénéficiant d’aidespubliques, voilà la politique dece groupe... comme de biend’autres !

Correspondant LO

� Air France

La direction d’Air Franceaime à se vanter de ses résultatstout en maintenant le gel dessalaires – et les deux vont depair. Et elle n’embauche aussiqu’au compte-gouttes, mêmelà où les besoins sont les pluscriants.

Mais, à trop tirer sur lacorde, celle-ci finira bien pascraquer. En tout cas, pratique-

ment tous les syndicats dePNC (personnel naviguantcommercial – hôtesses et ste-wards) viennent de déposer unpréavis de grève pour la der-nière semaine d’octobre, aveccomme revendications lessalaires et les conditions detravail.

Que les PNC en aient assez,on l’imagine sans peine. Qu’ils

le montrent, tant mieux ! Et laseule chose que n’aurait pasvolée la direction, elle qui nousimpose à tous les mêmesconditions de travail et desalaire dégradées, c’est quenous nous retrouvions tousensemble, dans tous les sec-teurs de la compagnie, à luiprésenter l’addition.

Correspondant LO

Grève annoncéedu personnel navigant commercial

À Air France, différentessections syndicales avaientappelé depuis plusieurs semai-nes à faire grève le 18 octobre,appel relayé plus mollement etp lus tard ivement par l e sbureaux nationaux de ces syn-dicats.

La suppression des régimesspéciaux et ce que cela repré-sente, on connaît : c’est arrivé àAir France en 1991, bien avantmême la privatisation de lacompagnie. Et surtout, pour denombreux travailleurs des ate-liers, du fret, parmi le person-nel commercial, etc., l’envie nemanquait pas de faire savoirque les attaques gouvernemen-tales, ça suffit. Dans les discus-sions, i l revenait souventcomme une évidence que, sipour le moment Sarkozy et songouvernement s’en prennentaux cheminots, électriciens,gaziers, etc., ce n’est que pourmieux préparer une nouvelleattaque contre les retraites,cette fois, de tous les salariés.

Et puis Sarkozy peut faireses discours sur le « travaillerplus pour gagner plus », chacunvoit bien que la direction d’Air

France affiche dans la presse,mois après mois, des résultatsfinanciers mirobolants, tandisque nos salaires, eux, sont defait gelés depuis des années etque la charge de travail, dansbien des secteurs, ne cesse decroître.

Alors le 18 octobre, si dans

certains secteurs d’Orly, deRoissy, de Villeneuve, il y a eu10 % de grév i s te s , dansd’autres on a parfois atteint60 %, voire 70 % du personnelqui a cessé le travail une demi-journée, et plus souvent lajournée entière, notammentdans les ateliers et à l’Escale (les

aérogares).

Quant à la manifestationparisienne, ceux des grévistesqui ont pu la rejoindre étaientune bonne centaine, une parti-cipation qui rappelle celle auxmanifestations contre le CPE.

Correspondant LO

LO

Lors de la manifestation, à Paris.

La journéedu 18 octobre

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Lutte Ouvrière n° 2047 �26 octobre 2007 �15

Dans les entreprises

� La Redoute – Wattrelos (Nord)

Échec au licenciement d’un déléguéDurant plus de quatre

semaines, notre collègue David,délégué CGT aux Ramassages,un des secteurs les plus péniblesde l’entreprise, a été mis à piedpar la direction de la Redoute,sous un prétexte plus queléger : il était accusé, ce qu’ilniait, d’avoir écrit des proposdésobligeants sur une cadre.Cette cadre, elle, avait traité dessalariés de « crasseux » et deSDF. Du coup, un carton de« SDF » rempli d’inscriptionspeu flatteuses sur la cadre enquestion, avec des écritures trèsdiverses, avait fait son appari-tion dans le service.

C’est pourtant David qui aété sanctionné d’une mise à pied

conservatoire, dans l’attented’un entretien pouvant se con-clure par son licenciement. Sansêtre prévenu et se présentantcomme d’habitude, une cadredu secteur lui a dit qu’il ne pou-vait plus entrer dans l’entreprise,comme s’il était quasiment unhomme dangereux.

Mais voilà, cette nouvelle aprovoqué dès le jour même undébrayage de plus de 100 per-sonnes, en solidarité avec ce tra-vailleur très apprécié pour sagentillesse et sa combativité. Ladirection faisant la sourdeoreille, nous étions plus de 200le jour de l’entretien. Et commela direction, quinze jours plustard, faisait encore le mort, nous

sommes retournés lui deman-der des comptes encore plusnombreux avec d’autres sec-teurs de l’entreprise, le jeudi11 octobre.

L’inspecteur du travail, qui avu que tous les syndicats, sauf laCGC, soutenaient David et quenous ét ions nombreux àdébrayer en solidarité avecnotre camarade injustementattaqué, a refusé le licenciementet sommé la direction de laRedoute d’organiser sa réinté-gration, ainsi que de lui payerses jours de mise à pied.

Comme quoi la solidarité,c’est un moyen efficace de répa-rer les injustices.

Correspondant LO

� MGENMutuelle de l’Éducation nationaleGrand-Quevilly (Seine-Maritime)

Des suppressionsd’emplois annoncées

Des suppressions d’emploissont annoncées à l’antenne nor-mande de la Mutuelle de l’Édu-cation nationale (MGEN),située à Grand-Quevilly.

Le siège normand de laMGEN comptait jusqu’à pré-sent 53 salariés. 25 emploisdevraient être supprimés.

Au début du mois, tous lessalariés ont reçu un livret quileur conseille de chercher unautre emploi ailleurs. La direc-

tion espère ainsi qu’entre lesdéparts volontaires et la dizainede départs possibles par mesured’âge, elle n’aura pas à annoncerde licenciement « sec » à la datebutoir, fixée en juin 2008.

Mais pour les salariés de laMGEN, qu’il s’agisse de départsavant licenciement ou de licen-ciements tout court , ce lasignifie que 25 emplois vontencore passer à la trappe !

Correspondant LO

� La Poste – Mulhouse (Haut-Rhin)

Trois jours de grève font reculer la PosteDepuis la réorganisation de

la distribution du courrier aumois de juin, plus d’une tournéesur cinq a été supprimée sur lescinq bureaux que compte laplate-forme de Mulhouse. Ducoup, souvent, les facteursn’arrivent pas à terminer leurdistribution à 15 h 30, horairethéorique de fin de tournée.

La direction, qui expliquait àqui voulait l’entendre que toutrentrerait dans l’ordre après unepériode d’adaptation, a quoti-diennement recours à des inté-rimaires non formés. L’un deuxa ainsi terminé sa tournée à20 heures se retrouvant devantle bureau, portes closes !

Quant au directeur de laplate-forme de Mulhouse, laseule tournée qu’il ait effectuéeest celle des bureaux, il y a troissemaines. Il a ainsi convoquédes facteurs pour leur signifiertout simplement qu’ils étaientincompétents, incapables etqu’ils devraient, après desannées de métier, « penser àfaire autre chose » !

C’est sans doute le méprisaffiché de la direction qui apoussé à la grève. Un préavisillimité a été déposé pour le17 octobre par une intersyndi-cale (CGT-CFDT-SUD-FO-CFTC), une des revendicationsprincipales portant sur le redé-

coupage des tournées et la créa-tion de huit tournées et demiesupplémentaires sur la plate-forme.

Le premier jour de grève, 75facteurs sur 100 se retrouvaientau Centre de tri pour demanderdes comptes à la direction, quiproposait, en tout et pour tout,deux créations de postes !

Le lendemain matin,18 octobre, les facteurs manifes-taient en ville en faisant signerlargement une pétition de sou-tien à leur mouvement. L’après-midi, des facteurs venus de Col-mar (distant de 45 km) les rejoi-gnaient pour participer à lamanifestation sur les retraites.

Quant aux agents du Centred’entraide de Strasbourg, quisont censés combler n’importequelle vacance de poste sur larégion, ils étaient à 90 % engrève, marquant ainsi leur soli-darité.

Le vendredi 19 au matin,une assemblée générale rendaitcompte de la deuxième propo-sition de la direction : quatrepostes supplémentaires. Mêmes’ils étaient moins nombreux àpoursuivre la grève, les facteursprésents jugeaient cette propo-sition toujours insuffisante, etdécidaient de continuer le mou-vement. Dans la journée, ladirection annonçait la création

de six postes avec les embauchescorrespondantes, et la transfor-mation rapide en CDI de douzepostes jusque-là occupés pardes intérimaires.

Les grévistes, régulièrementtenus au courant lors des négo-ciations, ont accepté ces nou-velles propositions et la reprisedu travail fut décidée pour lelendemain. Ces trois jours degrève ont été pour les facteursl’occasion d’exprimer leur ras-le-bol vis-à-vis de leurs condi-tions de travail et, si tout n’estpas réglé, le sentiment d’avoirfait reculer la direction parl’action collective domine.

Correspondant LO

Les travailleurs des usinesamiénoises de Goodyear-Dun-lop, qui regroupent 2 700 tra-vailleurs, ont refusé très majori-tairement, lors d’une consulta-t ion fa i te le vendredi 19octobre, la nouvelle organisa-tion des équipes projetée par ladirection du groupe. Et pourcause !

Elle aboutirait en effet à fairepasser l’ensemble des travail-leurs en 4x8, a lorsqu’aujourd’hui la majorité fontles 3x8 en semaine. Pour ceuxqui travaillent le week-end,cette nouvelle organisationentraînerait un allongement dela durée du travail (de 28 heuresà 35 heures), sans augmentationde salaire correspondante. Elleentraînerait également la sup-pression de 450 emplois sur

trois ans, par le biais de départsà la retraite et préretraite nonremplacés.

Bien entendu, le patron a faitson chantage habituel, préten-dant que ce plan est la « seulesolution pour rester compétitif »,et qu’il était la condition pourfaire un investissement de 52millions d’euros, nécessaire à lamodernisation de la produc-tion. Il a bien entendu ajouté àsa propagande le fait que les« coûts de production » du siteseraient supérieurs de 25 % àceux des usines allemandes.Bref, l’usine serait menacée defermeture si la direction ne réa-lisait pas son plan.

Le même discours a été tenuchez Continental à Clairoix,près de Compiègne, où la direc-tion voudrait faire passer les tra-

v a i l l e u r saux 40heures au1er janvier2008, avecune grosseperte desalaire à lac lé . El leprétendaitégalementque l’usinede Clairoixéta i t laplus chère du groupe, et que lesinvestissements ne pouvaientêtre débloqués sans une signa-ture de l’accord. Quand il s’agitde faire travailler plus tout enimposant aux travailleurs degagner moins, les patrons ne semontrent pas très originauxpour les arguments.

En juillet dernier, les travail-leurs de Goodyear-Dunlopavaient déjà fait grève contre lesattaques de la direction. En sep-tembre, ils avaient recommencéen bloquant les entrées del’usine pour empêcher la tenued’une première consultationorganisée par le patron. Les tra-

vailleurs tiennent bon. Il n’y aen effet aucune raison pourqu’ils se sacrifient, d’autant queGoodyear-Dunlop est lenuméro 1 mondial du pneuma-tique, et pas une petite entre-prise en difficulté !

Aline RETESSE

� Goodyear-Dunlop – Amiens LO

Non au projet de la direction

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Lutte Ouvrière - Directeur de publication : Michel Rodinson - Commission paritaire n° 1009 I 85576

Dans le monde� Turquie

L’armée sur le pied de guerre

L’armée turque est sur pied de guerre. Plusieurs dizainesde milliers de soldats – on parle de cent mille – sontconcentrés le long de la frontière irakienne et le chef del’état-major se dit « décidé » à pénétrer sur plusieursdizaines de kilomètres à l’intérieur de l’Irak, là où lapopulation est en majorité kurde. L’objectif serait d’enchasser les combattants du PKK, l’organisation de guérillafondée par des Kurdes de Turquie, qui seraient environ3 500, regroupés dans des camps en territoire irakien.

Depuis le mois de janvier,plus d’une cinquantaine de sol-dats turcs sont morts à la suitedes attaques attribuées au PKK,qui agit également en territoireturc. Dimanche 21 octobre,12 soldats turcs y ont été tués,

dans un village situé près de lafrontière. L’armée turque arépondu en faisant 32 morts,utilisant des avions de chasse,des hélicoptères de guerre et del’artillerie pour bombarder lespositions du PKK.

En fait , depuis le moisd’avril , le chef de l’arméeturque, le général Büyükanit,mène une campagne intensivepour obliger le gouvernement àdonner sa caution à une opéra-tion militaire en Irak. Réticent,le gouvernement dirigé parErdogan, chef du parti AKPsorti vainqueur des élections del’été, a fini par céder, deman-dant officiellement au Parle-ment d’autoriser l’armée àmener des opérations de grandeenvergure.

L’armée va-t-elle mainte-

nant mettre ses menaces à exé-cution ? Ce n’est cependant passûr. De toutes parts, et en parti-culier du côté des États-Unis, laTurquie a été mise en gardecontre une telle opération. Etlundi 22 octobre le ministre dela Défense turc a reconnu qu’ilexiste des « projets d’incursionde l’autre côté de la frontière »mais « pas prévus de façonurgente ». En fait, comme lerappelait une partie de la presseturque, il y a déjà eu ces derniè-res années pas moins de 24 opé-rations militaires à l’intérieurdu territoire irakien, dont cer-taines de grande envergure,mobilisant parfois jusqu’à35 000 soldats, sans venir pourautant à bout de la présence duPKK en Irak du Nord.

L’état-major lui-même saitdonc bien qu’il ne réussira pas àécraser le PKK. Sa campagnevise plutôt à faire pression surles États-Unis et sur les autoritéskurdes irakiennes pour qu’ils sechargent eux-mêmes de limiterson action, voire de lui interdireles actions armées en directionde la Turquie. Le présidentkurde irakien Jalal Talabani aainsi proposé au PKK de setransformer simplement en« mouvement politique ».

En revanche, toute cetteaffaire est l’occasion de meneren Turquie une campagnenationaliste et guerrière, danslaquelle les chefs de l’armée etl’extrême droite rivalisent à quifera le plus appel à la solidaritéavec les soldats victimes de la« terreur » du PKK. Une col-lecte a été lancée en faveur dessoldats et des manifestations de

soutien ont lieu, en fait plusbruyantes que massives. Toutcela est l’occasion pour l’arméede prendre sa revanche sur legouvernement et de faire com-prendre à Erdogan et à ceux quile soutiennent qu’en Turquie,encore aujourd’hui, c’est ellequi peut imposer ses choix.

En effet une partie de lapresse turque el le-mêmeexplique qu’il n’y a pas de« solution militaire » à la ques-tion kurde. Le Tüsiad, organisa-tion patronale équivalant auMedef en France, a lui aussiconstaté à plusieurs reprises quela guerre au Kurdistan avaitcoûté plus de 100 milliards dedollars, sans apporter de solu-tion. Mais ni le patronat turc nile gouvernement de l’AKPn’ont vraiment les moyensd’imposer qu’une solution poli-tique soit donnée au problèmekurde, en reconnaissant effecti-vement à cette population ledroit de parler et d’écrire salangue, voire le droit à une cer-taine autonomie.

L’armée turque se lancera-t-elle ou non dans une opérationde grande envergure en Irak,aux dépens de la populationkurde et en augmentant encoreun peu le chaos qui y règne ? Cen’est pas encore sûr . Enrevanche il est certain que lapopulation de Turquie elle-même paiera encore une fois,d’une façon ou d’une autre,pour cette pression accrue del’armée sur toute la vie politiqueet sociale.

Julien SILVA

� Pakistan

Benazir Bhutto fera-t-elle illusion ?Le 18 octobre, à Karachi, l’attentat contre Benazir Bhuttoa tué 136 des centaines de milliers de personnes quiétaient venues l’accueillir. La responsabilité de l’attentatincombe certainement à une bande armée, maislaquelle ?

De tels groupes sont en effettrès nombreux au Pakistan. Il ya les groupes tribaux, les isla-mistes, les trafiquants dedrogue, les gangsters des vil-les... les uns et les autres pou-vant d’ailleurs se confondre. Ily a surtout l’armée pakista-naise, au pouvoir de fait depuistoujours, consommant 40 %du budget de l’État et qui estelle-même l’entrepreneur leplus riche et le plus grand pro-priétaire foncier. Principalfoyer de corruption du pays,l ’armée organise le trafic

d’armes, et le trafic d’héroïnene peut pas se faire sans sonaccord. Les militaires et lespetites bandes qui les concur-rencent dans certaines zonesvivent ainsi aux dépens des160 millions de Pakistanaisplongés dans la misère etl’ignorance et soumis à la vio-lence quotidienne.

Cet état de fait n’a pu per-durer que grâce à l’impéria-lisme américain, qui a financéet équipé l’armée pakistanaise,meilleur soutien des États-Unis dans la région.

Le pourrissement de l’État aété accéléré par l’interventionaméricaine dans l’Afghanistanvoisin et le soutien que lesÉtats-unis ont exigé de l’Étatpakistanais. Moucharraf, legénéral-président pakistanais,ne peut rien refuser à son pro-tecteur et bailleur de fonds.Mais, à se mettre directementet visiblement au service del’impérialisme américain, il aperdu le peu de légitimité qu’ilpouvait avoir.

Il semble que les États-Uniseux-mêmes aient jugé que lepouvoir de Moucharraf étaitdésormais trop fragile et luiaient demandé de faire appel àBenazir Bhutto, ancien Pre-

mier ministre, écartée en 1999et qui conserve encore un cer-tain crédit.

En plus d’immenses pro-priétés, Benazir Bhutto avaithérité du Parti du PeuplePakistanais fondé par son père,Ali Bhutto. Ce dernier, Pre-mier ministre depuis1973, futdestitué et pendu par les mili-taires en 1979. Sa fille bénéficiaensui te de son prest igelorsqu’elle exerça le pouvoir de1988 à 1990, puis de 1993 à1999. Cependant ses passagesau pouvoir, outre l’enrichisse-ment éhonté de sa famille par lacorruption, amena surtout ladésillusion de ses partisans.C’est pourtant sur elle que les

États-Unis comptent pour ten-ter de « stabiliser » la situation,en donnant au visage militairede l’allié pakistanais un aspectplus démocratique.

Il n’est pas encore dit quecette opération politique abou-tisse, comme le montre l’atten-tat du 18 octobre. Mais si c’estle cas, cela ne pourra guèreabuser que l’opinion publiqueoccidentale, et encore pas pourtrès longtemps. Quant à lapopulation pakistanaise, ellecontinuera à subir la loi desgangsters, des usiniers, despropriétaires fonciers, desmilitaires et, au-dessus d’eux,de l’impérialisme américain.

Paul GALOIS

AFP