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Hegel - Logique (tome 1)

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    of

    Toronto

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    ^VABlBUo^

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    LOGIQUE

    DE

    HEGEL

    TOME

    1

    M

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    6/555

    OUVRAGES DU

    MEME AUTEUR

    Problme

    de

    la

    certitude,

    1 vol. in-8.

    Paris,

    Germer Baillire

    3

    Platonis, ristotelis

    et

    Hegelii

    de medio

    termino

    doctrina.

    1

    vol.

    in-8.

    Paris,

    Germer

    Baillire

    1

    50

    Introduction

    la

    Philosophie

    de Hegel,

    deuxime

    dition, 1 vol.

    in-8.

    Paris, Germer

    Baillire 6

    Essais

    de philosophie

    hglienne,

    4 vol.

    in-18. Paris, G.

    Baillire. 2 50

    Mlanges philosophiques,

    1

    vol. in-8.

    Paris,

    Germer

    Baillire

    5

    Philosophie

    de la

    Nature de

    Hegel,

    traduite pour la

    premire

    fois,

    et

    accompagne

    d'une

    Introduction

    et

    d'un

    Commentaire

    perptuel,

    3 vol. in-8. Paris, Germer

    Baillire

    2

    Philosophie

    de

    l'Esprit de

    Hegel, traduite

    pour

    la premire

    fois, et

    accompagne de deux Introductions

    et d'un

    Commentaire

    perptuel,

    2 vol.

    in-8. Paris, Germer

    Baillire

    18

    UHglianisme et la Philosophie,

    1 vol. in-8.

    Paris,

    Germer

    Bail-

    lire;

    Naples,

    Detken

    3

    50

    Inquiry

    into Spculative and Exprimental

    Science, 1 vol. in-8.

    Londres,

    Trbner

    3

    50

    History

    of

    Religion

    and

    of

    the Christian

    Church,

    by Bretschneider,

    translated into

    English.

    Londres,

    Trbner

    6

    La

    Pena di

    morte.

    Naples,

    De

    Angelis

    2

    Amore e

    Filosofia.

    Milano, Daelli

    2

    Lezioni

    sulla

    Filosofia

    dlia Storia, raccolte

    c

    publicate

    da

    RafTaele

    Mariano.

    Florence,

    Lemonnier

    U

    Due Frammenti. Naples,

    Detken

    1

    Prolusioni

    alla Storia

    dlia

    Filosofia

    (epoca

    Socratica)

    ed

    alla

    Filosofia

    dlia

    Storia. Naples,

    Detken

    2

    //

    Cavour,

    e

    libra

    Chiesa in libero

    Stato.

    Naples,

    Detken

    3

    Il

    Problema

    delV Assolulo

    (parte prima),

    1

    vol. in-8.

    Naples,

    Detken.

    3

    Tout

    rcemment

    publi.

    Strauss,

    l'ancienne et la nouvelle

    foi,

    1 vol.

    in-8.

    Paris,

    Germer

    Baillire;

    Naples,

    Detken

    6

    Sous

    presse.

    Philosophie de

    la

    Religion de

    Hegel,

    traduite

    pour la

    premire

    fois,

    et

    ac-

    compagne

    d'une

    Introduction

    et

    d'un

    Commentaire

    perptuel.

    Paris,

    Germer

    Baillire.

    Introduction to

    Spculative

    Logic

    and

    Philosophy.

    Saint-Louis,

    Missouri,

    U.-S.,

    E. P.

    Gray,

    Saint-Louis

    Book

    and News

    C.

    Cavour,

    et

    la

    libre

    glise

    dans

    le

    libre

    tat

    (traduit

    de

    l'italien).

    Naples,

    Detken.

    PARI*.

    IMPRIMERIE

    K

    F,.

    MARTINET,

    RUE

    MIGNON.

    2

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    7/555

    LOGIQUE

    DE

    HEGEL

    \

    TRADUITE

    POUR

    LA

    PREMIRE FOIS

    ET

    ACCOMPAGNE

    D'UNE

    INTRODUCTION

    ET

    D'UN

    COMMENTAIRE

    PERPTUEL

    A.

    VERA

    Professeur

    de

    philosophie l'Universil

    de Naples,

    Ancien

    professeur de

    philosophie

    l'Universit

    de

    France,

    Docteur

    es

    lettres

    de

    la Facult

    de

    Paris,

    EVXIKME

    EDIflOA

    Reiue

    et corrige

    TOME

    PREMIER

    S9%

    PARIS

    LIBRAIRIE

    GERMER

    BAILLIRE

    17,

    HUE

    DE

    L'COLE-DE-MDECINE.

    1874

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    8/555

    B

    Mit

    F7l/

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    9/555

    AVANT

    -PROPOS

    DE LA

    DEUXIEME EDITION

    Lorsque

    je

    publiai,

    en

    1859,

    le

    livre

    dont

    je

    lais

    pa-

    ratre

    aujourd'hui

    la

    deuxime

    dition,

    j'avais

    hte

    de

    commencer m'acquitter

    de

    l'engagement

    que

    j'avais

    pris dans

    mon Introduction

    la

    Philosophie

    de

    Hegel

    de

    faire connatre cette

    philosophie dans sa

    source et

    sous

    sa

    forme

    originale.

    C'est ce

    qui m'engagea

    d'abord

    h prendre

    pour

    texte

    de

    la

    Logique

    ce

    que

    j'ai

    appel

    la

    Petite

    En-

    cyclopdie

    de Hegel, publie

    par Rosenkranz,

    et

    qui

    dif-

    fre

    de

    la

    Logique

    de

    la

    Grande

    Encyclopdie,

    publie

    par

    Henning,

    en ce

    qu'elle

    ne

    contient pas,

    comme

    cette

    dernire,

    les

    Zasi'Uz,

    ces

    appendices

    qui

    dveloppent

    l'ide

    fondamentale expose

    sommairement

    dans

    les para-

    VUA.

    Logique de Hegel. I.

    />

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    10/555

    VI

    AVANT-PROPOS.

    graphes.

    Il

    y

    avait

    l,

    il faut

    le

    dire,

    une

    lacune.

    Et cette

    lacune

    je

    la

    fais

    disparatre

    dans

    la

    prsente

    dition,

    o

    j'ajoute

    textuellement ces

    appendices. Je

    dois,

    en

    outre,

    avouer que des

    inexactitudes s'taient

    glisses dans l'in-

    terprtation du

    texte,

    qu'il

    y

    avait

    des

    passages

    o

    la

    pense

    du texte

    n'tait

    pas

    fidlement

    rendue

    ,

    et

    d'autres

    o

    j'avais

    cru

    pouvoir

    m'en

    carter

    pour

    m'ac-

    commoder

    aux

    exigences

    de

    la

    langue,

    ou

    aux

    habi-

    tudes

    intellectuelles

    de mes

    lecteurs prsums.

    Toutes

    ces

    taches je

    me

    suis

    appliqu

    les

    faire

    disparatre dans

    la

    prsente

    dition, en

    soumettant

    mon

    travail

    une

    minu-

    tieuse et

    complte

    rvision

    ;

    de telle sorte

    que

    cette

    di-

    tion,

    soit

    par

    les

    additions

    nombreuses

    et

    importantes

    qu'elle

    contient,

    soit par la

    scrupuleuse fidlit

    avec

    laquelle le texte

    y

    est

    rendu,

    est

    une dition vraiment

    nouvelle.

    La

    seule

    partie

    de

    la

    premire dition

    laquelle

    j'ai cru

    ne devoir

    rien changer

    c'est

    mon

    Introduction.

    C'est

    qu'elle forme

    un tout

    auquel

    il

    m'a

    sembl

    que

    je

    ne pourrais

    toucher

    sans

    troubler

    l'harmonie

    des

    parties.

    J'ai donc

    pens

    que

    je

    ferai mieux

    de

    placer ici

    les

    con-

    sidrations

    que j'ai trouv

    convenable

    d'y

    ajouter.

    Il

    y

    a, comme on pourra

    le voir,

    deux

    points

    que

    je

    me

    suis surtout

    attach

    dmontrer

    dans

    cette

    Introduc-

    tion

    :

    le

    premier

    c'est

    qu'on

    ne

    saurait

    concevoir

    que

    deux

    Logiques,

    l'ancienne

    Logique, connue sous le nom de

    Logique d'Aristote,

    ou

    bien

    de

    Logique

    formelle et

    sub-

    jective,

    et

    la

    Logique

    hglienne;

    le second

    c'est que^

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    11/555

    AVANT-PKOPOS.

    VU

    considre

    en

    elle-mme

    (1),

    l'ancienne

    Logique

    est

    non-

    seulement

    insuffisante,

    mais

    fausse,

    et

    que

    par

    suite

    la

    Logique

    vritable,

    ou,

    pour

    mieux dire,

    la

    seule

    Logique

    vritable,

    est

    la

    Logique

    telle

    qu'elle

    a

    t conue

    et

    tra-

    ce

    dans ses

    traits

    fondamentaux

    et

    essentiels par Hegel.

    Ces

    points,

    je

    crois

    les

    avoir

    tablis

    de

    faon ne pas

    laisser

    de

    doute

    dans

    l'esprit

    de

    celui

    qui

    voudra

    y

    donner

    srieusement son attention

    .

    Mais

    il

    y

    a

    d'autres Logiques qui

    ont

    paru

    dans

    ces

    derniers

    temps, et

    parmi

    ces

    Logiques il

    en

    est une

    qu'on

    dirait imagine

    tout

    exprs par son auteur

    pour

    recueillir

    l'hritage hglien,

    et

    le

    recueillir

    en

    rejetant la Logique

    de

    Hegel dans

    l'ombre

    et en

    s'

    tablissant

    sur ses

    ruines.

    C'est

    des

    Recherches

    logiques

    (Logischen

    Untersuchungen)

    de Trendelenburg

    que

    je

    veux parler. Et

    c'est sur ce

    livre

    que

    je

    me

    bornerai

    ici

    prsenter

    quelques observations,

    les

    autres

    Logiques,

    telles

    que

    la

    Logique

    de

    M.

    Mill, par

    exemple, n'ayant

    pas,

    mon

    avis,

    une importance

    s-

    rieuse

    et

    vraiment

    scientifique

    (2).

    (1)

    Je

    dis considre en

    elle-mme,

    car on

    retrouve

    bien

    l'ancienne

    Logique

    dans

    la

    Logique

    hglienne,

    mais

    on

    l'y

    retrouve

    comme

    un

    moment

    subor-

    donn,

    comme une Logique transforme

    qui

    a

    reu

    une

    nouvelle et

    plus

    haute

    signification,

    une nouvelle

    et

    plus haute

    fonction dans la

    Logique

    hglienne

    elle-mme.

    (2)

    Qu'est-ce que la

    Logique de M.

    Mill?

    Est-elle

    une Logique formelle,

    ou

    bien

    une Logique

    objective,

    ou

    comme

    on voudra

    l'appeler? Ou bien

    encore,

    est-elle

    une Logique

    quelconque? Or,

    je

    dis que

    la

    seule

    rponse

    qu'on

    puisse

    faire

    ces

    questions,

    c'est

    qu'elle est

    un amas

    confus,

    indigeste et

    superficiel

    de

    toutes

    les

    sphres

    de la

    connaissance., ce

    qui veut

    dire

    qu'elle

    est

    le

    contraire

    de

    ce

    qu'elle prtend,

    et de ce

    qu'elle

    doit

    tre.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    12/555

    VIII

    AVANT-lMIOl'OS.

    Et qu'il nie

    soit

    d'abord permis

    de

    rappeler

    que

    je

    me

    suis

    dj

    occup

    de

    cette

    uvre

    de

    Trendelenburg

    dans

    la

    Prface

    de

    la deuxime

    dition

    de

    mon Introduction

    la

    Philosophie

    de Hegel,

    o je me

    flatte

    d'avoir dmontr

    qu'elle

    est,

    je

    ne

    dirai

    mme

    pas une

    imitation

    et

    une

    reproduction,

    mais

    une

    falsification

    de

    la

    Logique

    de

    Hegel.

    C'est

    cette

    dmonstration

    que

    je

    me

    propose de

    complter

    ici.

    On

    sait,

    ou du

    moins

    ceux

    qui

    ne sont pas trangers

    aux

    travaux

    de

    la philosophie

    allemande

    savent

    que

    Tren-

    delenburg,

    aprs

    avoir

    adopt la

    signification

    et

    la

    forme

    objectives et

    absolues

    de

    la Logique

    de

    Hegel,

    a

    cru

    pou-

    voir

    se

    permettre

    de

    remplacer la

    premire

    triade hg-

    lienne

    (premire, bien

    entendu,

    dans

    l'ordre

    de

    l'abstrac-

    tion),

    c'est--dire

    Y tre,

    le

    non-tre

    et

    le

    devenir,

    par

    une

    autre

    triade,

    l'tre, la

    pense

    et le

    mouvement.

    La

    premire

    question

    qui

    s'offre naturellement

    l'esprit

    en

    prsence

    de cette

    triade

    est

    celle-ci

    : qu'est

    devenu

    le

    non-tre dans

    cette

    dialectique,

    et

    comment la

    pense

    et

    le

    mouvement,

    et

    par suite tout le reste

    ont-ils

    pu

    se

    produire

    sans

    le non-tre? Car

    il

    est

    vident

    que

    pour

    aller

    en

    avant le

    non-tre

    est

    tout

    aussi

    ncessaire,

    plus

    ncessaire

    mme que

    l'tre.

    Mais

    que

    le

    lecteur se

    ras-

    sure,

    le

    non-tre

    n'est pas perdu,

    et

    il

    paratra

    en

    temps

    et

    lieu.

    Seulement

    il

    ne

    fera

    pas

    son entre par

    la

    grande

    porte,

    mais par

    une porte

    drobe

    et

    sous

    un

    faux

    dguisement.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    13/555

    AVANT-PROPOS,

    Aprs

    avoir

    expos dans

    la

    premire

    partie

    de

    ses

    Re-

    cherches

    logiques

    un

    certain

    nombre

    de

    catgories,

    Tren-

    delenburg

    semble

    s'tre

    aperu

    que

    toutes

    ces

    catgories

    n'auraient

    pu

    tre et

    se

    dvelopper

    sans

    l'intervention

    d'une

    certaine

    autre

    catgorie.

    Et

    quelle est

    cette

    cat-

    gorie?

    coutons

    l'auteur.

    Nous

    avons

    expos, dit-il

    (1),

    dans

    ce

    qui

    prcde

    les

    notions

    fondamentales

    (catgories)

    actives

    (2).

    Mais avec

    ces

    catgories

    travaillaient

    silen-

    cieusement

    {stillsckweigend)

    une

    autre

    catgorie

    qu'on

    doit

    maintenant

    considrer

    dans

    ce

    travail

    de

    coopration

    {in

    dieser

    Mitwirkung).

    Cette

    catgorie

    est

    la ngation

    (Verneimtng).

    Ainsi la

    ngation vient se

    placer ici

    la suite

    d'autres

    catgories.

    Et

    qu'a-t-elle

    fait

    jusqu'ici?

    Elle a

    travaill

    silencieusement.

    Sommes-nous

    dans

    la

    sphre

    de

    la Lo-

    gique ou

    dans

    les

    espaces

    imaginaires?

    11 faut

    dire,

    en

    effet,

    que ce

    travail silencieux

    de

    la

    catgorie

    n'est

    pas son

    travail, mais

    un

    travail qui n'existe que

    clans

    l'imagina-

    (1)

    2

    e

    par.

    Verneinung.

    Le

    chapitre

    qui

    a pour titre Ngation

    est

    plac

    entre

    les

    deux

    grandes classes

    des

    catgories que Trendelenburg

    dsigne

    par

    le

    nom

    de

    relles

    et

    modales.

    Quaut

    au

    passage

    de

    ces

    catgories

    la

    notion

    de

    la

    ngation,

    il

    s'en tire

    avec celle

    simple remarque

    :

    Nous

    avons

    marqu

    dans ce qui

    prcde les

    catgories fondamentales

    actives.

    Avec

    ces

    catgories

    travaillait silencieusement une notion que nous devons

    considrer

    dans

    ce

    travail

    de coopration. Cette

    notion est

    la

    ngation.

    En

    vrit,

    on ne

    saurait

    y

    mettre

    plus

    de

    sans-faon. Mais le sans-faon, on le sait,

    cache

    souvent

    les

    positions dsespres.

    (2)

    Elles

    sont

    logiquement

    actives

    en ce

    sens que,

    suivant

    l'auteur, elles

    sont

    un

    dveloppement

    du

    mouvement.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    14/555

    X

    AVANT-PKOPOS.

    tion

    de l'auteur.

    Car

    voici

    comment,

    suivant

    i'auteur, se

    ferait

    ce

    travail.

    Pendant,

    dit-il,

    que

    le

    mouvement

    en-

    gendrait

    des

    formations

    (Gebild)

    dtermines, et d'abord

    des figures

    (Figuren)

    et

    des

    nombres,

    apparaissait

    dans

    cette

    uvre

    (in

    dieser

    Tha) un

    moment

    ngatif.

    Il

    n'y

    a

    pas de

    figure

    sans

    point

    d'arrt

    (Hemmung)

    dans

    le

    mouvement

    gnrateur.

    Les

    units des

    nombres

    sont

    poses

    comme se

    distinguant

    les

    unes

    des

    autres. Chacune

    d'elles est

    l'uvre

    d'une

    activit

    qui

    les

    rassemble

    et

    les

    spare tout ensemble

    (1).

    Lorsque

    des produits dtermi-

    ns sortent

    (2)

    du

    mouvement

    universel,

    lorsque de cette

    action et de ses

    produits

    naissent

    les catgories,

    la dter-

    mination

    apparat

    comme

    une

    limitation,

    et

    la

    limitation

    comme

    une ngation.

    Chaque

    dtermination

    de

    soi

    im-

    plique

    la

    ngation

    de

    ce

    qui n'est pas soi. C'est

    ainsi

    que

    la

    ngation

    opre

    comme

    lment

    de

    la

    chose, non

    comme

    lment

    originaire

    (3),

    mais

    comme

    une

    consquence

    ;

    non

    comme but,

    mais

    comme

    moyen

    ;

    elle opre dans un

    terme

    positif, mais

    non

    comme

    un

    lment qui subsiste

    par lui-mme

    ().

    Voil

    ce

    que

    nous

    dit Trendelenburg.

    Or

    nous

    disons

    notre

    tour :

    autant

    de

    mots,

    autant

    de

    condamnations

    de

    sa thorie. Et,

    d'abord,

    y

    a-t-il rien

    de

    (1)

    Einer

    Zusammenfassenden

    und

    zugleich

    ausschliessenden

    Thtigkeit.

    (2)

    Sich

    ausscheiden

    :

    se

    dtachent.

    (3)

    Ursprngliches.

    (4)

    Ein

    Selbststilndiges

    fiir

    sich.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    15/555

    AVANT-PROPOS.

    XI

    plus

    trange

    que

    de

    venir

    nous

    dire

    :

    Voici

    une

    catgorie

    sans

    laquelle

    rien

    ne

    serait

    sorti

    du

    mouvement,

    mais

    qui, pendant

    qu'avec

    son

    concours

    le mouvement

    en

    se

    dterminant engendre d'autres

    catgories,

    telles

    que le

    nombre et ses

    diffrentes

    units,

    se tenait,

    de

    son

    ct,

    l'cart,

    et

    ne

    travaillait

    qu'en

    secret

    ? Y a-t-il,

    le de-

    mandons-nous encore, rien

    de

    plus trange?

    Car

    il

    ne

    faut

    pas

    un grand effort

    pour voir

    que dans

    le

    dveloppement

    des

    catgories, cette

    catgorie

    intervient

    tout

    aussi

    direc-

    tement, elle travaille d'une

    faon tout aussi

    ostensible

    et

    aussi active,

    et

    parle

    tout

    aussi

    haut,

    plus

    haut mme,

    que

    le mouvement

    lui-mme,

    puisque sans

    elle on

    n'au-

    rait qu'un mouvement

    indtermin, si

    toutefois

    on a

    le

    mouvement.

    Mais

    pourquoi Trendelenburg

    introduit-il

    ici,

    d'une

    faon

    aussi

    arbitraire et

    singulire

    cette cat-

    gorie,

    et pourquoi, tout en

    faisant

    croire

    que

    c'est

    ici

    qu'elle

    parat,

    est-il cependant

    oblig de la

    faire inter-

    venir avant,

    bien

    qu'il la

    fasse intervenir

    comme

    un

    ac-

    teur muet?

    C'est

    que

    cette

    catgorie est

    ni plus

    ni moins

    le

    non-tre.

    Et

    voyez

    l'habilet

    de

    notre auteur.

    Trendel-

    enburg,

    on

    le

    sait,

    ne

    veut

    pas

    du

    non-tre;

    il

    ne

    veut

    ni

    le

    nom

    ni

    la chose.

    Or c'est

    prcisment

    pour

    cette

    raison

    qu'il

    appelle

    ngation

    ce

    qui

    en

    ralit

    n'est

    rien

    autre chose

    que

    le

    non-tre.

    Et pourquoi ne veut-il pas

    du

    non-tre?

    C'est

    que,

    s'il

    avait admis le non-tre, il

    aurait

    fallu

    le

    placer

    ct

    de

    l'tre, et

    par

    l

    tout

    son

    chafau-

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    16/555

    XII

    AVANT-PROPOS.

    dage

    logique se serait croul.

    Mais comme

    la vrit

    est

    plus

    forte

    que

    l'habilet,

    il

    a

    bien

    fallu

    avoir

    recours

    l'lment

    ngatif,

    lment qui

    dans

    sa

    plus

    haute

    abstrac-

    tion

    est

    prcisment

    le

    non-tre. Trendelenburg fait

    donc

    intervenir

    le

    non-tre. Mais,

    au

    lieu

    de

    l'appeler non-

    tre,

    il

    l'appelle

    ngation

    ;

    au

    lieu de le placer l

    o

    il

    faut

    le

    placer,

    c'est--dire

    comme

    le

    contraire

    de

    l'tre,

    il

    le

    fait

    venir,

    on

    ne sait

    pourquoi,

    la

    suite d'une

    srie

    de

    catgories,

    qui

    le

    prsupposent

    et

    qui

    ne

    sauraient

    tre

    sans

    son

    concours.

    Que

    signifie

    aprs

    cela

    ce

    travail si-

    lencieux

    et

    passif

    queTrendelenburg

    attribue

    la

    ngation

    et qui

    commencerait

    la suite du mouvement, par la

    raison, dit-il,

    que

    le

    mouvement

    a

    besoin

    de

    points d'ar-

    rt,

    c'est--dire

    de

    se

    dterminer?

    Car,

    d'abord,

    il

    n'est

    point exact

    que la

    ngation

    intervienne,

    silencieusement

    ou haute

    voix,

    la

    suite

    du

    mouvement.

    Le

    mouve-

    ment

    n'est

    lui-mme

    le

    mouvement

    que

    parce

    qu'il

    n'est

    ni

    l'tre

    ni

    la

    pense

    (les

    deux

    autres

    termes

    de

    la

    triade

    Trendelenburgienne),

    ce

    qui

    veut

    dire

    qu'il

    prsuppose

    le

    non-tre. Et non-seulement le

    mouvement, mais la

    pense

    elle-mme

    prsuppose

    le

    non-tre,

    puisqu'elle

    n'est

    la

    pense qu'en

    n'tant pas ce

    qu'est l'tre. Et

    maintenant

    comment

    peut-on

    dire

    que

    ce non-tre,

    sans

    lequel

    le

    mouvement et

    la

    pense ne

    seraient pas,

    et

    l'aide

    duquel

    ils

    se

    dterminent,

    est

    un lment

    passif,

    et

    qu'il

    n'est

    pas

    un

    lment

    originaire?

    Sans

    doute,

    le

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    17/555

    AVANT-PROPOS.

    XIII

    non-tre est

    un

    lment

    passif

    et

    driv

    relativement

    des

    dterminations

    plus

    hautes,

    comme

    la

    matire,

    en

    tant que

    matire,

    est

    passive

    relativement

    aux sphres

    plus

    concrtes

    de

    la nature.

    C'est

    l

    un

    point

    lmentaire.

    Mais

    le non-tre

    ou,

    si l'on

    veut,

    la

    ngation

    n'est

    point

    passive

    et

    drive

    dans

    le

    sens

    o

    il

    faudrait

    l'entendre

    suivant

    Trendelenburg,

    c'est--dire

    dans

    le

    sens

    que

    le

    non-tre

    serait

    moins actif,

    moins essentiel

    et

    moins

    originaire

    que

    l'tre.

    L'tre

    et

    le non-tre sont

    tout

    aussi

    actifs et tout aussi

    passifs l'un

    que l'autre. Ils sont

    tout

    aussi

    passifs,

    en

    ce

    que

    l'tre abstrait

    et

    indtermin,

    ou l'tre en

    tant

    que

    tre,

    ne vaut

    pas

    plus

    que

    le

    non-

    tre

    galement

    abstrait

    et

    indtermin,

    ou le

    non-tre

    en

    tant que non-tre.

    Ils

    sont

    tout

    aussi

    actifs,

    en ce

    qu'ils

    entrent tous

    les

    deux et

    au

    mme titre dans

    la

    constitu-

    tion

    et le dveloppement des

    termes plus

    concrets,

    tels

    que le mouvement

    ou

    la

    pense.

    Le

    mouvement

    n'est

    pas

    le

    mouvement seulement par

    l'tre,

    et

    parce

    qu'il

    con-

    tient l'tre,

    mais

    aussi

    par le non-tre, et

    parce que

    le

    non-tre nie

    l'tre,

    et en niant l'tre

    rend possible

    le

    mouvement.

    En

    d'autres termes, le

    mouvement

    est, et est

    le

    mouvement tout

    aussi

    bien par

    le

    non-tre

    que

    par

    l'tre,

    et

    parce

    qu'il les contient

    tous les

    deux,

    et

    qu'en

    les contenant

    tous les

    deux

    il fait

    leur

    unit.

    Ainsi

    cette

    passivit

    et ce

    travail

    silencieux

    et

    subor-

    donn

    de

    la

    ngation

    n'ont

    pas

    de

    sens.

    Ils

    n'ont

    pas

    plus

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    18/555

    XIV

    AVANT-PROPOS.

    de sens, ils

    ne sont

    pas

    plus fonds en raison que la n-

    gation

    elle-mme,

    telle

    que

    la

    conoit

    Trendelenburg,

    et

    cette

    triade

    qu'il

    substitue

    la

    triade

    hglienne,

    et

    sur

    laquelle

    il

    se flatte d'lever

    l'chafaudage de

    sa Logique.

    Napies,

    31

    octobre 1872.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    19/555

    AVERTISSEMENT

    (DE

    LA

    PREMIERE DITION)

    En

    publiant la

    logique

    de

    Hegel,

    je

    viens aujourd'hui

    remplir l'engagement

    que

    j'ai

    pris,

    il

    y

    a quatre ans,

    vis-

    -vis des

    amis

    de la

    philosophie

    en

    gnral,

    et

    de la

    philo-

    sophie

    hglienne

    en particulier. La

    logique,

    on le sait, ne

    forme

    qu'une partie

    du

    systme

    de

    Hegel,

    mais

    elle en

    forme

    la

    partie

    la

    plus

    importante en

    ce

    sens

    qu'elle fournit

    la

    clef

    de

    tout le

    systme.

    La

    Philosophie

    de la

    Nature

    et

    la

    Philosophie

    de l'Esprit

    supposent

    la logique, et il

    est

    indispensable,

    avant

    de

    les

    aborder,

    que

    la

    pense

    se

    fami-

    liarise

    avec

    l'ide

    et

    la dmonstration

    logiques, et

    qu'elle

    en

    saisisse

    le

    sens et

    la porte.

    Il

    tait

    donc

    naturel

    de

    commencer

    parla

    logique.

    Mais

    les

    deux

    autres

    parties

    du

    systme

    suivront,

    je

    l'espre,

    de

    prs

    la

    logique.

    Ayant

    expos

    et

    discut

    dans

    mon

    Introduction

    la

    Philosophie

    de

    Hegel

    les

    principes fondamentaux de

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    20/555

    XVI

    AVERTISSEMENT.

    cette

    philosophie,

    et

    y

    ayant

    prsent l'ensemble

    du

    sys-

    tme,

    j'aurais

    pu

    me

    borner

    donner

    la

    simple

    tra-

    duction

    de

    chacune

    des

    parties qui

    le

    composent,

    en

    l'accompagnant

    d'un commentaire.

    Mais

    en

    examinant

    la

    chose

    de

    plus

    prs,

    j'ai

    vu qu'une

    introduction

    spciale

    et

    se

    rapportant

    directement

    chacune de

    ces

    parties

    tait

    indispensable

    ,

    ou

    que du

    moins

    elle

    rendrait

    mon

    travail

    plus complet.

    J'ai

    donc

    fait

    pr-

    cder

    la

    logique,

    et

    l'introduction

    gnrale

    que

    Hegel

    a

    mise

    en

    tte

    de

    son

    Encyclopdie d'une introduction,

    dans

    laquelle,

    d'une part,

    je

    me suis

    appliqu faire res-

    sortir

    les

    lacunes,

    l'impuissance

    et

    les

    erreurs de

    l'ancienne

    logique,

    et,

    d'autre

    part, j'ai

    examin

    et discut certains

    points

    essentiels,

    certains

    principes

    fondamentaux

    qui

    doivent

    faciliter

    au

    lecteur

    l'intelligence

    del

    logique

    hg-

    lienne.

    Quant

    cette logique,

    je

    la donne telle que je

    l'ai

    promise

    dans

    mon Introduction la

    philosophie de

    Hegel,

    c'est--dire

    je

    donne

    la

    traduction

    littrale

    de

    la

    logique,

    telle

    qu'elle

    se

    trouve

    dans

    ce

    que

    j'ai

    appel

    h

    petite

    En-

    cyclopdie.

    Quelques explications

    sont

    ncessaires

    pour

    faire

    comprendre

    au lecteur h

    nature

    du

    travail

    qu'il

    a

    devant

    lui.

    Hegel

    a

    publi

    trois

    logiques.

    Il

    a

    d'abord

    publi

    sa

    logique

    en deux volumes,

    dont les

    deux

    premires

    parties, savoir

    :

    la

    Science de

    l'Etre et

    la

    Science de

    l'Es-

    sence,

    parurent

    en

    1812,

    et

    la

    troisime

    partie,

    la Science

    de

    la

    Notion,

    parut

    en

    1816.

    C'est ce

    que

    j'ai appel

    la

    Grande

    Logique,

    parce

    qu'elle

    contient

    les

    thories

    et

    les

    dductions

    hgliennes avec

    tous

    leurs

    dveloppements

    et

    leurs dtails,

    et

    dans

    toute

    leur

    rigueur.

    Un

    an

    plus

    tard,

    c'est--dire

    en

    1817,

    Hegel

    publia

    une

    premire

    esquisse

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    21/555

    AVERTISSEMENT.

    XVI

    1

    de

    son

    systme,

    ou

    la

    premire

    dition

    de

    son

    Encyclopdie.

    C'est

    ce

    que

    j'ai

    appel

    la

    petite

    Encyclopdie.

    Dans

    cette

    esquisse,

    la

    logique

    ainsi

    que

    les

    autres parties du

    systme

    se

    trouvent

    rduites une

    suite de

    thses, ou propositions

    sommaires, dans

    lesquelles Hegel

    a

    rsum

    et

    condens

    ses

    thories et

    ses

    dductions.

    C'tait,

    du

    reste, une espce de

    manuel

    qu'il

    destinait plutt ses disciples

    qu'au

    public,

    et

    qu'il

    dveloppait

    et

    compltait soit par

    les

    explications

    donnes

    du

    haut

    de

    sa

    chaire,

    soit

    par

    la

    publication

    d'au-

    tres

    grands ouvrages,

    tels

    que

    la

    Philosophie

    du

    Droit,

    la

    Philosophie

    de

    la Religion,

    etc.

    Mais

    il

    comprit bientt

    qu'un

    tel

    livre

    tait lettre close, non-seulement

    pour

    les

    non

    initis,

    mais

    pour

    les

    initis

    et

    ses

    disciples

    eux-mmes,

    et

    que

    sa

    pense,

    dj

    fort

    difficile

    saisir,

    lorsqu'elle

    tait

    prsente

    avec tous ses dveloppements, devenait

    inacces-

    sible

    lorsqu'elle tait

    condense

    dans

    quelques

    propositions,

    et

    enveloppe dans

    des formes

    qui

    sortent

    des habitudes

    ordinaires

    du langage.

    C'est

    alors

    qu'il publia

    (18*27)

    une

    seconde dition

    de

    son Encyclopdie

    (1)

    dans

    laquelle

    il

    ajouta une sorte de

    commentaire

    sous

    forme

    de

    corol-

    laires [Zusatze)

    qui

    suivent la proposition

    principale,

    l'expliquent

    et

    la

    dveloppent,

    mais

    qui

    ne

    reproduisent

    pas

    la dmonstration

    directe et

    rigoureuse,

    et

    ne

    con-

    (1)

    Je

    dis

    une

    seconde

    dition

    de

    l'Encyclopdie,

    mais il

    serait

    plus

    exact

    de

    dire une

    seconde

    dition

    de

    la

    Logique de

    l'Encyclopdie.

    Car

    les

    deux

    autres parties

    de

    la

    grande

    Encyclopdie n'ont paru

    qu'aprs

    la mort

    de

    Hegel

    dans

    l'dition complte

    de

    ses

    uvres

    qui

    a

    t

    publie par

    le soin

    de

    ses

    disciples et

    de

    ses

    amis.

    La

    Philosophie de

    la

    Nature

    a

    t

    dite

    par

    Michelet,,

    et

    la

    Philosophie de

    l'Esprit

    par

    Boumann.

    Et

    ces

    deux ouvrages

    ont t

    rdigs

    sur les

    manuscrits de

    Hegel, et

    sur

    les

    cahiers

    de

    ceux d'entre

    sei

    disciples

    qui

    avaient

    suivi

    rgulirement

    ses

    cours.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    22/555

    XVlll

    AVERTISSEMENT.

    tiennent

    que

    des considrations

    exotriques,

    on des

    appli-

    cations

    et

    des

    exemples.

    C'est

    cette

    Encyclopdie

    que

    j'ai

    appele la

    Grande Encyclopdie. Plac,

    dans

    le choix

    que

    j'avais

    faire,

    en

    prsence de

    ces trois logiques,

    c'est

    pour

    la

    logique

    de

    la petite Encyclopdie

    que je

    me suis

    dcid.

    Voici

    les

    raisons

    qui m'y ont

    engag.

    Et d'abord une

    tra-

    duction

    littrale

    de

    la logique

    de

    la

    Grande Encyclopdie

    et

    t

    insuffisante,

    et

    cela

    par

    la raison

    que

    je

    viens d'in-

    diquer

    ;

    parla

    raison, veux-je

    dire,

    que

    le

    commentaire

    qui

    l'accompagne ne

    contient

    que des

    considrations

    ext-

    rieures

    et

    qui ne

    font

    pas

    suffisamment entrer

    dans

    la

    vraie

    signification,

    et dans

    l'enchanement de

    la

    dduction hg-

    lienne.

    D'un

    autre

    ct, je

    ne

    pouvais pas

    non

    plus

    songer

    donner

    une

    traduclion

    de

    la Grande

    Logique.

    Car,

    d'abord, la

    Grande

    Logique ne

    rentrait

    pas dans

    le

    cadre

    de

    ma

    publication, puisque

    c'est

    Y

    Encyclopdie

    que

    je

    me

    suis

    propos

    de

    publier.

    Ensuite,

    une

    traduction

    de

    la

    Grande

    Logique

    offre

    de

    nombreuses

    difficults, et

    des

    difficults

    qui,

    si

    elles ne sont pas

    insurmontables, sont

    cependant

    telles

    que pour

    moi

    j'ai

    cru devoir en quelque

    sorte

    les

    tourner

    plutt

    quede

    les aborder

    de

    front.

    J'estime

    que la

    Grande

    Logique,

    qui

    forme

    deux

    volumes

    compac-

    tes

    dans

    l'dition

    de Berlin, ne

    peut

    tre rendue

    littrale-

    ment

    intelligible

    que

    par

    des

    notes

    perptuelles,

    qui

    la

    porteraient

    dj

    trois

    volumes

    au

    moins.

    Mais

    ce

    commen-

    taire ne

    contiendrait

    que

    l'annotation

    purement

    littrale

    de

    l'ouvrage

    ;

    car

    il

    y

    a des

    parties pour

    lesquelles

    il serait

    insuffisant.

    Par exemple,

    il

    y

    a des

    recherches

    critiques

    sur

    le

    calcul

    infinitsimal,

    sur

    les

    thories

    chimiques

    de

    Berthollet

    et

    de

    Berzlius,

    sur le

    mouvement des

    corps

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    23/555

    AVERTISSEMENT.

    XIX

    clestes,

    etc.

    ;

    recherches

    o

    Hegel

    l'ait

    l'application

    de

    ses

    thories

    logiques,

    et

    qui

    exigent

    un

    travail

    tout

    fait

    sp-

    cial.

    Ce sont

    l

    les

    raisons

    qui

    ont du

    me

    faire

    carter la

    Grande

    Logique

    . Et cependant

    la

    Grande

    Logique

    est

    la

    vraie

    logique,

    et

    ce

    n'est que

    dans

    elle qu'on

    peut saisir

    la

    pense

    hglienne. Pour

    concilier

    ces

    difficults,

    voici

    le

    plan

    que j'ai adopt.

    J'ai,

    ainsi que

    je

    viens

    de

    le

    dire,

    traduit

    la

    logique

    de

    la Petite Encyclopdie

    ,

    en

    y

    ajoutant

    un

    commentaire.

    Dans

    ce

    commentaire, j'ai

    runi,

    autant

    qu'il

    m'a

    t

    possible

    de

    le

    faire,

    outre

    mes

    propres

    expli-

    cations,

    la

    Grande

    Logique,

    et

    la

    logique

    de

    la

    Grande

    Encyclopdie,

    soit

    en cilant

    textuellement

    des

    passages

    tirs

    de

    toutes

    les

    deux,

    soit

    en

    rsumant

    dans

    des

    notes

    plus

    ou moins

    tendues les dmonstrations

    de

    la

    Grande

    Logique,

    Par

    l,

    le

    lecteur

    se

    trouvera

    dans

    une

    certaine

    mesure

    en

    possession

    des trois

    logiques. Sans

    doute,

    il

    n'aura

    pas

    la

    Grande

    Logique

    avec ses

    dductions

    rigou-

    reuses,

    avec

    ses riches

    dveloppements et

    ses profondes

    applications,

    mais

    il

    en

    aura

    les

    grands

    traits

    et les

    dduc-

    tions

    essentielles

    ;

    et

    quant aux

    dtails,

    je

    crois qu'il

    y

    en

    a

    suffisamment

    pour

    celui qui

    voudra

    donner

    quelque

    atten-

    tion

    ce

    travail,

    et qui

    possde

    l'ducation

    philosophique

    ncessaire

    pour

    aborder

    srieusement

    et utilement

    de telles

    questions.

    Encore

    un

    mot sur

    la traduction

    . Hegel,

    on

    le

    sait,

    a

    son

    vocabulaire,

    ses

    formes et

    son

    langage

    .

    C'est naturel

    :

    toute

    pense

    originale

    et

    profonde

    se

    cre

    son expression.

    Ce

    n'est

    pas qu'il

    ne

    sache

    employer

    au

    besoin

    le

    langage

    ordinaire

    Quand

    il

    le

    faut,

    et

    l

    o

    le

    sujet

    le

    comporte,

    ou

    lorsqu'il

    veut

    donner sa pense

    une

    forme

    populaire

    ou

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    24/555

    XX

    AVEBTISSEMNT.

    moins

    strictement

    scientifique,

    il

    sait

    tre

    simple

    et

    naturel,

    pour

    me

    servir

    des

    expressions consacres,

    et

    s'lever

    jusqu'

    l'loquence.

    Mais la

    logique,

    la

    logique

    hglienne

    surtout, n'admet pas

    de

    ces

    tempraments

    ;

    je

    veux

    dire

    qu'elle

    n'admet

    que le

    langage

    abstrait

    et

    svre

    de

    la

    science.

    Le devoir

    d'un

    traducteur,

    surtout

    lorsqu'il

    s'agit

    d'une

    uvre

    scientifique,

    est

    de

    reproduire

    aussi

    fidlement

    qu'il

    le peut la pense

    de

    l'original,

    et de

    subordonner

    les

    exigences locales

    et

    finies

    du

    langage

    aux

    exigences

    uni-

    verselles et

    absolues

    de

    la

    pense. C'est l

    la

    rgle que

    j'ai

    suivie

    dans la

    traduction,

    ainsi

    que dans

    les

    notes et

    l'intro-

    duction,

    bien que moins

    strictement

    dans

    ces

    dernires.

    Aussi,

    tout

    en

    essayant

    de

    rester

    dans

    les

    formes

    ordinaires

    et convenues du langage, n'ai-jc

    pas

    hsit

    adopter

    l'ex-

    pression

    hglienne,

    ou

    en inventer

    une

    nouvelle,

    lors-

    que

    je

    n'en

    ai

    pas trouv dans la langue

    qui pt

    rendre

    la

    pense

    du texte, ou

    ma

    propre

    pense.

    Paris,

    29

    aut

    1859.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    25/555

    INTRODUCTION

    DU

    TRADUCTEUR

    CHAPITRE

    PREMIER:

    REMARQUES PRELIMINAIRES.

    Qu'il

    y

    ait

    une science

    appele logique, c'est

    ce

    qui

    est

    gnralement admis;

    et

    qu'une

    telle

    science

    soit

    des

    plus

    importantes

    non-seulement

    pour l'investigation

    spculative,

    mais pour

    la

    vie

    pratique elle-mme, c'est

    aussi

    un

    point

    sur lequel

    tous

    les

    hommes

    paraissent

    s'accorder.

    Car,

    bien

    que

    dans la

    vie

    pratique nous

    soyons

    le

    plus souvent

    guids

    par

    l'opinion,

    par

    l'intrt, par

    la

    passion

    et

    le

    caprice,

    il

    n'est cependant

    aucun

    de nous

    qui

    ne

    dsire

    fortifier

    et

    dvelopper ses

    facults

    logiques,

    la

    facult

    de

    rai-

    sonner,

    comme

    on

    l'appelle

    ordinairement,

    soit

    pour

    les

    appliquer

    l'objet

    particulier

    de

    notre

    activit,

    soit

    pour

    triompher

    des

    adversaires

    que

    chacun

    rencontre

    dans

    sa

    carrire.

    C'est

    l

    ce

    qui

    fait

    que

    la

    logique

    est

    avec

    les

    VRA.

    Logique

    de

    Hegel.

    I.

    1

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    26/555

    CHAPITRE

    mathmatiques

    la

    plus

    populaire des

    sciences

    abstraites.

    Car

    chacun

    sent,

    en

    quelque

    sorte,

    par

    instinct,

    que pour

    bien agir il faut

    bien penser,

    et

    que,

    par

    consquent,

    la

    science

    qui

    tudie

    les

    lois de

    la

    pense

    mrite

    l'attention

    de

    out

    tre raisonnable.

    Et comme

    il n'y

    a

    ni

    science,

    ni

    art,

    ni

    occupation

    pratique qui ne soit

    fonde

    sur

    la

    pense,

    et

    qui

    n'exige

    l'exercice

    normal

    des

    facults logiques, on

    en

    conclut

    naturellement que

    la

    logique est une science

    qui

    embrasse

    dans son

    domaine

    le champ entier de

    l'intelli-

    gence et de

    l'activit humaines.

    Mais

    si

    la logique,

    lorsqu'on

    la

    considre

    abstractive-

    ment,

    occupe

    un

    rang

    si

    lev dans

    l'opinion

    commune,

    elle

    est

    loin,

    il

    faut

    bien

    le

    dire, de

    rpondre

    l'attente

    gnrale

    et

    de

    tenir

    ce qu'elle promet, lorsqu'on la

    consi-

    dre

    dans sa

    forme

    actuelle,

    et

    telle qu'elle

    est

    expose

    dans

    les

    livres

    ou enseigne

    dans

    les

    coles.

    Et c'est

    l

    ce

    qui

    explique pourquoi,

    tandis

    que les

    mathmatiques

    ont

    vu

    augmenter

    le

    nombre

    de

    leurs sectateurs,

    et

    s'agrandir

    le

    champ de

    leurs

    recherches

    et

    de leurs

    applications,

    la

    logique s'est vue

    de plus en

    plus nglige

    et

    dlaisse.

    L'on

    peut

    mme

    dire

    que,

    si

    elle

    est

    toujours

    enseigne

    dans

    les

    coles,

    il

    faut

    plutt

    l'attribuer

    aux traditions

    de

    l'enseignement

    scolaire

    qu'

    un dsir srieux

    de

    l'ap-

    prendre

    ;

    et

    cela malgr

    son importance

    relle

    et

    avoue

    non-seulement

    par

    rapport

    la

    connaissance en gnral,

    mais

    par

    rapport

    aux

    mathmatiques

    elles-mmes,

    puisque

    la

    connaissance

    mathmatique

    suppose

    l'existence et

    l'ap-

    plication

    des

    lois

    logiques.

    C'est

    que

    cette science qui

    a

    pour

    objet de

    rgler

    et

    de

    fortifier

    les

    facults

    naturelles de

    l'esprit,

    telle

    qu'elle

    est

    maintenant

    constitue;

    semble

    plutt

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    27/555

    REMARQUES PRLIMINA1KES.

    3

    faite

    pour les garer et

    les

    vicier;

    car,

    ses

    thories

    ne

    nous

    offrent

    qu'un

    assemblage

    de

    formules

    vides,

    de

    rgles

    arbitraires

    et de

    mthodes

    artificielles

    qui

    ne sont

    d'accord

    ni

    avec

    elles-mmes, ni

    avec

    les choses auxquelles on

    les

    applique.

    Et

    ce

    n'est

    que par suite

    d'un

    faux

    enseignement

    et

    de

    fausses habitudes

    intellectuelles,

    et

    qu'en pervertis-

    sant ou en

    mutilant les faits qu'on

    est

    amen

    penser que

    la

    ralit

    concrte,

    les

    choses

    de

    la

    nature

    et

    de l'esprit,

    sont

    perues

    et

    connues

    par

    nous

    conformment

    aux

    lois

    traces

    par

    la

    logique.

    On a,

    la vrit, depuis

    longtemps

    compris

    ce

    qu'il

    y

    a

    d'insuffisant

    dans l'ancienne logique, et plusieurs

    tentatives

    ont

    t

    faites,

    depuis

    Ramus,

    pour

    reconstruire

    cette

    science

    sur des

    bases

    nouvelles.

    Mais

    je

    n'hsite

    point

    affirmer

    que toutes

    ces

    tentatives

    ont

    chou,

    et qu'elles

    n'ont

    pas

    seulement

    chou,

    mais

    qu'elles

    ne

    sont

    qu'une

    reproduc-

    tion

    infrieure

    des thories qu'elles

    prtendent

    renverser

    et

    remplacer.

    Car il

    n'y a

    rien

    dans

    Yorganum

    de

    Bacon,

    ou

    dans la

    philosophie

    de Descartes

    (1),

    en

    ce

    qui

    con-

    cerne

    les

    principes fondamentaux

    de la

    logique,

    qui

    ne

    se

    trouve

    dans

    Yorganum

    d'ristote. Et

    tous

    ceux qui

    vou-

    dront

    accorder

    une

    attention

    srieuse et

    dsintresse

    ces

    matires

    admettront,

    je

    crois, avec

    moi,

    que

    Yorganum

    d'Aristote

    surpasse

    toutes

    les

    thories

    logiques qui

    l'ont

    suivi

    par

    l'tendue,

    la

    profondeur et

    la

    justesse

    de

    ses

    re-

    cherches,

    et

    par

    le

    caractre

    scientifique

    dont i

    est

    marqu.

    Quant

    Yorganum

    de Bacon,

    l'illusion si

    longtemps

    ca-

    resse

    et

    admise

    comme

    un

    fait

    incontestable,

    qu'il

    nous

    (1)

    Discours

    sur

    la

    mthode;

    Rgles

    pour

    bien

    conduire

    sa

    pense*

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    28/555

    4

    CHAPITRE

    I.

    fournit

    une

    mthode

    nouvelle

    et

    des

    procds

    logiques

    inconnus

    Aristote

    et

    aux

    philosophes

    de

    l'antiquit,

    cette

    illusion

    a

    t dissipe

    par

    la

    critique

    moderne

    et

    par

    une

    connaissance

    plus approfondie et plus

    exacte

    de

    la

    philoso-

    phie

    ancienne

    (1).

    Le

    dfaut

    commun

    de toutes

    les thories logiques,

    de

    la

    thorie

    aristotlicienne

    comme

    des

    autres,

    mais

    plus

    de

    celles-ci

    que de

    la premire,

    ainsi

    que

    je

    le

    montrerai

    par

    la

    suite,

    l'erreur

    qui

    a empch les

    auteurs

    de ces thories

    d'tablir

    la logique

    sur

    des

    bases

    vraiment rationnelles,

    et

    qui vicie,

    si

    l'on peut

    ainsi

    dire,

    l'difice

    entier, il

    faut la

    chercher

    dans

    le principe mme

    d'o

    ils

    sont

    partis,

    je

    veux

    dire

    dans

    la

    manire dont ils ont

    conu cette

    science. Car

    ils

    ont

    tous

    considr

    la

    logique comme

    une

    science purement

    formelle,

    c'est--dire

    comme

    une

    science

    dont l'objet con-

    siste

    analyser

    et

    dcrire les

    formes

    purement subjectives

    de

    la

    pense,

    formes

    qui

    auraient

    une signification

    et

    une

    valeur

    pour

    ce

    qui

    concerne

    l'intelligence

    et

    ses

    oprations,

    mais

    qui

    ne

    seraient lies par

    aucun rapport

    objectif

    et

    consubstantiel avec

    les choses

    que

    nous

    pensons

    et

    con-

    /

    naissons

    avec

    leur concours, ou,

    comme

    on

    dit,

    avec

    l'tre

    des

    choses.

    C'est

    l la

    notion

    que

    les philosophes

    se sont

    gnrale-

    ment

    forme

    de

    la

    logique,

    et

    en

    partant

    de

    ce point

    de

    vue

    ils

    ont

    mutil

    cette science,

    ils

    l'ont,

    pour ainsi

    dire,

    J

    dpouille

    de

    sa substance, et

    n'ont

    laiss

    qu'une

    pure

    forme,

    qui,

    par

    cela

    mme qu'elle

    a

    t

    spare

    de

    sa

    sub-

    (1) Voy.

    ,

    sur ce

    point,

    un

    crit

    que

    j'ai

    publi

    en

    anglais

    :

    Inquiry

    into

    spculative

    and exprimental

    Science.

    Londres,

    185$,

    Trbncr;

    et dans

    mes

    Mlanges

    philosophiques,

    l'article

    Bacion.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    29/555

    REMARQUES PRLIMINAIRES.

    5

    sfance, et qu'elle

    a

    t

    considre

    indpendamment

    des

    choses

    relles

    et

    concrtes,

    est

    loin

    d'tre

    une

    forme

    vrai-

    v

    ment

    rationnelle

    et

    un

    instrument

    de la vrit.

    Et,

    il

    faut

    bien

    le

    dire,

    depuis Aristote

    jusqu' nos

    jours

    on croirait

    que les

    logiciens au lieu

    d'agrandir

    et de

    complter

    le

    champ

    des recherches

    marqu

    par le

    philosophe

    grec,

    ne

    se sont

    appliqus

    qu' le

    rtrcir,

    en

    retrancher

    quelques-unes

    de

    ses branches

    essentielles

    et le

    rduire ainsi

    son

    mi-

    nimum.

    De

    l

    les distinctions

    arbitraires et

    superficielles

    de

    la

    vrit

    mtaphysique

    et de

    la

    vrit logique,

    de

    la

    raison

    et du

    raisonnement,

    de

    la

    logique

    comme science

    des

    simples

    possibilits,

    et de

    la

    mtaphysique

    comme

    science

    des

    ralits

    ternelles

    et

    absolues,

    distinctions

    qui,

    d'une

    part,

    brisent

    l'unit

    de

    l'intelligence,

    et

    avec

    l'unit

    de

    l'intelligence l'unit

    des

    choses,

    et, de l'autre,

    ont

    fait

    de la logique

    une

    sorte

    de

    caput

    mortuum,

    o

    l'intelli-

    gence ne

    saurait

    trouver

    un critrium rel

    ?

    un

    guide

    ra-

    tionnel

    et assur,

    Tel

    est,

    mme

    en

    ce

    moment,

    l'tal

    de

    la logique,

    bien

    qu'il

    y

    ait

    aujourd'hui

    plus

    d'un

    demi-sicle

    que sa

    rnova-

    lion a t

    accomplie

    par

    Hegel.

    Lorsque

    la logique

    de

    Hegel

    parut

    (1),

    elle

    fut

    reue

    en

    Allemagne

    avec

    admiration,

    on

    peut mme

    dire

    avec

    en-

    thousiasme

    par

    le

    monde

    philosophique.

    L'on

    comprit

    alors qu'elle

    tait appele

    remplacer

    l'ancienne

    logique,

    et

    inaugurer

    une

    re

    nouvelle

    non-seulement

    pour

    la

    lo-

    gique,

    mais pour

    la philosophie

    et la

    science

    en

    gnral.

    Car,

    par l mme

    que la

    logique

    est

    une science

    universelle,

    (1)

    Nuremberg,

    1812.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    30/555

    6

    CHAPITRE I.

    il

    n'y

    a

    pas

    de sphre

    de

    la

    connaissance qui

    chappe

    son

    action,

    il

    n'y

    a

    pas

    de

    thorie

    ou de

    pense

    sur

    Dieu,

    sur

    la

    nature,

    sur

    l'homme

    qui

    n'implique

    une loi

    ou

    une notion

    logique,

    et,

    par

    consquent,

    la rnovation

    de la

    logique

    doit

    ncessairement

    entraner

    avec elle

    de nouvelles

    habi-

    tudes d'esprit,

    de nouveaux

    principes

    et

    des mthodes

    nou-

    velles

    dans

    toutes les

    branches de

    la

    connaissance.

    Que

    la

    logique

    de

    Hegel,

    lorsqu'elle

    sera

    mieux

    tudie

    et

    mieux

    connue,

    et qu'un

    attachement

    aveugle

    et

    mca-

    nique

    de

    vieilles formules

    tombera

    devant

    des

    prin-

    cipes

    vraiment

    rationnels

    et

    dmonstratifs, soit

    appele

    remplacer

    l'ancienne

    logique,

    c'est

    ce

    qui

    ne laisse

    pas

    l'ombre

    d'un doute

    dans

    mon

    esprit. Et

    les

    objections

    que

    l'on

    dirige

    contre

    la

    philosophie

    de

    Hegel,

    savoir,

    que cette

    philosophie

    qui

    autrefois

    a

    rgn

    en

    souve-

    raine

    en

    Allemagne

    est

    maintenant dlaisse et

    perd

    tous

    les

    jours

    de

    son influence,

    que ses

    partisans sont

    dis-

    perss

    et

    dcourags,

    et

    osent

    peine

    reconnatre

    la

    doc-

    trine

    de

    leur

    matre,

    et

    qu'il

    y

    a lieu

    de croire

    que cette

    doctrine

    n'est

    qu'une

    phase passagre de

    l'esprit

    humain,

    qu'une

    tentative

    hardie,

    mais

    strile

    pour

    expliquer

    les lois

    absolues

    de

    l'univers, de

    telles objections n'ont,

    mon gr,

    aucune

    valeur.

    Car

    ceux

    qui

    prtendent

    que

    la

    philoso-

    phie

    hglienne

    a perdu de

    son influence,

    on

    peut

    d'abord

    opposer

    l'affirmation

    contraire, et

    l'on

    peut

    dire que

    ce

    qu'elle

    a perdu

    en

    intensit,

    elle

    l'a

    gagn

    en

    tendue,

    et

    que cette

    influence,

    qui autrefois

    tait

    borne

    l'Alle-

    magne,

    s'tend

    aujourd'hui

    sur

    toute

    l'Europe

    et au

    del

    des

    mers,

    comme

    le

    prouvent

    des

    publications qui concer-

    nent

    directemenl

    la

    philosophie

    hglienne,

    ou

    qui

    portent

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    31/555

    REMARQUES

    PRLIMINAIRES.

    7

    une

    marque visible

    de son

    influence

    (1).

    Et

    ce

    dplace-

    ment

    du

    centre

    de

    l'hglianisme

    qui

    de

    l'Allemagne

    va

    en

    se

    rpandant

    et en

    jetant des

    germes sur

    les

    diffrents

    points du globe,

    au

    lieu

    d'tre

    une

    cause d'affaiblissement

    deviendra

    pour

    lui

    une source nouvelle de force

    et

    de

    vie.

    Car

    c'est

    en se

    combinant

    avec

    l'esprit

    des

    autres

    peuples,

    en

    variant

    ses

    formes

    et

    son

    langage,

    et

    en

    trouvant

    d'au-

    tres

    interprtes

    que

    ceux du sol

    qui

    l'a

    vu

    natre,

    qu'un

    grand

    systme se

    dveloppe et dploie

    les

    richesses

    ca-

    ches

    dans

    les profondeurs de

    la

    pense du matre.

    En

    outre,

    lors

    mme

    que

    l'on

    accorderait

    qu'en

    ce

    moment la

    philosophie

    hglienne

    a

    perdu de

    son

    influence,

    la

    con-

    clusion

    qu'on

    en

    veut

    tirer

    contre

    sa

    valeur

    intrinsque,

    contre

    son

    action

    et

    ses

    dveloppements futurs ne suit nul-

    lement

    des prmisses, lien

    est de

    la philosophie

    hglienne

    comme de la

    philosophie de

    Platon

    et

    d'Aristote,

    comme

    de tout grand

    systme,

    et on

    pourrait ajouter de

    tout

    grand

    vnement

    historique. Il

    y

    a

    raction,

    et

    il

    y

    a

    point d'arrt.

    Cette raction et ce point d'arrt

    sont amens

    par

    des causes

    diverses,

    par

    le

    pass,

    par

    les

    vieilles

    habitudes morales

    et

    intellectuelles,

    par l'intrt,

    par

    l'ignorance et

    l'indiff-

    rence,

    par

    la

    difficult

    de pntrer

    dans

    la

    signification

    vaste

    et

    profonde

    d'une

    thorie,

    ainsi

    que

    par

    l'impatience

    de

    voir

    l'ide

    immdiatement

    ralise.

    Mais

    c'est

    l

    l'clips,

    ce

    n'est

    pas

    l'vanouissement de

    la

    plante. Les

    doctrines

    de

    Platon

    et

    d'Aristote

    furent

    suivies,

    ou,

    comme

    dirait

    un

    antihglien,

    effaces

    par

    celles

    d'Epicure,

    des

    Sto-

    (1)

    Voy.,

    sur

    ce

    point,

    Prface de

    la

    deuxime

    dition

    (1864)

    de Ylnlro-

    duclion

    la

    Philosophie de

    Hegel;

    et

    la

    Philosophie

    contemporaine en

    Ilalie,

    ch. VI,

    par

    R.

    Mariano.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    32/555

    8

    CHAPITRE

    I.

    ciens, etc. Et

    cependant

    on

    ne

    les

    a

    pas moins

    vues

    revivre,

    et

    revivre

    aussi

    vigoureusement

    et

    plus

    vigoureu-

    sement

    peut-tre,

    qu'en

    sortant du

    cerveau

    et

    de

    la

    bouche

    de

    leurs

    immortels

    auteurs.

    Sans

    parler,

    en effet,

    de

    l'cole

    d'Alexandrie

    ni

    de

    la

    philosophie

    romaine,

    qui

    peuvent

    tre

    considres

    comme un dveloppement

    ou

    une

    repro-

    duction

    des

    doctrines

    de

    Platon

    et d'Aristote,

    l'influence

    de

    ces

    doctrines ne

    fut jamais

    plus

    marque

    et

    plus incontes-

    tablement

    tablie

    qu'au

    moyen ge

    et la

    renaissance.

    Et

    mme

    de nos

    jours,

    malgr

    les

    attaques

    ddaigneuses

    et

    les pompeuses promesses

    de Bacon

    et

    de

    Descartes,

    la

    philosophie

    grecque constitue

    la

    base

    de

    toute

    ducation

    vraiment

    philosophique. Et

    il

    ne

    faut

    pas

    non

    plus

    oublier

    qu'il

    y

    a

    peu

    de

    livres

    auxquels on

    ait

    consacr

    dans

    ces

    derniers temps plus

    d'attention

    et

    de

    travaux

    qu'aux

    livres

    de

    Platon

    et

    d'Aristote.

    Ainsi

    l'obscurcissement

    momentan

    de

    ces

    grands

    luminaires,

    loin

    d'tre un

    symptme

    de

    fai-

    blesse,

    est

    une

    preuve

    de

    puissance

    ;

    car

    il

    prouve

    combien

    est

    indestructible

    l'esprit qui

    vit

    en

    eux,

    esprit qui

    se

    per-

    ptue

    travers les

    ges,

    et

    ne s'efface

    que pour renatre

    une

    vie toujours jeune

    et

    toujours

    nouvelle

    Que

    Hegel

    appartienne

    la famille

    de ces penseurs ex-

    traordinaires

    et

    divins, et

    que

    ses

    thories soient

    faites

    pour

    rsister

    l'preuve

    du

    temps,

    c'est

    ce

    qui,

    mon

    avis,

    ne

    saurait

    laisser

    de

    doute

    dans

    l'esprit

    de

    celui

    qui

    voudra

    leur accorder

    une

    attention

    srieuse

    et dsintresse.

    Car

    sa

    puissance

    spculative

    vraiment

    merveilleuse,

    la

    profon-

    deur

    et

    la

    vaste

    tendue de

    son

    esprit

    qui a

    embrass

    toutes

    branches

    du

    savoir,

    et

    sa

    facult

    de dduire

    et

    de

    lier

    les

    ides

    et

    de systmatiser

    la

    connaissance,

    facult

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    33/555

    REMARQUES

    PRLIMINAIRES.

    9

    que

    nul

    antre

    penseur,

    sans

    en

    excepter

    Platon

    et

    Aristote,

    n'a

    gale,

    lui

    assurent

    une

    des

    places

    les

    plus

    leves

    parmi

    les

    gnies

    dont s'honorent

    la philosophie

    et

    l'esprit

    humain.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    34/555

    CHAPITRE

    II.

    DFINITIONS

    DE

    LA

    LOGIQUE.

    Rien

    ne

    prouve plus

    clairement

    peut-tre

    l'insuffisance

    de

    l'ancienne logique que

    les

    incertitudes

    et

    la

    divergence

    des

    opinions

    relativement

    son

    objet et

    ses

    limites.

    En

    effet,

    suivant

    les

    uns,

    la

    logique

    est

    un

    systme de rgles,

    une

    mthode pour

    former

    des

    ides claires

    et

    pour guider la

    raison

    (1)

    ;

    suivant

    d'autres,

    c'est

    la

    science

    de

    l'argumen-

    tation

    et

    du

    raisonnement,

    facults

    qu'ils distinguent

    soi-

    gneusement

    de

    la

    raison

    (2).

    Kant

    considre

    la

    logique

    comme

    une

    science

    formelle,

    comme

    la

    science

    des

    formes

    ncessaires ou

    lois

    de

    la

    pense,

    et,

    suivant

    ses

    propres

    expressions, de l'usage

    gnral

    de

    l'entendement,

    ind-

    pendamment

    de

    tout objet particulier,

    ou

    de tout

    contenu

    fourni

    soit

    par

    la

    raison,

    soit par

    l'exprience

    (3).

    Il en

    est

    qui

    liminent

    de

    la

    logique toute

    question

    touchant

    les

    ides,

    leur origine et leur

    signification

    objective.

    Il

    en

    est

    (1)

    Descartes,

    Watts.

    (2)

    C'est l

    la

    notion

    qu'on se fait

    le

    plus

    ordinairement

    de

    la logique.

    (3)

    Logique

    de

    Kant,

    publie

    par

    Jsche.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    35/555

    DFINITIONS

    DE

    LA

    LOGIQUE.

    11

    d'autres,

    au

    contraire,

    qui

    non-seulement

    y

    comprennent

    ces

    questions,

    mais

    qui

    font

    de

    la

    logique

    une

    sorte

    de

    miscellane o

    ils

    entassent

    ple-mle et comme

    au hasard

    toute

    espce

    de sujets, tels

    que les problmes de

    la certi-

    tude, de

    la

    probabilit,

    des miracles, etc.

    (1).

    Cette divergence

    d'opinions,

    cette

    incertitude

    touchant

    l'objet

    et les

    limites de

    la

    logique, qui

    serait une source

    d'erreurs dans toute

    autre science, entrane

    des cons-

    quences

    bien

    plus

    fcheuses

    encore

    lorsqu'il s'agit

    de

    la

    science qui est prsente comme

    l'instrument universel

    de

    l'investigation

    scientifique

    ,

    comme la mthode

    l'aide

    de

    laquelle

    on dcouvre

    o

    Ton

    constate

    la

    vrit

    ;

    car

    l'erreur

    et

    la

    confusion

    qui

    se

    glissent

    dans

    cette

    science

    univer-

    selle

    doivent par l

    mme pntrer dans

    toutes

    les

    autres

    branches du

    savoir.

    La difficult

    qu'on

    prouve

    se

    faire

    une

    notion

    exacte

    de

    la

    logique

    est

    due

    plusieurs

    causes,

    mais

    elle est

    due

    surtout

    l'absence d'une

    connaissance

    systmatique,

    et

    de

    recherches

    suffisamment

    approfondies

    sur

    la

    nature

    de

    la

    forme,

    et partant

    de

    la

    logique

    elle-mme.

    Et, en effet,

    l

    o

    il

    n'y

    a

    pas

    de systme

    (2),

    c'est--dire

    l

    o

    il

    n'y

    a

    pas

    un tout,

    et o les parties

    et le

    tout ne sont pas lis

    par

    des

    liens

    rationnels et par

    des

    rapports

    ncessaires

    et

    ab-

    solus,

    il

    ne

    peut

    y

    avoir

    qu'une

    connaissance

    fragmentaire

    et

    accidentelle.

    Et une

    science

    particulire

    qui

    n'est

    pas

    systmatiquement

    ordonne,

    et

    qui

    ne

    constitue

    pas

    la partie

    (1)

    La

    logique

    de Port-Royal, par

    exemple.

    (2)

    Voyez

    sur la

    ncessit d'une

    connaissance

    systmatique

    et

    les

    erreurs

    qui

    naissent de

    l'absence

    de cette condition,

    mon

    Inlroi.

    la

    Phil.

    de

    Hegel,

    ch.

    III,

    h,

    et

    plus bas,

    ch.

    IX,

    X

    et

    XI.

    Cf.

    aussi

    mes

    Introd.

    la

    Phil.

    de

    la

    Nature,

    et

    la

    Philos,

    de l'Esprit

    de

    Hegel,

    vol.

    I.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    36/555

    12

    CHAPITRE II.

    d'un

    tout

    ne

    saurait discerner

    clairement

    ni son

    objet,

    ni

    ses

    limites,

    ni

    les

    rapports

    qui

    l'unissent

    aux

    autres

    sciences.

    Et

    c'est

    ce

    qui a lieu

    dans

    la

    logique.

    Car cetle

    science qui,

    comme on

    nous

    l'enseigne,

    doit

    nous apprendre

    ordonner

    nos penses

    et

    former

    des

    ides

    claires

    et

    compltes,

    s'inquite

    fort

    peu

    soit

    d'ordonner

    ses propres

    matriaux,

    soit d'en

    rechercher et

    d'en

    dfinir

    avec

    prcision le

    sens

    et

    la

    valeur.

    Par

    exemple,

    la

    question de savoir

    quel

    est

    le

    rapport

    de

    la logique

    avec

    les

    autres

    sciences, on

    se con-

    tente

    de

    rpondre

    d'une manire

    vague et

    superficielle,

    que

    comme

    la logique

    est la

    science

    du

    raisonnement,

    et

    comme

    on

    a

    besoin du raisonnement dans toutes

    les scien-

    ces,

    la

    logique

    doit

    ncessairement

    avoir

    des rapports

    avec

    elles.

    Mais quelle

    est

    la

    vraie

    et

    intime nature

    de

    ces

    rap-

    ports,

    jusqu'

    quel

    point

    et

    de

    quelle

    faon la logique

    est

    lie

    aux

    autres

    sciences,

    et

    quelle

    est

    la

    limite

    qui la

    spare

    d'elles,

    c'est

    ce que les

    logiciens ne nous disent

    point.

    Et

    lorsque,

    pour

    en

    donner

    une

    dfinition

    plus

    exacte,

    ils

    ajoutent

    que

    c'est la science

    de

    la

    forme

    ou de

    la

    mthode

    l'aide

    de

    laquelle

    nous ordonnons

    nos penses pour

    at-

    teindre

    la

    vrit,

    ici

    aussi on nous

    laisse dans l'ignorance

    sur

    la

    nature

    de cette

    forme

    et

    de

    cette

    mthode,

    et

    sur

    leurs

    rapports

    avec les

    objets

    de

    la

    pense,

    comme,

    par

    exemple,

    s'il

    y

    a

    entre l'objet de

    la

    pense

    fini

    ou infini,

    physique

    ou

    mtaphysique

    et

    la

    forme

    une communaut

    de

    na-

    ture,

    et,

    s'il

    y

    en

    a,

    quelle

    est

    la

    diffrence

    entre

    la

    logique

    et

    l'ontologie

    et

    la mtaphysique

    ;

    et

    s'il n'y

    en

    a

    pas,

    com-

    ment

    la

    connaissance

    est

    possible

    ;

    ou

    bien,

    si

    la

    forme

    est

    ternelle

    et

    absolue,

    ou

    prissable

    et

    relative,

    et

    si

    elle

    est

    prissable

    et

    relative,

    comment

    on peut

    atteindre

    par

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    37/555

    DFINITIONS

    DE LA

    LOGIQUE.

    13

    elle

    l'absolue vrit, ngligeant ainsi

    ou

    laissant

    sans

    rponse

    les

    questions

    les

    plus

    importantes,

    et

    dont

    la

    solu-

    tion

    constitue la

    base d'une

    conception

    vraiment rationnelle

    de

    la

    logique.

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    38/555

    CHAPITRE

    III

    ESQUISSE

    DE

    L ANCIENNE

    LOGIQUE.

    Pour

    justifier

    l'exactitude

    de

    ces remarques,

    je

    vais

    tra-

    cer

    d'abord

    une

    rapide esquisse de

    l'ancienne

    logique,

    me

    me

    bornant

    indiquer

    les

    traits

    les

    plus

    essentiels

    de cette

    science,

    ce

    qui nous

    suffira pour

    mettre

    en

    lumire

    ses

    la-

    cunes,

    et

    ce

    qu'il

    y

    a,

    pour

    ainsi

    dire,

    d'illogique

    en elle,

    et

    nous

    servira

    comme

    de

    prparation

    et

    de

    passage

    la lo-

    gique

    hglienne.

    Que

    la

    logique

    soit

    une

    science

    universelle,

    c'est

    l

    un

    point

    sur

    lequel

    les philosophes

    sont d'accord. En

    effet,

    que

    la

    logique

    soit

    la

    science

    de

    la

    forme,

    ou qu'elle

    soit

    la

    science

    du

    raisonnement,

    l'unit

    de

    l'intelligence, ainsi

    que

    l'unit

    de

    la

    science,

    exigent

    qu'il

    y

    ait

    une science

    universelle qui

    s'tend

    toutes

    les

    branches de

    la

    con-

    naissance

    et de

    la pense.

    Mais

    si,

    d'un ct,

    la

    logique

    est

    une

    science

    universelle,

    elle

    doit,

    de

    l'autre,

    avoir

    un

    objet

    dtermin,

    et

    par

    suite

    un

    champ

    de

    recher-

    ches

    limit,

    et,

    en

    ce sens,

    elle

    doit

    tre une science

    par-

    ticulire.

    Car,

    si

    elle n'tait

    qu'une

    science

    universelle,

    elle

    serait

    la

    science

    universelle et la seule science,

    et

    les

    autres

    sciences

    ne

    seraient alors

    que

    des

    parties

    ou des

    di-

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    39/555

    ESQUISSE

    DE

    l'ANCIENNE

    LOGIQUE.

    15

    visions

    de

    la logique.

    Par consquent,

    il

    se

    prsente

    la

    question

    de

    savoir

    comment

    la

    logique

    peut

    tre

    une

    science

    universelle

    et

    particulire tout

    ensemble,

    dans

    ^

    quel

    sens

    et

    jusqu'

    quel

    point

    elle

    embrasse

    les autres

    sciences,

    et en

    quel

    sens

    elle

    constitue

    une

    science

    sui

    generis, ayant

    un

    objet

    distinct

    et

    dtermin.

    Or,

    lorsque nous

    analysons

    la

    pense, nous

    y

    dcouvrons

    deux lments

    : la

    chose

    elle-mme

    (qu'elle soit

    d'ailleurs

    purement

    pense

    ou signifie par des mots),

    et

    le

    mode

    suivant

    lequel les

    diffrentes

    choses

    sont

    unies

    et

    disposes

    dans

    et

    par

    la

    pense,

    en

    d'autres

    termes,

    nous

    y

    dcou-

    vrons,

    d'une

    part,

    ce

    qu'on a appel la matire,

    ou le con-

    tenu,

    et,

    de

    l'autre,

    la

    forme.

    Si

    dans

    la

    proposition

    :

    Fhomme

    est

    mortel,

    nous

    ne

    considrons

    en

    aucune

    faon

    ce

    qui

    se

    rapporte

    l'tre objectif

    et

    rel

    soit de Y

    homme,

    soit

    de

    mortel, comme, par exemple,

    s'il

    y

    a

    un

    tel

    tre

    appel homme,

    ou

    ce

    qu'il

    est,

    ou s'il

    y

    a des

    choses

    mor-

    telles,

    et

    en

    quoi

    consiste

    tre

    mortel,

    etc.,

    mais

    seulement

    la

    manire

    dont ces

    termes

    ou

    des

    termes

    semblables

    sont

    ou

    peuvent

    tre unis, nous

    aurons

    la

    forme

    universelle

    de

    cette proposition.

    C'est

    par

    le

    mme

    procd

    analytique

    que

    nous

    dcouvrons dans

    un

    raisonnement

    des

    lments

    et

    des

    rapports analogues.

    Et

    si nous

    tendons

    ce

    procd

    aux

    formes

    diverses

    l'aide

    desquelles

    nous pensons

    les

    choses,

    nous

    aurons le

    point

    de vue

    fondamental

    de

    l'an-

    cienne

    logique, c'est--dire

    nous

    aurons,

    d'une

    part,

    \&

    ma-

    tire

    de

    la

    pense,

    et les sciences

    qui

    s'y

    rapportent,

    telles

    que

    la

    mtaphysique

    et

    la

    physique, et, de

    l'autre,

    la

    forme

    de la

    pense,

    et

    la

    science de

    la

    forme

    ou

    la

    logique.

    Maintenant,

    comme

    il

    ne

    peut

    y

    avoir

    de

    pense

    sans

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    40/555

    16

    CHAPITRE

    III.

    une

    forme

    dtermine,

    il

    faut

    la

    pense certains

    lments

    fixes

    et

    gnraux

    qui

    la

    dterminent.

    Ces

    lments

    ont

    t

    nomms

    par

    quelques

    logiciens termes, par

    d'autres

    cat-

    gories

    ou

    concepts,

    et

    par

    d'autres

    genres

    et

    espces. Il

    faut

    remarquer,

    cet

    gard, que

    si^conformment

    la

    notion

    fondamentale

    de la

    logique que nous

    venons

    d'indiquer

    nous

    enlevons

    aux

    termes ou

    catgories, ou

    par

    quelque

    nom

    qu'on

    voudra

    les

    dsigner,

    leur

    valeur

    matrielle

    et

    objective, et

    leurs

    proprits

    relles

    (peu

    importe

    ici

    que

    ces

    proprits soient

    drives de

    l'exprience

    ou

    de

    la

    raison),

    on

    ne

    leur

    laissera que

    leur

    grandeur

    ou

    quantit,

    et

    la

    logique

    deviendra la

    science

    de

    la

    quantit

    de

    la

    pen-

    se

    (1).

    C'est

    l,

    pour le

    dire

    en passant,

    ce

    qui

    fait

    le

    rap-

    port

    de

    la logique

    et

    des

    mathmatiques,

    et

    ce

    qui

    a sou-

    vent

    amen

    les confondre.

    Car,

    si l'on dpouille

    les

    termes

    de

    leur

    contenu,

    on

    n'aura

    plus que

    des

    nombres

    ou des figures

    gomtriques,

    et

    on pourra comparer leur

    combinaison

    une

    proportion

    numrique

    ou

    des

    cercles

    concentriques

    (2).

    (1)

    Si,

    par

    exemple,

    dans le

    terme homme

    nous

    faisons

    abstraction

    de

    son

    existence

    relle et de

    ses

    qualits,

    le seul

    caractre,

    la

    seule

    entit qui

    pourra

    lui

    rester

    sera

    la quantit,

    c'est--dire nous

    aurons

    l'homme

    considr

    comme

    un

    tout,

    ou

    comme

    une

    partie, ou

    comme une

    unit

    indivisible.

    Et

    il

    faut

    remarquer

    que

    nous

    faisons

    ici

    une

    concession

    l'ancienne

    logique

    pour le

    besoin

    de

    la

    discussion. Car il

    est

    facile

    de

    voir

    que

    la

    quan-

    tit

    et

    ses

    rapports

    quels que

    soient

    d'ailleurs

    leur

    valeur

    et

    le

    rle

    qu'ils

    jouent

    dans

    la constitution

    des

    tres,

    font partie

    de

    la

    chose

    mme

    et de

    sa

    nature

    objective,

    et

    que,

    par consquent,

    elles

    dpassent

    les limites

    d'une

    logique

    qui

    n'y

    voit

    que

    des

    formes purement

    relatives

    et subjectives

    de

    l'intelligence.

    (2)

    Euler,

    par

    exemple,

    compare

    le

    syllogisme

    trois cercles concentriques

    dont

    le

    cercle

    central

    formerait

    le

    moyen

    terme.

    Ploucquet

    identifie

    la

    Ugique

    et

    le

    calcul,

    et aprs

    avoir ramen

    le

    syllogisme

    au

    calcul,

    il

    couclut

    par

    les

    paroles

    suivantes

    :

    Posse ctiam

    rudes

    mechanice

    tolam

    logicam

  • 7/21/2019 Hegel - Logique (tome 1)

    41/555

    ESQUISSE

    DE

    L'ANCIENNE LOGIQUE.

    17

    Maintenant,

    conformment ce

    point

    de

    vue

    ,

    les

    ca-

    ractres

    essentiels

    des

    termes

    seront

    ce

    que

    les

    logiciens

    appellent comprhension et

    extension,

    lesquelles

    forment

    '

    un certain nombre, une

    somme

    de caractres appartenant

    chaque terme.

    Soit,

    par

    exemple,

    le

    terme

    arbre. Arbre

    est

    la

    fois

    un

    genre

    et

    une

    espce.

    C'est un genre

    si

    l'on

    considre les

    termes

    infrieurs

    et

    plus troits,

    tels que

    chne, htre, peuplier,

    qu'il contient;

    c'est

    une

    espce

    si

    '

    l'on considre

    les

    termes suprieurs et plus

    larges,

    tels

    qu

    organique,

    matire,

    tre,

    dans

    lesquels

    il

    est

    contenu.

    L'ensemble

    des

    premiers caractres

    constitue

    son

    extension,

    l'ensemble

    des

    derniers

    constitue sa

    comprhension.

    D'o

    il

    suit

    :

    1

    que

    l'on

    a

    une

    somme

    ou

    une

    srie

    de

    termes

    o

    la

    comprhension

    et

    l'extension se dveloppent

    en

    raison

    inverse,

    la comprhension

    augmentant

    lorsque

    l'ex-

    tension

    diminue,

    et,

    rciproquement,

    l'extension augmen-

    tant

    lorsque la comprhension

    diminue

    ;

    2

    que,

    si

    l'on

    se

    reprsente par

    la

    pense

    la srie

    entire