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 IV LA REFORME ET LA MAGIE Cornélis Agrippa fonda une Société de Chercheurs. ll créa la Communsutë des Mages, ou des Frères de la Croix d'Or. Paracelse. selon maints témoignages. y appartenait. Melanchton était Chevalier de Saint-Jean. Les alchimistes. les savants. même l'abbé Tritheim, avaient coutume de se grouper dans ces cénacles. plus ou moins secrets. ou les adeptes de magie ne seraient pas inquiétés par les sectaires. En réunion. ils échangeaient le fruit de leurs travaux. se documentaient l'un l'autre. se transmet- taient des conseils pratiques, qu'en aucune façon I'on ne devait divulguer. et s'es- sayaient au rituel secret. Roger Bacon formulait justement : C'est de la .l'olie que de donner de la laitue à un.âne. qui se contente de c'hardons. LES FRATERNITÉS : TEMPLIERS ET ROSE-CROIX On comptait de nombreux occultistes surtout en Allemagne au xlv" siècle. 225

Histoire de La Magie 225-276 _P05

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IV

LA REFORME

ET

LA MAGIE

Cornélis Agrippa fonda une Société deChercheurs. ll créa la Communsutë des

Mages, ou des Frères de la Croix d'Or.Paracelse. selon maints témoignages. yappartenait. Melanchton était Chevalierde Saint-Jean.

Les alchimistes. les savants. même l'abbéTritheim, avaient coutume de se grouper

dans ces cénacles. plus ou moins secrets.ou les adeptes de magie ne seraient pasinquiétés par les sectaires. En réunion. ilséchangeaient le fruit de leurs travaux. se

documentaient l'un l'autre. se transmet-

taient des conseils pratiques, qu'en aucunefaçon I'on ne devait divulguer. et s'es-sayaient au rituel secret.

Roger Bacon formulait justement :

C'est de la .l'olie que de donner de lalaitue à un.âne. qui se contente de c'hardons.

LES FRATERNITÉS :TEMPLIERS ET ROSE-CROIX

On comptait de nombreux occultistessurtout en Allemagne au xlv" siècle.

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que l'on savait réunis en Fratemités, àl'instar des Fraternités d'Italie et des Pays-Bas. Cornélis Agrippa, en revenant deLondres, racontait qu'il y avait étéintronisé Chevalier de la Milice d'Or. DesAssemblées d'York de 1427 émanait la

Grande Loge d'Angleterre, présidée parHenri VII en 1502, qui Ia révéla lors dela pose de la première pierre de West-minster. Saint Jean-Baptiste était, enAngleterre, le patron des corporationsqu'en 1509, le cardinal Wolsey réuniten Grande Gilde. De leur côté, les alchi-mistes, nous I'avons vu, revendiquaientles affabulations magiques et les révé-lations de saint Jean I'Evangéliste. LesFraternités I'adopteront définitivement.

En Allemagae, la Charte de Colognede juin 1535, composée par I'assembléemaçonnique convoquée par l'évêque de

Cologne, Herman, sera signée des MaîtresElus de l'Ordre de Saint-Jean.

Mackensie a parlé de ces Fraternitéshermëtiques, issues, dit-il, d'Égypte :

Il est une Fraternité qui s'est propagéejusqu'à nos jours et dont l'origine remonteà une époque très reculée. Elle a ses ffi-ciers. ses secrets. ses mots de passe, samëthode particulière dans l'erceignementde la Sciençe. de la philosophie et de lareligion.., Si I'on en croit ses membresactuels. Ia Pierre Philosophale, l'élixirde vie, I'art de se rendre invisible, le pouvoir

de communiquer directement ayec l'autremonde, seraient une psrtie de l'hëritagede leur Société.

Un fait remarquable au xvre siècle, enAllemagne, était la maintenance des Tem-pliers. Deux notables de Brême avaientfondé à Riga. au début du xllre siecle

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et avec l'appui de saint Dorninique,I'Ordre des Chevaliers Porte-Glaiyes. Surune longue aube blanche se voyaient bro-dés deux glaives rouges entrecroisés,formant une Croix de Saint-André. C'étaitl'Ordre des Frères de la Milice du Christ,

fondé sur le modèle de l'Ordre de Ia Milicedu Temple. En 1237 les Porte-Glaivesse fondirent dans I'Ordre des ChevaliersTeutoniques.

L'Ordre Teutonique avait été fondé ausiège de Saint-Jean-d'Acre en 1112, pourrecueillir les croisés allemands malades enPalestine. Le Pape Calixte III le confirmaen 1192. Ses membres observaient larègle de saint Augustin et vivaient engrande communauté d'idées et de cheva-lerie avec le Temple. Ils avaient le mêmeidéal du combat contre I'hérésie et l'in-fidèle.

Après l'immense procès, puis le scan-dale et la suppression inique de l'Ordrede Ia Milice du Temple par le Pape Clé-ment V le 22 mars 1312, et le supplicedes grands dignitaires templiers du18 mars 1314, envoyés au bûcher parPhilippe le Bel, il parut que l'Ordre desChevaliers Teutoniques recueillait les motsd'ordre secrets du Temple. l

On lui attribuait la maintenance duchristianisme oriental primitif et très .,

largement 'gnostique, àpporté par le jTemple.

N'était-ce pas pour cette raison secrèteque Clément V avait suivi le roi Philippele Bel dans cette persécution incroyable?

Le drame monstrueux des Templierss'était déroulé cent cinquante ans avantFaust.

Le jeune étudiant en apprit les détails.

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En Allemagne. on les avait à peu prèsinnocentés.

Les Chevaliers Teulon* leurs succes-seurs. se chargeaient de rapporter lesphases dramatiques de I'aventure.

Les cénacles rosicruciens de I'abbéTritheim et de Cornélis Agrippa ne man-quaient pas d'en distiller l'horible récit,tout en maintenant l'ésotérisme de la

phalange sauée. selon le mot de saintBernard. fondateur de la Milice duTemple.

De I'Ordre Teutonique surgiront unjour la Stricte Observance Templière etla Fraternitë des Rose-Croix.

C'est une odyssée extraordinaire que

celle de ces moines-soldats auréolés dela conquête de Jérusalem. drapés d'hé-roisme. d'idéal et de sang. Saini Bernardleur avait interdit les femmes. les habits.un sommeil trop agréable, une table biengarnie, le droit de chasser. Ils devaientse tenir toujours prêts au combat. mêmeun contre dix; la mort constituait la plusbelle récompense de leur mission salva-trice.

Saint Bernard. prédicateur des Croi-sades. avait infusé à la Milice du Templeun fanatisme semblable à celui qui entié-vrait et faisait vaincre les

Arabes. acharnésà vaincre ou à mourir Dour Mahomet.On apprenait avec éionnement rout

ce que les Templiers, fondés à Jérusalem

sur les vestiges du Temple de Salomon,devaient et avaient emprunté à la philo-sophie orientale. On y trouvait en effetI'origine de leurs rites, leurs symboles. leuralphabet, leurs secrets en un mot. Lelong contact des Miliciens du Christ avecles érudits philosophes de Syrie leur avaitinculqué non seulement le goût du mystère,I'organisation hiérarchique des grades

comme chez les lsmaéliens et les Esséniens.mais aussi la vision transcendantale deschoses et la recherche d'un état béatiqueet d'une félicité dans la connaissance.bien au-dessus des religions. Beaucoupde pratiques. de coutumes. d'emblèmes,avaient été aussi adoptés par les Tem-pliers. et c'étaient là des thèmes. des mæurs.des emblèmes parfaitement étrangers àl'Occident. qui ne devait pas le leur par-donner.

Les Templiers. dans leurs hauts grades.s'étaient formés à I'hermétisme.

Et là. Faust retrouvait I'apport de laphilosophie orientale. qui le passionnait.et aussi la pratique de I'hermétisme.sans lequel désormais aucune vérité neIui paraîtrait possible.

Quelle était la vérité si grave. apportéepar les Templiers. qu'il avait fallu lesbrûler comme de vulgaires sorciers?

Faust apprenait la signification de lacroix pattée de gueules. comportant lesquatre éléments. quatre triangles &uxsommets convergents. le rouge (gueules)du Feu étant signe d'Action. Le manteaublanc était celui de pureté (des Esséniens).

Lumière et vérité. béatitudes.L'initiation Templière comportair uncérémonial magique : dépouillement desvêtements. purification par I'eau. triple

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LE BAPTIOMET DU COFFRET

interrogatoire. revêtement de nouveauxhabits blanc. rouge, brun; jeûne et com-munion, pafiicipation fraternelle rituelle.accolade. réceprion des armes : le sceau deSalomon, ie bouclier de David.

La corde de ceinture constituait un

signe magique, non seuiement d'humilitéet d'attachement à la règle, mais aussid'isolant astral et de limite du mondeextérieur.

L'étendard des hauts dignitaires. leBeaucéant. blanc et rouge, Sagesse etAmour divin. amour régénérateur, Beau-céant de guerre. noir et blanc, de Lumièreet de Ténèbres, monde lunaire et mondede Saturne. Beaucoup y voient le signedu manichéisme des Templiers. Le prin-cipe noir et blanc de réversion univer-selle et de régénération de I'impur, à laiaçon des alchimistes.

Ne rapportait-on pas aussi que lesTempliers répétaient des doctrines démiur-giques et dualistes? Que le sceau de deuxchevaliers avait un sens caché. celui deI'androgynat primitif? Ou bien le Diabledoublant le Soldat?

N'existait-il pas aussi. au Temple, despratiques démoniaques? Tous les Tem-pliers interrogés au procès, reconnurentle baiser démoniaque. le crachat sur laCroix, I'adoration du Baphomet infernal,du chat, des idoles, en grand chapitre.N'avait-on coutume d'uriner sur la croix.de se réunir en secret la nuit, pour des

pratiques infernales? L'acte d'accusationprécisait que le néophyte était reçu dansun lieu obscur. qu'on lui faisait renrerDieu, fouler aux pieds la Croix, cracher.sur le visage du Christ. puis il saluait leGrand Maître par d'étranges baisers

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sur la bouche et sur le ventre. On le pré-sentait ensuite à la véritable divinitédu Temple : une idole en bois doré. àtête barbue, dont les yeux flamboyantcomme des escarboucles. reluisaient. Onle vouait au culte de l'idole. Le væu dechasteté était violé des façons les pluscriminelles. S'il meurt quelque Templier.réprouvé. scélérat. on le brûle et on mêleses cendres aux boissons

etaliments des

nouveaux adeptes. S'il naît d'un Templierquelque pauvre enfant. on le fait cuireet la graisse oint I'idole!

N'était-ce pas là profession satanique?Avouée. reconnue?

Un fait demeure certain et domineles témoignages et les interrogatoires.Les Templiers possédaient des sortes detêtes idoles. talismans magiques et pro-phétiques secrets. que I'on dévoilait par-fois soit pour être inteffogés. semblablesaux Téraphim de I'Arche d'Alliance.figurines magiques qui parlaient, soit pour

effrayer, voire terroriser le jeune Templierà son initiation. Comme on monraitdans une demi-obscurité la tête mysté-rieuse, les récits qu'on en fit s'avèrentdivers et contradictoires. Tête de femme.tête d'homme barbue. mage à trois faces(retrouvé aux chapiteaux d'églises tem-plières). crâne d'homme. tête de chat?Des figures androgynes, voire obscènes.ont été également retrouvées dans lescommanderies. Elles sont coiffées d'unbonnet entouré de serpents. tiennent deschaînes. tendent des croix. Les signes duciel les entourent : Soleil. Lune. astres et la

peau de lion. le chandelier à sept branches.On relève des inscriptions gnostiqueset parfois des caractères arabes.

Lcs deux coffrets de la collection duduc de Brancas sont les plus célèbres deces objets Baphométiques et Templiers.L'un vient de Toscane. l'autre de Bour-gogne, à Essarois. non loin du Temple deVoulaine. Ils sont en pierre et grossière-ment taillés. Celui d'Essarois mesure25 centimètres sur 19 de lar-qe et 13 dehaut. Le couvercle porte un personnageobscène. androgyne.

barbuet

àmamelles.

Il est coiffé d'une tour crénelée. commeCybèle ou comme le Tarot. et porte àchaque main un bâton orné. l'un d'uncroissant lunaire. I'autre, du disquesolaire. A ses pieds. un crâne sépare uneétoile et un pentagone. Une inscriptionarabe ne peut être déchiffrée. Sur le côtédu coffret. des scènes érotiques. Sur unpetit côté. on voit un guerrier qui tire àlui deux enfants sur un crocodile. Ailleurs.un génie ailé tenant une couronne. uneépine dorsale triangulaire. un quatrièmepersonnage saisit une hache et un gou-

vernail. Sur un autre côté. quatre person-nages sacrifient un taureau sur un autelilluminé. Le coffret d'ltalie est à peu prèssemblable. avec une scène funéraire d'inci-nération.

A Broc. en Maine-t' I,oire. on a retrou-vé une statuette d'hom,lie barbu, accroupi,les jambes croisées. coiffé du bonnetpointu. tenant dans chaque main une sortede cordelette.

Les Templiers avouèrent qu'on leurtaisait adorer I'idole. que chaque chevalierse ceignait soit à nu. soit par-desJrls .rat'hemise. d'une cordelette de fil hlanc'. à

laquelle on at'ait préalablement /àit toucherl'idole haphomérique.On a brûlé les Templiers comme de

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vulgaires suppôts du Diable. Les commen-tateurs allemands ajoutent que I'onpeut discuter soit des bonnes inten-tions du Pape Clément V laissant supplicierles Templiers. et dans ce cas, les Templiersméritaient I'accusation de magie noire,

soit au contraire. si les Templiers étaientinnocents, comme I'affirma véhémente-ment le Grand Maître Jacques de Molayen montant au bûcher. c'était alors lePape. coupable de la plus démoniaqueentreprise au service de I'ignoble Bouc.

Le Diable était servi.Allumez les bûchers!ll en rejaillissait sur saint Bernard.

fondateur du Temple - et que I'on plaçaitaussi dans le cercle infernal des accusa-tions de magie - des mises en cause, quijetaient le trouble dans les esprits.

La fortune des Templiersportait-elle

le signe du Pacte Diabolique?La perte de Jérusalem par eux n'était-elle

pas I'ceuvre du Malin? C'est ce dont lesaccusait Guillaume de Plaisians auxÉtats de Tours.

On rapportait au Temple qu'au com-mencement de I'Ordre, il y avait deuxcavaliers qui combattaient sur un mêmecheval. outre-mer, L'un d'eux se recom-manda à Jésus et fut blessé. L'autrederrière lui, et c'était le Diable qui avaitpris figure humaine, déclara qu'il se

recommandait à qui pouvait mieux l'assis-

/er. N'ayant pas été blessé, il accabla soncompagnon de ses reproches : Sf tu veuxcroire en moi, l'Ordre se multipliera etdeviendra ricâe, promit-il.

C'est de là que naquirent les erreurs,déclara le frère Pierre de la Palu. domini-cain de Lyon, bachelier en théologie.

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Le même frère maintenait avoir entendudire qu'un Maître du Temple, fait prison-nier du Soudan - ou Sultan - se fitliberer sous la condition de jurer qu'ilferait adopter d'étranges erreurs parI'Ordre. Et désormais. I'Ordre fut très

en faveur au pays du Soudan.Certains docteurs subtils prônaient que

le reniement des Templiers était empruntéaux mystères figuratifs et aux rites del'église primitive. Le néophyte est unpécheur et un renégat. A I'exemple desaint Pierre. il doit renier le Christ. Lesjohannites en effet, et les adeptes dumanichéisme et du cainisme. Vaudois.Cathares. Albigeois déjà traqués parPhilippe Auguste. brûlés par saint Louispour bougrene, établissaient que le dua-lisme ou dithéisme faisait coexister les

deuxgrands principes

du bon, symbolisépar la lumière. et du mauvais, figuré parles ténèbres et identique à la matière. Uneguerre acharnee opposait les deux prin-cipes. L'homme est créé par le dieu mau-vais. Son affranchissement s'opérera parIa connaissance de la vraie Science. I'arbredéfendu de la Science du Bien et du Mal.l'æuvre rédemptrice du Christ. Ces adeptescondamnaient les rapports entre les deuxsexes (comme les Templiers), interdisaientla procréation (comme les Templiers),niaient la réalité de l'incarnation (renie-ment), affirmaient que Dieu bon et parfait

n'avait pu créer le mal, que le deuxièmeDreu mauvals rnstttua pour enlever sapuissance au Dieu bon. C'est Satan,Lucifer. Lucibel. Or. Lucibel a créé laterre, la matière, les hommes. Jésus estI'envoyé du Dieu bon. Sa mission neconsiste pas en I'expiation, par le fils de

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Dieu fait homme. des péchés du monde,mais en une mission de négation. Négationdonc de I'lncarnation. la Passion. laRésurrection. Haine de la Croix. matièreimpure rappelant les souffrances du Christet le rattachant à I'impur (crachat surla croix). Beauté réelle du lVe Evangile,celui de saint Jean. æuvre d'Apocalypseet d'Antéchrist. La corde de Ia ceinture

marque cette chaîne d'union. Elle empêcheI'acte de procréation qui était celui decréation. l'æuvre du Démon. Le mariageest un état satanique. Une femme enceinteatteint le comble de I'abomination. L'in-ceste et le concubinage demeurent préféra-bles au mariage; les Cathares étaient déjàaccusés de sodomie.

Quant à I'Eucharistie. bien entendu. ces

adeptes niaient la Présence Réelle. et c'estpourquoi les Templiers. dans le cérémonialde la messe. ne prononçaient pas lesparoles de consécration.

Etait-ce I'(Euvre du Malin?

Le roi de France. Philippe le Bel. quienvoya les Templiers au bûcher et mitla main sur leur or. leurs pierreries. leurbutin ramené d'Orient. valait-il mieux.lui qui pressura les Juifs. altéra la monnaie,qui, une nuit de 1303, fit attaquer le pape

Boniface VIII dans sa demeure d'Anagni,le fit souffieter par Nogaret. puis enfermer?Le pape devait en mourir. On murmuraqi, cn l'avait empoisonné.

A quelque temps de là. en effet. onremarquait à travers la France une actionconcertée de sorciers. sorcières. de Juifset de lépreux arrivés d'Espagne. Certainsversaient du poison dans les sources etles fruits. un poison composé de sanghumain. d'urine et de trois herbes mortelles.séchés et mis en poudre: ces élémentsétaient mêlés à une poudre d'hostieconsacrée. D'autres prenaient une tête decouleuvre, les pattes d'un crapaud. lescheveux d'une femme infectés de liqueurnoire et fétide. composant un charmemortel.

Le roi fut très effrayé des rapports quiconsignaient ces faits. On pensa à unevengeance magique du roi de Grenade.vaincu par les armées chrétiennes deCastille. On brûla les sorciers. les Juifs.les lépreux arrêtés. On brûla aussi àTours un certain abbé de Mont-Mayeux. AChinon. on exécuta dans un même brasier.cent soixante Juifs qui moururent cou-.rageusement. ce qui parut un défi. Surle bûcher ils lancèrent leur malédictionau roi.

Philippe le Bel mourut mystérieusementde langueur à Fontainebleau, en mars1314, âgé de quarante-six ans. accomplis-sant la prophétie de Jacques de Molay, eten disant : Hélas ! Trop me nuisent les malë-dictioru dont je suis poursuivi ! ll faisait allu-sion entre autres, aux malédictions du papeBoniface VIII et à celles du Grand MaîtreJacques de Molay sur son bûcher.

Louis de Navarre, ses deux frères

Philippe de Poitiers et Charles de IaMarche se réunirent avec leur oncleCharles de Valois et demandèrent ce quele premier ministre Enguerrand de Mari-

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-sny avait fait des richesses du roi dont ildevait assurer la garde. Enguerrand futimmédiatement accusé de vol et dilapida-tion du trésor de France et on I'enfermaà la prison du Louvre. On le jeta ensuite

dans la geôle du Temple puis I'on préparason dossier. Il fut prouvé que sa femmeavait confectionné des figures de cire pourenvoûter le roi Louis et son frère Charlesde la Marche et autres seigneurs. La damede Marigny, qui pratiquait la magie, et sa

scEur la dame de Chanteloup, furentemprisonnées au Louvle avec une sorcièreboiteuse. faiseuse de < voults )), et accusée

de fabriquer de l'or. Enguerrand fut con-damné à être pendu. Le gibet de Paris luifut réservé. au plus haut. parmi les larrons'La semaine suivante. on brûla la sorcièreet ses <( voults >. La dame de Marigny

et sa sæur. dame de Chanteloup, furentemprisonnées à vie. On accusait aussil'évêque de Châlons, Pierre de Lentilly,d'avoir causé la mort de Philippe le Belpar quelque incantation magique; il futjeté en prison. Pour magie également, etsur le même motif. on mit à la tortureRaoul de Presle, avocat principal auParlement. Mais on ne put rien entirer.

Le pape Clément V, qui condamna,était mort quatre mois après. aiournélui aussi par Jacques de Molay sur sonbûcher. Les autres ministres furent livrés

au F yreau. Les trois fils de Philipper ariés à trois princesses de Bour-nurent la malédiction dans leur

':erite meurt étranglée à27 ansibordements. Jeanne meurt

.che à 23 ans. Devant elleles deux beaux ieunes

hommes Philippe et Gautier d'Aulnay,qui avaient été ses amants.

On disait que le Diable avait possédéles trois princesses.

La venseance du Baphomet?

Les Fraternités, qui existaient en Europeaux xve et xvre siècles, se réunissaient sousle vocable de saint Jean (l'Apocalypse), desaint Jacques (Compostelle) ou parfoisde saint \ndré d'Ecosse.

SAINT JEAN, FAISEUR D'OR

Milet, évêque de Lodicée. a rapportéque I'apôtre Jean, après avoir ressuscitéla femme Drusienne, à Ephèse, rencontrale philosophe Craton, qui devant le peuplefaisait la démonstration de son influencephilosophique sur deux jeunes Grecs qu'ilavait persuadés de vendre tous leurs bienspour acheter deux diamants, et afin demontrer leur mépris de la richesse, enpublic, ces deux disciples réduisirent en

miettes leurs diamants. Saint Jean les

blâma et déclara que I'argent des diamantspouvait être employé à des æuvres de lafoi et, devant la foule, il reconstitua les

tliaman.ts pulvërisés... et le produit des

diamants fut distribuë aux pauvres.Or. les deux jeunes gens, voyant leurs

anciens esclaves bien vêtus. grâce au pro-

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duit de la vente des diamants. alorsqu'eux-mêmes étaient mis comme des

mendiants, maugréèrent. AIors, saint Jeanfit apporter du bord de la mer des roseauxet des pierres et les changea en or et en

diamants. Sur son ordre, les orfèvres dela ville examinèrent pendant sept joursI'or et les diamants ainsi fabriqués. etquand ils eurent déclaré n'en avoir jamaisvus d'aussi purs. saint Jean les donna auxdeux jeunes gens en leur disant que,puisqu'ils regrettaient leur richesse, ilsen posséderaient une nouvelle. mais quepar conre. ils perdraient la richesse duciel et qu'ils seraient mendiants dansl'ëternité. Justement saint Jean ressuscitaun jeune homme qui raconta ce qu'ilavait vu dans I'au-delà : la gloire du cielet les châtiments de I'Enfer. où on atten-

dait les deux jeunes riches qui avaientperdu les palais éternels constuits depierres brillantes. ëclairés d'une lumièremerveilleuse. pourvus de mets exquis ettout remplis de joies et de délices. Aucontraire. les attendaient les vers et lesténèbres. le fouet. le Jioid et le ./'eu. la vuetlu Diable, les remords et le désespoir. Oncomprend que les jeunes, changèrentd'avis. surtout quand le ressuscité ajouta :

Et i'ai vu vos anges gardiens qui pleuraient,qui gëtttissaient. O malheureux que vousêtes ! lls rendirent leurs richesses à I'apôtre.

qui donna leur première forme aux roseauxet aux pierres. Et ils obtinrent le pardon.Jean tit maints autres miracles : écrou-.nent du temple de Diane. absorption

ue poison sans la moindre gêne. deuxmorts -ressuscités devant Aristodème. etc.Au moment de m,'.irir. il flt creuser unefosse. s'y coucha. mais disparut dans une

lumière aveuglante et saint Jérôme. qui a

consigné ces prodiges. ajoute que. lorsquela lumière se dissipa. le saint avait disparuet la Jbsse était remplie de manne et I'ondit que cette manne sort quiourd'hui encore

de la fosse, à la manière d'une soLrce.Saint Jean est devenu le saint patron

des faiseurs d'or. Les alchimistes, pour laplupart, sont johannistes. Les Fraternitésdemeureront johannistes.

Les trois clés magiques de la Bible sont :

les, Cinq Livres de Moïse, la Prophëtied'Ezëchiel et l'Apocalypse de saint Jean.

L'Apocalypse passe pour la claviculede la Kabbale chrétienne. le livre mêmede l'ésotér' le et de la magie de Jésusdont Jean ,ut le conf,dent intime. Ellecontient les images et les nombres desThéraphim de I'Arche d'Alliance et desmystères antiques. EIle assemble tout ledogme kabbalistique. il suffit de savoirlire à travers les symboles pour accéderà la lumière voilée par le plus grand mage.

SAINT JACQUES,OU LE CHEMIN

DE LA CONNAISSANCE

Saint Jacques, fils d'Alphée. ./ut sagedans la science divine. Il ressemblait si

fort à Jésus que parfois on le prenait pourlui. On I'appelait le .frère du Seigneur.On dit qu'il fut le premier apôtre. aprèsla mort de Jésus. à célébrer la messe àJérusalem. Un juif I'accusa d'être unmagicien. car son rayonnement étaitextraordinaire. On assure que c'est à lasuite de son supplice que Jérusalem fut

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VALENTIN ANDREAE.

DES ..ROSE

HISTORIOGRAPHE

CROIX "

détruite. Vespasien appelait Jérusalem /epays des mages. Quand Titus prit la ville,après un siège particulièrement affreux,il détruisit le Temple. de fond en comble.

Saint Jacques. en Judée, lutta contre lamagie du mage Hermogène. en employantles mêmes moyens que lui : prodige parun linge magnétisé, bâton magique, etc.Après son supplice par Hérode. on connaîtla merveilleuse aventure de son sarcophagetransporté en Espagne où I'attaquèrentle dragon vomissant des flammes, puisles taureaux-démons, et où il accomplitd'étranges prodiges : lejeune voleur penduressuscité. à Compostelle; Ie jeune illuminéqui se coupa les parties génitales par amourdu Christ, qui mourut et fut ressuscité.Seules les cicatrices de I'opëration qu'ils'ëtait faite lui restèrent toujours, assure

Hugues, abbé de Cluny. A Saint-Jacques-de-Compostelle, parmi les pèlerins, les

miracles ne cessaient pas. Sur la route ducélèbre pèlerinage, saint Jacques apparais-sait parfois le bourdon à la main et lechapeau relevé, la panetière au côté.la coquille sur Ia poitrine.

Saint Jacques fut adopté par les ésoté-ristes de la Kabbale, d'abord pour ses

voyages, son pèlerinage, gravitation sur lechemin du perfectionnement et de laconnaissance. Saint Jacques prêcha danssa célèbre Épître que seuls /es ouvragescomptent. Les alchimistes y virent I'appel

au Grand CEuvre. La coquille fut considéréecomme un signe symbolique de la valeurde l'étoile flamboyante. Nicolas Flamelprit saint Jacques pour patron. C'est àSaint-Jacques-de-la-Boucherie à Paris, auxHalles. que le célèbre alchimiste fit bâtirune tour-clocher. la tour Saint-Jacques,

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qu'il garnit de sculptures mystérieusesdestinées aux ésotéristes. Sur le chemin de

Saint-Jacques. par la rue Saint-Jacques.montent les pèierins de Compostelle etc'est au caveau de I'auberge du Port duSalut qu'officient les fraternités jacobines

et les alchimistes, dans le souvenirvibrant

du supplice de maître Jacques, le grandJacques de Molay. Les Compagnons dudevoir affectionnent maître Jacques, àI'instar d'Hiram.

LA CROIX DE SAINT.ANDRE

Saint André, pêcheur de poissons, étaitau service de saint Jean quand il devint ledisciple de Jésus, avec son frère Simon;c'est lui qui assista Jésus pour la pêche

miraculeuse du lac de Génésareth. Aprèsla mort de Jésus, il accomplit maintsmiracles. A Nicée se tenaient sept démonsqui tuaient les passants. En présence dupeuple, saint André les changea en chienset les chassa. Il ressuscita les morts. Aprèsson supplice, du tombeau de saint Andrése dégagea une manne en forme de farineet une huile odorante, d'après lesquelles leshabitants de la rëgion pouvaient prévoirquelle seroit la fécondité de l'snnée sui-vante. Après sa mort, il apparut chezl'évêque qui avait à sa table une femmed'une merveilleuse beauté et qui était une

incarnation du démon. Il la chassa.(Légende dorée.)

Le supplice de saint André rendit célèbrela Croix en X sur laquelle on I'avaitattaché les membres écartés; cet X symbo-lique. qui est un K grec. fut le signe de

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r r r.i' t"lROBERT FLUDD

235

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maints développements de l'ésotérismechrétien.

Beaucoup de frat,:rnités adoptèrent lesigne de saint Andre. X - Krestos - lePoisson. etc. La croix de Saint-André.La Kabbale reconnut sa valeur ésoté-rique.

Saint André fut particulièrement adopté

par les Fraternités

'd'Écots..

dont la plantesymbolique est le chardon. En Ecosse.existèrent, pendant des siècles, des Fra-ternités de Saint-André-du-Chardon.

Nous en reparlerons à propos d'AlbertDûrer.

Tout laisse à penser que Roger Baconappartenait à une Société semblable etqu'il était membre agissant d'une Fra-ternité Initiatique. En effet, dans son livreAzoth. il présente. sur une gravure lepremier stade du processus alchimique,par un cadavre décomposé, couché dansla cornue de I'alchimiste. Le Soleil, la

Lune, les planètes avec leurs signes alchi-miques correspondants, dominent la scène.Le cadavre lève la tête. reprend espoir.Corbeau Noir sëpare Ia chair des os,tandis que l'âme et I'esprit, petits mons-tres blancs ailés. quittent le corps enmême temps que le dernier souffie. Cetteimage du profane mort. puis ressuscité àI'lnitiation vers la vérité philosophale,symbole Osirien - et surtout la phraserituelle : la chair quitte les or, apparte-naient essentiellement aux sociétés hermé-tiques du Moyen Age.

On répétait que Thomas A Kempis.

Mathia Kornax. Wigelius. Geber. Ray-mond Lulie. Arnold de Villeneuve et beau-coup d'aut;es. appartenaient en secretà semblables Fraternités de savants ott

236

se perpétuaient des mystères, dessacrés, des signes initiatiques.

LE SIGNE DE LA ROSE

Or il est un signe que l'on retrouvait

chez Villeneuve, Lulle. Bacon. Ortholain,et que nous revoyons constamment àcette époque en Allemagne, c'est celui deIa rose.

Le signe de la rose provenait, disait-on,de I'Orient et avait été transmis par lesphilosophes arabes : rose orientale desIndes, rose des thérapeutes et des Essé-niens. Rosaces des mosquées, des Cathé-drales, plénitude philosophique de magni-ficence. auréole de gloire, formationgéométrique d'absolu, de contemplationdivine, selon Pythagore. Le symboleessentiel de Rosaria.

Il existait une Société rosicrucienne enItalie vers 1410. une dans les Flandres en1430, une en Allemagne en 1459 : MichelMaïer donne la date de l4l3 pour l'appa-rition des Rose-Croix en Allemagne, oùils s'affirmeront à Sleswig en 1484. Aegi-dius Gutman. qui vécut en Souabe, àAugsbourg au début du xvre siècle, quipublia des volumes considérables, passaitpour Rose-Croix notoire.

Nul n'ignorait I'existence en Allemagnede ces Fraternités rosicruciennes. Onconnaissait donc I'existence de ces Sociétésde Pensée. sous le symbole de la rose et

de la Croix.Déjà en 1200. les Romqns de Ia Rose, et

notamment celui de Guillaume de Lor-ris en 1260. achevé par Jean de Meung,

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satirisaient les grands. ies religieux. et

contenaient des allusions à I'Hermétismealchimique. Celui d'Arnold de Villeneuvevers 1253. celui de Lulle. le Doctor Illu-minatus. vers 1270. celui de Orthoianus.de Roger Bacon, le Doctor Admirabilis.prouvent que dès 1250 existaient ces

Fraternités rosicruciennes. très utiles aux

alchimistes pour s'entraider. se protéger.pour voyager, pour s'instruire. se commu-niquer leurs travaux, à I'abri des regardstrop cuieux et ignorants des pouvoirspublics et religieux.

On donnait I'exemple à Trêves, ducomte de Falkenstein. membre directeurd'une de ces associations. On I'appelaitle très fameux et tès ëclairé prince etpère des philosophes.

Ce mouvement philosophique parcou-rait I'Europe et attaquait nettement laRome papale et les prélats de I'Eglise. LaRose-Croix précédait

laRéforme. Elle

répandait une gnose dont se montraientfervents les réformateurs. les étudiants, lesmystiques, les hermétistes et ies magiciens.

EIle prônait une vie plus désintéresséeque celle des riches prêtres romains etpoussait à des thèmes philosophiquesinspirés des manichéens et des Cathares.La fureur de Rome, bientôt, contre IaRéforme, s'attaquera violemment à laRose-Croix aussi. On pendra en Allemagnedes frères Rose-Croix.

La Règle de la Rose-Croix prescrivaitentre autres :

- Se tenir en Christ. condomner lepape, vivre chrétiennement.Le bijou symboiique des frères Rose-

Croix était une rose sur laquelle se déta-chait une croix ornée de treize ioyaux :

< Au centre est ie diamant signe desagesse.

< Sur la branche du haut :

le jaspe vert signe de lumière;l'hyacinthe jaune. signe d'amour: lechrysolithe blanc. signe de pureté.

Sur la branche droite :

le saphir bleu. signe de vérité;

l'émeraude verte, pierre de vie;la topaze dorée. signe d'harmonie.

< Sur la branche inférieure :

l'améthyste vioiette, signe de justice ;le béryl bagarré. signe d'humilité;le sarde rouge clair, signe de foi.

< Sur la branche de gauche :

la chrysoprase vert clair, force dela Loi;la sardoine, rayée en symbole debéatitude et la chalcédoine égale-ment rayée, signe de victoire. >(Sédir)

Les frères Rose-Croix fournirent large-ment les rangs de la Réforme. C'est parle canal de cette Fraternité que Faust se

lia d'amitié. de sentiments vraiment fra-ternels et d'estime réciproque, pour lesplus éminents dirigeants de l'état-majorluthérien. et pour Luther lui-même, frèreRose-Croix. Mélanchton. sans doute, I'yintroduisit.

La très iilustre Confrérie des Rose-Croix d'Allemagne était florissante enl5l0 - Son activité internationale etsecrète iui donnait une réelle puissance :

ses chefs voyageaient continuellement.

Les savants, les hermétistes, les occultistesvenaient à eux, leur prestige était grand,entre intellectuels, entre adeptes de lachimie secrète.

C'est d'Allemagne. avec Cornélis

z)t

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Agrippa et Paracelse. que partit le mouve-ment de Pansophie à symboles rosi-cruciens. dont certaines branches prati-quaient l'illumination et se faisaientnommer Les Philosophes du Feu. llsdeviendront en 1570, officiellement. lesFrères de la Rose Croix-d'Or.

Le pasteur luthérien Valentin Andreae(1586-1654) fut I'apologiste de la Frater-

nité des Rose-Croix. tl était chapelainde la cour de Wurtemberg et exposaI'origine de Rosenkreuz.

La vieille tradition des milieux ésoté-riques veut que Rosenkreuz, né en Alle-magne vers 1378. parcourut le mondeavant de parvenir en Orient. Il atteignitle sanctuaire de la Kabbale à Damas etrevint ensuite en Allemagne, avec lemerveiileux dépôt des Éucanes. Il se retiradans son village, tel un ermite, coula unelongue vieillesse. au fond d'une caverne,où la mort I'oublia jusqu'en 1484. Lorsque

beaucoupplus tard (en 1604) on

découvrirace sépulcre. on lira sur le mur cette inscrip-tion : Après six vingt ans. je serai dëcou-vert. Ce sera bien cent vingt ans aprèsle décès du mage.

Les symboles de Rosenkreuz remon-tent-ils. comme on le croit, au temps desGuelfes et des Gibelins? La rose de Para-celse. de Nicolas FIamel. du Juif Abraham,était-elle. sur croix. le signe hiéroglyphiquede I'accomplissement du Grand (Euvre?Le chef des Rose-Croix, un jour. seraKhunrath. de Leipzig.

La légende rosicrucienne date très

certainement du xve siècle. Elle a empruntéà un chevalier de I'Ordre de la Toisond'Or. selon Semler. son nom de Rosen-kreuz. Les Noces Chimiques disent qu'en

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1459. Chr. Rosenkreuz obtint la Toisond'Or. La Toison d'Or est le nom symbo-lique du Grand (Euvre.

A Nuremberg, on se passait sous lemanteau les Noces chimiques de Rosen-kreuz, oir le Grand (Euvre est représentésous le symbole de I'union sexuelle entrele Roi - le Soufre - et la Reine - leMercure.

On pratiquait non seulement I'alchi-mie avec ses symboles transcendantaux,mais aussi la Kabbale, dans les mysté-rieuses Fraternités Rose-Croix.

Le symbole de la rose, symbole préféréde Nicolas Flamel et du Roman de laRose. avons-nous dit, s'étalait dans laPronostication de Paracelse : une rose épa-nouie au milieu d'une couronne, avec lalettre fraternelle F (Éliphas Levi rappelleque la lettre F reproduit à peu près laforme du gamma grec majuscule, queI'on barrait comme F pour écarter lessoupçons.

etqui

était lefameux

G dela

connaissance, la gnose, la géométrie ettroisième lettre de I'alphabet, le ternaireinitiatique.) Paracelse révéla le symboletranscendantal de la rose et de la Croix.

La rose d'Hermès Thot, venue d'Égypteet de Chaldée. Son parfum était la révéla-tion de la vie, sa multiplicité de pétales, lesigne de la multiplication et de I'Unitéparfaite. Tout et Un harmonieux.

La rose portait aussi le symbole du sangdu Christ, pour la Chrétienté avide d'éso-térisme, illuminant de son message dejoie et de vie céleste la croix noire du

Sacrifice et de la Mort.On disait que les docteurs gnostiquesdu Moyen Age, unis en frères et strurs, .

secrètement propageaient la doctrine de

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Philon le Juil Bède le Vénérable. AlManson. selon lesquels Adam n'a chu quepar sa propre volonté. Les Aureae CrucisFratres étaient les théosophes; les RoseaeCrucis Frates recherchaient les mystèressublunaires. Au sommet, un Imperator.élu pour dix ans et qui descendait d'une

lignée remontant àAdam. dirigeait I'Or-

dre. Parmi les lettres magiques qu'ilsinvoquaient. citons. comme pour lesalchimistes. les lettres sacrées : I-N-R-I.mais aussi traduites : In Necis RenascorInteger, Dans la mort, renaître intact etpur !

Les Rose-Croix pratiquaient, en méca-nique. les miroirs d'Archimède. en archi-tecture les Sept Merveilles. les automatesd'Archytas. de Bacon. de maître Albert.Ies miroirs. le feu perpétuel. le mouvementperpétuel. En arithmétique, c'était larythmomachie. I'usage et le secret de la

roue de Pythagore et de ses nombress'él ",'ant jusqu'à celui de Dieu. ËnmL -iue : celle de la nature et de I'har-monie des choses. En - géométrie. laquadrature du cercle. Ils connaissaientles arts divinatoires. Aux plus grandsinitiés. on attribuait I'art de voyager dansles airs et I'aft de se rendre invisibles.

Il est certain que Johannès Faustappar-tenait à ce mouvement de Fraternitéslnternationales. La très illustre Confrériede Rose-Croix d'Allemagne était prospèreen 1510. Son activité internationale facili-tait considérablement les voyages de ses

membres. qui. teis des chevaliers. étaientreçus et tëtés. Nous avons dit le rôle trèsactif dans ce domaine de Cornélis Agrippa.

Faust appartenait très vraisembla-blement à ia même Fraternité cue

Cornélis Agrippa et Théophraste Paracelse.Tout au long de sa carrière. il parle de

ses frères. s'adresse à eux. est entouréd'eux. Le magicien eut toujours autourde lui des amis. des adeptes. des étudiants.qu'ii traitait fraternellement. Tous lestémoignages le conlirment.

Admirateurs. ses

/ières ne I'abandon-nèrent jamais.Faust bénéficia toute sa vie de I'appui

de puissants seigneurs. il eut même I'amitiéct la protection de moines abbés qui lerecevaient volontiers dans leurs couvents.ll fut sans cesse environné d'étudiants.d'amis fraternels et c'est un des plusbeaux traits de sa destinée. Les ( Frater-nités > en sont certainement la causesecrète.

Dans ces Fraternités. les travaux sDé-culatifs tournaient autour des forcessurnaturelles. Johannès Faust se sentait

vivement attiré par semblables problèmes.Il devait exceller dans Ia discussion.Les chroniqueurs rapportent qu'on le

qualifiait de spëculateur. Manlius ajoute :

Il vagabondait à I'aventure et disait beau-coup de choses mvstérieuses.

Les < Fraternités >, comprenaient des

compagnons. des maîtres. des maîtresélus qui se donnaient entraide et bonaccueil. hospitalité d'une ville à l'autre.

Ces réseaux secrets expliquent commenton pouvait entreprendre de voyager en

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ces rudes xve et xvte siècles. où lesmoyens de transport manouaient. oir le bri-gandage sévissait, et oirl'état descheminsétait dépiorable. Les étapes. comme ceilesdes moines dans leurs couvents. étaientorganisées. En premier lieu se voyaientsur route et d'auberge en auberge, les

ouvriers-compagnons. qui. leur apprentis-sage terminé. faisaient leur tour d'Alle-magne, allaient finir de s'instruire dans laprofession par un voyage éducatif etprofessionnel. culturel aussi, qui marquaitleur carrière débutante.

En même temps se rencontraientles étudiants-voyageurs. Les scolasticivagantes que nous avons décrits.

Johannès Faust acquit parmi euxune célébrité soutenue qui. de I'avis deshistoriens allemands. lui survécut assezlongtemps. Les Universités du MoyenAge échangaient ainsi les étudiants. Le

Tour d'Europe était organisé.Ensuite. voyageaient les savants, les

écrivains. ies astrologues. qui allaientvisiter les princes et les personnagescélèbres. Ils demeuraient des mois, quel-quefois des années auprès d'eux. vivantde leur générosité. leur apprenant leursconnaissances, leur apportant les nou-velles.

On voyait sur les bords du Rhin uneautre ( Société Fraternelle ) très active.celle des Frères du Libre Esprit. Le mou-vement était parti de France. Un théolo-gien de Paris. Amaury de Bène (à la fin

du xtle siècle). enseignait que Dieu esttout, que chacun participe à la divinitédu Christ, incarne le Saint-Esprit. ce quile dispense des sacrements et garantit.étant Dieu. qu'il ne peut pécher.

240

L'évêque de Paris obtint du papeInnocent III, la condamnation de cesFrères que Philippe Auguste condamna en12l0 et qui se réfugièrent en Suisse et enAllemagne. oir leur secte se développasurtout parmi les étudiants en philosophie.Cette primauté individuelle de I'Esprit

saint permettait toute liberté. sapaitI'autorité : on en vint à la communautédes femmes et à tous les excès. Les Ada-mites d'Autriche pratiquaient le nudisme,sous prétexte de revenir à des mceursédéniques. A Magdebourg, ils furentLuciferiens et se mirent à encourager lasorcellerie.

Il demeure parfaitement possible quel'étudiant Johannès Faust, qui habitaMagdebourg, ait appartenu à cette secte.On y invoquait ie verset de saint Jean :

II faut adorer Dieu en esprit et en Vérité(IV. 24). Daniel Rops qui les étudia,

consigne que les autorités en tout pays lesfrappèrent avec une extrême sévérité.

Dans ia région Rhénane, ces Frères duLibre Esprit. à tendance panthéiste, fusion-naient avec les begards, portant habitgris. ainsi que les béguines, très florissantsà la fin du xIIIc siècle. Le Concile de Viennede l3ll les dénonça, mais Daniel Ropsrapporte qu'ils florissaient durant lexrve et le xvc siècle. d'oir le célèbreBéguinage de Bruges, contre lequels'acharna I'Eglise. Ces mouvements pré-cèdent et annoncent la Réforme qui sortirade Ieurs rangs.

On trouvait aussi des Vaudois, queI'lnquisition n'avait pu exterminer et quiréapparaissaient sous le nom de FrèresApostoliques. Cette secte hérétique avaitété fondée par un franciscain défroqué,

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I

le frère Segarelli, qui qualifiait l'Église derepaire de Satan, antre du Démon del'orgent et annonçait sa chute et sa dispari-tion prochaine. La région cie Parmê enabondait. On brûla le frater Segareili etses principaux adeptes. ce qui eut poureffet de multipiier ses disciples, Fra Dolcinoprit la tête du mouvement. ll faliut unevéritable croisade.

Autour de Louis de Bavière, on avaitvu beaucoup de ces fraticelles hérétiquesqui faisaient école. Jusqu'à la naissancedu -protestantisme, écrit Daniel Rops(L'Ect-rsr DE LA C,c.rHÉnnel-e ET DE LACnolsnnr), cette fermentation ne devaitpas cesser.

Les troubles politiques qui suivirent lamort de Frédéric II et la disparition de lamaison des Hohenstaufen ame nèrent.avec le morcellement des provinces. undéchaînement de convoitises, la démora-lisation du clergé, des luttes entre lesprinces, qui grandirent avec la politiqueégoïste des Habsbourg. La bourgeoiiiedevenait une classe très influente, riche.L'artisanat florissait au sein des Corpo-rations. La poésie des Corporations. dànsle Weistersang, en divers dialectes, suc-cède aux lieder chevaleresques dépassés

et introduit dans le peuple ie goùt^de lapoésie et des traditions.La poésie et la musique participent

du fondement même du caractère qer-

LA ROSE.CROIX

manique. Les maîtres-chanteurs (ceuxd'Augsbourg et ceux de Nurembergfurent illustres) au xrve siècle répandireniles fêtes. multiplièrent les récits chantés,imaginèrent concours et défis. oir s'affron-taient buveurs et chanteurs, sous la

bannière des métiers.Hans Sachs, Hans Rosenbliit. HansFolz, les trois Hans, comme I'Histoire lesappeia, un poète, un peintre et un barbier,donnèrent le signal de I'essor de ces jouteschantées populaires, dont les Allemandsse montrèrent pendant des siècles trèsfriands. Les maîtres chanteurs main-tinrent les chants historiques, les chantsnationaux d'indépendance, des combats(le chant des Halb Surer en 1380, sur lavictoire des Suisses sur les Autrichiens,est une véritable chanson de Geste).

Honneur à nos forêts. honneur au

chant des preux. célébrons le travail dumeilleur ouvrier de la Corporation, chan-tons. buvons, fiers camarades, dansonsamis et frères!

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I

ALBERT DTRER.

ET LE GOÛT DU FANTASTIOUE

C'est à Nuremberg et certainementdans une < Fraternité > rosicrucienne.qu'Albert Dijrer fut initié.

Il était I'aîné de Faust. Sa célébrité

attirait tous les regards. Son caractère,son inspiration fantastique. le rapprochentsinguiièrement de Johannès Faust. C'étaitle fils d'un orfèvre hongrois et bien queson père le destinât à I'orfèvrerie. ilfit ses études de peintre et de graveur.Compagnon à dix-neuf ans. il fit, selonI'usage, son Tour d'Allemagne, alla visiteries grands artistes de Bâle, Colmar,Strasbourg. pendant pius de quatre années.

il termina ses voyages, en ayant passion-nément observé le monde. ramenant unesprit d'âpre critique du monde médiéval,à la veille de la Réforme et de la Renais-sance. Il passa du côté de ceux qui cri-tiquent. qui espèrent des temps absolu-ment neufs. Il cherchait. tout en respectantle talent très travaillé des Anciens. une

nouvelle manière de dessiner, une nou-velle façon de voir et de peindre. Cetterencontre du gothique, ses angoisses. ses

tourments, et une vision plus sereine,vouée à plus d'espérance. donnèrent àDiirer un style qui prépare la Renaissance.ll admirait la nature. Il était devenu undes meilleurs paysagistes d'Europe. Aprèsavoir travaillé à Venise et appris la formechez les grands maîtres italiens. il se

retira dix ans à Nuremberg, oir il tra-vaiila avec acharnement. Il ne perdaitpas de vue les thèmes populaires deI'Allemagne du Moyen Age et demeura

fervent des vieilles légendes. des chevau-chées, avec des pointes macabres. Iltravailiait pour l'électeur de Saxe, Fré-déric Le Sage, acquis aux idées neuveset qui protégeait et sauvera Luther. Pourson château de Wittemberg, il composasept panneaux des Douleurs de la Vierge,d'un pathétique extraordinaire.

Le mélange de réalisme et de fantas-tique qui I'anime, il I'exprime en deuxrecueils de gravures sur bois qu'il accom-plit de 1458 à 1510, L'Apocalypse et LaPassion, qui eurent un retentissement

considérable, tant la puissance dans ledétail. la richesse de l'évocation. lacruauté de I'observation, I'aspect infernalnuancé d'ésotérisme et de mystère, enro-baient cette æuvre hallucinante.

j,

;,I

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Dûrer, comme la plupart des intellec-tuels de cette époque. se consacrait àl'ésotérisme; il ne pouvait que s'associeraux recherches philosophiques des alchi-mistes. Il est certain que le jeune peintreacquit la sagesse des symboles de I'Occul-tisme dans une des sociétés secrètes qui

existaient enAllema-ene

etpeut-être

dans une Fraternité de Saint-André-du-Chardon d'Écosse (vor son portraitavec un chardon). Ses gravures de I'Apo-calypse abondent en symboles ésoté-çi',r1s5. On y sent sa pensée avide de:, iter le secret des choses.

Jette indépendance d'esprit. cette adhé-sion à l'ésotérisme des alchimistes. cesreflets quelque peu infernaux ne fai-saient-ils pas de Dtirer un frère aînépour Johannès Faust qui. souvent. allaséjourner et travaiiler et s'instruire àNuremberg et qui pratiqua certainement

les travaux des mêmes sociétés secrèteshermétiques? Sa fameuse gravure Melan-colio. oit I'ange de la Science est couronnéd'acacia et porte en main le compas,voit devant lui la pierre dégrossie, tandisque la règle et le maillet sont à ses pieds. letableau de Pythagore, derrière lui, s'éclairede l'étoile au sommet d'un triangle derayons. Le sens en est évident.

En 1512. Dûrer a été présenté à I'em-pereur Maximilien qui lui commande des@uvres. L'empereur se croyait le descendantd'Osiris et poussa vivement Albert Dûrerdans des sujets chargés d'ésotérisme.

L'initié va dès lors s'y consacrer : leChevalier. la Mort et le Diable, témoigneque Ie chevalier à la recherche de la véritétranscendantale. n'est détourné de sonchemin ni par l'Enfer ni par la Mort.

Cette extraordinaire composition, dra-matique et réaliste, symbolique à la fois,avait ceci de surprenant que I'artisteavait donné au chevalier les traits deFranz de Sickingen - nous I'avons dit -e Bailli, vrai chevalier allemand, grandsoldat, qui avait protégé Johannès Faust(voir notre reproduction).

Le sujet traité, son acuité frisant l'épou-vante, comportent bien le climat moraldans lequel vivaient Faust et Diirer.

Le peintre ne choisit certes pas Ia voiesatanique de Johannès Faust et malgréson détachement total des contingencesacquises. malgré ses idées < d'avant-garde >, malgré son avidité à percer lemystère profond de la vie, il ne se dépar-tait pas de sa prudence. Ayant totalementadhéré aux thèses de Luther, il n'entendpas pour cela scandaliser ses contempo-rains et se réfugie dans la réserve. Les

dernières années de sa vie le montrentreplié sur lui-même, ayant acquis unesagesse philosophique oir il trouvafapaisement. Il a adjuré, sans effet,Erasme de secourir Luther. ll achevasa vie à Nuremberg, dans la quiétudeet le travail. Il y bâtit son æuvre commeune grande architecture idéale, rempliede secrets. La cité idéale de Justices'entrevoit souvent dans ses compositions.La douleur a aussi sa plac . douleur desmassacres perpétrés au nom du Christ.Il fut enterré au cimetière Saint-Jean deNuremberg, le 6 avril 1528, mort à

cinquante-six ans, Johannite jusque dansson dernier sommeil. Johannès Faustaimait se rendre à Nuremberg.

Le réalisme de Diirer où la terreur, lamisère, le fantastique, se jouent dans le

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merveilleux. avec le désespoir et la souf-france, n'est-il pas le décor parfaitementadéquat à la chevauchée terribie de Faust?Lorsque Rembrandt peindra le poruaitde Faust, ii mettra sur les traits de sonvisage cette tristesse que I'on voyaittoujours sur la figure des ésotéristes etqu'Albert Diirer a tracée sur maintsportraits.

L'æuvre de Dùrer exhale cette infinielangueur, celle des magistes. celle des scep-

tiques et des savants qui savent. Etait-ceI'immense tristesse de la foi perdue.I'influence de la débauche et la proximitéde I'Enfer, ou bien une cicatrice ingué-rissable, de la grande peur de la fin dumonde? Le fruit de l'épouvante vouluepar l'Église? La certitude du châtimentet le refus définitif des joies de ce monde.aussi bien que de celles du repos éternel?Il n'y a pas de félicité pour les hommes. LeDiable, est cruel. Dieu nous abandonne à

lui.Les peintures et les gravrues d'Albert

Diirer sont extrêmement Faustiennes.

LE DIABLECF/À,Z LES RÉFORMATEURS

DE \ryITTEMBERG

L'Université de Wittemberg jeta unvif éclat au xvle siècle. Elle avait étéfondée par Frédéric, Électeur de Saxe,prince ami des lettres et des arts. Ill'avait ouverte en 1502 et demanda conseilà Staupitz, vicaire Général des Augustins,

maître de Florence et doyen de la Facultéde Théologie. C'est lui, qui conseilia le

choix des professeurs. notamment celuidu jeune moine exalté Martin Luther. Onlui confia la chaire de philosophie. Lajeunesse vint en fouie pour I'entendre,tant sa parole était claire et sa penséeenflammée. Luther devait y être nommédocteur. La cérémonie du l6 octobre1512, au cours de laqueile on lui remitses insignes de docteur. fut présidée parAndréas Bodenstein, le célèbre et ori-ginai Carlstadt. On attaqua fort les

Pères, et I'on en paria sévèrement dansles milieux théologiques. notamment àErfurt et à Cologne, où l'autorité scolas-tique n'était pas discutée. Au contraire,Reuchlin, le kabbaliste Capnion, se

réjouissaient beaucoup. Mais ne racontait-on pas qu'à Erfurt, le frère Johann Langeavaitjeté son froc 1ux orties pour prendrefemme? Et n'enr )yait-on pas le frèreLuther pour calmer les querelles incen-diaires qui envenimaient déjà le couventde Neudstadt?

La peste s'abattit sur Wittemberg, etla moitié de la population dut s'enfuir.

Johannès Faust avait de la famille àWittemberg. Il y venait d'Erfurt, pourhabiter une maison que lui avait léguéeson oncle : c'est là qu'il connut les chefsde la Réforme, et qu'avec eux plus oumoins, il se lança dans la magie.

C'est à Wittemberg autour de Luther,que se trouvaient les esprits avancés, dontie mouvement frondeur, excité par Ulrichde Hutten et par Melanchton, prenait lenom de la Réforme. Intelligent, érudit,gradé de I'Université de Heidelberg, Faustdont on sait le mordant, I'esprit frondeur,

fut accueilli par eux à bras ouverts.C'est ainsi qu'il connut et qu'il approcha

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Luther. D'enthousiasme, Johannès Faustadhéra au mouvement révolutionnairequi partait de cette ville même de Wittem-berg, où il venait étudier.

Le premier acte du moine Luther etqui connut un immense tetentissement,fut de nier le plincipe d'autorité, en se

séparant de I'Eglise. Le second futd'attaquer, et I'on sait comment la ventedes indulgences nécessaire à l'édificationde la Basilique Saint-Pierre, lui offritune cible toute trouvée et facile à attein-dre.

Quand Charles-Quint apprit que lepetit moine de Wittemberg venait dis-cuter à Heidelberg avec le légat du papeCajetan et qu'un prince important, Fré-déric de Saxe, le soutenait, que ses parti-sans. Ulrich de Hutten et Franz vonSickingen entre autres, le défendaient âpre-rnent, il tenta d'apaiser le mouvement. Lejeune empereur se montra très énergique,

à Worms. On se rappelle comment,malgré I'apostrophe de I'empereur, onne put apaiser le moine vengeur réfor-mateur et comment il fut déclaré héré-tique, mis au ban de l'Empire, dénoncépour ses thèses favorisant la révolte et lecrime.

Le mouvement de la Réforme redoubladès lors. Le lancement de la Bible imprimée, que Luther avait traduite en alle-mand et que l'on considère comme unchef-d'æuvre littéraire fondamental dela langue allemande classique. fut l'élé-

ment majeur de cette campagne trèssuivie et grandissante, écoutée tant dansla noblesse que dans la bourgeoisie desvilles et dans le peuple.

Luther aura des disciples plus violents,

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plus audacieux, plus révolutionnaires quelui : Zwingle, Karlstadt - que Lutherchassera - Munzer. Une vague illu-ministe, celle des anabaptistes, déferleraalors, entraînera des révoltes, des meurtres,commettra mille abus. Une véritableinsurrection ensanglantera I'Alsace, laSouabe, le Tyrol, celle des brigands et

mercenaires du Diable.La magie triomphait.Il ne s'agissait plus rien de moins que

de renverser les princes. Luther, consternéde tout cet incendie qu'il avait déterminé,fulmina. accusa. freina. Il traita les révol-tés de véritables loups et réclama puni-tion. Ce furent les paysans qui furentmassacrés. Les anabaptistes furent envoyésau bûcher. Mais la Réforme s'installadéfinitivement en Allemagne, soutenuepar les princes. Les femmes s'y ralliaient.Les Universitaires, les maîtres, les laïcs,tous les esprits avancés s'y précipitaient.Johannès Faust s'inscrivit dans ses rangs.La Réforme I'adopta pour son brio, sonérudition, son autorité parmi les étudiantset ses connaissances assez étonnantes enmagie.

Philippe Melanchton et Ulrich deHutten, Carlstadt, séjournaient à Wittem-berg, attachés à Luther dont ils étaientdevenus les plus fervents disciples. Toutun groupe d'intellectuels donnait le tonde la campagne du Réformateur.

On peut juger de l'esprit qui les animait,par I'apostrophe d'Ulrich de Hutten au

pape Léon X pour soutenir Luther :C'est toi, Léon Dix, c'est toi qui es unrenerd, qui as volé Ia Germanie ! Va, leChrist ne t'entend plus, tu n'es qu'unmenteur! L'Evangile t'a toujours dëplu,

L'ANGE DE LA PHILOSOPHIE. COMPAS EN MAIN. SCRUTE LAcuBreuE, r,'Érotrn A crNe BRANCHEs, t'Éeurnne, rn c,c,RRÉ

counoxNÉ p'AcAcIA. I-'AIR SoNGEUR. c'Esr LA "MÉL{Ncrcrrrn "ALBERT pûnrn, qur Érerr MEMBRE o'uxn rnetnnxrrÉ.

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t!-ran que tu es! Tu as avalé I'Allemagne.Dieu la tire de ton ventre. Tu as soufflé.extorquë notre argent... Les malëfices.les fables. tlont toi. Dix. et ies ancêtes.nous repaissent. avaient amolli nos crurs...Qu'appelles-tu liberrë de l' llglise ? La Jàcuttéde nous voler sans doute? Il n'y a que toi

d'hërëtique. Va. Dix, n'oublie pas que laGermanie nourrit conte toi des lions.s'il ne suffit pas de ses aigles. Tu es devenulion, îu voudrais nous manger,.. Tescardinaux sont des gloutons, des libertins,des ivrogncs.

Ulrich de Hutten réclamait que I'onpassât à I'action. Il voulait que l'on prîtles armes contre I'archevêque Albert deMayence. Un groupe de ses amis, /esgantelets de .fer. se disposait à brandirles épées. On peut juger de l'état d'échauf-fement des esprits.

Johannès Faust fut donc adopté par

Mélanchton et Hutten. Il apportait sonplein concours. son érudition de théolo-gien, sa volonté révolutionnaire anti-religieuse, ses tendances de magiste, àla poignée de convaincus agissant aunom du moine noir.

Des princes excédés des dîmes donton les accablait. vinrent appuyer Lutheret ses amis. Faust s'y fit de puissantesrelations. Mélanchton et Hutten furentpendant longtemps ses amis. avec ceuxqu'il connut à Wittemberg, tel JonasVictor. médecin astronome. mathéma-ticien et magicien. qui lui écrira plus

tard en I'appelant Très cher Monsieur etFrère (ce qui indique qu'il faisait partiede la même Fraternité que Faust) etauquel il rappelait les années de Wittem-berg; Jonas lui écrira notamment un jour :

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Pour moi, .ie ne vous ëgalais pas alors.et comme vous le savez bien, j'ëtudiaisla théologie. Cependant je parvins plustard à vous égaler tlans votre art, et aprèscela, vous m'avez consulté sur plusieurschoses.

Jonas Victor demandait en effet à

Faust comment il rédigeait ses Calen-driers magiques (tous les astrologues enfaisaient autant et vendaient le bulletinprophétique de leurs prédictions. Nos-tradamus y fera fortune) et comment ilparvenait à tant d'exactitude, pourannoncer le temps, la lune, les présages.Faust répondit par une pirouette. ne tenantpas à révéler sa méthode astrologique. Illui déclara qu'il en avait recueilli lesnotions pendant son vo),age dans les astres.

Faust sera fier de son art magique qu'I|travailla en bonne école, avec la plupartdes philosophes de Wittemberg.

Ulrich de Hutten, né au château deSteckelberg, non loin du Mein, issu d'unefamille noble, était sensiblement du mêmeâge que Johannès Faust. On le fit entrerdans la carrière ecclésiastique. Il la quittapour se vouer aux Lettres. Il connaissaitle latin en savant. En 1517, I'empereur

Maximilien lui décernera le laurier poé-tique. Il goûtait la vie errante des étudiantset des intellectuels qui vont étudier ouprofesser et se faire gonnaître de ville enville. On le trouve à Erfurt. oir il fut le

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disciple de Crotus Rubianus. puis à

Cologne. En 1506 il obtint à Francfortle titre de maître ès arts libëraux. La litté-rature entrait dans une opposition totaleaux enseignements de I'Eglise. Les pam-phlets de Hutten contre la PaPautéfurent vite célèbres.

Cet humaniste qui aimait son siècles'enivrait du goût de la vie retrouvée :

O siècle! O Lettres, c'est une joie devivre !

Il fut I'inséparable admirateur, le dis-ciple et I'ami de Luther. Ii devait mouriren 1523.

Murner plus âgé. était le type même del'ancien, l'æil fiévreux. celui de i'étudiantnomade querelleur. qui promena à traversI'Europe , . , théories virulentes des Réfor-mateurs a\ant de s'en séparer et de leshonnir - autant il honnissait l'Église.Les doctrines les plus extrêmes lui sem-blaient acceptables. Ses volumes de dis-cussions théologiques, ses pamphlets aussi.

avaient succès dans les Universités. L'Evo-cation des Fous,la Corporation des Friporu,et Ce Grand Fou de Luther. demeurentcélèbres. Lessing salue Murner commel'écrivain le pius expressif de son temps.Il a quelques ressemblances avec Faust.

On voyait aussi à Wittemberg, HansSachs, cordonnier de son état. et quitrouvait large audience dans le peupie.avec ses Contes pleins de verve. sesjoyeux écrits. ses Pièces cle Carnaval.Il apportait son entier concours à Luther,qu'il consacra dans Le Rossignol de Ll/it-temberg.

Le < doux > Philippe Schwarzed. dit< Mélanchton )). qui recevra souventFaust chez lui, était beaucoup plus jeune

que Faust. Il devait mourir à Wittembergfort àeé. Son oncle était Reuchlin.Mélanchton avait réussi brillamment àI'Université de Heidelberg oir il fut, dit-on, bachelier à quatorze ans. Il était pro-fesseur à Wittemberg, grand ami etdiscipie de Luther qu'il accompagna en1519 au Colloque de Leipzig. Il rédigeraen 1529 la Confession d'Augsbourg, il

demeurera donc au premier pian de laRéforme. On le surnomma PraeceptorGermaniae. C'est lui que François Ierfit venir à Paris, en 1535. pour_apaiserles docteurs en Sorbonne. mais I'Electeurde Saxe lui interdit d'y aller. Le roid'Angleterre le convoqua aussi.

L'Allemagne du xvte siècle avait uneprédilection pour les réunions d'étudiants,aussi bien que pour les fêtes de travail-leurs, les concours de tir ou de musique,les banquets. En Bavière, à Schoendorf,un paysan, Konrad, franc buveur et bonfarceur, qui semblait rire de tout, mêmedu curé, fonda ia Confrérie du Tonneau.avec de francs compagnons. A chevalsur un tonneau, il professait la magie,faisant des prophéties. accomplissant desprodiges. Le duc de Wittemberg ayantaugmenté I'impôt du vin, Konrad I'atta-

qua dans toutes ses con/iéries du Ton-neau. Quand Luther parut. les magistesse rangèrent immédiatement à ses côtés

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pour délivrer I'Allemagne du joug de Iapapauté. Konrad souriait toujours. L'Em-pereur le fit condamner et lui coupa latête.

Quelques années auparavant, I'em-pereur avait fait dissoudre aussi une con-frérie quasi magique. qui avait pouremblème... un soulier. La bière coulaità flots dans les confréries et échauffait

les esprits.C'est là, que Faust trouvait des auditoires enthousiastes pour ses discourset ses précieuses expériences de magie.

Et les buveurs brocardaient... I'Anté-christ, le Pape-Ane,le Moine-Veau, jouan'le Pape et la Truie, s'amusant de censottises, farces et gaudrioles.

La campagne de Luther contre lecélibat des prêtres et contre les désordresdes couvents amenait de nouveaux frèresaux confréries. Les libations étaient géné-reuses.

A Brême, une mascarade où figuraientle pape, les cardinaux, les moines, déclen-chait les rires. A Zwickau, le jour duMardi-Gras, on chassa à travers la villeles moines, et les rieurs engluèrent deplumes de coq la statue de saint François.A Elembourg, un rieur costumé en curé,monta sur un âne et fit ainsi son entréedans l'église parmi les farceurs, Le pillagedes monastères aggrava ces manifesta-tions.

Luther, qui se réjouissait de ces bouffon-neries, s'en amusait à table, en buvantavec ses compagnons, mais réprouva cesexcès, bien qu'il

eûtvoué

magiquementles monastères aux flammes de I'Enfer,aux lèpres de saint Antoine, au charbonet aux plaies de I'ancienne Egypte. Par

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toute la Saxe, il n'y eut plus de chantsreligieux, plus d'encens, plus de lumièressur les autels, les vitraux étaient cassésà coups de pierre.

La place était faite pour le Diable.

LE MOINE MARTIN LUTHER

ÉTaTT.n, PoRTÉ PAR LA MAGIE?Wittemberg 1512. Martin Luther était

le fils d'un modeste ouvrier mineur,fort pauvre, d'Eisleben, oir il était né.Avec ses parents, il vécut ensuite à Mans-feld où, leur situation s'améliorant nette-ment, ceux-ci purent lui donner uneéducation décente, mais sévère, la dis-cipline de l'école étant aussi rigoureuseque les traitements paternels. C'est àMagdebourg qu'âgé de quatorze ans,on l'envoya à l'école latine, plus dureencore, où il mourait carrément de faim.

Il travaillait bien, partit ensuite à I'Uni-versité d'Erfurt, où il apprit la scolas-tique. II y découvrit les richesses d'unevaste bibliothèque universitaire et pourla première fois lut la Bible. Son gradede bachelier obtenu en 1503, il passamaître en philosophie la même année.

C'est très probablement à I'Universitéd'Erfurt qu'il rencontra pour la premièrefois l'étudiant Johannès Faust, brillantcomme lui, et franchissant aussi sesgrades universitaires. Une fièvre de dévo-tion dévorait le jeune théologien Luther.

Bien qu'il fût un aimable comfragnon,aimant la musique - il chantait d'unejolie voix - la tristesse gagnait son âme.L'enseignement religieux, puis philoso-

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phique de I'Université l'accabiait de ses

rigueurs. Les conséquences du péché lejetaient dans une extrême frayeur; sanscesse, il évoquait la justice de Dieu. Ilparticipait à I'angoisse du siècle, c . : desgrandes peurs imposées par i -glise.appréciait les dogmes, mais s'adonnaitavec fureur à la connaissance des Anciens.Un jour, la foudre tomba près de lui,elle le précipita dans un monde oir lamagie avait sa part. Il se fit moine etreçut les ordres augustins en 1507. Maisson trouble intérieur ne faisait qu'augmen-ter. Il disait : Priez pour moi. car chaquejour m'amène une misère de plus, chaquejour .ie fais un pas vers l'Enfer.

L'électeur de Saxe, Frédéric le Sage,le fit mander à son château de Wittem-berg, en 1508. pour y enseigner à I'Uni-versité qu'il fondait. Son érudition surla Bible et les paroies du Christ tenait duprodige. Son cours de philosophie subitI'influence de saint Augustin. En 1512,

il fut nommé docteur en théologie. Sonexaltation devint véhémente.On sait commen! son retour à Erfurt,

ses voyages à Rome, à Milan, car ilallait à travers I'Italie, de couvent encouvent, oir il était royalement reçu,I'impressionnèrent péniblement sur lesinjustices et les mensonges observés çàet là. Revenu à Wittemberg, ses sermonsretentirent et attirèrent l'attention. Ilétait un prédicateur exceptionnel, douéd'érudition. de séduction et d'une voixqui déversait les charmes. Il devint iepersonnage le plus influent de I'Univer-

sité. Bien qu'il s'attaquât aux reliques etau trafic des indulgences, Frédéric leSage Ie tenait en haute estime.

Luther s'était prononcé d'abord commele continuateur et le disciple d'Érasme.Au nom de I'humanisme, il critiquaitcomme lui, les erreurs de la théologiescolastique et le genre de vie des princesde I'Eglise. de même que I'ignoranceprétentieuse des moines.

En 1516 va éciater publiquement etviolemment 1'affaire des indulgences. Elletroublera profondément I'Allemagne. Onse rappelle les faits : ie pape Léon X, pro-tecteur des artistes et des poètes, iui-mêmesensible au grand fft, cherchait desressources pour terminer l'église Saint-Pierre-de-Rome. Il usa de la vente desindulgences (ce qui fit dire plus tard àHenri Heine que les indulgences ayantété surtout vendues aux beiles pécheressesd'Italie et d'Allemagne, c'est avec l'argentdu stupre que la basilique de la chré-tienté a été bâtie). Albert de Brande-bourg, prince-électeur de Mayence, arche-vêque de Magdebourg, administrateur

du diocèse d'Halberstadt, archichancelierde I'Empire et primat de Germanie,était chargé de la gestion de cette affaire.Il s'adjoignit un certain Jean Tetzel,très attaqué et trafiquant sans scrupules.Martin Luther fulmina. Son Sermonsur les Indulgences, en octobre 1517, fitsensation - Tetzel répondit, invoquala toute-puissance aussi bien temporelleque morale du pape. Luther lui opposales textes sacrés. Le pape exigea unerétractation. Luther donc se rendit le7 octobre 1518 à Augsbourg pour s'expli-quer avec ie légat du pape, le cardinal de

Vio. La querelle fut violente. C'est enl5l9 et 1520 que Luther publiait'sestrois écrits réformateurs, qui devaient

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amorcer la rupture avec Rome. Le pape,le 2 juin 1520. le condamnait.

A Erfurt, les étudiants et les maîtresbrûlèrent ia bulle papale. Il est probableque Faust participa à ces feux de joieet qu'il réconforta Martin Luther. LeRéformateur répondit par un texte célè-bre : Pape, je-t'accase!... Il le qualifiaitd'Antéchrist. Erasme prit fait et cause

pour iui.Après la condamnation de Luther

comme hérétique par la diète de Worms,après sa captivité volontaire chez Fré-déric le Sage au château de la Wart-bourg, où il écrivit beaucoup, il revint àWittemberg, reprit ses sermons en chaire,invectiva les princes qui pressuraientIe peuple et les évêques ennemis du Christ.Le soulèvement du peuple entraîna desatrocités. La répression fut féroce. Enjuin 1525. compiiquant encore sa situa-tion, Martin Luther se mariait : il épou-sait une nonne échappée du couvent de

Nimtschen! Il se retira dans ie couvent.La destinée de Luther s'orienta favo-

rablement lorsque Jean le Constant,frère de Frédéric le Sage, succéda auPrince. Il avait embrassé la Réforme etdonnait la première niace. à S' -embourg,

au Réformateur.Luther se consacrera dès lors, et ju,squ'à

sa mort. à I'organisation de I'Egliseréformée. envoyant des prédicateurs etdes messages en toutes directions. LaProtestation de 1526. signée des princeset États évangéliques, assit le proteston-

tisme. Mélanchton travailla aux côtésde Luther et rédigea avec lui la Confes-sion d'Augsbourg de 1530, la Chartereligieuse des Protestants.

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Faust lisait les écrits de Martin Lutheret se repaissait de la truculence. de la

nassion de ton usitée dans un langagerulaire si intensément allemand. Parfois

ies mots grossiers, la rudesse plébéiennefrappaient de coups les polémiques durude moine augustin prêchant la révolteet insultant le pape. Il s'en prenait violem-ment à Léon X qui I'avait condamnécomme hérétique, notamment au sujetde Léon de Médicis, riche Florentin, amidu superbe Raphaël qu'il chargeait dedécorer d'immenses peintures sa nouvelleéglise Saint-Pierre.

- Cela rappelle, suggérait Luther, /apyramide de Rhodope, qu'une

fllede joie

égyptienne éleva avec le produit de sesprostitutions !

- Encore une Cathédrale bâtie par IeDiable! dit quelqu'un.

Le grand révolté était aussi susceptiblede douceur, de tendresse remplie de sua-vité. Ne I'appelait-on pas le Cygne ma-gique d'Eisleben? Martin Luther aimaittoujours passionnément la musique -l'Eglise ne dit-elle pas aussi qu'il y ade la sorceilerie dans la musique?) -usique parfois terrible, comme, I'hymnevengeur qu'il entonna lorsqu'il entra à

Worms avec ses compagnons. L'antiqueCathédrale frémit à ce chant de guerre,les corbeaux s'envolèrent effrayés deleurs nids au sommet des tours. N'était-ce

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pas plutôt de joie que ces horriblesoiseaux noirs croassèrent en faisant descercles tout en volant autour des clochers?Des oiseaux diaboiiques.

Le chant de la Réforme retentissaitsous les voûtes sacrées. portant bien desallusions à Satan :

Notre Dieu est une forteresse,Une épée et une bonne armure,II nous délivrera de tous les dangers

Qui nous menacent à présent,Ls vlrux vÉcn.nNr nÉlrtoNNous rN vEUT AUJoURD'HUI SÉRIEUSEMENT,

Il rsr enlrÉ or PouvorR ET DE RUSE.

Il N'e PAs soN PARETL AU MoNDE.Votre puissance ne fera rien,Vous verrez bientôt vote perte.L'homme de vërité combat pour nous.Dieu lui-même l'a choisi.Veux-tu savoir son nom?C'est Jésus-Christ,Le vrai seigneur,

Il n'est pos d'aute Dieu que lui,Il gardera le champ, il donnera Ia victoire.

Si le monde était plein de démons,Et s'ils voulaient now dévorer,Ne nous mettons pas trop en peine,Notre entreprise réussira cependant.

Lg pRItcr DE cE MoNDE.Bien qu'il now fasse la grimace,Ne nous fera pas de mal,II est condamné,Un seul mot Ie renverse.

Ils nous laisseront la porole,

Et nous ne dirons pas merci pour cela.La parole est parmi nousAvec son esprit et ses dons.

Qu'ils nous prennent notre corps.

Nos biens. I'honneur, nos enfants...Laissez-les Jaire,Ils ne gagneront rien à celaA now re 'a l'empire.

Lursrn.

Le Démon se tenait-il aux côtés deMartin Luther? Ses diatribes contre le

pape, contre i'Église, sa position d'héré-tique, et même ses polémiques avec leDiable. ses paroles remplies de magien'étaient-elles pas de I'empire même deSatan ?

Pendant des années le théologien Luthers'était penché avidement sur les textesmagiques de la Bible. II y avait puiséune force d'âme incomparable.

Sublime docteur Luther. si naïf. aussiétonné que lorsque avec son père, mineurà Mansfeld. il descendait dans la mine,au plus profond des entrailles de la terrechaude et remontait noir de charbon.

une flamme ardente dans les yeux ! MartinLuther, noir comme charbon, noircomme...

Cordial frère Martin, qui avait accueilliles bras ouverts Johannès Faust à Wittem-berg, qu'il avait adopté dans son grandmouvement de Réforme, car il avaitgoûté son indépendance, mesuré sonérudition. deviné ses pouvoirs en magie!

Magie du parfum et des couleurs desfleurs. Luther avait souvent à la mainun bouquet de fleurs qu'il regardait etqu'il respirait, surtout quand la discussions'envenimait. A Worms. il logeait chez

les chevaliers de Saint-Jean. oir ses amiset disciples i'entouraient. Luther est uninitié des Fraternités.

Un jour, il laissera la robe noire des

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pHILrppE MÉLANCHToN Éralr xÉ pnÈs pu.vTLLAGE or roHlNNÈs FAUsr ET FLrr soN AMr

DANS LA nÉronur.

augustins pour I'armure de chevalier.Il est chevalier de Saint-Jean. Aussi,arrivé à Worms. à la cour de I'empereurCharles-Quint, les chevaliers et soldatsallemands le saluent. lui présentent lesarmes. Quand il endosse I'habit de che-valier. on I'appelle Ie chevalier Georges,à la Wartbourg. Las de la claustra-tion. quand il s'échappa. au printemps1522. il portait la barbe et la chevelure

longue deschevaliers. Son épée

aucôté

montrait - comme pour Paracelse -u'il entendait prouver sa chevalerie

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pacifique, dressée contre I'erreur etnuancée d'ésotérisme et de significationssecrètes.

Quant à la rose à cinq pétales, on laremarque fréquemment dans les æuvresde Luther et sur ses portraits. Tout porteà croire que Luther était Rosr-Cnox,en même temps que CHnvAlteR DE SAINT-JrlN. Nous avons dit ce qu'il faut penserde I'importance à cette époque, des Fra-

ternités tres agissantes et des idéalistesRose-Croix.

LE DOCTEUR LUTHERET LE DOCTEUR FAUST

Widman. qui affirme maints faits prou-vant que Luther connut fort bienJohannèsFaust. a rapporté d'importants récits quenous consignons ici :

< Un jour que le Dr Martin Lutherrecevait des hôtes à sa table, on se mit à

parler du Dr Faust et à rappeler quelques-unes des fredaines qu'il avait récemmentcommises. Làdessus, le Dr Luther ditgravement que ce Faust ferait ce qu'ilvoudrait, mais que, malgré tout, il enserait à la fin chèrement payé. < Car iln'y a pas autre chose en lui qu'un diablehautain, orgueilleux et ambitieux, qui veutacquérir de la gloire en ce monde, malgréDieu et sa parole et aux dépens de sapropre conscience et du prochain. Maisce qui ne veut pas subsister n'a qu'à s'enaller tout droit au Diable. car il ne s'estjamais vu d'animal plus orgueilleux et quisoit tombé de si haut : pourquoi voulez-vous donc que Faust n'imite pas son

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maitre, pour se briser aussi finalement latête! Mais je vous ie dis, ni lui ni le Diablene peuvent se servir de la magie contremoi. Car je sais bien que si le Diabiepouvait me nuile. il y a longtemps qu'ilI'aurait fait; il m'a déjà bien souventtenu par la tête. mais ii a toujours été

obligé de me laisser aIler. J'ai bien souyentappris à mes dëperc quelle sorte Ce c'ontpa-gnon il esl. car il m'a nombre de Jbis sirudement assailli, que je ne savais plussi.j'étais mort ou vivant.ll m'a bien souventjeté dans un tel désespoir que je ne savaismême plus s'il existait un Dieu et queje perdais toute contance en Dieunotre Seigneur bien-aimé; cependant. avecI'aide de ia parole divine, je me suisdéfendu de ses attaques; il n'y a point eneffet de secours ni de conseil dont onpuisse s'aider, si ce n'est ceiui de Dieu.Mais lorsque nous n'avons pas la paroie

de Dieu. c'en est bientôt fait de nous.car le Diable possède alors le pouvoir des'emparer des gerc et de les mener à saguise. >>

n ...I1 y eut encore pendant ce repas.beaucoup de discussions semblables, surce Faust. Entre autres choses, queiqu'undit que le Dr Faust était si habile qu'ilsavait les choses à venir. Luther répondit :

< Oui, le Diable connait les pensées desimpies, car il les leur suggère. Il lit etrègne en maître dans les cæurs de tous leshommes qui ne sont pas défendus parla parole de Dieu; oui, il les tient prison-

niers dans ses lacets, de sorte qu'ii lescontraint à penser, parler et agir selonsa volonté. Aussi n'est-il pas étonnantque Faust puisse à présent prévoir cer-taines choses. Le Diable en a pu facile-

inent deviner de semblabies pendant laguerre de Bavière. car il avait vu que lecomte paiatin Robert était fier et riche,ce qui le rendait audacieux. et aussi quece comte méprisait I'empereur Maximi-lien. tandis qu'au contraire. Maximilienavait un caractère franc et de ia pius

haute noblesse, ce dont il était grandementà louer, et que de ià devait résuiter lagueffe. )

La conversation revint sur Faust.On raconta un de ses exploits :

< Un autre dit que le Dr Faust se

trouvant chez un comte de Bavière,son hôte avait organisé, pour lui êtreagréable. une belle chasse oir toutessortes d'animaux étaient apparus, maisnon d'une manière naturelle. Là-dessus.le Dr Luther dit qu'un des premiersseigneurs de la noblesse le fit inviter unjour à Venise à son château, ainsi que

plusieurs savants de Wittemberg, et qu'ilcommanda pour eux une chasse auxlièvres. Dans cette chasse, un beau groslièvre-renard fut aperçu par toutes lespersonnes présentes. Il se mit à courirdevant eux. et. comme ce seigneur avaitlancé son cheval après lui en poussant descris, le cheval tout à coup s'abattit souslui et tomba mort. En même temps, lelièvre s'éiançait dans les airs et disparais-sait. car il n'était pas autre chose qu'unvain fantôme façonné par le Diable.Là-dessus, un autre dit qu'il savait que,des gentilshommes du pays de Thuringe,

dont il ne dit pas le nom, étaient allésune nuit chasser des lièvres sur le Hôrsel-berg et en avaient pris huit; mais qu'ayantvoulu, à leur retour, Ies suspendre aucrochet, iis les avaient trouvés le lendemain

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métamorphosés en têtes de chevaux, quiétaient une vaine iilusion. A ce propos'le Dr Luther répondit qu'il se pouvaittrès bien que Ie Diable efit ramassé ces

têtes de chevaux à la voirie et s'en fûtservi pour préparer cette plaisanterie,et que probablement le Dr Faust n'avait

pas non plus organisé sa chasse sansarrière-pensée d'y jouer un mauvais tour,car le Diable se raille de toutes les inven-tions des hommes : c'est un esprit pleind'orgueil.

< Un autre, ensuite, dit aussi que ie

Dr Faust, dans un de ses voyages, s'atrêtaquelque temps à Gotha, et qu'ayant eudes démêlés avec son hôte, il se produisitdans la cave de l'hôtellerie un tel vacarmeet de telles apparitions d'Esprits quepersonne, la nuit, ne pouvait y descendreavec une lumière. parce que cette lumièreétait constamment éteinte. Toute la nuit,

on y entendait battre les tonneaux, ce

qui précédemment n'avait jamais eu iieu.Le Dr Martin Luther répondit que c'estla manière d'agir du Diable. Une foisqu'il s'est glissé quelque part, il ne s'enlaisse pas facilement déloger. >

Le D! de Schweidnitz d'Aschersleben,prédicateur, assistait à l'entretien. Il ditque Faust avait un Esprit familier. Unautre convive le confirma.

< Le Dr Luther dit : < Oui, le Diablepeut revêtir la forme humaine, mais unechose certaine, c'est que si I'on invite

ie Diable à venir chez soi. on a de lapeine à s'en défaire. Car Ie Dr Luc Gauric,le magicien d'Italie, avoua une fois, enma présence, devant une nombreuse ethonorable assemblée, que . son Espritlui était un jour apparu et avait voulu

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le contraindre à passer d'Italie en Alle-magne. oir se trouvait un magicien pluspuissant que lui. nommé Dr Faust,auquel ii verrait faire beaucoup de chosessurprenantes. A cette invitation pressante,il avait répondu qu'il n'était pas conve-nable qu'un Diable en chassât un autre.

Ce Gauric cherchait à s'appuyer surl'Écriture sainte et prétendait démontrerque la magie et le commerce avec les

Esprits n'y sont point défendus. car il yest écrit que de la femme doit naître cellequi écrasera la tête du serpent. d'ott I'ondoit conclure que I'homme a la puissancesur les diables, et qu'il peut avoir desrelations avec eux. s'il le désire. Et leDr Luther dit à ce propos : < C'est là,s'il plaît à Dieu, ce que je n'aurais jamaisI'audace de faire. >

C'était au temps où Faust séjournaità Magdebourg chez les chanoines, ses

amis. Il y évoquait les Esprits.Ernest Faligan, qui rapporte ces docu-

ments, fait cette juste observatioî : Enmême temps qu'il se sépare nettement deFaust. Luther s'eforce de mettre ses amisen garde contre la tentation de marchersur les traces de ce dëbauché. Il comprendtl'autant mieux le përil, que CETTE l/olgDANGEREI]SE, IL L'A LIJI.MÊUZ OUVTNTTet que tout le crime de Faust est de l'avoirparcourue jusqu'à ses limites extêmes, aulieu de s'être arrêtë. comme Luther etles docteurs du protestantisme, au point

où l'erreur devenait humainement crimi'nelle et destructive de tout ordre social.Le luciférisme et la magie cérémonielle

sont-ils I'aboutissement des doctrines révo-lutionnaires de Ia Réforme? Faust a-t-ilsuivi la voie de Luther?

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LUTHER ET LE DIABLE

<< Ce ne sont pas làdes contes en I'air, inven-tës pour inspirer lo peur.mais bien des /àits réels.vraiment ef ra.t'ants etnon des enJantillages.comme le pretendent

plusieurs qui veuientpasser povr SavanIS. r>

LurHrn

Luther croyait au Diable. Il le connais-sait, il recevait ses visites. ll parlait cons-tamment de iui.

Le Réformateur était en effet en proie.dans sa cellule du couvent de Wittemberg,à des visions. à des extases. et souvent seplaignait des attaques du Démon qui ne leIaissait guère en repos. Satan joue ungrand rôle dans la Réforme. Luther luidonne parfois la place de I'acteur opé-

rant.Le fils tourmenté du mineur. aux yeuxbrûlants, qui éprouva la misère. quiconnut les heures les plus difficiles de lavie, qui refusa de souscrire aux injustices.aux dogmes acquis, au trafic des indul-gences, semblait prédestiné pour bienconnaître le Diable. Satan est au premierplan dans ses convictions. ses explosions.ses rages.

Le bruit même se répandait en Alle-magne - seion Audin - que Luther avaitun commerce avec les puissances invisibleset des entreliens noclurnes avec Sotan.

C'était parfois un homme vêtu de noir:parfois un grand bouc cornu: ou parfoisune belle jeune fille qui entrait au château

de la Wartbourg, franchissant les portesbarrées de chaînes, les escaliers, ies portesde ler ! Quand on questionnait Lutherà ce sujet, il ne répondait pas.

A quel appei démoniaque faisait échole doux cygne blanc annoncé par JeanHuss sur son bûcher?

Llther conta qu'une nuit le Démonl'ir muer le sac de noix qu'on lui avait

do,. . et que. fort impatienté. il s'écria :Veux-tu bien t'en aller! Le Diable nelâcha pas. Le Diable se changea alorsen mouche. et bourdonna tout autourde la tête de Luther. Excédé. Luther saisitson encrier et le jeta sur I'insecte. L'encrierse brisa sur le mur. On montre encore latache de I'encre destinée à Satan. sur lemur de la cellule. à la Wartbourg.

Dans la querelle du célibat des prêtres,Luther n'invoquait-il pas des textesbibliques, par lesquels il démontrait que lecélibat religieux était l'æuvre de Satan?

Luther racontait même ses entretiens

avec Satan. Il invoquait son témoignage.Ainsi, dans son traité paru en 1521,Missa Privala, il illustra de façon saisis-sante. par une scène diabolique demeuréehistorique. et qui contribua largement ausuccès de la Réforme. le rôle de Satandans son évolution moraie. M. Audina écrit : Ce qu'il v avait encore d'indë-cisiondans l'âme de Luther sur la valeur deste.rtes bibliques, Iomba devant les argu-,nents du Diable. Convaincu par I'Espritdes Ténèbres. le moine ne vit plus dans lesacriJice de la messe. qt une idôlatriepapiste e! cessa de cëlëbrer.

Le moine visionnaire raconte en effet.qu'il s'éveilla un jour à minuit. et queSatan se tenait à ses côtés. Ils discutèrent

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courtoisement. Satan appelait le moine :

docteur éclairë. Luther commente : LeDiable est un rude.jouteur. auquel on résistedi-fficilement. Et le Prince des Ténèbresmena rudement la discussion sur la messe.Ii redoubla son argumentation et démon-tra. se faisant pressant. véhément. Luther

fut convaincu de toutes les erreurs del'Église. Il invoquera souvent cette nuittragique et son entretien capital.

Le Réformé disait parfois qu'un théo-logien doit avoir bataillé avec le Diablepours'élever. se surmonter, accéder à desvues suprêmes: Quand nous n'avons pas IeDiable artuché au cou. nous ne sommes quede tristes théologiens. a-t-il consigné.

Les discipies. les compagnons du grandréformateur. I'approuvaient. car ilsvivaient dans les mêmr illuminations etles mêmes transes spirituelles. Le milieude la Réforme où s'activait Faust.

rendait familier le voisinage du Démonet mieux. savait I'utiliser. On sait quelprofit en fera le magicien.

Un vent d'émancipation souffiait avecla Réforme : Bernhard de Feldkirch.abbé de Kemberg, jeta sa soutane, annonçapubliquement qu'il rompait ses vceux

et se maria. se révélant grand buveuret _qrand mangeur. Le pasteur de Hirsch-feld en fit autant et prit femme. Le maîtreCarlstadt. archidiacre depuis quinze ans.et qui profèssait des idées avancées dans

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l'éelise de Tousles-Saints. malgré ses

cheveux blancs. n'hésita pas à quitter lesordres et à créer un foyer. plus vert quejamais et citant la Bible à faire rougir lestèmmes. ce qui fit bien rire Luther. rap-porte-t-on. Inspiré par l'Ancien Testa-ment aussi. Gerbel de Strasbourg fit

de même. répudiant ses serments et sonhabit.Luther encourageait ces abandons et,

du château de la Wartbourg. lançait defulminantes proclamations de victoire.

On alla plus loin : Bucer se mariaquatre fois. Capito et d'autres évangé-listes mariés prêchèrent que I'homme peutrenvoyer sa lemme et se remarier plusieursfois. si besoin. On prêcha divorce etpoiygamie. On vit des catholiques aban-donner leur femme. prendre des concu-bines et se livrer à tous les excès. Ilsrevendiquaient les exemples bibliques,

en prenant pour noms : les Fils de IaIiberté. A Strasbourg, on accordait .unsecours d'argent et une habitation auxprçtres qui se mariaient et rejetaientI'Eglise.

L'humour s'en mêlait. Erasme souli-gnait en riant les incroyables illuntinationsde i'Esprit saint.

C'est alors que des intellectuels venusd'Italie. négateurs du catholicisme. pro-clamèrent qu'il convenait de nier l'im-mortalité de l'âme. lls allèrent fonderécole à Genève. après avoir traverséI'Allemagne. revendiquant les textes de

Luther.Excédé. I'empereur prit un décret de

condamnation contre Luther. le désignantcomme une créature du Démon. Ilordonna que ses livres fussent brûlés

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publiquement : la flamme est le remèdedes hérétiques. De tous côtés. les reli-gieux s'écriaient : Au _feu! du bois. ducharbon, pour brftler le tëmëraire !

Réfugié dans le château en pleinemontagne, à la Wartbourg, Luther redou-

blait. Pierre à pierre, il démolissaitI'Eglise : la confession. le cuite des saints.la messe, le purgatoire, I'extrême-onction,les væux, le catéchisme... Alors. son dis-ciple Carlstadt, avec Didyme et leursfanatiques se précipitèrent dans l'églisede Tous-les-Saints. de Wittemberg, aumoment de la prière et se mirent à briserles statues. les tableaux. ies images duculte en criant : Tu ne te feras pointd'images taillées ni aucune ressemblancedes choses qui sont aux cieux, ni ici surla terre. ni dans les eaux qui sont sous laterre. On fit de même à Zurich.

Les écoliers brûlaient leurs livres declasse. ils répétaient que Dour arrachert'Êvangile du cæur des'hommes. Satan nepouvait rien inventer de mieux que lesUniversités !

On se doute si cette révolte. ce feu dejoie. cette négation de I'immortalité del'âme enchantaient les jeunes magicienset les fortifiaient dans leur position philo-sophique négative. Luther affirmait Satanpartout : mais Luther n'avait-il pas [ui-même passé un pacte secret avec Luci-l'er.pour son auvre de démolition satanique.certaine nuit historiqne? Après Luther.les magiciens et les amis de Faust choi-sirent délibérément le côté de Satan. LesHébreux firent le pacte d'alliance avec lecruel Jéhovah. Faust sceliera le pacted'alliance avec I'adversaire partout triom-phant. le Prince. Aux dires de Luther. les

gens d'Église étaient des suppôts de I'En-fer et aux dires des papistes, Luther parlaiteu nom du Démonl La partie était jouée.

Quel que fût le camp choisi. on avait leDiable pour maître... Le théologien Fausttrouvait là le dernier chaînon qui, défini-

tivement et sans scrupuies et sans crainte.le liait à ses aspirations vers les sciencesdémoniaques. Le magicien avait le champlibre.

Mais à côté de ses amis de combat, ses

camarades de la Réforme I'entendraient-ils tous de cette oreille? Comment réagi-ront Mélanchton. Luther même, MarcStubner, Nicolas Storch, dit Aleandro,Mi.inzer, prédicateurs aux yeux de feu(un jour Mélanchton accusera Mûnzerd'être le Diable incarné). Jonas. Amsdorf.chefs du mouvement rénovateur évan-géliste ?

Luther disait : Je cc' rais Satan : jesais qu'il ne s'endort pcs, qu'il a I'eilouvert dans les temps de trouble et dedésolation. J'ai appris à lutter avec lui..jene le uains pas (Prêche de retour à Wittem-bourg). Dorénavant. il a dépouillé sesvêtements de prêtre. Il monte à cheval, ilporte la cuirasse de fer des chevaliers.la grande épée. le casque. les éperons. lesbottes de I'homme <i'armes de la Confrériesecrète. Le peintre Lucas Cranach I'airinsi représenté. C'est un roi mage duxvre siècle.

Mais le sang va couler.

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Luther a toujours été superstitieux.Pendant son séjour à la Wartbourg. ilentendait le Diable dans le vieux château.On sait comment ii lança à sa tête unencrier rempli d'encre. Le Diable. eneffet. le persécutait, le regardait ironique-

ment dans sa ceilule. se moouait de lui.Était-ce le Démon de l'archevêque Albert,ceiui qui vendait des indulgences? Démo-niaque archevêque qui faisait le jeu deSatan !

Le roi d'Angleterre Henri VIII. en1520. poussé par le cardinal Wolsey,publia la Défense des Sept Sacrements.dédicacée au pape Léon X. en réponse àI'outrageante Captivitë de Babvlone, dudocteur Luther. II y déclare entre autreslnJures :

Y eut-il .jamais peste aussi nuisible queLuther. pour s'attoquer au troupeau du

Christ? C'est un loup ëchappé de I'Enfer!Un déléguë de Sotan!A cela, Luther répondit aussitôt : "/e

proclome que le roi d'Angleterre est unmenteur el un maraud!... Cette boucheroyale bave Ie mensonge et le poison, ets'adressant aux théologiens ; Courage,cochons que vous êtes: brûlez-moi doncsi vous l'osez!

Quand en 1525 Luther se maria avec lanonne du couvent de Nimbschen. Cathe-rine de Bora, âgée de 26 ans, enceinte. lemonde hurla au scandale.

Rome disait que le fruit de cette union

serait I'Antéchrist puisque, d'après latradition, I'Antéchrist devait naitre dumariage d'un moine et d'une nonne.Quel tapage!...

Au contraire. Luther qui avait écritque le Diable avait fait du célibat une

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tromperie, un piège pour faire tomberd'innocents prêtres dans le péché mortel,accordait sa vie à ses idées. Hélas,le sac de Rome par le connétable deBourbon et son armée luthérienne, surl'ordre de Charles-Quint. vint lui donner

raison. Le pape Adrien VI fuya au châteauSaint-Ange et le connétable fit une écuriede l'église Saint-Pierre ! Hélas aussi, lapeste devait éclater à Wittemberg, d'oùLuther bravait I'empereur et le pape.

Le vieil et terrible EnnemiA l'heure prësente nous menace,Il est armë de pouvoir et de ruse,Il n'a pas son pareil au ntonde,

chantait Luther, quand sévissait la pesteà Wittemberg. Il y défiait Le Princede ce Monde, si puissant, si redoutable.

Diables, sorciers, esprits, superstitions

composaient le milieu oir vivait, oir évo-luait Martin Luther avec ses réformateurs.Son grand ami Albert Diirer lui envoie desgravures représentant d'affreux démons,d'horribles bêtes apocalyptiques, dignesde ses hallucinations.

Luther a confié que, lorsque le Diablelui faisait quelque tour, il arrêtait sonrravail, prenait sa flûte, jouait, charmaitiatan et ses idées redevenaient fraîchescomme lafeur que l'on trempe dans l'eau.

Le Diable, le Diable partout. Le monden'est qu'une vaste diablerie. Luther. vers1515, avoue désespérer du monde. Ilparle d'abandon, d'acceptation de I'Enfer!Luther, le jouteur enflammé, va-t-il passerau Diable?

Il se reprendUne lumière s'est levée, qui nous fait

voir ce que c'est que le monde : c'est le

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règne de Satan. a-t-tl écrrT. Et puis ;

Satan est le Prince du Monde. le péchéoriginel nous a perdus.

Le Diable fait c1u bruit dans la cellule deLuther à Wittemberg. Quelle frayeurlUn jour. il apparait à une jeune fillemalade. avec une belle figure de Christ.

raconte Lutlrer accouru. une singerie duDiable. Et il cracha au visage du fantôme.La figure se changea en serpent. qui courutà la fille et la mordit à I'oreille. le sangcoula. Le serpent disparut. Luther attesteavoir vu cela de ses yeux.

Le Diahle Jascine les hommes ! disait-il.Le ntonde mërite bien de tels avertisse-ments. puisqu'il ëpicurise et pense que leDémon n'est rien.

Satan a roultt tuer notre prieur en ietanlsur lui 11n ltuti le tnur. Mais Dieu l'amirqculeusement sauvé, a-t-il noté unjour. Ailleurs. il consigne encore:

Les lous. les boiteux, les aveugles, lesmuets, sonr des hommes chez qui les démonsse sont ëtablis. Les médet'ins qui taitent ces

infrmitës comme a\tant des couses natu-relles. sont des ignorants qui ne connaissentpoint route la puissonce du Dénton.

Et puis ceci :

Il y a tles lieux tlans beaucoup de pavs oithabitent les diables. La Prusse a grandnombre de maut'ais Esprits. En Suisse. nonIoin tle Lucerne. sur une haute montagne,il y a un la<' qu'on appelle l'ëtang de Pilate.Le Diable.\,est ëtabli d'une manière

terrible. Danstnon pa.vs,

il v aun ëtang

situë de rnême. Si I'on v .jette une pierre. ils'élève un grand. orage et tout le pavstremble alentour. C'est une habitation de

tliables qui v sont prisonniers !Ailleurs. on lit :

Le Diable a emporté à Sussen. Ie jour duL/endredi saiilt. tois écuyers qui s'ëtaientvoués à lui.

Un soir de grand orage, Luther disait :

C'est le Diable qui fait ce temps-là; lesi'ents ne sont aute chose que de bons outie mauvais Esprits : Le Diable respire

et sou.lfle.ll ajoutait : Le Diable promène les gensclans leur somnteil de côté et d'autre, desorte qu'ils Jont toute chose comme s'ilsvei I laient.

Il confia '. Aux Pavs-Bas et en Saxe, unchien monstrueux sent les gens qui doiventtnourir et rôde autour.

On racontait à la table de Luther diffé-rents propos sur le Diable. Un jour, dansune cavalcade de gentilshommes. I'und'eux s'était écrié en piquant des deux :

.4u Diable le dernier ! Comme il avait deuxchevaux, il en lâcha un; et celui-ci, restant

le dernier. le Diable I'emporta avec luidans les airs. Luther a dit à cette occasion :

Il ne Jaut pas convier Satan à note tqble.Il vient sans avoir été prië. Tout est pleinde diables autour tle nous : nous-mêmes,qui veillons et qui prion.r .iournellenrent,\OUS AVONS ASSEZ AFFAIRE A LUI. (MiChE-tet.)

Un vieux curé. faisant un jour sa prière,entendit derrière iui le Diabie qui voulaitl'en empêcher et qui grognait. commeaurait fait tout un troupeau de porcs.Le vieux curé. sans se laisser effrayer,se retourna

et lui dit : MaîtreDiable,

ilI'est bien advenu ce que tu méritais: tuëtais un bel ange et te t,oilà maintenantun vilain porr'. Aussrror LEs cRocNEMENTSCESSÈRENT CAR LE DI,q,sLe NE PEUT SOUF-

FRIR QU'ON LE MÉPRISE.

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!

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II

Un jeune vaurien, sauvage et emporté,buvait un jour avec quelques compagnonsdans un cabaret. Quant il n'eut plusd'argent. il dit que s'il se trouvaitquelqu'un qui lui payât un bon écot, illui vendrait son âine. Peu après. un hommeentra dans le cabaret. se mit à boire avecle vaurien et lui demanda s'il était vérita-blement prêt à vendre son âme. Celui-ci

répondit hardiment < oui > et I'hommelui paya à boire toute la journée. Sur lesoir, quand le garçon fut ivre, I'inconnudit aux autres, qui étaient dans le cabaret :

Messieurs, qu'en pensez-vous? Si quelqu'unachète un cheva!. la selle et la bride ne luiappartiennent-ils pas atissi? Les assistantss'effrayèrent beaucoup de ces mots et nevoulurent d'abord pas répondre; maiscomme l'étranger les pressait. ils direntà la fin : Oui. Ia selle et la bride sont aussi à/ui. Aussitôt le Diable (car c'était lui),saisit le mauvais sujet et I'emporta aveclui, à travers le plafond, de sorte que I'onn'a jamais su ce qu'il est advenu. (Racontépar Luther.)

L'histoire du Diable et du prisonnier quia volé de I'argent, est aussi contée par lui.Le Diable lui tord le cou et s'en empare.Histoire aussi des deux étudiants d'Erfurtet de la jeune fille aimée; histoire du Diablechangeant un homme en femme et desvieillards en enfants e.ffrayants et honibles,tel cet enfant de Halberstadt qui épuisaitsa mère et cinq autres femmes en lestétant, emporté par le Diable! Histoiredu jeune ouvrier ferrant. poursuivi par un

spectre et qui n'ose rentrer chez lui!Luther avouait que le Diable se prome-nait avec lui dans le dortoir du cloître.il le vexait. le tentait. Un ou deux diables

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épiaient, tourmentaient sa tête. Sans cesseils discutaient théologie ensemble :

Le Diable me serre souvent de si prèsdans la dispute, qu'il m'en vient de la sueur.Il est éternellement irrité, je le sens bien, jele comprends. Il couche avec moi plus prèsque ma Catherine !

Une autre fois : Le Diablen'est pas, à Iavérité, undocteur qui apris ses grades, mais,

du reste. ilest biensavqnt, bienexpërimenté.II n'a pourtant fail son métier que depuissix mille ans!

Il se confia : Satan ne songe qu'à metuer; il ne me quilte pas d'un pasl (Quandil fut terrassé par la maladie en 1532.)

Lorsque Luther maria, en 1 536, à Torgau,le duc Philiooe de Poméranie à la sæurde l'Électeui, au milieu de la cérémonie,I'anneau nuptial échappa de sa main etroula par terre. Très mauvais présage.Il eut un mouvement de terreur, se rassuraaussitôt et dit : Écoute. Diabte. cela ne teregarde pas.

c'estpeine

perdue! Et ilcontinua la bénédiction.Encore un Propos de la table de Luther :

une servante. pendant des années, sedisait sans cesse accompagnée d'un Espritqu'elle -,ommait Heinzchen. Elle s'entre-tenait . c lui. pendant les longues nuitsde I'hiver. Un jour, elle le supplia de se

montrer sous sa vraie forme. ll refusa, elleinsista. aiors il la conduisit à la cave. Elleprit un flambeau, et là, dans un tonneauouvert. elle vit un entànt mort qui flottaitau milieu de son sang. De longues annéesauparavant. elle avait secrètement mis au

monde un enfant. I'avait égorgé puiscaché dans un tonneau.Beaucoup de savants prétendaient que

Luther fut engendré par un démon incube,

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c'est ce qu'amrme Cochlæus. Vanini et

Cardan et François Junctunus le prouvaientaussi par les constellations qui avaientaccompagné sa naissance. Luther avaitcommerce avec le Diable. affirment-ils.

On raconte qu'un jour. à i'Évangiie oirest évoqué le sourd-muet dont on arrache

un diable. Luther tomba en criant :

Non sum! Non sum!Coechlæus I'accuse d'avoir révélé qu'ii

mangea plus d'un grain de sel avec Satan.On disait de Luther : Fils et disciple du

Diable.Et Luther. à qui on répétait I'abomi-

nable accusation des papistes contre iui.protestait : J'ai étë fait maîte et moineaugustin à ErJurt, et docteur ù llittem-berg !

FAUST DEVIENT MANICHÉEN

On verra comment Faust tut amené àrompre violemment avec le groupe desRéformés qui I'avaient admis et quidevinrent ses plus âpres ennemis.

C'est que son goût passionné pourI'Antiquité paienne et ses pratiques demagie le conduisaient à des positionsfatales qui bientôt ch'oquèrent autantles Réformés que ses premières déclara-tions de magicien avaient scandalisé lesprêtres d'Eglise. dès ses premières annéesde vie philosophique Via moderna.

Un fait capitalest

à si-qnaler:les

témoi-gnages de Tritheim. du chanoine Rufus.la chronique d'Erfurt. un texte de Man-lius. Ies déclarations de Luther. la versionde Widman. indiquent que Johnnès Faustversa dans le manichëisme.

C'est un des adversaires du magicien quien 1531 (donc du vivant de Faust), Sébas-tien Franck. a écrit dans Za ChronicaZev t buch und G e s c' hi cht bi b e I de Stasbourg :

Faust, un mysti-frcateur. a soutenu avectVanichëeus que le Christ n'a pu vëritable-ntent ni mourir. ni naitre. Il prëtend, en

outre, qu'il n'élsit pas né vëritablement de,Vqrie, ni mort sur la croix. et que le péchën'existait que dans l'imagination et pourles lteux des hommes. Il disait encore quele Dieu de I'Ancien Testament était un

méchant Dieu. Il blâmait la loi. parce qu'elleprocède d'un Dieu méchant. puis il admet-tait deux Dieux. ou origines de touteschoses. et on le lui a souvent entendu répëter.Son jeune Fëlix considérait Manichéeuscomme un apôtre du Christ,

Il en fallait beaucoup moins pour épou-vanter les Luthériens.

Voici donc Faust séduit par Manès.

De la foi chrétienne. vite abandonnée. àla conviction ambitieuse des Luthériens.délaissée, le jeune magicien accède à la sin-gulière position philosophique des gnos-tiques, qui concorde parfaitement avec safoi d'humaniste. Toujours I'Antiquité'aïenne I'absorbe et le met en mouvement.

Ce document nous apprend égaiementdeux faits : d'abord, que les adversairesde Faust ne désarment pas, et l'on saitsi ses thèses, si sa prédilection ouverte pourla magie, ses farces d'étudiant et sa débau-che, lui en suscitent - il ne prend aucunepeine,

nemontre aucune prudence pour

voiler sa conduite et ses opinions. aucontraire - et ses ennemis répètent unmot du moine Tritheim : C'estunmystiJica-leur (aujourd'hui on dirait un < illusion-niste >). Ses rodomontades, sa redondance

263

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excitent ses adversaires. Déjà et commelui, le fier Cornélis Agrippa. aussi bienque I'inquiétant Paracelse. sont traités desorciers dangereux.

Seconde attestation : Johannès a près delui un jeune valet-secrétaire du nom deFélix. Nous avons dit qu'il était indispen-sable à un alchimiste d'avoir un assistant.Faust tint toujours auprès de lui un

Jamulus, un conlident et domestique. quiseilait son cheval. qui portait en voyage ses

bagages et vêtements. maintenait le chevalà I'arrêt et le conduisait à i'écurie. Ilouvrait la porte aux visiteurs. faisait lescourses. On verra plus loin le rôlr uejoua Wagner. qui parla beaucoup 3s

la mort du magicien.Or. le valet Félix répétait les propos de

son maître. Ils furent rapportés : Féiixle famulus alilrma que son maître se

rangea aux côtés de Manichéus.Les manichéens suivaient la doctrine

du Persan Manès qui, sur le même modeque les premiers gnostiques, tenta d'unirle christianisme au magisme oriental, àconciiier la Bible et Zoroastre. L'essentielde sa vérité consistait dans le duaiismede la lumière et des ténèbres. le dualismedu Prince de Lumière et son équivalenceen Satan. Prince du Monde.

L'étudiant philosophe Johannès Faust yretrouvait concordance avec la Loi d'Her-mès : ce qui est en bas vaut ce qui est enhaut. La Loi de I'Unité. Manès ajoutaitque I'homme matière a été vaincu par lespuissances ténébreuses qui désormais com-

mandent le monde. L'histoire de Jésus-Christ n'est qu'un symbole et le Christ.I'homme inférieur sacrifié.

Venu de Perse, d'Inde, du Thibet, le

264

manichéisme avait été très florissant auxre siècle en Occident. Il revivait auxlle siècle avec les Cathares. les Parfaits,les Albigeois et au xrve siècle avec lesTempliers. On racontait que Manès. auIIIe siècle, esclave d'une veuve quiI'adopta, avait été formépar les magesdela Perse. Il se disait apôtre du Cfuist('nous retrouvons les mêmes déclarations

dans le document Sébastien Franck) etmessager de Son Esprit. On lui attribua ledon de miracles.

Il répétait que Satan est le principeexécuteur voulu par Dieu. ll existe deuxprincipes indépendants, le bon et lemauvais. tous deux souverains :

- L'homme a deux âmes, I'une bonne,I'autre mauvaise.

- La chair est mauvaise. Interdictionde se marier et de procréer.

- Le Christ ne s'est Das incarné.La fin dramatique du Prophète ajoutait

encore. parla

palmedu

martyre.à

lanoblesse de sa religion : Manès fut écorchévif par le roi de Perse, Sapor.

Ses fidèles maintinrent que Jésusannonça qu'il enverrait le Paraclet. ou leConsolateur. qui dirait aux hommes laVérité. Manès. de son propre aveu. étaitle Paraclet. comme Jésus se disait leMessie.

L'Ancien Testament. affirmaient-ils. estl'æuvre du Prince des Ténèbres et I'histoirede son empire malfaisant. Le drame dudieu incarné consiste à s'être soumis à lamatière, en s'y incorporant. Son corps, dès

lors, n'était qu'une apparence. Sa cruci-fixion exprimait la douleur de I'Hommecéleste enchaîné à la matière.

Saint Augustin combattit dans les

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rangs des fidèles de Manès avant de se

convertir au christianisme.Saint Augustin fut manichéen comme

Dioclétien. comme Faust et les alchi-mistes.

Ceux-ci accomplissaient en sens inversel'évolution philosophique de saint Augus-tin, Père de I'Egiise. d'autorité considé-

rable, dont les textes étaient en pleinevogue au Moyen Age.

Augustin fut aux premiers jours de sa

carrière professeur d'éloquence fort richeà Milan; quelle persuasion était la siennelIl se livra à l'étudc des sciences. au com-merce avec les femmes; I'une d'elles I'aban-donna après qu'il lui eut fait un enfant;il vivait esclave de la voluptd (VI. XV),allant de maîtresse en maitresse, vivantavec I'escorte tles plaisirs d' Épicare,écrivant : Voici Dieu. voilà ses créatures...Où est donc Ie mal. d'oit vient-il et par oit

s'est-ilglissé?

Quelleest sa racine?

Quelest son germe? Mais peut-être n'est-ilpas? Pourquoi donc redoutons-nous, pour-quoi fuvons-nous ce qui n'est pas?

C'est ainsi que Johannès Faust iut ces

lignes des Confessions, qui l'éblouirent :

Et je ne pouvais. saw un proJbnd ëtonne'ment, repasser dans ma tnëmoire tout ce

Iong temps écoulë depuis Ia dix-neuvièmeannée de mon âge, où ie nr'étais si vivementépris de la sagesse. rësolu d'abandonner àsa rencontre les laines espérances et lestrompeuses chimères de mes passions. Etdéjà .j'accomplissais ûres trente ans,

embourbé dqns la même J'onge. avide dejouir des objets présents. périssables et quidivisaient mon ânte. Je trouverai demain,disais-je. demain la vëritë paraîtra. et jela saisirai. Er puts Fausrus vA vENIR. IL

M'rxlltqurnA Tour. O grands maîtresde l'Académie! On ne peut rien îenir decertain pour rëgler la vie. Mais nous.cherchons mieux: ile désespérons pas.(CoNrrssroNs. VI-XI.)

Faustus va venir?Au rve siecie. Augustin avait donc pres-

senti sa venue. à lui. Johannès Faust.

Mais à quel F.c.usrus faisait doncallusion Augustin. au début du ve siècle?Sans doute à Faustus évêque de Riez,d'abord avocat. puis moine au monas-tère de Lérins. dont il fut élu abbéen 433. un brillant dissertateur sur lanature de la Grâce. considéré plus tardpar l'Église comme demi-hérétique. pourla défense qu'ii fit des semi-pélagiens.

Johannès répétait les lignes prophétiquesd'Augustin. qui avait aussi affirmé :

Dieu est en l'homme. l'homme est en Dieu.(I. II)

Oùi. Faustus va venir,

ilm'expliquera

tout !Quelle n'était donc pas la surprise de

Faust, en lisant avidement saint Augustin,d'apprendre que le saint, lorsqu'il avaitété séduit par I'hérésie manichéenne,avait vu ce fameux Faustus. évêquemanichéen. et que, selon Augustin, cejour avait été le plus beau jour de sa vie!

C'était aussi le plus beau jour de la viede Johannès Faust de Heidelberg, étudiantmanichéen.

L'orgueil d'être Fe.usrus.

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Les manichéens rejoignaient la Gnose.La Gnose. voie du saiut. à laquelle

on accède par paliers. Les caïnistes. Iesbogomiles. comme les manichéens. et auMoyen Age les Boulgres ou Bulgares.(Johannès Faust adhéra-t-il à une secteboulgre?) prétendaient, au-dessus du mal.atteindre à ia connaissance suprême oarI'immuable et les êtres incorporeis. L'Évàn-gile de saint Jean était seul valable :

on posait aux initiés son Évangile sur le

front. La lumière. Le Verbe.Dosithée, Ménandre. Cléobius. Corinthe

et les Ophites. et puis les naasémiens.les séthiens. bien entendu les calnistesou fils de Caïn faisaient I'obiet deslectures de tout étudiant qui veut cônnaitreles sectes gnostiques. On compulsaitJustin. Basilide. Valentin et ses disciples :

Héracléon. Ptolémée. Markos. Iv{aicion.Hermogène.

Splendide cohorte de philosophes déga-gés de l'astreinre du christianisme. imbusde la beile tradition hellénique! La grandeleçon d'Alexandrie. Le salut par

laGnose,

ses illuminations.De nombreuses sectes philosophiques,

au Moyen Age, revendiquaient la véritéde ces écoles, celles des nicoiaïstes. dessimoniens. cÉupocratiens, priscillanistes.pauliciens.

Faust et ses amis avaient le choix.rlémée d'Alexandrie, néo-piatonicien

du "tc siècle. prolèsseur des empereurs.n'annonçait-il pas le merveilieux dansI'imperfection du monde?

Jamblique, un peu plus tard. philo-sophe grec d'Alexandrie, le disciple de

Porphyre. gnostique païen et antichrétien,n'avait-il pas atteint la totale sagesse et

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n'avait-il pas le don de iévitation?Mais Satan est-il Ie roi du monde et des

créatures ?

Faust s'aventure de plus en plus surla voie luciferienne. Il s'y sent attiré.Sa philosophie I'y pousse immanquable-ment.

L'étudiant magicien suit avant tout laligne de conduite qui rejoint la méthodeexpérimentale de Bacon. de Maître Albert,et qui les dépassait.

elrâceaux enostiques :

La Connaissance avant la Foi, et ntêmeavant la Morale.

Connaissance du G de la GNosE.Mais Johannès éclate de rire : Ce G

n'est-il pas aussi la première lertre etmajuscuie de Goétie? Les gnostiquesmènent-iis à la science de I'Arbre biblioue.l'æuvre du serpent Satan? Est-ii eiactque c'est le Prince des Ténèbres qui acréé I'homme de la Genèse? L'esprir dusoleil. La Goëtie. la Science de Satan.

SIMON LE MAGICIEN

Mélanchton et ses élèves ont parfoisassimilé Faust à Simon le Magicien. le< Père des Gnostiques >.

Simon fut un héros de la Gnose. bienconnu des Évangélistes (Actes VIII).Il accomplit de nombreux miracles, ilétonna les populations.

Le magicien s'était emparé de l'espritde Néron qui I'admirait puissamment. ille considérait comme le premier magicien.L'apôtre Pierre entama une lutte contre

lui.Dans les Actes des Apôtres. c'est Phi-

DISPUTE PUBLIQUE DE SAINT PAUL, SAINT PIERREET DE SIMON LE MAGICIEN.

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lippe, prédicateur débarqué pour annoncerle Christ à Samarie, qui s'attaque à lui.En effet. Philippe était venu prêcher Jésusdans la ville de Samarie et il y accomplissaitdes miracles devant la foule stupéfaiteet attentive à ses paroles. Il exorcisait,libérait les possédés, guérissait les paraly-tiques, les boiteux. Or il y avait en cetteville un magicien nommé Simon. dont leprestige était grand dans le peuple. Simon.

consigne-t-on, fut ébloui par la force dePhilippe, demanda à se convertir etne quitta plus Philippe. Vinrent bientôtà Samarie Pierre et Jean. Les voyantpratiquer avec succès I'imposition desmains, Simon leur demanda ce pouvoirde I'imposition des mains: ii leur offritmême, dit-on, de I'argent. Pierre lui dit :

Que votre argent périsse avec vous, vousqui avez uu que le don de Dieu peut s'acqué-rir avec de I'argent!

Pierre accusa le magicien de mauvaisesprit, de fiel amer dans I'esprit engagédans les lieru de l'iniquité, lui demandantde prier Dieu; alors Simon I'aurait sollicitéde prier pour lui... Étrange récit à laglorification de Pierre, et contesté.

La célébrité de Simon était grande aupays de Samarie, où il était craint. SaintIrénée rapporte qu'il fit, comme la plupartdes grands philosophes. voire des initiés.de longs voyages. Sa doctrine était trèsvoisine de celle de Philon; sans douteséjourna-t-il à Alexandrie. Il fut trèsprobablement baptisé, comme le notentles Apôtres. mais ne se montra jamais trèschrétien. Les rapports de ses disciples

établissent qu'il fut un initié et chefd'école initiatique.L'école de Simon le Magicien prônait

268

un principe universel semblable au feu;elle invoquait le mot de Moise : Dieuest un.feu dëvorant. Feu apparent et visible,et aussi feu secret, invisible,après Platon elleprêchait I'intelligence et le sensible, et aprèsAristote. la puissance et I'acte. Dieu?Celui qui est, a étë et sera. Le Père à la foismâle et femelle. On distingue I'existencede trois mondes superposés se développantavec une parfaite similitude. La pensée,

un jour. abandonna le Père et, se tournantvers les créatures inférieures, créa lesanges et le monde inférieur que noushabitons. Ceux-ci voulurent retenir lapensée loin du Père, et ce fut le motif dela chute. Les anges maltraitèrent lapensée. Ils I'enfermèrent dans un corpshumain. Et depuis, cette pensée, à traversles siècles, a passé de femme en femme;oui, c'est pour elle qu'éclata la guerre deTroie, car elle se trouvait alors dans lecorps d'Hélène. Le poète Stésichore, quiI'avait maudite dans ses vers. devintaveugle, mais s'étant repenti et ayantchanté ia palinodie, retrouva la vue. LePère voulut sauver les humains de latyrannie des anges, il descendit du mondesupérieur, changea de forme pour ne pasêtre reconnu : c'était Simon lui-même! Ilapp,. it aux Juifs de Judée comme le Fils,aux Samaritains comme le Père. auxGentils comme le Saint-Esprit. Les pro-phètes avaient prédit son arrivée. Lesanges les avaient inspirés. Il s'était misà la recherche de la Pensée perdue dans lemonde inférieur et I'avait trouvée dansla personne d'Hélène dont il avait fait sa

compagne. Croire en Simon et en Hélène,c'était acquérir sa liberté et s'assurerle salut. Saint Irénée rappelle cette

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étonnante doctrine. (Marquès-Rivière.)On se doute si Faust trouva du piquant

à cette théorie du messianisme de Simonie Magicien. nouveau Sauveur. et dans leculte païen en Simon et Hélène, le coupielibérateur. de Force et de Beauté.

Faust admirait encore plus Simon leMagicien. quand il affirmait que le pro-

blème du Bien et du Mal nese pose pas.

et que seule importe la libre action.Simon a délivré les hommes de la tyranniedes anges. la Loi était l'æuvre de ces

anges, il n'y a. dès lors, qu'à mépriser laLoi.

Pour I'adepte donc de l'écoie gnostiquede Simon le Magicien, la morale reposesur l'indi.fférence des æuvres. Bien mieux.le couple Simon-Hélène donne le modèlede Ia dilection et de la sanctificationréciproque.

En raison de cette doctrine. ies Pèresde l'Église qualiûèrent Simon de Père

de I'hérësie. Ils s'effrayèrent des consé-quences possibles et crimineiles de ses

thèses qui, au départ, biffaient le problèmedu Bien et du Mal. du péché. de I'amour.

Les Simoniens constituèrent une sectedont I'Histoire consigne les travaux philo-sophiques. Certains y retrouvent la doc-trine des Carpocratiens, qui prônaientla réincorporation des âmes. la magie. lesphiltres. les parèdres.

Il est certain que Johannès Fausts'imprégna des théories consignées dansles Philosoohoumenct de Simon de Gitton.confirmées par son disciple Ménandre;

selon saint lrénée : Ménandre parvint ausommet de Iq science magique, prêchant.comme Simon I'avait dit. que le mondeavait été créé par les anges, qui n'étaient

qu'une émanation de la Pensée inspiratricede i'art de la magie. C'est ainsi queSimon enseignait cet art destiné à vaincreles anges créateurs de ce monde inférieur.Ses disciples seraient immortels. Eusèbeécril : Personne ne pouvoit. selon Ménandre,arriver à être supérieur aux anges crëateursdu monde, s'il n'acquérait l'expériencede la magie que

lui. 'Vénandre, enseigruit,et s'il ne participait à son baptême. Ceuxqui en étaient devenus dignes y touvaientl'immortalité, ils ne mouraient pas. restaientsans vieillesse dans une vie immortelle.

Faust apprit donc des gnostiques, deSimon le Magicien. de Ménandre. de Satur-nin, chef du gnosticisme syrien. de BasilideI'Egyptien et de son fils Isidore, qui ensei-gnèrent à Alexandrie, comment se résolvaitle problème de I'origine du Mal et duMalin. C'était par excès de curiositéque les premiers hommes avaient étéqualifiés d'hérétiques; I'homme ne saurait

en rien être responsable du Mal.Leur emprunta-t-il aussi le culte duSerpent des Ophites, dont la secte don-nait à I'initié un sceau et un chiffre mysté-rieux, répudiait le Dieu de I'Ancien Tes-tament et réhabilitait l'animal totémique,le serpent sacré. qui fut de tout tempsle grand symbole de I'initiation? L'exégèsebiblique justifiait ce culte du Serpenteucharistique : en amenant le premiercouple à manger le fruit de I'Arbre. leSerpent fut le bienfaiteur des hommes,comme Cain, Abiramon ou Judas. Serpentdes religions initiatiques d'Asie Mineure,

naja des divinités asiatiques. caducéed'Orphée...Le gnosticisme répandait en effet cette

conciusion que chaque religion contient

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sa part de vérité. Les légendes grecques,les mystères é-eyptiens donnent la main àla révélation chrétienne. tandis que, plustard. le manichéisme unit Zoroastre t ,.

Christ.Faust goûtait enfin. particulièrement

chez Simon le Magicien. sa philosophie

d'érotisme mystique. Son épouse Hélènede Troie n'était qu'une prostituée. Simonl'épousa pour le salut du genre humain, Iesalut ne venant pas des bonnes cBuvres,mais de la grâce divine de Simon et dei'espoir en Hélène.

Simon le Magicien laissa la réputationd'un sorcier.

Les Ophites - que I'on renconfefréquemment dans toute étude sur lamagie - vénéraient. dans leur culte duSerpent. la cause de la Gnose, révélant àI'Homme et à ia Femme la connaissancedes mystères du paganisme. le drame de laconnaissance accessible. Le luciférismeadore le Lucifer de la Cenèse. Le satanismerevendique le principe du Mal. le dieudestructeur qui séjourne aux Enfers.

Enfin les gnostiques licencieux. dénoncéspar saint Epiphane. montraient leurs ritesérotiques basés sur l'émission séminale

et le flux menstruel. La lumière jaillit deI'intimité sexuelle. La débauche est alorsutilisée en méthode d'ascèse. Sans doutey a-t-on puisé les accusations de sodomie.de débauche. et les auues aberrations qui

270

firent condamner les manichéens, lescathares, ies templiers.

Gnosis signifie connaissance.Simon le Magicien déclare au début

d'Apophasis, sa Révélation :Ceci est l'ëcrit de Ia Révélation de la

Voix et du Nom. venant de Ia pensée et de

la grande Puissance infinie; c'est pourquoiil sera scellé. caché, enveloppë dans lademeure en laquelle la racine du Touta ses fondements. La Gnose est l'apanagedes Initiés (cité par Serge Hutin). Elledénonce. en sa doctrine, I'obtention duSalut par la Connaissance. Selon Théodote,Ia Gnose permel à l'homme de comprendrela signifcation de toutes choses. Hippolyteécrit : Elle est amère, en effet nous ditSimon, l'eau que I'on trouve après lamer Rouge : car elle est la voie qui mèncà la connaissance des choses de Ia vie. voiequi passe à travers les dfficultés et les

amertumes. Mais, chongëe par Moîse.c'est-à-dire par le Verbe, cette eau amèredevient douce. Serge Hutin voit dans laGnose - très justement

- une attitudeexistentielle. le caractère d'expériencevécue.

Le Serpent qui se mord la queue,image du chaos, plur le plus haut maîtredu gnosticisme, I'Egyptien Valentin. quis'initia à Alexandrie, à toutes les doctrinessecrètes de l'ancienne Égypte.

Était-ce dans ses images métaphysiquesque Johannès Faust puisa ses visions desEnfers

-dont on retrouvera plus tard des

éléments dans son fameux voyage avec leDragon? Selon l'école de Valentin, eneffet. douze chambres des Enfers conte-naient. dans I'hémisphère inférieur, lesâmes. les génies, les dieux à tête d'animaux.

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Dieux à figure de crocodile. de chat' de

chien, de serpent. de bæuf noir, de porc,

d'ours. de serpent basilic. dragons à sept

têtes. génies à sept têtes de chat, à sept

têtes de chien: douze domaines de la

course nocturne du Soleii.Les rois aussi portent au front I'Uroeus'

le serpent royal basilic. image de la terreur.

La Gnose. sublime secret de la Connais-sance. le feu de l'Intelligence. le rejet de

toutes les idées préconçues. des dogmes. des

préventions. Ll glorification du pouvoirtranscendantal de la magle.

Simon le Magicien. maître magicien.I'apologiste et l'évocateur de la Belle

Hélène, demeure le grand témoin de laprésence maintenue des dieux de lamythologie et de leurs mystères.

Une incantation gnostique est venuejusqu'à nous. C'est ia formule maglquedu Pepvnus or Levos. d'origine égyp-tlenne :

< Prononçant vers l'Orient, la maindroite étendue vers la gauche et de mêmela gauche vers ce qui est à gauche. tudiras A. Vers le Nord. le poing droitétendu. tu diras E. Élevant les deux mains.tu diras. tourné vers le Midi. H (é longgrec). Vers le Sud. les matns tournees vers

i'estomac. tu diras l. Crachant à terre,et touchant I'extrémité des pieds. tu dirasO. Regardant en I'air. la main sur le cæur.tu diras U. Reeardant le ciel et les cieux

mains sur la tête. tu diras O (oméga). >

Les gnostiques employaient des talis-mans (amulettes, formules magiques surpapyrus), rlotamment les Abraxas. dont le

nor grec représente le chiffre 365 annuel.Il i. .ète de coq. de lion ou de taureau etest gravé sur pierre.

Le roi Louis VII en portait un sur son

sceau royal.Les gnostiques y gravaient les nomsprotecteurs de .Aeons. Anges et ArchangesKokhabriel. Gabriel. Michel. Raphaë1.ceux des trois rois mages, ceux des

Hébreux jetés dans la fournaise du l=ivre de

Daniel. ceux des Sept Dormants d'Ephèse.Évocations. imprécations Sabaeiao (laoSabaoth), Sphragis Theon, le Sceau deDieu.

On inscrit le mot magique Abracadabraen triangle puis on lit de droite à gaucheet de haut en bas.

La formule du Sator des mages kabba-

listiques. inscrite sur des manuscrits grecs,aussi bien que sur des dalles d'églises(Vèrone, Loches. Beaulieu. Chinon, Jar-nac), s'écrit en carré magique (voir I'ins-cription de la chapelle de Saint-Laurent-deRochemaure). Certains y voient les nomsdes bergers qui vinrent à la crèche adorerJésus.

Sator fut un pentacie chrétien, commele Poisson (lktus).

Les gnostiques ontson aspect le plus

donné à la magiescientiûoue. lls ont

)11

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été les réalisateurs, du grand courant éso-térique méditerranéen. Les mystères grecsasiatiques, romains. se fondaient dans lesenseignements de leurs écoles. à Ia grandetradition égyptienne et au ferment de larévélation chrétienne initiatique toutenouvelle.

Pendant plusieurs siècles. le gnosticisme

d'Alexandrie développa son rayonnement.Ses synthèses culturelles. philosophiqueset mystiques connurent un vif succès.Beaucoup de disciples entouraient lesmaîtres. Les adversaires ne manquaientpas aussi. notamment les premiers Pèresdu christianisme. qui ne cessèrent deiutter contre ce qu'ils nommaient I'hérésiegnostique.

Si le < père des gnostiques > fut Simonle Magicien. Basiiide l'Égyptien en futun grand professeur. Valentin se montrale plus brillant. Tous les secrets de I'antioueÉgypte se rerouvaient dans sa philosopirie

platonicienne et pythagoricienne. Simonenseigna à Alexandrie et à Rome. Sousson influence et celle de Marcion. dessectes cliverses fleurirent : les unes prê-chaient un ascétisme exaltant. d'autres.au contraire, se plongeaient dans l'éro-tisme et la débauche. d'autres. tels lesOphites. adoraient le serpenr. ce quimanifestait une tradition nettement égyp-tienne. Beaucoup, au rrre siècle. prati-quaient des rites expiatoires. La Kabbaleet les mystères d'Eleusis imprégnaientl'ésotérisme gnostique.

272

LA MAGIE CHEZ LES CATHARES

Au xne siècle. I'affaire de la secte desCathares q.ui fit couler tant de sang

- trente ans de croisades dramatiquesavec bûchers et- égorgements, cent ansde lutte pour I'Eglise et I'lnquisition -ut appelée celle des manichéens modernes.

Elle ravagea le Midi de la France aux xrre,xllre et xrve siècles. C'étaient de curieuxpersonnages que ces petits messieursdiscrets vêtus de nor qui faisaient I'admi-ration de tous, sorte d'ascètes ayant leurdoctrine, leurs usages, leurs rites, qui pro-cédaient du jeûne et de I'imposition desmains et qui vivaient en fraternités secrètes.Leur conception du monde sensible étaitprofondément pessimiste; I'undeuxdisait :

Tout ce qui est sous Ie soleil et sous laIune n'est que corruption et conJ'usion,et ils dénommaient la matière corruptibilia,selon le mot de saint Paul

:La

figurede ce

monde passe et le mot d'Héraclite : Touts'écoule. Le monde. pour eux, était tran-sitoria.

La dualité de leur système de conceptiondu monde repose sur le double principed'un monde spirituel, æuvre du Dieu bonet d'un monde matériel. æuvre du Dieumauvais, Satan, Dieu de ce siècle, Princede ce monde trompeur et abusif que saintJean dénonçait en écrivant : Le Dragon aentraîné sur terre par sa queue Ie tiers desétoiles.

Les Cathares nient I'Enfer de l'Église

chrétienne, puisque Satan a réalisé sonroyaume sur la terre. Ils rejettent le Pur-gatoire aussi. car le monde spirituel estle monde de Dieu qui ne peut admettre quedes âmes parfaitement pures : c'est sur

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terre que doit s'opérer cette purification.Le Christ régénérateur n'était pas Dieu,jar ; il ne se serait abaissé jusqu'à s'in-car dans la matière. II n'a eu ni un vraicorps ni une vraie chair. J. Marquès-Rivièreécrit : Nous retrouvons là un écho des

grandes doctrines gnostiques de I'Epinoïa,la Pensëe divine de Simon le Mage ; ce sontles mêmes méthodes de rachst, les mêmesconceptiotts du monde, Ies mêmes solutionsdu problème du mal.

L'initiation consistait à persuader aunéophyte ie détachement de ce mondeet la libération de l'âme captive du corps.La vie est le plus grand des malheurs, ilfaut la détruire, sur soi - par I'ascèse. lesuicide ou l'épreuve de l'Endura - et surles autres, en se gardant bien de procréeret d'emprisonner, par ia naissance. uneâme dans un corps impur. La faute origi-

nelle de nos ancêtres fut justementl'æuvre de chair. Ce fruit qui leur futdéfendu fut tout simplement Ie plaisir dela chair, DELEcrArro coiTUS, qu'Adamoffrit à Ia fenune. Un acte de Satan.

L'initiation cathare consistait en I'ap-prentissage des méthodes qui mènent àI'extase, qui séparent l'âme du corps, et àvivre dans I'illumination soirituelle. celledes Parfaits. La dame Berbeguera. femmedu seigneur de Puylaurens. raconte savisite à I'un de ces personnages supérieurs.Il lui apparut comme la merveille la plusétrange. Depuis.f'ort longtemps il était assis

sur une chaise. immobile comme un troncd'arbre, irsensible à ce qui I'entourait.

L'ascèse du Yoga hindou.Une fois initié, le < Parfait > devenait

végétarien : ne jamais manger de viande.æufs. graisse. fromage, qui proviennent

de la génération. Seuls les fruits et lespoissons peuvent être absorbés. Respectde la vie des animaux. les tuer et les mangerest un crime. Jamais un cathare ne mansede volaille. Interdiction formelle de tue;.Défense d'aller à la guerre pour tuer son

prochain. Défense de prêter serment :le oÉcnrocue dit : Tu ne jureras point.Le serment est illicite.

La hauteur de vues et l'ascèsedes < Parfaits > ralliaient beaucouo de< Croyants > à la doctrine cathare. aussibien dans le peuple que parmi les élites etles princes. Leurs Fraternités devenaientde plus en plus nombreuses. On les voyaitgroupées en Lombardie, en Milanais, enToscane, à Trévise, à Florence, àConstan-tinople, en Roumanie, en Bulgarie, enAdriatique. Elles étaient fort nombreusesen Flance, en langue d'oil, à Albi, à Tou-

Iouse, à Carcassonne. Plus de deux centmille cathares accoururent les armes à lamain pour défendre leur idéal, quand sedéchaîna la déplorable croisade des Albi-geols.

Le Consolamentum constituait la céré-monie la plus importante du culte cathare:c'était la purification d'une âme déchue.L'Esprit bienheureux du Consolateur,venu du Paraclet, la visitait. Les rites enétaient sévères. Après une longue instruc-tion, une obéissance absolue au Parfaitinitiateur, abstinence rigoureuse de nourri-ture animale, viande, æufs. laitage; le riteconsistait en allocution solennelle, réci-tation d'oraison. imposition des mainsavec transmission initiatique. Promesse devivre selon la règle cathare.. Ensuite se

déroulait le melioramentum. confessionpublique avec imploration du pardon et

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remise des péchés. Par le rite de la parcia.I'initié s'agenouillait, mettaitles deux mainscontre terre avec trois prosternations et for_mules rituelles. Promesse de vie cathare.Pose du Livre sacré. le Nouveau Testament.sur la tête du récipiendaire et impositiondes mains. Enfin. revêtement du Consoléde vêtements noirs et souvent d'une cor_delette de lin à porter sur la poitrine.Enfin, les Parfaits donnaient le baiser de

paix. Accolade fraternelie générale.Le Cathare, selon I'origine du motKatharos, signifie pur. Le ConsolamentumI'a dégagé de la matière et dirigé sur lemonde surnaturel. Les mots de iasse. lessignes secrets permettront aux aàeptes dese reconnaître entre eux. surtout forsouel'lnquisition va se déchainer contre eux.

Souvent ils vivaient en communautés.car il se refusaient aux joies de la familléet, bien entendu, pratiquaient une chastetéabsolue.

Dans leur apostolat très actif, les par-faits se disaient les continuateurs desApôtres dont ils avaient conservé lemandat. Le repas pris en commun, avecbénédiction du pain, selon un rituelprécis, réunissait constamment les par_

faits et les Croyants. Il se terminait souventpar Ie melioramentum, ou adoration collec_tive. Genoux fléchis, mains jointes, tripleinclination où les effiuves magiques iliu-minaient les fidèles. L'Inquisition nes'y trompa pas et alluma ies bûchers.

Les Parfaits opéraient-ils des guérisonsmiraculeuses, envoûtements ou évôcations.

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remise des péchés. Par le rite de Ia parcia,l'initié s'agenouil lait. mettait les deux mainscontre terre avec trois prosternations et for-mules rituelles. Promesse de vie cathare.Pose du Livre sacré. le Nouveau Testament,sur la tête du récipiendaire et impositiondes mains. Enfin. revêtement du Consoléde vêtements noirs et souvent d'une cor-delette de lin à porter sur Ia poitrine.

Enfin. les Parfaits donnaient le baiser depaix. Accolade fraternelle générale.Le Cathare. selon I'origine du mot

Katharos. signifie pur. Le ConsolamentumI'a dégagé de la matière et dirigé sur lemonde surnaturel. Les mots de passe. iessignes secrets permettront aux adeptes dese reconnaître entre eux, surtout lorsqueI'lnquisition va se déchaîner contre eux.

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Souvent ils vivaient en communautés,car il se refusaient aux joies de la familleet, bien entendu, pratiquaient une chastetéabsolue.

Dans leur apostolat très actii les Par-faits se disaient les continuateurs desApôtres dont ils avaient conservé lemandat. Le repas pris en commun, avecbénédiction du pain, selon un rituel

précis. réunissait constamment les Par-faits et les Croyants. Il se terminait souventpar Ie melioramentum, ou adoration collec-tive. Genoux fléchis, mains jointes, tripleinclination où les effiuves magiques illu-minaient les fidèles. L'Inquisition nes'y trompa pas et alluma ses bûchers.

Les Parfaits opéraient-ils des guérisonsmiraculeuses. envoûtements ou évocations.

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comme on I'a rapporté? Savaient-ils se

rendre invisibles, comme beaucoup plustard le pratiqueront les Fraternités Rose-Croix? Que de mystères restent enfouisdans les ruines désolées de Montségur!

L'ésotérisme cathare. sa mystique. sesilluminations, ses rites, qui perpétuaientla lignée manichéenne, se renouvellerontavec d'autres sectes. Ils ont des rapportsétroits avec ceux de la doctrine et desrites secrets, voire sacrilèges, des Tem-pliers.

Et comment ne pas contempler avecrespect I'ascèse d'inspiration magique ettranscendantale du Parfait avide de per-fection et qui se sublimait jusqu'à mourir defaim dans les joies extatiques del'Endura ?

Hérésie! Hérésie! clame i'Inquisition

qui fut féroce dans sa répression. LouisChochod écrit: C'est dans l'hérésiealbigeoise, dans ce qu'Éliphas Levi consi-dère comme une perversion du zoroastris:.:e,qu'il faut rechercher l'origine des pratiq...es

sacrilèges et en particulier des messesnoires, dont se complique la sorcellerie duMoyen Age et les cérémonies à rebours quifrent scandale à Paris au cours du grandsiècle.

En outrageant le Dieu-Mauvais de chair,Jésus sur terre. Ie gnostique croit serapprocher du Dieu-Bon qui lui concéderases grâces.

Magie noire?C'est pour les Albigeois qu'en 1252 le

pape Innocent IV, par sa bulle Ad Extir-penda autorise légitimement la torture.

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