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1/8 fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_l%27alphabet_grec Alphabets phénicien et grec Phénicien Grec ʼāleph Α alpha bēth Β bêta gīmel Γ gamma dāleth Δ delta Ε epsilon wāw Ϝ digamma Υ upsilon zayin Ζ Zêta ḥēth Η êta ṭēth Θ theta yōdh Ι iota kaph Κ kappa lāmedh Λ lambda mēm Μ mu nun Ν nu sāmekh Ξ xi ayin Ο omicron Π pi ṣādē Ϻ san qōph Ϙ qoppa rēš Ρ rho šin Σ sigma tāw Τ tau Φ phi Χ chi Ψ psi Ω omega Histoire de l'alphabet grec L’alphabet grec est, historiquement, le premier alphabet utilisé pour écrire une langue indo-européenne. Ce n’est pas une création ex nihilo, car il est dérivé des alphabets utilisés sur la côte de Phénicie, l’alphabet phénicien. Celui-ci est à proprement parler un abjad, un alphabet consonantique. Cependant, vers le IX e siècle av. J.-C., des matres lectionis y apparurent pour indiquer certaines voyelles, surtout des voyelles finales . Premier alphabet à noter véritablement les voyelles, une nécessité pour la transcription des idiomes indo-européens, qui sont essentiellement flexionnels, il a évolué au cours du temps et a donné naissance à de nombreux alphabets ultérieurs. Ce système d'écriture s'est rapidement propagé à l'Est, vers la Phrygie et à l'Ouest, en Eubée. Hors de la Grèce, il fut d'abord adopté par les Etrusques pour transcrire leur propre langue. L'alphabet grec n'est pas le seul système d'écriture utilisé par les Grecs de l'Antiquité ; en effet, plusieurs siècles avant l'adaptation de l’alphabet phénicien, ils empruntèrent, en le modifiant, le linéaire B aux Minoens. Sommaire 1 L'origine de l'alphabet selon les Anciens 2 Chronologie de l'adoption de l'alphabet 3 La restructuration de l'abjad phénicien 4 Alphabets archaïques locaux 5 Évolution aux époques classique et hellénistique 6 Évolution au Moyen Âge 7 Les textes imprimés 8 L'alphabet actuel 9 Alphabets dérivés de l'alphabet grec 10 Articles connexes 11 Notes et références L'origine de l'alphabet selon les Anciens La Grèce antique, dans ses écrits, nous a laissé les témoignages de ses croyances sur l'origine de son écriture. Homère, le premier, mentionne une écriture grecque lorsqu'il narre la légende de Bellérophon dans L'Iliade (VI, 168–170) : « πέμπε δέ μιν Λυκίην δέ, πόρεν δ᾽ ὅ γε σήματα λυγρὰ 1

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Alphabetsphénicien et grec

Phénicien Grec

ʼāleph Α alpha

bēth Β bêta

gīmel Γ gamma

dāleth Δ delta

hē Ε epsilon

wāwϜ digamma

Υ upsilon

zayin Ζ Zêta

ḥēth Η êta

ṭēth Θ theta

yōdh Ι iota

kaph Κ kappa

lāmedh Λ lambda

mēm Μ mu

nun Ν nu

sāmekh Ξ xi

ayin Ο omicron

pē Π pi

ṣādē Ϻ san

qōph Ϙ qoppa

rēš Ρ rho

šin Σ sigma

tāw Τ tau

Φ phi

Χ chi

Ψ psi

Ω omega

Histoire de l'alphabet grec

L’alphabet grec est, historiquement, le premier alphabet utilisé pourécrire une langue indo-européenne. Ce n’est pas une création ex nihilo,car il est dérivé des alphabets utilisés sur la côte de Phénicie, l’alphabetphénicien. Celui-ci est à proprement parler un abjad, un alphabet

consonantique. Cependant, vers le IXe siècle av. J.-C., des matreslectionis y apparurent pour indiquer certaines voyelles, surtout desvoyelles finales .

Premier alphabet à noter véritablement les voyelles, une nécessité pour latranscription des idiomes indo-européens, qui sont essentiellementflexionnels, il a évolué au cours du temps et a donné naissance à denombreux alphabets ultérieurs. Ce système d'écriture s'est rapidementpropagé à l'Est, vers la Phrygie et à l'Ouest, en Eubée. Hors de la Grèce,il fut d'abord adopté par les Etrusques pour transcrire leur propre langue.

L'alphabet grec n'est pas le seul système d'écriture utilisé par les Grecsde l'Antiquité ; en effet, plusieurs siècles avant l'adaptation de l’alphabetphénicien, ils empruntèrent, en le modifiant, le linéaire B aux Minoens.

Sommaire

1 L'origine de l'alphabet selon les Anciens2 Chronologie de l'adoption de l'alphabet

3 La restructuration de l'abjad phénicien

4 Alphabets archaïques locaux5 Évolution aux époques classique et

hellénistique

6 Évolution au Moyen Âge

7 Les textes imprimés8 L'alphabet actuel

9 Alphabets dérivés de l'alphabet grec

10 Articles connexes

11 Notes et références

L'origine de l'alphabet selon les Anciens

La Grèce antique, dans ses écrits, nous a laissé les témoignages de sescroyances sur l'origine de son écriture.

Homère, le premier, mentionne une écriture grecque lorsqu'il narre lalégende de Bellérophon dans L'Iliade (VI, 168–170) :

« πέμπε δέ μιν Λυκίην δέ, πόρεν δ᾽ ὅ γε σήματα λυγρὰ

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Texte de la Coupe de Nestor (écrit de

droite à gauche).

γράψας ἐν πίνακι πτυκτῷ θυμοφθόρα πολλά,δεῖξαι δ᾽ ἠνώγειν ᾧ πενθερῷ ὄφρ᾽ ἀπόλοιτο. »

« Mais [Prœtos] envoya Bellérophon en Lycie, en lui remettant des signes funestes. Sur des tablettesrepliées il avait tracé maint trait meurtrier ; il lui donna l’ordre de les montrer à son beau-père, afin qu’ilsfussent sa mort. »

— Trad. Paul Mazon

Hécatée de Milet, un logographe (chroniqueur) du milieu du VIe siècle av. J.-C., attribue l'invention de l'écriture

grecque à Danaos.

Hérodote , au Ve siècle av. J.-C., affirme que l'écriture grecque fut adaptée des Phéniciens. Il affirmait que cetemprunt s'était réalisé par l'entremise d'une colonie phénicienne, les Géphyriens, qui s'installa en Béotie. Les Grecsutilisaient le terme phoinikeia, les choses phéniciennes, pour désigner leur alphabet.

Pour Hyginus, les Parques créèrent cinq voyelles et les consonnes B et T et Palamède ajouta onze consonnes. Cetalphabet fut alors transmis en Grèce par Cadmos, venu avec les Phéniciens .

Diodore de Sicile dit ceci : Certains attribuent l'invention des lettres aux Syriens, desquels les Phéniciens lesapprirent. Ils les communiquèrent aux Grecs lorsqu'ils vinrent en Europe avec Cadmos ; de là vient que lesGrecs les appelèrent "lettres phéniciennes". Aux tenants de cette opinion, on répond que les Phéniciens nefurent pas les premiers à inventer les lettres, mais qu'ils en changèrent seulement la forme pour formerd'autres caractères, qui ensuite devinrent communs sous le nom de "caractères phéniciens .

Plutarque, s'opposant à l'opinion d'Hérodote, affirment que les Géphyriens, et donc l'alphabet, proviennent d'Eubéeou d'Eréthrie .

La distinction entre Eta et Epsilon ainsi qu'entre Omega et Omicron, adoptée dans la forme ionienne de l'alphabetgrec est traditionnellement attribuée à Simonide de Céos (556-469).

Chronologie de l'adoption de l'alphabet

La majorité des spécialistes estime aujourd'hui que l'alphabet phénicien fut

adopté par les Grecs au début du VIIIe siècle av. J.-C. . Le plus ancien

fragment épigraphique connu date de cette époque (770-750 av. J.-C.) .Les plus vieux textes substantiels trouvés à ce jour sont l'"inscription duDipylon" et le texte de la "Coupe de Nestor". Ces deux textes, écrits avec

l'alphabet "de Cumes" (cf. infra) remontent à la fin du VIIIe siècle av. J.-C..

Cependant, certains chercheurs font remonter l'alphabet grec à des dates

bien plus anciennes: le XIe siècle av. J.-C. pour Naveh (1973) , le

XIVe siècle av. J.-C. pour Stieglitz (1981) et même le XVIII

e siècle av. J.-C. pour Bernal (1990) . J. Février considère toutefois que l'alphabet grec

ne peut en aucun cas être antérieur au Xe siècle av. J.-C. av. J.-C.: avant cette date, les caractères phéniciensn'avaient pas encore tous acquis un graphisme compatible avec les caractères grecs dérivés. Il estime quant à luil'apparition de ces derniers aux alentours de l'an -900 .

Quoi qu'il en soit, les recherches historiques confirment la thèse de l'origine phénicienne de l'alphabet grec, même sil'hypothèse d'une colonie phénicienne en Grèce est rejetée.

Les Grecs ont conservé les mots désignant les lettres phéniciennes, même s'ils ont remanié leurs formes et leursappellations. Ainsi, le A phénicien, représentant un bœuf, était nommé « aleph » par ceux-ci. Le A grec, bien qu'ayantvarié dans sa transcription, est appelé « alpha » ce qui indique son origine, « alpha » ne signifiant rien de particulier en

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Inscription en boustrophédon -

écriture ionienne archaïque. Musée de

Hiérapolis, Turquie.

Évolution de la lettre A.

grec. La plupart des noms de lettres grecques peuvent être expliqués d'une manière similaire. La perte du sens dunom accentua d'ailleurs la modification du mot lui-même.

Un autre indice de l'origine phénicienne est l'ordre des lettres, l'ordrelevantin, qui fut conservé entre l'alphabet phénicien et l'alphabet grec. Deplus, les plus anciens textes grecs connus sont écrits de droite à gauche,comme tous les abjads sémitiques.

Les alphabets archaïques utilisés en Grèce présentaient des variantes,d'autant plus que le sens d'écriture resta longtemps indécis (de droite àgauche, de gauche à droite et parfois même en boustrophédon) ;néanmoins certains traits communs (la même erreur de nommage decertains noms de lettres par rapport au terme originel, par exemple)indiquent que l'importation dans le monde grec a été un phénomène unique.Par l'étude des alphabets locaux, il est possible d'émettre des hypothèsessur le lieu où cet échange culturel a eu lieu.

La restructuration de l'abjad phénicien

La majorité des lettres grecques transcrivaient approximativement lesmêmes sons que les lettres phéniciennes. Cependant, comme les autreslangues sémitiques, le phénicien comportait plusieurs gutturales (’āleph [ʔ],hē [h, e, a], ḥēth [ħ], et ‘ayin [ʕ]) sans équivalent en grec. Parmi celles-ci,seul ḥēth [ħ] fut conservé initialement en grec en tant que consonne pourindiquer un H aspiré. Les autres furent réutilisées pour devenir les voyellesalpha, epsilon et omicron. En outre, les matres lectionis waw (ou) et yōdh(i) devinrent respectivement les voyelles upsilon et iota et, dans certainsdialectes, les semi-voyelles transcrivant approximativement les sons "w" et"y".

Les noms des lettres étant acrophoniques, le ‘ayin fut rebaptisé ultérieurement omicron ("petit o") pour conserver ceprincipe. Le ṭēth (T emphatique) fut utilisé pour noter le [tʰ] grec. Quant au qōph, il fut utilisé un temps en grec sous lenom de koppa ou qoppa (Ϙ), le temps de passer à l'étrusque et par la suite au latin (Q), mais il fut rapidementabandonné, sauf dans la numération. La lettre dérivée du waw, propre à certains dialectes , s'appela d'abord wau,puis fut rebaptisée digamma (par référence à la forme Ϝ, semblable à deux gammas « empilés ») longtemps après sadisparition totale de la langue grecque .

Le phénicien connaissait également quatre sifflantes, alors que le grec n'en possède qu'une seule. Le sāmekh, d'abordabandonné, fut ultérieurement réemployé pour noter le son [ks] (ksi). Quant au sigma, il tire son nom du sāmekh,mais son tracé est issu du šin. Une lettre grecque sampi (ϡ), d'origine incertaine, représentant un son proche de [ts]ou [ss], vécut un moment mais ne fut conservée que dans la numération .

Quelques nouveaux symboles, tels upsilon, phi, khi et psi furent également ajoutés à la fin de l'alphabet (c'est-à-direaprès le tau). L'introduction de consonnes doubles peut s'expliquer par le fait qu'il s'agit là des seules combinaisonsde consonnes permises en grec à la fin d'une syllabe. Ainsi, toutes les syllabes se terminent par une voyelle ou uneseule consonne.

Alphabets archaïques locaux

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Distribution des groupes d'alphabets

locaux d'après Kirchhoff (1887) :

Vert : crétois

Rouge : occidental

Bleu : attique, ionien

Vase corynthien archaïque : Les noms

"Perseus" et "Andromeda" sont

inscrits vers la gauche, mais "Ketos"

vers la droite. Voir aussi l'orientation

du sigma.

Phénicien

Vert Crétois

Rouge Occidental

BleuAttique

Ionien

Ionien classique

Moderne Α Β Γ Δ Ε Ζ Η Θ Ι Κ Λ Μ Ν Ξ Ο Π Ρ Σ Τ Υ Φ Χ Ψ Ω

Prononciation a b g d e w zd h ē tʰ i k l m n ks o p s k r s t u ks pʰ kʰ ps ō

Du VIIIe au VI

e siècle av. J.-C., des variantes locales de l'alphabet sedéveloppèrent. Ces alphabets ont été répartis en trois groupes parKirchhoff en 1887 : il distingue les groupes vert (crétois), rouge(occidental) et bleu (attique, ionien et corynthien). Dans ces groupes, leslettres utilisées pour transcrire les sons «ps», «kh» et «ks» sont différentes.Dans les alphabets bleus, «ks» est transcrit par le symbole Ξ, «kh» par Χet «ps» par Ψ. Dans les alphabets rouges par contre, «ks» est transcrit parΧ, «kh» par Ψ et «ps» n'est pas représenté par un seul signe, mais soit parphi-sigma, soit par pi-sigma, en fonction de la prononciation. Quant augroupe vert, il ne comportait pas ces lettres nouvelles. Dans le grouperouge, il convient de mentionner particulièrement l'alphabet de Cumae (ouKymi, en Eubée). Cette écriture est vraisemblablement celle qui donnanaissance à l'alphabet latin par l'intermédiaire de l'étrusque.

Ce type d'emprunt n'est d'ailleurs pas unique : plusieurs peuples qui neparlaient pas le grec, ni même, dans certains cas, une langue indo-européenne, ont utilisé l'alphabet grec et l'ont adapté à leur langue, formantdes alphabets dits épichoriques. C'est le cas, en Anatolie, des Phrygiens,des Lyciens, des Lydiens, des Cariens. Ces derniers ont la particularitéd'avoir conçu un système d'écriture mi-alphabétique (avec des lettresgrecques), mi-syllabique .

À l'aide de ces variantes et de quelques autres, on s'aperçoit que lesalphabets archaïques et les groupes qu'ils forment correspondent auxroutes commerciales de la mer Égée. De ces études, il ressort quel'emprunt de l'alphabet au phénicien aurait eu lieu au Liban actuel et quel'alphabet se serait répandu à travers le monde grec, en commençant parl'Eubée et Athènes.

Évolution aux époques classique ethellénistique

C’est la variante alphabétique ionienne du groupe bleu qui finit par s'imposer au monde grec. En -403, son usagedevint obligatoire à Athènes pour tout document officiel en lieu et place de l'ancienne variante attique. Son usage,

trente ans plus tard, s'était étendu vers la Béotie et la Macédoine. À la fin du IVe siècle av. J.-C., il avait gagné laquasi totalité du monde grec . En -403, l’alphabet ionien avait déjà évolué et utilisait des lettres différentes pourtranscrire les e et o longs et courts, la lettre H notant désormais le e long.

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Majuscule, Ier ou IIe siècle. Fragment

des Élements d'Euclide sur papyrus.

Onciale du IVe siècle, page de la bible

Son Vieil attique Ionien

[h] Η ( - )

[ɛː] E Η (eta)

[eː] Ε or ΕΙ ΕΙ

[ɔː] Ο Ω (omega)

[oː] Ο or ΟΥ ΟΥ

[kʰ] Χ Χ (chi)

[pʰ] Φ Φ (phi)

[ks] ΧΣ Ξ (xi)

[ps] ΦΣ Ψ (psi)

L'absence de lettre pour l'aspirée [h] ne posait pas de problème en dialecteionien, mais l'attique connaissait encore ce son. On utilisa alors, à l'initiale,la partie gauche du H ( ├ ) pour indiquer une aspiration et la partie droitepour indiquer son absence. Ces signes seront remplacés ultérieurement parl'esprit rude et l'esprit doux, respectivement .

L'introduction des signes diacritiques, des accents et de la ponctuation

dans les textes manuscrits est attribuée à Aristophane de Byzance (IIIe 

‑ IIe siècle av. J.-C.) . Cependant ces signes n'apparaîtront que trèsexceptionnellement dans l'épigraphie où l'on ne rencontre guère, de tempsen temps, que des points séparateurs de mots ou de phrases, ou des traits

horizontaux indiquant des chiffres . Dans les manuscrits, ce n'est qu'au IXe siècle av. J.-C. qu'il commenceront à êtrelargement utilisés.

L’alphabet ionien devint donc d’un usage universel dans le monde hellénistique, se diffusant presque en même tempsque la koinè, langue grecque commune. Seules de légères variantes locales subsistèrent sur le plan graphique duranttoute l’Antiquité.

Mais à cette même époque, à côté de la capitale, anguleuse, utilisée enépigraphie, deux styles différents d'écriture se développèrent, adaptés tousdeux à l'usage de l'encre et aux supports légers (le papyrus, ou, plus tard,le parchemin et le papier). L'onciale ou majuscule , apparue lapremière, était constituée de grandes lettres droites, similaires aux

caractères épigraphiques, mais plus arrondie. Au IIIe siècle av. J.-C., tandisque l'onciale, qui fera preuve pendant de nombreux siècles d'uneremarquable stabilité, continuait à être utilisée, surtout pour les livres, unecursive apparut. Celle-ci s'écartera progressivement du modèle oncial,avec des caractères plus petits, plus étirés, plus simples et avec denombreuses ligatures . Elle était destinée aux autres écrits (lettres privées,documents de la vie quotidienne ...). Les ligatures, de même quel'avènement d'un sigma final (ς) distinct du sigma normal (σ), avaientd'ailleurs l'avantage de faciliter la lecture, en assurant l'autonomie des mots,que rien ne séparait ). Dans la cursive, on distingue trois styles successifs :

la ptolémaïque (IIIe ‑ Ie siècle av. J.-C.), la romaine (I

e ‑ IIIe siècle) et la

byzantine (à partir du IVe siècle) .

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Minuscule du Xe siècle. Manuscrit

vetustissimus, texte de Thucidides.

Minuscule tardive, XVe siècle. Texte

d'Aristote

Évolution au Moyen Âge

Cursive du VIe siècle (contrat privé) sur papyrus

Au milieu du IXe siècle, l'onciale fut remplacée, comme écriture de librairie,par une minuscule, comportant des caractères compacts, arrondis,provenant de l'ancienne cursive. Cette innovation se produisit au monastèredu Stoudion de Constantinople. Les manuscrits de cette époque sontappelés les codices vetustissimi ("très vieux manuscrits"). Par la suite, cestyle se développa, empruntant davantage d'éléments encore à la cursive :

à partir du milieu du Xe siècle, on parle de codices vetusti, de recentiores

à partir du XIIIe et de novelli après 1456 (débuts de l'imprimerie) .

En même temps que la minuscule, l'écriture grecque médiévale adopta lesespaces entre les mots, mais pas immédiatement de manière systématique.Auparavant, les mots se suivaient sans discontinuer ou, plus rarement, ilsétaient séparés par un point à mi-hauteur ou un double point. Les accentstoniques (aigus, graves et périspomènes), ainsi que les signes deponctuation furent utilisés progressivement de manière plus régulière. Leiota souscrit (on écrit désormais ῃ et non ηι) fut utilisé avec les voyelles

longues à partir du XIIIe siècle.

Dans les manuscrits médiévaux, les anciennes onciales étaient souventemployées conjointement avec les minuscules, pour les titres et pour mettreen relief l'initiale d'une phrase ou d'un paragraphe. Comme en latin, cettehabitude fut à la base de l'établissement d'un alphabet bicaméral : lesminuscules modernes dérivent de leurs homologues médiévales et lesmajuscules des onciales. Comme dans les manuscrits occidentauxégalement, des lettrines furent fréquemment utilisées en début de chapitre.

Les textes imprimés

Les premiers textes imprimés reprirent bien entendu les caractères manuscrits de leur époque, qui, dès lors, ne semodifièrent plus guère. On constate toutefois une diminution progressive de l'usage des ligatures et des abréviations.Pour la numération, on conserva néanmoins la ligature Ϛ (stigma valant sigma + tau) qui avait remplacé le digammapour figurer le chiffre 6. Tout en gardant l'appellation "stigma", on lui substitue souvent le sigma final, les deuxcaractères étant proches dans leur graphisme.

L'alphabet actuel

Voir aussi : Paragraphe « prononciation » du grec moderne.

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Texte imprimé, extrait d'une édition

d'Aristote de 1566

Écriture actuelle imprimée et

manuscrite et prononciation moderne

des noms des lettres.

À l'instar de ce qui s'est produit avec les caractères latins, une nouvelleécriture manuscrite a fait son apparition à côté des caractères imprimés.Certaines lettres y revêtent une forme sensiblement différente.

En 1982, l'orthographe monotonique fut adoptée officiellement. Onabandonna donc le système des trois accents (aigu, grave et périspomène)pour ne conserver que l'accent aigu. Le grec avait en effet remplacé depuislongtemps les accents de hauteur par un accent d'intensité. Les aspirationsinitiales ne se prononçant plus depuis longtemps, les esprits furentégalement abandonnés.

De manière plus générale, la prononciation du grec a profondément changéau cours d'une évolution entamée dès avant le début de notre ère,essentiellement par iotacisme et monophtongaison. Mais l'orthographe estrestée conservatrice : de nombreux sons maintenant identiques continuent às'écrire de manières différentes. D'autre part, des groupes de consonnespermettent aujourd'hui de noter des sons qui ne sont plus représentés dansl'alphabet mais qui sont présents dans la langue, surtout dans des motsd'origine étrangère. C'est ainsi, par exemple, que le groupe nu-tau (ντ)permet de transcrire le son D, le delta se prononçant aujourd'hui DH ; legroupe mu-pi (μπ) permet d'écrire le son B qui a disparu de l'alphabetdepuis que le bêta a évolué vers le son V .

Alphabets dérivés de l'alphabet grec

L'alphabet étrusque, utilisé dès le VIIe siècle av. J.-C., qui donnera

naissance plus tard à l'alphabet latin, est un dérivé du grec, via les coloniesde la Grande Grèce. Il convient de remarquer que l'alphabet utilisé dansces colonies n'était pas l'alphabet ionien, mais l'alphabet utilisé en Eubée.Ainsi l'écriture étrusque dérive non de l'alphabet grec classique, mais d'un alphabet archaïque de type "occidental".

L'alphabet gotique, inventé probablement par l'évêque arien Wulfila est une adaptation de l'alphabet grec dans sagraphie onciale.

Les Coptes d'Égypte se sont servis de l'alphabet grec oncial, auquel ils ont ajouté des caractères adaptés dudémotique égyptien, pour écrire leur langue : c'est l'alphabet copte.

Au IXe siècle av. J.-C., les moines Cyrille et Méthode adaptèrent ce même alphabet grec, toujours dans sa graphieonciale, pour transcrire le vieux slave, créant ainsi l'alphabet glagolitique, ancêtre du cyrillique.

Articles connexes

Alphabet grec ;

Diacritiques de l'alphabet grec

Alphabet phénicien ;

Épigraphie ;

Numération grecque

Digamma

Écriture

Paléographie.

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Notes et références

1. M. O'Connor, Epigraphic Semitic Scripts, dans Daniels et Bright, The World's Writing Systems, 1996.2. Hérodote, Enquêtes, V, 58.3. Hyginus,Fabulae, 277.4. Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, V.

5. Plutarque, Œuvres morales, V, 860e, De la malignité d'Hérodote.6. N. Stampolidis et V. Karageorghis, The date of the earliest inscribed objects; A.W. Johnston, The alphabet, dans Sea

Routes from Sidon to Huelva: Interconnections in the Mediterranean, éd. N. Stampolidis et V. Karageorghis, 2003,263-76.

7. Pierre Swiggers, Transmission of the Phoenician Script to the West, dans Daniels et Bright, The World's WritingSystems, 1996.

8. Joseph Naveh, "Some Semitic epigraphical considerations in the antiquity of the Greek alphabet", American journal ofarchaeology 77: 1-8 (1973).

9. Robert R. Stieglitz, "The Letters of Kadmos: Mythology, Archaeology, and Eteocretan", Pepragmena tou DiethnousKretologikou Synedriou (Héraklion, 29 août – 3 Septembre 1976), Athènes, 1981.

10. M. Bernal, Cadmean Letters: The Transmission of the Alphabet to the Aegean and Further West Before 1400 B.C.,Eisenbrauns, 1990, isbn=0-931464-47-1.

11. J. Février, Histoire de l'écriture, Payot, 1984, p. 395 et ss.12. En mycénien, en grec de Laconie, Béotie et Chypre. Voir digamma.

13. Au IIe siècle av. J.-C. au plus tard. Cf . digamma.14. J. Février, Op. cit., p. 388 ss.15. J. Février, Op. cit., p. 410-417.16. J. Février, Op. cit., p. 401.17. Voir Diacritiques de l'alphabet grec et J. Février, Op. cit., p. 406.18. J. Février, Op. cit., p. 407.19. Voir numération grecque.20. Le terme prête à confusion, ce qui entraîne des contradictions apparentes entre les sources : J. Février et ses

prédécesseurs utilisent le terme "onciale" pour désigner cette écriture dès l'époque hellénistique. Elle en présente eneffet toutes les caractéristiques. Cependant, aujourd'hui, on tend à réserver le terme "onciale" à sa forme médiévale,

contemporaine de l'onciale latine (à partir du IIIe siècle après J.-C.), et à utiliser le terme majuscule pour sa formeantérieure. Mais cette appellation peut amener d'autres confusions ("majuscule", par opposition à "minuscule", qui

n'apparaît au sens propre qu'au IXe siècle).21. Une liste de celles-ci est disponible sur [1] (http://www.sources-

chretiennes.mom.fr/upload/doc/Cours_paleo_grecque.pdf) , p. 16. D'après B. A. Van Groningen, Short manual ofGreek palaeography, Leyden, 1955, p. 31 - 45.

22. J. Février, Op. cit., p. 404 ss.23. J. Février, Op. cit., p. 406.24. G. Bady, Paléographie grecque, éléments de cours", Univ. Lyon, 2001, p.13.[2] (http://www.sources-

chretiennes.mom.fr/upload/doc/Cours_paleo_grecque.pdf)25. Paul Hansall, Glossary of Terms Used in Paleography - A. Dain, Les manuscrits, Paris, 1949.26. Cf. Grec moderne, écriture et prononciation.

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