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Armand Colin Présentation Author(s): Michel Pierssens and Jacques Neefs Source: Littérature, No. 124, HISTOIRES LITTÉRAIRES (DÉCEMBRE 2001), pp. 3-5 Published by: Armand Colin Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41704836 . Accessed: 14/06/2014 16:44 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Armand Colin is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Littérature. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.44.77.38 on Sat, 14 Jun 2014 16:44:33 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

HISTOIRES LITTÉRAIRES || Présentation

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Armand Colin

PrésentationAuthor(s): Michel Pierssens and Jacques NeefsSource: Littérature, No. 124, HISTOIRES LITTÉRAIRES (DÉCEMBRE 2001), pp. 3-5Published by: Armand ColinStable URL: http://www.jstor.org/stable/41704836 .

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Présentation

Histoires littéraires au pluriel... Pourquoi le pluriel semble-t-il désormais s'imposer dans le travail de V histoire?

Les études littéraires construisent , pour une part , V espace des œuvres. Elles le font en ouvrant V accès à celles-ci, en les éditant, en les choisissant, en les commentant, c'est-à-dire en leur donnant «présence» au présent.

C'est parce que nous sommes pris dans le mouvement d'une cons- truction à la fois «historique» et « historienne », qui est le mouvement de la littérature elle-même, comme de ses lectures, que nous devons adop- ter le pluriel. «S'il m'était donné de lire n'importe quelle page d'aujourd'hui - celle-ci par exemple - comme on la lira en l'an 2000, je connaîtrais la littérature de l'an 2000», écrivait Borges en 1951 Ce sentiment de la variation des œuvres dans le temps du fait même de la compréhension qu'il est possible d'en avoir en un moment donné, est bien, semble-t-il, fondateur de la conscience littéraire elle-même. Mais cela ne constitue pas pour autant une «histoire» unique, cela nous interdit, tout au contraire, d'aligner les œuvres dans une historicité sim- ple, qui serait comme le cours linéaire de la littérature.

La « littérature » est elle-même une notion et une activité qui n'ont de sens que prises dans un champ d'oppositions complexes, historique- ment variant, comme le montre José-Luis Diaz en suivant les partages dans lesquels se construit, de la fin du xvnf siècle à la seconde moitié du XIXe siècle, «l'autonomisation de la littérature». Celle-ci se fait par une différenciation mouvante qui la distingue peu à peu de la philoso- phie, de la poésie, de «l'art», jusqu'à ce que soit posée, avec Mallarmé, l'évidence de la «littérature pure». La « littérature » construit ainsi, de son mouvement propre, sa «notion», dans une réflexivité essentielle.

Mais, la littérature d'une période est aussi ce que la tradition criti- que retient et construit, et ses reliefs tiennent aux regards qui l'explo- rent, à distance dans le temps. Margaret Cohen le montre en proposant « une reconstruction du champ littéraire » du XIXe siècle, en s 'attachant aux « dynamiques intralittéraires », et en s' intéressant, dans une perspec- tive post- structuraliste nouvelle , aux vastes cantons aveugles de la pro- duction romanesque, en particulier féminine, du début du XIXe siècle. Elle s'attache ainsi au «sous-genre sentimental» contre lequel les codes réa- listes se sont élaborés, et explique ce qu 'est exhumer une vaste littératu- re depuis longtemps enfouie, littérature hors d'usage, et ramener de l'archive littéraire les structures oubliées qui pourtant ont été un temps

1. «Note sur (à la recherche de) Bernard Shaw», Œuvres complètes, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1993, 1. 1, p. 790. Ce texte est cité ici même, p. 64, par Ley la Perrone Moisés.

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LITTÉRATURE N° 124 -DÉC. 2001

■ HISTOIRES LITTÉRAIRES

familières , et profondément adoptées 2. La question de «l'évaluation littéraire» est par là-même posée , dans la mesure où le paysage d'une période ne cesse de se transformer, à la mesure même de la compré- hension que Von veut en construire ou du sens qu'on veut lui donner .

Le pluriel des «histoires littéraires» tient ainsi aux perspectives toujours renouvelées qui modèlent l'espace littéraire. Les écrivains et les critiques en reprennent sans cesse le dessin. Christophe Pradeau suit ainsi «la dynamique du mémorable» élaborée par Thibaudet, une dyna- mique qui joue de la coprésence des ruptures dyschroniques et de l'enchaînement chronologique , dynamique partagée entre articles et ouvrages et qui «remet en cause, de façon à la fois subtile et radicale, l'histoire littéraire positiviste, en faisant intervenir, comme une quatriè- me dimension, le temps de la mémoire». Mais les écrivains construisent également leurs manières propres de visiter le patrimoine littéraire, de le critiquer, de l'emprunter, de l'absorber, comme Sartre, se faisant « miroir critique de Maupassant dans La Nausée» par l'invention d'un fantastique «en trompe-l'œil», ainsi que le montre Fabrice Thumerei. C'est également, autrement, ce que fait Borges, quand il est écrivain- professeur de littérature, et qu'il invente un «comparatisme libre» et infini, proposant une «histoire littéraire de la lecture», une histoire lit- téraire de «sa» lecture, et du plaisir de lire, comme le montre Ley la Perrone-Moisés en commentant le Cours de littérature anglaise que l'écrivain avait donné à l'Université de Buenos Aires.

Le pluriel tient également aux enjeux «nationaux» des «histoires littéraires », en particulier ceux des «littératures périphériques », comme le souligne Micheline Cambrón, à propos de « la littérature québécoise », en montrant la méfiance qu'il faut avoir envers les « récits » qui veulent constituer en histoire une littérature («Des récits et du grand récit. Raconter l'histoire de la littérature québécoise »), et en démêlant les contradictions qui président aux processus de la constitution d'une «littérature nationale».

Mais le pluriel tient enfin, et peut-être d'abord, au chantier de l'édition des textes anciens, à l'existence de la pluralité des œuvres devenues inaccessibles parce que non rééditées : Alain Vaillant montre « l'enjeu théorique» d'une «édition des textes du passé», dans ses liens avec le «marché éditorial », et l'urgence qu'il y a à utiliser les moyens techniques qui sont à notre disposition pour «exhumer une masse énor- me de textes sans valeur définissable»; se formerait là une rencontre vraiment nouvelle entre histoire et littérature, dans une acception de l'archive rendue vivante et active.

2. Ce qu'elle fait dans son livre The Sentimental Education of the Novel , Princeton University Press, 1999 dont l'article publié ici est l'introduction, traduite et adaptée.

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PRÉSENTATION ■

Ouvrir ce pluriel des histoires littéraires , c ' est aussi « reconnaître » quelques lieux de cette histoire non écrite de la littérature , qui ne peut être que constamment «réécrite» à travers les œuvres elles-mêmes , intelligibles dans une histoire à laquelle , en retour , elles donnent sens.

Michel Pierssens (Université de Montréal) et Jacques Neefs (Université Paris 8)

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