149

Click here to load reader

Histomag 92

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Histomag 92La Belgique en 2dm GM

Citation preview

Page 1: Histomag 92

39-45Histomag LA SECONDE GUERRE MONDIALE PAR DES PASSIONNES POUR DES PASSIONNES - N°92 JUILLET-OCTOBRE 2015

GR

ATU

IT-

ISSN

22

67- 0

785

Eddy De Bruyne, Jean-Yves Goffi,Jean-Louis Marichal, Prosper Vandenbroucke,Grégory Haffringues

dans la Seconde Guerre mondialeLA BELGIQUE

Page 2: Histomag 92

Histomag est produit par uneéquipe de bénévoles passionnésd’histoire.À ce titre, ce magazine est le premiertrimestriel historique imprimable etentièrement gratuit. Nos colonnes sontouvertes à toutes les personnes quisouhaitent y publier un article,communiquer des informations, faireune annonce …

Si vous souhaitez devenir partenaired’Histomag, vous avez la possibilité decontacter notre rédacteur en chef.

Responsable d’Édition : Prosper VandenbrouckeRédacteur en Chef : Vincent DupontConseillers de rédaction : Patrick Babelaere, AlexandreSanguedolce, Frédéric BonnusResponsable communication et partenariats : Jean CotrezPremières Corrections : Pierre GuiraudRelecture et correction définitive : Vincent Dupont, FrédéricBonnus, Pierre Guiraud, Patrick Babelaere, Marc TaffoureauInfographie et Mise en pages : Frédéric BonnusRubrique Commémoration : Marc TaffoureauResponsable rubriques : Jean Cotrez

Numéro ISSN : 2267 - 0785

Contacts :Forum : [email protected] : [email protected] :Forum : http://www.39-45.orgHistomag : http://www.39-45.org/histomag

Histomag est une publication trimestrielle gratuite du Forum« Le Monde en Guerre » sous format pdf. Marque, logos, désignet contenus déposés et protégés. Toute reproduction sousquelque support que ce soit est interdite sans notre autorisationet/ou celle de l’auteur concerné. Le format «  pdf  » est unepropriété d’Adobe inc.

3 Editorial (Vincent Dupont)

4 Hommage à Jean-Louis Crémieux-Brilhac (Jean Cotrez)

12 Et la neutralité de la Belgique ? (Vincent Dupont)18 Uniformologie des forces belges

(Jean-Yves Goffi et Mahfoud Prestifilippo)24 La ligne KW Belge (Jean Cotrez)30 La campagne des 18 jours (Prosper Vandenbroucke)45 La force publique dans la guerre (Prosper Vandenbroucke)53 Les Belges dans la RAF (Prosper Vandenbroucke)57 Un as Belge, « Van Lierde» (Grégory Haffringues)62 Le recrutement dans les stalags et les oflags en faveur de la légion Wallonie (Eddy De Bruyne)91 La 27.SS-Freiwilligen-Grenadier division Langemarck

(Alexandre Sanguedolce)100 Les volontaires belges dans la Luftwaffe (Grégory Haffringues)102 La brigade Piron (Jean-Louis Marichal)117 La question Royale (Prosper Vandenbroucke)

121 Résistance et brosse à dents (Xavier Riaud)123 L’opération Regenbogen (Nicolas Moreau)126 Le Deutschland/Lützow (Patrick Fleuridas)137 Le coin des lecteurs (Vincent Dupont)

N° 92 — JUILLET - OCTOBRE 2015

La Belgique dans la Seconde Guerre mondiale

La couvertureSur une idée originale de Prosper.Une d’un journal Belge d’époqueen fond.

Page 3: Histomag 92

3

par Vincent Dupont

Jean Cotrez nous parlera ensuite de la ligne KWet pour plus de réalisme, c’est non pas à travers unarticle mais le récit d’un combattant belge, JulesLoxhay, que vous pourrez en apprendre plus sur lacampagne des 18 jours. Nous redécouvrirons ensuitece que fut la force publique du Congo belge et saparticipation au conflit grâce à Prosper Vandenbrouc-ke. Ce dernier nous présentera également les belgesqui ont servi dans la RAF avant que Grégory Haffrin-gues ne s’attarde justement sur l’as belge Van Lierde.Non loin de là, sur le continent ravagé par la guerre,la guerre continuait, et Eddy De Bruyne nous livrera

une étude approfondie du recrute-ment mené pour la légion Walloniedans les stalags et oflags. Nousresterons d’ailleurs dans la collabo-ration armée puisqu’AlexandreSanguedolce nous présenteraquant à lui la division SS Lange-marck avant que Grégory Haffrin-gues ne s’arrête sur quelquesvolontaires belges ayant rejoint laLuftwaffe. Nous reviendrons sur laBelgique au moment de la Libéra-tion avec un récit des périples de laBrigade Piron par Jean-Louis Mari-chal et pour finir c’est la questionroyale qui nous sera présentée parProsper Vandenbroucke.

Bien évidemment, outre notre dossier spécial,vous pourrez trouver en deuxième partie, comme àl’accoutumée, nos rubriques «  hors-dossier  », pourcontinuer de vous faire découvrir l’histoire de laSeconde Guerre sous d’autres angles thématiques.Vous retrouverez ainsi un article sur l’opération Re-genbogen par Nicolas Moreau avant que Xavier Riaudne nous parle des résistants dans le kommando deHeinkel. Patrick Fleuridas nous fera découvrir l’histoiredu navire de guerre Deutschland devenu Lützow.Enfin nos lecteurs retrouveront, comme d’habitude, laprésentation de quelques ouvrages que la rédaction ajugés bon de vous recommander.

Toute la rédaction de l’Histomag 39-45 voussouhaite une excellente lecture  ! Je rappelle quel’Histomag 39-45, fier de compter dans ses contribu-teurs des historiens professionnels et des passionnésavertis, ouvre ses colonnes à tous, y compris etsurtout aux historiens de demain. Donc si vous avezune idée, un projet, n’hésitez pas  ! Contactez larédaction !

Après les récentes dispari-tions d’hommes comme BobMaloubier ou Jean-Louis Cré-mieux-Brilhac, figures de laFrance Libre, l’entrée de Ger-maine Tillion, Geneviève An-thonioz-De Gaulle, Jean Zayet Pierre Brossolette au Pan-théon, nous pouvons consta-ter que si les témoins de ceconflit qui nous intéresse

tant disparaissent peu à peu, la mémoire collectiven’oublie pas le courage et l’exemple qu’ils ont moti-vé. Mais derrière ces hommes et ces femmes illus-tres il reste encore de nombreux témoins de laguerre, qui ont chacun leur histoire aussi riche l’uneque l’autre mais qui eux aussi dispa-raissent malheureusement peu à peu :ce sont nos pères, nos mères, nosgrands-pères et nos grands-mères.

Leur mémoire parfois défaillan-te que nous écoutons depuis notreenfance, parfois d’une seule oreille – lajeunesse peut être bien ignorante hé-las  ! – ne doit pas être considéréecomme insignifiante, loin de là. Tantque leur santé le permet encore maisaussi parce que nous le pouvons –chaque téléphone est aussi un dicta-phone de nos jours – il nous appartientde recueillir le plus souvent possibleleurs souvenirs afin qu’ils perdurent etpuissent être transmis pour unemeilleure connaissance du conflit auxprochaines générations. Nous avons cette chanceque chacun de nous puisse apporter sa pierre à lamémoire collective, saisissons-la tant qu’il est tempset au prochain repas de famille demandez leur deparler, enregistrez-les, n’orientez qu’avec parcimo-nie le récit de leurs souvenirs et vous obtiendrez unesource inestimable. Elle-même fidèle à sa volonté detransmettre et faire connaître ce qui peut être oubliédans ce conflit, la rédaction de l’Histomag 39-45 asouhaité continuer sa série d’étude sur les petitspays peu étudiés en abordant aujourd’hui la Belgi-que dans la guerre.

Aussi après avoir parcouru l’hommage quenous avons voulu rendre à Jean-Louis Crémieux-Bril-hac ainsi que le reportage présentant nos récentes –et passionnantes ! – journées du forum, nous tente-rons d’étudier plus en détail ce que fut la Belgiquependant le second conflit mondial. C’est tout d’abordvotre serviteur qui tentera de résumer que ce fut laneutralité belge à l’approche du conflit, avant queJean-Yves Goffi et Mahfoud Prestifilippo ne nousprésentent l’uniformologie des forces belges.

Histomag - Numéro 0

Editorial

Page 4: Histomag 92

après une marche de plus de 400 km, l’Unionsoviétique où il est arrêté par l’armée rouge.L’Union soviétique étant à cette date encorel’alliée de l’Allemagne, il est à nouveau empris-onné. Il fera notamment un passage à la Loubi-anka qui deviendra plus tard le siège du KGB.

A noter que c’est en lisant un journal distribuéaux prisonniers par les Allemands, qu’il prendconnaissance de l’appel du 18 juin d’un certainCharles de Gaulle …

Suite à Barbarossa, après un transfert à Grya-zovetz où il reste jusqu’au 30 août 1941 il estenfin libéré après 8 mois d’emprisonnement enUnion soviétique et peut, en compagnie de 218autres évadés français gagner Londres où ilarrive le 9 septembre 1941.

l n’est pas dans les habitudesdu HM de faire des nécrolo-gies mais nous faisons une

exception pour Jean-LouisCrémieux-Brilhac, décédé le 8 avrildernier à l’âge de 98 ans pourplusieurs raisons. D’abordl’actualité récente avec la pan-théonisation de Germaine Tillion,Geneviève de Gaulle-Anthonioz,Jean Zay et Pierre Brossolette con-temporains de Mr Crémieux-Bril-hac et engagés comme lui dans lalutte officielle ou clandestine con-tre l’occupant. Ensuite par sonparcours hors norme depuis laligne Maginot jusqu’au poste deconseiller Etat, en passant parl’Union soviétique, l’Allemagne etLondres aux côtés de Charles Degaulle. Enfin dans l’Histomag 39-45 numéro 91, Marie Nancy, réal-isatrice du film « les saboteurs del’ombre et de la lumière  » avaitdéjà évoqué Mr Crémieux-Brilhacpuisqu’il était conseiller historiquesur son tournage. Vous retrouver-ez son hommage à la fin de cetarticle.

Né en janvier 1917 à Colombe, MrCrémieux-Brilhac fait de brillantes étudesqu’il conclut par des études de lettres etd’histoire à la Sorbonne. Dès 1935 à seule-ment 18 ans, il fait parti du comité devigilance des intellectuels antifascistes.Après son passage aux EOR, il est mobiliséen 1939 et affecté en tant qu’aspirant sur laligne Maginot. Il est fait prisonnier en juin1940 et envoyé comme beaucoup d’autresdans un Stalag en Allemagne, plus précisé-ment en Poméranie. Stalag dont il s’évadeen Janvier 1941 et parvient à rejoindre,

4 Histomag - Numéro 92

IHommage à

Jean-Louis Crémieux-Brilhacpar Jean COTREZ

interview

Jean-Louis Crémieux-Brilhac

Page 5: Histomag 92

∙ Retour par l’URSS en 1945

∙ Ici Londres. Les voix de la liberté en 1975

∙ Les français de l’an 40 en 1990 en 2 tomesde 700 pages chacun.

∙ Les français libres. De l’appel du 18 juin àla libération en 1996

∙ Prisonniers de la liberté  : l’odyssée des218 évadés par l’URSS en 2004

La somme de ses écrits sur la France libre fera delui, à son corps défendant, l’historien officiel decette institution.

Parmi ses nombreuses décorations, en 2014 il estélevé à la dignité de Grand’croix et grand officierde la Légion d’honneur.

Pour finir, je laisse la parole à Marie Nancy, qui,dès qu’elle a appris le décès de Mr Crémieux-Brilhac, m’a contacté pour me proposer spontané-ment de lui rendre un hommage si, Histomag39-45 faisait quelque chose en son honneur. Je tiensà la remercier chaleureusement.

5 Histomag - Numéro 92

interview

Il s’engage dans les forces françaises libres sousle pseudonyme de Brilhac. Il a 24 ans. Affecté aucommissariat à l’intérieur du CNFL. A 25 ans, il estnommé, secrétaire du comité exécutif de propa-gande et chef du service de diffusion clandestinede la France libre. Il occupera ce poste du print-emps 1942 à août 1944 ce qui le conduira àintervenir sur les ondes de Radio Londres. Son rôleest d’écouter radio Paris et radio Vichy afin depouvoir réagir aux mensonges proférés sur ces 2radios. Il est en charge de faire larguer des tractsen France à destination de la résistance. Ces tractssont destinés à informer et à guider la résistancequi manque cruellement d’informations fiables.

A la libération en septembre 1944, il est cofonda-teur de la Documentation française dont il devien-dra par la suite directeur. Le rôle de cetteinstitution est de mettre le savoir dans tous lesdomaines à la portée des décideurs, des cherch-eurs et également du quidam. En 1954, ils’engage en politique aux côtés de MendèsFrance dont il devient conseiller pour les ques-tions concernant les études scientifiques avant dedevenir à nouveau conseiller auprès du ministrede l’Education Nationale en 1956 jusqu’au départde Mendès France du gouvernement en 1958. Parla suite il continuera une carrière de haut-fonc-tionnaire toujours gravitant autour des étudessupérieures, de la connaissance, de la rechercheet la promotion et la diffusion de celles-ci.

Il est nommé conseiller Etat de 1982 à 1986.

La retraite venue, Jean-Louis Crémieux-Brilhac selance dans l’écriture et pour commencer il relateraquelques-unes des aventures qu’il a lui-mêmevécues. On pourra citer entre autre :

Page 6: Histomag 92

Il rejoint le général de Gaulle à Londresoù il devient le secrétaire du Comitéexécutif de propagande et le chef duservice de diffusion clandestine de laFrance Libre. A plusieurs reprises, on aentendu sa voix au micro de Radio-Lon-dres. Il était de ceux qui avaient laresponsabilité d’élaborer les grandesémissions londoniennes, à destinationde l'Europe occupée par Hitler. En1944, Jean-Louis Crémieux-Brilhac vou-lait rejoindre la Résistance, directe-ment sur le territoire français. Ledestin et l’état-major de Londres en ontdécidé autrement … Transmettre àtoute l’Europe les messages du combatmené par la France Libre, c’était soute-nir, accompagner et guider la Résis-tance intérieure. C’était aussi rendrel’espoir de la victoire, du retour à laliberté et à la souveraineté de leurpays, aux populations persécutées etenchaînées sous le joug nazi. C’est ainsique plus de cinquante mille messagesfurent envoyés par Londres … PourJean-Louis Crémieux-Brilhac, communi-quer était une manière exemplaire derésister. Il a honoré cette noble causejusqu’aux derniers instants de sa vie.

Marie Nancy, réalisatrice TV6 Histomag - Numéro 92

interview

J’ai eu la chance de travailler sept an-nées avec Jean-Louis Crémieux-Brilhac,grand historien du second conflit mon-dial, et de réaliser avec lui trois filmssur la Résistance et l’Occupation. Dansle dernier de ces trois films «Les Sabo-teurs de L’ombre et de la Lumière»réalisé en 2014, l’historien, ancien ré-sistant de la France Libre, explique lesliens étroits entre la France Combat-tante de Londres et la Résistance sur leterrain, en France. Travailler avec Jean-Louis Crémieux-Brilhac c’est être àl’école de la rigueur et de la précisiondans la recherche historique. C’est aus-si avoir toujours à l’esprit, l’exigence dela sobriété dans l’écriture du sujet trai-té. Aujourd’hui qu’il n’est plus là pourme guider et me conseiller dans mesrecherches et mes écritures, je mesurecombien il me manque, même s’il m’alaissé en legs, l’enseignement de cho-ses très précieuses qui ne me quitter-ont pas. Jean-Louis Crémieux-Brilhacc’est l’élégance, la générosité, la sim-plicité mais aussi une très grande pu-deur qui vous invite au respect.

C’est surtout un homme d’une trèsgrande mémoire. A ma demande, il estvenu le 13 décembre 2013 à Bordeaux,pour animer une conférence sur laFrance Libre, accompagné du jeunehistorien Philippe André. A presque 97ans, il a tenu toute la conférence etrépondu aux questions du public, sansnotes ni aucune marque de fatigue. Il aépoustouflé par sa vivacité intellectu-elle, son humour et son inépuisablemémoire, les bordelais qui assistaient àcette soirée exceptionnelle. Tous s’ensouviennent … Jean-Louis Crémieux-Brilhac est l'une des dernières grandesfigures de la Résistance et de la FranceLibre. En 1941, après avoir connu ladureté des stalags allemands et desprisons russes et parcouru un incroy-able périple,

Marie Nancy

Page 7: Histomag 92

C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés ànouveau, les 15, 16 et 17 juin derniers. Pour toutvous avouer je ne pouvais pas venir le premierjour et ça m’a embêté, car rater Dynamo dans sonenvironnement naturel, l’imaginant désigner dudoigt les positions françaises de la poche deDunkerque qu’il connait comme le fond de sonjardin (c’est en fait réellement le fond de sonjardin), arpenter les positions bétonnées françai-ses et allemandes de la cité corsaire, ça medonnait envie  !! Enfin faut bien bosser … Maisj’étais au rendez vous du samedi à 9h30 pourrencontrer tous ceux qui étaient venus à traversle brouillard et à peine descendu de voiture,Prosper et moi nous nous sommes parlés commesi nous nous étions quittés la veille, bon à part lebeau temps qui n’était pas au rendez vous, jevous avoue que le sujet abordé d’entrée ce fut lapréparation de ce numéro 92 justement, en parti-culier. Bref aux journées tout se passe naturelle-ment, et c’est ça qui est sympa dans ces journées,on discute, on se fait des bons repas, et on faitsurtout des visites car le propre des journées duforum c’est aussi que nous faisons toujours ensorte qu’elles se déroulent dans un secteur quel’un de nous peut faire découvrir, et où les sites àvisiter ne manquent pas d’intérêt.

7 Histomag - Numéro 92

Les journées

Pour ceux de nos lecteurs ou des membres duforum le Monde en Guerre qui ne les connaî-traient pas encore, les journées du forum sont unesorte de réunion de famille de l’équipe du forumet de l’Histomag à laquelle les membres sonttoujours conviés. Nous ne nous connaissons leplus souvent que sur le net, via le forum, via leséchanges que nous pouvons créer en MP, nousnous apprécions, nous nous tutoyons, mais il estvrai que nous ne nous voyons pas souvent en faceà face, voilà ce à quoi les journées du forumcherchent à remédier. Cette année c’était le NordPas de Calais qui était à l’honneur (félicitations àFred et Esther d’ailleurs, pour être venus depuisleur lointain Languedoc).

Alors j’en entends déjà qui pourrait se dire, « maisça peut paraître bizarre, on ne s’est jamais vu, jene sais pas si je viendrai moi ». N’ayant jamaistrop voulu mélanger vie sociale sur le net et«  vraie vie  » comme on dit, j’avais moi-mêmeune petite appréhension la première fois, c’était ily a quelques années, au musée du Bourget, maistrès vite, je vous rassure, tout s’est passé trèsnaturellement, «  sans chichi  ». Vu que l’on secroise sur le forum quasiment tous les jours,quand on se retrouve en face on continue dediscuter naturellement comme la veille, commesi on se voyait tous les jours, et on parle chars,avions, calibres, béton, avions, anecdotes et peti-tes histoires durant le conflit, bref ce qu’on faittous les jours ! La Batterie Todt

Musée de l'opération Dynamo

par Vincent DUPONT

Page 8: Histomag 92

Sur tous les sites que nous avons visitéDynamo et Shelburn n’ont pas manqué d’enrichirla visite, qu’ils en soient remerciés. L’après mididu 16 c’est la base de Mimoyecques qui devaitcontenir les canons V3 que nous avons découvert,véritable forteresse dédiée à la destruction deLondres, elle fut très impressionnante, tout com-me les deux autres bases que nous avons visitéesle dimanche : Eperlecques et Helfaut.

8 Histomag - Numéro 90

Les journÈes

Cette année nous avions un programme trèsbétonné, c’est le moins qu’on puisse dire  ! Etentre deux belles histoires d’animaux dont seuleRay a le secret (petit clin d’œil à une fidèlelectrice) nous avons pu visiter la batterie Todt auCap Gris Nez ainsi que les autres batteries dusecteur que Shelburn et Dynamo n’ont pas man-qué de commenter, de décrire.

La Batterie Todt

Les journées

Page 9: Histomag 92

9 Histomag - Numéro 90

Base de Mimoyecques

Système de propulsion des canons de Mimoyecques

Les journées

Page 10: Histomag 92

laissé le même sentiment que la veille sur legigantisme du programme de destruction hit-lérien qui, grâce à l’aviation alliée, ne vit jamais lejour.

1 0 Histomag - Numéro 92

En effet, nous avons continué de découvrirles sites « secrets » du IIIe Reich dans le nord dela France le lendemain. Les deux sites de lance-ment de V2 d’Eperlecques et de Helfaut nous ont

Blindage des bouches de sortiesdes tubes à Mimoyecques(Poids 53 t.)

Base d'Eperlecques

Base d'Eperlecques

Bunker de Wizernes-Helfaut

Les journées

Page 11: Histomag 92

Remerciements : à tous pour ces belles journées,merci pour les photos mises en ligne que j’ai purécupérer et merci aussi à Shelburn pour m’avoirenvoyé la documentation ;)

1 1 Histomag - Numéro 92

Toutes ces visites, très bien faites et enri-chies des commentaires de Dynamo, m’ont laisséun excellent souvenir. L’organisation était parfaite(merci Marie également  !) et il est tout naturelque l’un des principaux sujets de conversation àtable ait souvent été la prochaine destination desjournées du forum qui ne manqueront pas, j’ensuis sûr, d’être aussi réussies !

PhotoS de groupe à Mimoyecques

Les journées

Page 12: Histomag 92

C’est en effet l’éternelle question, surtout du point de vue français : mais pour-quoi la Belgique était-elle neutre alors que tout indiquait que les pays ayant combattul’Allemagne entre 1914 et 1918 auraient à nouveau à le faire ? Dans quelles circonstancescette neutralité avait été décidée et surtout qu’en était-il vraiment ? C’est ce que nousallons tenter de découvrir et résumer.

1 2 Histomag - Numéro 92

Et la neutralitéde la Belgique ?

La SDN devait garantir la paix pour la Belgique,ce rêve s'effondra avant d'avoir été vraiment achevé

Page 13: Histomag 92

et inversement si l’Allemagne attaquait la Belgi-que. Ainsi la neutralité belge ne durerait que letemps de la paix, ce qui n’est pas vraiment lepropre de la neutralité !

Or à partir de janvier 1933, cette paix quela Société Des Nations entend préserver contrevents et marées sans savoir concrètement dequelle manière elle pourrait le faire en cas debruits de sabre, semble justement être mise à mal.Le départ de l’Allemagne de la SDN et ses viola-tions du traité de Versailles ne font qu’aggraver lasituation. La SDN et Locarno étant désormais ban-cals du fait de ce retrait du Reich du concert desnations c’est tous les piliers sur lesquels la diplo-matie belge reposait qui s’effondrent et le royau-me doit alors revoir en profondeur les conditionsdans lesquelles il pourrait préserver cette neutrali-té si importante à son intégrité.

Pour écarter tout risque de conflit pour lepays, la Belgique va alors s’orienter vers unepolitique des mains libres, dans une neutralitéstricte et sans engagement à l’égard de ses voi-sins, à l’image de la Suisse et de la Hollande. Cettepolitique sous-entend cependant de devoir penserla défense du pays par ses propres moyens, doncde renforcer son armée et de prévoir les risques deconflits sans concertation avec les pays qui pour-raient éventuellement être amené à la défendre.C’est ce que le royaume va faire en se donnanttout d’abord les moyens de fortifier le canal Albertet de moderniser les secteurs fortifiés d’Anvers,Liège et Namur. Du point de vue des forces militai-res terrestres le service militaire est porté à 17mois, renforçant le nombre d’unités. En parallèleun effort de modernisation de l’armée belge estentamé, et cette dernière voit sa cavalerie motori-sée en particulier.

1 3 Histomag - Numéro 92

D’où vient la neutralité belge ?

Mais avant d’aborder ce que fut cetteneutralité à la fin des années trente il convient derevenir sur son origine. Elle fut proclamée pour lapremière fois en même temps que l’indépendan-ce du petit royaume de Belgique, le 20 janvier1831, à la conférence de Londres, alors que laBelgique essayait de se dégager de la souveraine-té néerlandaise. Dès son origine cette neutralités’érige comme une notion sacrée indissociable deson indépendance. Cette indépendance et la pro-tection de la neutralité belge devaient alors êtregaranties par l’Autriche, la Prusse, la France, laRussie et surtout le Royaume-Uni, ce dernierayant particulièrement insisté pour l’instaurationde cette neutralité. En définitive c’est d’ailleurs laGrande-Bretagne qui s’indignera le plus de laviolation de la neutralité belge en août 1914 parl’Empire allemand, allant jusqu’à s’appuyer surcette raison pour justifier la déclaration de guerreque le gouvernement britannique envoie au kai-ser le 4 août, tandis que personne ne croyait alorsqu’une neutralité violée pouvait conduire aussiloin. La neutralité de la Belgique dans le concertdes nations va néanmoins perdurer puisque lestroupes belges, durant toute la Première Guerremondiale, ne seront jamais subordonnées aucommandement allié.

La paix revenue, celle-ci s’annonçait dé-sormais garantie par la Société Des Nations. Encela la neutralité belge et l’intégrité de son terri-toire ne paraissaient définitivement plus mena-cées par ses voisins. Les divers pactes et traitésqui suivirent n’ont pu que conforter le royaumedans cette idée durant tout l’entre-deux-guerres.En 1925 en particulier, à Locarno, le Pacte Rhénanet les conventions d’arbitrage qui en découlent,constituent alors une solide assurance pour laBelgique. Signé par la France, l’Allemagne, laBelgique, la Grande-Bretagne et l’Italie – ces deuxderniers se portant garants –, ce pacte chercheavant tout à préserver la vallée du Rhin de toutnouveau conflit, et il est en cela déterminant pourla politique de neutralité de la Belgique puisqu’encas d’invasion par l’un des signataires les autress’engagent à venir en aide au pays agressé.Toutefois cette neutralité, si préservée soit-elle,était toutefois d’emblée remise en cause car encas d’agression allemande sur la France, en vertude ce pacte, la Belgique devrait entrer automati-quement en guerre aux cotés de la France,

Léopold III à l'issue d'une revue.La Belgique doit alors s'armer pourpouvoir se défendre

Page 14: Histomag 92

La fin d’une neutralité

Le 1er septembre 1939, alors que l’Allema-gne attaque la Pologne, la Grande-Bretagne et laFrance viennent au secours de cette dernière et

déclarent la guerre au IIIe Reich. Fidèle à sespromesses d’empêcher de son mieux d’être lechamp de bataille des belligérants, le royaume adécrété dès le 25 août la mobilisation et mis enplace seize divisions ainsi que de nombreusesunités non endivisionnées pour la défense de sesfrontières, dont deux tiers au sud du pays, face àla France. La conjoncture est alors telle que laprincipale menace pour le pays vient de la France,qui pourrait avoir besoin de passer par la Belgiquepour attaquer l’Allemagne, et sa doctrine consis-tant à résister à toute agression sous-entend alorsde se préparer à s’opposer à une agression, d’oùqu’elle vienne : voilà le principe de base qui régitla neutralité belge en 1940 et qui explique sonpositionnement. L’attitude qui découle de ce posi-tionnement est alors logique dès lors que l’état-major belge analyse le rapport des forces enprésence sur ses frontières et fonde ses précau-tions sur les intentions de ses voisins. La Francemasse alors en effet ses troupes sur son frontNord-Est tandis que l’Allemagne a concentré sestroupes sur la frontière polonaise, l’attitude belgene fait alors simplement que suivre la conduitequ’elle a elle-même dictée. Toutefois le rapportde force va évoluer dans les semaines qui vien-nent, et l’armée belge sera par la suite majoritai-rement déployée sur sa frontière Est. Au total, survingt divisions, à partir de 21 septembre, douzedoivent venir se poster entre Anvers et Liège, lesdeux divisions de chasseurs ardennais doivents’étendre dans les Ardennes de Namur jusqu’auxabords d’Arlon tandis que six divisions restenttournées vers la France. Même si ces divisionsrestent orientées vers la France ce nouveau dispo-sitif, fort au nord-est, laisse clairement apparaîtreque l’état-major belge compte sur les alliées pourl’aider à tenir les Ardennes et renforcer au plusvite son centre, même si les contacts avec l’état-major français ne sont pas clairement renoués.

1 4 Histomag - Numéro 92

Si la Belgique s’est détachée de ses partenaireseuropéens pour préserver sa neutralité, ses voi-sins, en particulier Français et Allemands, conti-nuent, quant à eux, d’affirmer que l’intégrité duterritoire belge sera préservée, sans doute dans lesouci de limiter les possibilités théoriques d’inva-sion réciproque et endormir la méfiance du voisin… Ainsi le 24 avril 1937, la garantie de neutralitéde la Belgique est renouvelée par la France et laGrande-Bretagne qui déclarent vouloir la défendrecontre toute agression tandis que le 13 octobre,c’est l’Allemagne qui formule les mêmes garan-ties. A la veille de la guerre, le gouvernementbelge est alors ferme sur ses positions et entenddéfendre ses frontières de toutes ses forces con-tre toute agression ou invasion. Il réaffirme égale-ment son opposition à ce que le territoire belgesoit utilisé en vue d’une agression contre un autreÉtat et entend déployer tous les moyens possiblespour assurer la défense du royaume, nous allonsmaintenant voir ce qu’il en fut réellement avecl’évolution de la conjoncture diplomatique et mili-taire en 1939-1940.

Paul-Henri Spaak, Premierministre du 15 mai 1938 au 22 février 1939,qui dUT gérer cette neutralitérétablie

Page 15: Histomag 92

Quand on connait le plan Dyle-Breda et la rapiditéde déploiement inégale des unités françaises,l’armée belge avait lieu de s’inquiéter, d’autantque ce plan abandonnait tout l’Est du pays pourétablir une ligne de défense entre Anvers etNamur via Louvain et Wavre. C’est ainsi que,certes déçu de devoir presque certainementabandonner ses forts qui lui avaient couté si cher,l’état-major belge se résout en février 1940 àpréparer son repli en cas d’attaque, pour se con-former au plan français, des contacts répétésétant pris pour s’y préparer au mieux. Les deuxarmées s’étant désormais plus ou moins enten-dues ce seront vingt divisions sur vingt-deux quiseront déployées dans l’Est du pays pour parer àtoute menace sur une neutralité déjà bien com-promise.

1 5 Histomag - Numéro 92

Au fil des semaines la neutralité belge sembleêtre de plus en plus menacée. Des divisionsallemandes, sans cesse plus nombreuses, se mas-sent de l’autre coté de la frontière. A la fin dumois d’octobre ce sont près de 70 divisions que le

2e bureau belge décompte dans la région d’Aix-la-Chapelle. L’état-major belge décide alors de pous-ser les mesures visant à protéger la neutralité dupays à leur maximum : deux divisions supplémen-taires sont mobilisées, pour cependant un enca-drement stratégique et tactique de l’armée belgede plus en plus étiré et de moins en moinssusceptible d’être efficace le moment venu …Cette situation ne va pas en s’arrangeant puisqu’àpartir de novembre 1939 c’est un total de dix-huitdivisions qui sont déployées vers l’Est tandis quel’état-major de l’armée belge cherche tout demême à s’assurer de la rapidité de déploiementdu dispositif français dans le cas d’une agressionallemande.

Dispositif prévu par l'armée belge à la veille de l'attaque allemande

Page 16: Histomag 92

1 6 Histomag - Numéro 92

Léopold III au micro à l'annonce de la guerre

L'attaque du 10 mai 1940 sur la Belgique

Page 17: Histomag 92

Bibliographie- Actes de colloque, Les relations militairesfranco-belges, mars 1936-10 mai 1940, Pa-ris, CNRS, 1968.- WOESTE, Charles Frédéric Auguste, Laneutralité belge, Bruxelles, O. Schepens,1891.- KOTHEN Robert, Les origines de la guerrede 1939 et la neutralité belge, Liège, Lapensée catholique.

1 7 Histomag - Numéro 92

Le 10 mai 1940, les armées allemandespénètrent en territoire belge et néerlandais selonles plans qu’ils avaient établis. En dix-huit jours laneutralité n’est plus qu’un vain mot que l’arméebelge tente de défendre aux côtés des Britanni-ques et des Français. Rapidement sous le joug del’occupant, le pays va subir la guerre, et la neutra-lité ambigüe du roi Léopold III, vu comme unecomplaisance, lui sera amèrement reprochée. Etsi quelques unités belges ont poursuivi la guerreaux côtés des alliés, la neutralité du royaume deBelgique n’en était pas moins préservée sur lepapier à la fin de la guerre. Elle ne prendra fin enréalité que devant la menace soviétique. En effetle 17 mars 1948 la Belgique est signataire dutraité de Bruxelles qui préfigure la création del’OTAN, les pays occidentaux souhaitant s’organi-ser défensivement dans le cas d’un conflit. Dèslors, plaque tournante de la diplomatie européen-ne et de la stratégique militaire occidentale, laBelgique intégrera des organismes comme l’ONU,l’OCDE, l’OTAN puis par la suite la CECA et l’UnionEuropéenne. Sa neutralité n’a duré qu’un temps,le temps que tous ses voisins s’accordent sur unavenir commun où la Belgique avait évidemmenttoute sa place.

Page 18: Histomag 92

1 8 Histomag - Numéro 92

Uniformes et insignesdes forces armées belges 1940

algré sa neutralité en 1914, la Belgique est engagée dans un conflit qui allait lui amener uneexpérience dans la guerre des tranchées ainsi qu'une vision plus réaliste de la neutralité. En 1936,alors que l'Allemagne réoccupe la Rhénanie, la Belgique décide d'allonger la durée du servicemilitaire de 8 à 12 mois ainsi qu'une augmentation de 15 % du budget de la Défense auxquelss'ajoute la construction de nouvelles fortifications. Ces précautions ne suffisent cependant pas à

cacher le vieillissement des conceptions issues de la Grande Guerre, telle celles consistant à considérer les charsde combat comme des matériels purement offensifs et donc à en priver l'armée belge basée sur la défensive. Enmai 1940, la Belgique aligne 22 divisions, composées de troupes qui allaient surprendre le commandementallemand. Cependant cette résistance sera de courte durée et le 28 mai, elle se voit contrainte de proposer unereddition.En dix-huit jours de combat, l'armée Belge totalisera une perte de 23 350 tués et blessés.

M1- Général-Major en grand uniforme - 2 Capitaine d’un Régiment de grenadiers3- Soldat du 5e Régiment d’infanterie de ligne, tenue de campagne - 4- Sergent-chef du 1er Régimentde chasseurs en tenue de sortie

Page 19: Histomag 92

Juste avant guerre est amorcée une politi-que de motorisation touchant l'une des deuxdivisions de chasseurs ardennais et les deux divi-sions de cavalerie. Le corps de cavalerie (motori-sé) comprend un état-major, deux divisions decavalerie, un régiment d'artillerie lourde et unbataillon de pionniers cyclistes. La division decavalerie est à 3 régiments mixtes comprenantchacun un bataillon monté, un bataillon motocy-cliste et un escadron d'entraînement.

La tenue adoptée par l'armée belge en1915 a été choisie de teinte kakie principalementpour des raisons pratiques. En effet, la GrandeBretagne étant alors la seule puissance alliéecapable de fournir des uniformes en nombresuffisant. Le fantassin belge n'en a pas moinsconservé une silhouette très française notammentgrâce à l'adaptation du casque Adrian.Au contraire des fantassins, les officiers belges ontune allure typiquement britannique surtout lors-que ces derniers portent une casquette.Les chasseurs ardennais perçoivent certains effetsspécifiques : un béret vert orné d'une tête desanglier, une capote raccourcie et des jambièresde cuir.Les troupes mécanisées sont coiffées d'un casqued'acier à bandeau de cuir de style français ou d'uncasque en fibre de conception belge ornés l'uncomme l'autre d'une tête de lion vue de face etvêtues d'un veston de cuir avec culotte kaki etleggins ou d'une combinaison kaki.

1 9 Histomag - Numéro 92

A – L'Armée de terre belge 1940

Organisation

Avec ses 100 000 hommes en temps de paix,l'armée belge est une force permanente, solide,basée sur la conscription, capable d'atteindre uneffectif d'environ 550 000 hommes après mobili-sation générale. Ce chiffre est relativement élevépour un pays ne comptant que 8 millions d'habi-tants. Placée sous le commandement suprême duroi Léopold III, elle comprend :

- Trois corps d'armée (Quartiers-généraux àBruxelles, Anvers et Liège).- Un corps de cavalerie basé à Bruxelles.- Le corps des chasseurs ardennais basé à Namur.- Six autres divisions d'infanterie deux de cavale-rie et trois bataillons de cyclistes frontières.

Le corps d'armée comprend :- Un état major.- deux divisions d'infanterie.- un régiment d'artillerie lourde ainsi qu'un régi-ment de pionniers.

La division d'infanterie a un état-major et troisrégiments d’infanterie ; chacun compte dans sesrangs 3 000 hommes armés de fusils Mauser M35et des armes d'appui suivantes :- 108 fusils mitrailleurs Browning M30.- 52 mitrailleuses Maxim M 08.- 108 mortiers légers.- 9 mortiers lourds ou canons d'infanterie.- 6 canons antichars.

Le régiment d'artillerie lourde de corps d'arméeest à 4 groupes de 2 batteries chacun, partielle-ment motorisées :16 obusiers de 155 mm court Schneider M17.8 canons de 105 mm Schneider M13.8 pièces de 120 mm Cockerill M 32.

Page 20: Histomag 92

L'arme, la subdivision ou le service est indiqué parla couleur de la patte de collet et de son passe-poil. S'y ajoute une grande variété d'insignes enmétal doré ou brodés en cannetille que l'ontrouve sur le bandeau de la casquette, sur lespattes de collet et les pattes d'épaule.

2 0 Histomag - Numéro 92

Les marques de grade figurent principalement surles pattes de collet pour les officiers et adjudantsou en bas des manches pour les sous officiers etla troupe. Les généraux portent en outre leursétoiles sur les pattes d’épaule.

5 - Chasseur ardennais, tenue de service6- Artilleur en tenue de campagne, en capote7- Capitaine d’aviation en tenue de service

Page 21: Histomag 92

L'aéronautique militaire fait partie inté-grante de la Défense aéronautique du territoireavec la Garde territoriale antiaérienne et la Défen-se terrestre contre les avions. L'aviation propre-ment dite, comprend trois régimentsd'aéronautique :

- le premier est un régiment d'observationde corps d'armée - le deuxième est un régiment de chasse - le troisième est un régiment de recon-naissance d'armée et de bombardement.

Il faut y ajouter les troupes auxiliaires d'aéronau-tique et le service de ravitaillement-dépannage.Le premier régiment est à 6 groupes de chacunune escadrille de vol (en tout 62 appareils opéra-tionnels), le 2ème à 2 groupes de 3 escadrilles(79 appareils), le 3ème à 2 groupes de 2 esca-drilles (41 appareils). Chaque groupe comprendaussi une escadrille de parc disposant notammentde moyens antiaériens.

2 1 Histomag - Numéro 92

B – L’Aviation belge

L'aviation militaire belge créée dès 1910au sein de l'armée de terre, souffre à la fin desannées trente d'un manque significatif d'appa-reils modernes. Tout en disposant d'une petiteindustrie aéronautique nationale, elle a recoursaux productions britanniques, italiennes. Une col-laboration avec les Etats Unis ne s'est quant à ellepas concrétisée. Le 10 mai 1940, l'aéronautiquemilitaire ne compte que 234 appareils dont 180opérationnels, pour la plupart des modèles péri-més. Ses rares chasseurs modernes, des " Haw-kes" Hurricane de fabrication britannique, serontpresque tous détruits au sol sur leur aérodrome deSchaeffer.

Page 22: Histomag 92

:

La tenue gris-bleu reçoit exactement les mêmesmarques de grade que la tenue kaki. Sur cettedernière, la couleur d'arme de l'aéronautique estle bleu moyen, les pattes de collet étant souli-gnées de rouge. L'insigne de l'escadrille en métalémaillé est porté sur la poche de poitrine droite.

2 2 Histomag - Numéro 92

:

Il en existe deux types distincts :- Le premier est celui de l'armée de terre dont faitpartie l'aéronautique.- Le second est l'uniforme gris-bleu porté par lescadres d'active appartenant au personnel navi-gant. La situation se complique encore du fait del'habitude d'un certain nombre d'officiers de l'aé-ronautique militaire qui continuent à porter leurancien uniforme des formations terrestres.L'uniforme gris-bleu se complète d'une casquetteplate assortie d'un bandeau et d'une visière noire,ainsi qu'une capote croisée gris-bleu. Le pantalonlong et les chaussures basses sont d'un port pluscourant que la culotte et les bottes.

Page 23: Histomag 92

Quartiers-maîtres et matelots sont coiffés d'unbonnet du modèle français mais avec un pomponbleu et la mention « Marine Korps » puis simple-ment « Marine » en 1940, tissée en or sur le ruban.En plus de la vareuse à col marin bleu liseré detrois bandes blanches, ils portent le caban àdouble rang de cinq boutons dorés.

A cet égard, la marine belge rompt avec la tradi-tion : dépendant de l'armée de terre, elle enconserve les marques de grade au collet desvestons et capotes sur des pattes bleu foncésoutachées de bleu clair.Sur le bandeau de la casquette, les grades sontindiqués à la manière française.

D – Conclusion :

Cette étude minimale sera enrichie parl’ouverture d’un fil sur le Forum « Le Monde enGuerre » ; nous invitons chacun à le suivre et à yparticiper.

- Andrew Mollo,

Editions Atlas, Paris 1981, Orbis Publishing 1981.-Planche Knötel, Jankte, Sieg

Militar Verlag, Berlin, s.d.

2 3 Histomag - Numéro 92

C – La Marine belge :

A la fin du XIXème siècle, la marine belgea virtuellement cessé d'exister pour n'être refor-mée qu'à la fin de la Grande Guerre. Entre lesdeux guerres, cette minuscule flotte est à nou-veau dissoute faute de crédits suffisants et n'estremise sur pied que le 15 septembre 1939 sousle nom de puis .En novembre 1939 , plusieurs centaines de cons-crits ayant une expérience des choses de la mersont mutés au corps de marine qui comprendalors l'effectif théorique de 30 officiers principale-ment des officiers de réserve issus de la marinemarchande, 98 officiers mariniers auxquels s'ajou-tent 513 maîtres et matelots, répartis entre lequartier général et la 1ère escadrille à Ostende, la2ème escadrille à Zeebrugge, la 3ème à Anverset une escadrille de remplacement et de forma-tion .Les navires sont de petites embarcations côtièresarmées d'un canon de 47mm et de 2 mitrailleu-ses, ainsi que des bateaux civils réquisitionnés,notamment de gros chalutiers en bois utiliséspour le dragage des mines.L'artillerie côtière (une pièce à Zeebrugge etl'autre à Anvers) est à la charge de l'armée deterre.Au cours de la campagne de 1940, la marinebelge perd environ un quart de ses effectifs,tandis qu'un certain nombre de survivants passeen Grande Bretagne. En mai 1943, la Royal Navycomptera une section belge de 350 hommes et 7unités.

Le nouveau règlement sur les tenues de lamarine belge ne sort qu'en janvier 1940, si bienqu'au moment de l'attaque allemande, les unifor-mes sont surtout du modèle existant antérieure-ment. La coupe de l'uniforme est du type "international " plus quelques similitudes de l'uni-forme en vigueur dans la marine française.Officiers et officiers mariniers portent la casquetteplate, le veston croisé avec la chemise blanche etcravate noire, le pantalon long, les chaussuresnoires et la capote croisée.

Page 24: Histomag 92

1/GENESE :

La ligne KW appelée également KW stelling ou KW linie ou encore ligne Dyle était une ligne defortifications, principalement à vocation anti chars qui s’étendait de Koningshooikt à Wavre, d’oùson nom de ligne KW. Elle faisait partie de l’ensemble des fortifications belges édifiées ouréhabilités pendant l’entre 2 guerres comme les positions fortifiées de Liège (PFL 1 et 2), de Namur(PFN), d’Anvers (PFA),  la ligne du canal Albert (dont le fort d’Eben Emael) et les défensescôtières.

2 4 Histomag - Numéro 92

La ligne KW Belge

la ligne KW en rouge.

Page 25: Histomag 92

Environ 430 blockhaus composent la ligne KW.Selon les zones défendues ils sont répartis sur 2lignes successives, comme par exemple une zonesans obstacle naturel. Les blockhaus pour mi-trailleuses sont implantés à proximité immédiatesdes obstacles afin de pouvoir déclencher un feunourri et efficace contre un assaillant empêtrédans les défenses et autres réseaux de barbelés.Les villes et les carrefours stratégiques sont érigésen «  centre antichars  » via la construction deblockhaus formant une boucle fermée autour dusite à protéger. Ces centres de résistance sont aunombre de 17. L’arme de base antichar belge deforteresse est le canon de 47 mle 1931 fabriquéà Liège par la Fonderie Royale de Canons (FRC).Mais seulement 750 pièces seront livrées.

Blockhaus type de la ligne KW :C’est un blockhaus pour mitrailleuses à 1, 2 ou 3embrasures de seulement 38° d’azimut. Les ar-mes les plus répandues sont la mitrailleuse lourdeMaxim, la Hotchkiss 8mm et la Colt. Cependantselon que l’ouvrage soit occupé par des Belges,des Anglais ou des Français, chaque nation utilise-ra sa mitrailleuse au prix d’aménagements légersdans le blockhaus. Ce blockhaus assure un tir deflanquement. Les embrasures sont protégées destirs de face par des oreillons et un encorbellement(sorte de renflement débordant du toit, empêchela chute de gravats à l’aplomb des embrasures).La face avant est dépourvue d’embrasure. Chacu-ne est surplombée sur le côté d’une visière quipermettait de guider le tireur. Les 2 orifices sontprotégés par des volets métalliques et sont égale-ment protégées du ruissellement des eaux depluie par la présence d’un rebord en béton oud’une lamelle en acier. Certains blockhaus sontéquipés d’un périscope.

2 5 Histomag - Numéro 92

Elle était raccordée aux PFA et PFN en s’appuyantsur la rivière Dyle à l’est de Bruxelles. Sa portionnord courrait à travers des zones forestières clair-semées alors que sa portion sud s’étendait sur unterrain légèrement vallonné. Cette ligne qui de-vait devenir la ligne de défense principale futlongtemps reléguée au second plan et ce n’estqu’en 1938, devant les bruits de bottes venantd’Allemagne qu’elle fut enfin développée. Lestravaux sur la ligne continueront d’ailleurs aprèsde déclenchement de la guerre.La stratégie de défense belge vers la fin desannées 30 était de faire une guerre de retarde-ment face à une invasion de son territoire afin depermettre aux troupes françaises de venir appor-ter leur aide en pénétrant en Belgique. La défenseest organisée en profondeur suivant 4 lignessuccessives :

- La ligne d’alerte  le long de la frontière avecles Pays-Bas et l’Allemagne

- La ligne avancée  qui devait permettre par descombats retardateurs au gros des troupes derejoindre la ligne suivante en en sabotant lesroutes, les ponts etc.

- La ligne de protection  le long du canal Albert.C’est la que le gros de l’armée belge attendraitl’agresseur.

- La ligne de résistance ou ligne KW sur laquelledevait s’appuyer les armées alliées venues ensoutien des troupes belges.

Cependant quand Léopold III déclare la Belgiqueneutre, il exclut de fait toute intervention préven-tive de l’armée française sur son territoire. Celle-cine pourra avoir lieu qu’après l’agression du terri-toire en vertu d’accords passés entre les 2 paysplus l’Angleterre. Cette nouvelle donne chambou-le les plans de l’EM belge qui conclut que lameilleure ligne de défense en cas d’attaque alle-mande serait la ligne KW qui jusqu’alors avait étéun peu délaissée.

dispositif antichar près de Haacht

Canon AC de 47 mle 1931

Page 26: Histomag 92

La chambre de tir mesure 2m x 2 m et la hauteursous plafond est de 1.85 m. Le plafond est recou-vert de tôles ondulées afin d’éviter la chute debéton lors d’un bombardement. L’ouvrage estéquipé de conduits de ventilation, protégés contrele jet de grenades depuis l’extérieur. Par contrebien sûr pas d’électricité. L’éclairage était assurépar des lampes à huile. Dans les blockhaus decommandement dépourvu d’embrasures de tir etde visières il y faisait particulièrement sombremême en pleine journée. A noter qu’un effortparticulier concernant le camouflage a été fait surtous les ouvrages de la ligne KW. Camouflage enbriques rouges type maison, en bois pour ressem-bler à une grange, filets de camouflages, oucarrément abri enterré. Les blockhaus sont réper-toriés en fonction de leur lieu géographique, suivid’un numéro. Par exemple BB2 pour blockhausnuméro 2 du bois de Beumont ou TPM1 pourblockhaus numéro 1 de la tête de pont de Maline.Contrairement aux constructions allemandes, iln’y a pas vraiment de catalogue de constructionsdûment référencées. Il y a beaucoup de modèlessimilaires mais pas toujours identiques. Entrée parle toit ou l’arrière, sortie de secours sur le côté ouà l’arrière, angle formé par les 2 embrasures detir, etc.Les autres types de blockhaus étaient de type Cpour connexion et/ou commandement et de typeV qui étaient en fait de petits blockhaus abritantdes relais téléphoniques. Il était prévu un largedéveloppement du système de communicationmais le déclenchement des hostilités ne permet-tra pas de mettre en place ce dernier.

2 6 Histomag - Numéro 92

2 modèles diffèrent quant à l’accès au blockhaus.Sur le premier modèle on accédait à l’intérieur del’ouvrage par une trappe située sur le toit et ondescendait à l’intérieur par une échelle. (Commesur le plan ci-dessous)Sur le second modèle on retrouve une entréestandard par 2 portes blindées successives don-nant dans un sas à 90°. La porte donnant surl’extérieur est protégée par un créneau de tirintérieur. Les portes d’environ 200 kg chacunesont équipées de sortes de stores vénitiens métal-liques permettant de favoriser l’aération del’ouvrage. Le blindage de ces portes n’est que de5 mm.

L’ouvrage est équipé de goulottes lance grenades(*) permettant de repousser un adversaire évo-luant aux abords immédiats de la casemate. Lagoulotte était fermée de l’intérieur par un voletblindé qu’il était préférable de vite bien refermeraprès avoir balancé la grenade dans la goulotte. Anoter que ce type d’ouvrage est équipé d’unesortie de secours (R) de 60 cm x 60 cm. Les mursavant et latéraux font 1,30 mètre d’épaisseur etsont censés résister à un coup au but d’une piècede 150mm. Le mur arrière n’a lui qu’1 mètred’épaisseur.

schéma simplifié d’un blockhaus

mitrailleuse avec accès par le toit

camouflage en maison d’habitation

Page 27: Histomag 92

4/ LES PORTES BELGES :

Une des caractéristiques de la ligne KW est laprésence dense de portes belges entre l’endroitoù la ligne s’écarte de la rivière Dyle et la jonctionavec la PFN.Nous allons donc profiter de l’occasion pour pré-senter cet élément antichar que l’on retrouveraen masse sur le mur de l’Atlantique et en particu-lier sur les plages du débarquement.Appelés indifféremment élément Cointet, élé-ment C ou plus connu encore porte belge, c’est undes obstacles antichars les plus connus. La diffé-rence entre un élément Cointet et une porte belgeest la présence de 8 cornières verticales ajoutéesà l’avant de l’élément afin, qu’en plus des blindés,l’infanterie soit elle aussi ralentie au moment defranchir l’obstacle. Cette modification ayant étéinventée par les Belges, l’élément Cointet estdevenu « porte belge », bien que son origine viason concepteur, le Colonel Edmond de Cointet deFillain (1870 - 1948), soit Française. Et c’est ainsiqu’il est passé à la postérité. Elles auront d’ailleurs

une 3ème vie en Normandie après que le sergentCurtis G. Culin eut l’idée de découper les portesbelges pour les souder à l’avant des Sherman afinde défoncer les épaisses haies du bocage nor-mand. Le Sherman était grâce à lui devenu un« Edge-cutter ».

Présentation :

La porte belge est donc une barrière mobilemesurant 3 mètres de large sur 2.5 mètres dehaut d’environ 1.3 tonne et montée sur 3 rou-leaux (2 à axe fixe devant et le troisième àl’arrière à axe pivotant afin de faciliter la manipu-lation de la porte. Ces éléments s’attachent l’un àl’autre pour former une barrière continue sanslimite de longueur (route, pont, tunnel, champ,frontière …) C’est cette particularité qui vaudra àla ligne KW son surnom de « ligne de fer », unegrande partie des75 000 portes fournies par l’industrie belge ayantété affectée sur la ligne dans le secteur Louvain-Namur.

2 7 Histomag - Numéro 92

Ce qui est étonnant, c’est qu’il n’y a pas traced’autre type de blockhaus de combat sur la ligneKW que ces blockhaus pour mitrailleuses. C'est-à-dire que même pour ce qui est appelé les centresantichars, il n’y a pas de blockhaus abritant d’ar-me antichars. Les canons de 47 ne rentrant pasdans les blockhaus présents, ils sont mis enbatterie dans des positions de campagnes légèresà l’abri derrière quelques sacs de sable. Cetteremarque ne vaut que pour la ligne KW. Ailleursdans les places fortifiées par exemple, il existebien des blockhaus typiques réservés aux armesantichars, de 47 et 75 mm. Certains d’entre euxsont même équipés de cloches blindées d’obser-vation. (Voir plan ci-dessous). Mais rien de toutcela sur la fortification qui nous occupeaujourd’hui. Après coup, on peut se poser laquestion de l’utilité des barrages antichars, type« portes belges » si une fois les blindés immobili-sés ou tout du moins ralentis, il n’y a aucunepossibilité de les détruire avec des armes adéqua-tes lors de cette phase où ils sont vulnérables.Peut-être est-ce le manque de temps qui a faitque l’EM belge a préféré favoriser la constructionde blockhaus légers ?

plan de blockhaus pour mitrailleuse +75 AC + cloche blindée (sourcehttp://www.bunkergordel.be)

Page 28: Histomag 92

CONCLUSION :

Une fois de plus une ligne de fortification n’aurapas vraiment joué son rôle, c'est-à-dire retarderl’attaque ennemie afin de permettre la montéedu gros des troupes chargé de stopper l’attaque.Peu de blockhaus de la ligne KW ont connu lecombat. Ils étaient occupés par des troupes bel-ges, françaises ou anglaises du BEF. La bataille dela Dyle ne dura que 3 jours (du 14 au 16 mai1940) mais durant lesquels les combats furentintenses et violents. Les Allemands étaient à peuprès contenus mais le 16 mai, l’ordre de repli estdonné aux troupes franco-anglaises suite à lapercée de Sedan qui les menace d’un encercle-ment.

2 8 Histomag - Numéro 92

Une fois installées à l’endroit voulu, les portesrattachées entre elles grâce aux gonds que l’onvoit sur les montants verticaux de la photo ci-dessus dans lesquels sont enfilées des barresd’acier. L’avantage du système est qu’il permetune certaine souplesse entre les portes tout en lesmaintenant liées. Le mouvement d’avant en ar-rière correspondant au passage en force d’unblindé est entravé par le fait que la première etdernière porte d’un ensemble sont rattachées parune élingue en acier courant au ras du sol quivient s’arrimer sur 2 «  bornes Cointet  ». Cesbornes sont telles des bittes d’amarrage en béton,renforcées au cœur par une poutrelle d’acier. Leurforme en cône inversé empêche, en cas de ten-sion sur le câble, qu’il ne s’échappe vers le haut.Le béton est entouré d’une tôle afin que la frictiondu câble ne fragilise pas le béton de la borne.

porte belge (musée Omaha)

Page 29: Histomag 92

2 9 Histomag - Numéro 92

Sources :- Fortress Europe – European fortifica-

tions of WW2 Kaufman et Jurga édi-tions Di capo press

- http://lignekw.blogspot.fr/

Merci à Prosper pour son aide à la traduc-tion de termes parfois ambigus

borne Cointet

Sherman « edge-cutter »

Page 30: Histomag 92

3 0 Histomag - Numéro 92

La campagne des 18 jours

ans aucun ultimatum, l’armée allemande envahit le territoire belge à l’aubedu 10 mai 1940. Dès les premières heures de l’invasion, les appareils del’aéronautique militaire belge furent pratiquement tous détruits au sol. Enutilisant massivement le tandem Char-Avion, l’armée allemande traversarapidement les Ardennes belges et françaises. Dès le 11 mai 1940, le fort

belge - pourtant réputé imprenable – d’Eben-Emael tomba en mains allemandes et lesponts de Vroenhoven et Veldwezelt au dessus de la Meuse tombèrent intacts en mainsennemies.

S

La 10e compagnie (Jules Loxhay est le plus grand)

Page 31: Histomag 92

Ce que nous proposons de faireaujourd’hui, c’est de laisser la parole à l’un de cessoldats qui se sont battus pendant ces dix-huitjours. Jules Loxhay était un soldat de la classe1938 (appelé sous les armes le 16 mai 1938), ilnous raconte sa mobilisation (phase C) de 1939 et

sa campagne des 18 jours au sein du 1er de Ligne.Son récit il le fit lui-même et le publia dans lefascicule 6 du tome IV du Centre Liégeois d’Histoi-re et d’Archéologie Militaire grâce à qui nouspouvons à nouveau faire partager ce récit.

La mobilisation

Quand nous avons quitté la caserne, le 28août 1939, nous ne doutions pas que c'était sansesprit de retour. C'est à Romsée que le régimentest cantonné. Je n'aurai pas le temps de m'instal-ler, on me demande de choisir un mitrailleur et untélémétreur (ce dernier est de la classe 36 ethabite l'endroit où nous devons nous rendre).Nous sommes partis pour Engis où nous avonsrejoint un peloton de la 10e compagnie chargé dela garde au pont et nous avons partagé leurlogement, la salle de café près du pont. Notremission était de placer une mitrailleuse sur unremorqueur et d'effectuer des patrouilles sur laMeuse pour surveiller la navigation. Deux bate-liers du génie d'Anvers nous avaient été adjoints,mais l'Atlas VI (le frère du célèbre Atlas V de laguerre de 14-18) n'arriva pas.Le 31 août, les ponts du Val-Benoit et d'Ougrée,touchés par la foudre avaient sauté. En attendantque la circulation fluviale soit rétablie et permettel'arrivée de notre bateau, nous avons partagé les

activités de la 10e : gardes, travaux de défense,etc. Nous avons joué un match de football contrel'équipe d'Engis et nous avons gagné (la photo del'équipe est parue dans la Meuse du 16 septem-

3 1 Histomag - Numéro 92

La Meuse fut traversée dans les secteursde Dinant, Monthermé et Sedan et pendant queles positions françaises furent submergées au sud,l’Armée hollandaise ne put résister au nord. Cettesituation, sans issue, obligea le commandementbelge à abandonner (après quelques résistances)les positions défensives du Canal Albert et – unpeu plus tard – les positions de la Ligne K.W.(Koningshooik-Wavre). Il fut bien tenté de résisterà la Wehrmacht et notamment sur les positions del’Escaut, le Canal de Gand à Terneuzen, la Lys eten fin sur une ligne défensive d’Ypres à Roulersmais la pression allemande était trop forte. Lorsde la conférence interalliée, tenue à Ypres le 21mai 1940, il fut généralement admis que l’Arméebelge avait réussi de très bonnes et courageusesmanœuvres de retardement et notamment sur larivière Dendre le 18 mai, à Zwijndrecht le 19 maiet sur l’Escaut le 20 mai 1940. Une bataille trèsdure eu lieu sur la Lys vers le 23/24 mai et où +de 2500 soldats belges trouvèrent la mort.

L’armée belge ne put que ralentir la pro-gression allemande et put ainsi – un temps soitpeu – aider le rembarquement de l’Armée britan-nique à Dunkerque. Cependant la lutte devint tropinégale et le 27 mai 1940, Sa Majesté le RoiLéopold III envoya des plénipotentiaires belgesdans les lignes allemandes afin de discuter d’uncessez-le-feu. La réponse allemande fut brève etsèche dans les termes  : capitulation sans condi-tions le lendemain 28 mai 1940. Cette campa-gne de 18 jours coûta la vie à près de 6000militaires et à certainement autant de civils.250.000 militaires (sur un total de 600.000) furentfait prisonniers de guerre et envoyés en Allema-gne. Cependant après quelques mois les Alle-mands libérèrent la plupart des soldatsnéerlandophones (à l’exception des officiers etsous-officiers d’active) dans le cadre de la Fla-menpolitik de Adolf Hitler. Au final +/- 70.000militaires belges restèrent prisonniers de guerrejusqu’à la fin du second conflit mondial en Europe.

Page 32: Histomag 92

3 2 Histomag - Numéro 92

Page 33: Histomag 92

3 3 Histomag - Numéro 92

Page 34: Histomag 92

3 4 Histomag - Numéro 90

Fin novembre, le caporal BOUSSART de laclasse 36 et moi, avons été affectés à l'encadre-ment d'une section de recrues de la classe 39 ; cesont des Hennuyers que notre façon de parlerétonne. BOUSSART et moi sommes installés à laferme du vieux château de Saive. Nous occuponsla chambre du domestique, mobilisé lui aussi.C'est un cube de maçonnerie accolé au mur dansle fond de l'étable. Pour y accéder, il faut gravirune échelle qui nous mène sur la paille au-dessusdes vaches, puis une autre qui nous conduit à lachambre. On y est directement sous les tuilesdont une, en verre, donne la lumière. L'espace,très réduit, est occupé par un grand lit, une petitetable et une chaise. Un matin, en m'éveillant, jesors le nez et un bras de dessous les couvertures

et je sens quelque chose de froid.

Je fais de la lumière et je vois que le lit estcouvert de neige ! Celle-ci poussée par un ventviolent s'insinue sous les tuiles. Évidemment, il nefait pas chaud dans la chambre, d'autant que latempérature baisse rapidement au point que leseau d'eau que nous montons chaque soir pournos ablutions matinales n'est plus qu'un bloc deglace, le matin. Heureusement, on me fait repas-ser au peloton hors-rang, cette fois comme capo-ral d'ordinaire. Je change aussitôt de logement.Avec six camarades, nous occupons une pièced'une petite maison et, privilège du grade, monmatelas est à côté du poêle. Je suis chargé duravitaillement. Nous avons fabriqué un traîneaupour aller chercher le pain et la viande à Barchon.Je suis le plus souvent à la cuisine, une «  rou-lante » installée dans un hangar, mais parfois, j'ail'occasion de descendre à Liège pour y acheterdes conserves.

En octobre, vers la date à laquelle nousaurions dû être libérés, nous avons rejoint lerégiment à Chêvremont. C'était pour faire nosadieux au 14e de ligne qui devenait intégrale-ment flamand. Notre bataillon a été transféré au1er de ligne où nous sommes devenus la 8ecompagnie du IIe bataillon. Le chef de corps est lecolonel BARTHELEMY; la compagnie est sous lesordres du commandant VELLE et notre chef depeloton est le lieute-nant PEREAUX. Nospositions se trouvententre les forts d'Eve-gnée et de Barchonet notre bataillon estcantonné à Saive, oùnous apprécions lemoelleux et le par-fum du foin de la ré-gion dans les fenilsdes différentes fer-mes. J'ai été affectéau peloton hors-ranget j'échappe ainsi auxexercices, gardes ettravaux divers deretranchement.  Jesuis avec le fourrier etje passe mes jour-nées dans le maga-sin. Peu de temps après, j'ai été désigné commeadjoint au docteur STREEL qui fait aussi officed'officier chargé des loisirs et des sports. Le majorme charge d'acheter les vareuses pour l'équipe dubataillon ; je les choisis aux couleurs liégeoises :rouge avec col et parements jaunes. J'ai parcourula position pour mettre sur pied des rencontresinter-compagnies, inter-bataillons et même inter-unités, ce qui, en tenant compte des impératifs duservice et de la disponibilité des terrains, ne futpas une tâche aisée. Avec ma compagnie, je suisretourné jouer à Engis contre le club dont ledocteur STREEL est président. L'hiver précoce etrude nous a contraints à mettre ces activités enveilleuse.

Laissez passer pour aller chercher du ravitaillement

Page 35: Histomag 92

3 5 Histomag - Numéro 90

En attendant, la principale préoccupationde l'armée belge en campagne est de se protégerdu froid. C'est pourquoi passe-montagnes, échar-pes de laine et gros sabots de bois, bien que peuréglementaires, sont tolérés. J'ai retrouvé monagenda de 1940 et j'y lis :- Les 6,7 et 8 janvier : congé.- Le 14 : alerte générale (si mes souvenirs sontbons, un aviateur allemand abattu par notreD.T.C.A., était porteur de plans d'invasions denotre pays)(*).

(*) Loxhay fait allusion ici à l'atterrissageforcé du Me-108 à Mechelen aan de Maas (Ac-tuellement Maasmechelen)

On l'avait assez dit : « on s'en fout commede l'an quarante  ». Eh bien, il est arrivé et lesperspectives pour cette année sont bien incertai-nes. Après la conquête de la Pologne par l'Allema-gne, les belligérants semblent s'être mis enhibernation. C'est, comme disent les journaux,«  une drôle de guerre  ». Nous, nous sommesneutres et c'est bien volontiers que nous laisse-rons la gloire aux Français qui clament : « Nousvaincrons parce que nous sommes les plus forts »,et aux Anglais qui chantent : « Nous irons pendrenotre linge sur la ligne Siegfried ».

Le document qui provoqua l'alerte du 14 janvier. Le 10 janvier 1940, un avion alle-mand s’égare dans le brouillard et s’écrase en Belgique. Un des occupants porteles ordres d’attaque du groupe Von Bock pour le déclenchement des opérationsen Belgique, le 17 janvier. Il ne parvient pas à les brûler complètement et l’État-major belge est averti.

Page 36: Histomag 92

Nos prédécesseurs ont aménagé une porcherie ety ont construit des bat-flancs sur lesquels nousrangeons nos paillasses côte à côte.

3 6 Histomag - Numéro 92

Une photo de groupe qui montre différentes façonsde porter la tenue de campagne

Défense antichar - Barrières Cointet

L'hiver 39-40 fut rude. Danscertaines unités, les sentinel-les étaient protégées du froidpar une peau de mouton portéesur la capote

Page 37: Histomag 92

Je passe beaucoup de temps à l'abri decontre-irruption 5 qui se trouve au pied de laXhavée, Le personnel se compose d'un sergent,d'une équipe pour le canon de 4,7 et de monéquipe de mitrailleurs.L'abri est quant à lui composé :- d'un rez-de-chaussée sans autre ouverture quela porte d'entrée qui donne sur un petit sas formépar un mur dressé devant la porte et qui est percéd'une embrasure pour défendre celle-ci. Derrièrele mur, il y a une trappe qui donne accès à unpassage souterrain qui permettrait l'évacuationdiscrète de l'abri et dont la sortie se trouve dansla tranchée du chemin de fer. Dans l'angle oppo-sé, il y a une échelle qui donne accès à la partiesupérieure de l'abri- d'un étage où on trouve :- contre le mur de droite : les obus perforants etpercutants du canon de 4,7 cm,- contre le mur de gauche : les caisses de grena-des et les boîtes de munitions pour la mitrailleuse,- l'ouverture pour le phare, l'embrasure pour lamitrailleuse et celle pour le canon, qui peuventêtre fermées par des volets d'acier.- une sortie de secours d'un mètre de côté quidonne sur le talus auquel est accolé l'abri. Cettesortie est fermée par des poutrelles d'acier.- une échelle métallique, au centre de la pièce,qui permet d'accéder à la tourelle d'observation.

3 7 Histomag - Numéro 92

Le 26 et le 30 : je suis de garde. Les congésétant toujours retardés, je ne peux pas partir le 3février comme prévu. Le 5, je reçois ma permis-sion et je rentre à la maison pour six jours.J'attrape un furoncle au talon droit et le médecinmilitaire que je vais consulter me donne quatrejours supplémentaires. Le 14, quand je rentre aucantonnement, il est près de minuit et, surprise,je trouve le local vide, à l'exception de mon fusil,du sac contenant mes effets et de mes fournituresde couchage. Le lendemain j'apprends que lacompagnie a changé de cantonnement. Je chargemon barda sur un traîneau et je rejoins les autres.Je suis très mal accueilli par l'adjudant qui s'apprê-tait à me porter déserteur. Il me met au rapportdu commandant, mais celui-ci, après m'avoir en-tendu, classe l'affaire sans suite. Le 16 je repasseau peloton hors-rang. Nous logeons dans un bara-quement tout près du cimetière militaire de Rabo-zée. Du 7 au 12 mars je suis en congé. Quand jerentre, nouvelle affectation : je passe en subsis-tance à la 6e compagnie ; mission : garde perma-nente à l'abri 5 en cas d'alerte. J'ai, évidemment,encore changé de cantonnement. C'est à Wandre,cette fois, que je vois fleurir les forsythias. Nouslogeons dans le baraquement de l'Œuvre Nationa-le de l'Enfance. Comme, en fait de lits, il n'y avaitque des cadres en bois sans sommier, nous avonsfait appel au système D. Nous avons coupé devieux pneus de vélos et les avons cloués dans lesens de la longueur, puis nous avons coupé desmorceaux plus petits que nous avons tressés etfixés dans le sens de la largeur, et ça a donné deslits fort confortables. On nous a distribué unexemplaire d'un hebdomadaire que nous rece-vons assez régulièrement depuis le début de lamobilisation. Il s'appelle « Le BARBELE » et a priscomme devise celle du 14e de ligne «  Qui s'yfrotte s'y pique ».

Page 38: Histomag 92

3 8 Histomag - Numéro 90

Abri de contre-irruption 5Légende :a = coupole d'observationb = embrasure pour le canon de 4,7c = embrasure pour la mitrailleused = embrasure pour le phare <<

Vue en plan du premierétageLégende :1)     échelle vers rez-de-chaussée2)     obus pour 4,73)     sortie de secours4)     canon 4,75)     mitrailleuse6)     phare7)     cartouches8)     grenades9)     échelle vers coupo-le d'observation<<

Page 39: Histomag 92

La nuit est tombée. On nous informe quenous devons évacuer l'abri et nous rendre àHerstal. Nous emportons la mitrailleuse et sabo-tons le canon. Nous rejoignons nos compagnies etpassons la nuit chez l'habitant. Le 11 mai. Monbataillon (le IIe) a pour mission d’occuper etdéfendre le sous-secteur nord qui s'étend deHerstal au pont de Wandre. Les trois autres ba-taillons occupent Grâce-Berleur, Ans et Liers, tan-dis que le P.C. est à Alleur. Vers midi, on fait sauterle pont de Herstal. Je suis à 100 m de là et, malgréla protection des maisons, le souffle de l'explosionme plie en deux. Les autres bataillons reçoiventl'ordre de se porter entre Glons et la station deRoclenge-sur-Geer. Échelonnées entre Fexhe-Slinset Liers, ces unités sont attaquées, de 13.30 h à18 h, par des vagues successives de Stukas et debiplans Heinkel lâchant leurs bombes en piqué etmitraillant tout ce qui bouge. Les pertes s'élèventà 30 tués et quelques dizaines de blessés. Lecharroi hippomobile est en grande partie détruitet la plupart des chevaux tués. Les bataillons sontdispersés. Dans la soirée, le régiment reçoit l'or-dre de se replier vers Namur.

Le 12 mai nous avons marché toute la nuitet, le matin, on fait une halte à la sortie d'Engis.Dans l'après-midi, nous repartons et, quand nousarrivons à Flône, nous voyons encore des avionsqui tournent et qui piquent sur les troupes qui sontsur le plateau du côté de Hannut. A Huy, nousrencontrons un petit blindé français dont les occu-pants nous saluent avec un brin de gouaille. (Ilfaut bien dire qu'à ce stade des opérations, lesFrançais ont encore une grande confiance dans lesvertus de leur potion magique : le pinard). Noustraversons la Meuse et, par les crêtes, prenons ladirection de Namur.

Le 13 mai on nous dit que nous nousreplions sur la deuxième ligne de défense. Nousrencontrons de plus en plus de Français : unrégiment de Nord-Africains, des canons en batte-rie dans les champs et de petits groupes motori-sés.  Des bombardiers allemands nous survolentà faible altitude. Quand ils sont juste au-dessus denos têtes, je vois les bombes se détacher ettomber en sifflant. Je n'ai pas peur car je saisqu'elles toucheront le sol un peu plus loin. De fait,elles vont faire des dégâts chez les Français qui setrouvent de l'autre côté du talus. Après deux nuitsà la belle étoile, des civils m'ouvrent leur porte etje peux passer celle-ci dans un lit. Le 14 mai nouspartons vers Ransart où nous embarquons dansun train. Le 15 mai nous avons roulé toute la nuitet une bonne partie de la journée. A Gand, où letrain fait halte, le bruit court qu'on a arrêté denombreux espions.

3 9 Histomag - Numéro 90

Le 30 mars, je change encore de loge-ment. Le déménagement est court, il faut justetraverser la route et monter au second étage d'unimmeuble particulier. Heureusement, nous res-tons à Wandre où c'est plus agréable que dans lacampagne de Barchon. On peut aller au café, aucinéma, ou prendre une douche au phalanstèredu charbonnage. Avec le printemps, on reparle desport ; les terrains de football sont boueux, maison espère pouvoir rejouer dans une quinzaine dejours. Le docteur STREEL me fait savoir que moncommandant m'a proposé pour le grade de ser-gent et que je serai prochainement transféré auservice « Sports et Loisirs ». Le 10 avril, les congéssont suspendus puis rétablis quelques jours plustard. Le 27, je pars en congé jusqu'au 29. Je suis àpeine rentré que les congés sont supprimés. Le 9mai, les permissions sont rétablies. Le 10 mai,vers 1.30 h du matin, le sergent entre dans lachambre et crie « debout, c'est la guerre ». Évi-demment, il se fait chahuter. Hélas ! Il faut biense rendre à l'évidence, il ne plaisante pas. J'enfilemon équipement et me rends avec mon équipe àmon poste dans le fortin 5.

La guerre

Le 10 mai, vers 2.30 h du matin, nousarrivons à l'abri où nous retrouvons le sergent etl'équipe du canon de 4,7.  Nous déposons nossacs et installons une garde aux pièces. Dès lelever du jour, nous regardons passer les avionsallemands. La D.T.C.A. tire et des éclats retombentprès de nous. Un peu plus tard, nous apprenonsque, sur les hauteurs de la Xhavée, un soldat a ététué par un éclat. Dans la matinée, nous voyonsarriver de petits groupes de gardes-frontière. Ilsont supporté le premier choc mais ont dit seretirer pour éviter l'encerclement. Une vingtainede soldats hollandais passent devant nous. Ils sontsans arme et vont Dieu sait où. Dans l'après-midi,mes parents viennent me rendre visite. Ils sontinquiets car ils ont déjà vécu une guerre et saventque la séparation risque d'être longue. Nousjouons les fanfarons, peut-il en être autrement ?Nous n'avons pas encore eu l'occasion d'avoirpeur ! Et puis, que risquons-nous dans un aussibeau fortin? Mes parents semblent rassurés. Maisle sont-ils vraiment ? Ils me quittent en mepromettant de revenir, le lendemain, avec mesfrères.

Page 40: Histomag 92

4 0 Histomag - Numéro 92

Nous apprenons qu'un train qui nous sui-vait a été touché par l'aviation. Le soir, nousdébarquons dans un patelin dont j'ai oublié lenom. Je m'installe dans un local où l'intendance astocké des vivres et j'y passe la nuit. Le 16 mai aumatin, pendant que je faisais ma toilette, on afermé l'intendance et je dois faire la file pourobtenir ma ration et récupérer mon équipement.Plus tard, nous partons pour Maria Aalter où nouslogeons chez l'habitant.

Ce qui reste du régiment est regroupé le17 mai. On fait le bilan : environ 30% de l'effectifest hors combat (35 tués, des blessés, des prison-niers et des disparus dont beaucoup ont étédéroutés par les Français et coupés de l'unité.L'armement et le charroi d'une valeur de deuxcompagnies de mitrailleuses, de la compagnie demortiers de 7,6 et de la moitié de la compagniede canons de 4,7 ont été détruits (en grandepartie le II). Faute de renforts en hommes et enmatériel, le régiment est reformé sur base dedeux bataillons à trois compagnies de fusiliers,une compagnie de mitrailleuses (12 pièces) etune compagnie de canons de 4,7 (7 pièces).L'effectif est réduit à 2.000 hommes. Nous voyonsune vingtaine de biplans belges tourner dans leciel puis se poser sur l'aérodrome voisin. Je mepromène et voilà qu'arrive un groupe importantde soldats français dont très peu ont encore leursarmes. J'ai à peine le temps d'apprendre qu'ils onteu un engagement très dur qu'on entend le bruitd'un moteur d'avion. Aussitôt, c'est la débandade; les Français plongent dans les fossés et je resteseul debout car l'avion, qui débouche en rase-mottes, porte les cocardes françaises. Le 18 maiune vingtaine de Dorniers viennent lâcher leursbombes sur le champ d'aviation et détruisent ausol la plupart des avions. Le 19 mai je tienscompagnie à la sentinelle qui monte de gardedevant le moulin dont nous regardons tourner lesailes. Nous sommes assis et le soldat a posé sonfusil contre le mur, entre nous. Il joue avec ladétente de son arme et « pan », le coup part, à 5cm de mon oreille droite. Le 20 mai, les Dornierssont revenus, pour achever les derniers avions etrendre le terrain inutilisable. Le 21 mai, rien àsignaler. Le 22 mai, nous allons occuper le terrainabandonné par les Anglais devant la Lys.

D'un côté...

de l'autre

Des canons il n'en restait plus guère

Page 41: Histomag 92

Il est 8 h du matin ! Seulement ? Les Allemandssont obstinés, ils n'arrêtent pas de tirer sur nous.La poignée de soldats que nous sommes neméritent pas tant d'honneurs. Vers midi, la cuisineroulante profite d'une courte accalmie et nousapporte de la nourriture ; nous recevons, en toutet pour tout, une pleine gamelle de petits pois. Etça continue. Il faut être très rapide pour aller fairepipi entre deux salves.

Nous roulons une cigarette. En donnant du feu àJulien, je remarque qu'il est blême ; la peau deson visage semble collée sur les os. Je ne suisprobablement pas plus beau à voir. Est-ce la peur? Je ne crois pas. Disons que nos sens sont enalerte et que nous sommes prêts à agir à lamoindre sollicitation. L'occupant du trou voisinnous montre un beau morceau de métal qui vientd'atterrir à ses pieds. Peu de temps après, Julienet moi avons la sensation qu'une mèche fore untrou dans le sol ; dans le même temps, nous noussentons soulevés et comprimés. Un peu de terretombe dans notre trou. Un obus vient d'exploserdans le sol, si près que nous n'avons pas entendul'éclatement. (Nous verrons que le bord de l'en-tonnoir était à moins d'un mètre de notre dos).Vers 6 heures du soir, le tir cesse, enfin ! Mais lesAllemands, en nous bloquant dans nos trous, nousont empêchés de ravitailler nos camarades. Onnous appelle et nous quittons notre bosquet pouraller décharger un camion qui a versé dans lefossé. La nuit est tombée. Nous avons changé deposition ; nous sommes repassés de l'autre côtédu canal. Je rencontre le sergent Léonet ; il estvenu chercher du renfort mais on l'empêche derejoindre ses hommes car le pont va sauter. Aubord de la Lys, le spectacle est dantesque. Au-dessus des maisons qui brûlent, le ciel est trans-formé en un long rideau rouge auquel les obus quiexplosent donnent un éclat éphémère. Je marcheavec Léonet, Nous fumons une cigarette et voilàque quelqu'un tire sur nous. Dans une envoléedigne d'un gardien de but international, nousplongeons dans le fossé.

4 1 Histomag - Numéro 92

Le 23 mai, nous avons passé la rivière etnotre régiment a été déployé le long de la rive. Lesergent et moi allons repérer les positions denotre compagnie et les chemins que devrontemprunter notre section de ravitailleurs. Noussommes stupéfaits car les 500 mètres que nousavons parcourus, entre le canal, sur l'autre riveduquel se trouve le P.C. du commandant, et la Lys,NE SONT PAS OCCUPES, ce qui signifie que noscamarades qui sont là, au bord de l'eau, alignésLES UNS A COTE DES AUTRES, devront combattreSANS LA MOINDRE PROTECTION ARRIERE. Notresection s'installe dans une maison au milieu deschamps. Nous sommes à portée de voix du P.C. età 300 m, en ligne droite, derrière notre compa-gnie. Vers 19.30 h, l'artillerie allemande ouvre unfeu violent sur nos positions. La bataille d'OOIGEMvient de commencer. Dans le village, des maisonsbrûlent. Nos artilleurs ripostent et infligent despertes sévères à l'ennemi dont les nombreusestentatives pour franchir la Lys sont toutes vouéesà l'échec. Vers 22 h, je me couche à terre dans lacuisine et je m'endors au son du canon.

Pendant la nuit du 23 au 24 mai, notrerégiment a été déplacé vers la droite, à l'autrecôté de la jonction du canal et de la rivière. Nousdevons rentrer au P.C. où on nous indique lesnouvelles positions à ravitailler. Dans un petitbois, près du canal, on a creusé des trous à moitiécouverts par des sacs de terre. Nous y installonsnotre section, puis je pars avec le sergent pouraller reconnaître l'emplacement occupé par notrecompagnie. Elle se trouve au bord de l'eau, dansun secteur boisé qui est soumis à un bombarde-ment intense. Un blessé nous demande de leconduire à l'infirmerie. Nous en sommes assezproches quand un obus éclate, en l'air, à 20 m denous. Nous avons « vu » la boule de feu et lestraces de fumée laissées par les éclats, mais nousn'avons rien « entendu ». Les Allemands ont faitmonter un ballon d'observation. Il doit nous avoirvus car, lorsque nous rejoignons la section, l'artil-lerie se met à nous tirer dessus. Je plonge dans letrou où se trouve déjà Julien et m'assieds à côtéde lui.  La mitraille hache les branches des arbreset des éclats tombent un peu partout mais lessacs de terre, au-dessus de nos têtes, suffisent ànous protéger.

Page 42: Histomag 92

Le 25 mai, en début de journée, noussommes dans un champ de blé. Un major passeet nous dit de creuser des trous.  Les Allemandsont franchi la Lys et on aurait aperçu des élémentsavancés. Nous devons à nouveau nous déplacer.Dans un village, le carrefour par où nous devonspasser est pris sous le feu de l'artillerie. Uneestafette motocycliste vient d'être renversée parune explosion. L'homme n'est heureusement pasblessé. Nous passons sans incident. Nous devonsrejoindre l'État-major qui se trouve à Hertegem. Acet endroit nous retrouvons les musiciens durégiment.  Notre unité a fondu comme neige ausoleil. Les rares rescapés des bords de la Lys nousracontent comment, pendant plus de 24 heures,ils ont résisté et comment ils ont pu échapper àl'ennemi, qui, au prix de pertes importantes, avaitfinalement réussi à traverser la Lys et qui, vul'absence de couverture, les prenait à revers. A

OOIGEM, le 1er de ligne a eu 72 tués, plus de 200blessés et les trois quarts du reste faits prison-niers. Parmi les mitrailleurs avec qui j'ai fait monservice, je sais que, à cette seule place, il y a eu2 tués : Charlier et Verleyen, quelques blessésdont : Jadoul, Smets et Vandenbos et une vingtai-ne de prisonniers.

Le 26 mai, les Allemands lancent destracts disant que les Français et les Anglais nousont abandonnés et que nous devons nous rendre.Nous sommes pratiquement encerclés et le bruitcourt qu'on va faire comme en 1914, se retran-cher derrière l'Yser. En attendant, mon estomacme rappelle que je n'ai rien mangé hier etaujourd'hui. J'entre dans une ferme occupée pardes réfugiés. Ils me donnent du lait aigre que jen'arrive pas à avaler et une tartine. Je m'assiedssur un petit talus au-dessus duquel une haie cacheun verger et je roule une cigarette. Soudain, mestympans sont sur le point d'éclater. Juste derrièremoi, une batterie de 75 vient d'ouvrir le feu.

4 2 Histomag - Numéro 90

Tract lancé par l'aviation allemandedans les lignes alliées...

... et la réponse !

Page 43: Histomag 92

. Les grenadiers décrochent. Après une

courte hésitation, le lieutenant nous dit de faire demême. Lorsque nous arrivons à la route, noussommes à nouveau pris à partie par l'artillerie. Lesgrenadiers sont arrêtés par les gendarmes etconduits dans la cour d'une école. Quant à nous,nous avons droit à une sérieuse engueulade de lapart d'un major. Le lieutenant lui explique notresituation. Le major se calme. Un sous-officier luiayant expliqué que, depuis plus de deux jours,nous n'avons reçu aucun ravitaillement, le majors'en va donner un ordre et nous recevons, chacun,un pain et une boîte de viande. Le lieutenant areçu des instructions. Après un court déplace-ment, nous nous déployons en tirailleurs dans uneprairie, à droite d'un chemin de terre. On nous aadjoint un canon de 4,7 tracté par une chenillette.Le conducteur est seul et n'a plus d'obus ! Nousarrivons à un champ de blé séparé du chemin parune maison entourée d'un jardin. Est-ce d'ici qu'onm'a tiré dessus il y a un quart d'heure? Je m'ap-prête à franchir la haie quand arrivent 18 Dorniersqui nous survolent en tirant de toutes leurs pièces.On peut voir, dans le ciel bleu, la trace de chaquecoup tiré. Cela crépite autour de nous comme dela grêle sur un toit de verre. Personne n'esttouché. Nous nous relevons et nous voyons quechaque impact est marqué par une petite colonnede fumée. Qu'est-ce que c'est que ça? Tout-à-coup, je suis pris d'une frousse rétrospective. Jeviens de me rendre compte que, si je m'étaiscouché perpendiculairement à la haie, j'auraisreçu une balle dans le dos. En effet, il y a de lafumée à 20 cm à gauche de la place où mesépaules se trouvaient, ainsi qu'à 50 cm à droite.Nous avons eu une sacrée chance! Nous sommesrevenus à notre point de départ. J'entre dans laferme pour faire remplir ma gourde d'eau. Pen-dant que j'attends, j'entends parler dans la piècevoisine, et mon cœur se serre. Ce sont des enfantsqui prient. Je sors et je reprends ma place. Brus-quement des colonnes de terre montent vers leciel. L'artillerie allemande tire sur l'endroit où nousvenons d'être mitraillés. Les obus tombent, enquinconce, sur toute la largeur de la prairie et letir se rapproche progressivement. A part la ferme,il n'y a pas d'abri. Alors, nous reculons, sans hâteet sans panique. Nous repartons à la recherche denotre unité. Sur une petite butte nous découvronsune batterie d'obusiers de 155. Ils tirent à vue surun objectif qui se trouve dans la plaine, environ 1Km plus loin. C'est ainsi que nous voyons l'arrivéede ces projectiles dont le départ nous assourdit. Lesoir, nous entrons dans une grange pour y passerla nuit.

4 3 Histomag - Numéro 90

Le 27 mai, au petit jour, on nous fait sortirde la serre où nous avons passé la nuit. Onrassemble tous les soldats qui se trouvent dans lecoin et on forme des groupes de combat quiprennent aussitôt place dans des camions. Je resteavec une douzaine de sous-officiers. Nous avonsdû donner nos armes et nous devons attendrequ'on nous en rende d'autres. Un camion doitvenir nous rechercher. Une heure plus tard, nousrecevons des fusils modèle 1889 que nous de-vrons charger avec nos cartouches modèle 1930.(La balle mod 89 a le bout rond, tandis que laballe mod 30 a le bout pointu et a une trajectoireplus tendue ; ce qui veut dire que pour atteindreles jambes, nous devrons viser la tête, car la lignede mire n'a pas été adaptée à nos projectiles.)Une camionnette vient nous chercher. Elle estconduite par un civil qui a été réquisitionné. Aupremier voyage il est tombé en panne. Les occu-pants ont été répartis dans les autres camions eton lui a dit qu'après avoir réparé il devait venirnous prendre. Ce qu'il fait. L'ennui c'est qu'il nesait pas où se trouve notre unité.Nous approchons de Tielt et partout, dans lesfossés, des soldats attendent. Le lieutenant qui apris le commandement de notre petit groupeessaye de savoir où sont les autres, en vain. Nousquittons la route et nous engageons dans une ruelatérale. Comme nous allons en atteindre le bout,une arme automatique ouvre le feu sur nous. Jesuis debout à l'arrière et je vois les balles hacherle bas des volets et arracher des éclats de pierreaux façades. Le chauffeur s'arrête et repart aussi-tôt en marche arrière. Le lieutenant et lui sont lenez sous le tableau de bord. C'est donc sans rienvoir qu'il recule sur 150 m, prend le virage et nousmet à l'abri. Grâce à Dieu, personne n'est blessé.Nous repartons à pied et ne retrouvons toujourspas nos camarades. En désespoir de cause, lelieutenant nous met en position à l'orée d'un bois.Nous sommes séparés de la route par un petitvallon où, légèrement sur notre gauche, se trou-vent des bâtiments de ferme. Une bonne centainede grenadiers viennent s'installer à côté de nous.On se sent moins seul. Des officiers sortent de laferme et s'asseyent dans l'herbe, un peu à l'écart.Ils ont eu de la veine; juste à ce moment, desobus tombent sur la ferme.

Page 44: Histomag 92

Le 31 mai je suis seul dans le tram qui partvers Oreye. A la sortie de la ville, nous couponsune colonne de prisonniers belges. Quelques unsprennent le tram en marche. A Oreye, nous chan-geons de tram. Sur la plate-forme avant, onconseille aux soldats de descendre à Rocourt. Al'arrière, on ne me dit rien et je vais jusqu'auterminus, au pied de la rue de Campine. Des genssont massés des deux côtés de la rue Sainte-Marguerite et au Cadran.

Je traverse la rue; là, une femme me barrele passage et me demande si je connais sonneveu qui est au 1er de ligne. Il s'agit d'un soldatde ma compagnie, et je sais qu'il a été tué. Je n'aipas le courage de le dire à sa tante. Pendant quenous parlions, un Allemand s'est approché. Il medit de le suivre. Trois ou quatre autres soldatsbelges nous accompagnent. Nous sommes con-duits au Palais. Nous sommes persuadés qu'on varecevoir ce fameux « cachet » dont on a entendudire qu'il permettait de rentrer chez soi en toutetranquillité. Il nous faut, hélas, déchanter, car,après un court interrogatoire, nous sommes con-duits à la Citadelle. Nous venons de perdre notreliberté.

Il est de bon ton de se moquer de ceux quiont fait les dix-huit jours et de les traiter depoltrons et de fuyards. Or, tous les mouvementsque nous avons exécutés l'ont été « par ordre »et quand on nous a demandé de faire front, nousl'avons fait avec autant de courage et d'efficacitéque nos ainés de 14-18. Nous avons été battus,c'est vrai, mais ce sont les avions et les blindés,abondants en face, inexistants chez nous, qui ontfait la différence. Pendant la campagne, j'ai vu : le11, 6 avions français; le 17, 20 avions belges(détruits au sol les 18 et 20) et un autre avionfrançais. La Luftwaffe faisait ce qu'elle voulait etne s'en privait pas. Outre ses nombreux blessés,le 1er de ligne a eu 130 tués.

Article de Jules Loxhay paru dans le fascicu-le 6 du tome IV du CLHAM (Centre Liégeoisd’Histoire et d’Archéologie Militaire)

http://www.clham.org/000000.htmvia le site Freebelgians.

4 4 Histomag - Numéro 90

Le 28 mai, vers 5 h du matin, le fermiervient nous éveiller et nous dit que les Allemandssont proches. Nous prenons nos armes et noussortons. Nous scrutons la nuit et puis quelqu'unfait remarquer qu'il fait bien calme. Même entendant l'oreille, nous n'entendons ni canonna-des, ni tirs de fusils ou d'armes automatiquescomme c'était le cas depuis 5 jours. (Le protocolede capitulation a été signé à 0.20 h et les armesse sont tues à 4 h du matin). Nous arrivons dansune localité située à 12 km de Bruges et nousapprenons la nouvelle. L'ordre est donné de dépo-ser les armes. Nous les jetons, en tas, sur le côtéde la route. Pendant que nous attendons desinstructions, nous voyons passer une voiture alle-mande qui arbore un énorme drapeau blanc. Dansle courant de l'après-midi, je vois des soldats, deplus en plus nombreux, se mettre en route pourrentrer chez eux. Je commets la bêtise de fairecomme eux. Le soir, les Allemands nous arrêtentet nous parquent dans une prairie.Le 29 mai, tôt le matin, nous sommes autorisés àrepartir. Je marche, en compagnie d'un sergent,parmi les nombreux réfugiés qui regagnent leursfoyers. Un soldat de la « Flak » arrête un véhicule.Il invite des femmes et des enfants à prendreplace sur la plate-forme. Comme nous arrivons àsa hauteur, il nous fait signe de monter, chacund'un côté, sur les larges marchepieds. Nous nousagrippons et la voiture démarre dans la directionde Bruxelles. Le chauffeur nous débarque aucentre de la capitale. Une dame, à qui nousdemandons notre chemin, nous invite à manger.C'est une verviétoise ; inutile de dire que le rizqu'elle nous offre est extra. Le 30 mai, nousmarchons depuis quelques heures. Un camion del'armée allemande s'arrête et le chauffeur nousfait signe de monter dans la remorque. Il nousconduit jusqu'à Tirlemont. Je prends la route deSaint-Trond tandis que mon compagnon s'en vadans une autre direction.

Page 45: Histomag 92

4 5 Histomag - Numéro 92

La force publique du Congo belgedans la guerre

eu de gens le sa-vent peut-êtremais la Belgiques’était dotée de-puis 1908 d’une

grande colonie d’outre-mer: le Congo belge (actuelleRépublique Démocratiquedu Congo). Ce vaste terri-toire avait déjà, lors du pre-mier conflit mondial, étéen proie à la convoitise desbelligérants. Il n’en fut pasautrement, vingt deux ansplus tard. La capitulation, le28 mai 1940, de l'arméebelge de campagne neproduit, d'abord, guèred'effet au Congo belge.L'effort de guerre colonialsera économique avantd'être militaire. Les pre-mières bombes atomiques

américaines n'auraient probablement pas été prêtes en août 1945 sans l'uranium congolais. Loin del’Europe et vivant dans la tranquillité, le Congo belge à son tour allait pourtant entrer dans la guerre, maisc'était plutôt à reculons. Le 21 janvier 1941, après de longs mois de négociations, un accord commercialvisant à faire du Congo un « belligérant actif  » fut signé à Londres par le gouvernement belge et laGrande-Bretagne. Sur le plan financier, était établi un taux de change fixe du franc congolais, lequel sevoyait dévalué par rapport à la livre sterling. L'accord prévoyait également l'entrée du Congo dans la zonesterling, l'interdiction de l'importation et de l'exportation d'or et de devises. Sur le plan commercial, ilgarantissait l'achat par la Grande-Bretagne de certains produits congolais (cuivre, coton, huile de palme,etc.) qui seraient placés dans une situation douanière semblable à celle des produits coloniaux anglais.Mais si, à Londres, cet accord donna lieu à une satisfaction mutuelle, les Belges de la colonie déclarèrentplutôt que la convention tendait à exiger du Congo l'apport de sa production d'or et de ses revenus sansrien lui donner en échange.

PSoldats de la Force Publique à l'entrainement - 1943

Page 46: Histomag 92

Congo belge, mais c'est le 4 juillet seulement qu'àce titre, il arriva à Londres pour prendre sesfonctions. Le 10 mai, les résidents allemands auCongo avaient été arrêtés. Le 10 juin, l'Italie étantentrée en guerre aux côtés de l'Allemagne, legouverneur ordonna d'en faire autant pour lesItaliens.

4 6 Histomag - Numéro 92

En 1940, vivaient auCongo environ 25.000 Belges, ycompris les femmes femmes etles enfants. Le gouvernementPierlot n'avait à peu près rienprévu, en fait de mobilisation.Le colonel Gilliaert commandaitla Force publique, qui avait crééun deuxième bureau, à des finsde renseignements, sous la di-rection du capitaine Emile Jans-sens. Le théâtre des opérationsétait loin, les communicationsinterrompues. Le capitaine Jans-sens s'entendit avec le directeurde Radio Léopoldville, la stationlocale, qui se trouvait entre lesmains des pères jésuites, pourdiffuser un bulletin quotidiendonnant quelques informations.En fait, on ne savait presquerien de ce qui était en train dese passer. Le 28 mai à 12 heu-res 30, le gouverneur général

Pierre Ryckmans prononça à la radio un discourshaché par l'émotion. Sa conclusion était très fer-me : le Congo reste dans la guerre. Le même jour,M. De Vleeschauwer ministre des Colonies, télé-graphia à Pierre Ryckmans le texte du discoursprononcé par Hubert Pierlot au micro de RadioParis. Porté à la connaissance des Belges, ce textesema la consternation ; le gouverneur ajoutaittoutefois, prudemment, que le Roi n'était pluslibre et se trouvait dans l'impossibilité de régner,et il joignit à l'information l'avis de Churchill no-tant que « l'heure n'est pas à porter un jugementsur ce qui s'est passé ». A tout hasard, le gouver-neur fit enlever des lieux publics les portraits duRoi, insistant cependant pour que la chose sefasse dans la plus grande discrétion, par crainted'effaroucher les indigènes. Cette mesure outra lecapitaine Janssens, qui, dans son bureau, remitd'autorité le portrait royal là, où, à son avis, ildevait être.

On entrait dans une période de totale confusion,avec la défaite de la France, l'effondrement desinstitutions, le désarroi du gouvernement belgeincapable de fournir une décision maîtrisée. Seul,en fait, à la tête de la colonie, Pierre Ryckmansconnaissait les semaines les plus difficiles de sacarrière. Albert De Vleeschauwer avait bien éténommé, le 1er juin, administrateur général du

Soldat de la Force Publique en uniforme de campagne

Congolais de la Force Publique sur une motocyclette

Soldats de la Force Publiqueà la parade dans les année 1940,

entourant leur officier belge

Page 47: Histomag 92

Les notes, mises en circulation par l'entourage duRoi, allaient dans le même sens. « Simple hypo-thèse de travail  », dira Émile Janssens, devenugénéral, au cours de l'émission. A l'été 40, surplace, les cœurs et les esprits ne pouvaientqu'être déchirés.Les anciens combattants accusaient le gouverneurd'attentisme. Une Ligue d'action patriotique seconstitua, qui militait pour une politique ouverte-ment pro-alliée et protesta énergiquement lors-que Léopoldville refusa l'appui militaire quesollicitait le Kenya. L'autorité coloniale permîtseulement l'engagement de 300 volontaires dansles forces britanniques de l'est. A l'inverse, legouverneur reçut aussi une pétition réclamantque soit proclamée la neutralité du Congo. D'ac-cord avec le colonel Gilliaert, Pierre Ryckmans,sachant que la petite armée congolaise n'était pasen état de se lancer dans des aventures lointaineset que des mois seraient nécessaires avant qu'ar-rivent d'Amérique les approvisionnements et lematériel indispensable, Pierre Ryckmans, doncpensait que la prudence autant que la diplomatiecommandaient de limiter le rôle des forces mili-taires à la défense du territoire. Il y avait non loinde là en Abyssinie, 250.000 Italiens prêts à mettreen œuvre le rêve hitlérien de conquête de l'Afri-que ; c'est pour répondre à cette attaque qu'ilfallait être prêt.

4 7 Histomag - Numéro 92

Mais début juillet, au moment où les Britanniquesdemandèrent un soutien militaire aux troupescoloniales belges pour protéger la longue frontiè-re commune de leurs possessions d'Afrique avecles territoires sous domination italienne, le gou-verneur s'avisa que la Belgique n'était pas enguerre avec l'Italie ; les Italiens retrouvèrent laliberté. Pas en guerre avec l'Italie, nous ne l'étionsplus avec l'Allemagne. Des pressions de toutessortes s'exerçaient sur le gouverneur pour qu'ilévite de nous précipiter dans un camp plutôt quedans l'autre. Des industriels et des hommes d'af-faires plaidaient pour la neutralité de la colonietelle qu'elle avait été prévue en 1885 par l'Actede Berlin ; ils faisaient état d'interventions alle-mandes suivant lesquelles le Congo, au cas où ilsoutiendrait l'effort de guerre allié, risquerait gros.Une éventualité qu'il fallait, hélas, bien envisager,était que l'Angleterre ne gagne pas la guerre.Quarante ans plus tard, lors des émissions deMaurice De Wilde à la télévision belge sous le titreL' Ordre Nouveau, on évoqua un document duDeuxième bureau, rédigé par le capitaine Jans-sens, émettant l'avis qu'il fallait, pour définir lesattitudes à prendre au Congo dans un souci debonnes relations avec toutes les puissances, tenircompte de la possible défaite anglaise.

Camions utilisés par la Force Publiquepour être déployées face aux troupes italiennes en Ethiopie

Page 48: Histomag 92

expliquer la situation. Le gouverneur général avaitd'abord songé à soumettre à la Justice les anima-teurs de cet épisode burlesque abusivement affu-blé du nom de “putsch”. Mauroy et le capitaineMet den Ancxt, un héros de la guerre 14-18, leplus énervé des « putschistes », furent seulementenvoyés à Londres et mis à la disposition desforces belges de Grande-Bretagne ; ils se distin-guèrent, l'un en Hollande et l'autre en Afrique duNord. Sur quoi, le 21 novembre, le gouvernementbelge reconstitué à Londres déclara la guerre àl'Italie. Des escadrilles italiennes s'étaient poséesen Belgique pour participer aux opérations debombardement sur la Grande-Bretagne ; un sous-marin italien avait coulé le vapeur belge Kabalo.C'était plus qu'il n'en fallait pour motiver l'attitudedu gouvernement. La situation redevenait claire.Et puis, cette participation directe des forces mili-taires belges aux opérations en Afrique, on allaitl'avoir tout de même, en fin de compte.

4 8 Histomag - Numéro 92

Victoire en Éthiopie

Ce n'était pas l'avis des officiers des can-tonnements du nord-est, qui fantasmaient aunom de De Gaulle et rêvaient de coup de force. Le15 novembre 1940, jour de la fête de la Dynastie,à l'issue d'une fiévreuse réunion tenue à Watsa,quelques-uns d'entre eux envoyèrent à Ryckmansun télégramme comminatoire. Leur argumentétait que, faute de volonté de combattre, unecollaboration avec les Anglais nous serait imposéepar ces derniers et nous coûterait à terme lamoitié de la colonie, tandis qu'une offre sponta-née nous vaudrait leur amitié et sauverait l'inté-grité du territoire. Gilliaert, à la suite de cetélégramme, gagna Stanleyville, où quelques tê-tes chaudes parlaient de rien moins que de procé-der, dès son arrivée, à l'arrestation ducommandant en chef.

Le colonel Mauroy, quoi qu'il fût ardent partisande l'engagement immédiat de la Belgique dansles combats d'Afrique, réussit à calmer les plusexcités. Gilliaert put s'adresser aux officiers et

Carte de la campagne d'Ethiopie menée par la Force Publique

Page 49: Histomag 92

4 9 Histomag - Numéro 92

Les hauteurs de Saio, lieu des principaux affrontementsentre les forces du Congo Belge et l'armée italienne

Canons italiens pris par les troupes de laForce Publique après la victoire de Saio

Page 50: Histomag 92

5 0 Histomag - Numéro 92

Le général Gilliaert et le Colonel Dronckers-Martensau QG des troupes italiennes

Un aérodrome italien en Ethiopie pris par les troupes de la Force Publique

Page 51: Histomag 92

Mars ou Mercure

Tout cela, cependant, n'empêchait pas lefutur général Janssens de déplorer que les respon-sables du Congo préférassent, ainsi qu'il l'expliquedans son Histoire de la force publique, « l'épicerieà l'épée, les accords économiques au combat etMercure à Mars. » On ne saurait nier que le Congoait été une des principales sources d'approvision-nement pour l'industrie de guerre anglaise ; il estsûr que le rôle joué de ce fait par le Congo estsans comparaison avec le poids d'une arméecoloniale belge que les Anglais jugeaient, à justetitre, insuffisamment encadrée et préparée pouraffronter les troupes de Rommel. Mais il est vraique les Anglais étaient prêts à tout, y compris àl'intervention militaire, pour s'approprier auxmeilleures conditions l'usage des réserves congo-laises de matières premières ; la dévaluation de30% du franc congolais qu'ils imposèrent augouvernement belge et qui rendit d'autant pluspénible l'effort de la colonie n'avait, c'est un fait,aucun rapport avec le fair-play chevaleresque quel'on prête souvent, sans y bien réfléchir, au carac-tère britannique.

L'âpreté des négociations avec Londres tranchesingulièrement sur l'enthousiasme des discoursqui célébrèrent après la guerre la part prise par leCongo à l'effort pour la victoire. Les rechercheseffectuées par l'historien belge J.C. Willame dansles archives du Foreign Office montrent qu'eneffet le Congo n'avait pas le choix : s'il n'était pasentré de bon gré dans la guerre, la Grande-Breta-gne l'y aurait contraint. Quant au climat des pour-parlers, c'est peu de dire qu'il était médiocre. Lesouvenir des campagnes menées par la perfideAlbion contre l'entreprise coloniale de Léopold IIétait toujours bien vivant : c'est sans doute ce quiavait autorisé Chamberlain, en 1937, comme onne l'a su qu'après, à proposer à Hitler en échangede la paix en Europe la moitié du Congo belge ; demême le gouvernement Churchill s'étonnait de laprétention des Belges à réclamer des compensa-tions pour l'effort de guerre que l'on allait deman-der au Congo.

5 1 Histomag - Numéro 92

L’année 1941 allait ainsi marquer l’arrivée duCongo belge dans la guerre. Déchargé de sesfonctions de commandant en chef pour prendrele commandement du corps expéditionnaire dunord-est, le colonel Gilliaert, bientôt promu géné-ral, se trouva à la tête d'une force de 24.000hommes dont une bonne partie allait être enga-gée en Éthiopie contre les Italiens. Partie de

Stanleyville le 1er janvier, la brigade parcourutmille kilomètres pour atteindre Juba, sur le Nil,puis mille encore vers le nord, puis 500 vers l'est,pour gagner la frontière éthiopienne et se trouverengagée par le commandement anglais. Le pireennemi n'était pas les Italiens, bien qu'ils fussent,numériquement, largement supérieurs ; ce sontles maladies amibiennes qui faisaient dans latroupe congolaise le plus de dégâts. Néanmoins,le 12 mars, un bataillon s'empara d'Assosa, puis,avec le concours d'une unité britannique, de Gam-bela. Les forces adverses s'étaient repliées surSalo. Trois mille hommes partirent à l'assaut le 3juillet à 6 heures du matin et, à 15 heures, lagarnison envoyait des parlementaires ; 4.000Italiens dont 9 généraux, 18 canons, 250 véhicu-les, 8.000 fusils, 12 mortiers et 500 mulets tom-baient, du même coup, aux mains des Alliés.L'armée congolaise laissait, pour sa part, 1.100hommes en route - mais le drapeau belge flottaità nouveau parmi les vainqueurs. Ce ne fut pas laseule participation de la colonie aux opérationsmilitaires. Renvoyée par l'état-major britanniqueau Congo, la Force publique fut mise, plus tard, àla disposition du commandement de l'Ouest afri-cain au Nigéria, où se préparait une attaquecontre les colonies françaises ralliées à Vichy.D'autres unités se retrouvèrent au Moyen-Orient,avec, notamment, un raid de 7.000 kilomètres,pour 850 véhicules et 2.000 hommes, avant d'at-teindre Le Caire. On vit en Palestine le First Bel-gian Congo Brigade Group, ou bien encore 300Belges du Congo, résidents ou réfugiés, qui parti-cipèrent aux opérations de la Royal Air Force oude sa section sud-africaine. Enfin on vit un hôpitalde campagne équipé par le Congo opéra pour lesAnglais jusqu'en Birmanie.

Page 52: Histomag 92

L'attitude du gouverneur général mettant destroupes congolaises à la disposition des forcesbritanniques pour une campagne en Éthiopie avaittout d'abord été l'objet de critiques. On reprochaità Pierre Ryckmans d'avoir péché par excès dezèle. Le réalisme finit par l'emporter. Si l'on vou-lait que la Grande-Bretagne, un jour, contribue àla restauration de l'indépendance du pays, il fallaitd'avance en payer le prix.

Ouvrage de Pierre Stéphany,

http://www.ibiblio.org/hyperwar/UN/Belgium/Congo/

5 2 Histomag - Numéro 902

Albert De Vleeschauwer, combattant pied à piedafin que les Anglais fournissent au Congo le maté-riel nécessaire pour mener cet effort sans com-promettre son équilibre économique, se rendit« insupportable » aux yeux de Churchill. Les res-ponsables politiques belges, encouragés dans leurattitude par les milieux privés et en particulier parles dirigeants de la Société Générale, trouvèrentégalement appui auprès des États-Unis, mieux àmême de fournir au Congo le matériel dont ilavait besoin ; cette ébauche d'un axe Washington- Léopoldville incommoda, lui aussi, beaucoup lesAnglais. Dans la « mère patrie », comme on disaitalors, seul un petit nombre d'initiés étaient au faitdes événements d'Afrique.

Médaille de la Guerre Africaine - 1940-1945

Clairon Congolais dela Force Publique - 1943

Page 53: Histomag 92

5 3 Histomag - Numéro 92

Les Belges dans la R.A.F.

près la guerre éclair de mai-juin 1940 et la capitulation de la France, le mondeentier était convaincu que l'Angleterre, seule, ne tiendrait pas longtemps devantles armées victorieuses de Hitler. On attendait aussi, avec beaucoup de scepti-cisme, une riposte britannique aux coups allemands. Les Belges rentraient chezeux après leur pénible exode, l'armée était prisonnière et  l'Aéronautique

Militaire  avait cessé d'exister. C'est dans ce contexte qu'une poignée d'aviateurs refusad'accepter cette situation et, préférant le combat aux camps de prisonniers ou à l'inactivité,ils s'échappèrent, malgré les ordres qui le leur interdisaient, de France et du Maroc pourrejoindre la Grande-Bretagne.

A

Page 54: Histomag 92

5 4 Histomag - Numéro 92

Certains parmi eux furent immédiatementportés déserteurs et condamnés pour détourne-ment de matériel militaire !!!!. Nombreux furentdonc les Belges désireux de poursuivre le combatou tout simplement de reprendre immédiatementles armes contre l’envahisseur allemand. Despilotes confirmés mais également issus de l’Ar-mée de terre reprirent rapidement leur place ausein de la R.A.F. Ils furent 29 à prendre les com-mandes d’appareils britanniques dès le début dece que l’on appellera la ‘’Bataille d’Angleterre’’,dans les escadrilles de Hurricane du Fighter Com-mand n° 87, 213, 32, 43, 145, 46 et 229 :

M. BUCHIN, R. de CANNAERT d'HAMALLE,B. de HEMPTINNE, R. de HEMRICOURT deGRUNNE, F. de SPIRLET, G. DOUTREPONT,A. JOTTARD, D. LE ROY du VIVIER, R. MA-LENGREAU, J. OFFENBERG, V. ORTMANS,J. PHILIPART, E.SEGHERS, A. VAN DEN HO-VE D'ERTSENRYCK, W. VAN LIERDE.

Spitfire du 349th Squadron

Spitfire du 350th Belgian Squadron

Page 55: Histomag 92

5 5 Histomag - Numéro 90

Vingt et une victoires confirmées et six probablessont inscrites à leur palmarès entre le 11 août etle 31 octobre 1940. Sept d'entre eux y ont perdula vie, deux autres furent grièvement blessés. Sixdes sept tués Belges se trouvent sur le tableaud'honneur des aviateurs tués au cours de la Ba-taille d'Angleterre, parchemin déposé à l'abbayede Westminster dans la chapelle érigée à leurmémoire et dont les vitraux reprennent les insi-gnes des escadrilles. Le plus jeune de ce groupede braves trouva la mort au-dessus du comté deKent le jour de la Toussaint 1940; il s'appelait deCannaert d'Hamalle. Il avait 21 ans… et étaitarrivé le premier en solitaire le 20 juin à Plymouthavec un convoi de Polonais.

Quatorze autres (pilotes, observateurs et mi-trailleurs) furent répartis, après une courte adap-tation sur Bristol Blenheim, entre les Squadrons235 et 236 du Coastal Command. Voici leurs noms:

L. DEJACE, R.DEMOULIN, GIOVANNI DIEU, H. GON-NAY, L. HEIMES, L. JAVAUX, J. KIRKPATRICK,H. LAS-COT, O. LEJEUNE, A. MICHIELS, L. PREVOT, R.ROMAN, A. VANWAYENBERGHE, F. VENESOEN.

Blason du 350th SquadronCO Van de Velde,

349th Belgian Squadron

Flight officer Paul Siroux

Page 56: Histomag 92

Tous ces hommes étaient incorporés dans les FreeBelgian Forces (Forces Belges Libres) qui combat-tirent aux côtés des Alliés durant la SecondeGuerre mondiale au risque de se voir considéréscomme déserteurs et traîtres envers la patrie. Cesodieuses accusations ne furent annulées officielle-ment qu’en 1948.

Bibliographie et sites Internet :www.freebelgians.bewww.brigade piron.behttp://www.vieillestiges.be/‘’J’ai volé ma Liberté’’ par Mike Donnet Editions JMCollet (coll. Vécu par des belges)Article de G. Rens dans "Jours de Guerre" Editionsdu Crédit Communal de Belgique "Journal des Combattants" 11/2000.

Iconographie :www.freebelgians.be

5 6 Histomag - Numéro 92

Parmi ceux qui rejoignirent plus tard, citons égale-ment notamment Raymond Lallemant, un as bel-ge sur Hawker Typhoon à la 609 R.A.F. Squadronet il ne faut pas oublier Michel ‘’Mike’’ Donnet qui,avec son ami Léon Divoy, gagna l’Angleterre lanuit du 4 au 5 juillet 1941 à bord d’un SV4bis(Stampe & Vertongen). Bien entendu, les avia-teurs ne furent pas les seuls à gagner l’Angleterre.De nombreux soldats et officiers belges échappè-rent à la captivité et allèrent former l’embryond’une future armée belge outre Manche. Cesbraves servirent notamment au sein de la Brigade‘’Libération’’ (nommée également Brigade Pirondu nom de son chef le major -à l’époque- Jean-Baptiste PIRON) (voir article dans ce numéro),tandis que d’autres firent partie de la N° 4 Belgiantroop du No. 10 (Inter-Allied) Commando forméele 7 août 1942 par le capitaine Danloy.

Pelouse d’Honneur de la Force Aérienne située dans le cimetière de Bruxelles.

Page 57: Histomag 92

5 7 Histomag - Numéro 92

Van Lierde, un as Belge

u cours de la Seconde Guerre Mondiale, 521 pilotes et navigantsbelges ont servi dans la Royal Air Force. 128 d'entre eux ont laisséleur vie afin de libérer l'Europe. C'est de l'un de ses pilotes que nous

allons découvrir le parcours. Il s'agit de Rémy van Lierde.

A

Page 58: Histomag 92

Le 609 "West Ri-ding" Squadron estcréé le 10 février1936 appartenant àla Royal Auxiliary AirForce, c'est une unitéde réserve et les pilo-tes s'entraînent le di-manche. L'unitéparticipe à l'opéra-tion Dynamo puis à laBataille d'Angleterre.

En avril 1941, de nombreux pilotes belges ysont affectés. En avril 1942, elle est la 3èmeà être équipée du Hawker Typhoon. Jusqu'àla fin de la guerre, l'unité participe à toutesles grandes opérations faisant des ravagesdans les rangs ennemis. 55 pilotes belgesont servi au sein de cet escadron. Son pal-marès est de 232 victoires aériennes etplusieurs centaines d'objectifs au sol dé-truits pour la perte de 73 pilotes.

Rémy réalise plusieurs missions sur Spitfire Mk Vb.Puis il commence sa transformation sur HawkerTyphoon avec son unité à Duxford. C'est unepériode dure et très risquée car le nouvel appareilsouffre de nombreuses maladies de jeunesse. Onpourra ainsi citer : tirs accidentels des canons, lemoteur Napier Sabre s'arrête sans prévenir ouprend feu, l'appareil perd sa queue en piqué ouau cours d'évolution brusque ... Quasiment tousles pilotes auront effectué un atterrissage forcé ycompris "Mony". Enfin, les autres escadrons ainsique les unités de DCA alliées confondent le Ty-phoon avec le Focke Wulf Fw 190.La première sortie opérationnelle de l'unité avecle a lieu le 19 août 1942 sur Dieppependant l'opération .Pour Rémy et ses camarades, les missions sesuccèdent, patrouilles en mer et attaques denavires, escortes de bombardiers, chasse libre etmême des missions de nuit. Notre pilote accumu-le de l'expérience.Le 20 janvier 1943, au cours d'une mission d'inter-ception de (chasseurs-bombardiers) harce-lant le sud de l'Angleterre et Londres, il abat sonpremier appareil ennemi, un Fw 190, au sud deDouvres.

5 8 Histomag - Numéro 92

Rémy est né le 14 août 1915 à Overboelare.Le 16 septembre 1935, il s'engage dans l'Aéro-nautique Militaire. En novembre de la mêmeannée, il commence la formation d'observateurnavigant mais décide de s'orienter vers le pilotage.Le 1er mai 1937, il est breveté pilote et intègre la3ème escadrille du 1er régiment de l'Aéronauti-que Militaire.

Au cours des premiers jours de la campagne de1940, il effectue plusieurs missions de reconnais-sance car pour l'état-major de l'Armée la situationest des plus confuse.

Le 16 mai 1940, pendant une de ces missions, ilest abattu par la (DCA allemande). Capturé etblessé, il est hospitalisé à Bruges.Ne voulant pas rester en Belgique occupée, ildécide de rejoindre l'Angleterre pour continuer lalutte. Débute alors pour lui un long parcours.Le 28 septembre 1940, il se met en route endirection de la France afin de gagner l'Espagne. Ilarrive à traverser la frontière mais la Garde Civilel'arrête. Il subit un régime carcéral sévère aucamp de Miranda près de Burgos du 1er novem-bre 1940 au 14 février 1941.

Le 22 juillet 1941, Rémy arrive au Royaume-Uni.Après être passé par leet les interrogatoires du MI 5 pour démasquer lesespions, il s'engage à la RAFVR (

) le 5 septembre 1941.En octobre 1941, il est envoyé à l'OTU 57 (

, la dernière étape de la forma-tion d'un pilote au sein de la RAF) pour apprendreles us et coutumes de la .Le 9 janvier 1942, il est envoyé au N° 609

avec le grade de (sous-lieute-nant) et retrouve au sein de cette unité denombreux compatriotes.

Page 59: Histomag 92

Le soir du 14 mai 1943, il décolle avec 2 bombesde 250 livres, en direction d'une base ennemie enBelgique, volant en rase-motte. Un hangar estdétruit et sur le chemin du retour, il repère unbombardier allemand, un Heinkel He 111. Il atta-que et le bombardier se crashe aux environsd'Ostende.

5 9 Histomag - Numéro 92

Le 26 mars 1943, "Mony" effectue une mission surla base de Chièvres (près de chez lui). Il prend enchasse un Junker Ju 52/3m (trimoteur de trans-port) venant de décoller et l'abat (sans le savoir)sous les yeux de sa femme¹ et de la populationaccourues pour assister au spectacle.Il est le premier pilote de à réaliser uneattaque avec bombes.

Squadron 609, 5 Belges, de gauche à droite : Charles Demoulin, "Manu" Geerts, "Mony"van Lierde, "Cheval" Lallemand (venant d'être décoré de la ) etJoseph Renier

Page 60: Histomag 92

Le 27 avril 1944, suite à sa demande de retour enopération, Rémy abandonne son grade de

et intègre le N°3 volant surHawker Tempest Mk.V.

Le 13 juin 1944, débute l'offensive des V1 ou(arme de représailles), arme de

terreur tombant au "petit bonheur la chance".Rémy van Lierde se spécialise alors dans la chasseaux bombes volantes.Du 16 juin au 16 août 1944, il abat 35 V1 etparticipe à la destruction de 9 autres. Après guer-re, il a expliqué avoir abattu ces engins avec les 4canons de 20 mm de son Tempest sauf un qu'il abasculé avec le bout de son aile car il n'avait plusde munition.

Le 20 août 1944, il est à nouveauet prend le commandement du N°164 .Avec cette unité, il combat en Hollande et enAllemagne.Le 8 mai 1945, nous retrouvons notre "as" comme

officier de liaison au Quartier Général de la 2nd

.En août 1945, Rémy prend le commandement duN°350 formé essentiellement de per-sonnel belge. Cette unité est en attente de sontransfert dans la nouvelle Force Aérienne belge.En juin 1946, de retour en Belgique, il est promumajor.En novembre 1946, il commande la 1ère Escadrede Chasse basée à Beauchevain.D'octobre 1947 à novembre 1950, il dirige leGroupement des Opérations, période dont il profi-te pour étudier au . Puis il enchaî-ne avec le commandement de la 7ème Escadrede Chasse.

6 0 Histomag - Numéro 92

Le 30 juillet 1943, Rémy et 5 coéquipiers décol-lent pour une escorte de bombardiers Bostondevant effectuer un raid sur l'aérodrome d'Amter-dam-Schiphol aux Pays-Bas. Au cours de la mêléequi suit l'arrivée de chasseurs de la ,"Mony" est pris en chasse par un Bf 109 et malgréune succession de manœuvres évasives, le chas-seur ennemi reste collé dans sa queue. Il tenteune dernière manœuvre dans un piqué, redres-sant son au ras des flots tandis quel'appareil allemand percute la mer.Quelques temps plus tard, une nuit, Rémy attendle retour de Johnny Baldwin quand soudain unchasseur Fw 190 se pose sur le terrain. "Mony" et3 camarades se précipitent (sans arme) et fontprisonnier le pilote. Il s'agit du sous-officier HeinzEhrhardt du SKG.10 (ou escadre de bombardement rapide) ayant con-fondu la base anglaise avec sa base de Saint-Omer!En septembre 1943, Rémy est promu

(capitaine).Le 10 octobre 1943, "Mony" détruit un bombar-dier Ju 88 pendant un surprise. Un secondbombardier tombe sous ses obus pendant satentative d'atterrissage au cours de la mêmeattaque. C'est sa cinquième victoire.Le 30 octobre 1943, nouvelle victoire, cette foissur un bimoteur Bf 110.Fin décembre 1943, "Mony" termine son tourd'opération et part pour une permission.En février 1944, Rémy est promu(commandant) et sert à lade Sutton Bridge puis à Manston où il partage sonexpérience.

Hawker Tempest

Page 61: Histomag 92

Darling Kev, Hawker Typhoon, Tempest and SeaFury, Crowood, 2003.Demoulin Charles, mes oiseaux de feux, Julliard,1982.Lallemant Raymond, Rendez-vous avec la chance,Editions J'ai lu, 1964.Lallemant Raymond, Rendez-vous d'un jour, 6 juin44, Lallemant Editeur, 1994.Shores, Christopher, Aces High, GrubStreet, 1994.Shores, Christopher, Aces High 2, GrubStreet, 1999.Thomas, Andrew, V1 flying bomb aces, Osprey-publishing, 2013.Thomas, Chris, Typhoon and Tempest aces ofWW2, Ospreypublishing, 1999.Vangansbeke, Luc, dans l'oeil du typhon, Aéro-journal N°36, 2013.

http://www.

HYPERLINK"http://www.wingsofmemory.be/".be/

6 1 Histomag - Numéro 92

En 1953, il est breveté officier d'état-major del'École de Guerre, occupe ainsi le poste de chefd'état-major et devient par la même occasionaide de camps du roi Léopold III.En septembre 1954, Rémy est promu lieutenant-colonel.En novembre 1958, Rémy est le premier aviateurbelge à passer le mur du son à bord d'un HawkerHunter en Grande-Bretagne.Au début de 1959, il devient le commandant dela base de Kamina au Congo Belge en pleinepériode de révolte et de combat pour l'indépen-dance du pays. Grâce à son énergie et sa diploma-tie, il arrive à maintenir la cohésion des forcesbelges permettant ainsi de sauver de nombreuxréfugiés et sauvegarder l'honneur des armes bel-ges.Une fois rentré au pays, Rémy dirige le Bureaudes Opérations à la Présidence du Comité desChefs d'Etat-major, puis il commande de nouveaula 7ème Escadre de chasse et il termine sa carriè-re comme chef de la base de Chièvres. Il prend saretraite le 1er janvier 1968.

Il est décédé le 8 juin 1990 à Lessines.Le 8 septembre 2011, un monument est inauguréà sa mémoire à Lessines.

6 victoires aériennes et un appareilendommagé, 35 V1 abattus et 9 autres en coopé-rations. Objectifs détruits au sol : au moins 250véhicules et camions, 9 locomotives et un appa-reil. Ainsi que 6 navires endommagés. Monument de Lessines

Hawker Tempest de Rémy van LierdeSqudron 3

Page 62: Histomag 92

6 2 Histomag - Numéro 92

Le recrutement dans les eten faveur de la légion Wallonie ¹

1. La capitulation

Le 28 mai 1940, à 4h00 du matin,l’armée belge déposait les armes aprèsdix-huit jours d’âpres combats. Plus oumoins 225.000 militaires, soit environ30% des effectifs de l’armée belge,allaient partir en captivité ; la troupe etles sous-officiers vers des Kriegsgef.-Stammlager (Stalag), les officiers endirection de divers Kriegsgef.-Offizierlager (Oflag).

Cependant, la situation après lacapitulation restait confuse. En effet, leprotocole de l’armistice considéraitl’armée belge dans son ensemble, ycompris son commandant en chef,

1. Sources primaires : Justice militaire belge : dossiersen cause de C. Biltrays, P. Burtomboy, L. Chardome &consorts, L. Closset, A. Dor, F. Francq, F. Hellebaut, J.Lippert, A. Lisein, J. Vermeire  ; Nachlaβ  Baumann,CEGES.- Entretiens : L. Degrelle, F. Hellebaut, J. Mathieu.Sources secondaires : Maurice De Wilde, België in deTweede Wereld Oorlog - De Nieuwe Orde. Uitgeverijde Nederlandse Boekhandel. Antwerpen, 1982 ; -Louis - Fierens, Ce n’est qu’un journal, rien qu’unjournal, Centre de Recherches et d’Études Historiquesde la Seconde Guerre Mondiale - CEGES ; - Le Soirdu 9 mai 1946 ; - Victor Larock, Un aspect de la ques-tion royale – A quand la lumière ; - Jean-Louis Roba,L’Honneur et la Fidélité : essai biographique de Lu-cien Lippert. De Krijger, 1997 ; - Eddy De Bruyne,Encyclopédie de la Collaboration, de l’Occupation etde l’Ordre nouveau en Wallonie et dans le Nord/Pas-de-Calais. Inédit.

Page 63: Histomag 92

cette faveur. Les officiers de carrière, qu’ilsfussent Wallons ou Flamands, restèrent encaptivité. D’août 1940 à mars 1941, pas moins de105.853 militaires flamands furent libérés. LeStalag XIII A de Nuremberg à lui seul en libéraprès de 25.000.

2. Le temps des commissions et desdiscours

Au lendemain de l’armistice, sur initiativede l’entourage du Roi et avec l’accord del’Occupant, fut créé, au sein du Ministère desFinances, un organisme chargé des questions quiétaient du ressort de l’ancien département de laDéfense nationale. Institué par un arrêté royal du31 août 1940, son personnel fut choisi parmi desmilitaires qui appartenaient au cadre actif del’armée avant le 10 mai 1940.

Le 9 septembre 1940, la direction de cetorganisme – L’Office des Travaux de l’Arméedémobilisée, mieux connu sous le sigle O.T.A.D. –,fut confiée au lieutenant-général MauriceKeyaerts, libéré de l’Oflag de Tibor le même jour2,et au colonel Georges Goethals, attaché militaireen poste à Berlin, revenu spontanément de Suisse.

Ce service traitait de toutes les questionsrelatives aux officiers et assimilés, aux gradés etsoldats, en ce qui concernait leur classement etleur intégration dans l’économie du pays ou sesadministrations. Il s’occupait également detoutes les questions encore en litige relevant desattributions antérieures du Service du personnelmilitaire du Département de la Défensenationale. Il s’occupait de trouver un nouvelemploi aux militaires démobilisés ou, à défaut,allait continuer à leur assurer durant quatre ans,

6 3 Histomag - Numéro 92

le Roi Léopold III, comme prisonniers de guerre.Par contre, il n’était pas clair si les militaires, àl’instar du Roi, resteraient en Belgique oupartiraient en captivité. En tout état de cause, laconsigne était que les officiers devaient montrerl’exemple et attendre les ordres. Dans le flottement qui suivit, certainsofficiers, sans se soucier de cette directive,profitèrent du désordre du moment pourregagner, d’aucuns leur domicile, d’autres pourrejoindre la France ou la Grande-Bretagne. Ceuxqui obéirent aux consignes, - par la suite ilss’estimèrent victimes de la discipline -, restèrentauprès de la troupe avec la conséquence qu’ils lasuivirent en captivité en Allemagne… Quand onconsidère qu’environ la moitié des officiersbelges réussit à se soustraire à la captivité, oncomprend l’état d’esprit de l’autre moitié,prisonnière en Allemagne !

Dans cette masse de prisonniers deguerre, 145.000 étaient des Flamands tandis queles Wallons et les Bruxellois francophonesconfondus étaient au nombre de 80.000 mille.

Fidèles à la Flamenpolitik favorisant lesFlamands au détriment des Wallons, déjàpréconisée pendant la Grande guerre par legouverneur militaire Moritz von Bissing, lesAllemands s’appliquèrent à séparer lesnéerlandophones de francophones.

Aidés par d’anciens activistes flamandsayant collaboré avec l’ennemi pendant de laPremière Guerre mondiale, ils mirent sur pied descommissions linguistiques devant statuer surl’appartenance des intéressés à l’un ou l’autrerôle linguistique. La reconnaissance du statut deFlamand signifiait la promesse d’un retour enBelgique alors que les Wallons se voyaient refuser

2. Le général, francophone, s’était fait inscrire sur le rôle linguistique fla-mand… Pour l’anecdote, renseignons que sur trente-trois généraux prison-niers, tous francophones ou bilingues, seuls huit choisirent d’être inscrits surle rôle linguistique français.

Page 64: Histomag 92

divers camps, et avec une prédilection pour lesOflags, pour sonder les prisonniers sur leur étatd’esprit et surtout leur degré de loyalisme à lacouronne et la dynastie.

En effet, maint officier, surtout parmi lesplus jeunes, avait été choqué par le mariage du« Roi prisonnier  » 5 qui, au Palais de Laeken, àBruxelles, bénéficiait d’une liberté demouvements et d’un entourage familial guèrecompatible avec l’idée que l’on se faitcommunément de la condition d’un prisonnier deguerre.

D’autres étaient scandalisés à l’idée d’avoir été«  roulés  », victimes des consignes venues d’enhaut, en acceptant de partir en captivité avec latroupe alors que certains de leurs chefs avaientpris la poudre d’escampette en direction de laFrance, tel le major Defraiteur6, protégé dulieutenant-général Raoul Van Overstraeten, letrès écouté conseiller militaire du Roi. D’autresencore avaient été ébranlés dans leursconvictions

6 4 Histomag - Numéro 92

ainsi qu’aux familles des prisonniers de guerre,les moyens de subsister et l’appui moralnécessaires.

A son initiative, l’O.T.A.D. avait égalementobtenu, dès octobre 1940, le rappel de captivitéde plusieurs dizaines d’officiers de carrière, dontla Militärverwaltung avait laissé le choix à sonappréciation. Sur la liste figuraient une majoritéd’officiers de cavalerie, souvent aux noms àcharnières, une préférence qui suscita de vivesréactions de la part d’autres officiers pour qui cefavoritisme était provocateur3.

L’espoir d’un rapatriement rapides’estompant au fil du temps, l’O.T.A.D. décida decréer, au début de 1942, un service de liaison auxprisonniers qui visiterait les divers camps pourofficiers et soldats éparpillés sur le territoire duReich.

Ce service reçut l’appellation Commission‘t Serclaes du nom de son responsable, lecommandant comte de ‘t Serclaes deWommersom. Le siège de cette commission avaitélu domicile à l’hôtel Adlon à Berlin, lieu depassage de diplomates et de personnalités. Dejuin 1942 à fin 1943, les membres de laCommission visitèrent Stalags et Oflags.

Selon les directives du Chef de l’O.T.A.D.,la Commission ‘t Serclaes4, n’avait d’autresprérogatives que celles d’assurer du bien-êtremoral et matériel des prisonniers séjournant dansles camps allemands. Cependant, les membres dela Commission ne se tenaient pas strictement à lamission qui leur avait été impartie officiellement.Ainsi, ils profitèrent de leur passage dans les

3. F. Hellebaut, communication à l’auteur. Aarschot, août 1982.4 Soit la Délégation du Service de Liaison des Prisonniers de Guerre, uneémanation de l’O.T.A.D.

A défaut de partager le sort de ses troupesprisonnières, le Roi Léopold III leur adresseraune photo dédicacée.

5. Veuf de la Reine Astrid en août 1935, décédée au cours d’un accident dela circulation à Küssnacht (Suisse), Léopold III épouse le 11 septembre 1941Liliane Baels, fille du gouverneur de la province de Flandre-Occidentale.Gardé secret pendant trois mois, ce mariage est l’objet de vives polémiques.La population est choquée, le gouvernement en exil à Londres est scandalisécar la cérémonie religieuse a précédé le mariage civil (6 décembre 1941), seulà avoir force de loi. Une grande partie de la population désapprouve lemariage du Roi en période de guerre à un moment où les familles sontséparées. Déporté en Autriche à la fin de l’Occupation, le Roi ne rentrera aupays que pour abdiquer en faveur de son fils Baudouin.6. Sous prétexte d’aller récupérer son épouse en France, le major se fit cha-huter copieusement par ses pairs et dut encaisser des insultes telles que« déserteur !, crapule ! ». - Maurice De Wilde. België in de Tweede Oorlog

Page 65: Histomag 92

des courant républicains parmi cette catégorie  ;ensuite de s’assurer de l’existence, surtout parmiles officiers francophones, de groupementsroyalistes préconisant un régime fort, voireautoritaire.

3. Le temps des tractations

Fin décembre 1942, après dix-sept moisd’existence, le Wallonisches Infanterie Bataillon373, mieux connu sous l’appellation LégionWallonie, était exsangue. Des 3.034 hommes quis’étaient enrôlés dans ses rangs depuis sacréation en juillet 1941, 178 rescapés desdiverses campagnes à l’Est débarquèrent trèsdiscrètement à Bruxelles 17 décembre 1942tandis que 150 autres légionnaires, appartenantau contingent du 10 mars 1942, étaient restés enarrière-garde dans le Caucase. C’étaitpratiquement tout ce qui restait des forcescombattantes en premières lignes…

On était loin du retour triomphant préditpar Léon Degrelle lors de ses diverses allusions etappels tapageurs dans la presse. D’ailleurs, laMilitärverwaltung n’était pas dupe. En accordavec le Mouvement de Rex, elle était d’avis qu’ilvalait mieux éviter toute manifestation publiqueà l’occasion de ce premier retour en permissiondes légionnaires !

6 5 Histomag - Numéro 92

par le discours du Premier ministre Hubert Pierlotdu 28 mai 1940 :

Le Roi, rompant avec le lien qui l’unissait à sonpeuple s’est placé sous le pouvoir del’envahisseur. Dès lors, il n’est plus en situation degouverner car, de toute évidence, la fonction deChef d’état ne peut être exercée sous le contrôlede l’étranger. Les officiers et fonctionnaires sontdonc déliés du devoir d’obéissance auquel lesobligeait leur serment de fidélité.

Et comme si cela ne suffisait pas, lelieutenant-général Henri Denis, ministre de laDéfense nationale, renchérit le 8 juin suivant :

Le serment prêté par les membres de l’Armée nepeut être tenu que vis-à-vis du Roi libre,remplissant librement le rôle que lui assigne notreConstitution alors que le Souverain estactuellement dans l’impossibilité de le remplir,cas prévu par l’art. 82 de la Constitution.

Dans ces conditions, les messages du Roiet du général Van Overstraeten, transmis par lesmembres de la Commission, ne furent pastoujours accueillis avec le même respect dontavait témoigné le corps des officiers en temps depaix. Que la Commission poursuivîteffectivement d’autres buts que ceux pourlesquels elle avait été créée ressort clairementdes rapports rédigés par un de ses membres, lelieutenant André de Catalaÿ, les deux grandespréoccupations non avouées de la Commissionétant de cibler dans les Oflags les officiers àtendance antiroyaliste et à évaluer l’importance

Décembre 1942  : arrivée à Bruxelles des premierspermissionnaires de la après lescombats du Caucase. (Coll. E. De Bruyne).

Page 66: Histomag 92

Le 18 février 1942, après la levée de deuxcontingents pour la Légion et quelques départsde moindre importance, les effectifs avaientfondu comme neige au soleil pour tomber à 786hommes, soit 12 officiers, 2 officiers assimilés, 46sous-officiers et 723 hommes de troupe, pas tousaptes physiquement à un service au front.

Restait donc le réservoir en Allemagne  :les ouvriers volontaires d’abord et ceux astreintsau travail obligatoire ensuite, …sans oublier lesprisonniers de guerre.

4. Entre-temps, en coulisse

Le 13 mars 1942, le major von Prittwitz,responsable à Berlin des services de recrutementdes volontaires européens, s'informait auprès deson subordonné à Bruxelles, le major Baumanndu Kommandostab Z - ce service assurait la liaisonentre les autorités allemandes et les formationsmilitaires et paramilitaires à la suite de laWehrmacht (Wehrmachtgefolge) - des mesuresqu'il convenait de prendre pour étoffer lebataillon wallon après les pertes de la premièrecampagne d'hiver : 115 hommes hors de combat(39 morts, 60 blessés et 16 disparus ) sur uneforce combattante de 350 hommes. 8

De l'avis de Bruxelles, la seule issuepossible était de favoriser la libération desprisonniers de guerre rexistes. De cette manière,on espérait pouvoir renforcer le bataillon affaiblid'au moins une à deux compagnies.

8. Chiffre qui ne tient pas compte des démobilisations intervenues avant lesengagements militaires, principalement des malades et légionnaires inaptesaux tâches de combat parce que trop âgés.

6 6 Histomag - Numéro 92

A la mi-décembre 1942, profitant du premiercongé accordé aux légionnaires, et avant derejoindre la Belgique, Degrelle fit un détour parBerlin. Pour l'occasion, il s'était fait accompagnerpar l'officier de liaison de l'époque, leHauptmann Dr Erich von Lehe 7.

Les tractations avec la Wehrmachtportèrent sur la libération des prisonniers rexisteset la possibilité, formulée précédemment parl'état-major wallon, de pouvoir enrôler desFrançais dans les deux départements français duNord et du Pas-de-Calais. Cette dernièredemande avait été rejetée par l'O.K.H. au débutdu mois de décembre 1942 au motif quel'enrôlement de Français était susceptible deperturber l'esprit de cohésion de l'unité (DieAufnahme von Franzosen ist geeignet deneinheitlichen Geist der Legion zu stören).

Lors de ces mêmes tractations, Degrelleavait en vain proposé la libération d'un prisonnierde guerre wallon pour chaque légionnaire tué,blessé ou hors de combat. Il était aussi questionque tout prisonnier de guerre wallon quisouscrirait un engagement dans la LégionWallonie aurait le privilège de faire libérer unparent proche. Devant les hésitations de laWehrmacht à lui donner satisfaction, Degrelleallait se détourner de celle-ci quelques mois plustard et mettre en œuvre des moyens plusspectaculaires.

Fin 1942 la source rexiste et d’Ordrenouveau en Belgique était tarie et les possibilitésde recrutement se réduisaient considérablement.

Les Formations de Combat, la milice duMouvement, qui en mai 1941 affichaient encoretrois brigades et une brigade motorisée, au totalquelque quatre mille militants, sans compter uneréserve appréciable, avaient été écrémées.

7. Après la guerre, cet officier cacha les étendards de la Légion à sondomicile à Hambourg. Par la suite, ils furent récupérés par L. Degrelle.

Page 67: Histomag 92

Comme Lisein avait été le commandant decompagnie de Degrelle lors de combats de février1942, on pensait qu'il était l'homme tout indiquépour s'acquitter auprès de Degrelle de cettemission délicate. Il dut déchanter. Degrelle,moins intéressé par les doléances de Lisein quepar la perspective d'une libération desprisonniers de guerre rexistes10, cherchait àobtenir, à Berlin, un résultat dans ce domainesous forme d'un document écrit.

Dans la capitale du Reich, le groupes'adressa tout d'abord au comte de 't Serclaes deWommersom, Commissaire aux prisonniers, quile  renvoya  à  la Wilhelmstraβe,  dans  un  serviceallemand. Il y fut accessoirement question du sortque les Allemands comptaient réserver à laBelgique après la victoire allemande. De cesentrevues, il apparut très vite qu'aucune garantiene serait donnée ni pour l'avenir de la Belgique,ni pour la libération immédiate des prisonniersrexistes, et ce contrairement aux promessesfaites lors de la formation de la Légion Wallonie.

Sur ces entrefaites, par l’entremise descadres rexistes Victor Matthys et José Streel,Degrelle avait fait la connaissance ducorrespondant local du Pays Réel à Berlin,l'historien teinté de germanolâtrie Léon VanHuffel11. Ce dernier l’introduisit dans les hautessphères de la SS. José Streel devait déclarer par lasuite que Degrelle en revint littéralementtransformé.

10. Par la suite, le Haut Commandement allemand autorisa tout de mêmela libération de trois cents prisonniers rexistes.11. Auteur d’un opuscule intitulé La Wallonie et le Monde germanique,paru aux Éditions de La Roue Solaire en février 1944, ouvrage dans lequelil défend la thèse de la « germanité des Wallons ».

6 7 Histomag - Numéro 92

L'État-major de liaison allemand auprès de laLégion fut chargé de dresser un bilan de lasituation et de le soumettre aux services de vonPrittwitz qui se chargerait alors de le transmettreà ses supérieurs.

Il est vrai que jusqu'alors l'apport eneffectifs recrutés dans les Stalags avait étéinsignifiant, voire nul. Ainsi, le relevé mensuel desenrôlements pour le mois d'avril 1942 renseigne274 volontaires. De ce nombre, 162 avaient étéenrôlés en Belgique (dont 22 légionnairesdémobilisés réactivés) et seulement 17 hommesavaient pu être recrutés en Allemagne (9 parmiles ouvriers et 8 prisonniers de guerre). Résultatdes plus décevants surtout que le Mouvementrexiste était très sensible au problème desprisonniers de guerre (rexistes s’entend).

Dans le courant du mois de juin 1942,Victor Matthys9, chef a.i. du Mouvement de Rex,Paul Colin, directeur et rédacteur en chef duNouveau Journal, Mme Degrelle et Alfred Lisein,se rendirent à Berlin. Dans la capitale allemande,le groupe y fut rejoint par lieutenant LéonDegrelle.

Lisein, ex-officier légionnaire, avait étédémobilisé après les combats de Gromowaja-Balka en mars 1942. Il s'était déplacé pour seplaindre auprès du Chef du non-respect decertaines promesses faites lors de la mise sur piedde l'unité, celle des indemnités allouées auxfamilles des légionnaires, dont il s’occupait toutspécialement, étant la plus préoccupante.

9. Né le 20.02.1914. Inapte au service militaire. Intime de L. Degrelledepuis la naissance de Rex dans le monde estudiantin de Louvain. Fusillé àCharleroi le 10.11.1947.

Victor Matthys, fidèle exécutantde L. Degrelle.

Page 68: Histomag 92

Alors qu'aux yeux de l'état-major du Mouvementde Rex la Légion n'était qu'un moyen parmid'autres à mettre au service de la Collaboration,celle-ci devenait, dans le chef de Degrelle, le seulélément digne d'attention, une fin en soi, verslaquelle devaient converger toutes les forcesdisponibles et en y drainant le plus de mondepossible.

Degrelle s'était trouvé un nouveau rôle !Étant à la Légion et y ayant conquis desdécorations et des grades, il estimait quedorénavant plus rien ne compterait en dehors dela Légion.

5. Pendant ce temps derrière les barbelés

Si le recrutement dans les Stalagsdevenait pour Degrelle une nécessité prioritaire,celui dans les Oflags ne l’était pas moins.Seulement, il s’annonçait autrement ardu.

On se souviendra qu’après les hostilités,l’armée avait été aussitôt démobilisée par sespropres chefs ; ses formations non combattantesévacuées en France non occupée et démobiliséesà leur retour par le ministre de la Défensenationale. Les hommes avaient été rapatriés surordre de leurs chefs. Une grande partie desmilitaires de carrière, dont quelque trois milleofficiers, rentrés spontanément dans leurs foyers,avaient été autorisés à y rester par les autoritésoccupantes en s’engageant sur l’honneur à neplus rien entreprendre contre l’armée allemande.

6 8 Histomag - Numéro 92

En réalité, jusqu'alors, Degrelle avait côtoyé nonpas les cercles SS mais la Waffen-SS.

Dans le courant de l'automne de 1942,dans le Caucase, il avait fait la connaissance dugénéral Felix Steiner, le futur promoteur d'unearmée européenne et pour l'heure commandantde la division Wiking composée de volontairesflamands, hollandais et scandinaves. Degrelleavait immédiatement pressenti les avantagesqu'il pourrait tirer d'un transfert vers cette arme.La Waffen-SS, contrairement à la réactionnaireWehrmarcht, recrutait sur base du volontariat. Yappartenir refléterait à coup sûr l'image du soldatrévolutionnaire et augmenterait son prestigepersonnel tout en négligeant pas la perspectived’un équipement et ravitaillement plusimportants. Bien plus encore qu'à la Wehrmacht,la Révolution des Âmes, si chère à Degrelle, seferait à la Waffen-SS !

Donc, fin septembre 1942, il avait étéquestion, à la demande discrète du Chef de Rex,d'incorporer la Légion Wallonie dans la Waffen-SSen la transférant de la 97.Jäg.Div (à laquelle elleétait tactiquement rattachée) à la divisionWiking. A cette occasion, Degrelle s'était vuopposer un refus du général Ernst Rupp,commandant cette unité.

Les rumeurs s'étant ébruitées, le majorMeyer des services von Prittwitz n'allait pastarder à interroger le major Baumann duKommandostab Z, le 29 décembre 1942, sur laquestion de savoir si Bruxelles avait euconnaissance des tractations entre Degrelle et lesresponsables de la Waffen-SS.

Léon Degrelle et le général Ernst Rupp dans leCaucase (Coll. J.-L. Roba).

Page 69: Histomag 92

favorablement, relayée en cela par unepropagande tapageuse menant tambour battantpar Degrelle en personne, d’abord par l’assertionselon laquelle le Palais, par l’envoi (d’un faux  !)télégramme de félicitations à la troupe,approuvait la formation et l’action de la LégionWallonie ; ensuite, par une circulaire de sa mainlargement distribuée dans les Stalags aux termesde laquelle

[…] l’autorité allemande a demandé en hautlieu à Bruxelles si le serment de fidélité auFührer était compatible avec le service à laLégion et le serment au Führer, chef desarmées européennes (ce serment liemilitairement seulement, et pour la seulecampagne en Russie), la réponse a étéaffirmative […].

Dans les Oflags, l’hostilité à toute formed’attitude antipatriotique, - celle de s’informerquant aux conditions pour combattre sur le Frontde l’Est en était une -, et de défection morale àl’honneur d’officier était sanctionnée sur-le-champ par une mesure disciplinaire interne aucamp.

Ainsi, le 21 juillet 1941, en pleinecampagne de recrutement pour les légionsantibolcheviques, le capitaine-commandant deréserve Jean Malherbe13, prisonnier à l’Oflag VIIIC à Juliusburg, proposa ses services à la GardeWallonne, tremplin à un commandement au seinde la Légion Wallonie. Cela se sut et le colonel DeSmet, commandant belge du camp, lui infligea

13. Né le 06.01.1886. Professeur de mathématiques. Cpt. d'artillerie d’acti-ve (1923-1930) versé dans le cadre de la réserve. Fait prisonnier àChâlons/s/Saône et déporté à Hammerstein, puis à l'Oflag de Breslau.Libéré (janv. 1942) en vue de prendre un commandement au sein de laGarde Wallonne-G.W.

6 9 Histomag - Numéro 92

Pourtant, aussi paradoxal qui cela puisse paraîtreaujourd’hui, une des premières offres decollaboration militaire pour le front de l’Estémanait d’un Oflag !

En effet, le 18 juillet 1941, à l’invitation dela Kommandantur de l’Oflag II A de Prenzlau, lelieutenant-général Édouard Van den Bergen, chefd’état-major général de l’armée belge jusqu’enfévrier 1940 (poste qu’il perdit pour avoir faitenlever les barricades le long de la frontière belgedans la nuit du 13 janvier) et pour l’heurecommandant belge du camp, autorisa l’affichageaux valves d’un Ordre du Jour par lequel lesofficiers désireux de s’engager dans la LégionWallonie pouvaient se présenter à son bureau lelendemain à 15h00 !

Malgré la réserve que l’incorporation nepouvait se faire que sous le couvert del’approbation royale (clause que le général belgeavait insérée d’autorité dans le texte ducommuniqué), 51 officiers se seraient présentés !Cependant, le fait que l’engagement devaitobligatoirement se faire par le truchement duMouvement de Rex fit avorter le projet.

Quant à l’autorisation royale, les quelquesrares demandes adressées au Roi restèrent sansréponse tandis que l’O.T.A.D. se taisait sur le sujet(tout en accordant un congé sans solde auxcandidats pour le front de l’Est12). Seule laKommandantur Z à Bruxelles répondait

12. C’est particulièrement vrai dans le cas du major B.E.M. Frans Helle-baut, libéré de l’Oflag de Prenzlau pour s’engager dans la SS-Brigaded’Assaut Wallonie en juin 1944. Ce dernier avait adressé au Secrétariatgénéral du Ministère des Finances – Service général des Traitements del’Armée, une lettre aux termes de laquelle il sollicitait une mise en congésans solde pour une durée indéterminée à partir du 1er juin 1944. Uneréponse de Bruxelles, dd 22.07.1944, confirma sa mise en congé. Une noteajoutée à la main fait état des détails suivants et formulés comme suit : Sicet officier supérieur a pris du service dans la Légion Wallonie, il devraitêtre placé en congé sans traitement pour une période qui compterait commeservice actif. Comme il a sollicité sa mise en congé sans solde, j’estime qu’ily a lieu de faire droit à sa demande. A remarquer, que le temps passé encongé sans solde est décompté de l’ancienneté de l’officier. La position encongé sans solde est plus défavorable que la situation sans traitementprévue par l’Arrêté du 13.10.1941 modifié par l’Arrêté du 28.01.1942 (auxdires de F. Hellebaut, jamais publié au Moniteur Belge, l’équivalent duJournal Officiel français). – Communication écrite de F. Hellebaut. Arch.de l’auteur.

Page 70: Histomag 92

(prisonniers en Allemagne) au Commandeur de laLégion en personne, l’officier d’active LucienLippert15, revenu en congé en décembre 1942après la campagne du Caucase. L’officier belge seferait accompagner dans ses tournées parl’officier de liaison allemand de l’époque, leRittmeister von Rabenau.

Premier objectif  : contacter d’ancienscondisciples de l’École Royale Militaire-ERM, plusparticulièrement ceux de sa promotion retenus àPrenzlau. Lippert se mit en route le 24 janvier 1943.Le 4 février suivant il était de retour à l’unité,meurtri de l’accueil que lui avaient réservé sesanciens camarades, les deux ou trois officierscontactés à Prenzlau lui ayant reproché de porterl’uniforme ennemi, refusant jusqu’à lui serrer lamain.

15. Né le 25.08.1913. Officier de carrière de l’armée belge. Tué(13.02.1944) à Nowo-Buda/Tcherkassy.7 0 Histomag - Numéro 92

aussitôt 15 jours d’arrêt. Cette sanction futrendue publique et entraina une mise enquarantaine de l’intéressé.

Un officier de carrière cette fois, lecapitaine B.E.M. Pierre Pauly14, qui fera parler delui par la suite, fut libéré du camp de Lückenwaldele 8 août 1941, le jour du départ de la LégionWallonie pour le camp d’instruction de Meseritz.

A la suite de l’affichage, le 18 juillet 1941,du «placard Van den Bergen», il avait adressé aucommandant allemand du camp une lettreproposant ses services pour le front de l’Est. Cen’est qu’en Belgique, le 27 novembre 1941, qu’ilapprit par Victor Matthys, chef a.i. duMouvement de Rex, chez qui il avait étéconvoqué, qu’il avait été proposé pour prendre lecommandement de la Légion Wallonie après ledépart du premier titulaire, le major GeorgesJacobs.

6. L’option Lippert-Hellebaut

Le 28 décembre 1942, le colonel Meyer, lesupérieur du Hptm. Baumann du KommandostabZ de Bruxelles, décida de confier la délicatemission de recrutement d’officiers

14. Né le 25.04.1903. Officier de carrière. Prisonnier de guerre, d’abord àl’Oflag XVIII B de Wolfsberg, ensuite à celui de Lückenwalde. Se faitinscrire sur le rôle flamand (sa mère est d’origine flamande) et est renvoyédans ses foyers (08.08.1941).

En septembre 1944, G.Jacobs reprit du service à lafuture division Wallonie. Ilarbore le ruban del’ ainsi quel’

enargent. (Coll. J.-L. Roba).

Le capitaine de cavalerie von Rabenauaccompagna Lucien Lippert lors de satournée de recrutement dans les

. (Coll. E. De Bruyne).

Lucien Lippert, étudiant à l’École RoyaleMilitaire-ERM, 93e promotion A.G. (Coll. J.-L.Roba).

Page 71: Histomag 92

Cependant, tout en acceptant une missionofficielle de recrutement, Lippert allait, sous lecouvert de celle-ci, agir à des fins personnelles :un an et demi après la mise sur pied de la LégionWallonie, sonder sur place l’état d’esprit du corpsdes officiers prisonniers, plus spécialement en cequi concernait l’action et la raison d’être del’unité qu’il commandait. Cette démarcheintervint à un moment où l’identité de la Légionétait sur le point de subir de profondschangements. Les premières tractations pour lepassage à la Waffen-SS avaient eu lieu enseptembre-octobre 1942. A ce sujet, lesimpressions recueillies en Belgique lors de sonpremier congé de décembre 1942 l’avaientprofondément ébranlé.

Après une absence de dix-sept mois, Lippert avaitdû se rendre à l’évidence : la Légion Wallonie nejouissait pas de la sympathie de la population.Robert Poulet, rédacteur en chef du NouveauJournal, l’avait d’ailleurs épinglé dans un articleparu le 21 décembre 1942.

L’article en question, intitulé Bienvenueaux meilleurs Belges, soulignait :

7 1 Histomag - Numéro 92

Restait le major B.E.M. Frans Hellebaut16.

Très tôt les services de la censure ducourrier avaient remarqué dans sacorrespondance les commentaires admiratifs del’officier sur la puissance des armées allemandes,le savoir-faire de ses chefs et les réalisationssociales de l’Allemagne national-socialiste. Lesservices de von Prittwitz en avaient été informéset, à leur tour, ces derniers alertèrent leKommandostab Z à Bruxelles.

Le nom de Hellebaut était connu dans lesmilieux militaires et Lippert n’était pas sans savoirque la lignée Hellebaut comptait un grand-pèreministre de la Guerre et un père général. Enoutre, son aîné avait des «  relations  »  : parmicelles-ci le général Raoul Van Overstraeten, letrès écouté conseiller du Roi, et dont Hellebautpassait pour être un des protégés.

16. Né le 29.08.1898. Fils de général et petit-fils de Ministre de la Guerre.Major B.E.M. (breveté d’état-major). Engagé volontaire à seize ans lors laPremière Guerre mondiale. Prisonnier de guerre (28.05.1940-26.06.1944)successivement dans les Oflags IX.A (Rottenburg-an-Fulda), XD (Fischbeck)et II.A (Prenzlau). Décédé le 18.06.1984.

Le major B.E.M. FransHellebaut, chef d’état-major de la 2e Divisiond’Infanterie de l’arméebelge en mai 1940.

A l’avant-plan, un Lippert songeur… (Coll. E. DeBruyne).

Page 72: Histomag 92

Sachant qu’à ce sujet Lippert avait eu unentretien avec le Reichsarbeitsführer KonstantinHierl, Victor Matthys crut avoir trouvé en lapersonne du Kommandeur de la Légion lapersonne présentant toutes les garanties etqualités requises.

Décision délicate, le départ de l’officier decarrière pour le SVTW étant moins une manièreélégante de quitter la Légion (mais qui eût pu êtreressentie comme telle par la troupe) qu’uneattitude défensive et d’expectative face aumutisme de ceux qui l’avaient encouragé, voireconseillé en 1941. Lippert semblait opérer là unrepli tactique sur les positions où l’O.T.A.D l’avaitplacé d’autorité en 1940, même si la nouvellemouture rexiste qu’il aurait à diriger était loind’afficher les valeurs défendues par H. Bauchau.A défaut de pouvoir sauvegarder celles-ci, ilentendait les préserver d’une emprise troprexiste contre laquelle il avait mis en garde LéonClosset 17, l’officier légionnaire désigné pourdiriger le SVTW rexiste.

Par la même occasion, sa présence en Belgiquedevrait faciliter les possibilités de renouer avecceux qui, après l’avoir encouragé, pour l’heuresemblaient l’abandonner. S’il faut en croireHellebaut, ces personnalités n’aillaient pourtantpas tarder à se manifester sous la forme d’uneproposition inacceptable et particulièrementdéshonorante pour Lippert.

17. Né le 25.05.1911. Légion Wallonie (08.08.1941). Décédé le 03 février1954.

7 2 Histomag - Numéro 92

[…] le courage des légionnaires wallons qui necraignent pas d’affronter à la fois les risques ducombat et les haines politiques […] sont allés ducôté où le patriotisme était le plus dangereux, leplus difficile […].

Le texte avait à tel point indigné denombreux lecteurs que le 4 janvier suivant, sonauteur inclura parmi ces meilleurs Belges

[…] tous ceux qui se battent dans le mauvaiscamp et qui, poussés par une impulsioninconsidérée, sont allés se battre dans l’arméeanglaise […].

En outre, certains milieux dits influentsqui l’année précédente encore lui avaient trèsdiscrètement manifesté de la sympathie,l’évitaient soigneusement maintenant que lafortune des armes semblait changer de camp. Etlorsque Lippert voulut s’informer, auprès de cesmêmes personnalités, de l’attitude qu’ilconvenait d’adopter devant les nouveauxdéveloppements, il trouva porte close. Ces développements nous paraissent nepas être étrangers à la décision de Lippert deprendre la tête du Service des Volontaires duTravail pour la Wallonie-SVTW, organisme auquelil avait appartenu avant son engagement à laLégion.

Au début de 1943, ce service (non rexistefaisait la convoitise du Mouvement de Rex. Sonpremier chef Henri Bauchau, soumis auxpressions rexistes, allait d’ailleurs démissionnerde son poste en juin 1943. Anticipant la mainmiserexiste, l’Occupant était à la recherche d’unnouveau dirigeant.

Printemps 1944,l’Arbeitsführer LéonClosset en tournéed’inspection. (Coll. E.De Bruyne).

Page 73: Histomag 92

Pourtant, les signes avant-coureurs annonçant unchangement dans les mentalités et les attitudesn’avaient pas manqué, certains s’étant mêmesuccédé à un rythme accéléré pendant sonpremier congé en Belgique.

En effet, il nous paraît clair que findécembre 1942- début 1943, la Légion nereflétait plus guère l’image que Lippert s’était faitd’elle un an et demi plus tôt. Il devait êtreconscient qu’à quelques mois du passage de laLégion à la Waffen-SS – tractions dont il devaitavoir connaissance vu sa fonction au sein de celle-ci – ce transfert, dont les préparatifs avaientdébuté dès janvier 1943, allait mettre un termedéfinitif à l’image belgiciste que d’aucuns avaientvoulu coller à la Légion, celle-ci devenant, par laforce des choses, un instrument d’une politiqueantinationale.

7 3 Histomag - Numéro 92

Écoutons Hellebaut interviewé par l’auteur à sondomicile à Aarschot le 7 juillet 1981 :

[…] Le général Van Overstraeten était d’accordavec l’engagement de Lippert et lui avait donnécarte blanche. En 1943, il ne voulait plus lerecevoir. Lippert vint me demander conseil. Je luirépondis qu’en tant que militaire, son devoirétait de rester avec ses hommes…. car VanOverstraeten lui avait donné le conseil dedéserter et de passer en Angleterre […].

Dans le même contexte, lors de la révisiondu procès de Hellebaut, à la suite duquel il avaitcondamné à la peine de mort par fusillade le 10mai 1946 par la Cour Militaire de Bruxelles, sesavocats firent valoir que :

[…] s’il est établi que le major Hellebautn’ignorait pas, depuis l’époque où il se trouvaiten captivité en Allemagne, les relations quiexistaient en Belgique entre certains conseillersdu Roi, dont le comte Capelle, et les mouvementsd’Ordre Nouveau. Ces faits lui furent confirmésavec toutes les garanties possibles au coursd’une visite que vint lui faire, le 12 février 1943,le capitaine d’artillerie Lippert, devenuCommandeur de la Légion Wallonie.18

18. Le diplomate Heinz Forsteneichner, rattaché à la Légion comme inter-prète, rapporta après la guerre …à ma connaissance Hellebaut a été trèspréoccupé par la question du serment de fidélité à Hitler. Mais, convaincuque sa Majesté avait donné son accord tacite sur cette grave question, il afait taire ses scrupules. – Justice militaire. Dossier en cause de L. Degrelle.PV d’audition de F. Hellebaut du 17.06.1947, p. 7.

Dans sa cellule de condamné à mort, dans l’aile A/33 de laprison de St-Gilles à Bruxelles, Hellebaut entreprit derédiger l’historique de la campagne de Poméranie 1945.(Coll. E. De Bruyne).

Fin mai 1943, H. Himmler en visite au camp dePieske où il est accueilli par le capitaine LucienLippert, de la (Coll.E. De Bruyne).

Page 74: Histomag 92

ni dans une sens ni dans l’autre, hésitant àencourager franchement les jeunes qui venaientdiscrètement leur demande conseil, mais enéprouvant souvent une sincère admiration pources imprudents, qui croyaient contribuer àl’avenir de l’Europe, de la Belgique et de son Roi.Sauf Léon Degrelle, éloquent belliciste, qui tentépar une aventure aussi extraordinaire enacceptait tous les risques, y voyant une occasionunique de se mettre en évidence [...].

Lippert, à l’inverse de Degrelle, était opposé à ceque la Légion servît comme outil de propagandepolitique. Aux yeux du jeune Commandeur, laformation devait s’en tenir à son seul aspectmilitaire sans trop d’implications politiques etsurtout sans heurter l’opinion publique. C’étaitégalement le point de vue du cénacle qui avaitaccueilli avec sympathie et intérêt la mise surpied de la Légion Wallonie.

Or, Degrelle, par son discours en janvier1943, annonçant la …germanité des Wallons, letout ponctué par un vibrant Heil Hitler, nonseulement choqua l’opinion publique mais, par lamême occasion, provoqua une cascade dedéfections au sein du Mouvement de Rex.

La politique poursuivie par Degrelleéclatait au grand jour ! Elle serait personnelle, auservice exclusif d’une ambition de plus en plusenvahissante, où l’aspect militaire se limiteraitaux seuls exploits susceptibles de rehausser sonprestige auprès des dirigeants nationaux-socialistes, s’alignant sur l’organisation d’uneEurope dominée par l’Allemagne où l’intégrité dela Belgique, conformément au programmenational du Mouvement rexiste d’avant-guerre,n’était pas assurée.

7 4 Histomag - Numéro 92

Cette évolution ne pouvait qu’inquiéter le jeuneofficier car, de toute évidence, elle se heurteraità la réprobation des milieux francophones etroyalistes qui jusqu’alors s’étaient montrésbienveillants à son égard et qui, paradoxalement,tout en le désavouant aujourd’hui, en cerclerestreint, continuaient néanmoins à le qualifierde […] brillant officier et homme d’élite […],comme il ressort des Mémoires de l’aumôniermilitaire19.

En effet, il semble établi que l’abbé LouisFierens20, aumônier de la SS Brigade d’AssautWallonie, fut reçu par le comte Robert Capelle21

le 22 juillet 1943 et, qu’à cette occasion, le comtelui aurait fait l’éloge de Lippert en des termesrapportés ci-dessus.

Dans le même ordre d’idées, il n’est pasinintéressant de prendre connaissance del’analyse de Hellebaut. En parlant de la collaboration militaire, ilnote22,

[…] beaucoup de francophones répugnaient àparaître se rallier ainsi aux conceptions desextrémistes flamands ; ou à envoyer à leur tourleur fils combattre à l’Est avec l’armée qui pardeux fois avait envahi le territoire national. Enfait, les Belges se trouvaient abandonnés dansune situation tout à fait imprévue, sans obtenirla moindre directive de leur guide naturel.Aucune personnalité dirigeante ne voulait secompromettre devant opinion divisée,

19. Louis Fierens. Ce n’est qu’un journal, rien qu’un journal. CEGES, Bruxel-les.20. Schaarbeek, le 23.05.1904. Second aumônier de la Légion Wallonie(17.12.1942-mars 1944). Bien qu’inculpé sur base de l’art. 113 (portd’uniforme/collaboration militaire), il bénéficiera d’un non-lieu.21. Bruxelles, le 07.09.1889. Entendu par la Justice dans plusieurs affairesse rapportant à l’attitude du Roi pendant la guerre, notamment lors del’affaire Robert Poulet et celle d’une hypothétique approbation royale dela mise sur pied de la Légion Wallonie. Décédé en 1973. 22. Lettre à l’auteur, dd 22.09.1982.

Page 75: Histomag 92

[…] votre intention est-elle de venir à la Légion ?Vous serez accueilli parmi nous en pleineconfiance […].

Les hésitations de Hellebaut, d’une part, et le peud’empressement de Degrelle, d’autre part, de seséparer de Lippert, sans doute plus malléablequ’un Hellebaut, eurent pour effet que Lippert,faute de relève militaire adéquate – seulegarantie pour l’unité de garder son caractèremilitaire, avait-il précisé -  ; bouleversé par laproposition de déserter, choqué qu’on lui eûtproposé d’avoir à choisir entre l’honneur militaireet le forfaiture, continua à assumer lecommandement de l’unité jusqu’à sa mort, àNovo-Buda, le 13 février 1944, payant de sa vie laseule issue possible sans faillir à son honneur, etque Hellebaut devait lui confirmer ce 12 février1943 en lui déclarant :

[…] il faut plus de courage à continuer qu’àabandonner […].

Le 25 février 1943, Lippert quittainopinément le camp de Meseritz pour se rendreà Bruxelles.

7 5 Histomag - Numéro 92

Degrelle venait de s’emparer de la Légion, leReich subissait ses premiers revers militaires etLippert venait de se faire manœuvrer dans uneimpasse…

La visite que fit Lippert le 12 février 1943à l’Oflag XD de Fischbeck-Hambourg n’avait paspour unique but d’informer le major B.E.M.Hellebaut sur les développements récentssurvenus en Belgique et les réactions violemmentnégatives de la part de ses camarades de l’EcoleRoyale Militaire lors de sa visite au camp dePrenzlau quinze jours plus tôt ou encored’évaluer les chances de voir son aîné prendre larelève au cas où il quitterait la Légion pourprendre la tête du SVTW. Lippert s’était surtoutdéplacé, semble-t-il, à la suite de l’événementparticulièrement grave intervenu depuis peu,dont question plus haut.

Par personne interposée, le Kommandeurde la Légion avait été informé que, devant latournure des événements, les milieux bruxelloisqu’il connaissait pour leur avoir accordé toute saconfiance, lui conseillaient maintenant dedéserter et de gagner la Grande-Bretagne !

Cette intervention doit être postérieure àsa visite à Prenzlau, car on voit mal Lippert vouloirentraîner à sa suite des camarades de promotiontout en sachant qu’il venait d’être désavoué parceux dont il allait devoir évoquer les garanties. Tout au long de 1943, Hellebaut tergiversatandis que Lippert, de plus en plus isolé,multipliait les appels et les invitations à lerejoindre.

Ainsi, en juin 1943, dans un Feldpostadressé à Hellebaut, il écrivait :

. L. Lippert, Commandeur de la. (Coll. J.-L. Roba).

Page 76: Histomag 92

On ne le saura sans doute jamais24.

Une seule certitude : le 1er mars 1943; enl’église du Gesu à Bruxelles, Lippert assistait à lamesse commémorative de la bataille deGromowaja-Balka de février 1942. Nous avons dumal à croire, au vu de ce qui précède, que sondépart (non annoncé à la troupe) ait étéuniquement motivé par le désir de rendrehommage aux soldats tombés à l’Est l’annéeprécédente, d’autant plus qu’un service similaireavait été organisé à Meseritz (à l’époque,cantonnement de la Légion) le 27 février 1943.

7. Maigres résultats

Le recrutement d’officiers de carrièreprisonniers de guerre en Allemagne pour le frontde l’Est se soldait donc par un fiasco retentissant.

24. Mis en examen par la Justice militaire, le père de Lucien Lippert déploraque des lettres conservées à son domicile, émanant du général M. Keyaertset adressées à son fils Lucien en 1940-41, n’aient pas été versées au dossier,alors que selon l’intéressé celles-ci auraient pu utilement éclairer la Justice.

7 5 Histomag - Numéro 92

Que vint-il y faire ?

Qui rencontra-t-il lors de son retour dansla capitale ?

Entreprit-il une ultime tentative decontacter les personnalités influentes qui, finjuillet-août 1941, lorsque les pourparlers de lamise sur pied d’une Légion Belgeantibolchevique23, sous commandement uniqued’un général belge (devant discrètement faireéchec aux aspirations rexistes et viséesséparatistes du VNV flamand) eurent échoué,estimèrent pour le moins prudent d’assurer leursarrières en manipulant un jeune officier decarrière prometteur, ce qui, en cas de victoireallemande, eût permis à ce groupe d’avoir unpied dans le bon camp ?

En 1941, il y avait effectivement parmi despersonnalités influentes des milieuxfrancophones des gens qui, comme le Roi, serendaient compte (dans la perspective assezvraisemblable à cette époque d’une victoireallemande) à quel point l’initiative d’une légionflamande (Legioen Vlaanderen) risquait decompromettre toute chance de pouvoir formeren Belgique un gouvernement national dans lecadre d’un Nouvel Ordre européen. Il en étaitmême qui pensaient que seules d’excellentesprestations dans une légion royaliste, decaractère belge cette fois, paraissaient dès lors enmesure de faire valoir l’unité réelle de la Nation.

Ou bien, Lippert, après mûre réflexion, etaprès s’en être ouvert à Hellebaut, est-il venudonner une réponse verbale négative à laproposition qui lui avait faite au début du moisd’abandonner la Légion pour gagner la Grande-Bretagne ?

23. Le lecteur intéressé voudra bien consulter notre article, La difficilenaissance d’une Légion. Crédit Communal, Tome 8. Bruxelles. 1992.

Quelles durent être les pensées de Lucien Lippert, cejour-là à l’église de Gesu à Bruxelles, pendant lacérémonie religieuse à la mémoire des légionnairestombés au front de l’Est ? (Coll. E. De Bruyne).

Page 77: Histomag 92

Le Stalag I A de Stablack, de loin le plus importanten nombre, venait en tête avec 40 recrues, dontune fraction déserta aussitôt. Ceuxd’Altengrabow (XI A) et de Sandbostel (XI B)suivaient avec respectivement 26 et 20engagements.

Seulement, en étendant son terraind’action, Degrelle allait drainer vers la Légion desindividus mus par d’autres motivations que cellesde la lutte antibolchevique. Le passage à laWaffen-SS, le 1er juin 1943, verra donc unappauvrissement de l’engagement idéologique. Ilallait se traduire par un accroissementspectaculaire des désertions.

Alors que pour l’année 1942, pourl’ensemble de la Légion – le recrutement ayantatteint cette année-là le chiffre de 1.834 unités –,le conseil de guerre eut à statuer, en tout et pourtout, sur 28 cas de désertion. Au 31 mai 1943, rienque parmi les 192 prisonniers de guerre recrutéspar les équipes de Pévenasse, 34 déserteursn’étaient toujours pas appréhendés.

Une étude plus minutieuse des chiffresrévèle que le recrutement dans les Stalags restaitminime et représente, dans la plupart des cas,moins de 10% des hommes recrutés ailleurs.

Ainsi, au 31 décembre 1942, le nombre deprisonniers de guerre libérés des Stalags pourenrôlement dans l’unité wallonne se chiffre à136, alors qu’en Belgique 1.310 civils s’étaientportés volontaires, auxquels il faut encore ajouter388 membres de la Garde Wallonne, unité degendarmerie supplétive rexiste.

Cinq mois plus tard, au moment où lerecrutement dans les Stalags avait sensiblementaugmenté, l’autorité occupante dressa le tableausuivant :

7 7 Histomag - Numéro 92

Ce n’est qu’en juin 1944, moins d’un an avant lafin de la guerre, qu’un résultat tangible put êtreobtenu grâce à l’engagement des officiers decarrière Frans Hellebaut et Léon Lakaie25.Jusqu’alors, seulement deux officiers de carrière(Pierre Pauly et Léopold Thys) avaient franchi cepas.

Si le recrutement d’officiers pour la LégionWallonie restait un problème épineux, celui enfaveur de la troupe était tout aussi préoccupant. La source en Belgique étant tarie depuis ledépart du deuxième contingent du 10 mars 1942,il fallut se tourner vers d’autres horizons. Lesprisonniers de guerre étaient un réservoir enhommes dans lequel Degrelle espérait pouvoirpuiser.

L’avocat carolorégien Joseph Pévenasse –et depuis le 10 mars 1942 sous-officierlégionnaire – fut chargé de coordonner unetournée de propagande dans différents Stalags.Le résultat fut des plus maigres.

De juin 1942 à mai 1943, alors que vingt-six camps avaient fait l’objet de démarches de lapart de recruteurs patentés envoyés par Degrelle,le nombre de prisonniers de guerre recrutés sechiffrait à 192.

25. Né le 26.04.1901. Officier de carrière. Commandant du II/69Rgt de la28.SS-Freiw.Gr.Div.Wallonien. Écarté de son commandement par F. Helle-baut (avril 1945). Décédé en 1952.

L’avocat rexiste Joseph Pévenasse, renseigné fugitifet latitant après le 8 mai 1945. (Coll. J.-L. Roba).

Page 78: Histomag 92
Page 79: Histomag 92

obligés de choisir entre l’engagement ou laprison, des aventuriers de tout plumage etquelques idéalistes égarés.

Un constat cependant  : alors que lenombre d’enrôlement dans les camps deprisonniers était en chute libre depuis leprintemps 1944, celui enregistré dans les campspour travailleurs volontaires ou déportés(l’avocat légionnaire Louis Bastin ayant pris larelève de Joseph Pévenasse, rentré au pays)compensait largement les mauvais résultatsaffichés dans les Stalags.

A la même époque, par contre, lesdémarches entreprises dans l’Oflag de Prenzlause soldèrent par un joli succès qui eût pu êtresensationnel si trois officiers supérieurs, et nondes moindres, ne s’étaient rétractés par la suite.

Mais n’anticipons pas.

La transformation de la 5e Brigaded’Assaut Wallonie en Division Wallonie faillitavoir raison de Degrelle. Alors que toutes lesautres légions étrangères avaient perdu leurautonomie, l’unité wallonne avait réussi àrepousser les nombreuses tentatives demainmise de la part des Allemands.

Pourtant, au printemps 1944, les servicesSS berlinois faillirent atteindre leur but. LaBrigade avait perdu son Commandeur Lippert etDegrelle, malgré plusieurs démarches pressantes,n’avait pas réussi à lui succéder comme chefmilitaire. Comme le grade de Degrelle, à l’époquemajor (SS–Sturmbannführer), ne suffisait paspour commander l’unité qu’il projetait de diriger,Berlin était tout au plus disposé à ne tolérerDegrelle qu’en tant que …Chef des Wallons(Führer der Wallonen). Berlin lui fit donc

7 8 Histomag - Numéro 92

Après les combats de Tcherkassy enfévrier 1944 où deux tiers des effectifs avaientété anéantis – 632 hommes sur 1.850 avaient puéchapper à l’encerclement –, Degrelle se mit entête de mettre sur pied une unité dont la tailleserait suffisamment représentative de sesambitions.

Le recrutement d’étrangers (Français, Espagnols,Russes blancs, Luxembourgeois, renseignonsencore un Monégasque et un Finlandais), n’avaitd’autre but que de s’imposer en tant quechampion de la collaboration militaireoccidentale, tremplin au pouvoir politique auquelil n’avait jamais cessé d’aspirer depuis qu’il avaitendossé l’uniforme feldgrau.

Le recrutement allait bon train et l’on vitarriver à la Légion pêle-mêle des jeunes genspoussés par la misère morale ou en difficultésavec les autorités allemandes,

. A titre anecdotique, renseignons que L. Degrelle, profitant d’une visite(08.08.1944) au P.C. du Groupe de Combat Lehmann (Front de Narwa),recruta personnellement un Luxembourgeois engagé dans cette unité fla-mande. Par la suite, cette personne fit une carrière très honorable au sein dela NASA. – Communication verbale de l’intéressé à l’auteur. Housse, dd

Ambitionnant mise sur pied d’une unité qui seraitreprésentative de son image, Degrelle était conscientde l’importance de pouvoir recruter des officiers decarrière, seule possibilité de se mettre à l’abri de lamainmise allemande sur son unité. (Coll. E. DeBruyne).

Page 80: Histomag 92

[…] il faudra la Victoire militaire allemandepour donner une large part à l’œuvre sociale etpour que s’évanouisse tout le tintamarrementeur dont ses ennemis inondent la terre […].

Plus tard, en novembre 1944, ens’adressant à Degrelle, il écrivait :

[…] ma conscience me dictait le devoir d’offrirma vie, mon travail et le fruit de mon expériencemilitaire de 30 années à ceux qui défendent lesvéritables intérêts de mon peuple et àl’Allemagne national-socialiste d’Adolf Hitlerqui défend courageusement la cause de l’Europeentière. […].

Par ailleurs, la correspondance échangéeavec Lippert tout au long de l’année 1943permettait tous les espoirs de voir Hellebaut fairele pas. Ces contacts épistolaires n’étaient paspassés inaperçus et leur nature, on s’en doute,suscitaient de vifs commentaires parmi ses pairs.De plus en plus en butte avec son entourage,Hellebaut finira d’ailleurs par solliciter sontransfert à un autre Oflag le 12 décembre 1943.

A cet effet, Hellebaut avait préalablementdemandé l’intervention et l’appui de Lippertcomme il ressort du Feldpost du 7 décembre1943 :

[…] Mon Major, C’est du front (Tcherkassy,note de l’auteur) que je vous écris. Je fais tout cequi est possible de mon côté pour vous donnersatisfaction. Toutes les démarches ont été faites.Il faut attendre. Je pense que c’est très dur pourvous de vivre dans ce milieu hostile etincompréhensif et qui doit l’être davantage.

7 9 Histomag - Numéro 92

savoir qu’à défaut d’un officier belge d’un gradecorrespondant à un commandement au niveaud’une division, le SS-Hauptamt se verrait dansl’obligation de désigner un des leurs…. (ce qu’il fiteffectivement en la personne du SS-OberführerKarl Burk, nommé le 21 juin 1944).

Ce fut le prélude de l’affaire Chardome.27

Le 24 mai 1944, à l’Oflag II A de Prenzlau, Degrellefit sonder, par l’intermédiaire d’un de seslieutenants spécialement dépêché sur place, lesintentions du major B.E.M. Frans Hellebaut derejoindre la Légion. Degrelle savait que l’officier supérieuravait la réputation d’afficher ses sympathies pourl’Ordre nouveau par un franc-parler et desattitudes sans équivoque. Ainsi, le 27 janvier 1944, Hellebaut écrivaità sa famille

27. Né le 10.08.1884. Officier de carrière. Attitude héroïque en 14-18. Cdtdes Chasseurs Ardennais (1933). Général-major (26.03.1940). Prisonnierde guerre à l’Oflag de Prenzlau, il se laisse convaincre par L. Degrelle(26.05.1944) de s’engager dans la Brigade d’Assaut Wallonie.

Le général-major Lambert Chardome, prestigieuxchef de guerre 14-18. (Coll. F. Balace).

Page 81: Histomag 92

Par la suite, les manœuvres de Gottlob Berger(chef du SS-Hauptamt) visant à éloigner lesofficiers libérés en leur proposant de bénéficier

d’un repos en Belgique ayant réussi,Frankignoul et Chardome, dûmentinformés et chapitrés par leursproches, demandèrent à êtrerenvoyés dans leur Oflag28.

En effet, pendant son séjour àBruxelles, Chardome n’avait passeulement subi l’influence de safamille, il s’était surtout rendu compteque la Légion Wallonie ne jouissait pasde la sympathie de la population ; quesa fonction au sein de l’unité resteraitbornée à celle d’un vague Inspecteuraux armées aux compétences excluantle poste de Commandeur… réservé àDegrelle et ... que l’unité était loind’avoir la taille d’une division comme

on le lui avait fait miroiter.

Que s’était-il passé ?

Le 25 mai 1944, Hellebaut,appelé à la Kommandantur ducamp, fut mis en présence dulieutenant légionnaire JeanVermeire29 venu s’informer sil’officier persistait dans sonintention de passer à la Légion.

28. J. Frankignoul et L. Chardome échouèrent finalement à Oranienburg oùils furent libérés par les troupes soviétiques.29. Né le 28.09.1918. Journaliste au XXe Siècle. Milicien (1938). Désignéd’office comme correspondant du Pays Réel auprès de la Légion Wallonie.Il s’y fait accepter comme lieutenant malgré sa qualité de caporal miliciende l’armée belge. Après-guerre, il est à la base de la mise sur pied de l’AsblLes Bourguignons, association regroupant les anciens combattants wallonsdu Front de l’Est. Décédé le 21 sept. 2009.

8 0 Histomag - Numéro 92

8. L’affaire Chardome

En quittant l’Oflag de Prenzlau le 26 mai1944 pour rejoindre Degrelle, Hellebaut entrainaà sa suite trois autres officiers ; parmi ceux-ci, leprestigieux général-major Lambert Chardome. Sûr d’avoir trouvé en la personne deChardome et ses deux compagnons – les colonelsB.E.M. Jules Frankignoul et Louis Long – desmilitaires de carrière aux aptitudes requises etmême doublées d’un prestige certain pour ce quiétait du général-major Chardome, Degrelle mittout en œuvre pour donner à cet événement toutl’éclat nécessaire. C’est que qu’il fit le 25 juin 1944, àl’occasion d’un grand meeting au Reichssportfeldde Berlin au cours duquel Chardome futofficiellement présenté comme ayant rejoint laBrigade d’Assaut Wallonie (F. Hellebaut, le cpt-cdt L. Lakaie et J. Frankignoul avaient rejoint laBelgique la veille, alors que L. Long s’était rétractéen n’avait jamais quitté le camp de Prenzlau).

daté du 7 décembre 1943 adressé par L. Lippert à partir dufront de l’Est (Tcherkassy) à F. Hellebaut, prisonnier de guerre N° 655 àl’ .A de Prenzlau. (Coll. J.-L. Roba).

En mai 1944, le . J.Vermeire mena les tractationspréliminaires au camp dePrenzlau. (Coll. E. De Bruyne).

Page 82: Histomag 92

Ce même vendredi 26 mai 1944, le général-majorLambert Chardome, les colonels B.E.M LouisLong, Jules Frankignoul et le capitaine-commandant Léon Lakaie furent égalementconvoqués à la Kommandantur du camp.

Seul le colonel Long vint rendre comptede son entretien avec les autorités allemandes enprenant soin de ne pas mentionner la présencede Léon Degrelle. Il vint rapporter que lecommandant allemand du camp lui avait offertd’accompagner le major Hellebaut vers un autreOflag mais que, de concert avec Frankignoul etLakaie, il avait décliné l’offre.

Là aussi, la vérité est tout autre !

Les quatre officiers avaient bel et bien étéreçus par Degrelle accouru tout spécialement deDebica (Heidelager) dans l’espoir de solutionnerau plus vite le grave problème du manque decadres supérieurs dont souffrait la Brigaded’Assaut, mettant en danger la mise sur piedd’une division si chère à Degrelle.

Après leur avoir annoncé que l’O.K.W.allait faire de la Brigade une Division, Degrelledéveloppa ce qu’il avait déjà répété à maintesreprises :

[…] la nécessité pour la Belgique, dansl’hypothèse d’une victoire allemande, d’avoir àson actif une contribution militaire substantielleen succès des armées du IIIe Reich. Sans doute,une issue de la guerre favorable à l’Allemagneétait contestable, mais la stratégie adoptée aufront de l’Est recelait des possibilités positivesconcrètes […],

8 1 Histomag - Numéro 92

Contrairement à la communication interneémanant du général Édouard Van den Bergen,commandant belge de l’Oflag de Prenzlau, quivoulait que tout officier devait lui rendre comptede tout contact avec les autorités allemandes ducamp, Hellebaut, après l’entrevue, omit de seprésenter auprès de son supérieur.

Le lendemain, nouvelle convocation à laKommandantur et, à l’insu de sa hiérarchie,Hellebaut y rencontra Degrelle.

A 18h15, une voiture emportait les objetspersonnels du major. Une demi-heure plus tard,le même véhicule venait le charger. En partantHellebaut s’était contenté d’ébruiterl’information selon laquelle le changement decamp, qu’il avait sollicité en décembre 1943, luiavait été enfin accordé.

La vérité était tout autre, car Hellebautétait attendu au SS-Hauptamt réalisant de lasorte un «  changement de camp  » d’une touteautre nature et qui, aux yeux de ses ancienscompagnons, représentait un authentiquepassage à l’ennemi.

Le prétendu changement d’Oflag n’étaitqu’une ruse pour quitter le camp sans incidents,vite percée à jour d’ailleurs, ses occupants ayantremarqué que les bagages du major,contrairement aux usages, étaient pris en chargepar des ordonnances allemandes, ce qui valut àHellebaut d’être hué à sa sortie.

Page 83: Histomag 92

démenti tout accord de la part du Roi et queladite lettre constituait un dol31.

Par contre, il est établi que le comte Capelle étaitl’objet de démarches pressantes de personnalitésd’Ordre nouveau telles que Robert Poulet32,Ernest Delvaux33, Pierre Daye34 et d’autres quitoutes cherchaient à sonder le Palais surl’attitude qu’il convenait d’adopter et de se voirconfirmer si celle-ci serait couverte parl’approbation royale sans jamais obtenir, à cesujet, un document écrit.

Interprétant à son avantage les« silences » du Palais, Degrelle, pour apaiser lesinquiétudes provoquées par la prestation deserment de fidélité à Hitler et le port d’uniformeallemand, n’hésita pas à fabriquer de toutespièces un télégramme de félicitations que le Roiaurait envoyé au Regenwurmlager en août 1941.C’est tellement vrai qu’après mai 1945, plusieurs

31. Aud. Mil. Liège. Dossier A. Dor, déposition L. Thans.32. Liège, le 04.09.1893. Journaliste de tendance maurassienne, rédacteurà la Nation Belge avant mai 1940, collaborateur à L’Ouest, auteur d’unmanifeste pour la neutralité en septembre 1939. Sous l’Occupation, de-vient rédacteur en chef du Nouveau Journal et y prône une collaborationmodérée. Il se retire du Nouveau Journal après le discours sur la « Germa-nité des Wallons  » mais continue à publier. Condamné à mort. Libéréconditionnellement (1951), il s’installe à Paris. Y décède le 06.10.1989.33. Né le 31.10.1883. Avocat. Chef du Cabinet des Affaires Wallonnes (avril1941) dans le Ministère de l’Intérieur, dirigé par le Secrétaire GénéralGérard Romsée. Révoqué (Arrêt du Régent du 30.08.1945).34. Schaarbeek, le 24.06.1892. Journaliste. Rex. Membre de la Chambredes Représentants (24.05.1936–02.04.1939). Homme de lettres. Déchu dela nationalité belge le 24.06.1947. Décédé à Buenos-Aires le 24.02.1960.

8 2 Histomag - Numéro 92

Et après ce préambule d’achever par un appelvibrant au patriotisme des officiers belges à quiDegrelle demandait :

[…] de faire pour la patrie (et en fonction d’unehypothèse qu’il semblait reconnaître aléatoire)le sacrifice de leur honneur, de leur réputation etde toutes leurs amitiés […],

puis, au moment de quitter les lieux, par le rappel :

[…] que le Roi avait approuvé et encourageaittelle attitude, qu’il en avait donné l’assurance auchef de la Légion mais que, bien entendu, il nepouvait en faire état publiquement… […].

Ici, une parenthèse s’impose.

Lors des procès d’après-guerre, cettequestion d’une approbation royale a resurgi. Onfit alors grand cas d’une lettre que FernandRouleau30, à l’époque l’intéressé s’intitulaitLieutenant du Chef, prétendait avoir reçue ducomte Robert Capelle et aux termes de laquelle leRoi aurait approuvé la formation en Belgiqued’une légion antibolchevique.

Cependant, à ce sujet, l’épouse d’unofficier légionnaire déclara avoir appris par labouche de Mme Nève de Mévergnies, sœur ducomte Capelle, que son frère avait formellement

30. Né le 09.02.1904. Véritable fondateur de la Légion Wallonie (en juillet1941, il se qualifie de commandant ff de la Légion Wallonie). Entre enconflit avec L. Degrelle. Ce dernier le renvoie en Belgique et l’exclut duMouvement de Rex (10.11.1941) avec interdiction formelle à tout Rexisted’entrer en contact avec lui. Décédé à Madrid le 31.07.1984.

A gauche, l’inquiétant Fernand Rouleau au tempsoù il était évoluait à l’

. (Coll. E. De Bruyne).

Page 84: Histomag 92

Le 31 mai 1944, le général-major Chardome vinttrouver le lieutenant-général Van den Bergen lepriant que Frankignoul, Lakaie et lui-mêmefussent reçus par le commandant allemand envue de faire à celui-ci, en présence ducommandant du camp belge, une déclaration denature à apaiser les esprits car, en rentrant auquartier le 26 mai, Long, Lakaie et Frankignoulavaient été insultés.

Van den Bergen accéda à la requête etobtint d’être reçus dans le bureau du colonelallemand où, après les salutations d’usage, lecolonel B.E.M. Frankignoul prit la parole39:

[…] vendredi 26 mai quand on m’a offert dechanger de camp avec le major Hellebaut, jedéclare de la façon la plus formelle que je n’avaisdemandé un changement de camp, nidirectement, ni indirectement par personneinterposée, et que j’ignorais et j’ignore encore lapersonne qui a pu me proposer ou citer mon nomdans ce but. Je déclare de façon aussi formelle eta fortiori que j’ignore le nom de la personne qui apu proposer le général Chardome, le colonel Longet le commandant Lakaie. Comme vous le constatez, Monsieur lecolonel, j’ai refusé l’offre d’accompagner ce jour-là le major Hellebaut vers un nouveau camp et j’aiinsisté auprès de vous pour rejoindreimmédiatement le quartier des prisonniersmalgré votre crainte de voir se reproduireaggravés, les incidents regrettables qui ontaccompagné la sortie du camp du majorHellebaut.

39. Rapport du général E. Van den Bergen ; Justice Militaire, dossier F.Hellebaut, Chardome&Consorts.

8 3 Histomag - Numéro 92

officiers légionnaires témoignèrent dans ce sens. A ce propos, Jules Mathieu35, bras droit deDegrelle sur le front de l’Est, nous confia peuavant son décès que :

[…] personne ne peut affirmer qu’il a lu letélégramme, pas même Félix Francq36, ni JeanGeorges37, ni moi-même, pourtant nous étionsdes amis intimes, des amis à qui Léon disait tout.Il faut en convenir  : ce télégramme futvraisemblablement inventé de toutes piècespour calmer les appréhensions des engagés. Onen a fait part, mais il ne fut pas lu devant latroupe rassemblée. Rien que des on-dit […].

Le mot de la fin appartient sans doute àRoger Wastiau, le dernier officier de liaisonauprès du SS-Hauptamt à Berlin, lorsque celui-cidéclara par la suite que Degrelle, de son propreaveu, lui confia en avril 1945, peu avant sa fuite,que jamais le Roi n’avait donné son accord pourla constitution de la Légion Wallonie38.

Mais revenons à Prenzlau.

Le 27 mai 1944, le général Machiels,commandant en second de l’Oflag de Prenzlau,vint avertir son supérieur que les autoritésallemandes avaient proposé à l’O.K.W. detransférer quatre officiers belges vers un autrecamp, quoique ceux-ci eussent prétendu nevouloir donner aucune suite à l’offre qui leur avaitété faite.

35. Né le 23.09.1909. Rexiste de la première heure par amitié pour L.Degrelle. Légion Wallonie (08.08.1941). Auteur de mémoires.36. Né le 14.01.1907. Expert immobilier. Secrétaire particulier de L. De-grelle (à partir de fin 1939). Légion Wallonie (08.08.1941). Démobilisé(janv. 1942).37. Né le 30.08.1889. Architecte. Légion Wallonie (08.08.1941) mais ren-voyé en mission en Belgique. Après sa mise en liberté, s’installe à Monaco.38. Aud. Mil. Dossier R. Wastiau, PV, dd 14.1.1945, pièce 17. - Voir E. DeBruyne, Léon Degrelle et la Légion Wallonie – La fin d’une légende, p. 50,note 36. Ed. Luc Pire. Liège. 2011.

Page 85: Histomag 92

à l’abandon dans ma chambre et je vousdemande de bien vouloir prendre les mesuresutiles pour les sauvegarder et les faire transporterhors du camp avant que ma décision ne soitparvenue à la connaissance des prisonniers. Cettedéclaration et cette décision sont valables pour lecommandant Lakaie qui m’a marqué son completaccord à ce sujet […].

Puis ce fut au tour du général Chardome deprendre la parole :

[…] Je ne puis me dissocier en aucune façon demes deux amis en qui j’ai entière confiance etpour lesquels j’éprouve la plus profonde estime. Jeme rallie entièrement aux déclarations etdemandes du colonel Frankignoul.

Stupéfait par ces déclarations qui étaientloin d’avoir le caractère apaisant qu’avaitannoncé Chardome, Van den Bergen pria lecolonel du camp de donner des ordres pour queles bagages des trois officiers fussent enlevésavant son retour au camp. De retour au camp, Van den Bergen futinformé que, dès avant son départ pour laKommandantur, trois caisses avaient étépréparées au corps de garde pour l’enlèvementdes bagages et que des hommes de corvéeavaient été commandés pour cette tâche. Il en conclut donc que l’autoritéallemande avait été prévenue de la décision destrois officiers. Il dut également se rendre

8 4 Histomag - Numéro 92

En rentrant au quartier, le colonel B.E.M. Long, lecommandant Lakaie et moi, avons été insultés pardes isolés inconnus et nous avons appris par lasuite qu’une campagne de calomnies, voire demenaces, était dirigée contre nous. Bien plus, legénéral Chardome m’a dit avoir appris de sourcebien au courant de l’état des esprits au camp quenotre déclaration formelle d’être étrangers à laproposition de changement de camp qui nous aété faire serait considérée par des exaltés commeinsuffisante et qu’il conviendrait de faire une sortede profession de foi patriotique minime, conformeà ce que ces exaltés considèrent eux, les intérêtssupérieurs de la Belgique.

Pour ma part, je refuse formellementcomme je l’ai fait en d’autres circonstances, deme plier à une injonction illégitime violant lesdroits les plus sacrés de la liberté de conscience etd’opinion. D’autre part, je désire ardemment,autant que quiconque, apporter l’apaisement àl’atmosphère déprimée et énervée à juste titredans un camp de prisonniers après quatre ans decaptivité.

Je me vois donc forcé de recourir au seulmoyen de concilier les deux choses précédentes,moyen dont je laisse la responsabilité entière auxsectaires qui obligent à l’employer.

Aujourd’hui, je suis disposé à accepter lechangement de camp qui m’a été offert le 26 maiet que j’avais décliné ce jour-là.

Je crois que pour éviter des incidentsregrettables, que je crains nullement, mais quevous désirez peut-être, Monsieur le colonel,éviter, il n’est peut-être pas désirable que jerejoigne le quartier des prisonniers pour y enlevermes objets personnels qui sont

Page 86: Histomag 92

Le 2 juin suivant, le général Van den Bergencommuniquait aux officiers prisonniers le texteintégral des déclarations Frankignoul etChardome faites le 31 mai dans les locaux de laKommandantur.

9. Vor der KaserneVor dem groβen Tor…. Un certain état d’esprit….

Le général-major Lambert Chardome, cehéros prestigieux de la guerre 14-18, méritequ’on s’attarde quelque peu sur sa personnalitételle qu’elle s’était développée pendant sacaptivité et dont un codétenu a brossé le tableau. A Prenzlau, tout en forçant l’admirationgénérale pour ses qualités émérites de guerrier etde chef militaire, il afficha, surtout à partir de1943, des opinions et des écarts de langage quela masse du corps des officiers jugeait avecsévérité. Le général en était venu à considérer que,dans la lutte contre le bolchevisme, la solution laplus favorable pour l’avenir de la Belgique était lavictoire de l’Allemagne et avait développé, à lalecture des journaux censurés, des sentimentsgermanophiles, antianglais et antifrançais que lesdeux aumôniers militaires, malgré tous les effortspour le convaincre de ne pas s’exposer à une

40. Rapport de l’auditeur militaire Danse, intitulé Rapport sur mon activitéà l’occasion du départ du camp Oflag II.A des Général-major Chardome,colonel B.E.M. Frankignoul, major B.E.M Hellebaut, capitaine-comman-dant Lakaie, et mes relations, à cette occasion, avec le colonel B.E.M.Long. Événements se situent à Prenzlau, Oflag II.A du 26 mai au 1er juin1944. - Justice militaire. Dossier en cause de F. Hellebaut,Chardome&Consorts.

8 5 Histomag - Numéro 92

à l’évidence que la promesse d’une déclarationapaisante annoncée par Chardome n’était qu’uneruse de plus dans le but de permettre auxintéressés de quitter le camp sans être l’objet demanifestations d’indignation qui avaient marquéle départ de Hellebaut.

Le même jour, le commandant belge ducamp, faisait connaître, par voie d’avis aux valves,le texte suivant :

Le général-major Chardome, le colonel B.E.M.Frankignoul et le capitaine-commandant Lakaieont définitivement quitté le camp. Je tiens àinformer les officiers du camp des circonstancesdans lesquelles s’est effectué ce départ. Le matin,le général Chardome m’a fait demander aucommandant allemand du camp de le recevoirafin de lui faire en ma présence une déclarationde nature à apaiser l’agitation régnant parmi lesprisonniers au sujet de ces trois officiers. Je mesuis donc rendu avec les trois officiers à laKommandantur où le colonel Frankrignoul a faitau colonel allemand une déclaration aboutissant,à mon grand étonnement, à accepter lechangement de camp qui lui avait été offert le 26mai et qu’il avait refusé. Il a demandé en outre àne plus devoir pénétrer dans le camp et sollicitél’enlèvement de leurs objets personnels avant queleur décision soit connue par les prisonniers. Jetiens à dénoncer la manœuvre à laquelle ces troisofficiers se sont livrés pour se soustraire à laréaction que leur attitude aurait provoquée. Enfaisant croire à une déclaration d’apaisement, legénéral Chardome savait qu’il me trompait sur lebut réel de leur démarche. Chacun flétrira commeelle le mérite cette façon de faire.

Page 87: Histomag 92

Le cas du colonel Long mérite égalementquelques lignes.

Ce n’est que le 2 juin 1944, deux joursaprès le départ de Chardome et consorts que ladirection belge du camp apprit, sur aveu tardif ducolonel Long, la venue de Degrelle et qu’à cetteoccasion il avait proposé aux officiers concernésde s’engager dans la Brigade d’Assaut Wallonie.

A l’instar de Chardome, les quatre annéesde captivité qu’avait subies Long avaient laissédes traces dans son équilibre psychique. Sanature pessimiste avait pris des proportionsinquiétantes où la crainte du communismes’alliait à une méfiance accentuée à l’endroit dela civilisation américaine.

De l’avis de ses camarades prisonniers, ilvivait pénétré de la nostalgie, à ses yeuxirrévocablement révolue, où les pays de l’Europeoccidentale, les pays latins surtout, connaissaientdes modes de vie publique et privée à l’abri dumatérialisme. Et de cette invasion dumatérialisme, il se faisait maintenant unereprésentation très sombre. Quel que pût être levainqueur de cette guerre, il était d’avis que laBelgique ne pourrait plus rester elle-même ettous les germes de dissociation que la sociétébelge charriait ne pourraient que porter leursfruits.

Le colonel en était arrivé à considérer quela fin du monde était proche. Long, chef de Corpsdu 2e Carabiniers / Ier Corps d’Armée, tint-il despropos inconsidérés ? Tout porte à le croire car larumeur au camp l’accusait d’avoir déclaré augénéral Van den Bergen qu’il souhaitait la victoirede l’Allemagne. Les officiers de son régimentprotestèrent contre cette accusation tout en sedemandant si leur chef, à la veille duDébarquement, n’était à ce point resté

8 6 Histomag - Numéro 92

souillure grave de l’armée belge, ne parvinrent àmodérer.

Dès qu’il avait la parole, Chardomeclamait bien haut :

[…] qu’il était Belge, rien que Belge,intégralement belge, mais qu’il était le canon duRoi, commandant en chef, pointant vers l’Est, leSud, l’Ouest, à son gré, et que lui, généralChardome, fonçait dans la direction indiquée,quelle qu’elle fût, sans se soucier de la réactiondes foules […].

De tels propos et de telles attitudes,ponctuées par des sous-entendus que la grandemajorité du corps des officiers qualifiaitd’outrageants, ne pouvaient que jeter un malaisequi, au fil du temps, se transforma endésapprobation sans équivoque.

La situation était devenue alarmante à unpoint tel qu’en août 1943, les lieutenants-généraux du camp, dans un dernier élan derespect, avaient refusé de s’associer à unemesure de mise en quarantaine décidée par lesgénéraux-majors à l’égard de Chardome.

Pourtant, au début de sa captivité, au-delà de ses sentiments germanophiles, Chardomeavait déployé une attitude courageuse, plusparticulièrement lors des déclarationsd’appartenance linguistique où l’on avait vu,admirateur passionné de l’Allemagne, donner àses officiers, sous sa propre responsabilité, desconsignes formelles de nature à totalement faireéchec aux tentatives de semer la division parmi lecorps des officiers.

Page 88: Histomag 92

Chardome, après avoir été raisonné par sesproches, se rangea de l’avis du colonel et sollicitaégalement son transfert vers un camp deprisonniers. Finalement, seuls Hellebaut et Lakaierejoignirent le front de l’Est et participèrent, lepremier comme chef d’état-major de la divisionWallonie, le second comme commandant debataillon (II/69Rgt), à la dernière campagne enPoméranie42.

10. Grandeur et servitudes militairesteintées de rexisme…

L’exode vers l’Allemagne de lacollaboration francophone allait fournir àDegrelle quelque quatre mille hommes. ToutWallon, travailleur volontaire ou déporté, âgé de16 à 45 ans et résidant sur le territoire allemandétait touché par la mobilisation décrétée ennovembre 1944 par le tout frais émouluVolksführer der Wallonen. Des émissaires deDegrelle ratissèrent les camps et zonesd’hébergement de Belges francophones dans leHanovre et ailleurs à la

42. Pour s’être laissé surprendre par les Soviétiques sur des positions decombat non terminées dans les délais impartis, Lakaie fut relevé de soncommandement par Hellebaut après les combats de Lübow (05.03.1945). Ala fin des hostilités, Lakaie se cacha dans une ferme pendant un an avantd’être appréhendé.

8 7 Histomag - Numéro 92

intoxiqué par la propagande national-socialiste etdes conceptions militaires en retard de quatreannées pour attribuer au Reich quelque vaguechance de victoire ?

Quoi qu’il en soit, Long s’était fourré dansle pétrin que la décision de ne pas donner suite àl’appel de Degrelle vint encore accentuer tant lesexplications fournies à ses supérieurs leurparaissaient confuses et complexes.

Les motivations de Lakaie sont moinsconnues. A-t-il cédé aux appels pressants de sonépouse qui, en septembre 1942 déjà, eninvoquant une situation personnelle difficile,avait adressé une requête à la Kommandantur del’Oflag de Prenzlau, priant les autoritésallemandes de bien vouloir libérer son époux ?

Le 28 juin 1944, le colonel Frankignoul adressaitune lettre au SS-Hstuf. Karl-Theodor Moskopf41

de la Dienststelle Jungclaus de Bruxelles, l’invitantà transmettre à Gottlob Berger sa décision de nepas rejoindre Degrelle et d’être renvoyé dans unOflag !

41. Essen, le 01.01.1911. SS-Hauptsturmführer à la Dienststelle Jungclauscomme Chef de l'Ersatzkommando SS Wallonien, responsable du contrôlede la politique d’Ordre nouveau en Wallonie. Lors du repli en septembre1944 des Rexistes en Allemagne, il installe son service à Gummersbach.Recrute des Wallons pour suivre une formation d’agents subversifs àl’école d’espionnage de Wiehl.

Réponse négative de la part du commandant allemand del’ à la requête de libération anticipée de L. Lakaieformulée par son épouse. (Doc. M.H.).

Le 11 avril 1944, au restaurant àBruxelles, Degrelle et ses officiers fêtent la rupturede l’encerclement de Tcherkassy. Des trente-cinqofficiers présents, un seul est officier de carrière del’armée belge (dernier rang, troisième à parti de lagauche). (Coll. E. De Bruyne).

Page 89: Histomag 92

En 1944, la majorité des officiers était issue ducadre des sous-officiers rexistes engagés dans lepremier contingent de 1941 et que Degrelle avaiteu soin de faire promouvoir et de désigner pouroccuper les postes de commandementimportants, Henri Derriks44 constituantl’exception.

Il en était de même des candidats officiersenvoyés dans les écoles militaires (Bad Tölz,Kienschlag-Neweklau ou Sophienwalde). A partquelques isolés (proposés par H. Derriks), tousétaient d’obédience rexiste.

A la question de savoir s’il y eut, parmi lescollaborateurs de Degrelle, des officiers rexistesdans la pleine acception du terme, on peutrépondre par l’affirmative pour ce qui est desofficiers de réserve, voire d’active à la retraite45.

Par contre, il est difficile de se prononcerpour ce qui est des officiers d’active, la loi leurinterdisant toute affiliation à un parti politique.

44. Né le 31.07.1904. Lt de réserve. Légion Wallonie (14.10.1942). Aprèssa libération, s’active avec F. Hellebaut pour mettre sur pied une amicalede vétérans du front de l’Est dépourvue d’ingérences degrelliennes ouneorexistes..45 Parmi ces derniers, citons Ch. Sandron, capitaine-commandant (son filsest officier à la Légion Wallonie) ; ou encore J. Danguy, officier de gendar-merie qui par la suite prit du service à la Garde Wallonne. Citons aussi A.Lisein, officier de réserve et cadre rexiste à Huy, ainsi que quelques autres.

8 8 Histomag - Numéro 92

recherche d’hommes en âge d’être incorporés.

Sous des prétextes fallacieux etmensongers, plusieurs classes de jeunes gensfurent arrachés de leur lieu de travail et dirigésvers les trois camps de travail que leReichsarbeitsdienst allemand avait mis à ladisposition de la direction wallonne du Service duTravail Wallon, un pâle calque du R.A.D.allemand, véritable antichambre de la Waffen-SS.

En février 1945, contrairement à ce qu’on lui avaitfait croire, à savoir qu’elle retournerait à sesoccupations après un stage de trois mois, unepremière levée de ces Requis fut incorporéemanu militari et, après une instruction bâclée desix semaines, envoyée au front43.

A partir de l’automne 1944, la situationmilitaire étant celle que l’on sait, l’apport envolontaires provenant des camps de prisonniersfut, on s’en doute, négligeable.

D’août 1941 à mai 1945, près de huit milleindividus (pas tous francophones) passèrent dansles rangs de ce qu’on appelle communément laLégion Wallonie. Si l’élément rexiste étaitprédominant jusqu’au passage de l’unité à laWaffen-SS, en juin 1943, il n’en fut pas de mêmepar la suite.

Des quatre Kommandeure que compta laLégion jusqu’à la prise de commandement deDegrelle en septembre 1944, un seul peut êtretaxé de sympathisant rexiste, les autres n’avaientaucune attache avec le Mouvement de Rex.

43. Voir E. De Bruyne, Dans l’Etau de Degrelle – Le Service du travailobligatoire ou de l’Usine à la Waffen-SS. Éditions Foxmaster. Verviers.1994.

A gauche, Henri Derriks, officier de réserve del’armée belge, n’avait qu’une piètre idée de L.Degrelle qu’il qualifiait volontiers de…

. (Coll. J.-L. Roba).

Page 90: Histomag 92

prêter le serment de fidélité à Hitler en août 1941au camp de Meseritz et fut aussitôt démobilisé47.

Pauly n’était pas rexiste, pas plus queHellebaut ou Lakaie. Ces deux derniers nefiguraient même pas sur la liste dressée par lecommandant du 1er Étendard F.C. Cette liste,forcément incomplète puisqu’elle ne couvrequ’une partie des provinces wallonnes, renseigneonze officiers dont deux de l’active (un capitaine-commandant d’Ixelles et un lieutenant originairede Kain).

Parmi ces onze officiers de réserve, seulstrois ont une activité rexiste : René Reichling,officier aux Chasseurs Ardennais, et commandantprovincial des Formations de Combat-F.C. pour laprovince de Luxembourg  ; Paul Burtemboy,capitaine de l’aéronautique et Inspecteur desCadres territoriaux de Rex pour la province deLuxembourg, et Albert Constant, lieutenantd’infanterie, cdt du IIe Étendard F.C.

Parmi treize officiers de réserve rexistesprisonniers de guerre recensés, un seul a rejointles rangs de la Légion Wallonie, soit Jean Théâtre,adjudant C.S.L.R. (Candidat sous-lieutenant deRéserve), libéré du Stalag XIII.

Les officiers « nettement sympathisants »en 1940 sont au nombre de quatre (dont troisprisonniers de guerre)  : un colonel B.E.M., deuxcapitaines-commandants48 et un lieutenant.

Parmi les officiers toutes catégoriesconfondues, trois ont exprimé le souhait derejoindre la Garde Wallonne  : il s’agit dulieutenant de réserve (non prisonnier) CharlesHerbecq (son fils est légionnaires) ;

47.Communication orale A. Renier. Herstal, 5 mai 1985. Renier connaissaitcet officier pour l’avoir connu à l’Ecole Royale Militaire où il était son aînéd’un an ou deux.48. Dans l’armée belge, le grade de capitaine-commandant est le grade leplus élevé des officiers subalternes. Il s’acquiert à l’ancienneté pour ceuxqui ont renoncé ou échoué aux examens donnant accès à la carrière d’offi-cier supérieur. On lui applique le vocatif de Commandant.

8 9 Histomag - Numéro 92

Pour cette dernière catégorie, on ne peut parlerque de sympathies, pour autant qu’il y en eut car,bien souvent, et tout spécialement pour lesofficiers prisonniers, une seule phraseimprudente dans la correspondance privée ou unécart de langage suffisaient pour en faire…, auxyeux du Mouvement, des rexistes en puissance.

Ainsi, dans un document du 30 septembre1941, répertoriant les «  officiers rexistes  », lecommandant du Ier Étendard des Formations deCombats, renseignait Chardome comme […]élément rexiste connu du Chef [...] alors que, detoute évidence, le général, pas plus queHellebaut, malgré leur étiquette degermanophiles notoires, ne s’étaient jamaisidentifié au Rexisme. La pratique consistantconsidérer comme Rexiste tout individu qui, parquelque détour ou motif que ce fût, en était venuà admirer le régime national-socialiste, voire àexprimer sa crainte du bolchevisme, était unemanœuvre utilisée sans vergogne.

A l’exception de Georges Jacobs, officierd’active à la retraite mais réactivé lors de lamobilisation et du lieutenant d’active AdolpheRenier46, - ce dernier rejoignit les rangs desFormations de Combat avant de s’engager dans laLégion Wallonie -, les autres officiers de carrièrede la Légion n’avaient aucune attache avec Rexou son Chef, si ce n’est, comme tous leslégionnaires, d’avoir prêté le sermentd’allégeance à Degrelle.

Notons toutefois qu’un seul officier decarrière, Jacques M* de F*, refusa de

46. Né le 18.07.1915. École militaire. Prisonnier de guerre rappelé parl’O.T.A.D. Légion Wallonie (09.10.1941). A Novo-Buda (Tcherkassy),après la mort de L. Lippert (13.02.1944), étant l’officier le plus ancien engrade de la SS-Sturmbrigade, (en l’absence de L. Degrelle légèrementblessé et évacué), il refusa de prendre le commandement de la percée de laBrigade au profit du SS-Ostuf. J. Mathieu. Après la guerre, il entra dansl’Ordre des Frères Hospitaliers de Saint Dieu à Paris. Décédé à Paris le30.05.1998.

Page 91: Histomag 92

Le nombre d’officiers de carrière 1941-1945 selimite à neuf : G. Jacobs, L. Lippert, A. Renier, P.Pauly, L. Thys, F. Hellebaut, L. Lakaie et les frèresAlfred et Joseph Dumont, chiffre auquel il fautajouter un officier d’activé pensionné maisréactivé (G. Jacobs) et un officier de carrièrerenvoyé fin août 1941 pour refus de prestation àHitler. Pour être complet, il faut encore citerChristain de Backer de Réville (nom demprunt),officier de carrière de la Division Langemarck quien 1945 rejoignit la Division Wallonie.

Le nombre d’officiers de réserve del’armée belge (deux se sont prévalus de ce rangd’une manière frauduleuse  : J. Vermeire et F.Rouleau) peut se chiffrer à une petite trentaine.Trois russes blancs se virent confirmer leur rangd’officier lors du passage à la Waffen-SS en juin1943, soit G. Tchekhoff (notons tout de mêmeque ce dernier acquit la nationalité belge avant leconflit mondial), N. Kamsky et G. von Chafroff, lesautres conservèrent leur rang de Sonderführer.

Comme officiers étrangers, renseignonsdeux Français (les médecins Dr R. Buy et Stahl, cedernier Alsacien) et un médecin hongrois. Enfin,plusieurs dizaines d’officiers allemandscomplétaient les cadres, soit au sein de l’état-major de liaison, soit comme spécialistes desdivers services.

Au terme de cet aperçu, force est deconclure que les efforts de Degrelle pour recruterdes officiers de carrière belge se sont soldés parun cuisant échec. Le recrutement dans lesStalags, toutes proportions gardées, n’apportapas non plus les résultats escomptés.

9 0 Histomag - Numéro 92

du capitaine de réserve (non prisonnier) PaulGheysen et du maréchal des logis-C.S.L.R. (nonprisonnier) Marcel Jayé (ils seront incorporésdans la Division Wallonie en octobre 1944).

Ni Chardome, ni Hellebaut, ni Lakaie n’ontjamais tenu des propos en faveur du rexisme. Eton peut se poser la question de savoir si Lippertéprouvait pour le rexisme les sympathies quetrop rapidement certains lui ont parfois prêtées.

En tous les cas, aujourd’hui, sans grandrisque de se tromper, on peut affirmer queLippert ne s’est pas engagé dans la LégionWallonie par sympathie pour Rex et son Chef.

Les mobiles étaient tout autres.

Tout au long de son existence 1941-1945,la Légion Wallonie, a compté quelque deux centsofficiers dont un très grand nombre parpromotion intérieure : des sous-officiers (pour lamajorité Rexistes) sortis du rang pour acte debravoure (Tapferkeitsoffizier) ou pour leurexpérience du front (Frontbewährungsoffizier)  ;des cadres des Formations de Combat, auxquels ilfaut ajouter les diplômés des académiesmilitaires de Bad Tölz, Kienschlag-Neweklau ouSophienwalde, sans oublier les «  hors cadres  »,officiers de la Garde Wallonne ou de la NSKKnommés par complaisance et embrigadés enoctobre 1944.

Page 92: Histomag 92

9 1 Histomag - Numéro 92

La 27.SS-Freiwilligen-GrenadierLangemarck

ugés 'germaniques' en fonction des critères raciaux de l'Ordre Noire, les premiersvolontaires flamands sont admis dès 1940 dans les rangs de la Waffen-SS à ladifférence de leurs cousins wallons qui ne sont autorisés à revêtir que l'uniformede la Wehrmacht. Sans leader charismatique comme Léon Degrelle, les Flamands

vont fournir un contingent de 10 000 volontaires.

J

Affiche de propagande flamande

Page 93: Histomag 92

ODB SS-Freiwilligen Legion Flandern

Kommandeur : SS-Ostubaf Michael LippertAdjudant : SS-Ustuf. Günther SteffenStabs-Kompagnie : SS-Ustuf. Günther Steffen1.Schützen-Kompagnie : SS-Ostuf. Peter Nussbaum2.Schützen-Kompagnie : SS-Ustuf. Helmut Breymann3.Schützen-Kompagnie : SS-Ustuf. Hans Moyen4.(schwere)-Kompagnie : SS-Ustuff. Karl Neuhäuser5. Pak-Kompagnie : SS-Ustuf. Karl Weingärtner.

La Flan-dern

Les premiers volontaires flamands (environ 800)sont versés dans le 6.

dès avril 1941, régiment regroupantles autres volontaires germaniques danois etnéerlandais. L’entraînement s'effectue en Polo-gne mais avec l'opération Barbarossa, le

est dissous et les volontaires rejoignent leurslégion respectives, ainsi les Flamands sont regrou-pés dans le devenu

et enfinFlandern.

Le 13 octobre 1941, les volontaires prêtent ser-ment à Hitler et au nom de la 'lutte contre lebolchevisme'. Le 10 novembre suivant, la légionpart pour le front de l'Est, direction Leningrad pourêtre mise aux dépendances de la

( Gottfried Klingemann )comme réserve du XXVIII.

9 2 Histomag - Numéro 92

L'avant-guerre

Après la 1ère Guerre Mondiale, de nombreux partisflamands fleurissent en Belgique dont les aspira-tions varient de l'autonomie de la province aurattachement au royaume des Pays-Bas afin decréer le Diestland. Parmi eux, le (1) abré-viation de

(Union des nationaux-solidaristes thiois)(2). Son chef, Joris van Severen, à l'instar desdifférents partis d’extrême-droite, se dote d'unegarde rapprochée, paradant en chemise verte : le

(D.N.O.) dirigé par Jozef'Jef' François. Mais c'est le V.N.V. (

) ou Ligue Nationale Flamande deGustav 'Staf' de Clercq qui parvient à fédérer toutces mouvements sous sa propre chapelle. Unautre parti, le ,

fondé en 1936 par Jef van de Wiele,prône tout simplement le rattachement au IIIeReich.

Lorsqu'éclate la Seconde Guerre Mondiale, lesprincipaux chefs nationalistes sont arrêtés ettransférés en France. Le 20 mai 1940, à Abbeville,vingt-deux d'entre eux sont exécutés sans aucuneautre forme de procès, dont Joris van Severen,décapitant ainsi le (3). Sa mort laisse lechamp libre à Staf de Clercq qui entreprend demettre son parti, le V.N.V ainsi que sa milice, la

ou brigade noire au service del'occupant.Une pendant flamandde l' est créée à Anvers le 30septembre 1940 par Ward Hermans et René La-grou. Leur uniforme noir rappelle l'Ordre Noireavec quelques variantes  : la svastika est portéesur la casquette et la double-rune SS cousue dansun losange noir, posté au bras gauche. Cetteorganisation collaborationniste est chargée detâches de police et de lutte antiguérilla.

Défilé de soldats de laFlämische Legion

Flämische Legion.svg

Page 94: Histomag 92

9 3 Histomag - Numéro 92

Page 95: Histomag 92

L'unité, éprouvée, est relevée par la250. , mieux connue sous lenom de . Elle va trouver un peu derépit, d'autant plus que les combats diminuent enraison des températures atteignant jusqu'à -40°.La légion est transférée en Lettonie mais regagnele front le 3 janvier 1942, sur le Volchov  carl'offensive hivernale soviétique a commencé. Lesforces de l'Armée Rouge ont réussi à s'infiltrerdans les avant-postes allemands et la légion

reçoit comme mission de s'emparer duvillage de Koptsy le 19 janvier 1942. Malgrél'appui de l'artillerie allemande, les volontairessont stoppés par le feu des canons et des armesautomatiques russes, les pertes sont lourdes. Ungroupe d'assaut réussit à prendre pied dans lestranchées soviétiques et à s'emparer de Koptsy.Mais à leur tour, les assaillants deviennent assié-gés, les combats se terminent au corps-à-corps,l'arrivée de renfort permet aux Flamands de con-solider leurs positions. Durant ces combats, l'Reimond Tollenaere, ex-commandant de la

est tué le 22 janvier 1942. A cetteoccasion, la légion a les honneurs du bulletin deguerre allemand du 10 février. Jusqu'au 19 févriersuivant, la légion ainsi que les autres unités alle-mandes combattant à ses côtés repoussent entout 109 attaques ennemies.

9 4 Histomag - Numéro 92

Une est formée par l' . PeterNussbaum (4) à partir d'une section de chaquecompagnie et mise à la disposition du

'Reichsführer-SS' pour patrouiller et pro-téger la voie de chemin de fer Mga-Kirishi. Le 3décembre 1941, une patrouille tombe dans uneembuscade dans ces forêts denses, infestées departisans. Six Flamands sont tués, les premiersmorts de l'unité. Dans les journées qui suivent, lesaccrochages redoublent d'intensité, le légionnaireFrans Coulombier est le premier Flamand à êtredécoré de la Croix de Fer de 2eme classe (EK II).

Volontaire flamand, il porte larune solaire (Trifos), au lesdes doubles runes SS

Page 96: Histomag 92

Stukas le 5 mars. Le 8 mars, il ne reste plus que108 volontaires valides, l'unité exsangue estretirée du front. Mais le 17 mars, retour aufront : la légion est envoyée dans le secteur

de Delgovo où la 2e armée de choc dugénéral Andreï Vlassov à enfoncé le front(opération Liouban). L'arrivée de nouveaux

volontaires (13 officiers, 26 sous-officiers et 258hommes) permet à la légion de s'étoffer.

Engagée dans les combats du saillant du Volchovavec les SS néerlandais de la'Niederlande' et des Espagnols de la division

, les combats se terminent fin mai 1942 parla capture de l'illustre général Vlassov et la

destruction de sa 2e armée. L' Lippert,commandant la légion, blessé durant les opéra-

tions est remplacé par l' Hans-Albertvon Lettow-Vorbeck, neveu du célèbre généralPaul von Lettow-Vorbeck ayant combattu dans

l'Afrique Est-Allemande durant la 1ere GuerreMondiale. Mais il est envoyé au bout d'un mois àla tête du et c'est l'Josef Fitzum qui assume l’intérim. Le comporte-ment des Flamands est souvent évoqué dans lesbulletins de guerre et les premières Croix de Fer

de 1ère classe (EK I) sont décernées à l' JefFrançois (ancien chef du ) et au

Jules Geurts.

9 5 Histomag - Numéro 92

A partir de mars 1942, la légion est engagée dansles combats autour de Zyemptitsy. Deux

sont mis sur pied pour s'emparer d'unréseau de bunkers, avec le soutien de la

 : la KG Nussbaum et la KG Eckenbrecher. Le2 mars, après une préparation d'artillerie, lesFlamands partent à l'assaut et malgré le feu desarmes lourdes soviétiques clouant au sol les lé-gionnaires, les hommes de la KG Nussbaum réus-sissent à détruire à l'explosif les bunkers au prixde la perte de 2 officiers, 9 sous-officiers et 110hommes tués ou blessés. Parmi eux, l'Nussbaum, blessé mortellement en marchant surune mine. Toujours luttant avec les Espagnols, lesFlamands reprennent l'offensive qui s'achève parla prise de Zyemptitsy avec le soutien aérien des

Bandes de bras de la legion Flandernet de la division ainsi quel'insigne de nationalité

Hans-Albert von Lettow-VorbecK: neveu de l'illustre généralPaul von Lettow-Vrbeck, hérosdes combats en Arique Orientaleallemande

Page 97: Histomag 92

Avec les rescapés de la défunte légion et l'arrivéede nouveaux renforts, une nouvelle formation estmise sur pied par la volonté d'Heinrich Himmler etdu SS-FHA (5). L'unité, constituée en brigadeprend le nom de Langemarck, localité située près

d'Ypres où durant la 1ère Guerre Mondiale, desétudiants allemands s'élancèrent à l'assaut destranchées chantant leur hymne national. Lange-marck est dans les Flandres mais ce nom n'évo-que pas réellement l'engagement des Flamandsinversement à d'autres unités étrangères de la SSqui utilisent des noms de héros nationaux comme

pour les Albanais ou celui du payscomme ou .La brigade s'articule sur deux bataillons avec unétat-major, le commandement est assumé par le

Konrad Schellong. Elle est com-posée de 1470 hommes : 29 officiers, 176 sous-officiers et 1265 soldats. Le 22 octobre 1943, labrigade reçoit sa numérotation et devient la 6.SS-

'Langemarck' ;

ODB de la 6.SS-FreiwilligenSturmBrigade 'Lange-marck'(flämische Nr .1)

Kommandeur  : SS-Stubaf.Konrad SchellongAdjutant  : SS-Ustuf. WilhelmTeichert

- Grenadier-Bataillon (mot.)1. Infanterie-Kompagnie (SS-Ostuf Kurt Mahren-holz)2. Infanterie-Kompagnie (SS-Ustuf Sven Marten-son)3. Infanterie-Kompagnie (SS-Ustuf. Vogel)4. Maschinengewehr-Kompagnie (SS-Ustuf van derWeën)

-schweres-Bataillon (mot.)5. Infanterie-Geschütz-Komp. (SS-Ustuf. WillieKöhn)6. Panzer-Jäger-Komp. (SS-Hstuf. August Knorr)7. Sturmgeschütz-Komp. (SS-Hstuf. Weingärtner)8. (leichte)Flak-Komp. (SS-Ustuf. Uytterspot)9. (schwere)Flak-Komp. (SS-Hstf. Willie Dethier)10. Marsch-Komp. (SS-Ustuf. Wilhelm Schaumann).

9 6 Histomag - Numéro 92

Durant l'été 1942, la légion est aux portes deLeningrad, à une dizaine de kilomètres des pre-miers faubourgs. Dans son secteur, toujours auxcôtés des Espagnols et malgré le pilonnage del'artillerie soviétique, la légion est relativementépargnée jusqu’au retour des premiers froidspermettant à l'Armée Rouge de reprendre sesoffensives hivernales.Elle est transférée en janvier 1943 au sud du lacLadoga où elle y mène des combats défensifs. Le9 février, l' Geurts est tué par le tird'un sniper. Il avait été un des premiers récipien-daires de l'EK I. L'unité est envoyée en renfort àKrasny Bor où la division a reçu de plein fouetl'offensive soviétique lors de l'opération(Etincelle). Malgré les lourdes pertes, Kransy Borest repris par les Flamands le 22 mars. Exsangue,il ne reste plus que 50 volontaires sur les 450 quiont participé aux combats de Krasny Bor, la légionest relevée du front le 30 mars, envoyée à Debicaen Pologne où elle est dissoute.

La 6. 'Langemarck' ( ).

Jef François

Page 98: Histomag 92

Après un repos de trois semaines destiné à panserles plaies la est envoyée à Jampoloù de nouveau, les Flamands se retrouvent mena-cés d'encerclement. Le 2 mars, après avoir sabor-dé les pièces d'artillerie à bout de munitions, lesvolontaires se replient sur Bilhorodka, couvertspar les Stug III, mais la route est coupée par lesSoviétiques et les Flamands doivent se frayer unpassage à découvert, traversant les lignes enne-mies par petits paquets. Durant cette retraite,Konrad Schellong est blessé et c'est leWillie Detier qui assume l'intérim. Le 13 mars, lesrescapés commencent à arriver dans les lignesamies. Il ne reste plus que 400 volontaires etl'unité doit à nouveau être réorganisée avec l'arri-vée de nouveaux renforts. Le 15 mars, la brigadeest envoyée à Lvov puis à Knoviz, dans le protec-torat de Bohême-Moravie. Schellong, en récom-pense de la bonne tenue au combat de la

est promu .

9 7 Histomag - Numéro 92

Le 26 décembre 1943, la brigade reçoit sa nou-velle affectation, Zithomir sur le front d'Ukraine,aux dépendances de la 4. du

Ehrard Raus. Zithomir étant aux mainsdes Soviétiques, la situation est très préoccupan-te. Ayant établi une ligne défensive, la 6.

est dépêchée au village deDryglov où des chars russes tentent de percer. Le2 janvier 1944, l'artilleur Remi Schrijnen dude la compagnie antichar réussit à mettre hors decombat avec son PAK 40 trois T-34, les premiersd'une longue liste. Le lendemain, les positionsflamandes sont submergées et Schellong monteune contre-attaque avec l'aide des StuG de la7. Malgré ce renfort, Schel-long choisit de replier son unité derrière la rivièreNosivka. Le 15 janvier, la brigade avec la 1.S 'Adolf Hitler' etla 2. 'Das Reich' sont engagéesdans la reconquête de Berditchev, au sud deZithomir.

Conrad Schellong, Kommandeur dela division Langemarck

Remi Schrijnen : as du canonantichar PAK, récipiendaire dela  Ritterkreuz, il porte la runesolaire, autorisé car ayant étéintégré au régiment Nordwest

Page 99: Histomag 92

La 27. 'Langemarck''(

).

Le 20 septembre 1944, les survivants de la terri-ble 'bataille de la SS européenne' embarquent àTallin et sont transférés à Schwinemünde pourêtre réorganisés. Pendant ce temps, la Belgiquevient d'être libérée. L'afflux de collaborationnistesen exil, des membres de la ou duNSKK permet de transformer la S endivision. Le 18 octobre 1944, le SSHeinrich Himmler autorise la constitution de la27. 'Lange-marck'. L' Schellong est remplacé parl' Thomas Müller.

ODB simplifié de la 27.SS-Freiwilligen-Grena-dier-Division 'Langemarck''(flämische Nr .1).

Kommandeur  : SS-Standartenführer ThomasMüller-SS-Freiw.Gren.Rgt 66 : SS-Ostubaf Schellong-SS-Freiw.Gren.Rgt 67  : SS-SturmbannführerOtto Hansmann-SS-Freiw.Gren.Rgt.68  : SS-HaupsturmführerHans Stange-SS-Art.Rgt. 27  : SS-Sturbannführer HolgerArentoft.

Durant l'offensive des Ardennes, la nouvelle divi-sion est mise en alerte et placée en réserve de la6. . Les différents détachementssont disloqués vers Aix-la-Chapelle, les leadersnationalistes en exil sont persuadés qu'ils vontretourner en Belgique à l'abri des baïonnettesallemandes. Mais l'échec de l'offensive les ramè-ne à la dure réalité, c'est sur le front de l'Est queles volontaires flamands vont devoir à nouveaucombattre.

9 8 Histomag - Numéro 92

Narva

Le 12 juillet 1944, l' demande àSchellong d'envoyer une sur le frontde Narva aux dépendances du III-du Felix Steiner. Le corps d'ar-mée de Steiner compte en son sein la division SS'Nordland' et la brigade SS 'Nederland' (6).Le . du Rehmann est le premier àrejoindre le front de Narva, en Estonie, sur la

dont les points de défensesont des collines appelées Kinderheim höhe,Blauberg, Grenadier Höhe et Liebe höhe. Le 25juillet 1944, la Rehmann prendposition sur la Kinderheim höhe, épaulée au nordpar la 'Nederland' et au sud par des unités de la

. Le 26 juillet, les Soviétiques passentà l'attaque, la colline Kinderheim est dévastée parle feu de l'artillerie ennemie, anéantissant lesbunkers et les tranchées. Rehmann, gravementblessé est évacué et remplacé par l'Georg d'Haese. Assaillis par les T-34, les Flamandsabandonnent les hauteurs de la colline malgré defurieuses contre-attaques qui se terminent aucorps-à-corps. Les canons PAK sont sabotés etabandonnés, le seul encore en état de fonctionnerest celui du Remi Schrijnen et il vamontrer l'ampleur de son talent : il détruit tour-à-tour trois et quatre T-34. Repéré, soncanon est détruit mais Schrijnen est miraculeuse-ment épargné. Après avoir gagné l'EK I, il se voitattribuer la (Croix de Chevalier) remisepar son chef d'unité en personne, l'

Schellong.Le 27 juillet les combats pour la colline Kinde-rheim se poursuivent, au soir, un groupe d'assautflamand aidé par des volontaires SS lettons etestoniens réussit à atteindre le sommet au prix defurieux corps-à-corps mais doit finalement sereplier sur la colline Grenadier. Des 400 hommesengagés sur le front de Narva, il n'en reste plusqu'une cinquantaine de valides. Mais les Soviéti-ques, épuisés par ces sanglants combats ontstoppé leur attaque sur la .

Page 100: Histomag 92

Le 20 avril, l'armée rouge réussit à franchir lefleuve à Niederzahden, au sud de Stettin. Une

regroupant divers éléments de laLangemarck, de la Wallonie et diverses unités dela est placée sous le commandementd'un Wallon, le Hellebaut (7) pourmener une contre-attaque, obligeant les forcessoviétiques à se replier. Cependant, le 21 avril,après une intense préparation d'artillerie, les Rus-ses, à bord de canots pneumatiques réussissent àprendre pied de l'autre côté du fleuve, ce quicontraint les Flamands à un nouveau repli.

Après s'être maintenus à Prezlau, les Flamandsentreprennent de se diriger vers l'ouest en com-pagnie de survivants de la 33.

'Charlemagne'. Le 2 mai, l'Elbe estatteint, les volontaires sont déliés de leur sermentde fidélité par le Müller etchoisissent de se rendre aux Anglo-Américains oude continuer avec Degrelle vers le Danemark.

NOTES :(1) On dit aussi(2) Thiois signifie approximativement de lan-gue flamande(3) C'est ce que l'on a appelé le massacre

d'Abbeville par des hommes du 28e RégimentRégional sur ordre du capitaine Marcel Dingeon. Ilse suicidera à Pau, le 21 janvier 1941.(4) Les grades SS et abréviations sont indiquésà la fin de l'article.

s'occupe du re-crutement, de l'organisation et de la logistique SS,dirigé par l' Hans Jüttner .Ne pas confondre avec le , dirigé parl' Gottlob Berger(6) Les combats de la division 'Nederland'sont évoqués dans l'Histomag 87 spécial Pays-Bas.(7) Franz Hellebaut, chef d'état-major de ladivision 'Wallonie'.

SOURCES

John Littleton.. James Bender Publishing. 1981

Max Afiero. Ass. Cult. Ritterkreuz

9 9 Histomag - Numéro 92

Une commandée par l'Schellong, initialement dirigée en Hongrie pourparticiper aux opérations Konrad en vue de venirà l'aide à la garnison germano-hongroise encer-clée à Budapest, est envoyée en Poméranie etPrusse-Orientale où les confins du Grand Reichsont menacés par l'avancée soviétique. Les Fla-mands retrouvent leurs camarades néerlandais dela division 'Nederland' mais aussi leurs cousinswallons de la 28. . 'Wallonien'.Placés sous les ordres du Munzel,les Belges doivent défendre la ville de Stargard,important nœud routier et ferroviaire.Le 7 février 1945, les Soviétiques attaquent enforce et repoussent les éléments de la 'Nederland'chargés de la protection de la 104puis c'est au tour des Wallons du'Lakaie' d'être submergés, le 8 février. Une

de Flamands reçoit l'ordre de repousserl'avant-garde soviétique. Malgré leurs efforts,Wallons et Flamands doivent reculer et empêcherla prise d'Arnswalde. Le 13 février, les assiégésreçoivent un ultimatum, repoussé par la garnison.Pendant ce temps, le commandement allemandprépare une opération pour venir à l'aide de lagarnison assiégée d'Arnswalde : l'opération

(ou Solstice) dirigée par Felix Steinercommandant de la 11. . Lancée le 16février et malgré un bon début, les divisions SS'Nederland' et 'Nordland' prennent du retard maisparviennent néanmoins à ouvrir un corridor. Lajonction est faite avec les assiégés le 17 février à16h00. Durant la nuit du 17 au 18 février, tous lescivils sont évacués par le corridor et Arnswalde estabandonnée le lendemain. Schellong reçoit la

le 28 février pour le brillant comporte-ment de sa . Placée en défense lelong de la rivière Inha, les Flamands ne peuventempêcher sa traversée par les Soviétiques etl'établissement d'une tête-de-pont. Les survivants(500 hommes) se replient sur Stargard le 3 mars.Assiégés dans la ville, le dégel rendant le terrainpeu praticable pour les blindés soviétiques etlaisse un peu de répit aux Flamands. Ils ont lerenfort de quelques membres du et degrenadiers de la division 'Nordland'. Le 16 mars,nouveau repli sur Stettin puis sur la rive gauche del'Oder couverts par les 'cousins wallons'. Il nereste alors qu'environ deux cents hommes aux-quels se joint le 68. Les restesdes deux divisions 'Langemarck 'et 'Wallonien'sont regroupés dans une Müllerpour former le dernier rempart afin d'endiguer leflot soviétique qui se déverse sur la rive gauchede l'Oder, au sud de Stettin.

Page 101: Histomag 92

1 0 0 Histomag - Numéro 92

Les volontaires belges dans la

lusieurs ont servi dans laLuftwaffe essentielle-ment dans la Flak. Maistrès peu ont eu la chan-ce d'appartenir au per-

sonnel volant.

Guido Rombaut est un des raresà avoir pu voler. Il est né le 27avril 1923 à Waarschoot. Aprèsavoir passé sa jeunesse au Congobelge avec ses parents, nationa-listes flamands, Guido s'engagedans l'Algemeenc-SS-Vlaande-ren. À parti de 1941, il fait desdemandes répétées pour obtenirson transfert dans la Luftwaffe.Finalement, son vœu est exaucéet en 1942, il commence sa for-mation de pilote à la base deNenndorf.

P

En permission à bruxelles

Page 102: Histomag 92

Un troisième belge, Joseph Christian, né le 20mars 1921, formé comme radio-opérateur sur

Ju 88, est affecté au I./KG 54 (KG pourou escadre de bombardiers). Il

effectue plusieurs missions sur l'Angleterre aucours de l'opération " " ou " "pour les britanniques entre janvier et avril 1944. Ilest tué au-dessus de l'Angleterre le 18 avril 1944.

Nous pouvons citer aussi 2 autres belges (n'ayanteffectué aucune mission), Alfons Labeau formécomme pilote de chasse mais en mai 1945, lesappareils se font rares et encore plus le carburant... Joseph Justin, mitrailleur sur Ju 88 affectéau KG 6 et réaffecté au 159 endécembre 1944.

Sources :Joseph, Frank, the Axis Air Forces, Praeger, 2012.Mombeek, Eric, Jagdgeschwader 1 "Oeseau", Lele Presse,1997.Neulen, Hans-Werner, in the skies of Europe, The CrowoodPress, 2000.

1 0 1 Histomag - Numéro 92

Le 5 avril 1943, il rejoint la 102,unité école (équivalent aux

de la ) basée dans un secteur"calme". Le 20 juillet 1943, il est au

(unité école) puis le 7 septembre 1943, il estaffecté à la 6ème escadrille de l'escadre de chas-se 1 (6./JG 1 "Oesau"). Le 27 septembre 1943,une formation de 308 bombardiers escortée par262 P-47 est détectée. À 11 heures,l'ordre est donné de décoller. Guido pilote le

Fw 190 Wk.Nr. 550523, arborant un 12jaune sur le fuselage Il ne rentre pas de sapremière mission, sans aucune information sup-plémentaire sur son combat, il est porté disparu.Le 26 janvier 1961, la cours de justice de Münsterdéclare officiellement son décès.

Un second belge a rejoint les rangs du personnelvolant, il s'agit d’Henri Dannemark.Henri est né le 26 novembre 1921 à Faymonvilleprès de Malmédy. En 1941, il adhère au NSFK( ). Naturelle-ment, son engagement dans la Luftwaffe suit.Dannemark reçoit une formation de mécanicienen France, aux Pays-Bas ainsi qu'en Allemagne àParow. Il est affecté au 2 (unité desauvetage en mer) en Estonie.Le 5 juin 1944, Henri et ses coéquipiers décollentà bord du Do 24T (Wk.Nr. 1075) pour unemission de sauvetage d'un équipage deabattu au-dessus du golfe de Finlande. Malgréune escorte de chasse, l'hydravion est abattu parle La-5 du lieutenant Alexander Po-tyomkin.Blessé et seul survivant, Dannemark est récupéréet hospitalisé à Plawen. Quelques jours plus tard,il est évacué sur Königsberg.En août 1944, il retourne à son unité basée àGrossenbrod. Il obtient une permission et surtoutun sauf-conduit pour retourner chez lui. En sep-tembre 1944, il assiste à la libération (ou peutêtre pour lui à l'invasion) de son village par lestroupes américaines. Après guerre, il se lanceavec succès dans les affaires.

Fw 190 JG1 "Oesau

Dornier Do 24

Junker Ju 88

Page 103: Histomag 92

1 0 2 Histomag - Numéro 92

La brigade Piron, des origines au retour

e 10 mai 1940, la Belgique est envahie par les troupes allemandes. Le 22 mai, leLieutenant-Général Chevalier V. VAN STRYDONCK de BURKEL est mis à la disposi-tion des autorités belges. Il arrive à Londres accompagné d'officiers de l'État-majorde la 1ère Circonscription Militaire. Le 25 mai, suite à un entretien entre le « WarOffice » britannique et le Capitaine-Commandant Breveté d'État-major (BEM)

Charles CUMONT (adjoint de l'Attaché Militaire à Londres), il est décidé de regrouper lesmilitaires belges dans un camp à TENBY. Le Lieutenant-Général Van STRYDONCK estdésigné par le Ministre de la Défense Nationale, le Lieutenant-Général DENIS, pour prendrele commandement du Camp Militaire Belge de Regroupement (CMBR). Le 28 mai, l'arméebelge capitule. Dans le courant du mois de juin 1940, le Lieutenant-Général Van STRYDONCKest donc désigné comme commandant des Forces Belges en Grande-Bretagne tandis que leMinistre JASPAR fait une déclaration à la radio BBC, appelant tous les Belges à rester à côtéde ceux qui continuent à combattre et à le rejoindre en Grande-Bretagne.

L

Page 104: Histomag 92

Il convient également à cette époque de poserdes signes distinctifs sur tous les véhicules desForces Belges en Grande-Bretagne. C’est chosefaite en avril, ces véhicules devant arborer 4signes distinctifs : Le numéro belge d'immatricula-tion ; Le numéro de l'unité peint sur un fond de

couleur (1er Btn Fus : 110 en blanc sur fond rouge; Batterie d'Artillerie : 114 en blanc sur fond mirouge, mi bleu disposé horizontalement)  ; Lalettre « B » et enfin une cocarde aux couleursnationales. Les mouvements d’unités reprennentau gré de la constitution des unités et de leurscycles d’entraînement, ainsi le 13 mai, la Batteried'Artillerie va s'installer à ST-DOGMAELS puis àVELINDRE. Début juin, l'État-major et les servicesrestés à TENBY font mouvement pour GREATMALVERN.

1 0 3 Histomag - Numéro 92

Reconstituer des forces belges enGrande-Bretagne

Le 21 juillet, le CMBR compte déjà 462hommes. Le mois d'août verra donc la formationde l'unité combattante et de l'unité de pionniers,ainsi que la création de la 1ère Compagnie deFusiliers (Cdt LEGRAND) (20 août) qui s'installe àLLANELLY et de la 2ème Compagnie de Fusiliers(Lt SMEKENS) (25 août) qui rejoint PENALLY.L'effectif du CMBR est alors de 692 hommes etson augmentation conduit à la création débutseptembre de la 3ème Compagnie de Fusiliers(Cdt CAMBIER). Le 21 septembre, un peloton écoleest même créé (sous les ordres du Lt J. BLOCH). Le28 octobre c’est au tour de la 4ème Compagniede Fusiliers (Cdt VERSTRAETEN) d’être créée, celle-ci s'installe également à PENALLY. Le 30 octobre,les ministres PIERLOT, GUTT, SPAAK et DE VLEE-SCHAUWER reconstituent le Gouvernement Belgeà Londres, décidés à poursuivre la guerre. Lesunités belges en formation se voient alors com-plétées d’une Compagnie d’État-major le 8 no-vembre. Le Major CUMONT commande alors leBataillon et à la fin du mois de décembre 1940, le

1er Bataillon de Fusiliers atteint son effectif com-plet : 825 officiers, sous-officiers et hommes detroupe. Le 3 janvier 1941, c’est au tour de laBatterie d'Artillerie d’être créée (Cdt HIRSCH), elles'installe à CAMARTHEN, puis à LLANELLY. La 3èmeCompagnie quitte alors TENBY pour s'installer àHAVERFORDWEST. Le début du mois février 1941voit quant à lui la naissance de l'Escadron d'Autos-blindées (Cdt de WALCKIERS). La reconstitutiondes troupes belges en Grande-Bretagne étant enbonne voie une prise d'armes a lieu le 15 février,cérémonie au cours de laquelle Monsieur PIERLOT,Premier Ministre, procède à la remise de sonDRAPEAU au 1er Bataillon de Fusiliers. Ce dernierquitte ses logements de TENBY le 20 février pours'installer à CAMARTHEN. L'État-major du GénéralVan STRYDONCK, quelques services et les troupesà l'instruction restent toutefois à TENBY.

Défilé dans les rues de Tenbyle 15 février 1941

Marche sur une plage anglaise

en juin 1941

Page 105: Histomag 92

La Batterie d'Artillerie revient de LLANELLY pours'établir quant à elle à MORETON MORELL. Cescantonnements sont situés à 10 kilomètres au sudde LEAMINGTON SPA et permettent ainsi de re-grouper la brigade.

Du coté des forces « spéciales », après la forma-tion de la Compagnie Parachutiste Indépendante,le Gouvernement Belge accepte début juillet deformer une unité de Commandos. Des directivessont ainsi données aux autorités militaires pourrecruter le personnel. Ainsi en août, les premierscandidats volontaires pour l'unité de Commandos

quittent le 1er Bataillon pour ABERSOCH. Le Capit-aine G. DANLOY est désigné comme commandant

du groupe. Les Belges forment désormais la 4ème

Troop du 10ème Commando qui comprend égale-ment des unités de nationalité française, néerlan-daise, norvégienne et polonaise et vontcommencer leur entraînement.

1 0 4 Histomag - Numéro 92

Fin juin, c’est au tour du contingent demilitaires belges formés au Canada de gagner laGrande-Bretagne. Cette troupe qu'on appellerapendant longtemps les « Canadiens » est envoyéeà MALVERN (Compagnie A du 2ème Bataillon deFusiliers en formation). En septembre 1941,l'Escadron reçoit ses premières autos blindées,essentiellement destinées à l’entrainement : uneRolls-Royce de 1920 et deux Lanchester de 1930.En octobre, l'Escadron réceptionne enfin 14 blind-és GUY Mark I A. Après s’être familiarisé avec cesnouveaux engins, l'Escadron d'Autos Blindéesquittera MALVERN fin avril 1942 pour s'installer àPEMBREY où il assumera sa première mission deguerre : la surveillance de la côte entre PEMBREYET DIDWELLY. En parallèle, en janvier 1942 ce futau tour de la Batterie d'Artillerie de recevoirprogressivement du nouveau matériel. Elle com-mence ainsi sa conversion à l'emploi des canons-obusiers de 25 livres reçus à partir de décembre1941. Le 20 février, le « Brigade Train » estconstitué. Le Commandant WINTERGROEN en as-sure le commandement. Les lieutenantsDIDISHEIM et PATERNOTTE sont désignés pour le1er Bataillon de Fusiliers. Le 9 avril, le Capitaine G.HOUBION, les Lieutenants OSSELAER et BERTHEL-SON et le Sous-lieutenant SAUSSEZ sont pris enforce à la Compagnie État-major des Forces Ter-restres.

Le Major BEM J. PIRON, qui était arrivédepuis le 6 janvier, ayant débarqué à GREENOCK(Ecosse) venant de Gibraltar, reçoit du comman-dant des Forces Belges en Grande-Bretagne, letitre d'officier supérieur adjoint chargé de diriger

et de parfaire l'entraînement d'ensemble du 1er

Bataillon de Fusiliers, de la Batterie d'Artillerie etde l'Escadron d'autos blindées. Il crée un petitétat-major avancé avec le Commandant CANNE-PEEL et le Lieutenant DIDISHEIM, installé à KINE-TON. Pendant ce temps, en parallèle à laformation des unités terrestres belges, la Com-pagnie Parachutiste Indépendante est créée le 8mai et confiée au Commandant THISE. Début juin,l'Escadron fait mouvement pour occuper un nou-veau cantonnement à HUMBERSLADE PARK et le 4juin ce sont toutes les Forces Belges en Grande-Bretagne qui sont officiellement mises à la dispo-sition des Alliés, alors qu'elles existent depuis le30 juillet 1940. Le 8 juin, le 1er Bataillon quitteCARMARTHEN pour s'installer à WALTON HALL.

Revue des automitrailleuses enoctobre 1941 à Great Malvern

le 15 février 1941

Les volontaires belgesau Canada en 1942s'entrainant au Camp Joliette

Page 106: Histomag 92

Structure et préparation duGroupement belge

Début janvier 1943, le 1er Bataillon et laBatterie d'Artillerie quittent donc CHEPSTOW pourCLACTON-ON-SEA où, le 21 janvier, suite auxdécisions du mois de décembre, le 1er Bataillonde Fusiliers est dissous et réorganisé en ungroupement composé de 3 unités indépendantesde 300 hommes :

Chaque unité est composée d'un état-major et de7 pelotons.

1. Transmissions

2. Peloton Support (mortiers 3 pouces, Anti-aériens, Antichars, Scout)

3. Infanterie d'assaut

4. Infanterie d'assaut

5. Infanterie d'assaut

6. Mitrailleuses VICKERS

7. Administration (transports, ravitaillement, bran-cardiers, armuriers, …)

1 0 5 Histomag - Numéro 92

En septembre, l'Escadron quitte HUMBERSLADEPARK pour s'installer près de PORTHCAWL où ilsera attaché au 49th Reconnaissance Regimentde la 49th Division (Polar Bears). Le 1er Bataillonquitte quant à lui WALTON HALL pour s'installerdans un nouveau cantonnement sous tente àPENNYBONT. Le 23 septembre 1942, le MajorPIRON prend alors le commandement du 1erBataillon de Fusiliers qui, le mois suivant, faitmouvement vers CHEPSTOW. De son coté la Bat-terie d’Artillerie se voit également dotée d’unnouveau commandant le 24 novembre : le MajorB. de RIDDER. Ces troupes sont alors en Grande-Bretagne depuis 1940 pour la plupart, il est doncdécidé que les militaires ayant au moins 9 moisde présence aux Forces Belges seront autorisés àporter l'insigne métallique « BELGIAN ARMY INUNITED KINGDOM », cette mesure visant à dis-tinguer encore davantage les forces belges dansl’armée alliée inaugure d’autres changementspuisqu’à la fin du mois de décembre 1942 unbouleversement radical du commandement et del'organisation des Forces Terrestres en Grande-Bretagne est entamé. Le Major BEM PIRON estappelé en mission à Londres par le Premier Minis-tre H. PIERLOT pour y être informé du plan définitifde la restructuration des Forces Terrestres. Il enreviendra nanti du commandement de la nouvelleUnité : LE PREMIER GROUPEMENT. C'est le « WarOffice » qui prit la décision d'autoriser la formationd'une unité mobile indépendante, ce qui conve-nait à ses plans d'utilisation probable en opérationet au gouvernement belge. De son côté la BrigadeNéerlandaise « Prinses Irene » fut réorganisée àla même date et sur la même base arrêtée par le« War Office ».

Ecusson de la brigade Piron

Le Major J. Piron en 1942

Page 107: Histomag 92

La Brigade Belge n'est pas de la partie. Le 2juillet, la Brigade rejoint ses nouveaux cantonne-ments près de Cambridge et se résout à attendreson engagement sur le continent. Le 11 juillet,l'Escadron Blindé reçoit 12 nouveaux Scout CarDAIMLER Mk II. et le 20 juillet, deux Staghound AAarmés de deux mitrailleuses .50.

Le 29 juillet, l’ordre tant attendu du 21th ArmyGroup tombe enfin :    « Le 1er Groupement setiendra prêt à faire mouvement pour un marshal-ling area le 3 août à 0001 Hr ». Le 30 juillet, toutle personnel prépare activement son matériel. Le3 août 1944, le Groupement fait mouvement versTilbury et le 4, les opérations d'embarquement quidébutent à 0900 Hr dans les docks de Tilbury sontrondement menées. Il y a 3 Liberty Ships :L'  « Henry Austen » pour l'État-major du Groupe-ment, la 2ème Unité Motorisée et les Transmis-sions  ; Le «  Paul Benjamin  » pour l'Escadrond'Autos-blindées  ; Le «  Finlay  » pour la 3èmeUnité Motorisée  ; enfin le cargo britannique « Empire Gladstone » pour la 1ère Unité Motori-sée et la Batterie d'Artillerie.

1 0 6 Histomag - Numéro 92

En février 1943, le Groupement quitte CLACTONpour LOWESTOFT où la réorganisation des ForcesTerrestres et du Groupement entraîne une nou-velle répartition des officiers :

A l'état-major du Groupement : les CommandantsPONCELET et HOUBION, les Capitaines WOLFERS,RICHIR, VAN HOVER et RICHARD et les LieutenantsDIDISHEIM, KIRSCHEN et JACQUES

A l'Escadron d'Autos Blindées : le CommandantBEM de WALKIERS cède le commandement auCommandant BEM de SELLIERS de MORANVILLE.

Les Commandants des unités indépendantes sont: les Commandants WINTERGROEN (1ère), WATER-LOOS (2ème) et NOWE (3ème)

La Batterie d'Artillerie est commandée par leMajor B. de RIDDER.

En mars et avril, l'Escadron abandonne les GUYMark I A dont il était doté depuis octobre 1941 etreçoit 14 autos blindées HUMBER Mk IV, tandisque les unités reçoivent des armes antichar auto-tractées de 6 livres (57 mm). Le 7 octobre leGroupement se voit renforcé d'une compagnie duGénie dont la formation commence sous le com-mandement du Capitaine SMEKENS.

Le 11 janvier 1944, le Groupement démé-nage vers le Kent. L'Escadron Blindé s'installe àBroadstairs. Les autres unités aménagent à Rams-gate et à Margate d’où des exercicesd'embarquement avec parcours en mer et dedébarquement sur une plage peuvent être menésà partir de février. En mars, le Groupement estcomplété d'une unité Light Field Ambulance et le31 du même mois voit la création d'un pelotonLuxembourgeois au sein de la Batterie d'Artillerie.Cette dernière effectue d’ailleurs des tirsd’entrainement le 30 avril à South Down Plainprès d'Alfrison et se classe première parmi tousles régiments alliés. Le 6 mai, ayant achevé sesexercices dans le Kent, le 1er Groupement quittela région de Broadstairs pour s'installer sous tentedans la région de Great Yarmouth. Le 5 juin voitl’arrivée progressive du nouveau matériel danstoutes les unités. Le moral s'élève, mais la nou-velle du débarquement en Normandie provoqueune certaine déception.

Soldats du 1er bataillon àCarmarthen au début de l'année 1942

Unités de la brigade àl'entraînement en Angleterre en 1942

Page 108: Histomag 92

Le 8 août vers 10 heures, le moment tantattendu et espéré des hommes de la brigadebelge est enfin arrivé. Le débarquement de labrigade commence à Arromanches pour les véhi-cules, et à Courseulles pour le personnel.

 (« Souvenirs » de Jean Piron).

A peine après avoir débarqué, une longue colonnese forme. Le Groupement fait mouvement etarrive dans la nuit à Douvres-la-Délivrande et àPlumetot où il s'installe en bivouac. L'état-majorpasse la nuit au château de Ranville (comtesseRohan-Chabot). Le Groupement passe sous com-mandement de la 6th Airborne Division du gé-néral-major GALE qui dépend de la 1ère ArméeCanadienne (général CRERAR). Le colonel PIRONprend contact avec l'état-major britannique quiest installé dans les carrières de chaux sur la rivedroite de l'Orne. La mission du groupement est des'établir en réserve de la division sur la rivegauche de l'Orne. Les trains du groupement (véhi-cules) sont déjà sollicités par la division britan-nique pour transporter des parachutistes vers Pontl'Évêque. Le 9 août dans la soirée, le Groupementbelge relève la 5ème brigade britannique decommandos. En face de lui, une divisiond'infanterie allemande et la 12ème division dePanzergrenadiere SS. Les trains du groupementsont installés dans des carrières voisines desponts du canal. L'état-major s'installe à la mairied'Hauger. En avant, les 3 unités motoriséess'alignent, depuis les marécages qui bordentl'estuaire de l'Orne. La compagnie du génie et lesblindés sont en réserve. L'artillerie est en batteriesur la rive gauche du canal.

1 0 7 Histomag - Numéro 92

A 18.30, appareillage pour rejoindre unconvoi en formation à Whistable. Le 6 août à18.15, le convoi appareille et se met en marchevers la Normandie …

La « Brigade Piron » dans la Ba-taille de Normandie

La bataille de Normandie toute entière aété souvent représentée par le seul jour despremiers débarquements, le jour J, le 6 juin 1944.Elle fut en fait une très longue période de combatsviolents et continus qui dura jusqu'à la fin du moisd'août. Les affrontements les plus durs eurent lieuà partir du 10 juin jusqu'à la fin août. L'invasion dela France impliqua le débarquement sur les côtesnormandes, du 6 juin au 20 août 1944, dequelque 2.500.000 hommes. Le premier jour il yen eut 136.000, et le déferlement allait se pour-suivre pendant deux mois et demi. Le tour de la« Brigade Piron » vint dans les tous premiers joursdu mois d'août, en même temps que celui de labrigade néerlandaise « Princesse Irène » du Lieu-tenant Colonel de RUYTER van STEVENICK, de la

2ème Division Blindée française, de la 1ère DivisionBlindée polonaise du Général Major MACZEK et dela Brigade Blindée tchécoslovaque du GénéralMajor LISKA.

Embarquement du Colonel Piron,du Major Poncelet, du Lt-Colonel Mc Alister et du Commandant Houbion en 1944

Page 109: Histomag 92

immédiatement ses réglages. Les échelons arriè-res et les trains bivouaquent le long de la rivière.L'état-major est installé dans la maison du maired'Hauger. Le major PONCELET, chef d'état-majordu Groupement, déplie ses cartes dans la proprié-té des FABRE à Hauger. Dans la chambre la moinsinconfortable, le soldat LEBRECHT (chauffeur ducolonel PIRON) déplie le lit de camp de sonpatron. Tout près, le génie s'est installé en réservedans un verger. La batterie d'artillerie pilonnedurant les 5 jours qui suivent les positions alle-mandes.

1 0 8 Histomag - Numéro 92

Les deux jours suivants sont mis à profitpour effectuer des reconnaissances. Le génies'installe à Amfreville. Le 13 août, le Groupementest en ligne au contact de l'ennemi devant lesvillages de Sallenelles et d'Hauger. Le groupe-ment belge se voit confier la bande côtière. La1ère Unité (major WINTERGROEN) est à droiteappuyée sur Amfreville, en liaison avec le « 12Devons » britannique. La 3ème Unité (majorNOWE) s'appuie à la mer, à gauche. Les pelotonsde la 3ème Unité sont installés à l'entrée duvillage de Sallenelles, à hauteur de l'école. La2ème U.M. est au centre, au sud de la route quimène vers Franceville. La lisière du village estencore aux mains des allemands. Toute la régionest surveillée par l'ennemi depuis ce fameux abribétonné qui commande l'estuaire. Le PC de la2ème UM est bombardé par des mortiers. Le 1erSergent BAYENS et le Soldat SCHAESSENS sontblessés. Derrière, à moins d'un kilomètre,l'escadron d'autos blindées est en réserve dansune carrière de Basse l'Ecarde. Jules FLORIDOR(escadron blindé) et ses voltigeurs ont été déta-chés à la Ferme du Buisson, l'endroit hanté dusecteur. Le lieutenant-colonel DERIDDER (batteried'artillerie) a pris position le long du canal del'Orne près de Haute-Longueville et commence

Le parcours des unités belges en Normandie en 1944

La section cinématographique belgequi va suivre la brigade Piron permetde très bien illustrer son parcours

Page 110: Histomag 92

A 7 H 10, l'ordre d'attaque de l'opération«  Paddle  » arrive au PC de la brigade. [

Tout est prêt. Le

Colonel donne ordre aux 2ème et 3ème U.M.d'avancer. L'escadron blindé a pour mission depousser aussi rapidement que possible le long dela route côtière et sur le chemin de Merville. Lesrésistances sont très fortes. La route est minée ettenue sous le feu du point fort du Moulin duBuisson, dont le centre est constitué d'une case-mate blindée située au sommet d'une dune.L'autre itinéraire parcourt d'étroits chemins en-caissés fortement minés. Les blindés n'avancentque pas à pas et sont obligés de faire souventappel à la compagnie du génie. Une douzaine demines sont neutralisées par l'adjudant HARBOORTet son équipe. Mais une mine explose, tuant undémineur et blessant mortellement l'adjudantHARBOORT, il décèdera deux jours plus tard. Lelieutenant SAUVAGE (Chef de Pl de l'escadron) estblessé au dos. Il sera remplacé par son adjointNOEL, puis par Jules FLORIDOR. Le scout car deROUZEE saute. A 10 heures 40, on annonce queSallenelles est pris par le 3ème Pl de DEWANDRE.La progression reprend, mais elle est fortementralentie par les tirs des mortiers et les mines. Le3ème peloton de DEWANDRE est bloqué à 300mètres au nord de Sallenelles. A 11 heures, unetroupe de l'escadron blindé est mise à la disposi-tion du bataillon anglais « 12 Devons » qui pro-gresse à droite du dispositif belge. A 12 Hr 30, le

colonel donne ordre à la 1ère unité de se porter àla Ferme du Buisson. De là, elle attaquera vers leslisières est de Franceville, coupant à travers touten évitant les points forts de la route côtière.Cette tactique réussit et la 1ère unité pénètre àFranceville plage, premier objectif du Groupementbelge. Pendant ce temps, les autres unités étaientparvenues également à avancer. Après une in-tense préparation d'artillerie, FLORIDOR emporteles Winklers (voltigeurs) rassemblés des Troop 2,4et 5 à l'assaut du fortin. Les Allemands fuientcomme des lapins. Le peloton de Winklers del'escadron blindé, à pied, avait délogé les alle-mands du point fort du Moulin du Buisson.

1 0 9 Histomag - Numéro 92

Le 14 août, les patrouilles amies et enne-mies se rencontrent dans le premier chemin quimonte vers la droite à la sortie du village deSallenelles et qui mène à la Ferme du Buisson.Une grenade tombe à côté du lieutenant GeorgesVAN DER VEEN (Chef du 5ème peloton de la 2èmeU.M.), il est grièvement blessé. Le cadet RaymondVAN REMOORTELE le charge sur ses épaules aprèsavoir confié le peloton à Joseph GILLEBERT. Unepatrouille ennemie s'infiltre entre les Anglais et la1ère U.M ... Le lieutenant Jacques WANTY (2èmepeloton de la 1ère U.M.) reçoit une balle dansl'épaule alors que le Sgt DEWANDEZ doit êtreévacué sur l'hôpital de campagne. A la 3èmeunité, le jeune soldat BASTIN, blessé au coursd'une patrouille est fait prisonnier par les Alle-mands. Il restera quelques jours parmi eux et leurfaussera compagnie en revenant dans ses lignes.Les premiers prisonniers allemands affluent au PCdu Groupement. Le PC de la 2ème Unité installédans la maison de Mr LAVALLEE encaisse unesalve allemande. La maison de Mr MAUBER enprend aussi un coup le soir même. Les journéesdes 15 et 16 août, les troupes belges sont soumis-es à de nombreux tirs de mortier et subissentleurs premières pertes. Pour le soldat EdouardGERARD (5ème Pl-3ème U.M.), le docteur GOLDB-LATT ne peut plus rien pour lui … Il fallait que leplus jeune des volontaires soit le premier des garsde PIRON «  morts au champ d'honneur  ». Aumême moment, à la 1ère U.M., le Lieutenant DEBLOCK reçoit une rafale dans la jambe. Il faudral'amputer. Pour protéger la population, le villagede Sallenelles est évacué.

A l’assaut de la Dives

Le 17 août à l'aube, un premier ordred'avertissement parvient au Groupement. Legrand jour est arrivé. Les Belges vont attaquer à 3heures du matin. Leur mission est de s'emparerdes fortes positions qui couvrent Franceville et

Merville. Le Colonel donne ordre aux 2ème et 3ème

unités motorisées d'envoyer de fortes patrouillesde reconnaissance. Celle de la 2ème se trouveprise dans un champ de mines sous de violentesrafales de mitrailleuses ennemies. Le cadet VANREMOORTELE qui la commande est tué et deuxhommes blessés. Les autres parviennent à sedégager sous la protection de l'artillerie. La pa-trouille de la 3ème U.M. partie le long de la routecôtière en direction de Moulin du Buisson estarrêtée à 200 mètres des positions avancées.

Page 111: Histomag 92

Le 20 août, l'escadron blindé, dont la pro-gression avec le Groupement est rendue impossi-ble par les nombreuses destructions, est détachéau régiment de reconnaissance de la 6ème Divi-sion. Celui-ci, étant très éprouvé depuis le dé-barquement. C'est pourquoi le commandementdu régiment est enchanté de disposer del'escadron belge pour reprendre le contact avecl'ennemi en direction de Dozule-Annebault. Lereste du Groupement est à Auberville. Le 21 aoûtà 11 heures, les troupes Belges entrent à Cabourg,devant la Dives, dont les ponts ont sauté. Le

colonel y installe son PC avancé tandis que la 1ère

unité, utilisant des moyens de fortune, traverse lefleuve. Elle dépasse Houlgate et s'avance versAuberville où elle se heurte à de fortes arrière-gardes allemandes. Une section du Pl du Lt JA-COBS, guidée par un patriote français, le Lt LEFE-VRE, tombe dans une embuscade et se trouveprise sous le feu de 4 armes automatiques. 5hommes sont tués (le Cpl BETBEZE et les soldatsBECKAERT, JADON, GURHEM et DE BOECK) ainsi quele lieutenant LEFEVRE. L'aumônier DETHISE qui serend sur les lieux pour secourir les mourants et lesblessés est atteint à son tour et doit être évacué.Pendant ce temps, le génie travaille d'arrache-pied avec l'aide de la population à établir desmoyens de passage sur la Dives. Quelques jeepsparviennent à passer la rivière et à apporter lesravitaillements aux unités en ligne. A 19 heures,arrive un message du commandement de la 6thAirborne «  Congratulations on your advance  ».Dans la soirée, l'attaque est menée par la 1èreunité qui enlève les premières résistances sansappui d'artillerie. Dans la nuit, cette unité ren-forcée par des éléments de la 3ème U.M. etappuyée par l'artillerie repart à l'attaque. Cettefois, le succès est complet et les Allemands décro-chent. Simultanément, l'escadron d'autos blind-ées évolue plus au sud. A 6 heures, àGoustainville, pendant que le commandant del'escadron (Major de SELLIERS de MORANVILLE)donnait ses ordres aux chefs de peloton, le colo-nel commandant le régiment de reconnaissancebritannique lui rend visite et, s'adressant augroupe d'officiers Belges leur dit : « gentlemen,devant vous Dozulé est en feu, Troarn brûle en-core derrière vous, là-bas, à gauche, une autreville brûle, je ne sais pas laquelle. J'ignore où setrouve l'ennemi, vous le trouverez bien. Bonnechance ». Dès midi, l'escadron trouvait la ligne derésistance principale ennemie à Branville, Anne-baut, La Chapelle et Hainfray.

1 1 0 Histomag - Numéro 92

La compagnie du génie dégage la route desmines et des obstructions. A 19 heures, la brigadeoccupe tous les objectifs. Commence alors unevéritable course poursuite. Le 18 août, la journéese passe à tâter l'ennemi qui défend la tête depont de la Dives. Les résistants français fournis-sent des renseignements qui se révéleront exacts.Tandis que la compagnie du génie démine laroute de Cabourg à Bruqueville. L'artillerie fait unbond jusqu'à Gonneville, puis Vauville sur Mer.Durant 5 jours ils vont à nouveau harceler lespositions allemandes.

Le Major Poncelet et le Lieutenant Pelsmackersà Sallenelles le 14 août 1944

Les belges et les Canadiens pénètrent dans Villers-sur-Mer

Page 112: Histomag 92

aura l'honneur d'essuyer les premiers coups defeu. La Dives est à peine franchie que dans lafoulée, WINTERGROEN, au départ d'Houlgatepousse son extrême pointe (équipe de reconnais-sance de ROELANTS) au château Fouchet de Carel,sur la butte de Chaumont. Derrière eux, le 5èmePeloton d'assaut de Georges JACOBS devancé parla section du Sgt DEGROOTE. Derrière eux, lepeloton de José SCHMITZ. Conduit par des résis-tants français de Houlgate, DAUVILAIRE et LEFE-VRE, le peloton se glisse de la ferme Chagnet à laferme de Tolleville jusqu'à la crête. La compagniedu génie s'affaire à la maintenance de l'itinérairede la division et démine la route Pré le Houx ,tandis que la batterie d'artillerie est en position àCoudret-Rabu. Plus au sud, à l'escadron, après laprise de Branville, la « Troop One » de FLORIDORse lance sur Pont l'Évêque. DEWANDRE vers laroute de Beaumont et le pont de Rocheville.VERHAEGE vers Clarbec et le pont de Fierville. Il est8 heures 30. FLORIDOR dépasse Annebault.

La progression du groupementcontinue sur la côte

Le 24 août, à 8 heures 30, le Colonel donne l'ordrede reprendre la progression et de bousculerl'ennemi. Le pont détruit, l'infanterie traverse surses décombres portant armes et munitions pen-dant que la population amène des matériaux deconstruction et que le génie construit un bac pourpasser les véhicules. Cette fois, c'est la 3èmeunité qui est à l'avant garde. La progression sepoursuit péniblement. Les résistances allemandesfaiblissent. De nombreux prisonniers sont faits. LeGroupement belge est en flèche de 8 km sur lereste de la division. Le charroi n'a évidemmentpas pu suivre. Le soir, le « First Belgian Group »est aux portes d'Honfleur, il y rentrera le lende-main. L'artillerie est en position à Saint Benoîtd'Herbetot. Dès l'aube du 25 août, l'infanteriepénètre dans Honfleur, dépasse la ville, mais estarrêtée à Fiquefleur par des feux d'armes automa-tiques et antichars. Elle a été rejointe et appuyéepar le peloton VERHAEGE de l'escadron blindé. Unde ses véhicules est atteint par un coup de pleinfouet, blessant son chef et tuant son conducteur,le brave soldat VAN DEN BROECK. Le sous-officierDELAISSE est aussi grièvement blessé. Pendant lamatinée, le Groupement se concentre à

1 1 1 Histomag - Numéro 92

Quelques blindés reçoivent l'ordre de se porter enposition d'observation. Vers 18 heures, un généralanglais demande au commandant de l'escadronde vérifier l'occupation de Branville. Le terraind'approche est dangereux pour des autos blind-ées. Néanmoins, le Lt DEWANDRE s'avance avecprudence à la tête de sa « Troop » et parvient aumilieu du village où il surprend un importantdétachement ennemi. Des allemands apparais-sent dans toutes les maisons encadrant les véhi-cules. Toutes les autos blindées ouvrent le feutandis qu'à la lisière nord du village le scout car detête découvre un canon anti-char. Le Lt DEWAN-DRE donne l'ordre de décrocher avant quel'ennemi ne se remette de sa surprise. Les armestirent à toute volée. La route se couvre de blesséset de morts ennemis. A 19 H 25, le Lt DEWANDRErevient avec le renseignement. Il recevra la « Mil-itary Cross ».

Le 22 août, dès l'aube, la progressionreprend. Cette fois avec le charroi de combat quia passé la Dives sur un pont construit par le géniebelge. À 13 heures, le Groupement entre à Villerssur Mer où la population lui réserve un accueilfrénétique. Partout, les drapeaux français, anglaiset belges flottent, les cloches sonnent et la foulecrie : « vive la Belgique, merci, vive la France ».Le soir, la Touques est bordée et Deauville occu-pée. Le Groupement belge est le premier à avoiratteint cette rivière. Le général GALE a convoquéle colonel PIRON à son EM pour le féliciter de laprogression rapide de son groupement. Les pontssont détruits et les allemands occupent les hau-teurs de Trouville d'où ils bombardent les posi-tions belges à coups de mortiers et d'artillerie. LeLieutenant Benjamin PINKOUS est mortellementtouché par un éclat de mortier. Il décèdera le 24.Deux soldats de la 1ère ROUCHE et FOURNIER sonttués devant les ruines du pont. L'artillerie et lecharroi lourd qui ont franchi la Dives à Troarnarrivent à Deauville. Le QG du Groupements'installe dans une ferme exploitée par des belg-es. La compagnie du génie s'installe à Lieu Bill etl'artillerie est quant à elle en position à Clarbec. Le23 août, les belges aborderont les premiers laTouques entre Deauville et Pont l'Évêque. Sur lacôte, l'U.M. du Major WINTERGROEN est à l'avantgarde. Entre la Dives et la Touques, tous lesitinéraires sur lesquels vont s'engager les unitésde la 6th Airborne seront reconnus par l'escadrond'autos blindées. A Pont l'Évêque, la « Troop One »

Page 113: Histomag 92

Le 25 août à 6 heures 50, l'escadrond'autos blindées reçoit l'ordre de pousser vers larivière Morelle, ensuite vers la Risle et de cherch-er à entrer en contact, sur sa droite, avec leséléments de reconnaissance de la 49ème Divisionbritannique. Le Major SELLIERS lance la Troop deVERHAEGEN sur l'axe Honfleur, Fiquefleur, Equain-ville, Berville, Foulbec. Vers 10 heures 25, le PC del'escadron vient de s'installer à 300 mètres à l'estde St Benoît d'Hebertot. VERHAEGE aperçoit lepont de Fiquefleur qui est intact et veut essayerde s'en saisir par surprise. Mais il est pris sous lebombardement allemand. Il est blessé, ainsi que3 hommes. BIHAY, sous le feu de l'ennemi, varamasser l'un d'eux pendant que VERHAEGE con-tinue à transmettre des renseignements par radio.Le 26 août, le général GALE qui commande ladivision, décide de lancer l'escadron vers PontAudemer pour couper la retraite aux arrière-gardes allemandes. A 8 heures 15, le lieutenantd'OULTREMONT qui a pour mission de tenter uneaction sur le pont de Foulbec voit que le pont estdétruit. L'escadron tombe sous le feu de l'ennemiqui est terré sur les hauteurs surplombant la Risle.Mais le colonel PIRON avait, dès l'aube, envoyé la3ème unité motorisée pour progresser en avantdu Groupement, sur l'axe Honfleur-Berville-Foul-bec. L'unité quitte Conteville et arrive à hauteurde l'escadron. Mais ils tombent sous le feu enne-mi. Sous la violence des tirs, l'unité doit se replier,accusant quelques blessés. Le soldat MOUCHET yest tué et sera enterré dans le village. L'artillerieest à Saint Maclou.

1 1 2 Histomag - Numéro 92

Honfleur. La foule témoigne sa joie d'être libérée,mais aussi sa colère. Des femmes qui s'étaientlaissées séduire par le prestige de l'uniformeallemand sont rasées en public et traînées dansles rues. Des FFI font justice sommaire de deuxtraîtres. En face d'eux, de l'autre côté de l'eau, lesBelges aperçoivent le port du Havre. Les élémentsmotorisés ayant franchi la Touques à Pontl'Évêque, l'y ont rejointe. L'état-major s'installe àl'Auberge du Cheval Blanc où une charmantefillette, costumée en Alsacienne, remet des fleursau colonel PIRON. Ils passent la journée dans cepetit port de pêche. La population est encoretoute émue des atrocités allemandes. La nuitprécédente, ils ont fusillé quelques patriotes. Lesrésistants ont arrêté un jeune belge qui a participéau massacre de la nuit. Ils veulent le remettre augroupement belge, ce que l'auditeur John GERARDrefuse. L'artillerie est en position à Quitteville.Dans la nuit, le Groupement reçoit l'ordre depoursuivre son avance et de reprendre contactavec l'ennemi. Les Allemands abandonnent leshauteurs de Fiquefleur. La poursuite reprend parBerville et Foulbec. Là, l'avant-garde est arrêtéepar des feux nourris provenant des hauteurs dom-inant la vallée de la Risle. L'infanterie de tête ysubit quelques pertes. Le sous-lieutenant VANCAUWELAERT, fils du ministre est légèrement bles-sé. Le jeune soldat MOUCHET est tué alors qu'ilsecoure les blessés sous le feu de l'ennemi.L'avant-garde opère sa jonction avec l'escadronblindé qui a coupé plus au sud. Au cours de lajournée, le Groupement reçoit l'ordre de se con-centrer à Berville où il s'installe dans les vergersafin de se reposer durant 2 jours des fatigues desa progression rapide. Devant, s'étale le vasteestuaire de la Seine. Vers l'ouest, on aperçoit LeHavre. Le Groupement quitte aussi la 6th Airbornequi va rentrer en Grande-Bretagne où elle seraréorganisée pour se préparer à d'ultérieuresopérations. Le Groupement passe aux ordres de la49ème Division du général BARKER.

Le colonel Piron conversantavec des résistants d'Honfleur, le 25 août 1944

Page 114: Histomag 92

Le 1er septembre, la traversée de la Seine ayantété très lente ; ce n'est que vers midi que lamarche vers le Havre peut être entamée. Ce sontles blindés de l'escadron qui ouvrent et couvrentla progression de la 1ère unité motorisée. Bientôt,ils atteignent Bolbec et Harfleur. Les allemandsont établi leurs avant-postes le long du rebord estdu profond vallon qui précède la ville. Ils peuventfacilement être réduits. Mais les hauteurs del'ouest sont fortement défendues et garniesd'abris bétonnés. Le PC avancé est établi entreCaudebec et Lillebonne. Les unités motoriséesappuyées par l'artillerie sont prêtes à partir àl'attaque lorsque brusquement, le Général BARK-ER rencontre le colonel PIRON vers 18 heures. Illui communique de nouveaux ordres. Au cours dela nuit, le Groupement sera relevé par sa divisionet devra se regrouper, prêt à faire mouvementdès l'aube du lendemain. Le 2 septembre au lever

du jour, l'escadron se voit relever par le 49ème

régiment de reconnaissance. Durant la Campagnede Normandie, du 8 août au 2 septembre 1944,le First Belgian Group a eu

Le retour en Belgique

1 1 3 Histomag - Numéro 92

Le 27 août, l'escadron repasse sous le comman-dement belge. Le brio dont il a fait preuve aucours de ces 6 derniers jours lui valut les félicita-tions du commandant du régiment de reconnais-sance de la 6ème division. Dans la soirée du 28août, le Groupement reçoit l'ordre de franchir laRisle à Pont-Audemer et de s'établir au bivouacdans les vergers de Corneville. Pendant ces deuxjours, la 49ème a bordé la rive sud de la Seine. Le29 août, le Groupement qui bivouaque à Bervillepasse sous les ordres de la 49ème division britan-nique et fait mouvement au sud de la forêt deBrotonne tandis que l'escadron s'installe à Cauver-ville en Roumois. La compagnie du génie installeun pont au quai de la prison sur la rivière Risle. Labatterie d'artillerie pilonne sans arrêt la forêt deBrotonne où les allemands se réfugient avec toutleur matériel qu'ils abandonneront. Le Cadet VER-HAEGHE obtient l'autorisation de faire une recon-naissance inédite.

En civil, avec de faux papiers, il fait unereconnaissance de l'autre côté de la Seine encompagnie d'un pécheur et de 4 jeunes français.Il obtiendra des renseignements capitaux sur lesforces allemandes et sur la défense du Havre.Leur rigoureuse exactitude aidera beaucoup dansla progression vers le Havre et sera très utile à la49ème division qui réussira très rapidement às'emparer de la place. Le 31 août, le Groupementreçoit ses ordres. Il traversera la Seine sous laprotection du régiment de reconnaissance de la

49ème division. Il se regroupera au sud d'Yvetotpour marcher sur le Havre et prendre contact avecl'ennemi ... La traversée de la Seine doit se faireen plusieurs endroits. Trois points de passage parradeaux à moteurs sont organisés à Caudebec eten amont. Les blindés du Major SELLIERS passe-ront les premiers dès la tombée de la nuit. Lecolonel PIRON accompagne le capitaine BLOCH,officier de liaison sur le premier radeau.L'opération est très lente et durera jusqu'au lend-emain dans la soirée. L'escadron arrive sur sonpoint de traversée à 18 heures, mais doit attendrela mise en œuvre du génie britannique. A 21heures, l'escadron traverse la Seine à La Maille-raye. Cette opération durera jusqu'au lendemainà 10 heures. L'état-major passe à Caudebec à 11heures, suivi de la batterie d'artillerie. La 3èmeunité traverse à ce moment la forêt de Brotonne.Les trains de la brigade traversent sur le pont dechemin de fer de Rouen.

Le 2 septembre, les troupesbelges reprennent la routevers leur pays

Page 115: Histomag 92

Le délire des populations belges libérées accueil-lent le Groupement à Antoing, Leuze et Ath,jusqu'à Enghien où ils doivent attendre les instruc-tions du général ADAIR. Le Groupement y passe lanuit. Le 4 septembre, à 9 heures 30, le comman-dant de la division envoie ses ordres pour l'entréeà Bruxelles. Les deux mille hommes sont rasés deprès, et impatients  … La Division des Guardsprécède le Groupement belge, donc se sont bienles Anglais qui libèrent Bruxelles. Toutefois, deuxpelotons Belges accompagnent la division desGuards … A 15 heures, la tête de colonne belgepénètre dans les premiers faubourgs de Bruxelles.Une foule en délire les accueille. L'effervescencemonte pour atteindre son point culminant Portede Namur. La population semble progressivementse réveiller de quatre années de torpeur. Par laplace des Palais, la colonne regagne la rue Royaleoù le colonel Piron fleurit la tombe du SoldatInconnu. Porte de Schaerbeek, la colonne se dis-loque et les unités du Groupement prennent leurs

quartiers : la 1ère unité dans la caserne du «

Petit-Château », la 2ème Place Dailly, la 3ème lechamp d'aviation de Melsbroeck, l'escadron à lacaserne d'Etterbeek. L'État-major à la caserne desGrenadiers, mais celle-ci est envahie par unefoule de résistants et de prisonniers Allemands. Lelendemain, l'État-major s'installe dans un bâti-ment de l'université. La batterie d'artillerie occupela caserne du 6ème d'artillerie. Si Bruxelles étaitlibéré, les Allemands occupaient encore quelquesvilles. Le 8 septembre, Une Troop de l'escadronparticipe à la libération de Liège. Des équipes dereconnaissances partent pour Tirlemont, Roos-beek et Saint-Trond. La colonne belge remontel'avant garde américaine et atteint Ans. La popu-lation locale les prend pour des canadiens français: combien peu de belges se doutaient qu'ils al-laient être libérés par des Belges ! Par la rivedroite de la Meuse, des reconnaissances partentpour Fléron et Visé. Pendant ce temps, à Brux-elles, des missions sont confiées aux différentes

unités du Groupement. La 1ère unité est en chargede garder les ponts sur le canal et le reste duGroupement de défendre le nord de Bruxelles. Le8 septembre, le colonel PIRON est convoqué àl'Hôtel de ville de Bruxelles : le Maréchal MONT-GOMERY est en visite officielle. Les officiers duBelgian Group lui sont présentés. Le Maréchalfélicite les troupes du Groupement pour les faitsd'armes qu'ils ont montrés durant la campagne deNormandie. Après 6 jours de retrouvailles et defête, le colonel Piron sollicita des autorités britan-niques, l'autorisation de continuer sous leur com-mandement et d'aller se battre dans le Limbourg.Cette décision digne reflétait l'esprit de tous lesmembres du Groupement.1 1 4 Histomag - Numéro 92

Dans l'après-midi du 2 septembre, alors que lesautos blindées quittent Saint-Romains pourYvetot, le Colonel PIRON est convoqué à Lyons-la-Forêt. A 20 heures, il est reçu avec les patrons desgrandes unités à Beaumetz par le général HOR-ROCKS, commandant du XXXème Corps britan-nique  : La Division Blindée des Guardscommandée par le général ADAIR, dont fait partieà présent le Groupement belge, a reçu l'ordre dese lancer sur l'axe Arras, Douai, Tournai, Hal et …Bruxelles. Le Groupement doit se rassembler à lacitadelle d'Arras et y passer la nuit. La campagnede Normandie se termine pour le First BelgianGroup. Les armées alliées avaient franchi la Seine,Paris était libéré. Les armées anglo-américaineset françaises progressaient irrésistiblement vers laBelgique et vers l'Alsace et la brigade Piron allaitpouvoir rentrer au pays.

Le 3 septembre à 8 heures 30, l'escadron quitteArras pour Douai. Il ouvre la marche à la colonnede revenants qui rentrent dans leur pays aprèsquatre années d'exil. Dans la file des véhicules, setrouvent des gens qu'on n'attendait plus, que leurfamille croyait morts depuis longtemps. Le pre-mier véhicule passe la frontière belge à Rongy à16 heures 36. Où attend également le général SirAlexander Stanier, de la division blindée desGuards.

Le 3 septembre marque le retour en Belgique

Page 116: Histomag 92

La campagne du Limbourg

Le 10 septembre dans la nuit, la colonnese reforme dans les différents quartiers de Brux-elles. Le 11 septembre au lever du jour, la « Bri-gade Piron » quitte la capitale pour passer sous lesordres de la 8ème brigade blindée britannique ausein du XXXème Corps. Elle a pour mission des'emparer de Bourg-Léopold. L'escadron d'autosblindées en tête, suivi de la 1ère unité motoriséefonce vers Louvain, Diest et passe le canal Albertà Beringen vers 13 heures 30. Dès 14 heures 50,les Troops de l'escadron sont en place devantBourg-Léopold : la Troop du Lt SAUVAGE est àdroite à la lisière nord. La Troop de DEWANDRE estau centre du dispositif tandis que la Troop deVERHAEGEN est à gauche, au carrefour de la routede Baelen. Au moment de faire mouvement pourprendre la ville, les défenses allemandes ripos-tent. La Daimler du chef BIHAY est atteinte dedeux coups directs. BENOOT et SIMOENS sont tués,BIHAY est gravement blessé. L'escadron se re-groupe à l'entrée de Bourg-Léopold. Les hommesde la 1ère unité les rejoignent et ouvrent lesgrilles du camp de prisonniers politiques etlibèrent ainsi plus de 900 prisonniers et capturentles SS qui le gardaient. La 3ème Unité quitteBeverloo et entre dans Heppen où ils rencontrentde fortes positions allemandes. Leo VAN CAUWE-LAERT est blessé. Pendant ce temps, les Anglais etles Allemands s'entretuent à Hechtel où les SS ontrepris le village à deux reprises. A la 1ère Unité,le Sdt Carlos MARTIN sera tué à la gare de Bourg-Léopold. Le 13 septembre, les canons de l'arrière-garde allemande sont toujours tenaces. Le 3èmepeloton envoie une patrouille de combat vers lesbois de Oostham, mais leur chef, le cadet LouisGOETS est victime d'un sniper. Le lendemain, laposition forte est prise et les Allemands sontcapturés, mais après qu'ils aient massacré unevingtaine de civils, absolument innocents.

1 1 5 Histomag - Numéro 92

Le 4 septembre, entrée dansBruxelles du Bren Carrier deCarette et Galand (2e Compagnie, 1er peloton)

Le 4 septembre 1944,l'entrée dans Bruxelles de laDaimler 'As de Pique' de De Potter et de Muller

Page 117: Histomag 92

Conclusion

Le Groupement va poursuivre sa marcheen Hollande jusqu’au 17 novembre, déplorant 26tués supplémentaires puis sera relevé pour partiren repos à Louvain. La guerre n’était toutefois pasterminée pour eux puisque la brigade va à nou-veau être déployée aux Pays-Bas d’avril à mai1945, ayant renforcé ses effectifs par l’apport devolontaires, elle y perdra 19 combattants. Ceshommes passeront par la suite outre-Rhin, désar-mant près de 7600 combattants allemands avantde participer à l’occupation du pays jusqu’endécembre 1945.

1 1 6 Histomag - Numéro 92

Le 16 septembre, le Groupement reçoit pourmission de nettoyer le terrain jusqu'au canald'embranchement. Les blindés s'emparent deBaelen et de Maat. Les Allemands se montrentencore très actifs et contre-attaquent devant cettedernière localité. Passant pendant quelques jourssous le commandement de la fameuse 50èmeDivision Ecossaise, le Groupement s'empare, tourà tour, d'Himmer et de Oostham et rejette lesAllemands au nord du canal d'embranchement. Le17 septembre, le groupement belge passe sousles ordres du VIIIème Corps (général O'CONNO),alors que la batterie d'artillerie reste attachée auXXXème Corps, elle prend position à Neerpelt etparticipe à la préparation et à l'appui de l'attaqueexécutée par la Guards Armoured Division.

La participation à Market-Garden

Commence alors la formidable poussée enHollande. Les divisions blindées britanniques seprécipitent le long l'axe Hechtel-Nimègue pouropérer leur jonction avec les troupes aéroportées.Le Groupement, en appui direct du VIIIème Corpsa pour mission d'assurer le flanc droit de la basede départ. Le 19 septembre, l'escadron blindéquitte Hechtel en éclaireur en direction du canalMeuse-Escaut. Les Allemands se sont retirés der-rière cette ligne d'eau. Le colonel PIRON installe

son PC à MEEUWE. Le 20 septembre, la 2ème Unité

Motorisée se lance vers Brée, la 1ère vers Bocholt

et la 3ème vers Kaulille. Toutes ces communes sontlibérées. L'escadron se rassemble à Ellikom. Les

Allemands restent actifs. La 3ème Unité capturequelques parachutistes. Le Groupement tient unfront de 15 kilomètres , il est opposé aux régi-ments de parachutistes « Grasmehl » et « Harde-gg ». Ils sont très agressifs et poussent despatrouilles à l'intérieur des lignes belges. Le 22septembre à 11 heures 57, les premiers élémentsdu Groupement belge passent la frontière hollan-daise. Ils reçoivent l'autorisation de franchir lecanal et de pousser vers Wessem et versMaaseyk. Une fois de plus, le Groupement a bienrempli sa mission. Le colonel PIRON reçoit dugénéral commandant le VIIIème Corps, un mes-sage de félicitations.

Page 118: Histomag 92

1 1 7 Histomag - Numéro 92

La question

a question royale (1945-1950) … est un conflit politique entre Sa Majesté le Roi LéopoldIII et son gouvernement qui amènera finalement le Roi à abdiquer au profit de son fils Bau-douin en 1950.

Après l’invasion de la Belgique, le 10 mai 1940, le Roi Léopold III refuse de suivre songouvernement à l’étranger afin d’y continuer la lutte contre l’envahisseur allemand. Tout comme sonpère, le Roi Albert1e qui resta au front, Léopold choisit de rester en territoire belge au granddésapointement de son gouvenement, ce qui mènera, plus tard - à la fin de la guerre - à un sérieuxconflit.Après la capitulation de l’Armée belge, le 28 mai 1940, Léopold III devint prisonnier de guerre maisresta au château de Laken (Bruxelles) tout en déclinant une entrevue avec Adolf Hitler. Aprèsquelques hésitations, il accepte car il est pratiquement certain que l’Allemagne gagnera la guerre etqu’il parviendra à persuader Adolf Hitler de le laisser régner en Belgique tout comme avant.L’entrevue a lieu mais n’apporte rien de bon aux Belges, Hitler laissant entendre que Léopold n’aurapas son mot à dire tant que la guerre durera.

Lsignature de la capitulation belge par SM Léopold III

Page 119: Histomag 92

1 1 8 Histomag - Numéro 92

En 1941 il se marie pour la seconde fois (sapremière épouse, la Reine Astrid est décédée lorsd’un accident de voiture le 29 août 1935) avecLilian Baels, la fille du gouverneur de la provincede Flandre Occidentale.

Ce mariage n’est pas très bien perçu au sein de lapopulation et encore moins bien par de nombreuxprisonniers de guerre belges. En effet le Roi Léo-pold est certes prisonnier de guerre mais dans desconditions autres que ceux qui le sont en Allema-gne, d’autant plus que le Cardinal Van Roey,primat de Belgique annonce par une lettre pasto-rale, rédigé un jour après le mariage religieux,que le mariage civil ne sera célébré que trois moisaprès. Un mariage civil qui se déroule après lemariage religieux n’est pas conforme à la loi etserait donc illégal.

Lilian Baels, seconde épouse de S.M. le Roi Léopold III

Carte postale envoyée aux prisonniers de guerre belges

Page 120: Histomag 92

Au sein du nouveau gouvernement sous GastonEyskens, la division règne également en maître etlorsque le Premier Ministre décrète, en tenantcompte du résultat du réferendum, le retour duRoi, le gouvernement est à nouveau dissous et lesWallons optent pour une grêve générale.

Ils préconisent même une marche de protestationsur Bruxelles et des émeutes prévisibles éclatentun peu partout en Wallonie.

L’été 1950 est certainement l’été le plus chaudqu’ait connu la Belgique.

Ce fut finalement Jean Duvieussart, devenu nou-veau premier ministre qui trancha, le 19 juillet1950 en émettant l’avis comme quoi la régencedu prince Charles se terminait avec le retour duRoi Léopold III, cependant celui-ci ne retrouva pasle trône immédiatement.

Cela ne fut le cas que le 11 août 1950 en tant que‘’Prince Royal’’ et non comme ‘’Roi’’ et Léopold IIIabdiqua le 16 juillet 1951 au profit de son fils

Baudouin qui monta sur le trône en tant que 5e

Roi des Belges.

Il va de soi que cette article ne se veut pasexhaustif et qu’il y a eu de nombreux remouspolitiques depuis le retour du gouvernement deLondres en septembre 1944 jusqu’à l’abdicationde SM le Roi Léopold III

1 1 9 Histomag - Numéro 92

Mai 1945, voit la libération du Roi Léopold III.Seulement le gouvernement belge du premierMinistre Pierlot veut le recevoir à la seule condi-tion qu’il renonce immédiatement au trône, ceque Léopold III refuse …

Le gouvernement belge est divisé. Les socialistes,libéraux et communistes sont contre le retour dusouverain tandis que les sociaux-chrétiens sontfavorables à ce retour. Qui plus est Léopold III adéjà depuis des années une mauvaise ententeavec Hubert Pierlot.

Après la dissolution du gouvernement, à cause dela mésentente au sujet de la question, le CVP(Christelijke volkspartij) le parti néerlandophonedevient le plus grand parti de Belgique. Il décrèteun référendum où la seule et unique question est :Êtes-vous pour ou contre le retour du Roi ?

Ce référendum n’est pas obligatoire mais 58%des vôtants votent pour un retour, le reste estcontre. Ce référendum crée encore plus de divi-sion au sein de la population car les Flamandsvotent massivement pour un retour du Roi, tandisque les Wallons votent contre.

Le Prince Charles, Régent de Belgique

Marches de protestations

Page 121: Histomag 92

1 2 0 Histomag - Numéro 92

http://historiek.net/belgische-koningskwestie-1945-1950/2351/

http://www.ethesis.net/cvp/cvp_hfst_1.htm

http://www.histoire-des-

belges.be/les-belges-leur-histoire

http://www.histoire-des-belges.be/au-fil-du-temps/epoque-contemporaine/regne-de-leopold-iii/la-liberation-

engendre-la-question-royale

http://reflexions.ulg.ac.be/cms/c_15142/question-royale

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fusillade_de_Gr%C3%A2ce-Berleur

http://www.vivreenbelgique.be/12-a-la-decouverte-de-la-belgique/le-regne-de-leopold-iii-1934-1951

http://www.cheratte.net/joomla1.5/index.php?option=com_content&view=article&id=82%3Aloccupation&catid=1

01&Itemid=83&limitstart=1

Abdication de SM Léopold III au profit de son fils Baudouin

Page 122: Histomag 92

1 2 1 Histomag - Numéro 92

Résistance et brosse à dentsau kommando de Heinkel

A l’usine Heinkel, tout est bon pour saboter l’entreprise de guerre nazie. Danscette usine, se trouve la chaîne de fabrication de l'HE-177, unbombardier.  Au hall 2, sont les presses et une partie de la fabricationd’outillage. Former, découper, souder, mais pour qui, pour quoi ? Alex LeBihan explique : « On fabrique des cuillères, des fourchettes, ouvre-boîtes,

des pipes, des fume-cigarettes, des tabatières. Felipe Noguerol et Roger Guérin sespécialisent dans la fabrication clandestine, à leurs risques et périls, de brosses àdents. »Felipe Noguerol se souvient qu’ « un matin, je me suis évanoui sur la place d’appel. Onm’a emmené tout raide à l’infirmerie. Heureusement, il y avait un infirmier belge,Jacques Placet, que je connaissais. Il m’a dit : « Ne t’en fais pas, je vais te soigner. » Ilm’a camouflé et m’a soigné pendant huit jours. On ne pouvait rester plus longtemps.C’était trop dangereux. On risquait de passer à la chambre à gaz si on n’était pas guériau bout de huit jours.Pendant mon séjour à l’infirmerie, Placet a vu que j’avais une brosse à dents, qui étaittrès bien, comme une brosse à dents « Gibbs » de l’époque, avec mon nom gravé parun copain bijoutier à Marseille.« Qui t’a donné ça ? » me demanda-t-il.

- « Je l’ai fabriquée moi-même. »- « Tu ne peux pas m’en faire une ? »

J’ai dit : « Oui, quand je travaillerai de nuit, j’irai au Hall chercher des outils. » Il y avaitdes scies mécaniques, des perceuses, tout ce qu’il fallait pour la fabrication des avions.Bien sûr, je risquais la pendaison, mais la vie ne comptait pas. On se disait : « Si je passeà la chambre à gaz aujourd’hui ou demain, ça va être pareil ». Alors on ne prenait pasles précautions qu’aujourd’hui, on prendrait.Pour fabriquer cette brosse, j’allais dans un hall où on mettait les avions qui étaientfinis. J’y allais avec ce petit camarade marseillais. Arrivé là, je montais dans l’avion.Avec un marteau, je cassais le pare-brise qui était en plexiglas. Je récupérais lesmorceaux. Avec un couteau, je coupais des crins de sanglier, qui étaient très longs,parce que dans ces avions de combat, il y avait une tour avec un canon. Autour de latour, il y avait une rangée de crins pour limiter le frottement et pour empêcher lepassage de l’air.Et c’est comme ça que j’ai fabriqué une brosse à dents pour mon camarade Placet. Ilétait très content.

Page 123: Histomag 92

Si les brosses à dents sont bien évidemmentabsentes dans la vie des déportés, le camp deSachsenhausen a pourtant un règlement inté-rieur, daté du 6 novembre 1942, dont les directi-ves sont un monument d’hypocrisie et decynisme. Un paragraphe y est dévolu à l’hygiènedentaire :

(Xavier Riaud) Docteur en chirurgiedentaire, Docteur en épistémologie, his-toire des sciences et des techniques,Lauréat et membre associé national del’Académie nationale de chirurgie den-taire, membre libre de l’Académie natio-nale de chirurgie.

1 2 2 Histomag - Numéro 92

Page 124: Histomag 92

1 2 3 Histomag - Numéro 92

L’opération Regenbogen baroud d’honneur de la Kriegsmarine

D ans la nuit du 29 avril 1945, dans son bunker souterrain de Berlin, Hitlerdicte à sa secrétaire son testament politique, ultime tentative de justifica-tions des tourments dans lesquels l’Europe fut plongée au cours de sixannées de guerre. Après avoir écarté Goering, Himmler et nombre de ceuxqu’il ne considère plus comme ses fidèles, Hitler confie les ruines du IIIe

Reich à L’Amiral Dönitz et le nomme président du Reich pour lui succéder. Quelquesheures plus tard, il se suicide, confiant ainsi les rennes de l’Allemagne à son comman-dant en chef de la Kriegsmarine. Le même jour, Dönitz organise l’opération Regenbo-gen, visant à ordonner le sabordage de tous les U-Boote et autres navires de laKriegsmarine après réception du nom de code « Regenbogen », à l’exception de ceuxnécessaires au transport à la pèche et au déminage. Selon les sources, entre 219 et 238sous-marins sont sabordés entre le 1er mai et le 5 mai 1945.

Le Grand Amiral Karl Dönitz

Page 125: Histomag 92

Ce même jour, l’Amiral Hans-Georg vonFriedeburg, sous les ordres de Dönitz se rend àLunebourg pour rencontrer Montgomery et négo-cier un armistice. Il est éconduit, les alliés n’en-tendant accepter qu’une capitulation sansconditions. Après avoir reçu l’autorisation del’Amiral Dönitz, von Friedeburg signe le 4 mai lacapitulation sans conditions des troupes alleman-des du Nord-Ouest de l’Allemagne, des Pays-Baset du Danemark , incluant tous les navires de laKriegsmarine de ces zones.

1 2 4 Histomag - Numéro 92

A la date du 30 avril 1945, l’état de laKriegsmarine est similaire à l’état del’Allemagne,  elle est à bout de souffle  : de sesprincipaux bâtiments, seul le Prinz-Eugen est en-core en état de poursuivre le combat. La forcesous-marine, quant à elle,  semble être la seuleencore apte à se battre dans sa globalité.L’amiral Dönitz, pour sauver l’honneur de sessous-mariniers, corps d’élite dont il est lui mêmeissu, et pour éviter que ses précieux U-boote netombent entre les mains des alliés préfère prépa-rer le sabordage de toutes les unités de la Kriegs-marine ne pouvant pas servir à la pêche ou audéminage.

Le 1er mai, les premiers sabordages ont lieu, alorsmême que l’ordre officiel « Regenbogen » n’a pasencore été donné : trois U-boote sont sabordés àWarnemünde : le U-612 de l’Oberleutnant zur SeeDick, le U-929 de l’Oberleutnant zur See Schulz etl’U-1308 de l’Oberleutnant zur See Besold. Lelendemain, une véritable vague de sabordages alieu à Travemünde : ce sont 32 U-Boote supplé-mentaires qui sont sabordés. Le même jour, leU-71 est sabordé à Wilhelmshaven, ainsi que lesU-2327, U-2332 et peut être le U-3004, à Ham-bourg. Le 3 mai, la vague continue, entre unequarantaine et une soixantaine de U-Boote selonles sources sont sabordés à Kiel, Hambourg etNeustadt.

Le U-3040 sabordé dans le port de Kiel

Accueil de la délégation allemandepar le Général Montgomeryà Lunebourg

Lecture des conditions de la capitulationpar le général Montgomery

Page 126: Histomag 92

mais aussi plut tard jusqu’en juin 1945 : le U-287est sabordé le 16 mai dans l’estuaire de l’Elbe, leU-963 le 20 mai au Portugal, le U-979 le 24 mai àAmrum, et enfin le U-1277 sabordé le 3 juin 1945au Portugal.Ainsi, selon les sources, entre 219 et 238 U-Booteauront été sabordés sur la fin de la guerre, beau-coup avant même que l’ordre «  Regenbogen  »soit donné. Certains historiens émettent mêmedes doutes sur l’émission de ce nom de code.

Sur les quelques 154 U-Boote qui se rendi-rent aux alliés, 121 seront coulés lors de l’opéra-tion Deadlight.

Sources :

www.u-boote.frwww.uboat.netThe Atlantic Campaign de Dan van der VatPhotos : Wikipedia, www.wlb-stuttgart.de

ERRATUM concernant l’article paru dans leHM91 :Le terme de "reconditionnés" pour parlerdes casques Adrian suppose qu’ils soientpassés en usine pour être modifiés, ce quin’est pas le cas de ces casques, qui doiventdonc plutôt être considérés comme "réuti-lisés". Par ailleurs la description du derniercasque représenté dans cet article n’étaitpas noir laqué, portant un insigne et uncimier en argenté mais en noir brillantavec grenade et cimier argenté.

1 2 5 Histomag - Numéro 92

Parallèlement à cette capitulation quelques autressous-marins sont sabordés. Lors de la signature dela capitulation, Montgomery insista pour que lesU-boote se rendent sans sabordage. Pourtant,dans les premières heures du 5 mai 1945, l’ordreofficiel «  Regenbogen  » est donné, pour êtreannulé quelques minutes plus tard. Cependant,bon nombre de commandants de U-Boote,croyant à un contre ordre venant des alliés sabor-dent tout de même leur navire  : le 5 mai, 87U-Boote supplémentaires sont sabordés, sur lamère baltique et la mère du nord, alors que lacapitulation signée la veille prend effet.

Le 7 mai pourtant, deux U-Boote de typeXVIIB qui s’étaient rendus le 5 mai sont sabordésdans la nuit par Oberleutnant zur See GerhardGrumpelt à Cuxhaven. Celui-ci du, pour cet actefaire face à une cour martiale et fut condamné à5 ans d’emprisonnement. Le lendemain, la capi-tulation de l’Allemagne est signée, et un grandnombre de U-Boote, plus de 150, se rendent auxalliés. Cependant, quelques cas isolés de saborda-ges sont encore répertoriés le 8 mai, notamment,les cas des U-2538, U-3030 et U-3503,

U-Boote sabordés à Wilhelmshaven

Page 127: Histomag 92

1 2 6 Histomag - Numéro 92

Le Deutschland / Lützow

Pour beaucoup d’entre-nous, au nom de « cuirassé de poche » nous associons lenavire « Admiral Graf Spee » ce corsaire moderne des mers, lancé le 30 juin1934 et sabordé cinq ans plus tard le 17 décembre 1939. C’est oublier les deuxautres navires de ce type, en particulier le « Deutschland » dont la carrière,bien que chaotique, ne se termina qu’en 1947. C’est aussi un navire qui, faitrarissime, change de nom au cours de sa carrière. Ses derniers combats auront

des objectifs terrestres à partir du printemps 1944 lors de l’offensive soviétique enCourlande puis en 1945 contre la Prusse orientale. Soutient aux troupes allemandesqui tentent, en vain, de contrer l’avancé ennemie, mais aussi l’évacuation de civils etmilitaires vers l’Ouest. Finalement utilisé comme batterie flottante au sud de Swi-nemünde, il sera incomplètement sabordé avant d’être renfloué par les soviétiques puiscoulé lors de tests en 1947.

Page 128: Histomag 92

La coque du Panzerschiff A, numérotée 219, estmise sur cale aux chantiers Deutsche Werke deKiel le 5 février 1929 (A noter que la traditionmaritime allemande veut que l’on ne donne pasde nom à un navire avant son lancement officiel.Ce n’est jusqu’à ce jour qu’un numéro de coque).Le navire, baptisé « Deutschland » est lancé le19 mai 1931 en présence du président Hin-denburg et de 60000 personnes. Il est admis auservice actif le 1er avril 1933.

1 2 7 Histomag - Numéro 92

Historique

Le traité de Versailles interdit à l’Allema-gne de construire des navires de plus de 10.000ts (Washington). De 1929 à 1936 trois unités dela classe « Deutschland » sont construits. Deutsch-land, Admiral Scheer et Admiral Graf Spee. Lesnavires font en réalité 14.290 ts, 15180 ts et16.320 ts en pleine charge. Ils sont surnommés«  cuirassé de poche  » Ils sont classés «  navirecuirassé » (Panzerschiff) avant d’être reclassé enavril 1940 « Schwerer Kreuzer » (croiseur lourd).Avec six canons de 28 cm placés en deux tourel-les triples en armement principal et huit de 15 cmen secondaire, ils ne peuvent affronter des cuiras-sés classiques mais surclassent les croiseurslourds de la classe «  Washington  » armés decanons de 203 mm. Ils possèdent des installationsde détections en avance pour l’époque ainsi quedes systèmes de pointages très précis pour lescanons. La propulsion diesel, innovante, est com-posée d’un ensemble de huit moteurs dieselsMAN à double action M9Z42/58 développantchacun 6563ch soit une puissance totale de53004ch. Quatre moteurs sont accouplés à unréducteur donnant une puissance pratique de48390ch et entrainant deux lignes d'arbres mu-nies d'hélices. La production électrique est assu-rée par huit diesels générateurs Linke-HoffmanBosch répartis en quatre salles. La puissance tota-le est de 2160 kW. Avec 3347 tonnes de mazouten soute, le Deutschland peut parcourir 18650miles nautiques à 15 nœuds et 7149 à 26 nœuds.La vitesse maximale est de 26 à 28 nœuds maxi-mum. Enfin dernière innovation, l’utilisation de lasoudure à l’arc pour l’ensemble de la coque : gainde poids et de résistance, meilleure pénétrationdans l’eau.

Un enfant tenant dans sesmains une maquette du Deutschland

Le lancement du Deutschland le 19 mai 1931

Page 129: Histomag 92

Premières sorties

Le tout nouveau cuirassé effectue sa premièresortie officielle du 20 mai au 1er juin 1933 en merde Norvège. Il fait des escales à Balholmen (Nor-vège), aux îles Féroé avant de commémorer le1er juin la bataille du Jutland que les allemandsconsidéraient comme une victoire sur la HomeFleet. Le 22 juin, il participe à sa première revuenavale au large de Kiel.Déclaré pleinement opérationnel le 10 décembre1933, il appareille pour la Norvège le 10 avril1934 avant d'effectuer des manœuvres avec laflotte puis de réaliser une sortie dans l'Atlantiquedu 9 au 23 juin 1934, une visite de Göteborg enSuède et ensuite le port de Leith en Ecosse aumois d´octobre. Le 14 mars 1935, le Deutschlandquitte une nouvelle fois l'Allemagne pour unecroisière vers l’Amérique Latine jusqu’au 19 avril,date de son retour à Wilhelmshaven. Suivait unenouvelle escale en octobre et début novembreensemble avec le cuirassé Admiral Scheer dansl´Atlantique pour tester l´artillerie lourde et sessystèmes de conduite de tir. Ces exercices conti-nuaient dans l´Atlantique et Mer du Nord jusqu´au24 juin 1935.

1 2 8 Histomag - Numéro 92

Le choix du nom

C'est le troisième navire à porter ce nom depuisl'unification allemande. Le premier était une fré-gate cuirassée de la classe Kaiser, construite en1872 en Angleterre. Entrée en service en juillet1875, jusqu’en 1906, puis servie de cible avantd'être envoyé à la démolition en 1908. Le secondétait un cuirassé du type pré dreadnought, lepremier d'une classe qui allait compter au totalcinq unités. Entré en service en août 1906, ilparticipa à la bataille du Jutland avant d'êtreferraillé en 1922.

La pose des canons de 28 cmdans les tourelles triplesaux chantiers de Kiel

Les canons de 28 cm posés,ce sont les plaques de blindagedes tourelles triples quisont installées

Les tourelles triples de28 cm achevées

Page 130: Histomag 92

La première expérience opérationnelle du Deuts-chland, c'est bien entendu la guerre d'Espagne. Le23 juillet, le cuirassé de poche en manœuvres aularge d'Helgoland, retourne rapidement à Wil-helmshaven où il embarque vivres et munitionspour deux mois. Le 26 juillet, accompagné descroiseurs légers Leipzig et Köln, il jette l'ancre àSaint Sébastian alors que l'Admiral Scheer gagneseul Malaga. Le Deutschland porte officiellementune assistance humanitaire sur les ports de Bil-bao, Santander, Gijon, El Ferrol et Vigo. C'est ainsique 26 navires marchands sont escortés et 9300réfugiés dont 4550 allemands sont aidés par laKriegsmarine. Le 8 août 1936, il retrouve sonsister-ship, l’Admiral Scheer, à Valence avecd'autres navires de la Kriegsmarine, le croiseurléger Köln et les torpilleurs Luchs, Leopard, Möwe,Kondor Albatros et Seedler. Il fait un petit passageau large de Barcelone le 9 août puis met le capsur l'Allemagne le 24 et arrive à destination le 31août 1936.Une deuxième mission dans les eaux espagnolesdébute le 1er octobre 1936. Opérant essentielle-ment en baie d'Alicante, il couvre les cargostransportant les armes et munitions destinées auxnationalistes. A la mi-octobre, 15397 ressortis-sants dont 5539 allemands ont été évacués. LeDeutschland quitte l'Espagne le 14 novembreaprès avoir été relevé par le Graf Spee et arrive àWilhelmshaven le 21 novembre 1936.

1 2 9 Histomag - Numéro 92

Cérémonie de mise en servicedu Deutschland en avril 1933 (1)

Cérémonie de mise en servicedu Deutschland en avril 1933 (1)

Cérémonie de mise en servicedu Deutschland en avril 1933 (1)

Le Deutschland sur le canal de Kiel

Page 131: Histomag 92

Ce cuirassé n'était pas dans la rade mais la villereçoit 91 coups de 280mm. Les réparations duDeutschland ne durèrent pas plus de dix jours etle cuirassé reprit rapidement la mer pour desexercices et manœuvres. Le 5 octobre 1937, leDeutschland appareille de Wilhelmshaven pourl'Espagne toujours en proie à la guerre. Il faitescale au Ferrol, à Cadix, Tanger, Algerisas, Ceuta,Melilla puis les ports italiens de Gaète, Naples oùl'équipage passe les fêtes de Noël avant d'autresrelâches à Capri, Amalfi et Taormina. De retour enAllemagne en février 1938, il est en carénage defévrier à juillet 1938 avant un nouveau déploie-ment entre Tanger et Gibraltar du 24 juillet au 15août puis regagne Kiel le 22 pour assister aulancement du croiseur lourd (Schwerer Kreuzer)Prinz Eugen. Il est de nouveau présent au large del'Espagne (Galice) du 22 au 27 septembre avantd'effectuer des exercices avec des sous marinsentre les Açores et les Canaries. Ces exercices sontmarqués par des visites de courtoisie à Santa Cruzde la Palma le 9 octobre, à Cadiz le 11, Tanger le13 et Gibraltar le 15 octobre 1938. Cinq jours plustard, il regagne l'Allemagne en compagnie duGraf Spee avant de participer début novembre àdes exercices de tir. Entre le 6 et le 26 février1939, le cuirassé est présent en Espagne avant deregagner l'Allemagne pour participer le 23 mars àla reprise de Memel par l'Allemagne. Le 1er avril1939, il assiste au lancement du cuirassé Tirpitz àWilhelmhsaven. Il passe ensuite l'été dans diffé-rentes manœuvres destinées à préparer uneguerre désormais inévitable.

1 3 0 Histomag - Numéro 92

Il repart pour l'Espagne le 31 janvier 1937 sousdes conditions de météo très défavorables (tem-pête et surtout glace). Le 31 mars il doit être mis,comme prévu, en calle sèche à l'Arsenal de Wil-helmshaven pour des changements et des amé-liorations. Il part à nouveau pour l'Espagne le 10mai. Le 21 mai il fait escale à Palma de Majorqueen compagnie des torpilleurs Seedler et Albatros,mais la ville est bombardée le 24 mai obligeantles navires allemands à gagner Ibiza. Le 29 mai ausoir, après l'arrivée des navires allemands, l'alerteest donnée : des navires républicains sont signa-lés au large. Au même moment, deux trimoteursrépublicains larguent leurs bombes sur le navire.Deux bombes de 50 kg seulement touchent lecuirassé. La première explose à proximité de latourelle III tribord de 150mm. Des éclats attei-gnent le réservoir à carburant aviation et immé-diatement l'incendie se déclare, se propageant àl'hydravion et au mess des sous-officiers. La se-conde traverse le pont supérieur au niveau dumat militaire et ravage le pont inférieur de lacheminée jusqu'aux soubassements de la tourelleAnton. De nombreuses soutes à munitions sontnoyées par précaution. Le bilan est lourd : 31 tuéset 110 blessés dont 71 très graves. Le 30 mai, leDeutschland débarque à Gibraltar les 69 marinsqui doivent être hospitalisés et les corps desmarins tués que les autorités britanniques propo-sent d'inhumer le 1er juin. Mais à peine enterrés,les corps sont déterrés sur ordre d'Hitler pour êtreramenés clandestinement en Allemagne. Le cui-rassé arrivera à Wilhelmshaven le 15 juin et les 31marins tués auront le droit à des funérailles mili-taires grandioses. Cette attaque ne reste pas sansconséquences. L'Admiral Scheer reçoit l'ordre debombarder Almeria et de couler le cuirassé Jaime1er.

Le Deutschland en 1936

Le Deutschland en 1938

Page 132: Histomag 92

A cause des très mauvaises conditions météorolo-giques en Atlantique avec des ouragans qui cau-saient de multiples avaries et du fait que lesBritanniques avaient tout de suite commencé àformer des convois et de changer les itinérairesl´opération doit être abandonnée. En plus Hitlerveut que le navire rentre en Allemagne. Il craintpar dessus tout, l'effet dévastateur d'une destruc-tion du Deutschland par les alliés sur l'opinionpublique allemande. Le cuirassé de poche netarde pas à quitter la zone. Il file à grande vitesseet franchit de jour le détroit du Danemark (entrel'Islande et le Groenland) le 8 novembre 1939,passe au large de l'île Jan Mayen le 10 et aprèsavoir évité un bâtiment suspect le 14, fait sajonction avec la 4ème flottille de contre-torpilleurs et s'amarre le 16 novembre dans lenouveau port allemand de Gotenhafen, l'ancienGdynia polonais.

Changement de nom en le 16 no-vembre 1939 (février 1940)

Fait rarissime dans l’histoire de la Marine deguerre allemande, il est débaptisé sur propositionde l´amiral Raeder le 16 novembre à Gotenhafen.Il est alors baptisé « Lützow ». Ce nom est celuidu cinquième et dernier croiseur lourd de la classe

Admiral Hipper. Il est lancé le 1er juillet 1939. Suiteau pacte de non-agression entre l’Allemagne etl’URSS, en gage de confiance, la coque inachevéeest vendue à l’URSS en février 1940. Le change-ment de nom a donc pour but de cacher le retourdu Deutschland en Allemagne, la vente de lacoque du croiseur lourd Lützow aux Soviétiques eten plus on voulait éviter une fois la guerre éclatéel´effet psychologique désastreux qu´aurait la perted´un navire portant le nom de sa patrie. En février1940 le retour et la rebaptisassions seront officiel-lement annoncés. Au même temps Lützow etAdmiral Scheer seront reclassifiés «  SchwererKreuzer » (croiseur lourd).

1 3 1 Histomag - Numéro 92

Au moment où éclate la seconde guerre mondia-le, la Kriegsmarine est loin d'avoir atteint sescapacités maximales et comme le dira l'amiralRaeder, ses forces sont tous justes bonnes pourmourir dans l'honneur et préparer les bases d'unerenaissance (mit Anstand zu sterben).Le Deutschland appareille d'Allemagne le 24 aoûtpour mener une guerre au commerce mais sonaction est bridée par une série de considérationspolitiques. Le cuirassé de poche navigue au largedu Groenland, et se ravitaille auprès du auxiliaireWesterwald. Ce n'est que le 26 septembre 1939que le Deutschland reçoit toute liberté pour atta-quer les navires isolés et les convois ennemis. Ilse trouve à cette époque toujours au large duGroenland à la hauteur de la pointe sud-ouest del'Islande. Son commandant gagne l'Atlantique,entre les Açores et les Bermudes pour intercepterle trafic venant d'Amérique Centrale et du Pana-ma. Il cherche en particulier à mettre la main surles pétroliers nécessaires à son propre ravitaille-ment. Le 4 octobre le Deutschland ne trouveaucun navire ennemi car ces derniers ont étédétournés afin de rejoindre les convois à partird'Halifax. Le lendemain, il réussit cependant àdétruire le cargo anglais Stonegate (5044 ton-neaux).Le 9 octobre 1939, il gagne une nouvelle zoned'opération au sud-est de Terre-Neuve et y captu-re le cargo américain City of Flint qu'il détournesur l'Allemagne avec un équipage de prise. Lenavire gagne Tromsoe en Norvège le 22 mais lesautorités norvégiennes internent l'équipe de priseet renvoient le cargo aux Etats Unis. Le Deuts-chland doit attendre le 14 octobre 1939 pourdétruire le cargo norvégien Lorentz W. Hansenchargé de bois. Le Deutschland, chassé par laForce de Raid française qui couvre le grand convoiKJ4 et 22 navires de la Home Fleet, se ravitaille encarburant et vivres au Westerwald du 25 au 31octobre 1939.

Page 133: Histomag 92

Le lendemain matin dès quatre heures, l’armadas’enfonce dans le fjord, le Blücher ouvre la mar-che. Arrivé au niveau de la forteresse d’Oscarborg(détroit de Dröbak), son commandant, le colonelEriksen, a été prévenu de l’approche d’une forcenavale étrangère. Il n’a pas reçu d’ordre précis,mais ses consignes permanentes sont d’ouvrir lefeu sur tout navire cherchant à forcer le passage.En bon soldat, il va les appliquer à la lettre. Amoins de 1500 mètres les obus de 280 mm et de150 mm pleuvent sur le navire, déclenchant desincendies. Il parvient à poursuivre sa route, maislorsqu’il passe devant la batterie lance-torpille deKaholm, dont les Allemands ignorent l’existence,celle-ci lui expédie deux torpilles qui ouvrentd’énormes brèches sous la ligne de flottaison. Lenavire est perdu et, malgré les efforts de sonéquipage, il coule à 6 heures 22, entraînant aveclui plus de 1000 marins et soldats de l´armée deterre embarqué sur le croiseur. Le Lützow encais-se trois coups de 150 mm qui avarient principale-ment le canon du milieu de la tourelle A. Soncommandant fait marche arrière à toute vitesseet décide de débarquer les troupes d’assaut qu’ila à bord, au sud de Dröbak pour prendre laforteresse par la terre. Ce n'est que le 10 avril queles navires peuvent s'amarrer à Oslo.1 3 2 Histomag - Numéro 92

Au moment de l'invasion du Danemark et de la

Norvège, le Lützow doit être engagé dans l'at-

lantique. Les allemands espèrent que l’invasion

des deux pays détourne les flottes anglaises et

françaises vers ces derniers, laissant le champ

libre au Lützow pour effectuer une nouvelle

campagne. Mais les moyens d’accompagne-

ment au navire manquent et la Home Fleet rôde

en permanence à quelques centaines de miles

de la Norvège. Le Lützow est finalement affecté

au groupe N° 5 chargé de la prise d'Oslo. Ce

dernier se compose donc des croiseurs lourds

Lützow et Blücher, du croiseur léger Emden, de

trois torpilleurs et de la 1ère flottille de dra-

gueurs de mines.

Opération Weserübung : leLützow et la Norvège.

Au moment de l'invasion du Danemark et de laNorvège, le Lützow doit être engagé dans l'atlan-tique. Les allemands espèrent que l’invasion desdeux pays détourne les flottes anglaises et fran-çaises vers ces derniers, laissant le champ libre auLützow pour effectuer une nouvelle campagne.Mais les moyens d’accompagnement au naviremanquent et la Home Fleet rôde en permanenceà quelques centaines de miles de la Norvège. LeLützow est finalement affecté au groupe N° 5chargé de la prise d'Oslo. Ce dernier se composedonc des croiseurs lourds Lützow et Blücher, ducroiseur léger Emden, de trois torpilleurs et de la1ère flottille de dragueurs de mines.

Le groupe 5 appareille le 7 avril à partir de 5h pourgagner Kiel. Le Kattegat est franchi le 8 vers midiet les navires sont en position le soir même. Aucours du voyage, le sous marin britannique Tridentlance dix torpilles sur le Lützow mais sans aucunrésultat, le navire n’est pas touché.

Les différents camouflages du Deutschland durant la Guerre civileespagnole (en haut), en 1941 (au milieu) et en 1944 (en bas)

Page 134: Histomag 92

1942, l’année terrible, bataille dela mer de Barents.

Réparé en janvier 1942, il regagne Gotenhafenen mer baltique et puis Swinemünde pour desessais et des exercices. Il rejoint la Norvège le 17mai pour tenter d'attaquer les convois alliés àdestination de l'Union Soviétique. Lors d'une sor-tie le 3 juillet 1942 en compagnie de l’AdmiralScheer et cinq destroyers/contre-torpilleurs (Z28,Z24, Z27, Z29, Z30) pour intercepter le convoiPQ17, le croiseur va s’échouer sur un haut-fond.Dégagé et réparé à Kiel, il regagne la Norvègepour se préparer à une nouvelle campagne deguerre au commerce de 4 à 6 semaines en merde Norvège. Le 22 décembre 1942, le convoiJW51B appareille du Loch Ewe à destination de lapéninsule de Kola en URSS. Ses 15 cargos lourde-ment chargés sont accompagnés d’une impres-sionnante escorte de six destroyers, de troiscorvettes, d’un dragueur de mines et de troischalutiers armés. En plus de l'escorte, une cou-verture à distance est assurée par les croiseurslégers Sheffield et Jamaica et deux destroyers(Force R). Sans connaissance de ce déploiement,les allemands disposent des croiseurs lourds Hip-per et Lützow, accompagnés de six destroyerspour faire la chasse à ce convoi. Les combats sontassez confus en raison de la météo particulière-ment mauvaise et des ordres imprécis, provo-quent des pertes de part et d’autre. Toutefois,l’ordre donné à l'admiral Kummetz, commandantl’ensemble des forces allemandes, de ne pasengager les croiseurs lourds avec des forces enne-mis équivalentes va perturber, voire entraver, lesattaques sur le convoi. Ce dernier arrive sansaucune perte en URSS. Les navires allemandsendommagés comme l’Admiral Hipper regagnentla Norvège. Cet échec provoque la colère d'Hitleret la chute du Grand Admiral Raeder, partisan dela flotte de surface, qui est débarqué le 30 janvier1943 et remplacé par Dönitz, son rival, convaincului de la suprématie de la flotte sous-marine. Lesgrands bâtiments de surface, jugés inefficacesdoivent être désarmés.

1 3 3 Histomag - Numéro 92

Le 11 avril le Lützow reprend la mer en directionde Kiel pour réparations. Il a moins de chance quetrois jours plus tôt puisque le sous-marin Spearfishle torpille, provoquant des dégâts sérieux puisqueses deux hélices et son gouvernail sont arrachéset la coque arrière fortement endommagée. C´està partir de l´hauteur du Skagen au Skagerrak quele Deutschland regagne Kiel à la remorque.

Avril 1940 à juin 1941

A son arrivée à Kiel, le constat des dégâts estimpressionnant. Ces derniers nécessitent prèsd’une année de réparations et de modernisa-tions. Comble de malchance, le 9 juillet 1940, lorsd’un raid britannique sur le port de Kiel de huitbombardiers Whitley du squadron 10, une bom-be touche le navire à tribord. Elle traverse deuxponts mais sans exploser. Le Lützow n’est remisen service que le 31 mars 1941. Le 12 juin il quitteKiel sous forte escorte (trois destroyers/contre-torpilleurs et deux torpilleurs) pour gagner laNorvège mais cet appareillage n'échappa pas auxbritanniques. Le 13 juin, un Bristol Beaufort dusquadron 42 du Coastal Command, le torpille enmer du Nord. Le projectile touche le navire enplein milieu inondant les compartiments machi-nes. Le navire doit remettre le cap sur Kiel par sespropres moyens après une réparation provisoireUne nouvelle indisponibilité de six mois commen-ce.

Le Lützow le 14 avril 1940au retour de l'opération Weserübung

Page 135: Histomag 92

Les travaux de refonte s’achèvent le 15 mars1944. Le Lützow est utilisé alors comme navire-école pour les élèves-officiers de la Kriegsmarine.En juin 1944, les croiseurs lourds Prinz Eugen,Lützow, Admiral Scheer et les contre-torpilleursde la 6ème Zerstörer Flottille sont regroupés pourformer un groupe de combat qui prend bientôt lenom de son amiral commandant: le groupe Thie-le. A partir du 23 juin le Lützow et le Prinz Eugenfont une première apparition dans les eaux finnoi-ses en transportant munition et des pièces de flakau secours des troupes terrestres. Trop exposé auxraids aériens à la base navale Aspö en Finlande leLützow rentre à Gotenhafen le 8 juillet 1944. C’estlà qu’a lieu la dernière revue navale à l´occasiondu changement du «  chef de la flotte  » de laKriegsmarine. Les croiseurs lourds Admiral Hipper,Prinz Eugen, Lützow et Admiral Scheer et lescroiseurs légers Köln, Leipzig, Nürnberg et Emdenparticipent à l’évènement. Les semaines suivan-tes le Lützow continue à « faire la navette » dansles eaux orientales de la mer baltique tout étantde plus en plus mis en danger par les avionscuirassés russes. Le 8 aout 1944, aux chantiersnavals de Gotenhafen on remplace alors les piè-ces de flak existantes de 3,7cm et de 2cm simplepar 8 pièces de 4cm Bofors et six pièces de flak2cm double. Le 24 septembre, le Lützow participeavec le Prinz Eugen, deux contre-torpilleurs etdeux torpilleurs à la couverture du convoi chargéd'évacuer les 2000 (les informations manquentsur l’effectif précis) soldats de l'armée de Laponie.

Les derniers mois de 1944 la Kriegsmarine va voirses unités de surface se concentrer en Baltiquepour soutenir l´armée de terre à tenter de stopperou au moins de retarder l'avance russe. Tous lesnavires disponibles sont ainsi utilisés pour desévacuations de civils, des transports de troupes etdes missions d'appui feu sur buts terrestres. Apartir du mois d´octobre, le groupe Thiele avec lePrinz Eugen, le Lützow, trois contre-torpilleurs etquatre torpilleurs intervient, sur demande del´armée de terre, pour soutenir les troupes alle-mandes. Les grosses pièces de marine bombar-dent les soviétiques à 20 km à l'intérieur desterres et permettent à la Wehrmacht de réaliserun front défensif autour de Memel. Cette actionarrête pour un moment l´avance russe.

1 3 4 Histomag - Numéro 92

1943: le Lützow dans la Baltique

Le 8 février, le Grand Amiral Dönitz présente leplan de désarmement exigé par Hitler. Il effectueune distinction entre les unités à désarmer immé-diatement (le Gneisenau en réparation et le GrafZeppelin encore en construction), celles nécessi-tant une remise en état longue (croiseur lourdAdmiral Hipper, croiseurs légers Köln et Leipzig)celles considérés comme encore utiles en Norvè-ge (cuirassé Tirpitz et croiseur de bataille Scharn-horst) et dont le désarmement va être différéjusqu'à l'automne. Un groupe d'entrainement(Ausbildungverband der Flotte) est égalementmis sur pied avec les croiseurs lourds Prinz Eugen,Admiral Scheer, Lützow et les croiseurs légersNürnberg et Emden. En dépit de son aversion pourles grands bâtiments, Hitler accepte de revenir sursa décision de désarmement et le 23 mars 1943,un puissant groupe de combat est rassemblé dansl'Altafjord, groupe de combat composé du Tirpitz,du Scharnhorst, du Lützow et de huit destroyers.En raison de problèmes mécaniques Lützow nestfinalement pas engagé dans les raids de ce grou-pe et il quitte son mouillage de Kaafjord le 23septembre 1943 pour regagner Kiel fin septembresous les menaces des sous-marins et vedettesrapides britanniques, échappant de peu à deuxattaques de la RAF. Le 1er octobre 1943, le croi-seur gagne Gotenhafen et malgré les sévèresbombardements du 9 octobre 1943 où 272 ton-nes de bombes sont larguées uniquement sur leport, le croiseur en ressort intact. Il quitte alorsGotenhafen pour le port letton de Libau, beau-coup plus à l´est, réduisant ainsi les risques debombardements, pour une refonte qui va duréeprès de six mois.

Le Lützow ancré dans la baiede Bogen, près de Narvik, en juin 1942

Page 136: Histomag 92

transféré dans la région d’Elbing et Frauenburg enPrusse-Orientale pour assurer des missions d'ap-pui et d'évacuation de la population en fuite. Pourla première fois les marins du croiseur sont obli-gés à tirer sur leur propre territoire (un des chefsde « tourelle Bruno » reçoit l’ordre de détruire sonvillage de Tolkemit).

Parallèlement, la Poméranie, avec Stettin et Swi-nemünde plus à l´ouest, est fortement menacée.Le 7 mars 1945, le Lützow gagne Swinemünde. Ilest amarré au bord d´un canal à l´intérieur du paysau lieu dit Lognitzer Ort pour participer à laprotection de la région de Stettin / Usedom /Wollin. La ville de Swinemünde est attaquée le 12mars par 400 bombardiers à l´aide du radar. Elleest partiellement détruite ainsi que de nombreuxde bateaux dans le port. Le Lützow, non repéré ensort indemne. Le front autour de Stettin se stabili-se, par contre la Prusse Orientale avec Danzigrisque d´être perdue. Le 22 mars 1945, portant lamarque de l'amiral Thiele et escorté par le Z31 etZ34, le Lützow regagna la région de Dantzig pourrelever l'Admiral Scheer dont les canons sontentièrement usés et qui doit rentrer aux chantiersnavals à Kiel. Là il est coulé par la RAF le 7 avril.L´action du Lützow ne retarde la prise de la villepar les soviétiques que deux jours. Jusqu´au 28mars, le Lützow couvert par les torpilleurs T23 etT28 et ses contre-torpilleurs bombardent lespositions soviétiques autour de Gotenhafen aunord de Dantzig malgré les attaques, sans succès,des avions soviétiques. Gotenhafen doit êtreabandonné le 28 mars, l´épave du cuirassé Gnei-senau est mise en barrage devant l´entrée duport. 8000 soldats et 30000 civils arrivent à êtreévacués sur la presqu’île de Hela. Le 4 avril leLützow n´a plus de munitions. Les toutes dernièresréserves de 28cm se trouvent sur le cargo auxi-liaire (Trossschiff) Franken qui attend en mer prèsde Hela. Dans la nuit, en plein brouillard, on arriveinaperçu à transférer les munitions sur le croiseur.Le cargo coule peu après le 8 avril sous lesbombes soviétiques. Le soir du même jour, lePrinz Eugen et le Lützow sont sécurisés par troiscontre-torpilleurs et un torpilleur et reçoiventl´ordre à se rendre à Swinemünde. Le Lützowregagne le même endroit au Lognitzer Ort qu´unmois auparavant. Le soir même de l´arrivée il estrepéré par un avion de reconnaissance et les volsde reconnaissance continuent sans arrêt. Le 13avril, il subit une première attaque aérienne, maisun plafond trop bas réduit l'efficacité du bombar-dement.

1 3 5 Histomag - Numéro 92

Les bombardements terrestres intensifs appor-tent deux problèmes : une consommation d´obusnon prévue et jamais vue auparavant, en secondlieu une usure rapide des canons. Le ravitaille-ment, les réparations dues aux attaques aérien-nes, l´usure du matériel et le transport des troupesfont que les navires prennent sans cesse le relaisentre port, chantiers navals et secteursd´opérations. Rarement tout le groupe est aucomplet. Plusieurs fois, l’Amiral Thiele doit trans-férer son pavillon entre le Prinz Eugen, le Lützowet l’Admiral Scheer.Après Memel le groupe se voit en urgence dirigervers l´ile Ösel (Saaremaa / Estonie) et sapresqu´ile Sworbe où à partir de début novembrele Lützow et deux contre-torpilleurs vont au se-cours aux troupes allemandes en retraite et arri-vent à stabiliser le front. Le Lützow rentre àGotenhafen pour faire le plein de munitions detous calibres et faire mesurer l´usure des canonsde l´artillerie lourde par des spécialistes de Kruppafin de recalculer les données de tir. Deux centssurvivants du cuirassé Tirpitz, coulé le 12 novem-bre par la RAF dans un fjord en Norvège sont àbord du Lützow Une nouvelle attaque en force dessoviétiques, le 18 novembre, force le groupe àretourner prématurément à Sworbe, d´abord avecle Prinz Eugen et cela jusqu`à l´épuisement de sesmunition de 20,3cm, ensuite l’Admiral Scheerprend le relais, suivi par le Lützow. L’ensembledes navires est attaqué presque sans arrêt parl´aviation soviétique. Dans la nuit du 22 au 23novembre, la Kriegsmarine réalise l'évacuationdes troupes restantes engagées dans la pres-qu'ile. De retour à Gotenhafen, un des huit mo-teurs diesel doit être démonté et réparé. C´estseulement au 12 décembre que Lützow peutappareiller. Par miracle dans la nuit du 18 décem-bre il survit sans dommage à une attaque aérien-ne des bombardiers de la RAF qui larguent 824 tsde bombes sur le port de Gotenhafen, coulant descargos, des pétroliers et le pré-dreadnoughtSchleswig-Holstein. Par précaution le croiseur esttransféré à Pillau en Prusse-Orientale. On arrive àtrouver dans un dépôt près de Danzig des obus de28cm oubliés. Le 15 janvier l´armée rouge com-mence l´attaque sur la Prusse Orientale. AussitôtLützow reprend la mer. Le 7 mars 1945, le PrinzEugen, le prédreadnought Schlesien et le croiseurléger Leipzig (groupe Rogge) accompagnés parles Z31 et Z34 opèrent au profit des troupesallemandes de Gotenhafen avant d'être rejointspar le Lützow. Le 8 février 1945 le Lützow seul est

Page 137: Histomag 92

par faire sauter les tourelles de 28cm et de 15cm.A l´intérieur de la coque sont déposés des chargesà minuteries et à l´extérieur des mines tout aulong de la coque. Un feu de mazout flottant surl´eau monte à cause de l’arrêt des pompes,surchauffées, et se répand très vite empêchant lamise d´amorces/fusées sur les mines. Les chargesà l´exception des mines explosent sans contrôlesuivant l´avance du feu. Le sabordement totalreste donc incomplet.Du lancement le 19 mai 1931 jusqu´au sabordage,le 3 mai 1945, uniquement 68 marins du Deuts-chland – Lützow ont trouvé la mort.

1945-1947, épilogue

Deux ans après la capitulation, les Russes arriventà renflouer le Lützow afin d´utiliser l'épave pourdes tests de résistance aux bombes de gros cali-bres et le faire couler dans la mer baltique.L´épave est remorquée pendant deux jours deSwinemünde à un endroit au large de Dantzig(Gdansk) Des bombes de 250 et de 500kg sontdisposées sur le navire en août 1947 et mises àfeu le 22 août, provoquant après quelques tenta-tives vaines à cause des bombes non explosées lenaufrage du cuirassé. L'épave repose aujourd'huià 113 mètres de profondeur.

Sources principales :

1  : Hans Georg Prager, PanzerschiffDeutschland – Schwerer Kreuzer LützowKoehler, Ausgabe 20012. Gerhard Koop / Klaus-Peter Schmolke.Die Panzerschiffe der Deutschland-KlassebernardGraefe Verlag, 1993Jürgen Strecker, Januar 2015

1 3 6 Histomag - Numéro 92

Le 15 avril, une autre attaque doit être abandon-née bien avant l´arrivée au but en raison dumauvais temps. Mais tout change le lendemain16 avril 1945. Ce jour là dans un ciel clair, 18Lancasters du squadron 617 (l'unité des «briseursde barrage») dont 14 armés de Tallboy attaquentle Lützow, escortés par des P51 Mustang dessquadrons 442 et 611. L'attaque a lieu à l'aube. Laproche déflagration dans l'eau d'une des tallboyde 5,4 ts cause une brèche longue de dix mètreset haute d’un mètre. Le Lützow prend une gite de56° sur tribord vers la berge et se pose dans laboue du canal. Une bombe de 250 kg touche etarrache le donjon de la tour avant avec le télé-pointeur, une autre traverse les compartiments àproximité de la soute à munitions arrière de 28cm (tourelle Bruno) mais les deux n'explosentpas. Un seul Lancaster est abattu, 7 aviateurs et12 marins sont tués. Le croiseur est alors équilibréà l´aide d´un bateau-pompe pour pouvoir formerune base d´artillerie. On arrive à fermer provisoi-rement les voies d´eau et à vider le compartimentdes groupes électrogènes no. 4 puis à les réparerpour avoir le courant nécessaire afin de continuerle combat. Toutes les pièces de DCA (flak) sontdémontées et installées sur les contre-torpilleursZ33 et Z34 pour leur renforcement. Le Lützow estalors sans aucune protection aérienne propre. Latourelle Anton de l'artillerie principale est remiseen service et le navire sert alors de batterie lourdejusqu'au 3 mai, tirant jusqu´à 42 km sur les unitésde l'armée Rouge qui encerclent Swinemünde,notamment le 28 avril. Un minimum de marinsnécessaire au fonctionnement de l´artillerie resteau bord. A court de munitions, les allemandsdécident de saborder le navire en commençant

Le Lützow en 1945

Page 138: Histomag 92

1 3 7 Histomag - Numéro 92

Le coin des lecteurs

B onjour à toutes et à tous,

Nous allons comme à notre habitude vous présenter quelquesouvrages références sur le sujet que nous avons abordés

dans le dossier thématique de ce numéro. Ensuite cesont les dernières sorties littéraires concernant leconflit qui nous intéresse tant et qui ont retenul’attention de la rédaction que nous présenterons,en espérant qu’ils vous plairont tout autant !

Page 139: Histomag 92

Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale en Belgiquede Paul Aron et José GotovitchAndré Versaille éditeur527 pages – 36,00 €

En deux cents rubriques thématiques, ce dictionnaire passeen revue la plupart des faits de société survenus en Belgiquependant la Seconde Guerre mondiale. La période reste eneffet un objet de curiosité aux dimensions multiples. Laguerre et l'Occupation ne sont pas seulement affaires destratégies militaires ou de chroniques sociales, elles tou-chent à tous les aspects de la vie quotidienne, à la gloire, àl'héroïsme, comme à la veulerie, à l'horreur ou à la fraterni-té. Il s'agit donc d'interroger ces registres divers, du contenude l'assiette quotidienne au nombre de fusillés, de la maniè-re de circuler à celle d'aimer, ainsi que les groupes et lespartis en présence, les idéologies en cause, les activitésludiques, sportives ou économiques du moment. Les auteursde l'ouvrage synthétisent de manière claire le résultat desplus récents travaux scientifiques reconnus en la matière. Ilsont profité de surcroît de l'ouverture récente des archivesessentielles de la période. Ainsi, le bénéfice ajouté à cetravail, est qu'il offre la bibliographie sélective la plus effica-ce et la plus à jour qui soit. Il transmet en particulier aupublic francophone les apports des nombreux et importantstravaux menés et publiés en Flandre qui n'ont pas trouvé (etne trouveront sans doute pas) de traduction française.Chaque notice présente d'abord une définition ou une miseen situation. Elle s'enrichit ensuite d'un développementhistorique, dans lequel on a tenté de mettre systématique-ment en évidence la portée de la période de l'Occupation,tant par rapport à l'avant-guerre que par rapport à la Libéra-tion. Ainsi chaque part de cet énorme puzzle se présentedans le contexte qui lui donne sa signification.

Bonjour à toutes et à tous,

La Belgique est un sujet assez peu connu si ce n’est du public belge lui-mêmepeut-être. Il existe ainsi, dès la guerre et l’immédiat après-guerre, de la mêmemanière que la France, des publications pour revenir sur ce conflit où leterritoire métropolitain se trouve entièrement occupé, avec les conséquencesque cela entraîne. Nous allons donc vous présenter quelques ouvrages que l’onpeut trouver sur le sujet que nous allons aujourd’hui aborder.

1 3 8 Histomag - Numéro 92

Page 140: Histomag 92

La Belgique sous l’occupation allemande (1940-1944)de Paul Struye et Guillaume JacquemynsÉditions Complexe288 pages – 52,00 €

Comment connaître vraiment les courants profonds qui traversèrent la sociétébelge sous l'Occupation 1940-1944 ? Au-delà des faits saillants, des crimes et desactes héroïques, de la résistance et de la collaboration, des déportations et dugénocide, du mariage du Roi, une société entière endura durant quatre longuesannées une situation inédite, faite de gestes quotidiens, de peurs, mais aussi de joieséphémères, d'aspirations multiples, de projets, d'indignations, de rage, d'indifféren-ce ... Beaucoup, la plupart, eurent froid, eurent faim, mais certains mangèrent bien,passèrent des vacances, poursuivirent leurs « dîners en ville ». La société ne s'est pasendormie pendant quatre ans. Mais quelles traces laissent dans l'histoire les émo-tions, les élans, les opinions quand la presse est censurée, l'expression libre traquée,quand la méfiance est reine ? Et quelles distorsions des réalités subissent les souve-nirs construits quand la fin de l'histoire est connue, quand on a rejoint le camp desvainqueurs ? Deux témoins exceptionnels nous rapportent de cette période desanalyses insoupçonnables, incontournables. Paul Struye, avocat de cassation, jour-naliste, grand bourgeois catholique, fondateur de La Libre Belgique clandestine en1940, introduit dans tous les cercles du pouvoir, politique, économique, judiciaire, aétabli tous les six mois une synthèse des courants qu'il a perçus dans l'opinionpublique. Il décrit les gens qu'il rencontre et n'épargne personne, surtout pas ceuxde sa classe, quand il dresse le tableau des accommodements avec les idéesd' « Ordre nouveau ». A travers son enquête, nous suivons toute l'évolution d'uneopinion qui a très fortement varié, dans tous les domaines, notamment à propos duRoi, au cours de la guerre. Seul le monde ouvrier échappait à sa loupe. Or, uneexceptionnelle enquête menée dans quelques milliers de foyers ouvriers de la gran-de industrie entre 1941 et 1944 par le fondateur en Belgique des sondages et enquê-tes sociologiques, le professeur Guillaume Jacquemyns de l'ULB, nous livre avec laprécision du scientifique l'évolution des conditions de vie de ces travailleurs. Mais lechercheur ne s'est pas arrêté aux données quantifiables : il a noté l'évolution desmentalités, des rapports hommes/femmes, des aspirations, des rêves et des colères.Publiés en 1945, ces deux ouvrages particulièrement passionnants, qui constituentencore la base de tous les travaux sur la période, étaient devenus introuvables.

1 3 9 His-

Page 141: Histomag 92

Breendonck 1940-1945de Patrick NeforsRacine Lannoo éditeur365 pages

Le fort de Breendonk, « Auffan-glager  » de la SS pendant laseconde occupation allemandede la Belgique, est entré dansl'histoire comme l'  «  enfer deBreendonk ». Il n’a jusqu'à pré-sent jamais fait l'objet d'uneétude historique scientifique ap-profondie. Breendonk de PatrickNefors comble ce vide impor-tant dans l'historiographie bel-ge. L'histoire du Fort depuis sacréation en 1906, la vie desprisonniers durant la période1940-1944, depuis leur entrée

au Fort jusqu'au moment où ils le quittent, morts ou vivants,des sujets comme la faim, le travail, l'hygiène, la violenceou la mort, sont analysés avec minutie dans cet ouvrage. Quisont les « bourreaux », ces Allemands et ces Flamands quiont maltraité, torturé et tué les victimes du nazisme ? En unevingtaine de portraits, on découvre les détenus de Breen-donk : au début, de nombreux juifs, et à partir de 1941-1942de plus en plus de résistants, parmi lesquels de grands chefsde mouvements de résistance ou de réseaux de renseigne-ments, comme Grippa, Bauduin, Van Praag, Louette ...

Léopold IIIde Michel DumoulinAndré Versaille éditeur400 pages – 19,90 €

Synthèse fondamentale sur LéopoldIII, cette biographie retrace l'ensem-ble de la vie du plus controversé desrois des Belges. Le but de cet ouvra-ge n'est cependant pas d'enflammerune nouvelle fois les esprits. En re-plaçant le personnage dans un largecontexte historique, les auteurs ontsouhaité contribuer, de façon nuan-cée, à l'étude d'une période trou-blée de notre passé. Le règne deLéopold III a beau avoir été le pluscourt de notre dynastie, la polémi-que qui s'est développée à l'époquen'a pas d'équivalent dans notre his-

toire. Cet ouvrage de référence, destiné au grand public, aété établi sur la base d'archives très diversifiées et souventinédites, et rédigé par des historiens belges, aussi bienfrancophones que néerlandophones.

Les chasseurs ardennais. De-bout sur la frontière, fidèles etcourageuxJean-Claude DelhezÉditions Weyrich264 pages – 32,00 €

Ils  ont sauvél’honneur del’armée belgeen 1940. Dansune débâclesans précé-dent devantl’invasion alle-mande, lesChasseurs ar-dennais onttenu. Ils  ontrésisté aux di-

visions blindées à  Bodangeet  Chabrehez, ils ont souffertsous les bombes à Namur, ils ontprotégé la retraite de l’arméesur la Dendre et sur l’Escaut, ilsont livré l’ultime bataillede la Lys, défendant pied à piedDeinze, Gottem et Vinkt.

Et pourtant, ces Chasseurs ar-dennais avaient été créés par leministre Devèze, dans les an-nées trente, pour une tout autremission : défendre la provincede Luxembourg. La Belgique ena décidé différemment en 1940,laissant les blindés allemandstraverser l’Ardenne pour percerà  Sedan et  emporter les Alliésdans la défaite. Il ne restera plusaux Chasseurs qu’à lutter pourl’honneur, abandonnés en pleincombat par des divisions fla-mandes à  qui l’extrême-droiteavait commandé de mettre basles armes.

1 4 0 Histomag - Numéro 92

Page 142: Histomag 92

SS Flamands : L’Histoire de la 27ème division SS de grena-diers volontaires Langemarckde Jonathan TriggÉditions Jourdan320 pages – 23,90 €

Pendant la guerre 1940-1945, 23.000 Flamandss'engagèrent dans la SS.11.000 Wallons choisirentégalement de porter l'uni-forme des troupes d'Him-mler. Cette différences’explique par la volontédes dirigeants des forma-tions nationalistes flaman-des de l'époque, VNV,Dinaso et De Vlag, de per-suader un maximum dejeunes gens de s'enrôleraux côtés des Allemands,dans l'espoir que les occu-pants reconnaissants ac-corderaient à la Flandreune autonomie plus gran-de, voire l'indépendance.Le communautaire, qui

s'exprimait déjà en 1917, quand le Raad van Vlaaderenproclama l'indépendance unilatérale de la Flandre, n'estjamais absent des grands événements en Belgique. Lespartis nationalistes en furent pour leurs frais : les Allemandsconsidéraient les territoires occupés comme des vaches àlait, et rien d'autre. Parmi ces 23.000 hommes, la majoritéfut contrainte à s'enrôler après le Débarquement du 6 juin1944, après la fuite précipitée en Allemagne de tous ceuxqui avaient collaboré de façon trop ostentatoire avec lesnazis, et principalement les membres des nombreusesformations paramilitaires qui fleurirent dans le pays. Pen-dant les années qui précédèrent, le noyau des volontairesflamands qui combattirent en même temps dans diversesunités de la Wehrmacht et de la SS ne dépassa pas les 6.000hommes. C’est l'histoire de ceux-ci, de la Légion SS Flandre

jusqu’à la 27ème Division SS de grenadiers volontaires «Langemarck » que l'auteur raconte. Jonathan Trigg, ancienmilitaire et spécialiste des formations de volontaires pen-dant la dernière guerre, constate que les Flamands combat-tirent courageusement, gagnant une réputation méritée debravoure et de solidité au combat. 5000 devaient mourir aufront. Il conclut qu'il fut dommage que tant de qualités aientété mises au service d'une si triste cause. L'histoire de cesjeunes hommes partis parfois combattre au nom d'unecroisade antibolchevique, mais le plus souvent au nom dunationalisme flamand …

SS Wallons : Récits de la 28ème division SSde grenadiers volontaires Walloniede Daniel-Charles LuytensÉditions Jourdan448 pages – 18,90 €

Le témoignage deceux qui, en Wallo-nie, partirent se bat-tre contre lecommunisme sur lefront de l'Est. En necherchant ni à con-damner, ni à excu-ser ou à dédouaner; ce livre nous re-plonge dans cequ'était l'ambiancedu « temps » etl'état d'esprit deceux qui en Belgi-que, comme denombreux autrespays, partirent com-

battre sous l'uniforme SS. À travers des té-moignages et des interviews qui vont deDegrelle au plus simple des SS « wallon », le livre passe en revue lesmotivations, les idéaux, les symboles, lescombats, mais aussi les plaidoyers au retourdevant les tribunaux, les procès et les empri-sonnements.

1 4 1 Histomag - Numéro 92

Page 143: Histomag 92

avec ses unités motorisées, et sur la route Troarn-Pont-l’Évêque avec l’escadron blindé ; puis l’ensemble de labrigade passe la Seine, entre La Meilleraye et Rouen. Desti-née à délivrer Le Havre, elle est finalement appelée pourremonter en Belgique ... et libérer Bruxelles. C’est cetteodyssée, marquée de durs combats face à un ennemi qui aconservé toute sa pugnacité, que proposent de retracer lesauteurs. L’ouvrage présente un rappel de l’histoire de labrigade, depuis sa création en Angleterre en juillet 1940, etle récit de la campagne de Normandie. Des annexes sontréservées à un moment de mémoire, à la commémorationde la libération de Bruxelles et à un parcours du souvenir,d’Arromanches aux rives de la Seine. L’ouvrage est illustréde nombreuses photographies et documents.

Souvenirs et Solitudede Jean ZayÉditions Belin512 pages – 9,40 €

Jean Zay (1904-1944), jeune ministrede l’Éducation nationale et des Beauxarts du Front populaire, fut constam-ment attaqué par l’extrême droitecomme républicain, juif, protestant,franc-maçon et désigné commel’homme à abattre. En octobre 1940 ilest condamné à la déportation par letribunal de Clermont-Ferrand aux or-dres de Vichy, emprisonné à Riom,jusqu'au jour où le 20 juin 1944 desmiliciens le font sortir de prison pouraller le massacrer dans un bois. Danssa cellule, pendant trois ans, Jean Zay

a écrit au jour le jour, le journal de sa captivité. Au-delà dela chronique de la vie quotidienne d’un prisonnier, c’est unregard porté sur la vie politique du moment, et une réflexionhautement politique de l’auteur sur son action passée et surla situation de la France à l’époque. C’est un livre exception-nel, à l’image de son auteur : à la fois homme politique,résistant, écrivain et penseur d’une immense culture.

La Brigade Piron en Normandiede Serge et Henny SochonOREP Éditions96 pages – 12,00 €

6 juin 1944 ! Cejour-là, la Nor-mandie est lethéâtre de laplus formidableopération aéro-portée, navaleet aérienne detous les temps,avec pour objec-tif la Libérationde la France, del’Europe, occu-pées depuisquatre ans parl’Allemagne na-

zie. Sur le rivage, cinq têtes depont sont reliées les jours sui-vants. De mi-juin au 20 août, labataille de Normandie permet lalibération de la plus grande par-tie de la province. Cependant,une large zone, la Côte Fleurie,entre l’Orne et l’estuaire de laSeine, est toujours occupée. Le17 août, les Alliés lancent l’opé-ration Paddle dont l’objectif estla libération de cette zone. Cetteopération est assignée à la bri-gade belge libre ou encore «brigade Piron », du nom de sonchef, le lieutenant-colonel JeanPiron. La brigade est placée sousle commandement du major-gé-néral Richard N. Gale, le com-mandant la 6e divisionaéroportée britannique. Forte deses 2 300 hommes et de ses 500véhicules, la brigade Piron estconstituée de trois compagniesindépendantes, alliant mobilitéet puissance de feu. Entre le 17et le 31 août, la brigade va opé-rer le long de la route côtière, deRanville à Honfleur,

1 4 2 Histomag - Numéro 92

Page 144: Histomag 92

Cette seconde édition est enrichie d'une nouvelle présenta-tion de Pierre Brossolette par Guillaume Piketty. Elle éclaireles raisons d'un destin posthume contrasté avant la périodede reconnaissance et les honneurs au Panthéon.

Portrait de résistantsde Jeanne-Marie MartinÉditions J’ai Lu – Librio Document96 pages – 3,00 €

Hommes, femmes, jour-nalistes, chercheurs,ouvriers, fonctionnaires,français, étrangers : ils ontété le bras armé de laRésistance intérieure etl'honneur de la nation. Ilss’appelaient GermaineTillion, Pierre Brossolette,Geneviève de Gaulle-An-thonioz, Jean Zay, JosephKessel, Missak Manou-chian, Charlotte Delbo-Du-dach, Jean Moulin, GilbertRenault, Edmond Miche-let. Plongés dans l'unedes périodes les plus trou-bles de l'histoire de Fran-ce, chacun d'entre eux estdevenu, par conviction,par des choix répétés, par

fidélité à ses valeurs, l'incarnation du courage. A travers cetouvrage vous pourrez découvrir le portrait de ces dix figuresde la Résistance, enrichis de leurs textes, lettres ou discours,les plus emblématiques. Un ouvrage à placer dans toutes lesmains, en particulier les moins chevronnées  : petit et trèspeu onéreux les portraits présentés ont l’avantage d’êtrecourt et très bien écrits, ce qui ne peut qu’intéresser lesdébutants en particulier.

Résistance, 1927-1943de Pierre Brossolette (textesrassemblés par Guillaume Pi-ketty)Éditions Odile Jacob204 pages – 21,90 €

Intellectuel en-gagé puis jour-naliste, pionnierde la résistanceintérieure deve-nu l'un des prin-cipaux artisansde l'unificationde l'armée desombres sousl'autorité gaul-lienne, PierreBrossolette vé-cut passionné-ment avant demourir tragique-ment en 1944.

Homme de plume autant que duverbe, mû par des idées anticon-formistes et par un puissant dé-sir de rénovation, il a légué plusde mille articles, chroniques ra-diophoniques, rapports ou dis-cours. Vingt-six de ses textesparmi les plus évocateurs sontprésentés dans ce recueil - dontla fameuse apologie aux «sou-tiers de la gloire» ou la lettrecourageuse du 2 novembre1942 au général de Gaulle. Écritsà des moments clefs de la vie deBrossolette ou en écho à desdébats cruciaux, ils plongent aucœur des défis auxquels lesFrançais, l'Europe et le mondefurent confrontés durant l'entre-deux-guerres puis les annéesnoires.

1 4 3 Histomag - Numéro 92

Page 145: Histomag 92

les délégués de la conférence d'Évian découvrirent, en 1945,que six millions d'êtres humains avaient été exterminésdans des fours crématoires installés au cœur de l'Europe. Undocument édifiant sur un fait méconnu, qui démontre lalâcheté et l'hypocrisie des dirigeants politiques, incapablesd'une décision salvatrice autre que politique._________________________

Ravensbrückde Germaine TillionÉditions Points517 pages – 11,80 €

Résistante dès juin 1940, Ger-maine Tillion (1907-2008) estarrêtée en 1942 et déportéeà Ravensbrück de 1943 à1945. Directrice d'études àl'EHESS, elle a publié desouvrages d'ethnologie etd'histoire. Elle est égalementl'auteur d'une "opérette-re-vue" rédigée à Ravensbrück,

(Points, 2007). Dans cettetroisième et dernière versionde son ouvrage sur Ravens-brück, Germaine Tillion essaiede combiner, selon ses pro-pres mots, « la grande lumiè-re blanche de l'enquête

historique, qui illumine de toutes parts les reliefs et lescouleurs, avec l'obscur rayon de l'expérience qui traverse lesépaisseurs de la matière. Non pas la seule raison, non pasla passion seule, mais l'une et l'autre ensemble, unissantleurs insuffisantes clartés pour explorer ce gouffre inconnu,le malheur des autres ». Cette édition est enrichie d'enquê-tes sur les exterminations par le gaz, menées par AnisePostel-Vinay pour Ravensbrück et par Serge Choumoff pourHartheim, Gusen et Mauthausen.

La conférence de la honte.Évian, juillet 1938de Raphaël DelpardÉditions Michalon249 pages – 19,00 €

En 1938, alorsque les Juifs es-saient de quit-ter l'enfergermanique –discriminésdans leur viematérielle, so-ciale et spiri-tuelle, broyéspar des mesu-res répressivesde plus en plusnombreuses –les pays du

monde entier refusent de leurouvrir leur porte. Devant la gra-vité de la situation, le présidentaméricain Franklin Roosevelt,pressé par des associations chré-tiennes et juives, finit par propo-ser la tenue d'une conférenceinternationale dont l'objectif serade pousser chaque pays à ac-cueillir un nombre substantield'émigrants. Vingt-neuf repré-sentants de pays se retrouvent àÉvian-les-Bains du 6 au 15 juillet1938, et chaque délégué trouve-ra des prétextes odieux pourexpliquer son impossibilité à re-cevoir une population en erranceet soumise à un grand danger.Les conséquences sont terribles.Parce qu'ils refusèrent de sauversix cent mille vies, dont des en-fants,

1 4 4 Histomag - Numéro 92

Page 146: Histomag 92

Le combat d’une viede Serge KlarsfeldÉditions J’ai Lu – Librio Document80 pages – 3,00 €

Serge Klarsfeld et sa fem-me Beate ont entreprisdepuis plusieurs décen-nies une tâche colossaleen se lançant à la poursui-te des nazis à la fin de laSeconde Guerre mondiale.Presque chacun à en têteles reportages les mon-trant dans leur chasse auxcriminels de guerre nazisafin que ceux-ci soient re-trouvés et punis. Ils ontvéritablement mené uneentreprise monumentale,aventureuse et seméed'embûches, de la gifle deBeate au chancelier Kie-singer à l'enlèvementavorté de Klaus Barbie. Atravers ce petit ouvrage

biographique, c’est toute une vie faite d’enquête, d’échecs,de succès que le lecteur peut découvrir, sans avoir à passerpar une œuvre qui serait trop volumineuse. C’est toutl’avantage de ce livre que les débutants comme les lecteursles plus chevronnés trouveront plaisir à lire et ainsi découvrirle témoignage exemplaire d'un acteur majeur de la traquedes criminels nazis et de son combat pour la justice et ledevoir de mémoire.

KZ Dorade Robin WalterÉditions Des ronds dans l’O241 pages – 24,00 €

KZ Dora était uncamp de concen-tration basé en Al-lemagne, destiné àla fabrication d'ar-mes secrètes, lesmissiles V1 et V2,en fonctionnementde 1943 à 1945.Cinq personnagesvoient leur destinse croiser au campde concentrationde Dora : Paul, élè-ve officier français,

Émile, jeune résistant insouciant,Hans, SS issu des jeunesses hit-lériennes, Bastian, officier SSd’expérience et Michael, ambi-tieux scientifique allemande tra-vaillant sur les missiles V1 et V2,armes secrètes d’Hitler. L'histoi-re emmène aussi le lecteur dansle terrible camp d'Ellrich, unsous-camp de Dora, nous mon-tre les premiers tirs réussis desmissiles V2 sur la région pari-sienne et nous dévoile commentles 2 déportés tentent de survi-vre, chacun à leur manière, cha-cun avec leurs armes, la ruse oula chance. Inspiré par l'histoirevraie de Pierre Walter, prisonnierà Dora de 1943 à 1945, son petitfils Robin nous livre ici son excel-lente bande dessinée regroupéeaujourd’hui en un seul volume,mais aussi la totalité des textesde son grand-père

, que ce dernier aécrits à l’été 1945 et qui ont étépour lui le point de départ de sonintérêt pour cette histoire. Unelecture importante pour com-prendre ce que l’univers descamps à pu être …

1 4 5 Histomag - Numéro 92

Page 147: Histomag 92

Le lecteur pourra ainsi y redécouvrir les évènements les plusmarquants qui ont conduit à cette reddition, mais aussi etsurtout le retour des prisonniers de guerre, les conditions devie dans les pays libérés, l’ouverture des camps, les suitesde la guerre, en un mot les conséquences de ce quel’effondrement du Reich allait entrainer pour la vie demillions d’hommes ayant pu survivre jusqu’ici et qui allaientconnaître enfin la paix. Cet ouvrage s’enrichit par ailleursd’anecdotes et de récits sur la vie quotidienne des habitantsqui permettent de mieux saisir le soulagement que repré-senta vraiment la fin de la guerre en Europe en 1945. Leslecteurs amateurs pourront particulièrement y trouver ungrand intérêt pour mieux saisir la fin du conflit le plusmeurtrier de l’histoire.

___________________

Les cent derniers jours d’Hitlerde Jean LopezÉditions Perrin277 pages – 24,90 €

Les derniers mois de la SecondeGuerre mondiale en Europe sontles plus sanglants et les plus des-tructeurs de tout le conflit. Chaquejour, en moyenne, 30 000 êtreshumains perdent la vie. De cetteorgie de mort, Hitler est le grandresponsable. Diminué par la mala-die, traqué, contesté ou haï parson peuple même, réduit à vivresous les bombes dans un trou hu-mide, il continue néanmoins à ali-

menter le brasier. Pour comprendre cecataclysme, Jean Lopez livre la chronique des

derniers jours de la vie du Führer, de son retour à Berlin à lami-janvier 1945 à son suicide en avril de la même année.Ce sont ses déplacements, ses proclamations, ses actes degouvernement et de commandement militaire, sa vie quo-tidienne et ses humeurs qui sont racontés grâce aux témoi-gnages de ceux qui l'entourent jusqu'à la fin : les Goebbels,bien sûr, mais aussi son chauffeur, son garde du corps, sonmédecin ... Cette chronique est aussi celle des événementsmilitaires, absolument indispensable tant la résistance de laWehrmacht aux offensives des Alliés détermine directementle temps qu'il reste à vivre au Troisième Reich et à sonmaître. Elle est enfin politique et permet d'appréhenderl'action des organisations criminelles que sont le parti nazi,la SS, la Gestapo et la Jeunesse hitlérienne comme decomprendre le poids des quatre plus puissants hommes duTroisième Reich après Hitler : Himmler, Goebbels, Bormannet Speer. Plus de cent photos accompagnent le récit. Ellesdonnent à voir la réalité de l'effondrement de l'un desrégimes les plus ahurissants du XXe siècle. Texte et imagesrépondent à la question centrale de ce livre sans équivalent: à quels desseins obéit la volonté du Führer de ne jamaiscapituler, de résister jusqu'à la mort, en entraînant ses 80millions de sujets dans l'apocalypse ?

Trois jours en maide Pierre StéphanyIxelles éditions351 pages – 23,90 €

On l’ignore souventmais la capitulationdu IIIe Reich se fit àReims, au numéro 10de la rue Jolicœur,devenue aujourd’huirue Franklin Roose-velt, dans la nuit du 6au 7 mai 1945. Com-mençait alors troisjours où la paix allaitenfin éclore. Le 7 mail’accord sur la reddi-tion des troupes alle-mandes était signé,

mettant fin aux hostilités sur levieux continent. Le 8 mai cettegrande nouvelle était annoncéede part le monde et le cessez-le-feu était décrété à 23 heures. Le9 mai est cependant la seuledate retenue par l’ancienneUnion soviétique, encoreaujourd’hui, puisqu’elle voulutavoir à Berlin un second engage-ment de reddition plus conformeà ses vœux, donnant plus degrandeur à cet acte devant cloreleur grande guerre patriotique.Ce sont ces trois jours en maique Pierre Stéphany a tenté deretracer, mais également les se-maines qui ontprécédé cette ca-pitulation, chez les Alliés, chezles Soviétiques, mais aussi chezles Allemands à Berlin.

1 4 6 Histomag - Numéro 92

Page 148: Histomag 92

Les maîtres de l’airde Donald MillerÉditions Michel Lafon700 pages – 22,50 €

1942, l'Angleterre est seule contre l'Allemagnenazie. De jeunes Américains de tous milieux et detoutes origines, noirs ou blancs (étudiants de Har-vard, paysans ou futures personnalités telles queJimmy Stewart et Clark Gable), vont prêter main-forte aux Alliés pour vivre la grande aventure ettraverser l'Atlantique à bord de leur avion. Souventau péril de leur vie. La Seconde Guerre mondiale

aurait-elle pu être gagnée sans l'aide de cette 8e AirForce ? Pas sûr. Car ces aviateurs qui sont arrivés auxportes de l'Allemagne nazie avant même les forcesalliées ont usé de stratégies et de méthodes inno-vantes grâce auxquelles l'ennemi a pu être déstabi-lisé puis paralysé ... Quand les Britanniquesattaquaient la nuit, eux bombardaient en plein jour,détruisant au passage chemins de fer, raffineries depétrole, gares de triage, usines ... Mais la victoire aun prix, et cette unité a payé très cher sa contribu-tion à la campagne alliée : 26 000 tués – plus quedans la marine américaine –, 10 561 avions perdus,14 000 blessés et 33 000 prisonniers de guerre.S'appuyant à la fois sur des témoignages, des jour-naux intimes et des documents officiels, Millerretrace l'épopée de cette unité aérienne et nousplonge dans l'intimité de ses jeunes aviateurs, met-tant l'accent sur leur courage face au danger et à lapeur. Dans ce livre qui se lit comme un roman,l'auteur dresse un portrait touchant de ces héros deguerre, qui fut la plus meurtrière du XXe siècle.

1 4 7 Histomag - Numéro 92

Page 149: Histomag 92

Histomag LA SECONDE GUERRE MONDIALE PAR DES PASSIONNES POUR DES PASSIONNES - WWW.39-45.ORG /HISTOMAG

39-45

Prolongez votre lectureavec les suppléments multimédia d’Histomag sur le Forum

Cliquez ou Flashez le QR-CODE ci-dessous