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Les hors-séries Hors-série N° H26 - Lundi 9 juin - ISSN / 1772-9742 - 21 Le guide du LBO Aspects juridiques et fiscaux Crises financières et obsolescence réglementaire Par Alain Gauvin, docteur en droit, avocat, Lefèvre Pelletier & associés p. 53 Actualité

Hors-série N° H26 - Lundi 9 juin - ISSN / 1772-9742 - 21 · C’est dans cette société holding que pourront investir les dirigeants et salariés de la société cible, l’investissement

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Les hors-séries

Hors-série N° H26 - Lundi 9 juin - ISSN / 1772-9742 - 21 €

Le guide

du LBO

Aspects juridiques et fiscaux

Crises financières

et obsolescence réglementaire

Par Alain Gauvin, docteur en droit, avocat,

Lefèvre Pelletier & associés p. 53

Actualité

Couv HS 24-fiscLBO 2/06/08 16:38 Page 3

ASPECTS JURIDIQUES ET FISCAUX D’UN LBO

Pour faire simple, il est possible de décrire une opération de LBO comme étant uneopération par laquelle un ou plusieurs investisseurs font l’acquisition d’uneentreprise (la société cible) via une société holding qui s’endette autant que lacapacité de remboursement de la société cible le permet. La société holding sera

capitalisée par les investisseurs, uniquement à hauteur du solde du prix d’acquisition majo-ré des coûts d’acquisition (y compris les coûts de la dette). C’est dans cette société holdingque pourront investir les dirigeants et salariés de la société cible, l’investissement de ceux-ci, ainsi que les «incentives» qui leur sont proposés, constituant ce qui est courammentappelé le «management package».Dans la réalisation d’une opération de LBO, il est habituel que plusieurs cabinets d’avocatsinterviennent ; ils représentent respectivement les investisseurs acquéreurs, le vendeur, lesbanques seniors, les mezzaneurs, et enfin les dirigeants investisseurs.Le rôle du cabinet d’avocats choisi par les investisseurs est multiple. Le LBO est d’abord uneopération d’acquisition dans laquelle les avocats interviennent pour réaliser l’audit juri-dique et fiscal, pour rédiger le contrat d’acquisition et la garantie de passif et pour analyseret résoudre les différentes questions réglementaires devant être traitées préalablement à laréalisation de l’acquisition (droit des concentrations français et/ou européen, consultationdes comités d’entreprise, etc.). Le cabinet d’avocats interviendra également pour détermi-ner la structuration fiscale et juridique de l’opération, et pour décrire le schéma de la remon-tée des cash-flows de la société cible vers la holding.Les autres opérations auxquelles le cabinet d’avocats prête sa plume sont ensuite, notamment :– la négociation et la rédaction des contrats de prêts bancaires et mezzanines avec les dif-férentes garanties et sûretés qui sont consenties aux banques ;– la rédaction du (ou des) pacte(s) d’actionnaires qui définiront les relations, non seulemententre les actionnaires, mais également entre les actionnaires et la direction de la société cible ;– les différents actes susceptibles de constituer le «management package» (émission devaleurs composées telles qu’ABSA ou BSA, contrat d’option, plan de stock-options, établis-sement de FCPE).D’un point de vue juridique et fiscal, l’acquisition par LBO est une opération complexe et faitappel à des domaines du droit très diversifiés. L’objet du présent cahier est donc de décri-re les principales questions d’ordre juridique et fiscal qui se posent dans le cadre de cesopérations, en présentant à chaque fois à ses lecteurs le dernier état de l’analyse juridique.Pour des raisons de simplicité, seules seront traitées les questions liées à l’acquisitiond’une société cible française.

Jean-Luc Bédos, responsable du pôle private equity du cabinet Lefèvre Pelletier & Associés

GUIDE LBO

■ Sommaire■

1 Actualité des principales étapes d’une opération d’acquisition par LBO p.7

1.1 Une accélération du calendrier p.7

1.2 Les audits de la cible et «vendor due diligence» p.8

1.3 Des term-sheets bancaires de plus en plus complets p.8

1.4 Les «build-up» p.9

1.5 Rééquilibrage des rapports entre investisseurs et managers p.9

2 La structuration fiscale du LBO p.10

2.1 La mise en place d’une structure d’acquisition p.10

2.1.1 La mise en place d’une intégration fiscale p.10

2.1.2 La déductibilité des coûts de financement p.10

2.1.3 La déductibilité des coûts d’acquisition non financiers p.13

2.2 La gestion des flux de résultat p.13

2.2.1 Les flux entre la société cible et la société holding p.13

2.2.2 La fiscalité des investisseurs p.14

3 Financement d’une opération de LBO p.16

3.1 Les modes de financement proposés p.16

3.1.1 La dette senior p.16

3.1.2 La dette mezzanine p.17

3.1.3 La tranche «second lien» p.17

3.1.4 Les obligations «high yield» p.18

3.1.5 Le refinancement des dettes de la société cible p.18

3.2 Les techniques contractuelles utilisées p.19

3.2.1 Les clauses usuelles p.19

3.2.2 L’organisation de la subordination p.19

3.2.3 Les mécanismes de «debt push down» p.20

3.3 Les garanties accordées p.21

3.3.1 Gage de compte d’instruments financiers p.21

3.3.2 Délégations p.22

3.3 Cessions de créances professionnelles à titre de garantie p.22

3.4 La fiducie p.22

3.4 Les risques juridiques encourus p.23

3.4.1 Prohibition de l’assistance financière p.23

3.4.2 L’abus lié aux conventions de trésorerie p.24

3.4.3 La fusion rapide p.24

3.4.4 La responsabilité des prêteurs p.25

4 Le management package p.26

4.1 Evolutions, critères et contraintes p.26

4.1.1 Le management package, une question devenue centrale dans les négociations p.26

4.1.2 Structure de l’investissement des managers p.26

4.1.3 Eléments de mesure de la performance d’un LBO p.27

3

5

■ Sommaire■

4.2 Les supports des management packages p.28

4.2.1 Les accords contractuels p.28

4.2.2 Mécanismes légaux d’intéressements des salariés et mandataires sociaux :

outils d’intéressement du deuxième cercle de managers p.30

4.2.3 Emission de valeurs mobilières p.31

4.3 Eléments de précaution p.34

3.1 Des mécanismes devant impliquer un risque d’investisseur p.34

3.2 Des mécanismes devant être anticipatifs p.34

4.4 Principales évolutions récentes p.34

4.4.1 Une évaluation des packages p.34

4.4.2 Vers un package pour tous les salariés ? p.35

4.4.3 Des managers prêteurs p.36

4.4.4 Des managers surreprésentés au capital (mécanisme dit de «reverse ratchet») p.36

5 Les pactes d’actionnaires p.37

5.1 Protection des actionnaires financiers : une liberté «encadrée» des dirigeants p.37

5.1.1 Pour les actionnaires financiers, le statut classique de l’actionnaire est insuffisant p.37

5.1.2 La participation directe des actionnaires financiers à la gestion n’est pas une option p.37

5.1.3 La tentative de création d’un statut d’actionnaire «impliqué», sans être «substitué» au management p.37

5.2 L’organisation du contrôle du capital p.39

5.2.1 Clauses de confidentialité et de non-concurrence p.39

5.2.2 Clauses d’exclusion p.39

5.2.3 Restrictions aux transferts de valeurs mobilières p.39

5.2.4 Clauses de sortie p.40

5.3 La sortie du LBO : un exercice délicat p.41

5.3.1 L’introduction de la société en bourse p.41

5.3.2 La cession industrielle de la société p.41

5.3.3 Le LBO secondaire p.41

6 La soumission des acquisitions par LBO au contrôle des concentrations en France p.43

6.1 Des règles spécifiques de calcul des seuils de chiffre d’affaires entraînant une notification p.43

6.2 Toutes les acquisitions ne sont pas soumises au contrôle des concentrations p.44

6.3 Des allègements de procédure sont possibles p.44

6.3.1 Analyse concurrentielle p.44

6.3.2 Instruction du dossier de notification p.44

6.4 Anticiper les problèmes de concurrence p.45

7. Traitement du LBO en difficultés p.46

7.1 Les contraintes spécifiques aux opérations de LBO p.46

7.2 Les critères de choix entre des solutions variées p.46

7.2.1 Mandat ad hoc et conciliation p.46

7.2.2 Sauvegarde p.48

7.2.3 Redressement judiciaire p.49

7.2.4 Liquidation judiciaire p.50

7

A u début des années 2000, le marché desfusions-acquisitions a été marqué par deuxphénomènes :

– pour des raisons différentes, un grand nombre d’opéra-tions de transfert d’entreprises ont pris la forme de LBOconduits par des fonds d’investissement ;– de plus en plus d’opérations de transfert d’entreprisesprennent place entre deux fonds d’investissement (onparle alors de «LBO secondaire»), ou constituent principa-lement une opération de recapitalisation où les action-naires financiers opérateurs de la première acquisition enLBO conservent le contrôle ou une participation substan-tielle dans le groupe objet de l’acquisition.Ces deux phénomènes ont conduit à un accroissement dunombre et à une «accélération» des calendriers des acqui-sitions sous forme de LBO. Ainsi, si dans les années 1990,il était habituel de considérer qu’une opération d’acquisi-tion par LBO pouvait prendre entre trois et six mois, iln’était pas rare depuis 2000 que de telles opérationssoient «bouclées» en moins d’un mois. Toutefois, depuisl’été 2007, un troisième facteur doit être pris en compte :les banques et les mezzaneurs, faisant face à un retourne-ment de marché, ont sensiblement allongé leurs délais deprise de décision, ce qui ralentit d’autant le calendrier del’ensemble de l’opération.Le descriptif qui suit de ces différentes étapes porte essen-tiellement sur les opérations dites de «mid-cap» (soit unevalorisation d’entreprise allant de 30 millions à 500 mil-lions d’euros).

D ans nombre d’opérations, le ou les vendeurscommencent par saisir une banque d’affaires ouun intermédiaire financier afin que ceux-ci «met-

tent» sur le marché soit un groupe de sociétés, soit unebranche/division d’un grand groupe.Si, il y a quelques années, ce processus de mise sur le mar-ché était structuré autour de trois étapes (une premièreétape de «teasing» afin d’intéresser le plus grand nombred’acheteurs individuels ou financiers possible ; puis une

étape de «short list» à laquelle ne participaient que les can-didats présélectionnés, suivie, enfin, d’une période d’exclu-sivité réservée à un seul acheteur potentiel), il est de plus enplus courant que la période de teasing soit supprimée, etque les acheteurs potentiels soient amenés, dès une pre-mière étape, non seulement à faire connaître leur intérêtpour l’acquisition, mais également l’intégralité des condi-tions dans lesquelles cette opération pourrait prendre place.Il est aussi courant que les vendeurs établissent, dès ledébut du processus de vente, non seulement un «informa-tion memorandum», mais aussi une synthèse d’auditcomptable, commercial et juridique (dite «vendor due dili-gence») et un projet de contrat d’acquisition.Ainsi, en même temps qu’il transmet une offre détaillée,l’acquéreur intéressé doit faire connaître ses commen-taires sur le projet de contrat d’acquisition, ainsi que lespoints spécifiques d’audit pour lesquels il désire recevoirun complément d’information.La lettre d’intention est souvent accompagnée des «term-sheets» du financement, tant senior que mezzaneur, ceciafin de conforter les vendeurs sur la faisabilité rapide del’opération.Il faut remarquer que cette accélération du calendrierrépond à l’attente aussi bien du vendeur que de l’acqué-reur. Le vendeur veut céder et percevoir son prix le plusrapidement possible. L’acquéreur, fonds d’investissement,préfère entrer dans un processus court où il limitera sescoûts (notamment s’il n’est finalement pas retenu).D’un point de vue juridique, la principale question concer-nera le caractère irrévocable ou pas («binding» ou «nonbinding») de la lettre d’offre. En l’occurrence, même si ven-deur et acquéreur ont, a priori, des intérêts divergents(l’acquéreur cherchant, à ce stade, à s’engager ad mini-ma), il est rare, en droit français, qu’une lettre d’offreconstitue un réel engagement irrévocable d’acquérir. Ilrevient donc au vendeur et à ses conseils d’apprécier ledegré de «volonté de faire» de chaque candidat acquéreur.Pour ce dernier, l’équilibre à trouver consiste à présenterune offre la plus complète et négociée possible (compre-nant non seulement les conditions de prix, mais aussi lesprincipales stipulations du pacte d’actionnaires et dumanagement package, ainsi que les term-sheets ban-caires), tout en se préservant encore quelques portes desorties, sans oublier les conditions suspensives habi-tuelles dont la réalisation ne dépend pas de l’une ou

1.1Une accélération

du calendrier

1-Actualité des principales étapes d’uneopération d’acquisition par LBO

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saisis très en amont de l’opération. Cette saisine est sou-vent facilitée par le fait que certains investisseurs tra-vaillent de façon régulière avec les mêmes banques, ce quileur permet de s’assurer une réactivité très forte de celles-ci à la présentation de toute nouvelle opération.L’appréciation des banques et des mezzaneurs, sur uneopération envisagée, avant même la signature de la lettred’intention, est donc un phénomène courant. Ce phéno-mène est renforcé par le fait que lorsque les appels d’offresont lancés, chaque investisseur potentiel ou potentielle-ment intéressé à intérêt à s’attacher l’exclusivité d’unebanque.De leur côté, les banques ont développé des term-sheetsbancaires relativement standard pour tout ce qui concernele mécanisme même de l’opération de prêt (conditionssuspensives, garanties, mécanisme de mise à dispositiondes fonds), qui leur permet de réagir rapidement.De ce fait, les term-sheets bancaires sont de plus en plusdéveloppés et complets, et contiennent, dès leur premièreémission, la quasi-totalité des principaux termes ducontrat de prêt à venir. Ceci vaut tant pour la dette seniorque pour la dette mezzanine.Il faut également remarquer que lesdits contrats contien-nent des déclarations qui s’apparentent de très près àcelles qui figurent habituellement dans des garanties depassif et sont en l’espèce faites, non pas par les vendeursde la cible, mais par l’acquéreur/emprunteur.

L ’un des objectifs des fonds d’investissement,lors de l’acquisition de sociétés dites de«small cap» ou de «mid cap», est d’agréger,

autour de cette société, d’autres sociétés ou desfonds de commerce du même secteur d’activité. Cesopérations successives d’acquisition constituent ceque la pratique qualifie de «build-up». La structurejuridique (et fiscale) de ces acquisitions dépendratrès largement de l’identité de l’acquéreur : la sociétéopérationnelle objet de l’acquisition initiale ou, direc-tement, la société holding de tête du groupe. De cechoix dépendra, par exemple, l’identité de l’emprun-teur de la nouvelle dette, et donc des actifs sur les-quels porteront les sûretés consenties au titre decette nouvelle dette. Lors d’un build-up, il est courantque les prêteurs demandent à bénéficier d’une sûreté

sur l’intégralité des actifs (anciens et nouveaux) dugroupe, et ce même si la dette n’a servi qu’à acquérirde nouveaux actifs. La négociation sur la hiérarchisa-tion des dettes et des sûretés, ainsi que l’incidencede cette nouvelle opération sur la structure d’endet-tement existante, est l’un des points-clés des opéra-tions de build-up.L’autre sujet à aborder très en amont de l’acquisition d’unenouvelle société est la question de l’intégration des «nou-veaux» dirigeants dans le «management package» mis enplace lors de la nouvelle opération. Les questions de «prixd’entrée» et du volume de leurs participations doivent êtreabordées, notamment avec les dirigeants déjà en place,très en amont dans le process d’acquisition. Ces questionssont d’autant plus délicates à traiter que ce sont le plussouvent les dirigeants de la première société qui initient etproposent des «build-up», ceci en raison de leur connais-sance de leur secteur d’activité et donc des opportunitésd’acquisition.

A près plusieurs années d’une croissance soute-nue, le marché du LBO est aujourd’hui matureet se caractérise par un haut degré de profes-

sionnalisation, notamment s’agissant des questionsliées au management package. Les managers sontdésormais tout à fait rompus à ces pratiques et sontconseillés par des avocats spécialisés auxquels sontrégulièrement associés des cabinets conseil. Cecontexte a eu pour effet d’accroître significativementles demandes des managers, notamment lors des LBOsecondaires et tertiaires. Depuis quelques mois, aprèsune période d’euphorie, la tendance semble s’inversernotamment compte tenu du ralentissement de l’activi-té économique résultant de la contraction du marchédu crédit. Ce rééquilibrage des packages, preuve com-plémentaire d’un marché réellement mature, se traduitpar un retour au principe fondamental des opérationsde private equity que constitue la recherche d’un ali-gnement d’intérêts entre le capital et la compétence,sans déséquilibre excessif en faveur de l’une ou l’autredes parties prenantes.

1.5Rééquilibrage

des rapports entreinvestisseurs et managers

1.4Les «build-up»

l’autre des parties (avis des comités d’entreprise concer-nés, saisine des autorités européennes ou nationales enmatière de respect du droit des concentrations, parexemple).Cette obligation de présenter rapidement une offre la pluscomplète possible a amené les acquéreurs, afin de limiterleurs risques, à structurer leur prix d’acquisition de façonde plus en plus conditionnée (conditions de niveau de tré-sorerie, de résultats, de BFR nominatif, etc.) et de plus enplus étalé dans le temps (earn out, crédit vendeur, com-plément de prix, etc.).

I l est assez courant que les vendeurs organisentune «vendor due diligence», dont la synthèse estremise aux acquéreurs potentiels, en même

temps que l’«information memorandum». Cette «vendor due diligence» ne couvre souvent que lesaspects comptables et financiers de la société ou du grou-pe de sociétés cédé. Il est plus rare qu’une «vendor duediligence» englobant les questions de nature juridique soitétablie. En matière juridique, il est plus courant qu’une«data room» soit organisée, mais qu’elle ne soit ouverte,pour chacun des acheteurs intéressés déclarés, que pourune durée assez courte (de deux à cinq jours).Ce raccourcissement des délais laissés à l’acquéreur pourconduire des audits est, bien entendu, préjudiciable à uneanalyse approfondie de la société cible et, à notre sens, nepeut se concevoir, sans risques, que dans le cadre d’opé-rations de LBO secondaires ou si l’un des acquéreurspotentiels a déjà, pour quelque raison que ce soit, uneconnaissance relativement approfondie de la société cible.Pour ce qui concerne l’audit juridique, il faut avoirconscience qu’il est rare que celui-ci révèle les problèmesréels que peut rencontrer une société, principalementparce que, soit lesdits problèmes ne sont pas connus despersonnes chargées de la vente au sein de la société, soitces problèmes n’ont pas de traduction juridique.Les points, qu’une «due diligence» juridique permet toute-fois de révéler assez facilement, sont les suivants :– la qualité de l’organisation de la société ou du groupecible (notamment en matière de droit des sociétés et decontentieux) ;– la nature et l’importance des contentieux en cours (mais,malheureusement, pas celles des contentieux potentiels) ;

– les questions de droit social ;– les questions relatives au droit immobilier (propriété desimmeubles, baux commerciaux, etc.).Les audits juridiques en matière immobilière révèlent trèssouvent des problèmes non traités (problème de surfaceréelle, défaut de certificat de conformité, baux commer-ciaux peu équilibrés, etc.).L’audit de nature fiscale doit faire apparaître relativementaisément le niveau de risques pris, en la matière, par lasociété.Pour ce qui concerne le calendrier des audits, il y a unedizaine d’années, un audit ne commençait à être conduit,soit une fois qu’il n’existait plus qu’un nombre limité d’ac-quéreurs («short list»), soit même une fois qu’un accordsur les grands principes avait été trouvé entre le vendeuret l’acquéreur. Il n’était pas rare qu’un contrat d’acquisitionsoit signé avec, comme condition suspensive, la réalisa-tion satisfaisante des audits (tout en évitant, en droit fran-çais, le caractère potestatif d’une telle clause).Les audits devant être de plus en plus souvent conduitsconcomitamment avec les premières étapes d’une acqui-sition, il est pratiquement inenvisageable, à l’heure actuel-le, de voir la conduite des audits constituer une conditionsuspensive à l’opération.A notre sens, si les risques strictement juridiques peuventêtre couverts par un texte correct de garantie de passif, enrevanche, pour ce qui concerne les aspects financiers etcomptables, il est important de couvrir ces risques par desclauses, intégrées dans le contrat d’acquisition, spéci-fiques. Les deux clauses les plus répandues sont (i) celleprévoyant la vérification, avant le closing, d’un certainnombre de points comptables (situation nette, Ebitda,niveau de trésorerie, dette nette, etc.), et (ii) une claused’ajustement de prix fondée sur des critères d’Ebitda, dedette nette ou de résultat (cette clause d’ajustement deprix doit toutefois s’inscrire dans un calendrier et une pro-cédure de mise en œuvre encadrés et précis).

D ans tout LBO, les banques et les mezzaneurssont, bien entendu, la clé de voûte, au mêmetitre que les dirigeants, de l’opération.

Si, au début des années 1990, ils n’étaient sollicités par lesinvestisseurs en equity qu’une fois la lettre d’intention(voire le contrat d’acquisition) signée, ils sont maintenant

1.3Des term-sheets

bancaires de plusen plus complets

1.2Les audits de

la cible et «vendordue diligence»

que définies à l’article 39-12 du Code général des impôts,sans que soit exigée une participation directe du prêteurdans le capital de l’emprunteur. Les «entreprises liées»sont celles dont l’une détient directement ou indirecte-ment la majorité du capital de l’autre, ou y exerce en fait lepouvoir de décision, et les entreprises placées l’une etl’autre, directement ou indirectement, en droit ou en fait,sous le contrôle d’une même entreprise tierce. Désormaiscontrairement aux règles anciennes, les intérêts versés àune société mère sont susceptibles d’entrer dans le champdes limitations.Le nouveau texte introduit par ailleurs des règles de limi-tation autonomes s’agissant à la fois du taux d’intérêt etdu quantum de la dette :i) la loi maintient la limite existante de l’article 39.1.3 duCGI concernant le taux maximum admis, en l’assouplis-sant. Comme avant, les intérêts ne sont déductibles quedans la limite du montant des intérêts calculés en retenantle taux moyen annuel de référence des prêts d’une duréeinitiale supérieure à deux ans, mais la loi assouplit cetterègle en autorisant la déduction d’un intérêt à un tauxsupérieur si l’entreprise prouve que ce taux correspond àcelui qu’elle aurait obtenu d’organismes financiers dansdes conditions analogues ;ii) les intérêts ne seront intégralement déductibles que sileur montant n’excède pas la plus élevée de ces troislimites: 1) la limite d’endettement global égal à 1,5 fois le montantdes capitaux propres et non le montant du capital socialcomme auparavant. Pour l’appréciation de ce seuil, ilconvient de retenir la définition comptable des capitauxpropres : le capital, les écarts de réévaluation, les réserves,le report à nouveau, les provisions réglementées et lerésultat net de l’exercice,2) la limite de couverture d’intérêts qui ne doivent pasdépasser 25 % du résultat courant avant impôt majoré decertains éléments,3) la limite correspondant au montant des intérêts reçusdes sociétés liées, permettant d’exclure de ce dispositif lessociétés qui jouent le simple rôle d’intermédiaire.Ces règles sont susceptibles d’impacter les LBO dans les-quels une partie du financement serait assurée sous formede dettes auprès d’un actionnaire, ou plus largement d’une«société liée», ce qui peut rendre non déductible tout oupartie des montants dus à un fonds d’investissement typeFCPR (financement sous forme d’OC, par exemple).Si la fraction des intérêts qui excèdent la plus élevée deslimites est inférieure à 150 milliers d’euros, ces intérêtspourront néanmoins être déduits.

Dans le cas contraire, ces intérêts devront être réintégréset pourront être déduits au titre d’exercices ultérieurs,après application d’une décote de 5 % à compter de ladeuxième année.Des règles spécifiques sont également prévues pour lesgroupes consolidés fiscalement. Dans les groupes inté-grés, le dispositif de réintégration des intérêts s’applique-ra pour la détermination du résultat individuel des sociétésmembres. En revanche, les intérêts réintégrés aux résul-tats ne pourront pas être reportés pour être déduits desrésultats individuels. Toutefois un mécanisme particulierpermet de neutraliser pour la détermination du résultatd’ensemble une fraction des intérêts rapportée aux résul-tats individuels, ce dispositif conduit en pratique à déter-miner le montant des intérêts non déductibles au niveaudu groupe concerné comme s’il constituait une seule enti-té en ne lui appliquant qu’un seul ratio et non les trois sus-visés, à savoir le ratio de couverture d’intérêts2.

2.1.2.1 L’acte anormal de gestion

L’administration française a, depuis plusieurs années,développé une doctrine en vertu de laquelle une sociétécommettrait un acte anormal de gestion lorsqu’elle s’en-dette trop fortement, par rapport à sa capacité de financerle paiement des intérêts et le remboursement de la dette.Cette doctrine l’amène à remettre en cause la déductiondes intérêts, lorsqu’elle estime que le financement en capi-tal de la société acquéreuse est insuffisant. Sans tropentrer dans le détail de ce débat technique épineux, ilconvient de souligner que cette position de l’administra-tion est largement contestée, compte tenu de l’absence detexte spécifique autorisant une telle approche et du carac-tère très subjectif de la notion d’endettement maximum.Par ailleurs, l’approche de l’administration aboutit souventen pratique à remettre en cause a posteriori l’équilibrefinancier d’une opération dans les cas où, quelque tempsaprès l’acquisition, la société holding éprouve des difficul-tés financières liées à des remontées de résultat insuffi-santes de la société cible et devient fortement déficitaire.Cette doctrine a été fortement remise en cause par leConseil d’Etat (Arrêt Andritz, 30 décembre 2003), qui a rap-pelé que l’administration n’était pas autorisée à apprécierle caractère normal ou anormal du choix entre le finance-ment par l’octroi de prêt ou de fonds propres.

2.1.2.2 Le cas des «fusions rapides»

La fusion de la holding d’acquisition et de la société cible apour effet une imputation directe des coûts supportés parla société holding sur les résultats de la société cible (la

2. Instruction 4/1-8-07 du 31 décembre 2007.

L es enjeux fiscaux liés aux opérations de LBO sontimportants, tant au regard des risques qu’ilspeuvent générer sur l’équilibre financier des

structures mises en place, que pour l’optimisation de lagestion des flux générés par l’opération. Ces enjeux s’ar-ticulent autour de deux grands sujets : la mise en placed’une structure permettant d’obtenir un effet de levierfiscal sur les coûts liés à l’acquisition (1) et les frotte-ments fiscaux liés à la remontée des flux générés par lasociété cible vers les investisseurs (2). Compte tenu del’ampleur du sujet, nous nous efforcerons surtout dedégager les grandes lignes des principes fiscaux mis enjeu, tout en essayant de mettre en lumière les évolutionssignificatives récentes résultant d’une actualité législati-ve et jurisprudentielle riche en la matière.

L es opérations de LBO génèrent des coûtsimportants qui tiennent essentiellement auxcharges de financement (1.2) et aux frais d’ac-

quisition (1.3). Dans la majorité des cas, la mise enplace d’une société holding d’acquisition supportantces coûts sera nécessaire, mais le levier fiscal lié à l’im-putation des frais butera, en pratique, sur l’absence deprofit taxable réalisé par la société holding, sauf dansles cas d’acquisitions par une société opérationnelleprofitable. La mise en place d’un accord d’intégrationfiscale entre la société holding et la société cibleconstitue donc en général un préalable (1.1).

2.1.1 La mise en place d’une intégrationfiscale

L a société holding, si elle détient directement ouindirectement plus de 95 % du capital de lasociété cible (nous supposerons qu’elles sont

toutes deux soumises à l’IS) et si elle n’est pas elle-même détenue à plus de 95 % par une autre sociétésoumise à l’IS en France, peut opter avec sa filiale pourle régime de l’intégration fiscale. Ce régime permet de

calculer un résultat fiscal d’ensemble et d’imputer lesdéficits réalisés par la société holding pendant lapériode d’intégration sur les profits réalisés par lasociété cible.La mise en place d’une intégration fiscale dès l’exercice aucours duquel la société cible est acquise présente ainsil’avantage de pouvoir imputer les frais liés à cette acquisi-tion sur les profits réalisés par la société cible.La Loi de finances pour 2004 a introduit différentesmesures visant à assouplir certaines conditions d’applica-tion du régime d’intégration fiscale et à en faciliter enconséquence la mise en place. Ces nouvelles dispositions,commentées par l’administration fiscale dans son instruc-tion du 19 juillet 20051, permettent dorénavant d’exercerl’option dans le délai de déclaration de résultat de l’exerci-ce précédent, ce qui permet par exemple à des sociétésclôturant leur exercice au 31 décembre d’exercer l’optionpour une intégration en 2006 dans le délai de déclarationde l’exercice 2005. Ce nouveau délai est également appli-cable lors de la formation d’un nouveau groupe suite àl’absorption ou l’acquisition de plus de 95 % du capital dela société mère d’un autre groupe intégré fiscalement.Par ailleurs, les modalités pour changer les dates de clôtu-re des exercices des sociétés du groupe ont été assou-plies. La modification des dates de clôture peut désormaisintervenir à tout moment au cours de la période couvertepar l’option et peut se traduire par un raccourcissement ouun allongement de la durée de l’exercice.

2.1.2 La déductibilité des coûts de financementLes intérêts liés à la dette d’acquisition supportés par lasociété holding sont en principe déductibles de son résul-tat (nota : contrairement aux frais financiers supportés pardes personnes physiques dans la même situation, ce quirenforce l’intérêt de la mise en place d’une holding pour lesLBO impliquant des personnes physiques et notamment lemanagement). Par exception, cette déduction peut néan-moins être limitée en vertu de plusieurs règles suscep-tibles de s’appliquer aux LBO et dont certaines viennentd’être modifiées.Les articles 212 nouveau et 39.1.3 du Code général desimpôtsLes règles de sous-capitalisation ont été modifiées par laLoi de finances pour 2006.Le nouveau dispositif s’applique aux entités liées, telles

2.1La mise en placed’une structure

d’acquisition

2-La structuration fiscale du LBO

1. Instruction 4 H 2 05

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tibles et les emprunts remboursables à l’initiative de l’em-prunteur. Par ailleurs, l’administration refuse la déductiondes primes correspondant à une capitalisation d’intérêts,lorsque ces primes sont susceptibles d’être capitaliséespar des mécanismes de conversion, de remboursement enaction ou d’émission de bons de souscription d’actions.L’administration considère en effet dans ces situations quela prime ne constitue pas une véritable charge pour l’émet-teur tant que le souscripteur garde la possibilité de latransformer en capital.Du côté du souscripteur (généralement les mezzaneurs),les enjeux sont essentiellement liés au mode d’impositiondes produits générés par ces instruments (taxation desintérêts et des primes courus) et à la possibilité de bénéfi-cier d’un sursis de paiement en cas de conversion ou deremboursement en action. Ceux-ci devront également s’in-terroger à l’avenir sur leur statut en tant que «sociétésliées» au regard des règles de sous-capitalisation évo-quées ci-avant.

2.1.3 La déductibilité des coûts d’acquisition nonfinanciersCes coûts peuvent représenter des sommes substantiellesdans le cadre d’acquisitions. En ce qui concerne l’impôt surles sociétés, la prise en compte de ces frais doit faire l’ob-jet d’attentions particulières sur la détermination de l’enti-té qui doit les supporter (les frais d’acquisition ne doiventpas en principe être supportés par la société cible).Leur prise en compte dans le résultat intégré ou seulementdans le résultat propre de la société holding, selon que l’in-tégration fiscale est effective ou non au moment où ils sontengagés, devient en conséquence un enjeu accru.Les frais d’acquisition de titres (ce qui n’inclut pas les fraisliés au financement, notamment) doivent être incorporésau prix de revient des titres acquis et leur déduction esteffectuée sur cinq ans (article 209 IV du CGI3).Le coût réel de ces charges d’acquisition peut être signifi-cativement réduit en fonction de leur traitement au regardde la TVA, dès lors que la TVA sur les frais liés uniquementà l’acquisition d’actions par une holding n’ayant pas d’ac-tivités autres que la détention d’action (holding «pure»considérée comme non assujettie) n’est en principe pasdéductible. La CJCE (Arrêt CIBO Participations4) a néan-moins jugé que la TVA sur les frais d’acquisition par unesociété holding est déductible, lorsque cette dernière réa-lise, en sus de son statut de holding, des prestations deservices soumises à TVA auprès de ses filiales (holding dite«mixte»). L’administration a commenté et confirmé cettejurisprudence dans une instruction du 15 octobre 2001,

n° 3 D-4-01, qui renforce l’intérêt de conserver un rôle actifd’animation et de support des sociétés holding.

L a mise en place des structures LBO supposeune étude précise de la gestion des flux, d’unepart, entre la société cible et la société holding

et, d’autre part, entre cette dernière et les investis-seurs, qui peuvent réaliser leur revenu sous forme dedividende, ou de plus-values. La fiscalité entraîneselon la nature de ces flux des frottements différentsqui doivent être pris en compte, notamment au regarddes changements récents sur le régime fiscal des dis-tributions.

2.2.1 Les flux entre la société cible et lasociété holdingLa remontée des flux de la société cible vers la société hol-ding est essentielle au financement de cette dernière. Ladistribution des résultats de la société cible peut êtreeffectuée sans frottement fiscal, dès lors que la sociétéholding bénéficie du régime d’exonération des sociétésmères et que l’intégration fiscale permet d’éviter les coûtsliés à l’imposition de la quote-part de frais et charges (saufpour le premier exercice d’appartenance au groupe de lasociété distributrice).La structure financière peut nécessiter la remontée deréserves de la société cible vers la société holding, ce quipeut permettre de refinancer cette dernière en augmen-tant éventuellement l’endettement de la société cible(«debt push-down»), par exemple par des opérations derachat d’actions ou de distributions de réserves. Ce méca-nisme n’entraîne pas de levier fiscal supplémentaire de lastructure intégrée dans son ensemble, mais peut aboutir àdes répartitions différentes du résultat fiscal entre la socié-té cible et la société holding (la réduction du résultatpropre de la société cible peut par exemple impacter le cal-cul de la participation des salariés).Ce mécanisme de «debt push-down» doit toutefois êtreappliqué désormais, en gardant en mémoire les limitationsinstaurées par l’article 212 nouveau du Code général desimpôts et applicables, selon des modalités particulières,entre une société mère et sa fille intégrée.La mise en place d’une convention d’intégration est néces-

2.2La gestion des flux

de résultat

3. Commenté par l’instruction 4/1-1-08 du 4 janvier 2008. 4. CJCE aff. 16/00 du 27 septembre 2001.

mise en place d’une intégration fiscale permet un résultatsimilaire, sous réserve des difficultés liées au «timing» desa mise en place). L’administration a commenté ces opé-rations de fusion dans une instruction du 3 août 2000, enindiquant qu’elle se réservait la possibilité de remettre encause ces opérations, soit sur le fondement de l’acte anor-mal de gestion (évoqué ci-dessus), soit sur le fondementde l’abus de droit, lorsque l’opération est effectuée dansun but exclusivement fiscal. L’administration a indiquéqu’elle s’appuierait sur un faisceau d’indices, tels que ledélai séparant l’acquisition de la fusion, le niveau de capi-talisation de la société holding, l’importance des dettessubsistant au moment de la fusion et l’exercice ou non parla société holding d’activités autres que la détention detitres.Il convient toutefois de noter que dans son instruction du19 juillet 2005 précitée, l’administration semble autoriserla prise de contrôle d’une société mère d’un groupe suiviede son absorption par la société acquéreuse au cours dumême exercice.En tout état de cause, au regard du caractère subjectif descritères retenus par l’administration, il convient d’éviter lessituations extrêmes dans lesquelles il serait difficile de jus-tifier d’un intérêt autre que fiscal à la réalisation de lafusion et qui seraient susceptibles de générer un conten-tieux avec des pénalités élevées (80 % si l’abus de droit estdémontré).Enfin, dans le cadre d’un rescrit du 23 octobre 2007, l’ad-ministration a précisé qu’elle ne remettrait pas en causeles opérations de fusion rapide entre deux structures definancement, ce qui concerne principalement les LBOsecondaires (cf. § 9.3) lorsqu’une holding acquiert non lasociété opérationnelle, mais la holding constituée précé-demment pour permettre une première acquisition de lasociété opérationnelle.

2.1.2.3 L’«amendement Charasse»

Ces dispositions extrêmement techniques visent à limiterla possibilité de générer de l’endettement dans un groupeintégré fiscalement, par l’acquisition de titres auprès departies liées. Ce texte, codifié à l’article 223 B al. 7 du CGI,s’applique lorsqu’une société acquiert à titre onéreuxauprès d’une société qui la contrôle (directement ou indi-rectement, en droit ou en fait), ou auprès d’une sociétécontrôlée par cette dernière, des titres d’une autre sociétéqui devient membre du même groupe intégré que la socié-té acquéreuse. Lorsque ces conditions sont remplies, lesintérêts sur la dette présumée créée par l’acquisition destitres ne sont pas déductibles du résultat du groupe inté-gré, et ce pendant les 15 exercices clos après la date d’ac-quisition. Ce texte sanction prévoit plusieurs exceptions,

notamment lorsque l’acquisition est en fait financée parune recapitalisation du groupe intégré et non par de ladette.La rigueur de ces principes nécessite, dans la majorité descas, une étude précise, dès lors que le texte peut s’appli-quer lors de restructurations post-acquisition de groupes,voire fonctionner comme un véritable «cheval de Troie»lorsque le groupe cible, qui devient membre d’un groupeintégré, est constitué de deux sociétés, non intégrées fis-calement avant l’acquisition, et que l’une d’entre elles aacquis l’autre au cours des 14 années précédentes auprèsd’un actionnaire la contrôlant. Ces dispositions consti-tuent un enjeu important dans la mise en place de LBOsecondaires et dans l’acquisition de groupes cibles ayantfait l’objet de restructurations internes.La Loi de finances rectificative pour 2005 a toutefois atté-nué la rigueur de ces règles à deux égards.Tout d’abord, elle restreint la notion de contrôle de fait auxsituations de détention du capital social supérieur à 40 %,alors qu’auparavant la doctrine administrative présumaitqu’une personne contrôlait une société si elle détenait unefraction des droits de vote supérieure à la minorité de blo-cage (soit 33 %) et si aucun autre associé n’en détenaitune fraction supérieure. En outre, le contrôle de fait résul-tant du contrôle conjoint par plusieurs personnes ne peutêtre retenu que si ces personnes agissent de concert. Ilapparaît donc désormais nécessaire de prouver l’existenced’un accord entre les vendeurs pour établir le contrôle defait de la société.Le second aménagement apporté instaure un nouveau casde sortie du dispositif de l’amendement Charasse. La réin-tégration des charges financières est ainsi interrompue autitre des exercices au cours desquels la société qui détientles titres de la société rachetée n’est plus contrôlée par lespersonnes qui contrôlaient la société cessionnaire aumoment de l’acquisition de la société cible.

2.1.2.4 Le cas de la dette mezzanine

Celle-ci peut prendre des formes diverses (obligationsconvertibles, échangeables, Obsa, etc.) et suscite desenjeux différents pour l’émetteur (la société holding) et lesouscripteur (le prêteur).En ce qui concerne l’émetteur, celui-ci devra s’interrogersur la question de la déductibilité des intérêts au regarddes règles de sous-capitalisation évoquées ci-dessus. Lesvaleurs mobilières composées utilisant des mécanismesd’intérêts capitalisés suscitent également des interroga-tions. En effet, l’article 39.1.1. ter du CGI autorise la déduc-tion sur la durée de l’emprunt, selon la technique desannuités actuarielles, des rémunérations autres que lesintérêts, mais exclut notamment les obligations conver-

14 15

années précédant la souscription ou l’apport, plus de 25% des droits dans les bénéfices des sociétés dont lestitres figurent à l’actif du fonds. Lorsque ces conditionssont réunies, les porteurs personnes physiques sont exo-nérés d’impôt sur le revenu à raison de l’ensemble desproduits répartis par le fonds (même postérieurement àl’expiration du délai d’indisponibilité, depuis 2002), ainsique des plus-values réalisées lors du rachat ou de la ces-sion des parts du fonds (ces revenus et plus-valuesdemeurent cependant soumis aux prélèvements sociauxde 11 %). Quant aux personnes morales, les parts deFCPR échappent aux règles de valorisation «mark to mar-ket» et bénéficient du régime des plus-values à longterme.

2.2.2.4 Le cas des non-résidents

Les non-résidents ne sont imposables en France que surleurs revenus de source française. Pour ces investisseurségalement, la fiscalité peut créer des arbitrages significa-tifs selon le mode de remontée des résultats de la sociétéholding, qui peut entraîner l’exigibilité de retenues à lasource, selon la nature du revenu. L’effet de ces retenues àla source est le plus souvent réduit par les traités fiscaux etles directives, selon des modalités qui peuvent varier d’untraité à l’autre.

Les distributions de dividendes sont soumises à une rete-nue à la source dont le taux est en principe de 25 %, maisles traités permettent en général de réduire ce taux à 15 %,voire à 5 % pour les sociétés qui détiennent une participa-tion substantielle (le seuil est en général de 10 % du capi-tal). La directive européenne sur le régime des sociétésmères permet de réduire ce taux à 0 % pour les sociétésmère de l’Union européenne, lorsqu’elles détiennent pen-dant plus de deux ans une participation supérieure à 15 %,puis 10 % à compter de 2009.De même, les plus-values sur cessions de valeurs mobilièrespeuvent être soumises à une retenue à la source de 16 %,mais uniquement lorsque le cédant détient directement ouindirectement une participation substantielle supérieure à25 % dans le capital de la société holding distributrice. Endehors de quelques exceptions, les traités fiscaux prévoientgénéralement que les plus-values ne sont imposables quedans l’Etat de la société bénéficiaire et empêchent le prélè-vement de la retenue à la source, même sur les transferts departicipations substantielles supérieures à 25 %.Les intérêts sur emprunts consentis depuis l’étranger pourfinancer la société holding sont en principe exonérés deretenue à la source en vertu de l’article 131 quater du CGI,sans avoir recours aux traités qui prévoient également desexonérations.

saire et peut également participer au refinancement de laholding, lorsque la société cible acquitte auprès de cettedernière l’impôt qu’elle aurait dû acquitter en l’absenced’intégration, notamment si l’impôt dû par le groupe etd’un montant inférieur.

2.2.2 La fiscalité des investisseursLes investisseurs réalisent leurs revenus sous la forme dedistributions de dividendes ou de plus-values et l’imposi-tion de ces revenus obéit à des règles et des taux d’impo-sition différents, selon qu’il s’agit de personnes morales,de personnes physiques, ou de FCPR. La réforme du régi-me des distributions avait entraîné la disparition de l’avoirfiscal et la suppression corrélative du précompte avait déjàsensiblement modifié les arbitrages fiscaux entre ces deuxmodes de réalisation des revenus sur les LBO.La réforme du régime des plus-values à long terme surtitres de participation détenus par les entreprises et durégime des plus-values de cession de titres réalisées pardes particuliers sont venues modifier à nouveau le paysa-ge fiscal.

2.2.2.1 Les investisseurs personnes physiques

Pour ces investisseurs, les réformes successives du régimedes distributions ont abouti à un rééquilibrage de l’impo-sition entre la réalisation de plus-values et les distributionsde résultat (29 %). En effet, les plus-values sont imposéesau taux de 18 %, auxquels s’ajoutent les contributionsadditionnelles, soit un taux effectif de 29 %. Les distribu-tions de résultats (y compris les rachats de titres) sontquant à elles imposées au taux progressif de l’impôt sur lerevenu, mais le système d’abattement de 40 % aboutit enpratique à une imposition effective au taux marginal d’en-viron 34/35 %, étant précisé que depuis le 1er janvier2008, il est possible d’opter pour une retenue à la sourcede 29 %.Par ailleurs, ces plus-values bénéficient d’un abattementd’un tiers par année de détention au-delà de la cinquième.La plus-value est donc définitivement exonérée au bout dehuit ans de détention (les prélèvements sociaux de 11 %sont en revanche maintenus), la durée de détention étantdécomptée à partir du 1er janvier 2006.Ainsi à compter de 2012, l’imposition effective des inves-tisseurs personnes physiques devrait être notoirementplus faible en cas de réalisation des gains sur LBO via descessions de titres.Enfin, sous certaines conditions, il est possible de placerces titres dans un PEA, ce qui permet également de limiterl’imposition des plus-values à 11 %.Un arbitrage entre la perception dans l’immédiat de divi-dendes bénéficiant du système de l’abattement, et la réa-

lisation de plus-values, doit donc être opéré par les inves-tisseurs personnes physiques.

2.2.2.2 Les investisseurs personnes morales

La remontée des résultats vers les investisseurs personnesmorales soumis à l’IS génère aussi des frottements fiscauxtrès différents, selon que le revenu est réalisé sous formede dividendes éligibles ou pas au régime mère-fille, ou deplus-values de cession pouvant bénéficier du régime desplus-values à long terme.En ce qui concerne les dividendes versés à des sociétés nonéligibles au régime société mère, l’imposition est au tauxplein de l’IS (soit 34,43 % contribution sociale incluse),sans élimination de la double imposition qui en résulte (lesrésultats déjà imposés chez la société holding sont impo-sés à nouveau lors de la distribution aux investisseurs).Les dividendes versés à des sociétés éligibles au régimesociété mère sont en revanche exonérés sous réserve de laréintégration d’une quote-part de frais généraux dès lorsque l’investisseur, qui doit détenir plus de 5 % du capitalde la société distributrice, s’engage à détenir les actionspendant plus deux ans (condition non applicable à destitres souscrits à l’émission). Le bénéfice du régime mère-fille a été étendu par la Loi de finances rectificative pour2005 aux actions sans droit de vote ou dont le droit de voteest partiel dès lors que l’investisseur détient par ailleursdes actions représentant au moins 5 % du capital et desdroits de vote de la société distributrice.La réalisation de plus-values sur des titres de placementou des titres de participation détenus depuis moins dedeux ans demeure taxée au taux de droit commun, soit34,43 % contribution sociale incluse.En revanche, les plus-values de cession de titres de parti-cipation sont exonérées pour les titres de participation telque définis à l’article 219 I-a quinquies du CGI, à l’excep-tion d’une quote-part de frais et charges égale à 5 % dumontant de la plus-value qui demeure imposable.

2.2.2.3 Les fonds communs de placement à risques

Les FCPR sont les acteurs naturels des opérations de LBO,ce qui s’explique notamment par le fait que leur actif doitêtre investi à plus de 50 % en titres de sociétés non cotéeset qu’ils permettent aux personnes physiques investissantpar leur intermédiaire de bénéficier d’un régime d’exoné-ration. Afin de bénéficier de ce régime favorable, les inves-tisseurs personnes physiques dans le fonds doivent s’en-gager à conserver les parts pour une durée minimum decinq ans et à réinvestir immédiatement les sommes ouvaleurs réparties par le fonds pendant cette période. Parailleurs, les porteurs ne doivent pas détenir, ou avoir déte-nu, directement ou indirectement, au cours des cinq

16 17

exemple, la tranche A d’une maturité de sept ans seraamortissable par échéances successives, tandis que latranche B d’une durée de huit ans sera capitalisée et rem-boursée in fine).Ce découpage de la dette senior permet de limiter la char-ge de remboursement supportée par l’entreprise dans lespremières années de l’opération, puisqu’une fractionimportante du prêt n’est due qu’au débouclage du LBO. Ilest cependant à noter que les investisseurs en dette LBOrecherchent de plus en plus des tranches de financementnon-amortissables en vue d’améliorer leur Ebitda ainsique leur effet de levier. Les établissements prêteurs gar-dent ainsi une marge de manœuvre pour les opérations decroissance externe.Pour tenir compte des faibles garanties qui peuvent êtreaccordées au prêteur senior (cf. 3), la dette senior bénéfi-cie, en vertu du mécanisme de subordination, d’un rangsupérieur aux autres dettes contractées par la holding. Lecontrat de prêt prévoit généralement des engagementsspécifiques à la charge de l’emprunteur, notamment en cequi concerne les informations devant être communiquéesau prêteur, plus nombreuses et fréquentes que dans unprêt classique (cf. 2.1). De même, les ratios financiersdevant être respectés par la holding sont plus stricts etplus diversifiés que dans le cadre d’un financement clas-sique (cf. 2.1).

3.1.2 La dette mezzanineLa dette mezzanine, consiste le plus souvent en des titresde créances qui permettent à terme d’accéder à unequote-part du capital de la société. Ces produits permet-tent aux prêteurs (souvent des établissements spécialisésdans ce type de prêts : fonds d’investissement, hedgefunds) d’obtenir un complément de rémunération lors dudébouclage de l’opération et d’assurer la rentabilité deleur investissement grâce à cet accès au capital. Le com-plément de rémunération est qualifié par la pratiqued’equity kicker et a pour contrepartie les plus grandsrisques pris par le prêteur mezzanine (encore appelé«mezzaneur») qui accepte un rang inférieur à la dettesenior et un décalage de sa rémunération dans le temps.Il existe une grande variété de produits mezzanine. Il estfréquent de rencontrer des obligations remboursables parannuités égales, assorties de bons de souscription d’ac-tions (Obsa) ou des obligations remboursables (Ora) ouconvertibles en actions (Oca). Ces obligations peuventbénéficier (le plus fréquent) ou non de garanties (lorsquec’est le cas, ces garanties seront alors d’un rang inférieuraux garanties de la dette senior). Les échéances de rem-boursement du capital et des intérêts peuvent égalementêtre modulées. Les intérêts peuvent ainsi être capitalisés

et n’être remboursés en tout ou partie qu’à l’échéance sousforme de prime (ils peuvent être capitalisés en totalité,comme dans le cas des mezzanines dites PIK (pay in kind),ou dépendre de la situation financière de l’entreprise,comme dans le cas des mezzanines dites pay if you can).Certains produits de dette ne donnant pas accès au capitalsont parfois assimilés aux mezzanines : c’est le cas notam-ment des produits obligataires non cotés ou des prêts àlong terme subordonnés à la dette senior. Les produitsobligataires sont d’ailleurs souvent mis en place par lesinvestisseurs eux-mêmes ou les prêteurs mezzanine encomplément de leur financement initial.Alternative à la dette mezzanine, les high-yields bonds(obligations à haut rendement) sont apparus ces dernièresannées dans les opérations d’envergure internationale. Ladette mezzanine se distingue toutefois des high yieldbonds qui sont des obligations cotées ne donnant pasaccès au capital. Ces titres offrent la possibilité aux inves-tisseurs de recourir au marché pour financer une partie del’acquisition et permettent de financer une opération avecune dilution plus faible qu’une mezzanine. Plus générale-ment, les high yield bonds ont un profil mieux adapté auxLBO que la dette bancaire classique (cf. 1.4).Par ailleurs, le second lien, produit également récent,apparu aux Etats-Unis, représente une part croissante dessources de financement dans les opérations LBO.

3.1.3 La tranche «second lien»Jusqu’à une date récente, le financement de LBO combi-nait une dette senior à deux tranches et une dette mezza-nine. C’est encore le cas classique pour les acquisitionsdites «small» et «mid-caps». Pour les autres opérationsd’un montant plus important, le financement est de plusen plus fréquemment structuré de la manière suivante :une dette senior à quatre tranches (par exemple : trancheA à sept ans remboursable par échéances successives,tranche B à huit ans remboursable in fine, tranche C à neufans remboursable in fine, tranche D correspondant au cré-dit revolving accordé à la cible pour ses besoins en fondsde roulement, remboursable par refinancement), unetranche de second lien, et deux tranches de dette mezza-nine, l’une junior, l’autre senior.En réalité, la tranche second lien, représente une des caté-gories de financements second lien, dont deux sont utili-sées dans les opérations de LBO : les second lien termloans (tranche second lien) qui s’interposent entre la dettesenior et la dette mezzanine et les second lien bond, quisont une catégorie de high yield bonds avec sûretés.Le second lien est donc une dette à long terme (neuf à dixans) qui s’intercale entre la dette senior et la dette mezza-nine, et qui est garanti par les mêmes actifs que la dette

U ne acquisition par LBO suppose un ou plu-sieurs financements adaptés à la situation dela holding, de la société cible ainsi que de ses

filiales. La pratique a depuis longtemps mis en placedes modes de financement efficaces économiquementet sécurisés juridiquement. Nous en ferons un bref rap-pel (1), avant de décrire les techniques contractuelleset les garanties mises en œuvre dans ces financements(2 et 3). Enfin, nous envisagerons les principauxrisques juridiques inhérents à ce type d’opérations (4).Précisons que les questions abordées ont toutes déjà étélargement évoquées par les juridictions françaises et par lapratique du marché. Une connaissance approfondie decertains mécanismes et de quelques problématiquesrécurrentes est toutefois nécessaire à la mise en place dufinancement d’une acquisition par voie de LBO.

D ans le cadre d’un LBO, une partie du finance-ment est tout d’abord apportée à la holdingsous forme de capital conférant aux acqué-

reurs la propriété de la holding et, indirectement, de lacible. Pour une part plus importante (les deux tiersenviron), le financement du prix d’acquisition estensuite constitué par l’endettement de la holdingselon différentes modalités.L’endettement de la holding d’acquisition prend tradition-nellement la forme d’une dette senior et d’une dette mez-zanine, le remboursement de la seconde étant subordon-né à celui de la première. La dette senior consiste en unprêt à moyen terme (entre cinq et huit ans environ) etcouvre généralement plus de la moitié des besoins definancement du LBO. La dette mezzanine, ou junior, prendquant à elle la forme d’un prêt subordonné, d’un prêt par-ticipatif ou plus fréquemment d’une émission obligatairesubordonnée généralement assortie de bons de souscrip-tion d’actions ou convertible en actions.En marge des techniques classiques d’endettement ontémergé de nouveaux instruments destinés à financer l’ac-quisition de la société cible. A ce sujet, nous évoquerons

les high yield bonds, ou obligations à haut rendement, etle second lien financing qui s’intercale entre l’endettementsenior et l’endettement mezzanine.Enfin, nous décrirons brièvement les financements accor-dés à la cible pour couvrir notamment ses besoins d’ex-ploitation. Outre les prêts classiques et les ouvertures decrédit renouvelable, le refinancement de la société ciblepeut également passer par la technique du securitisationby-out qui combine LBO et titrisation.

3.1.1 La dette senior

A côté de l’apport en fonds propres au sein de laholding, le financement du prix d’acquisition dela cible prend la forme d’une dette bancaire

dite senior (car prioritaire sur les autres dettes de l’em-prunteur). Lorsque les montants accordés sont trèsélevés, le financement senior pourra faire l’objet d’unesyndication entre plusieurs établissements prêteurs,par voie de cession ou de transfert.Outre la syndication, les banques utilisent également latitrisation des créances de l’établissement prêteur. La titri-sation consiste en une cession à une entité créée à ceteffet, qui émettra ensuite des titres ayant vocation à êtresouscrits par des établissements de crédit ou des investis-seurs (véhicules de titrisation nommés CDO collaterizeddebt obligation).Cette pratique a connu un développement important aucours des dernières années car il permet aux établisse-ments prêteurs de se défaire du risque du crédit en letransférant au marché.La dette senior présente les caractéristiques d’un prêt àmoyen terme. Ainsi, sa durée se situe généralement entrecinq et sept ans et demi, voire davantage, étant entenduque si l’opération se déroule bien, la dette sera rembourséepar anticipation afin de revendre plus rapidement la socié-té libre de tout endettement. Quant au taux d’intérêt de ladette senior, il peut être fixe ou plus fréquemment variablesur la base d’Euribor augmenté d’une marge représentantla marge de la banque. Cette marge pouvant elle-mêmevarier au cours de la vie du crédit notamment sur la base durespect des ratios financiers par l’emprunteur.Pratiquement, la dette senior est composée de plusieurstranches, classées par ordre croissant de risque, chacuneayant un taux d’intérêt spécifique en fonction de ses carac-téristiques. En effet, chaque tranche varie selon la duréede l’emprunt et certaines, subordonnées au paiement del’emprunt principal, ne sont remboursables qu’in fine (par

3.1Les modes

de financementproposés

3-Financement d’une opération de LBO

18 19

nancement plus rapide de sa dette senior ou subordon-née, sans compromettre l’activité opérationnelle de lacible. Pour cette dernière, le securitisation by-out contri-bue à l’amélioration de son image financière puisque latitrisation permet de réduire ses actifs immobilisés ou sonBFR. Enfin, pour les apporteurs de dettes du LBO, le secu-ritisation by-out aboutit à un transfert de risque sur lesinvestisseurs du marché. En effet, la titrisation peut per-mettre aux créanciers financiers de la holding d’acquisitionde transférer le risque du financement du LBO sur le finan-cement du FCC, et donc au marché.

L es techniques contractuelles utilisées dans lecadre d’un financement LBO se traduisentnotamment par un certain nombre d’engage-

ments spécifiques à la charge de l’emprunteur (cove-nants). A côté de ces obligations usuelles, le mécanis-me de subordination occupe une place prépondéranteau sein de la structuration du LBO. Les intervenantspeuvent également avoir recours à des techniques derestructuration sophistiquées telles que les méca-nismes de «debt push down».

3.2.1 Les clauses usuelles

L es prêteurs imposent aux emprunteurs desobligations de nature diverse, parfois qualifiéesde negative pledge (interdiction de consentir

des sûretés). Si ces obligations peuvent varier entre leprêt senior et le prêt mezzanine, le principe est que lesmezzaneurs ne doivent pas avoir plus de droits etd’avantages que les prêteurs senior.Les principaux engagements imposés aux emprunteurssont, entre autres :■ des déclarations et garanties : ces déclarations et garan-ties sont assez proches de celles qui sont fournies dans lecadre d’une garantie de passif. Elles doivent en principeêtre vérifiées lors de la mise à disposition des fonds et sontrenouvelées à chaque période d’intérêt ;■ des obligations d’information : l’emprunteur peut s’en-gager à fournir au prêteur ses comptes annuels, accompa-gnés des rapports de gestion et des rapports des commis-saires aux comptes, des situations intermédiaires dont lafréquence peut varier de trois à six mois, un budget

annuel, tout fait significatif susceptible d’affecter sa situa-tion financière, tout changement dans la composition deses organes sociaux ou concernant ses commissaires auxcomptes, etc. ;■ le respect de ratios financiers : l’emprunteur s’engage àrespecter certains ratios financiers définis dans la conven-tion de crédit, faute de quoi la dette devient exigible. Lesplus fréquents sont le ratio de structure (dettes finan-cières consolidées/fonds propres) et le ratio d’exploita-tion (résultat d’exploitation (Ebit) consolidés/frais finan-ciers consolidés. Les seuils à ne pas dépasser au regardde ces ratios sont fonction du plan prévisionnel d’exploi-tation (business plan) avec une marge généralementsituée entre 10 et 15%. Le contrat de prêt fait égalementréférence à d’autres ratios tels que : dette nette/Ebitda(earning before interest and taxes depreciation added) ;fonds propres/dette nette ; Ebitda/frais financiers ; cashflow d’exploitation/service de la dette, etc. ;■ la gestion de la trésorerie excédentaire (excess cashflow) : les prêteurs requièrent classiquement que l’éven-tuel excess cash flow soit utilisé en tout ou partie (et leplus souvent au-delà d’une franchise dont le montant aurafait l’objet d’une négociation) pour rembourser par antici-pation la dette senior ;■ le maintien de l’actionnariat : en cas de changementsignificatif dans l’actionnariat de l’emprunteur avant lecomplet remboursement de la dette et notamment en casde changement de contrôle (dans l’hypothèse de l’existen-ce d’un actionnaire de référence), celle-ci deviendra exi-gible par anticipation et les prêteurs pourront ainsi sortirde l’opération ;■ des limitations relatives aux actifs du groupe : l’emprun-teur s’engage à ne pas accorder de sûretés sur ses actifsautres que celles autorisées par le prêteur ou qui luisont consenties (negative pledges) et à ne pas céder lesactifs nécessaires à l’exploitation, à ne pas procéder à denouvelles acquisitions, cessions ou joint-ventures ou àdes investissements significatifs, sans l’accord du prê-teur, etc.Le non-respect de l’ensemble de ces clauses entraîne leplus souvent l’exigibilité anticipée du prêt, l’emprunteurbénéficiant parfois d’un délai pour régulariser sa situa-tion en cas de défaillance. Cette sanction est en pratiquerarement mise en jeu, mais constitue un moyen de pres-sion sur les emprunteurs et constitue un point de négo-ciation lors de la mise en place de la documentation definancement.

3.2.2 L’organisation de la subordinationLa subordination s’organise contractuellement par l’inter-médiaire de conventions de rang ou de subordination.

3.2Les techniquescontractuelles

utilisées

senior, mais subordonnée au remboursement de celle-ci.Les termes des engagements (covenant package) sontplus souples que ceux de la dette senior, ils présententnotamment plus de flexibilité au niveau des seuils. Parailleurs, en cas de procédure collective à l’encontre dudébiteur, les prêteurs second lien renoncent à leurs droitsrelatifs à l’exercice des sûretés et à certains de leurs droits,en fonction de l’étendue de cette renonciation, le secondlien est dit «silent» (renonciation totale) ou quiet (renon-ciation temporaire pendant la période de standstill (sus-pension des droits)). Ce type de dette junior fut créé il y a quelques années auxEtats-Unis afin de permettre le financement de sociétésintervenant sur des marchés en manque de liquidité, telsque le marché des hautes technologies. Elle tend à se sub-stituer à la tranche mezzanine classique dont le coûtdemeure élevé. La question est de savoir si le pricing dusecond lien correspond toujours véritablement à son posi-tionnement juridique dans la structure du financement.Il est encore trop tôt pour dégager les standards du secondlien européen. Cependant il semble que celui-ci constitueplutôt un produit intermédiaire entre senior et mezzaninequ’un produit autonome sur les traces du second lieneuropéen.

3.1.4 Les obligations «high yield»Egalement inspirés du modèle américain, les high yieldbonds sont des obligations cotées à haut rendement, dis-posant d’une notation inférieure à Baa (Moody’s) ou BBB(S & P) et dont la maturité est comprise entre huit et dixans. En général, le taux d’intérêt stipulé est fixe et le rem-boursement du capital intervient à terme. Ces obligationssont assorties de coupons élevés en contrepartie durisque important assumé par les investisseurs. Les highyield bonds offrent un profil adapté aux opérations degrande envergure.Subordonné à l’endettement senior et structuré sousforme de titres obligataires à taux fixe avec un rembourse-ment in fine. Les clauses attachées aux high yield bondssont également plus souples que celles de la dette senior.De fait, une telle substitution permet à l’émetteur de réali-ser une économie substantielle sur ses frais financiers. Acet avantage, s’ajoute l’absence de dilution du capitalpuisque les porteurs de high yield bonds ne reçoivent pasde bons de souscription donnant accès au capital (war-rants). Enfin, les engagements contractuels de l’emprun-teur (covenants) attachés à ces titres sont beaucoup plussouples que ceux stipulés dans le financement bancaire.La plupart du temps, les high yield bonds sont émis à lafaveur d’un indenture géré par un trustee et sont régis parle droit new-yorkais. De plus en plus souvent, les émet-

teurs français optent pour le droit français, les investis-seurs étant alors organisés en une masse bénéficiant de lapersonnalité morale et l’indenture étant remplacé par unenotice publiée au Balo.Le contrat d’émission contient souvent une call protectionpouvant être exercée dans une période de trois à cinq ansaprès l’émission. Cette clause permet aux investisseurs,en cas d’introduction en bourse de l’émetteur, de pronon-cer l’exigibilité anticipée des obligations à hauteur d’uncertain pourcentage du montant du principal.Il semble qu’un nouvel instrument ait fait son apparitionsur le marché de la dette junior (britannique), lesMezznotes. Les Mezznotes sont un produit hybride quiprésente les avantages de la dette Mezzanine et ceux deshigh yield bonds.

3.1.5 Le refinancement des dettes de la société cibleLa cible peut avoir besoin de couvrir ses besoins d’exploi-tation par emprunt ou de financer le remboursement desavances en compte-courant du vendeur. Dans ce cas, descontrats de prêt et des ouvertures de crédit renouvelablespeuvent être conclus avec la cible. Ces prêts sont le plussouvent accordés par le prêteur senior. Ces financementspermettent au prêteur d’obtenir des sûretés directementsur les actifs de la cible. Les prêteurs préfèrent cependantparfois concentrer l’endettement dans la holding seule,qui redistribue alors les fonds par l’intermédiaire de prêtsintra-groupes.De même, une ligne Capex (capital expenditure) pourraêtre mise en place, celle-ci s’apparente au crédit revolvinget a pour objectif de permettre à la cible de financer cer-tains investissements corporels et incorporels durantl’opération de LBO.Le refinancement de la cible peut également passer par latechnique du securitisation by-out qui combine LBO ettitrisation. La titrisation organise le transfert d’actifs à uneentité ad hoc (en France, le fonds commun de créances ouFCC) qui se refinance par l’émission de titres représentatifsdes actifs reçus.Dans le cadre d’un LBO, la cible va donc céder à un FCC cer-tains de ses actifs (immobilisations stables, stocks,créances commerciales) dont l’acquisition sera financéepar l’émission de titres négociables. Les liquidités résultantdu règlement de ces titres vont donc financer le prix de ces-sion des actifs et ainsi revenir à la société cible. Cette der-nière bénéficie alors d’un moyen de financement alternatif,qui, par le biais d’une remontée d’un superdividende versle holding, doit notamment servir à l’extinction d’une partiesélectionnée de la dette d’acquisition du montage LBO.Un tel montage présente de nombreux intérêts. Pour laholding d’acquisition, l’opération doit permettre un refi-

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D ans le cadre des crédits d’exploitation dontpeuvent bénéficier la cible et/ou ses filiales, lesgaranties envisageables sont multiples, qu’il

s’agisse de sûretés réelles ou de sûretés personnelles.Sans dresser un catalogue exhaustif de ces garanties,mentionnons simplement que la plupart d’entre elles ontvu leur régime juridique profondément modifié par laréforme du droit des sûretés résultant de l’ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006.S’agissant des sûretés personnelles, si le droit du caution-nement demeure inchangé, le Code civil (article 2287-1)consacre en revanche la garantie autonome et la lettred’intention. Le régime de la garantie autonome (article2321 du Code civil) est calqué sur les principes dégagéspar la jurisprudence ; celui de la lettre d’intention n’étantpas détaillé c’est également le régime jurisprudentiel qui avocation à s’appliquer. C’est en matière de sûretés réellesque les changements sont les plus substantiels. Ainsi, legage de biens corporels voit ses conditions assouplies parun recul de l’exigence de dépossession, et son efficacitérenforcée par la validité des pactes commissoires.Précisons que le gage de choses fongibles et de chosesfutures est expressément autorisé, et que, par application,un nouveau dispositif est consacré au gage sur stocksdans le Code de commerce. Le nantissement de créance,dont le nantissement de solde de compte, est égalementrénové. Son opposabilité comme sa réalisation sont désor-mais simplifiées et ainsi mieux adaptés à la pratique. Enfin,les sûretés réelles immobilières connaissent d’impor-tantes innovations dont principalement l’apparition del’hypothèque rechargeable.La loi n° 2007-211 du 19 février 2007 a introduit la fiducieen droit français.S’agissant, à présent, des garanties afférentes au finance-ment du prix d’acquisition de la cible leur nombre estbeaucoup plus limité en pratique, compte tenu du peud’actifs que peut généralement offrir à ses créanciers laholding constituée ad hoc.Le régime de ces garanties mérite cependant d’être préci-sé, qu’il s’agisse du gage de compte d’instruments finan-ciers, récemment réformé, de la délégation imparfaite, oude la cession de créances professionnelles à titre de garan-tie, dite cession Dailly.

3.3.1 Gage de compte d’instrumentsfinanciers

L e nantissement portant sur les titres de la cibleconstitue la sûreté principale accordée par laholding dans le cadre d’un LBO. Les titres ainsi

affectés en garantie étant généralement des instru-ments financiers inscrits en compte, leur nantissementobéit au régime spécial prévu par les articles L. 431-4et L. 431-5 du Code monétaire et financier.Ce régime a été réformé par l’ordonnance n° 2005-171 du 24février 2005 transposant la directive 2002/47/CE du 6 juin2002 relative aux contrats de garanties financières.Avant la réforme, plusieurs incertitudes entouraient le gagede compte d’instruments financiers, et plus spécialement ladétermination de son assiette. La première difficulté concer-nait la validité des clauses d’arrosage ou d’accroissementobligeant le constituant à verser des titres supplémentairessur le compte nanti pour permettre l’ajustement de la sûre-té aux variations de la créance garantie ou des actifs initiale-ment gagés. La seconde portait sur le sort des fruits et pro-duits générés par les titres nantis lorsque le teneur de comp-te, généralement l’émetteur dédits titres, n’est pas habilité àrecevoir des dépôts.L’article L. 431-4 modifié règle ces deux difficultés. D’unepart, il est désormais prévu que les titres complémentairessont compris dans l’assiette du gage ; ces nouveaux actifssont considérés comme ayant été remis à la date de décla-ration initiale de gage, ce qui permet de faire échapper leurinscription sur le compte gagé aux nullités de la période sus-pecte. D’autre part, lorsque le teneur de compte est la socié-té émettrice, les fruits et produits en toutes sommes sontdésormais versés sur un compte spécial ouvert au nom duconstituant dans les livres d’un établissement de crédit oud’un intermédiaire habilité. Ce compte est réputé faire partiedu compte gagé à la date de déclaration de la sûreté.Notons que demeure discutée la possibilité de consentirdes nantissements de rangs successifs sur un mêmecompte d’instruments financiers. Toutefois, les obstaclesthéoriques, liés notamment à l’exercice du droit de réten-tion, ont une portée de plus en plus limitée.Au vu des améliorations de son régime, le gage de comp-te d’instruments financiers tend à devenir plus attractifdans le cadre des LBO. Il demeure, cependant, que cettesûreté n’a de valeur que si la situation de la cible est saine.De plus, sa réalisation peut s’avérer longue et coûteuse. Leprêteur peut par ailleurs hésiter à se faire attribuer lestitres d’une société en difficulté : outre le fait que la posi-tion d’un actionnaire est la plus défavorable en cas deliquidation judiciaire, la responsabilité du prêteur peut êtreengagée si après sa prise de contrôle, la situation de lasociété se dégrade encore.

3.3Les garanties

accordées

Cette technique s’analyse juridiquement en une stipula-tion pour autrui aux termes de laquelle, l’emprunteur(stipulant) obtiendra du prêteur subordonné (promet-tant) qu’il accepte de n’être remboursé qu’après le prê-teur senior (tiers bénéficiaire).Une convention de subordination prévoira que le prêtsenior est remboursé en priorité par rapport aux autresdettes. La convention sur le rang aménage les conditionsde paiement des différentes dettes en cas de mise enœuvre des sûretés. Ces conventions comportent desclauses de turn-over ou de claw-back aux termes des-quelles le mezzaneur s’engage à reverser au banquiersenior toutes les sommes perçues tant que ce derniern’aura pas été remboursé.La dette mezzanine peut également faire l’objet d’unesubordination lorsque celle-ci comporte deux tranches,l’une senior, l’autre junior. Dans ce dernier cas, la dettemezzanine senior est une forme classique de dette mez-zanine où les intérêts font l’objet d’un paiement selon unéchéancier, sous réserve qu’il n’y ait pas de défaut depaiement au titre de la dette senior. La dette mezzaninejunior, quant à elle, donne lieu à capitalisation des inté-rêts dont le versement est subordonné au désintéresse-ment complet des créanciers seniors et des mezzaneursseniors.En dépit de la subordination, si l’emprunteur est à jour dupaiement et remboursement des sommes dues en coursde prêt (intérêts, commissions, amortissement), il peutobtenir du prêteur l’autorisation de disposer des divi-dendes et de la trésorerie excédentaires, on parlera alorsde «subordination filante», dans le cas contraire il s’agirad’une «subordination totale».Le vendeur, lorsqu’il a accepté un paiement différé, peutégalement exiger les mêmes sûretés que le prêteursenior, en second rang. Il est alors possible de créer desactes de sûretés séparés de second rang (dans lesquelsle bénéficiaire de la sûreté s’engage à respecter lesconditions de la convention de subordination) ou que leprêteur senior soit désigné agent des sûretés dans laconvention de subordination. Dans ce dernier cas, lessûretés sont prises au nom du prêteur senior pour soncompte et celui du vendeur : il est alors nécessaire deprendre quelques précautions de rédaction concernantles sûretés, afin de s’assurer que le mandat accordé auprêteur senior est bien valable.A la subordination conventionnelle peut s’ajouter unesubordination structurelle qui consiste en l’introductiond’une entité supplémentaire entre le mezzaneur et la hol-ding d’acquisition. Pratiquement, le mezzaneur prête lesfonds à cette entité intermédiaire (dite top company) quidétient la totalité du capital de la holding. En cas de

défaut, le mezzaneur n’a donc de recours que contre latop company qui ne dispose, quant à elle, que de sesdroits d’actionnaire vis-à-vis de la holding. Si cette der-nière est liquidée, le top company sera désintéresséeaprès les créanciers de la sociétés, à savoir les prêteurssenior.

3.2.3 Les mécanismes de «debt push down»Les mécanismes de debt push down permettent le trans-fert de la dette de la holding d’acquisition vers la cible. Cetransfert peut notamment être réalisé (i) au moyen de l’ac-quisition par la cible d’un actif de la holding, (ii) grâce à ladistribution par la cible de dividendes ou (iii) par l’amortis-sement ou la réduction du capital social de la cible. Dansles opérations de LBO, c’est la seconde hypothèse qui serencontre le plus fréquemment, la holding étant crééedans la plupart des cas pour les besoins de l’acquisition etne possédant pas d’autres actifs que les titres de la cible.L’assemblée générale de la cible peut ainsi décider de dis-tribuer le bénéfice distribuable et/ou les réserves dont elledispose. Il est désormais admis, sous réserve des limita-tions qui peuvent être imposées par l’administration fisca-le, que la cible peut valablement s’endetter pour effectuercette distribution. Bien entendu, la distribution des béné-fices ne doit pas avoir pour effet de réduire les capitauxpropres à un montant inférieur à celui du capital augmen-té des réserves que la loi ou les statuts ne permettent pasde distribuer.La distribution ne doit pas non plus constituer un abus demajorité, ce qui pourrait être le cas si une telle distributionmettait en péril le développement et les investissements dela cible. Cela suppose toutefois qu’il existe des actionnairesminoritaires, et que la décision soit contraire à l’intérêtgénéral de la cible et dans l’unique dessein de favoriser lesactionnaires majoritaires au détriment des minoritaires.Un courant jurisprudentiel développe également la res-ponsabilité des sociétés qui distribuent des dividendes demanière abusive, envers les tiers ou leurs partenaires com-merciaux. Ainsi, la Cour de cassation a récemmentcondamné un concédant envers un concessionnaire enliquidation judiciaire en considérant que le concédantavait abusé de son droit de fixer unilatéralement desconditions de vente alors qu’il avait distribué des divi-dendes prélevés sur les bénéfices à ses actionnaires (Cass.com. 15 janvier 2002, Droit des sociétés n° 10, octobre2002, p. 15).En tout état de cause, les distributions de dividende,qu’elles soient réalisées par emprunt ou grâce à la tréso-rerie de la cible, ne doivent pas obérer de manière excessi-ve sa situation financière, le succès d’une opération deLBO dépendant de la bonne santé de la cible.

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lité à l’exception toutefois de toute utilisation à des fins delibéralités.On pourra ainsi librement mettre en place des opérationsde fiducie-sûretés (organisant par exemple une cessionfiduciaire de créances civiles), de fiducie-gestion (parexemple d’actifs).La technique juridique de la fiducie devrait offrir ainsi unegrande souplesse dans son usage. Toutefois, cet usagesera réservé à certaines catégories de personnes. Ainsiseules des personnes morales soumises à l’impôt sur lessociétés pourront agir en qualité de constituants tandisque seuls des professionnels réglementés soumis à desnormes prudentielles (établissement de crédit, entreprisesd’investissement, entreprises d’assurance, Trésor public,Banque de France, La Poste, Caisse des Dépôts, etc.) pour-ront agir en qualité de fiduciaires. En revanche, s’agissantdes bénéficiaires, aucune restriction n’est prévue.Dans le cadre d’une fiducie, les biens transférés par leconstituant seront séparés du patrimoine propre de lapersonne agissant en qualité de fiduciaire. Les créan-ciers personnels du constituant (autres que ceuxconcernés par l’opération de fiducie) et les créanciersdu fiduciaire n’auront aucun droit de recours sur lepatrimoine fiduciaire. Seuls les créanciers dont lacréance résulte de la conservation ou de la gestion dupatrimoine fiduciaire pourront saisir ce dernier (étantprécisé que, sauf stipulation expresse contraire, en casd’insuffisance d’actif du patrimoine fiduciaire, cescréanciers n’auront aucun droit de recours sur le patri-moine du constituant).Sur le plan de la forme, le contrat de fiducie devra, à peinede nullité, déterminer :■ les biens, droits ou sûretés transférés (s’ils sont futurs,ils doivent être déterminables) ;■ la durée du transfert, qui ne peut excéder 33 ans à comp-ter de la signature du contrat ;■ l’identité du ou des constituants ;■ l’identité du ou des fiduciaires ;■ l’identité du ou des bénéficiaires ou, à défaut, les règlespermettant leur désignation ;■ la mission du ou des fiduciaires et l’étendue de leurspouvoirs d’administration et de disposition.Enfin, en pratique, la mise en œuvre d’une fiducie donneralieu à deux séries de formalités : d’une part aux formalitésde publicité ayant trait au transfert de propriété du bien,droit ou sûreté considéré (cette publicité devra toutefoisêtre effectuée au nom du fiduciaire ès qualité) ; d’autre part,sous réserve de nullité, à l’enregistrement fiscal du contratde fiducie (et de chacun de ses avenants) dans un délai d’unmois à compter de sa conclusion. Toute fiducie devra parailleurs être inscrite sur le registre national des fiducies.

L a mise en place d’un financement LBO peut seheurter à certains obstacles juridiques qui sontautant de risques pour la viabilité du montage.

La plupart de ces risques concerne les relations entre laholding et la cible et découle principalement des dispo-sitions relatives à l’assistance financière, à l’abus debiens sociaux et de crédit, ainsi qu’à l’abus de pouvoir.Dans leurs relations avec les emprunteurs, les prêteurs s’ex-posent également à des risques particuliers dans le cadred’une opération de LBO. Ainsi, les banques peuvent-ellesengager leur responsabilité pour soutien abusif ou être qua-lifiées d’administrateurs de fait, notamment dans le cas oùun emprunteur ferait l’objet d’une procédure collective.

3.4.1 Prohibition de l’assistance financière

L ’article L. 225-216 du Code de commerce dispo-se qu’une société «ne peut avancer des fonds,accorder des prêts ou consentir une sûreté en

vue de la souscription ou de l’achat de ses propresactions par un tiers».Ce texte, qui résulte de la transposition de l’article 23 de ladeuxième directive européenne du 13 décembre 1976,n’est applicable qu’aux sociétés par actions (sociétés ano-nymes, sociétés par actions simplifiées ou sociétés encommandite).Ainsi, les autres types de sociétés commerciales, tellesque les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés ennom collectif ou les sociétés civiles ne sont pas concernéespar cette interdiction. Ce qui ne signifie pas que ce typed’assistance est libre. La Cour de cassation a ainsi déjàjugé que les garanties accordées par le gérant d’une socié-té en nom collectif pour les dettes d’un associé ayant pourfinalité le rachat des parts sociales de la société n’entraientpas dans l’objet social de la société et encourraient enconséquence la nullité (Cass. com. 26 janvier 1993 n° 91-12.566, Bull. civ. IV n° 34 p. 21, Rev. soc. 1993, p. 396).L’article L. 225-216 ne précise pas si ses dispositions sontégalement applicables aux filiales de la cible, mais en l’ab-sence de position claire, la prudence commande de consi-dérer qu’elles le sont.Outre les sanctions pénales prévues par l’article L. 242-24du Code de commerce, la violation de ces dispositions, dufait qu’elles sont impératives, peut entraîner la nullité desprêts ou garanties accordés.

3.4Les risques

juridiques encourus

3.3.2 DélégationsLa holding peut mettre en place au profit des prêteurs,représentés par un agent des sûretés, des délégationsimparfaites en application de l’article 1275 du Code civil.Ces délégations sont généralement consenties sur le fon-dement des créances que détient la holding au titre de sespolices d’assurance, notamment l’assurance «hommes-clés», ou de la garantie de passif consentie par le vendeurde la cible.Le mécanisme de la délégation est relativement souple etseul un accord entre les trois parties est nécessaire : la hol-ding (le délégant) donne ainsi ordre à son débiteur (le délé-gué : la compagnie d’assurance ou le vendeur, selon lanature de la créance «déléguée») de s’engager à payer auxprêteurs (le délégataire) les montants dus au titre de lacréance «déléguée». L’intérêt de cette convention est decréer un engagement propre et nouveau du déléguéenvers le délégataire.Imparfaite, la délégation ainsi opérée permet aux prêteursde s’adjoindre un débiteur supplémentaire, de sorte que sile délégué ne s’exécute pas, le délégataire pourra pour-suivre le délégant en paiement.Notons que la Cour de cassation a récemment jugé qu’estvalable l’acte de délégation imparfaite consenti avant lacessation des paiements, peu important que son exécu-tion ait lieu postérieurement, c’est-à-dire lors de la périodesuspecte (Cass. com., 4 octobre 2005, JCP E 2006, p. 414,note Albrieux).

3.3.3 Cessions de créances professionnelles à titrede garantieLa cession de créances professionnelles, définie par laloi n° 81-1 du 2 janvier 1981 dite «loi Dailly», peut êtreutilisée à plusieurs fins dans le cadre des opérations deLBO. Nous citerons, pour illustration, le cas où la holdingqui a consenti un prêt intra-groupe à la cible, cède lacréance liée à ce prêt en garantie de sa dette senior. Si laholding avait pris des sûretés sur les actifs de la cible engarantie du remboursement du prêt intra-groupe, cessûretés seront également transférées de plein droit auprêteur à compter de la signature du bordereau de ces-sion, ainsi que l’a consacré la loi du 1er août 2003 sur lasécurité financière (article L. 313-27 du Code monétaireet financier).La cession Dailly ne peut être consentie que pour descréances professionnelles et au profit d’un établissementde crédit.La constitution et l’opposabilité de cession Dailly sont rela-tivement simples et efficaces. Il est conclu une convention-cadre de cession de créances professionnelles au titre delaquelle les parties signent des bordereaux identifiant

chaque créance, seul le bordereau constitue la sûreté. Lebordereau doit impérativement comporter les mentions del’article L. 313-23 du Code monétaire et financier à peinede nullité. La cession Dailly est opposable aux tiers dès lasignature de ce bordereau et bien qu’elle ne soit consentiequ’à titre de garantie, elle emporte transfert de propriétéde la créance. Elle peut être notifiée par le prêteur au débi-teur cédé. Si celui-ci l’accepte (article L. 313-29 du Codemonétaire et financier), il aura l’obligation de régler sacréance entre les mains du prêteur. Le prêteur peut toute-fois donner mandat à l’emprunteur de recouvrer la créan-ce, ce qui doit être précisé dans la notification : le plus sou-vent la créance est alors réglée sur un compte nanti aubénéfice du prêteur. Il arrive fréquemment, notammentpour des raisons commerciales, que le prêteur accepte dene procéder à la notification qu’en cas de survenance d’uncas de défaut au titre de la dette senior.Il reste que les cessions Dailly ne peuvent pas toujoursêtre utilisées dans les opérations d’envergure internatio-nale : le garde des sceaux a ainsi considéré (réponse dugarde des sceaux publiée au JO du 27 janvier 2003 p.600), que la cession de créances Dailly est réservée auxétablissements de crédit dûment agréés par le CECEI ouhabilités à exercer leur activité en France, en applicationdu droit communautaire. Pour des établissements étran-gers ne remplissant pas ces conditions, il est donc néces-saire de procéder à des cessions de créances en applica-tion de l’article 1690 du Code civil, ou d’utiliser le méca-nisme de la délégation.

3.3.4 La fiducieLa loi du 19 février 2007 précitée, comprend essentielle-ment deux séries de dispositions : des dispositions orga-nisant le régime juridique de la fiducie, codifiées auxarticles 2011 à 2031 du Code civil et les dispositions défi-nissant le régime fiscal de la fiducie, insérées dans le Codegénéral des impôts.La fiducie est définie à l’article 2011 du Code civil comme«l’opération par laquelle un ou plusieurs constituantstransfèrent des biens, des droits ou des sûretés, présentsou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenantséparés de leur patrimoine propre, agissent dans un butdéterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires».Le mécanisme instauré aux articles 2001 à 2031 du Codecivil permet ainsi à un constituant de transférer temporai-rement ses biens (immobiliers ou mobiliers), droits (per-sonnels ou réels) ou sûretés (réelles ou personnelles) dansun patrimoine d’affectation géré par un fiduciaire au profitd’un bénéficiaire.Le nouveau dispositif prévoit que la fiducie pourra être uti-lisée dans tous types d’opérations quelle que soit sa fina-

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3.4.4 La responsabilité des prêteursLes fournisseurs de crédit sont fréquemment mis en causedans le cadre de procédures collectives ouvertes à l’en-contre des entreprises auxquelles ils ont prêté des fonds.La loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 relative à la sauve-garde des entreprises est cependant venue limiter cetteresponsabilité fondée sur le soutien abusif. En effet, lenouvel article L. 650-1 du Code de commerce prévoitdésormais que les créanciers de l’entreprise faillie ne peu-vent être tenus pour responsables des préjudices subis dufait des concours consentis.A cette irresponsabilité de principe, la disposition précitéepose trois exceptions : la fraude, l’immixtion caractériséedans la gestion du débiteur et l’existence de garanties dis-proportionnées au regard du concours accordé. Pour cha-cune de ces dérogations, le pouvoir d’appréciation desjuges du fond est considérable ce qui augure une difficileprévisibilité des solutions applicables.Lorsque l’une des exceptions est caractérisée, la sanction duprêteur de deniers est double. D’une part, les garantiesprises en contrepartie du concours octroyé sont nulles.D’autre part, le fournisseur de crédit peut engager sur le ter-

rain du droit commun sa responsabilité civile pour soutienabusif ou rupture abusive de crédit en application de l’article1382 du Code civil. En outre, la sanction pénale pour fourni-ture de moyens ruineux est également envisageable.Dans le cadre de LBO, compte tenu des nombreuses obli-gations mises à la charge des emprunteurs par les prê-teurs, l’immixtion dans la gestion du débiteur pourrait êtreretenue pour mettre en cause la responsabilité desbanques. Cette immixtion pourrait, de surcroît, traduireune gestion de fait qui exposerait l’établissement de créditaux sanctions encourues par les dirigeants d’entreprisesen difficulté. Dans cette hypothèse, le prêteur pourranotamment engager sa responsabilité pour insuffisanced’actifs, ou, dans certains cas énumérés par la loi, êtredébiteur de l’obligation aux dettes sociales nouvellementinstituée par la loi de sauvegarde des entreprises.Le risque que l’établissement prêteur soit qualifié de diri-geant de fait est d’autant moins négligeable qu’une récen-te jurisprudence est venue affirmer qu’une banque pouvaitêtre administrateur de fait par personne interposée (CAVersailles, 29 avril 2004, RDBF, juill.-août 2004, o. 271, obs.F.-X. Lucas).

La principale question est de savoir si cette prohibitiongénérale est valable pour toutes les opérations qu’ellessoient antérieures ou postérieures à l’acquisition. Certainssoutiennent que ce texte étant assorti de sanctionspénales, il est d’interprétation stricte et qu’une telle inter-diction n’est applicable qu’au moment de l’acquisition etne s’applique pas aux sûretés ou prêts consentis posté-rieurement. Toutefois, si ces prêts ou sûretés apparaissentcomme une condition de la réalisation de l’opération ousont accordés en garantie du prêt d’acquisition, il pourraitêtre démontré qu’ils ont été conclus en violation des dis-positions de l’article L. 225-216.Bien entendu, ces dispositions ne s’opposent pas au nan-tissement des titres de la cible, puisque les biens de la hol-ding ne sont pas concernés par l’interdiction (Cass. com. 19décembre 2000, RJDA 4/01 n° 455). La jurisprudence aégalement déjà eu l’occasion de confirmer que cette inter-diction ne concerne pas l’affectation des dividendes distri-bués par la cible à la holding au remboursement du prêtaccordé en vue de l’acquisition (Cass. com. 15 novembre1994, RJDA 2/95 n° 159).

3.4.2 L’abus lié aux conventions de trésorerieDans le cadre d’un LBO, les conventions de gestion de tré-sorerie centralisée doivent être mises en place avec pré-caution. Ainsi, la cible ne doit pas financer une partie del’acquisition par l’intermédiaire d’avances en trésoreriefaites à la holding, au risque pour ses dirigeants de se voircondamnés sur le fondement de l’abus de biens sociauxou du crédit de la société, en vertu des articles L. 242-6 3°du Code de commerce pour les sociétés par actions ou L.241-3 du Code de commerce pour les sociétés à responsa-bilité limitée.Un arrêt déjà ancien (arrêt Rozenblum, Cass. crim. 4 février1985 n° 84-91.581, Bull. crim. n° 54, p. 145) a fixé les cri-tères dans le cadre desquels des avances en trésorerie oudes garanties intra-groupes ne constituent pas un abus debiens ou du crédit d’une société. L’opération doit être dic-tée par un intérêt économique, social ou financier com-mun, apprécié au regard d’une politique élaborée pourl’ensemble du groupe, et ne doit pas être démunie decontrepartie ou rompre l’équilibre entre les engagementsrespectifs des sociétés concernées, ni excéder les capaci-tés financières de celle qui en supporte la charge.Dans le cadre d’une opération de LBO, les critères poséspar la jurisprudence Rozenblum sont difficiles à remplir. Lajurisprudence (Cass. crim. 24 juin 1991, JCP E 1992 172 n°15 et Cass. Crim. 5 mai 1997 n° 96-81.482, Bull. crim. n° 159p. 525, Bull. Joly 1997, p. 956) a déjà considéré que lesavances de trésorerie ne peuvent être justifiées par lanotion de groupe, lorsque la holding ne dispose pas des

ressources suffisantes pour faire face au remboursementdes avances et des prêts dont elle a bénéficié de la part dela cible et que ces avances et prêts ont en outre été accor-dés sans contrepartie réelle et au seul bénéfice du déten-teur du capital de la holding.

3.4.3 La fusion rapideIl a été souligné que la fusion rapide entre la cible et sa hol-ding soulevait des problèmes fiscaux. Une telle fusion estégalement controversée sur le plan juridique. Les oppo-sants à cette fusion soutiennent qu’elle permet de réaliserprécisément ce qu’interdit l’article L. 225-216 du Code decommerce. Les partisans répondent que la fusion ne pou-vant être assimilée à une avance, un prêt ou une sûreté, iln’y a pas d’interdiction en l’espèce.La jurisprudence, sans appliquer l’article L. 225-216 duCode de commerce, a déjà considéré qu’une fusion rapidepouvait constituer un abus de pouvoir, sur le fondementde l’article L. 242-6 4° du Code de commerce (Cass. crim.10 juillet 1995 n° 94-82.665, Bull. crim. n° 253 p. 703, JCPE 1996 II n° 780 ; Bull. Joly 1995 p. 1048). Dans cette espè-ce, le dirigeant avait toutefois également commis desabus de biens sociaux, et les juges du fond avaient consi-déré que l’opération, extrêmement déséquilibrée, lésion-naire et dépourvue de toute justification économiquepour la cible, avait surtout pour objectif de permettre ausecond actionnaire et prêteur de la holding de rentrerdirectement et personnellement en possession du capitalde la cible.Concernant plus particulièrement l’assistance financière,si la fusion rapide est une condition de la mise en place del’opération et du financement, la fraude pourrait être aisé-ment démontrée. Il est nécessaire qu’aucun engagementcontractuel ne soit prévu dans la mise en place de l’opéra-tion de réaliser la fusion. L’intention frauduleuse pourraitnotamment être caractérisée si des garanties sont accor-dées sur les actifs de l’ancienne filiale ou si des actifs decette société sont cédés afin d’assurer le remboursementdu prêt initialement accordé à la holding. La holding doitêtre en mesure de rembourser la dette sans que la fusionintervienne nécessairement.En revanche, si la fusion a lieu alors qu’un certain tempss’est écoulé après la réalisation de l’opération de LBO etqu’elle se justifie par ailleurs économiquement, elle nedevrait pas être considérée comme constituant une viola-tion des dispositions de l’article L. 225-216 du Code decommerce ou un abus de pouvoir.En outre, il semble maintenant admis par l’administrationfiscale, qu’une fusion rapide soit possible lorsqu’elle neconcerne que les holdings intermédiaires, sans concernerles sociétés opérationnelles.

26 27

plus-value dont le montant sera fonction du pourcentagedu capital détenu et de la survaleur créée.Toutefois, l’acquisition d’une telle participation n’est envi-sageable que pour les dirigeants disposant déjà de moyenspersonnels suffisants (les conditions financières de leurprise de participation étant en principe les mêmes que pourles actionnaires financiers ou très faiblement décotées). Or,même dans le cadre de LBO secondaires, les dirigeants nedisposent pas, le plus souvent, de moyens leur permettantd’acquérir une participation d’un montant tel qu’ils pour-raient réaliser une plus-value significative à la sortie.Le manque de liquidité des dirigeants, comme la dispropor-tion évidente entre les capacités des fonds d’investissementet celle de l’équipe dirigeante, peuvent être corrigées :■ d’une part, par un recours à l’emprunt de la part des diri-geants aux fins de financer le montant de leur investisse-ment (cette solution pose ensuite la question de la natureet du traitement, dans le pacte d’actionnaires, des sûretésconsenties par les dirigeants sur les titres de la holdingainsi financés) ; et■ d’autre part, par le recours à la sweet equity. L’equitypartner n’investit qu’une partie de ses fonds en capital etle solde, généralement, en obligations convertibles, per-mettant ainsi aux sommes investies en capital par l’équipedirigeante de représenter une quote-part du capital plusimportante que ce qu’elle aurait été si la totalité dessommes investies par les fonds l’avaient été en capital.Cette pratique d’origine anglo-saxonne a eu tendance cesdernières années à être remplacée par le principe d’uninvestissement pari passu entre dirigeants et fonds, asso-ciés à des outils dits ratchets au profit des managers. Dansce type de structure, toutes les parties investissent dansles mêmes proportions en capital et en prêt (généralementdes obligations convertibles, compte tenu des règles s’im-posant aux fonds d’investissement), les managers dispo-sant par ailleurs de mécanismes qui introduisent, en leurfaveur, un effet multiplicateur permettant, lorsque lesobjectifs de rentabilité du LBO sont atteints ou dépassés,de déconnecter la part du prix de cession leur revenant deleur participation d’origine.En effet, pour être efficaces, les mécanismes de co-inves-tissement doivent induire un effet de cliquet et de seuil encas de réussite. C’est en effet ce système du «tout ou rien»qui est le garant de la motivation des dirigeants à atteindreles objectifs fixés en commun.Il n’est toutefois pas rare aujourd’hui, dans des montagesun peu complexes, mis en place dans le cadre d’opérationsde taille significative, que les packages du managementsoit un panachage de sweet equity et de ratchet. Ces struc-tures plus complexes permettent notamment de «lisser»les effets des packages dans des situations de perfor-

mances extrêmes (TRI très bas ou très élevés) et d’affiner lacourbe de répartition de valeur en faveur du management.

4.1.3 Eléments de mesure de la performance d’unLBO4.1.3.1 Le TRI : l’unité de mesure classique de la rentabilité

d’un investissement

Pour les fonds d’investissement, l’objectif de toute opéra-tion de LBO est bien entendu la maximisation de la plus-value réalisée lors de la sortie. C’est en effet la plus-value decession qui constitue l’élément principal de la rentabilité del’investissement, les intérêts perçus en rémunération desobligations éventuellement souscrites n’intervenant, engénéral, que pour une part marginale (il convient toutefoisde noter que les intérêts des obligations ou les dividendesprioritaires au titre d’actions de préférence éventuellementsouscrites par les fonds d’investissement sont la plupart dutemps capitalisés et payés in fine et peuvent ainsi, dans cer-tains montages, constituer une part non-négligeable desrevenus perçus par les fonds). La rentabilité de l’investisse-ment correspond schématiquement au rapport entre ce quel’investissement a coûté et ce qu’il a rapporté.Ce rapport, appelé taux de rendement interne (TRI), est lavariable-clé à l’aune de laquelle sera jugée la réussite ounon de l’investissement réalisé. La rentabilité moyennesouhaitée par les fonds oscille en général, en France,autour de 15 à 20% par an. Au-delà, les dirigeants peuventobtenir d’appréhender une quote-part de la plus-valuemarginale qui permet aux fonds de réaliser un TRI supé-rieur à l’objectif.Le TRI désigne le taux de rendement interne qui permetd’égaliser la valeur actualisée des sommes perçues dansle cadre de l’investissement (revenus générés par l’inves-tissement) et la valeur actualisée des sommes investies. LeTRI est donc égal au réel «t» tel que :

avec :«Di» : désigne le montant total décaissé par les fonds d’in-vestissement le i-ième jour suivant l’acquisition de lasociété cible (quelle que soit la forme du décaissement :capital, obligations de toute nature, bons de souscriptionautonomes, compte-courant…).«Ej» :Désigne le montant encaissé par les fonds d’investis-sement le j-ième jour suivant l’acquisition de la sociétécible (quelle que soit la forme de l’encaissement : produitde cession d’actions et/ou de bons de souscription auto-nomes, remboursement, intérêts, dividendes…).«N» : Désigne le nombre de jours entre la date d’acquisition etla date de changement de contrôle de la holding de rachat.

U n LBO est avant tout un projet d’entreprise.Les montages financiers les plus «tendus» nesont envisageables et viables que si la cible

est une société bien gérée, bien positionnée sur unmarché en croissance et qui conserve d’importantesmarges de progression.C’est cet équilibre entre analyse des réussites passées etdétermination des perspectives d’avenir qui est au centrede la réflexion des intervenants à un LBO et qui nécessite,pour que l’opération soit une réussite, la mise en placed’incentives adaptés au profit de l’encadrement.Les managers ne sont plus alors considérés comme desimples dirigeants ou salariés du groupe cible maiscomme de véritables co-investisseurs devant assumer uneprise de risque «capitalistique» au même titre que lesinvestisseurs financiers. La raison d’être de ces méca-nismes est d’assurer un alignement d’intérêts entre lecapital (les fonds d’investissement) et la compétence (lesmanagers) permettant ainsi le meilleur développement dela société et donc la réussite de l’opération au profit detoutes les parties prenantes.

4.1.1 Le management package, une questiondevenue centrale dans les négociations

L es mécanismes d’intéressement et de co-inves-tissement des dirigeants, garantissant leurmotivation, sont devenus au fil du temps un

élément central de la structuration des opérations deLBO. Autrefois considérée comme accessoire et traitéeau dernier moment, cette question est aujourd’hui aucentre des préoccupations des fonds d’investissementet abordée dès le début des négociations. Certainsinvestisseurs financiers n’hésitent plus à considérerqu’ils se concentrent autant sur le management packa-ge que sur le prix d’acquisition.Cette évolution s’explique essentiellement par deuxfacteurs :■ d’une part, le secteur du LBO en France est devenu,depuis plusieurs années déjà, un secteur mature. Lesstructures et mécanismes mis en place sont pour la plu-

part éprouvés et connus des intervenants et notammentdes dirigeants candidats à une reprise de leur société enLBO. Ceux-ci n’hésitent plus à formuler leurs souhaits enmatière de partage de la création de valeur. La diminutiondu nombre de cibles sur le marché et une concurrenceaccrue entre les investisseurs ont renforcé leur position ;■ d’autre part, dans un marché des fusions-acquisitionsrelativement atone ces dernières années, les opportunitésde sorties industrielles ou boursières ont été peu attrac-tives. Dans ce contexte, les fonds d’investissement ontsouvent privilégié la cession à d’autres fonds commemoyen de réaliser leurs investissements. Dans ces LBOsecondaires (voire tertiaires), les dirigeants sont chaquefois consultés, interviennent très largement dans le choixde l’investisseur et disposent, le plus souvent, d’une capa-cité financière certaine en raison du «cash-out» réalisé lorsdu LBO primaire.On a donc assisté à une augmentation significative desdemandes des managers avec (i) des seuils de déclenche-ment, en cas de réussite du LBO, revus à la baisse (d’un TRIde 25 à 35 %, la fourchette s’est réduite à 20-30 % voire,dans certains cas, 18-28 %), (ii) une quote-part de la sur-plus-value appréhendée par les managers de plus en plusélevée et (iii) davantage de droits négociés et obtenus(conditions de vesting plus favorables, droit de premierrefus ou droit de préemption de premier rang entre lesmanagers par exemple).D’un point de vue plus conjoncturel, le contexte de la crisedes subprimes et la raréfaction du crédit qui en a découlé,a pour effet de souligner le fait que le succès des opéra-tions de LBO repose essentiellement sur une croissanceforte de la cible, justifiant ainsi la mise en place, la pluslarge possible, de mécanismes assurant la plus grandemotivation des équipes concourant au développement deson activité.Toutefois, cette crise semble également être l’occasiond’un retour à plus de mesure dans ce que les fonds d’in-vestissements sont prêts à consentir aux équipes demanagement, un bon management package étant un pac-kage «équilibré» assurant, sans distorsion excessive auprofit de l’un ou l’autre des acteurs, l’alignement d’intérêtsévoqué plus haut.

4.1.2 Structure de l’investissement des managersUne prise de participation dans la holding d’acquisitionpeut permettre aux investisseurs dirigeants de réaliser uneplus-value de cession lors du débouclage de l’opération,

4.1Evolutions, critères

et contraintes

4-Le management package

28 29

consenti aux dirigeants n’est pas constitué par le verse-ment de sommes d’argent, susceptibles d’être assimiléesà un complément de rémunération et taxées comme tel,mais par l’opportunité d’accroître à terme leur participa-tion dans le capital de la holding, donc plus lié au statutd’actionnaire qu’à celui de dirigeant.Sur cette base, les actionnaires financiers peuvent consen-tir des promesses de cession d’actions au profit des diri-geants, permettant à ces derniers, lors du débouclage del’opération, d’acquérir un nombre d’actions complémen-taires. Le nombre et le prix des actions «promises» peu-vent être fixés dès l’origine, ou être simplement détermi-nables par application d’une formule mathématique, fonc-tion le plus souvent du TRI réalisé par les actionnairesfinanciers, ou du prix proposé par l’acquéreur pour 100%du capital de la holding.Ces mécanismes permettent aux dirigeants d’accroître àterme leur participation et donc d’augmenter leur plus-value de cession en cas d’atteinte de certains objectifs derentabilité. Les sommes ainsi perçues constituant des plus-values de cession de titres sont, en principe, soumises à unrégime fiscal et social plus attractif que celles perçues dansle cadre de simples accords de rétrocession de TRI.Le recours à des promesses de cession d’actions présentetoutefois trois inconvénients majeurs.

(i) une sécurité juridique incertaine pour les dirigeants :

d’une part, la promesse de cession constituant un enga-gement unilatéral de celui qui s’oblige à céder (en l’es-pèce les actionnaires financiers) n’accorde qu’une sécu-rité juridique limitée au bénéficiaire. En effet, si le pro-mettant se rétracte (c’est-à-dire revient sur son engage-ment de céder) avant que le bénéficiaire n’ait levé l’op-tion, ce dernier ne pourra pas obtenir le transfert desactions à son profit. Dans une telle hypothèse, le bénéfi-ciaire ne pourra obtenir que des dommages-intérêts pourinexécution contractuelle (Cass. civ. 3e, 15/12/1995). Onpeut toutefois présumer que la relation entre l’investis-seur financier et les dirigeants conservera une qualitésuffisante pour que ne soit pas envisagée une quel-conque rupture d’engagement ;

(ii) justification de l’antériorité : il est important que detelles promesses soient conclues dès l’origine de l’inves-tissement et qu’il soit possible d’en apporter la preuve encas de contentieux. En effet, dans la mesure où elles per-mettent aux dirigeants d’acquérir, dans le futur (lors de lasortie du LBO), des actions complémentaires à un prix fixéà l’avance (et donc plus attractif que le prix auquel lesactions doivent être cédées le jour même), il est nécessai-re de pouvoir justifier que l’engagement pris par les action-

naires financiers de céder ces actions à ce prix avait étépris à une date où il était en principe impossible de prévoirque le prix stipulé dans la promesse serait significative-ment inférieur à la valeur réelle des actions au jour del’exercice de la promesse. A cet égard, il semble opportund’enregistrer les promesses auprès de la recette desimpôts ou de les déposer au rang des minutes d’un notai-re pour leur donner date certaine et justifier de l’antériori-té, donc de l’existence réelle d’un aléa ;

(iii) un risque de requalification fiscale des gains réalisés

par les dirigeants : si l’administration fiscale considèreque la promesse a été consentie à des conditions préfé-rentielles et en considération du fait que le bénéficiaire estdirigeant de la société, elle peut tenter d’établir que l’avan-tage retiré par le dirigeant constitue en réalité une rému-nération complémentaire.

4.2.1.3 Les schémas impliquant un risque d’investisseur :

les options

Le risque visé au (iii) ci-dessus (requalification fiscale de lanature des gains) semble moindre lorsque le dirigeantencourt un véritable risque de perte et donc lorsque lesmécanismes mis en place s’apparentent plus à un co-investissement qu’à un intéressement.C’est le cas des schémas dans lesquels les dirigeantspayent à l’origine le droit d’acquérir dans le futur, à un prixdéterminé ou déterminable, un certain nombre d’actionscomplémentaires.Si les objectifs de rentabilité ne sont pas atteints, l’optionne peut être exercée. Les dirigeants subissent alors uneperte égale au prix de l’option versé initialement auxactionnaires financiers.Du fait de l’existence d’un tel aléa, le dirigeant intervienten qualité d’investisseur qui accepte de prendre un risquefinancier en contrepartie d’une espérance de gain.L’aléa doit être réel et significatif. A cet égard, le pricing del’option est déterminant. Il convient en effet de veiller à ceque le prix payé par les dirigeants en contrepartie de l’op-tion soit fixé sur des bases objectives et à des conditionsde marché.Dès lors que les conditions et le prix d’exercice de l’option(la contrepartie payée par les dirigeants lors de la signatu-re) font courir aux dirigeants un véritable risque de pertedans l’hypothèse où la valeur de la société ne s’appréciepas au-delà d’un certain seuil, il semble possible de sou-tenir valablement que les gains perçus de l’exercice del’option constituent bien une plus-value de cession devantêtre imposée comme telle.Une question complémentaire se pose quant à la possibi-lité, pour les dirigeants, d’acquérir les titres complémen-

Il convient d’ajouter que, dans le cadre des négociations, uneattention particulière doit être portée à la définition du TRI etnotamment à ce qui est pris en compte dans les décaisse-ments et les encaissements. Par exemple, les frais liées à l’ac-quisition et à la cession peuvent représenter des montantssignificatifs et avoir une incidence non négligeable sur le TRIselon qu’ils sont ou non pris en compte dans le calcul.

4.1.3.2 Les multiples de sortie : élément de correction

Toutefois, dans certaines hypothèses, le TRI peut s’avérerêtre un outil inadapté de la mesure de la rentabilité d’uninvestissement. C’est essentiellement le cas lors d’opéra-tions de cession intervenant dans un délai «très» courtaprès l’acquisition initiale. En effet, réaliser un TRI mêmetrès élevé (30-40 %) sur une année seulement est moinsintéressant pour l’investisseur que de réaliser un TRIannuel certes plus faible (20-25 %) mais sur une périodeplus longue (quatre à cinq ans par exemple). En effet, unecession rapide permettant de dégager un fort TRI ne permetpas, dans certains cas, de réaliser une plus-value suffisan-te compte tenu des frais liés au montage de l’opération, autemps et à l’investissement qu’elle a nécessités. En consé-quence, il est de plus en plus fréquent que les accords fas-sent référence à un multiple de l’investissement d’originecomme objectif de rentabilité en cas de cession rapide.A l’inverse, le temps peut avoir un effet négatif sur le TRI.Maintenir un objectif constant de TRI sur une périodelongue peut donc pénaliser le management qui, en cas denon-réalisation du TRI, peut se voir priver de la surplus-value négociée à l’origine. La référence à un multiple del’investissement d’origine comme objectif de rentabilité del’investissement s’avère être également un bon correctifde l’incidence négative du temps sur le TRI.La négociation du management package porte dès lorsd’une part, (i) sur la quote-part de la survaleur qui revien-dra aux dirigeants en fonction des différentes hypothèsesde sortie et (ii) sur le choix des outils permettant d’opérerce co-investissement.

O utre des montages de type sweet equity évo-qués plus haut, ces mécanismes peuvent êtreschématiquement mis en œuvre de trois

façons :

■ soit par recours à des engagements contractuels (§ 2.1ci-dessous) ;■ soit par recours aux mécanismes légaux d’intéressementdes salariés et mandataires sociaux (§ 2.2 ci-dessous) ;■ soit par l’émission de valeurs mobilières au profit desdirigeants (§ 2.3 ci-dessous).Le choix du type de mécanisme résulte le plus souventd’un arbitrage entre les exigences de souplesse et de sécu-rité juridique avec en toile de fond le traitement fiscal dessommes ainsi perçues. A cet égard, il convient de noterqu’il n’existe pas de package standard, la solution retenuerésultant toujours d’une négociation au cas par cas.

4.2.1 Les accords contractuels4.2.1.1 Accords de rétrocession

La méthode qui, à l’origine, est apparue la plus simple et laplus souple consistait simplement à ce que les action-naires financiers s’engagent au profit des dirigeants à leurrétrocéder une partie du prix de cession perçu lors dudébouclage de l’opération, si les objectifs de rentabilitéétaient atteints. Ce mécanisme contractuel de partage deplus-value est en général le mécanisme couramment utili-sé en droit anglais et américain.C’est ainsi qu’une multitude d’accords sui generis a vu lejour, justifiant, sur la base d’éléments variants d’une opé-ration à l’autre, le versement d’une partie du prix complé-mentaire aux dirigeants.Cette solution a le mérite de la simplicité. Elle pose néan-moins trois problèmes rédhibitoires : ■ les montants en jeu sont en général très inférieurs à ceque les dirigeants peuvent espérer retirer de la vente d’uneparticipation, même minime, en capital, lors du dénoue-ment du LBO ;■ si l’administration fiscale considère que ces sommessont versées aux dirigeants en contrepartie de leur partici-pation à l’activité de la société, elles peuvent être requali-fiées en rémunération et par conséquent soumises à unrégime fiscal et, le cas échéant, social dissuasif ; et■ ces mécanismes peuvent donner lieu à des contentieuxlongs et délicats lorsque les parties ne sont plus d’accordau moment de les mettre en œuvre.Ce type d’accord contractuel, peu fréquent aujourd’hui, doit,selon nous, être réitéré peu de temps (voire un instant deraison) avant la cession, notamment afin de s’assurer quecet accord de répartition du prix qui ne concerne a priori queles vendeurs n’implique pas, outre mesure, l’acquéreur.

4.2.1.2 Les promesses de cession d’actions

Dans un LBO, les dirigeants ont vocation à avoir un doublestatut de dirigeant et d’actionnaire. Dès lors, se sont déve-loppés des mécanismes aux termes desquels l’avantage

4.2Les supports

des managementpackages

30 31

l’exercice des options, prévoir l’adhésion des bénéficiairesà un pacte d’actionnaires en cas d’exercice des options,etc.).

4.2.2.2 Les attributions gratuites d’actions

Ce dispositif a été instauré à l’occasion de la Loi definances pour 2005 et codifié sous les articles L. 225-197-1à L. 225-197-5 du Code de commerce et a été plus récem-ment assoupli par la loi du 30 décembre 2006. Il constitueun élément d’intéressement des dirigeants non négli-geable et devient donc un élément de négociation signifi-catif pour les acteurs du LBO.L’avantage de ce système pour les dirigeants attributairesréside essentiellement dans le fait qu’il n’entraîne aucuneprise de risque puisqu’ils n’ont aucun versement à effectuer.Parallèlement, pour la société émettrice, le risque est maî-trisé : la société peut librement déterminer les modalitésqui conditionneront l’attribution définitive des actions (etnotamment la réalisation de certains objectifs globauxet/ou individuels) pour éviter d’être tenue à cette attribu-tion alors qu’elle ne serait plus en mesure de le faire.Les avantages et inconvénients de ce régime sont globale-ment identiques à ceux du mécanisme des stock-optionsmême si dans les faits il offre un peu plus de souplesse. Unedifférence entre ces deux outils tient au fait que les actionsgratuites ne nécessitent aucun investissement du bénéficiaireet constituent un avantage dès le premier euro alors qu’à l’in-verse, les stock-options supposent le paiement d’un prix etl’existence d’un avantage que si, au jour de l’exercice, la valeurréelle de l’action est supérieure au prix d’exercice. Il faut doncmoins d’actions gratuites que de stock-options pour réaliserle même gain. Par conséquent, la mise en place de plan d’at-tribution gratuite d’actions est moins dilutive en principe pourles autres actionnaires qu’un plan de stock-options.Ce système est néanmoins assorti d’un certain nombre decontraintes et de rigidité pour les dirigeants :■ ainsi, comme pour les stock-options, un dirigeant nepourra pas se voir attribuer des actions gratuites s’ildétient ou s’il vient à détenir après l’attribution des actionsgratuites, plus de 10 % du capital social ;■ en outre, le système impose (i) un délai d’acquisition dontla durée ne peut être inférieure à 2 ans et pendant lequel lesdirigeants attributaires ne sont pas propriétaires desactions consenties et n’ont aucun droit d’actionnaire, et (ii)un délai de conservation, au minimum égal à 2 ans (sauf sile délai d’acquisition est supérieur à 4 ans, auquel casaucun délai de conservation n’est requis) pendant lequelles actions sont indisponibles et ne peuvent pas faire l’ob-jet d’une transmission (article L. 225-197-1 du Code de com-merce) avec, en outre, des restrictions légales pour lessociétés cotées liées à la prévention des délits d’initiés.

Or, l’application du régime fiscal de faveur relatif à la plus-value d’acquisition et à la plus-value de cession quiseraient réalisées par le dirigeant est subordonnée au res-pect des délais d’acquisition et de conservation d’aumoins 2 ans. En effet, la réglementation fiscale n’a passuivi l’évolution du Code de commerce, qui permet de sup-primer la période de conservation dès lors que la périoded’acquisition est de 4 ans au moins. Ainsi, même avec unepériode d’acquisition de 4 ans, les titres attribués gratuite-ment semblent devoir être conservés au moins 2 ans parleurs bénéficiaires pour bénéficier du régime de faveur ;■ enfin, certaines incertitudes fiscales demeurent, notam-ment quant au régime applicable en cas d’apport à uneholding d’actions attribuées gratuitement pendant leurpériode de conservation (seule l’hypothèse d’une fusion-absorption de la cible – dont les actions ont été attribuéesgratuitement – par la nouvelle holding semble dans un telcas permettre le maintien du régime de faveur), ce qui rendassez complexe le débouclage des opérations de LBOnotamment dans la perspective d’un LBO secondaire.Notons par ailleurs que, comme pour les stock-options, cerégime a perdu de son intérêt depuis la loi LFSS visée plushaut. En effet, de la même manière que pour les stock-options, la société qui attribue gratuitement des actions doitdésormais verser une contribution patronale égale à 10 % de100 % de la valeur des actions à la date de la décision d’attri-bution, étant précisé que, pour les sociétés cotées, cettecontribution peut être assise sur la juste valeur des actionstelle qu’elle est appréciée pour l’établissement des comptesconsolidés. Le bénéficiaire des actions attribuées gratuite-ment est également redevable d’une contribution salarialeégale à 2,5 % de la valeur des actions au jour de l’acquisition.Par conséquent, les actions gratuites constituent un mécanis-me plus adapté à un second voire troisième cercle de mana-gers, qu’il convient, à l’instar des stock-options, d’adapter auxcontraintes particulières des LBO tout en conservant à l’espritcertaines rigidités qui le rendent peu compatibles avec cer-tains objectifs ou contraintes de ce type d’opération.

4.2.3 Emission de valeurs mobilièresEn parallèle des schémas évoqués plus haut, le recours àl’émission de valeurs mobilières donnant accès au capital esttrès souvent utilisé comme support des management pac-kages, dans la mesure où elles allient souplesse, sécuritéjuridique et relèvent d’un régime juridique désormais moder-nisé et uniformisé depuis l’ordonnance du 24 juin 2004.

4.2.3.1 Les bons de souscription de parts de créateur d’en-

treprise (BSPCE)

Créés par le législateur à l’occasion de la Loi de financespour 1998, le régime a été pérennisé et assoupli par la loi

taires qui leur reviennent par exercice de l’option, via unPEA, de telle façon que la plus-value dégagée par leurrevente immédiate puisse être exonérée de l’impôt sur lesplus-values. Rien ne l’interdit en théorie dès lors que lesrègles de fonctionnement propres au PEA sont respectées.

4.2.2 Mécanismes légaux d’intéressements dessalariés et mandataires sociaux : outils d’intéresse-ment du deuxième cercle de managers

4.2.2.1 Les stock-options

Le premier outil auquel on pense lorsqu’on aborde la ques-tion de l’intéressement au sein d’une société est celui desstock-options.Ces options permettent aux dirigeants de bénéficier du droitd’acquérir ou de souscrire, dans le futur, des actions d’unesociété à des conditions arrêtées par l’assemblée généraleayant décidé l’attribution de telles options ou, en cas dedélégation, par le conseil d’administration (ou le directoire).Depuis la loi NRE du 15 mai 2001, les sociétés non cotéesont perdu une grande partie de la liberté dont elles jouis-saient dans la détermination du prix de souscription desactions. En effet, la loi précise désormais que le prix desouscription des actions émises par une société non cotée,au moment de la levée de l’option, «est déterminé confor-mément aux méthodes objectives retenues en matièred’évaluation d’actions, en tenant compte, selon une pon-dération appropriée à chaque cas, de la situation nettecomptable, de la rentabilité et des perspectives d’activitéde l’entreprise […] A défaut, le prix de souscription estdéterminé en divisant par le nombre de titres existants lemontant de l’actif net réévalué, calculé d’après le bilan leplus récent» (art. L. 225-177 du Code de commerce).En outre, le prix fixé pour la souscription ou l’achat desactions ne peut pas être modifié pendant la durée de l’op-tion à moins que, pendant cette période, il ne soit procé-dé à certaines opérations financières susceptibles d’in-fluer sur la valeur du titre et nécessitant un ajustement duprix convenu à l’origine (article L. 225-181 du Code decommerce modifié par l’ordonnance n° 2004-604 du24 juin 2004).La loi NRE de 2001 a également modifié le délai dit «d’in-disponibilité» durant lequel l’attributaire de stock-optionsdoit les conserver s’il veut bénéficier du régime fiscal etsocial le plus favorable pour l’imposition de la plus-valueréalisée. Initialement de quatre ans, ce délai a été réduit àquatre ans, mais assorti de la contrainte supplémentaired’un délai de portage de deux ans pour bénéficier d’untaux d’imposition réduit sur l’avantage tiré de la levée del’option (différence entre le prix de souscription et lavaleur de l’action à la date de la levée de l’option).

Notons également que l’attrait des stock-options a étésignificativement réduit, tant pour la société qui les attri-bue que pour les bénéficiaires des stock-options, depuis laloi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 qui a institué deux taxessociales complémentaires : une contribution patronale etune contribution salariale sur les stock-options.En effet, l’article L. 137-13 I du Code de la Sécurité socialeajoute une contribution patronale à la charge de la sociétéqui attribue des stock-options alors que jusque-là, l’entre-prise ne supportait aucune charge. Cette contribution estégale à 10 % de 25 % de la valeur des actions sur les-quelles portent ces options à la date de l’octroi, et ce quelque soit le prix de souscription. Précisons que pour lessociétés tenues d’appliquer les normes comptables inter-nationales (en pratique les sociétés cotées), cette contri-bution peut, au choix de la société, être assise sur la justevaleur des options telle qu’elle est appréciée pour l’éta-blissement des comptes consolidés. Cette contribution estexigible dans le mois suivant la date de la décision d’attri-bution des stock-options et applicable quelles que soit lessuites de cette attribution, c’est-à-dire que les optionssoient levées ou non.Par ailleurs, l’article L. 137-14 du Code de la Sécurité socialeinstitue, pour les attributions de stock-options consenties àcompter du 16 octobre 2007, une nouvelle contribution sala-riale égale à 2,5 % de la plus-value d’acquisition (c’est-à-dire, la différence entre la valeur de l’action à la date où lesalarié exerce l’option et le prix d’exercice initialement fixé).En outre, les stock-options présentent l’inconvénientd’être incessibles et de ne pouvoir donner droit à la sous-cription ou au rachat que d’un pourcentage limité du capi-tal de la société émettrice. Cette caractéristique peut poserdes difficultés pratiques importantes lors de la sortie, àl’occasion de laquelle (i) l’acquéreur ne peut acquérir l’in-tégralité des droits représentants, immédiatement ou àterme, une quotité du capital de la cible et (ii) les stocksoptionnaires ne peuvent remonter à l’étage de la holding.Les stock-options demeurent certes un instrument «natu-rel» d’intéressement des dirigeants, mais les contraintesjuridiques et fiscales liées à leur utilisation, et à la déter-mination du prix de souscription des actions auxquelleselles donnent droit, limitent considérablement leur attraitpour les dirigeants candidats à un LBO. En revanche, ellespeuvent constituer un instrument très adapté (car clair ettransparent) pour intéresser un nombre important decadres des sociétés faisant l’objet de LBO (société cible oufiliales de celle-ci), requérant toutefois une ingénierie par-ticulière pour rendre ce régime compatible avec lescontraintes spécifiques d’un LBO (comme par exemple,organiser les modalités de la revente des actions issues de

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des bons, des actions sous-jacentes, est en principetaxable au taux global de 29 % (soit 18 % plus prélève-ments sociaux, CSG et RDS).Cependant, le traitement fiscal de tels gains demeureincertain. En effet, l’administration fiscale se réserve ledroit de requalifier la plus-value réalisée en toute autrecatégorie de revenu (notamment complément de salaire),s’il ressort que l’avantage ainsi consenti est en réalité lacontrepartie d’un travail effectué comme dirigeant dans lasociété.La COB (et aujourd’hui l’AMF) a de nombreuses fois insis-té sur ce risque en indiquant notamment dans son bulletinmensuel de mars 2002 que «l’émission de BSA réservéeaux salariés et aux dirigeants porte un très fort risque derequalification fiscale et sociale».Il faut donc qu’existe un aléa réel concernant le gain ou laperte susceptible d’être réalisé par les titulaires. Les bonsdoivent être souscrits par les dirigeants agissant en quali-té de co-investisseurs et non au titre de leur fonction sala-riés ou de dirigeants et être payés à leur vrai prix (voir à cetégard § 4.3 ci-dessous). Ils doivent également être sous-crits au début de l’opération (closing) c’est-à-dire à unedate où il n’était pas possible de présager de la réussite ounon de l’investissement.A cet égard, conditionner l’exercice des bons à la pré-sence effective du titulaire dans la société comme sala-rié ou mandataire social est à éviter soigneusement. Eneffet, le lien exprès ainsi établi entre la qualité de diri-geant et la possibilité de bénéficier de l’avantage expo-se à un risque fort de requalification par l’administra-tion fiscale.Pourtant, il est de la logique des LBO, que seules les per-sonnes ayant «joué le jeu» jusqu’au bout retirent effec-tivement les fruits générés par l’opération (vesting). Ilest donc légitime que les dirigeants ayant quitté lasociété en cours de vie du LBO ne puissent bénéficier dela totalité des gains susceptibles d’être retirés de l’exer-cice des bons (ces questions s’organisent en généraldans le pacte d’actionnaires auquel les dirigeants sontnécessairement parties ou dans des promesses de ces-sions séparées). Reste que les mécanismes utilisés pourmettre en œuvre ces principes peuvent comporter cer-tains risques.Comme toute émission de valeurs mobilières donnantaccès à terme au capital, l’émission de bons auto-nomes ou de BSA nécessite, à l’occasion de chaqueopération ultérieure sur le capital, de préserver lesdroits des porteurs de titres émis antérieurement.Cette obligation alourdit significativement la gestiondu capital différé et nécessite de procéder à des calculscomplexes.

Utilisés avec précaution, les BSA sont aujourd’hui l’un desoutils les plus efficaces pour permettre à terme le co-investissement des dirigeants, d’autant plus que les BSA,et les actions auxquelles leur exercice donne droit, peu-vent être souscrits dans le cadre d’un plan d’épargne enactions (PEA), dont le régime fiscal est particulièrementattractif.Il convient toutefois de noter qu’un nombre important decontentieux porte sur l’utilisation des PEA dans le cadredu débouclage de management package. Par consé-quent, un élément complémentaire de prudence peutconsister à ce que les BSA et les actions acquises parexercice des BSA ne soient pas inscrites puis cédées dansle cadre d’un PEA.

4.2.3.3 Les actions de préférence

Les actions de préférence, instituées par l’ordonnance du24 juin 2004, avec ou sans droits de vote, peuvent êtreassorties de droits particuliers (pécuniaires ou non) déter-minés lors de leur émission. A l’origine, ce mécanismeavait pour objectif de remplacer la multitude de titres decapital assortis de droits particuliers et d’apporter un élé-ment de simplification et de flexibilité.Elles constituent un outil de gestion des relations entreles dirigeants et les investisseurs financiers dans la mesu-re où elles permettent d’attacher à leurs titres des droitset des pouvoirs spécifiques et notamment un droit d’in-formation privilégié, un droit de consultation préalablevoire un droit de veto pour la prise de certaines décisionssignificatives.En complément, les actions de préférence sans droit devote facilitent les possibilités de transmission derichesses sans transfert immédiat de pouvoir, élémentimportant pour la gestion des relations entre les interve-nants au LBO. Dans cet esprit, il peut être envisagé de pré-voir que si certains critères de performance sont atteints,les actions de préférence permettront à leurs titulairesd’appréhender une quote-part fixée à l’origine du prix decession de 100% de la société.Toutefois, la complexité et la lourdeur de la procédured’émission (leur création donnant lieu notamment à lamise en œuvre de la procédure dite de contrôle des avan-tages particuliers dans l’hypothèse où elles sont émisesau profit d’un ou plusieurs actionnaires nommément dési-gnés) et de la gestion dans le temps de ces titres de capi-tal n’ont en réalité par permis d’instaurer la flexibilité pré-vue à l’origine, faisant de ces titres un mécanisme en réa-lité assez peu utilisé dans les opérations de LBO, sauflorsque la complexité des montages et l’inadaptation desautres outils, font de ses actions la seule solution pratiqueenvisageable.

NRE. Cet outil a été créé afin de permettre aux jeunesentreprises de retenir des collaborateurs de haut niveau.Les BSPCE peuvent théoriquement être utilisés dans lecadre des LBO. Cependant, les conditions d’émission et dedétention de 25 % du capital de la société émettrice pardes personnes physiques, et le délai de 5 ans dans lequelest enfermé leur exercice, rendent les BSPCE rarement uti-lisables pour les dirigeants candidats à un LBO, qui setourneront alors vers des valeurs mobilières dont le cadrelégislatif et fiscal est moins contraignant.D’après le Code général des impôts, seules les sociétésexerçant une activité nouvelle peuvent émettre des BSPCEà l’exclusion des sociétés créées «dans le cadre d’uneconcentration, d’une restructuration, d’une extension oud’une reprise d’activité préexistante». La loi NRE a étendule champ d’application des BSPCE aux sociétés ayant uneactivité financière comme la détention de titres, visantainsi les holdings pures, permettant l’émission de BSPCEdans le cadre d’opérations de LBO (sous réserve bienentendu que les autres conditions soient remplies).

4.2.3.2 Les bons de souscription d’actions

Compte tenu de la liberté qu’autorise leur mise en œuvre,les bons de souscription d’actions, qu’ils soient auto-nomes ou attachés à d’autres valeurs mobilières (parexemple ABSA, dont le régime est régi par les articlesL. 228-91 et suivants du Code de commerce), se sont trèslargement imposés comme support des mécanismes deco-investissement des dirigeants dans les LBO.Toutefois, il convient de conserver à l’esprit que leur utili-sation s’est généralisée à défaut d’instruments spéci-fiques adaptés aux caractéristiques et exigences particu-lières de ce type d’opérations. Créés à l’origine comme unoutil de financement à terme des entreprises, leur utilisa-tion à d’autres fins impose de respecter certainescontraintes et de prendre certaines précautions.Il est important de préciser que ce mécanisme s’inscritdans une logique de co-investissement des dirigeants etnon pas dans celle d’un simple intéressement.L’ordonnance 2004-604 du 24 juin 2004 a soumis lesvaleurs mobilières donnant accès au capital à un régimejuridique unifié et simplifié et a par ailleurs supprimé la dis-position qui imposait que les actions sous-jacentes àl’émission de bons de souscription autonomes émises encas d’exercice des bons le soient dans un délai de 5 ans àcompter de la date de l’assemblée générale ayant suppri-mé le droit préférentiel de souscription des actionnaires. Iln’y a donc plus à distinguer entre les bons de souscriptionautonomes et les BSA attachés à d’autres valeurs mobi-lières, les deux catégories de valeurs mobilières étantdésormais soumises au même régime.

Si le nouveau dispositif est générateur d’une plus grandesécurité juridique, il est cependant alourdi par le mécanismede préservation des droits réaffirmé et complété par l’or-donnance du 24 juin 2004 en cas d’émissions ultérieures devaleurs mobilières. L’objectif est d’assurer, aux porteurs devaleurs mobilières donnant accès au capital, que l’apprécia-tion qu’ils ont faite, au jour de la souscription, de la valeurdes titres escomptés ne serait pas dévaluée par des opéra-tions décidées ultérieurement par la société, qui seraient, àdéfaut d’ajustements, susceptibles de modifier les avan-tages sur lesquels ils ont fondé leur décision.

L’outil de la liberté, mais une liberté sous contrainte

Les bons autonomes, comme les BSA attachés à desactions ou obligations, sont des valeurs mobilières et doi-vent à ce titre respecter les caractéristiques propres à toutevaleur mobilière que sont la négociabilité, la fongibilité etl’indivisibilité. Sous cette réserve, ils permettent de jouird’une assez grande liberté dans la fixation des conditionsd’émission et de souscription des titres sous-jacents.Ils permettent à leurs attributaires la souscription d’actions,dont le nombre et le prix de souscription peuvent être fixéslibrement, dans la limite du montant maximal d’augmenta-tion du capital décidé par l’assemblée générale.Le nombre d’actions auquel chaque bon donne droit desouscrire et le prix de souscription peuvent être fixés dèsl’émission, ou être simplement déterminables au jourd’exercice, par application de formules mathématiques (leprix d’exercice devant au minimum être égal au nominal del’action sous-jacente). Ces dernières peuvent être fonctiond’une multitude de critères tels que le TRI réalisé par lesfonds d’investissement, le prix de cession de la holding oul’actif net retraité de certaines variables.A cet égard, il convient de veiller à ce que les formulesmathématiques :■ soient fonction de variables objectives, déterminables etqui ne dépendent pas des seules titulaires des bons (non-potestativité) ;■ prévoient un plafond, de telle façon que jamais les cal-culs n’aboutissent à un nombre d’actions supérieur au pla-fond de l’augmentation de capital autorisé par l’assem-blée générale ;■ prévoient le recours à un expert pour l’application de laformule en cas de contestation ;■ prévoient des mécanismes d’arrondis et de traitementdes rompus pour que chaque titulaire se voit attribuer unnombre entier d’actions.

Les limites de l’exercice

D’un point de vue fiscal, la plus-value réalisée par le diri-geant lors de la cession de ses bons ou, en cas d’exercice

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négligeable, le coût d’une opération (honoraires de l’ex-pert). D’autre part, certaines valorisations très élevéesd’un management package aboutissent à ce qu’en réalitéil soit plus intéressant pour le dirigeant, compte tenu del’effet de levier espéré, d’investir directement en capital lessommes initialement destinées à être investies dans desoutils de ratchet.

4.4.2 Vers un package pour tous les salariés ?Le marché du LBO est depuis quelques années un marchémature, dont la structure, les exigences, les outils et lesplus-values qui peuvent en résulter sont désormais large-ment diffusés et connus au-delà du microcosme du capitalinvestissement. Cette acculturation du monde de l’entre-prise aux spécificités et opportunités des opérations deLBO génère une double conséquence.Du côté des collaborateurs des sociétés cibles, elle aug-mente de façon significative leurs demandes d’être asso-ciés à l’opération. Du côté des investisseurs, elle permetd’étendre le cercle des partenaires en capital à une popu-lation plus large et mieux informée des «règles du jeu» dece type de montage.Cette généralisation des packages au sein des entreprisesrésulte également pour partie du succès de plusieurs opé-rations de LBO réalisées sur des groupes de taille trèssignificative au sein desquelles la culture de l’actionnariatsalarié, par le biais de plans d’épargne groupe, était déjàtrès présente.Conscient de cette tendance et soucieux de la nécessité decréer des outils adaptés pour faciliter le développementd’un véritable actionnariat salarié au sein des groupessous LBO, le législateur est récemment intervenu pourassouplir les règles régissant le fonctionnement des FCPE,véritables mécanismes de participation des salariés per-mettant d’appréhender les intérêts de tous les salariés autravers d’un support unique.Les deux principales avancées instituées par la loi du 30décembre 2006 pour le développement de la participationet de l’actionnariat salarié consistent à :■ permettre aux FCPE – investis en titres non cotés – d’êtrepartie à un pacte d’actionnaires. Les titres de la holdingdétenus via un FCPE peuvent donc, à l’instar des titresdétenus par les autres investisseurs, être soumis aux res-trictions habituelles existantes dans les LBO, telles que lesclauses d’inaliénabilité, de préemption ou de sortie. Cettenouvelle modalité constitue une réelle avancée et uneadaptation significative du mécanisme aux contraintes desopérations de LBO ;■ créer un nouveau type de FCPE dit «de reprise», dontl’actif peut être investi jusqu’à 95 % en titres non cotées(donc en actions d’une holding de LBO) et non plus seule-

ment dans la limite de 2/3 (limite habituelle mise en placeaux fins d’assurer la liquidité d’une partie de l’actif). Ilconvient toutefois de noter que la mise en place, par l’in-vestisseur financier par exemple, d’un mécanisme de liqui-dité sur les titres détenus par le FCPE permet de s’affran-chir de cette limite du 1/3 liquide.Toutefois, malgré ces assouplissements, un certainnombre de difficultés demeure :■ les dispositions du pacte d’actionnaires auquel le FCPEest partie doivent être compatibles avec les contraintesimposées aux fonds (notamment leurs contraintes deliquidité) ;■ le nouveau FCPE dit de «reprise» vise très spécifique-ment les cas de reprise de l’entreprise par les salariés(RES). Ainsi, ce dispositif doit être adossé à un pland’épargne entreprise, établi non pas unilatéralement maisen vertu d’un accord négocié avec les salariés et qui doitnotamment définir le contrôle final de la société, c’est-à-dire les conditions dans lesquelles l’entreprise qui lesemploie sera contrôlée (le but étant évidemment uneimplication significative des salariés dans la gestion deleur société). En outre, la mise en place de ce type de FCPEest subordonnée à l’implication dans l’opération de rachatd’au moins 15 salariés, ou au moins 30 % des salariés si leseffectifs de l’entreprise n’excèdent pas 50 salariés ;■ la constitution et la gestion d’un FCPE, classique ou dereprise, génère des surcoûts (honoraires des commis-saires aux comptes, des experts et de la société de ges-tion) et des contraintes administratives non négligeables,liées notamment à l’agrément du règlement par l’AMF ;■ rappelons enfin qu’outre la possibilité d’un abondement,il existe un régime fiscal très attractif pour inciter les sala-riés à investir dans leur société. En effet, la plus-valuequ’ils réalisent bénéficie, à l’exception de certaines contri-butions mineures, d’une exonération sociale et fiscale. Cetavantage est toutefois soumis à l’obligation pour les sala-riés, sauf exceptions, de conserver les titres au moins cinqans alors qu’un nombre important de LBO se dénouentdans un délai plus court.Que ce soit par vertu ou par obligation, force est de consta-ter une tendance lourde à la diffusion des managementpackages au sein des entreprises sous LBO.Toutefois, il convient de conserver à l’esprit que, face à unepopulation désormais moins uniforme, les montages doi-vent être adaptés sinon à la situation de chacun au moinsà chaque catégorie de bénéficiaires. En effet, le niveau derisque (et donc l’espérance de gain) doit être fonction dudegré d’implication du bénéficiaire dans le développe-ment, le management et la stratégie du groupe et prendreen compte les capacités financières de chacun. Ainsi, lesinvestisseurs, avec l’équipe dirigeante, distinguent de plus

E n dehors des attributions gratuites d’actions oudes stock-options, dont le régime est très enca-dré et par conséquent très sécurisé, la mise en

place d’un management package requiert certainesprécautions.

4.3.1 Des mécanismes devant impliquer unrisque d’investisseur

P our ne pas apparaître comme un mécanismed’intéressement, assimilable à un bonus,venant rémunérer une activité professionnelle,

il est impératif que les management packages (sauflorsqu’il s’agit d’attribution gratuite d’actions ou destock-options) satisfassent les deux conditions cumu-latives suivantes :■ d’une part, ils doivent être mis en place au profit de diri-geants qui par ailleurs sont également actionnaires de laholding dès l’origine ;■ d’autre part, ils doivent comporter un véritable aléa etconstituer un risque financier pour la personne concernée.Ces deux éléments combinés constituent en effet la clé devoûte des management packages. Les sommes perçues parles dirigeants de LBO au titre de leur package doivent consti-tuer la contrepartie d’un risque d’investisseur.En conséquence, les outils, supports du management pac-kage, doivent être payés par leur bénéficiaire à leur juste prix(voir § 4.4 ci-dessous relatif aux évolutions récentes) et repré-senter pour le bénéficiaire un investissement non négli-geable au regard notamment de ses capacités financières.C’est le risque de perdre une somme non négligeable encas de non-réalisation des objectifs de TRI qui justifie encontrepartie l’appréhension par les managers de sommessignificatives en cas de réussite du LBO.

4.3.2 Des mécanismes devant être anticipatifsUne autre dimension d’importance, pourtant souventnégligée, consiste à prévoir les modalités d’adaptation etd’ajustement des management packages mis en place àl’origine de l’opération aux évènements susceptibles d’in-tervenir en cours du LBO.Les conditions dans lesquelles tout ou partie du packageest perdu en cas de départ du groupe du bénéficiaireconcerné, variables selon la date et la nature du départ(vesting), sont bien entendu toujours prévues mais, la plu-

part du temps, rien n’est dit sur ce qu’il advient en casd’entrée de nouveaux managers et/ou d’opérations decroissance externe nécessitant un investissement en fondspropres complémentaire.Dans de telles circonstances se posent en général lesquestions suivantes :■ la part des managers d’origine doit-elle ou non êtreréduite pour permettre l’entrée de nouveaux managers ?Et dans l’affirmative, dans quelles proportions ?■ comment compenser ou au moins atténuer l’effet dilutifd’un investissement complémentaire en fonds propresauquel un dirigeant n’a pas les moyens de participer paripassu avec les fonds d’investissements ou les autres diri-geants ?■ comment retraiter, le cas échéant, l’incidence négativesur le TRI (critère de déclenchement des packages) de nou-veaux investissements en fonds propres ?Il est très difficile de prévoir dès l’origine, de façon préciseet détaillée, l’ensemble des situations particulières sus-ceptibles de survenir et des règles applicables danschaque circonstance. Toutefois, il est impératif d’arrêter aminima certains grands principes auxquels les partiespourront se référer le moment venu.

4.4.1 Une évaluation des packages

L ’évolution la plus notable réside dans le recours,de plus en plus fréquent, à des cabinets spécia-lisés dans l’évaluation des outils mis en place au

profit des dirigeants dans le cadre du management pac-kage. Cette tendance résulte du développement descontrôles et de l’existence de certains redressementsde l’administration sur les gains significatifs réaliséspar des dirigeants de société sous LBO lors de la ces-sion de leur participation. Comme indiqué plus haut,l’un des critères déterminant, permettant de limiter lerisque fiscal est l’existence d’un véritable aléa. Enconséquence, en cas de contrôle, disposer d’une éva-luation d’un tiers expert se prononçant sur le fait queles outils de ratchet ont été payés par le dirigeant à leurvrai prix, déterminé sur la base des modèles classiquesde valorisation d’options adaptés aux spécificités desLBO, peut constituer un argument fort.Il convient toutefois de relever que cette pratique a seslimites. D’une part elle renchérit, parfois de façon non

4.4Principales

évolutions récentes

4.3Eléments

de précaution

36 37

L es relations entre managers et investisseurs,dont les destins sont intimement liés, sontrégies principalement par le pacte d’action-

naires, et accessoirement par les statuts de la société.Le pacte régit leurs rapports dans trois grands domaines :l’organisation de la gestion, les mouvements sur le capitalet les clauses de séparation.Au même titre que les grandes lignes du «managementpackage», les principes fondateurs et les mécanismesopérationnels de ce partenariat doivent être définis très enamont de la réalisation effective du LBO.Dans le contexte d’une acquisition par LBO, le pacte d’ac-tionnaires doit établir un équilibre entre : la nécessaireextension des droits d’actionnaires détenus par les action-naires financiers au cours de la vie du LBO (1), l’obligationd’assurer l’organisation efficiente du contrôle du capital(2), et la valorisation du statut particulier des dirigeants àl’issue d’un LBO réussi (3).

5.1.1 Pour les actionnaires financiers, le sta-tut classique de l’actionnaire est insuffisant

E n droit français, le statut de l’actionnaire est engrande partie celui d’un propriétaire et non celuid’un acteur impliqué dans la vie de la société

dont il possède une part du capital. Les droits qui luisont reconnus sont donc limités en conséquence.Son contrôle sur les décisions et les événements qui ponc-tuent la vie de la société s’exerce principalement a poste-riori, lors de l’assemblée générale annuelle statuant sur lescomptes sociaux. Les voies d’investigations de la gestionque lui ouvre le droit français sont principalement judi-ciaires (expertise de gestion, mandataire ad hoc…), oudrastiques comme l’utilisation du pouvoir de révocation adnutum des mandataires sociaux.On comprend aisément que ces mécanismes sont insuffi-sants et inadaptés à la logique d’un LBO, qui requiert desmodes à la fois plus précoces et plus consensuels de trai-

tement des conflits potentiels entre dirigeants et action-naires financiers.De plus, certaines orientations ou engagements straté-giques doivent faire l’objet de décisions conjointes entreles financiers et les dirigeants. Il en est ainsi par exemplede la réalisation d’opérations significatives de croissanceexterne, opérations nécessaires et fondamentales dans lemodèle de création de valeur des LBO dits «build-up»,dans lesquels l’entreprise cible du LBO initial va chercher àracheter d’autres entreprises de son secteur, afin de deve-nir un des leaders d’un marché jusque-là plus atomisé.

5.1.2 La participation directe des actionnaires finan-ciers à la gestion n’est pas une optionLa participation directe des actionnaires financiers à lagestion de l’entreprise cible d’un LBO serait en premier lieucontraire à l’esprit même du LBO, qui repose pour unebonne part sur la confiance accordée par les actionnairesfinanciers aux capacités de gestionnaires des dirigeants.De plus, la gestion n’est ni dans la culture, ni dans le métierdes actionnaires financiers de LBO : en cela leurs objectifset leurs méthodes sont quelque peu différents de ceux des«capital-risqueurs».Surtout, en droit français, la responsabilité encourue parles actionnaires qui s’immiscent dans la gestion des socié-tés est particulièrement forte, et la jurisprudence des tri-bunaux français n’a pas cessé de se durcir depuis unequinzaine d’années, utilisant des critères de fait, dans uneanalyse au cas par cas.

5.1.3 La tentative de création d’un statut d’actionnaire «impliqué», sans être «substitué» aumanagement(i) Clauses d’information privilégiée

L’actionnaire financier cherche à être à la fois un guidepour l’équipe dirigeante, car il possède plus de recul qu’el-le sur l’entreprise cible du LBO, et un garde-fou face auxtentations centrifuges qui constitueraient une menacepour la réussite du business plan.Pour ce faire, il est primordial qu’il dispose, dans des délaisde production très courts, d’une information aussi fiableque possible sur l’entreprise.Les clauses d’information privilégiée des pactes de LBOprévoient donc, avec précision, les informations de naturecomptable, financière, commerciale, parfois technique ouautre que les dirigeants doivent fournir chaque mois, tri-mestre et année écoulés aux actionnaires financiers. Des

5.1Protection desactionnaires

financiers : uneliberté «encadrée»

des dirigeants

5-Les pactes d’actionnairesen plus souvent, au sein du groupe, un cercle 2 voire uncercle 3, bénéficiant chacun de packages spécifiques baséssur des outils différents (voir à ce sujet § 4.2.2 ci-dessus).A cet égard, dans le contexte d’un marché très en crois-sance, dans lequel les perspectives de gain pouvaientsembler (à tort) assurées jusqu’à la récente crise des sub-primes et aux tensions générées sur le marché du crédit,les équipes dirigeantes ont dû jouer un rôle modérateurdans les montants investis par les collaborateurs au capi-tal de la société afin de leur faire prendre conscience de ceque de tels investissements comportent par définition unepart de risque non négligeable, requérant ainsi de ne pasy investir la totalité de son patrimoine.

4.4.3 Des managers prêteursCompte tenu du développement des LBO secondaires per-mettant aux managers de faire du «cash out» lors de lapremière opération, et du développement des OBO(Owner Buy Out) dans lesquelles les managers ont unevraie capacité financière, certains managers ont lesmoyens, et n’hésitent plus à souscrire à une «mini-mezza-nine» en obligations convertibles.Ce mécanisme leur permet de leur assurer un mécanismed’acquisition d’une plus-value complémentaire parconversion d’un certain nombre d’obligations convertiblesen fonction d’un TRI réalisé lors de la sortie et en cours devie du LBO. Les intérêts payés sur les obligations peuventconstituer un complément de rémunération. A cet égard, ilconvient de noter que des apports de titres de la cible à laholding de rachat peuvent être rémunérés pour partie enobligations convertibles, permettant ainsi aux managersd’accroître le levier de son investissement.

4.4.4 Des managers surreprésentés au capital(mécanisme dit de «reverse ratchet»)Dans certaines opérations, un autre mécanisme d’intéres-sement des managers peut être mis en place, qui consisteà ce que les managers détiennent dès l’origine une partici-pation très élevée dans le capital de la holding (correspon-dant aux meilleures hypothèses de TRI), qui sera réduitepar l’effet dilutif d’OC ou des BSA détenus par les investis-seurs au niveau correspondant au TRI effectivement réali-sé lors de la sortie. Ce schéma dit de «reverse ratchet»

inverse la logique habituelle des mécanismes d’intéresse-ment, dans la mesure où la participation des managers nes’accroît pas lors de la sortie, mais est au contraire rame-née à la participation devant effectivement leur revenircompte tenu du TRI effectivement réalisé.L’utilité de ce type de mécanisme au regard des enjeux fis-caux liés au management packages n’est pas certaine. Parailleurs, elle pose deux difficultés pratiques, qui sont : lagestion des sorties intermédiaires, et la gestion de la sur-représentation des managers au capital en cours de vie duLBO, ce qui nécessite l’insertion dans le pacte de clausesspécifiques ou bien une plus grande complexité dans lastructuration des valeurs mobilières émises par la holding.

Conclusion

Plusieurs années de croissance soutenue et de dévelop-pement des opérations de LBO ont abouti à une grandematurité du marché et à un haut degré de professionnali-sation de ses pratiques. Cette tendance est notammenttrès marquée s’agissant de la place des managers austade des négociations. Ils sont désormais rompus à cetype d’opérations et à leurs mécanismes juridiques etfinanciers, chaque fois conseillés par des avocats spéciali-sés et régulièrement adossés à la compétence et l’expé-rience de cabinets conseil. Dans ce contexte, la tendance aété à un accroissement significatif des demandes desmanagers, notamment lors des LBO secondaires et ter-tiaires, et quelquefois à une surenchère des fonds d’inves-tissements eux-mêmes, prêts à accorder des conditions deplus en plus favorables au management pour emporter undossier.Dans ce contexte se sont développées des pratiques demarché «standards» souvent très en faveur des managers.Depuis quelques mois, force est de constater une formed’«atterrissage», qui devrait être confirmée et accentuéepar le ralentissement de l’activité économique et lacontraction du marché du crédit. Des demandes trop nom-breuses, parfois déconnectées de toutes mesures, ont eupour conséquence un rééquilibrage des packages, preuveprobablement d’un marché réellement mature, de retour àses fondamentaux que constitue la recherche d’un aligne-ment d’intérêts entre le capital et la compétence sans dis-torsion excessive au profit de l’un ou l’autre des acteurs.

38 39

but de désamorcer en amont tout conflit ou blocage poten-tiel entre actionnariat et management.

(v) Les clauses de majorité renforcée

Ce type de clause permet de soumettre les décisions d’uneimportance particulière ou touchant à la structure du LBOà l’autorisation préalable des organes décisionnels sta-tuant à une majorité renforcée.Cette procédure doit rester exceptionnelle afin d’éviter leseffets pervers d’un renforcement trop important tendant àbloquer toute décision.

(vi) Le droit de veto

L’instauration d’un tel droit au sein du pacte d’actionnairesou attaché aux actions de préférence va donner la possibi-lité aux actionnaires financiers de s’opposer et de sanction-ner toute gestion non conforme à la lettre ou aux objectifsdu business plan et aux choix stratégiques des managersqui représenteraient un danger pour la société cible.

5.2.1 Clauses de confidentialité et de non-concurrence

L a réussite d’une opération de LBO va égale-ment dépendre de la maîtrise des comporte-ments des dirigeants dont on veut s’assurer la

fidélité dans l’opération entreprise.L’insertion de clauses de confidentialité et de clauses denon-concurrence dans le pacte (les rédacteurs pouvantdonner effet à ces dernières à la vente ou au départ du diri-geant concerné) va permettre aux actionnaires financiersde se prémunir contre d’éventuels comportements oppor-tunistes des dirigeants et ce, non seulement pendant ladurée de l’opération de LBO, mais également, pour unedurée déterminée, après l’opération de LBO.

5.2.2 Clauses d’exclusionL’insertion dans le pacte d’actionnaires de clauses d’exclu-sion va permettre aux actionnaires financiers d’obliger lasortie d’un actionnaire par suite de l’arrivée de certainsévénements jugés déterminants pour la cohésion du pro-jet «managerial»Ainsi la qualité d’actionnaire des dirigeants pourradépendre du maintien de leur contrat de travail ou mandatsocial au sein de la société.

Il convient néanmoins de rédiger ces clauses avec précau-tion. Ainsi, la procédure d’exclusion doit-elle être prévuenotamment au regard du droit d’être entendu de l’action-naire exclu. De même, les modalités d’indemnisation doi-vent être prévues dès l’origine.On soulignera l’avantage de la SAS, dont le régime assureune grande liberté pour l’instauration de ces clauses.

5.2.3 Restrictions aux transferts de valeurs mobi-lièresDans un LBO, l’étendue des restrictions posées aux trans-ferts de valeurs mobilières diffère selon (i) la nature destransferts envisagés (sortie au profit d’un tiers acquéreur,reclassement de titres entre dirigeants, dévolution succes-sorale…), (ii) la qualité de l’actionnaire concerné (action-naire financier, dirigeant…), (iii) la structure de l’opération(plusieurs actionnaires financiers, existence d’un finance-ment mezzanine, poids relatif des dirigeants dans le capi-tal…), et (iv) la période de la cession envisagée.

(i) Transferts interdits : clauses d’inaliénabilité

Souvent appliquées pour les deux ou trois premièresannées suivant l’acquisition, ces clauses interdisent enpratique tout mouvement sur le capital détenu par l’inté-gralité, ou seulement certaines catégories d’actionnaires,et visent en particulier les dirigeants dont on veut assurerla fidélité au projet de LBO. Ces clauses peuvent aider àmaintenir la cohésion d’une pluralité d’actionnaires finan-ciers.Pour être juridiquement valables, ces clauses doivent pré-voir une limite d’applicabilité dans le temps.

(ii) Transferts encadrés : clauses d’agrément et de pré-

emption

L’ordonnance du 24 juin 2004 a retouché le régime juri-dique des clauses d’agrément statutaires dans les socié-tés anonymes non cotées, en validant la possibilité de sou-mettre toute cession d’actions (même entre actionnaires)à l’agrément préalable de la société.Dès lors, de telles clauses pourront être insérées dans lesstatuts de la société (et non plus seulement dans lespactes d’actionnaires) dont la force contraignante est plusforte que celle des pactes d’actionnaires (nullité de la ces-sion conclue en violation des dispositions statutaires maisréparation en dommages et intérêts pour des cessionsconclues en violation des dispositions d’un pacte statutai-re) favorisant ainsi la réalisation des opérations de LBO.En effet, ces clauses ont pour objectif de maintenir la cohé-sion du capital social (maintien de l’intuitu personae ini-tial) et donc l’équilibre fondateur du LBO. Dans la plupartdes cas, les dirigeants minoritaires y seront soumis sans

5.2L’organisation du

contrôle du capital

indicateurs significatifs de la performance de l’entrepriseseront sélectionnés en fonction de la nature de son activi-té. Les modalités de communication et de discussion de cereporting seront définies dans le pacte.Il convient toutefois de ne pas entraver l’action des diri-geants par des obligations de reporting excessives. Il fautnotamment tenir compte, en la matière, des exigences desbanques qui assurent le financement de l’acquisition etdes actionnaires financiers.L’expérience montre que la négociation de ces clauses dupacte est l’occasion d’échanges financiers approfondis surl’efficacité et la pertinence des systèmes d’informationexistant au sein de l’entreprise cible et, le cas échéant,d’une véritable mise à niveau de ces derniers.Outre la transmission d’une information de qualité surl’entreprise, le pacte doit organiser et cadencer des«points de rencontre» entre les dirigeants et les action-naires financiers. A ce titre, le pacte pourra intégrer l’ins-tauration d’un comité de suivi et d’un comité des rémuné-rations, véritables espaces de réflexion distincts desautres organes sociaux.Il faudra également tenir compte des desiderata desbanques, faire participer les managers des filiales et inté-grer, le cas échéant, des personnalités extérieures.

(ii) Instauration d’un comité de suivi

Le comité de suivi, dont les réunions sont moins formellesque celles d’un conseil d’administration ou d’un conseil desurveillance, aura pour objet de créer un lien régulierd’échange et de réflexion entre dirigeants et actionnairesfinanciers sur la réalisation du business plan et sur lesorientations stratégiques qui s’offrent à l’entreprise.Peuvent y être débattus les budgets prévisionnels, lesréorientations éventuelles de la politique commerciale del’entreprise, ou les opportunités de croissance externeidentifiées. Il ne doit pas s’agir d’un organe collégial déci-sionnaire (au risque pour les actionnaires financiers d’unegestion de fait), mais plutôt d’une forme de «brain trust» àl’anglo-saxonne.Pour ce qui concerne le calendrier de ces rencontres, il estnaturel qu’elles prennent place de façon très régulière(mensuellement), juste après la réalisation de l’acquisi-tion, pour s’espacer une fois que les parties au LBO ontpris des habitudes de communication.

(iii) Instauration d’un comité des rémunérations

L’existence d’un comité des rémunérations repose surl’idée qu’au-delà du levier financier et du levier fiscal clas-siquement évoqués dans les LBO, il existe aussi un fortlevier social : exercice «tendu» financièrement parconstruction, le LBO doit permettre d’insuffler une forte

motivation et de décupler l’esprit d’entreprise, pouratteindre les buts de création de valeur qu’il se fixe.Ce comité est donc en charge du suivi et de l’harmonisa-tion des rémunérations des cadres et dirigeants et pourraêtre le lieu d’échanges sur les plans de carrière et lesdivers mécanismes d’intéressement le cas échéant envigueur, pour toutes les catégories de personnel au sein del’entreprise.

(iv) Système des autorisations préalables

Cette clause du pacte soumet à autorisation préalable duconseil d’administration ou de surveillance statuant à lamajorité qualifiée (donc avec l’assentiment des action-naires financiers) la mise en œuvre par les dirigeants decertaines décisions de gestion d’une particulière impor-tance, ou qui seraient susceptibles de constituer des «casde défaut» au sens des accords de financement du LBO.Fréquemment, le champ des décisions visées par cesclauses couvrira (i) les engagements dont l’impact finan-cier potentiel est significatif (comme le fait par exemple deconsentir des sûretés), (ii) les orientations stratégiquesnon consignées dans le business plan, (iii) les décisionsstructurelles affectant l’équilibre ou les accords du LBO.La tentation de soumettre en pratique toutes décisionsimportantes au contrôle préalable des actionnaires finan-ciers est souvent forte lors de la rédaction des pactes d’ac-tionnaires de LBO. Il convient d’être très prudent dans larédaction de ces clauses, afin d’éviter l’écueil jurispruden-tiel de la gestion de fait.La rédaction doit être précise et motivée, dégager les «fac-teurs discriminants» de l’entreprise cible et de son activité,et ne pas impliquer des actionnaires financiers trop pru-dents dans la gestion quotidienne de l’entreprise au détri-ment de l’expérience des dirigeants.Une évolution du régime de ces autorisations préalablespeut être prévue au cours du temps afin de permettre auxactionnaires financiers d’alléger leur contrôle, notammentsur les filiales opérationnelles du groupe cible du LBO, unefois qu’un «rythme de croisière» s’est installé avec l’équi-pe dirigeante.Les quelques clauses évoquées ci-dessus ont donc pourobjet d’instaurer les bases d’une relation suivie, caden-cée mais fluide, entre les actionnaires financiers et lesdirigeants dans le contexte particulier d’un LBO, tout enrespectant les règles prudentielles posées par le droitdes sociétés français en matière de gouvernementd’entreprise.Toutes ces clauses peuvent paraître comme étant «stan-dard» et donc presque superfétatoires, mais l’expériencemontre qu’elles ne doivent pas être négligées. Leur exis-tence et leur mise en œuvre dans les pactes ont aussi pour

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sonnable, dans le cas où les actionnaires n’auraient pus’accorder sur l’exercice de leur droit de première offre.

D ans le cadre de la sortie d’un LBO, les action-naires financiers et les dirigeants peuvent nepas avoir les mêmes intérêts. Pour l’action-

naire financier, l’objectif est généralement le désenga-gement total, assorti d’une plus-value de cession laplus importante possible. Pour les dirigeants, la situa-tion varie fortement suivant le mécanisme de cession.

5.3.1 L’introduction de la société en bourse

M ême si ce type de sortie n’est pas le pluscommun, il faut que le pacte y fasse réfé-rence. L’expérience montre toutefois que

peu de pactes prévoient tous les dispositifs entiersd’une sortie en bourse et qu’il faut donc, une fois l’in-troduction en bourse décidée, établir un nouvel accordentre les parties au pacte.L’une des raisons pour créer ce nouveau pacte est que lesintroductions en bourse portent généralement sur unepart minoritaire du capital de la société cible, et n’offrentdonc qu’une hypothèse de liquidité partielle aux action-naires financiers. Il faut donc organiser leur sortie progres-sive afin qu’elle ne vienne pas perturber, de façon intem-pestive, le cours de bourse de la société.L’introduction d’une clause de liquidité dans le pacte vapermettre aux actionnaires financiers et aux dirigeantsd’organiser leurs relations dans l’optique d’une telle sor-tie, et aux actionnaires financiers d’organiser entre eux lesconditions de leur liquidité individuelle.Cependant, si l’insertion d’une telle clause présente l’avan-tage de réaffirmer le principe de liquidité et de fédérer lesdirigeants et les actionnaires financiers dans l’objectif prin-cipal de l’introduction en bourse, elle est un «couperetfinancier» qui ne fonctionne équitablement qu’entre action-naires de taille et de capacité financière comparables.On notera la possibilité pour les rédacteurs de combinercette clause avec un mandat à une banque d’affaires pour100 % des titres, ou même d’améliorer la situation des diri-geants en cas de sortie en bourse.Les questions devant être tranchées soit dans le pacte ini-tial, soit dans le nouveau pacte, nous paraissent être lessuivantes :

■ la valorisation minimale de la société qui sera cotée, etau-dessous de laquelle les actionnaires ne procéderontpas à l’introduction ;■ le pourcentage du capital qui sera introduit et la réparti-tion entre actionnaires de cette possibilité de liquidité ;■ l’acquisition et la répartition des clauses de «lock-up»imposées par les autorités boursières ;■ la participation aux futurs organes sociaux de l’entrepri-se cotée ;■ le périmètre des clauses de préemption qui pourraientêtre maintenues après l’introduction ;■ le dénouement des clauses d’intéressement et de co-investissement des dirigeants et des salariés ;■ l’organisation des travaux préalables à l’introduction ;■ la prise en charge des coûts (élevés) de l’introduction.

5.3.2 La cession industrielle de la sociétéDans une situation de marché «normal», cette cession est laplus «naturelle» puisqu’elle se fait au profit d’un acteur écono-mique qui maîtrise le métier de l’entreprise et sait valoriser lechemin parcouru lors du LBO et, potentiellement, la plus rému-nératrice puisqu’elle peut amener un «pricing» par le repre-neur qui prend en compte non seulement la valeur intrinsèquede l’entreprise cédée, mais aussi la valeur d’opportunité, ou desynergie industrielle, que représente pour lui cette acquisition.Encore faut-il être certain que l’acquéreur industriel poten-tiel, souvent désireux d’obtenir le contrôle intégral de sacible, pourra bien appréhender la totalité du capital déte-nu par les actionnaires financiers et les dirigeants.Dans ce cadre, les actionnaires financiers pourront, sinécessaire, faire jouer l’obligation de sortie conjointeimposée aux dirigeants ou aux «mezzaneurs» éventuels,tandis que les dirigeants seront, de leur côté, assurés departiciper à la sortie, sur les mêmes bases économiquesque les actionnaires financiers, grâce à leur droit de sortieconjointe intégral ou proportionnel.En réalité, la meilleure protection des dirigeants résidedans le fait que, le plus souvent, ils sont à l’origine mêmed’une sortie industrielle. Ce sont, en effet, eux qui connais-sent leurs concurrents ou partenaires industriels suscep-tibles d’être intéressés par une acquisition.Malheureusement, cette solution ne peut souvent êtremise en œuvre pour une question de prix ou pour unequestion de moyens dont ne disposent pas les candidatsindustriels éventuels.Au-delà de ces droits symétriques de sortie, les dirigeantspeuvent chercher à «monétiser» leur risque, et à négocieravec les actionnaires financiers le reversement à leur pro-fit d’une partie de la plus-value que ces derniers ont réali-sé à l’occasion de la cession industrielle : il s’agit du méca-nisme dit de la «rétrocession de TRI».

5.3La sortie du LBO :un exercice délicat

en être pleinement bénéficiaires. Les actionnaires finan-ciers veulent en effet pouvoir organiser le plus librementpossible leurs options de sortie du LBO.La clause d’agrément a classiquement pour objectif d’em-pêcher l’entrée de tiers indésirables dans le capital de lasociété, et permet donc aux actionnaires financiers de maî-triser complètement les transferts envisagés par lesdirigeants.Lorsque l’agrément est refusé, les actionnaires financierspourront à leur choix racheter les actions offertes à lavente, ou bien les faire racheter par un tiers qu’ils agréent,ou encore les faire racheter par la société en vue de leurannulation (avec effet relutif) ou d’un portage temporaire.Il est possible également de prévoir un droit de repentir quiconfère à l’actionnaire cédant la possibilité de renoncer àson projet de transfert en cas de refus d’agrément.Toutefois, l’inconvénient de l’agrément réside dans le faitqu’il s’agit d’un droit collectif, exercé par l’ensemble desassociés. Or, dans la plupart des LBO, il n’est envisageablede consentir un tel droit ni aux dirigeants à l’égard destransferts opérés par les actionnaires financiers ni, en casde pluralité d’actionnaires financiers, à l’un d’entre eux, àl’égard des transferts envisagés par les autres.Dans ces situations, il convient de privilégier le droit depréemption, qui a pour fonction essentielle d’assurer aupréempteur la possibilité d’augmenter sa participation aucapital de la société, si un actionnaire souhaite en sortir.Le droit de préemption est un droit qui peut être exercéseul, donc convenir au souci d’indépendance des action-naires financiers. Cependant, il s’agit d’un droit «coupe-ret», la notification de transfert envoyée par l’actionnairesortant étant assimilée à une offre ferme de vente destitres concernés par le transfert. De plus, à défaut de pré-emption, le transfert des titres est totalement libre.Compte tenu des contraintes imposées par les clausesd’agrément et de préemption traditionnelles, la pratiquedes pactes liés aux opérations de LBO a développé desclauses spécifiques, intégrant au plus près les spécificitésde la situation des actionnaires financiers, et combinantles principes de base de l’agrément et de la préemptiontout en évitant les pièges du cumul de ces deux méca-nismes de nature très différente.En particulier, lorsque les actionnaires financiers souhai-tent dénouer une opération de LBO, il leur est nécessairede purger le droit de préemption qui aura été consenti auxdirigeants, notamment afin de pouvoir conférer un mandatde vente à une banque d’affaires.Le pacte peut alors prévoir un droit de premier refus aux diri-geants, sur la base d’une valeur d’entreprise déterminée parles actionnaires financiers. En cas de non-exercice de cedroit, le droit de préemption des dirigeants est réputé purgé.

5.2.4 Clauses de sortie(i) Obligation de sortie conjointe ou «drag along»

Soucieux de ne pas entraver la sortie du LBO, les action-naires financiers prennent généralement soin de faire pro-mettre aux dirigeants actionnaires, parmi les dispositionsdu pacte, de vendre la totalité de leur participation au capi-tal de la société, aux mêmes conditions que celles offertesà l’actionnaire financier, en cas d’offre par un tiers sur100 % du capital de la société (ce sont les clauses dites de«sortie forcée» ou d’«obligation de sortie conjointe» desdirigeants).Dans le cadre du mécanisme d’obligation de sortieconjointe, les dirigeants ne peuvent contester le prix desortie négocié par les actionnaires financiers avec le tiersacquéreur, et pourront, le cas échéant, être amenés àaccepter : (i) d’être tenus à hauteur de leur participation autitre de la garantie de passif, et (ii) d’être payés en actionsde l’acquéreur pour tout ou partie du prix, et non exclusi-vement en numéraire le cas échéant.

(ii) Droit de sortie conjointe ou «tag along»

En contrepartie, les dirigeants demandent un droit«miroir» de l’obligation de sortie conjointe, par lequel ilspourront obliger le tiers acquéreur à acquérir la totalité deleur participation au capital de la société, aux mêmesconditions que celles offertes aux actionnaires financiers(«droit de sortie conjointe»).Ce droit peut également être proportionnel, c’est-à-direqu’il s’exercera pour les dirigeants à concurrence du pour-centage de leur participation cédé par les actionnairesfinanciers, de manière que tous puissent bénéficier équi-tablement de toute opportunité de liquidité.

(iii) Clauses de première offre en cas de cession d’actifs

ou «first refusal»

De même, en cas de projet de cession d’actifs significatifsou de filiales de la société cible, il convient de tenir comp-te de la disparité des stratégies et des moyens financiersqui peut exister entre les différents actionnaires.Les actionnaires financiers pourront notamment organiserentre eux un droit de première offre sur ces cessions, etconfier aux organes sociaux le soin de les départager pouridentifier le «mieux-disant», qui se verra proposer d’ac-quérir l’actif concerné par préférence à un tiers.Ces clauses sont à manier avec précaution, s’agissant deconventions dites «réglementées» d’une part, et suscep-tibles, d’autre part, de lancer les actionnaires dans unesurenchère nuisible à leur cohésion.Il convient en pratique de fixer les délais de la premièreoffre de façon suffisamment serrée pour que la cession autiers acquéreur pressenti puisse se faire en un délai rai-

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D epuis l’entrée en vigueur de la loi du 15 mai2001 sur les nouvelles régulations écono-miques, le système français de contrôle des

concentrations présente un caractère «automatique»qui fait peser certaines contraintes sur les opérationsde capital-investissement. Une acquisition est soumiseà l’obligation de notification et autorisation préalablespar le ministre de l’Economie dès lors qu’elle atteintune certaine dimension exprimée en chiffre d’affaires,et ce indépendamment de l’analyse concurrentielle decette opération.Ainsi, les investisseurs se voient contraints de notifier unnombre important d’opérations alors que celles-ci neconstituent souvent que leur premier investissement dansun secteur donné d’activité, et sont donc peu susceptiblesde restreindre la concurrence.Les gestionnaires des fonds d’investissement s’étaientdonc initialement interrogés sur la pertinence d’un telcontrôle. Ils avaient également manifesté des inquiétudesliées notamment aux délais induits par ce contrôle.La pratique décisionnelle a permis de lever ces inquié-tudes. En effet, les services du ministère de l’Economie, enparticulier la DGCCRF (Direction générale de la concurren-ce, la consommation et la répression des fraudes), ontadapté leurs pratiques afin de prendre en compte les pro-blématiques spécifiques aux fonds d’investissement etaux opérations de LBO. Il reste que les opérations de capi-tal investissement sont pleinement soumises aux règlescommunes de contrôle des concentrations.

Les règles de contrôle des concentrations seront appli-cables si les trois conditions suivantes sont réunies :

■ le chiffre d’affaires total mondial hors taxes de l’en-semble de l’acquéreur et de la cible est supérieur à 150 mil-lions d’euros ;■ le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé en France parau moins deux des parties à l’opération (l’acquéreur et lacible, ou deux acquéreurs ou deux cibles) est supérieur à50 millions d’euros ; étant entendu que les deux partiesdoivent réaliser chacune 50 millions d’euros ;■ l’opération n’atteint pas les seuils de chiffre d’affaires dudroit communautaire.Antérieurement fixé à 15 millions d’euros, le second seuil aété relevé à 50 millions d’euros en 2004, en vue de ciblerle contrôle sur les opérations les plus significatives. En pra-tique, cette modification a permis d’écarter du contrôle unnombre significatif d’opérations de capital investissement,notamment des opérations de type «mid-cap».Ainsi, il convient de vérifier, à un stade préliminaire de lanégociation, si l’opération envisagée atteint ces seuils. Acet égard, la DGCCRF a défini des règles spécifiques de cal-cul du chiffre d’affaires pour les fonds d’investissement :■ lorsque l’acquisition est réalisée par un fonds d’investis-sement, il convient de prendre en compte toutes les parti-cipations gérées par la société de gestion de ce fonds,même celles détenues par le biais d’autres fonds ;■ si une participation octroie à la société de gestion lecontrôle exclusif de la société acquise, il faut comptabili-ser la totalité du chiffre d’affaires de cette dernière. Si lasociété de gestion détient un contrôle conjoint, le chiffred’affaires de la société acquise est imputé, à partségales, à chacune des entreprises détenant le contrôleen commun, indépendamment de leur pourcentage departicipation ;■ si la société de gestion du fonds acquéreur est détenuepar une autre société ou par un groupe, il faut prendre encompte le chiffre d’affaires de tout le groupe, ce qui a uneincidence particulière pour les sociétés de gestion déte-nues par des groupes de banque ou d’assurances. Enrevanche, ne sont pas pris en compte les chiffres d’af-faires des investisseurs ou porteurs de parts du fonds(sauf dans les cas très rares où ces investisseurs partici-pent à la gestion du fonds, ou lorsque la société mère dela société de gestion détient la totalité des parts dufonds).

6.1Des règles

spécifiques decalcul des seuils de

chiffre d’affairesentraînant une

notification

6-La soumission des acquisitions par LBO au contrôle des concentrations

en France

5.3.3 Le LBO secondaireLa cession du capital de la société cible du LBO à une nou-velle holding créée pour l’occasion, qui recourra à l’endet-tement pour financer une partie de cette acquisition dansle cadre d’un nouveau LBO, est une sortie de plus en plusfréquemment utilisée lorsque la société cible possèdeencore un fort potentiel de croissance.Il arrive même que les actionnaires financiers et les éta-blissements bancaires qui ont participé au LBO primairecomposent la majeure partie de ceux du LBO secondaire,tout simplement parce que la société cible a totalementremboursé le prêt «senior» issu de l’acquisition initiale, etqu’il convient donc, par le nouveau LBO, de réinitialiser lelevier financier de l’opération.Les pactes anticipent de plus en plus fréquemment ce typede sortie et prévoient leur gestion de telle manière que lesaccords et équilibres initiaux atteints entre actionnairesfinanciers et dirigeants ne soient pas entièrement renégo-ciés, même si le LBO secondaire est généralement l’occa-sion d’un accroissement de la part de capital dévolue auxdirigeants, et d’un intéressement plus large des cadres etsalariés du groupe cible du LBO.Si, au contraire, le nouvel acquéreur est un autre investis-seur financier que celui qui avait réalisé le LBO primaire,les dirigeants se trouvent dans une position privilégiéedans la négociation des contours de la nouvelle opération.En effet, ils détiennent le savoir sur l’entreprise, et ilsreprésentent l’élément de continuité au sein même decelle-ci. La question de leur fidélité aux actionnaires finan-ciers d’origine peut donc légitimement se poser, notam-ment pour ce qui concerne la rédaction et la mise en œuvrede la garantie de passif.Le tiers acquéreur demandera généralement aux action-naires sortants, chacun en fonction du niveau de leur par-ticipation (ce qui peut inclure les dirigeants actionnaires),

une garantie de passif (ou d’actif et de passif), de manièreà se voir indemniser de tout préjudice qu’il pourrait décou-vrir ou subir postérieurement à l’acquisition, mais dont lescauses seraient antérieures à celle-ci.La négociation réussie de ce type de contrat repose engrande partie sur la connaissance approfondie que chaquepartie peut avoir de l’entreprise cédée, et des éventuelspassifs ou «pièges» que ses comptes peuvent receler. Lesdirigeants, qui ont naturellement la meilleure connaissan-ce de l’entreprise, ont un rôle fondamental à jouer à cestade, mais peuvent se trouver dans une situation deconflit d’intérêts, compte tenu du fait que le repreneur, dèsla cession réalisée, peut être leur nouvel employeur ouactionnaire.La pratique montre que le fait pour les dirigeants d’avoirété significativement intéressés au capital de l’entreprise,et donc de se trouver ainsi dans le camp des garants lorsde la négociation de la garantie de passif face au nouvelacquéreur, est une véritable source de confort pour lesactionnaires financiers.Le pacte d’actionnaires initial qui lie les sortants peutmême, dans ce cas, prévoir les conditions danslesquelles : (i) le poids de l’obligation d’indemnisation autitre de la garantie de passif sera répartie entre eux, (ii)sera organisée leur défense commune vis-à-vis de l’acqué-reur et vis-à-vis de la société, en cas de mise en jeu de lagarantie.Le pacte d’actionnaires qui noue la relation entre les diri-geants et les actionnaires financiers au sein du LBO, estdonc un contrat très différent des pactes mis en place dansles acquisitions classiques. D’une durée éphémère àl’échelle de la vie d’un groupe, il est le temps d’un LBO lapièce maîtresse de l’équilibre des droits, des devoirs et despouvoirs respectifs des dirigeants et des actionnairesfinanciers.

44 45

■ procédure accélérée : en principe, le ministre a un délaimaximum de cinq semaines, à compter de la notification(complète) pour autoriser l’acquisition, ou alors pour saisirle Conseil de la concurrence s’il considère qu’il existe desrisques pour la concurrence et qu’une analyse plus appro-fondie est nécessaire. Toutefois, concernant les opérationsréalisées par les fonds d’investissement, l’autorisationpeut être délivrée en trois semaines, dès lors qu’il n’y a pasde marché affecté par l’acquisition projetée ;■ établissement d’un tronc commun de notification : àtout moment, il est possible de déposer auprès de laDGCCRF un tronc commun de notification, éventuelle-ment sous forme électronique, présentant le fonds d’in-vestissement acquéreur, sa société de gestion et lesfonds gérés par elle et, le cas échéant, le groupe auquelelle appartient. Ainsi, pour chaque acquisition réaliséepar ce fonds, il ne restera plus qu’à présenter la ou lessociétés acquises et les marchés concernés par l’opéra-tion, ce qui allège le délai de préparation matérielle dechaque dossier de notification.

Certaines opérations de capital-investissement soulè-vent de réels problèmes de concurrence. C’est notam-

ment le cas de certaines opérations de «build-up»(acquisitions réalisées par la cible) dans lesquellesl’addition de parts de marché est importante.Dans ces cas, il est toutefois possible d’obtenir uneautorisation dans le délai initial de cinq semaines, siles parties sont en mesure de proposer à la DGCCRFdes remèdes appropriés, permettant de combler lesrestrictions de concurrence résultant de l’opération.Les remèdes peuvent consister par exemple, en la ces-sion d’une ligne de production, ou l’octroi d’une licen-ce de droits de propriété intellectuelle.Dans ces cas, il est essentiel d’identifier les éventuelsproblèmes de concurrence soulevés par l’opération leplus en amont possible, afin de pouvoir traiter rapide-ment ces problèmes avec la DGCCRF. Eventuellement,l’opération peut faire l’objet d’une prénotification, quipermet de traiter les difficultés avant même la conclu-sion d’un accord irrévocable entre les parties. Il seraalors possible d’obtenir une décision dans lesmeilleurs délais à compter du dépôt de la notificationformelle.Il en résulte que, si un investissement est réalisé dansla perspective d’un «build-up» postérieur, il est impor-tant d’identifier les éventuels problèmes de concurren-ce dès la première acquisition. De même, si l’investissement est réalisé sur un marchédéjà très concentré, et qu’il est prévu de réaliser unecession ultérieure à l’un des opérateurs présents surce marché, il convient, dès l’acquisition, de déterminersi cette sortie pourrait poser des problèmes deconcurrence.

6.4Anticiper

les problèmes de concurrence

S eules les opérations qui entraînent une prise decontrôle de la société cible sont considéréescomme des concentrations et soumises aux

règles de contrôle. Au sens du droit des concentra-tions, le contrôle existe lorsqu’un ou plusieurs acqué-reurs ont la faculté de bloquer, individuellement, lesdécisions stratégiques de la société acquise. Cecontrôle peut être conjoint ou exclusif.Ainsi, une prise de participation minoritaire par un fondsd’investissement ne constitue une concentration que si lefonds se voit accorder des droits de veto sur les décisionsstratégiques de la cible (telles que, par exemple, l’adop-tion du business plan et du budget ou la nomination ou larévocation des dirigeants).De même, ne constitue pas une concentration l’acquisitionqui aboutit à une situation de «majorités fluctuantes». Unexemple en a été donné lors de l’acquisition de la sociétéGIC par plusieurs investisseurs, par le biais d’une holdingde reprise (Lettre du ministre du 20 août 2002 – FinancièreArgassi) : la DGCCRF a considéré qu’aucun des action-naires de la holding de reprise n’était en mesure de blo-quer, individuellement, les décisions stratégiques de cettedernière, et par conséquent de la cible. L’opération neconstituait donc pas une concentration et échappait auxrègles de contrôle.

6.3.1 Analyse concurrentielle

Une évaluation rapide des marchés concernés parl’acquisition projetée et des parts de marché desparties permet en général de déterminer, à un

stade initial de la négociation, s’il existe des «marchésaffectés» par cette opération. La DGCCRF considère qu’unmarché est «affecté» (i) lorsque la part combinée des par-

ties sur ce marché excède 25%, ou (ii) lorsque l’une desparties à l’opération (acquéreur ou cible) détient une partde marché supérieure à 25% sur un marché, et qu’uneautre des parties exerce une activité sur un marché enaval, en amont ou connexe à ce marché.Cette analyse des marchés a pour but d’apprécier si l’ac-quéreur est déjà présent sur le marché de la cible, ou surles marchés en amont, en aval ou connexes de celui de lacible et si, par conséquent, l’opération entraînera des addi-tions de parts de marché, ou des effets verticaux oucongloméraux entre différents marchés.L’approche de la DGCCRF en ce qui concerne la détermina-tion du périmètre concurrentiel d’activités a évolué. Elle ad’abord pris en compte l’autonomie de la société de ges-tion du fonds d’investissement, particulièrement en matiè-re d’investissement et désinvestissement, et analysé si lesactionnaires de cette société de gestion étaient ou non enmesure d’exercer sur elle une influence déterminante. Cefaisant, la DGCCRF considérait que si la société de gestionétait autonome, seules devaient être prises en compte lesactivités des sociétés détenues par les fonds gérés parcette société de gestion ; en revanche, si la société n’étaitpas autonome, l’examen portait sur les activités de tout legroupe auquel elle appartient.La DGCCRF adopte toutefois aujourd’hui une approcheidentique à celle qui prévaut pour le calcul des seuils dechiffre d’affaires. Le périmètre pris en compte pour l’analy-se concurrentielle inclut donc non seulement l’ensembledes activités des sociétés détenues par les fonds gérés parla société de gestion mais également les activités du oudes groupes auxquels la société de gestion appartient. Laquestion de l’autonomie de la société de gestion estdésormais indifférente.

6.3.2 Instruction du dossier de notificationDepuis la fin de l’année 2004, il n’est plus nécessaire d’at-tendre la signature d’un accord irrévocable entre les par-ties pour notifier l’opération. Il est possible de le faire surla base d’un projet «suffisamment abouti», notammentd’une lettre d’intention et/ou d’un projet de contrat de ces-sion d’actions.Cette faculté ouverte à tous les types de concentrationspeut être utilisée par les investisseurs pour leur permettred’obtenir l’autorisation du ministre de l’Economie avantmême la signature de l’accord irrévocable, pour autant quela publicité liée à la notification (publication sur le site inter-net de la DGCCRF ; envoi de questionnaires de marché) nesuscite pas de difficultés au stade de la négociation.Si cette faculté n’a pas été utilisée, il est possible dedemander à la DGCCRF le bénéfice d’autres assouplisse-ments de procédure :

6.3Des allégements

de procédure sontpossibles

6.2Toutes les

acquisitions nesont pas soumises

au contrôle desconcentrations

46 47

nus pour la société opérationnelle à l’égard de la holding.Mener à bien le retournement nécessite d’instaurer un dia-logue de qualité entre les différents intervenants. C’est làune des complexités des LBO. Un manager confronté auxdifficultés de son entreprise se trouve contraint de devoir,dans le même temps, négocier avec ses actionnaires, sesbanquiers, ses fournisseurs, ses sous-traitants, les créan-ciers publics sociaux et fiscaux, et éventuellement sessalariés. Dans le cadre d’un LBO, les intervenants sontencore plus nombreux. A ceux listés ci-dessus s’ajoutentles banquiers seniors de la holding de reprise, les mezza-neurs et autres financiers. Certains de ces créanciers nesont même pas nécessairement connus du débiteurlorsque la banque senior a syndiqué ses créances sur lemarché de la dette (mouvement qui devrait s’accentueravec les contraintes imposées par Bâle II). A l’inverse, cescréanciers ne connaissent pas nécessairement l’entrepriseet n’ont, contrairement à la banque, aucun lien commercialavec l’entreprise. En outre, l’identité de ces créanciers peutconstamment changer, les cessions pouvant continuer àintervenir pendant les discussions. De nouveaux interve-nants peuvent également apparaître quand il est questionde faire entrer de nouveaux investisseurs comme les fondsspécialisés dans le retournement. Enfin, les intérêts de cesdifférents intervenants sont divergents. La discussion dansun contexte de difficultés entraîne le plus souvent une cer-taine crispation des positions des uns et des autres, cha-cun privilégiant son intérêt propre.Classiquement, les banques envisagent difficilement deconsentir de nouveaux crédits sans effort supplémentairedes actionnaires. Ces derniers sont réticents faute de visi-bilité. Le manager peut, quant à lui, être tenté de déposerrapidement son bilan pour pouvoir imposer des délaisdans la discussion et pour préserver sa propre responsa-bilité. Les créanciers de la société opérationnelle ont éga-lement des intérêts divergents de ceux de la holding.Pourtant le retournement d’un LBO passe nécessairementpar un équilibre de tous ces différents intérêts. Cet équi-libre nécessite de ne pas se focaliser totalement sur ladette de LBO pour laisser respirer les filiales opération-nelles afin qu’elles continuent à créer de la valeur, et éga-lement de veiller à ne pas surajouter de l’endettement quipourrait menacer tout remboursement.Instaurer un dialogue de qualité et en amont des difficul-tés nécessite une information financière particulièrementfiable et transparente. De la fiabilité de cette information,tant pour l’existant que pour les prévisionnels, dépendrala possibilité de prendre des décisions éclairées maisaussi le sentiment de sécurité qu’il convient impérative-ment de donner aux intervenants pour qu’ils consentent ànégocier.

Dernière contrainte et non des moindres : la rapidité. Touten devant intervenir sur tous ces fronts dans le mêmetemps, les intervenants doivent veiller à ce que l’existen-ce des difficultés et leur traitement demeure confidentiel(ce qui n’est jamais possible très longtemps). L’excellenteconnaissance des différents modes de traitement, deleurs contraintes spécifiques, de leur portée variée estnécessaire pour pouvoir adopter au plus vite la stratégieefficace et cohérente. La rapidité exige également que lesintervenants, qu’il s’agisse des conseils avocats ethommes du chiffre, ou encore de l’administrateur judiciai-re (éventuellement désigné en qualité de mandataire adhoc ou de conciliateur) travaillent en étroite collaborationselon des standards partagés et éprouvés. De l’efficacitéde cette collaboration dépend également la nécessaireconfiance qui doit présider dans les rapports entre lesintervenants. L’administrateur doit avoir la confiance dutribunal, les conseils doivent avoir la confiance du mana-ger et des actionnaires mais également de l’administra-teur. La qualité des documents financiers à produire, latransparence des négociations à mener sont égalementdes éléments indispensables à la confiance des différentscréanciers et donc à la rapidité de leurs réactions. C’estcet équilibre délicat à trouver entre ces différents para-mètres qui conditionne largement le succès du retourne-ment du LBO.L’ensemble de ces contraintes étant posé, il convient ensui-te de déterminer le mode de traitement des difficultésadapté. Il faut d’abord déterminer à quel niveau se situentles difficultés. Il peut s’agir uniquement de reconsolider ladette de la holding, modifier le rythme de remboursementde la dette d’acquisition, aménager les covenants, modifierles garanties. Dans cette hypothèse, un simple mandat adhoc pourra suffire. Eventuellement, il sera transformé enconciliation afin d’obtenir une homologation. Il peut s’agirégalement de restructurer en profondeur la (ou les) cible(s).Cette restructuration peut être de nature économique,sociale ou industrielle. Il peut être nécessaire alors d’envi-sager la fermeture ou la cession d’une branche d’activité,un plan de licenciement, une délocalisation, etc. Le modede traitement pourra alors être celui de la sauvegarde si lesdifficultés ont été suffisamment anticipées, voire éventuel-lement un redressement judiciaire. Dans cette hypothèsecependant, il conviendra de ne pas rester inactif quant autraitement de la dette d’acquisition dont le remboursementrisque d’être affecté. C’est alors que va se poser le problè-me délicat de l’articulation nécessaire entre le mode de trai-tement adapté aux difficultés de la cible et celui adapté auxdifficultés de la holding tête de groupe. Les situations peu-vent ici être très variées et le choix des modes de traitementest déterminant.

A u risque d’énoncer une évidence, on peut esti-mer que le LBO est «en difficultés» lorsque lecash vient à manquer. Plusieurs causes de

cette insuffisance sont concevables et les situationssont multiples.Il peut s’agir des prévisions qui ont présidé au montagefinancier qui se révèlent à l’usage trop optimistes (insuffi-sance structurelle de cash flow). Une ou plusieurs filialesopérationnelles peuvent voir leur activité se trouver ensituation délicate (insuffisance ponctuelle de cash flow).Les difficultés peuvent survenir au cours de la «vie» duLBO ou au moment du remboursement in fine de la detted’acquisition. Autant de situations très différentes quiappellent des solutions variées.Dans le cadre d’un LBO il convient d’abord de déterminerà quel niveau se situent les difficultés : s’agit-il unique-ment de reconsolider la dette de la holding, ou plutôt demener une restructuration financière, voire économique,sociale ou industrielle de la (ou des) cible(s) ? Parfois, ilfaudra mener les deux de front. Dans tous les cas, ilconviendra de déterminer le mode de traitement adaptéaux difficultés des filiales opérationnelles et celui adapté àla holding d’acquisition. La complexité particulière de cesdossiers, au-delà des divergences d’intérêts, consiste àveiller à l’articulation cohérente de ces modes de traite-ment entre eux afin d’éviter que l’un ne compromettel’autreLe droit du traitement des difficultés des entreprises a étéprofondément remanié par la loi n° 2005-845 du 26 juillet2005, dite «loi de sauvegarde des entreprises», dont lesdispositions sont pour l’essentiel entrées en vigueur le 1erjanvier 2006. La philosophie de cette loi est essentielle-ment de favoriser la prévention des difficultés par un trai-tement le plus en amont possible de l’état de cessationdes paiements. Pour ce qui est de la prévention, le législa-teur a ainsi consacré le mandat ad hoc, remanié les dispo-sitions applicables à la conciliation et institué la nouvelleprocédure dite de sauvegarde. Pour ce qui est du traite-ment judiciaire, il a également adapté les procédures deredressement et de liquidation judiciaire.Suivant l’état de gravité des difficultés rencontrées, on dis-tingue classiquement les modes de traitement qui sontamiables de ceux qui sont judiciaires. Jusqu’en 2005, lafrontière entre l’amiable (mandat ad hoc, conciliation) et lejudiciaire (redressement judiciaire et liquidation judiciaire)était marquée par l’état de cessation des paiements del’entreprise. La loi de 2005 a rompu avec ce critère puisquedésormais :

■ la voie amiable de la «conciliation» peut être utilisée parune entreprise alors même qu’elle est déjà en état de ces-sation des paiements, et ce depuis moins de 45 jours ;■ le traitement judiciaire des difficultés est possible alorsque l’entreprise n’est pas encore en état de cessation despaiements : c’est la procédure de sauvegarde.La palette des méthodes possibles pour traiter les difficul-tés est aujourd’hui plus large, et les éléments de souples-se introduits permettent de trouver des solutions variéeset adaptées. Dans le cadre des groupes, et plus spécifi-quement dans le cadre des LBO, les praticiens disposentdonc de moyens efficaces pour mener à bien le retourne-ment escompté. Ces moyens sont cependant souventméconnus et il convient d’en rappeler les principes. Cetteconnaissance est d’autant plus importante que descontraintes spécifiques aux LBO ne sont cependant pasprises en compte et il convient d’être attentif à certainessources de problèmes qu’il faut identifier.

S chématiquement, le retournement du LBOnécessite le plus souvent concomitamment de :renégocier la dette LBO, rechercher de nou-

veaux partenaires et traiter les difficultés des filialesopérationnelles.Il est impératif que le traitement des difficultés de ces der-nières s’opère dans un cadre cohérent avec celui de larenégociation de la dette LBO. Ceci s’inscrit dans descontraintes spécifiques.L’anticipation des difficultés est essentielle pour en analy-ser rapidement les causes, envisager au plus vite leurimpact sur les remontées de cash, élaborer un plan deretournement qui prenne en compte les impératifs à la foisde la dette de LBO et de l’activité des filiales. Seule cetteanticipation permet de conserver la maîtrise et le choix desarmes. A défaut, seules les procédures judiciaires contrai-gnantes s’imposent et le nécessaire arbitrage entre les dif-férents modes de traitement des difficultés ne pourra pluss’opérer. Cette anticipation passe également par une éva-luation précise des risques, notamment en termes decontagion des incidences des modes de traitement rete-

7.1Les contraintesspécifiques aux

opérations de LBO

7-Traitement du LBO en difficultés

48 49

L’homologation de l’accord présente plusieurs avantages.Il suspend les actions et poursuites individuelles pour lescréances dont il est l’objet. Les cautions et garants auto-nomes personnes physiques ou morales peuvent se pré-valoir des dispositions de l’accord homologué.Le jugement d’homologation a également pour effet defixer, avec autorité de chose jugée, la date de cessationdes paiements. En effet, le législateur a prévu qu’il n’estpas possible, en cas de redressement ou liquidation judi-ciaire ultérieure, de faire remonter la date de cessationdes paiements avant la date à laquelle le jugement d’ho-mologation est devenu définitif (sauf en cas de fraude). Ils’agit là d’un élément renforçant substantiellement lasécurité juridique attachée à la conclusion d’un tel accord.Combinée avec l’abandon du soutien abusif (sauf fraude,immixtion ou octroi de garanties disproportionnées) cettedisposition permet, notamment dans le cadre des LBO,d’éviter les crispations et favorise la restructuration de ladette.Les personnes qui, en vue d’assurer la poursuite de l’acti-vité de l’entreprise et sa pérennité, ont consenti dans l’ac-cord homologué un nouvel apport en trésorerie, ou ontfourni un nouveau bien ou service à l’entreprise, bénéfi-cient d’un nouveau privilège sur leurs créances ou sur leprix du bien ou de la prestation de services, privilège de la«new money». Encore faut-il que ces créances soient men-tionnées dans l’accord homologué. En l’absence d’homo-logation, il n’y aura donc pas de privilège.Cette disposition est destinée à favoriser l’intervention àce stade des fonds de retournement et des banques d’in-vestissement spécialisées. Ce privilège intéressant estamené à jouer si survient par la suite une procédure deredressement ou de liquidation judiciaire : les créanciersdétenteurs du privilège de la «new money» ne seront pri-més que par le superprivilège des salariés et le privilègedes frais de justice ; ils seront donc désintéressés avant lescréanciers sociaux et fiscaux et les créanciers «méritants»postérieurs à l’ouverture du redressement ou de la liqui-dation judiciaire. Ce nouveau privilège ne pourra bénéfi-cier aux apports des associés dans le cadre d’une aug-mentation du capital. En revanche, il bénéficiera à leursapports en compte-courant. Ce privilège est dès lors adap-té à l’émission d’obligations qui seront, si tout se passebien par la suite, converties en capital.Le succès de cette méthode est démontré. Plus de 70 %des dossiers ouverts évitent ainsi les procédures judi-ciaires de traitement des difficultés. S’agissant d’une pro-cédure amiable, elle est totalement maîtrisée par le chefd’entreprise, ce qui en LBO évite notamment les effets decontagion entre le traitement des difficultés de la holdinget celui de la cible.

7.2.2 SauvegardeIl s’agit en quelque sorte d’une procédure de «redressementjudiciaire anticipé» : l’idée est de permettre à une entreprisede bénéficier de l’ensemble des règles de protection atta-chées au redressement judiciaire, notamment la suspensiondes poursuites et le gel du passif corrélatif, avant mêmequ’elle ne soit en état de cessation des paiements.

7.2.2.1 Ouverture de la procédure

La procédure de sauvegarde n’est ouverte qu’aux entre-prises qui ne sont pas encore en état de cessation des paie-ments. Elle ne peut être ouverte qu’à la demande du débi-teur lorsqu’il rencontre des difficultés qu’il n’est pas enmesure de surmonter et qui sont susceptibles de le condui-re à la cessation des paiements. L’objectif de cette procédu-re est, après une période d’observation, l’adoption d’un«plan de sauvegarde» visant à empêcher la cessation despaiements et à résoudre les difficultés de l’entreprise. L’undes intérêts de cette procédure est qu’elle n’a pas été assor-tie des règles du redressement judiciaire pouvant apparaîtrecomme des mesures de «défiance» à leur encontre. Ainsi,l’ouverture d’une procédure de sauvegarde n’implique nil’incessibilité des titres sociaux des dirigeants, ni leur mise àl’écart de l’administration de l’entreprise, ni l’instaurationd’une «période suspecte», ni la possibilité de reprise globa-le de l’entreprise par un tiers. L’administrateur judiciaire n’aqu’une simple mission de surveillance et d’assistance : lagestion de l’entreprise est toujours assurée par le dirigeant.La période d’observation entraîne les effets classiques déjàconnus : suspension des poursuites, continuation descontrats en cours, administration de l’entreprise sous lasurveillance de l’administrateur, arrêt du cours des inté-rêts, interdiction de paiement des créances antérieures,réservation du patrimoine de l’entreprise, reconstitutiondu patrimoine de l’entreprise, etc.Dans le cadre d’un LBO, la sauvegarde peut présenter desavantages certains dans la mesure où elle entraîne auto-matiquement la suspension du paiement des échéances.Elle constitue donc un moyen de protection de l’entrepriseet de contrainte de ses créanciers.A tout moment de la période d’observation, le tribunal peutordonner la cession partielle de l’activité ou, si l’état de ces-sation des paiements survient, convertir la procédure desauvegarde en redressement judiciaire ou en liquidationjudiciaire si le redressement est manifestement impossible.A noter : contrairement au redressement judiciaire, le régi-me des licenciements demeure celui du droit commun.

7.2.2.2 Adoption et exécution d’un plan de sauvegarde

Le plan ne peut être d’une durée supérieure à 10 ans (saufsi le plan est adopté par les comités de créanciers selon les

L es différentes solutions concevables doiventêtre combinées et graduées en fonction duniveau de contrainte que l’entreprise subit mais

également qu’elle recherche à imposer à ses créanciers.

7.2.1 Mandat ad hoc et conciliation7.2.1.1 L’assistance d’un professionnel

Dans le cadre d’un LBO, compte tenu des contraintes pré-citées, il est difficilement concevable que le dirigeant et lesactionnaires mènent seuls la restructuration. Cettedémarche est aléatoire et présente peu de sécurité juri-dique. Ils peuvent solliciter, dans un cadre totalementamiable, l’assistance du président du tribunal pour qu’ildésigne un professionnel spécialisé dans le traitement desdifficultés, et ce pour les aider à parvenir à un accord derestructuration. Si l’entreprise n’est pas dans une situationtrop délicate, cette intervention du président du tribunalpeut se faire discrètement et de manière adaptée.Deux pratiques sont ici concevables : la demande de dési-gnation d’un mandataire ad hoc ou celle d’un conciliateur.La pratique démontre que mandat ad hoc et conciliationsont en réalité complémentaires. Souvent, les négocia-tions débuteront avec un mandataire ad hoc qui, lorsqueles négociations seront sur le point d’aboutir, transforme-ra la mission en conciliation afin de pouvoir bénéficier desavantages conférés par l’homologation de l’accord.Le mandat ad hoc ne fait pas l’objet d’un encadrementlégislatif. Son utilisation demeure confidentielle. C’est unmode de résolution des difficultés particulièrement adap-té dans la mesure où la mission du mandataire toutcomme la durée de sa mission sont déterminées au caspar cas et résultent d’une discussion entre le manager et leprésident du tribunal. Le mandataire ad hoc, comme leconciliateur, peuvent être choisis sur suggestion du débi-teur. Le mandataire ad hoc, comme le conciliateur, ne sesubstituent pas au dirigeant et n’ont pas le pouvoir des’immiscer dans la gestion de l’entreprise. Ils n’ont aucunpouvoir de contrainte à l’égard des partenaires de l’entre-prise ; c’est une procédure amiable. Ils n’ont qu’un rôle demédiateurs amenant les intervenants à consentir desefforts réciproques dans l’intérêt de la poursuite de l’acti-vité de l’entreprise. Les avantages du mandat ad hoc sontdonc évidents dans le cadre d’un LBO. C’est un mode de

traitement des difficultés efficace et surtout qui demeuretotalement maîtrisé par le chef d’entreprise, notammentquant à son périmètre. Ainsi, par exemple, s’il ne s’agit quede renégocier les conditions de la dette d’acquisition sansperturber les conditions de fonctionnement de la sociétéopérationnelle. La conciliation fait l’objet de règles plus pré-cises et peut présenter des avantages particuliers, notam-ment quant aux effets d’une homologation de l’accord.

7.2.1.2 Conciliation

Pour bénéficier d’une procédure de conciliation, l’entrepri-se doit rencontrer des difficultés juridiques, économiquesou financières, avérées ou prévisibles, et ne doit pas êtreen état de cessation des paiements, ou alors depuis moinsde 45 jours. La durée de la mission du conciliateur est dequatre mois maximum et peut être prorogée, à la deman-de du conciliateur lui-même, pour un nouveau délai maxi-mum d’un mois. La conciliation ne peut entraîner de sus-pension provisoire des poursuites. Toutefois, si le débiteurfait l’objet de poursuites en cours de procédure de conci-liation, le Président du tribunal peut reporter ou échelon-ner le paiement des dettes en cause ou suspendre les pro-cédures d’exécution engagées par le créancier et ce, sur lefondement des articles 1244-1 et suivants du Code civil.L’accord amiable, négocié avec certains créanciers et par-tenaires de l’entreprise, est destiné à mettre fin aux diffi-cultés de cette dernière. Dans le cadre de la conciliation,les créanciers publics, sociaux et fiscaux peuvent désor-mais, au même titre que les autres créanciers, non seule-ment accorder des délais de paiement mais surtout, etc’est une innovation intéressante, accorder des remises dedettes. L’accord de conciliation est essentiellement unaccord de restructuration de dettes, assorti éventuelle-ment de dispositions sur la restructuration économique etsociale de l’entreprise.Dans un souci de discrétion, l’accord peut être simplementconstaté par le Président du tribunal (ce qui a pour effet delui donner force exécutoire). Il demeure alors confidentiel.La décision n’est pas publiée et n’est pas susceptible derecours.L’accord peut également faire l’objet d’une homologationpar le tribunal, il acquiert alors une force particulière. Pourbénéficier d’une homologation, il est nécessaire : ■ que le débiteur ne soit pas en état de cessation des paie-ments ou que l’accord y mette fin ;■ que les termes de l’accord soient de nature à assurer lapérennité de l’activité de l’entreprise ;■ que l’accord ne porte pas atteinte aux intérêts des créan-ciers non signataires.Dans cette hypothèse, le jugement d’homologation estpublié (mais pas le contenu de l’accord lui-même).

7.2Les critères

de choix entre dessolutions variées

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sauf disposition contraire des statuts ou décision de l’as-semblée générale. Le maintien de l’activité de l’entrepriseest possible si la cession totale ou partielle de l’entrepriseest envisageable, à condition que l’intérêt public ou celuides créanciers l’exige ; la liquidation judiciaire n’entraîne-ra pas alors de déchéance du terme des créances : l’exigi-bilité des créances non échues sera reportée à l’arrêté duplan de cession.Dans le cadre d’un LBO, sauf à ce qu’un plan de cessionsoit rapidement envisageable ou s’il s’agit de fermer unedes filiales opérationnelles sans grande conséquence surl’ensemble du groupe, la liquidation sera souvent révéla-trice d’un échec tant elle est destructrice de valeur.

Le recours aux procédures judiciaires dans le cadre desLBO doit être envisagé avec la plus grande précaution.

Notamment, elles ne sont pas bien adaptées aux dispo-sitifs de conversion de la dette en capital. Les risquesde contagion doivent également être soigneusementanalysés. Ainsi, si pour des raisons fiscales, la holdingd’acquisition s’est vu attribuer un «rôle actif», il y auraun risque de la voir qualifiée de dirigeante de fait de lacible, ce qui peut entraîner une responsabilité spéci-fique à ce titre, notamment en termes de comblementd’insuffisance d’actifs. Pire encore, il convient d’évaluerle risque d’une véritable extension de procédure si uneconfusion des patrimoines est intervenue entre la cibleet la holding. Il convient également de se méfier des«apprentis sorciers» qui pourraient souhaiter une telleextension pour contraindre encore plus les créanciersde la holding dans le cadre de la restructuration de lacible.

modalités décrites ci-après). Dans le cadre de l’élaborationdu plan de sauvegarde, les créanciers interviennent par lebiais de deux comités de créanciers qui doivent être consti-tués par l’administrateur judiciaire dans un délai de 30jours à compter du jugement d’ouverture de la procédurede sauvegarde. Le premier comité est composé des éta-blissements de crédit ; le second comité est composé desprincipaux fournisseurs de biens ou services.Les deux comités doivent être consultés en vue de l’adop-tion du plan de sauvegarde. Les créanciers qui ne sont pasmembres de comités seront consultés selon la procédurede droit commun, c’est-à-dire la consultation par le man-dataire judiciaire avec possibilité pour le tribunal d’impo-ser des délais uniformes de paiement. Les comités ontalors 30 jours pour se prononcer sur ce projet et adopterun plan. Le plan est adopté si chacun des comités votepour (selon des conditions de majorité précisées par laloi).Dans le cadre d’un LBO, ces dispositions sont difficiles àmanier notamment parce que les banques ou mezzaneursayant participé à la syndication, s’ils disposent bien decréances de nature originellement bancaire, ne sont pasmembres des comités. Par ailleurs, dans la mesure où il n’ya pas de gel des cessions pendant la durée de la négocia-tion du plan, le périmètre constitué par l’ensemble descréanciers peut changer, ce qui ne rend pas les discussionsaisées. Enfin, les obligataires sont regroupés séparémenten autant de comités que de catégorie d’émissions, ce quilà encore ne facilite pas les discussions.Le tribunal, après s’être assuré que les intérêts de tous lescréanciers sont suffisamment protégés, arrête alors le planconformément au projet adopté par les comités de créan-ciers. Le plan ainsi arrêté s’impose à tous les membres descomités. À défaut d’adoption d’un plan par les comités,c’est la procédure de droit commun d’élaboration du planqui s’applique. Le plan est opposable à tous. Les per-sonnes physiques co-obligées, cautions ou ayant souscritune garantie autonome peuvent également s’en prévaloir.En cas d’inexécution par le débiteur de ses engagements,le tribunal peut ordonner la résolution du plan. Si la cessa-tion des paiements intervient en cours d’exécution de ceplan, il est non seulement résolu après avis du ministèrepublic, mais une procédure de liquidation judiciaire doitégalement être ouverte.Dans le cadre des LBO, l’utilisation de la sauvegarde peutêtre utile. On relèvera cependant que le mécanisme légalretenu ne favorise pas la rapidité souhaitée, l’élaborationd’un plan n’intervenant souvent que dans un délai de plusde six mois. Là encore, il est souvent utile de combiner sau-vegarde et mandat ad hoc, ce dernier permettant avantl’ouverture de la seconde de parvenir à une sorte de pré-

accord, sorte de projet de plan permettant une adoptionplus rapide.

7.2.3 Redressement judiciaireDans le cadre du LBO, l’utilisation du redressement judi-ciaire est concevable notamment lorsque la restructura-tion des sociétés cibles nécessite des mesures plus radi-cales. Ainsi, elle s’avère utile lorsque des plans sociauxdoivent intervenir, puisque des règles dérogatoires audroit commun sont alors applicables aux licenciements. Laprocédure de redressement judiciaire est ouverte par le tri-bunal lorsque l’entreprise est en état de cessation despaiements. Le chef d’entreprise doit désormais procéder àla déclaration de cessation des paiements au plus tarddans les 45 jours de la survenance de celle-ci s’il n’a pasopté pour une conciliation. Le tribunal désigne les organesde la procédure (administrateur judiciaire, mandatairejudiciaire, juge-commissaire) et ouvre une période d’ob-servation dont les règles sont les mêmes que pour la pério-de ouverte au cours de la sauvegarde.L’administrateur peut avoir une mission de représentation,contrairement à ce qui prévaut en procédure de sauvegar-de. Pendant cette période d’observation, l’activité de l’en-treprise est continuée en vue de l’élaboration d’un projetde plan à laquelle participeront les comités de créanciers,le cas échéant, selon les mêmes modalités qu’en cours desauvegarde.L’objectif de la procédure de redressement judiciaire estuniquement l’élaboration d’un plan de continuation. Leplan de cession, totale ou partielle, est envisagé à présentuniquement comme une modalité de la liquidation judi-ciaire de l’entreprise, dans l’hypothèse où le débiteur estdans l’impossibilité d’assurer lui-même le redressementde l’entreprise. La loi institue ainsi une hiérarchie entreplan de continuation et plan de cession, qui n’existait pasantérieurement. Si, dans le cadre d’un redressement judi-ciaire, la période d’observation ne permet d’aboutir qu’àl’élaboration d’un plan de cession, l’entreprise n’est pascontrainte pour autant de faire l’objet d’une procédure deliquidation judiciaire, mais ce sont les règles propres àcette procédure qui s’appliqueront au plan de cession.

7.2.4 Liquidation judiciaireLa liquidation doit intervenir lorsque la cessation des paie-ments de l’entreprise est avérée et que le redressement decelle-ci est manifestement impossible.L’objet de la liquidation est de mettre fin à l’activité et deréaliser le patrimoine du débiteur par une cession globaleou séparée de ses biens. Le chef d’entreprise est dessaisi.Toutefois, si le débiteur est une personne morale, les diri-geants sociaux en fonction sont maintenus à leur poste,

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U ne tribune publiée par «The Wall Street Journal»a clairement exposé l’un des facteurs déclen-cheurs de la récente secousse subie par les

marchés financiers : le transfert par les banques de leursrisques de crédit à des opérateurs non bancaires, tenantlieu d’investisseurs, au moyen d’instruments opaques1.Cette analyse jette une lumière crue sur une probléma-tique d’une dimension politique : celle de la pertinence dela réglementation actuelle de la finance à l’aune de lamanière dont elle se pratique en réalité.En effet, force est de constater que les trois grands métiersfinanciers que sont la banque, l’assurance et les servicesd’investissement se sont, au cours des dernières années,rapprochés autour du concept de la «marchéisation» durisque, au point d’ignorer toute frontière géopolitique ousectorielle. En 2002, par exemple, les banques améri-caines ont transféré massivement leurs risques de crédit àdes investisseurs européens. Or, sur le terrain juridique, onobserve que ces trois métiers financiers sont cloisonnéspar la loi en trois monopoles d’exercice distincts.En outre, la finance s’affranchit des catégories juridiques.Par exemple, alors que, traditionnellement, les titres decréance ont pour objet de financer l’entreprise qui lesémet, ils sont, depuis quelques années, également utilisésafin de permettre aux émetteurs de se couvrir contre unrisque. Enfin, les conditions de commercialisation de pro-duits financiers de plus en plus sophistiqués traditionnel-lement réservés aux institutionnels se sont assouplies, aupoint d’assimiler dans certains cas l’épargnant particulierà un investisseur dit qualifié. A cet égard, en France, ledécret du 16 mai 2006 est remarquable.Que faire alors pour que le risque que se reproduise une crisefinancière telle que celle de l’été dernier soit limité ? Sansdoute, la réglementation financière devrait être réformée entenant compte des deux éléments de réflexion suivants.Un premier pas consisterait à créer une autorité uniqueréglementant et contrôlant assureurs, banques, presta-taires de services d’investissement et fonds d’investisse-ment, dès lors qu’ils se livrent à l’activité de gestion et detransfert de risques. Notons que nos voisins anglais, avecla FSA (Financial Services Authority), et belges, avec laCBFA (Commission bancaire financière et des assurances),ont exprimé une vision plus audacieuse que celle de la loi

du 1er août 2003 qui a créé un comité purement consulta-tif. Ensuite, il conviendrait de s’intéresser à l’opacité desinstruments par lesquels les opérateurs transfèrent leursrisques de crédit, opacité qui résulte de l’absence de qua-lification légale de certains instruments et du phénomènede «window dressing» ou habillage juridique.L’absence de qualification concerne tous les instrumentsfinanciers. La loi française, née des directives euro-péennes, se contente de lister une série d’instrumentsdont il est dit qu’ils sont des instruments financiers àterme, sans que cette qualification procède de critèresobjectifs d’application générale et pérenne. Par exemple,un swap, dont il est communément admis qu’il est un ins-trument financier à terme, doit-il conserver cette qualifica-tion lorsqu’il présente un caractère indemnitaire ?L’habillage juridique consiste, comme l’ont relevé la FSA etla Commission bancaire, à «habiller», par exemple, un pro-duit d’assurance en instrument financier. Cette pratique del’habillage juridique a également fait l’objet de vigoureuxéchanges entre la NAIC, l’association fédérale des régula-teurs d’assurance américains, et l’ISDA, l’association inter-nationale regroupant les professionnels des produits déri-vés, au sujet des dérivés climatiques.Cet habillage juridique répond à des préoccupations quine sont pas toujours avouées. Premièrement, comme l’aobservé la Commission européenne, les professionnels durisque procèdent à des «arbitrages réglementaires» enlocalisant géographiquement et en structurant leurscontrats de telle sorte qu’ils échappent le plus possibleaux contraintes réglementaires. Deuxièmement, il est plusfacile de «vendre du risque» à des investisseurs, en parti-culier à des OPCVM, par le biais d’instruments financiersqu’au moyen de contrats d’assurances.En définitive, il serait utile de mettre en exergue l’exacteexplication de cette crise : une architecture légale et régle-mentaire obsolète ne reflétant pas l’organisation et lefonctionnement du monde de la finance qui ignore toutefrontière géopolitique ou réglementaire et s’attache àatteindre un objectif économiquement sain – diffuser lerisque pour mieux en absorber le choc et, par là même,accroître la sécurité des financements. ■

Par Alain Gauvin, docteur en droit, avocat,Lefèvre Pelletier & associés

Actualité

Crises financières et obsolescence réglementaire

1. G. Ip et J.-E. Hilsenrath, «How easy credit turned risky – Low interest rates and new financial architecture planted seeds of excess», «The Wall Street Journal», 7 août 2007, p. 1 et 32.

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