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03 Extra Homenaje a Rodrigo de Balbín Behrmann 2015

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03Extra

Homenaje a Rodrigo de Balbín Behrmann

2015

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ARPI 03 Extra

Homenaje a Rodrigo de Balbín Behrmann

Publicación Extra: 2015 ISSN: 2341-2496 Dirección: Primitiva Bueno Ramírez (UAH) Subdirección: Rosa Barroso (UAH) Consejo editorial: Manuel Alcaraz (Universidad de Alcalá); José Mª Barco (Universidad de Alcalá); Cristina de Juana (Universidad de Alcalá); Mª Ángeles Lancharro (Universidad de Alcalá); Estibaliz Polo (Universidad de Alcalá); Antonio Vázquez (Universidad de Alcalá); Piedad Villanueva (Universidad de Alcalá). Comité Asesor: Rodrigo de Balbín (Prehistoria-UAH); Margarita Vallejo (Historia Antigua- UAH); Lauro Olmo (Arqueología- UAH); Leonor Rocha (Arqueología – Universidade de Évora); Enrique Baquedano (MAR); Luc Laporte (Laboratoire d'Anthropologie, Université de Rennes); Laure Salanova (CNRS). Edición: Área de Prehistoria (UAH) Foto portada: Peña Somera (J. A. Gómez Barrera)

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SUMARIO Editorial 05-12 Semblanza asturiana seguida de un oprobio de la vejez . Limón Delgado, Antonio 13-19 Hacerse humano. Carbonell Roura, Eudald 20-31 Peuplement de l’intérieur de la Péninsule Ibérique pendant le Paléolithique supérieur: où en est-on? Aubry, Thierry 32-43 Arte rupestre en la frontera hispano-portuguesa: cuenca del río Águeda. Reis, Mario; Vazquez Marcos, Carlos 44-55 Ganando altura. Tránsito, explotación y campamento de cazadores-recolectores en los espacios de monta-ña de la encrucijada vasca. Arrizabalaga, Alvaro; Calvo, Aitor; Domínguez-Ballesteros, Eder; García-Ibaibarriaga, Naroa; Iriarte-Chiapusso, María José 56-72 Los anzuelos de la Cueva de la Canaleja (Romangordo, Cáceres). González Cordero, Antonio; Cerrillo Cuenca, Enrique 73-80 L’art céramique et l’émergence de l’économie agricole. Salanova, Laure 81-95 La nécropole de Barnenez à Plouezoc’h dans le Finistère: le long tumulus nord et son implantation. Cousseau, Florian 96-110 L’intégration de pierres dressées isolées à l’air libre dans les espaces sépulcraux de l’ouest de la France: Le département du Morbihan Gouezin, Philippe 111-118 Les pétroglyphes de la Pierre des Farfadets. Commune du Poiré sur Vie–Vendée (France). Etude d’inter-prétation provisoire. Benéteau, Gérard 119-132 Algunas reflexiones sobre métodos de realce digital de la imagen en pinturas rupestres. Cerrillo Cuenca, Enrique 133-147 El tiempo y los ritos de los antepasados: La Mina y el Alto del Reinoso, novedades sobre el megalitismo en la Cuenca del Duero . Rojo-Guerra, Manuel; Garrido-Pena, Rafael; Tejedor-Rodríguez, Cristina; García-Martínez de Lagrán, Iñigo; Alt, K.W. 148-163 El megalito pseudohipogeico “Monte Deva III” como representación de la plenitud neolítica en el hinter-land de Gijón (Asturias). de Blas Cortina, Miguel Angel 164-179 Ad aeternum. Enterramiento de la Edad del Bronce en Carmona (Sevilla). Belén Deamos, María ; Román Rodríguez, Juan Manuel; Vázquez Paz, Jacobo

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180-196 Nuevos datos sobre la secuencia de uso sepulcral de la cueva de Santimamiñe (Kortezubi, Bizkaia). López Quintana, Juan Carlos; Guenaga Lizasu, Amagoia; Etxeberria, Francisco; Herrasti, Lourdes; Martínez de Pancorbo, Marian; Palencia, Leire; Valverde, Laura; Cardoso, Sergio 197-210 Novedades en torno al arte rupestre de Valonsadero (Soria). Gómez-Barrera, Juan A. 211-223 Ces marques qui ne font pas partie du corpus. Hameau, Philippe 224-237 A dos metros bajo tierra. Pensando los yacimientos prehistóricos de hoyos. Márquez-Romero, José Enrique 238-256 The diversity of ideotechnic objects at Perdigões enclosure: a first inventory of items and problems. Valera , Antonio Carlos 257-271 Sobre la cronología de los ídolos-espátula del dolmen de San Martín (Laguardia– Alava). Fernández– Eraso, Javier; Mujika-Alustiza, José Antonio; Fernández– Crespo, Teresa 272-286 La diversidad campaniforme en el mundo funerario. Algunos ejemplos de la cuenca media/alta del Tajo en el interior peninsular. Liesau von Lettow-Vorbeck , Corina; Blasco Bosqued, Concepción 287-305 El Yacimiento romano de la Ermita de San Bartolomé (Atalaya del Cañavate, Cuenca). López, José Polo; Valenciano Prieto, Mª del Carmen 306-319 De un largo “tiempo perdido” en la reconstrucción de la Prehistoria canaria a una rápida construcción de su protohistoria. González-Antón, Rafael; del Arco Aguilar, Carmen 320-333 Manifestaciones rupestres protohistóricas de la isla de Lanzarote en un contexto doméstico: el sitio de Buenavista (Teguise). Atoche Peña, Pablo; Ramírez Rodríguez , Mª Ángeles 334-356 Décorations et représentations symboliques sur les mégalithes du Sénégal et de Gambie. Laporte, Luc; Delvoye, Adrien; Bocoum, Hamady; Cros, Jean‐Paul; Djouad, Sélim;Thiam, Djibi 357-370 Breves notas en torno a unos grabados de armas metálicas de influencia atlásica en las tierras del Tiris, al SE del Sahara Occidental. Sáenz de Buruaga, Andoni 371-387 La figura humana en el arte rupestre en el sur del Valle Calchaquí (Salta, Argentina). Ledesma, Rosanna

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ARPI. Arqueología y Prehistoria del Interior peninsular 03– 2015 81

LA NÉCROPOLE DE BARNENEZ À

PLOUEZOC’H DANS LE FINISTÈRE: LE

LONG TUMULUS NORD ET SON IM‐

PLANTATION.

Florian Cousseau (1)

Resumé

Le terme Barnenez est associé au cairn fouillé et restauré dans les années 1950-1960 par Pierre-

Roland Giot. Il semble isolé actuellement mais d’autres édifices limitrophes sont connus et spécialement un

second long tumulus au nord du cairn. Ce travail cherche à ramener à la lumière ce monument avec une ac-

tualisation de ses données qui peut aider à la compréhension de l’ensemble de Barnenez.

Mots -clés: Mégalithe, Nord-ouest de la France, Long tumulus, territoire

Abstract

Barnenez’s term is associated to the cairn, excavated and restored during the 50-60’s by Pierre-Roland Giot. It seems isolated now but other adjacent buildings are known and specially a second long tumu-lus next to the cairn at its north. This work wants to bring to light this monuments with an updating of its data which can help to the understanding of the Barnenez group.

Key words: Megalith, North-west France, long tumulus, landscape

(1) Université de Rennes 1 .UMR 6566-Creaah. [email protected]

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1.- INTRODUCTION

Un long tumulus est un édifice néolithique

de très grande longueur renfermant un à plusieurs

dolmens. Leur compréhension dans l’ouest de la

France est l’une des problématiques de recherche

les plus actives depuis une vingtaine d’année pour

l’étude des mégalithes. Les fouilles des sites d’Er-

Grah à Locmariaquer dans le Morbihan, de Péré à

Prissé-la-Charrière dans les Deux-Sèvres et du

Souc’h à Plouhinec dans le Finistère sont à l’origine

de cette dynamique (Laporte et al. 2002; Le Goffic,

2006; Le Roux 2006 ; Scarre et al. 2003). La mor-

phologie de long tumulus est la dernière phase

d’une évolution architecturale qui peut être com-

plexe et longue (Joussaume 1997 ; Joussaume et al.

1998 ; Scarre et al. 2003; Laporte 2010b). Les

phases précédentes sont constituées d’un ou plu-

sieurs monuments qui ont été inclus ou unis dans

le long tumulus par différents types d’aménage-

ments possibles (Joussaume 2003; Laporte 2010b).

Pour les longs tumulus fouillés au Souc’h et Péré,

deux édifices étaient présents lors de la phase pré-

cédente. Pour le premier, ils ont été unifiés par

l’adjonction d’un dolmen entre les deux et par la

modification des façades (Le Goffic 2006; Laporte

2010a). Pour le second, les deux édifices ont été

englobés dans le long tumulus qui a donc été cons-

truit par-dessus venant les cacher (Laporte et al.

2002; Scarre et al. 2003). Les longs tumulus ca-

chent donc une histoire architecturale qui a pris

plusieurs formes et subi différents aménagements,

renfermant un ou plusieurs monuments qui ont été

indépendants à un temps donné. Les longs tumu-

lus sont régulièrement groupés avec d’autres mo-

numents du même type, par exemple le site de

Péré ou du Souc’h compte deux longs tumulus, la

nécropole de Tusson en Charente en possède trois

mais souvent un seul a été sondé ou fouillé nous

empêchant de voir les relations architecturales et

chronologiques entres ces différents longs tumu-

lus. La compréhension du fonctionnement de l’en-

semble est donc biaisée. Des édifices d’autre type

peuvent être rassemblés sur le même lieu comme

la nécropole de Bougon qui possède un long tumu-

lus et quatre autres de forme différente (Mohen et

Scarre 2002). L’emplacement joue donc un rôle

important dans la constitution de ces longs tumu-

lus, les bâtisseurs préférant aménager des monu-

ments préexistants plutôt que de les construire

ailleurs. Les longs tumulus sont souvent situés sur

des zones au fort impact dans le paysage avec de

larges visibilités vers et depuis les édifices

(Joussaume et al. 1998).

Le site de Barnenez à Plouezoc’h dans le

Finistère possède deux longs tumulus nommés

nord et sud. Ces deux édifices connus depuis le

début du XXème siècle ont fait l’objet de destruc-

tion en 1954-1955 pour y extraire la pierre (Giot

1987). Ces travaux ont été interrompus par les ser-

vices de l’état et des fouilles ont été engagées par

Pierre-Roland Giot privilégiant l’édifice sud mieux

conservé. Elles ont été réalisées par intermittence

jusqu’en 1968 et associées à une restauration du

tumulus sud. Pour le nord, les travaux ont surtout

portés sur une reprise des parties qui ont été dé-

truites par l’entreprise et notamment l’emplace-

ment d’un dolmen qui a donné un peu de mobilier.

L’exploration ne s’est pas étendue au reste du tu-

mulus alors que sa partie orientale était restée in-

tacte. Le choix de privilégier le tumulus sud et son

exploitation touristique actuelle a mis le tumulus

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nord dans l’oubli. La monographie du site ne con-

sacre que quelques pages au tumulus nord avec

aucun relevé précis de celui-ci ni photographie. Le

tumulus sud fait actuellement l’objet d’une reprise

d’étude avec de nouvelles méthodologies et per-

met une lecture plus précise de l’architecture mon-

trant une évolution complexe avec notamment

une nécropole qui a été englobée par le long tumu-

lus (Cousseau thèse en cours). Celui-ci est lui-

même réalisé en deux phases comme P.-R Giot

l’avait observé (Giot 1987). Cet article vise à porter

notre attention sur le long tumulus nord de Barne-

nez. Toutes les données accessibles sur celui-ci ont

été inventoriées pour une remise en perspective

avec les connaissances actuelles sur les longs tu-

mulus.

2.- GROUPE DE BARNENEZ

La presqu’île de Barnenez est située dans

la baie de Morlaix au nord-est du Finistère (fig. 1).

Elle n’est pas directement sur la côte septentrio-

nale, mais à l’intérieur de la baie sur sa rive droite.

Elle délimite l’anse de Térénez à son est où se jette

la rivière le Corniou formant une vallée d’axe nord-

ouest/sud-est. La presqu’île est séparée du conti-

nent par un isthme nord-ouest/sud-est, large de

310 m où se trouve le village de Kernéléhen (IGN

2007). Sa hauteur générale est entre 0 et 20 m

NGF, mais une colline existe au milieu montant

jusqu’à 34 m. La pointe de la presqu’île est une col-

line de 623 m de large et 820 m de long qui culmine

à 48 m de hauteur. Au sommet se trouve le village

de Barnenez qui a donné la dénomination à la pres-

qu’île. Les deux longs tumulus sont situés sur cette

colline, mais pas à son sommet. Ils sont sur sa

pente sud de façon parallèle avec un axe nord-est/

sud-ouest. Le septentrionale est au sommet de la

pente tandis que le méridional est cent mètres plus

bas au sud. Ils forment une barrière à l’isthme en

ayant un axe presque perpendiculaire à celui-ci. Le

tumulus sud est trapézoïdal de 75 m de long pour

20 à 25 m de large renfermant 11 dolmens (Giot

1987). Comme dit auparavant cet état est la phase

finale d’une longue évolution architecturale. Le

tumulus nord est présenté succinctement dans la

monographie Barnenez, Carn, Guennoc sans docu-

mentation iconographique (Giot 1987). Actuelle-

ment, il est très peu visible, car il est sous la végé-

tation. P.-R. Giot indique que celui-ci devait mesu-

rer 25 à 30 m de long selon un axe est-ouest et une

dizaine de mètres de large, chiffres qu’il faudra

discuter, pour 3 m de hauteur (Giot 1987). Lors de

l’exploitation comme carrière de ce tumulus, les

ouvriers ont mis au jour une chambre recouverte

par une table de couverture. Cette dernière a été

poussée sur le côté et est actuellement encore vi-

sible. D’autres éléments mégalithiques n’étant pas

visibles, P.-R. Giot propose que les parois de ce

dolmen devaient être construites en pierre sèche.

D’après les témoignages oraux des ouvriers qui se

sont introduits dans la chambre avant sa destruc-

tion, elle avait un plan au sol circulaire ou polygo-

nal. L’emplacement de la chambre était toujours

visible au sol après la destruction et a donc pu être

fouillé. La présence ou non d’un couloir n’a pu être

observé (Giot 1987). Cette chambre couverte par

une table de couverture est l’unique élément con-

nu et fouillé pour le tumulus nord de Barnenez.

Aucune photographie ou aucun relevé n’a été pu-

blié sur ce tumulus. Toute cette documentation

inédite est restée dans les archives de fouille et

restauration conservées à l’UMR 6566-Creaah au

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laboratoire Archéosciences de l’université de

Rennes 1.

Tumulus nord de Barnenez

Un travail d’inventaire et de numérisation

a été mené sur ce lot grâce au projet ICARE mené

par Marie-Yvane Daire et Catherine Le Gall. Un

peu plus de 1500 documents ont été répertoriés et

une fiche d’enregistrement a été créée pour cha-

cun. Parmi eux, neuf photos représentent le tumu-

lus nord. Elles datent de 1955 ou 1956 juste après

les destructions sauf deux de 1962. On peut y ob-

server chaque face du tumulus. La vue générale

depuis le tumulus sud montre deux états de con-

servation différents (fig.2). La partie orientale est

sous la forme d’une butte. Elle n’a pas été enta-

mée par les ouvriers, car elle est située sur une

parcelle dont les propriétaires leur avaient refusé

l’extraction. La limite de parcelle est visible avec la

haie qui longe la voie d’accès permettant l’accès

vers le tumulus sud depuis la route en formant une

coupe d’environ 3 m de haut à cet endroit (d’après

Fig. 1.- Localisation de la presqu’île de Barnenez et des différentes structures présentes dessus. Carte littorale SHOM (SHOM,

2014) et photographies aériennes par P.R. Giot en 1965 pour le cliché haut et 1969 pour le bas (Archives UMR6566-Creeah).

Zoom sur la presqu’île de Barnenez de la carte établie par Louis Le Guennec au début du XXe siècle (Le Guennec 1979)

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Giot 1987). À partir de la limite de parcelle, le tumu-

lus semble entièrement détruit jusqu’à une grande

dalle. Cette dernière est la table de couverture dé-

placée par les ouvriers. À l’ouest de celle-ci, une

butte est visible dont il est difficile d’identifier si elle

est composée des déblais inexploitables pour l’en-

trepreneur ou bien si elle est un morceau conservé

du tumulus sur lequel des déblais ont pu être dépo-

sés. D’autres éléments mégalithiques semblent

avoir été posés contre cette butte côté sud-ouest

et un autre passage se dessine à l’ouest de celle-ci.

Si elle n’est pas un tas de déblais elle ne peut être

également l’extrémité ouest du tumulus nord, mais

une zone non exploitable dont il faut faire le tour.

Deux autres buttes sont visibles, la première tout à

l’ouest sous un couvert végétal dont aucun cliché

ne permet de la définir comme tas de déblais ou

partie conservée du tumulus nord. La deuxième est

en arrière-plan de la table de couverture et de la

voie aménagée. Celle-ci se voit plus précisément

sur la vue depuis le nord. La butte se prolonge un

peu vers l’ouest, mais surtout elle est positionnée

en limite de parcelle. Sur ce même cliché, la mor-

phologie de la partie conservée est discernable.

Son extrémité est démarre avec une pente pour

monter à la hauteur de la coupe en limite de par-

celle. On peut estimer cette partie orientale longue

d’un peu moins de 30 m et haute d’environ 3 m de

haut. À l’ouest de la partie orientale, la zone pré-

sente de légers reliefs recouverts par endroit par

des buissons. P.-R. Giot mentionne la présence de

ces monticules dans la monographie (Giot 1987).

P.-R. Giot a aussi photographié la zone

autour de la table de couverture dans son état

après l’arrêt de l’extraction (fig.2). Le bloc était de

biais reposant sur un amas de blocs bousculés lors-

que la table a été poussée vers le sud. Sur les

images, au-dessus de celle-ci, environ un mètre

d’épaisseur du tumulus est conservé composé de

terre dans la partie supérieure et les pierres n’appa-

raissent qu’au contact avec le bloc. Au nord de ce

dernier l’implantation de la chambre est visible et

marquée par un jalon. Seul le « plancher » est en-

core en partie conservé, il n’y a ni trace de trous de

calage pour des blocs ou de base de parois en

pierre sèche. Toutefois, P.-R. Giot estime que la

chambre devait être entièrement en pierre sèche

car aucun élément mégalithique en dehors de la

table n’a été retrouvé aux abords. Il était impos-

sible de reconnaître la longueur et l’orientation du

couloir (Giot 1987). Sur ces clichés de détail, on

peut également observer deux buttes, la première

est celle à proximité de la table et la seconde est

celle en limite de parcelle au nord. Elles sont com-

posées selon P.-R. Giot par les parties du tumulus

détruites déplacées. Il est toutefois étonnant que

ces buttes ne contiennent que des déblais, car elles

sont sur l’emplacement du tumulus avant destruc-

tion. De plus, sur le cliché présentant en arrière-

plan la butte en limite de parcelle, on observe deux

niveaux. Ils semblent être séparés par un couvert

végétal qui pourrait être le sommet du tumulus

conservé sur environ 2 m de hauteur. Sur celui-ci

ont été déposés des déblais sur un mètre de hau-

teur environ. L’amas proche de la table de couver-

ture ne présente pas deux niveaux, mais de par sa

position, il est surprenant que les entrepreneurs

n’aient pas exploité cette partie qui présente

d’après les photos des blocs d’assez grandes di-

mensions. La découverte de la table ou d’autres

éléments mégalithiques présents dans la butte les

ont dissuadés d’attaquer cette zone.

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Fig. 2 .- Haut : Indication des structures du tumulus nord sur les vues aériennes IGN de 1977 (Géoportail). Droite : photos des

différentes faces du tumulus nord . Gauche : images de la zone autour de la table de couverture en bas (Archives UMR6566-

Creaah)

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Aucune des masses visibles sur ces pho-

tos n’a été fouillée ou sondée. Seul l’emplacement

de la chambre a été dégagé pour récolter le mobi-

lier qui restait. Le tumulus nord a donc conservé

cet état par la suite. Un nettoyage généralisé a eu

lieu peu avant mars 1969 pour le remembrement

parcellaire (fig.1). Cet état a été fixé par des clichés

pris lors d’un survol aérien et à basse altitude au-

tour du tumulus sud. Les prises de vue, centrali-

sées sur le tumulus sud, incluent parfois les restes

du tumulus nord qui sont encore en place. Le par-

cellaire divise en trois parties ceux-ci. À l’est se

trouve une structure en U qui ressemblait à la ruine

d’une ferme médiévale de trois bâtiments autour

d’une cour (Le Roux comm. pers.). Les pierres pour

la construction de celle-ci devaient provenir du

tumulus nord. Au centre, nous avons la partie in-

tacte qui semble avoir baissé un peu en hauteur au

niveau de la coupe. La dernière partie est compo-

sée de la table de couverture et de la butte à son

contact. Quelques reliefs sont également visibles

dans l’axe du tumulus et dans sa continuité à

l’ouest. L’état est similaire à celui de 1955 avec une

légère érosion. Seule la butte qui était en limite de

parcelle au nord semble avoir été arasée ou sa

hauteur très largement diminuée. Les éléments

mégalithiques n’ont pas bougé notamment ceux

qui reposent sur la butte centrale au sud-ouest. À

partir de 1977, toute cette zone n’est plus entrete-

nue et se couvre de buissons, ronces et arbres qui

ne nous permettent pas aujourd’hui de faire l’état

précisément du tumulus nord de Barnenez. Seuls

la table de couverture et ses abords sont acces-

sibles actuellement.

Pour avoir un relevé précis de celle-ci, elle

a été nettoyée son sommet n’étant plus recouvert

que par du lierre et quelques pierres (fig.3). Le sol

est plus haut que sur les photos d’archive, la visibi-

lité en dessous de la table est difficile, mais on

peut toujours voir que celle-ci repose sur un amas

de blocs qui continue pour former le début de la

butte visible au contact de la table sur les clichés

anciens. La table mesure trois mètres de côté dans

ses plus grandes dimensions avec une largeur al-

lant de 40 à moins de 10 cm. Le granite est à gros

grain provenant de Saint Samson à quatre kilo-

mètres de distance comme certains du tumulus

sud (Giot et al. 1995). Le bloc présente 6 grandes

faces, une première grande inférieure peu acces-

sible, une seconde supérieure de même taille et les

quatre autres forment les bords de la table. La

première et un des bords sont des faces d’arrache-

ment et les autres d’affleurement comme définies

par Dominique Sellier (Sellier 2013). Ce bloc est

donc de type 1 selon la typologie établie par Em-

manuel Mens avec toutefois une fracture verticale

(Mens 2008). Il s’agit du sommet d’un affleure-

ment qui a été détaché du rocher par une diaclase

horizontale et une cassure verticale. Des encoches

sont encore visibles sur les bords des faces d’arra-

chement. Le bloc ayant juste été poussé, sa posi-

tion actuelle devait être celle au-dessus de la

chambre. La face plane inférieure d’arrachement

était donc celle visible dans la chambre, laissant la

face d’affleurement plus courbe au contact avec la

masse du tumulus. Une numérisation 3D par pho-

togrammétrie a été réalisée des parties accessibles

de la table pour pouvoir découper des sections sur

celle-ci et avoir un volume précis . Le profil du

bloc est en biseau sur une de ses largeurs, le bloc

ne devait donc pas être posé horizontalement au-

dessus de la chambre, mais avec une légère rota-

tion pour conserver la planéité de la face infé-

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Fig. 3.- Haut : relevé de la table de couverture du tumulus nord de Barnenez, typologie d’après Mens 2008. (Modèle 3D dis-

ponible sur le site : https://sketchfab.com/flocou) Bas : blocs de métadolérite autour de la table et pierres dressées du dolmen

J du tumulus sud de Barnenez.

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rieure. L’autre largeur est moins visible, mais

semble avoir un profil rectangulaire plus régulier.

Une fissure est présente à l’opposé de la face

d’affleurement verticale. On ne peut dire si elle

résulte de l’érosion, de l’extraction néolithique, des

mouvements du tumulus après construction ou du

déplacement de table en 1954. Des marmites

d’érosion sont présentes sur la face supérieure pri-

vilégiant une extraction sur estran. Le volume don-

né par le modèle 3D est de 2,65 m3 donnant un

poids estimé de sept tonnes. Cette pierre a donc

été extraite à 4 kms de distance sur estran avec un

transport obligeant à emprunter une des pentes de

la colline de Barnenez. Autour de cette table des

blocs épars de métadolérite d’un peu moins d’un

mètre de long rappelant la morphologie d’orthos-

tates du tumulus sud sont présents. L’interpréta-

tion d’un dolmen exclusivement en pierre sèche est

peut être hâtive à la vue de ces blocs qui pourraient

être des pierres dressées plaquées contre les parois

dans le même principe que les orthostates des dol-

mens I et J du tumulus sud (fig. 3).

Le tumulus nord reste en grande partie

inconnu sans de nouveaux travaux. Grâce aux élé-

ments d’archive, certaines données peuvent être

appréhendées. Un plan des différentes structures

autour liées au tumulus nord a pu être réalisé avec

les photos aériennes et permettent de discuter des

dimensions avant sa destruction sous la forme

d’une butte. La structure en U pourrait être les

restes d’une occupation médiévale du site. Les

autres sont à rattacher au tumulus nord et à sa des-

truction. La partie conservée mesure environ 30 m

sur 15 m pour 2 à 3 m de haut. Les limites de la par-

tie occidentale sont par contre mal définies. La

butte tout à l’ouest semble être assez ancienne. On

ne peut dire s’il s’agit de l’extrémité ouest du tu-

mulus qui l’amènerait à une longueur de 70 m ou

un déblai de fouille ancienne ou d’exploitation de la

pierre. Par contre, le tumulus devait être allongé

jusqu’au niveau de la table de couverture et de la

butte à proximité donnant une longueur d’environ

50 m au tumulus. Sa largeur dans cette partie occi-

dentale ne peut pas être estimée. Seule un dolmen

a pu être observé, malheureusement son état ne

permet pas de savoir avec certitude si la chambre

était circulaire et s’il possédait un couloir. La table

de couverture étant toujours accessible, son étude

a montré qu’elle était le sommet d’un affleurement

sur estran d’un gisement utilisé également pour le

tumulus sud. Sa disposition actuelle doit être celle

d’origine privilégiant la face plane d’arrachement

dans la chambre. La présence de blocs en métado-

lérite proche de ceux retrouvés comme pierres

dressés dans certains dolmens du tumulus sud per-

met de discuter de la construction exclusivement

en pierre sèche proposée par P.-R. Giot. Les longs

tumulus étant le fruit d’une évolution architectu-

rale complexe, on peut supposer que cela est éga-

lement le cas pour le tumulus nord. Le dolmen re-

trouvé pourrait donc ne pas associé à la phase de

construction du long tumulus . D’autres dolmens

pourraient être encore conservés dans la partie

intacte du tumulus notamment si l’on compare au

tumulus sud qui possède 11 dolmens. La nécropole

de Barnenez a donc dû prendre de multiples

formes sur une longue durée montrant que l’em-

placement joue un rôle primordiale dans la com-

préhension de cet ensemble.

Les deux longs tumulus sont actuellement

les uniques édifices néolithiques présents sur la

presqu’île mais des indices d’autres édifices exis-

Page 14: î ì í ñ 03-8.pdf · ayant un axe presque perpendiculaire à celui-ci. Le tumulus sud est trapézoïdal de _ ] m de long pour 20 à 25 m de large renfermant 11 dolmens (Giot

ARPI. Arqueología y Prehistoria del Interior peninsular 03– 2015 90

tent. Au nord-ouest, une chambre ruinée est indi-

quée avec le terme dolmen sur une carte réalisée

par Louis Le Guennec au début du XXe siècle et

publiée dans un recueil de ses manuscrits en 1979

(fig.1, Le Guennec 1979). Cette chambre ruinée

n’est pas attestée, de grands aménagements de la

Seconde Guerre mondiale ont eu lieu au même

emplacement. La construction de casemates et

des changements de topographie ont pu détruire

ces vestiges. À côté de Kernéléhen, la petite colline

située dans l’isthme de la presqu’île devait être

également occupée. Lors de la construction d’une

maison sur cette colline dans les années 1970 des

dalles pouvant provenir d’un édifice mégalithique

(dolmen ou menhir) ont été retrouvées (Giot 1987).

Ces dalles sont perceptibles par des taches

blanches sur les vues aériennes. Certains édifices

ont pu être également détruits au Néolithique

même. C’est le cas de façon certaine pour un bloc

mégalithique présent dans le tumulus sud. Il s’agit

de la première table de couverture du dolmen J.

Elle porte une gravure en écusson dont le dessin

est sur sa face donnant dans le couloir, mais n’est

pas adapté à celui-ci étant notamment perpendicu-

laire à la longueur du couloir (Giot 1987). Ce bloc

serait un remploi sûrement d’une pierre dressée

qui devait se trouver proche de la paire de tumulus,

car elle est du même granite que la plupart des

blocs granitiques du tumulus sud. Cette pierre

dressée était donc un édifice indépendant durant

une phase de l’évolution architecturale de l’en-

semble et un doute subsiste pour les blocs présents

dans la façade occidentale du tumulus sud qui

pourrait être un remploi d’orthostates d’un dolmen

(Laporte et Cousseau, à paraître). L’occupation de

la presqu’île ne devait donc pas être exclusivement

réservée au groupe des longs tumulus. Des édifices

devaient être implantés sur les autres hauteurs

mais dont le fonctionnement n’est pas obligatoire-

ment associé à celui des longs tumulus. L’implan-

tation de ces derniers et ses raisons peuvent égale-

ment être appréhendées grâce à la visibilité qui

leur est accordée.

3.LIEU D’IMPLANTATION DES TUMULUS

Une étude sur la visibilité depuis et vers

les longs tumulus de Barnenez été menée par

Pierre Gouletquer (Gouletquer 1991, 1993). Etant

situés sur la pente sud de la colline, ils sont donc

seulement visibles depuis toute la partie sud de la

baie (fig.4). Il indique que dans cette zone pourrait

être située la communauté qui a commandé l’édi-

fice. À l’inverse, depuis le monument lors des jours

de grande visibilité on peut apercevoir les monts

d’Arrée située à plus de 25 km au sud qui sont en-

core un marqueur dans le paysage. Dans le prolon-

gement de cette ligne de crête au nord-est, un en-

semble de menhirs est présent dont leur fonction

pourrait être d’imiter les sommets rocheux

(Gouletquer 1991). L’espace entre les monts d’Ar-

rée et la baie de Morlaix correspond au bassin ver-

sant des rivières donnant dans la baie. Ce territoire

aurait pour limite orientale un ensemble de men-

hirs près de Lanmeur et pour occidentale, la rive

gauche de la baie. Selon Pierre Gouletquer, cette

zone serait un territoire d’échange associé aux

longs tumulus de Barnenez selon la définition de

Leroi-Gourhan « Organisation spatiale des groupes

agricoles. Chaque groupe est fixé, au moins relati-

vement, dans son territoire et entretient avec les

groupes voisins des échanges qui peuvent at-

teindre l’alliance matrimoniale ou se restreindre

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ARPI. Arqueología y Prehistoria del Interior peninsular 03– 2015 91

aux échanges matériels. » (Leroi-Gourhan 1964 ;

Gouletquer 1991). Pierre Gouletquer nuance tou-

tefois son propos en indiquant que les données

chronologiques sont trop peu nombreuses pour

assurer que tous les monuments sont de la même

période et fonctionne de concert. Pour préciser,

cette étude une modélisation a été réalisée de la

visibilité accordée au sommet du tumulus nord

actuellement. Le site www.heywhatsthat.com

permet de calculer toutes les zones visibles depuis

un point qu’on lui indique. Les données utilisées

sont celles générées par la February 2000 Space

Shuttle mission de la NASA qui sont accessibles à

tous avec une précision de 100 m. Le produit est

une carte avec un aplat rouge qui indique le terri-

toire visible depuis le point qu’on lui a fourni et

applicable sur les vues aériennes de Google (fig.4).

Elles ne prennent pas en compte le couvert fores-

tier qui pourrait restreindre la visibilité. À grande

échelle, l’aplat nous montre quelle zone est visible

depuis le sommet du tumulus nord, la distance

étant trop importante pour le sens inverse. La li-

mite sud pour tous les points est comme indiqué

par Pierre Gouletquer la ligne de crête des monts

d’Arrée qui marque donc l’horizon pour la vue vers

le sud depuis les tumulus de Barnenez. Pour la vue

vers le nord, celle-ci est très rapidement bloquée

par la colline, les édifices étant installés sur la

pente sud de celle-ci. La visibilité s’ouvre seule-

ment sur le nord-ouest de la baie. À l’échelle de la

partie basse de la baie, l’aplat rouge indique les

zones visibles depuis le monument, mais le sens

inverse également. La visibilité est principalement

orientée sur la partie basse de la baie de Morlaix, la

vallée formée par le Corniou, les points hauts le

long de ces deux et ceux qui sont de l’autre côté de

l’isthme en face de la colline. Les couloirs du tumu-

lus sud sont orientés sud/sud-est donc vers l’anse

de Térénez et la rivière le Corniou. Seule l’anse de

Térénez n’est pas visible pour le tumulus nord, car

ce dernier est occulté par tumulus sud mais sous la

forme de long tumulus. Soit cette occultation est

volontaire soit elle n’est peut-être que la résul-

tante de l’évolution architecturale vers des longs

tumulus. Toutefois l’architecture du tumulus sud a

été ajustée pour assurer le maximum de visibilité.

Un cliché présente la centaine de mètres qui sépa-

rent les deux tumulus en 1955-56. La hauteur con-

servée proche de celle d’origine du tumulus sud

s’arrête au niveau de la base de l’édifice nord. Le

sommet a donc été adapté pour qu’il ne vienne pas

dépasser une horizontale au niveau du pied de la

face sud du tumulus nord. Cela peut engendrer un

effet de perspective pour une personne venant de

l’autre côté de l’isthme à la même hauteur environ.

Elle verrait les deux tumulus se superposer en hau-

teur. Le paysage actuel autour de la presqu’île est

la baie de Morlaix avec un paysage qui évolue

énormément en fonction des marées. La carte

littorale SHOM (fig.4) montre bien la zone exon-

dée à grande marée basse par le coloré vert foncé

(SHOM 2014). Seule la rivière de Morlaix au centre

de la baie reste continuellement en eau. Les tra-

vaux récents de Pierre Stéphan, ont établi le ni-

veau marin au Néolithique aux environs de – cinq

mètres en dessous de l’actuel correspondant à une

altitude de -9, 75 m NGF (Stéphan et al. 2009 ;

Stéphan 2011). La ligne correspondant à ce niveau

sur la carte littorale SHOM est à 3 km au nord de la

presqu’île. Au Néolithique, la colline de Barnenez

surplombait donc une large vallée et notamment

une bande de terre de 2 km de largeur délimitées

par deux rivières maritimes qui sont celle de Mor-

laix à l’ouest et le Corniou à l’est. Elles devaient

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ARPI. Arqueología y Prehistoria del Interior peninsular 03– 2015 92

être des éléments marquants dans le paysage avec

un effet de marnage et difficilement franchissables

notamment au niveau du littoral de par leur lar-

geur. Le paysage autour du monument était donc

principalement terrestre. La zone de visibilité sur la

baie depuis et vers le tumulus nord reste sur les

zones exondées au Néolithique. Le caractère mari-

time de l’implantation actuelle n’est donc pas vrai

pour le Néolithique.

Les études de visibilité ne permettent pas

de définir un territoire associé au monument mais

une relation particulière avec le paysage (López-

Romero González de la Aleja 2008 ; Laporte et al.

2014). Ici l’implantation du groupe de Barnenez a

été choisi pour orienter les édifices vers les terres

avec comme point de fuite vers le sud : les monts

d’Arrées. Les tumulus de Barnenez alors qu’ils sont

à 3 kms de la mer au Néolithique sont clairement

terrestres. Cela contraste avec l’étude spatiale me-

née sur la région de Lorient dans le Morbihan où

tous les monuments sur une bande littorale sont

tournés vers la mer (López-Romero González de la

Aleja 2008). Pour Barnenez, la ligne de crête des

monts d’Arrées ne peut être une limite d’un terri-

toire mais comme Pierre Gouletquer le propose,

d’une zone où la communauté ou les communau-

tés utilisant la nécropole jouent un rôle. Dans la

zone où le tumulus est visible se situe l’objet qui

doit être impacté par ces architectures. L’habitat

de la ou les communautés en lien avec l’édifice

peut se retrouver dans cette aire ou bien le chemi-

nement d’accès qui pourrait être proche de l’ac-

tuel. Depuis les hauteurs au sud Les édifices sont

perpendiculaires à celui-ci développant l’idée de

barrière visuelle. Le jeu de perspective entre les

deux longs tumulus avec l’adaptation du sommet

du tumulus sud donnant une superposition des

deux volumes pourrait être un argument supplé-

mentaire. Une autre possibilité est d’impacter des

voies de communication. La zone de visibilité con-

cerne particulièrement les parties sud de la baie de

Morlaix et l’anse de Térénez avec la vallée du Cor-

niou. Ces deux zones étaient exondées au Néoli-

thique formant deux vallées traversées par des

rivières. Celle de Morlaix de par sa largeur devait

être une voie maritime très empruntée. La possibi-

lité de navigation sur le Corniou est au contraire

peu probable. N’importe quelle personne navi-

gante au niveau de l’embouchure de la rivière de

Morlaix voyait les deux tumulus comme c’est éga-

lement le cas actuellement. Par voie terrestre, ces

deux rivières devaient être de vrais obstacles. Les

franchissements possibles pour la rivière de Mor-

laix devaient être dans les terres et pour le Corniou

également, mais à moindre mesure. Pour ce der-

nier, le tombolo présent dans l’anse de Térénez

était l’un des principaux points de passage à marée

basse jusqu’aux années 1960 (Le Gall comm. pers.).

Un cheminement sur le littoral au Néolithique de-

puis l’est remonterait donc haut dans les terres

pour traverser les deux rivières particulièrement

celle de Morlaix obligeant aux utilisateurs à passer

au pied des tumulus de Barnenez et de grimper la

pente en face du tumulus. N’importe quelle per-

sonne empruntant ce chemin serait donc impactée

pour les deux architectures. Le choix de l’objet à

impacter a pu très bien évoluer en même temps

que l’architecture. La zone de visibilité d’un long

tumulus que l’on se trouve à son pied ou sommet

offre une visibilité différente qu’un cairn circulaire

d’une dizaine de mètres de diamètre. C’est pour

cela que la compréhension des évolutions architec-

turales qui ont conduit à un long tumulus est im-

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ARPI. Arqueología y Prehistoria del Interior peninsular 03– 2015 93

portante. Si comme à Barnenez les longs tumulus

sont par deux ou plus, le phasage architecturale

doit être appréhendé pour chacun. Seulement

dans ce cas, les relations de visibilité, les orienta-

tions des couloirs, les jeux de perspective entre les

monuments pour chaque phase pourront per-

mettre de mieux voir quel impact vise l’édifice.

Seule l’implantation reste la même lui offrant un

cadre.

Fig. 4 .- Gauche haut : la presqu’île de Barnenez dans son contexte élargi d’après Gouletquer, 1991. Gauche bas : Carte littorale

SHOM de la baie de Morlaix avec indication du niveau marin néolithique proposé en rouge (SHOM, 2014). Droite : Cartes de

visibilité depuis et vers le tumulus nord de Barnenez d’après le site www.heywhatsthat.com. Bas : photo de la pente entre les

deux tumulus en 1955-1956 (Archives UMR6566-Creaah).

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L’étude du long tumulus nord de Barnenez

doit donc se poursuivre par une acquisition nou-

velle de données. Si celui-ci est proche du tumulus

sud alors il est le fruit de nombreux aménagements

architecturaux recouvrant un millénaire laissant

envisager de nombreuses morphologies et rela-

tions pour les édifices de la nécropole de Barnenez

(Giot 1987 ; Giot et al. 1994).

Remerciements

La tenue de ces recherches a été assurée

grâce aux financements de la Région Bretagne, de

la communauté d’agglomération de Morlaix, du

Conseil Général du Finistère, du Centre de Monu-

ments Nationaux, du Ministère de la Culture et de

l’UMR 6566 que l’on tient à remercier. La direction

du programme Barnenez est assurée par Luc La-

porte, directeur de recherches au CNRS avec la

collaboration de Primitiva Bueno Ramirez et Rodri-

go de Balbín Behrmann dans le cadre du projet

HAR2012.37019 : Los colores de la Muerte. Cette

coopération internationale a apporté une vraie

émulation autour du groupe de Barnenez. Pour

finir, ma gratitude revient à François Le Gall pour

son accueil et son aide précieuse sur le terrain.

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