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VOL CXI N O 238 / LE MARDI 20 OCTOBRE 2020 / 1,52 $ + TAXES = 1,75 $ WWW.LEDEVOIR.COM Avis légaux.............B2 Décès......................B4 Édito.......................A6 Grille TV..................B7 Idées.......................A7 Météo.....................B6 Mots croisés...........B6 Sports.....................B6 Sudoku...................B6 INDEX ACTUALITÉS L’empire des signes : Donald Trump et la stratégie émotionnelle | A 8 MONDE Mingatchevir, cible ultime de la guerre du Haut-Karabakh III CORONAVIRUS Orange tirant sur le rouge Au Saguenay–Lac-Saint-Jean, le nombre de cas continue d’augmenter ISABELLE PORTER À ALMA LE DEVOIR Devant des hausses records de cas de COVID-19, le Saguenay–Lac-Saint-Jean se prépare à basculer en zone rouge à son tour. Tout un bouleversement pour cette région qui avait été en grande par- tie épargnée lors de la première vague. « Beaucoup de régions se stabili- sent, alors que, dans la nôtre, ça s’in- tensifie », résumait lundi le dirigeant du Centre intégré universitaire de san- té et de services sociaux (CIUSSS) ré- gional, Donald Aubin lors d’un point de presse. « Il y a de plus en plus de cas. […] C’est sûr que c’est une situa- tion préoccupante, il ne faut pas se le cacher. » Le CIUSSS recensait 47 nouveaux cas lundi, dont 3 nouveaux décès. En trois jours, ce ne sont pas moins de 101 nouveaux cas qui se sont ajoutés. C’est beaucoup pour une région qui n’a recensé que 341 cas pendant toute la durée de la première vague. Aux journalistes qui lui demandaient si on pourrait éviter l’entrée en zone rouge, M. Aubin semblait y croire. « On voudrait éviter d’avoir à changer de couleur », a-t-il dit avant de recon- naître que ses chiffres s’approchaient d’un niveau justifiant les contraintes liées à la zone rouge. Le territoire est en zone orange depuis à peine sept jours, mais la contamina- tion communautaire progresse rapide- ment. On recense 32 lieux d’éclosion dans des écoles, des résidences pour personnes âgées, des hôpitaux et des milieux de travail. Le secteur d’Alma, dans l’est du Lac-Saint-Jean, est particulièrement touché, avec le tiers des cas depuis le début de la seconde vague. Étant donné la forte proportion de cas à Alma, pourrait-on limiter une éventuelle zone rouge à sa MRC (du Lac-Saint-Jean Est), comme on l’a fait en Outaouais pour la MRC de Gati- neau ? Non, a répondu le D r Aubin no- tamment parce que les patients de la COVID-19 à Alma sont, de toute façon, transférés à l’hôpital de Saguenay, qui a le statut d’établissement désigné pour le traitement de la COVID-19. « On a regardé les différentes hypothèses, et on aurait très peu d’effets à faire ça », a dit le D r Aubin. « On doit travailler dans une vision régionale. » VOIR PAGE A 2 : III LE MOT EN « N » La liberté d’enseignement sous surveillance Plus de 500 professeurs signent une lettre en soutien à une collègue de l’Université d’Ottawa Un panneau annonce la présence d'un point de contrôle au départ de Québec sur la route 175, direction nord. RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR D CAROLINE MONTPETIT LE DEVOIR d’escroquerie que de relations diplo- matiques. Dans chaque cas, Malcolm Gladwell met en lumière notre incapa- cité à évaluer avec certitude l’état d’esprit d’une personne que nous ne connaissons pas, et la propension des humains à faire confiance, parfois à tort, à autrui. Gladwell est l’un des nombreux in- vités de la conférence C2 de Montréal (Commerce + Créativité), qui se tient entièrement en ligne cette année, et qui réunit des noms aussi prestigieux VOIR PAGE A 4 : Naturellement confiant L’être humain a foi en l’autre, au risque de se tromper. Et c’est bien ainsi, explique Malcolm Gladwell. onnez un sujet à Malcolm Gladwell, il en tirera une théorie. L’homme de 58 ans, l’un des penseurs les plus en vue actuellement aux États-Unis, aime étudier les faits. Il les analyse avec at- tention pour en tirer une façon nouvel- le de voir les choses, et de considérer les politiques publiques. Son dernier livre par exemple, Tal- king to Strangers, traite autant de con- sentement sexuel et d’alcool, de profi- lage racial, d’espionnage, de suicide, LIRE AUSSI PAGE A 7 : LA POLICE DES MOTS À L’UNIVERSITÉ, LA CHRONIQUE DE PIERRE TRUDEL MARCO FORTIER Le milieu universitaire monte au front contre le traitement réservé à l’ensei- gnante de l’Université d’Ottawa dé- noncée pour avoir mentionné le « mot commençant par N » dans un cours. La professeure Verushka Lieutenant- Duval a été suspendue, puis réintégrée dans ses fonctions pour avoir utilisé ce mot en classe, même sans intention malicieuse. Une lettre signée par 579 professeurs de cégep et d’université, transmise au Devoir, dénonce ce « gra- ve précédent qui attaque de front la li- berté d’enseignement ». « L’Université d’Ottawa se trompe de cible. On ne s’attaque pas au pro- blème du racisme en punissant et en interdisant l’enseignement des mots, des œuvres et des auteurs qui, au con- traire, le révèlent et le combattent ex- plicitement », indique la lettre rédigée par Mathieu Gauthier, professeur de philosophie au cégep Garneau, et Mu- rielle Chapuis, professeure de littératu- re au cégep Lionel-Groulx. « Il est urgent que les institutions d’enseignement supérieur se dotent d’une politique claire afin de protéger l’intégrité des connaissances et de ses passeurs, cela doit passer entre autres par la reconnaissance du droit au dé- saccord raisonnable et à celui du prin- cipe de charité. Le contexte social et le clientélisme ne peuvent prévaloir sur la connaissance et sa diffusion », ajou- tent les auteurs. « Racisme systémique » Le recteur de l’établissement, Jacques Frémont, a brisé son silence des der- niers jours, lundi, en expliquant le fil des événements. Il fait valoir que l’ensei- gnante, qui fait partie du groupe majori- taire, a commis un impair envers une minorité en mentionnant le mot honni. VOIR PAGE A 4 : On ne s’attaque pas au problème du racisme en punissant et en interdisant l’enseigne- ment des mots, des œuvres et des auteurs [...] MATHIEU GAUTHIER ET MURIELLE CHAPUIS »

III LE MOT EN « N » III CORONAVIRUS Orange tirant sur le rouge

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Page 1: III LE MOT EN « N » III CORONAVIRUS Orange tirant sur le rouge

VOL CXI NO 238 / LE MARDI 20 OCTOBRE 2020 / 1,52 $ + TAXES = 1,75 $WWW.LEDEVOIR.COM

Avis légaux.............B2Décès......................B4Édito.......................A6Grille TV..................B7Idées.......................A7Météo.....................B6Mots croisés...........B6Sports.....................B6Sudoku...................B6

INDEX

ACTUALITÉSL’empire des signes :Donald Trump etla stratégie émotionnelle | A 8

MONDE Mingatchevir, cible ultime de la guerre du Haut-Karabakh

III CORONAVIRUS

Orange tirant sur le rougeAu Saguenay–Lac-Saint-Jean, le nombre de cas continue d’augmenter

ISABELLE PORTERÀ ALMALE DEVOIR

Devant des hausses records de cas de COVID-19, le Saguenay–Lac-Saint-Jean se prépare à basculer en zone rouge à son tour. Tout un bouleversement pour cette région qui avait été en grande par-tie épargnée lors de la première vague.

« Beaucoup de régions se stabili-sent, alors que, dans la nôtre, ça s’in-tensifie », résumait lundi le dirigeant du Centre intégré universitaire de san-té et de services sociaux (CIUSSS) ré-gional, Donald Aubin lors d’un point de presse. « Il y a de plus en plus de cas. […] C’est sûr que c’est une situa-tion préoccupante, il ne faut pas se le cacher. »

Le CIUSSS recensait 47 nouveaux

cas lundi, dont 3 nouveaux décès. En trois jours, ce ne sont pas moins de 101 nouveaux cas qui se sont ajoutés. C’est beaucoup pour une région qui n’a recensé que 341 cas pendant toute la durée de la première vague.

Aux journalistes qui lui demandaient si on pourrait éviter l’entrée en zone rouge, M. Aubin semblait y croire. « On voudrait éviter d’avoir à changer de couleur », a-t-il dit avant de recon-naître que ses chiffres s’approchaient d’un niveau justifiant les contraintes liées à la zone rouge.

Le territoire est en zone orange depuis à peine sept jours, mais la contamina-tion communautaire progresse rapide-ment. On recense 32 lieux d’éclosion dans des écoles, des résidences pour personnes âgées, des hôpitaux et des milieux de travail.

Le secteur d’Alma, dans l’est du Lac-Saint-Jean, est particulièrement touché, avec le tiers des cas depuis le début de la seconde vague.

Étant donné la forte proportion de cas à Alma, pourrait-on limiter une éventuelle zone rouge à sa MRC (du Lac-Saint-Jean Est), comme on l’a fait en Outaouais pour la MRC de Gati-neau ? Non, a répondu le Dr Aubin no-tamment parce que les patients de la COVID-19 à Alma sont, de toute façon, transférés à l’hôpital de Saguenay, qui a le statut d’établissement désigné pour le traitement de la COVID-19. « On a regardé les différentes hypothèses, et on aurait très peu d’effets à faire ça », a dit le Dr Aubin. « On doit travailler dans une vision régionale. »

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III LE MOT EN « N »

La liberté d’enseignement sous surveillance Plus de 500 professeurs signent une lettre en soutien à une collègue de l’Université d’Ottawa

Un panneau annonce la présence d'un point de contrôle au départ de Québec sur la route 175, direction nord.RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR

DCAROLINE MONTPETITLE DEVOIR

d’escroquerie que de relations diplo-matiques. Dans chaque cas, Malcolm Gladwell met en lumière notre incapa-cité à évaluer avec certitude l’état d’esprit d’une personne que nous ne connaissons pas, et la propension des humains à faire confiance, parfois à tort, à autrui.

Gladwell est l’un des nombreux in-vités de la conférence C2 de Montréal (Commerce + Créativité), qui se tient entièrement en ligne cette année, et qui réunit des noms aussi prestigieux

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Naturellement confiantL’être humain a foi en l’autre, au risque de se tromper.Et c’est bien ainsi, explique Malcolm Gladwell.

onnez un sujet à Malcolm Gladwell, il en tirera une théorie. L’homme de 58 ans, l’un des penseurs les plus en vue actuellement aux États-Unis, aime étudier les faits. Il les analyse avec at-tention pour en tirer une façon nouvel-le de voir les choses, et de considérer les politiques publiques.

Son dernier livre par exemple, Tal-king to Strangers, traite autant de con-sentement sexuel et d’alcool, de profi-lage racial, d’espionnage, de suicide,

LIRE AUSSI PAGE A 7 : LA POLICE DES MOTS À L’UNIVERSITÉ, LA CHRONIQUE DE PIERRE TRUDEL

MARCO FORTIER

Le milieu universitaire monte au front contre le traitement réservé à l’ensei-gnante de l’Université d’Ottawa dé-noncée pour avoir mentionné le « mot commençant par N » dans un cours. La professeure Verushka Lieutenant-Duval a été suspendue, puis réintégrée dans ses fonctions pour avoir utilisé ce mot en classe, même sans intention malicieuse. Une lettre signée par 579 professeurs de cégep et d’université, transmise au Devoir, dénonce ce « gra-ve précédent qui attaque de front la li-berté d’enseignement ».

« L’Université d’Ottawa se trompe de cible. On ne s’attaque pas au pro-blème du racisme en punissant et en interdisant l’enseignement des mots, des œuvres et des auteurs qui, au con-traire, le révèlent et le combattent ex-plicitement », indique la lettre rédigée par Mathieu Gauthier, professeur de philosophie au cégep Garneau, et Mu-rielle Chapuis, professeure de littératu-re au cégep Lionel-Groulx.

« Il est urgent que les institutions d’enseignement supérieur se dotent d’une politique claire afin de protéger l’intégrité des connaissances et de ses passeurs, cela doit passer entre autres par la reconnaissance du droit au dé-saccord raisonnable et à celui du prin-cipe de charité. Le contexte social et le clientélisme ne peuvent prévaloir sur la connaissance et sa diffusion », ajou-tent les auteurs.

« Racisme systémique »Le recteur de l’établissement, Jacques Frémont, a brisé son silence des der-niers jours, lundi, en expliquant le fil des événements. Il fait valoir que l’ensei-gnante, qui fait partie du groupe majori-taire, a commis un impair envers une minorité en mentionnant le mot honni.

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On ne s’attaque pas au problème du racisme en punissantet en interdisant l’enseigne-ment des mots, des œuvres et des auteurs [...] MATHIEU GAUTHIER ET MURIELLE CHAPUIS»