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ÉDITORIAL / EDITORIAL Il est bien temps, tiens, de faire des voeux pour 2014Y. Panis © Springer-Verlag France 2014 Alheure où jécris ce modeste éditorial pour Colon & Rec- tum, notre revue bien aimée, sur ma Remington numéro 7 (modèle de 1887), je me prends à rêver tout haut de ce que pourrait être notre beau métier de chirurgien colorectal en 2014. Que pouvons-nous espérer pour lannée 2014 ? Un meilleur salaire ? Aucune chance. Une voiture de fonction payée par lAPHP ? Non plusUn bureau où le chauffage marche ? Nexagérons rien ! Une SNFGE qui se souvient quil y a bien longtemps (à lépoque Jérémie Lefe- vre nétait même pas né et Guillaume Meurette était en CM2, cest dire), trainaient dans les couloirs des JFHOD pleins de chirurgiens heureux dêtre là, dont votre serviteur ? Ne rêvons pas. Là on nage en pleine science fiction. Donc, il va falloir être plus modeste jai limpression. Réfléchissons alors un peu sur lavenir de nos chères Socié- tés Savantes. En effet, toujours à lépoque où Guillaume Meurette passait avec difficulté le certificat détude (séchant sur la couleur du cheval blanc dHenri IV), votre serviteur, toujours lui (jaime bien parler de moi) était aux respon- sabilités à la SFCD, et déjà membre du conseil dadminis- tration de la SNFCP. Jai même connu et tutoyé Emmanuel Tiret. Cest dire si je suis vieuxBref, je mégare. Donc, le fonctionnement des Sociétés Savantes, je me targue de my connaître un peu. Ou plutôt, je dois dire, je my connaissais ! Car le monde a bien changé depuis 20 ans. Le monde déjà tout court évidemment, mais aussi et surtout celui de nos sociétés savantes (SS en abrégé cest plus simple pour la suite du texte). Bref rappel en arrière. De quoi causait-on à la fin du der- nier millénaire et au tout début de lactuel ? On était dans des sociétés savantes, et donc on causait de science. CQFD. Et aussi de basse politique évidemment. Mais au moins cela avait un avantage : on comprenait tous les mots. Et on pou- vait se battre à armes égales pour défendre ses intérêts où ceux de son « clan ». Aujourdhui que nenni ! Tout ceci est bien fini ! Ouste ! Adieu nos chères engueulades ! Aujour- dhui on cause DPC (LE DPC, pour les ignares, et pas LA DPC, opération emblématique du chirurgien « qui en a »), la FSM et les CNP, dont le CNP-HGE forcément, voire la FSMAD (je sais pas ce que cest, désolé), et la Fédération des Spécialités (il paraît quil y en a une pour la chirur- gie digestive), Accréditation, etc, etc. Il paraît même que « le CEFA HGE contrôle le DPC ». Cest dingue ! Mais je comprends toujours rienAvec lidée de base énoncée à chaque réunion : « attention mon gars, tu as tort de ne pas ty intéresser ! Tu es foutu ! ça va devenir obligatoire ! Tu es mort ! » Bref, on vous prédit lenfer si vous ne suivez pas le chemin tout tracé par nos SS. Et moi dans mon coin je me disais quoi dans ces réu- nions ? Dabord je suis passé par une phase dincompréhen- sion totale des débats (« mais de quoi ils causent ? » « Fina- lement, ils ont peut-être raison : les chirurgiens doivent être moins intelligents que les médecins car je ny comprends rien ! » etc, etc.). Ensuite, évidemment, car cest mon tem- pérament, jai réagi : « ah ah, je me marre ! Déjà il y a 20 ans, quand sous Kouchner (si jose dire) on causait de FMC et quil fallait avoir ses points, et que cétait obliga- toire, et bien finalement il ne sest rien passé. Alors comme il ny a pas dargent, et bien ce coup-ci ça sera pareil, et toc ! ». Mais bon, faut être honnête, dans nos conseils dadministration, je suis ultra-minoritaire je pense. Il nya quà voir les débats enflammés sur le sujet pour se rendre compte que mes collègues suivent de près le débat. Quils sont au jus. Ou alors ça ennuie tout le monde, mais personne nose rien dire ? Pas impossible finalement. Et ça serait plu- tôt rassurantJe vais vous faire une confidence : tout ceci memmerde. Désolé pour la vulgarité. Dabord parce que je ny comprends rien. Ensuite parce que cela ne mintéresse pas mais alors vraiment pas du tout. Enfin et surtout, et cest lobjet (un peu tardif, je reconnais) de mon éditorial qui na ni queue ni tête : à mes yeux, une société savante ne devrait causer que de RPC, Conférence de consensus, organisation du programme scientifique du congrès annuel, fiches dinformations et cest Y. Panis (*) Service de Chirurgie Colorectale, Pôle des Maladies de lAppareil Digestif, Hôpital Beaujon Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (APHP), Université Paris VII (Denis Diderot), 100, boulevard du Général Leclerc, 92118 Clichy cedex e-mail : [email protected] Colon Rectum DOI 10.1007/s11725-014-0510-1

Il est bien temps, tiens, de faire des voeux pour 2014

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ÉDITORIAL / EDITORIAL

Il est bien temps, tiens, de faire des voeux pour 2014…

Y. Panis

© Springer-Verlag France 2014

A l’heure où j’écris ce modeste éditorial pour Colon & Rec-tum, notre revue bien aimée, sur ma Remington numéro 7(modèle de 1887), je me prends à rêver tout haut de ce quepourrait être notre beau métier de chirurgien colorectalen 2014.

Que pouvons-nous espérer pour l’année 2014 ?

Un meilleur salaire ? Aucune chance. Une voiture defonction payée par l’APHP ? Non plus…Un bureau où lechauffage marche ? N’exagérons rien ! Une SNFGE qui sesouvient qu’il y a bien longtemps (à l’époque Jérémie Lefe-vre n’était même pas né et GuillaumeMeurette était en CM2,c’est dire…), trainaient dans les couloirs des JFHOD pleinsde chirurgiens heureux d’être là, dont votre serviteur ? Nerêvons pas. Là on nage en pleine science fiction.

Donc, il va falloir être plus modeste j’ai l’impression.Réfléchissons alors un peu sur l’avenir de nos chères Socié-tés Savantes. En effet, toujours à l’époque où GuillaumeMeurette passait avec difficulté le certificat d’étude (séchantsur la couleur du cheval blanc d’Henri IV), votre serviteur,toujours lui (j’aime bien parler de moi…) était aux respon-sabilités à la SFCD, et déjà membre du conseil d’adminis-tration de la SNFCP. J’ai même connu et tutoyé EmmanuelTiret. C’est dire si je suis vieux…Bref, je m’égare. Donc, lefonctionnement des Sociétés Savantes, je me targue de m’yconnaître un peu. Ou plutôt, je dois dire, je m’y connaissais !Car le monde a bien changé depuis 20 ans. Le monde déjàtout court évidemment, mais aussi et surtout celui de nossociétés savantes (SS en abrégé c’est plus simple pour lasuite du texte).

Bref rappel en arrière. De quoi causait-on à la fin du der-nier millénaire et au tout début de l’actuel ? On était dans dessociétés savantes, et donc on causait de science. CQFD. Etaussi de basse politique évidemment. Mais au moins cela

avait un avantage : on comprenait tous les mots. Et on pou-vait se battre à armes égales pour défendre ses intérêts oùceux de son « clan ». Aujourd’hui que nenni ! Tout ceci estbien fini ! Ouste ! Adieu nos chères engueulades ! Aujour-d’hui on cause DPC (LE DPC, pour les ignares, et pas LADPC, opération emblématique du chirurgien « qui en a »), laFSM et les CNP, dont le CNP-HGE forcément, voire laFSMAD (je sais pas ce que c’est, désolé), et la Fédérationdes Spécialités (il paraît qu’il y en a une pour la chirur-gie digestive), Accréditation, etc, etc. Il paraît même que« le CEFA HGE contrôle le DPC ». C’est dingue ! Mais jecomprends toujours rien… Avec l’idée de base énoncée àchaque réunion : « attention mon gars, tu as tort de ne past’y intéresser ! Tu es foutu ! ça va devenir obligatoire ! Tu esmort ! » Bref, on vous prédit l’enfer si vous ne suivez pas lechemin tout tracé par nos SS.

Et moi dans mon coin je me disais quoi dans ces réu-nions ? D’abord je suis passé par une phase d’incompréhen-sion totale des débats (« mais de quoi ils causent ? » « Fina-lement, ils ont peut-être raison : les chirurgiens doivent êtremoins intelligents que les médecins car je n’y comprendsrien ! » etc, etc.). Ensuite, évidemment, car c’est mon tem-pérament, j’ai réagi : « ah ah, je me marre ! Déjà il y a20 ans, quand sous Kouchner (si j’ose dire) on causait deFMC et qu’il fallait avoir ses points, et que c’était obliga-toire, et bien finalement il ne s’est rien passé. Alors commeil n’y a pas d’argent, et bien ce coup-ci ça sera pareil, ettoc ! ». Mais bon, faut être honnête, dans nos conseilsd’administration, je suis ultra-minoritaire je pense. Il n’y aqu’à voir les débats enflammés sur le sujet pour se rendrecompte que mes collègues suivent de près le débat. Qu’ilssont au jus. Ou alors ça ennuie tout le monde, mais personnen’ose rien dire ? Pas impossible finalement. Et ça serait plu-tôt rassurant…

Je vais vous faire une confidence : tout ceci m’emmerde.Désolé pour la vulgarité. D’abord parce que je n’y comprendsrien. Ensuite parce que cela ne m’intéresse pas mais alorsvraiment pas du tout. Enfin et surtout, et c’est l’objet (unpeu tardif, je reconnais) de mon éditorial qui n’a ni queue nitête : à mes yeux, une société savante ne devrait causer que deRPC, Conférence de consensus, organisation du programmescientifique du congrès annuel, fiches d’informations et c’est

Y. Panis (*)Service de Chirurgie Colorectale,Pôle des Maladies de l’Appareil Digestif,Hôpital Beaujon – Assistance Publique des Hôpitauxde Paris (APHP), Université Paris VII (Denis Diderot),100, boulevard du Général Leclerc, 92118 Clichy cedexe-mail : [email protected]

Colon RectumDOI 10.1007/s11725-014-0510-1

tout ! Le reste devrait être discuté ailleurs…. ou sans moi.Voilà, c’est dit. Je sens que je vais pas me faire un paquetd’amis mais bon tant pis. Ce n’est pas notre boulot. Je veuxbien que les syndicats et les Fédérations s’en occupent. Trèsbien. Mais pas nous. Ou pas moi.

Donc, en conclusion, mon vœu pour 2014 ? Avoir à nou-veau de belles sociétés savantes où tout le monde s’aime etoù on cause de médecine, de chirurgie, de proctologie, brefde belles choses…

Bonne année à tous !

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