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Ann Chir Plast Esthét 2001 ; 46 : 253, 254 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0294-1260(01)00030-9/MIS Compte-rendu de congrès IMCAS IMFAT 12–14 Janvier 2001 – Paris Ils étaient donc plus de 700 cette année à se presser au Pa- lais des Congrès afin d’assister aux dernières nouveautés exposées durant ces deux jours par plus de 60 interve- nants. Selon une habitude maintenant bien établie, ces exposés étaient scindés en deux parties principales, l’une essentiellement consacrée à une approche médicalisée du vieillissement (lasers, injections, compléments nutrition- nels, etc.), l’autre purement chirurgicale que nous avions personnellement en charge et à laquelle un écho tout à fait favorable a été fait puisque la salle mise à disposition s’est souvent avérée trop petite pour accueillir l’ensemble des auditeurs. C’est cette partie dont nous rapportons ici les principaux enseignements. J. Carraway doit-il être considéré comme un pré- curseur ? Il est en effet l’un des premiers chirurgiens plasticiens à s’intéresser passionnément à la « médecine anti-âge », phénomène appelé semble-t-il à prendre beau- coup d’importance dans les prochaines années. Quelle que soit la demande esthétique du patient, il l’incorpore dans un bilan général de santé surtout axé vers les défi- cits vitaminiques et le rééquilibrage alimentaire basé sur les principes de Zone (les repas doivent être composés à 40 % d’hydrates de carbone, 30 % de protéines et de graisse) en insistant sur les fruits et les légumes, en di- minuant la consommation de viande et en augmentant celle de poissons et d’oeuf, etc. Ces principes ne sont sans doute pas révolutionnaires, mais Carraway en a fait l’objet de séminaires qu’il organise régulièrement chez lui et qui semblent rencontrer un succès de plus en plus croissant. Reste à savoir si les suppléments nutritionnels, qu’ils soient vitaminiques, anti-oxydatifs ou hormonaux sont justifiés quel que soit l’état du patient ou s’ils ne doivent êtres administrés qu’en cas de déficit avéré. . . La controverse actuelle sur la DHEA est l’illustration type de ce débat, loin d’être clos. D’un point de vue plus chi- rurgical, Carraway nous a longuement expliqué son abord des blépharoplasties avec une excision cutanée ou muscu- laire d’emblée en haut, un abord rétro-musculaire en bas, avec détachement de l’orbiculaire du rebord marginal os- seux en cas de sillon naso-palpébral prononcé, complété par des greffes de graisse intramusculaires si nécessaire. Il insiste sur l’importance de l’automassage en postopéra- toire et la nécessité d’intervenir très tôt en cas d’incident, sans attendre les quatre à six mois régulièrement préco- nisés habituellement. Sa technique de greffe de graisse, qui nous avait beaucoup frappés il y a deux ans à Dallas, mérite qu’on s’y attarde à nouveau : prélèvement toujours à l’aiguille de 14, pas de centrifugation mais élimination du surplus séro-huileux par absorption sur tampons de Codman, réinjections à l’aiguille avec détachement par le biseau des éventuelles connexions profondes de façon à créer des petits tunnels remplis par la graisse, la greffe étant complétée plus en profondeur ensuite. Nous avons adopté ces principes depuis quelques mois, ils simplifient beaucoup la technique par rapport à la lipostructure de Coleman, même si les suites sont évidemment beaucoup plus ecchymotiques en cas de travail superficiel au biseau comme il le préconise. La mise en place d’un pansement adhésif directement sur la peau pendant quelques jours diminue nettement l’oedème postopératoire. Le vieillis- sement de la région parabuccale (sillons nasogéniens et plis commissuraux) reste encore un traitement bien dif- ficile à codifier : J. Santini et P. Kestemont nous ont rappelé que, plus on descendait, plus les insertions des muscles peauciers sur le derme profond étaient fortes et que le système musculo-aponévrotique du platysma res- tait la clé de voûte du rajeunissement du bas du visage. Pour Th. Besins, un sillon n’existe que par un surplomb et seule la remontée dans la verticalité de la masse ju- gomalaire peut apporter à la fois une solution durable au sillon nasogénien, au creusement naso-jugal quand le système aponévrotico-graisseux se relâche, et au ra- jeunissement palpébral inférieur quand l’ablation simple des poches pourrait se traduire par un oeil creux peu to- nique : la voie d’abord est canthale externe, la dissection sous-périostée intéresse tout l’ensemble jugomalaire, le septum est ensuite rompu si nécessaire pour permettre l’étalement de la graisse inférieure qui n’est pas résé- quée ; un point transfixiant percutané récupéré en voie temporale permet une traction très importante qui amasse une quantité de peau excédentaire impressionnante sous la paupière inférieure, laquelle est réséquée séparément du muscle ; la remise en tension séparée de celui-ci est mieux maintenue par un point trans-osseux pariétal ; si nécessaire, l’intervention se termine par une remise en tension temporale qui se rapproche de la galéapexie de Fogli ; ces auteurs seront d’accord sur l’importance d’un « lipofilling » complémentaire pour galber la pommette en

IMCAS IMFAT 12–14 Janvier 2001 – Paris

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Ann Chir Plast Esthét 2001 ; 46 : 253, 254 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservésS0294-1260(01)00030-9/MIS Compte-rendu de congrès

IMCAS IMFAT 12–14 Janvier 2001 – Paris

Ils étaient donc plus de 700 cette année à se presser au Pa-lais des Congrès afin d’assister aux dernières nouveautésexposées durant ces deux jours par plus de 60 interve-nants. Selon une habitude maintenant bien établie, cesexposés étaient scindés en deux parties principales, l’uneessentiellement consacrée à une approche médicalisée duvieillissement (lasers, injections, compléments nutrition-nels, etc.), l’autre purement chirurgicale que nous avionspersonnellement en charge et à laquelle un écho tout à faitfavorable a été fait puisque la salle mise à disposition s’estsouvent avérée trop petite pour accueillir l’ensemble desauditeurs. C’est cette partie dont nous rapportons ici lesprincipaux enseignements.

J. Carraway doit-il être considéré comme un pré-curseur ? Il est en effet l’un des premiers chirurgiensplasticiens à s’intéresser passionnément à la « médecineanti-âge », phénomène appelé semble-t-il à prendre beau-coup d’importance dans les prochaines années. Quelleque soit la demande esthétique du patient, il l’incorporedans un bilan général de santé surtout axé vers les défi-cits vitaminiques et le rééquilibrage alimentaire basé surles principes de Zone (les repas doivent être composésà 40 % d’hydrates de carbone, 30 % de protéines et degraisse) en insistant sur les fruits et les légumes, en di-minuant la consommation de viande et en augmentantcelle de poissons et d’œuf, etc. Ces principes ne sontsans doute pas révolutionnaires, mais Carraway en a faitl’objet de séminaires qu’il organise régulièrement chezlui et qui semblent rencontrer un succès de plus en pluscroissant. Reste à savoir si les suppléments nutritionnels,qu’ils soient vitaminiques, anti-oxydatifs ou hormonauxsont justifiés quel que soit l’état du patient ou s’ils nedoivent êtres administrés qu’en cas de déficit avéré. . . Lacontroverse actuelle sur la DHEA est l’illustration typede ce débat, loin d’être clos. D’un point de vue plus chi-rurgical, Carraway nous a longuement expliqué son aborddes blépharoplasties avec une excision cutanée ou muscu-laire d’emblée en haut, un abord rétro-musculaire en bas,avec détachement de l’orbiculaire du rebord marginal os-seux en cas de sillon naso-palpébral prononcé, complétépar des greffes de graisse intramusculaires si nécessaire.Il insiste sur l’importance de l’automassage en postopéra-toire et la nécessité d’intervenir très tôt en cas d’incident,sans attendre les quatre à six mois régulièrement préco-

nisés habituellement. Sa technique de greffe de graisse,qui nous avait beaucoup frappés il y a deux ans à Dallas,mérite qu’on s’y attarde à nouveau : prélèvement toujoursà l’aiguille de 14, pas de centrifugation mais éliminationdu surplus séro-huileux par absorption sur tampons deCodman, réinjections à l’aiguille avec détachement par lebiseau des éventuelles connexions profondes de façon àcréer des petits tunnels remplis par la graisse, la greffeétant complétée plus en profondeur ensuite. Nous avonsadopté ces principes depuis quelques mois, ils simplifientbeaucoup la technique par rapport à la lipostructure deColeman, même si les suites sont évidemment beaucoupplus ecchymotiques en cas de travail superficiel au biseaucomme il le préconise. La mise en place d’un pansementadhésif directement sur la peau pendant quelques joursdiminue nettement l’œdème postopératoire. Le vieillis-sement de la région parabuccale (sillons nasogéniens etplis commissuraux) reste encore un traitement bien dif-ficile à codifier : J. Santini et P. Kestemont nous ontrappelé que, plus on descendait, plus les insertions desmuscles peauciers sur le derme profond étaient fortes etque le système musculo-aponévrotique du platysma res-tait la clé de voûte du rajeunissement du bas du visage.Pour Th. Besins, un sillon n’existe que par un surplombet seule la remontée dans la verticalité de la masse ju-gomalaire peut apporter à la fois une solution durableau sillon nasogénien, au creusement naso-jugal quandle système aponévrotico-graisseux se relâche, et au ra-jeunissement palpébral inférieur quand l’ablation simpledes poches pourrait se traduire par un œil creux peu to-nique : la voie d’abord est canthale externe, la dissectionsous-périostée intéresse tout l’ensemble jugomalaire, leseptum est ensuite rompu si nécessaire pour permettrel’étalement de la graisse inférieure qui n’est pas résé-quée ; un point transfixiant percutané récupéré en voietemporale permet une traction très importante qui amasseune quantité de peau excédentaire impressionnante sousla paupière inférieure, laquelle est réséquée séparémentdu muscle ; la remise en tension séparée de celui-ci estmieux maintenue par un point trans-osseux pariétal ; sinécessaire, l’intervention se termine par une remise entension temporale qui se rapproche de la galéapexie deFogli ; ces auteurs seront d’accord sur l’importance d’un« lipofilling » complémentaire pour galber la pommette en

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fin d’intervention. Pour le pli commissural, Marinetti alégèrement modifié sa technique du détachement du li-gament mandibulaire par voie muqueuse avec relargagedes expansions du SMAS ; G. Botti fait confiance au trèsgrand décollement, avec remise en tension forte du SMASpour résoudre le problème. Quant à la poche malaire enrapport avec le relâchement orbiculaire, les petits moyens(injection de cortisone, liposuccion) restent d’efficacitévariable, et souvent modeste, lorsque l’on ne souhaitepas remettre le muscle en tension (B. Cornette De SaintCyr). En conclusion, il semble se dessiner actuellementune tendance un peu opposée à ceux qui comptaient sur lelifting traditionnel pour résoudre l’ensemble du vieillisse-ment facial à tous les étages : un certain nombre d’auteurssépare les vecteurs de tension avec un relèvement verti-cal du tiers moyen suspendu par voie temporale séparétotalement du vecteur latéral qui exige alors une dissec-tion beaucoup moins poussée, voire minimaliste, commele propose P. Tonnard avec le lifting pré-auriculaire en Set suture en bourse du SMAS sus-mandibulaire. Ses ré-sultats, plutôt convaincants, résisteront-ils à l’épreuve dutemps ? J.L. Goin est indéniablement l’un de ceux qui ontle mieux assimilé l’intérêt de ces différentes techniques,comme il en fit brillamment la démonstration avec sa tech-nique de base dans le lifting aux différents étages. Danstous les cas, la tendance est vraiment aux associations etl’on assiste à une chute assez vertigineuse des indicationsde lifting endoscopique du front devant l’efficacité de latoxine botulique (B. Ascher). Le retour des peelings, faceà l’explosion technologique des lasers, montre bien queles techniques de «resurfacing » sont définitivement en-trées dans l’armada chirurgicale de base. L’acquisition detoutes ces techniques sera sans doute favorisée dans lesprochaines années par le développement de modèles vir-tuels très prometteurs (G. Galdino).

La dernière journée était consacrée à l’inaugurationd’une séance totalement dédiée à la graisse, l’IMFAT (In-vestigation and Management of Fat and Adipose Tissue),brillamment introduite par M. Lafontan qui dénie toute

possibilité de conservation de la graisse vivante au-delàde quelques heures ; il nous rappelle que les adipocytes dela région glutéo-fémorale, résistants aux catécholamines,ont donc des activités lipogéniques fortes et lipolytiquesréduites, et que la différenciation des précurseurs adipocy-taires peut avoir lieu toute la vie. Des « arrondissements »de la silhouette peuvent se produire toute la vie durant,et l’éclaircissement des mécanismes en cause permettrasans doute l’inauguration d’un véritablement traitementmédical des lipoméries. Une nouvelle classification des li-podystrophies (Ph. Blanchemaison) est la bienvenue pourséparer clairement différents cadres nosologiques, et no-tamment celui de la cellulite enfin considéré comme untrouble pouvant être pathologique. L’IMCAS a égalementpermis de faire le point sur les différentes techniques delipofilling, et sur le traitement des lipoatrophies qui inau-gure un secteur tout à fait passionnant de notre activité.Les possibilités de culture adipocytaire (M. Zbili), encorebalbutiantes, sont une perspective néanmoins bien encou-rageante pour les patients dépourvus de toute réserve. Lasession sur la liposuccion permit à Y.G. Illouz de nousdire qu’en plus de 20 ans il n’avait finalement pas changégrand chose à sa technique de base, sinon l’abandon desgrosses canules et une méfiance sans ambiguïté devantles risques de la liposuccion superficielle, pourtant bienbrillamment exposés par le tandem italien M. Gasparottiet C. Gasperoni qui y ajoute un zeste de liposuccion auxultrasons par voie externe ou interne. Les aides méca-niques à la liposuccion (B. Môle) restent controverséeset l’endermologie fait toujours l’objet d’une étude et deperspectives bien documentées (B.M. Kinney et C. Lacar-riere).

Le prochain IMCAS aura lieu à Paris du 11 au 13janvier 2002.

Bernard Môle15, avenue de Tourville, 75007 Paris, France