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Article original Immunothérapie spécifique sublinguale : ODISSEE un an après. Résultats préliminaires d’ODISSEE (Observatoire de l’indication, du choix de prise en charge par Immunothérapie spécifique sublinguale ainsi que de l’adhésion et de l’observance au traitement chez les patients souffrant d’allergie respiratoire rhinite et/ou conjonctivite et/ou asthme allergique) Specific sublingual Immunotherapy: ODISSEE after one year. Preliminary results of ODISSEE (observatory of the indication and management of respiratory allergies rhinitis and/or conjunctivitis and/or allergic asthmaby specific sublingual immunotherapy) A. Didier a, * , A. Chartier b , G. Démonet c a Service de pneumologie et allergologie, hôpital Larrey, CHU de Toulouse, 24, chemin de Pouvourville, 31059 Toulouse cedex 9, France b Département médical ALK-Abello, 92400 Courbevoie, France c Cabinet médical, 31270 Cugnaux, France Reçu le 21 juillet 2011 ; accepté le 21 juillet 2011 Résumé Buts de l’enque ˆte. Identifier en pratique les facteurs qui déterminent l’adhésion et l’observance au traitement par immunothérapie sublinguale (ITSL) des patients allergiques respiratoires et fournir un état des lieux sur les pratiques en allergologie. Patients et me ´thodes. Enquête longitudinale nationale multicentrique menée de septembre 2009 à mars 2011 et réalisée chez des patients âgés de cinq ans et plus, allergiques aux pollens ou aux acariens, chez qui une ITSL a été instaurée. Analyses préliminaires descriptives d’adhésion, d’observance et d’évolution symptomatologique à l’issue d’une année de traitement. Re ´sultats. Sur les 1876 patients analysables de l’observatoire, âgés de 23,8 14,9 ans, 49 % étaient des hommes, 66,6 % étaient allergiques aux acariens et 36,6 % aux acariens et pollens. L’observance rapportée par le médecin, excellente dans 73,6 % des cas et moyenne dans 16,8 %, était meilleure chez les adultes, chez les femmes, ou en cas de rhinite allergique. L’observance évaluée par le patient était forte pour 71,6 % et modérée pour 26,6 % d’entre eux. Après un an de traitement 87,7 % des patients étaient disposés à continuer l’ITSL, essentiellement grâce à l’amélioration symptomatique, constatée chez 72,6 % des asthmatiques et 87,6 % des patients souffrant de rhinite, de la diminution de consommation des traitements symptomatiques, effective chez 73,6 % des patients, et de l’amélioration de la qualité de vie (l’impact de la maladie devenait négligeable pour 59,1 % patients). La tolérance était bonne, conforme à celle attendue avec l’ITSL. Conclusion. L’Observatoire de l’indication, du choix de prise en charge par Immunothérapie spécifique sublinguale ainsi que de l’adhésion et de l’observance au traitement chez les patients souffrant d’allergie respiratoire (ODISSEE) montre que les patients ont une bonne observance à leur ITSL, essentiellement grâce à l’acceptation et la prise en charge par le patient de sa maladie. L’analyse fine des facteurs d’observance fera l’objet d’un prochain article. # 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Immunothérapie sublinguale ; Allergie respiratoire ; Observance ; Adhésion ; Symptômes ; Qualité de vie Abstract Aim of the survey. To identify in current practice factors determining compliance and observance to sublingual specific immunotherapy (SLIT) in patients suffering respiratory allergy. Revue française d’allergologie 51 (2011) 476484 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Didier). 1877-0320/$ see front matter # 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.reval.2011.07.008

Immunothérapie spécifique sublinguale : ODISSEE un an après. Résultats préliminaires d’ODISSEE (Observatoire de l’indication, du choix de prise en charge par Immunothérapie

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Immunothérapie spécifique sublinguale : ODISSEE un an après. Résultatspréliminaires d’ODISSEE (Observatoire de l’indication, du choix de prise

en charge par Immunothérapie spécifique sublinguale ainsi que del’adhésion et de l’observance au traitement chez les patients souffrant

d’allergie respiratoire – rhinite et/ou conjonctivite et/ou asthme allergique)

Specific sublingual Immunotherapy: ODISSEE after one year. Preliminary results of ODISSEE(observatory of the indication and management of respiratory allergies –rhinitis and/or

conjunctivitis and/or allergic asthma– by specific sublingual immunotherapy)

A. Didier a,*, A. Chartier b, G. Démonet c

a Service de pneumologie et allergologie, hôpital Larrey, CHU de Toulouse, 24, chemin de Pouvourville, 31059 Toulouse cedex 9, Franceb Département médical ALK-Abello, 92400 Courbevoie, France

c Cabinet médical, 31270 Cugnaux, France

Reçu le 21 juillet 2011 ; accepté le 21 juillet 2011

Résumé

Buts de l’enquete. – Identifier en pratique les facteurs qui déterminent l’adhésion et l’observance au traitement par immunothérapie sublinguale(ITSL) des patients allergiques respiratoires et fournir un état des lieux sur les pratiques en allergologie.Patients et methodes. – Enquête longitudinale nationale multicentrique menée de septembre 2009 à mars 2011 et réalisée chez des patients âgésde cinq ans et plus, allergiques aux pollens ou aux acariens, chez qui une ITSL a été instaurée. Analyses préliminaires descriptives d’adhésion,d’observance et d’évolution symptomatologique à l’issue d’une année de traitement.Resultats. – Sur les 1876 patients analysables de l’observatoire, âgés de 23,8 � 14,9 ans, 49 % étaient des hommes, 66,6 % étaient allergiques auxacariens et 36,6 % aux acariens et pollens. L’observance rapportée par le médecin, excellente dans 73,6 % des cas et moyenne dans 16,8 %, étaitmeilleure chez les adultes, chez les femmes, ou en cas de rhinite allergique. L’observance évaluée par le patient était forte pour 71,6 % et modéréepour 26,6 % d’entre eux. Après un an de traitement 87,7 % des patients étaient disposés à continuer l’ITSL, essentiellement grâce à l’améliorationsymptomatique, constatée chez 72,6 % des asthmatiques et 87,6 % des patients souffrant de rhinite, de la diminution de consommation destraitements symptomatiques, effective chez 73,6 % des patients, et de l’amélioration de la qualité de vie (l’impact de la maladie devenaitnégligeable pour 59,1 % patients). La tolérance était bonne, conforme à celle attendue avec l’ITSL.Conclusion. – L’Observatoire de l’indication, du choix de prise en charge par Immunothérapie spécifique sublinguale ainsi que de l’adhésion et del’observance au traitement chez les patients souffrant d’allergie respiratoire (ODISSEE) montre que les patients ont une bonne observance à leurITSL, essentiellement grâce à l’acceptation et la prise en charge par le patient de sa maladie. L’analyse fine des facteurs d’observance fera l’objetd’un prochain article.# 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Immunothérapie sublinguale ; Allergie respiratoire ; Observance ; Adhésion ; Symptômes ; Qualité de vie

Abstract

Aim of the survey. – To identify in current practice factors determining compliance and observance to sublingual specific immunotherapy (SLIT)in patients suffering respiratory allergy.

Revue française d’allergologie 51 (2011) 476–484

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. Didier).

1877-0320/$ – see front matter # 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.reval.2011.07.008

Patients and methods. – French, multicentric, longitudinal survey, conducted from September 2009 to March 2011, in patients older than 5 years,allergic to house dust mite or pollens, and who had a SLIT initiated. Preliminary descriptive results after 1 year SLIT.Results. – The cohort included 1876 patients aged 23.8 � 14.9 years; 49% were male. Predominant allergy was house dust mite (66.6%) andhouse dust mite plus pollens (36.6%). Compliance was excellent in 73.6% cases and medium in 16.8%. Adults, women or patients suffering rhinitisshowed the best compliance. Observance as assessed by the patient was strong in 71.6% cases and moderate in 26.6%. After 1 year of treatment,87.7% patients wished to continue SLIT, mainly because of symptomatic enhancement, seen in 72.6% of asthmatic and 87.6% of rhinitis patients,of the decrease in symptomatic treatment intake, seen in 73.6% of the patients, and of the better quality of life, seen in 59.1% of the patients.Tolerance was good, as expected with SLIT treatment.Conclusion. – L’Observatoire de l’indication, du choix de prise en charge par Immunothérapie spécifique sublinguale ainsi que de l’adhésion etde l’observance au traitement chez les patients souffrant d’allergie respiratoire (ODISSEE) showed that patients treated with SLIT are compliantand observant to the treatment, mainly owing to their acceptance and understanding of their disease.# 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Sublingual immunotherapy; Respiratory allergy; Compliance; Adhesion; Symptoms; Quality of life

A. Didier et al. / Revue française d’allergologie 51 (2011) 476–484 477

1. Introduction

Les allergies respiratoires touchent 25 à 30 % de lapopulation générale en France, se présentant ainsi comme unproblème majeur de santé publique [1]. Leur prise en chargecomporte trois volets : (i) l’éviction allergénique lorsque celaest possible, (ii) le traitement symptomatique, (iii) l’immuno-thérapie spécifique (ITS) [2] qui, selon l’OMS, est le seultraitement susceptible de modifier le cours naturel de la maladieallergique, pouvant éviter le passage de la rhinite à l’asthme [3].L’ITS consiste à stimuler le système immunitaire en admi-nistrant habituellement des doses croissantes d’allergènes afind’induire une tolérance spécifique à long terme [4]. Cetraitement peut être administré soit par voie injectable, soit parvoie sublinguale (ITSL). Cette dernière voie est bien tolérée(plus de 500 millions de doses administrées à l’homme à ce joursans choc anaphylactique), et a fait la preuve de son efficacitédans le traitement de la rhinite et de l’asthme allergiques chezl’adulte et l’enfant [5].

La durée préconisée de l’ITS est d’au moins trois ans [6]. Lavoie sublinguale, de plus en plus utilisée, représenteaujourd’hui plus de 70 % des prescriptions d’immunothérapiepour allergie respiratoire en France. Cependant, compte tenu dela chronicité de la maladie et de la durée du traitement,l’observance du patient et son adhésion au traitementconstituent des facteurs essentiels de l’efficacité de l’ITS.

L’observance est l’acte de suivre le traitement prescrit ; sonétude relève d’une approche objective et mesurable. L’adhésionreflète les attitudes et la motivation d’un patient à suivre untraitement ; elle se réfère à l’approche subjective du patient àsuivre le traitement prescrit. Dans les maladies chroniques, ilexiste des facteurs connus de non observance. Ils sont liés à lafois au patient, à la maladie, au traitement et au médecin [7].Dans le cas de l’ITSL, la plupart des études réalisées ensituation pragmatique chez des adultes et des enfants ontmontré que les traitements s’accompagnent en général d’unebonne observance pendant des durées de un à trois ans, avec uneobservance au schéma de traitement supérieure à 75 % pourplus de 80 % des patients dans la première année de traitement[6]. Dans l’ITSL, l’accent est mis sur l’importance del’information délivrée aux patients et sur le rôle fondamentalde l’adhésion au traitement pour améliorer l’observance.

L’enquête Observatoire de l’indication, du choix de prise encharge par Immunothérapie spécifique sublinguale ainsi que del’adhésion et de l’observance au traitement chez les patientssouffrant d’allergie respiratoire (ODISSEE) a été réalisée afind’identifier, en condition pragmatique, les facteurs quidéterminent l’adhésion et l’observance au traitement par ITSLdes patients souffrant de rhinite, de conjonctivite et/ou asthmeallergique, et de fournir un état des lieux sur les pratiques enallergologie. Le profil clinique, celui des sensibilisations, ainsique les principaux facteurs qui ont influencé la mise en œuvrede l’ITSL chez ces patients ont été publiés à la fin de la périodede recrutement de l’enquête [8]. Le présent article décrit lesrésultats préliminaires descriptifs d’adhésion, d’observance etd’évolution symptomatologique à l’issue d’une année detraitement. Les analyses approfondies d’adhésion et d’obser-vance, et l’étude de leurs corrélations feront l’objet d’unepublication ultérieure.

2. Patients et méthodes

ODISSEE est une enquête observationnelle prospective,longitudinale et multicentrique menée en France auprès de290 médecins compétents en allergologie de septembre 2009 àmars 2011. De septembre 2009 à février 2010, chaqueallergologue a inclus dans l’étude les 22 premiers patients quiconsultaient pour une rhinite, un asthme et/ou une conjonctivitepar allergie aux acariens (11 patients) ou aux pollens (11 patients)acceptant de participer à l’enquête. Cette première étape a permisla constitution d’un registre décrivant le profil des patients selonqu’ils relèvent ou non d’une ITSL et l’identification des motifsd’instauration ou de non instauration d’une ITSL [8]. Parmi les22 patients inclus, les 12 premiers patients pour lesquels uneITSL a été instaurée (six allergiques aux acariens et sixallergiques au pollen) ont fait l’objet d’un suivi de 12 mois aprèsl’initiation de l’immunothérapie. Cette étape consistait àdocumenter l’évolution de la symptomatologie ainsi quel’observance des patients en fonction des différents schémasde désensibilisation. Le patient ou l’autorité parentale légaleremplissait un auto-questionnaire et le médecin un questionnaired’observation à la visite d’inclusion et à 12 mois � 30 jours.

Le « questionnaire médecin » à l’inclusion portait sur lasituation thérapeutique de l’allergie respiratoire, puis à

A. Didier et al. / Revue française d’allergologie 51 (2011) 476–484478

12 mois � 30 jours sur l’évolution clinique et l’attitudethérapeutique liée à l’allergie. Les questions posées au patientconcernaient :

� à l’inclusion et à la visite de fin, les symptômes de sonallergie, leur impact sur sa qualité de vie et l’utilisationde traitements symptomatiques, par échelle visuelleanalogique ;� à l’inclusion, ses connaissances sur le traitement de la

maladie, sa compréhension des mesures thérapeutiques et sonadhésion à l’ITSL, par questionnaire fermé ;� à la visite de fin de suivi, son adhésion et son observance au

traitement, par questionnaire fermé.

À la visite de fin de suivi, l’observance était évaluée par lemédecin comme excellente (> 80 %), moyenne (50–80 %) oufaible (< 50 %), et par le patient par le questionnairestandardisé de Moriski [9] qui permettait d’attribuer un scoreallant de 0 à 10. L’impact de la maladie allergique sur la qualitéde vie était évalué à l’inclusion et à la fin du suivi par uneéchelle visuelle analogique allant de 0 (aucun impact) à 10(impact très important).

3. Statistiques

Les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logicielSAS 9.1, SAS institue, Cary NC, États-Unis. Les analysesinférentielles ont été précédées d’analyses descriptives. Lesvariables quantitatives ont été décrites par le nombre de valeursrenseignées, le nombre de données manquantes, la moyenne,l’écart-type, le premier et le troisième quartile, la médiane, leminimum et le maximum. Les variables qualitatives ont étédécrites par le nombre de valeurs renseignées, le nombre devaleurs manquantes, la fréquence et le pourcentage parmodalité. Une différence était considérée comme statistique-ment significative lorsque le degré de signification du testbilatéral était inférieur ou égal à 0,05. L’observance, l’adhésionau traitement et l’évolution symptomatologique ont été

Fig. 1. Extraits prescrits à l’issue de la consultation d’inclusion (1869 patients ; septsaisonniers : pollens d’arbres, de graminées, d’herbacées.

analysées en fonction des profils cliniques et de sensibilisationdes patients par des tests du Khi2.

4. Résultats

4.1. La population

Sur 2079 patients inclus dans l’observatoire par les290 médecins participants, 203 n’ont pu être retenus pour lesanalyses (172 n’appartenaient pas au registre et 31 n’avaient pasde données à l’inclusion). La population analysable del’observatoire était composée de 1876 patients, égalementrépartis entre hommes (49 %) et femmes (51 %), âgés enmoyenne de 23,8 (� 14,9) ans. La population était principale-ment adulte (56,5 %), 15,3 % avaient de 12 à 18 ans et 28,2 %moins de 12 ans. Plus d’un patient sur deux vivait en zoneurbaine ; 52 % d’entre eux habitaient un logement ancien ; 28,3 %des patients étaient dans un environnement professionnelfavorisant l’allergie ; 44 % avaient des contacts réguliers avecdes animaux : chats (49 %), chiens (41 %). Les sensibilisationsles plus fréquentes étaient les acariens (66,6 %), les pollens degraminées (55,3 %) et les pollens de bétulacées (27,0 %). Lespatients étaient polysensibilisés dans 62,7 % des cas avec uneassociation acariens/pollens pour 36,6 %. Conformément auxcritères d’inclusion, tous les patients présentaient une rhiniteallergique (98,5 %), une conjonctivite (69,2 %) ou un asthme(49,9 %). Ils pouvaient aussi avoir un eczéma atopique (18,3 %),une allergie alimentaire (12,5 %) ou une sinusite (7,9 %). Larhinite, persistante pour 71,4 % des patients, était modérée àsévère dans 84 % des cas. L’asthme, persistant chez 32,4 % despatients, était léger pour 51,3 % et modéré pour 45,3 % des cas.Les patients avaient un traitement symptomatique systématiquedans 53,1 % des cas et occasionnel pour 42,3 % avec unsoulagement attendu insuffisant pour 33,6 %. Une ITS antérieureavait été effectuée chez 15,2 % des patients. Elle était efficace àtrès efficace pour 65 % d’entre eux et bien tolérée dans 80 % descas. L’observance avait été excellente dans 60 % des cas et jugéefaible dans 12,9 % des cas.

DM).* Allergènes per-annuels : acariens ; phanères; moisissures. ** Allergènes

Tableau 1Répartition des patients en fonction de la fréquence hebdomadaire des prises.

1 (%) 2–6 (%) 7 (%)

Acariens 4,4 28,4 67,2Arbres 2,0 26,3 71,7Graminées 5,7 30,7 63,7Mélange d’allergènes per annuelsa 0,0 37,9 62,1Mélange d’allergènes saisonniersb 1,3 34,2 64,5Mélange d’allergènes per annuels

et saisonniers2,1 34,0 63,9

Tous types d’allergènes 3,8 29,8 66,4

a Allergènes per annuels : acariens ; phanères ; moisissures.b Allergènes saisonniers : pollens d’arbres, de graminées, d’herbacées.

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4.2. Attitude thérapeutique

À l’issue de la consultation d’inclusion, 85,9 % des patientsse sont vu prescrire une seule préparation, 13,7 % deuxpréparations et 0,4 % trois préparations. Des allergènesappartenant à la même famille était prescrits à 81,8 % despatients. L’ITSL était prescrite pour une durée médiane de12 mois, et une dose d’entretien instaurée d’emblée dans 7 %des cas, selon un schéma per annuel (53,0 %), pré- (quatre moisen moyenne avant la saison) et co-saisonnier (46,5 %) ousaisonnier (0,5 %). Les différents types d’extraits prescrits sontprésentés en Fig. 1. Quelle que soit la préparation, le schéma deprise était de plus de quatre prises hebdomadaires dans 80 %des cas et plus de 60 % des patients avaient une prisequotidienne (Tableau 1).

Fig. 2. Motifs prioritaires de prescription d’une immunothérapie sublinguale (ITSL) (1863 patients ; 13 DM).

Fig. 3. Motifs d’adhésions à l’instauration d’une immunothérapie sublinguale (ITSL) avant le début du traitement (1876 patients).

Tableau 2Observance durant l’année de l’observatoire, globalement et par facteur ayantune influence significative (1490 patients ; 386 DM).

Observance (%)

Excellente(> 80 %)

Moyenne(50–80 %)

Faible(< 50 %)

Globale 73,6 16,8 9,5

Par âge5 à 11 ans 75,6 14,9 9,412 à 18 ans 65,6 20,3 14,1> 18 ans 75,1 16,7 8,2

Par type de sensibilisationAcariens 71,5 15,8 12,7Acariens + pollens 71,0 17,8 11,2Pollens 78,2 16,7 5,1

Par type de rhinitePersistante 73,0 19,7 7,3Intermittente 74,2 15,2 10,4

Par sévérité de la rhiniteLégère 67,2 24,4 8,3Modérée à sévère 75,0 14,6 10,4

Par type d’asthmePersistant 69,4 14,2 16,5Intermittent 75,0 14,6 6,7

Par sévérité de l’asthmeLéger 76,9 15,6 7,6Modéré 68,5 16,3 15,2Sévère 72,2 16,7 11,1

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Les raisons principales pour le médecin de prescrire uneITSL étaient la gêne symptomatique ressentie par le patient,une prévision de bonne observance et le choix du patient(Fig. 2). Les patients adhéraient à l’idée d’une ITSLessentiellement en raison de la gêne symptomatique ressentie,d’une possibilité de guérison et de l’espoir d’une améliorationde leur qualité de vie (Fig. 3).

4.3. Observance du patient au traitement

Sur les 1876 patients évaluables en début d’enquête, 1571(83,4 %) ont eu une visite de suivi 12 mois après l’instaurationde l’ITSL.

Selon les praticiens, après 12 mois de traitement, 73,6 % despatients ont eu une excellente observance supérieure ou égale à80 %, 16,8 % une observance moyenne comprise entre 50 et80 %, et 9,5 % une observance faible inférieure à 50 %. Laproportion de patients ayant une excellente observance étaitmoins élevée chez les adolescents que dans les autres tranchesd’âge ( p = 0,02). Le pourcentage de patients avec uneexcellente observance était plus important chez les patientssensibilisés aux pollens (78,2 %) par rapport à ceux sensibilisésaux acariens (71,5 %) ou aux pollens et aux acariens (71 % ;p < 0,001) (Tableau 2).

Selon les patients, leur observance au traitement après12 mois, mesurée par le questionnaire de Moriski, était forte(� 8) chez 71,6 % des patients, modérée (4 à 7) chez 26,6 % etfaible (� 3) chez 1,2 % d’entre eux. Cette observance était plusmarquée chez les adultes ( p = 0,0004) et plus importante chezles femmes (74,4 %) que chez les hommes (68,5 % ; p = 0,001).Une observance forte au traitement était significativement plusimportante lorsque les patients étaient atteints de rhinite(71,7 %) que d’asthme (52 %, p = 0,009).

Après un an de traitement, 87,7 % des patients étaientdisposés à continuer leur ITSL, essentiellement du fait de la

Fig. 4. Motivation du patient pour continuer l’immunothérapie sublinguale (ITSL) après un an (1471 patients ; 405 DM).

Fig. 5. Amélioration perçue de la symptomatologie.

A. Didier et al. / Revue française d’allergologie 51 (2011) 476–484 481

perception de l’amélioration des symptômes, de la diminutionde la consommation de traitements symptomatiques et du boncontrôle de l’évolution de la maladie allergique (Fig. 4).

4.4. Évolution de la symptomatologie

Au bout de 12 mois de traitement, la symptomatologieclinique était fortement améliorée par rapport à l’inclusion(Fig. 5). La rhinite était améliorée pour 87,6 % des patients,la conjonctivite pour 83,3 % et l’asthme pour 72,6 %. Cesaméliorations variaient selon le type d’allergènes prescrits(Fig. 6). La consommation de traitements symptomatiquesavait diminué chez 73,6 % des patients (Fig. 7). De même,les arrêts de travail et les absences scolaires dus à l’allergieavaient fortement diminué : l’absentéisme scolaire, qui avaittouché 27 % des enfants l’année précédente, a affecté 4 %d’entre eux pendant l’année écoulée ; le nombre de patientsayant eu besoin d’un arrêt de travail passait de 6 % à 2 %.Enfin le retentissement de la maladie allergique sur la qualitéde vie était considérablement abaissé : le taux de patientsrapportant un impact important (� 8) passait de 28,5 % àl’inclusion à 9,5 % après un an d’ITSL ; parallèlement letaux de patients qui n’étaient pas ou peu gênés par leurmaladie passait de 13,5 % à la visite d’inclusion à 59,1 %après un an (Fig. 8).

4.5. Tolérance de l’immunothérapie sublinguale

Un effet indésirable lié au traitement a été rapporté par21,2 % (n = 318) des patients (Fig. 9). Pour 41,8 % d’entreeux, aucune action n’a été entreprise, une adaptation de doseavec baisse transitoire du schéma initial a été réalisée chez20,4 %, une baisse définitive du schéma pour 9,7 % et54 patients (16,9 %) ont arrêté définitivement leur traitementpour effet indésirable soit 2,9 % de la population del’observatoire.

5. Discussion

À notre connaissance, cette enquête est la première menéeen France qui décrive l’observance et l’adhésion au traitementpar ITSL d’un tel effectif de patients souffrant d’allergierespiratoire. Les cohortes étudiées font généralement état demoins de 500 patients [10]. L’observance, les coûts et la qualitéde vie sont des facteurs importants dans la prise en charge decette maladie [10], et son adhésion est d’autant plus importanteque c’est le patient qui s’auto-administre son traitement.

L’observance thérapeutique [11] est le degré avec lequel lepatient suit les prescriptions médicales concernant le régimeprescrit, l’exercice ou la prise du médicament. L’observance estdonc un comportement, c’est-à-dire l’acte de suivre letraitement prescrit. Il s’agit de la partie visible, objectivableet mesurable de cette pratique de soin. L’adhésion [12] faitréférence à des processus intrinsèques tels que les attitudes et lamotivation des patients à suivre leurs traitements. L’adhésionthérapeutique ne peut être obtenue que si le malade a accepté samaladie et compris l’intérêt des traitements proposés. Cette

adhésion est primordiale dans les pathologies chroniques oùl’aspect subjectif de la symptomatologie est important.

Les résultats préliminaires d’ODISSEE ont montré que 75 %des patients avaient une observance de plus de 80 % après un an

Fig. 6. Amélioration perçue de la symptomatologie selon l’allergie.

A. Didier et al. / Revue française d’allergologie 51 (2011) 476–484482

de traitement, ce qui est conforme aux chiffres généralementrapportés pour les ITSL [6]. Quant à l’acceptation dutraitement, il est surprenant de constater qu’à l’initiation del’ITSL, 50 % des patients en espèrent une guérison, ce quisouligne leur méconnaissance de la maladie. Cette mécon-naissance était déjà rapportée en 2003 [13] ; l’information despatients reste donc la pierre angulaire dans la prise en charge del’allergie respiratoire.

La variabilité des schémas thérapeutiques est relativementfaible : 91 % des patients avaient une montée progressive desdoses. Des mélanges de familles d’allergènes étaient prescrits àmoins de 20 % des patients.

L’amélioration perçue de la symptomatologie après un an detraitement variait selon les manifestations initiales : 90 %d’amélioration de la rhinite, 80 % de la conjonctivite et 75 % del’asthme. Enfin la tolérance à l’ITSL observée dans cette

13,5%

57,9%

28,5%

59,1%

31,4%

9,5%

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

[0-3] [4 -7] [8 -10]

Première visite (1650 pa�ents) Dernière visite (1338 pa�ents)

Fig. 8. Retentissement sur la qualité de vie (EVA). Faible (0–3) ; moyen (4–7) ;fort (8–10).

Fig. 7. Évolution du recours aux traitements symptomatiques (1420 patients ;256 DM).

Fig. 9. Type d’événements indésirables présentés (1499 patients dont 318 ayant présenté un EI ; 377 DM).

A. Didier et al. / Revue française d’allergologie 51 (2011) 476–484 483

enquête est conforme aux données des publications actuelles[14].

6. Conclusion

Les résultats préliminaires d’ODISSEE montrent l’impor-tance d’assurer une information plus complète sur la maladieau patient. En France, les allergologues accordent plusd’intérêt à l’aspect clinique qu’à l’acceptation et la prise encharge par le patient de sa maladie. Les traitements prescritssuivent généralement les recommandations des sociétéssavantes. L’analyse fine des facteurs d’observance (notammentles modalités d’administration) feront l’objet d’un prochainarticle.

Déclaration d’intérêts

AC. Employé du laboratoire ALK-Abelló.AD. Interventions ponctuelles : activités de conseil pour le

laboratoire ALK-Abelló.

GD. Interventions ponctuelles : activités de conseil pour lelaboratoire ALK-Abelló.

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