3
22 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MAI 2010 - N°422 Industrie du DIV et biologie médicale : accompagnement à la démarche d’accréditation Une de plus direz-vous ? Et bien non : à part quelques invités privilégiés (Jean Benoît président et Jean Bégué, pour le Syndicat des biologistes), Jean-Gérard Gobert (président de la Fédération nationale des syndicats de praticiens biologistes hospitaliers et hospitalo- universitaires), Bernard Gouget (Fédération hospitalière de France), Claude Grasmick (Président du Syndicat des biologistes des hôpitaux), Anne Gruson (vice-présidente de la Section Santé humaine du Cofrac), et votre serviteur), il s’agissait d’une réunion, animée par Mme Fabienne Chauvière, journaliste à France Inter, entre les professionnels du DIV et les autorités de tutelle. Cette fin d’après-midi, revêtue des habits de la classique table ronde déjà printanière, réunissait un représentant de l’AFSSAPS, en la personne de son directeur de l’évaluation des dispositifs médicaux, M. Jean-Claude Ghislain ; les Drs Anne-Marie Gallot et Michel Ballereau pour le ministère de la Santé ; M. Daniel Pierre et Mme Hélène Mehay pour le Cofrac. Après avoir souhaité la bienvenue aux membres du SFRL et leurs invités, Y. Quinchard confia le micro à F. Chauvière. D’entrée, elle sollicita M. Ballereau. Celui-ci introduisit la présentation de A.-M. Gallot par une simple phrase de forte densité : « Les LBM disposent désormais d’une entière liberté d’organisation sous réserve de l’existence d’une efficience intégrée et territorialement structurée ». Déjà il faut la digérer… ce qui explique sans doute le silence qui lui fit suite, et dont profita A.-M. Gallot pour enchaîner en rappelant les fondamentaux de la réforme voulue par Mme la ministre Roselyne Bachelot : une biologie médicalisée en amont (conseil à la prescription, phase pré-analytique maîtrisée) et en aval (interprétation(s) et conseil), une qualité prouvée et pragmatique vis-à-vis des soins prodigués aux patients, assortie d’un vecteur-modèle européen, une réforme identique pour le privé et le public, Ce rappel a été complété par une précision de M. Ballereau : « les exigences de qualité du résultat se substituent aux anciennes exigences de moyens : c’est une précision fondamentale ». A.-M. Gallot apporta d’autres précisions sur les grands rendez- vous de la réforme et offrit à l’auditoire attentif l’opportunité d’ouvrir les agendas : preuve d’entrée dans la démarche avant le 1 er novembre 2013, accréditation complète de chaque laboratoire (survivant – NDLR), avant le 1 er novembre 2016. Elle précisa que les preuves à fournir pourraient relever de deux voies d’accès : la voie A, correspondant à une démarche « libre » pour laquelle trois validations de méthodes (vérifications sur site) et un abonnement à un programme d’EEQ dans trois spécialités du LBM, pour au moins 50 % des paramètres concernés seront exigés par le Cofrac, et présentés dans le dossier initial, lui- même déposé au plus tard le 31 octobre 2012 ; la voie B correspondant à un cursus d’accompagnement par une « auto-école » tel que celui proposé par Bioqualité ® par exemple (ou autre organisme reconnu par le ministère de la Santé). Les preuves à fournir au Cofrac doivent être colligées et adressées au plus tard le 31 mai 2013. Dans le parc du Jardin des Plantes, au bord de la rue Cuvier et de la faculté de Jussieu rénovée ou presque (mes sou- venirs d’étudiant tardif font naître une émotion «chair de poule»), se trouve le Grand amphithéâtre du Muséum. C’est en ces lieux où la fauverie, ours et singes, jadis prétextes à la promenade dominicale, ont disparu (ne reste que le vivarium) que le 7 avril 2010, M. Yves Quinchard, Président du SFRL (Syndicat de l’industrie du diagnostic in vitro), avait organisé une réunion d’informations et d’échanges sur le thème de l’accréditation des laboratoires. © D.R. Conférence-débat du SFRL Un amphithéâtre studieux. U p p b d p u h (P h la se Fabienne Chauvière

Industrie du DIV et biologie médicale : accompagnement à la démarche d’accréditation

Embed Size (px)

Citation preview

22 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MAI 2010 - N°422

Industrie du DIV et biologie médicale : accompagnement à la démarche d’accréditation

Une de plus direz-vous ? Et bien non : à part quelques invités privilégiés (Jean Benoît président et Jean Bégué, pour le Syndicat des biologistes), Jean-Gérard Gobert (président de la Fédération nationale des syndicats de praticiens biologistes hospitaliers et hospitalo-universitaires), Bernard Gouget (Fédération hospitalière de France), Claude Grasmick (Président du Syndicat des biologistes des hôpitaux), Anne Gruson (vice-présidente de la Section Santé humaine du Cofrac), et votre serviteur), il s’agissait d’une réunion, animée

par Mme Fabienne Chauvière, journaliste à France Inter, entre les professionnels du DIV et les autorités de tutelle. Cette fin d’après-midi, revêtue des habits de la classique table ronde déjà printanière, réunissait un représentant de l’AFSSAPS, en la personne de son directeur de l’évaluation des dispositifs médicaux, M. Jean-Claude Ghislain ; les Drs Anne-Marie Gallot et Michel Ballereau pour le ministère de la Santé ; M. Daniel Pierre et Mme Hélène Mehay pour le Cofrac.

Après avoir souhaité la bienvenue aux membres du SFRL et leurs invités, Y. Quinchard confia le micro à F. Chauvière. D’entrée, elle sollicita M. Ballereau. Celui-ci introduisit la présentation de A.-M. Gallot par une simple phrase de forte densité : « Les LBM disposent désormais d’une entière liberté d’organisation sous réserve de l’existence d’une efficience intégrée et territorialement structurée ».Déjà il faut la digérer… ce qui explique sans doute le silence qui lui fit suite, et dont profita A.-M. Gallot pour enchaîner en rappelant les fondamentaux de la réforme voulue par Mme la ministre Roselyne Bachelot : une biologie médicalisée en amont (conseil à la prescription,

phase pré-analytique maîtrisée) et en aval (interprétation(s) et conseil),

une qualité prouvée et pragmatique vis-à-vis des soins prodigués aux patients, assortie d’un vecteur-modèle européen, une réforme identique pour le privé et le public,

Ce rappel a été complété par une précision de M. Ballereau : « les exigences de qualité du résultat se substituent aux anciennes exigences de moyens : c’est une précision fondamentale ».A.-M. Gallot apporta d’autres précisions sur les grands rendez-vous de la réforme et offrit à l’auditoire attentif l’opportunité d’ouvrir les agendas : preuve d’entrée dans la démarche avant le 1er novembre 2013, accréditation complète de chaque laboratoire (survivant –

NDLR), avant le 1er novembre 2016.Elle précisa que les preuves à fournir pourraient relever de deux voies d’accès : la voie A, correspondant à une démarche « libre » pour laquelle

trois validations de méthodes (vérifications sur site) et un abonnement à un programme d’EEQ dans trois spécialités du LBM, pour au moins 50 % des paramètres concernés seront exigés par le Cofrac, et présentés dans le dossier initial, lui-même déposé au plus tard le 31 octobre 2012 ; la voie B correspondant à un cursus d’accompagnement par

une « auto-école » tel que celui proposé par Bioqualité® par exemple (ou autre organisme reconnu par le ministère de la Santé). Les preuves à fournir au Cofrac doivent être colligées et adressées au plus tard le 31 mai 2013.

Dans le parc du Jardin des Plantes, au bord de la rue Cuvier et de la faculté de Jussieu rénovée ou presque (mes sou-venirs d’étudiant tardif font naître une émotion «chair de poule»), se trouve le Grand amphithéâtre du Muséum. C’est en ces lieux où la fauverie, ours et singes, jadis prétextes à la promenade dominicale, ont disparu (ne reste que le vivarium) que le 7 avril 2010, M. Yves Quinchard, Président du SFRL (Syndicat de l’industrie du diagnostic in vitro), avait organisé une réunion d’informations et d’échanges sur le thème de l’accréditation des laboratoires.

© D

.R.

Conférence-débat du SFRL

Un amphithéâtre studieux.

Uppbdpuh(PhlaseFabienne Chauvière

Journées

REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MAI 2010 - N°422 // 23

SYMPOSIUM I CONGRES I CONFÉRENCE DÉBAT I SALON

M. Ballereau reprit la parole pour confier à l’assistance que cette réforme de la biologie correspond à un profond changement culturel. F. Chauvière en bonne animatrice rebondit sur le mot culture et suggéra que dans ce cadre, il soit précisé quel(s) rôle(s) serai(en)t confié(s) aux fournisseurs dans cette nouvelle œuvre théâtrale…M. Ballereau, très diplomate, dressa un rapide bilan avec les doigts d’une seule main : la qualité fonctionnelle des automates

actuels est indiscutable, chaque fournisseur peut, en tant

qu’interlocuteur privilégié, offrir un « support » de validation de techniques (vérification sur site), par tout moyen à sa convenance (documentation, articles publiés dans les revues scientifiques, etc.), à côté de cela, les LBM doivent et devront

participer à des EEQ indépendantes (les sociétés savantes et le Cofrac ont à se

pencher sur les méthodes de référence), il existe un retard presque choquant concernant les systèmes

d’information (gestion des demandes, éléments cliniques, serveur et résultats validés, etc.).À ce propos, et se retournant vers J.-C. Ghislain, il précisa que l’AFSSAPS acquiert une nouvelle compétence vis-à-vis des logiciels.Élargissant le champ de la question initiale, il évoqua également le rôle des SROS dans la régulation de l’offre territoriale de biologie médicale, et comme à son habitude (ses réponses sont souvent des sollicitations de questions), il glissa cette phrase sibylline : « un site sans automate ? oui ; mais un site sans biologiste ? non ! »Il conclut cette prise de parole en rappelant que le pilotage par le « B » était un mirage, synonyme d’inflation injustifiée et donc accompagné d’une absence formelle de la pertinence de l’acte (et de sa demande).F. Chauvière décida de changer de sujet et se rapprocha des représentants du Cofrac. « Quel est le rôle du Cofrac ? » demanda-t-elle.Son directeur, D. Pierre brossa le profil de cet organisme créé en mai 1994, dont le statut relève de celui des associations 1901. Le Cofrac compte un personnel permanent (80 personnes) ; son budget 2009 a atteint 13 millions d’euros. Le Cofrac est riche de 150 évaluateurs qualiticiens et d’environ 1 000 évaluateurs

techniques. 160 laboratoires de biologie médicale sont accrédités, la plupart de façon partielle. Le rôle du Cofrac, pour ce qui concerne le sujet d’aujourd’hui, est d’attester de la compétence des laboratoires avec une reconnaissance internationale grâce aux accords mutuels de réciprocité (MLA’s).F. Chauvière se tourna ensuite vers M. J.-C. Ghislain avec la même question.Celui-ci évoqua différentes problématiques en cours de résolution à l’AFSSAPS : définir la bonne articulation entre le CNI et l’EEQ obligatoire

figurant dans l’ordonnance, notamment vis-à-vis de l’enregistrement (agrément ?) des organismes chargés d’EEQ, du maintien d’une lisibilité publique, d’une homogénéisation des critères d’acceptabilité ; faire évoluer le contrôle national en prenant en compte

différents objectifs tels que la santé publique (plan cancer), les examens dits « à risque » selon la classification GHTF, les examens émergents non encore contrôlés, sans oublier une extension des vigilances vers la métrologie et l’informatique (logiciels de laboratoire).Il conclut « le tout, fait et fera jouer à l’AFSSAPS un rôle majeur dans le nouveau paysage de la biologie médicale française ».F. Chauvière, sans doute non satisfaite des réponses obtenues, reformula sa question initiale en changeant le mot « rôle » par celui de « conséquences ». En clair, quelles sont les conséquences de la réforme vis-à-vis des industriels du DIV ?Sachant que M Ballereau n’est jamais à court (il préfère l’aéronautique à la chasse), elle posa son regard et dirigea son micro vers lui.« Il est évident, dit-il, que les biologistes ont besoin de l’expérience et de la compétence de leurs fournisseurs ; les automates seront à terme moins nombreux et plus “ gros ”. Notre objectif est de mettre en place une dynamique d’amélioration continue axée sur la qualité des soins prodigués aux patients. Ainsi, par exemple, le biologiste vérifiera, pour les “ lecteurs de glycémie ”, la cohérence des résultats et si nécessaire prendra les mesures appropriées ».J.-C. Ghislain posa à son tour la question de l’existence d’une relation entre le marquage CE et l’obligation de validation sur site. Il se répondit : « tout ce qui est apport objectif est bon à prendre par le biologiste, quant aux choix de son automate, de sa technique et de la vérification sur site ».

Quelles sont les relations prévues entre l’AFFSSAPS et le Cofrac ?H. Mehay répondit que les deux organismes travaillaient déjà ensemble au sein de la Commission technique d’accréditation et que plusieurs documents étaient en chantier.

Anne-Marie Gallot. Yves Quinchard. Daniel Pierre. Michel Ballereau. Jean-Claude Ghislain. Hélène Mehay.AnnAnne Me-Mariarie Ge Gallallotot.AA J

24 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MAI 2010 - N°422

Combien va coûter l’accréditation ?D. Pierre affirma qu’il était impossible de répondre à cette question (remous dans la salle). Il le justifia par la diversité des situations de LBM à accréditer. En revanche, il était évidemment possible d’évaluer les coûts de la réception du dossier (analyse de recevabilité), de l’évaluation proprement dite et de la rémunération des évaluateurs en fonction de la portée d’accréditation : le tarif homme/jour est défini (mais le nombre de jours est variable) et celui de la redevance annuelle.

De combien d’évaluateurs devra disposer le Cofrac ?D. Pierre rappela que l’accréditation est une évaluation par les pairs, à laquelle il faut également ajouter les évaluations de surveillance et celles du cycle de réévaluation. Au total, il admit que le nombre d’évaluateurs potentiels souhaitable n’était pas encore atteint et en profita pour faire appel à candidatures.M. Ballereau revint sur la problématique des coûts en précisant qu’il ne fallait pas négliger les coûts indirects au premier rang desquels se trouve la réorganisation structurelle des laboratoires. Il ajouta, non sans humour, que la mise à niveau pour prétendre à l’accréditation était inversement proportionnelle à l’empoussiérage du GBEA.

À terme, combien de laboratoires seront accrédités ?La réforme de la biologie médicale s’inscrit dans la loi HPST, intervint M. Ballereau. Pour les laboratoires privés, les estimations du ministère prévoient qu’avec une meilleure répartition hexagonale des sites, il y aura environ 800 laboratoires (à partir des 3 700 actuels). En revanche, pour les laboratoires hospitaliers, le nombre actuel est plus difficile à cerner (environ 1 200 supposés), le nombre de pôles pourrait atteindre environ 200 entités...

Le marquage CE est une auto certification. Dès lors peut-on lui faire confiance ?M. Ballereau opina devant la pertinence de la question. « Nous savons, dit-il, que certains systèmes analytiques bien qu’affublés d’un marquage CE peuvent menacer la réussite de la démarche d’accréditation. Là encore, les fournisseurs et les sociétés savantes ont un rôle à jouer : n’est-ce pas le moment d’établir des grilles de choix ? » interrogea-t-il.

Dans quelle mesure l’ordonnance s’applique-t-elle aux laboratoires d’anatomie et cytopathologie ?M. Ballereau indiqua que dans l’état actuel des choses, l’ordonnance ne s’applique aux LACP que pour la partie de l’activité qui relève de la biologie médicale, en clair, la biologie moléculaire. Il ajouta qu’à terme, il faudra évoluer vers l’accréditation de ces laboratoires.

Les services économiques, dans les établissements de soins, exercent une activité de filtrage basée d’abord sur le prix : cette politique incontournable n’obéit pas à l’exigence principale de la qualité.M. Ballereau fut très clair dans sa réponse : « j’ai bien entendu : nous avons besoin d’exemples concrets, il faut nous en fournir ».

La pression économique risque de nuire à la qualité comme d’ailleurs le caractère figé de notre nomenclature insista J. Benoit.M. Ballereau « Deux points sont abordés dans la remarque de Jean. Ma réponse est celle-ci : ce qui est offert au patient doit être la qualité requise. Une biologie efficiente est d’abord efficace. Pour la question sur la nomenclature, celle-ci doit évoluer en faisant entrer les “ BHN ” et en supprimant les actes référencés devenus obsolètes ».

J.-G. Gobert avec sa conviction habituelle exprima la néces-sité que les collègues puissent disposer au plus vite de documents « balisés ».D. Pierre précisa que différents documents étaient en cours, dont la version « février 2010 » du manuel d’accréditation (document d’exigences spécifiques).

C. Giroud (membre du SFRL) exprima plusieurs souhaits quant à l’harmonisation des pratiques d’évaluations du Cofrac, aux bénéfices d’une concertation Cofrac/SFBC, à l’importance des méthodes de référence et à celle de la certification des valeurs cibles.Le problème, avec de telles réunions dont l’importance est indiscutable, c’est le risque de frustration : « on » n’a pas parlé de ceci ou de cela, « on » aurait dû demander des précisions sur…L’avantage, avec de telles réunions, c’est la proximité immédiate et la disponibilité des personnes (adresses courriels et n° de téléphone mobile échangés) et la convivialité de discussions ouvertes comme autant de bouteilles de champagne.

Extraits de la conférence-débat

du mercredi 7 avril 2010 rédigés par Claude Naudin

Table ronde bien menée implique une ouverture vers les auditeurs. Plusieurs questions ont été posées, des affirmations prononcées, des requêtes formulées. Les voici.

© D

.R.

©

Les « Chevaliers » de la table ronde.