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Jésus-Christ Ellen G. White

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  • Jsus-ChristEllen G. White

  • Information au sujet de ce livre

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    Concernant lauteur

    Ellen G. White (1827-1915) est considre comme lauteur amricain le plus vastement traduit, ses oeuvres ont t publies en plus de 160 langues.Elle a crit plus de 100,000 pages sur une large varit de thmes spirituels et pratiques. Guide par le Saint-Esprit elle a exalt Jsus et point lesEcritures comme tant la base de la foi de chacun.

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  • Ellen White

    JESUS-CHRIST[2]

    Traduit de louvrage en anglais: The Desire of Ages.Tir 12000 exemplaires.

    Tous droits de reproduction totale ou partielle et de traduction rservs.

    ditions Vie et Sant, 2000 BP 59, 77192 DAMMARIE-LS-LYS CEDEX, France. ISBN 2-85743-163-5ISSN 1158-5080 [3] [4] [5] [6] [7]

    Prface

    A quelque race ou quelque condition quappartienne un homme, celui-ci prouve un irrsistible attrait vers des biens quil ne possde pas. LeDieu de bont a mis cette aspiration dans notre nature, pour quaucune chose,mauvaise, bonne, ou mme excellenteparmi celles qui noussont accessibles, ne puisse nous procurer une entire satisfaction. Dieu veut que lhomme cherche les biens les meilleurs et quen eux il trouve lebonheur ternel.

    Ce livre a pour but de montrer que seul Jsus-Christ rpond toutes nos aspirations. Il est vrai quil existe dj bien des Vie du Christ, ouvragesexcellents, bien documents, contenant de savantes dissertations sur la chronologie, les faits contemporains, les coutumes, le milieu historique,ainsi que sur les enseignements et les multiples aspects de la vie de Jsus de Nazareth. Avouons nanmoins que lon na pas tout dit et quil nousreste beaucoup apprendre.

    Disons cependant que cet ouvrage na pas pour but doffrir une harmonie des vangiles, ni mme de placer dans un ordre rigoureusementchronologique les vnements importants et les merveilleuses leons qui se dgagent de la vie du Christ. Le but est de prsenter lamour de Dieurvl en son Fils, la beaut divine de la vie du Christ, laquelle tous peuvent participer, plutt que de chercher satisfaire la curiosit ou rpondre aux objections de la critique. Par la bont de son caractre, Jsus attirait lui ses disciples; par sa prsence, par la vive sympathie quilmanifestait lgard de leurs infirmits et de leurs besoins, il faisait passer leur caractre du plan terrestre au plan cleste, de lgosme ausacrifice, de ltroitesse de coeurfruit de lignorance et du prjug une ouverture qui les poussait connatre et aimer intensment leshommes de toutes nations et de toutes races. Dans le mme esprit, cet ouvrage se propose dtablir un contact direct entre le lecteur et le divinRdempteur, Jsus tout-puissant, capable de sauver compltement et de transformer son image tous ceux qui, par [8] lui, sapprochent de Dieu.Mais combien il est difficile de raconter la vie du Christ! Cest tenter de peindre larc-en-ciel sur la toile, ou de reproduire sur le papier une musiquemlodieuse.

    Dans les pages qui suivent, lauteurune femme ayant une longue et profonde exprience des choses divinesa mis en vidence les beautsindites contenues dans la vie de Jsus. Elle tire simplement de lcrin quelques pierres prcieuses. Dans ce trsor infini elle puise, lintention dulecteur, des richesses insouponnes. Ainsi plus dun passage familier, dont on croyait connatre toute la porte, projette un nouveau jet de lumireglorieuse. Jsus-Christ y est rvl comme laboutissement des dsirs et des espoirs de tous les sicles.

    En prsentant ce livre au public, nous demandons Dieu que son message devienne parole de vie pour beaucoup de lecteurs dont lesaspirations et les dsirs nont pas encore t exaucs.

    Les Editeurs [9]

  • 1 Dieu avec nous

    ON LUI donnera le nom dEmmanuel: ... Dieu avec nous La lumire de la connaissance de la gloire de Dieu resplendit sur la face de Christ. Dsles jours de lternit le Seigneur Jsus-Christ tait un avec le Pre; il tait limage de Dieu, limage de sa grandeur et de sa majest, le rayonnementde sa gloire. Cest pour manifester cette gloire quil est venu en ce monde. Sur une terre obscurcie par le pch il est venu rvler la lumire de lamourde Dieu; il a t Dieu avec nous. Cest pour cela que la prophtie avait annonc: On lui donnera le nom dEmmanuel.

    En venant demeurer parmi nous, Jsus allait rvler Dieu la fois aux hommes et aux anges. Il tait la Parole de Dieu,la pense de Dieu devenantperceptible loreille. Dans la prire quil a formule en faveur de ses disciples il a dit: Je leur ai fait connatre ton nom,misricordieux etcompatissant, lent la colre, riche en grce et en fidlit,afin que lamour dont tu mas aim soit en eux, et que moi, je sois en eux. Cettervlation ntait pas destine seulement aux enfants de cette terre. Notre petit monde est le livre de texte de lunivers. Le merveilleux dessein de grcede Dieu, le mystre de son amour rdempteur: voil le thme sur lequel les anges voudraient se pencher et qui sera le sujet de leurs mditations travers les ges sans fin. Les rachets, et avec eux les tres qui nont pas pch, trouveront dans la croix du Christ leur science et leur chant. On verraque la gloire qui resplendit sur la face du Christ cest la gloire de lamour qui [10] se sacrifie. On verra, la lumire du Calvaire, que la loi de lamour quirenonce soi-mme est la loi de la vie pour la terre et pour le ciel; que lamour qui ne cherche pas son intrt a sa source dans le coeur de Dieu; etquen celui qui est doux et humble se manifeste le caractre de celui qui habite une lumire dont aucun homme ne peut sapprocher.

    Au commencement, Dieu tait manifest dans toutes les oeuvres de la cration. Cest le Christ qui a dploy les cieux et jet les fondements de laterre. Sa main a plac les mondes dans lespace et form les fleurs des champs. Cest lui qui soutient les montagnes par sa force. A lui appartient lamer,car cest lui qui la cre. Cest lui qui a rempli la terre de beaut et lair de chant. Sur tout ce qui se trouve sur la terre, dans les airs, et dans leciel, il a grav le message de lamour du Pre.

    Bien que le pch ait souill loeuvre parfaite de Dieu, ce message subsiste. Maintenant encore toutes les choses cres annoncent la gloire desperfections divines. A part le coeur goste de lhomme, il nest rien qui vive pour soi-mme. Aucun oiseau ne fend les airs, aucune bte ne se meut surle sol sans servir entretenir quelque autre vie. La plus simple feuille darbre, le plus humble brin dherbe exerce un ministre. Chaque arbre, chaquebourgeon, chaque feuille produit un lment vital sans lequel aucun homme, aucune bte pourrait vivre; en retour, chaque homme, chaque btecontribue entretenir la vie de larbre, du bourgeon, de la feuille. Les fleurs mettent leur parfum et dploient leur beaut pour le bonheur de lhumanit.Le soleil rpand sa clart pour la joie de milliers de mondes. Locan lui-mme, source de tous nos cours deau et de toutes nos fontaines, ne reoitleau de tous les fleuves que pour la restituer. Les vapeurs qui slvent de son sein redescendent sur le sol en ondes fcondantes.

    Les anges de gloire donnent avec joie leur amour et leur vigilance inlassable en faveur dtres dchus et souills. Des tres clestes rconfortent lecoeur des hommes; ils apportent ce monde entnbr la lumire des parvis clestes; par un [11] ministre aimable et patient ils exercent une actionsur lesprit humain pour amener les mes perdues une communion avec le Christ plus troite que celle quils peuvent exprimenter eux-mmes.

    Mais laissons de ct ces manifestations moins importantes pour contempler Dieu en Jsus. En regardant Jsus nous comprenons que cest lagloire de notre Dieu de donner. Je ne fais rien de moi-mme, affirmait le Christ; le Pre qui est vivant ma envoy, et... je vis par le Pre. Je necherche pas ma gloire, mais la gloire de celui qui ma envoy. Ces paroles mettent en vidence le grand principe qui est la loi de la vie pour lunivers.Le Christ a tout reu de Dieu, et il la pris pour le donner. Il en est ainsi du ministre quil exerce dans les parvis clestes en faveur de toutes lescratures: par lintermdiaire du Fils bien-aim la vie du Pre se rpand sur tous; elle retourne par lintermdiaire du Fils sous forme de louanges et dejoyeux service, telle une vague damour, vers la grande Source universelle. Ainsi travers le Christ le circuit bienfaisant est complet, reprsentant lecaractre du grand Donateur, la loi de la vie.

    Cest dans le ciel mme que cette loi a t viole. Le pch a eu son origine dans la recherche de soi-mme. Lucifer, le chrubin protecteur, vouluttre le premier dans le ciel. Il seffora de gagner sa cause des tres clestes, de les loigner de leur Crateur et dassurer leur hommage sapersonne. Pour cela il prsenta Dieu sous un faux jour, laccusant dorgueil. Il prta un Crateur aimant ses propres mauvaises caractristiques. Ilrussit de cette manire tromper dabord les anges, puis les hommes. Il les amena douter de la parole de Dieu, ne plus se fier sa bont. Parceque Dieu est un Dieu de justice, environn dune majest redoutable, Satan a fait voir en lui un tre svre, sans piti. Il entrana ainsi les hommes danssa rvolte contre Dieu et ds lors une nuit de malheur descendit sur le monde.

    Parce que Dieu a t mconnu, les tnbres ont envahi la terre. Pour dissiper ces ombres lugubres, pour ramener le [12] monde Dieu, il fallaitbriser le pouvoir trompeur de Satan. Lemploi de la force ne pouvait produire ce rsultat, car cet emploi soppose aux principes du gouvernement divin.Dieu naccepte quun service damour; or lamour ne se commande pas; il ne sobtient pas par lusage de la force ou de lautorit. Lamour seul veillelamour. Connatre Dieu cest laimer; son caractre se manifeste en opposition avec celui de Satan. Cette oeuvre ne pouvait tre accomplie que par unseul Etre, unique dans tout lunivers. Celui-l seul qui connaissait la hauteur et la profondeur de lamour de Dieu tait capable de le rvler. Sur lasombre nuit enveloppant le monde devait se lever le Soleil de justice qui porte la sant dans ses rayons.

    Il ne faut pas voir dans le plan de la rdemption le produit dune rflexion tardive, conscutive la chute dAdam. Il sagit de la rvlation du mystretenu secret ds lorigine des temps. Cette rvlation dvoila les principes qui ds les ges ternels sont la base du trne de Dieu. Dieu et le Christont prvu ds le commencement lapostasie de Satan et la chute de lhomme, amene par le pouvoir trompeur de cet apostat. Dieu nest pas lauteurdu pch, mais il en a prvu lexistence et il sest prpar faire face cette terrible ventualit. Si grand tait son amour pour le monde quil sestengag donner son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne prisse pas, mais quil ait la vie ternelle.

    Lucifer avait dit: Jlverai mon trne au-dessus des toiles de Dieu. ... Je serai semblable au Trs-Haut. Mais le Christ, dont la condition tait cellede Dieu, ... na pas estim comme une proie arracher dtre gal avec Dieu, mais il sest dpouill lui-mme, en prenant la condition desclave, endevenant semblable aux hommes.

    Il y a eu l un sacrifice volontaire. Jsus et pu demeurer au ct du Pre. Il pouvait conserver la gloire du ciel et lhommage des anges. Il a prfrremettre le sceptre entre les mains du Pre et descendre du trne de lunivers pour apporter la lumire ceux qui en taient privs, la vie ceux quiprissaient. [13]

    Voici prs de deux mille ans quune voix mystrieuse manant du trne de Dieu, a t entendue dans le ciel: Tu nas voulu ni sacrifice, ni offrande;mais tu mas form un corps. ... Voici, je viensdans le rouleau du livre il est crit mon sujetpour faire, Dieu, ta volont. Ces paroles annonaientlaccomplissement du dessein tenu cach de toute ternit. Le Christ tait sur le point de visiter notre monde et de sincarner. Tu mas form un corps,dit-il. Sil stait montr revtu de la gloire quil partageait avec le Pre avant que le monde ft, nous neussions pu supporter la lumire de sa prsence.Pour que nous pussions le contempler sans tre dtruits, la manifestation de sa gloire a t voile. Sa divinit a t revtue du voile de lhumanit,lagloire invisible sous une forme humaine visible.

    Ce grand dessein a t annonc au moyen de figures et de symboles. Le buisson ardent dans lequel le Christ se montra Mose faisait connatreDieu. Le symbole choisi pour reprsenter la divinit tait un simple buisson nayant rien dattrayant. LInfini y tait enserr. Le Dieu tout-compatissantenveloppa sa gloire dans cette humble reprsentation, pour que Mose pt la regarder et vivre. De mme, dans la colonne de nue de jour et dans la

  • colonne de feu de nuit, Dieu entrait en communication avec Isral, faisant connatre aux hommes sa volont et rpandant sur eux sa grce. La gloire deDieu tait adoucie, sa majest voile, afin que les faibles yeux dtres finis pussent les contempler. Cest ainsi que le Christ allait venir, semblable auxhommes, pour transformer notre corps avili. Il navait aucune beaut qui pt le recommander aux yeux des hommes: il tait nanmoins Dieu incarn,lumire du ciel et de la terre. Sa gloire tait voile, sa grandeur et sa majest taient caches pour lui permettre de sapprocher des hommes affligs ettents.

    Dieu commanda Isral, par lintermdiaire de Mose: Ils mlveront un sanctuaire, et jhabiterai au milieu deux. Et il habita dans le sanctuaire, aumilieu de son peuple. Le symbole de sa prsence les accompagna dans tous leurs voyages [14] harassants dans le dsert. Ainsi le Christ dressa sontabernacle au milieu du campement humain. Il planta sa tente ct de celles des hommes, afin de demeurer parmi nous, et de nous familiariser avecson divin caractre et sa vie. La Parole a t faite chair, et elle a habit parmi nous, pleine de grce et de vrit; et nous avons contempl sa gloire,une gloire comme celle du Fils unique venu du Pre.

    Ds lors que Jsus est venu habiter parmi nous, nous savons que Dieu connat nos preuves et compatit nos souffrances. Tout fils, toute filledAdam est mme de comprendre que notre Crateur est lami des pcheurs. Car en toute doctrine de grce, en toute promesse de joie, en tout actedamour, dans tout ce qui nous attire quand nous mditons sur la vie terrestre du Sauveur, nous voyons Dieu avec nous.

    Satan transforme la loi damour de Dieu en une loi dgosme. Il nous fait croire quil est impossible dobir ses prceptes. Il rend le Crateurresponsable de la chute de nos premiers parents et de tous les malheurs qui ont suivi; Dieu devient ainsi lauteur du pch, de la souffrance, de la mort.Jsus devait dmasquer cette tromperie. Devenu semblable nous, il allait donner lexemple de lobissance. Pour cela il revtit notre nature et fit nospropres expriences. Aussi devait-il devenir, en tout, semblable ses frres. Sil nous fallait subir quelque chose que Jsus nait pas eu supporter,Satan pourrait en tirer argument pour nous montrer que la puissance de Dieu est insuffisante en ce qui nous concerne. Cest pourquoi Jsus a ttent comme nous tous gards. Il a endur toutes les preuves qui peuvent nous survenir. Il na pas fait appel pour lui-mme une puissance quinous serait refuse. En tant quhomme il a fait face la tentation et la vaincue par la force que Dieu lui a donne. Il dit: Cest mes dlices, mon Dieu,de faire ce qui est ton bon plaisir, et ta loi est au dedans de mes entrailles. Alors quil allait de lieu en lieu en faisant du bien, gurissant tous ceux queSatan affligeait, il donnait connatre aux hommes le caractre de la loi de Dieu et la nature de son service. Il atteste par sa [15] vie que nous avonsaussi la possibilit dobir la loi de Dieu.

    Par son humanit le Christ est venu en contact avec lhumanit; par sa divinit il saisit le trne de Dieu. En tant que Fils de lhomme il nous a donn unexemple dobissance; en tant que Fils de Dieu il nous confre le pouvoir dobir. Cest le Christ qui du milieu du buisson ardent du Mont Horeb disait:Je suis celui qui dit: Je suis.. ... Tu parleras ainsi aux enfants dIsral: Celui qui est, lEternel, menvoie vers vous. Tel tait le gage de la dlivrancedIsral. Ainsi, quand il vint en se rendant semblable aux hommes, il sest dclar Celui qui est. Lenfant de Bethlhem, le doux et humble Sauveur,tait Dieu manifest en chair. Et il nous dit: Je suis le bon berger. Je suis le pain vivant. Je suis le chemin, la vrit et la vie. Tout pouvoir ma tdonn dans le ciel et sur la terre. Je suis le garant de toutes les promesses. Je suis, ne craignez rien. Dieu avec nous: ainsi notre dlivrance du pchest rendue certaine, le pouvoir dobir la loi du ciel nous est assur.

    En sabaissant jusqu revtir notre humanit, le Christ a manifest un caractre oppos celui de Satan. Mais il est descendu encore plus bas sur lesentier de lhumiliation. Aprs stre trouv dans la situation dun homme, il sest abaiss lui-mme en devenant obissant jusqu la mort, la mort de lacroix. Tel le souverain sacrificateur qui dposait son riche vtement pontifical pour officier dans lhabit de lin du simple sacrificateur, le Christ a pris laforme de serviteur et a offert son sacrifice, la fois sacrificateur et victime. Il a t meurtri cause de nos pchs, bris cause de nos iniquits. Lechtiment qui nous donne la paix est tomb sur lui.

    Le Christ a t trait selon nos mrites afin que nous puissions tre traits selon ses mrites. Il a t condamn pour nos pchs, auxquels il navaitpas particip, afin que nous puissions tre justifis par sa justice, laquelle nous navions pas particip. Il a souffert la mort qui tait la ntre, afin quenous puissions recevoir la vie qui est la sienne. Cest par ses meurtrissures que nous avons la gurison. [16]

    Par sa vie et par sa mort, le Christ a fait plus que de simplement rparer les ruines causes par le pch. Satan voulait sparer jamais lhomme deDieu; or en Christ nous devenons unis Dieu plus troitement que si nous navions jamais pch. En assumant notre nature le Sauveur sest rattach lhumanit par un lien qui ne sera jamais bris, qui subsistera dge en ge. Dieu a tant aim le monde quil a donn son Fils unique. Ce nest passeulement pour porter nos pchs, pour mourir en sacrifice pour nous, quil a t donn; Dieu la donn pour toujours lhumanit dchue. Pour assurerson conseil de paix immuable, Dieu a donn son Fils unique comme partie intgrante de la famille humaine, pour toujours participant de notre nature.Ainsi se trouve garanti laccomplissement de la parole divine. Un enfant nous est n, un fils nous a t donn; lempire a t pos sur son paule. Enla personne de son Fils, Dieu a adopt la nature humaine et la transporte au plus haut des cieux. Cest le Fils de lhomme qui partage le trne delunivers. Cest ce Fils de lhomme qui on donne pour nom: le Conseiller admirable, le Dieu fort, le Pre dternit, le Prince de la paix. Le Je suisest larbitre plac entre Dieu et lhumanit, posant sa main sur lun et sur lautre. Bien que saint, innocent, sans souillure, spar des pcheurs, il napas honte de nous appeler ses frres. En Christ la famille de la terre et celle des cieux sont relies lune lautre. Le Christ glorifi est notre frre. Leciel est enchss dans lhumanit, lhumanit est enlace au sein de lAmour infini. Dieu dit, au sujet de son peuple: Ils seront tous comme les pierresdun diadme, brillant dans la terre sainte. De quelle beaut, de quel clat on les verra resplendir! La hauteur laquelle seront levs les rachets seraun tmoignage ternel rendu la misricorde de Dieu. Dans les sicles venir il montrera la richesse surabondante de sa grce par sa bont enversnous en Christ-Jsus. ... Dsormais les principauts et les pouvoirs dans les lieux clestes connaissent par lEglise la sagesse de Dieu dans sa grandediversit, selon le dessein ternel quil a ralis par le Christ-Jsus notre Seigneur. [17]

    Le gouvernement de Dieu se trouve justifi grce loeuvre rdemptrice du Christ. Le Dieu tout-puissant est rvl en tant que Dieu damour. Lesaccusations de Satan sont rfutes, son vrai caractre dmasqu. Toute nouvelle rvolte devient impossible. Le pch ne pourra plus jamais entrer nouveau dans lunivers. Tous seront prservs dapostasie travers lternit. Les habitants de la terre et du ciel sont dsormais unis leur Crateurpar des liens indissolubles.

    Loeuvre de la rdemption sera complte. O le pch avait abond, la grce de Dieu va surabonder. La terre elle-mme, que Satan rclame commetant son fief, sera non seulement rachete mais exalte. Notre monde si petit, tache noire dans la glorieuse cration, sous la maldiction du pch,sera honor par-dessus tous les autres mondes de lunivers de Dieu. Ici-bas, o le Fils de Dieu a dress sa tente au sein de lhumanit, o le Roi degloire a vcu, a souffert, a subi la mort,ici-bas, quand Dieu fera toutes choses nouvelles, le tabernacle de Dieu sera parmi les hommes. Il habiteraavec eux, ils seront son peuple, et Dieu lui-mme sera avec eux. Marchant la lumire du Seigneur, pendant lternit, les rachets lui rendront grcepour son don ineffable:

    Emmanuel, Dieu avec nous. [18]

  • 2 Le peuple lu

    LE PEUPLE juif avait attendu la venue du Sauveur pendant plus de mille ans. Il avait fait reposer sur cet vnement ses plus brillantes esprances. Lenom de ce Sauveur avait t enchss dans ses chants et ses prophties, dans les rites du temple et dans les prires du foyer. Nanmoins, il ne lereconnut pas quand il se prsenta lui. Le Bien-aim du ciel fut pour lui comme un rejeton... qui sort dune terre dessche. Il navait ni beaut, ni clatpour attirer les regards. Il est venu chez les siens, et les siens ne lont pas reu.

    Pourtant Dieu avait choisi Isral. Il lavait charg de conserver parmi les hommes la connaissance de sa loi, ainsi que les symboles et les prophtiesannonant le Sauveur. Il voulait faire de lui une source de salut pour le monde. Ce quavait t Abraham dans le pays o il sjourna, ce que Joseph avaitt en Egypte, et Daniel la cour de Babylone, le peuple hbreu devait ltre au milieu des nations. Il lui incombait de faire connatre Dieu aux hommes.

    Le Seigneur avait adress un appel Abraham en ces termes: Je te bnirai, ... et tu seras une cause de bndiction... et toutes les familles de laterre seront bnies en toi. Le mme enseignement fut renouvel par les prophtes. Mme aprs quIsral eut t dvast par la guerre et la captivit,cette promesse lui tait faite: La partie survivante de Jacob sera, au milieu de nombreux peuples, comme une rose qui vient de lEternel, comme lesgouttes de pluie sur le gazon, lequel nattend rien de lhomme et nespre rien des enfants des hommes. Le Seigneur dclarait par Esae, au sujet du[19] temple de Jrusalem: Ma maison sera appele la maison de prire de tous les peuples.

    Cependant les Isralites fixrent leurs espoirs sur des grandeurs mondaines. Ds leur entre au pays de Canaan ils abandonnrent lescommandements de Dieu pour suivre les voies des paens. Dieu leur envoya des avertissements par ses prophtes: en pure perte. Les souffrancesque leur infligrent les paens qui les opprimaient furent vaines. Chaque tentative de rforme tait bientt suivie dune apostasie plus complte.

    Si Isral avait t fidle son Dieu, il et pu accomplir le dessein divin dans lhonneur et la gloire. Sil avait march dans la voie de lobissance, Dieului et donn la prminence en gloire, en renom et en splendeur, sur toutes les nations quil a cres. Mose avait prdit: Tous les peuples de laterre verront que le nom de lEternel est invoqu sur toi et ils te craindront. Les peuples qui entendraient parler de toutes ses lois diraient: Cette grandenation est le seul peuple sage et intelligent. Leurs infidlits firent que le dessein de Dieu ne put se raliser qu travers des adversits et deshumiliations continuelles.

    Ils furent assujettis Babylone et disperss travers les pays paens. Laffliction en amena quelques-uns renouveler leur alliance avec Dieu. Alorsque, leurs harpes suspendues aux saules, ils pleuraient sur les ruines du saint temple, la lumire de la vrit brillait grce eux et la connaissance duvrai Dieu se rpandait parmi les nations. Les rituels des sacrifices paens taient une perversion de celui que Dieu avait tabli; nombre dobservateurssincres des rites paens apprirent des Hbreux la signification du service divin et saisirent par la foi la promesse du Rdempteur.

    Beaucoup dexils subirent la perscution. Un assez grand nombre perdit la vie pour avoir refus de transgresser le sabbat et de clbrer les ftespaennes. Tandis que des idoltres tentaient dcraser la vrit, le Seigneur plaait ses serviteurs en prsence de rois et de gouverneurs, leur offrant lapossibilit de recevoir, avec leur peuple, la lumire. A plusieurs reprises [20] les plus grands monarques durent proclamer la suprmatie du Dieu servipar leurs captifs hbreux.

    La captivit babylonienne eut pour effet de gurir compltement les Isralites du culte des images. Au cours des sicles suivants ils furent opprimspar des ennemis paens, si bien que la conviction stablit en eux que leur prosprit dpendait de lobissance la loi de Dieu. Chez un trop grandnombre, toutefois, lobissance navait pas lamour pour mobile. Leur motif tait goste. Ils rendaient Dieu un service extrieur en vue dobtenir lagrandeur nationale. Au lieu dtre la lumire du monde, ils sexcluaient du monde pour chapper la tentation de lidoltrie. Mose avait donn desinstructions par lesquelles Dieu limitait leurs rapports avec les idoltres; mais cet enseignement donna lieu de fausses interprtations. Le but tait deles empcher de se conformer aux usages des paens. Mais on sen servit pour dresser un mur de sparation entre Isral et les autres nations. LesJuifs considraient Jrusalem comme leur paradis et ils veillaient jalousement priver les Gentils des grces du Seigneur.

    De retour de Babylone, on voua une grande attention linstruction religieuse. Des synagogues furent construites dans toutes les parties de lacontre; la loi y tait expose par des prtres et des scribes. Des coles furent tablies; outre les arts et les sciences on y enseignait les principes de lajustice. Mais ces institutions se corrompirent. Pendant la captivit, bien des personnes avaient subi linfluence des ides et des coutumes paennes, etcela fut introduit dans le service religieux. On se conforma bien des gards aux usages des idoltres.

    En sloignant de Dieu les Juifs perdirent presque compltement de vue lenseignement que reclait le service rituel, service que le Christ lui-mmeavait institu. Dans toutes ses parties ce service tait un symbole se rapportant au Christ; lorigine, il tait plein de vitalit et de beaut spirituelle.Mais les Juifs perdirent la vie spirituelle, tout en retenant leurs crmonies comme des choses mortes. Ils plaaient leur confiance dans les sacrifices etles ordonnances plutt que de sappuyer [21] sur celui que ces choses annonaient. Pour suppler ce quils avaient perdu, les prtres et les rabbinsmultiplirent leurs propres exigences; plus ils devenaient rigides, moins ils faisaient place lamour de Dieu. Ils mesuraient le degr de leur saintet parla multitude de leurs crmonies alors que leurs coeurs taient remplis dorgueil et dhypocrisie.

    Avec leurs prescriptions dtailles et accablantes, lobservation de la loi devenait impossible. Ceux qui dsiraient servir Dieu et qui sefforaient enmme temps dobserver les prceptes rabbiniques peinaient sous un lourd fardeau. Leur conscience trouble ne leur laissait aucun repos. Par cemoyen Satan sefforait de dcourager le peuple, de donner une fausse conception du caractre de Dieu et de jeter le mpris sur la foi dIsral. Ilesprait fournir la preuve de ce quil avait prtendu quand il stait rvolt dans le ciel: que les exigences divines sont injustes et inacceptables. Ilaffirmait quIsral lui-mme nobservait pas la loi.

    Les Juifs dsiraient la venue du Messie, mais navaient pas une juste conception de sa mission. Ils cherchaient tre dlivrs du joug des Romainsplutt que dtre dlivrs de leurs pchs. Ils attendaient un Messie conqurant, qui briserait le pouvoir de loppresseur et confrerait Isral unedomination universelle. Ils taient ainsi tout prts rejeter le Sauveur.

    Au moment de la naissance du Christ, la nation piaffait dimpatience sous lautorit de ses matres trangers; elle tait travaille par des luttesintrieures. On avait permis aux Juifs de maintenir une certaine autonomie, mais rien ne leur faisait oublier quils taient soumis au joug romain, et il leurtait difficile daccepter les limitations apportes leur puissance. Les Romains sattribuaient le droit de dsigner et de dposer leur souverainsacrificateur, et souvent cet office sobtenait par la fraude, la corruption, voire par le meurtre. Le sacerdoce devenait de plus en plus corrompu.Nanmoins les prtres conservaient un pouvoir tendu et sen servaient pour des fins gostes et mercenaires. Le peuple tait pressurimpitoyablement par eux et soumis de lourdes taxes par les Romains. [22] Do un mcontentement gnral. Il se produisait de frquentes meutes.Lavidit et la violence, la mfiance et lapathie spirituelle sattaquaient au coeur mme de la nation.

    Par haine des Romains, par orgueil national et spirituel, les Juifs sattachrent fermement leurs formes de culte. Les prtres essayaient de sassurerune rputation de saintet en donnant une attention scrupuleuse aux crmonies religieuses. Le peuple, maintenu dans lignorance et loppression, etses chefs avides de pouvoir soupiraient aprs la venue de celui qui devait vaincre leurs ennemis et restaurer le royaume dIsral. Ils avaient tudi lesprophties sans en discerner le sens spirituel. Ils ngligrent par consquent les passages de lEcriture dcrivant lhumiliation du Christ sa premirevenue et appliqurent mal propos ceux qui se rapportaient la gloire de sa seconde venue. Leur vue fut obscurcie par lorgueil. Les prophties furent

  • interprtes en accord avec leurs dsirs gostes. [23]

  • 3 La plnitude des temps

    LORSQUE les temps furent accomplis, Dieu a envoy son Fils... afin de racheter ceux qui taient sous la loi, pour que nous recevions ladoption.La venue du Sauveur avait t annonce en Eden. Quand Adam et Eve eurent entendu la promesse, ils sattendirent un prompt accomplissement.

    Leur premier-n fut reu avec joie, dans lespoir quil serait le Librateur. Mais laccomplissement fut diffr. Ceux qui avaient t les premiers recevoir la promesse moururent sans la voir ralise. Depuis les jours dEnoch la promesse fut rpte par lentremise des patriarches et desprophtes, de manire maintenir vive lesprance de son apparition, mais il ne vint pas encore. La prophtie de Daniel fit connatre le moment de sonavnement, mais le message ne fut pas bien compris de tous. Les sicles succdrent aux sicles; enfin la voix des prophtes se tut. Alors que la mainde loppresseur pesait sur Isral plusieurs taient prts scrier: Les jours passent et toute prophtie demeure sans effet.

    Semblables aux toiles parcourant, en vastes orbites, la voie qui leur a t trace, les desseins de Dieu ne connaissent ni hte ni retard. Par lesymbole des paisses tnbres et de la fournaise fumante, Dieu avait prdit Abraham la servitude dIsral en Egypte et il avait fix quatre cents ansla dure de leur sjour. Ensuiteavait-il ditils sortiront avec de grandes richesses. Toute la puissance de lorgueilleux empire des Pharaonssopposa vainement laccomplissement de cette parole. Le mme jour [celui que la promesse avait fix par avance] toutes les armes de lEternelsortirent du pays [24] dEgypte. De mme, lheure de la venue du Christ avait t dcide dans le conseil cleste. Et quand la grande horloge dessicles marqua lheure indique, Jsus naquit Bethlhem.

    Lorsque les temps furent accomplis, Dieu a envoy son Fils. La Providence avait dirig les mouvements des nations, les vagues des impulsions etdes influences humaines, si bien que le monde tait mr pour lapparition du Librateur. Les nations se trouvaient runies sous un mme gouvernement.Une langue unique tait largement rpandue et gnralement adopte comme langue littraire. De tous les pays, les Juifs disperss se rassemblaient Jrusalem loccasion des ftes annuelles. De retour chez eux, il leur serait facile de rpandre, travers le monde, la nouvelle de la venue du Messie.

    A cette poque les religions paennes perdaient de leur ascendant sur le peuple. On tait las de spectacles et de fables. On soupirait aprs unereligion capable de satisfaire les besoins du coeur. Et, quoique la lumire de la vrit paraissait stre loigne de lhumanit, il y avait cependant desmes assoiffes de certitude, oppresses par langoisse et la douleur, des mes qui, ardemment, dsiraient le Dieu vivant et lassurance dune vie au-del du tombeau.

    La foi stait affaiblie chez les Juifs, qui staient loigns de Dieu, et lesprance avait cess presque compltement dilluminer lavenir. On necomprenait plus les paroles des prophtes. Les masses voyaient, dans la mort, un redoutable mystre et napercevaient, au-del, que doute etobscurit. Les plaintes des mres de Bethlhem navaient pas seules, travers les sicles, frapp loreille du prophte; mais aussi le cri poignant delhumanit tout entire: Une clameur sest fait entendre Rama, des pleurs et beaucoup de lamentations. Cest Rachel qui pleure ses enfants; elle napas voulu tre console, parce quils ne sont plus.

    Les hommes, assis sans consolation au pays de lombre de la mort, leurs regards chargs malgr tout despoir, attendaient la venue du Librateurqui devait dissiper les tnbres et rvler le secret de lavenir. [25]

    Des matres inspirs, avides de vrit, quoique nappartenant pas la nation juive, avaient annonc lapparition dun instructeur divin. Ils staientlevs, lun aprs lautre, comme des toiles dans un ciel obscur et leurs paroles prophtiques avaient allum lesprance dans le coeur de milliers depaens.

    Depuis des centaines dannes, les Ecritures avaient t traduites en grec, langue alors trs rpandue dans lempire romain. Les Juifs, disperss entous lieux, et, jusqu un certain point, les paens partageaient cette attente du Messie. Parmi ceux que les Juifs considraient comme des paens, ilsen trouvait qui comprenaient mieux que les docteurs dIsral les prophties de lEcriture relatives au Messie. Ils attendaient celui-ci pour tre dlivrsdu pch. Des philosophes sefforaient de sonder le mystre de lconomie hbraque. Mais ltroitesse desprit des Juifs empchait la lumire de serpandre. Tout proccups de maintenir une barrire entre eux et les autres nations, ils ntaient pas dsireux de communiquer le peu deconnaissances qui leur restait touchant le service symbolique. Il fallait donc que vnt le vritable Interprte, celui qui, seul, pouvait expliquer les symbolesse rapportant lui.

    Dieu avait parl au monde par la nature, par des figures et des symboles, par les patriarches et les prophtes. Lhumanit avait besoin dtre instruitedans un langage humain. Le Messager de lalliance devait parler. Sa voix devait se faire entendre dans son propre temple. Il fallait que le Christprononce des paroles claires et intelligibles. Lauteur de la vrit devait dgager la vrit de la balle dinvention humaine, qui lavait rendue sans effet. Ilfallait que les principes du gouvernement divin et du plan de la rdemption soient clairement dfinis. Les leons contenues dans lAncien Testamentdevaient tre parfaitement exposes aux hommes.

    Il y avait encore parmi les Juifs des mes fortes, descendant de cette sainte ligne qui avait conserv la connaissance de Dieu. Ils restaient attachs la promesse faite aux pres et appuyaient leur foi sur ces paroles de Mose: Le Seigneur votre Dieu vous suscitera dentre vos frres un prophtecomme moi; vous [26] lcouterez en tout ce quil vous dira. Ils apprenaient comment le Seigneur devait oindre son Elu pour porter la bonne nouvelleaux humbles, pour gurir ceux qui ont le coeur bris, pour annoncer aux captifs la libert, et pour proclamer, de la part de lEternel, une anne degrce. Ils apprenaient comment il devait tablir la justice sur la terre, et comment les nations devaient mettre leur confiance en sa loi; comment lesnations devaient tre attires par sa lumire et les rois par lclat de ses rayons.

    Ces paroles de Jacob mourant remplissaient leurs coeurs desprance: Le sceptre ne sera point enlev Juda et le bton du commandementnchappera pas son pouvoir, jusqu ce que vienne le Pacifique. La puissance dIsral, en svanouissant, attestait limminence de la venue duMessie. La prophtie de Daniel dpeignait la gloire de son rgne devant succder tous les royaumes terrestres; et lui-mme subsisteraternellement, ajoutait le prophte. Ils taient peu nombreux, il est vrai, ceux qui comprenaient la nature de la mission du Christ; mais on attendaitgnralement un prince puissant venant tablir son royaume en Isral et dlivrer les nations.

    Les temps taient accomplis. La corruption de lhumanit, accrue dge en ge par la transgression des lois divines, rendait ncessaire la venue duRdempteur. Satan stait efforc de creuser un gouffre infranchissable entre la terre et le ciel. Ses mensonges avaient enhardi les hommes dans lepch. Il se proposait de fatiguer la patience de Dieu, dteindre son amour pour lhomme et de lamener lui abandonner la juridiction de ce monde.

    Satan cherchait priver les hommes de la connaissance de Dieu, dtourner leur attention du temple de Dieu, en vue dtablir son propre royaume.Sa lutte pour la suprmatie paraissait presque couronne de succs. Il est vrai que dans chaque gnration Dieu a eu des serviteurs. Il y avait, mmeparmi les paens, des hommes que le Christ employait pour lever le peuple au-dessus du pch et de la dgradation. Mais ces hommes furentmpriss et has. Beaucoup dentre eux [27] moururent de mort violente. Les noires ombres accumules sur le monde par Satan spaississaient deplus en plus.

    Pendant des sicles Satan stait servi du paganisme pour dtourner de Dieu les hommes; mais son plus grand triomphe avait t la perversion de lafoi dIsral. En contemplant et en adorant leurs propres conceptions, les paens avaient perdu la connaissance de Dieu et staient corrompus. Il en taitde mme en Isral. Lide daprs laquelle un homme peut se sauver par ses oeuvres se trouvait la base de toutes les religions paennes; cette ide,

  • dont Satan est lauteur, stait maintenant introduite dans la religion juive. Partout o elle stablit, elle renverse les digues qui sopposent lenvahissement du pch.

    Le message du salut est communiqu aux hommes par des instruments humains. Mais les Juifs avaient tent de monopoliser leur profit la vrit quiassure la vie ternelle. Ils avaient amass et mis en rserve la manne vivante, qui stait corrompue. La religion dont ils avaient voulu saccaparer taitdevenue malfaisante. Ils drobrent Dieu sa gloire et frustrrent le monde en lui offrant une contrefaon de lEvangile. Ayant refus de se livrer Dieupour sauver le monde, ils devinrent des instruments de Satan pour le dtruire.

    Le peuple dont Dieu voulait faire la colonne et lappui de la vrit avait fini par reprsenter Satan. Se conformant au dsir de celui-ci, par sa conduite ilprsentait le caractre de Dieu sous un faux jour, et donnait limpression que Dieu est un tyran. Les prtres eux-mmes, qui officiaient dans le temple,avaient perdu de vue la signification du service quils accomplissaient. Ils avaient cess de voir, au-del du symbole, lobjet signifi. En offrant lessacrifices ils jouaient la comdie. Les ordonnances tablies par Dieu furent transformes en moyens daveugler les esprits et dendurcir les coeurs.Dieu ne pouvait plus agir en faveur des hommes par leur intermdiaire. Tout cela devait tre balay.

    La duperie du pch avait atteint son comble. Tous les moyens susceptibles de pervertir les mes humaines taient loeuvre. Le Fils de Dieu, encontemplant le monde, ne voyait [28] que souffrance et misre. Sa piti fut mue, car il vit avec quelle cruaut Satan traitait ses victimes. Il considraavec compassion ceux que lon corrompait, assassinait et perdait. Le chef que les hommes staient donn les enchanait son char comme descaptifs. Egars et tromps, ils savanaient en une triste procession vers une ruine ternellevers une mort sans espoir de retour la vie, vers une nuitque ne suivrait aucun matin. Des agents de Satan semparaient de corps humains. Ces corps, destins tre des habitations de Dieu, taient envahispar des dmons. Les sens, les nerfs, les facults, les organes des hommes taient employs par des puissances surnaturelles pour satisfaire lespassions les plus viles. Des visages humains portaient lempreinte des dmons. Ils refltaient les sentiments des lgions du mal qui les possdaient.Voil ce qui soffrait au regard du Rdempteur du monde. Quel spectacle pour un Etre infiniment pur!

    Le pch tait devenu une science, le vice tait consacr comme partie intgrante de la religion. La rvolte avait jet des racines profondes dans lescoeurs, lhostilit de lhomme contre le ciel tait devenue virulente. Il tait prouv aux yeux de lunivers que lhumanit ne pouvait se relever sans Dieu.Un nouvel lment de vie et de puissance devait tre communiqu par celui qui a cr le monde.

    Les habitants des mondes non dchus regardaient avec un intrt intense pour voir si Jhovah nallait pas se lever pour anantir les habitants de laterre. Si Dieu avait agi ainsi, Satan tait prt raliser son dessein tendant sassurer lallgeance des tres clestes.

    Satan avait prtendu que les principes du gouvernement divin rendent tout pardon impossible. Si le monde avait t dtruit, il y aurait vu une preuvede la vracit de ses affirmations. Il osait accuser Dieu, et voulait propager sa rvolte dans les mondes suprieurs. Or voici quau lieu de dtruire lemonde, Dieu envoya son Fils pour le sauver. Bien que la corruption et le mpris de Dieu fussent rpandus partout dans cette province rvolte, unmoyen de salut fut trouv. Au moment [29] critique o Satan paraissait sur le point de triompher, le Fils de Dieu vint charg du message de la grcedivine. A chaque sicle, chaque heure, lamour de Dieu stait manifest envers la race dchue. Malgr la perversit des hommes, les marques de lamisricorde navaient pas cess dtre prodigues. Et quand les temps furent accomplis, la Divinit se glorifia en inondant le monde dun flot de grcesalutaire qui ne devait jamais sarrter ni se retirer tant que le plan du salut ne serait pas accompli.

    Satan tait ravi, pensant quil avait russi avilir limage de Dieu en lhomme. Jsus vint alors pour rtablir en lhomme limage de son Crateur. Luiseul peut reconstituer un caractre ruin par le pch. Il vint chasser les dmons qui exeraient une domination sur les volonts. Il vint nous arracher lapoussire et remodeler les caractres dforms, pour les rendre semblables au divin Modle et leur communiquer la beaut de sa propre gloire. [30]

  • 4 Un Sauveur vous est donn

    LE ROI de gloire sabaissa profondment pour revtir lhumanit et vivre au milieu dtres souvent grossiers et repoussants. Il dut voiler sa gloire pourque la majest de sa forme extrieure nattirt pas les regards. Il vita tout dploiement extrieur. Ni les richesses, ni les honneurs mondains, ni lagrandeur humaine ne peuvent sauver une me de la mort; Jsus voulut que rien dans sa nature terrestre nattirt les hommes ses cts. Seule labeaut de la vrit cleste doit captiver ceux qui dsirent le suivre. Longtemps lavance le caractre du Messie avait t dcrit dans la prophtie, et ilvoulait tre accept des hommes sur le simple tmoignage de la Parole de Dieu.

    Les anges, extasis devant le glorieux plan du salut, taient impatients de voir comment le peuple de Dieu allait accueillir son Fils, cach sous le voilede lhumanit. Des anges vinrent visiter le pays du peuple lu. Les autres nations taient absorbes par des fables et par ladoration des faux dieux.Les anges vinrent donc dans le pays o la gloire de Dieu stait manifeste, o la lumire de la prophtie avait brill. Ils vinrent, invisibles, Jrusalem,auprs des ministres de la maison de Dieu chargs dexpliquer les oracles sacrs. Dj, le prtre Zacharie, tandis quil officiait devant lautel, avaitappris que la venue du Christ tait imminente. Dj, le prcurseur tait n, sa mission atteste par le miracle et par la prophtie. La nouvelle de cettenaissance et la signification tonnante de la mission du Baptiste staient rpandues aux alentours. Mais Jrusalem ne se prparait pas accueillir sonRdempteur.

    Cest avec tonnement que les messagers clestes constatrent lindiffrence du peuple appel par Dieu communiquer [31] au monde la lumirede la vrit sainte. La nation juive avait t conserve comme une preuve du fait que le Christ devait natre de la semence dAbraham et de la ligne deDavid; et voici quelle ne se rendait pas compte de limminente venue du Sauveur. Le sacrifice quotidien annonait, matin et soir, dans le temple,lAgneau de Dieu; mme ici cependant, aucun prparatif ntait fait pour le recevoir. Les prtres et les docteurs ne comprenaient pas que le plus grandvnement des ges tait sur le point de se produire. Ils rptaient leurs vaines prires, et accomplissaient les rites du culte pour tre vus des hommes;mais cause de leur soif de richesses et dhonneurs mondains ils taient peu prpars recevoir la rvlation du Messie. Mme indiffrence dans lepays dIsral, o les coeurs gostes et profanes taient trangers la joie dont tressaillait le ciel tout entier. Quelques-uns seulement soupiraient aprslInvisible. Cest ceux-ci quune ambassade cleste fut envoye.

    Des anges accompagnent Joseph et Marie, de Nazareth, leur lieu de sjour, la cit de David. Le dcret par lequel la Rome impriale ordonnait lerecensement de tous les peuples de ses vastes domaines avait atteint les collines de la Galile et leurs habitants. Tout comme Cyrus avait t appelautrefois lempire du monde pour rendre la libert aux captifs du Seigneur, Csar Auguste accomplira le dessein de Dieu damener Bethlhem lamre de Jsus. Celle-ci appartient la ligne de David, et cest dans la cit de David que doit natre le Fils de David. De Bethlhem, avait dit leprophte, surgira celui qui doit tre le chef suprme dIsral, celui dont lorigine remonte aux temps anciens, aux jours ternels. Mais Joseph et Mariene sont ni reconnus, ni honors dans leur cit royale. Las et sans abri, ils parcourent la longue rue troite, depuis la porte de la cit jusqu son extrmitorientale, cherchant en vain un lieu de repos pour la nuit. Il ny a pas de place pour eux dans lauberge encombre. Sous un grossier hangar servantdabri au btail, ils trouvent enfin un refuge, et cest l que natra le Rdempteur du monde.

    Les hommes nen savent rien, mais les cieux semplissent de [32] joie. Un intrt plus profond et plus tendre attire vers la terre les saints tres quipeuplent le monde de la lumire. Lunivers tout entier est illumin de sa prsence. Des foules danges se rassemblent sur les collines de Bethlhem. Ilsattendent un signal pour annoncer au monde la bonne nouvelle. Si les conducteurs dIsral avaient t fidles leur mandat, ils auraient eu le bonheurde participer lannonciation de la naissance de Jsus. Mais maintenant ils sont mis de ct.

    Dieu dit: Je rpandrai des eaux sur le sol altr et des ruisseaux sur la terre dessche. La lumire se lve, mme au sein des tnbres, pour leshommes droits. Des rayons de splendeur, manant du trne de Dieu, resplendiront sur ceux qui sont la recherche de la lumire et disposs laccepter avec bonheur.

    Dans les champs o le jeune David avait conduit ses troupeaux, des bergers veillaient, la nuit. Ils rompaient le silence des heures en sentretenant duSauveur promis, et ils priaient pour que le Roi montt sur le trne de David. Un ange du Seigneur leur apparut, et la gloire du Seigneur resplenditautour deux. Ils furent saisis dune grande crainte. Mais lange leur dit: Soyez sans crainte; car je vous annonce la bonne nouvelle dune grande joie pourtout le peuple: aujourdhui, dans la ville de David, il vous est n un Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur.

    Ces paroles remplissent lesprit des bergers de visions de gloire. Le Librateur est venu en Isral! On a coutume dassocier sa venue lide depuissance, de grandeur, de triomphe. Mais lange doit les prparer reconnatre leur Sauveur dans la pauvret et lhumiliation. Et ceci sera pour vousun signe: vous trouverez un nouveau-n emmaillott et couch dans une crche.

    Le cleste messager avait dissip leurs craintes. Il leur avait dit comment ils trouveraient Jsus. Avec de tendres gards pour la faiblesse humaine, illeur avait donn le temps de saccoutumer lclat divin. Maintenant la joie et la gloire ne pouvaient pas rester caches plus longtemps. Toute la plainefut [33] illumine par le resplendissement des armes divines. La terre fit silence, et le ciel se pencha pour couter le chant:

    Gloire Dieu dans les lieux trs hauts, Et paix sur la terre parmi les hommes quil agre!

    Oh! si la famille humaine pouvait aujourdhui reconnatre ce chant! La proclamation faite alors, la mlodie entonne, retentira jusqu la fin des tempset jusquaux extrmits de la terre. Et quand le Soleil de justice se lvera, ayant la gurison sous ses ailes, ce chant sera entonn nouveau par lagrande multitude, dont la voix pareille au bruit des grosses eaux dira: Allluia! Car le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant, a tabli son rgne.

    Les anges disparus, la lumire svanouit et les ombres nocturnes envelopprent nouveau les collines de Bethlhem. Mais la mmoire des bergersgarda le souvenir du tableau le plus brillant quaucun oeil humain ait jamais contempl. Lorsque les anges se furent loigns deux vers le ciel, lesbergers se dirent les uns aux autres: Allons donc jusqu Bethlhem, et voyons ce qui est arriv, ce que le Seigneur nous a fait connatre. Ils y allrent enhte, et trouvrent Marie, Joseph et le nouveau-n couch dans la crche. Tout joyeux ils sen allrent publiant ce quils avaient vu et entendu. Tousceux qui les entendirent furent dans ltonnement de ce que leur disaient les bergers. Marie gardait toutes ces choses et les mditait dans son coeur. Etles bergers sen retournrent, en glorifiant et louant Dieu.

    La distance qui spare le ciel de la terre nest pas plus grande aujourdhui quau moment o les bergers entendirent le chant des anges. Tout autantquautrefois, quand des hommes dhumble origine et de modeste situation rencontraient des anges, midi, et sentretenaient avec des messagersclestes dans les vignes et les champs, lhumanit reste lobjet de la sollicitude cleste. Le ciel peut tre trs prs de nous qui cheminons dans lesdifficiles sentiers de la vie. Des anges descendant des parvis clestes suivront les pas de ceux qui obissent aux ordres de Dieu.

    Lhistoire de Bethlhem est un thme inpuisable. On y [34] dcouvre la profondeur de la richesse, de la sagesse et de la science de Dieu. Nousnous tonnons devant le sacrifice du Sauveur qui changea le trne du ciel contre la crche, la socit des anges qui ladoraient contre la compagniedes btes de ltable. Sa prsence confond notre orgueil humain et notre propre suffisance. Et cependant ceci ntait que le commencement de sontonnante condescendance. Cet t pour le Fils de Dieu une humiliation presque infinie de revtir la nature humaine, mme alors quAdam rsidait enEden dans son innocence. Jsus accepta lhumanit alors quelle tait affaiblie par quatre millnaires de pch. Comme tout enfant dAdam, il a

  • accept les rsultats de la grande loi de lhrdit. Ces rsultats on peut les connatre en consultant lhistoire de ses anctres terrestres. Cest avec unetelle hrdit quil vint partager nos douleurs et nos tentations, et nous donner lexemple dune vie exempte de pch.

    Satan avait prouv de la haine pour le Christ cause de la position que celui-ci occupait dans les parvis de Dieu. Quand il se vit dtrn, sa hainesaccrut envers celui qui avait pris lengagement de racheter les pcheurs. Nanmoins Dieu permit son Fils de venir dans un monde dont Satan seprtendait le matre, et dy venir sous la forme dun faible petit enfant, sujet aux infirmits humaines. Il lui permit dencourir les dangers de la vie encommun avec tous les autres hommes, de livrer bataille comme tout enfant de lhumanit, au risque dun insuccs et dune perdition ternelle. Le coeurdun pre humain sattendrit sur son fils. Il considre le visage du petit enfant, et tremble la pense des dangers que la vie lui rserve. Il dsireprotger cet tre chri contre la puissance de Satan, et le prserver des tentations et des luttes. Dieu consentit donner son Fils unique en vue dunconflit plus redoutable et dun risque plus effrayant, et cela, afin que le sentier de la vie devnt plus sr pour nos enfants. Voici en quoi consiste lamour!Admirez, cieux! et sois tonne, terre! [35]

  • 5 La conscration

    ENVIRON quarante jours aprs sa naissance, le Christ fut apport Jrusalem par Joseph et Marie, qui devaient, en offrant un sacrifice, le prsenterau Seigneur. Ceci tait exig par la loi juive, et le Christ, en tant que remplaant de lhomme, devait se conformer la loi dans ses moindres dtails.Dj, il avait t soumis au rite de la circoncision, comme gage de son obissance la loi.

    Celle-ci exigeait que la mre offrt un agneau dun an en holocauste, et un jeune pigeon ou une tourterelle en sacrifice pour le pch. Mais ellepermettait aux parents trop pauvres pour apporter un agneau, de noffrir quune paire de tourterelles ou deux pigeonneaux, lun en holocauste, lautre ensacrifice pour le pch.

    Les animaux offerts au Seigneur devaient tre sans dfaut. Ils reprsentaient le Christ, et lon voit par l que Jsus lui-mme tait exempt de difformitphysique. Il tait lAgneau sans dfaut et sans tache. Au physique il tait sans dfaut; son corps tait robuste et sain. Pendant toute sa vie il seconforma aux lois de la nature. Au point de vue physique comme au point de vue spirituel il fut un exemple de ce que Dieu voulait que toute lhumanitatteigne en obissant aux lois divines.

    La coutume de consacrer les premiers-ns remontait une haute antiquit. Dieu avait promis de donner le premier-n du ciel pour sauver le pcheur.Chaque famille devait reconnatre ce don par la conscration du premier-n, vou au sacerdoce, en qualit de reprsentant du Christ parmi leshommes.

    Lordre de consacrer les premiers-ns fut renouvel lors de la dlivrance dIsral, hors dEgypte. Alors que les enfants dIsral [36] taient encoreasservis par les Egyptiens, le Seigneur envoya Mose auprs de Pharaon, roi dEgypte, pour lui dire: Ainsi parle lEternel: Isral est mon fils, monpremier-n. Je tavais dit: Laisse partir mon fils, afin quil soit mon service; et tu as refus de le laisser partir. Eh bien, je vais faire mourir ton filspremier-n!

    Mose communiqua son message; mais lorgueilleux roi rpondit: Qui est lEternel, pour que jobisse sa voix, en laissant partir Isral? Je neconnais pas lEternel et je ne laisserai point partir Isral. Le Seigneur opra des signes et des prodiges en faveur de son peuple, et frappa Pharaon deterribles chtiments. A la fin, lange destructeur fut charg dexterminer les premiers-ns parmi les hommes et parmi le btail des Egyptiens. LesIsralites, pour tre pargns, devaient asperger, avec le sang dun agneau immol, les poteaux de leurs portes. Chaque maison recevait ainsi unemarque, pour que lange, accomplissant sa mission de mort, pt passer par-dessus les demeures des Isralites.

    Aprs que le Seigneur eut frapp lEgypte, il dit Mose: Tu me consacreras tout premier-n, ... parmi les enfants dIsral, aussi bien celui deshommes que celui des animaux: il mappartient. Le jour o jai frapp tous les premiers-ns dans le pays dEgypte, jai consacr mon service toutpremier-n en Isral, depuis les hommes jusquaux animaux; ils seront donc moi. Je suis lEternel. Lorsque le service du tabernacle eut t tabli, leSeigneur choisit la tribu de Lvi pour officier dans le sanctuaire, la place des premiers-ns de tout Isral. Mais lon continua considrer lespremiers-ns comme appartenant au Seigneur, et il fallait les racheter prix dargent.

    La prsentation des premiers-ns acquit ainsi une signification particulire. Tout en servant de mmorial pour rappeler comment Dieu avaitmerveilleusement dlivr les enfants dIsral, elle annonait une plus grande dlivrance, devant tre accomplie par le Fils unique de Dieu. Ainsi que lesang rpandu sur les poteaux des portes a sauv les premiers-ns dIsral, le sang du Christ peut sauver le monde. [37]

    La prsentation du Christ revtait donc une profonde signification. Cependant le prtre ne vit pas ce qui tait derrire le voile; il ne sut pas dchiffrer lemystre. La prsentation des enfants tait une chose ordinaire. Jour aprs jour, chaque fois quun enfant tait prsent au Seigneur, le prtre percevaitle prix du rachat. Jour aprs jour, il accomplissait la srie des crmonies requises, sans beaucoup soccuper des parents ou de lenfant, except dansles cas o il sagissait de parents riches ou jouissant dune haute position. Joseph et Marie taient pauvres; et quand ils se prsentrent avec lenfant,les prtres ne virent quun homme et une femme vtus comme de simples Galilens. Rien dans leur apparence nattirait lattention, et ils napportaientque loffrande des pauvres gens.

    Le prtre accomplit les crmonies officielles. Prenant lenfant, il le tint devant lautel. Puis, layant rendu sa mre, il inscrivit son nomJsussur leregistre des premiers-ns. Il tait loin de penser quil avait tenu dans ses bras, sous la forme de ce petit enfant, la Majest du ciel, le Roi de gloire. Il nepensait pas que cet enfant ft celui dont Mose avait dit: Le Seigneur votre Dieu vous suscitera dentre vos frres un prophte comme moi; vouslcouterez en tout ce quil vous dira. Il ne pensait pas que cet enfant ft celui dont Mose avait dsir contempler la gloire. Le prtre avait port dansses bras un plus grand que Mose; et quand il inscrivit le nom de lenfant, il enregistra le nom de celui qui tait le fondement de toute lconomie juive.Ce nom allait tre lacte de condamnation mort de cette conomie; car le systme des sacrifices et des offrandes tait en train de vieillir; le symboleet lombre avaient presque rejoint la ralit.

    La Schkinah avait abandonn le sanctuaire, mais sous lenfant de Bethlhem se cachait la gloire devant laquelle les anges se prosternent. Ce petittre inconscient tait la postrit promise quannonait le premier autel dress lentre de lEden, le Schilh, le Pacificateur. Cest lui qui staitnomm Mose: JE SUIS. Cest lui qui avait conduit Isral dans la colonne de nue et de feu. Cest lui que les voyants avaient ds longtemps [38]annonc: le Dsir de toutes les nations, la Racine et le Rejeton de David, lEtoile brillante du matin. Le nom de ce faible enfant, consign sur le registredIsral comme lun de nos frres, ctait lesprance de lhumanit dchue. Cet enfant, pour qui lon paya le prix du rachat, cest lui qui devait payer laranon pour les pchs du monde entier. Il tait le vrai grand-prtre tabli sur la maison de Dieu, le chef dun sacerdoce non transmissible,lintercesseur qui sest assis la droite de la majest divine au plus haut des cieux.

    Cest spirituellement que lon discerne les choses spirituelles. Dans le temple, le Fils de Dieu fut consacr loeuvre quil devait accomplir. Le prtrevit en lui un enfant comme tous les autres enfants. Mais bien quil ne discernt rien dinaccoutum, lacte par lequel Dieu avait donn son Fils au mondefut reconnu. A cette occasion le Christ ne passa pas totalement inaperu. Il y avait Jrusalem un homme du nom de Simon. Cet homme tait juste etpieux, il attendait la consolation dIsral, et lEsprit-Saint tait sur lui. Il avait t divinement averti par le Saint-Esprit quil ne verrait pas la mort avantdavoir vu le Christ du Seigneur.

    En entrant dans le temple, Simon aperoit une famille prsentant au prtre un premier-n. Tout en elle trahit la pauvret; pourtant Simon prteloreille aux avertissements de lEsprit, et il a le sentiment trs net que lenfant prsent au Seigneur est la consolation dIsral, celui quil a dsir voir.Aux yeux du prtre tonn, Simon parat ravi en extase. Il prend lenfant rendu aux bras de Marie et le prsente Dieu, et son me est envahie dunejoie inconnue auparavant. Il scrie, en levant vers le ciel lenfant Sauveur:

    Maintenant, Matre, tu laisses ton serviteur Sen aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu ton salut, Que tu as prpar devant tous les peuples, Lumire pour clairer les nations, Et gloire de ton peuple, Isral.

  • Cet homme tait anim de lesprit de prophtie, et tandis que Joseph et Marie mditaient ses paroles ct de lui, il les [39] bnit, et dit Marie:Voici, cet enfant est l pour la chute et le relvement de beaucoup en Isral, et comme un signe qui provoquera la contradiction, et toi-mme, une pete transpercera lme, afin que les penses de beaucoup de coeurs soient rvles.

    La prophtesse Anne, elle aussi, vint confirmer le tmoignage que Simon avait rendu au Christ. Tandis que Simon parlait, le visage dAnneresplendissait dune gloire divine, et elle exprima la gratitude de son coeur pour avoir pu contempler Christ le Seigneur.

    Ces humbles adorateurs navaient pas tudi en vain les prophties. Mais ceux qui occupaient en Isral la position de chefs et de prtres, quoiquilseussent aussi, devant eux, les prcieuses dclarations, ne marchaient pas dans les voies du Seigneur, et leurs yeux ne pouvaient donc contempler laLumire de la Vie.

    Il en est de mme actuellement. Des vnements sur lesquels se concentre lattention du ciel tout entier ne sont pas remarqus, et passent totalementinaperus des conducteurs religieux et de ceux qui adorent dans la maison de Dieu. On rend hommage au Christ historique, on se dtourne du Christvivant. Pas plus aujourdhui quil y a dix-huit cents ans, on ne reconnat le Christ dans ses appels au sacrifice, dans les pauvres et les malheureux quiimplorent du secours, ou dans une juste cause entranant la pauvret, les peines et lopprobre.

    Marie rflchissait sur les paroles prophtiques de Simon, si comprhensives et dune si grande porte. Elle regardait lenfant qui reposait sur sonsein, se rappelant les paroles dites aux bergers de Bethlhem, et son coeur dbordait dune joie reconnaissante et dune radieuse esprance. Lesparoles de Simon faisaient renatre en son esprit les dclarations prophtiques dEsae: Un rameau surgira du tronc dIsa, un rejeton natra de sesracines. LEsprit de lEternel reposera sur lui, esprit de sagesse et dintelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte delEternel. ... La justice sera la ceinture de ses reins et la vrit sera la ceinture de ses flancs. Le peuple, qui marchait dans les tnbres, a vu [40] brillerune grande lumire; et la lumire a resplendi sur ceux qui habitaient le pays de lombre de la mort. ... Car un enfant nous est n, un fils nous a t donn;lempire a t pos sur son paule. On lappellera le Conseiller admirable, le Dieu fort, le Pre dternit, le Prince de la paix.

    Cependant Marie ne comprenait pas quelle tait la mission du Christ. Simon avait dclar quil serait la lumire des Gentils aussi bien que la gloiredIsral. Les anges avaient galement proclam la naissance du Sauveur comme un sujet de joie pour tous les peuples. Dieu sefforait de corriger lesconceptions troites des Juifs concernant loeuvre du Messie. Il voulait quon vt en lui, non seulement le Librateur dIsral, mais aussi le Rdempteurdu monde. Mais bien des annes devaient scouler avant que la mre de Jsus elle-mme ft capable de comprendre la mission de son fils.

    Marie pensait au rgne futur du Messie sur le trne de David, mais elle napercevait pas le baptme de souffrance qui devait en tre le prix. Simonmontra, par les paroles quil adressa Marie, que le Messie ne devait pas se frayer un passage facile travers le monde: Et toi-mme, une pe tetranspercera lme. La tendre piti de Dieu fait ainsi pressentir la mre de Jsus langoisse quelle commence prouver par amour pour lui.

    Simon avait dit: Voici, cet enfant est l pour la chute et le relvement de beaucoup en Isral et comme un signe qui provoquera la contradiction. Ilfaut tomber pour se relever. Nous devons tomber sur le Rocher et nous y briser, si nous voulons tre levs en Christ. Le moi doit tre dtrn, lorgueildoit tre abaiss, si nous voulons participer la gloire du royaume spirituel. Les Juifs repoussaient les honneurs quil fallait payer par lhumiliation. Ils nevoulurent pas recevoir leur Rdempteur. Jsus fut pour eux un signe de contradiction.

    Cest ainsi que les penses du coeur de beaucoup seront rvles. A la lumire de la vie du Sauveur, tous les coeurs sont dvoils, depuis celui duCrateur jusqu celui du prince des tnbres. Satan a montr Dieu comme un tre goste et [41] tyrannique, exigeant tout, ne donnant rien, se servantde ses cratures uniquement pour sa propre gloire sans rien faire pour leur bien. Mais le don du Christ fait connatre le coeur du Pre. Il atteste que lesprojets que Dieu a forms en notre faveur sont des projets de paix et non de malheur. Il montre que si la haine que Dieu prouve pour le pch estaussi forte que la mort, son amour pour le pcheur est plus grand que la mort. Aprs avoir entrepris loeuvre de notre rdemption, il npargnera rien dece qui lui est cher pour achever cette oeuvre. Aucune vrit essentielle notre salut nest refuse, aucun miracle de grce nest nglig, aucun moyendivin ne reste sans emploi. Une grce est ajoute une grce, un don un don. Tout le trsor du ciel souvre pour ceux quil veut sauver. Ayantrassembl les richesses de lunivers, et dploy les ressources de sa puissance infinie, il remet tout entre les mains du Christ, en lui disant: Tout ceciest pour lhomme. Use de ces dons pour lui apprendre quil ny a pas de plus grand amour que le mien sur la terre ou dans les cieux. Cest en maimantquil trouvera son plus parfait bonheur.

    A la croix du Calvaire, lamour et lgosme se dressent face face. L ils ont, lun et lautre, leur couronnement. Le Christ na vcu que pour soulageret bnir: en le mettant mort, Satan dmasque la malignit de sa haine envers Dieu, et son vritable but: dtrner Dieu et dtruire celui en qui semanifeste lamour divin.

    Cest aussi par la vie et la mort du Christ que les penses des hommes sont mises en lumire. La vie de Jsus, depuis la crche jusqu la croix,nous invite nous livrer et participer ses souffrances. Cest elle qui dvoile les penses des hommes. Jsus apporta la vrit du ciel, et tous ceuxqui taient attentifs la voix du Saint-Esprit furent attirs vers lui. Les adorateurs du moi ressortissaient au royaume de Satan. Par lattitude prise lgard du Christ chacun fixe sa position et prononce ainsi sa propre sentence.

    Au jour du jugement final, toute me perdue comprendra pourquoi elle a rejet la vrit. Mme lesprit obscurci par la [42] transgression saisira lesens de la croix. Les pcheurs seront condamns par la vue du Calvaire et de sa mystrieuse Victime. Tout prtexte mensonger sera balay. Lecaractre odieux de lapostasie humaine se montrera. Les hommes verront quel aura t leur choix. Toutes les questions de vrit et derreur, agitesau cours de la controverse des sicles, seront alors claircies. Au jugement de lunivers, Dieu sera pleinement justifi en ce qui concerne lexistence etla permanence du mal. Il sera dmontr que les dcrets divins nont en aucune faon favoris le pch. Rien ntait dfectueux dans le gouvernementde Dieu, rien ntait de nature causer du mcontentement. Quand seront rvles les penses de tous les coeurs, fidles et rebelles suniront pourdclarer: Tes voies sont justes et vritables, roi des nations! Seigneur, qui ne craindrait et ne glorifierait ton nom? ... Parce que tes dcrets de justiceont t manifests. [43]

  • 6 Nous avons vu son toile

    JESUS tait n Bethlhem de Jude, au temps du roi Hrode. Des mages dOrient arrivrent Jrusalem et dirent: O est le roi des Juifs qui vientde natre? Car nous avons vu son toile en Orient et nous sommes venus ladorer.

    Ces mages dOrient taient des philosophes. Ils appartenaient une classe nombreuse et influente, comprenant des hommes de haute naissance,ainsi que la plupart des riches et des savants de leur nation. Certains, parmi eux, abusaient de la crdulit du peuple; dautres, hommes droits, tudiantles vrits inscrites par la Providence dans la nature, taient respects cause de leur intgrit et de, leur sagesse. Parmi ces derniers se trouvaientles mages qui vinrent voir Jsus.

    La lumire divine a toujours resplendi au sein des tnbres du paganisme. En scrutant le ciel toil pour y dcouvrir le mystre cach dans sessentiers lumineux, ces mages contemplaient la gloire du Crateur. Dsireux dobtenir une connaissance plus complte, ils se tournrent vers lesEcritures hbraques. On conservait prcieusement, dans leur pays, des crits prophtiques annonant la venue dun instructeur divin. Balaamappartenait la classe des magiciens, bien quil ft, un moment donn, prophte de Dieu. Sous linfluence du Saint-Esprit, il avait prdit la prospritdIsral et lapparition du Messie; la tradition conservait de sicle en sicle ses prophties. Mais lavnement du Sauveur se trouvait plus clairementrvl dans lAncien Testament. Les magiciens apprirent, avec bonheur, que la venue du Messie tait proche, et que le monde entier allait tre remplide la connaissance de la gloire du Seigneur. [44]

    La nuit o la gloire de Dieu avait inond les collines de Bethlhem, les mages avaient aperu dans le ciel une lumire mystrieuse. Quand la lumireeut disparu, une brillante toile apparut, sattardant dans les cieux. Ce ntait ni une toile fixe, ni une plante, et ce phnomne provoqua la plus vivecuriosit. Cette toile tait forme par un groupe danges resplendissants se tenant distance. Les mages nen savaient rien, cependant ils eurentlimpression que ltoile tait l pour eux. Ils consultrent des prtres et des philosophes, ils fouillrent danciens parchemins. Balaam, dans saprophtie, avait dit: Un astre sort de Jacob, un sceptre slve dIsral. Cet astre trange leur avait-il t envoy comme un avant-coureur de celui quitait promis? Les mages avaient reu avec empressement la lumire de la vrit envoye par le ciel; maintenant cette lumire brillait leurs yeux dunclat plus vif. Des songes les poussrent la recherche du Prince nouveau-n.

    Ainsi quAbraham tait parti lappel de Dieu sans savoir o il allait, ainsi quIsral avait suivi par la foi la colonne de nue qui devait lamener laterre promise, ainsi ces paens se mirent la recherche du Sauveur annonc. Les choses prcieuses abondaient en Orient, et les mages ne partirentpas les mains vides. Se conformant la coutume de faire, en hommage, des prsents aux princes ou aux personnages de haut rang, ils se chargrentdes produits les plus riches du pays pour les offrir celui en qui devaient tre bnies toutes les familles de la terre. Marchant de nuit afin de pouvoirsuivre ltoile, les voyageurs trompaient la monotonie des heures en se remmorant les rcits traditionnels et les oracles prophtiques se rapportant celui quils cherchaient. A chaque tape, aux heures de repos, ils faisaient une nouvelle tude des prophties, et se convainquaient toujours davantagede la direction den haut. Ltoile leur servait de signe extrieur; ils avaient le tmoignage intrieur du Saint-Esprit influenant leurs coeurs et leurcommuniquant lesprance. Leur long voyage fut un voyage heureux.

    Les voici au pays dIsral, descendant le mont des Oliviers, [45] ayant Jrusalem sous leurs yeux. Ltoile qui les a guids sarrte au-dessus dutemple, puis disparat. Ils savancent, impatients, certains que la joyeuse nouvelle de la naissance du Messie est le sujet de toutes les conversations.Leurs recherches naboutissent pas. Entrant alors dans la cit sainte, ils se rendent au temple. A leur grand tonnement, personne ne parat connatre leRoi nouveau-n. Leurs questions ne suscitent aucune expression de joie et provoquent mme la surprise et la crainte, parfois le mpris.

    Les prtres, occups rpter les traditions, vantent leur religion et leur pit, dnoncent les Grecs et les Romains comme des paens, des pcheursde la pire espce. Les mages ne sont pas idoltres; aux yeux de Dieu, ils sont bien meilleurs que ses prtendus adorateurs; nanmoins les Juifs lesregardent comme des paens. Leurs questions anxieuses ne font vibrer aucune corde de sympathie mme chez les gardiens attitrs des saintsOracles.

    La nouvelle de larrive des mages se rpandit rapidement dans tout Jrusalem. Cette visite inattendue causa une grande excitation parmi le peuple,et le bruit en parvint jusquau palais du roi Hrode. Lide quun rival pourrait surgir veilla les craintes de lastucieux Edomite. Son accs au trne avaitt jalonn par des meurtres sans nombre. De sang tranger, objet de la haine du peuple soumis par force, sa seule sauvegarde tait la faveur deRome. Mais le nouveau prince avait des droits plus lgitimes. Il tait n pour rgner.

    Hrode souponna les prtres de comploter avec les trangers en vue de fomenter des troubles populaires pour le renverser du trne. Dcid djouer leur plan par la ruse, le roi dissimula sa dfiance. Il convoqua les chefs des prtres et les scribes, et les questionna sur lenseignement deslivres sacrs touchant le lieu de naissance du Messie.

    Lorgueil des docteurs juifs fut bless par cette enqute institue par lusurpateur du trne, sur la demande de ces trangers. Lindiffrence aveclaquelle ils consultrent les parchemins sacrs excita la colre du tyran envieux. Hrode simagina quils [46] voulaient lui cacher leurs connaissancessur ce sujet. Il essaya donc de les intimider, et leur commanda de faire de soigneuses recherches, et de lui dsigner le lieu de naissance du Roiattendu. Ils lui dirent: A Bethlhem de Jude, car voici ce qui a t crit par le prophte: Et toi, Bethlhem, terre de Juda, tu nes certes pas la moindredes principales villes de Juda, car de toi sortira un chef, qui fera patre Isral, mon peuple.

    Hrode voulut voir les mages en particulier. La colre et la crainte emplissaient son coeur; il sut pourtant garder une contenance calme, et reut lestrangers avec courtoisie. Il senquit du moment o ltoile tait apparue, et sembla se rjouir la pense de la naissance du Christ. Il dit sesvisiteurs: Allez et prenez des informations prcises sur le petit enfant; quand vous laurez trouv, faites-le moi savoir, afin que jaille, moi aussi, ladorer.Ayant dit cela il les congdia et ils prirent le chemin de Bethlhem.

    Les prtres et les anciens ntaient pas aussi ignorants quils voulaient le faire croire, au sujet de la naissance du Christ. On avait apport Jrusalem la nouvelle de la visite des anges aux bergers, mais les rabbins navaient pas voulu y prter attention. Ils auraient pu trouver Jsus, etconduire les mages son lieu de naissance. Ce furent les mages, au contraire, qui durent attirer leur attention sur la naissance du Messie. O est le roides Juifs qui vient de natre? dirent-ils. Car nous avons vu son toile en Orient et nous sommes venus ladorer.

    Cest lorgueil et lenvie qui empchrent la lumire de se faire. Les prtres et les rabbins pensaient quen accueillant les nouvelles apportes par lesbergers et par les mages ils se placeraient dans une position difficile, et se disqualifieraient aux yeux des foules en tant quinterprtes des vritsdivines. Ces matres savants ne voulaient pas sabaisser jusqu se laisser instruire par ceux quils appelaient des paens. Il ne se pouvait pas,assuraient-ils, que Dieu et pass ct deux, pour communiquer avec des bergers ignorants et des incirconcis. Ils affichrent donc du mpris pourles rcits qui mettaient en effervescence le roi Hrode et la population de Jrusalem. Ils ne [47] voulurent mme pas se rendre Bethlhem pour vrifierlexactitude de ces rcits. Ils traitrent de fanatisme lintrt que Jsus avait suscit. Alors dj les prtres et les rabbins commenaient rejeter leChrist. Ds ce moment, leur orgueil et leur obstination se transformaient en une vritable haine pour le Sauveur. Tandis que Dieu ouvrait la porte auxGentils, les chefs du peuple juif se fermaient eux-mmes cette porte.

    Les mages sen allrent seuls de Jrusalem. Les ombres de la nuit descendaient lorsquils franchirent les portes de la ville. Aprs leur long voyage,

  • dus par lindiffrence des chefs du peuple juif, ils quittaient Jrusalem moins confiants quils ny taient entrs; ils eurent pourtant la joie de revoirltoile qui les dirigeait vers Bethlhem. Lhumble condition de Jsus ne leur avait pas t rvle comme aux bergers. Quand ils arrivrent Bethlhem, aucune garde royale ne protgeait le Roi nouveau-n. Aucun homme influent ne faisait mme antichambre. Jsus reposait, emmaillot,dans une crche, entre des campagnards sans instruction, ses parents. Sagissait-il vraiment de celui dont il tait dit quil serait charg de relever lestribus de Jacob et de ramener les dbris dIsral; qui devait tre la lumire des nations, et apporter le salut... jusquaux extrmits de la terre?

    Ils entrrent dans la maison, virent le petit enfant avec Marie sa mre, se prosternrent et ladorrent. Sous son humble dguisement, ils reconnurenten Jsus la prsence de la Divinit. Ils lui donnrent leur coeur comme leur Sauveur, et lui prsentrent des dons: de lor, de lencens et de la myrrhe.Quelle foi que la leur! On aurait pu dire deux ce qui fut dit plus tard du centenier romain: En vrit, je vous le dis, je nai trouv chez personne, en Isral,une si grande foi.

    Les mages nayant pas devin les projets dHrode concernant Jsus, se prparaient, aprs avoir rempli la mission quils staient propose, retourner Jrusalem pour faire part au roi de leur succs. Mais un message divin, transmis en songe, leur interdit toute autre relation avec lui. Evitantdonc Jrusalem, ils rentrrent dans leur pays par un autre chemin. [48]

    Un songe aussi avertit Joseph. Il devait fuir en Egypte, avec Marie et lenfant. Lange lui dit: Restes-y jusqu ce que je te dise (de revenir); car Hrodeva rechercher le petit enfant pour le faire prir. Joseph obit sans dlai, et se mit en route, de nuit, pour plus de scurit.

    Dieu, par lintermdiaire des mages, attira lattention du peuple juif sur la naissance de son Fils. Les recherches quils firent Jrusalem, la curiositquils excitrent chez le peuple, et jusqu lenvie dHrode, tout cela fora la rflexion des prtres et des rabbins, et dirigea les esprits vers lesprophties concernant le Messie, et vers le grand vnement rcent.

    Satan, dcid empcher la lumire divine de briller dans le monde, fit appel toute sa ruse afin danantir le Sauveur. Mais celui qui ne sommeilleni ne dort, veillait sur son Enfant bien-aim. Celui qui avait fait pleuvoir la manne du ciel sur Isral, et qui avait nourri Elie en temps de famine, offrit unrefuge, en terre paenne, Marie et lenfant Jsus. Les dons apports par les mages venus dun pays paen, furent le moyen dont se servit laProvidence pour dfrayer les exils de leur voyage en Egypte et de leur sjour dans un pays tranger.

    Les mages staient trouvs parmi les premiers souhaiter la bienvenue au Rdempteur. Les premiers ils dposrent un don ses pieds. Quelbonheur ils eurent ainsi le servir! Dieu agre loffrande dun coeur aimant, et il en tire le plus grand profit pour son service. Si nous avons donn noscoeurs Jsus, nous lui apporterons aussi nos dons. A celui qui sest donn pour nous, nous consacrerons gnreusement nos biens terrestres lesplus prcieux, et nos meilleures facults mentales et spirituelles.

    Hrode attendait impatiemment Jrusalem le retour des mages. Ses soupons sveillrent en voyant le temps passer sans quils parussent. Ayantconstat le peu dempressement des rabbins lui indiquer le lieu de naissance du Messie, il en conclut que ceux-ci avaient devin ses desseins, et queles mages lavaient intentionnellement vit. Cette pense le mit en fureur, L o la ruse chouait, la force devait lemporter. Il allait [49] faire un exempleet montrer ces orgueilleux Juifs comment seraient rprimes leurs tentatives de placer un nouveau monarque sur le trne.

    Des soldats furent envoys immdiatement Bethlhem, avec lordre de mettre mort tous les enfants gs de deux ans et au-dessous. Lespaisibles demeures de la cit de David furent tmoins de scnes dhorreur, que le prophte avait entrevues six sicles auparavant:

    Une clameur sest fait entendre Rama, Des pleurs et beaucoup de lamentations. Cest Rachel qui pleure ses enfants; Elle na pas voulu tre console, Parce quils ne sont plus.

    Les Juifs taient responsables de ce malheur. Sils avaient march fidlement et humblement devant lui, Dieu aurait dsarm la colre du roi, mais ilsstaient spars de Dieu par leurs pchs, ils avaient rejet le Saint-Esprit, leur unique bouclier. Ce nest pas avec le dsir de se conformer lavolont de Dieu quils avaient tudi les Ecritures. Ils staient mis la recherche de prophties pouvant tre interprtes leur propre avantage, pourmontrer que Dieu ddaignait les autres nations. Ils prtendaient, orgueilleusement, que le Messie allait venir en qualit de roi, triomphant de sesennemis, et foulant aux pieds, avec colre, les paens. En agissant ainsi ils avaient excit la haine de leurs dominateurs. Satan stait propos, enfaussant leurs conceptions de la mission du Christ, dassurer la destruction du Sauveur; mais ce fut sur leurs ttes que le mal retomba.

    Cet acte de cruaut fut lun des derniers qui assombrirent le rgne dHrode. Peu aprs le meurtre des innocents, le roi lui-mme dut se soumettre la sentence inluctable: il mourut dune mort atroce.

    Joseph, qui se trouvait encore en Egypte, fut invit par un ange de Dieu rentrer au pays dIsral. Comme il voyait en Jsus lhritier du trne deDavid, il dsirait fixer son domicile Bethlhem; mais apprenant quArchlas rgnait en Jude, la place de son pre, il craignit que les desseins decelui-ci [50] contre le Christ ne fussent excuts par son fils. De tous les fils dHrode, Archlas tait celui qui moralement ressemblait le plus sonpre. Son accession au trne avait t marque par un tumulte Jrusalem: des milliers de Juifs avaient t massacrs par les soldats romains.

    De nouveau un lieu de refuge fut indiqu Joseph. Il retourna Nazareth, son ancien domicile, et cest l que Jsus demeura pendant prs de trenteans, afin que saccomplisse ce qui avait t dclar par les prophtes: Il sera appel Nazaren. La Galile obissait lun des fils dHrode, mais lapopulation y tait beaucoup plus mlange quen Jude, de sorte que les affaires des Juifs y excitaient moins dintrt et les droits de Jsus risquaientmoins de provoquer la jalousie de ceux qui dtenaient le pouvoir.

    Voil laccueil que fit la terre son Sauveur! Aucun lieu de repos o lEnfant rdempteur ft en sret! Dieu ne pouvait confier aux hommes ce Filsbien-aim, qui venait accomplir une oeuvre de salut en leur faveur. Des anges furent chargs dassister Jsus et de le protger jusqu la fin de samission, jusqu lheure o il mourrait par la main mme de ceux quil tait venu sauver. [51]

  • 7 Lenfance de Jsus

    LENFANCE et la jeunesse de Jsus scoulrent dans un petit village de montagne. Tout lieu sur la terre et t honor par sa prsence. Cet t unhonneur pour les palais des rois de le recevoir comme hte. Mais il passa ct des riches demeures, des cours royales, et des centres intellectuelsque la science avait rendus clbres, pour fixer sa demeure dans le village obscur et mpris de Nazareth.

    Le court rcit de ses premires annes est tout plein de signification: Le petit enfant grandissait et se fortifiait; il tait rempli de sagesse, et la grcede Dieu tait sur lui. Dans le rayonnement de la prsence de son Pre, Jsus croissait en sagesse, en stature et en grce, devant Dieu et devant leshommes. Son esprit tait actif et pntrant; il tait plus rflchi et plus sage que les enfants de son ge. Son caractre avait un quilibre magnifique.Ses facults intellectuelles et ses forces corporelles se dvelopprent graduellement, en harmonie avec les lois de lenfance.

    Lenfant Jsus se montrait particulirement aimable. Il tait toujours prt se mettre au service des autres. Rien ne pouvait lasser sa patience, et savracit tait incorruptible. Tout en tant ferme comme un rocher dans ses principes, il manifestait dans sa vie la grce dune courtoisie dsintresse.

    La mre de Jsus veillait avec la plus grande sollicitude sur le dveloppement de ses capacits, et elle admirait la perfection de son caractre. Ellese faisait un plaisir dencourager cet esprit vif et intelligent. Le Saint-Esprit lui donnait de la sagesse pour quelle pt, en coopration avec les espritsclestes, [52] travailler au dveloppement de cet enfant, qui ne reconnaissait que Dieu comme son pre.

    Ds les temps les plus reculs, les Isralites fidles avaient donn les plus grands soins linstruction de la jeunesse. Le Seigneur avait ordonn queds la plus tendre enfance on ft instruit au sujet de sa bont et de sa grandeur, telles quelles sont rvles plus particulirement dans sa loi, etillustres par lhistoire dIsral. Le chant, la prire, et lenseignement des Ecritures devaient sadapter aux jeunes intelligences. Pres et mres devaientenseigner leurs enfants que la loi de Dieu est lexpression de son caractre, et que cest en recevant dans le coeur les principes de la loi quonreproduit en soi-mme limage de Dieu. Lenseignement se faisait surtout oralement; cependant, les enfants apprenaient aussi lire les caractreshbraques; et les rouleaux de parchemin contenant lAncien Testament faisaient lobjet de leurs tudes.

    Aux jours du Christ, une communaut noffrant pas la jeunesse une instruction religieuse tait considre comme frappe de maldiction divine.Mais lenseignement tait devenu routinier. La tradition avait dans une large mesure supplant les Ecritures. Une vraie instruction aurait pour effetdamener les jeunes gens chercher Dieu et sefforcer de le trouver si possible, en ttonnant. Mais les matres juifs soccupaient surtout descrmonies. On encombrait lesprit de matriaux inutiles, jugs sans valeur dans lcole suprieure du ciel, et ce systme dducation ne laissait pointde place pour lexprience que lon obtient en acceptant personnellement la Parole de Dieu. Les lves, retenus dans un engrenage de chosesextrieures, ne trouvaient pas le temps ncessaire la communion avec Dieu. Ils ne pouvaient entendre sa voix parlant leurs coeurs. Tout en tant lapoursuite de la science, ils se dtournaient de la source de la sagesse. Les lments essentiels du service de Dieu se trouvaient ngligs, lesprincipes de la loi, obscurcis. Ce que lon considrait comme une instruction suprieure tait en ralit le plus grand obstacle un dveloppementnormal. Lenseignement donn par les rabbins comprimait les [53] facults des jeunes gens, entravait et rtrcissait leur esprit.

    Ce nest pas dans les coles de la synagogue que Jsus reut son instruction. Sa mre fut son premier matre terrestre. De ses lvres et des rouleauxdes prophtes, il recueillit la connaissance des choses divines. Sur ses genoux il apprit les paroles mmes quil avait donnes autrefois Isral, parlintermdiaire de Mose. Plus tard, il ne frquenta pas davantage les coles des rabbins. Linstruction quil et pu puiser cette source ne lui tait pasncessaire, Dieu lui-mme tant son instructeur.

    De ltonnement prouv par les Juifs au cours du ministre du Sauveur et exprim en ces mots: Comment connat-il les Ecrits, lui qui na pastudi? il ne faut pas conclure que Jsus ne savait pas lire, mais seulement quil navait pas reu une instruction rabbinique. Il acquit sa connaissanceainsi que nous pouvons le faire nous-mmes; sa grande familiarit avec les Ecritures montre comment il sest appliqu, dans ses premires annes, ltude de la Parole de Dieu. La vaste bibliothque des oeuvres divines tait aussi sa disposition. Lui qui avait fait toutes choses, il tudiaitmaintenant les leons graves de sa propre main sur la terre, la mer et le ciel. A lcart des souillures du monde, il tirait de la nature des trsors deconnaissances scientifiques. Ds son jeune ge il fut anim dun dsir unique: celui de vivre pour faire du bien. A cet effet, la nature lui offrait sesressources; de nouvelles ides concernant les mthodes suivre affluaient son esprit tandis quil tudiait cet effet la vie des plantes, des animaux etcelle de lhomme. Il sefforait continuellement de tirer des choses observes des illustrations pouvant lui servir rendre plus clairs les oracles vivantsde Dieu. Les paraboles par lesquelles il aimait, pendant son ministre, enseigner les leons de la vrit, montrent quel point son esprit fut ouvert auxinfluences de la nature, et combien de leons spirituelles il sut tirer de son entourage quotidien.

    La signification de la Parole et des oeuvres de Dieu se dvoilait Jsus, pendant quil sefforait de dcouvrir la raison des choses. Des tresclestes lassistaient, et son esprit tait tout [54] rempli de saintes penses. Ds le premier veil de son intelligence, il ne cessa de crotre en grcespirituelle et en connaissance de la vrit.

    Tout enfant peut sinstruire comme Jsus la fait. Si nous nous efforons dapprendre connatre notre Pre cleste, au moyen de sa Parole, desanges sapprocheront de nous, pour fortifier nos esprits, pour ennoblir et lever nos caractres. Nous deviendrons semblables au Sauveur. Lacontemplation de tout ce qui est beau et grand dans la nature dirige nos affections vers Dieu. Une crainte salutaire envahit lesprit, et lme reoit unevigueu