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DOSSIER NUMÉRO 13 SEPTEMBRE 2002 LA GÉOMATIQUE AU MINISTÈRE DES TRANSPORTS mtq.gouv.qc.ca/innovation/innovation.htm mtq.gouv.qc.ca/innovation/innovation.htm

Innovation Transport, numéro 13, septembre 2002...INNOVATION TRANSPORT SEPTEMBRE 20023 maximales permises, ni dans les cas où des bar-res lisses sont utilisées (lesquelles requièrent

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  • DOSSIER

    NUMÉRO 13 SEPTEMBRE 2002

    LA GÉOMATIQUE AU MINISTÈRE DES TRANSPORTS

    mtq.gouv.qc.ca/innovation/innovation.htmmtq.gouv.qc.ca/innovation/innovation.htm

  • LA GÉOMATIQUE AU MINISTÈRE DES TRANSPORTS DU QUÉBEC

    La géomatique est un domaine où les innovations se succèdent à un rythme accéléré. Au

    même titre que l'informatique au début des années 80, la géomatique vient remettre en

    question de manière radicale nos façons de faire.

    Au ministère des Transports du Québec, la gestion efficace des réseaux de transport passe

    inévitablement par l'accès rapide à des données géographiques fiables et à jour. Depuis

    plusieurs années, le Ministère a amorcé le virage de la géomatisation en raison des possibili-

    tés qu'offrent les nouvelles technologies en matière de captage, de traitement, d’intégration,

    d’analyse et de représentation de l’information géographique.

    Récemment, le Ministère a élaboré et mis en œuvre des projets importants en géoma-

    tique, dont le système de la base géographique routière et le système d’inventaire des infra-

    structures de transport visant à faciliter l’exploitation des données relatives aux différents

    réseaux de transport. Divers autres projets de recherche en géomatique sont également en

    cours.

    Sur le plan gouvernemental, les multiples applications dans différents ministères et orga-

    nismes ont conduit à une action concertée de coordination des initiatives du secteur public en

    la matière. Le Plan géomatique du gouvernement du Québec est le fruit de cette action

    concertée. Par ailleurs, l'expertise du Ministère en matière d'applications géomatiques en

    transport, de production et de diffusion de données à référence spatiale en font un chef de

    file au sein du gouvernement du Québec. À ce titre, le Ministère aura à relever un défi de

    taille au cours des prochaines années, soit celui d'adapter constamment ses façons de faire,

    tributaires de l'évolution rapide des nouvelles technologies, afin de réussir le passage au XXIe

    siècle en matière de gestion des données géographiques. Nous vous invitons à prendre

    connaissance du dossier du présent bulletin qui brosse le portrait de la géomatique au

    ministère des Transports du Québec.

    Pierre Toupin

    I N N O V A T I O N T R A N S P O R TsO M M A I R EP R O J E T D E R E C H E R C H E

    SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE DUCOMPORTEMENT EN SERVICE D’UN PONT ROUTIER EN BÉTON ARMÉ 3

    D O S S I E R

    LA GÉOMATIQUE AU MINISTÈRE DES TRANSPORTS 1 1

    S É C U R I T É D A N S L E S

    T R A N S P O R T S

    SÉCURITÉ ROUTIÈRE ET PLANIFICATION DU TERRITOIRE 1 7

    R O U T E S E T S T R U C T U R E S

    PROJET AVEC GARANTIE DE PERFORMANCE DE 10 ANS SUR L’A-40 À VAUDREUIL : BILAN APRÈS 6 ANS 2 0

    P A R U T I O N S R É C E N T E S 2 7

    C O N G R È S E T

    C O N F É R E N C E S 2 9

    INNOVATION TRANSPORT est réalisé par le Centre québécois detransfert de technologie en transport et édité par la Direction descommunications du ministère des Transports du Québec. Il estmaintenant diffusé sur Internet à l'adresse suivante :http://www.mtq.gouv.qc.ca/innovation/innovation.htm

    Coordination : Centre québécois de transfert de technologieen transportRévision linguistique : Direction des communicationsSupervision graphique : Jean-Pierre TremblayConception : Tandem Conception et Infographie inc.Impression : Imprimerie Laurentide inc.Photogravure : Composition OrléansPour obtenir de l’information supplémentaire, il suffit des’adresser à :Ministère des Transports du QuébecDirection de la recherche et de l’environnement700, boul. René-Lévesque Est, 21e étageQuébec (Québec), G1R 5H1Téléphone : (418) 643-6039Télécopieur : (418) 646-2343Courriel : [email protected]

    Dépôt légalBibliothèque nationale du QuébecISSN - 1480-610XTirage : 1950 exemplaires

    2 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 3

    maximales permises, ni dans les cas où des bar-res lisses sont utilisées (lesquelles requièrent unelongueur de scellement plus grande que les bar-res crénelées). Aucune indication n’y est donnéenon plus pour les cas où des étriers sont man-quants dans les zones d’arrêt des armatures deflexion.

    Par ailleurs, on admet, dans la norme, que larésistance en traction du béton est négligée, quela déformation ultime du béton est fixée à 3000µε, que le taux de travail maximum des arma-tures passives est égal à la limite élastique del’acier utilisé et que les sections planes restentplanes jusqu’à la rupture. De plus, après la fis-suration de l’âme sous les effets des efforts decisaillement, on assimile le comportement despoutres à celui d’un treillis plan dans les zones oùcoexistent un moment de flexion et un efforttranchant. Dans l’approche théorique standardi-sée, on simplifie l’analyse en négligeant leniveau de redondance structurale, les conditionsde retenue aux appuis, les effets d’arc transver-saux ou longitudinaux, etc.

    L’évaluation de la capacité d’une structureexistante est donc nécessairement entachéed’une certaine imprécision, laquelle est fonctionde la justesse des informations disponibles et dela conformité du modèle théorique exploité pourreprésenter le comportement réel de la structure.

    mettre en cause la sécurité d’un ouvrage, ceux-cisont relevés lors des inspections et sont prisen compte dans l’évaluation théorique de lastructure.

    L’évaluation de la capacité d’un pont enbéton armé est un exercice complexe. En effet, ilest très difficile d’évaluer avec précision l’inci-dence sur la capacité d’une détérioration révéléelors d’une inspection visuelle. La perte de capa-cité associée à un défaut dépend de la nature decelui-ci, de son emplacement sur la pièce et deson ampleur. De plus, le processus de détériora-tion évolue dans le temps, souvent au détrimentde la capacité structurale. À titre d’exemple, desfissures apparaissant sous l’effet des chargesd’utilisation peuvent s’élargir sous l’effet descycles des gradients thermiques, qui occasionnenteux aussi la flexion des éléments. Or, la largeurde ces fissures ainsi que leur type (flexion,cisaillement ou combinaison des deux) a une inci-dence significative sur la résistance offerte par lebéton (Minor et White, 1988).

    Malgré cela, l’évaluation de la capacité por-tante actuelle d’une structure existante estgénéralement effectuée suivant les exigences dela norme canadienne, CAN/CSA-S6, en vigueur.Ce faisant, on calcule les résistances en flexion eten cisaillement en utilisant les mêmes hypothè-ses et les mêmes équations que celles utiliséespour la conception de nouveaux ponts. Cettefaçon de faire simplifie beaucoup la procédured’évaluation et permet de porter un jugementobjectif sur la capacité de la plupart des pontsroutiers du réseau québécois. Cependant, aucuneindication n’est fournie dans la norme pour lescas où les étriers sont espacés au-delà des limites

    I N T R O D U C T I O N

    Les infrastructures autoroutières sont soumi-ses à des conditions d’exploitation de plus enplus exigeantes. L’intensité des charges sollicitantles ponts est en hausse d’année en année, ce quisurcharge les structures existantes, dont plusieursont été conçues avec des charges de calcul signi-ficativement plus faibles. Les effets de cescharges et la détérioration par la corrosionaccélèrent le processus de dégradation. Enfin, descauses d’ordre environnemental (affouillement,poussée des glaces, effets des cycles de gel-dégel, etc.) contribuent également à rendreinadéquates les structures existantes. Dans cecontexte, de plus en plus de ponts ne répondentpas aux exigences actuelles, et des travaux deplus en plus nombreux et coûteux doivent êtreréalisés pour renforcer ou réhabiliter les structuresafin d’assurer la sécurité des usagers.

    Pour gérer l’ensemble des structures sous saresponsabilité, le Ministère a mis sur pied un pro-gramme d’inspections périodiques de sesouvrages. Ces inspections ont pour but dedétecter le plus tôt possible les défauts pouvantdiminuer la capacité d’une structure ou sa duréede vie. Lorsque des défauts majeurs risquent de

    SURVEILLANCE ÉLECTRONIQUE DU COMPORTEMENTEN SERVICE D’UN PONT ROUTIER EN BÉTON ARMÉ

    par Marc Savard, Ph. D., ing., Direction des structures

  • 4 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    C H O I X D E L A M E S U R E ÀP R I V I L É G I E R

    Plusieurs mesures peuvent être considéréespar le gestionnaire d’une structure dont l’évalua-tion théorique démontre que sa capacité estinsuffisante. En premier lieu, on peut procéder aurenforcement ou à la reconstruction à très courtterme. Les moyens financiers du Ministère étantlimités, cette solution n’est envisagée que sur lesstructures présentant les défauts les plus aigus oulorsque la fiabilité de l’ouvrage à très court termeest remise en cause.

    En deuxième lieu, on peut restreindre l’ex-ploitation de la structure, soit en réduisant lenombre de voies ouvertes à la circulation, enlimitant la vitesse des véhicules ou en fixantl’espacement entre les véhicules lourds (limita-tion du nombre de véhicules lourds pouvantcharger simultanément un pont ou une de sestravées). Ces mesures restrictives sont souventinacceptables pour une structure du réseausupérieur. La fermeture complète d’un pont estégalement inacceptable lorsque aucune voie dedéviation ne peut être envisagée ou que lalongueur du détour est trop contraignante. Enfin,l’érection d’étaiements actifs ou passifs n’estenvisageable que si la géométrie du site s’y prêteet si les incidences environnementales sontjugées acceptables.

    Dans certains cas, on peut améliorer la préci-sion de l’évaluation théorique en procédant àl’auscultation de la structure. L’auscultation estun ensemble d’examens et de mesures précisesqui vise à mieux connaître l’état réel d’unouvrage. Il existe deux types d’auscultation, àsavoir la prise d’échantillons servant à détermi-ner les propriétés des matériaux en place et laprise de mesures in situ pour l’analyse du com-portement réel de la structure ou d’un de ses élé-ments sollicités par des charges connues (essaide chargement). Les mesures in situ peuvent êtreglobales (flèches verticales, rotations aux appuis,modes de vibration, etc.) ou locales (déforma-tions, mesure du souffle (largeur) d’une fissure,

    etc.). Les résultats de l’auscultation sont la plu-part du temps utilisés pour la mise à jour des cal-culs d’évaluation de la structure et, dans certainscas, ils peuvent révéler une réserve de capacitésuffisante pour assurer l’exploitation sécuritairede l’ouvrage.

    Par ailleurs, sous certaines conditions, onpeut prolonger la durée de vie utile d’une struc-ture en la plaçant sous surveillance électronique.Un des objectifs de cette surveillance est desuivre de façon assidue l’évolution de l’ouvrageafin de connaître le rythme d’évolution du proces-sus d’endommagement. Ce suivi peut être faitsur des propriétés structurales telles que la rigi-dité équivalente, les fréquences de vibration,l’amortissement modal. On peut également sui-vre l’évolution de paramètres témoignant de laprogression de l’endommagement. Dans cedernier cas, on peut déterminer les plages devariations saisonnières de ces paramètres etdéfinir des seuils caractérisant une situation dan-gereuse ou faisant craindre la possibilité d’unedéfaillance de l’ouvrage à court terme. En cas dedépassement de ces valeurs seuils, les mesuresde sécurité préalablement définies doivent êtreexécutées. La télésurveillance est donc un moyende vérifier si le pont se comporte adéquatementsous l’effet des charges spécifiques au site d’unpont.

    L’adéquation du comportement de la struc-ture sous surveillance tendra à confirmer lesréserves de capacité prévues, qui étaientnégligées dans les calculs théoriques effectuéssuivant les prescriptions de la norme. Le com-portement adéquat de la structure peut égale-ment s’expliquer par le niveau des sollicitationsréelles, qui seraient inférieures à celles prescrites(le chargement à l’ultime prescrit ayant une prob-abilité d’occurrence trop faible pour le site dupont à l’étude), ou encore par l’emploi d’un coef-ficient de majoration dynamique trop important.

    À l’opposé, une progression de l’endom-magement (augmentation de la longueur ou dela largeur d’une fissure, ou du nombre de fis-

    sures) laisse présumer un comportementinadéquat de la structure surveillée. L’apparitionde fissures importantes peut être le signe d’uneplastification des armatures tendues. Elle peutaussi traduire une perte d’adhérence des aciersau béton par suite d’une corrosion très avancéeou d’une dislocation interne du béton. De telsdéfauts nécessitent des mesures de renforcementimmédiat, et la télésurveillance ne peut recom-mencer tant les travaux n’ont pas été réalisés.

    La télésurveillance n’est donc pratiquée quelorsque la défaillance de l’ouvrage n’est pasprévisible à court terme et que le mode de rup-ture prévu est ductile (comportant des signesprécurseurs). Dans le cas des structures en bétonarmé, les poutres doivent être sous-armées demanière à ce que l’armature en traction atteignesa limite élastique avant que le béton éclate encompression. Lorsque l’ouvrage est sujet à unerupture fragile, comme la rupture en cisaillementd’une poutre en béton armé ou une rupture dueà la progression d’une fissure de fatigue dans unélément d’acier, des mesures immédiates de ren-forcement visant à contrer cette éventualitédoivent être prises. Dans tous les cas où une télé-surveillance est envisagée, la fiabilité de la struc-ture doit être assurée dans l’immédiat et ne peutêtre compromise que par une aggravationultérieure des défauts.

    L’acier étant un matériau homogène, soncomportement jusqu’à l’ultime est plus simple àévaluer. À l’exception de la formation de fissuresde fatigue (laquelle ne peut faire l’objet d’unetélésurveillance), l’endommagement dans leséléments d’acier est plus facile à quantifier et àprendre en compte dans les calculs d’évaluation.Les éléments en béton armé disposent d’unerésistance beaucoup plus difficile à quantifier. Deplus, celle-ci évolue significativement dans letemps, en fonction de l’intensité des sollicitationset de l’agressivité des éléments environnemen-taux qui occasionnent la corrosion et la fissura-tion (interne et externe). Dans les normes de cal-

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 5

    cul, on tient compte de ces incertitudes en pro-posant des coefficients de pondération plus défa-vorables. Ainsi, les avantages à retirer de la sur-veillance électronique apparaissent potentielle-ment plus importants dans le cas des structuresen béton armé ou précontraint.

    I N S T R U M E N T A T I O N P O U RL A T É L É S U R V E I L L A N C E

    Le choix et l’emplacement des appareils demesure d’un programme de télésurveillance sontconditionnés par les modes de rupture prévus.Préalablement à l’instrumentation, la détermina-tion des modes de rupture les plus probables estcruciale. En effet, l’incapacité d’une opération desurveillance à déceler à temps un problèmedevenant préoccupant (à cause de la progressionrapide de la dégradation ou de modificationsdans les conditions d’utilisation ou dans l’envi-ronnement) risquerait d’aggraver les mesures àprendre, voire de mettre en péril la fiabilité de lastructure et la sécurité des usagers. La télésur-veillance est donc une opération exigeante, quinécessite une analyse structurale exhaustivepréalable à l’utilisation des appareils de mesureet de communication les plus performants. Lesystème d’acquisition de données utilisé doit êtrefiable, robuste, polyvalent, de grande précision etd’utilisation facile. Plus particulièrement, il doit :

    • avoir une mémoire de taille suffisante(stocker au moins 60 000 données) ;

    • être polyvalent (capable de lire les donnéesde différents types de capteurs) ;

    • pouvoir fonctionner dans des conditions diffi-ciles (température élevée ou basse (de-25 °C à +40 °C), taux d’humidité élevé,vibrations et chocs souvent non négligeables) ;

    • pouvoir interroger un grand nombre de cap-teurs (au moins 12) et offrir des possibilitésd’expansion ;

    • avoir un niveau de précision élevé, supérieurà 12 bits ;

    • être autonome (ne pas nécessiter le recours àun ordinateur pour effectuer et enregistrer lesmesures) ;

    • permettre l’acheminement des données etdes messages d’alarme par la téléphonie ter-restre ou cellulaire.

    Les capteurs utilisés doivent être fiables, degrande précision, capables de résister aux intem-péries et faciles d’installation. Généralement,pour détecter l’ouverture et la fermeture des fis-sures, des capteurs de type potentiométrique ouLVDT sont utilisés. Pour mesurer les flèches, onfavorisera l’utilisation d’inclinomètres de préci-sion en nombre suffisant. Ces capteurs utilisentcomme référentiel le champ d’attraction gravita-tionnelle, lequel est considéré stable dans la plu-part des applications. Finalement, les sondesthermiques de précision doivent être suffisam-ment petites pour être introduites à l’intérieur deséléments structuraux. Les sondes utilisées sontgénéralement des détecteurs résistifs (RTD),reconnus pour leur précision et leur stabilité àlong terme.

    Généralement, le système d’acquisition dedonnées effectue une lecture de tous les capteurstoutes les dix minutes. Toutes les heures, unemoyenne est calculée et enregistrée. Cette façonde faire permet de détecter toute anomalie defonctionnement d’un capteur Elle permet égale-ment de suivre le comportement de la structureau fur et à mesure que les déformations d’originethermique se produisent. Toute irrégularité dansle comportement de la structure peut alors êtredécelée et interprétée dans l’analyse sub-séquente.

    É T U D E D E C A S – L E P O N TD E S A I N T - M A R C E L

    Le pont de Saint-Marcel compte deux voiesde circulation qui permettent au trafic routier dela Route 116 de franchir la rivière Tenturelle. Lagéométrie de ce pont, construit en 1944, estprésentée sommairement à la figure 1. Les

    photos 1 et 2 montrent une vue en élévation dela structure ainsi que le dessous du tablier. À noterle fort biais (56 °) qui caractérise le tablier de cepont.

    Une inspection visuelle de cette structure arévélé la présence de fissures de cisaillementlarges (plus de 1 mm) près des extrémités despoutres, de même que des fissures de flexion detaille moyenne (jusqu’à 1 mm) apparentées àl’effet d’un moment négatif aux extrémités desdeux poutres. Près du centre des poutres, des fis-sures de flexion sont également notées. De plus,une longue fissure longitudinale large (atteignant2 mm à certains endroits) est également visiblesous la dalle, entre les deux poutres. Finalement,des tâches d’efflorescence et de la délaminationaffectent l’extrémité des poutres ainsi que lesdiaphragmes.

    Ce pont a fait l’objet d’une évaluation de sacapacité suivant les prescriptions de la normecanadienne S6-88. Dans les calculs, un coeffi-cient de majoration dynamique de 30 % a étéutilisé (comme suggéré par la norme), et on aconsidéré que les deux voies du pont étaientchargées simultanément, une voie sollicitée parle camion normalisé et l’autre chargée à 90 % dece chargement. Considérant que le débit jour-nalier moyen annuel (DJMA) sur le pont de Saint-Marcel s’élève actuellement à 345 véhicules,dont 24 camions, le chargement utilisé dans lescalculs d’évaluation apparaît peu représentatifdes conditions d’exploitation maximales proba-bles. De plus, les coefficients de pondération descharges vives proposés dans la norme sont élevéspour ce type de pont offrant peu de redondancestructurale. L’établissement de ces coefficients netient pas compte de la variabilité des charges par-ticulières au site étudié ni de la durée de vierésiduelle souhaitée pour cette structure.

    Les résultats de l’évaluation théorique ontrévélé que la structure ne peut reprendre qu’en-viron 30 % de la charge légale autorisée sur cetteroute, en flexion comme en cisaillement. À noterque ce résultat a été obtenu en exploitant laméthode d’analyse simplifiée proposée dans la

  • 6 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    norme CAN-CSA/S6, laquelle n’est pas valablelorsque le biais du tablier dépasse 20 à 25degrés. De plus, on a négligé la retenue horizon-tale qui se manifeste aux extrémités des poutresen contact direct sur les culées et qui crée unmoment résistant négatif, comme en témoignentcertaines fissures relevées lors de l’inspection.L’armature longitudinale de la dalle contribuesans doute au développement de cet effort.

    Compte tenu qu’une restriction des chargespouvant solliciter ce pont ne constitue pas une

    solution acceptable pour le milieu, il a été décidéde remplacer la structure. Cependant, étantdonné que son état ne laisse pas prévoir de rup-ture imminente et qu’on retrouve ce type destructure en assez grand nombre dans lesréseaux routiers québécois (76 structures simi-laires au total dans le réseau routier québécois),un programme de télésurveillance du pont a étémis sur pied, afin de mieux connaître le rythmede progression de l’endommagement dans cetype de structure offrant peu de redondance struc-

    turale. Le but de cette opération est donc demesurer la progression de quelques mécanismesd’endommagements et non de surveiller la struc-ture pour en vérifier la fiabilité par rapport à tousles modes de rupture anticipés. L’instrumentationrequise devra être suffisamment sensible pourdétecter les comportements inadéquats, sansnécessairement devoir les expliquer. Ainsi, le suivide la progression des fissures de cisaillement seraeffectué, bien que le mode de rupture correspon-dant soit de nature fragile. L’affaissement pro-gressif (ductile) du centre d’une travée, s’il alieu, fera également l’objet d’une surveillance.Finalement, la fissure longitudinale sous la dalledevra également être investiguée, compte tenudu fort biais qui caractérise le tablier du pont etqui occasionne d’ importants efforts de flexiontransversale dans la dalle. Malgré la présence deces équipements de surveillance, la décision deremplacer la structure à court terme demeure jus-tifiée.

    I N S T R U M E N T A T I O N D UP O N T

    L’instrumentation requise doit être déployéede manière à pouvoir mesurer à la fois l’affaisse-ment et le souffle des fissures (appelés « varia-bles à expliquer ») et les phénomènes (appelés« variables explicatives ») ayant une influenceréversible et récurrente sur les variables à expli-quer. Dans le cas du pont à l’étude, on a estiméqu’a priori la température interne mesurée en dif-férents points (et permettant d’extraire la com-posante linéaire du gradient thermique) constituela seule variable explicative d’intérêt.

    Pour mesurer la flèche au centre, on a dis-posé deux inclinomètres espacés de un mètre etun niveau électronique sur la face intérieure del’âme du côté aval. La figure 2b montre les incli-nomètres disposés le long de la travée. Ces incli-nomètres, marqués TILT_X sur la figure, sontfabriqués par Applied Geomechanics, modèle TuffTilt 801. Ils ont une plage de mesure de ±3degrés, une résolution de l’ordre de 6 x 10–4

    Photo 1 : Profil du pont de Saint-Marcel

    Photo 2 : Capteurs installés dans la structure

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 7

    Figure 1 – Dimensions de la section transversale

    SUD NORD

    P1P2

    190

    1181

    1549 1955 1549

    Figure 2 : Localisation des capteursa : Élévation de la poutre P1 – côté intérieur

    EST OUEST

    CV1

    9415

    6000 500 PT_10

    PT_6

    PT_9P0T_5

    P0T_4P0T_3

    210

    PT_8

    22800

    b : Élévation de la poutre P2 – côté intérieur

    EST OUEST

    1055

    800

    1305

    9415

    2636

    22800

    5006000

    10002 000

    P0T_1PT_1

    PT_1PT_5

    P0T_2 tilt_2 tilt_1

    EL_1PT_4PT_2

    PT_3

    190

    1181

    SUD NORD

    P2 P1

    1955 15491549

    EST OUEST22800

    6000 500PT_10

    CV1

    PT_8

    9415

    210

    PT_9

    PT_6

    POT_5POT_4

    POT_3

    22800

    EST OUEST

    2636

    9415

    6000 500

    PT_5PT_110002000

    1305

    1055 P0T_1

    800

    EL_1 PT_1PT_4

    PT_2

    PT_3

    POT_2 tilt_2 tilt_1

  • 8 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    degrés et une linéarité inférieure à 2 % de lapleine échelle. De plus, un niveau électronique aété fixé, comme le montre la figure (capteurEL_1). Ce niveau permet de mesurer l’affaisse-ment d’une de ses extrémités par rapport àl’autre. Finalement, deux cordes vibrantes mar-quées CV1 et CV2, mesurent la déformation per-manente longitudinale au niveau du lit inférieurdes barres d’armature.

    Pour mesurer la température interne, 10 son-des thermiques de précision (de type RTD) ontété introduites au centre des deux poutres dupont, comme le montre la figure 2. Ces sondessont marquées PT_X sur la figure. Pour com-pléter l’instrumentation, le souffle de six fissuresimportantes situées dans la moitié est du pont aété enregistré à l’aide de potentiomètres. Cescapteurs sont marqués Pot_X sur les figures 2aet 2b. Tous ces capteurs sont reliés à un systèmed’acquisition de données doté d’un modemexploitant la téléphonie terrestre.

    A N A L Y S E D E S M E S U R E S

    E N R E G I S T R É E S

    Une fois l’instrumentation en place et véri-fiée, on doit procéder à la phase d’apprentissage.Cette phase consiste à enregistrer et analysertoutes les données dans le but d’établir unmo-dèle représentatif du comportement de l’ou-vrage surveillé. Ce modèle doit être capable deprédire l’évolution de la variable à expliquer àpartir des seules variables explicatives. L’analysepar régression linéaire convient particulièrementbien pour établir ces liens de causalité(Fauchoux, 1995). À noter que cette phase d’ap-prentissage doit être suffisamment longue pourque la plage des valeurs possibles des variablesexplicatives soit couverte, de manière à éviter lesprévisions obtenues par extrapolation. Dansl’analyse qui suit, on se bornera à étudier l’évo-lution du souffle de la fissure telle que mesurée àl’aide du capteur Pot_5 montré sur la figure 2a.

    La figure 3 montre l’évolution du souffle de lafissure numéro 5 et de la température internemesurée par la sonde thermique PT_9 en fonc-

    tion du temps. Ces données ont été enregistréesentre le 24 janvier 2001 et le 13 juillet de lamême année. L’inspection visuelle des tendancesrévèle un couplage évident entre ces variables.

    Pour évaluer si la fissure a subi un élargisse-ment à caractère permanent dans les conditionsd’exploitation actuelles (seuls les camions ayantune masse supérieure à la limite légale ne peu-vent franchir ce pont), on doit extraire desmesures les variations saisonnières réversibles.La tendance de la fonction résiduelle qui enrésulte peut témoigner ou non d’un endommage-ment irréversible. Ce processus d’extractionnécessite l’établissement d’un modèle représen-tatif des effets réversibles touchant le paramètreà expliquer. Comme il a été mentionné aupara-vant, une analyse par régression linéaire peutservir à établir ce modèle. Dans le cas d’unerégression linéaire univariate, celui-ci est de laforme :

    s(t) – a0 + a1T(t) + «(t) (1)

    où s(t) est le souffle de la fissure (mesurede sa largeur en fonction du temps), T(t) estune mesure de la température, a0 et a1 sont lesparamètres d’ajustements issus de la régressionlinéaire. La variable «(t) représente les résidus,soit la partie « inexpliquée» du paramètre s(t).Pour que ce modèle linéaire soit acceptable, lafonction résidu doit être de nature aléatoire et nedoit pas présenter d’effets de structure(Fauchoux, 1995).

    On présente sur la figure 4 le souffle de la fis-sure numéro 5 (capteur Pot_5) en fonction del’amplitude de la température interne mesurée àl’aide de la sonde thermique PT_9. On voit qu’ily a une excellente corrélation entre ces deuxvariables, la température interne expliquant92 % du souffle de la fissure (coefficient dedétermination r2 égal à 0,92).

    L’analyse par régression linéaire a conduitaux résultats indiqués au tableau 1 définissantles paramètres d’ajustements à introduire dans

    Figure 4 : Souffle de la fissure en fonction de la température interne

    Figure 3 : Souffle de la fissure et température interne en fonction du temps 24 janvier 2001 au 13 juillet 2001

    TempératureO.2 30

    20

    10

    0

    -10

    -20

    -230 -20 -10 0 10 20 30 40

    -30

    O.1

    O

    –O.1

    –O.2

    Souffle

    Souff

    le (m

    m)

    O.2

    O.1

    O

    –O.1

    –O.2

    O.2

    O.1

    O

    –O.1

    –O.2

    Souff

    le (m

    m)

    Temp

    ératu

    re (0

    0 )

    Température (00)

  • Tableau 1 : Valeurs des coefficients de l’analyse par régression linéaire

    24 janvier 2001 au 13 juillet 2001

    COEFFICIENT ESTIMATION ÉCART LIMITE LIMITETYPE SUPÉRIEURE INFÉRIEURE

    a0 –0,0225 3,14 e–04 –0,0219 –0,0231

    a1 0,00509 2,29 e–05 0,00514 0,00504

    I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 9

    l’équation 1. On peut vérifier que les coefficientsde régression ne sont pas nuls sur un intervalle deconfiance de plus de 97,7 %.

    Sur la figure 5, on peut comparer les prévi-sions du modèle obtenu par l’analyse de régres-sion et les valeurs mesurées entre le 24 janvier2001 et le 6 mai 2002. On constate que le mo-dèle suit de manière satisfaisante la flèchemesurée, et qu’il semble approprié à la fois pourexpliquer et prédire le souffle de cette fissure.

    On peut vérifier la validité du modèle établien analysant statistiquement les résidus de l’ex-traction des prévisions du modèle bivariate. Lamoyenne m et l’écart-type s des résidus «(t)s’élève à –0,00327 mm et 0,01817 mmrespectivement. À partir de ces valeurs, on peutcalculer les résidus centrés réduits (RCR) à l’aidede l’équation suivante :

    RCR =«(t) – µ

    s (2)

    On a représenté sur la figure 6 la variationdes RCR en fonction du temps. Si le modèle estsatisfaisant, les RCR se trouvent compris dansl’intervalle ±2 et ne comportent pas d’effets destructure (Fauchoux, 1995). On voit sur la figure6 que les résidus ne s’écartent pas de plus dedeux écarts types de la valeurs moyenne, saufpour quelques exceptions. Des phénomènes deglissement et de blocage aux appuis peuventexpliquer ces faibles écarts (de l’ordre du cen-tième de millimètre) par rapport à la moyenne.

    Pour vérifier la normalité des résidus, on areprésenté sur la figure 7 la probabilité cumuléede ceux-ci en fonction des résidus eux-mêmes. Onremarquera l'échelle dite « normale » ou« gaussienne » de l’ordonnée. Sur une telgraphique, la probabilité cumulée des résidussera distribuée sur une droite (dite « de Henry »)si les résidus sont distribués suivant une loi deprobabilité normale. On observe que les résidussuivent une distribution normale, ce qui confirmela validité du modèle établi.

    Pour vérifier le caractère aléatoire des don-nées, on a calculé l’autocorrélation de la fonction

    Figure 7 : Droite de Henry des résidus

    Figure 6 : Résidus centrés réduits en fonction du temps 24 janvier 2001 au 13 juillet 2001

    temps

    4

    2

    O

    -2

    -4

    Résid

    us ce

    ntrés

    rédu

    its

    4

    2

    O

    -2

    -4

    99.9999.8

    98

    805020

    20.2

    0.01

    Dens

    ité d

    e pr

    obab

    ilité

    99.9999.898

    805020

    20.20.01

    -0.075 -0.05 -0.025 0.025 0.05 0.0750Résidus (mm)

    Figure 5 : Comparaison du souffle mesuré avec les prévisions du modèle 24 janvier 2001 au 6 mai 2002

    PrévisionsSouffle

    O.2

    O.1

    O

    –O.1

    –O.2

    Souff

    le (m

    m)

    O.2

    O.1

    O

    –O.1

    –O.2

    temps

    r 2 = 0,92

  • 1 0 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    représentant les résidus. On s’assure ainsi que lerésidu à un instant t1 donné n’est pas influencépar la valeur du résidu à un autre instant t2. Lesrésultats sont montrés sur la figure 8. Onconstate que les résidus sont faiblement corrélésentre eux, ce qui est souhaitable. À noter la fortecorrélation lorsque t1 égale 0 et t2 égale tf , cequi est conforme aux attentes.

    C O N C L U S I O N S E T R E C O M -M A N D A T I O N S

    Les analyses effectuées jusqu’à maintenantindiquent que les fissures instrumentées du pontde Saint-Marcel ne s’élargissent pas de manièrepermanente sous l’effet du trafic routier local. Lesdonnées relatives à la déformation des poutresseront analysées en suivant une procédure simi-laire à celle présentée ici pour les fissures.

    Ce programme de télésurveillance s’inscritdans le cadre général de la gestion des infra-structures routières, plus particulièrementde l’évaluation de la fiabilité des structuresexistantes. Des recherches sont actuellementeffectuées par le Ministère en collaboration avecle Laboratoire Central des Ponts et Chaussées deFrance et le département de génie civil del’Université Laval, pour étudier l’influence de laprésence d’un système de surveillance électron-ique sur l’indice de fiabilité à utiliser dans les cal-culs d’évaluation.

    R E M E R C I E M E N T S

    Des remerciements sincères sont adressés àMM. Jean-François Laflamme, ingénieur etMichel Ricard, technicien principal, pour leur pré-cieuse collaboration lors des travaux d’instrumen-tation et de collecte des données.

    B I B L I O G R A P H I E

    FAUCHOUX, G. « Analyse des résidus d’unerégression linéaire appliquée à la surveillancemétrologique des Ouvrages d’Art », Bulletinde liaison du Laboratoire des Ponts etChaussées – 200, novembre-décembre1995.

    GAILLET, O. et MASSICOTTE, B. « Déterminationdes longueur de développement des barreslisses pour l’évaluation des ponts existants »,Quatrième colloque sur la progression de larecherche québécoise sur les ouvrages d’art,avril 1997.

    LCPC. « Auscultation, Surveillance renforcée,Haute surveillance, Mesures de sécuritéimmédiate ou de Sauvegarde », Instructiontechnique pour la surveillance et l’entretiendes ouvrages d’art – deuxième partie,Ministère de l’Équipement, des Transports etdu Logement, France, 1998.

    MINOR, J. et WHITE, K. R. « Condition Surveys ofConcrete Bridge Components – User’sManual », NCHRP report 312, TransportationResearch Board, décembre 1988.

    Figure 8 : Autocorrélation des résidus

    1

    0.6

    0.2

    -0.2

    -0.6

    -1

    1

    0.6

    0.2

    -0.2

    -0.6

    -1

    Autoc

    orré

    lation

    des

    résid

    us

    temps

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 1 1

    La géomatique est un domaine qui fait appelaux sciences, aux technologies de mesure de laterre ainsi qu’aux technologies de l'informationpour faciliter l'acquisition, le traitement et la ges-tion des données sur le territoire (ou « donnéesgéographiques »).2 Ce domaine, qui succède auxsciences géodésiques (géodésie, arpentage,hydrographie), à la cartographie (photogram-métrie, cartographie générale ou thématique) età la gestion et au droit foncier, regroupe l’ensem-ble des connaissances et des technologies néces-saires à la production et à la gestion cohérentedes données numériques décrivant le territoire etses ressources.

    U N E N O U V E L L E F A Ç O N D EF A I R E

    Au cours des dernières décennies, le domainede la géomatique a connu une évolution impor-tante grâce au développement des technologiesde l’information. D’une part, ces technologies ontamené de nouvelles façons de faire en gestion del’information à incidence territoriale. D’autrepart, la convergence des technologies offre main-tenant de nouvelles possibilités qui encouragentl’utilisation de la géomatique dans de nombreuxsecteurs (publicité, marketing, affaires, localisa-tion de véhicules, etc.).

    Grâce aux progrès de l’informatique, le pa-pier a rapidement fait place aux produitsnumériques, ce qui a du coup permis de décupler

    les possibilités de manipulation, d’analyse et dereprésentation. De plus, des logiciels plus convi-viaux offrent de multiples possibilités de con-signer des données d'inventaire et ils permettentla prise en charge par l’utilisateur d’une part si-gnificative des traitements.

    L'implantation de la géomatique dans uneorganisation comme le ministère des Transportsinfluence positivement un éventail de secteurs,que ce soit pour la collecte des données, pour lestravaux d’entretien des infrastructures routières,pour la planification des travaux en général, ouencore dans un contexte de partenariat oùl’échange d’information facilite la concertation.

    L ’ I N F R A S T R U C T U R E G É O G R A P H I Q U E D U M T Q

    Au milieu des années 90, le Service de lagéomatique entreprenait la réalisation d’unebase géographique numérique couvrant tout le

    territoire de l’écoumène du Québec, dans le butde moderniser ses processus de production de lacartographie officielle des infrastructures de trans-port.

    En 1997, le ministère des Transports possé-dait donc une base géographique numérique(BGN) à l'échelle 1 :250 000 qui répondait auxbesoins généraux de représentation car-tographique. Toutefois, la précision de lareprésentation géographique ne pouvait rendrecompte de certains éléments du réseau routiertelles les routes à chaussées séparées ou lesbretelles d'autoroute.

    En réponse à cette problématique, le Servicede la géomatique transformait graduellement laBGN en une base géographique multiéchelle en yintégrant, pour les secteurs les plus urbanisés,des données numériques de meilleure précisionacquises auprès de divers fournisseurs. Par souciconstant de posséder des données toujours plus

    DOSSIER

    LA GÉOMATIQUE AU MINISTÈRE DES TRANSPORTS

    Par Sylvie Laroche, Pierre Lessard, Claude Lavoie, Marc Ferland et Yannick Leduc, Service de la géomatique1

    Figure 1 : La base géographique multiéchelle résultant de l’intégration des levés GPS

    1. Les auteurs de l’article font partie de l’équipe du Service de la géomatique du ministère des Transports du Québec. En plus de ses activités de production cartographique, cetteunité agit depuis plusieurs années comme intégrateur des données géographiques et elle en assure la diffusion dans l’organisation et auprès des partenaires du Ministère. Elleagit non seulement à titre de coordonnateur du développement de la géomatique au MTQ, mais elle est également le principal représentant du Ministère auprès des autresministères et organismes.

    2. Université Laval, faculté de foresterie et géomatique, http://geomatique.scg.ulaval.ca

  • 1 2 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    précises et à jour, le MTQ a entrepris la réalisationdes relevés GPS (Global Positioning System) duréseau routier dont il assume la gestion. La figure1 montre l'amélioration qui en résulte sur le plancartographique.

    D E S A P P L I C A T I O N SI N T É R E S S A N T E S

    Les applications géomatiques sont main-tenant intégrées dans de nombreuses activités duMinistère. Combinées aux technologies de cap-tage vidéo et laser, elles permettent de réaliser,entre autres activités, l’inventaire et la reconnais-sance automatique des panneaux de signalisa-tion et l’auscultation des chaussées, la gestion etla diffusion des plans d’arpentage, la planificationet le contrôle des opérations de déneigementainsi que la diffusion des informations sur l’étatdes routes, la circulation routière et les travauxroutiers. Le nombre d'applications et l'éventaildes outils augmentent de façon exponentielle, etleurs fonctionnalités évoluent vers un niveau deraffinement sans précédent. En modélisation dessystèmes de transport, les besoins d'analyse spa-tiale sont à l'origine d'une panoplie de fonction-nalités qui ont forgé les systèmes d'informationgéographique tels que nous les connaissonsaujourd'hui. En gestion d'inventaire, l'utilisationde la localisation par référence linéaire a amenéle développement d'outils permettant de faire laconversion entre cette méthode de localisation etla localisation par coordonnées géographiques,dans le but de représenter sur une carte la posi-tion des éléments inventoriés. Dans les applica-tions d'aide à la décision, la géomatique a cer-tainement joué un rôle déterminant dans le traite-ment d'information ayant pour but d'orienter desinterventions, que ce soit pour des interventionsd'urgence ou pour la planification à long terme.

    L E S P R O J E T S D ER E C H E R C H E

    L’application des nouvelles technologies pourl’acquisition de données est un domaine promet-teur qui a le potentiel de faciliter la mise en place

    pour le projet. Ce dernier consistait à mettre aupoint un outil d’analyse flexible et performant quipermette d’obtenir une vue d’ensemble deslacunes du réseau routier, d’évaluer les budgetsnécessaires pour exécuter les travaux qui s’im-posent, de faire le bilan des travaux déjà effec-tués et de comparer les scénarios possibles selonl’approche de la gestion par résultats3. Cetteexpérimentation du jumelage des technologiesSIG et OLAP pourrait tracer la voie dans le choixde l’outil à utiliser pour l’exploitation des don-nées de l’entrepôt ministériel informationnel,sous toutes ses dimensions.

    Enfin, le portefeuille des projets de rechercheen géomatique à l’extérieur du Ministère estégalement important et le Ministère y participe àplusieurs niveaux. Ainsi, par sa participationfinancière à différentes activités de recherche, il aacquis le statut d’organisme affilié au réseauGEOIDE. Ce réseau d'excellence regroupe desorganismes publics et privés, de tout le Canada,qui œuvrent dans le domaine des sciences géo-matiques. Ces activités de recherche qui portentsur la géographie, la géomatique, l'aménage-ment du territoire, la planification des transports,les systèmes de transport intelligents, ainsi quesur l'industrie du matériel et du logiciel spécialisérejoignent de nombreuses préoccupations duMinistère. Preuve du dynamisme du Québec dansle domaine de la géomatique, la gestion duréseau GEOIDE a été confiée par les partenairescanadiens à l'Université Laval.

    L A C O N F I G U R A T I O N D ’ U N ES O L U T I O N A D M I N I S T R A -T I V E E T I N F O R M A T I Q U E( S A I ) : U N E R É F L E X I O NM I N I S T É R I E L L E

    À la suite des différents travaux, le Comité surl'efficience des activités d'arpentage et de locali-sation recommandait l'utilisation de la représen-tation à référence spatiale comme moyen delocalisation des diverses composantes de son

    d’information intégrée sur les réseaux de trans-port. À titre d’exemple, la vidéographie aériennemultispectrale a permis d’effectuer, à partir d’unprototype, la collecte de données environnemen-tales sur la végétation dans le corridor de l’au-toroute 40, de Montréal à Québec. L’analysesocioéconomique n’est pas en reste : on y recourtégalement à la géomatique dans le cadre desactivités du Ministère. En effet, des projets derecherche ont permis de définir les spécificationsnécessaires à l’utilisation des données deStatistique Canada dans l’analyse des probléma-tiques en transport, comme par exemple dans laspatialisation des usagers des différents réseauxde transport ou dans les modèles de prévision dela demande en transport. Le produit SELEXTRACTa permis d’intégrer, dans un environnement géo-matique accessible à tous, un outil de sélection etd’agrégation des données des différents recense-ments de Statistique Canada.

    Un autre projet visait à mettre au point unmodèle de données qui réponde aux besoins par-ticuliers du Ministère en matière de position-nement linéaire. Les conclusions du projet ontpermis de définir certains principes qui ont étérepris quelques années plus tard lors de la con-ception du système de la base géographiqueroutière (BGR).

    De plus, la mise au point d’algorithmes degénéralisation de données géographiquesnumériques s’ajoute aux sujets de recherche quiont été privilégiés ces dernières années. Outre lasimplification de la gestion de l’infrastructuregéographique de l’organisation, l’utilisation deces algorithmes permet de satisfaire les besoinsd’une plus large clientèle.

    Par ailleurs, les possibilités d’analyse desproblèmes liés à la géométrie des infrastructuresroutières ayant une incidence sur la sécurité et lamobilité ont récemment été explorées. L’aided’un logiciel d’analyse multidimensionnelle OLAP(OnLine Analytical Processing) et d’un systèmed’information géographique (SIG) a été sollicitée

    3. Plante, Simon. Développement et expérimentation d’un outil d’analyse SIG-OLAP. Géo-info, novembre- décem-bre 2001, http://www.pggq.gouv.qc.ca

  • et exactes aura des effets déterminants surl’ensemble des processus de travail en gestionroutière, tant pour ce qui est de la planificationstratégique que des opérations relatives à la pro-grammation, à l’exploitation et à l’entretien ainsiqu’à la mise à jour de l’inventaire. La réalisationcoordonnée de ces projets assurera une intégra-tion cohérente des divers aspects de la gestion del'information à référence spatiale.

    L E S P R O J E T S M E N É S ÀT E R M E À C E J O U R

    Des sept projets initiaux, trois sont main-tenant terminés. Le projet Intégration tech-nologique de la géomatique a permis de définirl’environnement technologique de la géomatiqueau Ministère, soit les outils servant à la concep-tion et à la réalisation des systèmes ministériels,la base de données à référence spatiale ainsi quele volet diffusion et gestion des données. Le pro-jet Formation d’un groupe responsable des don-nées ministérielles s’est quant à lui terminé par lacréation d’une nouvelle unité administrativeayant aujourd’hui la responsabilité d’élaborer un

    réseau routier. La solution administrative et infor-matique (SAI) pour la géomatique a été élaboréeau cours de l’année 1997. L’objectif était deconcevoir, dans une approche intégrée, l’organi-sation du travail, les technologies, les données,les traitements et la gestion par les utilisateurs.Bien que la plupart des projets géomatiques missur pied antérieurement concernaient principale-ment la gestion routière, la SAI Géomatique acomme objectif de répondre à des préoccupationsplus générales en matière de transport, en in-cluant tous les modes4.

    Dans le cadre de la mise en œuvre de la SAI,un ensemble de projets a été élaboré pour nor-maliser la définition, la collecte, la qualité, lasaisie et la mise à jour des données.L’incohérence et la difficulté d’intégration entreles bases de données ainsi que le manqued’outils conviviaux pour l’analyse, la prise dedécision et la représentation cartographique ontaussi été identifiés comme des problématiques àrésoudre.

    La possibilité d’avoir accès à des donnéesgéographiques numériques cohérentes, précises

    I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 1 3

    cadre de gestion de l’information ministérielle etde concevoir et réaliser un entrepôt de donnéesinformationnelles. Enfin, le projet Système degestion des chaussées a permis de mettre enplace des équipements spécialisés de collected’information sur l’état des chaussées et de nor-maliser la méthodologie de la collecte.L’introduction d’un progiciel permet maintenantd’élaborer une stratégie pluriannuelle de travauxsur le réseau routier et d’évaluer divers scénariosd’investissements basés sur l’évolution de l’étatdes chaussées.

    L A P O R T É E D E S P R O J E T SE N C O U R S

    Quatre autres projets, actuellement dans dif-férentes phases de développement, auront d’im-portantes répercussions sur les façons de faire denotre organisation au cours des prochainesannées. Ils répondent aux attentes de l’organisa-tion en ce qui concerne l’accessibilité des don-nées et les outils conviviaux de consultation et dereprésentation cartographique, tout en facilitantles échanges tant entre le personnel qu’avec lespartenaires. Ils sont décrits plus en détail dans lespages qui suivent.

    L E S Y S T È M E D E L A B A S EG É O G R A P H I Q U E R O U T I È R E

    L’objectif principal du système de la base géo-graphique routière (BGR) est de regrouper et dediffuser l’information relative à la géométrie duréseau routier, la localisation des infrastructuresdes autres modes de transport ainsi que ledécoupage administratif et géopolitique. La figure2 présente la partition fonctionnelle des dif-férentes facettes de données gérées par la BGR.

    Le système facilitera le processus de gestiondu réseau routier par la mise en place de nou-velles méthodes de travail utilisant la représenta-tion spatiale de l’information. Le système per-mettra également de simplifier l’intégration desrelevés qui sont faits régulièrement sur les dif-férents réseaux de transport partout au Québec.

    Figure 2 : Découpage fonctionnel du système BGR

    4. Ministère des Transports du Québec, Rapport du Comité de configuration de la SAI Géomatique, novembre 1997.

  • 1 4 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    Le personnel situé autant en région que dansles unités centrales pourra accéder au systèmepar le Web, à partir d’une interface conviviale.L’utilisateur pourra consulter, importer etimprimer des cartes et des rapports. Il pourrafaire des recherches sur la base de données etgéocoder ses propres données. Le système facili-tera la gestion du sectionnement du réseau rou-tier ainsi que la mise à jour de la géométrie desroutes. La figure 3 donne un aperçu de l’interfaceutilisée pour la consultation des données du sys-tème BGR.

    Le système BGR est donc appelé à devenirl’élément central de la gestion de l’information àréférence spatiale au Ministère. Comme le ditl’adage, « une image vaut mille mots » ; doréna-vant la carte interactive sur le Web constituera lenouveau standard en fait d’outil de travail pourles spécialistes et les gestionnaires du Ministère.

    L E S Y S T È M E D ’ I N V E N T A I R ED E S I N F R A S T R U C T U R E SR O U T I È R E S D E T R A N S P O R T

    L’objectif principal du système d’inventairedes infrastructures routières (IIT) est de fournir aupersonnel du Ministère un outil géomatique inter-actif et convivial pour faciliter la planification et la

    réalisation des travaux sur le réseau routier. Enplus de fournir une vision globale de l’inventairedes éléments d’infrastructures, le système IIToffrira des fonctionnalités d’actualisation de l’in-ventaire et alimentera les systèmes d’entretien,de conservation, d’évaluation, de contrôle et dedéveloppement du réseau routier. Il localisera leséléments d’infrastructures, en fonction des coor-données géographiques ou d’une localisationrelative (Route-Tronçon-Section-Chaînage).

    Actuellement à l’étape de la révision d’archi-tecture, le système devrait en être à l’étape de laréalisation à l’automne 2002, et livré 12 moisplus tard. Un des enjeux majeurs pour tirer avan-tage du nouveau système est la mise à niveaudes données d’inventaire – ces travaux sont doncà l’étape de la planification et des guides pour lacollecte des données sont en préparation.

    L A R É V I S I O N D E S R È G L E S D E S E C T I O N N E M E N T E T L AM É T H O D O L O G I E P O U R L A N U M É R I S A T I O N D EL ' I N V E N T A I R E

    La révision des règles de sectionnement apermis de confirmer la nécessité d’utiliser le sys-tème de référence linéaire actuellement en usage

    au Ministère et d’adapter les règles actuelles aunouveau contexte technique et opérationnel.L’objectif de ce volet est d’assurer la stabilité dela segmentation du réseau et de faciliter lerepérage efficace pour l’usager sur le terrain.

    Le second volet a permis de définir uneméthodologie pour la numérisation du réseauroutier et de produire des guides de référencedocumentant la procédure de mise à jour de lamorphologie du réseau routier supérieur selon lesnormes établies. L’intégration de l’informationdans le système BGR est ainsi simplifiée et assurela cohérence sur l’ensemble du territoire québé-cois, ce qui facilite les échanges avec les dif-férents partenaires.

    Il reste à ce jour à compléter la normalisationdes méthodes de collecte des éléments d'inven-taire qui alimenteront le futur système d’inven-taire des infrastructures routières.

    L ’ A R R I M A G E A V E C L E S S Y S T È M E S M I N I S T É R I E L S( M I S E À N I V E A U )

    L’architecture globale de la géomatique auMinistère a été examinée attentivement dans lebut de définir une approche cohérente pour laconception des systèmes à portée ministérielleayant une composante géomatique. Une pre-mière analyse a permis de décrire les fonctionspartagées de traitement des données spatiales etde définir un concept de système d’interface géo-graphique commune pour favoriser l’accès àl’ensemble des systèmes ministériels (figure 4).

    Cette interface géographique commune per-mettra d’accéder directement à différents sys-tèmes opérationnels (inventaire routier,éclairage, signalisation, structures), ou encored’avoir accès de façon uniforme, à l’aide desmêmes outils, à de l’information générée pard’autres systèmes (ex. : entretien, gestion deschaussées).

    Figure 3 : Interface usager pour l’exploitation des données du système BGR

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 1 5

    Figure 4 : Concept du système d’interface géographique commune

    Figure 5 : Diversité et richesse de l’information de l’Administration5

    5. Plan Géomatique du Gouvernement du Québec, http://www.pggq.gouv.qc.ca

  • 1 6 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    L E C O N T E X T E G O U V E R N E M E N T A L E T L E S A C T I O N S À V E N I R

    Pour pouvoir accomplir sa mission, l’adminis-tration publique québécoise recueille, traite, pro-duit et stocke une quantité phénoménale de don-nées géographiques, et ce, pour chacune de sesmissions sectorielles. Cette information géo-graphique est générée par plusieurs ministèreset organismes. La figure 5 montre la diversité etla richesse de cette information gérée à l’échellede toute l’Administration.

    Le développement rapide de la géomatiqueet ses multiples applications dans différents mi-nistères et organismes ont conduit à une actionconcertée de coordination visant à canaliser et àorienter les initiatives et les investissementspublics en la matière. Le Plan géomatique dugouvernement du Québec (PGGQ) est le fruit decette action concertée. Il a comme principauxobjectifs de promouvoir de nouvelles formes degestion à l'aide de la géomatique, d’orienter lesinvestissements des ministères et organismespublics en matière de géomatique et de susciterla participation des producteurs pour satisfaire lademande des utilisateurs de la géomatique.

    Le but d’une telle concertation est notam-ment d’atteindre une plus grande cohérenceinformationnelle dans l’administration publique,chaque ministère et organisme devant rattacherl’information géographique qu’il recueille àl’ensemble des données qui constituent l’infra-structure géographique gouvernementale. La dif-fusion de cette information produite par les mi-nistères et organismes est également un objectifimportant car l’accès à l’information del’Administration permet de modéliser etd’analyser les relations spatiales entre les multi-ples faits humains, sociaux, économiques etnaturels. D'intérêt public, l’information géo-graphique doit être partagée entre les orga-nismes et ministères afin de mieux servir lasociété québécoise.

    Sur la scène gouvernementale, le ministèredes Transports est considéré comme un acteur depremier plan en géomatique. Il est donc concernéde très près par les différentes stratégies de pro-duction et de diffusion de l’information géo-graphique mises en place par le PGGQ. Outre lesprojets de développement géomatique majeursqui sont présentement en cours au Ministère(ex. : BGR, IIT), des projets de partenariat de pro-duction des données sur les réseaux de transportse dessinent avec d’autres ministères. Une fois àterme, ils permettront d’améliorer la cohérenceinformationnelle dans l’Administration.

    En parallèle, le Ministère est à concevoir unatlas interactif en transport qui sera publié sur leWeb au cours de la prochaine année afin de ren-dre accessible à la population l’information géo-graphique qu’il détient. Notons, à titre d’exem-ple, l’intérêt de la population pour l’état desroutes en période hivernale, la localisation destravaux routiers en période estivale, la classifica-tion du réseau routier, etc. Ces exemples nereprésentent qu’une partie de la richesse du pa-trimoine informationnel du Ministère et des pos-sibilités de diffusion qui sont offertes par les appli-cations géomatiques accessible sur le Web.

    À L ’ H E U R E D E L A C O N V E R -G E N C E

    La géomatique est un domaine où les inno-vations se succèdent à un rythme accéléré. Tantdu point de vue logiciel que matériel, on disposeaujourd’hui d’outils extrêmement perfectionnés :des ordinateurs portables plus petits, la commu-nication sans fil, des récepteurs GPS plus précis àcoût abordable, la reconnaissance vocale pour lasaisie de l’information, etc. Ces progrès ont per-mis à la géomatique de jouer le rôle de disciplineintégratrice de l’information au sein de nom-breuses organisations, et le Ministère n’échappepas à cette tendance.

    Au même titre que l’informatique au débutdes années 1980, la géomatique remet aujour-

    d’hui en question de manière radicale nos façonsde travailler. L’influence de l’Internet sur ledéveloppement de la géomatique offre unemeilleure disponibilité, en temps réel, de jeux dedonnées de taille croissante grâce à l’augmenta-tion de la bande passante et à la compression desdonnées. Ainsi, dans toutes les organisations, ladiffusion sur le Web s’avère une voie promet-teuse. Au Ministère, après la diffusion de la carteroutière du Québec6, on songe aussi à la mise enligne d’un géorépertoire accessible sur l’intranetministériel, à la diffusion d’itinéraires routiers surInternet, etc.

    Tant en ce qui concerne la technologie que lesdonnées, la géomatique est devenue un lieu deconvergence. La composante spatiale qui carac-térise souvent une donnée sert de dénominateurcommun permettant de mettre en relation lesinformations entre elles, de quelque nature quece soit, à partir de la carte. L’analyse spatiale etl’interaction qui existe entre ces données permet-tent souvent de dégager des corrélations spa-tiales qu’on ne pourrait soupçonner autrement.Cette convergence permet aussi d’entrevoir àmoyen terme le déploiement d’applications pluscomplexes, entre autres, dans le suivi desvéhicules et des marchandises relativement à lasécurité ou encore dans l’automatisation descommunications avec l’usager de la route (sys-tèmes de transport intelligents).

    Dans tout ce processus d’évolution tech-nologique et scientifique, le ministère desTransports est un chef de file dansl’Administration non seulement en ce qui con-cerne la production de données, mais égalementpar l’expertise qu’il a acquise dans la conceptiond’applications et dans l’adaptation de ses façonsde faire à la géomatique. Au cours des années àvenir, le défi consistera à mener à terme les pro-jets en cours, mais aussi à former le personnel àl’utilisation des nouveaux outils. La modificationharmonieuse de nos façons de faire est la clé dusuccès pour réussir le passage au 21e siècle enmatière de gestion des données géographiques.

    6. Ministère des Transports du Québec, http//www.mtq.gouv.qc.ca/carte_routiere/

  • C O N T E X T E

    La Politique de sécurité dans les transports,2001-2005, volet routier, fixe un objectifd’amélioration du bilan routier de 15 % d’ici lafin de 2005, par rapport à la moyenne desannées 1995 – 2000. Il s’agit d’un objectif col-lectif, et les actions à mettre en œuvre impliquentaussi bien le gouvernement que ses partenairesen sécurité routière, dont les services policiers, lesmunicipalités et le réseau de la santé publique.

    Au Québec, le réseau routier (excluant leschemins en milieu forestier) relève principale-ment de deux niveaux de gestion: le ministèredes Transports du Québec, qui assure l’entretiendes autoroutes et des principales routes de tran-sit, et les municipalités. Celles-ci gèrent 81 % dela longueur du réseau; les deux tiers de tous lesaccidents surviennent sur le réseau routier muni-cipal, et 40 % de ces accidents sont mortels.

    En 2001, sur le réseau des municipalités, oncomptait ainsi environ 230 accidents mortels et2240 accidents avec blessés graves. Le nombred’accidents est en baisse depuis plusieursdizaines d’années, malgré l’augmentation de lacirculation, mais ce sont encore des chiffresélevés, et un ensemble de mesures s’imposepour atteindre l’objectif fixé dans la Politique.

    Plusieurs domaines peuvent être mis à profitpour améliorer la sécurité routière : l’aménage-ment et l’exploitation des infrastructuresroutières, la surveillance policière ou les commu-nications. De plus, une piste prometteuse résidedans l’intégration de la sécurité routière à cer-taines politiques, plus globales, des municipa-lités, comme l’aménagement du territoire. Eneffet, les choix en matière d’organisation de

    l’espace, d’urbanisme et de gestion des déplace-ments ont des répercussions sur la sécuritéroutière. Une telle démarche permet d’agir defaçon préventive et durable.

    Les principaux documents d’urbanisme sontle schéma d’aménagement, élaboré par la muni-cipalité régionale de comté (MRC), le plan d’ur-banisme et les règlements d’urbanisme, sous laresponsabilité des municipalités. Leur contenu estdéfini par la Loi sur l’aménagement et l’urba-nisme. Ainsi, en matière de transport terrestre,les schémas d’aménagement doivent indiquer lesinfrastructures et équipements importants quiexistent, ainsi que les principales améliorations àapporter, compte tenu du caractère adéquat ounon des infrastructures en place et de la demandeprévisible. La loi n’impose aucun objectif ou con-tenu relatif à la sécurité des déplacements. Lesdocuments d’urbanisme sont actuellement enrévision, ce qui donne lieu à une réflexion de fondsur l’ensemble de leur contenu.

    O B J E C T I F S

    La recherche en cours vise à explorer les liensentre urbanisme, déplacements et sécuritéroutière, et à montrer de quelle façon la sécuritéroutière pourrait être intégrée dans les documentsd’urbanisme. Une analyse d’une trentaine deschémas d’aménagement a été effectuée, à dif-férents stades de la révision, pour dégager lesprincipaux éléments actuellement proposés parles MRC dans cette perspective. Les rechercheseffectuées à l’étranger ont également été misesà profit pour déterminer quelles dispositions pour-raient adopter les MRC ou les municipalités. Cetexte présente les premiers résultats obtenus.

    P R E M I E R S R É S U L T A T S

    Le thème de la sécurité routière n’est pastraité de façon approfondie dans les schémasd’aménagement étudiés. Ceux-ci contiennentcependant de nombreux éléments qui peuventcontribuer à améliorer la sécurité routière et àprévenir les risques d’accidents.

    D I A G N O S T I C D E S É C U R I T ÉR O U T I È R E

    Les schémas d’aménagement étudiés font leplus souvent état de certains constats en matièrede sécurité routière. Ceux-ci portent générale-ment sur des tronçons présentant des problèmesde sécurité actuels ou potentiels : tronçons deroutes de transit en milieu rural le long desquelsl’urbanisation linéaire a entraîné une multiplica-tion des accès, traversées d’agglomération,secteurs de congestion.

    Certaines MRC reprennent également desconclusions du plan de transport dans leur région,en matière de sécurité. Un diagnostic del’ensemble du territoire, reposant sur des don-nées statistiques, permettrait par ailleurs de fairedes choix plus judicieux en matière d’aménage-ment.

    O B J E C T I F S

    Tous les schémas d’aménagement étudiésfixent des objectifs en matière de sécuritéroutière ou de circulation; ceux-ci sont le plus sou-vent de nature très générale (améliorer la circu-lation et la sécurité routière), et gagneraient àêtre plus concrets. Des objectifs d’amélioration de

    I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 1 7

    dans les transportsSécurité

    SÉCURITÉ ROUTIÈRE ET PLANIFICATION DU TERRITOIRE

    Par Catherine Berthod, ing., urb., Direction de la sécurité en transport

  • 1 8 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    la sécurité routière quantifiables permettraientégalement de rallier les acteurs autour desmesures adoptées.

    H I É R A R C H I E D U R É S E A UR O U T I E R

    La hiérarchie du réseau routier est un élémentde base de la planification du territoire et desinterventions en matière de sécurité. Une bonnehiérarchie permet d’assurer une cohérence entrel’usage des voies, les usages existants ou prévusaux abords et les caractéristiques physiques.Certains choix d’aménagement peuvent êtremodulés en fonction de la hiérarchie : usages,lotissement, marge de recul, accès, réseau decamionnage, réseau cyclable, réseau piéton, sta-tionnement sur rue, etc.

    En général, les MRC reprennent la classifica-tion fonctionnelle établie par le Ministère(autoroutes, routes nationales, régionales et col-lectrices) et ne hiérarchisent ainsi qu’une petitepartie du réseau routier (qui correspond cepen-dant au réseau le plus fréquenté). Quelques-unesseulement établissent aussi une classification duréseau sous la responsabilité des municipalités.

    C O N C E P T D ’ O R G A N I S A T I O NS P A T I A L E

    Le concept d’organisation spatiale, avec ladélimitation des grandes affectations et despérimètres d’urbanisation, permet d’appuyer leschoix en matière de gestion des déplacements.En effet, la localisation des nouvelles zones d’ur-banisation a des répercussions sur le choix desmodes de transport et le volume des déplace-ments, et par conséquent sur leurs conditions desécurité. La diminution de l’utilisation de l’auto-mobile améliore les conditions de sécurité del’ensemble des déplacements.

    En général, les concepts d’organisation spa-tiale adoptés par les MRC sont basés sur unestructure polaire (pôles principaux, secondaires,

    axes structurants) ; les exemples d’articulationavec les déplacements sont peu fréquents. Onpeut citer les suivants :

    • localiser les pôles en fonction de leur dessertepar les équipements de transport routier etautres modes ;

    • dans une MRC à caractère rural, privilégier lesactivités d’envergure régionale génératricesde déplacements dans le pôle, bien desservipar le réseau routier et d’autres modes detransport, plutôt que dans les petits noyauxvillageois ou le long d’une route de transit ;

    • délimiter les zones industrielles importantesselon des critères liés à l’efficacité du réseauroutier (par exemple, la facilité d’accès auréseau autoroutier ou supérieur) ;

    • exiger une étude de circulation avant d’au-toriser de grands projets le long des routes ;

    • privilégier l’extension urbaine dans dessecteurs où les effets sur le réseau routierseront moindres et pour favoriser les solutionsde rechange en transport dans de bonnesconditions de sécurité (transport en commun,réseaux cyclables et piétonniers) ;

    • favoriser les secteurs résidentiels ou commer-ciaux denses le long des lignes de transporten commun ou à proximité des stationsimportantes afin de faciliter les déplacementspiétons ;

    • limiter l’étalement urbain par une définitionadéquate des périmètres d’urbanisation.

    T R A M E S U R B A I N E S

    Dans la conception des nouveaux quartiersrésidentiels, il est possible de favoriser desmoyens de transport autres que l’automobileainsi que des vitesses modérées. La hiérarchiedes voies et de leurs raccordements, le tracé et lalargeur des rues sont autant d’éléments qui ontune influence sur les choix en matière de déplace-ments et sur le comportement des conducteurs.

    Certains schémas d’aménagement compor-

    tent par ailleurs des dispositions concernant lesnouvelles intersections : réduire le nombre denouvelles intersections avec le réseau routiersupérieur, prévoir un espacement minimal entreles intersections (300 à 400 mètres), assurer ladesserte de tout nouveau secteur résidentiel parune rue collectrice.

    U S A G E S L E L O N G D E SR O U T E S

    Les usages autorisés sur les terrains le longdes routes déterminent l’ampleur de la vie localeet le type d’usagers qui vont les utiliser. Cesusages doivent être compatibles avec la hiérar-chie et la vocation que l’on donne à la route :réseau de camionnage, réseau cyclable, axe detransport en commun, etc. Par exemple, laprésence de résidences le long d’une routenationale en milieu rural signifie l’arrêt éventueld’autobus scolaires ou la présence de piétons etcyclistes, qui peuvent être en conflit avec lesvéhicules et camions en transit.

    G E S T I O N D E S A C C È S L EL O N G D E S R O U T E S

    La multiplication des accès le long d’uneroute de transit sur laquelle la limite de vitesseest élevée (70 ou 90 km/h) augmente le nom-bre de manœuvres de virage et les risques deconflits ; cette situation peut être observée lelong d’une partie significative du réseau routierdu Québec. Toutefois, grâce à la sensibilisationfaite auprès des municipalités et MRC depuis unedizaine d’années, la majorité des schémasd’aménagement traitent maintenant de la ges-tion des accès : les problèmes de sécurité sontrelevés, des objectifs sont adoptés, des mesuressont incluses dans le schéma ou dans le docu-ment complémentaire.

    Les mesures les plus fréquentes sont unelargeur minimale de lot et une superficie mini-male à respecter lors du morcellement d’un ter-rain le long d’une route de transit. Conjuguées àune norme limitant le nombre d’accès par lot, ces

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 1 9

    dispositions (principalement la largeur minimale)assurent que les nouveaux accès resteront suf-fisamment espacés. Il est cependant nécessaireque cette norme minimale soit suffisammentélevée pour obtenir une certaine efficacité sur leplan de la gestion des accès, et qu’elle soitincluse dans le document complémentaire pourqu’elle puisse s’appliquer dans toutes les munici-palités; quelques MRC seulement adoptent deslargeurs minimales de 100 ou 150 mètres lelong des tronçons les plus sensibles.

    En s’inspirant des Normes du Ministère,plusieurs MRC fixent également des normes oudes critères d’aménagement des accès (largeur,rayons de courbure, espacement minimal avecune intersection, aménagement paysager, critèrepour que les manœuvres d’entrée et sortie sefassent en marche avant, etc.).

    Enfin, d’autres MRC prévoient que, le long duréseau routier supérieur, les permis de construc-tion et de lotissement ne seront accordés que sile requérant a obtenu le permis d’accès délivrépar le Ministère ou un avis écrit. Cette dispositionfacilite les discussions entre le Ministère, lesmunicipalités et la population, et assure une cer-taine cohérence dans les décisions.

    P A Y S A G E

    Toutes les MRC tiennent compte du paysagedans leurs schémas, notamment par la définitionde sites d’intérêt, de corridors routierspanoramiques ou de points de vue à préserver.Un cadre normatif ou des critères d’aménage-ment sont généralement intégrés au documentcomplémentaire. Les préoccupations sont souventde nature esthétique, mais les mesures adoptéesprésentent également des avantages pour lasécurité routière.

    En effet, la densité des constructions, lamarge de recul, l’affichage, les aménagementspaysagers sont autant d’éléments perçus par lesconducteurs et qui pourront avoir une influencesur leur comportement. Ainsi, une différence mar-

    quée entre les milieux urbain et rural permetd’aménager des portes d’entrée et d’amener lesconducteurs à réduire leur vitesse et à tenircompte des usagers vulnérables une fois dans lemilieu urbain. Un affichage commercial bien con-trôlé réduit la distraction des conducteurs. Labande boisée que plusieurs MRC exigent de con-server le long des chemins publics peut servir debrise vent et réduire les effets néfastes de lapoudrerie en hiver.

    C O N C L U S I O N

    L’analyse de différents schémas d’aménage-ment révisés révèle des éléments novateurs etdes pistes de solution pour favoriser la sécuritéroutière. La sécurité routière, et les transports engénéral, ne sont cependant pas encore complète-ment intégrés dans la planification du territoire. Ils’agit souvent d’un volet à part, orienté vers lesinfrastructures routières plutôt que vers lesdéplacements (la sécurité routière est souventutilisée comme argument pour justifier destravaux d’amélioration des infrastructures), sansréflexion d’ensemble sur les liens avec l’amé-nagement du territoire.

    Les résultats obtenus à ce jour dépendentbeaucoup du degré de sensibilisation de chacunlocalement, élu, aménagiste, ingénieur, policier,etc. Il est donc nécessaire de mieux diffuser lesrésultats des recherches dans le domaine et desensibiliser les acteurs; un guide à cet effet est enpréparation. De bons exemples existent :plusieurs municipalités et MRC ont reçu un prixSécurité routière de l’Association québécoise dutransport et des routes pour un document d’ur-banisme.

    La recherche doit encore être poursuivie, à dif-férents niveaux. Ainsi, les effets des choix d’amé-nagement sur la sécurité routière sont souventindirects, à long terme, et difficiles à mesurer ;une méthodologie devra être définie. Il faudraégalement préciser à quel niveau il faut agir :schéma d’aménagement, plan d’urbanisme,règlements municipaux. L’exercice de révision

    des schémas d’aménagement est bien engagé ;en janvier 2002, 23 schémas révisés étaient envigueur. La prochaine étape de révision touche lesplans d’urbanisme des municipalités, et c’est uneéchelle à laquelle la sécurité routière se traite trèsbien. Il faudra par ailleurs distinguer la situationdes MRC de type rural, très différente de celle desMRC de type urbain.

    L’inventaire réalisé a permis de dégagerplusieurs mesures novatrices. Afin de faciliter leuradoption par d’autres MRC ou municipalités, lecadre légal devra sans doute être ajusté. Lechantier sur l’instrumentation, lancé par la mi-nistre des Affaires municipales et de la Métropoleen 1999, permettra d’actualiser et d’améliorerles instruments mis à la disposition des munici-palités et des MRC en matière d’aménagementet d’urbanisme.

    De meilleures connaissances sur les relationsentre urbanisme et sécurité routière permettrontaux MRC et aux municipalités de prendre desdécisions plus appropriées dans leurs documentsd’urbanisme, et ainsi de contribuer à l’atteintedes objectifs énoncés dans la Politique de sécuritédans les transports et à l’amélioration de la sécu-rité routière.

    La démarche implique un partenariat accruentre, d’une part, les responsables de la planifi-cation de l’aménagement du territoire au seindes municipalités et des MRC et, d’autre part, lesgestionnaires des réseaux routiers, soit les muni-cipalités et le ministère des Transports. Le fait queles élus et les spécialistes concernés soient sensi-bilisés à la sécurité routière facilitera sa mise enœuvre.

  • 2 0 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    I N T R O D U C T I O N

    L’idée d’appliquer une longue période degarantie à des travaux de construction n’est pasnouvelle. Dès l’époque Romaine, les entrepre-neurs de travaux publics devaient assumer durantquinze ans la réparation des dommages auxouvrages qu’ils avaient construits. Dans l’anciendroit français, cette responsabilité était de dix anset ce n’est qu’en 1927 que le Code civil duQuébec l’a ramenée à cinq ans pour la « perte »de l’ouvrage, c’est-à-dire toute détériorationmajeure d’un ouvrage qui en affecte la solidité oul’intégrité et qui résulte d’un vice de conceptionou de réalisation des travaux ou d’un vice du sol[1] [2].

    Or, si la garantie de 10 ans du présent projetn’est pas un concept totalement nouveau quantà sa durée, son application à un devis de perfor-mance de chaussée peut être considérée commerelativement hardie en raison de la multitude defacteurs pouvant causer une détérioration pré-maturée de l’état de la chaussée pendant cettepériode. Il nous a donc semblé opportun, six ansaprès sa mise en service, de faire le point sur ledéroulement de l’application de cette garantieainsi que sur l’évolution de l’état de la chaussée,afin d’obtenir une indication de son comporte-ment futur.

    P R É S E N T A T I O N D U P R O J E T

    L’Autoroute 40 dans le secteur de la munici-palité de Vaudreuil-Dorion est une route en bétonà chaussées séparées comportant trois voies decirculation par direction. Le débit de circulationjournalier moyen annuel (DJMA) était de 59 000véhicules en 1994 et la proportion de véhiculeslourds atteignait 16 %. Comme ce secteur fait

    partie de l’axe principal de déplacement desmarchandises du Québec vers l’Ontario, notreprincipal marché d’exportation, les camions ysont particulièrement chargés.

    Construite en 1966, cette chaussée en bétonétait devenue très fissurée (figure 1), et l’uni trèspauvre. Elle avait atteint la fin de sa durée de vieutile, à cause notamment des importantes sollici-tations par les véhicules lourds, du drainageinadéquat de la fondation ainsi que des pro-blèmes caractéristiques des joints des dalleslongues armées d’un treillis métallique.

    Au moment où un projet de réfection majeuredevenait nécessaire sur cette route, un pro-gramme fut mis sur pied au ministère desTransports du Québec pour favoriser l’introductiond’innovations techniques par les entreprises deconstruction routière. Ce programme consistait àlancer un certain nombre d’appels de propositionspermettant aux entreprises de soumettre dessolutions innovatrices pour résoudre divers pro-blèmes touchant les chaussées et structures. Lesbuts visés étaient :

    • la mise au point de nouvelles techniques deréhabilitation routière ;

    • l’adaptation aux conditions québécoises des techniques et méthodes conçues àl’étranger ;

    • l’accroissement du potentiel technologiquedes firmes québécoises d’ingénierie ;

    • la définition d’une méthode administrativefavorisant le recours à l’expertise des entre-prises ;

    • la diversification de la connaissance et del’expérience des spécialistes du Ministère.

    D E V I S D ’ A P P E L D ’ O F F R E S

    En 1994, un appel d’offres de type concep-tion-réalisation incluant une clause de garantie deperformance a été lancé pour la réfection d’untronçon de 5,5 kilomètres de la chaussée endirection ouest de l’Autoroute 40.

    Outre les exigences relatives au maintien dela circulation pendant les travaux, les documentsd’appel d’offres incluaient les plans de lachaussée existante, la description des sondageset des carottes prélevées, les résultats d’essais derésistance en compression et des analyses desols, la cartographie des défauts, les résultatsbruts d’essais de déflexion FWD (Falling WeightDeflectometer), la profilométrie, les relevésd’adhérence SCRIM (Sideways Force CoefficientRoutine Investigation Machine), les données sta-tistiques de variation horaire de la circulation,l’ECAS (équivalent de charge axiale simple)rigide et souple estimé par année, ainsi que letaux d’accroissement prévu de la circulation.

    La garantie d’entretien exigée devait êtresous la forme d’un cautionnement d’entretiend’une valeur égale à 50 % de la somme du

    PROJET AVEC GARANTIE DE PERFORMANCE DE 10 ANS SUR L’A-40 À VAUDREUIL : BILAN APRÈS 6 ANS

    Bertrand Cormier, ing. Direction de l’Ouest-de-la-Montérégie

    Denis Thébeau, ing. Direction du laboratoire des chaussées

    Figure 1 – Dégradations présentessur l’ancienne chaussée

  • I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2 2 1

    contrat et dont la durée devait correspondre à lapériode de garantie proposée par le soumission-naire. Les défauts couverts par la garantie sontles nids-de-poule, les pelades, les épaufrures, lesfissures, le colmatage des joints, l’orniérage,l’adhérence et l’uni. Les seuils et délais d’inter-vention pour chacun des défauts sont indiqués autableau 1, par tronçon de 100 mètres delongueur sur une voie de circulation. Étant donnéque la durée de la période de garantie n’était passpécifiée dans l’appel d’offres mais laissée auchoix de l’entreprise, les seuils d’intervention cor-respondent pour la plupart à des valeurs que l’onne devrait normalement observer que vers la finde la durée de vie utile de la chaussée. Le devisexigeait toutefois que la solution proposée soitdimensionnée structuralement pour au moins 20ans, afin d’assurer un bon comportement à longterme de la chaussée quelle que soit la périodede garantie.

    C H O I X D E L A P R O P O S I T I O N

    Les propositions étaient jugées sur les critèressuivants (pondérés sur 100 %) :

    • compétence, fiabilité et expérience de l’en-treprise (10 %) ;

    • qualité de la proposition (20 %) ;

    • caractère innovant de la proposition (15 %) ;

    • facilité d’exécution et contraintes d’utilisation(10 %) ;

    • augmentation prévue de la qualité globale dela chaussée à court et long terme (10 %) ;

    • période de garantie offerte (10 %) ;

    • coût global (25 %).

    Dix propositions ont été soumises par septconsortiums, les périodes de garantie proposées

    allant d’un minimum de 2 ans à un maximum de15 ans. Les six propositions en enrobé bitu-mineux comprenaient diverses techniques defragmentation ou de recyclage de la dalle exis-tante, en place ou en centrale, ou encore l’utili-sation d’une membrane anti-fissures, avant lapose d’enrobés bitumineux spéciaux (àl’amiante, à haut module, rugueux, drainant,dense, posé en une fois ou construit par étapes).Les quatre propositions en béton de cimentétaient essentiellement constituées de recouvre-ments en béton non collé et de reconstructiondans les secteurs où le dégagement vertical nepermettait pas le rehaussement du profil.Différents types de dalles ont été proposés : avecjoints goujonnés ou non selon les voies, de sec-tion trapézoïdale ou d’épaisseur constante,dimensionnement de 20 ans ou 30 ans, ouencore en béton armé continu avec armature gal-vanisée.

    La proposition gagnante fut un recouvrementen béton non collé de section transversale trapé-zoïdale (figure 2), dimensionné pour 20 ans etassorti d’une garantie de 10 ans, à un prix de4,2 millions de dollars.

    C O N C E P T I O N D U P R O J E T

    Ce projet consistait essentiellement à cons-truire une nouvelle dalle par-dessus la dalle exis-tante, qui avait été préalablement recouverted’une couche d’enrobé bitumineux de 25 mmd’épaisseur. Là où les vieilles dalles étaientbrisées en plusieurs morceaux, elles ont simple-ment été remplacées par du béton normal.

    La dalle existante a dû être excavée etreconstruite directement sur la fondation exis-tante dans quatre secteurs, sur une longueur dequelques centaines de mètres : aux deuxextrémités du projet pour le raccordement auxstructures de ponts et sous deux viaducs pourmaintenir le dégagement vertical. La fondationexistante est constituée d’un matériau granulaired’une épaisseur de 770 mm, posé directementsur le sol naturel. Les essais de déflexion FWD

    Tableau 1 : Seuils et délais d’intervention pour les critères couverts par la garantie,par tronçon de contrôle (une voie de circulation sur 100 m de longueur)

    Critère InterventionDélai

    (jours) Seuil

    Nid de poule 3 4 ou plus dont le diamètre est supérieur à 100 mm

    Fissure 60 Ouverture supérieure ou égale à 3 mmououverture inférieure à 3 mm mais longueur supérieure à 20 m linéaires

    Colmatage de joint 60 10 % ou plus de joints défectueux

    Épaufrure 60 Largeur supérieure à 75 mmoulargeur entre 50 et 75 mm mais longueur supérieure à 20 m linéaires

    Ornière 60 Profondeur supérieure à 15 mm

    Adhérence 60 Indice CFT inférieur ou égal à 40

    Profilométrie 60 Indice IRI supérieur à 3,5

  • 2 2 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T S E P T E M B R E 2 0 0 2

    ont permis d’évaluer la portance de la fondationexistante à 45 MPa/m (150 psi/pouce) et celleà la surface de la dalle à 200 MPa/m (700psi/pouce). Le drainage latéral de la fondation aété amélioré par l’ajout d’un drain en rive droite,afin d’accélérer l’évacuation d