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14 Centraliens n o 621 [Septembre Octobre 2012

Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

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Dossier sur les objets connectés, les drivers et les freins de l'Internet des Objets. Publié dans la revue Centraliens n° 621 (Octobre 2012) par le think-tank Centrale-Supélec sur l'Internet des Objets.

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14 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

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Dossier

L’Internet des Objets « IdO… idéaux ? »

Sommairep 16 IdO : synthèse du groupe de travail des Centraliens et Supélec

p 20 Le point de vue des hommes de loi : propriété et usage des données

p 22 Le Machine to Machine : premier pas vers l’IdO

p 26 La sécurité dans les applications machine to machine

p 28 Véhicules électriques connectés : l’expérience ZE de Renault

p 31 Une des faces cachées de l’IdO : l’apport de la technologie de Search

p 34 L’opportunité de l’Internet des Objets dans le libre-service

p 36 SmartGrains : la startup IoT

p 39 Smart Grids : l’avènement du consomm’acteur grâce aux objets communicants

p 42 Withings : l’IdO au service de la santé

p 46 Smart Impulse : extraire et valoriser l’intelligence énergétique des signaux électriques dans les bâtiments tertiaires

p 48 Smartphones et technologies sans contact : deux catalyseurs de l’IdO

50 milliards d’objets communicants en 2020 : voilà ce que nous prédit un livre blanc publié par Ericsson en 2011.

On estime en eff et qu’environ 10 % des objets qui nous entourent sont susceptibles, à plus ou moins brève échéance, de pouvoir se connecter à nos systèmes d’information en utilisant les réseaux de télécommunications. C’est déjà le cas pour certains d’entre eux, du compteur électrique à la chaudière, en passant par nos véhicules ou même nos raquettes de tennis…

Ces exemples illustrent ce qu’on a pris l’habitude d’appeler l’Internet des Objets (IdO).

Fournir un accès automatisé et plus naturel à l’information qui concerne les objets, c’est en quelque sorte opérer la fusion du monde physique où ils évoluent et de l’espace de données qui les représente. Celle-ci va se concrétiser par une série d’innovations de rupture, d’où émergeront de nouveaux services, de nouvelles sources de création de valeur et de nouveaux diff érenciateurs pour les entreprises.

Ces progrès ne seront pas sans défi s techniques. Ils vont également nécessiter le développement d’approches transverses pour élaborer les modèles économiques appropriés. Enfi n, ils ne se feront bien sûr pas sans l’accompagnement de garde-fous juridiques et éthiques indispensables au respect de la vie privée et des droits des individus.

Ces sujets de réfl exion passionnants ont motivé un groupe d’anciens élèves de Centrale et Supélec à travailler pendant plus d’un an à l’identifi cation des enjeux techniques, économiques et sociétaux de l’Internet des Objets. C’est une synthèse de ces travaux que nous vous proposons en ouverture de ce dossier, qui complète lui-même une précédente publication dans la revue Flux n° 269 (mai 2012), disponible sur simple appel à l’association des Supélec (Tél. 01 44 01 05 50).

Étienne Saclier d’Arquian (93)

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Dossier

16 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Internet des objets : synthèse du groupe de travail des Centraliens & des Supélec

Introduction

L’Internet des Objets (IdO) désigne une ex-

tension de l’Internet à un ensemble presque

illimité d’objets physiques communicants

autonomes. Du parcmètre au compteur

électrique, du colis en livraison à l’hygro-

mètre placé dans un champ, du smartphone

à la simple ampoule électrique, nombre

d’objets vont pouvoir émettre et échanger

des données contextuelles pour interagir

entre eux, au bénéfice de meilleurs services

rendus aux individus, aux entreprises et

aux collectivités dans une grande variété

de domaines.

Les associations d’anciens élèves de Centrale

et de Supélec ont pris l’initiative d’approfon-

dir ce sujet avec les objectifs suivants :

Fournir à nos deux communautés une

brève synthèse du sujet et leur suggérer

des pistes de réflexion ;

Favoriser les échanges à ce sujet au sein

des groupements professionnels de nos

deux Écoles ;

Encourager la coopération Entreprises-

Ecoles (séminaires, projets d’études,

thèses) ;

Nous avons choisi quatre grands enjeux so-

ciétaux auxquels l’Internet des Objets peut

contribuer : optimisation des processus

et logistique, optimisation des ressources

pour un développement durable, individu

et ubiquité, services à la personne.

Après avoir décrit les domaines d’applica-

tion les plus connus à ce jour, cette synthèse

évoquera les solutions techniques mises en

œuvre, avant de résumer les enjeux éco-

nomiques, les questions posées par la re-

cherche de modèles viables et les réponses

qui se profilent.

Des applications M2M aux applications IdO

L’utilisation d’objets communicants permet

d’automatiser, voire d’éliminer des tâches

répétitives ou pénibles, de réduire les coûts

et d’optimiser les ressources, avantages déjà

apportés par les solutions de communica-

tion M2M (Machine-to-Machine).

L’Internet des Objets fournit à des « utilisa-

teurs » une information valorisée, agrégée à

partir de données issues de différents « pro-

ducteurs ». En répartissant utilisateurs et

producteurs dans les catégories « individus »,

« collectivité(s) » et « entreprises », on peut en

étudier quelques applications emblématiques.

La figure 1 montre que le transport multi-

modal ou les réseaux d’énergie intelligents

font partie d’applications transverses (mul-

tiples producteurs et utilisateurs), en op-

position à la gestion de flotte de véhicules

d’entreprise ou d’espaces publics qui appa-

raissent être des applications plus verti-

cales, plus proches du M2M, où producteur

et utilisateur ont tendance à se confondre.

Figure 1. Matrice des services

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Internet des Objets

Le transport multimodal, par exemple, per-

met d’optimiser le transport de chacun à

partir d’informations temps réel de sources

multiples, telles que les horaires et temps de

trajet de transports publics, le trafic routier,

la disponibilité de véhicules en partage ou

de places de stationnement. Cette meilleure

organisation des transports profite aux in-

dividus (durée, confort et coût de trajets) et

à la collectivité (coût, pollution, bruit).

Les réseaux d’électricité intelligents (Smart

Grids) ont pour leur part comme objectifs

d’améliorer l’adéquation entre production

et demande afin de réduire les coûts, stabi-

liser le réseau et intégrer les énergies renou-

velables. Cette optimisation s’appuie sur la

connaissance en temps réel de la consom-

mation ou de la production d’électricité

des clients, par exemple par des panneaux

solaires domestiques. Moyennant des mo-

dulations dynamiques de tarifs, ceux-ci

peuvent réduire leur facture en limitant ou

différant leur consommation lors des pé-

riodes de pointe, et la collectivité bénéficie

des avantages d’un mix énergétique moins

polluant et moins coûteux1. Les besoins de

charge des véhicules électriques et leur dis-

ponibilité comme stockage d’appoint sont

également des données très convoitées2.

D’autres applications sont aujourd’hui vues

comme peu transverses : le suivi médical à

distance via la télécollecte de paramètres

vitaux (poids, tension, taux sanguins), la

gestion des flottes de véhicules, le suivi des

expéditions, ou encore les réseaux sociaux

enrichis (partage avec ses amis d’infor-

mations issues de ses objets du quotidien).

De telles applications pourraient toutefois

s’enrichir à l’avenir en profitant d’un croi-

sement de données inter-domaines3.

Gérer les données

L’Internet des Objets se décrit assez sim-

plement par un découpage en quelques

niveaux logiques (figure 2) :

Physique : objets et capteurs

Accès au réseau, premier niveau possible

d’agrégation des données

Réseau : adressage des objets, échange

sécurisé des données

Application : consolidation et exploita-

tion des données par des systèmes d’in-

formation.

Chaque niveau possède son intelligence

propre, ainsi qu’une capacité d’agréger,

traiter et diffuser les données sous une

forme significative à son échelle.

Les objets peuvent aussi disposer de don-

nées propres par leur représentation numé-

rique (avatars).

Chacun de ces niveaux doit relever des défis

spécifiques et d’autres plus génériques, par-

mi lesquels les plus critiques sont :

La standardisation et l’interopérabilité,

La fiabilité et la pérennité,

Le contrôle des coûts de déploiement et de

maintenance,

La maîtrise de l’impact environnemental,

La sécurité et la confidentialité.

Les technologies d’accès devront aussi as-

surer l’identification et souvent la localisa-

tion des objets, en plus des contraintes clas-

siques d’Internet : connectivité, sécurité et

qualité de service4.

L’analyse de ces contraintes montre que

les applications qui sauront tirer parti

d’objets « grand public » existants, alimen-

tés, connectés, comme les smartphones et

tablettes (éventuellement « durcis » pour

des usages professionnels) émergeront sans

doute beaucoup plus rapidement5.

De la donnée à la connaissance

Actuellement, la plupart des applications

sont plutôt du type M2M, développées en

silo, et intégrées au cas par cas à des sys-

tèmes d’information d’entreprise.

Cependant, même si M2M et IdO sont

connexes, ils diffèrent en plusieurs points,

illustrés par le tableau en figure 36.

Dans une première étape, l’internet des

objets et les silos s’intégreront aux architec-

tures applicatives existantes. Mais les sys-

tèmes d’information actuels et les proces-

sus qu’ils supportent sont issus d’approches

déterministes, où acteurs, événements et

échanges sont prévus à l’avance.

Figure 2. Schéma d’une chaîne technique typique de l’Internet des Objets

Figure 3. Comparaison M2M – Internet des Objets

M2M IdO

MODÈLE

Client-serveur/hiérarchisé, centralisé, relations verticales

Peer-to-peer, intelligence ambiante

(« pervasive computing) »,

relations horizontales

SYSTÈMESFermés,

propriétairesOuverts,

interopérables

GRANULARITÉ

Nombre limité de capteurs/ actuateurs

dédiés

“Nuages” d’objets à usages

multiples, déployés

à grande échelle

ANALOGIE WEB

Domaines d’échanges

privés (Intranet)

web 1.0

Domaine d’échange

public (Internet)

web 2.0

MATURITÉ En exploitation En prospective

1. Voir dans ce dossier l’article de Jacques Millery

(Capgemini) sur le Smart Grid.

2. Cf. interview de Nicolas Remise (Renault) sur le

programme Fluence Z.E.

3. Cf. interview de Cédric Hutchings (Withings) au

sujet des objets de santé connectés.

4. Cf. article de Benoît Jouffrey (Gemalto) sur la

sécurité.

5. Cf. article de François Robin (Atos) sur la conver-

gence des technologies sans contact et des smart-

phones.

6. Pour plus de détails, se reporter à l’article de

Benoît Ponsard (Kimeggi), Le machine to ma-

chine, premier pas vers l’Internet des Objets.

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Celles-ci se révéleront à terme limitées face

à l’explosion des volumes et du nombre de

cas imprévus à intégrer.

La maîtrise de ces contraintes impliquera

l’apparition de nouveaux systèmes com-

plexes auto-adaptatifs issus de techniques

d’intelligence artificielle, à base d’objectifs,

d’échanges et de règles, sans exclure la dé-

cision humaine.

Les nouveaux processus seront définis par

leur finalité, les acteurs (objets, groupes

d’objets intelligents, humains) se recon-

naissant par leur convergence de buts et

pouvant décider du lancement d’un pro-

cessus et de l’échange correspondant à la

satisfaction de l’objectif, à l’instar des in-

ternautes sur le Web.

Ces systèmes complexes permettront

aussi de gérer l’explosion des vo-

lumes - les milliards d’interac-

tions potentielles entre objets

de l’internet.

Modèles et enjeux économiques

Déjà pour les services In-

ternet, fixes ou mobiles,

la question des modèles

économiques a provoqué

de profonds bouleverse-

ments dans les approches.

Il est indispensable de ré-

soudre le problème du par-

tage équitable entre tous les

acteurs d’un écosystème : la

majorité des coûts apparaît lors de

la production et collecte des don-

nées, alors que les gains sont générés en

aval de la chaîne par leur traitement et leur

valorisation.

Il semble bien qu’avec l’Internet des Objets,

du fait des investissements d’un facteur

d’échelle supérieur (coût de la fonction de

communication de l’objet, impacts réseaux,

infrastructures matérielles et logicielles

pour capter les données…), des démarches

novatrices seront nécessaires notamment

pour compenser les coûts supportés par les

uns aux bénéfices d’autres acteurs.

Quelques modèles économiques connus

(sans préjuger du modèle dominant) aident

à fixer les idées.

Les modèles de services payants :

Paiement à la transaction, pouvant

inclure le partage du revenu (exemple :

Apple) ; l’acte d’achat est facilité par des

prix modiques, adapté aux achats fré-

quents.

Paiement forfaitaire régulier, éventuel-

lement inclus dans un pack de services ;

permet d’introduire de nouveaux ser-

vices et de fidéliser les clients.

Les modèles de services « gratuits » :

Service inclus avec l’achat d’un produit ;

permet de valoriser le produit ; adapté à des

produits non durables ou à forte valeur.

Service gratuit pour le consomma-

teur, subventionné par les annonceurs

(exemple : Google) ; demande de savoir

satisfaire deux clients aux besoins diffé-

rents et parfois antagonistes.

Services offerts avec d’autres services,

subventionnés par les économies qu’il

peut apporter au fournisseur de service :

un tel cas gagnant-gagnant est favorable à

un développement rapide.

Les modèles mixtes, « Freemium » jume-

lant une offre gratuite d’appel et une offre

« Premium » payante haut de gamme ; s’ap-

pliquent aux produits et services à faibles

coûts marginaux, limitant le coût total de

production.

Si les modèles économiques classiques sont

essentiellement fondés sur le commerce

des biens, une nouvelle donne introduite

par les objets communicants se manifes-

tera à travers le partage d’information et

l’utilisation d’objets comme vecteurs de

création de valeur, à l’exemple du partage

de palettes dotées d’étiquette RFID (Radio

Frequency Identification) entre acteurs de

chaînes logistiques, le tout facilitant la

poursuite du développement de l’écono-

mie des services.

Les enjeux commerciaux semblent considé-

rables, mais c’est un marché très fragmenté,

très dépendant des applications et des éco-

systèmes.

Les domaines porteurs sont les services de

l’énergie et de l’eau (télé-relève des comp-

teurs), l’automobile (maintenance préven-

tive et alertes en cas d’accident) et les trans-

ports, la santé (suivi des patients atteints de

maladies chroniques), les appareils électro-

niques grand public (liseuses, consoles de

jeux,…) et les services fondés sur la tech-

nologie RFID.

Sur un domaine que l’on peut encore consi-

dérer comme prospectif, il est difficile de se

faire une idée précise de la taille du marché

adressable. Si l’on considère uniquement

le domaine des étiquettes RFID, qui n’est

qu’un volet de l’IdO, selon l’Idate, le mar-

ché mondial, d’un montant de 5 Mds$ en

2008, devrait atteindre 25 Mds€ vers 2018

avec une croissance attendue d’un facteur

300 en nombre d’étiquettes et en 10 ans, la

part « hardware » de ce périmètre d’étude

représentant de l’ordre de 75 %. Il est clair

que les effets indirects sur les systèmes

d’information, les nouvelles applications

et d’une façon générale les services laissent

envisager un potentiel très attractif.

Les défis de l’Internet des Objets

Aux notions de possession et de commerce

des biens, il faut accepter d’ajouter la di-

mension du partage d’information. C’est

un changement de paradigme majeur que

de considérer les objets en tant qu’émet-

teurs d’information et intrinsèquement

générateurs de valeur.

La valeur de l’information réside dans le

traitement que l’on en fait. Dans un océan

de données produites par des milliards

d’objets, il faudra pouvoir identifier les plus

pertinentes, les contextualiser, et leur don-

ner du sens pour l’usage recherché, exer-

cice rendu particulièrement difficile par la

dépendance de la sémantique à chaque éco-

système. La création de valeur sera d’autant

plus élevée que les applications sauront utili-

ser les objets de différents horizons, comme

dans l’exemple des villes intelligentes, ca-

pables d’agréger les données des individus,

des collectivités et des entreprises.

Ceci implique l’émergence de standards, la

création de services ouverts ainsi que la dis-

ponibilité de puissances de calcul et de ca-

pacités de stockage suffisantes. À cet effet,

le « Cloud Computing » sera une des solu-

tions pour limiter le coût de traitement des

immenses volumes de données à venir. La

complexité croissante des données et trai-

tements rendra également nécessaires des

changements de paradigme dans la concep-

tion des S.I. en introduisant des processus

auto adaptables pour pallier les limitations

des approches centralisées déterministes.

Il est encore difficile de se faire une idée

précise du rythme de développement de

ces marchés. Malgré quelques initiatives de

Dossier

Page 6: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 19

développement d’applications partagées,

ils sont encore dans leur plus grande part

organisés par grands silos verticaux dont la

maturité technique et économique est très

variable.

Outre ces défis économiques et techniques,

il ne faudra pas oublier les défis organisa-

tionnels et sociétaux découlant de l’Inter-

net des Objets : la valeur provenant de l’in-

formation, sa propriété devient source de

conflit. Sans même parler de confidentiali-

té, de respect de la vie privée ou de sécurisa-

tion des données, accepter que des données

issues d’un individu, d’une collectivité ou

d’une entreprise soient valorisées (génèrent

un revenu) sans retour ou bénéfice direct

pour leur producteur ne va pas forcément

de soi !

Bruno Gallier(Supélec 89 et Executive MBA HEC Paris)Responsable de business Development Machine

to Machine – Directeur du programme traçabilité

& RFID Orange Business Services

A exercé des fonctions en organisation et mana-

gement, conduite de projets, développement de

nouvelles activités au sein des sociétés Accenture, Raychem Sie-

mens Automotive et du groupe Orange qu’il a rejoint en 2000 où il

exerce sa fonction actuelle.

Frédéric Lejay(Supélec 94 et Master of Electrical Engineering de l’Université Georgia Tech)Directeur Développement Nouvelles Plateformes –

Sierra Wireless

Intègre Alcatel-Lucent, participe au développement

des plateformes de terminaux GSM (division Mobile

Phone) ; devient chef de produit pour les équipements WiMAX (di-

vision Mobile Radio). Rejoint Sierra Wireless (ex Wavecom) en 2007

au poste d’ingénieur marketing technique avant de prendre la direc-

tion des équipes R&D de développement des nouvelles plateformes

cellulaires pour les applications machine to machine.

Michel Olive(Supélec 1968)Ingénieur système, chef de projets spéciaux puis

Directeur de Division chez Bull, il a dirigé des

centres de profits en SSII puis a travaillé en indé-

pendant comme Directeur de Projet au service de

grands clients. Membre du comité directeur des

Supélec, Commission Réseau Professionnel. Responsable Com-

munication de Supélec Numérique. Benoît Ponsard(Supélec 85 et docteur ENST 91)Pendant 15 ans, mène différents projets de re-

cherche et développement sur des produits et ser-

vices « Télécom ». Orange lui confie en 2000 la

coordination technique entre les filiales mobiles du

groupe FT. Enseignant et chercheur en télécoms &

réseaux à l’Ensimag, il crée Kimeggi -société de conseil stratégique

et technique pour la connectivité des machines M2M-. Aide les

entreprises à concevoir et déployer des produits et services inno-

vants connectés par l’internet et le cellulaire.

Étienne Saclier d’Arquian (ECP 1993)Manager Optimisation des Services, Reliance

Ingénieur (93) est expert en intégration de services

réseaux innovants pour les entreprises.

Après des débuts dans le développement de logi-

ciels temps réel d’équipements réseaux, il entre en

1998 chez Sita-Equant en direction de projet sur

des solutions sur mesure pour les grands comptes multinationaux.

Il rejoint en 2002 l’opérateur virtuel Vanco, puis en 2008 le groupe

Indien Reliance, où il dirige à ce jour l’équipe chargée de l’optimi-

sation des services opérationnels

Internet des Objets

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20 Centraliens no621 [Septembre-Octobre 2012]

Dossier

Y a-t-il des questions de droit spécifi ques à l’Internet des Objets ?

En 1990, il y avait le « web 1.0 », c’est-à-dire

le web des média, en 2010, le « web 2.0 »,

celui des réseaux sociaux, aujourd’hui nous

sommes dans le « Web 3.0 » c’est-à-dire l’in-

ternet des objets (« Internet of things ») ou

IdO. Avec cette troisième révolution, l’inter-

net envahit notre vie de tous les jours, tant

professionnelle que privée. Il fait, sans que

nous n’en ayons parfaitement conscience,

partie de notre quotidien. Ces premiers pas

s’appellent « réalité augmentée », « géoloca-

lisation » ou « code QR » mais ces solutions

ne sont rien au regard de ce que l’avenir nous

réserve.

Dans les dix procha ines années, l’une des

principales évolutions d’Internet va consis-

ter à relier progressivement non seulement

des personnes à travers leurs ordinateurs,

mais également toute une série d’objets ma-

tériels (au sens moléculaire mais également

informationnel du terme), permettant ainsi

de créer l’internet des objets.

Il sera possible d’anticiper les embouteillages

grâce aux voitures qui sont connectées aux

feux routiers, ou encore de prévenir les

patients d’une éventuelle incompatibilité

entre deux boîtes de médicaments munies

de puces RFID (identifi cation par radiofré-

quence).

S’il ne nous appartient pas, juristes que nous

sommes, de présenter ce qu’est l’internet des

objets, il nous revient de traiter une question

importante, sinon centrale, celle de la pro-

priété et de l’usage des données, pour qu’elle

ne constitue pas un frein à la mise en œuvre

de nouveaux services.

L’internet des objets réalise en quelque sorte

la « fusion » entre le monde moléculaire

(l’objet) et le monde virtuel (l’internet), deux

mondes qui sont assez étanches sur un plan

juridique. Le monde physique repose sur

des règles très classiques et très anciennes

basées sur la « propriété » d’une part, et la

« faute » d’autre part. Le monde numérique

-principe de réalité oblige-, impose une ré-

vision de ces notions fondamentales. Dans

le monde numérique, la propriété demeure

mais elle a été revisitée notamment par le

droit au partage ; la responsabilité elle aussi

demeure mais la faute cède la place à d’autres

concepts, comme par exemple la « notifi ca-

tion » des failles de sécurité qui mettent en

danger la confi dentialité des données.

Quels risques avez-vous identifi és ? Quelles sont vos préconisations ?

Nous pouvons anticiper dans un futur

proche le déploiement en très grand nombre

d’objets et de systèmes auto-adaptifs au

comportement autonome et non prédictif,

cependant le droit spécifi que à ce domaine,

encore essentiellement prospectif, reste à

écrire. Nul ne sait s’il en résultera un en-

semble de lois d’une extrême complexité, ou

si au contraire une solution simple s’impo-

sera d’elle-même.

Il est donc diffi cile d’émettre des préconi-

sations précises, en revanche nous devons

d’ores et déjà prendre conscience de l’en-

semble des nouvelles contraintes qui mé-

ritent une vigilance accrue.

De l’objet sujet à l’objet acteur. L’objet n’a

pas de statut juridique ; en droit, il n’est rien.

Il n’existe pas. Il est légal ou illégal. Son usage

est autorisé ou interdit. Il appartient ou non

à quelqu’un. Mais en tant que tel, l’objet

n’est que néant. Il n’est rien car il n’existe pas

sans l’homme qui le fabrique, le transmet,

l’utilise ou le détruit. Avec l’internet des

objets, il prend une toute autre dimension :

il agit, interagit, certains prédisent même

que l’objet pourrait devenir « intelligent ».

Sans aller jusqu’au ridicule qui consisterait à

reconnaître à l’objet la « capacité juridique »

(c’est-à-dire, l’aptitude à avoir des droits et

des obligations et à les exercer soi-même), le

concept d’objet comme « acteur juridique »

se posera. Pour l’heure, la notion même

d’identité est intimement liée à l’Homme

mais qu’en sera-t-il demain lorsque chaque

objet sera doté d’une identité propre, voire

même de plusieurs selon les usages ?

L’identifi cation des objets. Le déploiement

de l’internet des objets nécessite la prise

en compte de certaines règles en matière

d’adressage. Pour que chaque objet puisse

être connecté à d’autres appareils sur inter-

net, il faut qu’une adresse IP propre lui soit

aff ectée. Cette dernière pourra être soit fi xe,

soit dynamique, selon la fréquence d’usage

et le niveau de sécurité souhaité. Or, pour

garantir un nombre suffi sant d’adresses

internet, il est impératif de déployer le pro-

tocole Internet « IPv6 » encore trop limité à

ce jour. Ce protocole permet en eff et d’aug-

menter considérablement l’espace d’adresses

disponible et d’assurer le développement des

connexions qui va croître de manière expo-

nentielle du fait des capteurs d’objets asso-

Le point de vue des hommes de loi :propriété et usage des donnéesQuestions à Alain Bensoussan et Eric Barbry, Avocats, www.alain-bensoussan.com

Page 8: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 21

Internet des Objets

ciés à l’avènement de nouveaux services. Qui

va prendre en charge le passage à l’IPv6 chez

les fournisseurs de contenu et d’accès ?

La propriété de l’IdO. La propriété sera à

n’en pas douter, une question centrale pour

l’internet des objets et ce, sur trois axes. La

propriété de l’objet, des données échangées

entre les objets et enfi n de l’identifi ant des

objets. Cisco estime que 50 milliard d’objets

seront connectés en 2020. 50 milliards de

nouveaux clients ! Un rêve pour les opé-

rateurs de communications électroniques

comparé aux « maigres » 4 milliards d’abon-

nés au mobile. Le chiff re fait déjà tourner

la tête de leurs prévisionnistes. La question

de la propriété des identifi ants qui seront

utilisés dans le cadre d’internet des objets

est tout aussi cruciale. Et enfi n, comment

allons-nous traiter les données échangées

entre deux objets appartenant à des entités

diff érentes ?

La responsabilité. Imaginez un instant, un

patient à la santé fragile équipé d’un équipe-

ment de monitoring connecté à un réseau de

soins. Il lance une alarme qui est étudiée en

temps réel par un médecin virtuel, lequel ren-

voie immédiatement à l’armoire à pharmacie,

-elle aussi connectée-, de manière à iden-

tifi er le type de médicament qui s’y trouve.

L’armoire se sera préalablement connectée

au dossier pharmaceutique du patient pour

éviter une iatrogénie médicamenteuse. Un

rêve, sans doute pour le patient mais un cau-

chemar pour le juriste, en cas de dysfonction-

nement. De même pour un objet autonome

qui se mettrait à propager des informations

erronées et, par réaction en chaîne via les ob-

jets qui l’entourent, perturber l’ensemble d’un

système complexe.

Qui endossera la responsabilité ? Le fabri-

cant de l’objet défectueux ? Son propriétaire ?

Son exploitant ? Deux voies sont possibles

pour anticiper ce cas : la loi ou la réglemen-

tation contractuelle. La première est rassu-

rante, mais l’expérience du monde Internet

démontre que les rôles et responsabilités sont

en pratique souvent moins tranchés que ne le

prévoient les cas de la loi. Le contrat est en ap-

parence plus fl exible, mais en l’absence d’une

rigueur juridique irréprochable et d’une lo-

gique architecturale contractuelle exhaustive

sur la chaîne concernée, sa protection n’est

que très partielle.

Le droit au silence des puces. Ce concept

est assurément le plus important de l’inter-

net des objets. Il y aura pour un objet des in-

formations strictement privatives (justifi ant

un droit au silence) et d’autres avec diff érents

niveaux de droit d’accès, accessibles ou non

en fonction de l’usage. Dans un monde où,

par principe, les objets seront nativement

communicants, redonner à l’Homme le

pouvoir de déconnexion est indispensable.

Cette idée n’est pas totalement nouvelle. On

la retrouve dans le monde du travail avec les

obligations consistant à rendre débrayables

les mécanismes de géolocalisation dans cer-

taines conditions, tant ces dispositifs sont

susceptibles de porter atteinte à la liberté

d’aller et venir anonymement et au droit à

la vie privée. Mais avec 50 milliards d’objets

communicants, le droit au silence ne sera

pas une mince aff aire…

À PROPOS DES AUTEURS

Alain Bensoussan

est avocat technologue

spécialiste en droit de la

propriété intellectuelle,

en droit de l’informa-

tique ainsi qu’en droit des

relations internationales,

fondateur en 1978 du cabinet éponyme tota-

lement dédié au droit des technologies avan-

cées. Il a rédigé et publié en 1985, aux éditions

Berger-Levrault, le premier traité de droit de

l’informatique. Pour la 3e année consécutive

depuis 2010, il a été distingué par ses pairs,

« Best Lawyer » de l’année dans le domaine

du Droit des nouvelles technologies.

Éric Barbry est avocat

Directeur du pôle « droit

du numérique » au sein du

Cabinet Alain Bensous-

san Avocats. En charge

au sein du Cabinet des

dossiers relatifs à la sécu-

rité des systèmes d’information, à la cyber-

surveilance et au droit pénal numérique.

Chargé d’enseignement à Telecom ParisTech.

Co-fondateur de Cyberlex.

Alain Bensoussan

et Éric Barbry

tiennent un « blog expert »

sur le site du Figaro, intitulé

« Droit des technologies avancées »,

http://blog.lefi garo.fr/bensoussan/

Page 9: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

22 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Le machine to machine, premier pas vers l’Internet des Objets

Les définitions de l’Internet des objets

(IdO) et du machine to machine (M2M)

sont nombreuses et reflètent chacune un

point de vue, un aspect particulier que l’au-

teur veut mettre en avant. Pour l’ETSI1, le

M2M concerne « la communication entre

machines avec une intervention humaine

limitée, voire absente ». En France, l’auto-

rité de régulation des télécoms demande

que les cartes SIMs des réseaux cellulaires

dédiées au M2M le soient à des « fins fonc-

tionnelles précises ». Un Smartphone que

son propriétaire utilise pour surfer sur

le web ne rentre pas dans la catégorie du

M2M. Une liseuse électronique qui télé-

charge un ebook est un dispositif M2M, car

son lien cellulaire est destiné à une fonc-

tion précise. La technologie cellulaire (2G,

GPRS, 3G…) est donc un élément essentiel

du M2M, en association avec l’Internet qui

apporte l’universalité des accès et des pro-

tocoles.

Pour l’Internet des Objets, déjà largement

présenté dans ce numéro de Flux, voici la

définition proposée par S. Bortzmeyer de

l’AFNIC2 : « donner la capacité de commu-

niquer sur l’Internet à des objets que l’on ne

considère pas, de près ou de loin, comme

des ordinateurs ». Comme l’ARCEP avec le

M2M sur le cellulaire, cette définition met

en avant la capacité de communication des

objets de l’IdO, mais en sans préciser les

technologies. Celles-ci peuvent être très

variées, mais on retrouve essentiellement

le WiFi, les réseaux radio de courte portée

(type 802.4.15, ZigBee, Wavenis…), les cou-

rants porteurs, l’Ethernet.

Énergie

Qui dit communication, dit besoin d’éner-

gie pour émettre et recevoir les informa-

tions et gérer la connexion avec l’environ-

nement. Le M2M utilise les technologies

cellulaires qui sont des communications

radio à débits et distances importants ; les

puissances radio y sont de l’ordre du Watt.

Les produits et solutions qui relèvent du

M2M doivent donc disposer d’une source

d’énergie suffisante pour assurer une

connexion permanente. Si l’on veut une

longue durée de service sur piles, celle-ci

est obtenue avec un mécanisme de réveil

régulier.

Pour l’IdO, l’énergie électrique est soit

largement disponible car les objets sont

connectés au réseau (électroménager, chau-

dières, climatiseurs, distributeurs de bois-

sons…), soit totalement absente (compteur

d’eau et de gaz, par exemple). Un aspect de

l’IdO va donc consister à réaliser la connec-

tivité Internet avec des solutions tech-

niques très basse énergie pour fonctionner

avec une simple pile, voire uniquement en

récupérant l’énergie dans l’environnement.

Dans beaucoup de cas, cela se traduira par

des systèmes radio à courte portée (qq di-

zaines de mètres pour les réseaux de cap-

teurs), faible débit et des puissances radio

de l’ordre du mW. Une passerelle fait en-

suite le lien avec l’Internet.

Flux d’informationDans sa forme actuelle, le M2M est très

influencé par la connectivité apportée par

les réseaux cellulaires : des dispositifs dis-

tants qui communiquent avec des systèmes

centraux. Les flux d’information se font en

étoile à partir ou vers ces serveurs centraux ;

il n’y a pas d’échange direct entre dispositifs

distants (voir figure 1). Chaque application

a ses serveurs centraux et ses modules de

communication installés dans ses produits

connectés. Le seul élément mutualisé est

le réseau de transport cellulaire +Internet.

Cette architecture est héritée des systèmes

cellulaires qui ont été conçus, à l’origine,

pour faire de la communication « human to

human » entre deux téléphones.

L’Internet des Objets, quant à lui, cherche à

tirer parti d’une infrastructure de communi-

cation maillée de type Internet dans sa par-

tie fixe et de type réseaux de capteurs dans sa

partie radio de proximité. Chaque objet peut

communiquer directement avec son voisin

pour acheminer et/ou traiter les données du

réseau. Une part de l’intelligence applica-

tive peut alors être déployée dans les objets

qui coopèrent pour fournir un service (voir

figure 2). Les inconvénients de cette coopé-

ration s’appellent confidentialité, partage de

propriété des données, gestion des droits,

niveau de confiance dans l’information…

Écosystèmes

Les écosystèmes de l’IdO et du M2M

fédèrent des acteurs dont les typologies

diffèrent sensiblement. Le M2M s’appuie

sur des technologies plutôt matures. Le

challenge y est de rassembler des acteurs

pour offrir une solution adaptée à chaque

marché « vertical » et cela de façon écono-

miquement viable pour tous les acteurs.

Dans cet écosystème, les opérateurs mo-

biles tiennent une place importante : leurs

Quand on parle de l’Internet des Objets (IdO), on évoque souvent le machine to machine (M2M) soit pour l’opposer soit pour le comparer à l’IdO. Nous proposons ici une analyse du M2M et de l’IdO au regard de quatre axes-énergie, flux d’information, écosystème et business models qui conditionnent le fonctionnement de tels systèmes et leur réussite économique.

Page 10: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Internet des Objets

off res M2M sont cruciales pour l’équilibre

de la chaîne de valeur du M2M, même si

leur part n’est que de 20 % du chiff re d’af-

faires du secteur3. Les autres acteurs (fi gure

3) sont essentiellement les fabricants de

modules cellulaires, les fabricants de carte

SIM (modèles durcis dédiés au M2M), les

intégrateurs et fournisseurs de services

informatiques. Cet écosystème d’aff aires

s’appuie sur l’ETSI et plus récemment

l’ITU4 pour la normalisation liée au M2M

(architecture, impacts réseau, interfaces de

service). Ces deux organismes, fortement

liés au monde des télécoms, marquent le

lien entre cellulaire et M2M. L’écosystème

est complété par les autorités de régulation

de chaque pays qui défi nissent le cadre ré-

glementaire du M2M, cadre lié aux licences

d’exploitation des réseaux cellulaires.

L’écosystème de l’Internet des Objets

est naturellement plus vaste car les défi s

à relever suscitent l’émergence de nou-

veaux acteurs. Il est aussi beaucoup moins

réglementé car il s’inspire fortement de

l’approche Internet. La normalisation de

l’IdO est essentiellement traitée par l’IETF

(travaux sur le routage et l’adressage) et

l’IEEE (normes radio), c’est-à-dire par des

organismes très impliqués dans l’Internet.

La communauté scientifi que est aussi très

présente dans l’IdO car les nouveaux pro-

blèmes à traiter sont nombreux (très grands

espaces de nommage, connectivité maillée,

routage dans un réseau très changeant, web

sémantique pour la recherche d’informa-

tion, sécurité…).

@

Figure 1 : les échanges M2M n’ont lieu qu’entre machines connectées et serveurs et sont spécifi ques à chaque application

internet

infosphère

Figure 2 : dans l’IdO, les objets connectés peuvent coopérer pour transporter des données et/ou élaborer une information

www.centraliens.net 23

Page 11: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

24 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Business model

En simplifi ant à peine, on peut dire que la

typologie des acteurs du M2M et de l’IdO

infl uence les business models des deux

domaines. Dans le M2M le business model

doit absolument intégrer le coût non nul de

la connectivité sur les réseaux cellulaires,

exploités et supervisés 24h/24 par les opéra-

teurs mobiles. Le coût de cette connectivité

se retrouve de façon apparente (abonne-

ment M2M) ou de façon cachée (paiement

à l’acte, coût one-shot) dans le service fi nal.

Pour l’IdO, le très grand nombre d’objets

interdit d’envisager de facturer de façon

récurrente un coût de connexion pour

chaque objet. D’où l’importance d’avoir

une connectivité réalisée de façon quasi

automatique et autonome dans l’IdO et de

passer dès que possible sur l’Internet dont

le coût est largement mutualisé. Le business

model de l’IdO va chercher à valoriser l’in-

formation créée puisque que la connecti-

vité est perçue comme devant être gratuite.

Inclusion plutôt qu’opposition

Souvent, la première comparaison entre

IoT et M2M tend à opposer ces deux ap-

proches : système ouvert contre système

fermé, principe de gratuité contre abon-

nement, marché émergent contre volume

d’aff aires de 14,2 M$5. À mieux y regarder,

il n’y a pas d’opposition mais plus une rela-

tion d’inclusion. Le M2M, tel qu’il est vu

par les acteurs de son écosystème, est une

adaptation du couple cellulaire/Internet

pour répondre à des besoins d’échanges

d’information entre systèmes distribués

et serveurs centraux. Les usages sont pro-

fessionnels (logistique, télémaintenance,

télégestion…) ou grand public spécifi ques

(alarme domestique, GPS connectés, cadres

photo numériques…). L’IdO adresse les dé-

fi s de la connectivité mais aussi du traite-

ment des données, de l’élaboration de l’in-

formation et de son partage souvent en pair

à pair. Aussi le M2M peut être vu comme

un premier pas vers l’Internet des Objets.

Dès aujourd’hui, certaines applications ex-

ploitent les deux approches. C’est la cas, par

exemple, de la télé relève des compteurs d’eau

ou de gaz : la partie terminale de la connec-

tivité est réalisée par des techniques radio

faible consommation et autoconfi gurable ty-

pique de l’IdO. La concentration longue dis-

tance passe par des passerelles M2M, reliées

par GPRS aux serveurs centraux.

Au-delà des querelles d’experts sur les posi-

tionnements respectifs de l’IdO et du M2M,

ce sont les usages et la valeur apportée par

ces technologies qui importent. L’avenir nous

dira comment le marché va tirer le meilleur

parti de ces deux approches pour créer de

nouveaux produits, de nouveaux services et

apporter de la valeur au client fi nal.

1. European Telecommunication Standards Insti-

tute, Technical Committee M2M, juin 2011

2. Association Française pour le Nommage Internet

en Coopération

3. Chiff res IDATE, avril 2011

4. International Telecommunication Union

5. Marché mondial du M2M : équipements, connec-

tivité cellulaire, développements logiciels et IT

services (chiff res IDATE pour l’année 2010)

fabricants modules

fabricants SIM

opérateurs mobiles

intégrateurs éditeurs logiciel fournisseurs services IT

constructeurs intégrateurs

développeurs

machines & produits connectés

serveurs application métier

réseaux cellulaires modules radio

cartes SIM M2M

client final / exploitant / mainteneur

Figure 3 : éléments de la chaîne de valeurs M2M et acteurs principaux

Benoît Ponsard

(Supélec 85

et docteur ENST 91)

Pendant 15 ans, mène

diff érents projets de re-

cherche et développe-

ment sur des produits

et services « Télécom ». Orange lui confi e

en 2000 la coordination technique entre

les fi liales mobiles du groupe FT. Ensei-

gnant et chercheur en télécoms & réseaux

à l’Ensimag, il crée Kimeggi -société de

conseil stratégique et technique pour la

connectivité des machines M2M-. Aide

les entreprises à concevoir et déployer des

produits et services innovants connectés

par l’internet et le cellulaire.

Page 12: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

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Page 13: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

26 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

La sécuritédans les applications machine to machine

L’ensemble des analystes

du marché machine-to-

machine (M2M) prévoit

une croissance importante du

nombre d’objets communicants

dans les années à venir. Certaines

estimations font l’objet de com-

mentaires soutenus, comme les 50 milliards

d’unités prévues par Ericsson1 en 2020. Sans

les commenter dans le détail, on notera

la grande diversité de types d’applications

et de connexions (réseau mobile ou fixe,

bluetooth, infrarouge, Zigbee, courant por-

teur…) présents derrière ces chiffres.

Nous avons à titre personnel conscience de

cette évolution vers un monde d’objets de

plus en plus communicants : notre voiture

intègre souvent des systèmes de géo-locali-

sation, de téléphonie mains libres intégrée,

et l’actualité nous parle du déploiement

prochain de l’appel d’urgence (ecall) sou-

tenu notamment par la Commission Euro-

péenne2, d’ores et déjà offert par certains

constructeurs en mode propriétaire. Ce phé-

nomène est sensible dans d’autres domaines

variés, comme celui de l’énergie avec le

déploiement annoncé de compteurs d’élec-

tricité communicants (par exemple le projet

Linky d’ERDF).

Cette évolution n’aura lieu de manière fiable

et satisfaisante pour l’utilisateur que si la

sécurité de ces communications et des appli-

cations sous-jacentes est assurée, par le res-

pect de la confidentialité des informations

échangées, de leur intégrité, de l’authentifi-

cation des parties en présence, et de la non-

répudiation des échanges.

Les enjeux de la sécuritéReprenons les deux exemples évoqués plus

haut. Les véhicules communiquent de plus

en plus, pour des besoins propres à l’utilisa-

teur (géo-localisation, navigation internet,

téléphonie mobile…), à l’administration

du véhicule (remontée de paramètres et

supervision de l’état du véhicule…) ou à la

sécurité des personnes (appel d’urgence avec

transmission des données de localisation du

véhicule). On anticipe également l’introduc-

tion de technologies « sans contact » (ouver-

ture des portes ou démarrage du véhicule à

l’aide de clefs numériques stockées dans son

téléphone portable…), ainsi que la commu-

nication entre véhicules (échanges d’infor-

mations météorologiques ou routières). On

comprend facilement les enjeux liés à la

sécurité des personnes si l’utilisation d’une

faille de sécurité permettait à un tiers de

modifier des paramètres moteurs, désacti-

ver l’ABS, ouvrir frauduleusement les portes

ou démarrer votre voiture à votre insu. Ces

deux derniers exemples ont d’ailleurs récem-

ment fait l’objet de publications3.

Quant aux compteurs électriques commu-

nicants, les risques peuvent être multiples :

détournement des capacités de communica-

tion par un utilisateur frauduleux4 capable

d’en modifier les données5, manipulation

par des tiers des compteurs d’une ville, par

exemple en cas d’actions terroristes ou de

guerre électronique (cf. le ver informatique

Stuxnet), pouvant entraîner une déstabilisa-

tion des moyens de production d’énergie et,

par un effet en chaîne, une coupure géante

d’électricité, intrusion dans le réseau de la

maison (zone HAN : Home Area Network),

et récupération d’informations privées (par

exemple liées à la facturation, à la pré-

sence…). On notera à ce titre la résistance

des associations de consommateurs aux

Pays-Bas face au déploiement des comp-

teurs communicants, pour des raisons liées

notamment à la protection des données de

l’utilisateur6, et les nombreuses publications

de chercheurs ou experts à ce sujet, aux

titres évocateurs (Cf. par exemple « Private

Memoirs of a Smart Meter » 7, « Are smart

meters spies ? » 8).

Il existe bien d’autres domaines que l’auto-

mobile ou l’énergie où un véritable enjeu de

sécurité apparaît avec l’utilisation massive

d’objets communicants : celui de la santé par

exemple. On comprend aisément le carac-

tère vital que peut avoir la sécurité de la

transmission des données d’un patient, qu’il

s’agisse notamment de l’authentification des

parties échangeant ces données, de la véri-

fication de l’intégrité de la transmission ou

encore de la confidentialité de ces échanges.

Enfin, le développement d’applications

situées dans le « cloud » peut augmenter la

vulnérabilité des systèmes, car il faut pou-

voir vérifier précisément où et comment

les données applicatives d’un utilisateur

sont stockées, et si les serveurs et les centres

d’hébergement qui participent à la chaîne

de confiance offrent eux-mêmes le niveau

requis de sécurité.

Conscients de cette vulnérabilité, la plu-

part des acteurs des domaines mentionnés

ci-dessus travaillent à la mise en œuvre de

solutions pour limiter ces risques. Sans pré-

tendre être exhaustif, la publication par le

BSI allemand en 2011 d’un profile de pro-

tection pour une passerelle (gateway) dans

le cadre du déploiement des compteurs

communicants9, les efforts des groupes de

travail de l’ETSI, du CENELEC, d’associa-

tions comme la GSMA, EUROSMART, la

création par la communauté européenne de

groupes dédiés à la sécurité dans le cadre du

mandat M49010 témoignent de ces efforts11.

Néanmoins les risques subsistent. Un rap-

port de février 2012 de AdaptiveMobile12

soulignait un certain nombre de vulnérabi-

lités fondamentales des applications M2M :

le fait que par définition ce type de commu-

nication se fasse sans l’intervention (et donc

la vérification) d’un être humain implique

une révision des modèles standards de sécu-

rité des réseaux (par exemple impossibilité

d’utiliser un secret lié à un utilisateur : PIN,

empreinte biométrique…), l’absence de

possibilité de mise à jour des applications

et des objets (pour des raisons de coûts

alors même que ces objets peuvent être sur

le terrain pour une très longue durée), leur

caractère statique (difficulté d’accès et de

remplacement des objets), la relative sim-

plicité de certains objets communicants (par

opposition à des téléphones mobiles dernier

cri embarquant les derniers systèmes d’ex-

ploitation).

Les solutionsOn peut énoncer quelques principes clefs :

1. De manière classique, les solutions rete-

nues doivent être un compromis entre le

risque (mesuré par sa gravité et sa probabi-

lité d’occurrence) et les investissements de

Page 14: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 27

Internet des Objets

sécurité choisis : on évitera de bâtir une for-

teresse autour d’un bien sans réelle valeur.

2. La sécurité doit être réalisée de bout en

bout. Même s’il s’agit d’une évidence, on

rappellera que si un certain nombre de

mesures sont mises en œuvre pour sécu-

riser par exemple un compteur intelligent,

encore faut il que les protocoles de com-

munications eux-mêmes soient sécurisés :

un certain nombre d’exemples publics

montrent que des attaques anciennes et

bien connues sont encore possibles sur

des objets communicants mis en vente

aujourd’hui, comme le « war texting » qui

utilise sur la partie radio une faille des

réseaux 2G combinée à une absence de

sécurité applicative. Enfin, le déploiement

d’une application M2M client serveur uti-

lisant un hardware sécurisé ne prémunit

aucunement d’attaques sur le serveur où

réside l’application.

3. Chaque application doit être traitée de

manière particulière : la diversité des appli-

cations, la multiplicité des environnements

d’intégration, des composants utilisés, des

briques logicielles choisies nécessite sou-

vent de faire recours à des sociétés spé-

cialisées indépendantes (notamment des

équipes internes d’une même entreprise)

qui permettront de jauger la qualité de la

sécurité de bout en bout de l’application. Ce

travail peut être modulaire et passer par la

modification des spécifications du système,

voire le contrôle a posteriori de la confor-

mité aux spécifications de l’implémenta-

tion réalisée. Ces audits sécurité peuvent

inclure des attaques en boîte blanche (avec

un niveau de connaissance a priori des

code-sources des logiciels client et serveur)

ou boîte noire (sans connaissance  a priori

du code-source des logiciels).

4. La nécessaire distribution de clefs crypto-

graphiques qui permettront aux objets de

communiquer de façon sûre avec des enti-

tés légitimes est bien entendu une étape

critique pour la sécurité d’une application.

5. Utiliser les outils réglementaires et indus-

triels existants, comme par exemple les

profiles de protection Critères Communs,

un standard international ISO/IEC 15408

qui définit des niveaux de sécurité certi-

fiables pour les systèmes d’information13.

Mettre en œuvre des solutions centrées sur

l’utilisation d’un hardware résistant aux

attaques externes et destiné uniquement à

la sécurité, par exemple pour le stockage

des algorithmes cryptographiques ou des

clefs d’authentification, et non pas partagé

avec d’autres applications14.

6. Enfin, le travail soutenu de standardisa-

tion doit être poursuivi afin d’assurer la

confiance des acteurs et l’interopérabilité

future des systèmes déployés.

Conclusion

Avec la multiplicité des objets communicants,

se posent des problèmes nouveaux de sécurité

liés au contexte spécifique des applications

machine to machine. Il est de la responsabilité

de tous les acteurs (communauté européenne,

États, industriels, associations) de s’assurer

que les conditions d’une utilisation sécurisée

de ces nouvelles possibilités de « l’internet des

objets » seront réunies.

Reste in fine la question du business model :

qui paiera pour cette sécurité ? Derrière cette

question en émergent d’autres : qui portera la

responsabilité de cette sécurité ? Qui a quelque

chose à protéger : une personne, une entre-

prise, un État (notamment dans le cas de d’at-

taques sur des infrastructures vitales comme

les réseaux électriques)… ? De quel bien

s’agit-il : intégrité physique de la personne (par

exemple dans le cas d’un véhicule connecté),

réputation (image de marque), données per-

sonnelles, installations ou secrets industriels,

savoir-faire, identité, argent… ? Il n’existe pas

là non plus de réponse toute faite, universelle.

Gageons seulement qu’avec le développement

de ces nouvelles possibilités de « l’internet des

objets », de nouveaux acteurs et de nouveaux

« business models » émergeront, témoins de

la vitalité de ce marché.

1. Ericsson, More than 50 billion connected devices,

February 2011.

2. Projet de résolution adopté le 19 juin 2012 par les

commissions transport et marché intérieur du Par-

lement européen demandant que tous les nouveaux

véhicules proposés à la vente dans l’UE à partir de

2015 soient équipés de la technologie « eCall ».

3. http://www.thehackernews.com/2011/07/war-tex-

ting-hackers-unlock-car-doors.html

4. Cf. fraude de 200,000 $ rapportée par http://www.

themercury.com.au/article/2011/05/03/227031_

tasmania-news.html en mai 2011.

5. Cf. l’analyse du Federal Bureau of Investigation,

Smart Grid Electric Meters Altered to Steal Electri-

city, May 2010.

6. Ross Anderson, Shailendra Fuloria, Who controls

the off switch, Cambridge University, 2011.

7. Andrès Molina-Markham, Prashant Shenoy, Kevin

Fu, Emmanuel Cecchet, and David Irwin, Private

Memoirs of a Smart Meter, University of Massachu-

setts Amherst, 2010.

8. Cf. par exemple, Ariel Bleicher, Privacy on the

Smart Grid, Are smart meters spies? They don’t

have to be, October 2010.

9. Protection Profile for the Gateway of a Smart Mete-

ring System. https ://www.bsi.bund.de/Shared-

Docs/Downloads/DE/BSI/SmartMeter/PP-Smart-

Meter.pdf?__blob=publicationFile

10. http://ec.europa.eu/energy/gas_electricity/smar-

tgrids/doc/2011_03_01_mandate_m490_en.pdf

11. On pourra noter également l’acquisition par une

filiale de BOSCH de la société ESCRYPT en avril

2012.

12. AdaptiveMobile, machine-to-machine : future

threat?, 2012.

13. Voir http://www.commoncriteriaportal.org

14. Cf. EUROSMART, Security and Privacy in the

digital world, 2012.

Benoît Jouffrey

(91) et IEP Paris (92)

est Vice-Président M2M Value Added

Services de Gemalto.

Il est à ce titre responsable de l’en-

semble des cartes et services délivrés

sur le marché par Gemalto. Depuis la

création du groupe jusqu’en décembre 2011, il a été égale-

ment président du groupe de travail machine-to-machine

de la SIMalliance.

Compteurs communicants en zone résidentielle.

Page 15: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

28 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Véhicules électriques connectés : l’expérience ZE de RenaultInterview de Nicolas Remise (81) - Renault

Quelle est votre proposition de valeur en termes de produits et services ?Renault conduit actuellement deux types

d’expériences bien différenciés sur les véhi-

cules électriques connectés.

La première est une coopération avec Better

Place (BPLC), en Israël et au Danemark, sur

les véhicules Fluence Z.E. (zéro émission).

BPLC est un fournisseur de services pour le

V.E. qui commercialise les véhicules, loue

les batteries, et gère des services connectés

liés à l’autonomie des véhicules (points de

charge et stations d’échange de batteries), et

des fonctions annexes : téléchargement de

musique, communication mixte voix-don-

nées avec les centres d’appel, télé-diagnos-

tic des services indépendants de la batte-

rie. Cette gestion à distance nécessite une

connexion réseau mobile et des services

déportés, développés et gérés par BPLC.

La seconde est menée en Europe, en dehors

du périmètre BPLC, sur base de services

connectés développés et gérés en direct par

Renault. La batterie est louée au proprié-

taire du véhicule : il n’y a pas de système

d’échange régulier mais une structure in-

terne à Renault gère le parc de batteries et

leur remplacement en cas de maintenance

préventive. Ce dernier aspect est également

très prisé des gestionnaires de flotte.

Pouvez-vous décrire les solutions techniques et les services apportés ?Parmi les enjeux principaux concernant le

véhicule électrique, on compte la « réassu-

rance » du conducteur ainsi que la nécessité

de supprimer l’angoisse d’une perte d’auto-

nomie du véhicule.

Dans ce but, Renault et BPLC surveillent

l’état de santé des batteries, résultat d’un

calcul de dégradation des capacités, par

exemple à la suite de plusieurs cycles de

charge très rapides sans refroidissement.

Ces informations sont répertoriées dans

une base de données de suivi du cycle de vie

des batteries (Battery Life Management Sys-

tem – BLMS).

Selon son état de santé, la batterie peut

avoir différentes utilités, du véhicule neuf au

véhicule d’occasion, puis plus tard comme

moyen de stockage énergétique pour le

réseau électrique, avant d’être recyclée. Tout

au long de sa vie, les données de suivi vont

assurer sa localisation, le choix d’utilisation

approprié et finalement la confirmation de

son recyclage.

Les données générées par l’utilisation du

véhicule transitent sur le réseau multiplexé

embarqué puis sont transférées sur le réseau

dédié à BPLC.

Voici les points spécifiques à la solution

Renault :

Le véhicule utilise un sous-système

télématique, la Telematic Control Unit

(TCU), qui transmet les données pro-

duites à un centre de données mutualisé

avec Nissan.

Le calculateur embarqué garde les logs et

diagnostics sur quelques jours. Ces infor-

mations sont utiles pour identifier les

causes des problèmes : véhicule concerné,

modes de conduite, en cas de rappel de

batteries défectueuses ou pour estimer au

mieux le risque financier inhérent à leur

garantie.

Par obligation de confidentialité, les don-

nées privées sont agrégées et moyennées.

Bien que lissées ces valeurs permettent

déjà de disposer sur le véhicule électrique

de bien plus d’informations (modes de

conduite et de recharge) que sur le véhi-

cule thermique, qui ne nécessite pas de

suivi continu.

Notre modèle permet aux responsables

de parcs une gestion à distance quasi au-

tomatisé des flottes, avec des services sur

mesure allant jusqu’à l’envoi en temps réel

de conseils préventifs aux conducteurs en

fonction de leur mode de conduite. Ceux-

ci ne sont bien sûr activés qu’après vérifi-

cation de la conformité avec le droit du

travail en vigueur dans le pays concerné.

Dans le cas de BPLC, un calculateur embar-

qué transmet les données via une connexion

3G, depuis le circuit multiplexé du véhicule

vers un centre d’opérations. Après traite-

ment, ces données alimentent les écrans de

contrôle d’alarmes et de suivi géographique,

ainsi que différents services dont la chaîne

de valeur est totalement captée par BPLC :

Gestion de l’autonomie du véhicule et

supervision à distance des batteries. Pour

limiter les risques techniques, BPLC pro-

fite des retours en station pour réaffecter

les batteries qui ont subi une utilisation

intensive à des utilisateurs moins exi-

geants.

Guidage GPS avec acheminement, en cas

de besoin, vers les points de charge ou les

stations d’échange les plus appropriés au

trajet prévu.

Supervision technique du véhicule,

envoi de messages d’alerte détaillés aux

conducteurs en cas de défauts identifiés

sur les véhicules (changement de batterie,

conseils de conduite).

Autres services informatiques : infotain-

ment, accès Internet, accès aux services

développés par les partenaires de BPLC

(applications, guides touristiques…).

Services d’intégration du V.E. au Smart

Grid, au profit des réseaux de distribu-

tion d’électricité et des gouvernements.

BPLC a l’obligation légale vis-à-vis d’Is-

raël Electric Corporation (IEC) de lisser

la charge des batteries pour éviter une

surcharge locale du réseau électrique,

ce qui est réalisé grâce à la géo-localisa-

tion des véhicules, en gérant les cycles

de charge en fonction de règles de prio-

rité définies à partir des besoins des

clients (véhicule arrêté pour quelques

heures, une nuit, plusieurs jours…).

À plus long terme, après le déploiement

de points de charge ou de branchements

domestiques bidirectionnels, en termes

de communication et de distribution

énergétique, IEC pourra solliciter les bat-

teries des véhicules branchés au réseau

électrique comme source de secours pour

faire face à des pics de demande.

Dans tous les cas, les informations affichées

en cours de conduite sont contrôlées, pré-

digérées et hiérarchisées pour garantir la

sécurité de la conduite (par exemple : utili-

Dossier

Page 16: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 29

sation de tweeter et affichage vidéo bloqués

quand le véhicule roule, ergonomie amélio-

rée des affichages).

Quelles sont les communica-tions qui s’établissent entre les différents objets du réseau ?Il y a, d’une part, les communications néces-

saires à la supervision des véhicules et des

batteries : du véhicule au centre BPLC ou au

BLMS Renault (alertes batterie, alertes mo-

teur), et, pour BPLC, entre points de charge/

stations d’échange et centre de supervision

(disponibilités, réservations, supervision

des points de charge/stations d’échange).

Les batteries sont communicantes quand

elles sont raccordées au réseau ou en cours

de recharge en station (BPLC), BPLC a envi-

sagé une solution de traçabilité des batteries

déconnectées par tag RFID, mais elle n’a pas

été réalisée à ce jour.

D’autre part, les communications à desti-

nation du client : du véhicule ou du centre

de supervision vers le smartphone du client

(autonomie, début et fin de charge, et, à

terme, demandes de décalage de charge à

des fins de régulation de la demande élec-

trique), ou du serveur central vers le véhi-

cule (infotainment, aide à l’utilisation/FAQ,

conseils de conduite). La solution Renault a

également prévu la programmation à dis-

tance du chauffage ou de la climatisation

avant le départ du véhicule (utilisation de

l’énergie du réseau électrique si le véhicule

est connecté).

Quels développements envisage Renault dans ce domaine ?Les données d’exploitation des véhicules

connectés nous permettent une étude très

fine des usages et de leur intérêt pour les

différents services. Renault est convaincu de

l’avenir des services connectés et l’ouverture

à terme vers des réseaux communautaires

d’objets connectés. On peut citer à ce titre le

partenariat avec TomTom dans le dévelop-

pement de services d’information géogra-

phiques mis à jour en temps réel à partir les

données remontées par les véhicules Renault

connectés.

Pour commercialiser ces services, il faut

cependant convaincre les clients, habitués

à un seul acte de paiement au moment de

l’acquisition du véhicule, de souscrire un

abonnement 3G en plus de celui de leur

propre smartphone ou de leur tablette. Nos

marges tarifaires sont très limitées par les

ordres de grandeur popularisés par les FAI,

et nous imposent de minimiser les coûts

d’exploitation (d’où l’intérêt de mutualiser

les infrastructures centralisées avec Nissan),

voire d’imaginer des modèles de partena-

riat avec les bénéficiaires de ces nouveaux

services (chaînes d’hôtellerie/restauration,

Chambres de Commerce et d’Industrie…),

à l’image des écosystèmes Apple ou Android

pour les applications sur smartphones. Un

tel écosystème informatique permettrait

également de limiter les investissements en

développement logiciel. Cependant la pru-

dence impose de rester vigilant concernant

les mises à jour récurrentes à distance des

logiciels, pour que les échanges avec le véhi-

cule ne mettent pas à mal sa sûreté de fonc-

tionnement.

BPLC envisage de son côté de développer

son appstore mais il subsiste pas mal de

questions sur le modèle choisi.

Renault étant avant tout fournisseur de mo-

bilité, cette réflexion est moins prioritaire

que le bon fonctionnement technique et la

sécurité du véhicule. Dans la conception du

véhicule, les services connectés, assez mar-

ginalement rentables, sont en forte concur-

rence avec d’autres services et équipements :

il est nécessaire de mettre en regard les coûts

d’intégration des nouveaux services avec

les bénéfices escomptés. Le V.E. est plus

propice à l’intégration de ces services car le

constructeur en a besoin. Dans le cas des vé-

hicules thermiques, cette nécessité est moins

évidente, sauf en ce qui concerne des pro-

blématiques de gestion de flotte. En dehors

d’une meilleure gestion du parc de batteries,

la question qui se pose est donc de savoir

si l’on peut refacturer directement au client

tout ou partie des coûts investis.

D’autre part, les expériences plus avancées

menées par Nissan et Samsung au Japon

et en Corée, où les smartphones sont déjà

très répandus, remettent en question l’inté-

gration d’équipements communicants là où

seule suffirait une interface avec ceux des

clients. Face à des acteurs spécialisés comme

Apple, le positionnement est difficile : Re-

nault n’est pas forcément l’acteur le plus légi-

time pour vendre de l’infotainment…

Quels sont les impacts de ces nouveaux services sur la conduite du changement en interne ?On constate que tous les clients n’essaient pas

les nouveaux services, malgré une prise en

charge totale des coûts par Renault pendant

les 3 premiers mois. Nos agents et conces-

sionnaires ne sont pas toujours à l’aise avec

ces nouveautés, d’autant plus que les clients

qui ont à l’avance fait le choix d’un véhicule

électrique sont déjà très informés. Les ven-

deurs sont mobilisés en moyenne deux fois

Internet des Objets

Système embarqué Better Place : état de charge de la batterie, mise en charge et puissance consommée

R-Link : programmation de la charge du véhicule

Application smartphone : état de charge et autonomie

Navigation TomTom avec localisation des points de charge

Page 17: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

30 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

plus de temps que pour un véhicule ther-

mique, d’où un manque d’intérêt à promou-

voir ces services supplémentaires s’ils ne

peuvent pas conclure une vente assez rapi-

dement. Renault cherche donc à augmenter

la motivation des vendeurs à proposer ces

offres : plus de 8 000 personnes ont été for-

mées en 2011, et ont accès à une documen-

tation en ligne pour répondre aux questions

des clients sur l’autonomie des V.E., et sur

les services connectés.

Chez BPLC, l’approche est assez différente.

Un Visitor Centre a été ouvert début 2010,

à grand renfort de publicité. Il a permis de

recueillir beaucoup de données marketing

sur les clients et d’améliorer la formation

des vendeurs. Equipés d’un iPad pour accé-

der à tout moment aux informations né-

cessaires, ceux-ci suivent un parcours très

rigoureux en accompagnant le client dans

le Visitor Centre.

Comment voyez-vous votre marché ?Nous assistons à une transition des modèles

d’usage, où la possession du véhicule cède

la place à la souscription à un service de

mobilité, dont l’illustration la plus radicale

est un service d’autopartage comme Auto-

lib’.

Nous souhaitons accompagner cette tran-

sition, tout en maintenant un niveau de

prestation assez élevé, que ne permet pas

un service de partage à cause des risques de

dégradations du fait du vandalisme ou de

cas d’utilisation irresponsable.

D’autre part Renault est pleinement

conscient que le développement du V.E. va

ouvrir le marché à de nouveaux entrants.

Cependant nous considérons que notre

expérience nous apporte l’avantage d’une

connaissance très fine de nos clients et de

ce qu’ils attendent de leur véhicule, et nous

avons identifié clairement les domaines

dont nous devons garder la maîtrise.

Quelles sont les contraintes de sécurité relatives aux données ?Le contraintes de sécurisation imposent

une séparation des deux réseaux de multi-

plexage Renault et BPLC, et le recours à des

communications cryptées.

Les données appartiennent en commun à

Renault et BPLC. Le modèle économique

de BPLC s’appuie sur l’information concer-

nant la batterie et l’utilisation du véhicule.

Afin de modéliser au mieux les consomma-

tions électriques et d’optimiser les calculs

prévisionnels d’autonomie, BPLC enre-

gistre un nombre considérable de données

sur ses clients, leurs habitudes de trajet,

leurs modes de conduite… Ces traitements,

effectués sur les serveurs BPLC, ne sont pas

maîtrisés par Renault.

Le client de BPLC peut s’opposer à l’utilisa-

tion de ses données privées, cependant les

contrats de vente mentionnent qu’il auto-

rise l’utilisation confidentielle des données

pour les besoins de l’activité de Renault et

de ses partenaires qui en auraient absolu-

ment besoin.

En Israël, c’est BPLC qui a la mainmise sur

100 % de la relation avec le client (location

de la batterie et vente du véhicule). Ces

pratiques ne sont pas applicables à tous les

pays. En France, les lois et leur supervision

par la CNIL ne permettent justement pas à

un fournisseur de services un niveau d’in-

trusion comparable à ce qui est pratiqué en

Israël.

Dans le cas du Danemark, BPLC doit de-

mander certaines informations à Renault

(qui vend le véhicule en direct). Dans ce

cas, Renault ne fournit que les données qui

lui appartiennent et sont indispensables à

BPLC, pourvu qu’elles ne mettent pas en

danger la relation entre Renault et le client.

La remontée des données est légalement

impossible en Europe, l’échange de données

entre Renault et BPLC demeure conforme

aux lois, en garantissant l’absence de lien

direct entre le numéro de batterie et le nom

du client.

Les juristes de Renault ont également véri-

fié que les contrats de BPLC mentionnent

les mêmes clauses de protection pour les

clients :

Pas de données nominatives (décorré-

lation de l’identifiant du véhicule et de

celui du client).

Pas de n° d’immatriculation du véhicule.

En termes de respect de la privauté des

données, Renault a mis en place plusieurs

garde-fous :

Respecter les lois, qui varient beaucoup

entre les pays. Dans le cas du Danemark,

c’est Renault qui a alerté BPLC sur les dif-

férences avec la France ou l’Allemagne ;

Mentions légales contractuelles.

Déclaration des fichiers à la CNIL ou aux

équivalents locaux ;

Vérification des contrats par les juristes

de Renault en central et des juristes locaux

dans chaque pays ;

Vigilance sur les données réclamées par

BPLC : pas de données superflues, pas

d’identifiants de personnes, moyennage

des données.

Dossier

Nicolas Remise (81)

est diplômé de l’École

Centrale en 1981,

option bio-ingénierie.

Après un an à l’UER Co-

chin-Port Royal, il en-

tame en 1984 une car-

rière de 20 ans à l’Ingénierie Renault avec des

postes en électronique, tôlerie et équipe-

ments de carrosserie. Responsable du Centre

Technique de Renault Samsung Motors

(Corée) de 2000 à 2003, il devient Directeur

du Projet Koleos, puis de Fluence ZE en

2009.

Ecran Better Place : véhicule en charge

R-Link : Réglage du préconditionnement du véhicule

Application R-Link de ZOE : navigation, éco score et flux d’énergie

Page 18: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 31

Internet des Objets

Une des faces cachées de l’Internet des Objets : l’apport de la technologie de SearchGuillaume Mainbourg et Julien Law-To - Dassault Systèmes Exalead

L’Internet des Objets

permet d’accéder à des flux numériques

via des interfaces physiques inédites et des

objets du quotidien connectés. Il existe déjà

par exemple des miroirs interactifs qui per-

mettent d’écouter la radio dans sa salle de

bains tout en surfant sur Internet. Ces expé-

riences nouvelles sont le fait d’entreprises

innovantes, dont les plates-formes de déve-

loppement permettent l’émergence de nou-

veaux usages autour des objets.

Avant de pouvoir diffuser l’information via

les objets, il faut la collecter efficacement et

la restituer intelligemment. C’est ce que réa-

lise Dassault Systèmes, en mettant la tech-

nologie de Search d’Exalead au service de

partenariats avec des entreprises comme Jos-

hfire ou en combinaison avec Netvibes, qui

a rejoint récemment Dassault Systèmes. Jos-

hfire fournit à des clients du secteur média/

communications en couplant sa technologie

à la plateforme Exalead, un service frontal

unifié de diffusion de flux de données riches

(texte, audio, vidéo) vers des objets divers

(radio ou télévision connectées, ordinateur,

smartphone, tablette, miroir interactif) où

vont s’incarner les flux numériques.

Nos partenaires se consacrent exclusivement

à l’interface de rendu des flux et de recherche

de contenu, mais c’est le Search qui gère

l’acheminement des contenus vers la plate-

forme de diffusion, en assurant la connexion

aux sources de données, avec une très grande

facilité de gestion de gros volumes (Big Data),

dans la plus grande variété d’accès possible.

C’est à partir du format pivot proposé par

notre index que les services de diffusion de

type JoshFire ou Netvibes peuvent récupé-

rer très simplement des données adaptées à

chaque type d’objet de diffusion.

JoshFire développe par exemple des scena-

rii d’utilisation simultanée de divers objets

(regarder la télévision tout en utilisant une

tablette pour les flux interactifs), ou de

transfert transparent de l’un à l’autre : vi-

sionnement du début d’un document sur un

grand écran, puis poursuite en mobilité sur

smartphone.

Pour alimenter les flux diffusés, il est néces-

saire de stocker des données en très gros

volume. L’application développée avec Josh-

fire pour le groupe Radio France prend en

compte un nombre élevé de stations, dont

les moyens de diffusion ainsi que les attri-

buts descriptifs de données sont de formats

très variables d’une chaîne à l’autre.

Il s’agit donc, depuis une source de données

pivot issue de contenus hétérogènes, de

définir une interface suffisamment versatile

pour s’adapter à chaque objet de diffusion,

avec des modes de fonctionnement et des

ergonomies différentes. Quel que soit son

format d’encodage, un même flux audio-vi-

suel devra s’afficher aussi bien sur le grand

écran d’un téléviseur, que sur une tablette

ou un smartphone. L’interface de recherche

devra être utilisable avec le clavier de l’ordi-

nateur, l’écran tactile de la tablette, ou sur un

téléviseur dépourvu de clavier.

Des services différenciateurs apportés par des innovations techniques de ruptureCes projets sont des exemples de Search-

Based Application (SBA) qui s’appuient sur

la technologie Exalead. Des données struc-

turées ou non structurées sont rassemblées à

partir de sources différentes, et lorsque c’est

nécessaire, leurs attributs de données sont

restructurés pour les rendre conformes à

une interface de recherche unique dévelop-

pée au cours de différents projets.

C’est cette interface qui est mise à la dispo-

sition des partenaires, comme Joshfire ou

Netvibes, en conformité avec les standards du

web et les protocoles d’échange classiques.

Historiquement, la technologie Exalead, en

s’appuyant sur des méthodes ingénieuses,

a permis de retrouver des données dans

un ensemble hétérogène, selon différents

critères : création d’un index du contenu

stocké, thématisation, recherche à facettes

(regroupement des résultats selon diverses

catégories de classement ou encore divers

éléments d’intérêt).

Pour structurer l’index et favoriser un trai-

tement sémantique, des attributs normali-

sés sont ajoutés. Par exemple dans le cas de

flux média : date, station de radio, thème de

l’émission, nom de l’émission, nom de l’invi-

té, nom de l’animateur…

Ensuite l’index est automatiquement ali-

menté en pratiquant des extractions sé-

mantiques sur les documents stockés. Des

algorithmes d’analyse du langage naturel

permettent en effet d’extraire des méta-don-

nées par détection d’entités nommées telles

que les noms de lieux, d’organisations, de

personnes (connues ou non), ou encore par

addition de « tags » en fonction de règles

métiers. Ce mécanisme permet d’extraire à

la demande un ensemble de documents sur

une période donnée, par exemple « toutes

les interventions radio du Premier Ministre

du mois écoulé ».

Cette approche du traitement des données

est différenciatrice par rapport à d’autres

Page 19: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

32 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Dossier

offres à plusieurs titres :

la gestion d’un grand nombre de sources

de données différentes ;

l’usage de l’extraction sémantique sur une

grande variété de données ;

la navigation par facettes ;

l’utilisation de ressources matérielles

standard : certains concurrents recourent

à des équipements conçus sur mesure,

surdimensionnés et très onéreux, au

contraire la technologie de Search distri-

bue données et traitements sur des ser-

veurs et disques banals, facilement exten-

sibles, y compris sur un « cloud » ;

la capacité de traiter des volumes

énormes, ceux auxquels fait référence le

vocable récemment popularisé de « Big

Data ». Le site web http://www.exalead.

com est un bon exemple de capacité et

d’évolutivité de cette solution : il donne

accès à un moteur de recherche indexant

16 milliards de pages web et 2 milliards

d’images.

Dans le cas de l’Internet des Objets, la tech-

nologie de Search est proposée en OEM

pour des applications de présentation de

flux. Le partenaire qui a la relation avec le

client média sous-traite ces fonctionnalités à

la brique de Search, fournie par l’éditeur de

logiciel. Le paiement du service est supporté

soit par le média, le créateur de contenu ou

l’annonceur. Le partenaire rémunère l’édi-

teur par une licence du logiciel ou sur le

chiffre d’affaires touché en revendant le ser-

vice final.

Les méta-données générées font partie de l’in-

dex et sont utilisées par l’application. La ques-

tion de la propriété des données ne se pose

donc pas puisque celles-ci appartiennent natu-

rellement au client qui achète l’application.

Page 20: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 33

Internet des Objets

Objets communicants : évolution du M2M vers un Internet des ObjetsNos solutions permettent à plusieurs objets connectés de com-

muniquer entre eux via un index central. Un des cas d’usage

est celui d’un canapé communicant qui permet à une télévi-

sion connectée d’afficher les préférences de chaque utilisateur

qui s’assied (reconnu grâce à une puce RFID placée dans son

portefeuille), et de lui proposer la reprise d’un document dont

le visionnement aurait été interrompu. Cette relation en peer-

to-peer traduit l’abandon progressif des modèles verticaux

caractérisant le M2M pour évoluer vers plus d’ouverture entre

objets et vers la notion d’écosystème.

L’application Joshfire démontre des fonctionnalités intéres-

santes. Le dernier point à vérifier dans la mise en œuvre de

ces architectures est leur réelle capacité à traiter les volumes

considérables de l’Internet des objets, non pas en millions

mais en milliards d’éléments. On peut à cet égard citer un autre

exemple d’objets « communicants passifs », avec l’application

mise en œuvre à La Poste pour suivre l’ensemble des plis traités

sur l’ensemble du territoire national. L’index mis en place pour

cette application permet de stocker et de restituer plus de 6

milliards d’événements, ce que les technologies classiques de

bases de données n’avaient pas réussi à faire.

L’originalité de ces solutions est donc de ne pas utiliser de base

de données, et de développer des applications fondées sur des

index. Dans ce cas, le module de recherche est beaucoup plus

qu’une simple fonctionnalité : c’est un élément de rupture, car

cette technologie de recherche est capable de traiter d’énormes

volumes en alliant une très grande agilité à de très bonnes per-

formances.

Julien Law-To est actuellement ingénieur

de recherche et chef de projet chez Dassault

Systèmes EXALEAD dans une équipe d’in-

novation. Ses centres d’intérêts profession-

nels sont le traitement de données multimé-

dia hétérogènes : indexation d’images de vidéos et de musiques.

Double diplôme de docteur en informatique dans le domaine

de la « Computer vision » et d’ingénieur (spécialité physique) de

l’ESPCI ParisTech.

Guillaume Mainbourg (80) a démarré sa

carrière chez Accenture. Il est ensuite DSI

du Groupe Bis (Services aux Entreprises),

puis DSI de Total Raffinage Marketing. En

1997 associé chez Ernst & Young Consul-

ting, qui fusionne en 2000 avec Capgemini. En 2005, il intègre

EXALEAD, une start-up de 25 personnes, qui conçoit, développe

et commercialise un logiciel moteur de recherche pour les entre-

prises. Exalead rejoint le groupe Dassault Systèmes en 2010. Il

est en charge du déploiement d’EXALEAD chez ses clients. Il est

également professeur d’Informatique à l’École Centrale Paris.

Page 21: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

34 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Dossier

L’opportunité de l’Internet des Objets dans le libre-service

Q u e

ce soit dans les banques

via les distributeurs de billets ou dans le

transport avec les automates de vente de

billets, le canal libre-service se répand de

plus en plus dans notre vie quotidienne. Un

faisceau de raisons motive cette tendance :

envie du client de maîtriser la transaction

sans interaction humaine, automatisation

de tâches simples sans valeur ajoutée pour

concentrer l’eff ort humain sur les cas com-

plexes ou sur les clients qui recherchent

cette interaction, réduction de personnel,

disponibilité 24h/24 à moindre coût…

Le canal libre-service se concrétise généra-

lement par des automates, des sites inter-

net, ou encore des applications dédiées aux

smartphones. Lors de l’ajout de ce canal à un

système pré-existant, deux problématiques

clefs sont en général à considérer : l’intégra-

tion au sein d’une architecture peu fl exible,

et le dépassement de la simple réplication

des fonctions existantes pour off rir de nou-

veaux services.

Concernant l’extension d’un système, deux

grandes stratégies sont envisageables : mo-

difi er le serveur central pour prendre en

compte les nouveautés ou, au contraire, ne

pas le modifi er et rendre les évolutions aussi

transparentes que possible.

La première est typique de l’approche Ma-

chine To Machine, fondée sur une archi-

tecture client/serveur avec une centralisa-

tion des données comme moyen d’échange.

Une évolution de système nécessite alors

une évolution du serveur central ce

qui, pour de nombreuses applications,

implique des coûts importants (temps,

investissement, risque directs et colla-

téraux).

La seconde, plus décentralisée, est

celle de l’Internet des Objets : c’est

en rendant plus intelligents certains

éléments périphériques que de nou-

velles chaînes d’information peuvent se

développer, sans modifi cation du serveur

central.

Dans ses activités en rapport avec l’automa-

tisation, la société IER a souvent fait le choix

d’ajouter aux systèmes des extensions intel-

ligentes qui permettent de bénéfi cier d’in-

novations sans nécessairement surcharger

la logique centrale. Ceci favorise l’évolution

des communications vers plus de « peer-to-

peer », et ouvre généralement le système à

d’autres intervenants.

Par exemple, pour les étiquettes de suivi

des bagages en aéroport, la transition du

code-barres au RFID peut s’eff ectuer indé-

pendamment de modifi cations au niveau du

DCS (Departure Control System : serveur

central des opérations aériennes d’une com-

pagnie en aéroport), mais en se concentrant

sur l’imprimante. Celle-ci est ainsi capable

de détecter la capacité RFID du papier, pour

ensuite selon la compagnie aérienne et les

données envoyées eff ectuer, en plus de l’im-

pression classique, un encodage de données

à destination de nouveaux lecteurs.

Grace à ce traitement, le bagage peut quitter

son état d’étiquette passive pour devenir un

objet communicant, capable, par exemple,

de garder trace du passage sous les détec-

teurs d’explosifs via une écriture sur la puce,

permettant ainsi de garantir sa conformité

au moment du chargement dans l’avion. Par

cette approche se crée donc au sein de l’aéro-

port un nouvel écosystème de données dyna-

miques dont le bagage peut devenir le vec-

teur, sans modifi cation des serveurs centraux.

La vision va bien sûr plus loin dans un pro-

jet comme Autolib’, où l’ensemble de la loca-

tion d’une voiture (réservation de la place de

départ et d’arrivée, prise, utilisation, dépose)

peut être réalisée de manière automatique,

mais donne aussi plus de place à l’humain et au

service pour les utilisateurs qui en ont besoin.

Ce choix de l’interaction est dans les gènes de

l’Internet des Objets : l’objet par sa commu-

nication n’est plus mono canal et s’ouvre bien

plus facilement à d’autres systèmes.

Le projet a été créé in extenso par le groupe

Bolloré dans un temps record (attribu-

tion du projet en décembre 2010, premier

déploiement un an plus tard), la fl exibilité

d’une intelligence répartie a probablement

été critique pour permettre au système

d’évoluer encore aujourd’hui de manière

organique : rendre les voitures et les bornes

encore plus communicantes.

Fort de son expérience dans la gestion du

libre-service, IER a fourni les systèmes

d’accès à la voiture, de géo-localisation et

de communication de la voiture avec le SI,

le système du centre d’appel, et également

l’ensemble des 3 types de bornes :

la Borne d’Abonnement : elle permet de

s’inscrire en station et d’obtenir sa carte

Autolib’ sans contact qui sera au cœur de

toutes les interactions

la Borne de Location (particulièrement

visible le soir avec son anneau bleu) : elle

permet de s’identifi er à une station afi n

d’avoir accès à une voiture avec ou sans

pré-réservation.

la Borne de Recharge : toute voiture garée

est connectée au système par câble de

recharge via la Borne de Recharge (une

voiture est considérée comme utilisée

de son débranchement à son rebranche-

ment). Ces bornes sont également dispo-

nibles pour recharger des véhicules non

Autolib’.

Page 22: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Damien Roux (98). Double diplôme de l’école centrale

Paris et Master de l’Université de Tokyo, Damien Roux

rejoint IER en 2000 (groupe Bolloré). Dans un premier

temps basé à Tokyo il contribue au développement de

l’activité dans la zone asiatique (centre de réparation, sup-

port technique à la vente). Il devient ensuite Directeur

des Études logiciels (essentiellement autour de 3 acti-

vités : logiciel embarqué pour des terminaux type imprimante / lecteur,

Middleware / applications pour des bornes, architecture serveur pour les

approches de supervision). Récemment il est en charge du Marketing des

solutions logicielles et bornes avec notamment une spécialisation dans le

traitement IT du passager du milieu aérien.

www.centraliens.net 35

Internet des Objets

Avec Autolib’, les voitures acquièrent non

seulement une connectivité mais également

une capacité de traitement. Ce n’est plus

seulement le système qui a connaissance

de l’emplacement de ses actifs, bornes ou

voitures, mais la voiture elle-même qui sait

qu’elle est louée, par qui, à partir de quel

endroit, et souvent pour aller où (lorsque le

GPS est utilisé et suivi).

On retrouve ici la deuxième problématique

de l’automatisation évoquée précédemment :

l’ajout de nouvelles fonctions. Cette anima-

tion soudaine d’un objet jusqu’alors passif

nécessite souvent un changement de percep-

tion par l’utilisateur. Ainsi, un couple d’amis

s’étonnait récemment que presque tous les

utilisateurs d’Autolib’ les ayant précédés

écoutaient la même radio. C’était sans savoir

que la voiture enregistre systématiquement

la dernière station de radio choisie par l’uti-

lisateur et la resélectionne à sa location sui-

vante.

De plus en plus de fabricants animent notre

quotidien : un pèse-personne capable de

reconnaître l’utilisateur et diff user son poids

sur internet, une prise électrique signalant

son état à distance au propriétaire et plus

généralement la domotique qui donne à

une maison des sens par l’ajout de capteurs

(présence, lumière…) ainsi que des actions

(actionnement de prise, lancement de pro-

gramme).

Une réalisation soudaine de cet état peut

indirectement créer un malaise, par crainte

que notre environnement nous espionne

sournoisement, et que des tiers profi tent de

cette extension de capacité. Mais ces sys-

tèmes sont construits pour l’utilisateur afi n

qu’il puisse bénéfi cier lui-même de ces nou-

velles combinatoires, et c’est en général seu-

lement lui qui peut profi ter de ces nouvelles

extensions.

Il est important pour chacun d’entre nous de

dépasser la crainte instinctive que peut créer

l’apparition d’objets animés. Il faut profi -

ter de l’émerveillement de leur apparition à

notre époque, avoir une conscience claire de

leurs capacités et surtout mettre en œuvre

cet incroyable potentiel.

Ce changement de paradigme n’est pas ré-

servé aux professionnels mais nous concerne

tous. Si le bricolage du siècle dernier était

l’évidente association d’un clou et d’un mar-

teau, l’internet des objets devrait créer un

nouveau bricolage d’intégration informa-

tique permettant d’associer un radieux soleil

matinal avec l’ouverture des rideaux pour

nous inciter à en profi ter…

IER est une société du groupe Bolloré

dont une large part des activités tourne

autour de l’automatisation. Ainsi les

bornes jaunes de la SNCF permettant

de retirer ou d’échanger son billet, une

partie des bornes de La Poste permet-

tant principalement d’aff ranchir ses

envois, de celles de la CNAM, de la

CNAF, et les bornes d’enregistrement

en libre-service dans les aéroports.

Page 23: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

36 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Dossier

SmartGrains : la startup « IoT »

Saviez-vous qu’en moyenne, en France,

30 % du trafic intra-urbain était consacré

à la recherche de places de stationnement ?

Que pour Paris, la pollution induite par ce

« trafic inutile » équivalait en ordre de gran-

deur à 1 000 avions tournoyant en perma-

nence au-dessus de la tour Eiffel ? Que les

seuls français perdent chaque année plus de

100 millions d’heures cumulées à garer leur

voiture ? Hélas la situation nous semble tel-

lement acquise que, par résignation proba-

blement, beaucoup d’entre nous ne sommes

même pas conscients du problème !

Courant 2008, mes deux associés et moi

avons pourtant décidé de relever le défi :

alléger le poids de la « recherche de place

de stationnement ». Ainsi est née Smar-

tGrains : nous avons conçu et produit des

capteurs miniatures, que nous « collons »

sur chaque place de stationnement ; ces cap-

teurs détectent si un véhicule est stationné

ou non, puis communiquent l’information

de proche en proche jusqu’à des panneaux

d’affichage guidant les automobilistes vers

les (dernières) places libres. Évidemment,

l’information est également remontée

jusqu’à des serveurs Web - par exemple à

l’aide de passerelles GSM/GPRS - ce qui

permet d’afficher l’emplacement des places

libres sur votre téléphone.

Nous avons fait du chemin en 3 ans : partis

début 2009 de la feuille blanche, avec un

capital modeste, nous avions notre premier

employé, deux stagiaires et une première

série de prototypes en fin d’année. Cela nous

a permis de convaincre et d’être suivis : nous

avons remporté de nombreux concours

d’innovation, obtenu plusieurs prêts d’hon-

neur, et surtout réalisé notre première levée

de fonds en 2010. Au bout de deux ans,

les choses prirent une nouvelle tournure

lorsque nous avons remporté notre pre-

mier appel d’offres important : la croissance

était enfin financée « sainement » - par du

chiffre d’affaires ! Aujourd’hui SmartGrains

a produit et déployé plus de 5 000 capteurs,

emploie 10 personnes, vient de dépasser le

million d’euros de chiffre d’affaires annuel, et

guide 100’000 automobilistes tous les jours

sur les parcs de stationnement de grands

centres commerciaux.

Rien n’est encore gagné : les ornières sont

toujours présentes, et peut-être plus insi-

dieuses car notre burn rate est devenue

importante (comprenez : nous avons des

bouches à nourrir tous les mois) et toute

erreur de stratégie - produit, commerciale,

financière - peut nous faire prendre du re-

tard et entamer notre trésorerie. Pour autant

nous avons déjà la satisfaction d’avoir réalisé

quelque chose de bien, et surtout d’avoir déjà

levé à plusieurs reprises des pierres d’achop-

pement qui auraient pu nous être fatales.

Beaucoup sont liées à la nature de notre

activité et de notre produit, et différencient

une startup IoT d’autres créations d’entre-

prise. Ces singularités de la startup IoT se

déclinent suivant les 3 domaines que l’entre-

preneur scrute en permanence, les 3 fronts

sur lesquels il alterne son combat pour les

faire progresser de concert : le produit, la

finance et le marché.

ProduitLa startup IoT se distingue des autres par

la multiplicité des métiers scientifiques et

techniques que vous devrez mettre en œuvre

3 ans déjà ! A l’heure de cette publication ma société SmartGrains souffle sa troisième bougie : c’est encore peu, mais suffisant pour fournir aux (futurs) entrepreneurs de l’Internet des Objets un premier retour d’expérience sur les spécificités d’une création de startup « IoT » (Internet of Things).

© SmartGrainsApplication Parksense de guidage vers les places libres

Page 24: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 37

Internet des Objets

dans votre proposition de valeur. Pourquoi ?

Parce que par nature, l’IoT commence non

pas dans un ordinateur mais dans le monde

physique ; et par nature, le monde physique

est plus complexe, hétéroclite et variable

(en un mot, « désordonné ») que le monde

de l’informatique. Cela reste vrai, que vous

conceviez votre propre matériel (comme

c’est le cas de SmartGrains) ou que vous tra-

vailliez sur des cibles matérielles déjà exis-

tantes (comme des téléphones portables) : à

la différence de startups Web par exemple,

dont le travail de conception, de développe-

ment et de test, peut intégralement se faire

dans un bureau sur un ordinateur, quitte

à user des « abstractions » informatiques

nécessaires pour les simulations, la startup

IoT doit gérer du matériel et des interactions

avec l’environnement ; et cela change toute

l’histoire du développement produit.

Avoir recours à des experts dans chaque do-

maine, se concentrer sur un cœur de métier

circonscrit et dimensionné au regard de vos

moyens financiers, et sous-traiter les autres

sujets techniques, n’est qu’une partie de la

solution : en effet, c’est toujours vous qui

serez aux manettes, et le pilotage des experts

ou de la sous-traitance peut facilement déri-

ver, voire échouer, si vous ne maîtrisez pas

convenablement le métier.

Cette réflexion prend tout son sens dans le

cas de SmartGrains ; pour nous, les points

chauds concernent deux sujets de recherche-

développement fortement liés à notre plate-

forme matérielle : nous devons détecter des

véhicules, et nous devons communiquer

l’information de présence/absence des vé-

hicules en quasi-temps-réel, en respectant

un profil de consommation très contraint

(chaque capteur est alimenté par deux batte-

ries de format AA pendant une durée mini-

male de cinq ans).

Un exemple concernant la détection véhi-

cule : nous avons arbitré en faveur de cap-

teurs magnétiques, c’est-à-dire que nous

mesurons de façon très précise le champ

magnétique terrestre en 3 dimensions, et

nous typons les déformations de ce champ

liées à la présence de matériaux ferroma-

gnétiques situés dans les châssis des véhi-

cules. Les contraintes de consommation

d’une part, et de vitesse de décision d’autre

part, nous imposent de prendre beaucoup

de mesures de courte durée. Or, les circuits

analogiques consommeraient trop si nous

devions, à chaque cycle de mesures, attendre

leur régime stationnaire. Nous devons

donc atteindre une précision métrologique

digne d’instruments de laboratoire, tout en

travaillant systématiquement en régimes

transitoires. Relever ce défi nous a coûté

plusieurs reconceptions électroniques ; plu-

sieurs semestres de travail sur les pilotes lo-

giciels, aidés d’une instrumentation ad hoc ;

la mise au point de bancs de tests « mai-

son », sur lesquels passent tous les capteurs

avant leur livraison.

Pourtant le travail ne s’arrête pas à la seule

mesure du champ magnétique : le traitement

du signal occupe toujours une part impor-

tante de notre recherche-développement. La

qualification des déformations magnétiques

liées aux véhicules – et le filtrage des pertur-

bations – ne peuvent se faire qu’à l’appui de

données de terrain, qui ne sont pas aisées à

récolter. Au final nous estimons qu’environ

30 % du temps de l’équipe détection est pas-

sé sur le terrain.

Les défis que nous avons dû relever dans le

domaine réseau sont aussi importants, et la

radiofréquence a aussi apporté son lot de

« surprises de terrain » qui ont nécessité un

temps d’expérimentation important, et une

instrumentation « maison » spécifique.

Selon moi les startups IoT, pour leur déve-

loppement produit, partagent ces spéci-

ficités : une conception faisant appel à de

nombreux savoirs hétérogènes, un dévelop-

pement électronique et informatique plus

long et sans doute plus expert (l’informa-

tique embarquée est, comparativement à

d’autres types de programmation, un travail

d’orfèvre), et l’omniprésence de l’expérimen-

tation terrain.

Le volet « produit » ne serait pas complet si

nous ne mentionnions les opérations : il faut

évidemment produire et assembler (dans

notre cas, de l’électronique et de la méca-

nique) ; piloter les stocks et la logistique ;

déployer ; puis maintenir. Le défi est de bien

s’entourer, mais aussi d’être bon gestion-

naire en sachant garder un œil sur chacun

des sujets – car chacun peut « dériver » ! Le

recul nous montre que la startup grandit par

phases de 12 à 18 mois, et que les modes de

fonctionnement doivent évoluer en consé-

quence : ce serait une erreur, que de viser

à tout prix l’optimalité industrielle lors des

premières séries de votre produit – patien-

tez, ce sera plus simple lorsque vous aurez

plus de moyens, et surtout plus d’expérience.

© SmartGrainsCapteur magnétique collé sur les places de parking

© SmartGrainsBorne d’annonce des places libres pour les parkings de centres commerciaux

Page 25: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

38 Centraliens no621 [Septembre-Octobre 2012]

Dossier

FinanceLes spécificités « Produit » que j’ai listées

laissent entendre que les besoins financiers

d’une startup IoT sont plus importants

que ceux d’une startup classique. Ce n’est

pas forcément le cas sur le moyen terme :

par exemple, de nombreuses startups Web

conditionnent leur succès à l’atteinte d’une

« masse critique » d’utilisateurs, dans des

secteurs où le coût d’acquisition marginal

est devenu important : ces entreprises sont

finalement plus consommatrices de cash

que beaucoup de startups IoT. Mais les

dépenses d’une startup IoT dans les phases

de lancement sont probablement plus im-

portantes. Dans de nombreux cas vous ne

pourrez pas passer outre le développement

d’une électronique « maison » - que vous le

pilotiez vous-même ou le fassiez faire : pen-

sez alors qu’une modification de circuits et

la production d’une nouvelle série de proto-

types coûte, à un facteur près, 10keur et 6

semaines de délais. Ce n’est pas négligeable

lorsqu’on se lance à budget contraint, car ces

coûts s’ajoutent à ceux habituellement sup-

portés lors d’une création d’entreprise. Bref,

il faut avoir les reins solides.

Pourtant, de nombreuses opportunités

existent et la France est bien placée pour lan-

cer une startup : les dispositifs ne manquent

pas et, avec une bonne stratégie, peuvent

être cumulés. Bien que le chiffre d’affaires ait

désormais pris le relais, nous avons investi le

temps qu’il fallait, au cours des 24 premiers

mois de SmartGrains, pour remporter prêts

d’honneurs (Scientipôle Initiative, Réseaux

Entreprendre), concours (Ministère de la

Recherche Émergence, Création-Dévelop-

pement, Créacc’, Grands Prix de la ville de

Paris, etc.), prêts (Oséo), aides fiscales (CIR,

dispositif jeunes docteurs). Par ailleurs, la

startup IoT est sans doute mieux position-

née que les autres pour être aidée : le secteur

de l’Innovation apprécie le caractère « in-

dustriel » de ces initiatives, et en reconnaît

les besoins financiers accrus ; cela n’est peut-

être que l’air du temps, mais la France sait

qu’elle doit aider l’industrie, et nous avons

clairement ressenti ce vent favorable.

Enfin, concernant la perception par des

investisseurs : je ne pense pas qu’il y ait de

« spécificités IoT » lors d’une levée de fonds ;

la partie se joue ailleurs. Une poignée d’in-

vestisseurs manifestent un rejet radical des

business plans faisant état d’une production

de « matériels », alors que la majorité y voit

un levier de différenciation. Mais en réalité,

le caractère IoT se manifeste davantage dans

le profil des Business Plans : si tout ou partie

de votre proposition de valeur est matériel,

vous aurez structurellement plus de chance

de faire une belle PME de croissance, que

d’emboîter le pas aux Success Stories du Web.

Il est capital, et d’ailleurs assez aisé, de faire

part aux investisseurs de ce discours « risk/

return », car ce n’est souvent pas l’histoire à

laquelle ils sont accoutumés en rencontrant

des entrepreneurs.

MarchéLa stratégie Marché est le volet le plus im-

portant. Nous avons fait le choix d’être entiè-

rement « verticalisés », c’est-à-dire que nous

maîtrisons l’intégralité de la chaîne de valeur

pour livrer notre produit « clé-en-main »

sur notre niche de Marché. Nous ciblons

nos efforts sur une application unique, dont

nous souhaitons devenir le leader interna-

tional. Cela a un prix : nous refusons d’autres

marchés sur lesquels nous sommes sollici-

tés ; nous n’avons pas d’activité de « conseil »

pour assurer un revenu récurrent ; etc. Gare

à la dispersion : j’ai pu rencontrer beaucoup

d’entrepreneurs qui « cherchaient leur mar-

ché » et, à ce titre épuisaient leurs ressources

au lieu de les concentrer ; le conseil est bien

connu mais sa mise en pratique nécessite de

la rigueur.

D’autres stratégies IoT se sont mises en place

au cours de 5 dernières années. Les marchés

IoT sont naissants et encore mal ciblés ;

comme le « vendeur de pelle » pendant la

ruée vers l’or, certaines sociétés décident

d’offrir des services « ciblés IoT » en conce-

vant par exemple des MiddleWares, en ven-

dant des outils de développement, d’analyse

de code, etc. Bref, l’écosystème IoT se met

progressivement en place, source d’opportu-

nités pour les « partenaires IoT ».

Enfin, une spécificité des startups IoT que

je vois réussir est qu’elles se placent dans la

catégorie des entreprises qui « répondent

à un besoin existant ou latent » : le pari in-

verse, qui consiste à « créer le marché » ou

« changer les habitudes », est hasardeux ;

les scénarios futuristes de « l’intelligence

ambiante » sont souvent des leurres. Par

sa nature (risques sur le produit, caractère

industriel, burn rate important), une startup

IoT peut rarement s’offrir le luxe de prendre

des risques Marché trop importants.

Finalement, la création de startup IoT n’est

pas le chemin de la facilité ! Aux difficultés

habituelles d’une création, s’ajoutent des

défis de développement produit liées à la

diversité des sujets et aux besoins accrus

d’expérimentation. La startup IoT n’est pas

l’occasion de faire un « coup », mais plutôt

de développer une belle PME de crois-

sance. Elle doit limiter ses risques com-

merciaux pour concentrer ses efforts sur le

développement produit et le financement.

Mais ce que nous pouvons déjà dire après 3

ans, c’est que cet amoncellement de pierres

d’achoppement forge réellement l’entre-

preneur qui est en vous : rien que pour cela

l’aventure mérite d’être tentée !

© SmartGrainsCapteurs sur place de parkings de centres commerciaux

Aymeric PuechAymeric est diplômé des Ponts et Chaus-sées (2003), du MSc en Intelligence Artificielle de l’Imperial College London (2004) et de

Sciences-Po Paris (2005). Après un court passage en banque d’affaires à sa sortie d’école, Aymeric rejoint en 2006 un cabi-net de conseil en stratégie où il rencontre Antoine Venet (Télécom Paris 2004, HEC Entrepreneurs 2005) ; ils collaborent trois ans, puis rencontrent Cedric Gepner (HEC 2006), qui travaillait alors sur les problé-matiques de mobilité urbaine. À trois, ils décident de co-fonder SmartGrains en 2009.

Aymeric est actuellement associé et DG de

SmartGrains.

Page 26: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 39

Internet des Objets

Smart Grids :l’avènement du consomm’acteur grâce aux objets communicants

À l’image de nombreux autres cas d’utilisation de l’IdO, ces bénéfices

ne seront pas le simple fait de solutions purement techniques. Ils vien-

dront de changements profonds, permis par la technologie, non seu-

lement dans la gestion des réseaux de distribution par les fournisseurs,

mais aussi dans les interactions au quotidien et les chaînes de valeurs

complexes qui impliquent les consommateurs.

Pour expliquer plus concrètement cette révolution à venir, nous nous

appuierons sur les étapes suivantes :

Préciser, au-delà du « buzzword », ce que signifie le Smart Grid pour

un fournisseur d’énergie,

Détailler en quoi le Smart Grid est un exemple typique d’application

de l’IdO,

Montrer comment la technologie des Smart Grids va transformer la

relation du client à son fournisseur d’énergie, en l’amenant à maîtriser

un environnement domestique enrichi souvent appelé « Smart Home »,

Illustrer le rôle de cette relation dans de nouveaux modèles d’interac-

tion complexe entre consommateurs et fournisseurs, qui précisément

donneront au Smart Grid toute sa valeur.

Un peu de technique (pour les plus courageux ou les curieux) : applications de l’IdO au Smart GridLe concept de Smart Grid désigne la convergence de multiples tech-

nologies afin d’assurer la fourniture d’énergie de manière fiable et

économique. Alors que la gestion traditionnelle du réseau dépend

de multiples opérations manuelles effectuées localement, le Smart

Grid permettra aux opérateurs de gérer et superviser des millions

d’appareils et de capteurs.

Ainsi, le Smart Grid dispose de capacités de communication éten-

dues permettant l’utilisation de compteurs intelligents, et d’outils de

supervision de transformateurs et autres systèmes de collecte et de

traitement de nombreuses informations :

D’un point de vue opérationnel, le Smart Grid fiabilisera les ré-

seaux, par une gestion plus efficace de l’utilisation des actifs et de

l’énergie répartie (i.e. produite par les clients), et réduira leur em-

preinte carbone. La gestion de ces opérations en quasi-temps réel

à une échelle proche du lieu de consommation en fait l’élément clé

de la manière dont fournisseurs et consommateurs optimiseront

l’utilisation de l’énergie dans le futur.

Le Smart Home : la perception du Smart Grid par le consommateur d’énergie au quotidienAu début du XXe siècle, l’électricité a commencé à améliorer la vie

quotidienne en apportant lumière après le coucher du soleil et puis-

sance aux machines. Aujourd’hui, nos maisons sont équipées de

nombreux appareils, le plus souvent commandés localement par

intervention manuelle (interrupteurs ou boutons), n’offrant qu’un

contrôle et une gestion de consommation énergétique très limités.

De même, les factures d’énergie sont difficiles à analyser. Reçues au

mieux tous les mois, de nombreux jours après l’utilisation du ser-

vice, elles ne facilitent pas la corrélation des dépenses avec les usages

ou, le cas échéant, la mesure de l’énergie produite par un panneau

solaire.

Comme le mentionne l’article de synthèse qui ouvre ce dossier, les Réseaux Intelligents d’Energie et d’Eau, souvent appelés « Smart Grids », font partie des applications prometteuses de l’Internet des Objets (IdO). En effet, la capacité à communiquer et traiter des informations d’objet à objet permettra dans ce cas d’optimiser la distribution et la consommation de l’énergie et de l’eau, ressources de plus en plus précieuses dans un monde en croissance.

Page 27: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

40 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Dossier

En combinant l’utilisation d’appareils de

plus grande efficacité énergétique, plus fa-

ciles à commander, et l’accès en temps réel

aux statistiques de consommation d’énergie,

le concept de Smart Home donnera à l’abon-

né des moyens pratiques de gérer pro acti-

vement sa consommation, pour limiter ses

dépenses et son impact environnemental.

Les portails dédiés fournissent une super-

vision à distance les appareils ménagers,

via Internet ou depuis un téléphone mo-

bile. Chacun peut accéder au bilan de sa

consommation, détaillé par plage horaire,

et bénéficier d’un système d’alarmes et

d’alertes automatiques.

Les afficheurs donnent aux clients un

accès en temps réel à leur consomma-

tion et favorisent la maîtrise des usages et

des coûts associés. Dans un système plus

sophistiqué, ils permettent aussi de déter-

miner la proportion d’énergie d’origine

renouvelable, et l’empreinte carbone résul-

tante.

Les appareils ménagers automatisés sont

gérés en fonction des préférences établies

par le client, et pourront ainsi être paramé-

trés avec des scénarios épousant la routine

du quotidien.

Combinant les systèmes précédents, les

systèmes d’intelligence avancés des Smart

Homes permettront aux consommateurs

d’utiliser la valeur en temps réel de leur

consommation pour gérer leurs dépenses

énergétiques à n’importe quel moment. La

Smart Home sera ainsi capable d’effectuer

des réglages au plus fin, afin de coller aux

habitudes de consommation, par exemple

en adaptant le confort au prix de l’énergie,

ou en différant certains usages (recharge

de véhicules électriques, gros électromé-

nager).

Dans ce cadre, la communication avec les

fournisseurs d’énergie pourra s’établir via

de multiples messages transmis à travers

le portail client, l’afficheur ou le mobile

du client. Elle couvrira tous les domaines :

conseils d’économie d’énergie, alertes mé-

téo, informations sur les interventions liées

à une coupure d’électricité, ou même des

commandes vers les appareils de la mai-

son.

FonctionnalitéCommunication

M2M/IdO entre…Bénéfices

Supervision à distance et remontée de données

Système de collecte de données etcapteurs/systèmes

de commandes (sur le réseau, jusqu’aux transformateurs voire jusqu’aux compteurs)

Meilleure gestion de la relation client, analyse fine de données, mesure précise de la qualité de service.

Comptage intelligents « Smart Metering »

Compteurs intelligents (éléments fondamentaux

du Smart Grid) et concentrateurs

Visibilité sur les habitudes de consommation, facturation plus précise, en fonction des périodes de consommation.Alarmes (cas de violation du réseau), repérage des zones de coupure pour mieux cibler les interventions. connexion/déconnexion à distance un consommateur, suivi de la production d’énergie d’un client, gestion des dépassements de puissance, délestage en cas de pic de charge…

Supervision des transformateurs

Systèmes de commande automatisés et capteurs

sur le réseau

Optimisation de la distribution, réduction des pannes, meilleure longévité des transformateurs, réduction des coûts d’entretien

Gestion du Réseau de Distribution

Système de gestion de réseau et divers capteurs

Meilleure identification et compréhension des incidents sur le réseau, maintenance programmée, parfois prédictive, fondée sur des analyses dynamiques évaluant en continu la « santé » du réseau

Gestion en Temps Réel des Coupures de Courant

Système de gestion de réseau et divers automatismes

Connaissance en temps réel de l’état du réseau, en cas de coupure de courant, facili-tant les arbitrages à faire pour sa remise en marche et les interventions sur le terrain

Systèmes complémentaires

Systèmes de contrôle de la tension, de balance de phase, commutation automatique pour la réalimentation d’une ligne, meilleure maîtrise du fonctionnement du réseau

Page 28: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 41

Internet des Objets

R T U

station

station

station

station

station

station station

battery

dg

M3 M4

WEATHER TRACKER OWEN CH24

station

ts

M3 M4

CAM 1

CAM 3CAM 4

CAM 2

M3 M4

station

station

station

station

station

station station

battery

dg

station

station

station

station

station

station station

battery

dg

station

station

station

station

station station

battery

station

dg

station

station

station

station

station station

battery

station

dg

R T U

M3 M4

station

station

station

station

station station

battery

station

dg

1.

6.

10.

15.

H2O

20. 21.

16. 17. 18. 19.

12. 13. 14.11.

7. 8. 9.

2. 3. 4. 5.

Baie

Géorgienne

Larry,

opérateur

Paula,

cliente

Les personnages : Larry et PaulaAvis de tempête : on prévoit de violents orages

et fortes pluies dans la région d’Owen Sound

Owen Sound

Orangeville

Douglas point

Tobermory

Tout va bien… Tous les compteurs sont connectés

Gestion de la demande

R.A.S. dans la région…

Vidéosurveillance à distance des centrales (« stations ») Génération distribuée activée

Un arbre tombe sur les fils et déclenche les coupe-circuit

Le système de supervision du réseau reçoit une notification d’incident

Génération distribuée désactivée

Panne de courant

Plusieurs circuits sont coupés

Arrêt de l’Éolienne (génération distribuée)La panne de courant dans la région cause

l’ouverture automatique des coupe-circuit

de protection du réseau

L’unité terminale distante

signale la panne au système

de supervision et l’opérateur

peut vérifier l’état de la centrale

via la vidéosurveillance

Une centrale

de secours

prend le relais

La demande

est transférée

automatiquement

à une autre centrale

Larry inspecte le réseau… Il rétablit le courant

du plus grand nombre de clients possible

Larry vérifie que le réseau est stable… La génération

distribuée redémarre automatiquement Génération distribuée activée

Larry observe une baisse d’activité Éolienne, d’où une baisse de génération distribuée et une instabilité de la tension…

Il active les régulateurs de charge…

Les régulateurs de charge entrent en jeu

Les régulateurs ne suffisent pas. La tension est encore en baisse.Larry démarre une procédure

de gestion de demande et le recours aux batteries

de stockage

Gestion de la demande activée

Gestion de la demande et batteries permettent

de rétablir la tension

Thermostat abaissé de

2 degrés

Boîtier de commande à distance

Chauffe-eau éteint

Larry surveille la progression des réparations. Il segmente le réseau et rétablit autant de zones que possible en attendant les réponses des Équipes de terrain… Il a rétabli la

génération distribuée…

Il a aussi utilisé les batteries de stockage

et activé la gestion de la demande

Il est même possible d’aller au-delà de la

gestion énergétique en intégrant divers

services domotiques (télésurveillance,

télésanté, divertissement, qui faciliteront

l’adoption du système par l’utilisateur.

Ainsi, les Smart Homes viseront à satisfaire

le consommateur par une interaction plus

efficace avec le fournisseur, pour garantir

une consommation maîtrisée, et une énergie

disponible aux meilleurs tarifs possibles en

fonction des besoins.

Smart Grid : comment se crée la valeur ? Technologies et nouvelle relation fournisseur-consom-mateur se combinent en un nouveau modèle qui révolutionnera nos habitudes quotidiennesComme pour beaucoup d’autres domaines

utilisant la technologie IdO, la valeur liée

aux Smart Grids et à sa déclinaison Smart

Home ne sera finalement pas due à l’amélio-

ration de processus déjà existant, mais véri-

tablement à la mise en place de nouveaux

modèles totalement différents, qui amè-

neront de profonds changements dans les

opérations du fournisseur d’énergie comme

dans les habitudes du consommateur. Ceux-

ci sont parfaitement illustrés par l’exemple

ci-dessus.

Nous voyons donc que nous assistons juste

aux prémisses de grandes transformations

amenées par ces nouveaux modèles fondés

sur les objets communicants. Au-delà de la

simple nouveauté technologique, ceux-ci

jouent le rôle de catalyseur dans l’émergence

de nouveaux services qui auront des impacts

majeurs pour tous les acteurs (fournisseurs

d’énergie, consommateurs, collectivités, in-

dustriels).

Jacques Millery

(90)

23 ans d’expérience

dans les domaines du

conseil, des services

IT et des télécoms, au

service d’une large

gamme d’industries,

dont plusieurs années en charge de la

direction des opérations commerciales

groupe   chez Capgemini. Après 5 ans

d’implication sur le démarrage et le

développement des activités Capge-

mini Smart Energy Services en Amé-

rique du Nord, Europe et Asie Pacifique,

Jacques est maintenant en charge de la

croissance de ces mêmes activités pour

l’Europe du Sud et l’Amérique Latine

(stratégie, ventes, marketing, alliances

et développement des opérations).

Page 29: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

42 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Interview de Cédric Hutchings (99)Directeur Général de Withings

Withings est une société innovante fran-

çaise fondée en 2008, qui conçoit des pro-

duits et applications permettant à chacun

de prendre en main sans effort sa santé et

son bien-être. Elle dessine et distribue des

produits de santé connectés dans le monde

entier, les principaux pays étant les États-

Unis (45 % du C.A.), puis l’Allemagne,

la France (10 %) et le Royaume-Uni. Elle

compte actuellement plus de 45 salariés,

dont 36 ingénieurs ou docteurs.

Withings est aujourd’hui un acteur leader

du mouvement de la santé connectée à tra-

vers le monde, internationalement reconnu

et primé par les organisations internatio-

nales (Design, Électronique grand public,

professionnels de la santé…) : 2 CES Innova-

tion Awards au CES Las Vegas 2011, 2 Étoiles

de l’Observeur du Design 2011, primé Doc-

tors 2.0 award, Lauréat de IT Night, Étoile

de l’Observeur du Design 2012, IF Design

Award et IF Gold Design Award 2012, Inno-

vations Award au CES Las Vegas 2012…

Quelle est la proposition de valeur de Withings ?

Avant de fonder Withings, j’ai travaillé au

développement d’équipements Internet

Triple Play chez Inventel, à l’origine de la

Livebox distribuée par Orange. Nous avons

donc une approche « télécom », que nous

avons souhaité utiliser pour revisiter des

objets de la vie quotidienne.

En effet, beaucoup d’entre eux, au-delà de

l’ordinateur, de la télévision ou du télé-

phone, ont vocation à être connectés à In-

ternet, pour deux raisons :

la simplification de l’usage, la connecti-

vité permettant de déléguer l’interface

utilisateur à des outils optimisés pour

saisir et restituer des informations riches

(smartphone, tablette, formulaire web) ;

l’apport de nouveaux services par l’ex-

ploitation de ressources externes : puis-

sance de calcul, capacité de stockage,

accès à des données temps réel (météo,

température…).

Nous avons choisi le domaine de la santé

parce que la rupture induite par la connec-

tivité y est très puissante.

La motivation de tout un chacun à prendre

soin de sa santé dépend fondamentalement

du niveau d’effort requis pour suivre à

long terme les résultats de mesures récur-

rentes (poids, tension, taux sanguins…). La

connectivité supprime cet effort et permet

d’intéresser un public bien plus large que

celui des utilisateurs naturellement impli-

qués (sportifs de haut niveau, personnes

engagées dans un régime…).

Nous avons décidé de ne pas créer de nou-

veaux types d’appareils, mais d’enrichir

des objets classiques, et de minimiser les

actions nécessaires à leur utilisation. Ces

modifications rendent ces objets « utiles »,

au sens où :

l’IdO au service de la santé

Dossier

Page 30: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 43

Internet des Objets

ils transmettent des mesures fi ables aux

bons destinataires : utilisateur, médecin,

service de coaching sportif ou médical, ser-

vice de corrélation avec d’autres données…

la simplicité d’usage favorise une adop-

tion durable et un bénéfi ce à long terme.

La connectivité n’est pas une fi n en soi, mais

une conséquence de cette recherche d’amé-

lioration. La simplifi cation commence par

la conception interne des équipements. Par

exemple, le module de pesée de notre pèse-

personnes est en permanence opérationnel

parce qu’il eff ectue régulièrement un tarage

automatique.

Dans ce souci de garantir la qualité de

conception et d’optimiser l’expérience

utilisateur, nous intégrons toute la chaîne

de fabrication (mécanique, électronique,

logiciel embarqué, plate-forme Internet) de

nos équipements et nous les administrons :

mises à jour logiciel, contrôle des batteries,

alertes, détection de pannes…

Pouvez-vous nous décrire vos réalisations ?

Prenons l’exemple d’un pèse-personne : le

moment de la pesée n’est pas des plus pro-

pices à l’analyse du résultat, il faut attendre

un peu plus tard et ne pas oublier de le re-

porter précisément.

En revanche, notre balance connectée

se charge du suivi : peu après la pesée, les

données exactes sont automatiquement

relayées en Wi-Fi vers le compte de l’uti-

lisateur sur notre plate-forme Internet, où

elles sont enregistrées, historiées et mises

en perspective par rapport à des objectifs.

Deuxième exemple : certains patients sont

contraints de prendre régulièrement leur

tension à domicile et de la consigner pour

en informer leur médecin.

Nous fabriquons un tensiomètre qui est

livré sans manuel d’utilisation : la simple

connexion d’un adaptateur sur un smart-

phone suffi t à déclencher l’appareil, et la

prise de tension s’eff ectue après validation

sur le téléphone de quelques étapes simples.

Le nombre de gestes nécessaires à l’opéra-

tion est réduit au minimum et les mesures

exactes sont transmises automatiquement

via le smartphone au compte Withings du

patient, et enregistrées pour le suivi.

NORMAL

20 25 30

26% 52% 31% 57%of men users of female users of men users of female users

29%WOMEN

71%MEN

33%WOMEN

67%MEN

GENDER REPARTITION OF OUR BODY SCALE USERS: SHARE OF BODY SCALE USERS WITHIN NORMAL BMI RANGE:

AVERAGE AGE OF OUR BODY SCALE USERS:

39YEARS OLD

38YEARS OLD

48YEARS OLD

47YEARS OLD

Who are self-trackers? What do they achieve?

3 3

72%THIS IS THE SHARE

OF OUR BLOOD

PRESSURE MONITOR

THIS IS THE SHARE

OF OUR BODY SCALE

USERS WHO START

weeksOF SELF-TRACKING.

monthsafter.

Source: anonymous data extracted from Withings’ products users databases.

49%USERS WHO HAVE STABILIZED

THEIR BLOOD PRESSURE AFTER

OR REACH A NORMAL BMI

RANGE AND REMAIN STABLE

In 2011, BMI is normal (between 20 and 25) for:

Withings

kg

SELF-TRACKERS PORTRAIT

7.0TIMES

8.1TIMES

7.7TIMES

7.2TIMES

In 2010, just before and after

Thanksgiving, women average

weight increased (only) of 150 g.

In 2010, just before and after

Thanksgiving, men average weight

increased of 210 g.

In 2010, just before and after

Christmas, men average weight

increased of 310 g.

In 2010, just before and after

Christmas, women average weight

increased of 170 g.

MEN WOMENWOMEN ARE THE FIRST OUT OF BED!

Thanksgiving Christmas

67.00 63.67

86.49 84.67

67.15 63.84

86.70 84.98

American women

weigh themselves

at 8:22 am average…

… whereas American men weigh

themselves at 8:27 am average.

European women

weigh themselves

at 8:13 am average…

…whereas European

men weigh

themselves at 8:18 am average.

FOIE GRAS BEATS TURKEY…

WHO SAID MEN DON’T CARE ABOUT THEIR WEIGHT?

Average number of weigh-ins each month:

Interested in a few original figures?

kg

kg kg

kg

Page 31: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

44 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Enfin, nous nous sommes intéressés au baby

monitor : au lieu du couple habituel écouteur/

récepteur, notre produit se limite à un boî-

tier doté d’une caméra et de capteurs divers

(température, humidité, bruit), connectable à

Internet par un accès filaire ou Wi-Fi.

On peut sans limite de distance se connec-

ter depuis un smartphone ou un ordina-

teur, qui accède immédiatement à tous les

services : supervision, déclenchement d’une

veilleuse, diffusion d’une berceuse…

Dans les trois cas, l’information enrichie

est restituée à l’utilisateur quand il le sou-

haite, sur son smartphone ou son ordina-

teur, et non pas sur l’appareil lui-même.

En résumé, nos objets produisent un flux

d’information que les applications resti-

tuent après corrélation avec les données

de nos partenaires ; le lien s’effectue via

le « Health Cloud » (notre infrastructure

hébergée) : les données sont accessibles

partout, tout le temps, indépendamment

de l’objet. Le service supporte par exemple

sans problème les cas de remplacement,

d’utilisation ou d’emprunt d’un second

équipement (résidence secondaire, hôtel,

séjour hors domicile).

Quelles sont en détail les ruptures apportées par l’internet des Objets dans votre domaine ?

Le lapin connecté de Violet (Nabaztag)

était une innovation radicale : à la fois pion-

nier et d’utilité discutable. Au contraire les

objets Withings appartiennent à une masse

de nouveaux objets « banals » dont l’inno-

vation rend l’usage plus simple et enrichit

très significativement les services qu’ils

offrent.

Nous avons constaté que les notions de télé

santé, de diagnostic à distance, de gestion

de l’efficacité des systèmes sanitaires, aug-

mentent le besoin de données générées hors

du milieu médical. Les médecins ont besoin

d’un flux régulier d’informations fiables

pour suivre un patient sorti de l’hôpital ou

gérer des affections chroniques (diabète,

cholestérol, hypertension…)

Les solutions existantes requièrent l’accep-

tation par les patients d’un « morceau d’hô-

pital » chez eux. Si la question ne se pose pas

pour les plus affectés d’entre eux, les autres

ne basculeront vers une gestion préventive

de leur santé qu’en la dédramatisant, grâce

à des objets grand public, attractifs pour

leurs qualités propres de simplicité d’usage,

d’esthétique, et de richesse de service. À cet

égard, nos objets sont plus corrélés au bien-

être qu’à la maladie, tout en proposant de

vrais services de santé.

Dans ce même élan de dédramatisation de la

santé, la massification des supports connec-

tés comme les télévisions connectées, les

tablettes, les smartphones et les PC qui peu-

plent nos intérieurs permet à Withings de dé-

livrer ses informations et services au plus près

de l’utilisateur, au moment le plus opportun.

Nous sommes déjà partenaires de Panasonic

et Samsung à qui nous avons ouvert notre

API : nos applications sont accessibles sur les

services Smart TV de Samsung et VieraCast

de Panasonic dans la thématique santé/bien-

être. Les utilisateurs de balances Withings

peuvent afficher leurs courbes de poids direc-

tement sur leur téléviseur.

La télévision connectée n’est pas un gadget,

c’est l’opportunité pour nous de véhiculer

des informations au moment le plus contex-

tuel en bénéficiant d’un emplacement cen-

tral dans le foyer et d’une très belle qualité

d’image et de son. Elle ouvre de nouvelles

perspectives pour les services de bien-être

parce qu’elle permet au spectateur d’enri-

chir ses contenus favoris par ses propres

données de la façon la plus naturelle. C’est

aussi un moyen massif d’évangélisation et

de communication sur la e-santé directe-

ment au cœur du foyer.

La rupture se caractérise donc par l’émer-

gence de nouvelles technologies réellement

utiles aux professionnels, via un grand pu-

blic qui aspire à s’approprier la gestion de

sa santé.

Vous avez évoqué le partage avec d’autres services, de quoi s’agit-il précisément ?

À l’image de ce qui est souvent évoqué au

sujet de l’IdO, on peut établir des corréla-

tions en partageant les données avec une

ou plusieurs des 60 plates-formes parte-

naires de Withings : services de coaching

sportif en ligne, de suivi de régime ali-

mentaire, de gestion des dossiers médi-

caux personnels (carnets de santé numé-

riques).

Par exemple, un abonné à Runkeeper, pro-

gramme en ligne de suivi d’entraînement

de course à pied, peut choisir d’automati-

ser la synchronisation des pesées avec son

historique d’exercice.

Ces partenariats applicatifs ajoutent une

valeur supplémentaire à l’utilisation de

nos produits, en les jumelant avec des ser-

vices alimentés automatiquement par les

données qu’ils génèrent.

Notre écosystème repose sur l’ouverture

totale de nos produits. L’utilisation de

technologies web standards (XML, JSON)

et la mise à disposition sur notre site web

de l’intégralité des spécifications de déve-

loppement et d’interfaçage (API et SDK)

facilitent l’utilisation de nos flux d’infor-

mation par tous types de partenaires.

Ceux-ci sont extrêmement variés, en

termes de cibles comme de complexité de

service.

À l’inverse nous développons également

une application de sélection des para-

mètres de suivi issus de nos partenaires

pour les ajouter à notre plateforme et les

corréler dans notre Health Cloud.

En août 2012, nous avons lancé Withings

Health Companion : la première applica-

tion mobile de santé et bien être, permet-

tant de centraliser l’ensemble des données

issues de nos produits, mais bien entendu

d’autres applications ainsi que d’autres

produits partenaires. Cette nouvelle appli-

cation mobile de Withings veut simplifier

la façon dont n’importe quel utilisateur

peut contrôler et améliorer son poids, son

activité physique, ses données cardiaques

et la qualité de son sommeil.

Quelle est la chaîne de valeur de ces partenariats ?

Ils sont à double sens : ils nous permettent

d’ajouter des services à notre offre, en

Dossier

Page 32: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 45

Internet des Objets

échange nous proposons à nos partenaires

une meilleure adhérence des clients grâce

à la mise à jour automatique de leurs don-

nées.

Une partie de ces services repose sur un mo-

dèle Freemium : recrutement de membres à

un service gratuit dans le but d’en convertir

le plus grand pourcentage possible à un ser-

vice Premium facturé, pour la plus longue

durée d’abonnement possible.

Dans ce cas le jumelage avec un de nos

produits permet d’incarner physiquement

le service au domicile du client, et favorise

une plus grande adhérence au service.

Un des nos 60 partenaires peut ainsi re-

commander dans le cadre de son service

l’usage de nos pèse-personnes et touche

une rémunération sur la vente de produits

prescrits, et nous sommes rémunérés en

échange par celui-ci sur l’augmentation de

l’adhérence de leurs clients.

Nous travaillons également à des accords

avec des opérateurs de réseaux qui gèrent

la connectivité et construisent des services

autour des objets de santé connectés, et

nous pourrions également envisager de tra-

vailler avec d’autre type d’acteurs, comme

des fournisseurs de services domotiques

pour le maintien à domicile des seniors.

Comment voyez-vous votre marché, et le développement de votre entreprise ?

Dans un marché des objets de bien-être

connectés en pleine explosion, nous

sommes à la fois une goutte d’eau et un

pionnier, donc nos perspectives de crois-

sance sont énormes.

Notre objectif est de devenir une référence

dans le développement d’objets de santé

connectés et augmentés.

Il est très important pour nous de démon-

trer qu’on peut exceller dans l’innovation

technique en France et construire une his-

toire industrielle en développant de A à Z

l’intégralité des produits et des services.

Face à la concurrence, notre moteur prin-

cipal est donc l’innovation : sur un effectif

de plus de 45 personnes en août 2012, (nos

effectifs augmentent chaque mois, nous

sommes en phase de recrutement), 32 sont

des ingénieurs ou docteurs affectés a la

R&D. Nous faisons de la recherche scienti-

fique pour le développement des capteurs,

et nous nous appuyons sur notre base de

données de santé connectée (actuellement

la plus grosse au monde) pour créer des

fonctionnalités et des services nouveaux

qui facilitent la création de valeur.

Nous vendons nos produits en ligne et via

de nouveaux espaces de vente dédiés à la

santé connectée, présents chez des distribu-

teurs spécialisés ou généralistes comme la

FNAC, et l’ensemble des Apple stores dans

le monde.

Comment gérez-vous la propriété et le partage des données ? Quels sont les usages transverses ?

Nous prenons soin des données de nos

utilisateurs en gérant leur stockage, leur

sécurisation mais aussi le contrôle du par-

tage en devançant les réflexes de base de

protection des utilisateurs (contrairement

à certains sites de réseaux sociaux ayant

défrayé la chronique) : les conditions d’uti-

lisation sont claires, la décision de partage

des données est toujours à l’initiative de

l’utilisateur et celui-ci s’effectue donc en

toute transparence, avec des tiers parfaite-

ment identifiés. Elles ne sont pas exploitées

au-delà des besoins de nos clients, comme

par exemple à des fins de publicités ciblées.

Enfin, la richesse des données générées et

corrélées permet également de dégager de

nouvelles connaissances au-delà des indi-

vidus (cf. infographie jointe « self-trackers

portrait »).

Propos recueillis par

Étienne Saclier d’Arquian

Cédric Hutchings (99) Directeur général de Withings. Âgé de 35 ans,

il cumule 8 ans d’expérience dans le marketing

de produits technologiques grand public.

Après avoir rejoint Inventel comme chef de produit

où il a géré le lancement des « Box » internet sans fil,

il occupait chez Thomson la direction marketing des

produits domestiques, en charge du développement

des offres résidentielles. Ingénieur de

l’École Centrale de Paris, et titulaire d’un Master

au Massachusetts Institute of Technology (MIT),

distingué meilleur Product manager du groupe

Thomson en 2006. Cédric assure la direction géné-

rale et le développement marketing et commercial.

Page 33: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

46 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Dossier

Smart Impulse commercialise une tech-

nologie qui permet d’obtenir la réparti-

tion de la consommation électrique de

chaque type d’appareil dans un bâtiment à

l’aide d’un seul point de mesure, le Smart

Analyzer®. Ces informations servent en-

suite à identifier les leviers d’économies

de consommation. Smart Impulse vise

aujourd’hui le marché des bâtiments ter-

tiaires (bureaux, surfaces commerciales,

hôtels, bâtiments d’enseignement…)

Une des préoccupations de Smart Impulse

est de conserver une facilité de mise en

place de la solution pour ne pas en freiner

le déploiement. D’une part il s’agit de pou-

voir installer le Smart Analyzer dans un

tableau électrique en moins de deux heures

et de façon non intrusive (sans coupure de

courant). Pour cela nous avons travaillé à

un design qui permet de clipser le Smart

Analyzer sur un rail DIN et choisi des

capteurs faciles à mettre en place, à savoir

des boucles pour mesurer le courant dans

chaque phase. Un autre aspect de la mise en

place est l’établissement de la communica-

tion du Smart Analyzer. Nous utilisons le

protocole IP qui est compatible avec la plu-

part des systèmes existants, et nous com-

muniquons via Ethernet ou Wifi lorsqu’il

est possible de passer par le réseau local

de l’entreprise, ou par GPRS/3G lorsque ce

n’est pas le cas. L’idée est de lever les bar-

rières à la mise en place.

Une fois que nous récupérons les données

de signaux électriques pré-traitées sur nos

serveurs, il s’agit d’appliquer nos algo-

rithmes de désagrégation et d’en déduire la

consommation de chaque type d’appareil.

À ce stade il peut être intéressant d’exploi-

ter d’autres données d’environnement

comme la température extérieure ou des

informations provenant d’autres types de

capteurs pour les croiser avec les données

de consommation afin d’affiner la com-

préhension de la consommation. Les don-

Smart Impulse, extraire et valoriser l’intelligence énergétique des signaux électriques dans les bâtiments tertiaires

Le projet à l’origine de Smart Impulse est né début 2008 de la réflexion d’étudiants de l’École Centrale Paris sur des pistes d’améliorations dans le domaine de l’énergie. Il est rapidement apparu que pour réduire la consommation d’électricité, il est nécessaire de savoir d’où elle provient, et qu’il n’y avait pas de solution adaptée sur le marché. C’est alors qu’a commencé le développement d’algorithmes brevetés qui, intégrés dans le boîtier Smart Analyzer®, permettent de comprendre quels sont les différents

appareils à l’origine de la consommation électrique. La technologie est basée sur la reconnaissance de la signature électrique des différents appareils en fonctionnement, selon un principe similaire à la capacité de l’Homme à identifier les différents instruments de musique qui jouent ensemble dans un orchestre.La société a été créée en mars 2011 par trois étudiants centraliens, lors de leur troisième année, et son effectif actuel est de 7 personnes.Le Smart Analyzer a été industrialisé et il est commercialisé depuis février 2012. Il est aujourd’hui déployé sur plusieurs dizaines de sites et Smart Impulse porte maintenant sa réflexion sur l’ensemble du système intelligent qu’il est en train de mettre en place.Smart Impulse a récemment reçu plusieurs prix : Scientipôle Initiative 2011, Prix Créateur d’Avenir du concours Petit Poucet 2011, Prix développement Concours Centraliens Entrepreneurs 2011, Prix de l’initiative innovante Le Vivier, et nous sommes soutenus par Oséo et la Région Ile de France. Les fondateurs sont dans l’attente de leurs premiers retours commerciaux pour engager une démarche de levée de fonds auprès de Business Angels ou fonds d’amorçage.

Page 34: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

www.centraliens.net 47

Internet des Objets

nées de consommation que nous obtenons

peuvent également être récupérées très sim-

plement par certains de nos partenaires via

notre API. Dans ce cas l’intérêt pour nos

partenaires est de récupérer les données de

consommation électrique et d’y ajouter de

nouveaux services métiers en y appliquant

leur savoir faire spécifique (connaissance

des équipements du site, modélisations

thermiques, intégration dans un bilan car-

bone plus global, etc.)

Smart Impulse propose ainsi une offre mo-

dulaire de suivi des consommations élec-

triques. Le premier niveau consiste à mettre

à disposition le Smart Analyzer et les don-

nées brutes de consommation pendant une

durée allant de 1 à 5 ans, dans le cas où le

client a les ressources et les outils en interne

pour exploiter les données de consomma-

tion ou travaille avec un fournisseur de

service qui propose des outils et ses compé-

tences. Les données peuvent être récupérées

via une interface d’export sur notre site web

ou via notre API. Si besoin, nous propo-

sons également un logiciel de visualisation

des données de consommation qui permet

d’effectuer des bilans journaliers, hebdo-

madaires ou mensuels de consommation

électrique par type d’appareil. En termes de

restitution des données, nous mettons les

informations à disposition via le web afin

d’éviter l’installation de logiciels sur des

postes clients, ce qui permet également de

réaliser automatiquement les mises à jour

sur des nouvelles versions. Nous dévelop-

pons aujourd’hui des outils permettant de

transmettre au gestionnaire du bâtiment les

informations de consommation électrique

de façon simplifiée et intuitive afin de mas-

quer toute la complexité que nous mettons

en œuvre pour parvenir au résultat.

La solution que nous développons regroupe

donc de notre point de vue les caractéris-

tiques qui vont permettre de catalyser la

diffusion de l’internet des objets : simpli-

cité de mise en place, mise à disposition de

données à forte valeur ajoutée et interopé-

rables avec de multiples applications tiers,

récupération et exploitation simplifiée pour

l’utilisateur final. Cela illustre le contraste

qu’il existe entre l’internet des objets et les

systèmes pré-existants, constitués d’en-

sembles de capteurs échangeant des don-

nées dans des protocoles propriétaires via

des bus de terrain pour les transmettre à un

PC de supervision.

En termes de modèle économique, nous

adoptons aujourd’hui un modèle similaire

à celui des fournisseurs d’accès à internet,

où nous louons le Smart Analyzer pendant

une période de temps et nous proposons

un abonnement d’accès aux données de

consommation. Les logiciels de visualisa-

tion sont proposés sous forme de software

as a service, donc également sous forme

d’abonnement.

En termes de perspectives, il pourra être

intéressant d’envisager d’autres manières

de valoriser les données de consomma-

tions de plusieurs dizaines voire centaines

de sites pour effectuer des prédictions de

consommation, pour envoyer des signaux

invitant à couper certains appareils au mo-

ment de pics de consommation à l’échelle

nationale (délestage) ou une base de donnée

qui reflète la performance énergétique des

bâtiments par usage. Plusieurs pistes sont

donc envisagées pour valoriser les données

de consommation sous d’autres formes.

Pour toute information sur les services et la

société Smart Impulse, n’hésitez pas à nous

contacter à [email protected].

Charles Gourio

e s t d i p l ô m é d e

l’École Centrale Paris

(11), option science de l’information.

Il a co-fondé Smart Impulse avec deux

autres ingénieurs de Centrale Paris en

mars 2011. Auparavant il a diverses

expériences en conseil en innovation,

marketing et capital risque dans le do-

maine des nouvelles technologies.

Page 35: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

Dossier

48 Centraliens no 621 [Septembre Octobre 2012

Dossier

Smartphones et technologies sans contact : deux catalyseurs de l’internet des objetsÀ partir de 1955, il aura fallu quatre décen-nies de politiques et financements publics pour obtenir un taux d’équipement de 95 % de la France en téléphonie fixe. Plus récemment, une quinzaine d’années seule-ment auront suffi pour atteindre des taux de 80 % pour les connexions internet fixes et de 100 % pour la téléphonie mobile… À la croisée de ces deux accélérations techno-logiques sans précédent plébiscitées par les utilisateurs, le smartphone métamorphose les usages en donnant aux mobinautes un accès immédiat à des informations contex-tuelles pertinentes. L’enthousiasme du grand public est confirmé : à peine 5 ans pour atteindre un taux de pénétration des smartphones proche de 50 % du parc en ser-vice et dépasser 60 % des ventes en France. Dans le monde, il se vend chaque seconde 11 smartphones fabriqués par les deux lea-ders du marché que sont Samsung et Apple.

Le smartphone est le premier objet de masse

connecté incarnant l’internet des objets. Il va

bientôt en favoriser le développement rapide

en embarquant la technologie de proximité

(NFC) avec un lecteur, offrant deux avantages :

dématérialisation des cartes à puces ac-

tuelles (paiement, fidélité, contrôle d’accès),

lecture de tags sans contact en substitution

à la lecture optique complexe et énergivore

(QR code).

L’intégration d’un lecteur NFC dans les nou-

veaux appareils se démocratise fortement

depuis plusieurs mois même si un grand

constructeur résiste encore à contre-cou-

rant… Avec un renouvellement annuel de

50 % du parc, cette technologie bidirection-

nelle équipera donc dès 2015 une majorité de

mobinautes démocratisant ainsi les usages

des technologies numériques mobiles.

L’impact des Technologies de l’Infor-mation et de la Communication (TIC) : numérisation et synchronisationAdoptés progressivement, ces nouveaux outils

ouvrent des possibilités inédites en termes de

traçabilité :

L’automatisation de l’identification uni-

taire des objets révolutionne l’acquisition

d’informations pertinentes et précises en

numérisant les événements élémentaires

pendant l’utilisation des produits.

La généralisation des réseaux sans fils per-

met, via les terminaux mobiles devenus

ainsi des capteurs contextuels, de garantir

la synchronisation permanente des don-

nées centralisées avec la réalité physique,

et d’améliorer la qualité des informations

donc la valeur de leur traitement pour les

transformer en connaissance.

Avec ces technologies, « ce n’est plus le client

qui vous parle du produit (ou du service) mais

c’est ce dernier qui vous parle du client », ce

qui permet de déceler plus rapidement de

nouvelles tendances d’usage à prendre en

compte et d’orienter efficacement la concep-

tion des produits à venir. Autant d’informa-

tions très précieuses pour pouvoir proposer

au consommateur, non plus un produit mais

une fonction, autrement dit, transformer un

engagement de moyens en obligation de ré-

sultat.

En gardant ainsi le contact avec son client,

l’entreprise peut construire une relation de

proximité durable pour mieux le fidéliser et

capitaliser le patrimoine commercial et la no-

toriété de la marque. Outre le cross-selling et

l’up-selling ciblés très précisément à partir du

contexte et des comportements du client, cette

intimité inédite permettra d’une part de lui

garantir directement l’authenticité et la qualité

des produits et, d’autre part, de lui proposer

des services périphériques récurrents pour

transformer un revenu ponctuel de vente en

une garantie d’usage facturée régulièrement

et, par nature, plus rassurante pour l’utilisa-

teur de produits de plus en plus techniques

intégrant des technologies nouvelles et parfois

complexes.

L’enjeu est de produire mieux en anticipant

les besoins afin d’éviter l’échec commercial,

d’accompagner le client s’il le souhaite dans

l’utilisation optimale du produit et d’assurer

l’élimination et le recyclage du produit en fin

de vie. Ces trois axes améliorent mécanique-

ment l’écobilan global et s’inscrivent dans la

perspective de la préservation des ressources

et du développement durable.

La nouvelle consommation informatique : SaaS, cloud et open sourceSymétriquement à cette évolution, l’offre in-

formatique s’est transformée simultanément

pour offrir des solutions plus flexibles et agiles

permettant d’accompagner et d’amplifier cette

dynamique numérique :

La forte croissance annuelle (36 % entre

2006 et 2011) du SaaS (Software as a Ser-

vice) témoigne de l’adhésion des clients à ce

nouveau service qui permet de maximiser

le SLA (Service Level Agreement) tout en

minimisant les délais de mise en place et

les coûts de possession, désormais calcu-

lés à l’usage (durée, nombre d’utilisateurs,

richesses des services utilisées,…). Cette

architecture permet des échanges perma-

nents entre l’éditeur et les utilisateurs finaux,

à l’instar de Salesforce.com, précurseur du

SaaS depuis 2000, qui les sonde chaque

trimestre pour prioriser les nouvelles fonc-

tionnalités souhaitées afin d’enrichir et

d’améliorer constamment l’ergonomie et la

valeur ajoutée de l’application.

Une informatique simple, décentralisée,

débarrassée de contraintes techniques

et accessible en réseau comme l’eau ou

l’électricité, voilà la promesse du « cloud

computing ». Cette révolution repose sur

l’utilisation locative de ressources de calcul

mutualisée et de bande passante internet

à la demande, avec un SLA amélioré du

fait d’environnements virtualisés et de la

redondance qu’ils permettent. Cette flexi-

bilité inédite repose sur les technologies

des machines virtuelles qui permettent à

l’administrateur du cloud d’optimiser la dis-

tribution des applications sans se soucier de

la localisation physique des serveurs.

Page 36: Internet des Objets - "IdO...idéaux ?"

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Internet des Objets

L’arrivée des logiciels libres contribue à

l’adoption de standards interopérables, gage

pour les clients d’agilité et d’enrichissement

de l’offre fournisseur avec des technologies

éprouvées et partagées. Ceci va amplifier

la dynamique du SaaS évoquée précédem-

ment du fait de gains financiers significatifs

par rapport à l’édition propriétaire.

Ces mutations ouvrent la voie à des services

transactionnels avancés comme par exemple

le paiement bancaire qui fournit, aussi bien

au petit commerçant isolé qu’à l’ensemble des

points de ventes d’une multinationale, un service

de paiement sécurisé, facturé à la transaction,

alliant performance et productivité, personnali-

sation et flexibilité, sans requérir de compétence

technologique spécifique. Le déploiement des

technologies sans contact et des smartphones

embarquant la carte de paiement va en simplifier

encore l’usage, à l’instar du « pass Navigo » de la

RATP, premier objet communicant de masse, qui

a permis, grâce au NFC, d’accélérer le débit des

lignes de contrôle d’accès de 30 % tout en rédui-

sant leurs coûts de maintenance de 50 %.

L’adoption du NFC, catalyseur du déploiement de l’internet des objetsLe développement concret de l’internet des

objets est resté limité jusqu’à ce jour, faute de

pouvoir déployer en grand nombre et à faible

coût des objets identifiés capables de commu-

niquer de manière autonome.

On aurait pu espérer profiter des développe-

ments rapides et combinés de l’identification

et de la traçabilité des objets par radio-fré-

quence (RFID) dans les entreprises, d’une

part, et de l’utilisation d’internet par les par-

ticuliers, d’autre part. Cependant, la conti-

nuité numérique entre un tag passif (RFID ou

NFC) et internet nécessite un lecteur mobile

pour réaliser la connexion indispensable.

Ce besoin se heurte à deux obstacles :

Jusqu’à présent, seul des lecteurs indus-

triels coûteux, car adaptés aux environ-

nements multiples des postes de travail,

permettaient d’appréhender le potentiel de

développement et de performance écono-

mique d’une solution de traçabilité aboutie.

A cet égard, Jean Leducq (43b), fondateur

d’Elis en 1968, devenu leader européen de

location-entretien de linge et de vêtements

professionnels ainsi que des prestations

complémentaires d’hygiène des sols et des

sanitaires, a été visionnaire en se lançant

dès 1996 dans cette voie pour identifier

chaque vêtement loué, confortant ainsi le

leadership de l’entreprise, et, être à l’origine

du plus important projet européen de tra-

çabilité RFID.

Ces lecteurs, souvent fixes, nécessitent des

distances de lecture assez élevées (quelques

dizaines de centimètres), au contraire des

usages grand public, qui doivent rester non

intrusifs pour respecter la liberté d’adhé-

sion et la vie privée des citoyens.

Le NFC répond au deuxième problème : avec

une distance de lecture inférieure à 5 cm, le

geste volontaire du mobinaute pour appro-

cher son smartphone du tag intégré dans l’ob-

jet est indispensable et tient lieu d’approbation

de l’usage. Quant à l’équation économique du

financement du lecteur, elle a été également

résolue grâce aux économies d’échelle réa-

lisées par les constructeurs de smartphone,

qui intègrent cette fonctionnalité dans leurs

modèles récents. Le coût résiduel, celui du

tag (quelques centimes d’euros), devient ainsi

marginal pour le fabricant en regard de la

richesse des informations générées.

Grâce à ces catalyseurs, le développement de

l’internet des objets est en marche, ouvrant de

nouveaux usages et créant des opportunités

considérables.

À titre d’exemple, le premier hypermarché

dans le monde entièrement équipé en NFC

ouvre courant octobre en région parisienne.

Un tag NFC est intégré dans chacune des

50 000 étiquettes d’affichage électroniques dis-

posées devant chaque produit, et le consom-

mateur peut visualiser en rayon des informa-

tions sur l’article correspondant, obtenir son

prix pour connaître en temps réel le montant

cumulé de ses achats, être alerté en cas d’in-

compatibilité avec son régime alimentaire pré-

alablement renseigné dans son smartphone…

Sous l’impulsion de Store Electronic Systems

(SES), société française leader mondial du

marché des étiquettes d’affichage électronique

et de son Directeur Technique Philippe Bot-

tine (02), cette innovation permet de passer

d’une distribution de masse à un commerce

de précision.

Pour conclure, je citerai un extrait des pro-

pos du Président de la République François

Mitterrand tenus lors de l’ouverture de l’an-

née Eiffel commémorant le centenaire de la

construction, le 14 janvier 1988 à la Tour Eif-

fel, et plus que jamais d’actualité :

« Il ne faut pas avoir peur de la technique. Il ne

faut pas craindre la technologie en avance. Il

ne faut pas croire que c’est la mise en applica-

tion de ces techniques nouvelles qui provoque

les drames sociaux que nous connaissons. Il

y a des drames sociaux parce que les respon-

sables de ces sociétés sont plus lents que les

techniques. Leurs cerveaux, leurs capacités

d’adaptation, d’une société, d’une structure et

donc de l’esprit de l’homme dans sa vie quoti-

dienne, vont moins vite que l’esprit de création

des meilleurs des siens. Alors, en réaction on

a tendance à en rester là où on est, à ne pas

bouger. On a peur du lendemain, on flatte le

passé. Le champ de l’innovation et de l’appli-

cation est immense et la connaissance nou-

velle ouvre précisément encore ce champ au

point que des hommes et des femmes formés

à ces nouvelles disciplines vont connaître de

nouveaux métiers. »

À l’opposé de l’angoisse du déclin industriel

et du renoncement dominant, l’internet des

objets s’inscrit dans une démarche offensive

d’innovation technologique favorisant l’émer-

gence d’une nouvelle économie de la préci-

sion. En facilitant ainsi l’authentification des

produits par l’utilisateur, il s’agit également

d’une opportunité inattendue de lutte efficace

contre l’immigration clandestine de biens,

parfois très meurtrière lorsqu’elle touche les

médicaments, alcools, pièces de rechange

automobiles,… La contrefaçon, amplifiée

par le développement rapide du commerce

en ligne, est évaluée par l’OCDE à 5 à 7 %

du commerce mondial et représente pour la

France une perte sèche de plus de 6 Md € et

40 000 emplois chaque année, avec le manque

à gagner fiscal correspondant qui serait si pré-

cieux pour rétablir les équilibres budgétaires

des états.

François Robin (88). Après avoir

déposé un brevet à sa sortie de Cen-

trale (88) pour automatiser le traite-

ment du linge dans les blanchisseries

industrielles, François Robin déve-

loppe cette invention en Suisse. En-

suite, initiateur de la solution RFID

chez Elis dès 1996, il en assure le déploiement indus-

triel sur les vêtements professionnels pour automatiser

le tri dans les usines et leur distribution. Après avoir

exercé des responsabilités de Directeur industriel dans

les services B2B et conçu des solutions de traçabilité

logistiques, il a rejoint Atos en 2011 pour développer

des applicatifs métiers innovants en intégrant les tech-

nologies numériques dans les problématiques clients. Il

est également à l’origine de la création de NEeco pro-

ducteur de granulés de bois et leader français avec trois

sites de production (Auvergne, Dauphiné, Ardennes)

de ce combustible renouvelable, économique, moderne

et disponible localement.