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Intégrité des formes de récrit Kim Stroumza Université de Genève <stroumza @ uni2a. uni ge ch> On a bien raisun de condamner le formalisme, mais on oublie d'habitude que ce qui est condamnable en lui. ce n 'est pas qu 'il estime trop la forme, c est qu il l estime trop peu. au point de la détacher du sens [...J. Le vrai contraire du formalisme est une bonne théorie de la parole qui la distingue de toute technique ou de tout instrument parce qu'elle n'est pas seulement moyen au service d'une fin extérieure, et qu elle a en elle-même sa morale, sa règle d'emploi, sa vision du monde comme un geste révèle toute la vérité d'un homme . 0. Introduction Outre les connaissances grammaticales et orthographiques, la principale difficulté pour quiconque aimerait améliorer son écrit est de prendre conscience de ce que présente la forme écrite de son texte et par conséquent de prendre suffisamment de distance par rapport à son propre texte pour faire abstraction de ce qu'on se sait vouloir dire et se mettre à la place d'un destinataire qui n'aurait accès, principalement, qu'à cette forme écrite. Il faut ensuite saisir le fonctionnement de cette forme, savoir utiliser les moyens qui permettent à celle-ci d'acquénr, par rapport au scripteur" et au contexte, l'autonomie exigée par sa nature écrite. Pour celui qui aimerait améliorer son écrit, la notion de forme est donc très importante et exige une certaine prise de conscience. Quant au linguiste ou à l'enseignant, comment peuvent-ils poser un diagnostic sur l'état de la compétence discursive d'un scripteur à partir d'un (ou de plusieurs) de ses textes ? Comment la forme écrite, que l'on veut 1. M. Merleau-Ponty (1969). Ut prose du monde. Gallimard, p. 126. 2. Un "scripteur" est un "sujel parlant" écrivant '

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Intégrité des formes de récrit

Kim Stroumza Université de Genève

<stroumza @ uni2a. uni ge ch>

On a bien raisun de condamner le formalisme, mais on oublie d'habitude que ce qui est condamnable en lui. ce n 'est pas qu 'il estime trop la forme, c est qu il l estime trop peu. au point de la détacher du sens [...J. Le vrai contraire du formalisme est une bonne théorie de la parole qui la distingue de toute technique ou de tout instrument parce qu'elle n'est pas seulement moyen au service d'une fin extérieure, et qu elle a en elle-même sa morale, sa règle d'emploi, sa vision du monde comme un geste révèle toute la vérité d'un homme .

0. Introduction

Outre les connaissances grammaticales et orthographiques, la principale difficulté pour quiconque aimerait améliorer son écrit est de prendre conscience de ce que présente la forme écrite de son texte et par conséquent de prendre suffisamment de distance par rapport à son propre texte pour faire abstraction de ce qu'on se sait vouloir dire et se mettre à la place d'un destinataire qui n'aurait accès, principalement, qu'à cette forme écrite. Il faut ensuite saisir le fonctionnement de cette forme, savoir utiliser les moyens qui permettent à celle-ci d'acquénr, par rapport au scripteur" et au contexte, l'autonomie exigée par sa nature écrite. Pour celui qui aimerait améliorer son écrit, la notion de forme est donc très importante et exige une certaine prise de conscience. Quant au linguiste ou à l'enseignant, comment peuvent-ils poser un diagnostic sur l'état de la compétence discursive d'un scripteur à partir d'un (ou de plusieurs) de ses textes ? Comment la forme écrite, que l'on veut

1. M. Merleau-Ponty (1969). Ut prose du monde. Gallimard, p. 126.

2. Un "scripteur" est un "sujel parlant" écrivant '

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considérer comme autonome par rapport à la pensée, peut-elle être interprétée comme un symptôme d'un certain état d'une compétence discursive ?

Un texte, composé de phrases toutes grammaticalement correctes, dont le contenu est logiquement organisé, peut néanmoins apparaître comme étant mal écrit. Faut-il considérer cette mauvaise qualité comme relevant d'un ordre totalement subjectif, comme étant en somme affaire de goût ? Mais alors faut-il en conclure qu'à part la grammaticalité, l'écrit ne peut pas être décrit linguisliquemenl, ni enseigné ? Nous situant à l'intérieur du cadre théorique développé par A. Auchlin. nous faisons le pari inverse, en considérant la dimension qualitative de l'usage du langage comme un des objets de la linguistique. Mais se pose alors la question du statut des régularités que doit observer un texte pour ne pas être considéré comme mal écrit. Ou, en d'autres termes, ces régularités ont-elles le même statut que les règles grammaticales et sinon quel serait leur statut ? Comme le dit J.-M. Schaeffer, "11 ne s'agit pas [ici] de réduire le texte à sa réalisation linguistique, mais d'interroger cène réalisation quant aux éléments qui témoignent de la mise en texte'"3-

Après avoir brièvement présenté le cadre théorique et la méthodologie utilisée, nous nous plongerons dans un certain nombre d'exemples sources de petits bonheurs et malheurs afin d'essayer d'une part de dégager quelles sont les difficultés que peut rencontrer une personne adulte francophone et universitaire dans sa pratique de l'écrit et d'autre part, notamment à partir d'une discussion sur les différents types de relatives, de comprendre quel est le statut des régularités que doit observer un texte bien écrit.

t. Pragmatique expérientielle et didactique de l'écrit

La théorie du bonheur conversationnel développée par A. Auchlin4 se caractérise par une volonté de prendre en considération la dimension qualitative de l'usage du langage. Cette qualité "relève, fondamentalement, de la dimension d'expérience et de participation subjective de l'usage du langage" . La notion d'"accord intérieur" concerne cette participation

3. J.-M. Schaeffer Texte" in Ducrot O. & al. (1995). Nouveau dictionnaire encyclopédique des sciences du langage, Paris. Seuil, p. 501.

4. Auchlin (1990), Auchlin (1991).

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subjective dans la mesure où elle rend compte de l'équilibrage entre ce que le sujet parlant croit être et l'image qu'il présente de lui-même dans la communication verbale6. Dans cette optique, "le langage n'est pas un 'outil' (...), il est fondamentalement une condition"ou comme le dit E. Benvcnistc : "Bien avant de servir à communiquer, le langage sert à vivre"8. Dans ce cadre théorique, la participation du linguiste, l'expérience qu'il "vit" à la lecture d'un texte, n'est pas considérée comme insignifiante ou même indésirable mais constitue au contraire le point de départ assumé de son étude. Lorsque celle-ci s'inscrit dans le domaine de la didactique de l'écrit, son objet est par conséquent constitué en grande partie par ces expériences de bonheurs ou de malheurs ressentis à la lecture d'un texte, le linguiste jouant alors le rôle d'un lecteur particulier. Une autre propriété de ce cadre théorique est de tenter de poser des diagnostics sur l'état des compétences discursives9 des différents scripteurs. compétences discursives qui peuvent être "caractérisées, très globalement, comme la capacité à atteindre l'accord intérieur"10. Les passages sources de petits malheurs ne doivent donc pas seulement être corrigés, ils doivent également être interprétés comme symptômes d'un certain dysfonctionnement au niveau de la compétence discursive du scripteur.

S'appuyer sur l'expérience ressentie par le linguiste dans un travail à prétention scientifique exige de tenter d'objectiver cette expérience ; la localisation et la description linguistique des passages-sources constituent donc une première étape indispensable. De la description linguistique de ces passages sources de bonheurs ou de malheurs aux interprétations diagnostiques, le chemin est long et sinueux ... mais une hypothèse sert de guide : la spécificité du médium, en ce qui nous concerne ici l'écrit différé1 ', pose certaines contraintes sur le fonctionnement de cette compétence discursive ou, en d'autres termes, l'environnement particulier dans lequel

5. Auchlin ( 1996). p.2.

t Auchlim 19901, pp. 324 ss.

7. Auchlin (1996). p. 5.

8. Benveniste (1974), p. 217. cité parAuchlin ( 1996), p. 5,

9. Auchlin ( 1995), pp. 224 ss.

10. Auchlin (1995). p. 217.

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cette compétence intervient nécessite une modification de son comportement, une adaptation. Pour décrire la spécificité de l'écrit différé, nous nous contenterons de quelques caractéristiques certes banales mais qui nous semblent par là même devoir être explicitées et prises en considération :

i) l'absence du scripteur au moment de la lecture du texte écrit : celui-ci n'est présent qu'au niveau des représentations que s'en fait le destinataire ;

ii) l'absence du sujet parlant1" récepteur au moment de l'émission ; iii) l'absence du paraverbal et de la situation ; iv) le fait que la temporalité propre au parcours de la lecture n'est pas

identique à celle du processus même de l'écriture,

Ce qui entraîne les conséquences suivantes : - les indications qui pourraient être transmises par les gestes, les

mimiques, l'intonation ou le contexte immédiat du scripteur doivent être inscrites dans la forme écrite ;

- la vérification de l'appropriété du thème, du ton. etc. ne peut s'effectuer au cours de la communication, le scripteur n'ayant pas accès à une quelconque confirmation de la part de son destinataire ;

- la temporalité de la lecture ne correspondant pas. ou du moins pas forcément, à celle de l'écriture, elle doit être construite, gagner son autonomie.

Ecrire exige de la part du scripteur d'une part qu'il prenne suffisamment de distance par rapport à son texte écrit pour faire abstraction de ce qu'il se sait avoir voulu communiquer ; c'est seulement ainsi qu'il peut espérer saisir ce que présente la forme écrite. D'autre part, il doit également davantage investir cette forme, elle seule doit suffire à la communication. Par

11. Tout écrit dont le moment de la réception est différé de celui de l'émission. Par opposition, lorsque nous parlons d'oral, nous nous référons à "l'oral des conversations" Il est clair que certaines des propriétés de l'écnt différé se retrouvent dans certaines situations de communication orale comme les conférences par exemple.

12. Si le texte est écrit à la main, la graphie garde alors une trace du sujet parlant, mais ses possibilités d'expression paraissent plus réduites que celles liées à l'intonation, ou en tout cas différentes.

13. Sujet parlant est utilisé au sens de O. Ducrot, i.e. d'être empirique de chair et d'os, qui s'oppose au locuteur, être de papier, entité linguistique.

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conséquent, la forme écrite nécessite à la fois une prise de distance de la part de son scripteur et un très grand investissement, ce qui évidemment ne va pas sans difficultés. Ne recevant lors de l'écriture aucun feed-back de la part de son destinataire, le scripteur doit augmenter son propre feed-back : le mécanisme de régulation de sa compétence discursive doit être renforcé. La compétence discursive à l'écrit doit également fonctionner avec des valeurs de calibrage souvent fort incertaines .

C'est donc à la fois à partir d'une certaine caractérisation de la spécificité de l'écrit et de descriptions linguistiques des passages-sources, que nous allons tenter de poser des diagnostics sur l'état de certaines compétences discursives et par là même essayer de dégager quelles peuvent être les difficultés rencontrées par un adulte universitaire francophone dans sa pratique de l'écrit.

2. Des petits malheurs et bonheurs discursifs aux diagnostics : quelles sont les aptitudes requises par une compétence discursive à l'écrit ?

2.1. Analyse de quelques exemples

Après plusieurs lectures d'un ensemble de textes, bien, médiocrement ou mal écrits et plusieurs tentatives de localisation des passages sources de petits malheurs ou bonheurs, une première et timide classification émerge. Celle-ci n'est pas encore très ordonnée mais permet de répertorier un ensemble d'exemples et de poser quelques esquisses de diagnostic.

Les textes examinés ont été écrits par des adultes universitaires, la plupart francophones, au cours des enseignements de formation continue Techniques de la communication écrite" dispensés par la Faculté de Lettres

de l'Université de Genève (années 1994-1995 et 1995-1996). Ils ont tous été cents en classe en réponse à des consignes. Par choix pédagogique, certaines de ces consignes étaient peu claires. Faute de place. les passages qui ont été sources de bonheurs et de malheurs discursifs ne peuvent ici être accompagnés des textes dont ils sont issus. Leur présentation est donc nécessairement partielle, et partiale. En ce qui

14. Pour les notions de régulation et de calibrage, nous nous référons ici à la description sysiémiquc de la compétence discursive développée dans Auchlin ( 1996). pp. 7-8.

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concerne la transcription, les mots entre parenthèses sont ceux qui ont été ajoutés à la version finale, i.e. n'étaient pas présents dans le brouillon et ont même parfois été placés au-dessus de la ligne dans la version finale ; les mots dont l'identification n'est pas assurée ont été suivis d'un '"?" ; quant aux mots barrés, ils étaient soit barrés dans la version finale, soit présents uniquement dans le brouillon. Des formulations ont parfois été accolées aux exemples afin de mettre en évidence certains détails. l.es exemples ne sont pas ici traités de manière exhaustive à deux égards : même s'ils présentent parfois plusieurs passages sources de bonheur ou de malheur discursif et donc un faisceau de problèmes, pour chaque exemple un seul a été choisi ; à maintes reprises plusieurs interprétations diagnostiques seraient possibles. Ce sont les 'besoins de la démonstration' et les contextes dans lesquels interviennent ces exemples qui ont guidé le choix de ces passages et de ces interprétations diagnostiques. Les exemples sur lesquels se base ce travail peuvent ne sembler pertinents que pour un lecteur linguiste, pointilleux, parfois maniaque. Mais aussi particulière que puisse être l'expérience ressentie par ce linguiste à la lecture d'un texte, celle-ci ne tire pas sa validité (ou pertinence) de la récurrence des formes observées mais du degré de généralité et de récurrence des interprétations diagnostiques faites sur ces exemples. Ou autrement dit, on ne déduit pas. en tout cas pas toujours, de la taille ou de la récurrence d'un indice l'importance de ce qu'il indique ...

• Oscillations

Au sein de ces exemples se côtoient des formulations alternatives sans que l'une d'entre elles ne soit privilégiée : l'oscillation qui en résulte a été source de petits malheurs discursifs.

( 1 ) Or, comme (pourl tout un chacun probablement, la page blanche pour débuter un rapport (...} est souvent angoissante. De plus, le résultat final it'êMptu toujours ne me donne pas toujours entière satisfaction [...}. "Or, comme tout un chacun probablement, j'éprouve de l'angoisse face à la page blanche" "Or, comme pour tout un chacun probablement, la page blanche est pour moi iource d'angoisses*.

La comparaison posée dans la première phrase explicite le comparant ( "tout un chacun") mais pas le comparé. La deuxième partie de la phrase est par conséquent impersonnelle, contrairement à ce que laissait prévoir le début de la phrase. Cette oscillation, dans la première phrase, entre le personnel et

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l'impersonnel15 est suivie d'une hésitation explicitement marquée par la rature entre à nouveau une phrase impersonnelle et une phrase personnelle. On retrouve k même phénomène dans l'exemple suivant :

(2) La difficulté d'écrire provient parfois du sujet même : comment écrire de façon convaincante sur un sujet peu motivant ou peu intéressant pour soi-même ? Evidemment, aucun séminaire ne pourrait venir en aide » dans ce cas défigure. Je me retrouve tout de même aussi "bloquée" don* devant la tâche pour des questions de "technique" (tournure de phrase, etc.), d'où l'attrait du séminaire pour mm. "Evidemment aucun séminaire ne pourrait me venir en aide dans ce cas de figure" "Evidemment aucun séminaire ne pourrait venir en aide à ce cas de figure".

A nouveau, ici. l'oscillation concerne des formules personnelles ou impersonnelles. Les deux exemples suivants, contrairement aux deux précédents, ont été sources d'un petit bonheur et montrent qu'il n'est pas nécessaire de choisir entre une formulation personnelle ci une formulation impersonnelle, le scripteur peut opter pour les deux :

(3) /.../ et cela signifie, je m'en rends bien compte, que l'inspiration est plus lente /.../.

(4) Il est vrai qu'un philologue doit (...I, un licencié en droit doit /.../. etc. etc. Mais il n'y a pas de vraie école pour devenir écrivain et c'est peut-être là mon erreur, avoir manqué de confiance en moi /.../.

Contrairement aux deux premiers exemples, ceux-ci ne présentent pas une oscillation entre deux formulations mais une sorte d'articulation : la formulation personnelle est soit isolée dans une construction syntaxique. l'incise, soit explicitement formulée comme telle, i.e. la phrase mentionne explicitement dans son contenu le passage de la tournure impersonnelle à la tournure personnelle. Les exemples suivants présentent également des oscillations ou des articulations mais cette fois-ci entre une formulation générique et une formulation spécifique :

i5) // écrivit à une compagnie maritime, lui proposant, de ce pour paver la croisière qu'il souhaitait faire en compagnie de sa famille, une rétribution

15. "Personnel" ci "impersonnel" signifient ici présence et respectivement absence de pronoms personnels.

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sous forme J'esquisse* d'estampes qu'il se proposait de réaliser sur ta base d'esquisses qu'il ferait pendant le voyage.

Deux lectures se superposent sur le mot "estampe" et sur le mot "esquisse" : "une rétribution sous forme d'estampes" et "sur la base d'esquisses" présentent des estampes et des esquisses génériques alors que "estampes qu'il se proposait de réaliser ..." et "esquisses qu'il ferait pendant le voyage" présentent des estampes et des esquisses particulières, spécifiques. Ces deux lectures sont en quelque sorte lexicalisées par le mot "typique", ce qui permet à l'exemple suivant de présenter harmonieusement des éléments à la fois génériques et spécifiques :

(6) On peut retrouver dans cette estampe réalisée exécutée d'après des esquisses de son voyage en Espagne en 1936, les éléments typiques <£t« des ports de la Méditerranée : au premier abord -et au premier plan-, on est confronté à [-1. mais à l'arrière-plan, on distingue les villages rypiques.

Qu'est-ce effectivement qu'un élément typique, si ce n'est un élément particulier qui a une valeur représentative, générique ? Dans l'exemple 7, également source d'un petit bonheur, "estampes" et "esquisses" gardent le même statut tout au long de leur construction :

(7) Surgi; alors en lui l'idée de faire un des voyages, en cargo ! En échange de ces voyages, il suggéna proposa à une compagnie maritime de lui offrir 48 estampes qu'il allait peindre/dessiner sur la base d'esquisses de voyages.

Ce type de malheur et de bonheur peut être interprété comme la trace de comportements différents face à la question du choix. En effet, contrairement aux articulations, les oscillations seraient la trace d'un non-choix. Face à une alternative A-B. le scripteur peut agir de trois façons différentes : il peut ne pas choisir et hésiter entre A et B, dans ce cas son texte, que nous qualifierons d'hétéroclite^ peut être source de petits malheurs . il peut choisir entre A et B, son texte sera alors homogène et il peut également choisir et A et B. son texte sera alors dit hétérogène. L'oscillation serait ainsi le résultat d'un non-choix alors que l'articulation

16. Ces nouons < 'articulation'", "oscillation", 'générique"- et "spécifique") demandent bien sûr à être précisées cl notamment en situant la dernière opposition par rapport aux distinctions posées entre "défini"/"indéfini" ou entre "identité spécifique"/ "identité numérique" (Pneto (1986), ch. 4).

17 Hétéroclite du point de vue de A et B. Ce texte peut évidemment ne pas être hétéroclite si l'on considère un autre aspect.

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serait le signe d'un double choix. Plus particulièrement, l'oscillation entre une tournure personnelle et une tournure impersonnelle montre la difficulté que peut ressentir le scripteur à définir la place depuis laquelle il écrit. Cette indétermination peut également être renforcée lorsque le scripteur, à force de penser à son destinataire, à force d'essayer de lire son propre texte à la place de celui-ci. en vient à s'oublier lui-même'18 ! Nous avons vu que la spécificité de l'écrit, notamment l'absence de confirmation en cours de route' de la part du destinataire, favorisait ces oscillations. Une des aptitudes requises par l'écrit réside donc dans cette capacité à gérer le doute, l'hésitation.

• Relatives restrictives très fréquentes et pauvres en contenu

Les relatives des exemples suivants ont été sources de petits malheurs discursifs parce qu'elles étaient fort récurrentes et semblaient, de par leur fréquence, dénoter un certain malaise, devoir combler un vide :

<8l Le genre de désinvestissement qui pourrait menacer mon travail serait

l'inquiétude de {...}.

|9) Le contre-projet majeur qui interviendrait serait l'idée que, de toutes manières, le texte serait au mieux très moyen. Mais l'idée du plaisir que j'aurais à me documenter sur les questions que je déciderais de traiter mettrait une sourdine à cette idée pessimiste.

(10) Le sujet qui me parte c'est le thème de "La clé".

11 I ) Les moyens que je vais me donner sont réalistes /.../.

Ces relatives restrictives précisent le thème de l'énoncé. Leur très forte récurrence peut indiquer d'une part que si ce thème exige d'être précisé, c'est peut-être parce qu'il n'est pas suffisamment clair dans le texte ou/et pour le scripteur ; et d'autre part que ce scripteur n'a pas beaucoup d'autres moyens à sa disposition pour effectuer ce genre d'opération (des adjectifs, des démonstratifs, etc. pourraient ici servir à préciser ces thèmes).

L'organisation thématique d'un texte peut certes se modifier, s'élaborer en cours d'écriture, mais la version finale doit comporter une organisation thématique relativement19 fixée. Les relatives restrictives semblent être pour le scripteur un moyen de préciser après-coup, c'est-à-dire

18. Cette «pression est celle d'un des participants de ces enseignements de formation continue.

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à la limite même après avoir écrit le syntagme nominal, ce dont il est en train de parler'. Une grande récurrence de ces relatives (surtout en début de paragraphe) peut ainsi attester d'un tâtonnement thématique, signe d'une écriture qui se cherche (trop) : l'organisation n'est pas suffisamment claire dans le texte pour qu'il ne soit pas nécessaire au début d'un paragraphe de préciser quel est le thème ; les phrases et les paragraphes ne s'enchaînent pas de façon prévisible, les liens thématiques doivent être explicités. Le scripteur doit soit modifier, améliorer son texte de sorte que la fin s'harmonise20 avec le début (et vice versa), soit être capable d'une certaine anticipation"1, c'est-à-dire d'écrire son texte en ayant déjà une certaine image de sa globalité. L'écrit requiert donc de la part du scripteur de pouvoir harmoniser progressivement son texte et/ou anticiper son état final.

• Précisions, spécifications par à-coups ou inadaptées

A nouveau, les précisions ou spécifications apportées dans les exemples suivants sont maladroites. Mais cette fois-ci elles ne se cantonnent pas aux thèmes et aux relatives, elles concernent les circonstants temporels et les syntagmes nominaux. Les exemples suivants ont été en eux-mêmes (et non plus par leur récurrence) sources de petits malheurs discursifs :

(12) Ce souvenir cuisant est la méprise dont il fut victime tors d'une escale à Cartnafiènes, alors qu'il esquissait les murailles d^tne qui parcouraient «M» la montagne qu'il obsédait.

Comme l'indiquent les deux ratures, la spécification apportée par les relatives restrictives n'a pas été tout de suite ressentie comme nécessaire ; elle intervient pour ainsi dire après-coup, comme un réajustement qui s'effectuerait en cours de route. Dans l'exemple suivant on retrouve cette spécification par à-coups en ce qui concerne cette fois la référence temporelle :

(13) Cette im itpr&é image est la vue qu'avait F.scher d'une des passerelles du bateau sur lequel il se trouvait (...} lors d'une croisière en 1936, A cette

19. Celle-ci ne doit pas être totalement ngidifiée des le départ. Il faut laisser à l'écriture une plage de liberté, un espace où le plaisir de l'écriture peut se communiquer au lecteur.

20. Nous ne sommes pas pour l'instant capables de préciser davantage ce que news entendons par harmonie et unité.

21. Nous empruntons ici cette notion à B. Schneuwly (exposé fait dans le cadre de la formation continue en juin 1996).

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époque Escher avait décidé de voguer au fil de l'eau avec son épouse vers les paysages d'Europe du Sud. Il avait souffert durant deux ans auparavant lorsqu'il dût s'exiler en Suisse (en 1935) car? te climat de l'Italie fasciste lui devint trop insupportable. Malheureusement, il rie trouvait aucune inspiration au travers des paysages neigeux et montagneux helvétiques.

"durant deux ans", "(deux ans) auparavant", "lorsqu'il dût s'exiler en Suisse"

et "en 1935" servent à préciser le moment de cette souffrance. Il y a ici une

très forte accumulation de spécifications, qui sont d'ailleurs de plus en plus

précises, comme si le scripteur se rendait compte à chaque pas que les

spécifications précédentes étaient insuffisantes.

L'exemple suivant, lui. dénote une certaine ambiguïté dans la référence d'un

syntagme nominal :

(14) Les raisons pour lesquelles une personne est amenée à participer à un séminaire de ce type sont certainement infinies, cependant, j'ai le sentiment que quelques points communs réunissent les participants de cette salle : t'incertitude, un manque de confiance en soi pour aller de l'avant. Dans le domaine privé comme dans le domaine professionnel, je souffre parfois de ces maux qui certes paraissent insensés à certains mais qui malheureusement m'empêchent défaire passer des messages de manière claire et concise.

"ces maux" est-il anaphorique ou cataphorique ? Rcprend-il "l'incertitude,

un manque de confiance en soi pour aller de l'avant" ou est-ce que ce sont

"ces maux qui certes paraissent insensés à certains mais qui ..." ? La

spécification peut ici être interprétée de deux façons différentes.

Dans l'exemple suivant, le syntagme nominal est insuffisamment spécifié :

(15) /.../ Les attentes de ce cours sont multiples et peuvent être détaillées également en trois points. Le premier point porte sur l'envie de pouvoir transcrire par écrit ce que l'on a pensé et pas devoir revenir sur le sujet en utilisant une phrase du genre 'Non, ce n'est pas exactement ce que je voulais dire, mais plutôt...'. {X*n? élargir mon Je pense donc Pour conclure je pense élargir mon vocabulaire ainsi que la cohérence de mes enchaînements logiques (de mes constructions écrites). Le deuxième point est de pouvoir posséder un canevas pour les différents types d'écrit que j'taiiise dans ma vte professionnelle. Par conséquent ne plus trop devoir penser à ta structure et de pouvoir systématiquement remplir tes différentes rubriques.

22. Les exemples ont élé transcrits tels quels, à la graphie près.

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A qui sont ces attentes multiples ? Serait-ce "mes attentes", "nos attentes" ou encore "leurs attentes" ? Les attentes de l'exemple suivant sont davantage spécifiées, il s'agit de "mes attentes", mais cette fois-ci c'est le contenu même de ces attentes, en quoi elles consistent, qui n'est pas clair ou communiqué d'une façon très indirecte.

( 16) Me s attentes, je ne le cacherai pas, sont impartantes, mais si par l'analyse des textes j'acquiers un sens critique qui favorise la clarté de l'écrit et me permette de repérer mes erreurs, j'estime que je n'aurai pas perdu mon temps.

La consigne de l'exercice demandait que cette personne présente ses attentes, or celles-ci sont soit présentées comme déjà précisées ("mes attentes"), soit présentées pour ainsi dire implicitement ( "mais si j'acquiers ... je n'aurai pas perdu mon temps"). Dans les deux exemples suivants, c'est tout le contenu même de la phrase qui est trop (ex. 17) ou pas assez (ex. 18) spécifié :

(17) "La clé", terme employé aussi bien au sens propre qu'au sens figuré, présent dans de nombreuses métaphores, a tout de suite retenu mon attention du fait d'une forte connotation de solutions et de renvoi à des souvenirs plus imagés.

les informations apportées par cette phrase mériteraient de l'être par plusieurs phrases ;

(18) C'est là une forme de communication écrite bien particulière qui fait surgir des problèmes particuliers.

pour le lecteur (du moins pour le lecteur que je suis), "particulière" et "particulier" ne recouvrent pas des informations précises, la relative restrictive ne suffit donc pas pour préciser le sens de "particulière".

Que les synlagmes nominaux et les circonstants temporels des exemples précédents (voire même la phrase entière) recoupent ou non des références précises pour le scripteur, celui-ci doit prendre en considération deux autres facteurs lorsqu'il décide du degré de spécification qu'il va donner aux formes linguistiques de son texte. D'un côté il doit dès le début présupposer une certaine connaissance de la part de son destinataire, faire un certain pari (puis s'y tenir) et d'un autre il doit tenir compte des indications déjà fournies par son texte. Le scripteur doit donc savoir gérer différents états de connaissance : celui du destinataire avant la lecture de son texte puis son évolution au cours de la

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lecture et également son propre état de connaissance. Ce qui implique qu'il prenne suffisamment de distance par rapport à ses propres connaissances et par rapport à son texte, ne serait-ce que pour s'apercevoir de ces différences. Comme l'indiquent les exemples 12 et 13. cette prise en compte des différents états de connaissance ne doit pas se faire par à-coups : la régulation ne doit pas opérer uniquement à un niveau local, elle doit s'inscrire dans une certaine globalité. La régulation de la compétence discursive doit certes être renforcée à l'écrit (de par l'absence de feed-back du destinataire) mais elle doit opérer en respectant une certaine unité du texte.

• Tâtonnements transcrits tels quels

Certains énoncés semblent mettre à plat telles quelles les pensées du scripteur, le lecteur a alors accès aux différents mouvements de sa pensée, à ses hésitations, ses tâtonnements :

< 19) /.../ Les deux exercices furent pour moi l'occasion de me rendre compte dt divers problèmes. Et. c'est pour pallier à ces difficultés que je compte participer à ce cours. Quels sont ces problèmes ? En premier lieu {...] La participation à ce cours pendant cette année académique est motivée aussi par l'exercice auquel je vais m'atteler [...).

Dans la deuxième phrase de cet exemple, "ces difficultés" est présenté comme étant déjà défini. Or, la troisième phrase montre clairement qu'elles nécessitent d'être précisées (c'est même ce que demandait la consigne). Qu'on interprète cette question comme étant celle que pourrait poser un destinataire ou comme celle que pourrait se poser le scripteur. c'est-à-dire comme étant ou non dialogisée. elle est la trace d'un certain tâtonnement (dialogique ou monologique). Tâtonnement qui est ici maladroit :

(20) /.../ Un article dans le 'Journal de Genève' a suffi pour me convaincre de partir à la découverte des aléas de la langue française .' Des aléas ? Ou lacunes si vous préférez ' Je dois certes en avoir de nombreuses : mais comment progresser sinon ? Quelle frustration d'être la perfection même ! Mais je n'en suis pas là !

A nouveau, cet exemple présente des phrases qui semblent orientées différemment. Nous laissons de côté la tergiversation entre "aléas" et "lacunes" pour nous intéresser aux trois dernières phrases. La personne se

considère successivement comme possédant des lacunes, puis comme étant frustrée d'être la perfection même, finalement comme n'étant pas si parfaite

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que ça. Cette incohérence peut s'expliquer lorsqu'on regarde le brouillon de ce texte :

Mais commet» qui pourrait progresser si il était la perfection même ? Quelle frustration ' Mais ...

Cette fois-ci. l'exclamative exprime quelque chose comme "Quelle frustration ce serait !" ou "Quelle frustration ça doit être !", exclamation qui n'est donc pas directement prise en charge par le locuteur. La correction apportée au brouillon a donc nui à la cohérence du propos : dans la version finale, la personne change trop abruptcmenl de propos à son propre égard. Le dernier exemple contient également des hésitations ou tâtonnements :

(21) Vfaujr me demandez pourquoi je veux suivre ce cours ? Je me le demande moi-même. Ou plus précisément, est-ce que vraiment j'en ai besoin, est-ce que vraiment je peux apprendre ce que j'aimerais tant savoir. Qu'est-ce que je voudrais savoir ? J'aimerais tant savoir (...)

Ces exemples ont en commun une présentation non-harmonisée d'orientations différentes. Ces orientations peuvent provenir de moments différents dans la pensée du scripteur : que ces moments se suivent directement dans le processus d'écriture ou qu'ils résultent de la confrontation d'un état du texte avec des corrections ultérieures ; mais ces orientations peuvent également provenir d'un décalage entre l'état de connaissance du scripteur et celui du destinataire. Les petits malheurs résulteraient dans ces exemples d'une confrontation non-harmonisée entre différents points de vue : que ceux-ci coexistent au sein d'une même personne (seule leur expression semble exiger un décalage temporel) ou proviennent de deux personnes différentes.

Les différents points de vue envisagés par le scripteur doivent être inscrits dans le texte et non transcrits tels quels. A nouveau, pour que la diversité enrichisse le texte, celle-ci doit être articulée, intégrée, ce qui implique un certain travail de la part du scripteur, un travail de construction du texte.

23. Harmoniser n'implique pas ICI homogénéiser mais, si différences il y a, les articuler. Un texte homogène et un texte hétérogène sont harmonisés, seuls les textes hétéroclites ne le sont pas.

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Après avoir examiné ces différents types d'exemples et tenté de cerner quelles difficultés chacun de ces types entraînait pour l'apprenant, nous pouvons maintenant essayer de brosser un tableau récapitulatif généra).

2.2. Récapitulation : un ensemble d'aptitudes requises par l'écrit24

D'une façon générale, un texte écrit est une construction autonome et unitaire. Le scripteur doit apprendre à construire son texte, c'est-à-dire à intégrer dans un tout des éléments souvent fort disparates. Au tout début de son apprentissage, le scripteur25 doit donc un tant soit peu prendre conscience de la disparité des éléments auxquels il est confronté (ses pensées, hésitations, connaissances, celles de son destinataire) et faire certains choix qui lui permettront d'intégrer ces différents éléments. Il doit également prendre suffisamment de distance par rapport à sa forme écrite pour saisir ce qu'elle présente seule. Il doit par conséquent savoir dissocier ce qu'il a écrit de ce qu'il a voulu communiquer, autonomiscr son texte par rapport à sa pensée. De même, il doit l'autonomiscr par rapport au contexte et au paravcrbal.

Ensuite commence le long travail de construction du texte : la diversité doit être intégrée pas à pas, autrement dit le scripteur doit sans cesse réguler son texte de sorte qu'il satisfasse aux contraintes interactionnelles et à ce qu'il se sait vouloir dire. A l'écrit cette régulation doit compenser l'absence de fecd-back du destinataire en respectant une certaine unité du texte.

On retrouve d'une façon très générale la notion d'accord intérieur développée par A. Auchlin : équilibrage qui doit ici intervenir entre ce que le scripteur se sait vouloir communiquer et ce que la forme écrite communique. A l'écrit, l'obtention de l'accord intérieur est d'autant plus importante que, comme nous l'avons vu. la forme seule doit représenter le sujet parlant (il n'y a pas de paravcrbal ou de contexte qui puisse contrebalancer son importance), elle doit être suffisamment autonome et

24. D'un poini de vue didactique, il n'est bien sûr pas suffisant de réussir à cerner ces aptitudes, encore faut-il trouver la manière de faire acquérir ces aptitudes par les apprenants.

25. Nous nous plaçons toujours dans le cas d'un adulte possédant déjà une relativement bonne maîirisc de la grammaire ei de l'orthographe.

26. Auchlin 11990), pp. 324 ss.

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construite pour pouvoir assumer seule la communication. Elle doit donc articuler les différents points de vue du scripteur avec ceux du destinataire.

23 . A l'articulation du linguistique et de l'extra-llnguistjque : la compétence discursive

Toutes les difficultés auxquelles se trouve confronté le scripteur montrent l'importance de l'autonomie de la forme linguistique écrite par rapport à ce qui est extra-linguistique (la pensée comme nébuleuse ou masse amorphe, le contexte, le paraverbal). La dissociation entre ce qui est linguistique cl ce qui est extra-linguistique est donc primordiale" . Nous allons voir que le linguiste qui pose un diagnostic, tout en respectant cette dissociation, se situe en fait à leur articulation.

En ce qui concerne le point de départ du diagnostic, il faut, me semble-t-il, commencer par faire la différence entre les éléments qui s'intègrent au texte. les homogènes et les hétérogènes, et ceux qui ne s'y intègrent pas, les hétéroclites : ceux qui font partie de la construction dont le texte est constitué et ceux qui n'en font pas partie. Les éléments qui n'appartiennent pas à cette construction ne répondent pas aux attentes construites dans le texte, et peuvent par conséquent cire interprétés comme la trace de quelque chose d'extérieur à cette construction : ils peuvent alors soit résulter d'un autre type de construction linguistique (par exemple les tournures qui semblent orales) soit être interprétés comme étant de la pensée posée telle quelle sur le papier (après une verbalisation fort réduite). C'est donc l'irruption (ou la non-irruption) d'éléments linguistiques dans un texte qui permet de faire des hypothèses sur l'état de la compétence du scripteur. Le point de départ du diagnostic n'est donc pas l'élément linguistique lui-même mais le fait qu'il respecte ou non certaines attentes construites par ce qui le précède. De même le point d'arrivée du diagnostic, les hypothèses sur l'état d'une compétence discursive, ne se situe pas exclusivement du côté de la pensée : la compétence discursive est justement ce qui doit permettre d'articuler le linguistique à l'extra-linguistique28.

27 Si nous avons peut-être gagné une certaine autonomie pour la linguistique, nous ne voulons pas pour autant négliger ce que .Merleau-Ponty nomme la fonction heuristique du langage (Merleau-Ponty (1968), p. 22 ; nous remercions A. Auchlin pour nous avoir signalé ce passage). Peut-être même que c'est justement parce qu'il y a une relative autonomie du linguistique que celui-ci peui permettre j c clarifier la pensée...

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Même si l'on se place à l'intérieur d'une conception non-formaliste29

de la langue, à l'intérieur de la conception instructionnelle de la signification développée par J.-C. Anscombre et O. Ducrot dans le cadre du structura­lisme du discours idéal30, et que l'on pense que certaines des attentes qui ne sont pas respectées correspondent à des enchaînements qui ne respectent pas les possibilités d'enchaînement des énoncés précédents, la linguistique ne permet ici que de montrer ces distorsions (ce qui évidemment est fort utile, surtout si l'on veut pouvoir montrer ces distorsions aux scripteurs), elle permet de décrire le symtômc, mais elle ne permet pas de l'interpréter. L'analyse un peu plus détaillée de quelques exemples permettra de mieux illustrer cette démarche.

3. Relatives restrictives et appositives : description linguistique et interprétation diagnostique

Parmi les exemples présentés, plusieurs contiennent des relatives. Leur analyse permettra de montrer que lorsque ces relatives sont sources de petits malheurs discursifs, on ne sait s'il faut les interpréter comme des relatives appositives ou restrictives. Ces distorsions, une fois montrées, seront interprétées.

On décrit habituellement3' la différence entre ces deux sortes de relatives notamment de la façon suivante :

• la relative appositive : - constitue une clause au sens de Berrendonner (1990), elle est donc

relativement autonome et peut comporter des connecteurs, ex. "d'ailleurs" ;

- a un statut de rhème secondaire : elle est supprimable, l'enchaîne-meni ne se fait pas sur elle mais sur la principale ;

- comporte une virgule avant son pronom relatif.

28. Cest pour celte raison qu'il est souvent difficile de déterminer *i un passage mal écrit provient par exemple d'une pensée floue ou d'une méconnaissance de certaines règles linguistiques.

29. Au sens de Merleau-Ponty. 30. Ducrot ( 1980). ch. I ; Ducrot (1984), en. 4. 31. Kleiber (1987), Fuchs & Millier (1979), Godard (1988). Combeites & Tomaxsone

(1988).

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• la relative restrictive : - ne constitue pas une clause, elle n'est pas autonome, elle est intégrée

dans le syntagme nominal auquel elle est rattachée ; • a le même statut thématique que son antécédent ; elle le spécifie, le

détermine ; - ne comporte pas de virgule avant son pronom relatif.

Ces rudiments de différenciation ne permettent pas toujours de déterminer dans les exemples suivants le type des différentes relatives.

(5) // écrivit à une compagnie maritime, lui proposant, de ce pour payer la croisière qu'il souhaitait faire en compagnie de sa famille, une rétribution sous forme d'esquisses d'estampes qu'il se proposait de réaliser sur la base d'esquisses au 'il ferait pendant le voyage.

La différence de lecture (une générique, l'autre spécifique) entre la principale et la restrictive semble bloquer l'interprétation de la relative comme restrictive, "estampes" ne peut être spécifié, déterminé de cette façon, car cela impliquerait rétroactivement d'interpréter "estampes" comme étant spécifique, ce qui entre en contradiction avec le syntagme prépositionnel "sous forme d'estampes". Cette relative serait-elle alors appositive ? Cette lecture pose là aussi un problème (bien que plus léger) dans la mesure où elle semble exiger la répétition de "estampes"3' :

/.../ sous forme d'estampes, estampes qu'il se proposait [...].

Le télescopage des deux lectures cl l'oscillation qui en résulte semblent bloquer tout type d'interprétation univoque. Dans l'exemple suivant.

(18) C'est là une forme de communication écrite bien particulière qui fait surgir des problèmes particuliers.

l'indétermination du syntagme nominal antécédent favoriserait la lecture restrictive de la relative aux dépens de la lecture appositive. Mais les informations qu'apporte la relative ne sont pas suffisantes pour lever cette indétermination. Ni "particulière", ni "particuliers" ne sont suffisamment précis pour admettre une lecture respectivement appositive et restrictive. Ce n'est plus ici l'oscillation qui empêche une lecture univoque du type de la

32. Sur le fait que cette répétition se fasse sans déterminant, ou plutôt avec un article zéro, se référer à Anscombre (1986). pp. 26-27.

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relative mais la sous-détermination des mots choisis par le scripteur. Dans les quatre exemples suivants, les relatives sont clairement restrictives, mais elles peuvent sembler avoir en quelque sorte été écrites après-coup :

(8) Le genre de désinvestissement qui pourrait menacer mon travail serait {'inquiétude de (...}.

(9) Le contre-projet majeur qui interviendrait serait l'idée que, de toutes manières, le texte serait au mieux très moyen. Mais l'idée du plaisir que j'aurais à me documenter sur les questions que je déciderais de traiter mettrait une sourdine à cette idée pessimiste.

i 10) l* sujet qui me parle c'est le thème de "IM clé". (11) Les moyens que je vais me donner sont réalistes /.../.

Les quatre syntagmes nominaux antécédents ont des articles définis ; mais cette spécification est-elle évidente par le co(n)texte ou découle-t-elle de la présence de la relative ? La lecture restrictive de ces relatives ferait pencher la balance du côté de l'aspect en quelque sort cataphorique de cette spécification mais l'évidence dans le co(n)tcxte du contenu apporté par ces relatives ferait, elle, pencher la balance du côté de la lecture appositive. Ceci peut expliquer une certaine gène lors de l'interprétation de ces phrases ; même si, nous l'avons vu, cette gêne se fait surtout ressentir lorsque ces tournures deviennent fréquentes. On retrouve dans l'exemple suivant un phénomène analogue :

i 14) Les raisons pour lesquelles une personne est amenée à participer à un séminaire de ce rvyv sont certainement infinies, cependant, j'ai te sentiment que quelques points communs réunissent tes participants de cette suite l'incertitude, un manque de • on fiance en soi pour aller de l'avant. Dans te domaine privé comme dans le domaine professionnel, je souffre parfois de ces maux qui certes paraissent insensés à certains mais qui malheureusement m'empêchent de faire passer des messages de manière claire et concise.

la spécification de "ces maux" peut être interprétée soit comme étant anaphorique, dans ce cas la relative est appositive, soit comme étant cataphorique, la relative est alors restrictive. L'information apportée par la relative semble suffisamment importante' pour favoriser la lecture appositive. mais l'absence de virgule favorise la lecture restrictive.

Ces petits malheurs semblent donc provenir d'une difficulté à identifier clairement et de façon univoque le type de la relative33, Deux aptitudes nous sembleni à la base de cette difficulté : la gestion de la

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différence entre son propre point de vue et celui du destinataire, et la gestion de la dynamique du texte, de son déroulement. La première aptitude recouvre des phénomènes proches des cas de "métanalysc focale", notion développée par Apothéloz & Reichler-Béguelin (à paraître). Ils analysent en effet l'exemple suivant en recourant à la différence de points de vue entre le scripteur et le destinataire :

Ils nous ont défendu d'en sortir, par suite de cette terrible maladie que vous soignez avec courage et qui règne dans les communes avoisintmles I lettres de soldat. 1918) (Apothéloz & Reichler-Béguelin (à paraître), cités par Gapany I1995) p. 51)

pour le soldat "cette terrible maladie" occupe une place saillante et n'est donc pas définie par la relative qui suit, la relative est donc appositive ; le destinataire au contraire, s'il ne considère pas cette maladie comme saillante, lit la relative comme étant restrictive. La deuxième aptitude consiste à savoir gérer l'état du texte dans lequel intervient la relative, à savoir si son antécédent a ou non été spécifié auparavant.

A partir de ces exemples on retrouve les aptitudes requises pour l'organisation thématique : le scripteur doit gérer d'une part la différence entre son propre point de vue et celui de son destinataire et d'autre part l'évolution des connaissances du destinataire au cours de sa lecture du texte. Cette dynamique du texte aurait pour effet une sorte de cristallisation dans le discours : de même qu'une expression à force d'être employée dans un certain contexte peut cristalliser en langue un nouveau sens, certains éléments changent de statut dans le déroulement du textew. Contrairement à la cristallisation dans la langue' . cette cristallisation rapide est éphémère : elle n'affecte pas la valeur en langue des mots, elle n'affecte que leur valeur

33. Même si l'on décide de prendre en considération les relatives déictiques. «Benzakour (1984)) ou piclives (Gapany (1995)). aucune d'entre elles ne permet une lecture univoque.

34. Ou du discours, nous employons ici ces deux ternies de façon équivalente (sans d'ailleurs les définir...).

35. Notion développée par J.-C. Anscombre et O. Ducrot. Cette cristallisation en langue est mise en évidence notamment par la phénomène de la délocutivité (Bcnvenisie (1966), ch. 23 ; Anscombre & Ducrot (1983), ch. 7. p. 173 ss ; Anscombre (1985)).

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discursive. Il n'est pas étonnant que l'on retrouve l'importance de cette dimension pour l'organisation thématique, la distinction entre thème et rhème ayant certainement à voir avec cette cristallisation dans le discours 6.

4. La quoilité d'un texte : un élément de la dimension qualitative ? un espace en partie grammaticaJisable ?

Un texte bien écrit est construit, autonomisé par rapport au contexte, au scripteur et à ses pensées. Cène autonomisation implique que les éléments du texte doivent être intégrés en un tout. Même si les notions d'unité, d'harmonie sont difficiles à circonscrire, il semble possible de décrire linguistiquemcnt certaines différences entre des éléments hétéroclites, qui ne s'intègrent pas au texte, font irruption et dérangent, et des éléments hétérogènes, dont la diversité et les différences sont articulées et inscrites dans le texte.

En essayant d'objectiver la dimension qualitative d'un texte, nous nous sommes en fait centrés sur sa dimension quoilitative3', c'est-à-dire sur ce qui fait qu'un texte est un texte : pour décrire ce qu'est un texte bien écrit, nous avons tenté de décrire ce qu'est un texte qui est écrit. Cette dimension quoilitative, que la grammaire traditionnelle contribue à définir mais qu'elle ne recouvre pas entièrement, nous semble en effet pouvoir faire partie de la dimension qualitative sans pour autant elle aussi la recouvrir totalement. Si ces deux dimensions nous paraissent imbriquées l'une dans l'autre, nous ne pouvons pour l'instant définir plus précisément leur articulation.

Entre la grammaire traditionnelle et ce qui serait de l'ordre d'un goût totalement individuel et subjectif, il y a donc la place pour une description linguistique de la quoilité d'un texte. Nous laissons ici ouverte la question de savoir s'il est nécessaire de postuler des unités supérieures à la phrase ou s'il est suffisant de se concentrer sur les

36. Le ihème et le présupposé ont d'ailleurs plusieurs propriétés en commun (Anscombre < 1995). p. 72).

37, Notion développée dans Auchlin (1996), p. 2 : "Lorsqu'un fabricani de poudre à lessive fait imprimer 'nouvelle qualité' sut .ses emballages, il joue avec l'ambiguïté du moi 'qualité' : l'expression signifie à la fois 'nouvelle sorte', la qualité au sens d'identité spécifique, et 'meilleure qualité', la qualité dans sa dimension évaluative [.,.]. Afin de distinguer ces deux sens du mol qualité, je propose d'utiliser le néologisme 'quoilité' pour désigner la dimension de l'identité spécifique, et de ne désigner par 'qualité' que la dimension évaluative".

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enchaînements entre énoncés38. De même, si pour relever les passages sources de bonheur et de malheur discursif le linguiste a en effet besoin de s'investir davantage dans sa lecture du texte que lorsqu'il doit en corriger les fautes d'orthographe ou de syntaxe39, nous ne savons pas si cette différence est à mettre au compte d'une différence de nature, ou si elle s'explique par le fait que ces phénomènes n'ont pas pour l'instant été décrits et répertoriés. Dire que la description de la quoilité d'un texte peut relever de la linguistique, c'est opter pour une conception non-formaliste de la forme, i.e. estimer suffisamment la forme que constitue un texte pour tenter de dégager les régularités d'emploi qui lui sont propres. Dans le cadre d'une didactique de l'écrit, si l'on s'intéresse à l'établissement de diagnostics sur des compétences discursives, un texte nous semble en effet pouvoir révéler si ce n'est la vérité d'un homme, du moins certaines indications sur l'état de sa compétence discursive.

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39. Auchlin (ici-même).

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