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L'ILLUSION par TIPHAINE PEDAT

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L'ILLUSIONparTIPHAINE PEDAT

Je suis là, dans le seul lieu où je n’aurais jamais pensé me réfugierun jour, et pourtant aujourd’hui je suis là, là dans une église. Assisesur un banc de bois, les mains jointes posées sur mes genoux. Onpourrait croire que je prie or ce n’est pas le cas, ou plutôt si, jeprie mais pas Dieu. Je prie juste pour pas qu’Ils me retrouvent.La respiration haletante j’essayais de me calmer sur mon banc. Jeregardais tout autour de moi et j’avais beau ne pas être croyante jene pouvais qu’admirer la majesté des lieux. Des dorures, un im-mense plafond, des tableaux… Je me levai du banc et me dirigeaivers l’autel central. Le bruit de mes pas résonnait sur le sol depierre.Au moins je suis seule et personne ne viendra me chercher ici, pasmême moi d’ailleurs… pensai-je.En faisant le tour de l’église, j’effleurais du bout des doigts les sta-tues de marbres. Qui sont-Ils , je n’en sais rien. Me retrouveront-Ils ? Je n’en sais rien. Qu’ai-je fait pour qu’Ils me poursuivent ? jen’en sais rien. Que vais-je faire maintenant ? Je n’en sais rien…Ma vie est devenue un immense tas de « je n’en sais rien ».Tout estdevenu flou et incertain.J’avais les yeux fermés goûtant le calme que l’église me procuraitmais un mouvement sur le côté me les fit rouvrir immédiatement.Devant moi se tenait un homme habillé en soutane noir. Je reculaisd’un pas effrayée.-Vous m’avez fait peur ! hurlais-je.- Ce n’était pas mon intention, veuillez m’excuser, dit calmementl’homme en face de moi.Avant que j’aie pu répliquer, il reprit :- Vous cherchez des réponses, n’est ce pas ? Je peux vous en four-nir, suivez-moi. Il n’attendit pas que je réponde, il tournait déjà lestalons et se dirigeait vers le fond de l’église.Dois-je le suivre ? Qui est-il ? Puis-je lui faire confiance ? il disaitqu’il avait des réponses pour moi… Et voilà que j’ai juste encoreplus de questions qu’avant…Je me décidai tout de même à le suivre… Il était près d’une trappeouverte que je n’avais pas remarquée avant. Je jetai un coup d’œil

dans le trou béant et n’aperçus rien que le noir.- Je ne descendrais pas là-dedans hein ! clamais-je.Mais l’homme en soutane venait d’empoigner une sorte d’échelleet disparaissait dans les profondeurs du trou noir.J’ai l’impression d’être écoutée c’est super… Bon et bien je croisque c’est à mon tour maintenant…J’inspirai un grand coup avant de me lancer, moi aussi. Soudain latrappe se referma d’elle-même audessus de moi et je fus plongéedans les ténèbres. Je ne suis, habituellement, pas claustrophobemais là, je dois reconnaître qu’une légère panique m’envahit.Et si c’était un piège, s’Ils m’avaient retrouvée  ? Que feraient-Ilsde moi ?Je me forçai à chasser toutes ces pensées macabres de mon espritet continuai à descendre dans les entrailles de la terre. Quand enfinj’atteignis le sol, l’homme en soutane m’attendait une torche à lamain. Il me regarda et se remit à marcher en silence. Je le suivispendant des minutes ou bien des heures dans le long tunnel quis’étendait devant nous. Nous arrivâmes enfin devant une vieilleporte en chêne, là, l’homme en soutane frappa une fois… deuxfois…Et j’entendis s’élever derrière le panneau de bois une profondevoix :-Entrez.L’homme à mes côtés poussa donc la porte et je fus aveuglée par lalumière qui s’échappait de la pièce. Quand mes yeux s’y furenthabitués, je distinguai quatre murs et sur ces quatre murs des cen-taines et des centaines de livres s’alignaient. Au centre de la piècetrônait un massif bureau en bois  ; derrière, sur un grandiose fau-teuil se tenait un homme habillé lui aussi en soutane noire mais ilparaissait cependant plus âgé que le premier homme.- Venez-vous asseoirYourie, dit-il en me montrant un siège en facede son bureau.Comment connait-il mon prénom ?- Qui êtes-vous ? L’interrogeai-je.Le premier homme était parti et il avait refermé la porte après lui.

Je me retrouvai donc toute seule avec l’homme assis derrière sonbureau.- Qui je suis n’a que très peu d’importance. Ce qui a de l’impor-tance c’est toiYourie, toi et tes questions. Je sais ce qu’il t’arrive etj’espère pouvoir t’aider.- Eh bien, allez-y alors, aidez moi je n’attends que ça ! Lançai-je unpeu agressivement, mais l’homme restait impassible.- J’attends tes questions, répondit-il calmement.- Qui êtes-vous ? C’est bien une question ça, non ?- Oui mais elle me concerne moi et non toi. Je veux entendre lesquestions qui te concernent.Je réfléchis un instant avant de lancer :- Qui sont-Ils ?Sans espérer qu’il puisse m’éclairer convenablement sur ce point,il ne devait même pas savoir de quoi je parlais…- Voila une question tout à fait juste et intéressante. Ils sont des dé-mons, mi-hommes mi-flammes, ils sont la plupart du temps pri-sonniers en enfer mais il arrive parfois que certains s’échappent etsèment le chaos sur terre.Des démons  ? Mi-homme mi-flammes  ? J’avais tout de même dumal à le croire, cela semblait si irréel, tout le monde sait que lesdémons n’existent pas. Mais pourtant, au fond de moi, j’étais per-suadée que l’homme disait la vérité. Des flashs me revinrent enmémoire. Des flashs de ce qui m’avait poussé à me réfugier dansl’église.Ballade nocturne, puis tout d’un coup lumière. Bruit, claquementsinistre, comme des flammes brûlant dans l’âtre. Chaleur, brûluresur mon corps, aveuglement. Une main noire se tend vers moi,veut m’étrangler, me griffer. Je me débats, je cours, je me préci-pite vers la première porte que je trouve, c’est celle de l’église.J’entre, Ils ne me suivent pas. Protégée.- Des démons échappés de l’enfer ? Répétai-je- Oui, et c’est le fait de te réfugier dans l’église qui t’a sauvée.D’autres n’ont pas eu cette chance…- D’autres personnes ont été attaquées ?

- Oui…- Mais il faut faire quelque chose ! On ne peut pas laisser ces dé-mons tuer des innocents !- Il faut les renvoyer en Enfer…- Mais ?- Mais le rituel est difficile à réaliser et je crains de ne pas y par-venir. De plus, il me manque un ingrédient crucial.- Il faut tout de même tenter ! Il vous manque quoi ?- Le sang d’une personne né le 6 juin, je n’en ai trouvé aucunepour l’instant.- Gloups… Le sang…- Oui mais pas beaucoup, juste de quoi remplir une fiole, mais ilfaudra que la personne s’inflige la blessure elle-même.Un silence passa.Dois-je lui dire que je suis née un 6 juin ? Ça fait mal de se blesser,encore plus quand on se l’inflige soit même. Je ne suis pas maso…Mais il ne faut pas laisser ces démons en liberté et je suis à priori laseule à pouvoir les renvoyer en Enfer. Il faut que je le fasse…- Je suis née un 6 juin, lançai-je après mon moment de réflexion.L’homme leva les yeux de son bureau et ouvrit la bouche pourparler mais je le coupai avant :- Et j’accepte de donner mon sang pour le rituel.- Oh ? Très bien, nous allons donc pouvoir tenter de renvoyer cesdémons dans les flammes de l’Enfer. Suis-moi.Il alla vers le mur nord de la pièce et fouilla dans sa bibliothèque, iltira un livre, ce qui activa un mécanisme ouvrant ainsi un passagevers une autre pièce.Au sol de cette salle était dessiné un pentacle.- Bien, commençons.Après ces mots, l’homme en soutane s’activa, il fit brûler de l’en-cens, alluma des bougies de différentes couleurs, prononça desphrases incompréhensibles en latin… Puis vint le moment où il metendit un petit poignard argent.- C’est à toi, murmura-t-il.Il me poussa au centre du pentacle, me donna la fiole que je devaisremplir de mon sang puis il me dit de répéter ce qu’il disait.

- Moi,Youri Tiskis, née le 6 juin 1994 accepte de donner mon sangafin d’accomplir le rituel qui renverra les démons en Enfer.Après ça, l’homme me fit signe de me couper.Tu le fais pour le bien de l’humanité… me dis-je en espérant quetout ceci marche  ; je ‘ai jamais cru au Diable ni en Dieu et voilàque j’accepte de participer à un rituel de magie…J’avalai une grande gorgée d’air, fis le vide dans ma tête, et tran-chai d’un coup la paume de ma main. Je sentis l’argent mordantma chair puis la brûlure qui s’en suivit. La douleur me fit lâcher lecouteau qui provoqua un doux tintement en tombant au sol. Jeserrai les dents afin de ne laisser passer aucun son. J’aperçus lesang perler au niveau de ma blessure et il se mit enfin à couler àflot. Je remplis la fiole tant bien que mal et sortis ensuite dupentacle en titubant.L’homme me prit le flacon et me tendit un foulard en lin blanc queje nouai autour de ma main blessée afin d’essayer de stopperl’hémorragie.Après cela, l’homme reprit ses incantations.- Retournez d’où vous venez, démons de l’enfer ! Retournez voirvotre maitre Lucifer ! A la fin de cette phrase, l’homme jeta la fiolede sang par terre et elle explosa dans une puissante déflagration, jefus projetée contre le mur et le choc m’assomma. Je ne mesouviens pas de ce qui se passa ensuite. Mais quand je revins à moi,j’étais à l’endroit même où tout avait commencé, l’endroit où jem’étais faite attaquer. Je m’assis par terre en attendant de retrou-ver tous mes esprits.Au loin, j’aperçus le soleil levant.Que s’est-il passé cette nuit ?Une violente douleur dans mon crâne me fit grimacer.J’ai dû me cogner la tête je ne sais comment et pendant que j’étaisinconsciente j’ai dû rêver. Des démons mi-homme mi-flammes quiattaquent les gens ? Des prêtres qui font de la magie noire pour lesrenvoyer en Enfer ? Moi qui me suis coupée pour donner mon sangpour ce rituel, Oui j’ai vraiment dû rêver tout ça, ce n’était pasréel, je n’ai même pas de cicatrice à l’endroit où je me suis soit di-sant coupée…Après m’être convaincue que tout ceci n’avait pas existé et que

j’avais tout imaginé je me levai. La tête me tournait toujours et jedus m’appuyer contre un arbre pour ne pas retomber. C’est là quequelque chose de blanc accrocha mon œil, je me penchai pour leramasser. Il s’agissait d’un foulard de lin blanc taché de sang… Ilressemblait étrangement à celui que j’avis noué autour de mapaume dans mon rêve…- Ce n’est pas possible… Murmurai-je en l’enfouissant dans mapoche…Peu après je pris le chemin de chez moi, bien décidée à allerdormir et oublier toute cette histoire irréelle…FIN