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21 dec.2012 Interview : René Véron Rubrique libre Etudier loin d’ici Explique ta thèse à ta mamie Les camps de GSE Plein d’autres choses... Le journal des étudiants en géosciences et environnement

Irrégulier n°21

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L'Irrégulier – le journal des étudiants en géosciences et environnement – a le plaisir de vous proposer un nouveau numéro haut en couleurs ! Une bonne lecture à tous

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21dec.2012

Interview : René Véron

Rubriquelibre

Etudier loin d’ici

Explique ta thèse à ta mamie

Les campsde GSE

Plein d’autres choses...

Le journal des étudiants en géosciences et environnement

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L’Irrégulier

Dedans

Nous

Edito 3 / L’Aege te parle 4 / Entretien avec René Véron 5&6 / Les camps de GSE : camp de cartographie géologique 7&8 - excursions de géomorphologie 9&10&11 / Explique ta thèse à ta mamie : Basile Gross 12&13 - Florian Humair 14&15 / Rubrique libre : Grégoire Hauser 16&17 - Corentin Neuffer 18 / Etudier loin d’ici : Manon Stalder 19&20 - Adrian Timofte 21 / Des géo’s en balade : Corentin Neuffer et Stephan Utz 22&23 / Portfolio : Sébastien Ruttimann 24

Rédacteur en chef : Corentin Neuffer (rédaction) & Jean-Baptiste Bosson (mise en page) Comité de rédaction : Vincent Humphrey, Yoan Pétremand, Lucie Rosset, Sébastien Ruttimann & Stephan Utz ; Karel Nicolas (illustrations) & Sébastien Ruttimann (photos)

Ont également participé : Gaétan Métral, René Véron, Basile Gross, Florian Humair, Grégoire Hauser, Manon Stalder & Adrian Timofte

Numéro 21, paru le 10 décembre 2012, Editeur FGSE

http://www3.unil.ch/wpmu/aege/lirregulier/

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EditoIMPORTANT !! Ceci est certainement le dernier édito que vous pourrez déguster. L’Apocalypse prédite par les Mayas devrait se produire le jour de la fin des cours (et de la fin de l’exposition de votre journal favori), c’est moche… Jetez-vous donc sur l’Irrégulier une dernière fois !!

Confucius a dit un jour : “si tu veux nourrir un homme un jour, donne-lui un poisson. Si tu veux le nourrir pour la vie, apprends-lui à pêcher".

La nouvelle équipe de l’Irrégulier a clairement dû apprendre à pêcher pour ce numéro ! Devant faire peau neuve (un peu dans l’urgence), l’équipe s’est mise en quatre pour concocter un numéro qui, nous l’espérons, attisera votre curiosité et stimulera votre esprit (du moins un peu plus que certains cours).

À l’image du monde, 2012 a également été l’année du grand bouleversement pour la Faculté des Géosciences et de l’Environnement ; suppression de la commission d’enseignement, création du Bureau et Conseil de l’Ecole… Et au final (certains n’y croyaient plus), un déménagement dans un nouveau bâtiment. Dix ans après sa création, la Faculté prend maintenant un nouvel élan ; attention à ne pas rater certains virages décisifs quant à l’orientation politique, socio-économique et technique que veut se donner la fac’. La Faculté des Géosciences et de l’Environnement de Lausanne doit conserver et développer sa prédominance, non seulement dans la qualité du cursus et l’originalité des cours qu’elle peut proposer, mais aussi dans son positionnement.

À l’inverse de la Faculté, l’Irrégulier n’a pas fondamentalement changé de formule ; on vous propose dorénavant une rubrique supplémentaire (les camps de GSE) ; sinon, tout y est !

Yoan et Gaétan, les nouveaux co-présidents, vous apporteront les news venues de l’AEGE et en profiteront pour se présenter à vous !

Le Professeur René Véron se confiera à nous et nous présentera les nouveaux aspects structurels de la Faculté.

Basile et Florian tenteront d’expliquer les tenants et les aboutissants de leur thèse à leur mamie.

La Rubrique libre vous proposera deux articles qui, nous l’espérons, alimenteront maintes conversations et susciteront quelque réponse (c’est aussi le but de la rubrique !!).

Si vous n’avez pas eu de nouvelles d’Adrian et de Manon depuis le début de la rentrée, c’est normal, ils sont à l’étranger ; Adrian nous contera sa version du American Dream et Manon vous initiera à un voyage dans le Nord de l’Europe pour nous raconter son expérience en Norvège.

Et, last but not least, Stephan et moi-même vous mènerons en balade au travers du Chablais, passant de la Suisse à la France pour changer un peu.

Bref, du tout bon !

Mais malgré le temps maussade de l’automne, un semestre trop chargé et un monde qui n’a jamais été si proche d’une troisième guerre mondiale, il s’agit de ne pas sombrer dans le pessimisme. Pour ce faire, lisez l’Irrégulier, ça va peut-être vous remonter le moral !!

Bonne lecture !!

Corentin Neuffer

Photo de la couverture : quelque part au Svalbard (© F. Humair)

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Pour commencer, nous tenons à remercier le comité 2011-2012 pour tout le travail accompli pendant cette année mouvementée. Le nouveau comité est maintenant prêt à rendre cette année mémorable et riche en activités. En effet, en 2013 nous allons fêter les 10 ans de la faculté et de l’AEGE, il y a donc de quoi fêter ! Nous comptons donc sur votre présence afin de marquer cet événement de grande importance.

La Geo’s night au Harper’s a eu un grand succès, les stars du cinéma de tous horizons se sont réunies et se sont abreuvées à leur guise ! Nous nous réjouissons également de vous voir nombreux à notre traditionnel souper de Noël du 20 décembre et au WE de ski du 1 au 3 mars qui s’annoncent festifs et riches en sensations fortes.

L’AEGE a fait un grand pas cette année car elle est sortie depuis quelques mois de la « cave » de l’Amphipôle afin de rejoindre son tout nouveau bureau à Geopolis. C’est dans ce bureau que nous oeuvrons une fois par semaine (au moins) pour des événements festifs ou académiques et que nous débattons sur le fonctionnement de la faculté ou de l’université. Si vous avez des questions, vous pouvez venir nous voir le mardi de 12h15 à 13h00 au bureau 4430 ou nous contacter par mail à l’adresse [email protected] (tu la connais celle-ci :) ! Si tu es motivé à t’investir dans la vie de la faculté n’hésite pas à nous rejoindre !

∆ Pour en savoir plus sur le fonctionnement de l’AEGE, nos activités ou autres, rendez-vous sur notre tout nouveau site internet :

http://unil.ch/aege.

L’Aege te parleYoan Pétremand & Gaétan Métral

Parle à l’IrrégulierTu as envie de proposer un article, des photos ou des dessins ? Tu souhaites participer à la rédaction d’un journal (de la conception à la mise en page) ? Tu as détesté ou adoré un article ? N’hésite pas à nous écrire à l’adresse [email protected]

Les caricatures de Karel

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Entretien avec René VéronProfesseur à l’IGD, Vice-doyen aux affaires

académiques et directeur de l’Ecole des GSECorentin Neuffer & Yoan Pétremand

Quel métier rêviez-vous de faire enfant ?

Cela a changé naturellement, comme chez tous les garçons, mais je n’ai pas eu les attentes « normales ». Je ne voulais pas devenir astronaute ou policier mais être forestier m’aurait beaucoup plu, j’aimais beaucoup la forêt. Trente ans plus tard, j’ai fait des études sur la gestion forestière, ça m’est revenu… c’était intéressant !

Avez-vous eu un parcours particulier avant le monde académique ou est-ce venu naturellement ?

Cela s’est passé dans une lignée assez étroite mais ce n’est pas une ambition que j’avais toujours eue. Devenir académicien, c’est plutôt arrivé par hasard, ou par opportunité, ça a marché comme ça. Par exemple, quand j’étais en train de finir mon master, on m’a proposé de faire un doctorat ; naturellement j’ai dit oui, pourquoi pas. Après le doctorat, je n’étais pas vraiment convaincu parce qu’en Suisse, on ne peut pas vraiment planifier de devenir professeur car il n’y a pas beaucoup de postes. J’étais assez ouvert pour faire d’autres choses, j’ai donc soumis des candidatures pour plus ou moins n’importe quoi : on m’a seulement pris pour des postes académiques.

Pourquoi la géographie, et plus particulièrement la géographie sociale ?

C’est d’abord un choix de programme universitaire ; comme pour beaucoup de personnes j’ai eu au gymnase un enseignant de géographie assez intéressant et cette branche m’intéressait également beaucoup. Ce qui m’a toujours plu c’est cette relation entre les humains et la nature, l’environnement naturel. Comprendre l’environnement naturel par la société et vice-versa, comprendre la société par son rapport avec l’environnement. Je voulais faire ce que j’aimais faire et je ne pouvais pas faire Histoire à cause du latin, donc voilà.

Vous avez voyagé au Canada et dans d’autres pays. Pourquoi la Suisse et l’Université de Lausanne ? Aussi par opportunisme ?

Oui et non. Comme vous le savez, je suis d’origine suisse, saint-gallois. Au Canada c’était très intéressant, j’ai beaucoup aimé y travailler, mais la Suisse m’a quand même manqué. Et comme j’ai vu des offres, j’ai postulé. J’avais un congé sabbatique en Suisse – ma femme a un emploi à Genève – et par hasard on a trouvé un appartement à Lausanne. Là je me suis dit pourquoi pas postuler à l’UNIL.

Vous avez pas mal voyagé avant de venir à Lausanne. Est-ce que cela ne vous manque pas ?

En tant que professeur, on a beaucoup d’opportunités de voyager,

notamment dans mon métier si l’on s’intéresse aux études de développement. Pour moi il y a maintenant des contraintes liées à ma famille, il est donc plus difficile de voyager. Le travail lié aux tâches administratives permet également moins d’être absent pendant des mois et des mois. C’était mon mode de recherche habituel, de rester pendant des mois dans un village, dans une ville, de m’immerger. Là ça devient plus difficile.

Je pars relativement souvent, mais pour des voyages très courts ; c’est un peu le tourisme de la recherche et pas vraiment de la recherche.

Vous avez des passions ou des hobbys ?

C’est la famille ; on n’a guère le temps d’avoir des hobbys qui prennent beaucoup de temps. Mais avec les enfants on peut avoir des hobbys en commun, j’aime beaucoup le ski et la natation. J’aime aussi la randonnée, mais ma famille n’aime pas ça.

Qu’emmèneriez-vous sur une île déserte ?

Ce serait naturellement ma femme et mes quatre enfants. Ce serait bien peuplé après !

Comme objet un maillot de bain, mais s’il n’y a que ma famille je n’en aurai pas vraiment besoin.

Si vous aviez une baguette magique, que feriez-vous ?

Plus de justice sociale et moins de famine dans le monde.

Au niveau personnel, avez-vous des ambitions, des projets particuliers ?

L’ambition générale, c’est d’être heureux. Une autre ambition, c’est que par l’enseignement on peut peut-être encourager les jeunes gens à faire une différence dans le monde.

Du point de vue de ma recherche, je viens de commencer un nouveau projet sur des petites villes en Inde et la gouvernance environnementale dans ces petites villes. J’espère que ça va bien marcher.

Concernant maintenant l’Ecole des Géoscience. C’est une chose toute nouvelle pour la faculté ; vous qui la dirigez, pouvez-vous nous en parler ?

Il faut distinguer entre la gestion quotidienne et la planification à moyen terme. La gestion quotidienne des affaires académiques n’a pas beaucoup changé : nous avons toujours le Secrétariat académique qui continue de traiter les dossiers plus ou moins comme avant. Ce qui

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est peut-être plus important et plus intéressant, c’est au niveau de la planification à moyen terme, de l’Ecole. On a un Bureau de l’Ecole et un Conseil de l’Ecole ; ces deux organes remplacent la commission d’enseignement. Ce ne sont maintenant plus des représentants des Master mais des représentants des filières (ndlr : géologie, environnement et géographie). Les représentants auront avec un peu de chance une vision holistique de l’enseignement du Bachelor au Master. Le Bureau agit plus comme un think tank et fonctionne à nombre restreint, à cinq personnes. C’est plutôt pour faire des propositions, réagir rapidement à des demandes, des choses comme ça. C’est un organe beaucoup plus flexible que ce qu’était la commission d’enseignement je crois.

La fonction du Conseil est de vérifier et discuter les propositions du Bureau. Le Bureau ne fait pas ce qu’il veut ; on négocie, on discute, on modifie afin de mettre les choses plus en transparence. C’est également l’idée du Conseil : dans le Conseil, il y a plus ou moins la même représentativité que dans l’ancienne commission – 3 étudiants, 3 membres du personnel intermédiaire et PAT (ndlr : personnel administratif et technique) et les professeurs des différentes filières.

Vous parlez de la représentation des étudiants. Pour vous, quelle importance donnez-vous à cette représentation ?

C’est absolument clé. Il ne la faut pas seulement au Conseil de l’Ecole ou au Conseil de faculté, mais aussi par des voies informelles. Ce n’est pas toujours nécessaire de passer par des institutions existantes, mais simplement de donner des retours autrement. Comme enseignant, on a des idées mais on ne sait pas ce que les étudiants en pensent. Les étudiants peuvent apporter d’autres perspectives par leurs expériences et c’est très important de les entendre.

Certains étudiants ont l’impression que les professeurs de culture anglo-saxonne sont plus ouverts à la discussion informelle pour régler certaines choses par un contact direct. Avez-vous aussi cette impression?

Je ne suis pas sûr, vous pourriez le dire mieux que moi. Mais j’ai quand même l’impression que la plupart de mes collègues sont assez ouverts à l’échange avec les étudiants. Je ne sais pas si c’est une question de culture ou une question de génération. J’ai aussi été actif comme étudiant dans une association et pour la rédaction d’un journal comme l’Irrégulier. A l’époque, nous avons dû nous battre, nous n’avions pas de poids dans les décisions. C’était beaucoup plus conflictuel et aujourd’hui nous avons des relations beaucoup plus paisibles. Il y a des représentations qui permettent aux étudiants de s’exprimer, peut être pas assez. Ces organes sont très positifs pour les étudiants, pour les enseignants et pour l’université.

Avez-vous un conseil à donner aux étudiants de la faculté par rapport à leurs études ou à la vie de tous les jours ?

Lorsqu’on est actif dans une association d’étudiants comme l’AEGE, cela apporte beaucoup. Ce sont des compétences transversales qu’on ne reçoit pas nécessairement dans les cours et ça peut souvent faire une différence. Mes collègues qui étaient actifs dans des associations

comme les ONG ont développé des compétences et ont eu une meilleure chance sur le marché de l’emploi. Je ne veux pas dire qu’il faut s’engager seulement dans le but d’avoir un emploi plus tard, mais cela apporte beaucoup de compétences. Je me rappelle d’une étude qu’on a faite à l’université de Guelph où je travaillais avant au Canada. Nous avons interrogé des anciens étudiants qui avaient fini depuis une dizaine d’années et nous leur avons demandé où ils avaient développé les compétences les plus importantes. Lors d’un cours, d’un cursus, ou par des activités extracurriculaires ? C’était frappant parce que la majorité a répondu que c’est par les activités extracurriculaires qu’ils ont développé les compétences qu’ils ont le plus besoin aujourd’hui. Cela pose également des questions sur ce que les étudiants font avec leurs études.

Pensez-vous que dans le cadre du cours, vous apportez le bagage de base et que grâce à cela les étudiants peuvent s’engager et apprendre d’autres choses ?

Ce qui est important ce n’est pas seulement le bagage de base mais c’est aussi la motivation de faire sa propre recherche, d’être curieux, de savoir où trouver les choses. Parce qu’aujourd’hui, si je vous donne des faits dans les cours, je peux le faire sur des sujets actuels, mais dans dix ans ce sera déjà dépassé. En tant qu’enseignant nous devons essayer d’expliquer aux étudiants comment faire leur propre recherche et mener leur propre réflexion.

Est-ce que vous avez lu le dernier numéro de l’Irrégulier ?

J’ai lu l’interview de Stuart Lane en préparation de cet entretien. Mais je dois dire que j’ai lu des éditions précédentes et je trouve que c’est une bonne source d’information. Des fois, c’est plus informatif que les informations officielles qu’on obtient.

Est-ce que vous écrivez vous-même dans un journal ou publiez régulièrement dans des revues?

Dans des revues oui, mais pas dans un journal personnel malheureusement. J’écris un journal de recherche lorsque je suis sur le terrain et j’écrivais aussi un journal privé quand j’ai fait mes recherches doctorales. Aujourd’hui quand j’écris, c’est des mails aux étudiants, aux collègues ou des articles pour les revues.

Vous avez beaucoup travaillé sur le développement et la géographie sociale et politique. Que pensez-vous de la situation en Syrie et au Proche-Orient actuellement ?

Malheureusement, je ne comprends pas très bien la situation et l’histoire de la Syrie. Je n’ai pas bien étudié le sujet mais ce qui est frappant c’est la réaction internationale ; tout le monde est choqué mais personne ne sait quoi faire parce que l’opposition n’est pas unie, n’a pas de projet clair et est malheureusement aussi responsable de quelques atrocités. C’est difficile d’avoir un point de vue très clair. Ce qui est frappant, c’est que des régimes autoritaires ne peuvent pas survivre à long terme. Quand ils arrivent vers la fin, ça pose beaucoup de problèmes de violence. En indonésien, il y a un mot qu’on utilise aussi en anglais et en français, c’est : « Amok ». Ca veut dire que si on a oppressé la pensée individuelle, si on ne peut pas s’associer librement, à un moment donné cela explose par la violence. On peut comparer ça avec l’Inde, où il y a toujours des petits drames et des scandales. Là il y a des changements sans cesse, mais il n’y a pas de répression aussi violente qu’en Syrie ou dans les pays arabes. C’est des petits changements progressifs et donc la violence n’est pas éclatante et presque gérable…

Entretien (suite)

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Les camps de GSETu as envie de partager des photos ex-traordinaires? Des anecdotes ou des histoires surréalistes? Simplement de raconter tes expériences en camp ou excursion? Cette nouvelle rubrique est pour toi.

Camp de cartographie géologique(bachelor, juillet 2012)

Texte et photos : Sébastien Ruttimann

Lundi 2 juillet, rendez-vous est donné au parking de l’Amphipôle à 9h histoire de laisser le temps à une étudiante de passer un oral avant de partir (le camp a lieu pendant la dernière semaine de la session d’examens). Départ pour les Plans sur Bex avec les minibus de l’Unil ; le temps se fait de plus en plus menaçant en allant vers l’est, il faut dire que les prévisions ne sont pas très bonnes : on annonce pas mal de pluie et des températures pas très élevées pour la saison. Petit arrêt dans la « riante » bourgade de Bex histoire de faire quelques provisions et acheter les pique-niques pour les trois jours suivants. Il commence déjà à pleuvoir et plus on monte vers les Plans plus il peut fort.

C’est sous des trombes d’eau que nous découvrons notre dortoir, autant dire que la maison aurait très bien pu servir de maison hantée dans un décor de film; balustrades vermoulues et partant en morceaux, balcons pleins de trous, gouttières rongées (cf. photo), humidité relative devant avoisiner en permanence les 80% et bien sûr pas de chauffage.

Après avoir pris possession de notre logement, premier contact avec le terrain à cartographier, où plutôt : exercice pratique d’orientation en terrain inconnu, sous des trombes d’eau et en plein brouillard. La journée s’est donc terminée de manière prématurée au bistrot de Pont de Nant, ce qui n’a pas déplu à grand monde !

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Les camps de GSE (suite)

Le lendemain, après une nuit bercée par le chant de L’Avançon de Nant s’écoulant juste à côté de nos dortoirs, chaque groupe a pris possession d’un terrain de quelques kilomètres carrés à cartographier sur une zone s’étendant du Pont de Nant au Col des Essets en passant par Le Richard et La Vare (front de la nappe de Morcles). Bien entendu tout est à parcourir à pied contrairement aux excursions de géomorphologie (amateurs de promenades en véhicule passez votre chemin ! ) et les terrains les plus éloignés représentent environ 25km efforts rien que pour l’aller-retour. Une fois arrivé sur le terrain il faut bien sûr aller observer chaque affleurement quel que soit son accessibilité, autant dire qu’à la fin de la journée les km se font sentir dans les jambes.

Au fil des jours nos cartes ont pris peu à peu des couleurs et nous avons découvert que le travail de cartographie géologique n’est pas chose aisée et que la différenciation de différents types de calcaires l’est encore moins.

La carte géologique était à rendre l’avant dernier jour du camp, accompagnée d’un bref rapport sous la forme d’une notice explicative de la carte.

Avant de rentrer sur Lausanne, la dernière journée a été consacrée à la montée depuis Solalex presque jusqu’au sommet de la Haute Corde (sommet du miroir d’Argentine) en passant par Anzeinde, et le Col de la Poreyrette. Le but était de commencer par aller voir des grès de Taveyanne, puis de tenter de reconstituer la mise en place des nappes en utilisant les indices géologiques présents (grandes concentrations de fossiles dans certaines couches, types de roche,…).

Si vous aimez la géologie et en particulier si le cours de géologie régionale vous a plu, je ne peux que vous conseiller ce camp. Attention toutefois au fait qu’il vaut mieux aimer marcher et crapahuter dans des endroits un peu improbables...

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Excursions de géomorphologie(bachelor, mai 2012)

Texte et photos : Sébastien Ruttimann

Les camps de GSE (suite)

Les excursions de géomorphologie de fin de deuxième année, c’est six jours de « promenade » en minibus à travers le Jura, le Lavaux et le Valais, six jours de découverte (ou redécouverte) de nos belles contrées en utilisant le fameux « œil géomorphologique ».

La première journée est dédiée à l’exploration du Jura plissé avec un passage au sommet de la Dent de Vaulion et à la Sèche des Amburnex notamment. Le lendemain, après un détour par le Mont Pèlerin et ses « poudingues », les choses deviennent enfin plus sérieuses avec l’arrivée dans les Alpes et la première nuit à Sion. Arriver à 18h à l’auberge et apprendre qu’il n’y a rien pour le souper

est toujours une expérience intéressante surtout pour une horde de GSE affamés (et en plus que les magasins ferment dans 30min, Valais oblige). Fort heureusement nous comptions dans nos rangs de fins maîtres queux qui nous ont mitonnés des mets de chef malgré un équipement de cuisine quelque peu austère. Les soirées furent donc de grands moments au parfum d’ale et faites de rencontres étranges propageant des idées insolites sur les grands maux du monde et notre salut par les aliments lacto-fermentés ! Certains se rappelleront également (ou pas) avoir parcouru des couloirs en chariot à lessive et « mécontenté » le personnel au cœur de la nuit…!

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Les camps de GSE (suite)

Petite marche dans le val Ferret, de Praz de Fort jusqu’à La Fouly afin d’aller voir la moraine de Saleina et les effets de la politique de captages d’eau digne du « Far-West » sur la Dranse de Ferret. La guerre pour l’eau est sans pitié pour l’environnement et les compagnies semblent ignorer qu’un certain Q

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existe…

Visite du glacier d’Aletsch et première « marche » du camp en partant depuis Belalp jusqu’à l’Hotel Belalp puis descente jusqu’à Blatten en suivant la moraine Tardiglaciaire du glacier d’Aletsch. Le téléphérique pour Belalp étant en révision, la montée s’est faite… en minibus. La route se trouvant être (bien sûr) strictement interdite à la circulation, la zone est une réserve naturelle et Belalp un village sans voitures… C’est bien connu, en Valais la signalisation routière n’est là que pour la décoration !

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Les camps de GSE (suite)

Histoire de terminer le camp en beauté, nous avons quitté l’agitation de la ville pour venir (r)éveiller les pâturages de Sembrancher. Un feu, des grillades, la pleine lune et la vue sur Vollèges et le Merdenson, que demander de mieux ?!

A tous ceux qui auront la chance de participer à ce camp nous vous souhaitons d’avoir la même veine que nous avec la météo – déjeuner et souper dehors en mai relève souvent de l’exceptionnel surtout pendant une semaine complète – ainsi que d’avoir le même plaisir à abandonner des cours de théorie et à aller enfin sur le terrain.

Bon camps à tous !

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Explique ta thèse à ta mamie«Mais à quoi ça sert de réfléchir autant sur un truc aussi pointu? Tu feras quoi quand tu seras grand et que tu auras enfin fini d’étudier? Et puis pourquoi tu t’enfermes si longtemps dans ton labo et tu vas te les cailler des semaines entières sur le terrain...?.» La situation n’était plus tenable, il s’agissait enfin de s’expliquer. Ah la vulgarisation, c’est chiant, mais il faut bien s’y coller parfois, si on veut être tranquille et respecté...

Développement de la petite irrigation et transformations de l’économie rurale au Sahel Texte et Photos : Basile Gross (IGD)

Démarche

A priori, un géographe ne s’intéresserait pas au développement rural du Sahel. Ses domaines de prédilection sont plutôt la ville ou la montagne. Bien que l’approche soit avant tout interdisciplinaire, cette thèse mobilise plusieurs apports de la géographie. Premièrement, le renversement du point de vue classique du géographe (étudier le rural plutôt que l’urbain), tout en conservant une perspective spatiale, aide à mieux comprendre les enjeux du développement de pays essentiellement ruraux – au Mali par exemple, les trois quarts de la population habitent en milieu rural et un tiers du PIB provient du secteur primaire. Deuxièmement, l’analyse s’appuie sur les différents niveaux de l’échelle spatiale, du local au global. Enfin, une des thématiques centrales de la thèse est la durabilité. Mais pour une bonne analyse du développement, il est indispensable d’emprunter des outils et des théories à d’autres disciplines : écologie, économie, philosophie, agronomie, sociologie, politique, anthropologie, etc.

Etudes du développement

L’étude du développement est donc transversale et fort complexe. D’autant plus que le concept de développement est difficilement saisissable – on le confond trop souvent avec la croissance économique – et qu’il est l’objet de nombreuses critiques – notamment celles de la décroissance. Sans rejeter l’idée même de développement, le diagnostic diffère de celui qui, usuel mais réducteur, présente l’Afrique

comme un échec. L’évolution des économies africaines n’est pas symptomatique d’une faillite du projet de développement amorcé aux Indépendances. Elle révèle plutôt une volonté de s’émanciper des pays développés dispensateurs de l’aide, un besoin de résister pour préserver une identité propre, et une forte capacité d’adaptation pour accueillir (plutôt que subir) les changements. Ces changements sont par ailleurs perçus par une majorité de la population comme légitimes et indispensables. Autrement dit, il est nécessaire de changer de regard pour appréhender positivement les dynamiques de transformation de l’économie et de la société en Afrique. Celles-ci ne mènent pas automatiquement d’une préhistoire de l’économie (traditionnelle et rurale) à la consommation de masse (moderne et citadine) au moyen de la croissance, de l’industrialisation et de l’urbanisation. Il y a une autre Afrique, ‘informelle’ ou paysanne, reine de la débrouille, et loin d’être malheureuse.

Le Sahel en crise ?

Le Sahel est une vaste bande située au sud du Sahara qui marque la transition entre le désert et la savane tropicale. Du Sénégal à l’ouest jusqu’au Soudan à l’est, en passant par la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad, cette région est surtout connue pour être l’une des plus pauvres du monde et fait essentiellement parler d’elle pour ses problèmes alimentaires (et plus récemment politiques) : en Afrique, les gens ont faim. Cette situation paradoxale mérite toutefois d’être éclairée pour nuancer certaines idées reçues sur la pauvreté

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en Afrique. Tout d’abord, ce sont les producteurs eux-mêmes (paysans et éleveurs) qui sont les principales victimes de la crise alimentaire, et non les consommateurs urbains, même s’il y a aussi des poches d’extrême pauvreté en ville. Mais surtout, la crise n’est pas due à un déficit de production agricole ou à une croissance démographique trop rapide : production et population ont toutes deux à peu près doublé en l’espace de vingt ans au Sahel. On ne peut pas non plus incriminer le seul climat et tout mettre sur le dos de la désertification. Certes, les précipitations sont très variables et relativement rares, et des techniques culturales inadaptées peuvent perturber l’équilibre écologique des terroirs, mais l’avancée irrésistible du Sahara tient plus du mythe que de l’observation scientifique indiscutable. Une partie du problème alimentaire se situe au niveau de la redistribution des surplus entre régions excédentaires et déficitaires, ou de l’acheminement de l’aide alimentaire aux zones reculées. Mais les racines de la crise que traverse le Sahel sont plus profondes. La corruption, les rébellions et autres coups d’état, les trafics en tout genre, les enlèvements et la radicalisation religieuse aggravent d’autant plus la situation. Comment sortir de cette vision pessimiste de l’Afrique ? Quelles transformations touchent le monde rural au Sahel ?

Développement rural et petite irrigation

On observe tout d’abord des changements d’ordre technique : suppression des jachères, introduction de la culture attelée, extension des surfaces, convergence entre agriculture et élevage ; mais aussi des changements d’ordre économique : importance prise par les cultures de rente au détriment des cultures vivrières, rôle accru du marché et de la monnaie, diversification du travail, salariat et vente des terres ; et surtout des changements d’ordre socioculturel : scolarisation, alphabétisation, amélioration des conditions sanitaires, de l’espérance de vie. Un autre point important à mentionner et qui concerne directement cette thèse est le développement de la petite irrigation. La petite irrigation fait référence à des activités agricoles mobilisant de l’eau comme le maraîchage, l’arboriculture ou la riziculture, effectuées à petite échelle et à titre privé. Elle se distingue ainsi des grands aménagements de type barrage menés par les Etats et financés avec l’aide des pays développés. Ces deux sortes d’irrigation se différencient par leurs bilans sociaux, écologiques, mais surtout économiques : contrairement à la petite irrigation qui demande des investissements faibles et très rapidement amortis, donc à la portée des petits producteurs, il est beaucoup moins aisé pour les paysans d’accéder aux parcelles aménagées et les frais d’exploitations sont plus conséquents. La grande irrigation est ainsi surtout intéressante pour qui maîtrise les techniques modernes de production intensive et possède les capitaux nécessaires pour la mise en valeur de ces zones. Ce qui explique pourquoi ces aménagements sont la cible privilégiée des accaparements de terre à grande échelle par des étrangers, phénomène largement relayé par les média.

L’économie rurale entre subsistance et marché

Afin de porter un regard plus positif sur le Sahel, il est nécessaire de mettre des lunettes qui réduisent la myopie de l’économie ‘ordinaire’ pour aborder sous de meilleurs auspices l’économie rurale. Pourquoi est-il important de distinguer ces deux types d’économie ? Parce que les paysans sahéliens ont une représentation du monde et une rationalité économique qui leur sont propres : le profit n’est pas leur principale motivation, le social prime sur l’économique, la solidarité familiale prévaut sur l’individualisme, et le marché n’est pas l’unique modalité d’échange. Le premier souci du paysan est la subsistance, c’est-à-dire la reproduction des conditions nécessaires à l’épanouissement de son groupe social (la famille, le clan, le village) fondée sur l’autonomie alimentaire. Dans un second temps, il s’attache à la production de cultures de rente par la vente desquelles il acquiert des marchandises qu’il ne peut obtenir directement de la nature. Les cultures de rente sont plus risquées parce qu’elles dépendent du marché pour être écoulées : le paysan doit donc être connecté à ce marché (par des infrastructures et des moyens de transport) et obtenir des prix rémunérateurs. Le marché ici évoqué n’est pas le marché autorégulateur globalisé des théories (néo)libérales, mais le marché local, un lieu d’échanges dont le rôle est autant économique que social, et lui-même plus ou moins inséré dans des marchés régionaux, voire mondiaux. La prise de risque est généralement payante et les cultures de rente participent grandement à l’augmentation des revenus et à l’amélioration des conditions de vie des populations rurales, qui peuvent ainsi accéder à des services de base comme la santé, l’éducation ou l’eau potable. Sans une intégration de la question des revenus, le développement mène trop souvent à des situations non pérennes, à des coquilles vides : un centre de santé sans médecin ni médicament, une école en manque d’enseignants et de cahiers, de l’eau potable trop chère pour une majorité et un réseau hydraulique délabré, mais de belles pancartes glorifiant la générosité de tel ou tel donateur.

Agriculture et durabilité

Comment rendre ce développement plus ‘durable’ ? La question de la durabilité se pose avant tout pour l’agriculture : quelles activités productives peuvent générer des revenus sans compromettre la sécurité alimentaire ? Quelles sont leurs conditions d’émergence et comment appuyer leur développement ? Comment s’articulent les sphères de la subsistance et du marché ? Que peut apporter l’agroécologie par rapport à l’approche conventionnelle de l’agriculture utilisant massivement techniques et capitaux ? Ce qui mène à des réflexions plus pratiques : comment conceptualiser un projet de développement rural ? Comment (re)définir des politiques de développement rural ? Autant de questions auxquelles la thèse contribuera à répondre sur la base de séjours au Mali et au Burkina Faso, du suivi de projets de développement dans la région du Sourou et ailleurs, et des recherches de feu l’IGUL au Niger. En conclusion, un proverbe de la sagesse africaine résume fort bien les défis inhérents au développement du Sahel : si le cours d’eau change d’itinéraire, le caïman est bien obligé de le suivre…

Explique ta thèse à ta mamie (suite) Explique ta thèse à ta mamie (suite)

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Caractérisation et modélisation des fractures tectoniques dans les structures sédimentaires plissées et implications sur les instabilités rocheuses

Explique ta thèse à ta mamie (suite)

Texte et Photos : Florian Humair (ISTE)

Grand-maman, cet article dans le journal de l’université t’est destiné. Il a pour objectif de t’expliquer ma thèse de doctorat, ou plus exactement de tenter de te l’expliquer. Ce sujet de discussion, nous l’avons déjà abordé ensemble à quelques reprises, toutefois en dépit du fait que tu soies très intéressée par mes études, peut-être que mes explications ont parfois manqué de clarté jusqu’alors. Par l’intermédiaire de ces quelques lignes, je vais, je l’espère, réussir à rendre mon travail à l’université plus clair à tes yeux.

Afin de comprendre les thèmes abordés dans le cadre de mon sujet, il s’agit de remonter au moment où mes professeurs m’ont proposé de réaliser une thèse. Ces derniers ont alors insisté sur le fait que je devais traiter de problématiques qui me passionnaient et que je devais me concentrer sur certains buts particuliers, la géologie étant une branche d’étude plus que vaste... C’est dans cette optique que j’ai décidé que mon travail porterait sur deux objets auxquels je m’intéresse depuis un certain temps, eux-mêmes intimement liés : 1) la fracturation dans les plis affectant des couches sédimentaires, 2) le développement d’instabilités rocheuses dans ces plis. Si le premier objectif constitue le corps principal de mon travail, le deuxième consiste à appliquer à des cas concrets les résultats du premier afin de comprendre le rôle des plis dans les phénomènes gravitaires.

Pour ce faire, mon travail s’axe principalement sur trois terrains d’études, deux dans le Jura Suisse et un autre au Canada, aux abords des montagnes Rocheuses. Ces trois sites ont été choisis car ils présentent des contextes géologiques comparables tout en étant également distinguables. En effet, il s’agit de « plis sur rampe » qui se forment en glissant sur des niveaux dits de «décollement ». En clair, il s’agit d’un empilement de roches assez peu déformables qui, suite à une

contrainte compressive, se mettent à glisser et à se plisser sur un niveau de roches beaucoup plus tendre et déformable. Ce processus est accompagné et relayé à l’aide de grandes failles qui permettent à des séries de roches de chevaucher des séries plus jeunes. Dans les sites étudiés, les horizons plus compétents se composent principalement de roches carbonatées comme les calcaires ou les dolomies, ainsi que de roches détritiques comme les grès. Les horizons plus déformables sont quant à eux constitués des roches évaporitiques comme la halite (sel) ou le gypse, et de roches marneuses. De manière tout à fait imagée, on peut représenter la formation de ces plis comme une série de feuilles de papier que l’on fait glisser sur un bureau et que l’on retient d’un côté afin de plier cette dernière

Dans ce contexte, sous l’effet des différentes forces qui lui sont appliquées, la série de roche va se déformer et former ainsi des plis dont les caractéristiques dépendent de plusieurs facteurs comme la direction des contraintes, l’ampleur de ces dernières, la nature des roches plissées, la présence ou absence d’hétérogénéités avant le plis (failles, fractures, niveaux d’altération), l’érosion durant le plissement,…

Néanmoins, en réponse au plissement, la série de roches ne va pas se déformer de manière complètement homogène. Si les horizons les moins compétents auront tendance à être intensément déformés voire à former des petits plis secondaires, les horizons les plus résistants auront quant à eux tendance, passé un certain stade de résistance aux contraintes, à se fracturer. Et cela d’autant plus que, autant dans la bordure des Rocheuses canadiennes que dans le Jura Suisse, la température moyenne lors du plissement était relativement froide, favorisant de ce fait un style de déformation cassant (< 100° Jura (Hindle et al., 1999); ~170° Foothills Canadiennes (Cooper, 2007)).

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Explique ta thèse à ta mamie (suite)

L’étude de ces déformations liées à la mise en place des plis constitue justement le premier objectif de mon travail de thèse. Pour ce faire, certaines des différentes questions qui vont permettre de cadrer mon travail peuvent être formulées comme suit :

– quelle est la chronologie des différentes fractures présentes dans la roche ?

– quelle est l’influence des différents types de roches de la série sédimentaire dans la formation des fractures ?

– comment la présence de fractures préexistantes influence la forme des plis et l’apparition d’autres fractures ?

– est-ce que les sites d’études Suisses et Canadiens apportent des résultats similaires ? si non, pourquoi ? ...

Le deuxième objectif de mon travail consiste à comprendre dans quelle mesure les informations sur les structures tectoniques ci-mentionnées nous permettent de mieux appréhender les causes du développement d’instabilités rocheuses dans les plis. L’étude des instabilités rocheuses est une branche d’étude en soi et ces phénomènes gravitaires trouvent leurs causes dans une multitude de facteurs qui sont considérés comme internes (composition de la roche, perméabilité, orientation et pente de la topographie, présence de grandes structures tectoniques, hydrogéologie du massif…) ou externes (conditions météorologiques, sismicité, constructions humaines).

Le but de mon travail n’est pas de faire l’inventaire des rôles et des conséquences de ces multiples facteurs, mais plutôt de mettre en évidence l’impact de la présence de plis et des structures associées (orientation des fractures, zones d’intense fracturation, forme du pli…) comme facteur d’augmentation de la susceptibilité, ainsi que de prédisposition aux instabilités des pentes rocheuses.

Afin de pouvoir essayer d’apporter des réponses à ces questions, je m’appuie sur une démarche utilisant une large variété d’outils complémentaires afin de pouvoir aborder les choses à différentes échelles et sous différents points de vue. Cela implique tant des mesures de terrain à l’aide de la boussole, du marteau, de la loupe…,

des mesures à distance avec des appareils d’acquisition d’ informations sur les structures de la roche (LiDAR, photogrammétrie terrestre), l’observation et quantification des grandes structures à l’échelle kilométrique avec des photos aériennes ou des modèles numériques de terrain, ainsi que la modélisation informatique en 3D des plis avec des logiciels reproduisant le comportement physique des roches.

FIGURES

• Sous le titre p.14 : Exemple d’affleurement montrant les différentes fractures dans la formation de calcaire massif Mississippienne Livingstone (330-346 Ma). Livingstone Range anticlinorium, Alberta, Canada.

• Couverture p.1 et p.3 : Pli sur rampe affectant la formation carbonatée Permienne Kapp Starostin (275-250 Ma) au sud de l’Isfjorden dans l’archipel du Svalbard (Norvège).

• En bas p.14 : Exemple de nuage de point LiDAR montrant la charnière du Livingstone Range anticlinorium, Alberta, Canada.

• En haut p.15 : Exemple de fractures gravitaires (back cracks) dans la formation Livingstone développées par la réactivation de fractures tectoniques mise en place lors du plissement de l’anticlinal de Turtle Mountain. Crête de Turtle Mountain, Alberta, Canada.

REFERENCES

• Cooley M.A. (2007). The structural, thermal, and fluid evolution of the Livingstone Range Anticlinorium, and its regional significance to the southern Alberta Foreland thrust and fold belt. PhD thesis, Queen’s University, Kingston, Ontario, Canada.

• Hindle, D., Burkhard, M. (1999). Strain, displacement and rotation associated with the formation of curvarture in fold belts; the example of the Jura arc. Journal of Structural Geology, 21, 1089-1101.

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Rubrique libre

Grégoire HauserQuel est le prix de l’espace?

Le 6 août

d e r n i e r , l e r o b o t

« Curiosity » de la NASA à 2,5 milliards de

dollars se posait sur la planète rouge, Mars. Et comme à chaque

évènement spatial majeur, la même question revient à travers les médias et les bouches des

contribuables frustrés : est-ce qu’il n’y aurait pas mieux à faire de tout cet argent alors que le Monde est frappé de guerre, famine, misère, chômage, maladies, etc. ?

Avant de faire son jugement personnel sur la question, il advient de s’intéresser aux faits et aux chiffres.

Pourquoi aller dans l’espace ?

On a tous en tête cette image de l’homme marchant sur la Lune, sans doute une des images marquantes du siècle dernier, ce même siècle qui a vu éclore la conquête spatiale. En 2012, cela fait désormais 40 années que le dernier homme a foulé notre satellite naturel, les objectifs actuels de l’espace sont désormais ailleurs. Il faut distinguer actuellement deux grandes activités dans le domaine de l’espace. La première est relative à l’exploration de l’Univers et du système solaire, tandis que la seconde se consacre à l’apport des satellites à la vie quotidienne des terriens et à la surveillance de notre planète. Aujourd’hui, c’est définitivement la deuxième catégorie qui représente la majorité des dépenses avec à l’échelle mondiale près de 70% des investissements dans le domaine spatial (251 milliards de dollars en 2007). Il ne faut pourtant pas oublier que ce sont précisément ces applications spatiales qui nous permettent de communiquer avec le monde entier, prévoir et gérer les catastrophes naturelles, s’informer de la météo, lutter contre les maladies, gérer l’agriculture, observer le réchauffement climatique etc. Aussi, chaque dollar investi dans l’espace n’est donc pas un dollar qui part en fumée, c’est un dollar investi dans un marché, donc dans des milliers d’emplois.

Oui et l’exploration ?

Les applications spatiales servent finalement l’être humain, mais quid des

télescopes qui scrutent les confins de l’Univers, des robots qui roulent sur Mars, et des astronautes

qui flottent dans la Station Spatiale Internationale (ISS) qui a coûté 100 milliards de dollars aux pays participants ?

Les bénéfices d’une telle entreprise existent mais sont plus difficilement observables et estimables.

Tout d’abord. il est dans la nature de l’homme d’explorer et de comprendre le monde dans lequel il vit. Constantin Tsiolkovski, père de l’astronautique moderne, dira cette fameuse phrase : « La Terre est le berceau de l’humanité, mais on ne passe pas sa vie entière dans un berceau. ». Pour illustrer ce désir de découverte de l’être humain, imaginons une plateforme qui serait suspendue à 100 mètres au-dessus de nos têtes et sur laquelle personne n’aurait mis le pied ni vu la surface. Tôt ou tard, l’homme aura envie de savoir ce qu’il y a sur cette plateforme, de quelle matière elle est composée, pourquoi elle est là, jusqu’à développer une envie d’y aller lui-même. L’exploration spatiale n’est qu’une reproduction de ce principe à une échelle beaucoup plus importante.

Chacun est différemment sensible à ce désir de savoir et d’exploration, mais il y en aura toujours quelques-uns qui oseront se donner les moyens d’aller voir et de comprendre.

Cette volonté de découverte ne s’applique pas seulement à l’espace mais à la Science en général. Chaque année, des milliards de francs sont dépensés dans la recherche et la science, l’exploration de l’espace ne représentant qu’une petite branche de la science.

Et cette science a un véritable impact sur l’humanité, pour preuve, je pense qu’aucun humain sur cette planète n’a été mécontent de découvrir un cliché de l’intégralité de notre Terre vue depuis l’espace et critiquera ce dernier. Un tel cliché fait partie de la « culture humaine », et c’est cette même culture qui différencie plus largement l’homme de l’animal. Ceci explique notamment pourquoi il est important que l’Etat continue à financer le programme spatial consacré à l’exploration, car aucune entreprise privée ne peut se permettre d’offrir de la culture e t de la science spatiale.

L’exploration est peut-être importante, mais n’exagérons-nous tout de même pas avec ces milliards dépensés pour elle chaque année, alors que les problèmes sur Terre ne manquent pas ?

Carl Sagan, scientifique et astronome, en réponse à cette question, posa deux questions.

Aurait-il fallu régler tous nos problèmes avant de partir explorer ? Ces

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égulier

Rubrique libre (suite)problèmes seront-ils la raison

de notre départ ? Chaque lecteur est libre de répondre à ces deux

questions, mais il est intéressant de se les poser.

Nous sommes peut-être partis trop vite dans une exploration de l’espace dès les années 1950. Il aurait peut-être fallu attendre que la situation globale de notre Terre soit meilleure et que les espèces, en commençant par l’homme, soient moins menacées des nombreux dangers qui les guettent.

Ou alors, il est peut-être trop tard pour explorer. Nos préoccupations, comme le réchauffement climatique et la pauvreté dans le monde, ont contraint nos politiciens à réduire le budget spatial ces dernières décennies. C’est pourquoi les perspectives d’exploration sont amoindries et de grands projets tels que « l’homme sur Mars » ne voient pas le jour.

L’espace est-il alors vraiment un luxe ?

Il est vrai que l’exploration spatiale a ce côté qui laisse rêveur, impressionnant et intriguant qui la projette souvent à la une des journaux, que cela soit pour de grandes réussites (l’homme sur la Lune, « Curiosity » sur Mars, etc.) mais aussi pour les échecs (explosion des navettes spatiales Challenger et Columbia, échec des nombreuses missions martiennes, etc.). Dès lors, le grand public et les médias n’y voient trop souvent que l’argent gaspillé et résument l’exploration spatiale à envoyer quelques astronautes flotter en apesanteur au-dessus de nos têtes.

Certes l’exploration spatiale est financée par l’Etat (indirectement par le contribuable), mais il est bon de rappeler que l’homme aime bien dépenser dans des domaines qui sont loin d’être utiles comme le loisir et le divertissement. Ainsi, celui qui critique les affaires spatiales oublie les sommes beaucoup plus conséquentes consacrées chaque année à la mode, au sport, dans la publicité, à la culture (cinéma, musique, etc.) au jeu et à la loterie, aux fêtes, mais encore à la guerre, au tabac et à l’alcool pour ne citer que ceux-ci. Ces derniers éléments sont fondamentalement inutiles, mais font aussi partie (malheureusement pour certains) de la « culture humaine ». Panem et circenses.

L a S u i s s e dans tout cela ?

La Suisse ne possède pas d’agence spatiale, mais est un membre fondateur de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) créée en 1975. Le budget annuel de cette dernière est d’environ 4 milliards d’euros, dont environ 156 millions versés annuellement par la Suisse. Avec une population de près de 8 millions, cela fait donc une moyenne de 20 francs par habitant.. A titre comparatif, chaque Suisse verse, chaque année, environ en moyenne 625 francs pour l’armée et a dépensé en 2011 en moyenne 350 francs dans la loterie.

Pour conclure

On remarque dès lors que l’utilité de la recherche spatiale ne peut se définir uniquement sur le critère des dépenses et que bien d’autres dimensions entrent en jeu.

Cependant et quoi qu’on en pense, quitte à investir de l’argent dans l’espace, autant bien l’investir, ce qui n’est pas forcément le cas comme par exemple dans l’ISS et ses objectifs peu clairs ou dans des programmes étudiés durant des années et qui n’ont jamais vu le jour…

• D’après Villain Jacques, 2008, A la Conquête de l’Espace. Paris : Vuibert

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Les caricatures de Karel

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Corentin Neuffer

Du néo-colonialisme à la française à l’ingérence humanitaire

Rubrique libre (suite)

La France est-elle entrée dans une nouvelle phase de colonialisme ?

Au vu des évènements géopolitiques récents, on pourrait légitimement se poser la question. En septembre dernier, le président de la République française François Hollande s’adressait pour la première fois à la tribune de l’ONU. Son discours paraissait induire certains éléments quelque peu incohérents, pour ne pas dire opposés à ce qui était réellement dit. En voulant faire dans le politiquement bien « onusard », Hollande cite trois problèmes majeurs actuels : les guerres, la crise économique mondiale et, attention les vélos, il nous prévient du dérèglement climatique qui met en péril la survie de notre planète… On sentait une volonté de bien faire de la part de Paul Jean-Ortiz (nègre de Hollande) dans la rédaction du discours. Mais, à trop vouloir bien faire, le Président français s’en est emmêlé les pinceaux d’une manière relativement magistrale (le lapsus entre environnement et développement, survenu TROIS fois de suite !!), tentant de tout sortir de son chapeau magique.

Passant de la volonté de dépénalisation universelle de l’homosexualité aux problèmes d’ingérence gouvernementale via la crise environnementale, le bon élève Hollande a également invoqué l’urgence concernant la Syrie. Certes on pourrait légitimement se demander si un président tel que Hollande aurait le bagout et le courage de s’attaquer à un vrai problème, par exemple la guerre entre les différents cartels de la drogue qui a causé 100’000 morts en cinq ans au Mexique.

Mais non, la France préfère faire la guerre, l’invoque au nom de…, et, comble de tout si l’on se réfère au discours de Hollande, il ne la considère pas comme Violence si elle est pratiquée par un Etat.

Alors après avoir renversé le seul pays d’Afrique qui n’était pas endetté – la Lybie –, la France va gentiment s’attaquer au cas syrien puis au cas iranien suivant les ordres du maître américain.

Pour se dire que cela ne sera pas imminent, les politiques se cachent derrière la dette nationale pour penser que plus personne n’a les moyens de faire la guerre. Certes la France a bien perdu son triple A en janvier dernier, mais était-ce dû à l’invasion de la Lybie en juin ?

Les Etats-Unis sont le pays le plus endetté du monde, de plus avec une économie uniquement basée sur les services (ils ne produisent quasi plus rien de matériel, de concret) ; ils sont actuellement sur plusieurs fronts. Obama fait croire qu’il retire ses troupes d’Afghanistan – pour mieux les replacer dans toute la région – et s’apprête, qu’on veuille le croire ou non, à envahir la Syrie et l’Iran car il ne les contrôle pas.

À ceux qui applaudissent la réélection d’Obama et qui n’ont pas encore pris conscience de la tartufferie que représentent les élections

américaines, qu’ils se demandent si Obama a arrêté les conflits lancés par Bush Jr. Autre preuve en est la nomination par Obama d’officiers extrêmement frauduleux de l’administration Bush Jr. à des postes tels que Secrétaire à la Défense (Robert Gates, ancien agent de la CIA et lobbyiste de l’armement) et sous-secrétaire à la Défense (William Lynn, lobbyiste pour Raytheon, il aurait égaré 3400 milliards au budget de l’armement sous Bush Jr. …).

Condamnant l’ingérence humanitaire dans son discours, Hollande veut une France qui pourra jouer au petit gendarme mondial (interdire l’ingérence par l’ingérence ou le monopole de la violence), tout en continuant bien sûr à servir les intérêts d’Israël et des Etats-Unis. Evidemment l’idée de faire quelques billets ne lui a pas échappé, je cite: ″nous continuerons à nous battre pour la protection des civils, à savoir que les états ont tous la responsabilité d’assurer la sécurité de leur civils. Et si un état vient à manquer à cette obligation, c’est à nous, à l’ONU, d’engager les moyens de l’assumer à sa place. N’enterrons pas cette promesse car cela peut nous être utile″ .

Alors, utile pour quoi faire? Pour invoquer la guerre sur des prétextes qui nous arrangent, pour exploiter et piller les pays soumis et ceci dans le but d’installer un nouvel ordre mondial tellement souhaité par les élites internationales.

Avant que la France n’arme des hordes de mercenaires dans le but de générer des (faux) soulèvements populaires en Lybie et ailleurs au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, il fallait éventuellement se demander qu’allaient-ils faire avec toutes ces armes une fois leur mission terminée. L’éventualité que ces mercenaires aillent occuper un bout de pays, en l’occurrence le Nord du Mali, ne leur était évidemment pas venue à l’idée.

L’instabilité en Afrique fait bien le beurre d’une Europe récemment lauréate du prix Nobel de la Paix.

En effet, à force d’avoir déplacé ses conflits armés (quoiqu’en ex-Yougoslavie, l’implication de pays tels que l’Allemagne et l’Autriche serait à revoir…), l’Europe s’est maintenue en paix.

La France a entamé une partie dans laquelle elle a tout à perdre. Elle est dorénavant cachée sous de nouvelles aspirations faussement plus acceptables telles que, le fameux ″la guerre sans l’aimer″ de BHL – évoqué par rapport à l’intervention française en Lybie Elle se place dorénavant parmi la liste des belligérants et néo-gestionnaires de l’Afrique et du Moyen-Orient et n’est pas prête de quitter cette position.

Pour une information non mainstream, voir entre autres :

- www.voltairenet.org

- www.alterinfo.net

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Etudier loin d’ici...Des étudiants de la faculté en échange nous racontent leurs lointaines aventures

Texte et Photos : Manon Stalder

Norway Anyway!L e n o r d , le froid, la nature sauvage, la pénombre… je me suis demandée longuement pourquoi j’avais choisi ce pays sur ma liste d’échange erasmus, anyway, je devais y aller. Sans doute parce qu’en hiver, il n’y a parfois que quatre heures de jour, le semestre à Trondheim commence au début du mois d’août, ce qui signifiait, pas trop de vacances et de temps pour un stage. Anyway, j’ai pris un billet easyjet pour Edimbourg, une ville que je rêvais de visiter depuis des années. Après cette petite escale « forcée » en raison du manque de lignes directes depuis la Suisse vers le grand Nord alias Trondheim ! Je suis arrivée dans la capitale d’Ecosse au moment propice, où se déroulaient le « Grand Tattoo » et le « Fringe Festival » qui animaient les rues entourant le célèbre château médiéval perché sur les hauteurs de la cité. Le « Grand Tattoo », les écossais en sont très fiers; des militaires affluent de tout le pays revêtus du kilt traditionnel, cornemuse à la main, et s’en donnent à cœur joie dans la cour du château où des feux d’artifices enjolivent la fête. Les billets doivent être réservés des mois à l’avance tant cette attraction a du succès. Quant au « Fringe Festival », c’est totalement dingue, le programme est un épais volume rassemblant plus d’une centaine de concerts et spectacles qui se déroulent durant presque un mois. Mais le plus mémorable est la publicité faite pour les représentations; les acteurs ou les étudiants chargés de la promo, se baladent déguisés dans les rues et réalisent de petits shows de mise en bouche… plutôt déjantés, allant du type couché par terre couvert de cartes à celui qui marche sur des échasses en faisant des tours de magie.

Mes péripéties écossaises ne se sont pas arrêtées là, sac au dos, je suis partie en expédition dans le parc régional des Pentland Hills, doté de collines arrondies aux alentours de la ville. Le camping sauvage y est permis, cependant, j’ai réussi à planter ma tente dans un champ de moutons ! Le soir j’ai admiré un magnifique coucher de soleil, ce que je n’avais pas calculé, ce fut la sortie de la tente au petit matin : une brume épaisse et humide ! J’ai laissé tomber le trekking prévu. Sur le chemin du retour, j’ai eu la surprise de voir sortir du brouillard de drôles de bonshommes : ils sont vêtus de petites cuissettes, ils ont parfois une lampe frontale fixé sur le crâne, des bonnets ridicules et ils courent, pleins de courage et de hargne dans les collines, anyway !

Toujours dans la trame de l’originalité, il y avait dans le parc des pistes de ski qui fonctionnent sans neige, juste une sorte de tapis brosse sur lequel glisser et des remontées mécaniques.

Le cœur serré, ç’en était fini de la folie écossaise, j’ai pris l’avion direction Bergen, premiers pas en Norvège ! Depuis l’avion, on peut

vo ir la côte dentelée et des fjords se dessiner. Cette ville est la deuxième du pays, très touristique, j’y ai côtoyé les cars de japonais. Il y a un coin qui remonte le moral quand on a dormi dans l’aéroport et qu’on débarque dans la cité à sept heures du matin alors qu’il fait que quelques degrés et que l’humidité transperce les membres, c’est un petit quartier de maisons de pêcheurs multicolores qui domine le fjord. On était tout un groupe, chargé de multiples bagages, à camper devant l’office de tourisme en attendant son ouverture prévue sur les coups de dix heures. Après la promenade en bateau sur les fjords, la vue en haut du funiculaire et le marché aux poissons, nouveau départ… mais toujours pas Trondheim : Oslo,… la ville de trop. Ce n’est pas une ville de très grand intérêt, à part pour les passionnés de musées, j’ai du en faire une dizaine ! Bon, il y en avait un particulièrement intéressant sur le fameux explorateur norvégien à l’origine du Kon-tiki. Thor Heyerdahl avait décidé, il y a environ soixante ans, de se rendre en Polynésie dans une embarcation de fortune construite en une sorte de papyrus ! Peut-être en avez-vous entendu parler car le film de l’expédition, qui a du reste réussi, était à l’affiche il y a peu de temps.

L’argent commençant à se faire rare, dernière étape et pas des moindres : Trondheim ! A la journée d’orientation, les orateurs nous ont tout de suite mis au parfum en affichant la carte de la Norvège avec une grande flèche plaçant la ville comme étant le sommet du monde! Il faut dire que les cours ne valent pas trois crédits comme chez nous, mais le stupide chiffre de sept et demi ! Ça sent les gaufres dans les couloirs et il y toujours une animation quelque part: bizutages, concerts, course de ski sur roulettes,…

Anyway, Trondheim est une ville étalée, le mot « spread » semble plus adapté, tant il s’étend dans sa prononciation. Mais si c’était seulement cela le problème, non, il y a plein de collines et de rues sans issues. Après plus d’un mois dans la ville, beaucoup de marche et de vélo (moyen

 

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de transport le plus adapté), je me surprends encore à sortir le plan. J’ai bien essayé le bus, mais ils partent à l’avance ou n’arrivent jamais, et si tu ne fais pas dix milles signes au contrôleur, il passe tout droit, sans même daigner un regard.

Cependant, je vois la mer de ma fenêtre, il me faut vingt-cinq minutes en vélo pour rejoindre la plage. Je loge dans un ancien hôpital désaffecté, on fait parfois des courses en fauteuil roulant dans les couloirs. Dans ma chambre, il y a bouton pour appeler les infirmières et une table pour manger au lit ! L’immeuble est entièrement dédié aux étudiants européens, il y des gens de partout… mais apparemment je suis la seule suisse. Les fêtes étudiantes s’enchaînent mais l’alcool taxé ne coule pas à flot, pas anyway !

Tous les week-ends, on part en « cabin trip » armé de boussoles et de cartes, on va se perdre au milieu de la nature sauvage dans de petites cabanes sans eau ni électricité. En général, cela se passe plutôt bien, on peut boire l’eau des sources rencontrées en chemin et se nourrir des souvenirs des anciens visiteurs consignés dans des livres de bord. Alors que parfois, on peut se perdre et marcher plus de six heures sans trouver la cabane ! Dans ces cas là, pas de panique à cette époque de l’année, ce sera plus critique en hiver ! L’astuce c’est de grignoter du fromage orange norvégien au lait de chèvre qui a un goût de caramel et de profiter de la « moelleur » des lichens.

En résumé, la Norvège est un pays pas si mal, on ne s’y ennuie pas, et le froid est un défi au quotidien. Maintenant, je n’ai qu’une hâte : pouvoir admirer les aurores boréales, au petit matin à la sortie des boîtes de nuit, il paraît qu’on peut voir ces traces vertes dans le ciel d’hiver!

Etudier loin d’ici... (suite)

 

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Texte et Photo : Adrian Timofte

Lettre à Lausanne

Etudier loin d’ici... (suite)Déjà trois mois que je suis dans l’Iowa, trois mois loin de ma chère et tendre Lausanne. Tu me manques, tes rues en pente, ton lac romantique, tes métros si pratiques, tes journées calmes et tes nuits endiablées. Ô combien il m’est difficile de penser à toi, alors que me voilà au milieu des champs de maïs transgéniques du Midwest ! Si tu savais combien ta cathédrale et son guet hantent mes nuits sans sommeil. Il me tarde de te revoir, de déambuler dans tes rues courbes et escarpées. Ici tout est plat et droit, les bâtiments ne se touchent pas et ce n’est pas l’espace qui manque. Je n’oublie pas ton charme si particulier, comme on n’en trouve nulle part ailleurs.

Je dois pourtant t’avouer que j’ai rencontré une autre ville, la ville d’Ames, dans l’Iowa, une petite ville qui héberge l’Iowa State University, malgré tout accueillante, aux gens souriants, décomplexés et studieux. Ici, le système universitaire est totalement différent de ton Unil, les devoirs (concept dont j’avais oublié la signification depuis mon gymnase) font partie du quotidien, les tests sont fréquents et il n’y a pas de véritable session d’examens de fin de semestre. Le travail est ainsi constant, mais au moins je serai tranquille en janvier, quand tout le monde sera en train de trimer à la Banane ou au Rolex.

Les professeurs ont une vision particulière de l’enseignement, plus pédagogue et plus participative. Les cours consistent souvent en des discussions entre et avec les élèves, plutôt qu’un simple monologue unilatéral. Cela a ses avantages, l’apprentissage est ainsi plus facile, mais cela ralentit fortement le déroulement du cours et il m’arrive de sortir d’un cours en me demandant si je venais réellement d’apprendre quelque chose de la part du professeur. De même, les projets de groupe, plutôt marginaux à l’Unil, font partie intégrante de l’apprentissage à l’américaine, pour préparer les étudiants à la vie active, paraît-il.

Préparer les gens à la vie active, justement, voilà le but non caché des universités américaines, alors qu’à Lausanne on essaie d’éviter de rendre les études trop « commerciales ». Cette vision commerciale ne se borne pas à l’université, on la retrouve partout dans les mentalités et on la nomme parfois « American dream », où tout le monde a l’opportunité de devenir riche et/ou célèbre s’il le veut et s’il travaille dur pour y arriver. Ma vision d’environnementaliste gauchiste passe souvent pour une plaisanterie ou une utopie dans un pays ultra-dépendant de la voiture et ai-je besoin de te dire qu’on me regarde comme un extraterrestre lorsque je mentionne le fait que je n’ai jamais conduit de voiture de ma vie !

Tout cela fait bien sûr partie du charme local et, comme je te l’ai dit

précédemment, les gens sont très ouverts et il est très courant que quelqu’un que je n’ai jamais rencontré auparavant me raconte sa vie alors que j’attends le bus. C’est ainsi qu’on fait toutes sortes de rencontres ! Des rencontres, on en fait aussi dans les bars, presque tous situés sur la même rue, déserte en semaine et bondée au point de ne plus pouvoir avancer les soirs du weekend !

Les bars ne sont pas la seule attraction de la ville, il y a aussi le football (américain bien entendu) ! Quelques heures avant les matchs, les gens se massent par milliers autour du stade pour griller des steaks, des burgers et des hotdogs, et boire des bières sans goût. Tout le monde sans exception arbore les couleurs de l’Université, le rouge et le jaune, et pour chaque match, le stade, pouvant contenir plus de 50’000 spectateurs, est plein à craquer ! De quoi faire rêver ceux qui désespèrent de remplir ton stade de la Pontaise, n’est-ce pas, ma chère Lausanne ? En cette période électorale qui vient de se terminer, l’Iowa State University a aussi été un des champs de bataille de cette guerre politique américaine. J’ai eu la chance de pouvoir assister à un discours de Barack Obama dès ma deuxième semaine sur le campus et à un concert de soutien gratuit de Bruce Springsteen.

Voilà, je crois que je t’ai tout dit, ma douce Lausanne, il me tarde de te revoir, même si cela va être dur de quitter les Etats-Unis, pays de tous les superlatifs ! À bientôt !

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Des géo’s en balade

Texte et Photos : Corentin Neuffer & Stephan UtzLes trois sommets

Si vous êtes du coin, vous vous êtes certainement déjà rendu au Lac Tanay avec Papa et Maman une fois dans votre petite enfance pour aller nourrir les canards (quasi domestiqués) et manger une raclette. Mais aviez-vous remarqué les jolis reliefs derrière le vallon ? Le Chablais regorge de beaux paysages, également en France. Pour les plus lausannois d’entre-nous, vous avez sûrement observé (ou alors vous ne faites même plus attention) les magnifiques sommets qui surplombent le Léman, dominés par la Dent d’Oche (2222 m.). Après nous avoir travaillé pendant plus de vingt ans, notre curiosité a eu raison de nous ; il fallait bien aller visiter la région une fois.

Pour se rendre à Tanay, le combo train-car postal fonctionne à merveille. Rendez vous à Vouvry (VS) afin de prendre le car postal qui vous mènera à Miex (arrêt Miex – Flon). Comptez environ 45 minutes pour rejoindre Tanay depuis Miex. Moyennant la modique somme de 10.- CHF (!!) par personne, Dédé ou un de ses comparses se fera un plaisir de mener les plus feignasses d’entre vous jusqu’à Tanay grâce à son Cherokee© frauduleux. Il est évidemment possible de monter en 4x4 jusqu’à Tanay (pas forcément légal, à part si vous avez une plaque valaisanne), mais il est conseillé de parquer en bas à Miex.

Là, plusieurs possibilités s’offrent à vous : la première, s’arrêter et passer la journée au bord du lac, pêcher, se faire racketter du pain par les canards, boire des binchs et se baigner. La deuxième est de partir en direction de la France pour une randonnée conséquente de deux jours. Pas de panique, vous aurez la possibilité de profiter du lac sur votre retour (si vous avez encore le temps pour prendre le car postal…), mais gardons le plaisir pour la fin.

Votre premier point de passage se situera dans la Montagne de Loz, après plus d’une heure de marche depuis Tanay ; il vous faudra ensuite suivre la crête qui relie la Dent de Vélan au Col de Bise.

En rejoignant le Lac de la Case, vous aurez sûrement la chance de rencontrer un nombre incalculable de bouquetins dans la région du Col de Pavis. Le secteur entre le Col du Pavis et la Fenêtre d’Oche se prête parfaitement à une pause pic-nic.

Si l’envie et la météo sont de la partie, depuis le Lac de la Case, vous pouvez opter pour la variante du sommet de la Dent d’Oche en longeant la crête, moyennant quelques passages vertigineux rappelant quelque peu une Via Ferrata. Autrement, descendez jusqu’à l’alpage des Chalets d’Oche où vous pourrez déguster un onctueux verre de lait à la menthe avant d’attaquer l’ascension de la Dent d’Oche. Attention, pensez à remplir vos gourdes, les points d’eau se feront très rares par la suite !

Une fois le sommet atteint, vous devrez redescendre jusqu’au pseudo col en deçà pour rejoindre le versant nord de la Dent. Pour les frileux ou les personnes sans équipement adéquat, le refuge d’Oche vous accueillera durant la haute saison pour des tarifs très corrects. Sinon, il vous faudra bientôt penser à trouver un emplacement pour la nuit.

Nous avons décidé de planter notre tente en contrebas du Col de Trepertuis, face au Léman, à l’arrière des Mémises de Thollon.

Après une bonne nuit de repos, vous serez frais pour rejoindre la Morge, après laquelle vous remonterez jusqu’au Lac de Lovenex. Si vous êtes déjà foutu ou si vous n’avez pas le courage d’attaquer le plat de résistance du tour, vous pouvez ici vous orienter en direction de la Montagne de Loz et rejoindre ensuite Tanay. Si par contre vous suivez l’itinéraire, soyez conscients de la difficulté de la suite du chemin (signalée d’ailleurs par les panneaux). Si une fois le Col des Crosses atteint il vous reste encore des forces, vous pouvez toujours monter au Grammont (env. 1h30 aller-retour depuis le col).

Vous pouvez ensuite vous réjouir de la descente qui vous mènera à Tanay où s’imposera un moment de détente avant de rejoindre Miex et la plaine.

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Des géo’s en balade (suite)

Variante 2

Pour bien porter son nom des Trois Sommets, outre le fait qu’il fallait trouver un titre cool (et nous motiver d’y aller), vous avez la possibilité d’envoyer vraiment du lourd grâce à l’ascension d’un autre sommet, les Cornettes de Bise. Pour cela, une fois arrivés à Miex, ne montez pas à Tanay mais remontez le Fossau jusqu’au Col de Verne. Avis aux équilibristes, l’ascension des Cornettes vous procurera d’agréables sensations. Toutefois, cette variante nécessite sûrement un bivouac supplémentaire.

Matériel

Bonnes chaussures de montagne, matériel de bivouac (tente, habits pour la nuit, réchaud) et nourriture. Des bâtons pourraient être utiles vu la déclivité de certains passages. Pour s’orienter, les cartes Lausanne, Chablais, Rochers de Naye et St-Maurice au 50’000 peuvent vous être utiles. Sinon, la nôtre est mieux !

Les conseils du Bouquetin

Pensez à prendre de l’eau en suffisance. Le dernier point d’eau facilement accessible sur France reste les Chalets d’Oche. Si vous êtes équipé d’un réchaud, il vous sera possible de cuire de l’eau en route.

Ne pas s’énerver à cause des chemins mal marqués en France.

Et ne pas boire de lait à la menthe…

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Le portfolio de l’automneSébastien Ruttimann