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J'aime mon metier

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Une série de portraits de personnes des Ormonts qui vous expliquent pourquoi elles aiment leur métier. Destiné aux jeunes gens qui doivent trouver une profession, tâche souvent ardue !

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Aigue-Noire, les Diablerets © Jean Lugrin

PREFACEEn 2010, j’avais exposé, au Musée des Ormonts à Vers-l’Eglise, vingt-sept portraits de personnes de la région qui m’expliquaient pourquoi elles aimaient leur métier.

Déjà six ans, et je n’avais pas encore abouti à la réalisation du petit livre regroupant ces portraits. Rassurez-vous, j’ai fait bien d’autres choses, mais un petit clignotant dans mon cerveau me rappelait à l’ordre. Editer un livre coûte cher, j’aurais voulu le faire financer par les deux communes des Ormonts, afin qu’elles puissent l’offrir aux jeunes gens à la recherche d’une voie professionnelle. Les Communes ont d’autres soucis financiers que de se transformer en éditeurs. Ma femme vient de me dire que les jeunes ne sont pas forcément intéressés par un livre de papier. Mais oui, elle a parfaitement raison, je vais le diffuser par les réseaux sociaux et que chacun puisse le télécharger en PDF.

Le temps a si vite passé, que certains de mes interlocuteurs sont partis sous d’autres Cieux. Ils nous manquent. D’autres ont changé leur trajectoire, se sont mariés, ont eu des enfants, ou d’autres enfants, se sont séparés, mais ce n’est pas l’essentiel de ce livre. Il est là, juste pour rappeler l’importance du choix de sa profession.

INTRODUCTIONDieu, qu’il est difficile et compliqué de choisir un métier aujourd’hui !

Il y a encore quelques décennies, ton père était garagiste, tu seras garagiste. Tu voulais faire de la musique, tiens il manque une trompette à la fanfare... Même si tu voulais faire du violon !

Au vingt-et-unième siècle, tu peux choisir entre mille métiers, tu peux en inventer, mais rarement tu demeures toute ta vie dans le même bureau, dans le même atelier.

Le choix puisqu’il est énorme est d’autant plus ardu, raison pour laquelle, il est indispensable de se poser quelques questions vitales sur ce que l’on veut faire de sa vie, comment construire son bonheur.

Presque nonante mille heures d’une vie, consacrées à travailler méritent de se passer au bon endroit, source de joies, source de bonheur. Le contraire restant valable, il est indispensable de tomber juste.

Comme pour l’établi : une place pour chaque outil, chaque outil à sa place, la bonne place de travail pour la bonne personne, et c’est déjà un gage de réussite !

Je vous souhaite bonne chance dans votre réflexion et surtout d’être heureux dans ce que vous faites, vous le ferez encore mieux !

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Ami Nicollier, serrurier (1921-2012)

Il est né le 1er mai 1921 à neuf heures aux Aviolats.

Après un apprentissage de serrurier à Lausanne, il a pu acheter l'immeuble du Rosex, qui heureusement se situait à côté d'un cours d'eau, matière première indispensable à l'une de ses créations : La centrale électrique au fil de l'eau. Après en avoir réalisé trois aux Mosses, il en a construit une soixantaine dans le monde entier.

Chez lui, «son» cours d'eau lui procure l'électricité depuis longtemps. Il a bien de la chance d'être indépendant, aussi de ce côté-là.

Sa formation et surtout son esprit de chercheur permanent lui ont permis d'ignorer la routine. Mécanique auto, serrureries de toutes sortes, chauffages, béliers, et bien sûr, centrales au fil de l'eau.

Ses yeux pleins de malice prouvent une curiosité sans cesse en éveil. C'est là qu'on voit, que l'âge n'a rien à faire lorsqu'on a de l'intérêt et de la passion pour ce que l'on fait.

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Christian et Bente Reber, agents immobiliers

Christian, ne voulais-tu pas venir avec ta femme pour me dire pourquoi tu aimes ton métier ?

Si si, malheureusement elle a été retenue par des clients, mais je le regrette car c'est à elle que je dois d'avoir ouvert cette agence immobilière.

J'ai une formation de cuisinier, j'ai tenu le Restaurant des Sports. Les événements se sont enchaînés, je me suis occupé durant plusieurs années de La Pote. Ce travail de bar-dancing exigeait de travailler principalement la nuit. Des clients me confiaient les clés de leur logement en leur absence, puis ils ont demandé de nous occuper de la location. C'est ma femme qui l'a fait, nos jumeaux ayant moins besoin d'elle. Nous avons débuté dans un local de 14 m2, dans lequel nous travaillions les deux. Avec le temps, ces mêmes clients nous ont confié la revente de leur propriété. Au début, complètement ignorant, nous avons pu bénéficier des conseils d'une agence à Mon-tana, et nous nous sommes «formés sur le tas». Si parfois, je peux être incopris par mon côté franc et direct, il a aussi l'avantage de témoigner de mon caractère honnête. J'ai une éthique et je m'y tiens. Et puis, la concurrence est un moteur formidable pour s'améliorer.

Et pourquoi aimes-tu ton métier ?

D'abord, peut-être à cause de la découverte. Je n'y connaissais rien, j'ai du tout apprendre, c'est fascinant, stimulant et très excitant. Aussi, de pouvoir travailler avec sa femme, c'est une occasion d'être encore d'avantage ensemble. En plus, pour mon caractère d'indépendant, de pouvoir organiser mon travail en essayant d'être toujours meilleur, est un bon moteur de vie. Les clients des locations qui reviennent chaque année, que l'on connait mieux, qui nous parlent de l'évolution de leur famille deviennent parfois des amis.

Que pourrais-tu conseiller à un jeune en recherche d'une profession ?

D'être curieux pour son propre avenir, de choisir une voie, et lorsque on en est cer-tain, de s'y tenir. Il faut de la persévérance pour arriver à ce que l'on veut vraiment.

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Christine Colruyt, physiothérapeute

Née en Belgique, Christine, déjà toute petite, désirait soigner les gens, puis le métier de physio s'est révélé à elle. A 18 ans, elle a étudié à la Haute Ecole de Louvain, tout de suite une série de stages ont complété la partie théorique durant trois ans. De plus, l'école exigeait des performances sportives, de façon à supporter la charge physique.

Un premier poste chez un physiothérapeute à Saint-Gall, un deuxième à Zurich, et après un petit retour en Belgique, la Suisse lui manquait. Ayant trouvé un vieux chalet à louer à La Comballaz, la propriétaire lui indiqua la place des Diablerets qui se libérait. C'est elle, qui ayant succédé à Willy Oguey, s'est occupée avec compétence de mon dos. Malheureusement, les miracles se font ailleurs, néanmoins, grâce à ses prestations, mes douleurs dorsales et ma tête ont pu prendre quelques vacances.

Indépendante, elle est heureuse de pouvoir combiner vie professionnelle avec vie de famille.

- J'aime la découverte des diverses personnalités que je doit traiter, et le plaisir de voir le patient qui rayonne en sortant du cabinet. Ce que je recherche, c'est une re-mise en question permanente, afin d'aider au mieux la personne que je traite.

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Dirk et Mady Krauter, restaurateurs

C'est un métier que j'ai choisi. Je le fais d'abord avec l'intérieur, avec amour, avec mon coeur, et je l'exerce depuis 30 ans.

Comment avez-vous su que c'était le métier à choisir ? Comment est-ce venu ?

Lorsque nous étions petits, ma mère avait décidé d'aider mon père qui était meunier et fabriquait des huiles végétales. Donc, la moitié de la semaine, elle battait la campagne pour les vendre. Alors, lorsque nous rentrions de l'école, il fallait bien préparer quelque chose si nous voulions manger ! Au début, nous réchauffions ce qu'elle nous avait préparé, puis après, nous nous sommes débrouillés. Je pense que cela a commencé comme ça, naturellement. Aussi, lorsque j'accompagnais mon père qui visitait les restaurants pour vendre ses huiles, j'étais toujours impressionné par ces cuisines qui avaient encore de grandes brigades.

Et vous Mady, mon ancienne coiffeuse, la restauration n'est pas une vocation, mais une «obligation» !

Effectivement, au départ, ce fut par obligation, et au début c'était dur. Même si j'avais l'habitude de la clientèle, chez le coiffeur ou au café, elle n'a pas la même attitude. Au début, d'ailleurs, je faisais beaucoup de choses, mais au service, on ne me voyait pas. J'avais peur de mal faire, mais j'ai dû m'y mettre pour remplacer un collabora-teur qui nous quittait. Et maintenant, je crois que je n'aurais plus envie de couper les cheveux !

Et Dirk, d'ajouter :

Je lui tire mon chapeau et plusieurs fois plutôt qu'une, comme elle s'y est mise, et elle le fait vraiment bien !

Mais vous, Dirk, votre accent n'est pas typiquement des Ormonts ?

Je viens de la région de Stuttgart, où l'on disait que dans ce métier, si l'on veut per-cer, il faut séjourner en Suisse. J'ai atterri aux Diablerets. On y fait une saison, ou on y reste !

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Eric Fontana, employé de banque

Pourquoi travailles-tu dans une banque et qu’est-ce qui t’y a amené ?

C'est un peu une tradition familiale, ma mère, deux oncles, je voulais aussi, petit, travailler dans une banque. D'autre part, j'avais la possibilité de faire mon apprentissage en restant aux Diablerets, ce qui, pour moi, était primordial. Je suis très attaché à ma région. Mon CFC en poche, j'ai rempli mes obligations militaires, puis j'ai travaillé trois ans à la succursale de Villeneuve, tout en continuant d'habiter ici. Une place s'étant libérée aux Diablerets, j'ai sauté sur l'occasion. Depuis 2001, je suis de nouveau ici et qu'est-ce qu'on y est bien !

J'ai un immense plaisir à travailler au guichet, je connais toute la clientèle. En travaillant où j'habite, je peux voir ma femme et ma fille très souvent. Là, est ma vraie ambition, conjuguer famille et travail. Je pense à une connaissance qui gagne très bien sa vie dans une banque, mais il ne peut en profiter ; il rentre à dix heures le soir et repart à six heures le matin. Il ne voit ses enfants que le dimanche, très peu pour moi !

Mon métier est passionnant car très varié. Comme caissier, il faut être le généraliste de la Banque, il faut tout connaître pour pouvoir répondre à la clientèle, la garder et la transmettre aux spécialistes selon leurs demandes. Je suis aussi responsable de la formation des apprentis, et j'adore transmettre ce que je sais aux jeunes qui débutent. Dans la Banque aussi, les métiers sont en continuelle évolution, cela permet de rester en éveil !

Son plaisir de faire ce métier doit être communicatif, car Eric a même des clients de la plaine qui viennent faire leurs opérations en passant par Les Diablerets en se rendant dans le Saanenland.

Les clients aiment les employés qui aiment leur métier !

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Klaus, Bernard et Stéphane Wartner, hôteliersJ'aurais pu encore ajouter Anne, la femme de Klaus et Alexandra, la femme de Stéphane, car ils travaillent tous ensemble.Klaus, troisième génération d'hôteliers et Bernard et Stéphane, quatrième génération, on devrait pouvoir trouver des gènes d'hôteliers dans leur ADN !

Klaus :

J'aime ce métier, car on a tellement de contact avec les gens, c'est très humain, même si c'est dur, le contact fait plaisir, il n'y a pas un jour qui est le même, c'est tellement varié.

Lorsque tu es jeune, tu n'as jamais peur de ne pas trouver du travail et en plus avec ce métier, la porte est ouverte aux voyages.

Bernard :

Je suis reconnaissant envers mon père qui m'a tout montré à l'hôtel. Je suis le maître d'hôtel, je suis le responsable du restaurant.

Pour moi, c'est comme un théâtre, ce que j'aime, c'est jouer comme au théâtre dans une mise en scène de restaurant, j'adore ça.

Stéphane :

Sans y avoir été contraint, c'est le plaisir de pouvoir travailler en famille. Avant, j'ai eu la possibilité de travailler à l'étranger, de faire d'autres expériences, comme en Thaïlande, en Autriche, en Angleterre et en Suisse, au Baur au Lac de Zurich, entre autres. Et, en plus, c'est grâce à l'hôtellerie que j'ai rencontré ma femme !

Je n'insisterai pas sur la formation, mais que conseillerez-vous à un jeune pour faire ce métier ?

Proposition familiale :

Avoir une bonne base scolaire, la culture générale la plus importante possible, pouvoir parler de tout sans être un spécialiste, s'intéresser à tous les sujets et être polyglotte.

Dans notre métier, tu es tout, tu es médecin, psychologue, psychiatre, tu dois détendre l'atmosphère même si ta clientèle est stressée, malheureuse, pleine de problèmes, il faut qu'elle revienne !

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Gérard et Yoann Huck, menuisiers

D'abord le père :Gérard, pourquoi ce métier ?

J'avais six ans, lorsque je passais avec ma maman devant le dépôt d'un vendeur de matériaux de construction, j'adorais une odeur, c'était celle du bois ! Depuis cet âge, j'ai toujours voulu travailler avec cette odeur et ce matériau. J'avais toujours un couteau avec moi et un morceau de bois entre les mains. Je n'ai jamais changé d'avis. Bien sûr, au début de l'apprentissage, je me suis demandé si c'était bien à cela que je voulais consacrer ma vie. Mais quand tu vois, à la fin de la journée, que tu as fabriqué un meuble, une porte, et que cela va améliorer l'intérieur de la maison de quelqu'un, c'est très gratifiant.

Prendre un morceau de bois et lui donner une forme, une fonction.

Yoann, toi, tu voulais faire comme papa ?

- Bon, il faut admettre que je suis quasiment né sur un tas de sciure !

Depuis tout petit, mon père m'emmenait sur les chantiers, j'aimais aussi cette odeur du bois. Au début, je voulais devenir luthier, mais je n'étais pas assez imbibé de musique, j'aurais dû m'y intéresser plus tôt, et j'avais peur de me décevoir, de ne pas être à la hauteur, alors, la menuiserie était une autre manière de travailler le bois. Au début de l'apprentissage, j'ai eu de gros doutes, peut-être regrettais-je d'avoir aban-donné l'idée de lutherie. C'est magique de créer un instrument qui fait de la musique, mais créer un espace à vivre pour les gens, ça l'est aussi. J'ai fait mon apprentissage chez Claude Busset à La Murée, et tout d'un coup, premier déclic, je comprenais mieux ce que je faisais, j'ai croché, et je m'y suis beaucoup intéressé. Puis j'ai travaillé durant cinq ans en plaine.

C'est là que j'ai eu le deuxième déclic, lorsque je prenais des boulots du début à la fin et je fabriquais de belles choses.

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Gladys Robert, sommelière

Qu'est-ce qui fait que tu as choisi ce métier ?

Mon père et ma mère étaient dans le métier, en France, d'où je viens, je n'ai vu que cela, c'était mon milieu. Après un bac scientifique, j'ai suivi les cours d'une Ecole Hôtelière à Grenoble. Je suis venue aux Diablerets, il y a huit ans, j'y ai connu mon ami, alors cuisinier. Je suis restée et je m'y plais.

Et pourquoi aimes-tu ce métier ?

Indépendamment de l'organisation du travail qui m'intéresse aussi, le contact avec la plupart des clients est agréable, surtout les habitués avec lesquels l'échange est plus profond, ainsi que les touristes qui reviennent d'année en année. Je suis contente de les revoir et ils sont contents d'être reconnus.

Parfois, il y a des clients incapables de dire bonjour ou merci, et je le regrette, mais en revanche la clientèle anglaise est souvent très polie et discute facilement avec moi ou mes collègues.

Ce sont des moments, courts, mais très agréables, ces rencontres avec des gens tellement différents.

Bon, évidemment, maintenant que j'ai une petite fille, je travaille moins au Muguet pour pouvoir m'en occuper.

C'est vrai que Gladys semble être d'une efficacité redoutable dans son travail, dou-blée d'un charme ravageur, qui fait le bonheur de ses clients !

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Isabelle Fontana, vendeuse en articles de sports

J'ai fait mon apprentissage avec Jacky Peretten déjà, dans le magasin des Diablerets, il y a ... bien longtemps. J'adore le contact avec les gens et j'aime les conseiller en connaissance de cause.

Après l'apprentissage, je suis partie en Angleterre, car, ici, il y a une importante clientèle anglophone. Au retour, je partageais mon temps entre un entrainement intensif de volleyball et la vente dans les magasins où se situait mon équipe, Leysin, Montreux, Cheseaux et Bâle. Après des années de compétition en volleyball comme internationale, je me suis mise au beach-volley. Ma coéquipière et moi visions une sélection pour les Jeux Olympiques de Sydney. Essayé pas pu.

Donc, vous jouiez à un très haut niveau !

Lorsque je suis revenue aux Diablerets,Il me fallait un nouveau défi. En 1995, j'ai secondé Michel Peretten qui avait repris le magasin au décès de son père. Je m'occupe des achats pour tous les articles textiles et techniques pour la saison d'hiver. Ce qui m'intéresse c'est tout le fonctionnement du magasin, le bureau, les achats, la vente, et surtout le contact, pouvoir conseiller le client sur des articles de sports que l'on connait pour les avoir testés.

J'ai aussi passé mon brevet pour l'enseignement du tennis. C'est un sport que j'aime beaucoup enseigner.

Que ce soit au magasin ou sur le court, je fais beaucoup de connaissances de gens différents et c'est enrichissant. J'aime cette relation de confiance avec mes clients.

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Jean-Claude Roch, surveillant permanent de la fauneJ'ai bien aimé voir tomber la neige, mais je suis content de la voir fondre, de constater le réveil de la nature, d'entendre le chant matinal des oiseaux, ça revit, c'est magnifique !

Vous avez été garde-forestier durant vingt ans, et maintenant vous êtes devenu garde-chasse?

Cela ne s'appelle plus ainsi, mais surveillant permanent de la faune. Même si une petite partie de mon activité consiste à poursuivre le braconnier, la très grande partie de mon activité est la gestion des biotopes et de la faune. Bien sûr, parfois, je dois exercer mon pouvoir judiciaire, et débarquer avec l'autorisation du juge à 6 heures du matin pour une perquisition, mais je déteste intervenir dans la vie privée des gens, j'aime mieux les autres côtés de mon métier.

Braconniers de toutes sortes, n'obligez pas Monsieur Roch à quitter son terrain de prédilection pour des tâches moins gratifiantes !

Depuis 1996, j'ai exercé cette nouvelle profession à temps partiel et depuis 2000, à cent pour cent pour ne pas dire plus, car le nombre d'heures que je consacre à cette tâche dépasse le cadre de la convention collective, son intérêt étant de tous les instants. Le loup ne prend pas rendez-vous pour égorger les moutons. J'accours pour remonter le moral du paysan et estimer l'étendue de la perte, analyser l'ADN du prédateur. La surveillance des animaux sauvages ne se fait pas forcément à heures fixes durant les heures d'ouvertures de bureaux, mais c'est tellement passionnant, que le nombre d'heures est très accessoire.

Comment fait-on pour devenir surveillant permanent de la faune ?

Il n'y a pas d'école ou d'apprentissage de garde-faune, on peut provenir des rangs de la police ou de la gendarmerie, des forestiers ou d'une autre formation si possible en relation avec la nature et avoir obtenu son CFC, mais en tous les cas être au béné-fice d'un permis de chasse, car malheureusement on doit parfois abattre des bêtes. Il faut être nommé, et suivre plusieurs semaines de cours de formation et chaque année des stages de formation continue.

C'est un rêve que j'avais depuis longtemps déjà, de m'occuper de la faune. En 1980, j'avais passé mon permis de chasse, on m'avait pris tout de suite comme surveillant auxiliaire bénévole de la faune.

Maintenant, je réalise mon rêve journellement !

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Jean-François (1948-2015) et Muriel Berruex, agriculteurs, fromagère

Alors, Jean-François, tu n'es pas devenu gendarme ou facteur ?

J'aurais peut-être pu, mais grâce à la création de la route du Col de la Croix, en 1970, la ferme du Rachy est devenue accessible toute l'année. Pour moi, cela fut déterminant pour reprendre le train de campagne familial. Un semblant de liberté que l'on ne retrouve pas dans les autres professions citées plus haut, une communion avec la nature qui nous entoure, même si notre métier est devenu très administratif, nous bénéficions d'un cadre de vie exceptionnel. Une vie d'élevage, lorsque ton bétail reçoit les meilleures notes, lorsque ton lait est de la meilleure qualité, sont des satisfactions énormes et la récompense d'un travail parfois ingrat et contraignant, mais combien gratifiant.

D'autre part, l'apport du tourisme en périodes hivernale et estivale est très important. Durant de nombreuses années, j'ai pu travailler aux remontées mécaniques à deux minutes de la maison, et maintenant, grâce à la buvette du Rachy et celle de l'alpage de La Marnèche en été, cela nous permet non seulement un apport non négligeable, mais aussi de rencontrer beaucoup de monde. C'est extrêmement positif pour cha-cun !

Si c'était à refaire, avec les facilités mécaniques de notre métier d'aujourd'hui, je redeviendrais agriculteur.

Et toi, Muriel, que fais-tu là ?

Toute petite déjà, je me sentais bien à l'écurie, avec les animaux. Dès ma fin de scolarité, je suis allée faire un apprentissage de fromagère dans la Broye. L'ambiance n'était pas celle que j'espérais, mais peut-être que cela m'a stimulée pour réussir. Après, j'ai fait un apprentissage d'agricultrice chez un paysan qui venait couler son lait à la fromagerie. Là, j'ai été très heureuse, il y avait beaucoup plus de bétail que de cultures. Puis, j'ai suivi les cours de l'Ecole d'agriculture de Grange-Verney, et maintenant je travaille en famille. Je regrette de ne pas pouvoir fabriquer le fromage lorsque nous montons à La Marnèche l'été, faute d'installations, le lait doit être acheminé au chalet du Rachy.

C'est clair que, pour une jeune femme comme moi, les contraintes de présence sont importantes, mais j'aime être à l'extérieur et en contact avec les animaux de la ferme.

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Jean-Maurice Chevalley, architecte

J'ai une vague idée pourquoi on peut aimer ce métier aux qualités humaines, artistiques et techniques, mais chaque individu peut trouver une motivation différente. Quelle est la tienne ?

J'ai commencé, vers 13-14 ans par vider le grenier de la ferme de mes parents pour y créer ma propre chambre. C'est le côté bricolage à l'échelle réelle qui m'a intéressé, avant d'avoir l'idée de devenir architecte. Le gymnase avait organisé une journée de visite à l'EPF-L, je m'étais inscrit en chimie, génie civil et architecture. Lorsque j'ai vu les ateliers en architecture, les radios, nourriture et boissons, des plans partout, des maquettes, je ne suis pas allé voir le génie civil, ni la chimie, mon choix était déjà fait.

Mes études terminées, après un stage passionnant au Maroc, j'ai fait diverses expériences en plaine, puis je suis entré à l'Atelier d'architecture Le Triangle. Lorsque l'associé responsable du bureau des Diablerets a quitté la Société, j'ai repris les locaux en me mettant à mon compte.

L'intérêt de ma profession est de s'approcher au plus près des désirs d'un client (Maître de l'ouvrage) et de les réaliser dans le cadre de son budget et des très nombreux règlements et normes régissant les innombrables prestations nécessaires à la construction d'un bâtiment.

Lorsque le chantier terminé, les comptes rendus, on a réussi à transformer une relation professionnelle en relation d'amitié avec ses clients, c'est une satisfaction supplémentaire et la preuve que l'on a fait son métier plus que correctement.

S'il n'y avait pas autant de règlements contraignants, qui n'évitent pourtant pas l'ar-chitecture d'un niveau très inférieur, construire l'habitat de personnes ou un outil de travail dans autant de domaines qu'il existe de métiers, architecte serait certainement l'un des plus beaux métiers du Monde !

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Jean Carvalho, un bonheur polyvalent

Originaire du Cap-Vert, comment débarque-t-on aux Ormonts ?

Lorsque je suis arrivé en Suisse, je voulais m'occuper du bétail, travailler dans l'agriculture, ce que j'ai fait jusqu'à l'arrêt de l'exploitation pour cause d'accident de mon patron. Je suis allé travailler alors chez un charpentier, puis six mois plus tard, j'ai été engagé dans une entreprise de maçonnerie-génie civil des Diablerets. Cette année, cela fera quatorze ans que je m'occupe de la centrale à béton, de transports et de réparations mécaniques, ce que j'adore faire. J'aime quand ça fonctionne. J'ai suivi des cours à Yverdon lorsque je travaillais à Divonnes, mais j'ai beaucoup appris sur le tas. Même si parfois, cela ne fonctionne pas, il ne faut pas lâcher, il faut travailler jusqu'à ce qu'on arrive. Il me semble que trop de jeunes abandonnent leur place de travail à la moindre difficulté, sans savoir ce qu'ils vont faire après. Ils oublient que pour toutes choses à faire, il faut transpirer et persévérer. Il faut admettre qu'à chaque fois qu'on a réussi quelque chose, cela se grave dans sa tête et donne un peu de confiance en soi.

Mais alors, l'agriculture, c'est oublié ?

Non, maintenant que j'ai mon chalet avec un peu de terrain, je pourrai à ma retraite, acheter des chèvres ou des génisses et m'en occuper.

Jean, il me semble que tu n'es pas tout à fait prêt à prendre ta retraite et que tu vas pouvoir encore apporter ton sourire, ta joie de vivre et ta précieuse collaboration à l'entreprise qui t'emploie, c'est tout ce que je te souhaite !

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Lars Theiler, guide de montagneJ'ai toujours été attiré par les métiers de la montagne, mais pour pouvoir devenir guide de montagne, vous devez ou avoir le baccalauréat ou être au bénéfice d'un CFC (Certificat Fédéral de Capacité). Ayant aussi été attiré par le dessin, la technique, la construction, j'ai fait un apprentissage de dessinateur en génie civil. Puis, petit à petit, la montagne fut la plus forte. Mais j'avais un métier de secours au cas où je ne pourrais plus m'y rendre. J'ai passé tous les degrés de patentes de professeur de ski, y compris celle de formateur pour les professeurs, mon brevet de guide de montagne (formation de trois ans) et celui, à part, de chef de sécurité pour les remontées mécaniques suisses.

Chef de sécurité ?J'atteste la sécurité pour l'ouverture des pistes de ski. C'est moi qui autorise telle ou telle ouverture de piste en fonction de sa sécurité. C'est d'ailleurs la même procédure avec des clients privés, c'est le guide qui prend les décisions sécuritaires.

Il est à noter que Lars a été pris en février 2010, dans une avalanche dans l'exercice de la sécurisation de la piste de la Combe d'Audon. Il s'en est sorti avec des fractures, mais grâce à son air-bag, il est resté en surface. Si un homme de sa compétence peut être pris dans une avalanche, cela devrait faire réfléchir certains gros malins du type «No Risk, no Fun», mais qui nécessitent les efforts et les risques de la colonne de secours !

Au niveau de la Commune, comme ailleurs en Suisse, à la suite du drame des Haudères en 1999, chaque année on se rencontre en début de saison pour répéter la procédure d'urgence en cas d'avalanches, refaire la liste des propriétaires de chalets situés en zones dangereuses, pour que tout soit en place si elle arrive. Après, c'est de l'appréciation, ce n'est pas mathématique une avalanche. Un câble de téléphérique, on peut le radiographier, compter les torons cassés et calculer sa portance. Pour les avalanches, il n'y a pas de normes, c'est l'appréciation d'un groupe d'experts, de montagnards, ce ne sont que des avis humains. (Ne serait-ce pas un peu caractérielle, une avalanche ?)

Qu'est-ce que vous aimez dans ce métier ?

La liberté. Pour celui qui ne se fait pas piéger par l'appel des affaires et du profit, un choix de travail gigantesque : Trois semaines de Haute-Route avec des clients, puis on part au Kilimanjaro avec d'autres clients, on fait un trecking la semaine suivante, et on se retrouve en Grèce à faire de l'escalade.Mais, dans la nature, la liberté se paie très chère. D'abord, il est difficile de concilier son métier avec une vie de famille équilibrée, lorsque vous êtes constamment loin avec des clients. Aussi, lorsque vous êtes en montagne et qu'il fait tellement beau, on ne pourrait pas être mieux ailleurs, mais d'un coup, vous pouvez vous retrouver à deux doigts de la mort, en face de situations très graves, face à la rudesse de la nature.Le travail du guide est justement de définir où est la limite, et ne pas la dépasser. Combien de fois, on s'arrête avant le sommet. L'intelligence, ce n'est pas d'écouter sa tête lorsqu'on est en montagne, mais ses tripes !

Ce que j'aime aussi, c'est que les gens, en montagne, souvent, tombent le masque. Ils sont plus sincères et les contacts humains beaucoup plus purs.

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Liliane Nicolier, professeur de skiLe ski, que j'ai commencé à l'âge de trois ans a toujours été ma passion. Après, j'ai participé à de petits concours OJ et juniors, puis de plus importants jusqu'à ceux de l'Equipe suisse de ski. Il était donc naturel que je passe ma patente. Habitant dans une région équipée de belles pistes de ski, au début, j'ai donné des leçons pour aider et rendre service à l'Ecole de ski, de temps en temps. Après, par la force des choses et de mon destin, c'est devenu mon métier à plein temps. Bien sûr, parfois c'est rude lorsqu'il neige et qu'il fait froid, mais j'aime être dehors, dans mes montagnes et

regarder les paysages qui changent au gré de la météo. J'aime aussi beaucoup être en contact avec les gens, adultes ou enfants. Je me suis découvert beaucoup de patience. Lorsque je suis devenue maman, j'ai eu plus de facilité avec les petits, qui sont devenus grands et qui, à leur tour, m'ont confié leurs enfants. Je rencontre des élèves de toutes nationalités et de tous milieux, dont je ne connais pas toujours la langue. Avec les enfants, je parle en français et par gestes, ils apprennent par mimétisme. Avec les plus grands qui apprennent les langues, je peux m'adresser à eux en allemand, en anglais ou en italien. Avec ceux qui ne parlent aucune de ces langues, je demande aux parents qu'ils m'apprennent quelques mots usuels, comme «plier les genoux !»

Comment dis-tu cela en japonais ? Car Liliane a même enseigné le ski à Vin, le fils de mon ami Masahiro, lorsqu'il avait cinq ans...

Hiza, magete !

Les adultes, eux, ont plus de peine à imiter, les explications sont plus techniques.

Pendant les leçons de ski, on peut aussi avoir des échanges, un bon sentiment réciproque, une amitié, même si l'on ne se comprend pas au niveau de la langue.

Parfois, les débuts sont difficiles avec des enfants qui n'ont pas envie ou qui sont capricieux. Il faut non seulement leurs apprendre à skier en composant avec des exercices ludiques, beaucoup de psychologie et leurs apprendre quelques règles de savoir-vivre, mais il y a tant d'enfants adorables.

D'autre part l'enseignement à des personnes handicapées, soit infirmes moteur-cérébraux, soit physiquement, est difficile mais tellement gratifiant. Je me souviens de cette petite fille de treize ans, qui avait de naissance une luxation de la hanche, incapable de tourner d'un côté. J'ai essayé d'analyser son problème, d'aller au fond des choses, je n'aime pas rester sur un échec. Alors, lorsqu'elle s'est mise à pouvoir tourner des deux côtés, j'en ai eu les larmes aux yeux. Et la satisfaction de la réussite lue dans ses yeux vous fait aimer encore plus votre métier !

Vraiment, on est plus épanoui, lorsqu'on fait un métier qu'on aime !

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Lucien Anker, pharmacien

Lorsque j'avais quatre ou cinq ans, nous vivions à Bulle. J'avais très peur des orages. Ma mère travaillait dans une pharmacie. Je voyais le jardin que mon père entretenait amoureusement se faire déchiqueter par d'énormes grêlons. Je me suis dit que si j'étais pharmaciens, je pourrais habiter où je travaillais !

A quatorze ans, j'avais le droit de rouler en vélo Solex, j'ai été garçon de courses pour la pharmacie où ma mère travaillait, ce qui a contribué à me faire envie d'exercer cette profession. Mais ce qui m'a vraiment donné le goût du métier, c'est mon stage d'une année et demi chez un pharmacien de Montreux, qui m'a non seulement donné une grande éthique de mon métier, mais aussi mis en contact avec des musiciens de jazz se produisant au Festival, lorsque mon maître de stage tenait l'infirmerie .

(Connaissez-vous beaucoup de personnes qui ont eu l'honneur de masser les chevilles du trompettiste Miles Davis ?)

Intéressé par la chimie, je suis effectivement devenu pharmacien, puis quatre ans durant assistant à l'Université, et pharmacien cantonal pendant dix ans. Ma mère a aidé mon frère Claude-Alain, aussi pharmacien, à ouvrir la Pharmacie des Diablerets, et je les ai rejoints.

Qu'aimes-tu dans ton métier ?

Le contact avec les gens, et aussi le mélange chimie, physique, médecine.

Parce que vous faites encore des préparations ?

Essentiellement pour les dermatologues et les pédiatres, qui demandent des pommades sans agents conservateurs qui peuvent être parfois allergènes, ou pour des nourrissons avec des spécialités qui n'existent pas pour cette catégorie d'âge.

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Lucien Morerod, laitier-fromager

Pourquoi es-tu laitier-fromager ?

C'est en voyant mon père faire le fromage que j'ai eu envie de faire l'apprentissage de fromager. Je ne pouvais pas seulement fabriquer l'été. J'ai travaillé dans différentes fromageries et j'ai découvert le commerce en travaillant en Valais et cela m'a aussi beaucoup plu. J'ai heureusement pu succéder à Raymond Lacroix et reprendre sa laiterie, avec ma femme, ce qui m'a permis de travailler aux Diablerets et d'en vivre toute l'année.

Qu'aimes-tu dans ce métier ?

La vie du fromage est multiple et on en trouve dans bien des parties du globe. J'aime connaître l'Histoire d'un fromage, d'où il provient, ses racines. Lorsque je voyage en France, c'est toujours un plaisir de rechercher de petites productions spécifiques ; je m'intéresse à tout ce qui les touche : A chaque région, son fromage, et à chaque fromage, son histoire. En Normandie, j'adore découvrir de nouveaux Camembert, ou un peu plus bas de petites «chèvreries». Maintes sortes de fromages ont été inventées par des religieux, à commencer par notre Tête de Moine, que j'ai d'ailleurs aussi appris à fabriquer. C'est fascinant de connaître dans le détail pourquoi telle ou telle production a vu le jour. Lorsque je serai retraité, je sillonnerai les routes pour découvrir ou redécouvrir les fromages de France ou d'ailleurs !

Je crois que nous serons tous d'accord pour affirmer que la vitrine de fromages de Lucien démontre bien son amour du métier. Je crois que peu de résidents secondaires montent aux Ormonts après avoir acheté leur fromage en plaine, mais certainement qu'ils redescendent avec ceux de Lucien !

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Marc Rossier, pasteur

Je ne devrais pas vous poser la question, mais je le fais quand même :Aimez-vous votre métier ?

Certains aspects de mon métier sont franchement épanouissants, d'autres plus durs. L'important, c’est de trouver un sens à ce que je fais et à ce que je vis dans lespériodes difficiles. Dans les périodes faciles, ça vient tout seul.

Est-ce que je peux vraiment parler de vocation ? Une voix n’a jamais résonné des cieux qui disait : «tu feras pasteur», mais j’ai l'impression d’avoir été conduit progressivement à faire ce métier-là, parfois même contre mes désirs et en m’obligeant à dépasser mes craintes. Finalement, je ne me voyais rien faire d’autre.

Mais à quel moment, cet appel est-il venu ?

Devenir pasteur, parce que mon père l’était, me semblait la plus mauvaise des raisons. J’ai donc préféré entrer à l'Ecole polytechnique en mécanique. Après deux ans, en plein cours, je me suis fait arrêter net par un élan intérieur : Mais qu'est-ce que je fais là ?

Je devais choisir entre pasteur et pompier : Un besoin d’action et de réflexion pour des questions de vie ou de mort. J’ai choisi de le faire au service de Celui qui me donne la Vie, même en ne sachant pas vraiment qui c'était. Je Lui ai fait confiance : s’il y en a un qui devait savoir comment utiliser ma vie au mieux, c’était d'abord Lui. Ce qui est passionnant, c'est de chercher le sens de la vie et de le chercher avec les autres.

Et vous avez trouvé ?

Trouvé, non : la vérité est comme un horizon qui s’éloigne au fur et à mesure que l’on avance. Et ce que j'aime tout particulièrement dans la foi chrétienne, c'est cette notion d'espérance.Mon métier est exigeant, c’est vrai : il demande à chaque instant de l'amour, pour moi-même d'abord, pour les autres ensuite. Ce qui n’est pas toujours évident.

Petite anecdote d’entreprise : Le grand Patron a reporté le souper de boîte à la fin des temps. Je me suis dit qu’Il avait trouvé le truc pour faire vivre ses employés d'espoir et de confiance !

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Marie-Danielle Aubry, institutrice

Comment arrive-t-on aux Diablerets, lorsque l'on vient de Montreux ?

J'ai fait un remplacement pour cause de maternité d'une enseignante, et j'ai découvert la région. C'est ici que j'ai voulu enseigner.

Et pourquoi avoir choisi ce métier ?

Je voulais faire l'Ecole Hôtelière, j'ai eu un diplôme de commerce, puis je suis allé travailler durant une année dans un hôtel, à la réception, en préparant une maturité professionnelle, mais je me suis rendu compte que, pour moi, les contacts, quej'aimais, n'étaient pas assez suivi avec les hôtes. Et, travaillant à l'hôtel, j'ai dû chercher un ballon que des enfants avaient envoyés sur un balcon, et je me suis dit que c'était d'eux dont je voulais m'occuper. J'avais fait beaucoup de camps avec des enfants et j'aimais le contact avec eux. J'ai donc suivi les cours de la HEP (Haute Ecole Pédagogique) pour devenir enseignante.

Ce que j'aime dans mon métier, c'est aussi de trouver comment expliquer la matière à apprendre, en tenant compte de la manière de fonctionner de l'enfant. Tenter de m'adresser à lui avec son langage, car c'est frustrant d'expliquer quelque chose que l'enfant ne comprend pas. Tous ne fonctionnent pas de la même manière, mais beaucoup sont capables de comprendre si l'on s'adresse à eux de manière adéquate.

Je m'occupe principalement des enfants de première année, et je suis frappé de voir comme ces petits enfants sont motivés et curieux de tout.

Vous n'avez pas choisi ce métier pour la durée des vacances (Ha ha ha !)?

Je dois dire que depuis que je travaille dans ce métier, j'apprécie beaucoup les va-cances. Comme les enfants, je suis fatiguée à la fin de la période scolaire, les vacances me permettent de me ressourcer et je me réjouis de recommencer l'école en étant plus patiente, plus à l'écoute des élèves.

J'aime aussi voir les progrès des enfants, et leur visage lorsqu'ils réussissent à apprendre quelque chose. C'est magnifique !

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Marino Frei, électronicien-informaticien

Depuis toujours, j'ai aimé la technique, l'électricité, les télécommunications, puis plus tard, l'informatique. J'ai été attiré par les métiers techniques. Voyant dans les bureaux les gens brasser du papier, brasser de l'air, je voulais toucher du concret.

Dès mon plus jeune âge, je suis bricoleur; J'ai fait du maquettisme, puis plus tard, avec un ami, vers 14-15 ans, nous avons fabriqué des jeux de lumières psychédéliques, il fallait tirer des câbles, puis après, nous avons fabriqué complètement des circuits imprimés. J'ai réalisé des émetteurs FM pour m'amuser. On lisait des revues, il y avait des plans, alors on réalisait tout de A à Z.

Cela m'a amené tout naturellement à l'Ecole des Métiers, d'où je suis sorti après quatre ans avec un CFC (Certificat Fédéral de Capacité). De là, j'ai suivi les cours de l'Ecole d'Electricité, du point de vue électronique, c'était un peu sommaire, mais on apprenait à réparer les appareils, rechercher les pannes et changer les composants défectueux, car à l'époque, les appareils se réparaient ! J'en suis sorti avec un diplôme de radio-électricien. J'ai fait une année de plus pour devenir technicien en électronique. Je comprenais beaucoup de choses en électronique, on ne parlait pas encore d'informatique, il n'y avait que d'énormes machines auxquelles nous n'avions pas accès.

Comme je n'étais pas allé suffisamment au fond des choses, j'ai pu entrer en deuxième année de l'Ecole d'ingénieurs de Genève, où je suis resté 3 ans pour obtenir mon diplôme d'ingénieur. J'avais beaucoup de plaisir à faire de la programmation sur cartes perforées. On commençait à entrevoir l'interaction de l'informatique et de la téléphonie, la monétique, transactions d'argent par ligne téléphonique avant Internet. J'ai travaillé dans un bureau qui faisait de la monétique, de la télématique, et aussi sur des appareils qui faisaient de la reconnaissance de pièces de monnaie et de billets de banque.

Lorsque la Société dans laquelle je travaillais n'a pas su amorcer le virage des cartes à puces, je suis venu aux Diablerets où j'ai fait plusieurs petits boulots, mais j'avais un rêve, faire de l'électronique et de l'informatique dans mon chalet. J'ai monté ma structure en 1993, en concentrant mon activité sur le service et non sur la vente de «cartons».

C'est un métier passionnant, ça change tout le temps, il y a toujours de nouveaux problèmes à résoudre.

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Mary-Claude Busset, historienne, Conservatrice du Musée des Ormonts

J’ai choisi de faire des études d'histoire et d’histoire de l’art, car ce sont des domaines qui m’intéressent depuis toute petite. Cela a commencé par l’architecture, par les «vieilles pierres». Je me souviens, près de Villarzel, village de ma grand-maman Violette, il y avait une tour médiévale qui me faisait rêver. J'aurais tellement voulu y entrer mais, évidemment, elle était fermée à clef. Ensuite il y a eu une cha-pelle sur une colline à La Sage, l ‘Abbaye de Montheron et bien entendu la cathédrale de Lausanne à côté de laquelle je passais entre deux cours au Gymnase de la Cité, tous ces lieux ont contribué à me faire voyager dans le temps.

L’Histoire, c’est aussi une question d’enseignants ; il suffit de tomber sur la bonne personne et j’ai eu cette chance. Pendant mes années de bac, j’ai fait le lien avec l’actualité. C’était l’époque de Lech Walesa et de «Solidarnosc», de la guerre civile en Irlande et bien entendu du Rideau de Fer. Avec du recul, je me rends compte que j’ai vécu de sacrés changements historiques : «l’Histoire en direct».

Pour moi, l’Histoire, c’est passer de la visite de Pompéi à la construction d’un ancien bisse en Valais. C’est s’intéresser aux gens, à leur vie, à leur pensée, aux témoins matériels qu’ils ont laissés derrière eux. C’est aussi essayer de comprendre comment les êtres humains ont pu à la fois être des génies en art ou en science et en même temps être capable des pires atrocités.

J’aime l’Histoire mais je n’ai aucune nostalgie du le passé. Juste le petit fantasme de pouvoir remonter le Temps pendant quelques heures en restant invisible ! Les diverses activités que j’exerce découlent tout naturellement de cet intérêt. Il y a le travail de recherche qui ressemble presque à celui d’un détective : rassembler les indices à travers documents, photos et objets pour reconstituer des événements ou des périodes. Le partage de ces découvertes avec le public se fait ensuite au travers de publications, de conférences ou de visites guidées. Le musée est aussi un excellent lieu où s’informer sur l’histoire et l’environnement de son lieu d’habitation ou de vacances. Le défi est alors de rendre ce lieu accueillant et attractif : c’est le défi que j’essaie de relever depuis bientôt 3 ans, heureusement entourée et soutenue par des personnes pleines d’idées et de talents.

On n’utilise dans ce cas pas le mot «travail» mais heureusement celui d’«activité passionnante».

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Mary-Claude Grobéty, esthéticienne

Ma première expérience avec l’esthétique a eu lieu à 14 ans. Une amie en formation m’a fait une teinture de cils qui s’est malheureusement soldée par du produit dans l’œil. Je me suis toujours appliquée à ce que cela n’arrive pas dans ma carrière.

C’est l’ambiance feutrée de la cabine, le contact physique et l’intimité qui m’ont plu dans cette profession.

Après une formation de deux ans, j'ai travaillé dans divers instituts, y compris aux Diablerets, puis je me suis installée, d'abord à la maison, près de mes enfants et depuis quelques années au chalet Les Rosiers.

J'aime les gens, j'aime leur donner du temps, dans une atmosphère détendue, un peu comme dans un cocon. Lorsque je m'occupe d'une personne, souvent la magie opère et j'ai l'impression que ma clientèle m'apporte autant que je lui donne. Il y a une certaine osmose qui se développe. Certains sont très surpris que je leur dise merci à la fin d’un massage !

Il y a trente ans que ça dure, et j'aime ça !

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Nadine Arena, employée de tourisme

Après l'Ecole de Commerce et une année d'Ecole de Tourisme, j'ai commencé, il y a dix ans, à travailler à Diablerets Tourisme, à accueillir nos chers hôtes et m'occuper de l'animation durant quatre ans à plein temps. Puis ma fille est arrivée, mon temps de travail s'est réduit à quarante pour cent. J'ai été aussi mandatée pour m'occuper de la coordination du Festival International du Film Alpin. En n'étant pas tout le temps à l'Office, j'avais peut-être ainsi une approche un peu différente du tourisme. En un temps de travail limité, j'ai beaucoup de plaisir à rencontrer des gens, retrouver des habitués. J'aime donner des renseignements aux touristes afin que leur séjour se déroule le mieux possible, et parfois être le paratonnerre de leur mauvaise humeur !

Bonjour, je n'ai qu'une semaine de vacances, j'ai réservé ici et regardez le temps qu'il fait, c'est scandaleux !

C'est très gratifiant lorsque quelqu'un repart après vous avoir versé le réservoir de ses insatisfactions en vous disant merci quand-même ! Les journées ne sont jamais les mêmes, ce sont dans la plupart des cas des gens différents. On cherche avec eux des propositions d'occupation durant leur séjour en étant attentif à leurs désirs. C'est vrai que l'été, c'est plus facile d'organiser des activités, même à l'extérieur de la région, mais l'hiver, les touristes, moins à l'aise sur les routes enneigées, préfèrent laisser leur véhicule inadapté au garage. Il faut donc se décarcasser pour les occuper le mieux possible hors des pistes de ski. C'est vrai que la clientèle d'hiver arrive, loue son équipement de ski, achète son abonnement et part sur les pistes pour rentabiliser un investissement souvent assez important. Il n'a pas de temps à perdre, c'est le même stress qu'il connait en ville.

La clientèle d'hiver est très demandeuse. Peu de temps, mais il faut le remplir ! L'été, c'est différent, les gens sont souvent plus détendus, ils s'intéressent à plus de choses, visitent les musées, observent la faune et la flore, se promènent.

J'aime aussi le contact avec les résidents secondaires, cela devient plus amical.

Dans ce métier, lorsque une personne arrive au bureau, c'est qu'elle a une ou plusieurs questions. Si on arrive à lui donner de bonnes réponses, on a vraiment l'impression de l'avoir aidée.

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Naïké Wider, pâtissière

Alors, Naïké, pourquoi es-tu devenue pâtissière ?

A l'école, depuis des années, j'aimais beaucoup un garçon. Il voulait devenir pâtissier, j'ai donc décidé de devenir pâtissière.

Lui est devenu horloger à la Vallée de Joux, je suis devenue pâtissière. Après trois stages, j'étais convaincue que c'était MON métier. Sans hésitation !

Qu'aimes-tu dans ce métier ?

On peut laisser aller son imagination, on peut créer ce qu'on veut, travailler avec les saisons, fabriquer pour le plaisir des sens, plaisir de la vie, plaisir du ventre, tout en jouant avec les couleurs, les matières, les volumes, les dessins...

Le désavantage, c'est qu'on doit travailler debout, le week-end, les jours fériés. Il faut se lever très tôt, on commence à quatre heures, et dans l'hôtellerie à deux heures !

Pour ce métier, il faut de l'adresse, de la rigueur, de la minutie, le sens artistique, le respect de l'hygiène, des qualités d'organisateur et de gestion, savoir choisir ses produits.

C'est un métier exigeant.

Après avoir travaillé au Muguet, Naïké a le projet d'ouvrir sa propre pâtisserie sur la Riviera. BONNE CHANCE, Naïké !

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Nicolas Fehr, médecin

Nicolas, ingénieur agronome, est-ce vraiment la bonne filière pour devenir médecin ?

C'est vrai que j'avais commencé des études pour le devenir, mais rapidement, j'ai bifurqué vers la médecine. J'aime aider les gens, un à un. Le fait que mon père était psychiatre n'a rien à voir dans mon choix.

Après quelques stages chez le Dr Daubercies, avec lequel je me suis très bien entendu, j'ai fait quelques remplacements ici, là, même à Château-d'Oex, et y compris dans le Val d'Anniviers. J'ai vite compris que la région des Ormonts était le coin où je me sentirais bien, et que je pourrais y apporter mes compétences à la population, et vivre heureux.

C'est vrai que le bonhomme, dans les deux sens du terme, lorsqu'il n'est pas dans la foule, a un contact privilégié avec une personne. Christine, sa femme souffrait au début de n'être que Madame Nicolas, car beaucoup ne connaissaient même pas son nom de famille, c'est significatif de son approche de l'autre. Lorsqu'on se fait soigner par Nicolas, on sait qu'il le fait en ami, proche. Le Docteur n'a pas compté son temps et ses déplacements pour soulager, soigner et guérir. Le côté humain peut parfois remplacer avantageusement la médication, et pour les effets secondaires, aucun souci !

Pourvu que cette profession du médecin généraliste puisse retrouver l'aura élémentaire qu'elle mérite, c'est si important de confier sa santé à quelqu'un qu'on connaît et surtout qui vous connaît. La machine en est encore si loin !

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Olivier Veuve, tavillonneur

Alors, ce magnifique livre «Tavillons» que tu as réalisé avec Pierre Grandjean, c'est typiquement l'ouvrage d'un type qui n'aime pas son métier ! Blague à part, qu'est-ce qui t'a amené à ce métier ?

J'ai d'abord fait un apprentissage d'électricien, mais après deux ans, bien que sorti le meilleur de la «boîte», j'ai quitté, sentant que ce métier n'était pas le mien. En réalité, c'est à la lecture d'un livre «La Tentation de l'Orient», que j'ai été aspiré par l'envie de voyager, dans les pays du Nord, en Inde, au Népal, en Afganistan, au Pakistan, et bien d'autres endroits. Je travaillais comme «manoillon» pour gagner deux, trois ronds. Puis, j'ai été «modzounet», garde-genisse dans un chalet d'alpage, où j'ai découvert le tavillon recouvrant ce type de chalets. J'ai trouvé ce mode de couverture tellement beau, que je m'y suis intéressé, en suivant toute la filière de son existence, depuis le choix du bon arbre jusqu'à la manière de le poser, en passant par toute les phases de sa préparation. J'aime la montagne, je n'ai pas envie d'habiter ailleurs, ici les gens sont comme le paysage, rudes et attachants. Ce boulot me permet d'être à mon aise, dans mon environnement. J'ai recouvert des chalets pour des milliardaires, puis je me suis allé me ressourcer sur le toit d'un chalet perdu dans la montagne !

C'est si important de conserver des métiers-rois de l'artisanat, qui demandent une connaissance approfondie de ce que nous apporte Dame-nature.

Oui, mais cela ne veut pas dire, que je ne couvre que des vieux chalets, j'aime beaucoup recouvrir des bâtiments contemporains comme un grand magasin de Château-d'Oex avec ce matériau qui n'a, et de loin, rien perdu de son actualité.

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Philippe Fontana, intendant

Pourquoi aimes-tu ton métier ?

Parce que, bien qu'étant payé par la Commune d'Ormont-Dessus, je suis complète-ment indépendant dans l'organisation de mon travail.

Parce que tu t'occupes de quoi ?

De l'entretien de la Maison des Congrès, du Collège, de la Chapelle anglaise et de la Maison de Commune. Cela me permet de rencontrer des personnes extrêmement intéressantes, et d'autres un peu moins !

J'ai commencé après la construction de la Maison des Congrès, à laquelle j'ai d'ailleurs participé quand je travaillais pour l'entreprise de maçonnerie.

Au début, j'ai dû être derrière les organisateurs de soirées pour qu'ils rendent les locaux comme ils les avaient trouvés, mais maintenant, avec les habitués, c'est plus facile.

Après trente ans d'intenses activités, cette Maison des Congrès, même s'il faudrait peut-être changer quelques appareils vétustes, même si certains équipements de cuisine pourraient être complétés, il faut constater qu'elle est dans un état de conservation qu'un bon nombre d'entre nous pourrait envier !

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Raymond Nicollier, électronicien de loisirs

Alors Monsieur Nicollier, aimez-vous votre métier ?

- Oui, je l'aime, mais il est foutu !

J'ai toujours été attiré par l'électronique, je me suis donc retrouvé tout naturellement à réparer tous les appareils, à en vendre et à les installer. J'aime faire des installations de réception audiovisuelles, des installations de toutes sortes, rechercher la meilleure solution pour que l'installation soit intéressante pour mes clients et intéressante à réaliser, mais je fais de moins en moins de réparations, elles coûtent souvent trop cher. On ne peut plus obtenir les pièces de rechange, les vendeurs et les acheteurs préfèrent plutôt changer que réparer. Je crois qu'une partie de ce métier est fichue, il faut pouvoir s'adapter pour survivre. La clientèle achète dans les grandes surfaces.

Mais, j'arrive néanmoins à me débrouiller et j'aime ce que je fais !

Il est regrettable qu'une partie de la population n'ait pas encore compris l'intérêt de pouvoir compter sur un réparateur installateur sur place. N'oublions jamais qu'un seul franc qui circule dans les divers commerces de la région rapporte à toute la collectivité !

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Reto Terzi, maçon

J'arrive à mi-chemin du Droutsay, je suis accueilli par trois canards au bord de l'un des trois étangs de Reto, car si cette «baraque» a une petite entreprise de maçonnerie, il est, depuis tout petit, proche de la nature, proche de sa faune. Il aurait voulu devenir garde-chasse, mais lorsqu'il y en a huit pour tout le canton, c'est un peu «chasse-gardée» ! Ayant plusieurs cordes à son arc, il construisait depuis toujours, il était naturel qu'il construisît pour de vrai.

Déjà, petit, je voulais construire ma maison.

Celle-ci, je ne l'ai pas construite, elle était là.

C'est difficile à réaliser hors des zones à bâtir, et même difficile à transformer, les Services de l'aménagement du territoire ne sont pas toujours très sensibles à la vie des habitants. Pourtant, il a transformé pour tenter, malgré tout, d'y loger sa nom-breuse famille.

On sent l'amour de son travail dans le but de créer le milieu propice au développement de ses proches, c'est aussi cela J'AIME MON METIER

Et ce plaisir de créer de toutes pièces son environnement : Etangs où d'énormes truites côtoient ombles chevaliers et poissons rouges, murs de soutènement et terrasses sans fins, terrier pour le lapin ou nichoirs pour les canards.

A l'époque, lorsque j'ai tiré mon premier chevreuil, je pleurais en le dépeçant. J'ai donné mon fusil et je me suis acheté un appareil de photo avec un téléobjectif ! J'accompagne parfois le surveillant de la faune dans ses observations.

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Stephan Vouillamoz, plâtrier-peintre

Stephan, pourquoi aimes-tu ton métier ?

Mon métier, je l'aime, mais c'est venu avec le temps. Sortant de classes terminales dans les années '70, il n'y avait pas tellement de choix, c'étaient les métiers du bâtiment. J'en ai choisi un, un peu par hasard, j'ai fait un stage, c'était la peinture. Par contre, la passion est venue par la suite. J'ai toujours été intéressé par le côté artistique de mon métier de peintre, et je me suis vraiment réalisé en m'installant comme peintre aux Diablerets.

Restaurer ces versets que l'on trouve sur les vieux chalets, avec tout le côté recherche pour trouver les parties ou les mots manquants, effacés par le soleil. J'ai toujours été assez habile de mes doigts, pas pour avoir cette flamme aux bouts des doigts qui me permette de dessiner artistiquement, et je le regrette, mais pour le travail au pinceau ou le dessin technique, je pense que c'est ce qui a dû conditionner mon choix, et ça je ne le regrette absolument pas.

Depuis ces quinze dernières années que je suis établi aux Diablerets, j'ai pu me réaliser pleinement, j'ai pu prendre des cours spécifiques sur certaines techniques que j'ai pu directement appliquer dans des constructions.

Apprentissage de peintre 3 ans.J'essaye d'orienter le jeune qui débute à faire le double apprentissage, c'est à dire aussi plâtrier-peintre qui dure 4 ans.

C'est vrai, que le métier de plâtrier est plus pénible, mais il est complémentaire. Le peintre travaille sur le support du plâtrier, c'est un double métier unique.

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Sunny Borloz, dame de confiance et de compagnie

Qu'est-ce qui présageait la trajectoire de Sunny, après un apprentissage de dessinatrice-géomètre, de s'occuper petit à petit d'un couple âgé, d'abord, puis de Madame, restée seule après le décès de son cher mari ?

A part la gestion de trois logements dont je m'occupe, mon temps est occupé par ma petite dame, mais tellement intéressante et j'aime beaucoup aider les gens.

Je me rends chez elle matin et après-midi, tous les jours de la semaine, sauf le week-end et les jours fériés, où je ne vais qu'une seule fois et je vais recharger mes batteries deux semaines par année chez mon papa en France, c'est que du BONHEUR. Je m'occupe d'elle, je vais faire les courses en respectant ses désirs de favoriser chacun des commerçants du Village. On prépare et je fais ses paiements. Je suis sa confidente, elle me considère un peu comme sa petite-fille. Si physiquement, elle n'a plus une forme olympique, en revanche, intellectuellement pour une personne de nonante ans, elle va très bien. Entre le CMS qui lui donne les soins d'hygiène et moi, ma petite dame peut ainsi demeurer chez elle, dans son environnement et ses souvenirs, et c'est de là qu'elle aimerait rejoindre son mari.

Ce qui est difficile, voire impossible, dans ce que je fais, c'est de savoir à quel moment il faudra trouver une autre occupation ou une autre personne qui voudra bien que je l'accompagne.

Sunny, quand je serai encore plus vieux, je me réjouis que ce soit toi !

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Thomas Schmidt (1971-2013)

Quel est ton métier, Thomas ?

Mon métier n'existe pas encore, je suis en train de le créer.

Avant de parler de ton métier qui n'existe pas, que faisais-tu quand nous nous sommes connus ?

J'ai fait partie d'une start-up qui a développé une technologie Internet qui n'existait pas et semblait impossible à réaliser. Le concept a été trouvé et vendu à une grosse société japonaise. J'ai collaboré quelque temps, puis je me suis rendu compte que ce travail ne comblait pas mes aspirations vitales et familiales. Je ne voulais pas vivre avec des regrets, ce sont des taches indélébiles.

Alors, parle-moi de ce métier à créer !

Déjà, à l'époque, j'ai cherché de l'argent pour une société caritative, mon école au Pays de Galles. Habituellement, les projets avec un impact social sont financés par des donations. Mais une donation est en fait une transaction financière avec un rendement de -120%. Cela signifie que même lorsqu'on trouve une bonne solution pour un problème, la manière de le financer ne permet pas une expansionsignificative. C’est un handicap au dynamisme fondamental qui limite pratiquement chaque projet et chaque entrepreneur social, aujourd'hui et demain.

Je travaille avec des banques d’affaires et des entrepreneurs sociaux, en développant une manière de financer des projets à impact social par un investissement avec un risque limité et un rendement positif. Ainsi, nous pourrons envisager de mobiliser des moyens financiers pour l’expansion de ce type de projets.

Dès que j’ai abordé ce problème, il m’a pris en otage. Au bout du compte, nous devons mettre fin aux investissements sans en quantifier les conséquences sociales. L’impact social doit devenir le quatrième pilier déterminant les décisions financières, à côté du terme, du risque et du rendement. Par exemple, si l'on peut trouver une structure qui apporte du profit financier en diminuant la pauvreté, on peut rapidement élargir l'idée et la propager globalement.

Je ne vais pas développer ce processus ici, mais lorsqu'il y a quelque chose à améliorer, il vaut toujours la peine d'essayer !

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Le Domaine des Sources, Les Diablerets © Jean Lugrin

L'eau coule toujours dans le sens de la pente !

ConseilLe stage, même assez court, est une formule intéressante pour se rendre compte à quoi correspond une profession. Et, c'est au moins du concret !

ConclusionJe vous ai présenté quelques personnes bien sympathiques qui ont bien voulu exprimer l'amour de leur métier. Je les remercie infiniment d'avoir bien voulu jouer le jeu. La liste aurait pu être plus longue, elle est même sans fin. A des degrés divers, les satisfactions d'une profession peuvent être nombreuses, mais une chose est sûre, un métier ne se choisit pas seulement en fonction du salaire, des primes ou des voitures de fonction, mais surtout en raison des qualités propres de l'individu, ses aspirations, car on peut être heureux dans sa profession, à condition de l'avoir choisie avec conviction et surtout, par la suite, en vérifiant que l'on n'applique pas le Principe de Peter, en gravissant les échelons et en atteignant, pour tous, un grave niveau d'incompétence aux conséquences catastrophiques.

Il vaut mieux demeurer un peu plus bas, faire preuve d'efficacité et en être heureux !

La course au bonheur ne se gagne pas en montant le plus haut, mais en se retrouvant à la bonne place. Il y a tant d'incapables qui dirigent aux plus hauts niveaux, ne soyez pas de ceux-là !

jl

Les Diablerets, le 23 juin 2016 www.jeanlugrin.com