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1 Jean DUVET (1485 vers 1570) et l’Apocalypse figurée. Introduction Le nouveau cabinet d’art graphique est consacré à la présentation des 23 gravures originales de Jean Duvet conservées dans les collections des musées de Langres. Elles permettent de découvrir le style très original de cet artiste singulier et d’entrer en contact avec une œuvre surprenante par son exubérance et sa modernité, l’Apocalypse figurée. Le présent dossier a pour but de faire le point sur la vie de cet artiste méconnu et de présenter cette œuvre étonnante. I) De l’artisan à l’artiste 1) Un notable langrois 2) Un artiste éclectique II) L’apocalypse figurée 1) Graver une révélation 2) Une œuvre singulière III) Analyse de quelques planches Conclusion Bibliographie IV) Pistes pédagogiques 1 ère partie : Questionnements permettant d’aborder l’Apocalypse figurée. 2 ème partie : Proposition d’un thème d’étude transdisciplinaire : La représentation du Mal dans les arts occidentaux

Jean DUVET (1485 – vers 1570) et l'Apocalypse figurée

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Jean DUVET (1485 – vers 1570) et l’Apocalypse figurée.

Introduction

Le nouveau cabinet d’art graphique est consacré à la présentation des 23 gravures originales de Jean

Duvet conservées dans les collections des musées de Langres. Elles permettent de découvrir le style

très original de cet artiste singulier et d’entrer en contact avec une œuvre surprenante par son

exubérance et sa modernité, l’Apocalypse figurée. Le présent dossier a pour but de faire le point sur

la vie de cet artiste méconnu et de présenter cette œuvre étonnante.

I) De l’artisan à l’artiste

1) Un notable langrois

2) Un artiste éclectique

II) L’apocalypse figurée

1) Graver une révélation

2) Une œuvre singulière

III) Analyse de quelques planches

Conclusion

Bibliographie

IV) Pistes pédagogiques

1ère partie : Questionnements permettant d’aborder l’Apocalypse figurée.

2ème partie : Proposition d’un thème d’étude transdisciplinaire :

La représentation du Mal dans les arts occidentaux

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I) De l’artisan à l’artiste

L’artiste serait né vers 1485, puisque qu’il affirme, dans le frontispice de l’Apocalypse figurée : «Jean

Duvet orfèvre de Langres, âgé de soixante-dix ans termina ces histoires en 1555. ». Considérée par

certains comme symbolique, cette inscription incluse dans la gravure du frontispice de l’Apocalypse

figurée, constitue toutefois un repère possible dans la biographie très lacunaire de l’artiste.

Une incertitude demeure quant à son lieu de naissance - Langres ou Dijon - Langres est alors le siège

d’un diocèse qui s’étendait jusqu’à Dijon. Mais un document atteste de sa réception à la maîtrise

d’orfèvre à Dijon en 1509, à 24 ans, âge normal à cette époque pour l’accès à un corps d’artisan. Les

années qui suivent sa maîtrise sont peu connues. On retrouve sa trace à Langres quelques années

plus tard.

1) Un notable langrois

Il appartient à une famille d’artisans. Orfèvre, graveur il est aussi l’un des premiers burinistes

français. Il va pourtant quitter bientôt cette condition strictement corporative. On sait en effet qu’il

participe à l’élaboration de décors éphémères lors des visites royales (les « entrées » royales) à

Langres, notamment celle de François Ier en 1521, 1522 et 1534 (Bull. Shal n°1, 1880). Ce travail lui

vaut peut-être le titre d’orfèvre du roi, distinction qui entraine diverses autres commandes pour la

cathédrale (un reliquaire, une tête de saint Mammès pour le trésor, un sceau aux armes de la ville de

Langres en 1524). François Ier lui achète un bassin en laiton lors de son passage à Dijon en 1529. Il

obtient un privilège royal de Henri II pour la publication de son œuvre la plus ambitieuse,

l’Apocalypse figurée.

Il devient l’artiste en vue de sa région.

Cette même année, comme d’autres habitants, il participe à la défense de la ville. On retrouve son

nom parmi ceux des membres de la Confrérie du Saint Sacrement en 1550. En 1552, il est inscrit sur

un rôle de taxes touchant sa demeure dans le quartier du «Moulin à vent ».

Une polémique a opposé les historiens de l’art à propos d’une éventuelle conversion de Jean Duvet

au protestantisme et de son possible séjour à Genève entre 1534 et 1544. Aucune archive ne permet

actuellement de trancher la question. La présence d’un homonyme à Genève, peut-être membre de

sa famille, pourrait expliquer l’existence de cette hypothèse.

2) Un artiste éclectique

Ses références artistiques notables sont celle de Dürer, de dix ans son aîné, dont il connait les œuvres

gravées et celle du peintre-graveur italien Marc Antoine Raimondi (1480-1534), héritier lui-même de

Raphaël. On trouve chez Jean Duvet des reprises d’œuvres de Mantegna ou de Raphaël.

Il emprunte aussi à la grande sculpture monumentale (Moïse et les patriarches) ou à la sculpture

romane (le tympan de Vezelay dans la Vision des sept chandeliers). D’autres œuvres renvoient aux

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miniatures de livres d’heures.

On peut percevoir dans le cycle de La Licorne, le style de l’Ecole de Fontainebleau.

C’est donc un artiste à la croisée des influences du Nord et du Sud, à laquelle il mêle une inspiration

très affranchie des codes de l’une et de l’autre. Il adapte à son goût ses modèles selon un éclectisme

et des habitudes propres aux maîtres artisans verriers ou émailleurs. Il en résulte une œuvre très

personnelle et inclassable, pleine d’une originalité parfois déroutante, empreinte de mystère, œuvre

qui témoigne d’une propension très affirmée pour le symbolisme et l’allégorie.

« en toute circonstance, Duvet conserve sa personnalité artistique très affirmée où la maladresse très

apparente du dessin et le « négligé » de la technique renforcent une conception originale de la

gravure. La surface est saturée, la composition souvent incohérente, les formes difficiles à lire dans

leur imbrication et la multitude de détails qui fascine l’œil, la lumière est brisée en mille éclats et

l’image semble flamboyer.» (R.May dans le catalogue de l’exposition Jean Duvet, 1985.)

L’œuvre gravé de Duvet est tout ce que nous connaissons de lui. Il subsiste aujourd’hui environ 70

pièces de l’artiste. Deux œuvres capitales ont donné à Duvet son renom d’artiste visionnaire :

L’Apocalypse figurée publiée à Lyon en 1561 chez l’éditeur Jean de Tournes et L’histoire de la Licorne

(v. 1560), probablement dédiée au roi Henri II et à Diane de Poitiers et qui valut à l’artiste le surnom

de « maître à la licorne » depuis le XVIIe siècle. Un groupe de planches sur saint Michel sont restées

inachevées et inédites.

II) L’Apocalypse figurée

1) Graver une vision divine

C’est une œuvre étonnante pour son époque tant elle semble proche de notre sensibilité moderne

par la rupture avec les conventions du XVIe siècle. Pour avoir un aperçu de l’œuvre, avant la visite au

musée, on peut consulter la numérisation de la Bnf, les planches accompagnant la traduction de

Lefevre d’Etaple.

Le musée d’Art et d’Histoire de Langres présente vingt des vingt-trois planches que comporte

l’édition de 1561 de l’Apocalypse (Vingt-deux planches et un frontispice). Il s’agit de gravures au burin

sur cuivre illustrant le texte de Saint Jean, composant les vingt-quatre derniers livres du Nouveau

Testament.

Les gravures n’ont peut-être pas été destinées au départ à l’illustration d’un livre car une même

gravure se rapporte parfois à plusieurs chapitres du texte biblique mais il est possible que le privilège

royal ait fait revoir le projet initial. Quoi qu’il en soit, Duvet ne respecte pas la partition des vingt-

quatre livres de la Bible et plusieurs états d’impression correspondent à des éditions différentes,

accompagnées ou non des textes de l’Apocalypse.

Duvet s’inspire du texte le plus énigmatique de la Bible (Voir la traduction très accessible de Jacques

Brault et Jean-Pierre Prévost dans l’édition de 2001 parue chez Bayard).

Rédigée à la fin du Ier siècle après J.C, l’Apocalypse annonce la fin des temps prochaine, le Jugement

dernier et l’avènement d’un nouveau monde. La traduction du mot grec « apocalyse » est

« révélation » ou « dévoilement » : l’auteur présumé, l’apôtre Jean, retranscrit une vision qu’il dit

inspirée par Dieu lui-même. C’est un texte violent et foisonnant, accumulant les symboles, parfois

obscur.

Dans le frontispice – absent de l’exposition – Jean Duvet se représente lui-même sous les traits de

son saint patron et par le fait, s’identifie à l’apôtre.

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En effet, ce frontispice représente un vieillard, drapé d’un costume à l’antique, désignant de l’index

un livre et tenant dans l’autre un stylet. Sur la table sont aussi posés un burin ainsi qu’une plaque au

sommet arrondi qui évoquent à la fois la forme de l’Apocalypse figurée et les tablettes de cuivre à

graver : la signature de l’artiste y figure. Sans doute faut-il voir dans cette gravure une auto-

projection de l’artiste où il insiste sur le parallèle entre la condition de l’Évangéliste et la sienne, tous

deux traducteurs de la vision « d’événements divins », Duvet usant logiquement dans ce but, du

procédé de la gravure.

Son respect du texte biblique est total dans le traitement des personnages et des allégories (les

quatre cavaliers, « les cent quarante-quatre-mille de toutes les tribus d’Israël », la Bête, la Jérusalem

céleste…).

2) Une œuvre singulière

On ne peut nier la parenté évidente avec l’Apocalypse gravée par Dürer (seconde édition, de 1511).

En revanche, les différences sont notables : usant de la technique de la xylographie, d’un dessin

élégant, la composition de Dürer est d’une grande simplicité, très aérée. Si Duvet conserve quelques

personnages et des compositions de l’ouvrage allemand (ils sont inversés sur la page, attestant de la

copie), l’artiste crée sur ses planches des univers saturés, déstructurés où se mêlent détails

imaginaires et réalistes, notamment des éléments d’architecture, dans un cadre systématiquement

cintré qui se démarque du travail de Dürer. Il semble vouloir recouvrir tout l’espace dont il dispose, à

la manière d’un orfèvre. Pour C.Eisler*, cette mise en scène de l’image serait une transcription

d’autant d’épisodes furtifs associés aux entrées royales voire aux mystères qui se jouaient sur les

parvis des églises, très populaires à l’époque. Succession de tableaux animés, ces événements

mêlent, comme le fait Duvet sur ses planches, réalisme et surnaturel au sein d’une même

représentation.

Le graveur a une manière singulière d’exprimer les méandres de sa pensée et sa vision esthétique. Il

traduit sa pensée, sa foi, ses visions oniriques par la plastique : au moyen de la lumière et des ombres

qui créent des formes mais surtout par la résistance de ces formes à la lumière car celle-ci se fraye

difficilement un chemin dans cet univers de chaos. Le burin crée des traits tantôt fins, tantôt épais,

souvent serrés, créant de larges surfaces noires.

Les multiples courbes, les torsions des corps, l’enroulement des drapés et des chevelures créent un

climat d’étrangeté proche du fantastique.

C’est toute la complexité de la pensée de Duvet et celle d’une époque tourmentée par les crises

religieuses que le spectateur peut ressentir au contact de cette Apocalypse.

*Colin Eisler ( 1931-…) est professeur à l’Institut des Beaux-Arts de l’université de N.York.

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III) Présentation de quelques planches

1) La révélation de saint Jean ou saint Jean dans l’île de Patmos. (Apocalypse 1,1-9)

Tout en étant saturée d’éléments disparates, cette gravure est fortement structurée par les éléments

d’architecture Renaissance du second plan. C. Eisler y a vu une représentation de la cathédrale Saint-

Mammès de Langres (dévolue dans un premier temps à saint Jean). Le monument semble faire le lien

entre les mondes terrestre (le puits, les hommes) et céleste (les nuées, Dieu). L’irréalité de l’espace

convoque néanmoins l’imaginaire.

Quelles que soient les libertés que Duvet peut prendre parfois avec la représentation de la

perspective, le traitement maîtrisé de ce monument prouve que ce n’est pas par maladresse mais

plutôt par choix esthétique et symbolique. Il procède davantage comme un cartonnier de tapisserie

dans la disposition de ses scènes, ignorant délibérément la ligne de fuite, les plans successifs,

l’évocation de la distance par la taille des personnages.

Le saint est en position centrale, recevant le message divin par « une voix forte comme une

trompette », instrument concrètement représenté ici. La posture du personnage est proche de celle

de la Femme Pensive de Marc-Antoine.

En face du saint, la représentation, citée dans le texte biblique, des « quatre êtres vivants qui

entourent le trône de Dieu » (l’aigle, le lion, le taureau et l’homme), devenus les symboles des

quatre évangélistes. Satan est représenté comme une bête tombant dans un puits.

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Dans le limbe, la Sainte Trinité (fig. 1), détentrice du Livre aux sept sceaux, domine la scène. Elle est

placée en outre sous le double patronage de Noé (à gauche, tenant l’Arche, fig.2) et d’Abraham à

droite (prêt au sacrifice de son fils Isaac, fig.3).

Le texte et les mots occupent dans cette planche une place importante :

Dans le livre : IN PRINCIPIO ERAT VERBVM (Au commencement était le Verbe)

Dans le limbe : TRES SIMVL AEQUALES PERSONAE SVNT DEVS VNVS PRINCIPVM ET FINIS RERVM

TESTATE IOHANNE (Trois personnes égales ensemble ne font qu’un seul dieu, principe et fin de tout,

comme l’atteste Jean.)

L’inscription sur le piédestal à gauche : B IOH SUB/PERTINACE/PRINCIP/AB/EXILIO REDIIT/ EPHESVS

VBI/ EVAGEL OIM NO/VISSIMO SCRIPSIT/QUOD A XPI/ DIVINA ILLA/ NATIVITATE/INCHOAVIT

VT/EBIONITARV/HERESIM MALA/REFELLERET (Saint Jean apôtre, sous le prince Pertinax, délivré de

son exil, revint à Ephèse où il écrivit un Evangile, le dernier de tous, qu’il commença à partir de la

naissance du Christ pour réfuter la mauvaise hérésie des Ebonites*)

*Les Ebonites n’étaient ni Juifs ni Chrétiens et considéraient que Jésus était né de l’union de Marie et

de Joseph. Cette mention de l’hérésie pourrait être une allusion à la réaction de l’Eglise catholique

contre les attaques dont elle fait l’objet à l’époque de Jean Duvet.

Toutes les planches portent la signature de l’artiste, ici sur une tablette sur le sol à droite : IOHA /

NNES/ FAC ; DU/ VET.

Fig.2

Fig.1

Fig.3

3.

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2) Saint Jean voit les quatre cavaliers. (Apocalypse 6,1 ; 6-8)

Les quatre cavaliers de l’Apocalypse de Jean sont des figures mystérieuses qui apparaissent au

Chapitre 6. Ce sont des créatures célestes dont l’interprétation varie selon les époques. Leur

présence augure la fin des temps annoncée par l’ouverture des quatre premiers des sept sceaux

que l’Agneau brise progressivement.

- Le premier cavalier est monté sur un cheval blanc, il porte une couronne et un arc, il part

« en vainqueur pour vaincre encore » (Fig1.)

- Le deuxième cavalier porte une épée sur un cheval « rouge feu » (Fig.2)

- Le troisième est monté sur un cheval noir et tient dans sa main une balance ( Fig.3)

- Le quatrième chevauche sur un « cheval verdâtre ». Celui qui le montait « se nomme la

Mort » dit le texte de saint Jean. (Fig.4)

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Chaque cavalier possède donc une couleur et un attribut qui le différencie des autres et lui

donne une mission particulière. « Et il leur fut donné pouvoir sur le quart de la terre, pour tuer

par l'épée, par la famine, par la maladie mortelle, et par les bêtes sauvages de la terre. ».

Bien qu’il vienne en tête de cette horde assassine, le cavalier blanc, par le symbolisme de sa

couleur, représente peut-être une valeur plus positive. Certains auteurs (Irénée de Lyon,

Bossuet…) y ont vu une image du Christ ou de la prédication triomphante.

Les autres cavaliers ont pu être identifiés comme une représentation de la faim (la balance sert à

peser les aliments), de la guerre (l’épée) et des épidémies. Autant de fléaux destructeurs des

humains.

Dans la gravure, le rouge du cheval central est suggéré par le caractère flamboyant de la crinière

et le panache de sa parure. L’aspect famélique du dernier cheval évoque quant à lui un squelette

et le pouvoir mortifère de son maître.

Du sobre alignement de Dürer , Duvet passe a une scène chaotique où seuls se distinguent

nettement le cavalier à l’arc et l’ange dans les nuées. La scène évoque le drame par la torsion et

l’enchevêtrement des corps, les figures fragmentées, les humains écrasés par les chevaux.

Fig.1

Fig.4

Fig.3

Fig.2

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Sur les tablettes : HISTORIA/CAPIT 6/APOCAL ; JOHA N/NES FAC DV/VET

La disposition de l’ensemble rappelle certains portails romans illustrant le Jugement dernier et le

traitement infligés aux âmes impures : même imbrication des corps torturés, même souffrance

lisible sur les visages, même punition impitoyable à laquelle n’échappe aucun des damnés.

L’analogie est renforcée par le cadrage très restreint de la scène qui figure souvent sur le tympan

cintré des églises (celui de Sainte Foy de Conques, par exemple).

Plus largement, la gravure de Duvet fait penser aux multiples représentations du Jugement

dernier de la fin du XVe siècle (Memling, Bosch, Holbein, Bruegel, Dürer…). Pour avoir un aperçu

du traitement de ce thème jusqu’à nos jours, voir ici, avec une mention spéciale pour la bible

praguoise de Melantrich (1549) dont la gravure est proche de celle de Duvet, très dynamique,

animée d’un mouvement cyclique qui suggère le caractère implacable des tourments infligés aux

Hommes aussi bien que la colère divine.

3) La femme revêtue de soleil et le monstre à sept têtes. (Apocalypse 12, 1-5)

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«Il apparut un grand signe dans le ciel: une femme enveloppée du soleil avec la lune sous

ses pieds et sur la tête une couronne de douze étoiles. Elle est enceinte et elle crie,

tourmentée par les douleurs de l'enfantement. Il parut un autre signe dans le ciel ; voici un

grand dragon rouge feu avec sept têtes et dix cornes et sept diadèmes sur ses têtes. Sa

queue entraîne le tiers des étoiles du ciel et les jette sur la terre ; et le dragon se tient

devant la femme qui va enfanter pour dévorer son enfant quand elle enfantera. Elle

enfanta un fils, un mâle qui devait [gouverner] toutes les nations […] Et son enfant fut

enlevé vers Dieu et son trône. »

On remarquera ici encore l’extrême fidélité de Duvet au texte biblique.

Duvet a très minutieusement rendu l’aspect hideux du monstre en déformant son faciès, qu’il

le représente de trois-quart ou de profil. Le burin excelle à rendre la texture des écailles, les

stries de la queue, les défenses et les griffes acérées.

.

La lourdeur de la bête s’oppose à l’allure aérienne de la femme, en équilibre sur le croissant

de lune, en quasi-lévitation, sereine dans sa mandorle lumineuse. Chez elle, la finesse du

drapé et de la chevelure se prolonge dans le traitement des ailes et celui de la couronne

d’étoiles.

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Par sa posture et son vêtement, cette femme rappelle une Vierge à l’enfant gravée

antérieurement par Duvet : elle aussi se tient sur un croissant de lune, et porte une couronne.

Elle présente beaucoup de similitude avec la Lucrèce de Marc-Antoine, d’après Raphaël.

Cette femme avec «la lune sous ses pieds » peut être vue comme Marie après son assomption. Selon cette interprétation, l'« enfant mâle » serait une référence à Jésus, puisqu'il est destiné à « mener toutes les nations avec un sceptre de fer ». Le dragon essayant de dévorer le nouveau-né au moment de sa naissance pourrait être une allusion à la tentative d'Hérode le Grand pour assassiner Jésus. Enfin, il est dit dans la Bible que, après sa mort et sa résurrection, Jésus s’élève « jusqu'auprès de Dieu son père ». Mais pour certains commentateurs bibliques, il s'agit là d'une figure allégorique, d'une mère mystique, qui représenterait l'Église. En effet, dans plusieurs passages de la Bible, c’est une femme qui symbolise l'Eglise. Jérémie compare la fille de Sion [l'Eglise] à une femme belle et délicate (Jér. 6, 2). Paul compare l'église à une vierge pure donnée à Christ en mariage (2 Cor. 11, 2). Le Cantique de Salomon peut s’interpréter aussi comme exaltant la rencontre du Christ promis à sa fiancée, l'Eglise. Dans la prophétie biblique, la véritable Eglise peut donc revêtir les traits d’une femme pure; et par opposition, c’est une prostituée qui représenterait l'Eglise déchue et apostate (Apocalypse 17,1-6). La "lune sous ses pieds", outre la poésie de l’image, peut s’entendre comme un symbole, quelle que soit l’interprétation accordée la figure féminine : La Vierge ou l’Eglise reflèterait l’esprit divin tout comme la lune reflète la lumière du soleil. La "couronne de douze étoiles" peut, elle, être comprise comme représentant les douze apôtres qui ont fondé l'Eglise.

4) Le combat de saint Michel et le dragon (Apocalypse 12, 7-9)

Cet épisode a été maintes fois illustré par les artistes depuis le Moyen Age.

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D’après l’Ancien Testament (Livre d’Isaïe), Lucifer est un puissant archange , « porteur de

lumière », déchu à l'origine des temps pour avoir défié Dieu. Il a entraîné d’autres anges

rebelles dans sa chute (« un tiers des anges » dit la Bible).

Il est assimilé par la tradition chrétienne à Satan- Azael, présenté dans le Livre d'Hénoch

comme ayant « appris aux hommes à fabriquer des épées, des armes, des boucliers, des

cuirasses ».

L’archange saint Michel, (étymologiquement EL « Dieu » et MI, CHA « qui est semblable »)

est décrit dans l’Apocalypse comme l’envoyé de Dieu pour combattre Satan lui-même,

symbolisé par un dragon (serpent et dragon restent longtemps assimilés dans l’iconographie

chrétienne). Ce combat représente la lutte et le triomphe du Bien sur le Mal.

« Survint une guerre au ciel. Michel et ses messagers firent la guerre au dragon ; et le

dragon et ses messagers firent la guerre, mais il ne fut pas de force, et on ne trouva plus

leur place au ciel. Il fut jeté, le dragon, le grand, l’antique serpent qu’on appelle le diviseur

et l’Adversaire [celui qui est appelé le diable de Satan], qui égare l’Univers entier, il fut jeté

sur la terre et ses messagers avec lui.»

Ici, Duvet surcharge les deux-tiers de la planche pour montrer l’intensité des combats. Les

anges sont aux prises avec les envoyés de Satan dans une mêlée confuse. On distingue sous

la lueur céleste, l’étendard à croix blanche du saint, porté par les armées divines. De droite à

gauche, trois anges couronnés, les ailes déployées, portent tour à tour un poignard, une

lance et un arc. Ils sont confrontés à des démons cornus sur lesquels ils ont visiblement

l’avantage.

Dans sa jeunesse, Jean Duvet avait déjà gravé Saint

Michel, dans une posture et une représentation qui

montraient l’influence de l’école italienne et de

Raphaël sur son travail : il en avait retenu le

hanchement caractéristique, la rhétorique du geste

et du corps (le doigt pointé vers le ciel dont il est

l’envoyé), le poids un peu exagéré de la figure. Le

saint, portant cuirasse et jambières l’antique,

écrasait littéralement un démon traité en raccourci

d’une manière un peu maladroite.

Duvet offre ici une interprétation beaucoup plus

personnelle du saint guerrier.

L’archange saint Michel figure à gauche de la

planche, dans une posture d’attaque, un pied sur la

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poitrine du Malin et s’apprêtant à le terrasser. Il porte une simple tunique savamment

drapée, retenue par des agrafes. Le visage des anges combattants exprime une grande

sérénité, contrairement à ceux des quatre cavaliers du Chapitre 6.

Le diable gît au sol, écartelé, grimaçant, ses larges ailes écrasées sous son poids. On

distingue déjà à son cou la chaîne avec laquelle il sera « enchaîné pour mille ans »

(Apocalypse, 20,1-2) . L’abîme dans lequel il sera précipité prend la forme d’un puits sur

lequel on retrouve la signature de Jean Duvet.

En tant que saint victorieux, l’archange fait l’objet d’une vénération particulière de la part

des rois de France dès le VIIIe siècle. Il devient l’ange tutélaire du royaume.

L’ordre de chevalerie de Saint Michel est fondé par Louis XI en 1469 pour s’assurer un réseau

de fidélité personnel après la guerre de cent ans.

On a recensé deux planches de Duvet consacrées à la majesté royale d’Henri II. Celui-ci

s’identifie par les fleurs de lys, les H couronnés, les croissants de lune et, pour l’une d’entre

elles, par la présence de saint Rémi tenant la sainte ampoule. Le roi est représenté en saint

Michel terrassant le dragon, dans une posture et un costume très proches de ceux de

l’Apocalypse figurée. Dans les deux planches, le démon anéanti ressemble en tous points à

celui de l’Apocalypse figurée.

Dans la salle des peintures du Musée, on trouve une autre

représentation de saint Michel terrassant le démon (détail ci-contre :

une huile sur toile de Jean Tassel, XVIIe siècle).

On pourra avec profit comparer les deux œuvres et remarquer les

différences de traitement de la figure du saint et de celle du démon.

Conclusion :

Le travail de Jean Duvet ne s’inscrit pas dans la culture dominante de son époque. Il s’approprie de

façon un peu caricaturale le classicisme italien dont il a connaissance, véhiculé entre autres, par

l’Ecole de Fontainebleau. Mélange de dextérité et de maladresse, de curiosité envers des innovations

qu’il réfute ou comprend mal, son œuvre procède d’une logique moins rationnelle que symbolique.

Duvet est un artiste contemporain des questions et des angoisses de son temps : désir d’étendre ses

connaissances, de mieux comprendre un monde récemment dilaté mais aussi de résoudre de

nouveaux problèmes, notamment dans le domaine religieux. La Chrétienté connaît en effet sa

deuxième grande secousse après le schisme de 1054 : Luther et Calvin font vaciller les bases d’une

Eglise toute puissante. L'artiste pourrait vouloir rendre compte d'un monde où s'affrontent « le

Bien » et « le Mal » et où demeure vivante l'espérance du Salut.

L’artiste vieillissant recherche peut-être une exacerbation de sa propre foi à travers cette œuvre

atypique qu’est l’Apocalypse.

Celle-ci pourrait donc se comprendre comme le testament religieux d’un artiste en fin de vie,

tourmenté par les interrogations de son temps et hanté par ses visions personnelles.

C’est cette expression passionnée et passionnante, par laquelle s’exprime un individualisme sans

compromis, qui fait de Duvet un artiste très proche de la sensibilité moderne. Et c’est pourquoi sans

doute, il parvient à tant nous émouvoir à cinq siècles de distance.

Crédits photographiques : ©Arnaud Vaillant, Musées de Langres et Sylvain Riandet, Ville de Langres.

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Bibliographie :

Chérix, Christophe. Jean Duvet, catalogue de l’exposition, Cabinet des Estampes, Genève, 1996.

Catalogue de l’exposition Jean Duvet, Le Maître à la licorne, 1985.

Bulletin de la Shal, N°1, 1880.

Zerner, Henri. L’art de la Renaissance en France, Flammarion, 1986.

Bersier, Jean-Etienne. Jean Duvet, le Maître à la Licorne, Paris, 1977.

La nouvelle traduction de la Bible sous la direction de Jacques Brault et Jean-Pierre Prévost, Bayard,

2001.

IV) Pistes pédagogiques

L’Apocalypse de Jean Duvet est une œuvre complexe qui génère à elle seule quantité de pistes

d’exploitation en Histoire des Arts (première partie).

Pour dilater les possibilités d’étude, le thème de la Représentation du Mal dans les arts occidentaux a

donné lieu à un développement dans une seconde partie.

Place dans les programmes de collèges et de lycées

A / La Renaissance Collèges : Classe de 5e : Du IXe s. à la fin du XVIIe s. Lycées : (Extraits du B.O n°4 DU 29.4.2010 et du 19.2.2009) Classes de Seconde : « Les Hommes de la Renaissance, un artiste de la Renaissance dans la société de son temps. » Lycées professionnels : « …On présente la Renaissance comme un mouvement d’innovations dans tous les domaines de la culture, arts et savoirs, revendiquant des héritages de l’Antiquité. On en présente les grandes figures que sont l’artiste et...en montre la diffusion notamment par l’imprimerie… »

B/ Histoire des Arts (Extraits du B.O. n° 32 du 28.8.2008) Collèges : Les périodes historiques

- Classe de 6e : De l’Antiquité au IXe s. et Classe de 5e : Du IXe s. à la fin du XVIIe s. Les thématiques qui peuvent être abordées avec cette œuvre sont : - « Arts, espace, temps » - « Arts, mythes et religions » - « Arts, techniques, expressions » - « Arts, ruptures, continuités ».

Lycées : Champ anthropologique : « Arts, réalités, imaginaires » ; « Arts et sacré »

Champ historique et social : « Arts, mémoires, témoignages, engagements ». Champ esthétique : « Arts, goût, esthétiques »

« …Situées au croisement des regards disciplinaires, ces thématiques permettent d’aborder les œuvres sous

des perspectives variées et de les situer dans leur contexte intellectuel, historique, social, esthétique,

Elles font émerger des interrogations et des problématiques porteuses de sens… »

1ère partie : Quelques questionnements permettant d’aborder l’Apocalypse figurée.

Le traitement de l’espace et du temps dans une œuvre d’art. Comment sont construites,

découpées les séquences de la narration ?

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Comment rendre compte de l’espace ? L’architecture (idéalisée, stylisée ici), la

perspective, la définition des espaces (ciel / terre..) les espaces imaginaires (la Jérusalem

céleste). Quelle est la valeur du cadre ?

Le temps : Comment sont rendus / perdus l’enchainement du récit, la chronologie, la

durée ?

la place de l’Homme (quels hommes ?) dans l’univers relaté par cette œuvre

Dans le chaos/ désordre ; l’Harmonie / l’ordre voulu par la divinité ?

L’Homme face aux créatures célestes ou imaginaires (anges, cavaliers destructeurs,

démons, Satan…)

La relation entre l’œuvre d’art et les pouvoirs

Quels enjeux religieux dans cette représentation ?

Quelle relation avec le pouvoir politique ? avec l’unification du royaume au XVIe siècle

(Cf Henri II en saint Michel).

Quels emblèmes, codes et symboles sont visibles ici ?

Le mythe dans l’art et ses différents modes d’expression

- L’Apocalypse est sœur des grands récits antiques :

les mythes de Mésopotamie (Babylone et les légendes mésopotamiennes),

les références aux récits de l’Ancien Testament (L’Arche de Noé, Hérode, les

sauterelles ...)

l’allusion au culte impérial (adoration de la Bête couronnée…)

- Le millénarisme dans l’art :

Tenture de l’Apocalypse d’Angers XIVe siècle, celle de Lurçat (Le chant du monde,

1947)

Le vitrail de la Sainte Chapelle de Vincennes (1559), de Saint Maurice d’Angers

Les portes de l’église Saint Jean de Dôle par M.Calka, 1964 ; le tympan d’Autun

XIIe siècle

Les fresques de l’église de Manosque par J.Carzou (1957)

La peinture de la Dirosapocalypse de Di Rossa (1985)

Le Dies Irae des messes Requiem (celui de Mozart en particulier, 1790)

Le septième sceau de Bergman (1957)

le Sacré source d’inspiration pour l’Art

Dans le Musée, multiples exemples comme dans l’Apocalypse figurée :

Personnages (Satan, le Christ, la femme sur le croissant de lune/ la Vierge…)

Lieux et gestes symboliques : l’Enfer, le Désert ,les Vendanges, Jérusalem céleste….

Thèmes (le combat de saint Michel, la Chute des anges rebelles…)

Formes (mandorle, cintre, l’architecture religieuse …)

Objets du culte (ciboires, lutrin, Livre, chandeliers…)

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Duvet et la représentation : rupture ou continuité ?

Pas ou peu de perspective, pas d’échelle dans la représentation des personnages

(refus de l’héritage renaissant ?)

Un récit parfois « étagé » comme dans les tapisseries ou représentation médiévales

Mais pas de respect de la norme :

- Des personnages atypiques (saint Michel en toge, l’Ange aux jambes-colonnes, la femme

couronnée de soleil…)

- Des images saturées, peu lisibles, peu structurées et donc peu « pédagogiques » selon les

critères du prosélytisme de l’époque.

- L’utilisation du burin : technique en de la taille en creux et non plus en relief comme en

xylographie : Duvet est l’un des premiers à l’expérimenter en France.

2ème partie : Proposition d’un thème d’étude transdisciplinaire :

La représentation du Mal dans les arts occidentaux

L’origine de Satan est donnée par une description allégorique dans l’Ancien Testament (Ezechiel 28,

11-15). Il est le principal adversaire (=Satan) de Dieu et de l'homme. En vertu de sa nature même, il

n'agit que dans un esprit de méchanceté ("Bélial" = méchanceté) et il est à l'origine du mal sur la

terre (Genèse 3.1-6; Apocalypse 12.9).

A partir du VIe siècle, les Pères de l’Eglise (Saint Augustin notamment) présentent Lucifer non pas

comme un principe, mais comme le premier des anges, créature spirituelle chassée du paradis

céleste pour avoir voulu égaler Dieu par son orgueil. Dieu permet ainsi l’existence du mal car il est à

l’origine d’essence divine. Il en fait une force destinée à éprouver la foi et la capacité de résistance

des Hommes à la tentation.

Le legs de la Bible a alimenté les figurations chrétiennes du Moyen Age sous des apparences

multiformes et de nombreux noms – Lucifer, Belzébuth, Bélial, démon, diable, Satan etc…

Ces représentations anciennes ont inspiré la figuration du Mal dans les siècles suivants et inspirent

encore celles de nos jours.

Selon l’historien Robert Muchembled*, dans les années 1550-1650, la littérature européenne et les

arts en général développent l’image d’un Satan omniprésent, envoyé d’une divinité impitoyable. Cet

archétype révèle une vision tragique de la nature humaine et a pour but de forger les consciences,

les Hommes devant choisir entre ce que l’Eglise a défini comme le Bien et le Mal. Il s'agit d'une

littérature au service d'un endoctrinement en faveur de la contrition dont la première démarche est

la crainte salutaire.

C’est dans ce contexte que naît le mythe de Faust. En 1587 paraît dans le Saint Empire un écrit

anonyme Historia von Johann Fausten, publié par l'éditeur Johann Spies, bientôt repris par l’anglais

Marlow (1593) bien avant de devenir l’œuvre célèbre de Goethe (1808 et 1832).

Les discours démonologiques de la fin du Moyen âge (procès en sorcellerie, images de l’Enfer,

possession…) ont, selon l’historien, contribué à forger un imaginaire commun occidental. La figure

emblématique de Satan aurait participé ainsi à la construction identitaire « culpabilisée » du

continent européen, par-delà les dissensions religieuses du XVIe siècle.

*Robert Muchembled. Une histoire du diable XIIe-XXe siècle, Point Histoire, 2002.

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Issue du Concile de Trente, l'Eglise de la Contre-réforme vit encore quelques décennies au temps de

la chasse aux sorcières, puis dès la fin du XVIIe siècle un contexte plus favorable au rationalisme

commence à faire reculer l'image du Diable durant le siècle des Lumières. A partir de cette époque triomphe une vision déchristianisée et désacralisée, celle de la Bête en

l'Homme. Avec le Romantisme, le Diable connaît une nouvelle diffusion, le satanisme devient à la mode et le

symbolisme de la fin du XIXe siècle ne le dédaigne pas. Mais déjà il s'égare dans la banalisation de

l'imagerie comique et l'emploi dans la littérature pamphlétaire jusqu'à la Belle Epoque.

Le diable est devenu un personnage essentiel du théâtre populaire et notamment du vaudeville, qui

connaît son apothéose entre 1830 et 1860. À la fin du XIXe siècle, on recourt volontiers au diable

pour portraiturer des personnages publics, politiques ou intellectuels. L’iconographie diabolique

banalisée de la Belle Époque se diffuse dans la caricature de presse et à la publicité.

Cent ans plus tard, le diable s'est reconverti dans le film d'horreur, la BD érotique, le hard rock ainsi

que la mode punk et a investi le marché du jeu vidéo.

Le diable et les démons sont donc des figures centrales dans l'imaginaire occidental et sont toujours

aussi vivantes, comme l'illustrent la littérature contemporaine, le cinéma, la publicité ...

Il est aisé de définir quelques thèmes qui peuvent servir de point de départ pour une étude

transdisciplinaire.

Les propositions qui suivent ont pour but de suggérer quelques thèmes qui sont autant de pistes

permettant de faire dialoguer différents enseignements (Lettres Classiques et Modernes, Histoire -

des religions, des mentalités, Philosophie, Histoire des Arts…).

1) Satan, l’ange déchu

Textes :

- La Bible, Ancien Testament, Esaïe 14 : 12-14 et Ezéchiel 28 : 12-18.

- Saint Augustin, De Genesi ad litteram, III, IX, 13 ; XI, XXXIII, 30.

- Victor Hugo. La fin de Satan, Poésies posthumes, 1886.

Iconographie :

- P.P.Rubbens. La chute des anges rebelles,1620.

- Lucas Signorelli. L’Enfer fresque de la cathédrale d’Orvietto, 1499.

- Une vision de la beauté originelle des anges rebelles avec le folio 64 des Très

riches heures du Duc de Berry, vers 1420.

- Jean-Jacques Feuchère, Satan, Sculpture de 1833, au Louvre. Au Musée de Langres : La chute des anges rebelles. Attribué à Charles

Lebrun, Seconde moitié du XVIIe siècle.

2) Le diable, tourmenteur des âmes damnées

Textes :

- Jacques de Voragine. La légende Dorée (nombreux exemples de châtiments

infernaux), vers 1260.

- Dante Alighieri. La divine Comédie, Chant III, début XIVe siècle.

Iconographie :

- Un tympan d’église, par exemple, celui du portail central de la cathédrale de

Strasbourg où la figure du démon est associée à l’image de l’enfer ainsi qu’au

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fameux bloarch (littéralement « cul nu » en allemand et « cul qui souffle » en

alsacien).

- Herrade de Landsberg. Hortus Deliciarum, XIIe siècle.

- Folio 108 des Très riches heures du Duc de Berry, vers 1420.

3) Le combat du Bien contre le Mal

Textes :

- La Bible, Le nouveau Testament, Apocalypse (Voir ci-dessus)

- Jacques de Voragine. La légende Dorée, vers 1260

Iconographie :

- Pour Saint Michel et le démon voir ci-dessus.

- Paul Delaroche. Saint Georges terrassant le Dragon, Sculpture de 1832,

visible au Louvre.

- Sur le mythe du dragon et des combats contre le mal, voir le site du CRDP de

Versailles

4) Le pacte avec le Diable

Textes :

- Johann Wolfgang von Goethe. Faust, 1798. Traduction de Jean Amsler, Folio

Théâtre n°26, Gallimard, 1995.

- Mikhaël Boulgakov. Le maître et Marguerite, 1927. Pocket 4229, 2006 (Cette

fois-ci c’est une femme qui pactise avec le démon).

- Paul Valery, Mon Faust, 1941, Gallimard.

Musique :

- Charles Gounod. Faust, opéra de 1869. Mephisto y devient un personnage

manipulateur maléfique. Voir le dossier très complet du CRDP de Reims sur le

PREAC.

- Hector Berlioz confie le livret de sa Damnation de Faust à Gérard de Nerval

en 1846 et en fait une sorte d’autoportrait musical.

Iconographie :

Une exposition virtuelle de la BNF sur les gravures de Delacroix ( suivre le

lien)

La beauté du Diable, Film de René Clair, 1950. Suivre le lien pour voir

l’extrait.

5) Au service du Diable : démons et sorcières

Textes :

- William Shakespeare. Macbeth, Scène 1, Acte IV, 1606.

- Nathaniel Hawthorne. La lettre écarlate, 1850. Folio classique, Préface de

Julien Green.

- Alexandre Pouchkine. Les démons, Poèmes, 1830. Suivre le lien pour

entendre déclamer le poème en russe et en français.

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Iconographie :

- Francisco Goya. Le sabbat des sorcières, 1798.

- Au Musée de Langres, Claude Gillot, Sabbats, eau forte, vers 1710.

Les visiteurs du soir, Film de Marcel Carné, 1942.

6) Satan désacralisé

Textes :

- Jacques Cazotte. Le diable amoureux, 1772. Librio.

- Pierre Gripari. Dieu, diable et autres contes de menterie, Folio, 1980.

- Un conte traditionnel (la conteuse Elisa De Maury a consacré un CD entier

à des histoires liées au diable. Ecouter par exemple, sur Youtub, Le diable

et la tissandière).

Iconographie :

- Une caricature par exemple :

Talleyrand au congrès de Vienne : Analyse sur le site de L’Histoire par

l’image .

- Le diable l’emporte (1815) : Napoléon emporté aux enfers (références à

Michel Ange et à Carpeaux). Fonds Gallica.

Le diable apparait une vingtaine de fois dans le cinéma de Mélies qui joue lui-

même ce rôle qui était le personnage préféré de l’acteur. Voir ici le dossier du

réseau Canope sur les « diableries » de Mélies.

Dossier réalisé par C.Lecomte-Gillot pour les services éducatifs des musées de Langres, janvier-juin 2015.