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Dossier pédagogique Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse 1 Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse Informations pratiques Musée de l'Hôtel-Dieu 5, Grand-Rue 2900 Porrentruy 032 466 72 72 [email protected] Dates : du 21 septembre au 1 er décembre 2013 Horaire Tout public : du mardi au dimanche, de 14 à 17 heures. Pour les écoles : du lundi au vendredi, à toute heure de la journée, sur rendez-vous. Réservation indispensable au moins 24h à l'avance (jours ouvrables). Les enseignants qui visitent l’exposition en préparation d’une visite de classe entrent gratuitement (s’annoncer à l’accueil). De plus, ils reçoivent gracieusement le catalogue d’exposition afin de préparer leur visite. La visite est gratuite pour les écoles jurassiennes. Prix d'une visite scolaire guidée par les soins du Musée : CHF 50.00. L'exposition "Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse" est recommandée pour les enfants à partir de 7 ans. Chaque tranche d’âge y trouvera matière à réflexion et à étonnement. Dans le présent dossier, nous nous efforçons de donner des pistes pour tous les degrés d'enseignement. Nous vous invitons à adapter la visite à l'âge et à l'intérêt de vos élèves. Certains objets n’étant pas complètement protégés et parfois à portée de main, nous vous prions de rappeler à vos élèves qu’ils n’osent toucher les objets « qu’avec les yeux » ! Pour assurer la pertinence et l'intérêt de la visite, il vous est recommandé de la préparer en classe avant votre venue dans l’exposition. Nous nous tenons volontiers à votre disposition. Nous nous réjouissons de vous accueillir prochainement au Musée ! Dossier réalisé par : Ursule Babey, chargée d’inventaire Anne Schild, conservatrice 27.09.2013

Jean-Pierre Droz - L horloger de Son Altesse pédagogique JPDroz... · 2013-10-21 · Dossier pédagogique Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse 1 Jean-Pierre Droz - L’horloger

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Dossier pédagogique Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse

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Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse

Informations pratiques

Musée de l'Hôtel-Dieu 5, Grand-Rue 2900 Porrentruy 032 466 72 72 [email protected] Dates : du 21 septembre au 1er décembre 2013

Horaire Tout public : du mardi au dimanche, de 14 à 17 heures. Pour les écoles : du lundi au vendredi, à toute heure de la journée, sur rendez-vous. Réservation indispensable au moins 24h à l'avance (jours ouvrables). Les enseignants qui visitent l’exposition en préparation d’une visite de classe entrent gratuitement (s’annoncer à l’accueil). De plus, ils reçoivent gracieusement le catalogue d’exposition afin de préparer leur visite. La visite est gratuite pour les écoles jurassiennes. Prix d'une visite scolaire guidée par les soins du Musée : CHF 50.00. L'exposition "Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse" est recommandée pour les enfants à partir de 7 ans. Chaque tranche d’âge y trouvera matière à réflexion et à étonnement. Dans le présent dossier, nous nous efforçons de donner des pistes pour tous les degrés d'enseignement. Nous vous invitons à adapter la visite à l'âge et à l'intérêt de vos élèves. Certains objets n’étant pas complètement protégés et parfois à portée de main, nous vous prions de rappeler à vos élèves qu’ils n’osent toucher les objets « qu’avec les yeux » ! Pour assurer la pertinence et l'intérêt de la visite, il vous est recommandé de la préparer en classe avant votre venue dans l’exposition. Nous nous tenons volontiers à votre disposition. Nous nous réjouissons de vous accueillir prochainement au Musée !

Dossier réalisé par :

Ursule Babey, chargée d’inventaire Anne Schild, conservatrice

27.09.2013

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Pistes pédagogiques

Introduction destinée aux enseignants Les six textes suivants correspondent aux textes de salle que vous retrouverez dans l’exposition. Ils sont extraits et adaptés du texte du catalogue de l’exposition, rédigé

1. Jean-Pierre Droz (1713-1780)

Jean-Pierre Droz naît le 1er octobre 1713 dans la paroisse de Renan, selon toute vraisemblance à La Ferrière. Ses parents, Joseph et Marie née Robert, habitent le hameau des Rochats, toujours existant et situé «sous le Crêt» de La Ferrière, en deçà du village principal, au bord de la route actuelle menant à La Chaux-d'Abel. Il aurait eu trois frères et trois sœurs.

On ignore tout de sa jeunesse et de son apprentissage, car la première trace laissée par Jean-Pierre Droz date de 1739 ou 1740, année de son premier mariage avec Marie Madeleine, fille d'Abraham Droz. Il commence par s'établir chez son beau-père avant de revenir aux Rochats en 1741.

Son père meurt en 1744, année de naissance de son premier fils. Au décès de son père, il hérite d'une partie de ses dettes auxquelles viennent s’ajouter celles de son frère Joseph qui a repris la forge paternelle et pour lequel Jean-Pierre s’était porté caution. Son épouse décède en janvier 1752 et il doit alors partager ses biens avec son fils, ce qui représente une somme importante à débourser. Veuf avec un enfant, la situation est intenable à l'époque: il se remarie le 24 novembre de la même année avec une veuve qui a déjà elle-même une fille. De ce deuxième lit naît Henriette en 1753. Alors que Jean-Pierre Droz tente de refonder une famille, son frère Joseph et sa belle-sœur décèdent en 1754, laissant huit enfants dans une misère totale. Dans un premier temps en tout cas, Jean-Pierre Droz décide d'accueillir ses neveux et nièces.

En 1755, sa deuxième femme et leur fille Henriette tombent malades. Pour faire face à ses obligations et aux soins, Jean-Pierre Droz doit emprunter de l’argent et hypothèque sa maison pour la première fois. Toutes deux décèdent en 1756. Il se retrouve avec les dettes héritées de son père, celles contractées à l'égard de son fils et de son frère, ses propres emprunts et les difficultés de ses neveux et nièces. Pour rembourser le tout, il vend la maison des Rochats.

Il achète alors l'ancien cabaret de la Crosse de Bâle, au milieu du village de Renan et il se remarie en 1757 avec Elisabeth, fille d'Abraham Richard, meunier de Sonvilier. Dans l'incapacité de s'acquitter des traites de la maison dans les temps, il doit l'abandonner en 1758 et achète à l'horloger Jean-Jacques Robert la maison des Etoblons sur Renan qu’il ne quittera plus. Trois enfants naissent de ce troisième mariage. Dès la fin des années 1750, les problèmes financiers semblent disparaître et la situation familiale devient plus paisible. Jean-Pierre Droz décède en 1780 aux Etoblons. Le 1er mars 1781, sa veuve vend la maison et met ses biens et outils aux enchères.

2. Sujet et horloger du Prince-Evêque

Jean-Pierre Droz est originaire du Locle, bourgeois de Valangin, en même temps que communier des Montagnes et paroissien de Saint-Imier. Cette multiple appartenance caractérise les habitants de la Communauté des Montagnes qui regroupe les différents villages et hameaux dispersés au-dessus de Renan, dont La Ferrière et la Chaux-d'Abel. Cette Communauté est

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composée d'habitants venus des Montagnes neuchâteloises au XVIe siècle (les Droz, Calame, Huguenin, Robert, Tissot, etc.) qui ont conservé leurs anciennes origines tout en acquérant celles de leur nouveau lieu de résidence, un avantage qui leur permet de s'établir indifféremment de part et d'autre de la frontière. Aux confins de l'Evêché, la Communauté jouit d'une certaine liberté et développe de multiples activités artisanales pour compléter les revenus souvent limités de l'agriculture. En 1767, le Prince-Evêque Simon-Nicolas de Montjoie tentera de régulariser le statut de ces habitants un peu particuliers, mais il se verra dans l'obligation de continuer à admettre leur double appartenance et à tolérer leurs «allées et venues» pour conserver dans l'Evêché ces sujets considérés comme «actifs, industrieux et pour la plupart assés comodes». La Communauté représente une sorte de vivier d'où vont émerger de nombreux artisans et personnalités de renom, dont les plus connus sont sans doute les frères Abraham et Daniel Gagnebin, célèbres naturalistes de La Ferrière.

A partir de 1741, Jean-Pierre Droz paie ses impôts au Prince et participe avec son frère et son père aux corvées, notamment à la construction des routes de l'Erguël.

On peut penser que Jean-Pierre Droz avait déjà atteint une certaine renommée en 1750, puisqu'en 1754 il s'adresse au Prince-Evêque Joseph Guillaume Rinck de Baldenstein pour lui demander le titre d'horloger de son Altesse et de la Cour, invoquant le souhait de ce dernier de «rendre ses Peuples fortunés en favorisant les sciences et les arts», mais aussi ses propres «efforts dans son art», ainsi que son «zèle et application». Le Prince-Evêque lui accorde ce titre le 8 mars 1754, insistant quant à lui sur son souci de favoriser «les artistes dans nos Etats et [de] leur donner des marques de notre Bienveillance», et se référant aussi à l'«habileté en fait d'horlogerie de notre ame et feal Jean Pierre Droz de la Ferrière». Le Prince-Evêque souhaite dès lors qu'il «jouisse des honneurs et avantages» de ceux qui sont attachés à son service. Le titre reçu par Jean-Pierre Droz donne l'impression d'être surtout honorifique, dans la mesure où il ne comporte pas d'engagement précis de la part du Prince. Contrairement à d'autres artisans qui bénéficient d'un contrat en bonne et due forme, la lettre reçue par Jean-Pierre Droz reste très vague, ne donnant aucune information sur le salaire ou le travail.

Dès son obtention, Jean-Pierre Droz fait usage de ce titre dans tous les documents officiels et signe ses productions de «Jean Pierre Droz Horloger de S.A. Mgr. L'Evêque de Basle et de la Cour à la Ferrière», puis de «Jean Pierre Droz Horloger de S.A. Mgr. L'Evêque de Basle et de la Cour aux Etoblons» (nos 9, 11, 14 et 15). L'accès à cette forme de reconnaissance suprême ne manque pas de contribuer à asseoir sa renommée et à attirer les regards sur sa production.

En tant qu'horloger de Son Altesse, on pourrait donc s'attendre à des commandes venant de Porrentruy. Cela ne semble guère être le cas. Il faut noter que le titre obtenu par Jean-Pierre Droz n'a rien d'exclusif; il n'est pas le seul horloger à pouvoir travailler au service du Prince. En examinant les comptes de la Cour, on constate que plusieurs horlogers sont appelés entre 1754 et 1770 pour réparer horloges, montres et pendules de Son Altesse, parmi lesquels tout particulièrement un certain Ignace Jolat, mais aussi l'horloger Perret et le maire et pendulier Juillerat, tous de Porrentruy. Aucune trace, en revanche, de Jean-Pierre Droz durant toutes ces années.

3. Sa production et sa clientèle

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Jean-Pierre Droz a réalisé tous les types de pièces d'un horloger en moyen et gros volume de l'époque : des pendules murales ou cartels, des pendules « longue ligne » (ou de parquet), des régulateurs, mais aussi des horloges de clocher.

A observer les modèles conservés, il s'inscrit dans la lignée des grands penduliers neuchâtelois auxquels il est d'ailleurs souvent assimilé et parmi lesquels figurent les frères Huguenin, les Jaquet-Droz, les Ducommun-dit-Tinon, Josué Robert ou encore Samuel Roy. Comme eux, il puise son inspiration dans les deux sources d'influence les plus importantes du moment, la France et l’Angleterre. Il est par exemple l'un des producteurs les plus reconnus avec les frères Huguenin ou Samuel Roy de pendules « longue ligne », dont les premiers modèles sont élaborés en Angleterre à partir de 1670. Le style Louis XV, très en vogue alors, lui sert aussi de référence pour la plupart de ses autres réalisations (pendules murales, cartels).

Sur le plan technique, s'il n'a pas réellement inventé, on peut toutefois relever l'utilisation très précoce dans ses régulateurs de l'échappement à chevilles, mis au point par Louis Amant dans la première moitié du XVIIIe siècle, et associé à un balancier doté d'une masse très importante (nos 4, 6, 7 et 10). Cette utilisation lui permet d'être alors à la pointe en matière de précision. On soulignera aussi le recours plutôt rare dans la pendulerie neuchâteloise à un dispositif de remontage à fusée dans au moins l'une de ses pendules (no 11). Enfin, plusieurs documents parlent d'horloges de clocher et d'une machine servant à les fabriquer. Nous n'avons pas retrouvé pour l'instant de quelles horloges Jean-Pierre Droz a pu assurer la réalisation, en revanche, en 1774, il est encore fait mention d'une «horloge de tour presque finie» dans un inventaire, ce qui tend à montrer qu'il en a produit tout au long de sa carrière. Jean-Pierre Droz a exercé son métier jusqu'à la fin de sa vie, laissant à sa mort une pendule longue ligne inachevée qui sera vendue aux enchères.

Pour la construction des cabinets, il est fait mention dans les biens mis aux enchères à son décès d'«un cabinet noir» et d'un «mouvement de pendule et son cabinet à longue ligne» qui pourraient laisser penser qu'il en fabriquait une partie. Mais on retrouve aussi son nom au moins une fois, en 1756, parmi les clients d'Abram-Louis Sandoz à La Chaux-de-Fonds, célèbre fabricant de cabinets, fournisseur des Jaquet-Droz et de tous les grands penduliers du moment (no 5).

Les seules traces d'une activité commerciale apparaissent à l'échelle régionale. Jean-Pierre Droz échange parfois une pendule contre d'autres biens. Il s'acquitte ainsi de l'achat de sa maison aux Etoblons en donnant à l'horloger Jacques Robert 150 écus faibles et une pendule à 30 heures, la pratique du troc étant très fréquente. La grande valeur d'une pendule à l’époque porte d’ailleurs à penser que les clients à qui s'adresse Jean-Pierre Droz doivent jouir d'une certaine aisance. Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, les gens de cour représentent les principaux acquéreurs d'objets d'horlogerie. Faute d’actes privés, on ignore tout de ses clients particuliers. A ce titre, il faut relever qu'à part les cours princières, une nouvelle clientèle commence à apparaître à l'échelle régionale. Il s’agit d’une bourgeoisie enrichie par le commerce de bétail, artisans, horlogers, etc., qui fréquente les foires et s'intéresse à l'acquisition de pendules et de montres. Il n'est pas exclu que Jean-Pierre Droz profite pour une large part de ce nouveau «marché». Enfin, nous ignorons si, comme d'autres penduliers, il entreprend d'aller vendre sa production auprès d'autres cours; aucun écrit ne subsiste témoignant de ce genre de voyage.

On connaît en revanche les lieux d'échange régionaux privilégiés. Nous avons vu que Jean-Pierre Droz et ses apprentis fréquentent la foire de Renan trois fois par année. Les foires de

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Saint-Imier, de La Chaux-de-Fonds et des Bois sont tout aussi réputées. Horlogers et penduliers y vendent leur production et l'on y trouve aussi de quoi s'approvisionner en pièces détachées (cabinets, ressorts, timbres, etc.).

4. L'horloger-paysan

Jean-Pierre Droz est mentionné comme horloger dès le milieu des années 1740. Durant son séjour aux Rochats, la pratique de son art se double toutefois d’une activité agricole, comme il est de règle à l’époque. En 1752, l'état de ses biens mentionne : «deux vaches à lait, trois chars ferrés, une charrue, deux herses, harnachements de chevaux, la graine de la présente année 1752, les fourrages, un cochon».

En 1756, il est dit que sa seconde femme ne peut être présente à un rendez-vous chez le notaire «tant à cause des semailles que de la maladie de notre fille». Et une partie de ses dettes viennent de l'achat de «différentes graines» au meunier Daniel Cuënin de Saint-Imier.

Au moment de la vente de la maison des Rochats (1756), il laisse 800 livres de foin et quatre quintaux de paille de bage et avoine. Toujours aux Rochats, il dispose également d'une surface de forêt dont il tire le bois de chauffage, de four, etc. Durant toutes les années passées aux Rochats, Jean-Pierre Droz mène donc une double activité, sans pour autant que l'on puisse évaluer quelle est la part de l'activité agricole et quels sont exactement les revenus qu'il en tire par rapport à ceux de l'horlogerie.

La situation semble changer une fois qu'il s'installe aux Etoblons (1758), où l’activité agricole se réduit. L'inventaire après son décès ne mentionne plus qu’«une sonnaille» et «une boille» qui pourraient laisser penser qu'il y élevait encore une vache ou une chèvre pour le lait. Le déménagement à Renan pourrait donc marquer le passage à un statut d'horloger à part entière.

Pendant ses moments de repos aux Etoblons, Jean-Pierre Droz s'occupe de ses six ruches installées dans le jardin, une occupation qui n'est pas tout à fait ordinaire. Délaissée par les paysans, l'apiculture connaît un regain d'intérêt au XVIIIe siècle, surtout auprès des scientifiques qui introduiront de nombreuses améliorations techniques. On peut dès lors comprendre la curiosité de l'horloger pour cette activité en pleine évolution et qui, un peu comme l'horlogerie, représente alors un véritable terrain d'expérimentation. Il est à supposer aussi que le miel contribue à améliorer la nourriture ordinaire de la famille et permet la confection des chandelles.

Ces activités n'empêchent toutefois pas la famille de s'occuper de manière plus traditionnelle: pendant qu'épouse et fille filent le lin avec leurs quenouilles et «rouë», Jean-Pierre Droz entretient les alentours de sa maison avec une faulx, un piège à taupes, une fourche à foin, un taille-foin et il n'est pas complètement exclu, comme déjà dit, qu'il élève encore une chèvre ou une vache pour le lait.

En considérant ces descriptions, on ne peut manquer de repenser à la réflexion de Jean-Jacques Rousseau qui admirait: «sans cesse en ces hommes singuliers un mélange étonnant de finesse et de simplicité qu'on croirait presque incompatibles.» On ignore si Jean-Jacques Rousseau rencontre Jean-Pierre Droz lors de ses différents séjours dans la région, il passe notamment deux semaines chez Abraham Gagnebin à La Ferrière en 1765. Il est en tout cas sensible à cette caractéristique des habitants que semble partager notre pendulier: la présence d'une certaine aisance et d'une certaine culture, la capacité à fabriquer des objets remarquables,

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associées à un fort ancrage campagnard et au partage des plaisirs, obligations et difficultés qui étaient celles de tout «Montagnon» et sujet de son Altesse au XVIIIe siècle.

5. La forge

Joseph, le père de Jean-Pierre Droz, exerce la profession de maréchal, comme son grand-père Jonathan et son frère Joseph et il dispose d'une forge aux Rochats. Le fils ne s'éloignera guère de cet héritage familial, la fabrication de pendules comportant encore un important travail de forge.

Les inventaires de ses biens lors des différentes mises aux enchères ou ventes sous bénéfice de rachat nous permettent de reconstituer assez précisément l'atelier et l'équipement de Jean-Pierre Droz. On constate d'abord que, durant toute sa vie, celui-ci dispose d'une forge. En 1752, il possède «tous les outils de forge, à savoir l'enclume, le soufflet, le marteau, les tenailles, le charbon de forge». En 1759, après son installation aux Etoblons, il rachète dans une mise aux enchères une petite forge «au haut du village de Renen», à côté de sa propriété. Après sa mort, la vente de la maison fait toujours état de la présence d'une forge, ainsi que de tout l'équipement : une enclume, des bigornes, des outils et pinces de forge, un râteau à charbon et six vieux sacs à charbon. On peut donc supposer sans trop risquer de se tromper que le pendulier forgeait lui-même une partie des pièces et peut-être même des outils.

Outre le fer, Jean-Pierre Droz travaille également le laiton, l'une des listes mentionne du «loton non travaillé», et l'étain.

6. Les outils de l’horloger

Les inventaires de ses biens nous permettent également de reconstituer l'outillage de pendulier utilisé par Jean-Pierre Droz. La liste de 1752 fait état de «deux machines à fendre, étaux, tours à tourner, limes et autres». En 1758, on dispose d'un inventaire plus détaillé: «la machine à fendre les roues pour l'horlogerie, celle à fusée, quatre gros éthaux de fer à pieds, trois éthaux à mains, 12 marteaux, trois paires de pinces en boucles, cinq paires de pinces à goupilles, cinq compas, six gros écarissoires et d'autres plus petits, autant d'alésoirs, soixante grosses limes amanchées, 130 petites limes aussi amanchées, quantités de coupelles à bras, des quarrés et terreaux à vis, trois filières, deux paires de pinces à couper, environ douze burins, divers forets». En 1759, il acquiert: «Boîte de ferraille, boëte et des fers nervus, des filières à vis, un chien à éthaux, des pinces à boucles, un co(u)rbet, un marteau, un tronc à cornes, trois perches.».

Enfin, la vente aux enchères de ses outils après son décès en 1780 permet d'établir l'inventaire le plus complet. On y trouve des outils simples : de très nombreuses «limes petites et grandes, des pinces et petites cisailles, des marteaux petits et grands, quatre grands éthaux, un étau à main, un étau de fer et à jambe, trois bocfils, des pinces à boucles, à river et à couper, un grand foret, deux virebrequins, des mèches, des perçoirs et forets, des écarissoirs et alésoirs, un rivoir, un calibre, une filière à taroder, un compas d'engrenages, un maître dance, un compas, une équaire et une équaire de fer, des filières et une filière à tarauder, une pierre à huile».

Cet outillage de base est complété par des tours manuels et leurs fournitures : un grand tour à lardons, un petit tour à lardons, un grand tour de fer, un tour d'horloger, une machine à river, un tour à lunette, une machine à refendre les roues, une machine pour les horloges de clochers, des abres (vraisemblablement arbres), des cuivreaux (cuivrots), des liens de fer, des poulies.

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Enfin sont cités divers ustensiles permettant de chauffer et de suspendre (un réchaud, une chaudière de fer, une griffe et un vieux «colier», un plat baquet), sans oublier de quoi s'éclairer (deux chandeliers d'établi).

Jean-Pierre Droz possède en outre quelques outils de menuisier, comme un tronc de charpentier et de nombreux lots de «boisaille» qui font penser qu'il travaille aussi en partie le bois (pour les cabinets).

L'atelier de Jean-Pierre Droz semble être assez bien équipé, notamment avec la présence de tours et de machines pour tarauder, river, fendre les roues, faire les fusées, etc. On retrouve dans ces énumérations l'inventaire assez complet du pendulier de l'époque, qui connaît durant le XVIIIe siècle des améliorations importantes permettant la construction de mouvements de plus en plus précis. A en juger du prix auquel sont vendus les étaux et les tours, mais surtout la machine à fendre (36 écus) ainsi que l'enclume de forgeron (24 écus), qui atteignent les prix les plus élevés dans les ventes aux enchères, on peut supposer que la constitution de cet équipement a dû impliquer d'importants investissements qui expliquent peut-être certaines difficultés financières momentanées de Jean-Pierre Droz.

Nous ne sommes toutefois pas encore à l'ère de la machine automatique et toute la production reste manuelle; l'importance du nombre de limes (plus de 200) en sa possession en témoigne. Le type d'outils et de machines laisse penser que l'essentiel du travail touchant à la réalisation des pièces métalliques et à l'élaboration du mouvement est réalisé par Jean-Pierre Droz, y compris les fusées, puisqu'il dispose d'une machine pour cette fabrication.

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Questions aux élèves

1. Titre de l’exposition : qui est « Son Altesse » ? 2. Y a-t-il dans la grande salle un document qui précise les rapports entre Jean-Pierre Droz et

« Son Altesse » ? 3. Quels types d’horloges se trouvent dans la grande salle ? 4. Le mouvement de l’horloge est caché à la vue, puisqu’il se trouve à l’intérieur du cabinet.

Etant donné que les mouvements réalisés par Jean-Pierre Droz sont signés, des photographies se trouvent à coté de chaque horloge. Trouve les horloges qui sont signées avec la mention de « L’horloger de Son Altesse Monseigneur l’Evêque de Bâle » et note leur numéro.

5. Faites silence et écoutez ! Les 13 pendules présentées sont presque toutes en mouvement. Elles produisent différentes sortes de sons qui correspondent à diverses activités : lesquelles reconnais-tu ?

6. Vocabulaire : en horlogerie, qu’est-ce qu’un cabinet ? De quel mot dérive-t-il ? Ce mot désigne également d’autres choses : lesquelles ?

7. Regarder les détails : chercher un cadran avec deux, trois et quatre aiguilles et noter le numéro de l’horloge. A quoi servent toutes ces aiguilles ?

8. Au 18e siècle, les horloges sont mécaniques, c’est-à-dire que leur mouvement nécessaire à faire progresser les aiguilles marquant le temps doit être entretenu. Quel est le geste essentiel que l’on doit faire pour qu’une horloge fonctionne ? Quelle en est la périodicité ? Quelle expression française est généralement utilisée pour désigner ce travail ?

9. Quelles sont les principales parties d’une horloge ? En quelles matières sont-elles généralement réalisées ?

10. Au 18e siècle, chaque horloge est une pièce unique, chacune a son décor particulier, sa sonnerie à elle, son « look ». Dessine celle qui te plaît le plus. Pourquoi as-tu choisi celle-ci plutôt qu’une autre ?

11. Quand Jean-Pierre Droz a-t-il vécu ? Qui dirigeait la région à l’époque ? 12. Jean-Pierre Droz travaillait seul chez lui, mais que fabriquait-il exactement ? 13. Dans quelle région vivait-il ? Était-il un personnage tout à fait original dans cette région à

cette époque ? Si non, que partageait-il avec ses concitoyens ? 14. Quel était le métier de son père ? Pourquoi est-ce important pour sa carrière à lui ? 15. Qu’est-ce qu’une forge ? 16. Dessine deux outils typiques du forgeron. 17. Au 18e siècle, la plupart des gens avaient plusieurs métiers. Parallèlement à l’horlogerie,

Droz avait donc d’autres activités. Regarde les objets exposés dans la salle bleu-vert : à quels métiers peux-tu rapprocher ces outils ? Cites-en au moins deux.

18. L’horlogerie, même pour les grands formats comme les pendules, est un métier minutieux. Pour chaque phase de son travail, l’horloger dispose de plusieurs outils spécialisés. Trouve un outil :

- pour effectuer des mesures : …………………………………………………………. - pour maintenir une pièce serrée : ………………………………………………………. - pour percer : …………………………………………………………. - pour tailler : …………………………………………………………. - pour limer : …………………………………………………………. - pour faire des pas de vis : …………………………………………………………. - pour fraiser : ………………………………………………………….

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19. Le Jura est une terre d’horlogerie : où peut-on apprendre les métiers de l’horlogerie dans la région ?

20. La chasse aux trésors ! Les photos ci-dessous présentent des détails de différents objets exposés : retrouve les objets auxquels ils appartiennent et note sous la photo le numéro de la pièce. Attention, il ne s’agit pas seulement d’horloges, mais aussi d’autres d’objets qui se trouvent dans toute l’exposition.

No …… No …… No ……

No …… No …… No ……

No …… No …… No ……

No …… No …… No ……

Dossier pédagogique Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse

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Réponses possibles

1. Titre de l’exposition : qui est « Son Altesse » ?

Son Altesse était le terme par lequel on désignait ou on s’adressait au prince-évêque de Bâle qui résidait alors au château de Porrentruy. Il était le seigneur de toute la région. En l’occurrence, Jean-Pierre Droz devient l’horloger du prince-évêque Joseph Guillaume Rinck de Baldenstein en 1754. Ce prince a régné à Porrentruy entre 1744 et 1762.

2. Y a-t-il dans la grande salle un document qui précise les rapports entre Jean-Pierre Droz et Son Altesse ?

Le Brevet de nomination de Jean-Pierre Droz au poste d’horloger de la cour, signé du prince-évêque, le 8 mars 1754 (grande salle, vitrine plate, no 3)

3. Quels types d’appareils horlogers se trouvent dans la grande salle ?

On y trouve : - des pendules murales, également appelées cartels (nos 3, 4, 5, 8, 9, 11, 14, 15 et 16) - des « longues-lignes », également appelées pendules de parquet (nos 4, 6 et 10) - un mouvement seul (no 1) - des régulateurs de précision (no 7 et 10).

4. Le mouvement de l’horloge est caché à la vue, puisqu’il se trouve à l’intérieur du cabinet. Etant donné que les mouvements réalisés par Jean-Pierre Droz sont signés, des photographies se trouvent à coté de chaque horloge. Trouve les horloges qui sont signées avec la mention de « L’horloger de Son Altesse Monseigneur l’Evêque de Bâle » et note leur numéro.

Il s’agit des numéros 9, 11, 14 et 15.

5. Faites silence et écoutez ! Les 13 pendules présentées sont presque toutes en mouvement. Elles produisent différentes sortes de son qui correspondent à diverses activités : lesquelles reconnais-tu ?

Le bruit régulier du balancier. La sonnerie des heures, des demi-heures et des quarts-d’heure.

6. Vocabulaire : en horlogerie, qu’est-ce qu’un cabinet ? De quel mot dérive-t-il ? Ce mot désigne également d’autres choses : lesquelles ?

En horlogerie, le cabinet est l’enveloppe de l’horloge, la boîte qui contient le cadran (où on lit l’heure) et le mécanisme. Le plus souvent en bois, parfois décoré de peintures ou de placages de métal, il est aussi parfois entièrement en métal (grande salle, no 16).

Un cabinet est une petite cabine.

Il désigne également une petite salle destinée à des activités précises (par exemple un cabinet de toilette).

7. Regarder les détails : chercher un cadran avec deux, trois et quatre aiguilles et noter le numéro de l’horloge. A quoi servent toutes ces aiguilles ?

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La grande aiguille est celle des minutes, la petite aiguille est celle des heures. Il peut aussi y avoir une aiguille pour les secondes et pour le quantième, c’est-à-dire le jour du mois (nos 7 et 15).

8. Au 18e siècle, les horloges sont mécaniques, c’est-à-dire que le mouvement nécessaire à faire progresser les aiguilles marquant le temps doit être entretenu. Quel est le geste essentiel que l’on doit faire pour qu’une horloge fonctionne ? Quelle en est la périodicité ? Quelle expression française est généralement utilisée pour désigner ce travail ?

On dit qu’on doit remonter l’horloge, c’est-à-dire remonter le ressort qui entretient le mouvement, grâce à une clef. Chaque horloge possède son propre temps de fonctionnement autonome, ainsi certaines ne doivent être remontées que chaque semaine, d’autres, tous les jours.

9. Quelles sont les principales parties d’une horloge ? En quelles matières sont-elles généralement réalisées ?

Le cadran, généralement rond, porte les chiffres des heures. Il est généralement en émail blanc.

Le mouvement, le cœur de l’horloge, qui permet aux aiguilles de courir autour du cadran avec précision et régularité.

Le cabinet qui protège et embellit l’horloge par son décor.

10. Au 18e siècle, chaque horloge est une pièce unique, chacune a son décor particulier, sa sonnerie à elle, son « look ». Dessine celle qui te plaît le plus. Pourquoi as-tu choisi celle-là plutôt qu’une autre.

Réponse libre.

11. Quand Jean-Pierre Droz a-t-il vécu ? Qui dirigeait la région à l’époque ?

Il est né en 1713 et mort en 1780. A cette époque, appelée Ancien Régime, la plupart des pays européens étaient dotés d’un souverain. L’Evêché de Bâle, le territoire du Jura et du Jura-sud actuels, était alors gouverné par un prince-évêque qui avait sa cour au château de Porrentruy. L’Evêché faisait partie du Saint-Empire romain germanique.

12. Jean-Pierre Droz travaillait seul chez lui, mais que fabriquait-il exactement ?

Contrairement aux grandes usines actuelles produisant des pièces horlogères, les horlogers du 18e siècle faisaient toutes les parties de leurs horloges eux-mêmes chez eux, même leurs outils. Durant toute sa vie, Droz a été actif dans l’horlogerie en grand volume, c’est-à-dire qu’il fabriquait des horloges d’intérieur ou de clocher, mais pas de montres.

13. Dans quelle région vivait-il ? Était-il un personnage tout à fait original dans cette région à cette époque ? Si non, que partageait-il avec ses concitoyens ?

Il vivait dans les Montagnes, aux alentours de la Ferrière et de Renan. A cette époque, tout le monde cumulait en plus de son métier une seconde occupation, celle de paysan. Tous les horlogers étaient donc horlogers-paysans. En cela, Droz ne différait pas de ses concitoyens.

14. Quel était le métier de son père ? Pourquoi est-ce important pour sa carrière à lui ?

Dossier pédagogique Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse

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Son père était forgeron, de même que son frère. Lui-même avait une forge, un endroit où on peut transformer le fer en outils ou en pièces d’horlogerie. Cet atelier était essentiel pour Droz qui fabriquait de grandes horloges dans lesquelles beaucoup de pièces étaient travaillées à la forge.

15. Qu’est-ce qu’une forge ?

Une forge est un atelier spécialisé, doté d’un foyer alimenté en charbon pouvant atteindre les hautes températures propres à ramollir le fer pour le travailler. Les outils principaux en sont : l’enclume, le marteau et la pince.

16. Dessine deux outils typiques du forgeron.

17. Au 18e siècle, la plupart des gens avaient plusieurs métiers. Parallèlement à l’horlogerie, Droz avait donc d’autres activités. Regarde les objets exposés dans la salle bleu-vert : à quels métiers peux-tu rapprocher ces outils ?

L’agriculture. L’apiculture.

18. L’horlogerie, même pour les grands formats comme les pendules, est un métier minutieux. Pour chaque phase de son travail, l’horloger dispose de plusieurs outils spécialisés. Trouve un outil

- pour effectuer des mesures : huit-chiffre, compas - pour maintenir une pièce serrée : étau à main, étau de forge, étau d’établi - pour percer : drille à percer à ficelle - pour tailler : burins - pour limer : lime sabot, lime queue de rat, lime feuille de sauge, etc… - pour faire des pas de vis : plaques à fileter - pour fraiser : tours

19. Le Jura est une terre d’horlogerie : où peut-on apprendre les métiers de l’horlogerie dans

la région ?

A l’Ecole des Métiers techniques de Porrentruy, Section horlogerie. Elle est l’une des six dernières écoles d’horlogerie en Suisse encore en activité (il y en eut une dizaine par le passé).

20. La chasse aux trésors :

Grande salle, vitrine plate, no 2 Salle parquetée, no 1 Grande salle, no 3 (enclume)

Dossier pédagogique Jean-Pierre Droz - L’horloger de Son Altesse

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Salle parquetée, no 11 Grande salle, no 6 Grande salle, no 15

Grande salle, no 12 Salle parquetée, no 23 (boille à lait) Balancier de démonstration

Outils d’horlogerie, 1e vitrine, no 1 Grande salle, no 13 Ecole des métiers, “Horloge du 100e”