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Jeunes femmes Engagées autrement par Marie-Claude Trépanier en collaboration avec Hélène Blondeau Ce n 'estpas très original, c 'est vrai, et Croc aura traité lesujet avec beaucoup plus d'humour. N'empê- che: il nous paraissait important de parler des jeunes. Ou plutôt de laisser parler les jeunes (femmes surtout). Nous voulions en avoir le coeur net: en arrachent-elles à ce point? Leur avenir est-il vraiment bloqué? Et alors, que leur reste-t-il d'inspiration, de motivation?... Beaucoup de questions... mais encore plus de réponses. F.P.

Jeunes femmes Engagées autrementbv.cdeacf.ca/CF_PDF/LVR/1985/29septembre/92169.pdfdans un club de danseuses nues. Elle gagnait le salaire de base d'une serveuse, un taux inférieur

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Jeunes femmes

Engagées autrementpar Marie-Claude Trépanieren collaboration avecHélène Blondeau

Ce n 'estpas très original, c 'est vrai,et Croc aura traité le sujet avecbeaucoup plus d'humour. N'empê-che: il nous paraissait important deparler des jeunes. Ou plutôt de laisserparler les jeunes (femmes surtout).

Nous voulions en avoir le coeur net:en arrachent-elles à ce point? Leuravenir est-il vraiment bloqué? Etalors, que leur reste-t-il d'inspiration,de motivation?...

Beaucoup de questions... maisencore plus de réponses.

F.P.

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Les années thématiques ontceci d'agaçant : ceux et cellesqui prennent la parole ont ladésagréable tentation de fairedes généralités, de confondretout le monde dans le mêmebain. Le manque de nuancesfinit toujours par agacer : lesfemmes pourront vous parlerdu syndrome du «NOUS, LA

FEMME», qui les poursuit depuis 1975,«leur année». À leur tour, les jeunes n'é-chappent pas à cette curieuse manie...

Certains vont de découverte en décou-verte, en apprenant qu'ils ne savent ni lire,ni parler, ni écrire, qu'ils sont soucieux del'écologie, mais qu'ils n'égligent les conve-nances ; qu'ils vivent dans l'obsession de lafin du monde et qu'ils s'évadent dans letumulte de leur walkman, etc. La listepourrait s'allonger. LVR a décidé d'ajouterson mot.

Une envie de jaserC'est quand LVR nous a confié ce repor-

tage, à Hélène Blondeau et à moi, que nousavons enfin compris que nous étions partieprenante dans l'AiJ puisque nous avionstoutes les deux 26 ans ! (Il faut savoir queles jeunes n'ont pas tous le même âge (!)selon le gouvernement qui les recense : ilsont entre 15 et 25 pour le fédéral et entre 1 5et 30 pour le provincial.)

Une fois l'étonnement passé, la lourdedocumentation bien étudiée, il nous fallaittrouver une manière différente de parlerdes jeunes et surtout, éviter de tomber dansle piège des lieux communs. Qu'est-ce queles autres «filles» pensaient de l'organisa-tion d'une année pour les jeunes7 Sesentaient-elles concernées "> Se définis-saient-elles comme jeunes ~> Autant dequestions que nous avions soulevées entrenous. Nous voulions en profiter pour savoirce qu'elles pensaient du féminisme, de lapolitique, du militantisme, du travail, del'école, de l'amour, de la sexualité, etc.Nous ne prétendions pas faire un travail desociologue. Nous étions curieuses. Et sim-plement, nous avions envie de jaser.

Une sélectionAfin de respecter les conventions de

l'AIJ, nous avons choisi des filles entre 18et 28 ans provenant de milieux différents.Nous nous intéressions à une période pré-cise de l'existence : celle où l'on s'installeen dehors du foyer familial, où l'on tente devivre par ses propres moyens. Le tempsaussi où l'on vit ses premières véritableshistoires amoureuses, et ses premièresaventures de couple Réunir une dizaine defilles nous paraissait suffisant.

Nous en connaissions quelques-unesqui répondaient à nos exigences. Nous enavons rejoint quelques autres que nouscherchions un peu au hasard. Une fois deplus, le hasard a bien fait les choses. À unmoment donné, on avait l'impression de seretrouver entre amies de longue date.

Nous avons d'abord posé la question dela pertinence d'une année consacrée aux

septembre 1985

US JIUHIZjeunes Toutes les filles interrogées s'oppo-sent au découpage arbritaire de l'âge : il estabsurde de réunir dans un même groupedes adolescent-e-s de 15 ans et de «jeunesadultes» de 30 ans. Et puis, à quel âgecesse-t-on d'être adolescent-e pour devenir«jeune», et quand passe-t-on au clan desadultes ~> Où sont les frontières ? Bon nom-bre de nos interviewées ont dit ne pas sesentir concernées par les activités entourantl'Année internationale de la jeunesse. Ellesn'avaient pas moins de choses à dire pourautant.

Briser l'isolementNancy Gendron nous est apparue comme

la personne la plus «politisée» du groupe.Avec son air calme et son allure d'étudiantemodèle, on ne s'attendait pas. venant d'elle,à des positions aussi radicales. Nous lavonscontactée parce qu'elle milite au RAJ (leRegroupement autonome des jeunes) oùelle anime le Caucus des femmes. Elleinsiste pour préciser que le caucus fonc-tionne de manière autonome au sein duRAJ. Nancy a vite compris que derrière lepersonnage progressiste du militant degauche se cache souvent un vieux fond deconservateur qui n'arrive pas à mettre enpratique ses belles théories «féministes».Lors de la grande marche pour l'emploi, aumois de juin dernier, elle a organisé avecson groupe une action féministe : elless'étaient procuré des sifflets afin de pro-tester devant les cinémas porno ou lesaffiches publicitaires sexistes. Il y auraitdonc une relève après tout, contrairement àce que pouvait laisser croire un article surles filles des féministes (voir LVR, mars.85) ? Justement, Nancy y vient : l'article alaissé une mauvaise impression. C'était desfilles en réaction contre leur mère, alors ona pensé que tout le monde réagissait de lamême façon.

Nous avouons (honteusement) que nousnous attendions à un discours plus banal ;nous pensions les entendre réciter unepetite leçon de militantes bien endoctri-nées. Après Nancy Gendron. Marie-FranceBeaulieu, membre également du Caucusdes femmes du RAJ. nous a fait rapidementchanger d'idée. Marie-France, de tempéra-ment plutôt bohème et fantaisiste, vit dansune tente nichée sur le toit de la maisond'un ami. Au lieu de réclamer du travail, elleproclame le droit à la paresse et au minimumvital pour tous, parce qu'il faut bien vivre.Elle rêve de prendre la relève d'une sage-femme et/ou de voyager seule sur le pouce.Pour elle, le militantisme est une manièrede travailler pour l'indépendance des fem-mes et pour la justice universelle ; il permetde briser l'isolement : «Je ne peux pasrégler des choses personnelles en militant,mais ça m'a ouvert les yeux par rapport à laréalité sociale J'ai vu aussi que je n'étaispas seule dans le bateau. C'est stimulant.»

Travailler à tout prix ?La nécessité du travail se fait plus pres-

sante pour d'autres. En partant de la maison

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familiale. Nathalie Lebel voulait avoir untoit bien à elle Pas question de retourner enan-ière ; il lui fallait assurer sa survie C'estpourquoi elle n'a pas hésité à prendre lepremier emploi payant. Elle a même pensé àse prostituer, puis elle a trouvé une placedans un club de danseuses nues. Ellegagnait le salaire de base d'une serveuse,un taux inférieur au salaire minimum, etbouclait son budget avec les pourboires etles cachets pour les danses aux tables. Elley est restée cinq semaines. Le plus sincère-ment du monde, elle affirme avoir fait «unebonne job», que le patron et les clients enavaient pour leur argent : «II y avait unegrosse compétition entre les filles, il fallaitêtre la plus cochonne pour avoir les dansesaux tables. Je pense que j'étais assez co-chonne, j'étais capable d'exciter les gars.J'ai réussi à garder le respect de moi-mêmeet des autres, mais c'était difficile Cinqsemaines, c'était assez pour moi.»

On est loin des beaux projets DÉCLIC etcompagnie ou de la défunte ONET. Les«beaux cadeaux» ou les «belles initiatives»que l'on réserve aux jeunes apparaissent,dans plusieurs cas. complètement décollésde la réalité «Les dirigeants agissent commes'ils ne savaient pas quoi faire de nous.Comme cadeau pour l'AIJ, allez donc ra-masser la 'marde' des industries dans lefleuve ! Elles continueront de polluer et onpourra recommencer dans deux ans.»Dominique Cyr ne mâche pas ses mots. Elledégage une image de femme forte qui n'apas froid aux yeux. Cette fille s'inscrit endissidence presque partout où elle s'impli-que ; elle milite dans le Mouvement desétudiants et étudiantes chrétien-ne-s duQuébec, le MEECQ, où elle fut employéependant quelque temps. Elle y défend avecvigueur les intérêts des femmes Son opinionsur les questions de l'avortement et de lacontraception diffère totalement de la posi-tion officielle de l'Église. Mais elle ne veutpas pour autant vivre en marge des croyan-ces religieuses. Elle tient à ancrer sesactivités de militante dans la réalité sociale,elle croit à l'action concrète, à l'interventiondirecte. Ses projets sont ambitieux : c'est àla faculté de théologie qu'elle à l'intentionde s'attaquer : «Si je retourne en théologie,c'est parce que c'est un lieu qui laissetellement peu de place au féminin et que jecrois pouvoir leur apporter des choses.C'est aussi mon milieu, là où j'ai le plus deforce.»

La plupart des filles qui retournent auxétudes, comme Dominique, le font pour ychercher autre chose que ce qu'on y offre.Elles s'inscrivent pour profiter des prêts/bourses puisqu'elles se savent exclues dumarché du travail. Le système d'aide finan-cière aux étudiant-e-s offre une alternativeacceptable à l'assistance sociale IsabelleLarivée est la seule de nos interviewées àpoursuivre de longues et sérieuses études.Son intérêt se porte surtout vers la rechercheet la création : en plus d'une maîtrise enlittérature. Isabelle participe au collectif

LA VIE EN ROSE

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d'écriture Rrose Sèlavy, animé par YolandeVillemaire. Elle vit modestement et s'accom-mode assez bien de sa condition d'étu-diante : «Financièrement, c'est le plus dif-ficile. Mais quand tu étudies avec d'autrespersonnes qui vivent dans les mêmes con-ditions que toi, l'argent finit par devenir unélément secondaire.»

L'amour et la vaisselleNous avons voulu parler de l'amour.

Mais nous avons surtout parlé de ménage !Le problème est soulevé par celles qui ontfait l'expérience de la vie de couple. PourNancy Gendron, le dilemme est déchirant :elle est amoureuse et elle se rend comptequ'on peut bel et bien se faire exploiter aunom de l'amour : «On négocie, quand c'estson tour de vaisselle, et quand ça fait unesemaine qu'elle traîne, je vais bouffer aurestaurant, je pile sur mon orgueil. Çam'énerve qu'on passe tant de temps à parlerde ces choses-là. Lui, il vient tout juste dequitter ses parents et moi. je me retrouveavec une éducation à faire à partir de zéro.»

Plutôt que d'amour, Katherine Morinpréfère parler d'amitié. Elle pense quel'amitié est un sentiment plus fiable et plusdurable, comme si elle craignait de réveillerune grande douleur : «Quand j'aime beau-coup une personne, je préfère qu'elle de-vienne mon amie. À long terme, c'est plussûr. Je suis mêlée entre l'amour et l'amitié.»À deux reprises pendant l'entrevue, Kathe-rine a souligné quelle était marginale. Onne sait pas de quelle norme elle se sentexclue. Elle parle d'une sexualité marginaleparce qu'on ne lui a rien appris, qu'elle atout découvert dans les revues porno de sesfrères. Elle a été agressée par un ami de sonfrère quand elle avait dix ans. Elle s'estdéfendue. Mais elle est restée marquée :«J'ai toujours relié la sexualité à la violence.J'ai même joué le jeu J'ai cru longtempsque j'étais frigide. J'étais incapable de mefaire pénétrer. Plus tard, j'ai compris qu'iln'y avait pas uniquement la pénétration.J'ai lu, j'ai appris par moi-même » Méfiante,Katherine dit ne pas se confier à ses amies.Elle a peur d'être ridiculisée.

Marie-France Beaulieu n'aime pas quel'on mélange tout, amour et désir. Une amiea cru bien faire en lui «offrant» son chum«Le gars m'avait fait des avances et je l'airepoussé sans faire de drame. Je ne suis pasplus heureuse parce que je me sens souventdésirée.» Elle se demande pourquoi on veutlui imposer le désir des autres. Elle rêve derencontres plus valables et plus profondesoù la beauté physique serait un élémentsecondaire

Sylvie Legault, comédienne connue pourses succès au sein de la LNI (Ligue nationaled'improvisation), croit que les valeurssexuelles ont changé un peu chez lesjeunes hommes. Ils sont plus à l'écoute descorps, dit-elle, ils ne sont plus uniquementobsédés par la pénétration. Ils auraientcompris le message féministe sur la jouis-sance tandis que leurs aînés seraient restéssourds ; ceux-là traînent encore le mythede la mère et de la putain.

LA VIE EN ROSE

Uù JtUMSToujours le mot pour rire, Sylvie est

revenue à la question du ménage : «Si turencontres un gars, demande-lui s'il faitson lavage ; s'il répond non. c'est qu'il baisemal ! S'ils ne sont pas capables de s'occuperdeux-mêmes, je ne vois pas comment ilsarriveraient à s'occuper des aunes, donc àbaiser.» Si les gars sont aux prises avec desidées toutes faites sur la sexualité, les fillesse débattent pour leur part avec des rôles oùelles se sentent mal à l'aise : «En tant quefemme, j'ai été plus habituée à donner qu'àrecevoir, de dire Christine Marcoux : j'essaiede m'expliquer clairement, de faire passerce que je veux. Mais je sens des barrières, jeme demande à quel moment je réintègre lemodèle de la féminité.»L'indicible douleur

Malgré leur désir de sortir des rôles qu'onleur impose, les filles doivent composeravec les contraintes de la contraception. Etselon la majorité d'entre elles, ce n'est pasune mince tâche. Elles sont insatisfaitesdes méthodes actuellement disponibles.Elles voudraient qu'on approfondisse lesrecherches pour une contraception plusdouce et plus adaptée à leurs besoins. Prèsde la moitié ont dit avoir subi un avorte-ment. Isabelle s'est fait avorter il y a un moiset demi et elle a vécu cet épisode très diffi-cilement : «J'ai trouvé que c'était une trèsgrande douleur physique. Et quand je parlede souffrance, je ne parle pas de culpabilité,mais d'une soufrance à l'état brut. Ce sontdes moments où tu ne peux plus distinguerentre ton corps et ta tête, tu te fais arracher,tu te fais dévaster au propre comme aufiguré.» Isabelle se demande si on n'a pasocculté la violence physique de l'avorte-ment par crainte de faire peur aux filles.Mais il se peut aussi que les filles le taisentpar sentiment de culpabilité : après avoircommis pareille «faute», il ne faudrait passe plaindre en plus !Apprendre à devenir père et mère

La question de la maternité n'est pasfacile non plus. Contrairement aux autres.Dominique Cyr a envie d'être enceinte, devivre un accouchement. Pour elle, c'est undésir viscéral. Mais ejle a des appréhen-sions : «Comment ne pas me laisser envahirpar mon rôle d'éducatrice ~> Le défi, c'estd'être autre chose qu'une mère ou une con-jointe : être soi.» Elle cite l'exemple d'uneamie qui s'est laissée accaparer complète-ment par son rôle de mère. Chaque foisqu'elle s'absente une heure, c'est le drame àson retour. Toutes les responsabilités luiretombent sur les épaules.

Pour Sylvie Legault, le partage des tâchesa été déterminant dans sa décision d'avoirun enfant. Son chum était un gars respon-sable qui allait faire sa part. «Je vivais unepériode de bonheur complet. J'ai eu unenfant parce qu'Alain était disponible. Ilallait apprendre à devenir père comme moià devenir mère.» Maintenant qu'ils viventséparés, ils partagent la garde de l'enfant.Sylvie se dit pleinement satisfaite de lasituation et ajoute en riant : «Parfois, jepense que je suis une mère exemplaire !»

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Finalement, les filles ne sont pas trèsbavardes au chapitre de la politique. Ellesne croient pas pouvoir agir sur les struc-tures actuelles, persuadées que les institu-tions sont faites en fonction de ceux qui lesont créées. Par contre, elles croient qu'onattend beaucoup trop des jeunes et que çales hypothèque lourdement. «Libérerl'avenir, ce n'est pas uniquement l'affairedes jeunes», dit Dominique, reprenant lestermes de René Lévesque. «On ne nousdonne aucune chance et il faudrait sauverle monde en plus ! On trouve aussi ce genred'attente envers les femmes : elles doiventchanger les rapports du privé. C'est troplourd comme responsabilité et surtout, tropfacile pour ceux qui s'en débarrassent à sibon compte.»

Et c'est vrai, pourquoi camoufle-t-onencore l'intime et le privé ~> Pourtant, nosinterviewées croient que ces deux notionssont liées aux transformations sociales etéconomiques. Le jour de la grande marchepour l'emploi, en juin dernier, les clansétaient clairement démarqués : les hommesont parlé le langage de la politique tradi-tionnelle et les femmes ont réclamé - ironiedes choses - la transformation des rôlestraditionnels.

Sous prétexte que les filles d'aujourd'huin'adoptent pas les mêmes méthodes queleurs aînées, on s'empresse trop vite de direque la relève n'existe pas. Mais il faut plutôtvoir leur engagement autrement, cherchantà s'inscrire dans une réalité qui s'est trans-formée. De toute façon, il vaudrait mieuxéviter toute classification arbitraire partranche d'âge. Au bout du compte, lesopinions émises par nos interviewées, cesreprésentantes de «la jeunesse», rejoignentcelles d'autres féministes pour qui ce n'est(malheureusement?) pas l'année. Et inver-sement, les plus jeunes ne rejettent pas lesidées de celles qui les ont précédées. Pourtout dire, nous croyons que la jeunesse n'arien à voir avec l'âge.

Quant à nous, ce reportage nous a donnéle goût de poursuivre le dialogue. Nousavons été étonnées de l'assurance et de ladétermination chez la plupart des fillesrencontrées. Nous sommes ravies de leurfranchise et de la facilité avec laquelle ellesse sont confiées. Une ombre cependant autableau des confidences : la sexualité. Nosquestions étaient souvent détournées, lesréponses évasives. Nous sentions uneespèce de retenue, un peu de réticencemêlée à un évident besoin d'en parler Nousn'avons pas toujours réussi à lever le tabouqui entoure encore le sujet Là-dessus, leschoses ont peu changé ; même si on atendance à penser le contraire, l'éducationsexuelle demeure encore empreinte depudeur, de crainte et de silence. C'est notreseule déception : mais nous comptons bieny revenir. Nous savons maintenant que leféminisme à fait des «petites» J f*

MARIE-CLAIRE TRÉPANIER travaille depuisquatre ans dans le milieu littéraire et estmembre du comité de rédaction de LVR

septembre 1985