32
Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie Boutillier Blandine Laperche Université du Littoral-Côte d’Opale CLERSE (UMR, 8019), Réseau de Recherche sur l’innovation

Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

  • Upload
    others

  • View
    8

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Joan Robinson, économiste rebelle

1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris

« Penser et entreprendre au féminin »

Sophie Boutillier

Blandine Laperche

Université du Littoral-Côte d’Opale

CLERSE (UMR, 8019), Réseau de Recherche sur l’innovation

Page 2: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Joan Robinson (1903-1983)

Page 3: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Plan de la présentation

1. Les premières économistes : les vulgarisatrices et les collaboratrices

2. Joan Robinson : la deuxième économiste « à part entière » dans l’histoire de la théorie économique

3. Les grandes étapes d’un parcours intellectuel remarquable

4. Les influences théoriques fondamentales

5. Rien n’est jamais acquis, tout remettre en question

6. Bilan et perspectives, Joan Robinson est-elle un économiste comme les autres ?

Page 4: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

1. Les premières économistes, les vulgarisatrices et les collaboratrices Dans un article publié en 1992 dans « La revue française d’économie » (Vol 7, N°3, p. 113-138), Marie-Véronique Wittmann a réalisé une histoire des femmes-économistes.

Trois types de femmes-économistes : 1/ les vulgarisatrices, 2/ les collaboratrices et 3/ les économistes à part entière.

Lorsque l’économie politique se constitue en tant que discipline scientifique à part entière, au 18e siècle, les femmes dissertent, comme les hommes, dans les salons littéraires.

Page 5: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

François Quesnay et Madame de Pompadour

Page 6: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

1/ Les vulgarisatrices : deux pionnières

Janet Marcet (1769-1858) Harriet Martineau (1802-1876)

Page 7: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Janet Marcet et Harriet Martineau

Janet Marcet Fille d’un négociant suisse établi à Londres. Publie des ouvrages dans des domaines très variés : chimie, physique, économie. 1816 : « Conversations d’économie politique ». J.-B. Say : « c’est la seule femme qui écrit sur l’économie politique et elle s’y est montrée supérieure à beaucoup d’hommes ».

Harriet Martineau Née de parents français établis à Londres.

Elle publie en 1832 « La révolte et le renvoi des ouvriers ».

Influencée par les « Conversations d’économie politique » et se rend compte qu’elle fait de l’économie politique sans le savoir.

1832-34, elle publie « Illustration of Political economy » où elle illustre sous forme de dialogues les principes d’économie politique (Ricardo, Malthus).

Page 8: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

2/ Les collaboratrices

Dans son autobiographie, John Stuart Mill reconnait que sa femme eut une grande influence sur son œuvre, sans plus !

Mary Paley Marshall (1850-1944) écrit avec son mari « The economics of Industry » (1879). Mais, lorsque l’ouvrage fut réédité en 1892, Marshall effaça le nom de sa femme. Dans la préface, Marshall mentionne seulement une aide pour la relecture. Mary Paley fut pourtant la première femme qui enseigna l’économie à l’université de Cambridge. Mais, selon Keynes, une véritable association intellectuelle liait les deux époux.

Harriet Ann Jevons (1838-1910) travailla à la publication des œuvres posthumes de son mari.

Page 9: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

2/ Les collaboratrices (suite)

Elizabeth Boody Schumpeter (1898-1953) fit publier en 1954 l’ouvrage sur lequel J. A. Schumpeter travaillait depuis neuf ans, « Histoire de l’analyse économique ». Elle était économiste à l’université de Harvard.

Beatrice Potter Webb (1853-1943) participa à la création de la London School of Economics. En 1891, elle publie « Le mouvement coopératif en Grande-Bretagne ». Elle publie avec son époux, H. G. Webb, 14 ouvrages dont « Industrial democracy » (1897), et 8 en tant qu’unique auteur.

Aline Walras (1863-1942) a joué un rôle central dans l’œuvre de son père Léon Walras. Après sa mort, elle a largement contribué à diffuser l’œuvre de son père auprès des économistes qui la sollicitaient. Mais, elle n’était pas économiste. Son père l’appelait « ma petite ménagère » (Potier, Walker, 2011).

Page 10: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 11: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

2/ Les collaboratrices (suite)

Grace Jaffe rédige une thèse sur le mouvement ouvrier à Paris et devient en 1924 l’assistante de Richard Ely dans le département d’économie de l’université d’Evanston (Illinois). Elle rédige un chapitre sur Veblen dans « L’histoire économique des Etats-Unis ».

Vera Lutz (1912-1976) est proche de l’école autrichienne (F. Hayek). Elle publie avec son mari, Friedrich A. Lutz en 1951 « La théorie de l’investissement et de la firme ». A partir des années 1950, elle devient une économiste à part entière et mène sa propre carrière.

Page 12: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

3/ Joan Robinson : la deuxième économiste « à part entière » dans l’histoire de la théorie économique

Rosa Luxembourg (1871-1919) La première économiste à part entière 1907 : professeur à l’école centrale du Parti socialiste allemand.

Travaille à la rédaction de « Introduction à l’économie politique », mais met en évidence une contradiction dans « Le Capital » entre les schémas de la reproduction élargie et les contradictions internes du capitalisme.

1913 : publication de « L ’accumulation du capital » où elle met l’accent sur l’impérialisme.

Page 13: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

3/ Joan Robinson : la deuxième économiste « à part entière » dans l’histoire de la théorie économique (suite)

Joan Robinson est une économiste à part entière.

Elle publie entre 1933 et 1983 une dizaine d’ouvrages majeurs qui ont largement contribué à enrichir la théorie économique.

Trois ouvrages majeurs : « L’économie de la concurrence imparfaite » (1933), « Un essai sur l’économie de Marx » (1942) et « L’accumulation du capital » (1956).

Mais, elle ne devient professeur au poste jusque-là occupé par son mari, Austin Robinson (retraite) qu’en 1965 (elle prend sa retraite en 1972).

Austin Robinson est l’auteur de deux ouvrages : « The structure of competitive industry » (1931) et « Monopoly » (1934). Economiste proche de J. M. Keynes, il est aussi éditeur de « The Economic Journal » (créé en 1891).

Page 14: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 15: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

3/ Les grandes étapes d’un parcours intellectuel remarquable Née dans une famille de la haute société britannique (père et grand-père généraux), mais « traditionnellement contestataire » (Harcourt, 2001).

Fréquente l’une des écoles les plus réputée du Royaume-Uni, la Saint Paul’s Girl’s School de Londres (créée en 1904) où elle étudia l’histoire.

1922 : Inscription à l’université de Cambridge, imitant l’exemple donné par Mary Paley 50 ans plus tôt.

Elle choisit d’étudier l’économie principalement pour des raisons humanistes: comment lutter contre la pauvreté et le chômage?

1925 : elle est diplômée de l’université de Cambridge avec mention « assez-bien », ce fut pour elle une « grande déception ».

Page 16: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

L’université de Cambridge

Créée en 1209

Girton College, créé en 1869, premier collègue universitaire pour les femmes.

Les premières étudiants passent leurs examens en 1882.

Mais, il faut attendre 1947 pour que les femmes deviennent membres à part entière de l’université.

Page 17: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Des objectifs humanistes, dans « Contribution à l’économie contemporaine » (1978), elle écrit :

« Lorsque je suis arrivée à Cambridge (en octobre 1921) pour étudier l’économie, je ne savais pas trop de quoi il était question. J’espérais confusément que cette discipline m’aiderait à comprendre la pauvreté et les moyens permettant d’y remédier. Je croyais aussi que l’économie offrait une base de raisonnement rationnel plus large que l’histoire (mon sujet d’étude) tel qu’on l’enseignait à cette époque-là ».

Page 18: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Mais des espoirs déçus (idem):

« (…) la fonction de production s’est révélée être un puissant instrument de déséducation. L’étudiant en théorie économique doit écrire O = f (L, C), où L est une quantité de travail, C une quantité de capital et O le niveau de production des biens. Il doit supposer que tous les travailleurs sont interchangeables , et mesurer L en heures de travail d’homme ; on lui dit quelque chose à propos de l’indice retenu pour choisir une unité de production ; et on le presse de passer très vite à la question suivante dans l’espoir qu’il oubliera de se demander dans quelle unité on calcule C. Avant même qu’il se soit posé la question, il est devenu professeur, et c’est ainsi que se transmettent de génération en génération, des habitudes de pensée nébuleuses ».

Page 19: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 20: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 21: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

3/ Les grandes étapes d’un parcours intellectuel remarquable (suite) 1926 : mariage avec Austin Robinson. Ils séjournent pendant trois ans en Inde.

1929 : elle commence à enseigner l’économie, rencontre Keynes et découvre les travaux de Straffa.

1932 : première publication importante « Economics is a serious subject ».

1934 : elle est chargée de cours adjointe.

1937 : elle est chargée de cours.

Dans les années 1930, elle est l’un des membres les plus assidus du Cambridge Circus, un groupe de jeunes économistes réunis autour de Keynes pour l’aider à élaborer « La Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie ».

1949 : elle est maitre de conférences.

Dans les années 1950, Joan Robinson joue un rôle important dans la controverse des deux Cambridge (USA : la « grande synthèse »).

Après la guerre, elle continue à publier et est invitée dans un grand nombre d’universités pour faire des conférences…

Mais face au contexte politico-économique du monde, elle est de plus en plus pessimiste et déprimée par la course aux armements.

Page 22: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

4/ Les influences théoriques fondamentales Léon Walras Alfred Marshall

Arthur Pigou Pietro Straffa Michal Kalecki

John M. Keynes Karl Marx

Critique de l’ensemble du modèle théorique de Walras , en premier lieu la concurrence pure et parfaite, la firme et la rationalité économique

Marshall fut son professeur, alors qu’il était à Cambridge la référence incontestée en économie. Pigou est « tout à fait ignorant les réalités de l’industrie »

« La suggestion importante » de Straffa : la demande. Rendements croissants ou décroissants (non constants). Kalecki se base sur Marx et analyse la détermination des profits (a devancé Keynes selon JR)

Remise en cause fondamentale du modèle marginaliste. Remise en cause de la loi de Say. Rôle de la demande. Irrationalité du comportement des agents économiques. Anticipations

Influence de Kalecki Rapports sociaux conflictuels Cycles économiques Rapports d’exploitation Schéma de la reproduction élargie

Mettre l’accent sur les faits économiques, le temps, le progrès technique, les grandes entreprises et les forces sociales

Mettre l’accent sur la demande, sur les monopoles et les cycles économiques

Page 23: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

5/ Rien n’est jamais acquis, tout remettre en question/ Quels sont les principaux apports de Joan Robinson à la théorie économique ?

Théorie de la concurrence imparfaite (1933) [aux Etats-Unis, E. Chamberlin : « The theory of Monopolistic competition »], Joan Robinson met l’accent sur :

La discrimination par les prix,

Le pouvoir de marché par les grandes firmes,

L’homogénéité du produit,

L’élasticité de la demande par rapport au prix,

L’information est imparfaite.

« (…) Il est souvent possible et profitable pour un monopoliste de vendre un seul bien à différents prix et à différents acheteurs. Cela peut se produire lorsqu'il vend sur différents marchés séparés les uns des autres, de telle manière que les quantités vendues sur le marché le moins cher ne peuvent être achetées et revendues sur le marché le plus cher, et que les clients sur ce dernier ne peuvent se transférer sur le marché le moins cher pour bénéficier du prix plus faible » (Robinson, 1975, p.169).

Page 24: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

5/ Rien n’est jamais acquis, tout remettre en question/ Quels sont les principaux apports de Joan Robinson à la théorie économique ?

« L’accumulation du capital » (1956) : J. Robinson analyse le développement sur le long terme de l’économie capitaliste.

Selon ses dires, le taux d’intérêt n’est pas un paramètre essentiel de la croissance économique. C’est le profit qui est le seul moyen et le but de la croissance.

L’entreprise investit et accumule du capital en fonction des perspectives de vente et des profits auxquels elle s’attend la thèse du livre est résumée par Kalecki : « Les capitalistes gagnent ce qu’ils dépensent, les salariés dépensent ce qu’ils gagnent ».

Le profit revêt une dimension psychologique : pour gagner de l’argent, la création d’une entreprise n’est pas forcément le meilleur moyen…

Eléments contextuels :

1937 : John Hicks amalgame entre la théorie keynésienne et la théorie néoclassique (modèle IS-LM).

4939 : Roy Forbes Harrod donne sa version keynésienne de la croissance économique indépendante du taux d’intérêt (central pour les néoclassiques).

Page 25: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 26: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

5/ Rien n’est jamais acquis, tout remettre en question/ Quels sont les principaux apports de Joan Robinson à la théorie économique ? (suite)

« Essai sur l’économie de Marx » (1942)

Keynes n’apprécia pas du tout le livre. Dans une lettre adressée à Madame Austin Robinson, le 20/08/1942, il écrit que le livre était « aussi bien écrit que tout ce que vous avez fait auparavant… en dépit du fait qu’il y a quelque chose de fondamentalement ennuyeux dans le fait d’essayer de donner du sens à ce qui n’en a pas ». Il a « le sentiment que Marx était un très perspicace et original mais qu’il était vraiment un piètre penseur » (cité par Harcourt, 2001, p. 18).

Elle analyse dans cet ouvrage les apports de Marx, la théorie de l’exploitation, de la valeur travail, via Ricardo et la sous-consommation. Elle écrit : « le schéma de la reproduction élargie fournit une approche très simple et tout à fait indispensable au problème de l’épargne et de l’investissement, et de l’ajustement entre production de biens d’équipement et demande de biens de consommation ».

Dans « Lettre ouverte à un marxiste » (1953), Joan Robinson se définissait comme une « keynésienne de gauche ».

Page 27: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 28: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

6/Bilan et perspectives, Joan Robinson est-elle un économiste comme les autres ? En tant qu’intellectuelle Joan Robinson n’est pas devenue économiste d’abord pour faire

carrière, mais pour comprendre le monde, et sans doute, (cf. Marx), le transformer.

En parallèle à son activité d’enseignante et de chercheure, elle est aussi une militante pour diffuser la théorie keynésienne qu’elle a reformée dans une période économique difficile (les années 1930 et les années de croissance de l’après-guerre marquée par la guerre froide et la course aux armements). Elle était « une chercheuse passionnée de la vérité » (Dick Goodwin, cité par Harcourt, 2001, p. 28).

Page 29: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

6/Bilan et perspectives, Joan Robinson est-elle un économiste comme les autres ? Sur le plan théorique Joan Robinson a mis l’accent sur l’existence des grandes entreprises et leur extraordinaire

pourvoir de marché et a largement participé au développement de l’économie industrielle : « La volonté des firmes de s'agrandir a été un trait caractéristique du capitalisme depuis son début ; à la vérité, s'il n'en avait pas été ainsi, le capitalisme n'aurait jamais existé ». (« Hérésies économiques », 1976, p,170).

Les grandes entreprises ne sont pas un « accident », mais le résultat logique de l’évolution capitaliste (cf. Marx).

Remise en cause fondamentale du laisser-faire et de l’individualisme méthodologique : « Même lorsqu'il est techniquement possible de faire fonctionner le système sur la base du laisser-faire, le raisonnement (que chacun fasse ce qui est dans son propre intérêt et la concurrence parfaite garantira le bénéfice maximum pour tous, p.133) est, dans son essence, incohérent. Dans la poursuite de leur intérêt personnel, les individus découvrent qu'ils ont intérêt à s'unir et à se mettre d'accord pour ne pas entrer en concurrence les uns avec les autres » (Robinson, 1984, p. 133-134).

Page 30: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie
Page 31: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Pour conclure

« Les femmes économistes ont en commun d’avoir été à des titres divers des pionnières, en choisissant de manifester leur intérêt pour l’économie (J. Marcet et H. Martineau), en s’engageant dans des études jusque-là réserver aux hommes (M. Paley), en décidant de mener une carrière universitaire dans un milieu aussi fermé aux femmes que l’université de Cambridge » (Wittmann, 1992, p. 132)

Page 32: Joan Robinson, économiste rebelle - APEG...Joan Robinson, économiste rebelle 1903-1983 Journées pédagogiques 3 février 2017, Paris « Penser et entreprendre au féminin » Sophie

Merci pour votre attention