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4 AVENUE DE CORBERA 75012 PARIS - 01 53 02 06 60 JAN 15 Mensuel OJD : 72982 Surface approx. (cm²) : 202 N° de page : 22-23 Page 1/2 71 4529262400503/XHM/MCF/2 Tous droits réservés à l'éditeur ENTRETIEN > JOSE PLIVA THÉÂTRE 71 TEXTE ET MES JOSÉ PLIVA CANNIBALES Trois femmes, dans un parc public, font face à la disparition d'un enfant. C'est Cannibales, de l'auteur et metteur en scène José Pliya. Une réflexion sur la perte, la maternité et le vivre ensemble. Pourquoi avez-vous choisi, aujourd'hui, de revenir à Cannibales, pièce créée, en 2004, par Jacques Martial au Théâtre national de Chaillot? José Pliya : La mise en scene de Jacques Mar- tial était une première création. Il m'a semblé que le texte était suffisamment riche pour pro- poser d'autres variations, d'autres lectures. La mienne, en l'occurrence, participe d'un ques- tionnement obsessionnel qui traverse tout mon théâtre, le vivre ensemble Un questionnement qui est à la fois politique et métaphysique Com- ment faire de la scène ce territoire des origines, ce commencement premier où les hommes et les femmes peuvent s'asseoir, tranquilles, sur le rivage du monde 9 Lorsque les corps, frois- sés par les blessures de l'enfance, n'arrivent plus à s'exprimer, quelle(s) langue(s) faut-il inventer pour se retrouver'' Et même lorsqu'on a trouvé une langue commune, quelle musica- lité lui donner pour être certain de ne pas être dans l'incommunicabilité 9 Car l'ambition de ce théâtre du vivre ensemble est grande il s'agit bien de convoquer sur le plateau les vivants et les morts Dans mon théâtre, Cannibales pose cette question avec fulgurance. Vous comparez cette pièce à une enquête métaphysique. Que vise-t-elle à découvrir? J. Pl. : Les trois personnages de Cannibales usent du champ lexical du genre policier: crime, mobile, coupable, victime, enquête Maîs tout cela est mis au service d'une autre sémantique, celle de la recherche des causes et des principes premiers de la maternité. Christine (ndlr, interprétée par Lara Suyeux) et Martine (ndlr, interprétée par Claire Nebout), à travers leurs actes, cherchent à résoudre une énigme fondamentale pour la compréhension de notre monde, qu'est-ce que la proprieté'' Nicole (ndlr, interprétée par Marja Leena Junker), a travers ses silences, son ironie et sa froide clairvoyance, va proposer aux deux autres femmes un chemin radical et primitif de connaissance Cela pour trouver leur liberté. A travers quel travail de mise en scène sou- haitez-vous mettre en lumière ces trois indi- vidualités? J. Pl. : On est dans l'univers codifié du roman ou du film noir La création lumière installe un climat de nuit, de noirceur, d'obscurité expres- sionniste. Lenvironnement sonore baigne dans une ambiance de trottoir mouillé, de pluie, d'humidité Lespace scénographique décline de manière concrète l'esthétique d'une cer- taine urbanité celle du dédale, du labyrinthe, de ces villes aux rues sinueuses où l'on se perd

JOSÉ PLIVA CANNIBALES - Theatre 71 Scène … · José Pliya, né le 17 avril 1966 à Cotonou est un écrivain, dramaturge français d'origine béninoise. Il est le fils de Jean

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4 AVENUE DE CORBERA75012 PARIS - 01 53 02 06 60

JAN 15Mensuel

OJD : 72982

Surface approx. (cm²) : 202N° de page : 22-23

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Tous droits réservés à l'éditeur

ENTRETIEN > JOSE PLIVA

THÉÂTRE 71TEXTE ET MES JOSÉ PLIVA

CANNIBALESTrois femmes, dans un parcpublic, font face à la disparitiond'un enfant. C'est Cannibales, del'auteur et metteur en scène JoséPliya. Une réflexion sur la perte, lamaternité et le vivre ensemble.

Pourquoi avez-vous choisi, aujourd'hui, de revenir àCannibales, pièce créée, en 2004, par Jacques Martialau Théâtre national de Chaillot?José Pliya : La mise en scene de Jacques Mar-tial était une première création. Il m'a sembléque le texte était suffisamment riche pour pro-poser d'autres variations, d'autres lectures. Lamienne, en l'occurrence, participe d'un ques-tionnement obsessionnel qui traverse tout monthéâtre, le vivre ensemble Un questionnementqui est à la fois politique et métaphysique Com-ment faire de la scène ce territoire des origines,ce commencement premier où les hommes etles femmes peuvent s'asseoir, tranquilles, surle rivage du monde9 Lorsque les corps, frois-sés par les blessures de l'enfance, n'arriventplus à s'exprimer, quelle(s) langue(s) faut-ilinventer pour se retrouver'' Et même lorsqu'ona trouvé une langue commune, quelle musica-lité lui donner pour être certain de ne pas êtredans l'incommunicabilité9 Car l'ambition de cethéâtre du vivre ensemble est grande il s'agit

bien de convoquer sur le plateau les vivants etles morts Dans mon théâtre, Cannibales posecette question avec fulgurance.

Vous comparez cette pièce à une enquêtemétaphysique. Que vise-t-elle à découvrir?J. Pl. : Les trois personnages de Cannibalesusent du champ lexical du genre policier:crime, mobile, coupable, victime, enquêteMaîs tout cela est mis au service d'une autresémantique, celle de la recherche des causeset des principes premiers de la maternité.Christine (ndlr, interprétée par Lara Suyeux)et Martine (ndlr, interprétée par Claire Nebout),à travers leurs actes, cherchent à résoudre uneénigme fondamentale pour la compréhensionde notre monde, qu'est-ce que la proprieté''Nicole (ndlr, interprétée par Marja LeenaJunker), a travers ses silences, son ironie etsa froide clairvoyance, va proposer aux deuxautres femmes un chemin radical et primitif deconnaissance Cela pour trouver leur liberté.

A travers quel travail de mise en scène sou-haitez-vous mettre en lumière ces trois indi-vidualités?J. Pl. : On est dans l'univers codifié du romanou du film noir La création lumière installe unclimat de nuit, de noirceur, d'obscurité expres-sionniste. Lenvironnement sonore baigne dansune ambiance de trottoir mouillé, de pluie,d'humidité Lespace scénographique déclinede manière concrète l'esthétique d'une cer-taine urbanité celle du dédale, du labyrinthe,de ces villes aux rues sinueuses où l'on se perd

4 AVENUE DE CORBERA75012 PARIS - 01 53 02 06 60

JAN 15Mensuel

OJD : 72982

Surface approx. (cm²) : 202N° de page : 22-23

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Tous droits réservés à l'éditeur

"COMME UN JEU DE PISTEOÙ L'OBJECTIF EST DESE PERDRE POUR MIEUXTROUVER SA VÉRITÉ."JOSÉ PLIVA

malgré les panneaux d'indication Cannibales

fonctionne comme un jeu de piste où l'objectif

est de se perdre pour mieux trouver sa vérité.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

BBi•Pâtre 71 -Scène nationale de Malakoff, *5

3 place du 11 Novembre, 92240 Malakoff.

Du 20 au 30 janvier 2015. Les mardis et vendre-

dis à 20H30 ; les mercredis, jeudis et samedis à

19h30, les dimanches à 16h. Tél. 01 554891 00.www.theatre71.com.

Également au Théâtre national du Luxembourgles 12 et 13 février 2015, et au Théâtre du

, Passage à Neuchatel le 20 février.

149 RUE ANATOLE FRANCE92534 LEVALLOIS PERRET CEDEX - 01 41 34 60 00

14/20 JAN 15Hebdomadaire

OJD : 45158

Surface approx. (cm²) : 6

Page 1/1

711518862400504/GOP/ATF/2

Tous droits réservés à l'éditeur

CannibalesTexte et mise en scene Jose Pliya.Avec Marja Leena Junker, Lara Suyeux, Claire Nebout.Dans un parc, un landau, trois femmes, une voix « Mafille a disparu ' » Pas de battue policière pour rechercherla petite, maîs le questionnement d'une femme à troisvisages sur le rapport aux enfants et à l'amour maternel.Malakoff-Théatre 711 so

www.rfi.fr

Évaluation du siteLe site de Radio France Internationale propose des articles consacrés à l'actualité française etinternationale.

CibleGrand Public

Dynamisme* : 172* pages nouvelles en moyenne sur une semaine

71 / 236218262 Tous droits réservés à l'éditeur

Date : 14/01/2015

José PliyaPar : Yasmine Chouaki

José Pliya. DR

José Pliya, né le 17 avril 1966 à Cotonou est un écrivain, dramaturge français d'origine béninoise. Ilest le fils de Jean Pliya (haute personnalité de la vie politique, intellectuelle et littéraire en Afrique). Sapièce de théâtre Cannibales, sera présentée au Théâtre 71 de Malakoff, du 20 au 30 janvier 2015.

Pour en savoir plus sur Cannibales, ici.

Les choix musicaux de José Pliya

La CallasMme Butterfly

Sagbohan DanialouiA mon noude houndou

Christine and the queenSaint claude

Date : 15 JAN 15Pays : FrancePériodicité : Bimensuel

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71 0334182400502Tous droits réservés à l'éditeur

CannibalesChristine sommeille sur un banc dans unparc municipal, en fin d'après-midi, acôté de son landau où dort sa petite filleA son reveil, sa fille a disparu ll y a àcôté d'elle sur un autre banc, Nicole quin'aime pas les enfants ll y a sur un troi-sième banc Martine, assise, avec devantelle son landau où dort son petit garçonElles n'ont rien vu, rien entendu MaîsChristine va les contraindre à retrouversa fille dans leurs souvenirs, leurmémoire, leurs desirs maternelsFantasme ou réalité ? Le chemin surlequel José Pliya entraîne le spectateurest tout autre car l'enfant perdu n'estqu'un prétexte au questionnement d'unefemme à trois visages sur le rapport auxenfants et à l'amour maternel, le déses-poir de n'avoir jamais enfanté , la quêted'un miroir, le statut social Bref, toutce qui gravite autour du couple mère /nouveau-né Les actrices soutiennent lerythme de cette quête initiatique pourfouiller les voies énigmatiques de l'accèsà soi-même et réveiller le cannibale quisommeille en chacunDu 20 au 30 janvier 2015Théâtre 713, place du 11-novembre92240 MalakoffRéservations : 01 55 48 91 00www.theatre71 .com

Date : 24/01/2015Heure : 16:46:35Journaliste : Evelyne Trân

theatreauvent.blog.lemonde.frPays : FranceDynamisme : 4

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Tous droits réservés à l'éditeur 71 237061415

Cannibales de José Pliya – mise en scène José Pliya – au THEATRE71 – SCENE NATIONALE DE M ALAKOFF – 3 PLACE DU 11NOVEMBRE 92240 MALAKOFF – du mer. 21/01/15 au ven. 30/01/15

Jordan Allard (Création son) , Philippe Catalano (Création lumières) , José Pliya (Scénographie) , Florie Vaslin(Création costumes) , Danielle Vendé (Collaboration artistique)« Seul compte le puits sans fond de la souffrance …que l'on soit homme ou femme » nous dit José PLIYA à uncertain degré de malheur, en l'occurrence celle de la perte d'un enfant.

Ce n'est pas de ce malheur qu'il s'agit véritablement dans cette pièce. La femme qui s'exclame dans un jardinpublic « Ma fille a disparu » est dans une situation d'angoisse et de délire. Qu'elle ait besoin de la communiquer àdeux autres femmes inconnues, parait naturel. Trois voix de femmes s'écorchent sur une coquille vide, un landau,le lieu où aurait dû se trouver l'enfant. Ce faisant, il invoque la raison d'être de ces femmes d'un point de vuesociétal et politique.

Est-ce à dire que l'enfant occupe une place invraisemblable dans la tête de ses géniteurs. L'enfant objet de désirou de dénégation. Des personnes peuvent-elles partager leur part de vide, leur manque d'amour, leurs faiblessessans perdre la face. De façon très cruelle mais perspicace, José PLIYA découvre les stratégies d'individus quin'ont d'autre but que d'accomplir leurs désirs. Que ces stratégies relèvent de l'instinct de conservation, qu'ellessoient inconscientes ou reconnues par la société, qu'importe. Dans le lieu-dit de la parole, un ciel muet, un cielmaudit, à voix nues, chacune des femmes n'ont d'autre parti, d'autre profession de foi, que leurs propres désirs.L'une veut retrouver son enfant, l'autre est prête à tout pour en avoir un, la troisième qui prétend de ne pas aimerles enfants, cultive égoïstement le quant à soi.

Le manque d'empathie qu'éprouvent ces femmes les unes pour les autres est effrayant. Sont-elles devenues duresavec de la corne dans la paume des mains, à cause de cet enfant qui n'est pas là, un enfant projection de leursfantasmes, un enfant chose, un enfant à soi, un enfant propriété, chair de leur chair ?

José Pliya parle d'expérience. L'expérience que relate chacune de ces femmes peut être aussi bien celle dubonheur, de la jouissance, que celle de la désillusion, ou de la frustration. A travers leur parcours, le terrain bêchéau râteau, à la pelle, s'illusionne l'idée d'un endroit encore innocent celui où pourrait prendre place l'enfant idéal,telle une apparition.

Il faut se dégourdir sur l‘arène de l'imaginaire et du fantasme pour adhérer aux paroles très mûres de cespersonnages. A l'état de prétentions, leurs discours suscitent davantage l'interrogation rêveuse, la mélancolie quel'émotion.

Date : 24/01/2015Heure : 16:46:35Journaliste : Evelyne Trân

theatreauvent.blog.lemonde.frPays : FranceDynamisme : 4

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Tous droits réservés à l'éditeur 71 237061415

Chacune dans leurs rôles, les comédiennes s'impliquent fort bien dans leurs personnages. Celui de la femme âgée,égoïste est incarné de façon très humaine par Claire NEBOUT .Christine, la femme en mal d'enfant, interprétépar Lara SUYEUX devient un être irréel, un personnage presque fantôme, diabolique. Et Nicole, la jeune mèrenégligente, bénéficie de la fraicheur de son interprète Marja-Leena JUNKER.

Toutes vêtues de longues pèlerines, les trois femmes ont l'allure d'Erinyes, de mantes religieuses. La mise enscène dépouillée laisse donc la place au fantasme. C'est lui le carnivore des désirs humains. Impossible à balayerquoi qu'on dise.

Dans les rêves, qui nous rêve, est-ce l'enfant à venir, est-ce l'autre ? Est-ce la douleur qui réveille l'être ? Pourne pas succomber à la souffrance, il faut parler, aller regarder dans le puits malgré tout. José PLIYA martèle cepuits de paroles vivantes, volontaires et blessantes, et dans cette matière humaine qu'il remue physiquement etintellectuellement, comme un sculpteur, il laisse apparaitre, les radicelles, les plus résistantes qui véhiculent nosdésirs. C'est impressionnant !

Date : 28/01/2015Heure : 07:29:02

www.agoravox.frPays : FranceDynamisme : 48

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Tous droits réservés à l'éditeur 71 237359976

« Cannibales » dialectique & mise en scène de José PliyaAlors que le texte de « Cannibales » avait été mis en scène depuis une dizaine d’années par différentsréalisateurs à travers le monde, son auteur José Pliya souhaitait désormais y apporter sa propre contributionscénographique car celui-ci voulait y mettre en perspective la dimension métaphysique consubstantielle…jugée plutôt absente des créations précédentes de ses confrères.

Spéculant donc sur l’absence ou le manque d’enfant, quelle qu’en soit la cause indifférenciée, c’est enpartant d’une souffrance personnelle vécue au masculin que le dramaturge a projeté, symétriquementsur trois personnages féminins n’en formant qu’un, cet ensemble d’attitudes à la fois contradictoires maisaisément complémentaires.

Ainsi Christine, Martine et Nicole vont-elles durant une heure et demie s’affronter dans le cadre virtuel d’unsquare public, à coups de répliques dialectiques singeant la disparition, la simulation et la dénégation.

« Désirer », « abandonner » et « refouler » vont se battre en duel comme sur le divan d’une psychanalysedéplaçant le transfert de l’une à l’autre à la manière de chaises musicales tentant d’exclure, à tour de rôle,leur maillon faible.

C’est bel et bien à un jeu de société auquel se livrent les trois comédiennes dont l’enjeu ne serait autre quela survie identitaire personnelle dans l’adaptation au manque cruel, identifié ou non mais assumé jusqu’enses lourdes menaces dépressives.

Chacune devra se positionner dans sa propre logique intérieure tout en faisant place ou non à celle deses deux partenaires, en une synergie pouvant éventuellement se conceptualiser dans la triple structurefreudienne du « moi », du « surmoi » et de « l’inconscient ».

Intense prestation des trois comédiennes, Lara Suyeux, Claire Nebout & Marja Leena Junker qui semblentse déplacer sur le plateau du Théâtre 71 de Malakoff comme aimantées, dans un dédale de pulsions et derépulsions, à la fois par une inquiétude sourde et en même temps, par une étrange force surnaturelle.

Tout au long des pérégrinations accompagnant cette quête transgressive, un caddie quasiment hors d’usagefera office désuet de landau en transport délirant de toutes les inhibitions faisant frein à l’envie symboliqued’émancipation… mais paradoxalement, si bien partagée.

photo 1 © Theothea.com

photo 2 © Claire Besse

CANNIBALES - ***. Theothea.com - de & mise en scène José Pliya - avec Marja Leena junker, Lara Suyeux& Claire Nebout - Théâtre 71 Malakoff

CANNIBALES photo 2 © Claire Besse

CANNIBALES / José Pliya / Théâtre 71

Cécile.Charbit

Cannibales, c’est l’histoire d’une disparition.

Dans un parc municipal, Christine s’est involontairement assoupie. A son réveil,

sa fille a disparu. Deux autres femmes sont avec elle dans ce parc : Nicole qui

n’aime pas les enfants et ne souhaite pas être dérangée, et Martine face à un

landau. Ces deux femmes affirment ne rien savoir de la disparition de la fille de

Christine. Celle-ci ne les croit pas et tente de les pousser dans leurs

retranchements.

Le début du spectacle joue avec les codes du film noir. L’obscurité de la nuit

est fendue par une lumière blanche expressionniste et éclairant le plateau avec

géométrie. La pluie se fait entendre à plusieurs reprises. Ces trois femmes sont

seules dans ce parc que l’on nous dit « immense ». Leur solitude est lisible mais

on peut regretter ne pas ressentir le sentiment d’angoisse qui les relie.

L’enquête autour de la disparition de la fille de Christine n’est qu’un prétexte

pour José Pliya. Le réel enjeu est une « enquête métaphysique » comme il

l’explique lui-même dans la note d’intention du spectacle. Il s’agit de

s’interroger sur la maternité, ses causes. Pourquoi une femme décide-t-elle

d’enfanter ou non? Chacune des trois femmes vit la maternité à un stade

différent. Christine est dans une phase égoïste où seul son enfant a du sens. Le

landau de Martine est vide mais lui permet d’exister. Avoir un enfant, même

chimérique, permet une reconnaissance de la société. Nicole est la plus âgée et

émancipée des trois. Pour survivre à la douleur de la perte qu’elle a connue, elle

est entrée dans une phase de cannibalisme. Manger l’objet de souffrance lui

permettrait de détruire la douleur elle-même, et ce qui l’entoure.

L’incommunicabilité entre ses trois femmes est mise au centre du spectacle et

pose de nombreuses questions sur la manière de s’exprimer et sur la possibilité

d’une vie collective. Cependant, cette incommunicabilité peut-être lassante pour

le spectateur. Chacune joue sa partition avec une adresse semblant souvent

artificielle. Il n’y a pas d’échange concret, et l’émotion est difficilement

palpable pour le spectateur. Parler de l’incommunicabilité au théâtre est un défi.

L’écueil semble atteint dans Cannibales : nous aimerions plus de réalité pour

servir le texte de José Pliya.

MARDI 20 > VENDREDI 30 JANVIER 2015 au Théâtre 71

MARDI ET VENDREDI À 20H30

MERCREDI, JEUDI ET SAMEDI À 19H30 DIMANCHE À 16H

Texte et mise en scène José Pliya (Éd. L’avant-scène théâtre, Coll. des Quatre-Vents)

avec Marja leena junker, Lara Suyeux, Claire Nebout

THÉÂTRE - CRITIQUE

Théâtre 71 / texte et mes José Pliya

C A N N I B A L ES Publié le 24 janvier 2015 - N° 228

et metteur en scène José Pliya crée C annibales à la Scène nationale de Malakoff.

Mar ja-Leena Junker , Lara Suyeux et C laire Nebout interprètent ce jeu de miroirs

déformant autour de la question de la maternité.

: Claire Nebout, Lara Suyeux et Marja-Leena Junker dans Cannibales. Crédit visuel : Claire Besse

Compagnie de la Comédie Noir (alors dirigée par le comédien et metteur en scène Jacques Martial) que José Pliya écrit Cannibales, en 2002. Créée deux ans

sans décor conçu par José Pliya prend ses distances avec la représentation aux teintes plus réalistes signée par Jacques Martial en 2004. Dans cette nouvelle version de la pièce, aucun banc

p

des interprètes à deux, tantôt à trois voix que Cannibales dont le mystère change de nature au fil du spectacle.

T rois personnalités en souffrance Cette disparition agit sur les trois femmes comme un détonateur à effet progressif. Prises dans le jeu de miroirs déformant des simulacres sociaux, Christine (Lara Suyeux), Nicole (Marja-Leena

les unes après les autres, les replis de leur personnalité torturée. Il y a quelque chose de

u alors, plus rarement, corps contre corps, les trois comédiennes font sonner leurs répliques, en dehors de tout artifice psychologique, comme autant de plaidoiries ou de réquisitoires. Tout cela passe par des hauts et des bas, par des

-delà de ces irrégularités, le spectacle nous emporte. Nous égare et nous surprend. Instaurant un climat

Cannibales nous entraîne dans un labyrinthe dangereux. Un labyrinthe dont les impasses se heurtent aux thèmes de la maternité, du

Manuel Piolat Soleymat

 

le blog de martine silber:

marsupilamima,

Cannibales de José Pliya, mise en scène de l'auteur au Théâtre 71 de Malakoff

Premier choc, une ouverture visuelle et sonore. Lumière rasante sous un ciel bas qui scintille comme des réverbères aperçus entre les feuilles des arbres par grand vent, bruit de pluie qui tombe dru, quelques cris d'oiseau.

Deuxième choc, la beauté de la langue. La femme qui apparaît sous la lumière, long manteau rouge sur une robe noire courte, entame un long monologue et dès les premiers mots, on sait qu'on ne la quittera plus. Elle s'adresse à une autre femme qui assise sur un banc lui tourne le dos. Un dos qui se dresse comme un mur, un dos qui dit non et refuse toute communication. Mais la femme en manteau rouge, Christine, insiste. Sa fille a disparu. Sa fille, Christine, comme elle.Elle s'est assoupie un court moment et à son réveil plus d'enfant. Elle plaide, supplie, sait qu'elle dérange mais sa fille a disparu, qu'on veuille bien lui pardonner.

La femme de dos, qu'on appelera plus tard Nicole, ne veut rien entendre, littéralement. Son dos immobile le fait savoir. Mais, elle est contrainte de répondre à tant d'insistance. Elle n'aime pas les enfants. Et si dans ce parc immense, elle s'est assise là, sur ce banc, dans un endroit à l'écart, c'est pour ne pas être dérangée. Sa voix est chargée de colère et de mépris, sa voix est comme son dos. Alors intervient la troisième femme, Martine, long manteau rouge sur une robe noire, courte. Elle voudrait calmer Christine qui parle trop fort et risque de réveiller son fils, Martin, qui dort là, dans son landeau bleu marine. Alors, elle pourra l'aider. Trois femmes à des points différents de leur vie. Chrstine, sans doute la plus jeune, encore pleine d'espoir. Martine, un peu plus âgée, apparemment plus sage et plus calme mais prête à montrer les dents si le besoin s'en fait sentir, Nicole, la plus âgée, dont la sérénité apparente, peut exploser à tout moment.

S'en suivent un jeu d'alliances qui se font et se défont, un jeu de la vérité destructeur et cruel, matérialisés par une sorte de triangulation scénique qui fait se déplacer les actrices en lignes droites, les deux femmes en rouge et la femme en noir. Mais jamais elles ne s'éloignent pour chercher l'enfant disparue. Jamais. Bien sûr. Il ne s'agit pas d'un fait-divers. Pas d'alerte enlèvement, pas de sirènes, pas d'attroupement. Bien sûr que non. C'est une lutte acharnée autour non pas d'un enfant, mais du désir d'enfant. Une lutte à la vie à la mort, sans victoire et sans défaite. une lutte qui transforme ces trois femmes en guerrières, en sorcières, en mères. Un désir d'enfant qui va les tranfigurer. Mais comme le dira Christine : " Ce n'est pas de la violence, c'est une recherche légitime." Portées par une mise en scène et une dramaturgie magistrales, par une bande sonore discrète et fascinante, par les lumières impitoyables et par ce texte à couper le souffle, les trois actrices (Marja Leena Junker, Lara Suyeux, Claire Nebout) sont remarquables d'intensité, de présence, de force. Photos: Claire Besse