31
Ouvrir les portes de notre cœur et de notre esprit à l’Autre! Faire preuve de cette « entière générosité » à laquelle nous appelle le Seigneur, pourrait être la mission de partage que nous pourrions décider de vivre tout au long de ces mois d’été. Pour qu’une nouvelle « multiplication des pains » puisse être accomplie à travers notre présence auprès de l’Autre, et que nous puissions lui apporter tout ce dont il a besoin d’aides matérielles, mais surtout de nourritures spirituelles, nous avons à décider d’entreprendre cette démarche d’ouverture et d’écoute, sans laquelle notre foi demeure statique, sans l’action qui lui est complémentaire et qui doit l’accompagner. Cette foi agissante est la dimension spirituelle, tellement essentielle à tous, et qu’il est dans notre pouvoir d’offrir à toutes celles et ceux fragilisés par la vie. La seule exemplarité de notre vécu, notre attitude de témoins du Christ, en parole et par action, apparaîtra alors comme le vecteur de générosité et de totale cohérence avec le message dont le Christ nous a faits les héritiers. Jésus réunit ses disciples et les envoie porter la Bonne Nouvelle dans toutes les régions et villages de la Palestine d’alors, ils sont investis de cette mission d’évangélisation par le Christ lui-même et par Dieu qui leur offre les pouvoirs de leur foi agissante, celle qui peut transformer le monde en allégeant la souffrance, et en éradiquant le mal. Il nous est donné aujourd’hui de partager les mêmes pouvoirs par la force de cette même foi agissante, pour que nous puissions transformer le monde dans lequel nous vivons, en lui redonnant la dimension spirituelle, de laquelle il s’est tellement éloigné, et retrouver cet équilibre essentiel entre la matière dont nous sommes faits et l’Esprit qui nous habite. Laissons-nous habiter totalement par l’esprit et allons donc à la recherche de cet équilibre en mettant en pratique à chaque instant de notre vie la Parole du Seigneur, alors nous aurons contribué à la transformation du mal en bien et de notre monde de violences et de ruptures en un monde d’harmonie et de vrai fraternité Fra’ Jean-Louis ÉDITORIAL sommaire 25 « « 1 16 30 40 48 2 18 34 42 50 6 20 36 44 54 12 28 38 46 56 60 ÉDITORIAL THÈME LITURGIQUE DU MOIS MÉDITATION DOMINICALE LA PSALMODIE OU LITURGIE DU CŒUR L’ABÉCÉDAIRE DE LA FOI ENQUÊTE DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN COUP DE COEUR UNE ANNÉE AVEC LE PAPE FRANCOIS LES ESPACES DE LA PRIÈRE PÈLERINAGE STABAT MATER CONTEMPLER L’APOCALYPSE ANNIVERSAIRE DES SAINTS ENTREPRENDRE UNE DIVINE EXIGENCE SE LIBÉRER DE L’ARGENT DOSSIER MARIAGE LA VIE INTÉRIEURE DE NOS ENFANTS SAINT LÉON LE GRAND LES CHRÉTIENS D'ORIENT LE « NOTRE PÈRE » - IX O Un Cœur-à-Cœur avec Dieu Un bulletin paroissial mensuel JUILLET 2015

JUILLET 2015 - Paroisse Saint Antoine De Padoue · UNE ANNÉE AVEC LE PAPE FRANCOIS LES ESPACES DE LA PRIÈRE PÈLERINAGE STABAT MATER CONTEMPLER L’APOCALYPSE ANNIVERSAIRE DES SAINTS

Embed Size (px)

Citation preview

Ouvrir les portes de notre cœur et de notre esprit à l’Autre! Faire preuve de cette « entière générosité » à laquelle nous appelle le Seigneur, pourrait être la mission de partage que nous pourrions décider de vivre

tout au long de ces mois d’été. ▪ Pour qu’une nouvelle « multiplication des pains » puisse être accomplie à

travers notre présence auprès de l’Autre, et que nous puissions lui apporter tout ce dont il a besoin d’aides matérielles, mais surtout de nourritures spirituelles, nous avons à décider d’entreprendre cette démarche d’ouverture et d’écoute, sans laquelle notre foi demeure statique, sans l’action qui lui est complémentaire et qui doit l’accompagner. Cette foi agissante est la dimension spirituelle, tellement essentielle à tous, et qu’il est dans notre pouvoir d’offrir à toutes celles et ceux fragilisés par la vie. La seule exemplarité de notre vécu, notre attitude de témoins du Christ, en parole et par action, apparaîtra alors comme le vecteur de générosité et de totale cohérence avec le message dont le Christ nous a faits les héritiers.

▪ Jésus réunit ses disciples et les envoie porter la Bonne Nouvelle dans toutes les régions et villages de la Palestine d’alors, ils sont investis de cette mission d’évangélisation par le Christ lui-même et par Dieu qui leur offre les pouvoirs de leur foi agissante, celle qui peut transformer le monde en allégeant la souffrance, et en éradiquant le mal.

▪ Il nous est donné aujourd’hui de partager les mêmes pouvoirs par la force de cette même foi agissante, pour que nous puissions transformer le monde dans lequel nous vivons, en lui redonnant la dimension spirituelle, de laquelle il s’est tellement éloigné, et retrouver cet équilibre essentiel entre la matière dont nous sommes faits et l’Esprit qui nous habite. Laissons-nous habiter totalement par l’esprit et allons donc à la recherche de cet équilibre en mettant en pratique à chaque instant de notre vie la Parole du Seigneur, alors nous aurons contribué à la transformation du mal en bien et de notre monde de violences et de ruptures en un monde d’harmonie et de vrai fraternité

Fra’ Jean-Louis

ÉDITORIALsommaire25

« «

1

16

30

40

48

2

18

34

42

50

6

20

36

44

54

12

28

38

46

5660

ÉDITORIAL THÈME LITURGIQUE DU MOISMÉDITATION DOMINICALELA PSALMODIEOU LITURGIE DU CŒURL’ABÉCÉDAIRE DE LA FOIENQUÊTE DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN COUP DE COEURUNE ANNÉE AVEC LE PAPE FRANCOIS LES ESPACES DE LA PRIÈRE PÈLERINAGESTABAT MATERCONTEMPLER L’APOCALYPSE ANNIVERSAIRE DES SAINTSENTREPRENDRE UNE DIVINE EXIGENCESE LIBÉRER DE L’ARGENT DOSSIER MARIAGELA VIE INTÉRIEURE DE NOS ENFANTS SAINT LÉON LE GRANDLES CHRÉTIENS D'ORIENTLE « NOTRE PÈRE » - IX

O

Un Cœur-à-Cœur avec DieuUn bulletin paroissial mensuel

JU

ILL

ET

20

15

32

S’OUVRIR AU MONDE

THÈME LITURGIQUE DU MOIS S’OUVRIR AU MONDE

Juillet et la douceur de l’été. Juillet et l’envie de partir, de quitter le lieu du quotidien, de s’évader vers d’autres terres. Nous fermons les yeux et, l’espace d’un instant, nous voici au bout du monde. Ceci est un rêve ! Mais peut-être Dieu a-t-il le désir de nous envoyer ailleurs. Quitte ton pays, va vers le pays que je te mon trerai (Gn 12, 1), disait-il à Abraham au début de l’aventure dans laquelle il s’est engagé en écoutant la parole de Dieu. Mieux que le rêve, cette parole de Dieu que nous entendons quotidiennement a le pouvoir d’engen drer des déplacements extérieurs : gestes humbles et petits, mais réels et efficaces. Peut-être n’irons-nous pas au-delà de notre quartier ou de notre village, peut-être prendrons-nous le chemin vers de nouveaux horizons, ce qui compte, c’est la disponibilité, celle du cœur s’ou vrant au monde de l’autre, du prochain, du pauvre, de l’ami, au monde toujours nouveau de l’inattendu de Dieu.La Parole nous invite à la disponibilité d’Abraham se laissant conduire et acceptant la promesse de Dieu, à la disponibilité des disciples découvrant le sens de la mission et la joie qui en découle en voyant les hommes accueillir la bonne nouvelle du salut. Puisque le rythme estival fait tomber la tension du quotidien, prenons le temps d’être attentifs à la grande foule qui, autour de nous, cherche à voir ce Jésus vers qui nous pouvons la conduire.

Bernadette Mélois

À l’instar du titre de cette rubrique, « egard sur la liturgie », cette citation de saint Augustin nous invite ce mois-ci à porter notre regard sur le chant dans la liturgie et dans son rapport avec l’expression de

la foi. En ce sens, l’invitation de l’évêque d’Hippone (IVe-Ve s.) trouvera en quelque sorte son fondement dans cet adage fort célèbre en liturgie, formulé quelques années plus tard par Prosper d’Aquitaine (Ve s.), disciple d’Augustin : Lexorandi, lexcredendi — la loi de la prière est la loi de la foi. Plus proche de nous dans le temps, il y a tout juste vingt ans, se mettait en place une Commission épiscopale pour la promotion de chants liturgiques qui « portent la prière chrétienne et éduquent une expression juste de la foi » car, rappelait-on alors, « la foi qui s’imprime dans le cœur des fidèles est celle que la prière et les chants énoncent ». Mais, au-delà de l’aspect disciplinaire et de la confor mité à la doctrine catholique, quelle est la raison qui fonde véritablement la nécessité pour le chant liturgique d’exprimer « ce que nous croyons » ? Et pourquoi saint Augustin invite-t-il son interlocuteur à « voir ce que nous chantons » ?

LA FOI NAÎT DE L’ÉCOUTE À la première question, on peut d’abord répondre que la raison essentielle semble toute contenue dans l’invita tion d’Augustin et rejoint ce que l’Écriture affirme elle-même : La foi naît de ce que l’on entend, dit saint Paul ; et l’apôtre de poursuivre : Et ce que l’on entend, c’est la parole du Christ (Rm 10, 17). Cette affirmation pauli nienne capitale s’origine dans ce qui est déjà au fondement même de la foi juive et au cœur de sa prière quotidienne : Écoute, Israël (Dt 6,8). Par ailleurs, en ce mois de juillet où nous fêterons saint Benoît, rappelons que sa règle (VIe s.) commence par ce tout premier mot : « Écoute... » Bref, cette écoute se trouve ainsi à l’origine de toute forme de prédication, dans l’annonce de l’Évangile, au temps des premiers chrétiens comme au nôtre, puisque « c’est la Parole entendue qui conduit à croire ». C’est pourquoi la Constitution sur la liturgie de Vatican II dit au n° 24 que « dans la célébration de la liturgie, la Sainte Écriture est de la plus grande importance. C’est d’elle que sont tirés les textes qui sont lus et qui sont expliqués dans l’homé lie, ainsi que les psaumes qui sont chantés ».

LA NATURE DIALOGALE DE LA LITURGIECe faisant, la même Constitution au n° 33 rappelle que « dans la liturgie, Dieu parle à son peuple ; le Christ annonce à Dieu par les chants et la prière ». Dans ce dialogue entre Dieu et son peuple, fruit d’une écoute réciproque, il est donc naturel que la réponse du peuple à son Dieu prenne source dans le matériau même de ce qu’il a entendu et écouté en assemblée pour pouvoir le faire sien et l’actua liser, comme le précise encore la Constitution : «Les textes destinés au chant sacré seront conformes à la doctrine catholique et même seront tirés de préférence des Saintes Écritures et des sources liturgiques) (SC, n° 121).

LA PAROLE CRÉATRICEC’est pourquoi, elle ajoute à propos de la parole de Dieu: « C’est sous son inspiration et sous son impulsion que les prières, les oraisons et les hymnes liturgiques ont pris naissance et c’est d’elle que les actions et les signes reçoivent leur signification» (SC, n° 24). La priorité accor dée à la parole de Dieu comme source d’inspiration pour les textes des chants dans la liturgie est donc à considérer, non comme une règle formelle, mais comme une prio rité dynamique qui produit prières, oraisons et hymnes à partir du matériau même de l’Écriture proclamée et écoutée, méditée et actualisée, en Église.

LE CHANT, UNE PRÉDICATION DE LA FOISi le chant de l’Église se trouve ainsi pétri de la parole de Dieu, il devient de facto l’une des médiations privilé giées de la confession orale de la foi. Il apparaît donc ici clairement qu’à travers « ces vecteurs de la foi que sont les chants » s’exerce « une réelle prédication de la foi, d’autant plus efficace que les mots mis en musique sont répétés par les fidèles au point de faire partie de leur identité : c’est donc un acte qui engage non seulement l’expression de la foi, mais l’être chrétien tout entier ».

... PAR LA VOIX DES BAPTISÉS, CORPS DU CHRISTOr, si cela concerne « l’être chrétien tout entier », cela signifie que le corps y est tout entier engagé. Et non seulement le corps personnel, mais l’ensemble du corps ecclésial qui forme le corps du Christ ressuscité, don nant ainsi voix à son corps mystique, voix qui est, tout à la fois, la voix sacrée des baptisés qui offrent à Dieu, par Jésus, un sacrifice de louange, c’est-à-dire l’acte de foi qui sort de [leurs] lèvres en l’honneur de son nom (He 13, 15) et qui chantent le cantique nouveau du peuple des sauvés, et la voix du Christ lui-même, mort et ressuscité pour nous, élevant par nos lèvres sa louange vers le Père dans le souffle de l’Esprit saint.

LE CHANT, UNE ACTION DU CHRIST...Dès lors, si saint Augustin invite à « voir » ce que nous chantons, c’est parce que le chant est d’abord et avant tout, dans la liturgie, une action du Christ, tête et corps ; il « n’est » pas quelque chose, mais il « fait » quelque chose : il nous transforme, il fait de nous le cantique nouveau, à condition bien sûr que nous entrions dans le mémorial liturgique avec confiance, avec cette foi qui va se nourrir, dimanche après dimanche, de sa propre manifestation.

REGARD SUR LA LITURGIE« SI TU VEUX SAVOIR CE QUE NOUS CROYONS, VIENS VOIR CE QUE NOUS CHANTONS »

Père François-Xavier Ledoux

A

54 THÈME LITURGIQUE DU MOIS S’OUVRIR AU MONDE

... QUI SE DONNE À VOIR DANS LE CHANTEUR...Et c’est là sans doute la seconde raison pour laquelle saint Augustin invite à « voir » ce que nous chantons : pour lui, le cantique nouveau, c’est le chanteur lui-même, et chanter est le propre de celui qui aime, rejoignant ainsi le commandement nouveau (Aimez-vous les uns les autres) qui doit se donner à voir pour que nous soyons vraiment reconnus comme disciples du Christ (cf. Jn 13, 34-35) et qu’ainsi nous fassions chanter la Vérité : « Chantez avec la voix, chantez avec le cœur, chantez avec la bouche,chantez par toute votre vie : Chantez au Seigneur un chant nouveau.[...] Vous cherchez où sont ses louanges ? Sa louange est dans l’assemblée des fidèles. La louange de celui que l’on veut chanter, c’est le chanteur lui-même. Vous voulez dire les louanges de Dieu ? Soyez ce que vous dites. Vous êtes sa louange, si vous vivez selon le bien. »

Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison (Mc 6,4).

Dans des termes à peu près semblables, les trois Évangiles synoptiques rapportent l’épisode de la venue de Jésus dans la synagogue de Nazareth un matin de shabbat. Après un accueil chaleureux, il fut finalement éconduit et en tira une leçon amère sur un thème malheureusement connu : « Aucun prophète n’est bien reçu dans sa patrie », que nous traduisons aujourd’hui par : « Nul n’est prophète en son pays. » S’il en a fait cruellement l’expérience pour lui-même, Jésus ne fut pas le premier ni le seul. À qui faisait-il allusion en citant le dicton ? À Jérémie, proba-blement, qui fut tant de fois maltraité, persécuté pour avoir seulement osé dire la vérité, sur ordre de Dieu,

Nul n’est prophète en son pays, peut-être, mais le prédi-cateur venu d’ailleurs n’est pas forcément mieux accueilli ! Ce fut en tout cas l’expérience cuisante du prophète Amos, au vine siècle avant notre ère. Modeste éleveur de bétail dans la région de Bethléem, dans le royaume du Sud, il se trouva, par la volonté de Dieu, propulsé prophète dans le royaume du Nord. Cela ne dura que quelques mois car il fut bien vite renvoyé à son troupeau. Ses pro pos étaient bien trop désagréables. Mais il eut quand même le temps d’asséner quelques vérités que lui ins piraient les agissements des habitants de Samarie. Voici l’une d’elles, particulièrement bien tournée : Je déteste vos pèlerinages, dit Dieu [...]. Éloignez de moi le bruit de vos cantiques [...]. Mais que le droit jaillisse comme les eaux et la justice

Nul n’est prophète en son pays, on le sait. Curieusement, la gloire posthume des prophètes d’Is raël comme Amos ou Élisée ou Jérémie n’est guère en rapport avec les difficultés, le mépris, parfois même les persécutions, qu’ils ont endurés de leur vivant !

... PAR SON CHANT ET PAR SA VIEInviter à « voir » ce que nous chantons n’est donc pas si paradoxal, car ce que l’on croit ne peut être dissocié de notre témoignage de disciples qui écoutent la parole de Dieu. Cette « loi » de la foi qui n’est pas seulement loi de la prière, et réciproquement, mais qui est aussi, indissociablement, la loi de l’amour plus fort que la haine, « loi » qui doit être tout particulièrement médiatisée, dans la liturgie, par nos chants et nos prières, et par nos actes dans notre vie chrétienne : un cantique nouveau verbo et exemplo — par la parole et par l’exemple. « Peuple d’un Dieu qui fait merveille, sois sa merveille d’aujourd’hui. »Musicien et chanteur, maître ès lettres, licencié en théologie sacra mentaire et liturgie, le père François-Xavier Ledoux contribue depuis plusieurs années à la réflexion sur la musique et le chant dans la liturgie, à travers de nombreuses formations, articles, confé rences et émissions de radio.

de surcroît. Un autre exemple était célèbre, celui d’Ézékiel, que Dieu avait bien prévenu des déceptions qui l’atten daient : Écoute, fils d’homme ! Les gens de ton peuple, ceux qui bavardent sur toi le long des murs et aux portes des maisons, parlant les uns avec les autres, chacun avec son frère, ils disent : « Venez écouter quelle parole vient de la part du Seigneur !» Ils viendront à toi comme au rassemblement du peuple ; ils s’assiéront devant toi, eux, mon peuple ; ils écouteront tes paroles mais ne les mettront pas en pratique car leur bouche est pleine des passions qu’ils veulent assouvir : leur cœur suit leur profit. Au fond, tu es pour eux comme un chant passionné, d’une belle sonorité, avec un bon accompagnement. Ils écoutent tes paroles mais personne ne les met en pra tique (Ez 33, 30-32, TOB). Que de prédicateurs, de parents et d’éducateurs devraient relire ces sages paroles pour oser persévérer comme Ézékiel !

comme un torrent intarissable ! (Am 5, 21.23.24). Car il avait vite fait de s’apercevoir que la religion n’était que de façade : l’apparat des magni fiques célébrations ne lui faisait pas oublier la dureté de cœur des riches et leur indifférence au sort des pauvres. En somme, la parabole de Lazare et du riche aurait pu s’inspirer de la réalité qu’Amos avait sous les yeux tous les jours. C’est au nom de la paix sociale que cet empêcheur de danser en rond fut proprement expulsé sur ordre du roi Jéroboam, dûment conseillé par le grand prêtre de Béthel. Heureusement pour nous, Amos a eu le temps de prononcer quelques prédications musclées rassemblées dans un tout petit livre magnifique et bien représentatif de la prédication prophétique en Israël.

AMOS15e dimanche du temps ordinaire, B

TOI, LE VOYANT, VA-T’EN D’ICI! (AM 7, 12).

PETITE CHRONIQUE BIBLIQUEMarie-Noëlle Thabut

NUL N’EST PROPHÈTE EN SON PAYS14e dimanche du temps ordinaire, B

76 MÉDITATION DOMINICALE - I

EVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT MARC 6, 1-6

POUR MÉDITER L'ÉVANGILE

DIMANCHE 5 JUILLET14E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE - B

« Jésus n’est pas accepté dans son pays »Jésus est parti pour son pays, et ses disciples le suivent. Le jour du sabbat, il se mit à enseigner dans la synagogue. De nombreux auditeurs, frappés d’étonnement, disaient : « D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée, et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ? N’est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Et ils étaient profondément choqués à son sujet. Jésus leur disait : « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. » Et là il ne pouvait accomplir aucun miracle ; il guérit seulement quelques malades en leur imposant les mains. Et il s’étonna de leur manque de foi. Jésus parcourait les villages d’alentour en enseignant.

D'après l'évangile de Marc, Jésus a quitté son village de Nazareth au début de sa vie publique pour rejoindre Jean-Baptiste au bord du Jourdain et se faire baptiser (1, 9). Puis il a commencé sa prédication en parcourant une partie de la Galilée ; il est même allé de l'autre côté de la mer de Tibériade, dans les villes de la Décapole (chap. 5). Quand il s'installe quelque part, Capharnaüm semble être sa ville d'élection ; il n'est plus question de Nazareth pendant les cinq premiers chapitres de Marc ; quant à son entourage, il s'est choisi des amis, qu'il appelle ses disciples (3, 13). Comment réagit sa famille ? Marc note seulement au chapitre 3 l'opposition de quelques-uns qui le croyaient devenu fou. Les autres sont visiblement partagés : nombreux sont ceux qui ont été séduits par Jésus, par son enseignement et ses miracles ; les Pharisiens et leurs scribes, quant à eux, ont déjà à plusieurs reprises manifesté leur hostilité ; certains ont même déjà décidé de se débarrasser de lui (3, 6) : son crime, guérir des malades, n'importe quand, et même le jour du sabbat ! Et voici, avec l'évangile de ce dimanche, que Jésus revient pour la première fois dans son village de Nazareth. Sa réputation l'a-t-elle précédé ? Probablement, puisqu'on s'inquiète déjà de lui à Jérusalem (3, 22), et que, dès le début du texte, Marc nous rapporte la question de ses auditeurs : « D'où cela lui vient-il... ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ? » Voici donc l'enfant du pays de retour à la synagogue un matin de shabbat. Marc note seulement la présence de ses disciples : « Jésus est parti pour son pays, et ses disciples le suivent. » Puis il ne parle plus d'eux ; eux vont assister à la scène, sans intervenir, apparemment, mais cela leur servira de leçon pour l'avenir qui les attend eux-mêmes. Car si, jusqu'à présent, Jésus avait déjà rencontré des oppositions, ici, c'est bien pire, il essuie un véritable échec: au point de ne même plus pouvoir accomplir un seul miracle (v. 5) ; son propre village le refuse : toute l'attention du récit se concentre en effet sur la réaction des anciens voisins de Jésus ; dubitatifs au début, ils deviennent peu à peu franchement hostiles. Tout commence par des questions bien humaines : « Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée ?... N'est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Un mot, d'abord, sur ses frères : ce sont en réalité ses cousins : deux (Jacques le Petit et José) seront plus tard présentés par Marc comme fils d'une autre Marie, (cf 15, 40 - 47). Je reviens à la phrase : « Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée ?... N'est-il pas le charpentier, le fils de Marie... ? » Traduisez : son enseignement et ce qu'on sait de son action dans la région en font un personnage hors du commun ; or, nous savons bien, nous, d'où il sort ; il est comme nous, rien de plus ; d'où lui viendraient ses pouvoirs ? Si c'était un prophète, on l'aurait

MÉDITATION DOMINICALE - II

su, déjà ; il y a incompatibilité entre la grandeur de Dieu et la modestie de ses origines humaines. C'est bien le drame d'une partie des contemporains du Christ, semble dire Marc : enfermés dans leurs idées sur Dieu, ils n'ont pu le reconnaître quand il est venu. Marc revient très souvent sur cette question que pose la personnalité de Jésus : à Capharnaüm, déjà, les gens « se demandaient les uns aux autres : Qu'est-ce que cela ? Voilà un enseignement nouveau plein d'autorité ! Il commande même aux esprits impurs et ils lui obéissent » (1, 27). Quelques jours plus tard, après la guérison du paralytique, les scribes s'interrogeaient : « Qui peut pardonner les péchés sinon Dieu seul ? » (2, 7) ; sur le lac, après qu'il eut apaisé la tempête, les apôtres se demandaient aussi : «Qui donc est-il, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? » (4, 41). À Nazareth (6, 2), comme à Capharnaüm (1, 22), les assistants ont d'abord été « frappés d'étonnement » ; mais à Nazareth, les choses ont mal tourné, l'étonnement a viré au scandale : ici, Marc a certainement choisi volontairement le mot grec (skandalon) qui évoquait la pierre d'achoppement dont parlait Isaïe ; imaginez un chef de chantier qui se trouve devant une pierre de forme imprévue : soit il l'intègre à sa construction dont elle devient une pierre maîtresse ; soit il la méprise, et la laisse traîner sur le chantier, au risque de buter dessus. Cette image illustrait pour Isaïe le contraste entre celui qui croit et celui qui refuse de croire. Pour celui qui croit, le Seigneur est son rocher, comme disent certains psaumes, sa sécurité ; mais ceux qui refusent de croire se privent eux-mêmes de cette sécurité et le choix des croyants devient pour eux incompréhensible et proprement scandaleux. Saint Pierre reprend la même image en parlant du Christ : « On trouve dans l'Ecriture : Voici que je pose en Sion une pierre angulaire, choisie et précieuse, et celui qui met en elle sa confiance ne sera pas confondu... mais pour les incrédules, la pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre de l'angle et aussi une pierre d'achoppement, un roc qui fait tomber. Ils s'y heurtent parce qu'ils refusent de croire en la parole. » (1 P 2, 6-8). Chez Matthieu et Luc, le même thème est repris sous une autre forme : « Heureux celui qui ne tombera pas à cause de moi, dit Jésus lui-même. » (Mt 11, 5 ; Lc 7, 23). Pour le dire autrement, heureux sont ceux qui ont eu le bonheur de s'ouvrir au mystère de Jésus et de reconnaître en lui le Messie ; pour eux, le Christ est désormais le centre de leur vie ; au contraire, malheureux sont ceux qui, comme à Nazareth, se sont fermés à sa parole et à son action. Curieusement, les plus proches ne sont pas les mieux préparés à faire le bon choix : Jésus, comme Ezéchiel comme Jérémie, comme tant d'autres avant lui, constate que nul n'est prophète en son pays : « Un prophète n'est méprisé que dans son pays, sa famille et sa propre maison. » On veut bien l'écouter mais on reste de marbre ; Et cette indifférence des participants barre la route aux miracles : dans les chapitres précédents, Marc a noté à plusieurs reprises que miracle et foi vont de pair ; que ce soit lors de la tempête apaisée (4, 35 - 41), de la libération du démoniaque de Gérasa (5, 1 - 20), ou de la guérison de la fille de Jaïre et de l'hémorroïsse (5, 20 - 43). Ici, Marc retourne la proposition : là où il n'y a pas de foi, il ne peut pas y avoir de miracle. Manifestement, Jésus ne s'attendait pas à cette réaction scandalisée, puisque Marc affirme : « Il s'étonna de leur manque de foi ». On peut déjà être surpris nous-mêmes que Jésus s'étonne : cela veut dire que, pour lui, tout n'était pas écrit d'avance ; d'autre part cet étonnement est mêlé de tristesse : un peu plus haut, devant une opposition semblable venant des Pharisiens, Marc a noté que Jésus était « navré de l'endurcissement de leurs cœurs » (Mc 3, 5). Au niveau de Jésus, cet épisode peu glorieux de Nazareth fait déjà pressentir la croix ; pour l'avenir, il préfigure le sort des prophètes de tous les temps, affrontés à une incroyance quasi structurelle. Et pourtant, l'épisode se clôt néanmoins sur une petite lueur d'optimisme : même à Nazareth, dans ce climat d'hostilité, Jésus a pu quand même opérer quelques guérisons ; cela veut dire en clair que malgré toutes nos mauvaises volontés, tout espoir n'est jamais perdu !

98 MÉDITATION DOMINICALE - I MÉDITATION DOMINICALE - II

EVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT MARC 6, 7-13

DIMANCHE 12 JUILLET15E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE - B

« Jésus envoie les Douze appeler les hommes à la conversion » Jésus appelle les Douze ; et pour la première fois il les envoie deux par deux. Il leur donnait autorité sur les esprits impurs, et il leur prescrivit de ne rien prendre pour la route, mais seulement un bâton ; pas de pain, pas de sac, pas de pièces de monnaie dans leur ceinture. « Mettez des sandales, ne prenez pas de tunique de rechange. » Il leur disait encore : « Quand vous avez trouvé l’hospitalité dans une maison, restez-y jusqu’à votre départ. Si, dans une localité, on refuse de vous accueillir et de vous écouter, partez et secouez la poussière de vos pieds : ce sera pour eux un témoignage. » Ils partirent, etproclamèrent qu’il fallait se convertir. Ils expulsaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile à de nombreux malades, et les guérissaient.

POUR MÉDITER L'ÉVANGILEVoici les Douze au tout début de leur activité missionnaire : Jésus avait certainement formé depuis quelque temps déjà le projet de les envoyer ; puisque, dès le chapitre 3, Marc nous raconte qu’il les avait choisis dans ce but : « Il monte dans la montagne et il appelle ceux qu’il voulait. Ils vinrent à lui et il en établit douze pour être avec lui et pour les envoyer prêcher avec pouvoir de chasser les démons. II établit les Douze : Pierre — c’est le surnom qu’il a donné à Simon —, Jacques, le fils de Zébédée, et Jean, le frère de Jacques — et il leur donna le nom de Boanerguès, c’est-à-dire fils du tonnerre —, André, Philippe, Barthélemy, Matthieu, Thomas, Jacques, le fils d’Alphée, Thaddée et Simon le zélote, et Judas Iscariote, celui-là même qui le livra » (3, 16-19). Depuis, ils l’ont suivi partout et ont reçu son enseignement. Ils ont été témoins de sa puissance : les premiers chapitres de Marc rapportent de nombreux miracles de toute sorte.

Avec le texte d’aujourd’hui, voici que Jésus les envoie à leur tour, munis eux aussi du pouvoir de chasser les démons : « Jésus appelle les Douze, et pour la première fois il les envoie... Il leur donnait pouvoir sur les esprits mauvais. » Il leur donne également trois consignes : aller deux par deux, n’emporter que le strict nécessaire, ne pas se laisser impressionner par la persécution inévitable.

Premièrement, aller deux par deux : cela semble une pratique habituelle de Jésus ; Marc en donne quelques exemples par la suite : par exemple, pour préparer l’entrée à Jérusalem : « Lorsqu’ils approchent de Jérusalem, près de Bethphagé et de Béthanie, vers le mont des Oliviers, Jésus envoie deux de ses disciples et leur dit : Allez au village qui est devant vous... vous trouverez un ânon attaché... » (11, 1-2) ; même chose pour préparer la Pâque : « Il envoie deux de ses disciples et leur dit : Allez à la ville ; un homme viendra à votre rencontre, portant une cruche d’eau...» (14, 13). Il y a là peut-être la trace de la coutume juive selon laquelle un témoignage n’était recevable que quand il était porté par deux personnes au moins : « C'est sur les déclarations de deux ou de trois

témoins qu’on pourra instruire une affaire » (Dt 19, 15). L’évangélisation, elle aussi, est affaire de témoignage, elle n’est pas une affaire individuelle. Plus tard, les apôtres garderont cette habitude : ainsi Pierre et Jean vont ensemble prêcher au Temple de Jérusalem (Ac, 1) ; Paul et Barnabé font équipe longtemps en Syrie et en Asie Mineure (Ac 13-15) ; après leur séparation, Paul continue la mission avec Silas (Ac 16-17).Deuxièmement, n’emporter que le strict nécessaire : « il leur prescrivit de ne rien emporter pour la route, si ce n’est un bâton ; de n’avoir ni pain, ni sac, ni pièces de monnaie dans leur ceinture. Mettez des sandales, ne prenez pas de tunique de rechange. » Leurs seuls instruments doivent être ceux de la marche pour la mission. En entendant cette consigne, les apôtres ont probablement évoqué la marche de leurs pères dans la foi, la nuit de la fameuse Pâque de la sortie d’Egypte, « la ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton à la main. » (Ex 12, 11). La longue marche de l’Eglise, peuple de Dieu, commence ici. Elle exige mobilité, disponibilité, liberté d’esprit.

Troisième consigne donnée par Jésus, ne pas se laisser impressionner par la persécution inévitable. D’après le récit de Marc, les apôtres viennent tout juste d’assister à l’échec de Jésus à Nazareth (6, 1-6) ; et, depuis le début de l’évangile, ils ont vu naître et grandir l’opposition des scribes et des pharisiens. Il semble bien que la persécution doive être de tout temps le lot des prédicateurs et des prophètes : la première lecture nous en donne un cuisant exemple avec Amos, renvoyé dans ses foyers au bout de quelques mois seulement de prédication (« va-t-en d’ici avec tes visions » ; Am 7). On peut se demander pourquoi la persécution est inévitable, pourquoi « nul n’est prophète en son pays » comme l’a déclaré Jésus à Nazareth (6, 4) ; si l’évangélisation consiste à annoncer partout l’amour et le pardon de Dieu, pourquoi rencontre-t-elle tant d’oppositions ? Parce que nous avons la « nuque raide », comme disait Moïse ; parce que nous avons d’autres idées sur Dieu ; enfin, parce que nous avons le cœur endurci : or, si Dieu est amour et pardon, il va nous demander d’être à son image et donc nous remettre en question. C’est pour toutes ces mauvaises raisons que Jésus a été crucifié, et tant d’autres martyrisés à leur tour.

Face à ces refus, Jésus ne préconise pas la violence, ni le mépris évidemment ; mais la persévérance et la sérénité : « Si, dans une localité, on refuse de vous accueillir et de vous écouter, partez en secouant la poussière de vos pieds : ce sera pour eux un témoignage. » Soit dit en passant, c’est exactement ce qu’ont fait Paul et Barnabé à Antioche de Pisidie quand les choses se sont gâtées. (Ac 13, 51).

Comment comprendre ce geste qui doit être pour les gens un « témoignage » ? C’est peut-être une manière de dire : nous respectons votre liberté, nous ne sommes pas venus chez vous pour prendre quoi que ce soit contre votre gré, fût-ce de la poussière. Saint Luc a cette formule : « Même la poussière de votre ville qui s’est collée à nos pieds, nous l’essuyons pour vous la rendre. Pourtant, sachez-le, le Règne de Dieu est arrivé. » (Lc 10, 11).

Mais les apôtres, heureusement, ne rencontreront pas que de l’hostilité et des cœurs endurcis. La croissance irrésistible des communautés chrétiennes dès après la Résurrection du Christ en est la preuve. Et les Actes des Apôtres rapportent les noms de nombreuses personnes qui ont ouvert leurs maisons aux prédicateurs de l’évangile. Dans ce cas-là, la recommandation de Jésus est simple : « Quand vous avez trouvé l’hospitalité dans une maison, restez-y jusqu’à votre départ. » Accepter l’hospitalité d’autrui, c’est l’honorer.

1110 MÉDITATION DOMINICALE - III

EVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT MARC 6, 30-34 ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT JEAN 6, 1-15

POUR MÉDITER L'ÉVANGILE

DIMANCHE 19 JUILLET16E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE - B

DIMANCHE 26 JUILLET 17E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE - B

« Jésus a pitié de la foule »Après leur première mission, les apôtres se réunirent auprès de Jésus, et lui annoncèrent tout ce qu’ils avaient fait et enseigné. Il leur dit : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » De fait, ceux qui arrivaient et ceux qui partaient étaient nombreux, et l’on n’avait même pas le temps de manger. Alors, ils partirent en barque pour un endroit désert, à l’écart. Les gens les virent s’éloigner, et beaucoup comprirent leur intention. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux. En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement.

« Jésus nourrit la foule » Après cela, Jésus passa de l’autre côté de la mer de Galilée, le lac de Tibériade. Une grande foule le suivait, parce qu’elle avait vu les signes qu’il accomplissait sur les malades. Jésus gravit la montagne, et là, il était assis avec ses disciples. Or, la Pâque, la fête des Juifs, était proche. Jésus leva les yeux et vit qu’une foule nombreuse venait à lui. Il dit à Philippe : « Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » Il disait cela pour le mettre à l’épreuve, car il savait bien, lui, ce qu’il allait faire. Philippe lui répondit : « Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun reçoive un peu de pain. » Un de ses disciples, André, le frère de Simon-Pierre, lui dit : « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » Jésus dit : « Faites asseoir les gens. » Il y avait beaucoup d’herbe à cet endroit. Ils s’assirent donc, au nombre d’environ cinq mille hommes. Alors Jésus prit les pains et, après avoir rendu grâce, il les distribua aux convives ; il leur donna aussi du poisson, autant qu’ils en voulaient. Quand ils eurent mangé à leur faim, il dit à ses disciples : « Rassemblez les morceaux en surplus, pour que rien ne se perde. » Ils les rassemblèrent, et ils remplirent

douze paniers avec les morceaux des cinq pains d’orge, restés en surplus pour ceux qui prenaient cette nourriture. À la vue du signe que Jésus avait accompli, les gens disaient : « C’est vraiment lui le Prophète annoncé, celui qui vient dans le monde. » Mais Jésus savait qu’ils allaient venir l’enlever pour faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira dans la montagne, lui seul.

La réaction de la foule après la multiplication des pains dit bien l’effervescence qui régnait en Palestine à l’époque de Jésus ; car on attendait le Messie avec impatience : alors, quand on a vu Jésus guérir les malades, on s’est mis à le suivre ; Jean raconte : « Une grande foule le suivait, parce qu’elle avait vu les signes qu’il accomplissait en guérissant les malades. » L’effervescence était particulièrement grande, certainement, dans les jours qui précédaient la Pâque ; cette fête de la libération passée (de l’esclavage en Égypte) préfigurait aux yeux de tous la libération définitive qu’apporterait le Messie. Et si Jean prend la peine de préciser : « C’était un peu avant la Pâque, qui est la grande fête des Juifs », c’est qu’il y a là un élément important de compréhension du récit de la multiplication des pains ; dans les dimanches qui viennent, nous aurons l’occasion de mesurer à quel point le mystère pascal est sous-jacent à tout le discours de Jésus sur le pain de vie.Pour l’instant, Jésus entraîne la foule vers la montagne : « Jésus gagna la montagne, et là, il s’assit avec ses disciples. » Le mot « montagne », en Galilée, près du lac, ne peut être que symbolique (les collines culminent à quelques centaines de mètres) ; sans doute Jean veut-il nous faire entendre que l’heure du banquet messianique annoncé par le prophète Isaïe a sonné : « Le Seigneur, le tout-puissant, va donner sur cette montagne un festin pour tous les peuples, un festin de viandes grasses et de vins vieux, de viandes grasses succulentes et de vins vieux décantés » (Is 25, 6). À cette foule affamée du festin de Dieu, Jésus va offrir le signe que ce jour tant attendu est vraiment là. Car c’est bien lui qui prend l’initiative. Il commence par questionner Philippe, l’un des Douze : « Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » Et Jean commente : « Il disait cela pour le mettre à l’épreuve, car lui-même savait bien ce qu’il allait faire. » Sans doute, ici comme ailleurs, l’évangéliste veut-il insister sur la prescience de Jésus ; mais en quoi consiste cette « mise à l’épreuve » des apôtres ? Pour un Juif comme Jean, cette expression est un rappel de l’expérience de l’Exode : car la longue pérégrination dans le Sinaï avait été comprise par la suite comme un temps de « mise à l’épreuve » ; le livre du Deutéronome explique : « Le Seigneur ton Dieu t’éprouvait pour connaître ce qu’il y avait dans ton cœur » (Dt 8, 2). Philippe, lui, n’a peut-être pas compris tout de suite que Jésus en appelait à sa foi, il répond de manière toute humaine, pleine de bon sens : « Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun ait un petit morceau de pain. » Et André ajoute : « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » A vues humaines, on ne peut pas leur donner tort ! Mais le bon sens, la raison raisonnante ne sont pas toujours bons conseillers. Ont-ils donc oublié, Philippe et André, l’histoire du prophète Elisée ? Bien intentionné, le serviteur du prophète avait, dans un cas tout à fait semblable, tenu les mêmes propos : un tout petit peu de pain pour cent personnes, ce n’était même pas la peine d’y penser ! Mais Elisée avait passé outre... Jésus fait la même chose, il se contente de dire « Faites-les asseoir. » Pourquoi Jean précise-t-il « qu’il y avait beaucoup d’herbe à cet endroit. » ? Sinon pour faire entendre qu’un « bon pasteur » (encore une image messianique ; cf Jn 10) prend toujours soin d’emmener ses brebis sur un bon pâturage ? « Ils s’assirent donc, au nombre d’environ cinq mille hommes. » Les quatre évangiles notent la disproportion entre les cinq pains et les cinq mille hommes (disproportion beaucoup moins accentuée dans la multiplication des pains par Elisée) ; histoire de noter la surabondance des dons messianiques. Arrivé là, Jean change de ton : « Alors Jésus prit les pains, et, après avoir rendu grâce, les leur distribua. » On y reconnaît sans peine les mots de la Cène ; Jean, il est vrai, ne relate nulle part l’institution de l’Eucharistie (il la remplace par le lavement des pieds, Jn 13) ; mais ici, visiblement, il y fait référence : les chrétiens auxquels il s’adresse comprennent aussitôt que le miracle des pains sur la petite montagne de Galilée est le signe du banquet de l’Eucharistie qu’ils célèbrent chaque dimanche depuis la Résurrection du Christ.

MÉDITATION DOMINICALE - IV

POUR MÉDITER L'ÉVANGILEDimanche dernier, nous avions assisté à l’envoi en mission des Douze pour la première fois (Mc 6, 7-13) ; et Marc décrivait rapidement la façon dont ils s’en étaient acquittés : « Ils partirent, et proclamèrent qu’il fallait se convertir. Ils chassaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile à de nombreux malades, et les guérissaient » (6, 12-13). Ils ont donc fait très exactement ce qu’ils voient Jésus faire depuis le début de leur rencontre : guérir les malades, chasser les démons, enseigner ; Marc veut certainement faire entendre à ses lecteurs que la mission des Douze est dans la parfaite continuité de celle de Jésus car il a pris bien soin de les décrire en parallèle. On peut noter en effet que le début de la mission de Jésus et celui de la mission des Douze sont semblables : le lieu est le même (la Galilée), et surtout le contexte : Jésus a commencé « après que Jean eut été livré» (1, 14), les apôtres commencent à leur tour au moment de la mort du même Jean-Baptiste : puisque Marc raconte l’arrestation et l’exécution de Jean-Baptiste dans l’intervalle entre leur envoi en mission par Jésus et leur retour (6, 17-29). Quant au contenu de l’enseignement, s’il n’est pas précisé, c’est parce qu’il ressemble certainement à celui du Maître, résumé par Marc au début de son évangile : « Après que Jean (Baptiste) eut été livré, Jésus vint en Galilée. Il proclamait l’Évangile de Dieu et disait: Le temps est accompli, et le Règne de Dieu s’est approché : convertissez-vous et croyez à l’Évangile » (1, 14-15). Voici donc maintenant le retour des Douze : « Après leur première mission, les apôtres se réunissent auprès de Jésus, et lui rapportent tout ce qu’ils ont fait et enseigné. » C’est la première fois que Marc emploie le mot « apôtres » (qui signifie « envoyés » en mission), jusqu’ici il les appelait les « disciples » (« enseignés ») : désormais, ils partageront la mission de Jésus. Curieusement, à leur retour, la première chose qu’il leur propose, c’est de prendre de la distance: « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » Nouveau parallèle : après sa première journée à Capharnaüm, où il avait abondamment enseigné, guéri les malades, chassé les démons (1, 21-34), Marc notait : « Au matin, à la nuit noire, Jésus se leva, sortit et s’en alla dans un lieu désert ; là il priait. » Il s’était arraché au succès et était parti se ressourcer dans la prière. Les « envoyés » de tous les temps sont certainement invités ici à en faire autant : Marc répète à deux reprises cette retraite de Jésus et ses apôtres « à l’écart dans un endroit désert » (v. 31 et 32). Entre ces deux précisions qui forment une « inclusion », Marc a noté la présence de la foule : manière de nous dire « ce n’est pas une fuite-dérobade que Jésus leur propose, c’est un ressourcement pour mieux servir la foule». À Capharnaüm, c’est dans cette pause que Jésus avait puisé la force de s’arracher à la tentation de s’installer (1, 38). Mais la foule les suit, elle s’impose, et avec elle s’impose l’urgence de la mission ; dans son évangile, Marc insiste souvent sur cette présence de la foule qui poursuit Jésus partout : par exemple dans le récit de l’appel de Matthieu : « Toute la foule venait à lui et il les enseignait » (2, 13) ; ou pour introduire le discours en paraboles : « De nouveau, Jésus se mit à enseigner au bord de la mer. Une foule se rassemble près de lui, si nombreuse qu’il monte s’asseoir dans une barque, sur la mer. Toute la foule était à terre face à la mer » (4, 1) ; ou encore, à Gennésareth : « Partout où il entrait, villages, villes ou hameaux, on mettait les malades sur les places ; on le suppliait de les laisser toucher seulement la frange de son vêtement. » (6, 56). Marc insiste, cette foule ne vient pas seulement de Galilée, elle vient de partout : « Jésus se retira avec ses disciples au bord de la mer. Une grande multitude venue de la Galilée le suivit. Et de la Judée, de Jérusalem, de l’Idumée, d’au-delà du Jourdain, du pays de Tyr et Sidon, une grande multitude vint à lui, à la nouvelle de tout ce qu’il faisait. Il dit à ses disciples de tenir une barque prête pour lui à cause de la foule qui risquait de l’écraser. Car il en avait tant guéri que tous ceux qui étaient frappés de quelque mal se jetaient sur lui pour le toucher. » (3, 7-10). Et cette foule reste parfois des jours à l’écouter ; c’est ce qui décidera Jésus à accomplir la deuxième multiplication des pains : « Comme il y avait de nouveau une grande foule et qu’elle n’avait pas de quoi manger, Jésus appelle ses disciples et leur dit : J’ai pitié de cette foule, car voilà déjà trois jours qu’ils restent auprès de moi et ils n’ont pas de quoi manger. Si je les renvoie chez eux à jeun, ils vont défaillir en chemin, et il y en a qui sont venus de loin. » (8, 1-3). Tout ceci fait donc penser que Jésus a reçu un très bon accueil de la plupart de ses contemporains ; mais ce succès même a déclenché l’inquiétude des autorités religieuses : dès le chapitre 3, on apprend que des scribes sont « descendus de Jérusalem » (3, 22). Revenons à notre texte : en débarquant, Jésus vit donc cette grande foule (cinq mille hommes), « il fut saisi de pitié envers eux parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les instruire longuement. » Il les instruit d’abord, il accomplira une première multiplication des pains, ensuite (6, 35-44). Deux manières de les nourrir. Quand Marc dit la pitié de Jésus, il utilise le mot grec (« splangna ») qui désigne les entrailles, la profondeur de l’être ; c’est un équivalent du mot hébreu (« rahamim ») que l’on traduit souvent par miséricorde. Rien d’étonnant à ce que Jésus éprouve pour les hommes la pitié même de Dieu, une pitié telle qu’il a envoyée son Fils ; Marc, à la différence de Jean (Jn 10), ne développe pas le thème du bon pasteur, mais il est présent ici en filigrane : « Il fut saisi de pitié envers eux parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. » On entend résonner ici les plaintes de Jérémie sur les mauvais pasteurs qui ont mal dirigé le peuple d’Israël (c’était le sujet de notre première lecture). Et, depuis des siècles, on attendait le Messie qui serait un vrai bon berger. Cette fois, nous dit Marc, le Bon Pasteur, le Messie est parmi nous.

1312 LA PSALMODIE...

LA PSALMODIE, OULITURGIE DU CŒUR-XVIII

Au sein du temps du monde qui s’écoule, un autre Temps surgit sans cesse où tout est récapitulé, l’année liturgique. Aujourd’hui, celle-ci nous offre encore de nous plonger dans le Temps Ordinaire qui lentement tout transfigure. Laissons-nous paisiblement remodeler par ce Temps où le souvenir du passé n’est plus. Toute chose, une fois pour toutes, a déjà été rendue nouvelle. Ne laissons pas sans effet ce Temps livré à notre foi. Saisissons-le au fil des jours et des Dimanches où la Parole agissante de notre Dieu nous attend.

...OU LITURGIE DU CŒUR-XVIII

Psaume 122 : Les yeux vers le Seigneur

Ce psaume fait partie d’un recueil dont les particularités linguistiques suffiraient à elles seules à le distinguer du reste du psautier. Les psaumes 119 à 133 qui composent ce recueil ont un titre commun : « chant des Montées » qui n’appartient qu’à eux. Saint Jérôme, dans la Vulgate a traduit le terme « Montées » par « graduum », « degrés », « marches d’escalier ». Josèphe parle, en effet, des quinze marches séparant la cour des femmes de celle d’Israël ; ces quinze degrés, d’où chantaient les lévites, furent mis en relation avec nos quinze psaumes, par la tradition juive postérieure. Est-on allé jusqu'à penser que nos chantres exécutaient un psaume par marche ? L’hypothèse ne semble guère confirmée par le Targum, lequel paraphrase : « chant qui est chanté sur les montées de l’abîme ».

La confiance en Dieu tient une grande place dans notre psaume, ainsi que dans plusieurs autres de ce recueil, et l’on remarquera qu’elle constitue la disposition requise pour qu’on soit béni par Yahvé.

Fréquent dans le recueil, le « je » du psalmiste n’est cependant pas un pur « je » collectif, ni le « je » d’une autorité personnifiant la communauté ; il s’accompagne en effet volontiers d’un « nous », jusqu’à même, parfois, lui céder complètement la place.

Si le recueil des Montées constitue une œuvre unique, une certaine logique dans l’ordonnance des pièces, devrait y être discernable, et comme dans le rite liturgique lui-même (ps 114), on s’élève ici de l’expression de la plainte à la bénédiction, en passant par l’affirmation d’une totale confiance en Dieu. Ce mouvement revient trois fois : Ps 119-121 ; 122, 127 ; 128, 133. Jérusalem se trouve naturellement dans les trois cas au cœur du problème ; dans le premier, on monte vers elle ; dans le second, on se nourrit de ses certitudes ; et dans le troisième, on en tire des garanties pour l’avenir.

Notre psaume s’inscrit dans la deuxième section, où l’on voit toute l’angoisse passée qui se trouve « épongée » par le regard que porte l’orant sur la main de Yahvé, où les ombres du présent semblent s’estomper, sinon s’évanouir, au souvenir des dangers mortels auxquels les fidèles, avec l’aide du Seigneur, ont déjà merveilleusement échappé.

Psaume 84 : Prière pour la paix et la justice

Un oracle constitue le centre de ce psaume (v.9-10). Un officier du culte, se présentant lui-même à la première personne: « j’entends la voix du Seigneur Dieu », est chargé de le communiquer. Il s’agit d’un oracle de « paix » (cf. Jr 14, 13, 19; 23,17; 29, 11), dont les deux quatrains de conclusion (v. 11-12, 13-14) explicitent et commentent le contenu. Oracle de paix (v.9-10)Loin de faire la sourde oreille comme en Jr 14 à 15, 9, Yahvé répond ici à la prière des siens (cf. Jl 2, 18-19). Un officier du culte (Ps 81, 6; Ha 2, 1) communique les intentions bienveillantes de la divinité. Yahvé est décidé à faire la paix avec son peuple; et le psaume précise: avec le peuple de ses fidèles. Une glose renchérit sur les bonnes dispositions attendues pour l’obtention du pardon: le Dieu de l’Alliance ne se contentera pas de bonnes paroles sans lendemain (cf. Os 6, 4). Il exige une conversion définitive, un engagement irréversible. Yahvé se rapprochera (Ps 22, 12) des siens, de ceux qui le craignent. Cette approche est évidemment approche de salut (cf. Is 51, 5; 56,1), et la terre va s’en trouver comme inondée de gloire. Il s’agit bien entendu de la gloire de Yahvé (cf. Is 6, 3; Ez 1, 28; 43, 2, 4), mais en tant que celle-ci pénètre et transforme tout ce qu’elle touche (cf. Is 60, 1, 2). En ce qui concerne la terre, le mot gloire ouvre des perspectives de fécondité et de puissance productive. Commentaire de l’oracle (v.11-14)Il est tout aussi malaisé, dans les psaumes que dans les textes prophétiques, de distinguer l’oracle proprement dit, du commentaire qu’en donne le messager. Nous voyons en tout cas dans les deux derniers quatrains du psaume (v. 11-12, 13-14), l’explication de la promesse de paix formulée aux v. 9-10. Tout tourne autour de quatre mots, tendresse (hesed), fidélité, justice et paix. Le texte évite soigneusement de préciser s’il s’agit d’attributs divins ou de vertus de l’homme. Comme la paix dont on parlait déjà au v. 9, et la gloire du v. 10, elles ont leur origine toutes quatre en Dieu, mais pénètrent les réalités humaines tout autant que cosmiques (Os, 2, 21ss). Tendresse, fidélité, justice et paix, semblent surgir toutes quatre ensemble, et embrasser l’univers de la terre au ciel ; elles rétablissent ainsi l’harmonie brisée par le péché, non seulement entre Dieu et l’homme, mais entre l’homme et le monde (Os 2, 23- 24). La terre, grâce à la fidélité, donnera son fruit, comme dans la justice les nuées déverseront leur pluie fécondante (Is 45, 8; Jl 2, 23). Il paraît difficile de contester qu’il s’agisse ici du don de la pluie et de la prospérité du sol. La littérature chrétienne primitive, et la liturgie des premiers siècles, ont donc singulièrement élargi l’objet de l’oracle, lorsqu’elles en font une annonce du mystère de Noël. Notons toutefois que le psaume ne doit pas son origine à une calamité accidentelle, ou épisodique. La prospérité promise semble en relation avec le retour d’Exil ; elle représente le couronnement de l’œuvre de restauration, et manifeste ainsi la plénitude du pardon de Yahvé. L’Évangile a repris de notre psaume, avec le mot « paix » (Lc 2, 14), l’idée de la gloire habitant la terre (Jn 1, 14). Le Christ n’est-il pas le signe par excellence de la fécondité d’un univers réconcilié avec Dieu?

En priant les psaumes des Dimanches de ce mois, ces commentaires qu’en fait Beaucamp nous aideront encore une fois à mieux en pénétrer le sens. Témoins d’une Alliance éternelle, c’est à chacun de nous que ces psaumes redisent la fidélité d’un Dieu aujourd’hui. Entrons en terre promise, saisissons l’instant, n’attendons pas plus longtemps !

1514Dimanche XV du Temps Ordinaire (Année B) -

Psaume 84

Dimanche XVII du Temps Ordinaire (Année B) - Psaume 144

Dimanche XIV du Temps Ordinaire (Année B) - Psaume 122

Dimanche XVI du Temps Ordinaire (Année B) - Psaume 22

Psaume 22: Le bon Pasteur

Avec la série des psaumes 22 à 27, où l’on retrouve le même titre « à David », réapparait le thème de l’entrée dans le sanctuaire pour les psaumes 24 à 27. Le psaume 22, qui figure en tête du groupe, en est le plus récent; il évoque le retour d’Exil, et reprend les thèmes et formules des grands prophètes de l’Exil: Jr 31, 10-20; Ez 34, et le second Isaïe, 40, 11; 49, 9. Les exégètes modernes ont malencontreusement classé ce psaume parmi les chants individuels de confiance. La tradition chrétienne unanime, inspirée en cela par la synagogue, est plus heureuse lorsqu’elle en fait le chant par excellence du Baptême et de l’Eucharistie, c.à.d. le chant de l’entrée en terre promise. Le thème de Dieu-berger, en effet, n’appelle aucunement l’idée d’une sollicitude divine pour des individus ; qui dit berger dit troupeau, et le troupeau de Yahvé est toujours son peuple. Étroitement associée à l’idée d’Alliance (Ps 94, 7), l’image s’applique plus spécialement à la sortie d’Egypte (Ps 76, 20; Is 63, 14), ou au retour de captivité (Jr 23, 3-4). Car Yahvé ne promène pas son troupeau de point d’eau en point d’eau, il le rassemble et le conduit vers son pâturage (Ez 33, 14); c’est là qu’il attend lui-même les siens, afin de leur offrir blé, vin et graisse (Is 55, 1-2). Le Pasteur d’Israël devient alors tout naturellement son hôte (cf. Jr 31, 10-12). Le verset d’introduction (v. 1) exprime l’idée maîtresse du psaume: quand le Dieu de l’Alliance reprend en main son peuple, il le comble. Les désirs de ce dernier seront comblés, sa sécurité parfaite et sa nourriture abondante (Ps 80, 16-17; 146, 13-14). Car la tâche du berger est tout à la fois de défendre et de faire paître son troupeau; Yahvé fait bien les choses, son troupeau est étalé (Ez 34, 14-15) dans l’herbe grasse; il ne mange pas, sur le qui-vive, l’herbe maigre du chemin. Le psaume lui-même est formé de deux parties égales, comprenant chacune deux quatrains.La marche du retour (v. 2-4).Les deux premiers (v. 2-4) chantent la marche du retour sous la conduite de Yahvé. On est sur la route qui mène au repos et à la justice (Jr 31, 23; Ps 117, 19), car on sort d’un monde de violence et d’oppression. Israël, qui avait épuisé ses forces à courir après de faux dieux (Is 49, 4), peut alors reprendre son souffle (Ps 18, 8). Pécheur, il mérite certes moins que jamais la sollicitude de son Dieu; mais Yahvé a décidé de lui faire justice pour l’honneur de son nom, dont l’Exil avait provoqué la profanation parmi les nations (Ez 36, 22). On croit entendre, dans le deuxième quatrain (v. 4), un écho des formules chères au second Isaïe: « ne crains pas, car je suis avec toi » (Is 41, 10; 43, 5), « consolez, consolez mon peuple ». La mention du bâton de Yahvé donne à la consolation du retour une saveur un peu revancharde. Ce bâton, que Yahvé a si souvent manié contre les siens (cf. Is 10, 5), va se retourner contre les ennemis (Is 30, 31-32), contre les loups menaçant le troupeau. Hospitalité divine (v. 5-6). La deuxième partie (v. 5-6) évoque le pain, le vin et l’huile de l’hospitalité, qui seront les dons de la terre promise (Dt 28, 3-8; Jr 31, 12). On y souligne la libéralité du geste divin: la table est assez riche pour provoquer la rage de l’ennemi (cf. Ps 111, 10), l’huile engraisse la tête, et le vin déborde de la coupe. Le verbe « poursuivre » du dernier verset ravive le souvenir de la persécution passée, qui hante d’ailleurs plus ou moins explicitement tout le psaume, avec son obsession de repos et de justice. Au lieu d’être pris en chasse par le monde et par la haine des nations, Israël se sent maintenant comme traqué par le Bonheur et l’affection de son Dieu. Et la joie d’être enfin chez Yahvé possède une telle plénitude, qu’elle garde un goût d’éternité (Ps 15, 11; 20, 5 ; etc.).

Psaume 144: Louange au Roi Yahvé

Bien que souvent associé, dans la liturgie synagogale, aux psaumes doxologiques qui suivent, le psaume 144 n’en appartient pas moins, ne serait-ce que par son titre, à la petite collection davidique qui précède, et à laquelle il sert de conclusion. Il suppose, comme eux, une connaissance mémorisée de l’ensemble du psautier, auquel il fait de courts et fréquents emprunts. Il ne laisse, pas plus qu’eux, émerger quelque trace que ce soit de situation cultuelle, circonstanciée ou localisée. Le psalmiste demeure un fidèle anonyme, noyé dans une foule indifférenciée. Dans le psaume 144, on discerne deux parties bien distinctes: v. 1-12 et 13-21. Invitatoires (v. 1-12)On ne retrouve que d’assez loin, dans le psaume 144, la structure habituelle des hymnes bibliques. La première partie du poème est moins un invitatoire, en effet, qu’une série d’invitatoires, destinés à un public de plus en plus large. Dans le premier sextain (v. 1-13), le fidèle s’invite lui-même à bénir Yahvé. Dans le deuxième, (v.4-5), sa voix se mêle à celle du monde ambiant, qui, dans le troisième (v. 7-9), aura seul la parole. Le quatrième (v. 10- 12), quant à lui, opère une distinction entre les bénéficiaires de l’action divine, et le reste des fils d’Adam (v. 12). C’est que l’action de grâce d’Israël est expansive par nature; elle tend à s’étendre, de l’individu aux fidèles de la communauté d’Israël, et d’Israël à l’univers entier. Le terme « action de grâce » est cependant assez impropre ici, car le verbe technique n’y figure qu’une seule fois, au v. 10. Il s’agit plutôt d’une « bénédiction », presque d’une extase ; exaltant son Dieu, le fidèle se sent dépassé, jusqu’à en perdre pieds. Le règne de Yahvé (v. 13-20)L’actualisation du règne de Yahvé (v. 13) constitue la motivation des invitatoires qui précèdent. Le programme de la royauté divine implique, habituellement, des réalisations de jugements et de justice. En fait de « justice » et de « juste » (v. 17), toutefois, on ne trouve le terme, ici, qu’avec le sens de « remplir ses engagements », « accomplir ses promesses ». Fidèle à sa hesed (v. 13b), en effet, Yahvé défend (v. 14) et nourrit les siens (v. 15-16); il les comble et les sauve (v. 19). Le problème paraît donc restreint aux données de l’Alliance avec Israël. Le psaume demeure, cependant, comme obsédé par une certaine idée de totalité - le mot « tout » revient huit fois-, proche de l’universalité au sens rigoureux du terme. Il semble ainsi vouloir déborder, sans jamais le dire expressément, le cadre strictement national. Le psaume 144 forme une fort belle conclusion, non seulement à la petite collection davidique des psaumes 137-144, mais au psautier tout entier.

Patricia BAROUDYBibliographie BEAUCAMP E., Le psautier Ps 1-72, Éd. Gabalda, Paris, 1976. BEAUCAMP E., Le psautier PS 73-150, Éd. Gabalda, Paris, 1979.

LA PSALMODIE... ...OU LITURGIE DU CŒUR-XVIII

1716 L’ABÉCÉDAIRE DE LA FOI

Afin de signifier la Nouvelle Alliance proclamée par Jésus, les chrétiens ont appelé Ancien Testament (du latin testa mentum, qui traduit l'hébreu berith, « alliance ») la pre mière partie de la Bible (du grec byblos, « livre »). Elle ne concerne qu'Israël et fut élaborée au cours du ler millénaire avant notre ère. Les premiers écrits attestés sont ceux des prophètes Amos et Osée (VIIIe siècle avant J.-C.), et les derniers remontent aux deux siècles avant J.-C., tandis que le récit de la Création, sur lequel s'ouvre la Bible, fut rédigé vers la fin du VIe siècle avant J.-C. Certains livres, les apocryphes (du grec apocruphos, « caché », « secret »), furent rejetés par le canon (du grec kanon, « règle ») d'Israël qui ne retint que ce qu'il reconnaissait comme étant ins piré directement par Dieu » et conforme à l'orthodoxie en vigueur. Après la prise de Jérusalem en 70 après J.-C., on aboutit ainsi à la Bible en hébreu. Celle-ci comprend trois parties : la Torah, la « Loi », qui contient l'histoire depuis la Création jusqu'à la mort de Moïse, et la législation religieuse ; les Prophètes, qui ras semble des ouvrages historiques et prophétiques ; les Écrits, qui réunit les Psaumes et des œuvres de genres divers. Du IIIe au Ier siècle avant J.-C., la Bible fut traduite en grec. Cette version, dite des Septante — elle aurait été faite par 72 traducteurs —, se dis-tingue par des ajouts et des modifications que ne reconnaissent pas les juifs.Le Nouveau Testament, référence fondamentale pour la foi de l'Église, débute par l'action et la vie de Jésus au travers des quatre Évangiles; puis sont rapportés les débuts de l'Église (Actes des Apôtres, épîtres de Paul et de quelques autres) ; enfin, l'Apocalypse qui clôt l'ensemble. Soit 27 ouvrages choisis par le canon chrétien de la fin du Ier siècle à la fin du IVe siècle. Mais certains livres apocryphes, comme leurs homologues juifs, n'en constituent pas moins des sources de renseignements utiles. Parmi les grandes traductions ultérieures de la Bible, celle que saint Jérôme (v. 345-420) fit en latin, la Vulgate (du latin vulgatus, « répandu »), s'est imposée en Occident. Le concile de la Contre-Réforme, qui se tint à Trente (1545-1563), la jugea même « authentique » au regard de la foi. Précisons que l'initiateur de la Réforme, Luther, venait de faire sa traduction en allemand... Enfin, la traduction œcuménique de la Bible, ou TOB (années 1970), est un travail commun entre catholiques et protestants.

Postillae perpetuae in Vetus et Novum Testamentum, Nicolas de Lyre, Langres, 1460-1464.

Paris, Bibliothèque nationale de France, Mss, Latin 11972 (f. 1)Tiré de «L’abécédaire du christianisme»

COMME...

Bible

1918

confronter à notre péché, de faire la lumière sur nous-mêmes en toute vérité. Il ne s'agit pas de moraliser mais, humblement, de nous reconnaître pécheurs et, dans un mouvement de tout notre être, de demander le par don et la grâce de Dieu. Jésus ne moralise pas : Il n'« enfonce » jamais le pécheur, Il lui parle au cœur et le relève. Il ne condamne ni la femme adultère, ni Zachée, ni même ceux qui Le cru cifient. À Pierre qui l’a renié trois fois, Il confie son Église !

Ainsi en est-il pour nous : le Seigneur nous tend les bras, Il nous attend, courons à Lui !

Se confesser est une inépuisable source de joie, car il y a plus de joie pour un pécheur qui se convertit que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui estiment pouvoir s'en pas ser ! Joie du Ciel, joie de Dieu qui nous tend les bras, joie du pécheur qui se sait aimé et pardonné, joie du fils prodigue qui se jette dans les bras de son père...Allons sereinement nous confesser, nous en ressortirons pleins de joie et d'énergie !

ENQUÊTE

SE CONFESSER SANS STRESSER - VII

os grands-mères « faisaient leurs pâques » et n'auraient pour rien au monde dérogé à cette obligation de peur de brûler pour l'éternité dans les terribles feux de l'Enfer... Vieux principes poussiéreux et risibles ? Mais non !

L'Église d'aujourd'hui nous demande toujours de nous confesser et de communier au moins une fois par an pour la fête de Pâques...

« Chaque fidèle ayant atteint l'âge de discré tion a l'obligation de confesser ses péchés graves et en tout cas de se confesser fidèle ment au moins une fois par an. » Ce n'est pas une simple et discrète suggestion... Il en va donc des visites au confessionnal comme des visites chez le dentiste : ce n'est pas parce que je n'en ai pas envie que je n'en ai pas besoin.

Lorsque l'on se fait bousculer dans la rue, on entend parfois marmonner vaguement : « J'm'excuse ». Formidable : on s'absout soi-même, plus besoin des autres! Passons du « J'm'excuse » au « J'm'accuse » et allons vers Dieu Lui demander son pardon. Il vient à notre rencontre !

« Nul n'a Dieu pour Père qui n'a l'Église pour mère », paraît-il. C'est Jésus Lui-même qui a confié aux apôtres le pouvoir de remettre les péchés : c'est par Lui que passe le par don, et c'est en son nom qu'il est donné. Objection classique : je n'ai pas besoin d'un prêtre (pécheur, lui aussi), je règle mes petites affaires directement avec Dieu. Et pour l'eucharistie, se débrouille-t-on aussi tout seul avec Lui ? On ne peut pas se passer de l'Église et des prêtres qui la servent, parce que c'est par eux que le Seigneur répand ses bienfaits, parce que l'on n'est pas chrétien tout seul... Le Christ et l'Église sont indissociablement unis.

Le sacrement de récon ciliation exige donc la média tion d'un prêtre qui représente à la fois l'un et l'autre. Il nous donne le pardon de Dieu « par le ministère de l'Église » et non de sa propre autorité. Comment savoir que le Sei gneur nous pardonne vraiment si personne n'est là pour nous en assurer? D'autre part, se confesser est une démarche de réconciliation avec l'Église. Notre péché la blesse et porte atteinte à sa sainteté, à son intégrité. C'est toute l'Église qui est restau rée lorsque nous nous confessons.

Se confesser est une démarche de conver sion, une rencontre personnelle avec Dieu. On peut discourir à l'infini sur ce qui fait une « bonne » confession : le lieu, le prêtre (trop comme ci, pas assez comme ça...), les circonstances, la température de l'air, la température de l'eau... tant que l'on n'a pas la volonté sincère de se convertir, on trou vera toujours une bonne excuse pour pas ser au travers.

Parce qu'au fond, nous n'avons pas très envie de nous

ENQUÊTE

N

« Quand tu vas te confesser, dis-toi que tu vas déclouer Jésus de sa Croix » (saint Jean-Marie Vianney).

Aller se confesser ? La tentation est forte de se tâter le pouls et de trouver une bonne excuse pour passer à travers : « Comment est-ce que je le sens? », expression choc des temps nouveaux… En énonçant l’objection que nous pourrions un jour ou l’autre avoir vis-à-vis de la confession, Juliette Levivier nous invite à remettre dans sa juste perspective ce que l’on appelle aujourd’hui le sacrement de réconciliation.

2120 DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

«Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église », rapporte saint Matthieu.Comprendre le Vatican, c'est mieux connaître à travers des lieux et des hommes.Tout a commencé avec l'appel de Jésus: « Allez enseigner à toutes les nations ». L'évangélisation a guidé les pas des apôtres Pierre et Paul jusqu'à la capitale de l'Empire. C'est à Rome que les premiers chrétiens ont préservé cet héritage, par-delà la mémoire de ces deux martyrs.Depuis plus de deux mille ans, les papes se transmettent le relais. Les clés de saint Pierre symbolisent la tâche confiée au premier des apôtres, guide entre les hommes et le Ciel. Les quelques clés que nous vous proposons souhaitent vous faire pénétrer au cœur de l'Église catholique et universelle. Et mettre en pleine lumière les acteurs et les lieux d'une histoire qui n'a jamais fini.

QUELQUES CLÉS POUR COMPRENDRE L’ÉGLISE DE PIERRE À ROME-(III)

DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

Peu avant sa mort, en 395, l'empereur Théodose 1er avait partagé l'Empire romain entre ses deux fils : à l'un l'Orient, à l'autre l'Occident. Dix ans plus tard, victime des invasions barbares, l'empire d'Occident est fractionné en plusieurs royaumes. Il finit par s'écroule en 476, l’empire d'Orient s'avérant incapable de défendre Rome.Le siège de l'Empire est désormais à Constanti-nople, mais le pape n'a pas abandonné Rome. Il y réside même, avec tout le haut clergé, et exerce une autorité civile crois-sante. Grégoire le Grand (590-604) restaure l'admi-nistration de la ville sainte qui devient peu à peu un centre politique. L’Église s'organise en un système monarchique avec un souverain, le pontife. Les papes recherchent alors des alliances en Occident. Harcelés par les Lombards, ils prennent appui sur les rois francs et sur les empereurs germaniques. Ainsi. C’est avec la caution de Rome que Pépin le Bref dépose en 751 le dernier des Mérovingiens, Childéric III, et se fait élire roi. En 754 à Ponthieu en Champagne, il rencontre le pape Étienne II. Les pourparlers aboutissent à ce qu'on appelle la « promesse de Quierzy ». Le pape reconnaît l'autorité du souverain carolingien qui, en échange, s'engage à libérer la papauté de l'oppression lom-barde, L'affaire est réglée entre 754 et 756 et Pépin donne les territoires libérés au pape. C'est l'acte de naissance des États pontificaux et du véritable pou voir temporel du pape; pendant plus d'un millénaire, le pape en sera le seul

La naissance des États pontificaux

maître. L'arrangement déplaît à Cons tantinople qui estime avoir toujours un droit de regard sur Rome. C'est alors que surgit opportunément un document ancien: selon cette Donation de Constantin, l'empereur, atteint par la lèpre, aurait été guéri et baptisé par le pape Sylvestre en 330. En gage de reconnaissance, il aurait accordé au pape des possessions non seulement sur la ville éternelle, mais aussi sur le Latran et sur l'Italie. Ce document est un faux qui, pendant longtemps, va servir aux souverains pontifes pour justifier leur pouvoir temporel. La supercherie ne sera définitivement levée qu'au XIVe siècle.Les États pontificaux constituent au début une large écharpe de territoires, traversant la péninsule du sud de

Rome au delta du Pô. Ils se structurent au fil des siècles, grâce à des acquisitions foncières et à un maillage adminis tratif et judiciaire. Mais les frontières changent régulièrement au gré des revendications mutuel les entre la papauté et les puissances régionales, les royaumes et duchés. Les querelles sont égale ment endémiques avec les empereurs germaniques d'Occident. À certaines épo ques, ces États incluent au nord Parme et Modène, Ravenne et Bologne, à l'ouest Avignon et le Comtat Venaissin, au sud la Corse, la Sardaigne et la Sicile. Au XIVe siècle, ils sont annexés par Napoléon, puis réduits à la région du Latium autour de Rome, avant de disparaître dans la tourmente de l'unité italienne en 1870 (voir clés 17 à 21).

2322 DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

Des enceintes fortifiées pour défendre le VaticanAvant même que Nico las III ne soit le premier pape à en faire sa rési dence principale au XIIIe siècle, le Vatican est l'objet de convoi tises, à travers les trésors de sa basilique et de ses palais, édifiés à partir du VIe siècle. Ce sanctuaire pour les pèlerins, qui se pressent de plus en plus nom-breux vers la tombe de saint Pierre, constitue aussi un enjeu politique, car la papauté mêlera longtemps pouvoir spirituel et temporel. Les menaces viennent aussi bien des invasions étrangères que des rivalités entre grandes familles romaines. Après le pillage de Rome par les Sarrasins en 846, Léon IV fait entourer tout le quartier autour du Vatican (le Borgo) d'une enceinte fortifiée, Les vestiges impressionnants de ce « mur léonin » sont encore visibles aujourd'hui à l'ouest et au nord de la cité. Mais cette muraille a été restaurée au XVe siècle sous Nicolas V. Au siècle suivant, Paul III demande à Sangallo le Jeune de renforcer l'enceinte par des bastions. De nouveaux murs sont construits et ces aménagements successifs se poursuivent jusqu'au milieu du XVIIe siècle, avec Urbain VIII.

Au Moyen Âge, quand les papes entreprennent la construction des bâtiments adossés à la basilique, la préoccupation défensive est particulièrement présente. Nicolas III (1277 – 1280) commence à édifier une forteresse garnie de tours. Nico las V (1447-1455) parachève le projet de son prédécesseur et y accole un donjon. Sixte IV (1471-1484) bâtit la chapelle Sixtine, dont on remarque aisément de l'extérieur les cré neaux des murs. Alexandre VI (1492-1503) donne son nom (Borgia) à la tour massive à l'angle du palais médiéval. Entre le Borgo et le Tibre, l'ancien mausolée de l'empereur

Hadrien devient aussi un vérita ble château fortifie, renforcé pat Nicolas V et Alexandre VI. C'est là que Clément VII se réfugie en 1527 devant l'avancée des troupes de Charles-Quint, Il emprunte pour cela le passetto. Cette longue muraille construite par Léon IV (847-855) relie le château Saint-Ange au palais du Vatican. Alexandre VI avait fait aménager un passage à son sommet.

DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

Grégoire VII (pape de 1073 à 1085) fait par tie des pontifes qui ont laissé une forte empreinte dans l'histoire de l'Église. C'est un homme de grande culture et de principes. C'est grâce à lui notamment que le synode du Latran avait, en 1059, décidé de réserver l'élection du pape aux cardinaux, c'est-à-dire au haut clergé romain, pour se débar rasser de la tutelle du souverain du Saint-Empire romain ger manique, qui jusque-là impo sait ses candidats au trône de saint Pierre.Le siècle précédent avait été particulièrement turbulent et néfaste pour l'image de la papauté. Léon IX (1049-1054) avait amorcé un certain redres sement. Grégoire VII est le premier à mettre en œuvre la notion de «théocratie chré tienne»: le pape, représentant Dieu sur terre, a donc vocation à détenir un pouvoir aussi bien temporel que spirituel. Ce qui veut dire qu'il exerce une souve raineté prééminente et indivisi ble sur l'Église, mais aussi que toute la société est organisée sous la houlette de Rome. Tout acte accompli ayant une valeur spirituelle, le pape a le devoir et le droit de tout contrôler.

La « réforme grégorienne» est d'abord d'ordre moral. Le pape s'attaque à la simonie, c'est-à-dire le trafic des char ges ecclésiastiques, et à toutes les corruptions et féodalités qui gangrènent le clergé. Elle est aussi d'ordre institutionnel. Grégoire VII transforme radica lement les structures de l'Église. Il s'engage sur la voie d'une véri table monarchie théocratique. Il favorise la centralisation, ce qui aboutira à la mise en place d'une administration de plus en plus forte, la curie romaine. Grégoire VII veut redonner leur dignité et leur indépendance aux évêques et aux clercs en les libérant de toute tutelle. C'est ce qui l'amène à affronter l'em pereur allemand car le système féodal est fondé sur le prin cipe des investitures laïques. Comme chaque suzerain vend un fief h un vassal, les évêchés et les abbayes sont devenus eux aussi de véritables seigneuries. En 1076, le pape fait plier le roi de Germanie et futur empereur Henri IV à Canossa, mais la trêve ne dure guère. L'armée de l'empereur envahit Rome en 1083 et oblige Grégoire VII à se réfugier au châ teau Saint-Ange. Les riva lités vont se poursuivre encore longtemps entre pouvoir religieux et pouvoir séculier, jusqu'au moment où les puis sances politiques abandonne ront leur droit de regard sur les nominations religieuses.

La réforme grégorienne,aux origines de la papauté moderne

Il ne reste plus aujourd'hui que des ruines du château de Canossa. Cette forteresse qui s'élevait sur les pentes de l'Apennin, dans le nord de l'Italie, appartenait à la comtesse Mathilde, amie des papes à qui elle légua ses possessions en usufruit viager. C'est Mathilde qui joue les médiatrices dans la fameuse « Querelle des investitures» durant laquelle le pape et l'empereur germanique s'affrontent pour le contrôle des nominations ecclésiastiques, évêques et abbés. Alors que Grégoire VII vient d'être accueilli à Canossa, Henri IV arrive à son tour, le 25 janvier 1077. Il est seul, nu-pieds et en habit de pénitent. Il demande qu'on lui pardonne et qu'on le relève de l'excommunication. Quelques mois plus tôt, le pape l'avait en effet exclu de l'Église car le roi de Germanie avait tenté de le destituer, mais la confrontation avait tourné à l'avantage de Grégoire VII. Le pape lève l'excommunication le 28 janvier. Dans la chapelle du château, l'empereur agenouillé, les bras en croix, aux pieds de Grégoire VII, reçoit l'absolution et la communion. Tout se termine autour d'un banquet. Mais le pape ne tirera pas de réels bénéfices politiques de cette allégeance. «Aller à Canossa»: cette histoire a été assimilée dans l'imaginaire populaire à l'humiliation suprême. Elle a inspiré de nombreux romanciers, peintres et dramaturges.

Le pape à Canossa

2524 DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

Le cardinal Humbert de Moyenmoutier est l'im pétueux légat de Léon IX. Envoyé à Constantinople, il dépose le 16 juillet 1054, sur l'autel de Sainte-Sophie, en pleine célébration, une bulle du pape excom-muniant Michel Cérulaire, son patriarche. L'ana thème dénonce « les injures inouïes et les outrages adressés au Saint-Siège » de Rome. La réponse ne se fait pas attendre: le patriarche de Constantinople convoque aussitôt un concile d'une vingtaine d'évê ques qui, à son tour, excommu nie les «Latins». Le divorce entre l'Église d'Occident et l'Église d'Orient est consommé.

La ruptureentre Rome et Constantinople

La rupture parachève des siè cles de malentendus politiques et de querelles théologiques. Quand Constantin fait en 313 du christianisme la reli gion officielle et transfère en 330 sa capitale dans la ville grecque de Byzance, devenue Constantinople, le déséquilibre s'instaure déjà. D'un côté, l'empire d'Occident se délite. De l'autre, une civilisation byzantine raffinée est en plein essor à Constan tinople, la nouvelle Rome. À l'ouest, le pape revendique une primauté justifiée par la pré sence des tombes des apôtres Pierre et Paul. On y instaure une monarchie théocratique, avec une conception autoritaire et pyramidale du pouvoir religieux. À l'est, on se prévaut de l'essor du monachisme, des grands théologiens que furent les Pères de l'Église et des sept premiers conciles œcuméniques tenus dans ces contrées entre le IVe et le VIIIe siècles. Le patriarche y défend une conception collé-giale du pouvoir.

Deux mondes, deux langues, deux culturesCe sont en fait deux mondes, avec deux langues (le latin chez les Romains, le grec côté byzan tin) et deux cultures, que tout a fini par séparer. Avec le recul, les historiens pointent des causes plus immédiates qui n'expli quent pas tout. Il y eut par exem ple la crise iconoclaste. Elle a opposé ceux (les iconoclastes) qui refusent qu'on reproduise l'image du Christ parce que cela porte atteinte à sa nature divine et immatérielle, et ceux (les ico nodules ou iconolâtres) qui n'hésitent pas à utiliser pour le culte ces images saintes, signes visibles de la sanctification et de l'incarnation. Le débat violent aboutit à des persécutions lan-cées par des empereurs byzan tins iconoclastes au VIIIe siècle. Rome boycotte le concile de Constantinople de 680 qui condamne le culte des images. Le concile de Nicée de 787 rétablit la situation.

DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

La douloureuse question du « Filioque”

Mais il y eut surtout la querelle du Filioque. Les conciles de Nicée (325) et de Constantino ple (381) avaient défini un Dieu unique en trois personnes (Père, Fils et Esprit), sans hiérarchie entre elles, et un Credo préci sant que «l'Esprit procède du Père». Mais en Europe du Nord, l'hérésie de l'arianisme, selon laquelle le Fils de Dieu n'est pas Dieu, trouble les esprits.

C'est pourquoi, à partir du VIe siècle, on voit apparaître en Occident la formule « l'Esprit procède du Père et du Fils (filioque en latin) », pour renforcer le rôle divin de Jésus, le Fils. Charlemagne impose cette traduction latine du Credo mais l'expression n'est entérinée qu'au XIe siècle à l'occasion du couronnement d'Henri II en 1014. Constantinople n'acceptera jamais cette formulation. D'autres joutes doctrinales ont opposé Latins et Byzantins. Elles relevaient de la discipline (célibat des prêtres, port de la barbe...) ou du culte (usage du pain azyme sans levain pour les hosties). On comprend qu'elles aient pu donner nais sance à l'expression «querelles byzantines»! Deux tentatives de réconciliation, à Lyon en 1274 puis à Flo rence en 1439, n'arriveront pas à combler le fossé qui n'a fait que s'élargir depuis 1054. Il est vrai que les croisades n'ont rien fait pour apaiser les esprits. Le sac de Constantinople en juin 1204 a frappé la mémoire collective orthodoxe pour longtemps. Ce n'est qu'au XXe siècle qu'un nouvel espoir œcuménique s'ouvre avec Jean XXIII. En 1964, Paul VI rencontre le patriarche Athénagoras et le 7 décembre 1965, veille de la clôture de Vatican II, les pères conciliaires lèvent solennellement les excommunications prononcées 911 ans auparavant.

(Tiré de la revue Hors-Série « Pèlerin »)

2726 DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

Grégoire 1er le Grand (590-604)Il est l'un des rares, dans l'histoire de la papauté, à avoir reçu pour le moment le qualificatif de «grand», avec Léon 1er et Nicolas 1er. Grégoire 1er est un personnage fait de contradictions. Issu de la haute noblesse romaine, il jouit d'une grande popularité parce qu'il tente de répondre aux questions de son époque. Préfet de Rome 23 ans, il acquiert une grande connaissance de l'administration, mais il restera toute sa vie un contemplatif peu attiré par la gestion. Moine à 25 ans, il devient ensuite représentant du pape à Constantinople pendant six ans, avant de revenir dans l'un des monastères qu'il a fondés. Il est élu pape par acclamation à l'âge de 50 ans contre sa volonté. C'est l'un des rares souverains pontifes issu du monde monacal.

Grégoire 1er développe une activité débordante alors qu'il est en mauvaise santé. Il écrit beaucoup. Ses ouvrages sur la place de l'évêque dans la vie sociale, ses catéchèses et ses sermons connaissent un succès considérable. Lui qui utilise le titre de « serviteur des serviteurs» témoigne d'une foi exigeante et d'un profond mysticisme. Il s'élève contre la prétention du patriarche de Constantinople à revendiquer le titre de patriarche œcuménique, mais il réclame pour celui de Rome une primauté d'honneur. Grégoire 1er a aussi laissé son empreinte en matière de réforme liturgique.Son canon de la messe demeurera inchangé pendant plus de dix siècles et l'usage du chant grégorien apparaît sous son règne à Rome. Dès avant sa mort en 604, il est vénéré. Sur sa tombe à Saint-Pierre figure une inscription: « le consul de Dieu ». Canonisé, il porte aussi le titre de « docteur de l'Église».

(Tiré de la revue Hors-Série « Pèlerin »)

DÉCOUVRIR LA CITÉ DU VATICAN III

PORTRAITSLa figure de Grégoire 1er le Grand émerge parmi les papes au premier millénaire. La petite histoire de l'époque a fait ses choux gras de la prétendue « Jeanne la papesse ».

La « papesse Jeanne »Elle aurait des origines anglaises et serait née à Mayence au IXe siècle. Elle se serait Travestie afin de pouvoir suivre son amant à Rome. Elle aurait réussi à être admise dans la hiérarchie de la Curie romaine sous son déguisement masculin et aurait fini par être élue pape. Elle aurait ainsi occupé le siège pontifical pendant deux ans jusqu'à ce que la supercherie soit découverte: elle aurait accouché en catastrophe dans la rue au cours d'une procession entre Saint-Pierre et Saint-Jean-de-Latran, et serait décédée. _ L’histoire de la «papesse Jeanne» est une légende, mais qui a eu la vie dure.

Apparue au milieu du XIIIe siècle, la rumeur dure tout le Moyen Âge. Il faut attendre le XVIe siècle pour qu'elle soit sérieusement réfutée. Un dominicain d'un couvent de Metz y fait référence en 1255. Il est relayé par d'autres prêcheurs dominicains, par les chroniques médiévales, mais aussi par des milieux proches de la Curie romaine. Elle devient un argument polémique: papes et antipapes s'en servent, des franciscains y voient le signe d'une occupation satanique du siège pontifical, les luthériens trouvent là une preuve opportune de la corruption romaine. La petite histoire en retient que cette mésaventure aurait obligé depuis les cardinaux à vérifier le sexe de tout pape nouvellement

élu... Là encore, l'imagination s'est emballée. Elle s'inspire d'un détail: à partir du Xle siècle, on a utilisé une chaise à l'assise fortement échancrée pour le couronnement du pape au Latran. Ce siège ressemblait aux chaises curules antiques symbolisant l’aspect collégial de la Curie.

« COUP DE CŒUR »…

« COUP DE CŒUR »…

« COUP DE CŒUR »…

Marchez dans la foi, c'est important. Lorsque vous allez vous trouver ensemble, vous allez apprendre à faire des exercices de foi.

Vous allez commencer à faire des bâtons, des courbes et des déliés. Il faut absolument ensemble apprendre que le Seigneur vous aide dans les toutes petites choses. Et c'est [par] des petits témoignages que petit à petit vous allez le vivre dans les toutes petites choses, C'est cela qui est important, ces exercices de la foi. Et on ne peut le faire qu'en communauté.

2928 « COUP DE CŒUR »… « COUP DE CŒUR »…

3130

8 juilletNous demandons à la Vierge de nous accor der la grâce d'être forts, de veiller à satisfaire les besoins de nos semblables, afin de rester un peuple qui suit le Christ et qui porte sa croix — sans jamais perdre espoir —, dans la souffrance et la prière, suppliant Dieu et lui rendant grâce, un peuple gai malgré les soucis de l'existence.9 juilletLe geste du bon Samaritain n'était pas un simple geste tendre, sentimental et passager. Le Samaritain a trouvé dans la compassion le courage et la force de venir en aide à l'homme blessé.

10 juilletAttendri et compatissant, le bon Samaritain a senti qu'il était injuste de laisser ainsi un de ses semblables. Il s'est senti solidaire de ce pauvre voyageur et son cœur attendri a fait surgir en lui l'espoir qu'il y ait encore de la vie dans ce corps exsangue, ce qui lui a donné la force de lui porter secours.

11 juilletSentiment de justice, de solidarité et d'espoir, tels sont les sentiments du bon Samaritain et tels sont les sentiments de Jésus à l'égard de nous tous.

12 juilletJustice, solidarité et espoir... sont différentes manières de ne pas passer son chemin. Maintenir allumée la flamme d'espoir tout en luttant pour la justice et en restant solidaire, voilà com ment éviter de passer son chemin. Nous devons aller vers tous nos semblables, sans exception, principalement au-devant de ceux qui ont besoin de nous. Quand je vais vers quelqu'un, « mon cœur s'attendrit » et je passe à l'action.

13 juilletLe désir de justice, de solidarité, d'espoir se tra duit en gestes concrets, à l'image du bon Sama ritain : j'apporte le vin et l'huile, je panse les blessures, je m'occupe du blessé, je l'emmène l'auberge, je paie pour qu'on le soigne et je promets de revenir le voir.

14 juilletLorsque nous n'allons pas vers les gens, lorsque nous regardons de loin, les choses ne nous font pas mal, elles ne nous attendrissent pas. On dit bien « loin des yeux, loin du cœur », mais on pourrait tout aussi bien dire « cœur qui ne va pas vers l'autre, qui ne touche pas la dou leur, cœur qui ne ressent pas... et donc, yeux qui regardent mais qui ne voient pas ».

15 juilletJésus a mis en avant le pouvoir de l'amour en tant que service à autrui. [...] Sa source se trouve au-delà de toute identification humaine, c'est la paternité divine de l'amour, source inat teignable et indiscutable. Cet amour, ainsi trans mis de l'un à l'autre, ne peut être manipulé ou mal interprété. Seul l'amour suprême, celui qui vient de Dieu, confirme le pouvoir de Jésus.

16 juilletEn tant que Peuple fidèle de Dieu, nous éprou vons les mêmes sentiments qu'eut Jésus et nous en rendons grâce à notre Père, car c'est Lui qui attendrit notre cœur et qui nous transmet ce fort désir d'être plus justes, plus solidaires et pétris d'espoir.

17 juilletLa douleur n'est pas seulement une chose qui réclame de l'aide et exige des solutions. Si on la vit comme nous l'enseigne le Christ, la dou leur cache aussi une bénédiction et même une certaine joie ; une joie certes douloureuse, mais réelle.

18 juilletLorsque Jésus va au-devant de notre douleur, tout parait bien différent. Jésus nous parle des pauvres, des gens qui ont faim, de ceux qui se lamentent..., mais il y a de l'espoir dans le ton de sa voix, l'écouter est pour nous une conso-lation. Heureux vous qui pleurez maintenant car vous serez consolés, nous dit-il. Et ces mots sont déjà une façon de sécher nos larmes.

19 juilletLorsque Jésus dit : pauvres de vous, les riches, vous qui êtes satisfaits aujourd'hui, vous qui riez aujourd'hui... Plus que nous énerver, ces personnes dont parle Jésus finissent par nous faire pitié. C'est comme si leur sottise nous sau-tait aux yeux, comme si l'on devinait que leur affaire finirait mal.

UNE ANNÉE AVEC... ... LE PAPE FRANÇOIS

UNE ANNÉE AVEC LE PAPE FRANÇOIS

1er juilletDans le cœur de Dieu notre Père nous avons notre place, en tant qu'individus et en tant que peuple! Nombreuses sont les personnes qui ne trouvent pas leur place au sein de la cité, soit qu'elles en sont exclues, soit parce que, déso rientées, elles ont abandonné leur poste de com bat; le combat pour le bien général, préférant certains lieux privilégiés qui offrent des joies passagères.2 juilletAuprès de Dieu notre Père, l'expérience est totalement différente puisque nous nous sommes toujours sentis appelés, nous avons toujours été conviés. Lorsque, désorientés, nous nous sommes égarés, notre Père nous a envoyé Jésus pour qu'il nous rende notre place, afin que nous ayons notre place dans la vie, afin de soi gner nos blessures.

3 juilletPour pénétrer dans le sanctuaire il nous faut faire la queue, car nous sommes nombreux, mais dans cette queue notre attente est pleine d'espoirs. Celui qui est devant nous n'est pas un concurrent, mais notre semblable, celui qui nous suit pareillement.

4 juilletLorsque nous voyons une personne peu cou verte, dans le besoin, souvenons-nous que, pour notre Père, c'est la personne la plus importante, celle qu'il a davantage cherchée, celle à qui sont destinées les meilleures caresses.

5 juilletQuand on se prend à aider autrui, on trouve sa place dans la vie. Lorsque nous satisfaisons aux besoins de nos semblables, c'est avec éton nement et gratitude que nous voyons autrui nous venir en aide.6 juilletCelui qui veut m'accompagner, qu'il porte sa croix et me suive, a dit le Seigneur. Et, au pied de la croix, seul celui qui est prêt à. aider autrui trouve sa place.

7 juilletÊtre prêt à aider autrui est une vertu de notre peuple. Une vertu que nous avons héritée de nos ancêtres et que nous devons transmettre nos enfants. Une vertu qui nous permet de faire une nette différence entre vrai père et faux père, entre un ami et un traître, entre celui qui est disposé à aider et celui qui se contente de vivre sa vie.

3332 ...LE PAPE FRANÇOIS20 juilletJésus jette un regard profond sur la réalité et nous dit : Pauvre cœur qui ne sait pas pleurer ! Pauvre cœur qui n'a ni faim ni soif de justice ! Pauvre cœur qui ne se sent pas, pauvre d'amour ! Pauvre cœur pétri de vanité... ! Ce cœur-là, ce pauvre cœur finira endurci, méprisé, seul.

21 juilletHeureux parce que tu fais le bien, heureux parce que tu pleures, heureux non pas pour ce qui te manque... mais heureux parce que les dons de Dieu sont grands et que tu les recevras si tu gardes ton cœur démesurément ouvert. C'est pourquoi Jésus appelle heureux ceux qui, confrontés à certaines réalités, ouvrent tout grand leur cœur.

22 juilletLa bénédiction dédiée à ceux qui pleurent nous rappelle les sanglots versés au sein de la famille. Car dans les larmes d'une mère ou d'un Père pleurant pour son enfant se cache la plus belle prière que l'on puisse faire ici-bas : cette prière de larmes silencieuses et paisibles qui accompagne et intercède, pareille à celle de notre Mère au pied de la croix, qui sait demeurer au côté de son Fils sans esclandres et sans cris

23 juilletL’amour nous invite à accepter le fait que cette faiblesse offre l'opportunité de nous recons truire, de nous réconcilier et de grandir. Loin d'être une chose sentimentale et banale, une simple impulsion, l'amour est un cheminement fondateur, sublime et irremplaçable qui se pré sente aujourd'hui comme une chose dont notre société déshumanisée a besoin.

24 juilletEn ces temps si difficiles, il nous faut confir mer foi et confiance en Jésus notre Seigneur. Il se chargera, personnellement, de sécher nos larmes, comme il nous l'a promis. Si nous met tons en Lui tous nos espoirs, alors nous serons heureux.

25 juilletNous mettons nos pleurs sous les yeux de la Vierge et « tandis que nous soupirons, gémis sons et pleurons dans cette vallée de larmes », disons-lui : « Et maintenant, toi notre Mère et avocate, tourne vers nous tes yeux miséricor dieux et, après cet exil, présente-nous Jésus... »

26 juilletNotre Seigneur Jésus-Christ nous a lavé les pieds et nous a dit que, si nous l'imitions, nous serions heureux : « Si vous goûtez cette vérité — que le pouvoir, c'est se mettre au service d'autrui — et la pratiquez, vous serez heureux. »

27 juilletLe Seigneur était conscient qu'à ce moment-là « il avait tout le pouvoir du monde entre ses mains ». Et qu'a-t-il fait de ce pouvoir absolu ? Il l'a concentré en un seul geste, en un geste de soumission : offrir le pardon jusqu'au moindre détail, laver les pieds de ses disciples. Depuis lors, le pouvoir, c'est à jamais se mettre au service d’autrui.

28 juilletSi l'être le plus puissant a usé de son pouvoir pour se mettre au service d'autrui et pardonner, quiconque utilise ledit pouvoir à une autre fin sombrera dans le ridicule. Avec ce geste simple Jésus a tiré les puissants hors de leur trône et relevé les humbles, comme disait la Vierge, sa très sainte Mère, notre Mère à tous.

29 juilletLe pouvoir, c'est se mettre au service d'autrui et, pour être efficace, le service doit être rendu jusqu'au moindre détail, afin que l'autre se sente bien accueilli, avec sa dignité recouvrée. Jésus nous rassemble pour nous faire partager ce pou voir : pouvoir du service rendu entre personnes égales, pouvoir de servir jusqu'à ce que soit clai rement établie l'égalité entre celui qui rend service et celui qui en bénéficie.

30 juilletLes discours ne suffisent pas, il faut des témoi gnages. La personne qui détient une fraction de pouvoir en plus doit consacrer une fraction de son temps aux autres.

31 juilletDemandons à la Vierge de nous apprendre toutes ces vérités, de nous les graver dans la mémoire pour que, chaque fois que la vie nous place devant ce choix: se mettre au service d'autrui en incluant ou se défausser en excluant, laver les pieds à son semblable ou nous laver les mains la vue d'un pauvre hère, il nous vienne à l'esprit l'image de Jésus et que la joie de servir s'empare de notre cœur et nous engage à travailler pour le Royaume.

UNE ANNÉE AVEC...

3534 LES ESPACES DE LA PRIÈRE LES ESPACES DE LA PRIÈRE

LES ESPACES DE LA

PRIÈRE - VII Pour saint Paul, le chrétien est appelé à prier sans cesse. (1 Th 5, 17). Que voulait-il dire ?... La prière, incessante, peut être en nous sans que nous y pensions, comme l'air que nous respi rons. Il suffit que nous soyons ouverts ; il suffit que nous cherchions à comprendre, à mieux vivre, à mieuxaimer pour que quelque chose implore en nous. Sous forme de question ou d'adhésion, de révolte ou de consentement, de joie ou de souffrance, un mouvement léger, souvent à notre insu, nous tire de notre suffisance, nous tourne vers un autre. C'est la prière. Sans cesse. Prier consciemment n'est pas autre chose que prêter l'oreille à la prière silencieuse au creux de nous, l'écouter attentivementet la laisser monter à notre esprit et à nos lèvres. Nous découvrons alors que la prière était en nous et nous ne lesavions pas : prière murmure de la présence qui nous habite...

En priant, nous n'avons pas à nous inquiéter de manifester nos désirs ou nos besoins à Dieu qui connaît tout. Pourtant la prière est nécessaire à l'homme pour obtenir une grâce de Dieu : la prière à Dieu nous rend elle-même familiers de Dieu, puisque notre âme s'y élève vers lui, s'entretient affectueusement avec lui et l'adore en esprit et en vérité. Cette intimité acquise en priant incite l'homme à se remettre en prière avec confiance. C'est pourquoi il est dit dans le psaume : j'ai crié, c'est-à-dire j'ai prié avec confiance, parce que tu

La principale, la seule et très simple méthode pour atteindre le salut et la perfection spirituelle est la fréquence et le caractère ininterrompu de la prière, si faible soit-elle. Âme chrétienne, si tu ne trouves pas en toi-même le pouvoir d'adorer Dieu en esprit et en vérité, si ton cœur ne sent pas la chaleur et la douce satisfaction de la prière intérieure, alors apporte au sacrifice de la prière ce que tu peux, ce

La prière est au-delà de toute loi : elle est de l'ordre de la vie de l'amour qui ne peut durer et s'approfondir sans échanges. À toi de trouver, avec ceux qui t'aident, la forme et le temps de ta prière afin de mettre graduellement ta vie tout entière dans le courant de l'Esprit et qu'elle en soittransformée et pénétrée.

PRIER SANS CESSE, PRIER EN TOUT

LA PRIÈRE, UN LONG CHEMIN DE CONFIANCE

SIMPLEMENT, UNE PRIÈRE FRÉQUENTE

METTRE SA VIE DANS LE COURANT DE L'ESPRIT SAINT

C’est lorsque le besoin qu’il a du monde se convertit en désir de Dieu que l’homme fait l’expérience de sa filiation divine. La prière est le lieu de cette conversion, et la vie de l’homme peut tout entière alors devenir prière.

On se dispose à écouter et à recueillir la prière qui est en soi. Cela ne se fait pas sans effort ; non pas un effort tendu, anxieux du résultat à obtenir, mais un effort calme, de l'attention laplus soutenue, marquée par le respect, le désir et l'humilité... Il n'y a rien qui ne puisse se tourner en prière, en relation directe et vivante avec Dieu. On ne prie pas que dans les chapelles et il n'est pas indispensable de s'abstraire de l'ordinaire. Dieu devrait-il déserter nos minutes banales et ne se donner à rencontrer que dans les moments extraordinaires?Ce ne serait plus lui, qui s'est voulu proche de nous en tout... Par la prière, nous mettons tout sous le regard de Dieu et pouvons ainsi progessivement entrer dans la vérité de ce quinous est donné à vivre.

Régine du Charlat

m'as exaucé, mon Dieu (16, 6). Reçu dans l'intimité de Dieu par une première prière, le psalmiste prie ensuite avec une confiance accrue. Ainsi, dans la prière à Dieu, l'assiduité ou l'insistance dans la demande n'est-elle pas importune, mais bien plutôt agréée de Dieu ; car il faut toujours prier, dit l'Évangile, et ne jamais se lasser (Lc 18, 1) ; et ailleurs le Seigneur nous invite à demander: Demandez et vous recevrez, dit-il, frappez et l'on vousouvrira (Mt 7, 7).

Saint Thomas d'Aquin

qui dépend de ta volonté, ce qui est dans les limites de ton pouvoir. Familiarise, avant tout, l'humble instrument de tes lèvres avec l'invocation fréquente et persistante de la prière. Qu'elles invoquent le nom de Jésus souvent etsans interruption.

Anonyme

C'est l'Esprit qui te fera découvrir la parole du Seigneur : «Il faut prier sans cesse... » en libérant en toi ce dialogue de louange, d'adoration, de référence et de recours à Dieuau cœur même de l'agir.

Thérèse Gardey de Soos

3736 PÈLERINAGE PÈLERINAGE

PÈLERINAGE,UN CHEMIN VERS DIEU

Contrairement à l'islam, le christianisme n'impose pas de pèlerinage au croyant. Comme le dit le Christ, « le Royaume de Dieu est au dedans de vous » (Luc 17:21). L'histoire d'une vie croyante n'est-elle pas elle-même un voyage pour se retrouver soi-même en retrou vant Dieu ? Ce Dieu qui, dans la Genèse (12:1), interpelle Abra ham : « Va-t'en, quitte ta terre, ta patrie et ta maison vers la terre que je te ferai voir », et à qui le Christ, son Fils, fait écho : « Va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, puis

PÈLERINAGE UN CHEMIN VERS DIEU

Signe d’une profonde dévotion, sacrifice volontaire en hommage à Dieu, le pèlerinage chrétien n’a rien d’une obligation. C’est un moment choisi,

hors du temps commun, porté par une réelle quête de sens.viens et suis-moi » (Marc 10:21). Le pèlerinage n'est pas obligatoire, mais les Écri tures saintes font du voyage un moyen de cheminer vers Dieu. Dès les premières années du christianisme, on « pèlerine » vers les lieux que, selon les Évangiles. Jésus a parcourus. Mais, durant presque trois siècles après la mort du Christ, ceux qui se disent chré-tiens ou juifs-chrétiens sont des clandestins, des réprouvés. Il faut attendre l'édit de tolérance de Constantin (313) et, surtout, le voyage à Jérusalem de sa mère, sainte Hélène (y. 250-v. 330), qui « redécouvre » le lieu de la cruci fixion et même la « vraie croix », pour que les pèlerins (du latin pelerinus, « étranger ») affluent vers les lieux saints. C'est presque un embouteillage !

Le voyage de « l'anonyme de Bor deaux » qui part en 333 d'Aquitaine et rejoint la Palestine (5.000 kilomètres) en 170 étapes est le premier récit de pèlerinage dont nous disposons. Les invasions barbares - qui ont raison de l'Empire d'Occident au milieu du Ve siècle - ne vont faire qu'accélérer le mouve ment, même si bientôt les « paulmiers » (pèlerins de Jérusa lem) sont concurrencés par les romieux (pèlerins de Rome). En dépit des luttes incessantes entre Byzantins et barbares (Ostro goths, puis Francs), la « Ville éter nelle » relève du pouvoir pontifical qui en fait le centre de la chré tienté. Venus du nord de l'Europe, d'Angleterre, de Gaule, de Germa nie, les pèlerins, riches ou pauvres, encombrent ainsi la « via Franci gena » (celle qui vient du royaume franc) pour venir se recueillir sur les tombes de saint Pierre et saint Paul, etc.Mais pourquoi partir ? Pour mani fester sa foi, pour obtenir la guéri son de son corps parfois, de son âme surtout. Le pèlerinage, qui peut durer des années, est une sorte de sacrifice où l'on donne son temps et où, souvent, on risque sa vie. On vient adorer un lieu saint, une statue miraculeuse, mais sur tout des reliques, ces restes des saintes personnes (ossements, sang, dents...) ou des objets qu'elles ont touchés (la croix, la couronne d'épines, la tunique de Marie...). L'Église s'inquiète d'abord du type de vénération qu'elles peuvent susciter. On craint l'idolâtrie. Le deuxième concile de Nicée (787) affirme qu'elles ne peuvent faire l'objet que d'un culte relatif ne s'adressant pas à l'objet lui-même, mais à la personne qu'il symbolise ou rappelle. Ces reliques, enfer mées dans des reliquaires, surmontées d'un autel, puis d'une église, vont constituer le but de très nombreux pèlerinages, sur tout à partir du milieu du Xe siècle quand Godescalc, évêque du Puy- en-Velay, « lance » Saint-Jacques-de-Compostelle, en Galice.C'est en 813 qu'un ermite guidé par une étoile, d'où le nom de « campo stella », découvre un corps décapité rapidement identi fié par l'évêque du lieu comme celui de l'apôtre saint Jacques le Majeur. Une église est édifiée. Quarante-six ans plus tard, saint Jacques devient « Santiago mata moros » (« le tueur de Maures ») après être apparu au roi catholique, Ordoño des Asturies (821-866) et lui avoir assuré la victoire de Cla vijo contre les musulmans qui, depuis le début du VIIIe siècle, se sont emparés de la péninsule ibérique. De cette Reconquista, saint Jacques devient le patron.Une marque déposéeUn apôtre, un saint, un héros national, que faut-il de plus pour faire de Compostelle le lieu par excellence de la dévotion chré tienne ? Le pèlerinage à Saint-Jacques va susciter dans toute l'Europe un engouement fantas tique.En 1300, le pape Boniface VIII (1235 -1303) proclame le

premier jubilé à Rome et récompense ceux qui viennent dans la Ville sainte pour y participer d'une indulgence plé-nière, la rémission complète des péchés. Mais ce jubilé a lieu tous les cinquante ans et même si, dès l'an 1400, il se déroule tous les vingt-cinq ans, il est beaucoup moins « rentable » pour le péni tent que le pèlerinage de Compos-telle qui distribue les indulgences plénières toutes les années où la fête de saint Jacques tombe un dimanche, soit tous les six ans.L’engouementCompostelle va toutefois pâtir de son succès. Les faux pèlerins che minent pour détrousser les vrais, les riches se paient des rem plaçants pour aller empocher à leur compte les fameuses indul gences. Pour Luther, cette vaste foire est impie. L’authenticité des saintes reliques - d'ailleurs égarées de 1590 à 1879 - est plus que dou teuse.Les protestants se détournent donc des pèlerinages,

tandis que, en soli taire ou en groupe, catholiques et orthodoxes arpentent les routes. Au XIXe siècle en France, en réac tion aux idées républicaines, les pèlerinages lancés par l'ordre des

assomptionnistes* prennent l'al lure de manifestations organisées.Parallèle ment, les appari tions de la Vierge à Lourdes (1858) puis à Fatima (1917) attisent le renouveau du culte marial. Des flots de pèlerins se déversent vers les lieux sacralisés par Marie. Ces foules vont encore grossir dans la seconde moitié du XXe siècle, notamment sous l'impulsion du pape Jean-Paul II (1920-2005). Celui-ci promeut, à l'occasion de l'année jubilaire 1984, un rassemblement de jeunes qui va devenir régulier : les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). Ces énormes rendez-vous raniment la ferveur populaire pour le pèlerinage.Valeurs sûresC'est ainsi qu'aujourd'hui, c'est par centaines de milliers, voire par millions, que les visiteurs affluent vers la grotte miraculeuse de Lourdes, la Vierge de Guada lupe (Mexique), la Vierge noire de Czestochowa (Pologne) ou encore, pour les orthodoxes, la Trinité-Saint-Serge à Serguiev Possad, au nord de Moscou, ou le monastère de Valaam, lui aussi en Russie, la Terre sainte et Com-postelle restant bien sûr des valeurs sûres. Populaires, ces pèlerinages modernes ont-ils gardé leur âme à l'heure du « tou risme religieux » ? Sans doute la curiosité, l'intérêt culturel, la soif du ressourcement ou du dépay sement ont-ils largement sup planté la ferveur d'antan. L'hum-ble pénitent, l'austère marcheur, les cohortes cheminant mains jointes vers Dieu ont souvent fait place à des foules simplement en quête de sens.

Tiré du livre " Le Point, Rites chrétiens"

LE PÈLERINAGE N’EST PAS OBLIGATOIRE, MAIS LES

ÉCRITURES SAINTES FONT DU VOYAGE UN MOYEN DE CHEMINER

VERS DIEU

3938

Pour comprendre le cœur de Marie, il faut retour ner dans son sein de mère où, pendant neuf mois, prit chair le fils du Très-Haut. Dans son sein virginal où résonna un échange

admirable entre une servante et son Seigneur. Un échange tissé de silence, dont seuls la mère et l'enfant connaissent la profondeur charnelle. Dont ils gardent mémoire à jamais dans le secret du cœur. Le temps de son enfantement, Marie a connu le chair-à-chair, le cœur-à-cœur, le seul-à-seul avec Jésus. A résonné en Lui tout le peuple d'Israël qui s'était mis en marche. Ont résonné en elle ces myriades de royaumes, de demeures et de mondes qui ont jailli du Père. Lui s'est revêtu de notre humanité ; elle s'est donnée à la Vie, dans l'élan du Magnificat.

Mais donner chair dans son sein ne suffit pas, surtout si son enfant est fils du Très-Haut. Il faut aussi le mettre au monde, et parfois se laisser bouleverser dans son cœur de mère pour que d'autres le mettent au monde, pour que Lui-même se mette au monde. La vie de Marie est un long chemin pour passer du « seul-à-seul » de son enfantement au « tout en tous » de l'Église. Un long chemin pour élargir son cœur, de son seul fils à l'humanité entière.Nombreux sont les événements qui ont surpris, saisi et travaillé le cœur de Marie. De l'Annonciation de l'archange Gabriel à la fugue de Jésus à Jérusalem, en passant par les bergers de Bethléem et la prophétie de Simon au Temple. Ce fils, qu'elle a abrité dans son sein, voilà que se le disputent les petits, les prophètes et les sages. En retrou vant Jésus à 12 ans, au milieu des prêtres, dans le Temple de Jérusalem,

STABAT MATER STABAT MATER

DANS LE SEIN DE LA VIERGEÀ deux reprises, l’Évangile précise que Marie méditait en son cœur les événements de la vie de son Fils (Luc, 2, 19 et 51). Avec Charlotte Jousseaume, poétesse (« Le Silence est ma joie », aux éditions Albin Michel), entrons dans cette démarche mariale.

P

MARIE-IV

Par Charlotte JousseaumePoétesse, elle a publié « Le Silence est ma joie » (Albin Michel).

ELLE RÉSONNE SANS RAISONNER, POUR LAISSER LA VÉRITÉ SE

RÉVÉLER, ET LE CHEMIN SE FAIRE

Marie n'est encore qu'un cri du cœur: «Pourquoi nous as-tu fait cela ? »

Mais face à tous ces bouleversements, Marie ne s'arrête pas en chemin. Femme de silence et d'intériorité, elle les garde en son cœur et médite. Elle qui avait porté ce fils en son sein, elle se fait de nouveau réceptacle pour porter ces événements en son cœur. Pour se laisser enseigner. Dans

sa méditation, pas de ruminations ni de vaines paroles, juste un profond silence. Comme la lune qui réfléchit la lumière du soleil,

elle réfléchit la « lumière venue en ce monde ». En fille d’Israël, elle écoute ce qu'elle garde en son cœur. Elle laisse réson ner en elle tout le mystère de ce qui la travaille. Elle résonne sans raisonner, pour laisser la vérité se révéler et le chemin se faire. Son cœur qui écoute s'accorde ainsi à son pas qui avance.

Si Marie n'avait pas gardé et médité tous ces événements en son cœur, aurait-elle su inter céder aux noces de Cana ? Aurait-elle su demeurer au pied de la Croix et recevoir Jean, et avec lui l'Église tout entière, dans son cœur de mère ? Par son intériorité, Marie nous apprend à nous confier à la parole du Christ, qui œuvre dans le temps et dans nos profon deurs. À laisser advenir par elle « le chemin, la vérité et la vie ». Jésus nous engage à entrer dans le cœur de Marie, en nous disant que « ma mère, mes frères, mes sœurs, ce sont ceux qui gardent mes paroles ». Vingt et un ans après la fugue de Jésus à Jérusalem, Marie est restée debout au pied de la Croix. Pour certains, elle fut la première à rencontrer, dans le secret de la nuit, le Ressuscité.

(Marie, mère de vie spirituelle)

4140

Lettre à Pergame (2, 12-17)Dans un univers méditerranéen baigné dans des couleurs chaudes aux reflets ensoleillés, l'ange envoie Jean en mission en le chargeant d'un message destiné à la communauté chré tienne de Pergame représentée par une église dont on voit à la fois l'architecture extérieure et la composition des nefs intérieures. Au centre, l'ange domine Jean de sa haute taille, ce qui est tout à fait normal dans la conception de l'époque car il n'appartient pas au monde des humains et en le représentant plus grand que l'homme, on souligne son origine divine. Ses ailes, démesurément longues, presque aussi étendues que l'église est haute, déployées dans le ciel, lui confèrent une allure majestueuse. Il domine toute l'enluminure. De part et d'autre de sa tête, avant de se terminer en langues de feu effilées qu'un filament blanc fait ressortir sur le fond rougeoyant, le plumage de ses ailes est disposé en volutes à l'image des coquillages. L'ange tend la main vers Jean pour désigner le livre à partir duquel il lui faudra rédiger le contenu de la lettre qui sera adressée aux habitants de Pergame. Il vient à la rencon tre de Jean comme le laisse deviner le mouve ment de son genou, l'esquisse d'un cercle blanc qui brise la rigidité des plis du vêtement et marque la mobilité. En signe d'acceptation de la charge apostolique qui lui est confiée et en marque d'humilité, Jean baisse la tête. Du coup son corps paraît déséquilibré, une épaule plus haute que l'autre, renforcée par le contraste des deux couleurs qui l'habillent, noir et coq de roche. Le dessin de sa silhouette fait penser aux personnages de Matisse avec la courbe volumi neuse de sa manche dont trois petits traits blancs rappellent la pliure du coude. Jean tient le Livre des Écritures ouvert comme l'indiquent les deux rectangles qui évoquent le plat de la reliure. À la main de l'ange qui se découpe, immaculée sur l'ocre, répond celle de Jean allongée sur la couverture du livre comme s'il prêtait serment de fidélité. Le mouvement de leurs mains exprime l'échange entre eux dans ce passage du témoin que représente le Livre.

CONTEMPLER L’APOCALYPSE CONTEMPLER L’APOCALYPSE

pocalypse

… « L’Apocalypse de saint Jean a traversé et nourri l’imaginaire de notre civilisation. Faute d’en avoir reçu les clés d’interprétation, le lecteur projette

sur ce texte ses peurs, ses terreurs, ses désirs et ses pulsions. C’est évidemment une erreur.

Au fil des mois, nous allons donc nous laisser apprivoiser par ce texte guidé pas à pas par des illustrations… Aujourd’hui, plus qu’à toute autre période,

nous sommes tentés d’oublier le passé et de ne guère donner crédit à l’avenir, perdus que nous sommes dans le tourbillonnement anonyme des individus.

« L’Apocalypse nous inscrit dans une très longue durée, ''du commencement à la fin''. Nos actes s’inscrivent dans cette durée où ils trouvent sens. »

(Cardinal Jean Marie Lustiger)

À l'intérieur d'un assemblage géométrique de murs, noirs et marrons, surmontés de pans arrondis et de tourelles terminées par un clocheton, qui rappellent l'intérieur d'une forteresse, l'église est présentée en coupe. On distingue nettement sa double nef, ce que montrent les deux arcs en fer à cheval côte à côte. Il existe encore en Castille quelques chapelles d'origine wisigothique qui témoignent de ce type d'architecture à nefs multiples. Partant d'une base carrée, les colonnes portent des chapiteaux très frustes, composés de trois éléments marrons, jaunes et noirs. Les rideaux froncés, bordés d'une frange, rappellent la présence dans les églises espagnoles du Xe siècle d'une iconostase comme dans les églises orientales. Elle fut sans doute supprimée lorsque Rome, sous l'influence de Cluny, chercha à unifier la Liturgie et mit fin aux pratiques parti culières qui existaient toujours en Espagne, survivances des premiers siècles chrétiens où chaque pays christianisé avait organisé le culte selon les habitudes locales. Cette église comporte deux étages avec une petite chapelle qui coiffe la double nef. Les coloris ne sont pas employés innocemment : la nef sombre et l'encadrement marron de l'arc qui la dominent font ressortir de manière éclatante la lumière dorée de la chapelle supérieure comme si la mort ne pouvait résister à la lumière éblouissante de la résurrection. Enfin, au sommet, un fronton n'est pas posé là pour des raisons esthétiques ou archéologiques. Mais ses trois côtés égaux sont une manière de rappeler le mystère de la Trinité, le Dieu unique en trois personnes. Le commentaire de Beatus sur l'Apocalypse a été rédigé dans un climat de luttes religieuses où l'hérésie adoptianiste qui voyait en Jésus le fils charnel de Marie et de Joseph adopté par Dieu dominait si bien qu'une fois de plus la double nature de Jésus, vrai Dieu et vrai homme, était contestée.

- III

2.1 «À l'ange de l'église d'Éphèse, écris: Ainsi parle celui qui tient les sept étoiles dans sa droite, qui marche au milieu des sept chandeliers d'or :

2.2 Je sais tes œuvres, ton labeur et ta persévérance, et que tu ne peux tolérerles méchants. Tu as mis à l'épreuve ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas, et tu les as trouvés menteurs.

2.3 Tu as de la persévérance, tu as souffert à cause de mon nom et tu n'as pas perdu courage.

2.4 Mais j'ai contre toi que ta ferveur première, tu l'as abandonnée.

2,5 Souviens-toi donc d'où tu es tombé : repens-toi et accomplis les œuvres d'autrefois. Sinon, je viens à toi, et, si tu ne te repends, j'ôterai ton chandelier de sa place.

2.6 Mais tu as ceci en ta faveur : comme moi-même, tu as en horreur les œuvres des Nicolaïtes.

2.7 Celui qui a des oreilles, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux églises. Au vainqueur, je donnerai à manger de l'arbre de vie qui est dans le paradis de Dieu.

2.8 « À l’ange de l'église qui est à Smyrne, écris : Ainsi parle le Premier et le Dernier, celui qui fut mort mais qui est revenu à la vie.

2.9 Je sais ton épreuve et ta pauvreté — mais tu es riche — et les calomnies de ceux qui se prétendent Juifs ; ils ne le sont pas : c'est « une synagogue de Satan ».

2.10 Ne crains pas ce qu'il te faudra souffrir. Voici, le diable va jeterdes vôtres en prison pour vous tenter, et vous aurez dix jours d'épreuve. Sois fidèle jusqu'à la mort et je te donnerai la cou ronne de vie.

2.11 Celui qui a des oreilles, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux églises. Le vainqueur ne souffrira nullement de la seconde mort.

2.12 « À l'ange de l'église qui est à Pergame, écris: Ainsi parle celui qui a le glaive acéré à deux tranchants :

2.13 Je sais où tu demeures : c'est là qu'est le trône de Satan. Mais tu restes attaché à mon nom et tu n'as pas renié ma foi, même aux jours d'Antipas, mon témoin fidèle, qui fut mis à mort chez vous, là où Satan demeure.

2.14 Mais j'ai quelque reproche à te faire : il en est chez toi qui s'attachent la doctrine de ce Balaam qui conseillait à Balaq de tendre un piège aux fils d'Israël pour les pousser à manger des viandes sacrifiées aux idoles et à se prostituer.

2.15 Chez toi aussi, il en est qui s'attachent de même à la doctrine des Nicolaïtes.

2.16 Repens-toi donc. Sinon je viens à toi bientôt, et je les combattrai avec le glaive de ma bouche.

2.17 Celui qui a des oreilles, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux églises. Au vainqueur, je donnerai de la manne cachée, je lui donnerai une pierre blanche et, gravé sur la pierre, un nom nouveau que personne ne connaît sinon qui le reçoit.

4342

Maria Goretti, naît à Corinaldo, dans les Marches, le 16 octobre 1890. Elle doit très tôt prendre la route de l'émigration avec sa famille, arrivant, après plusieurs étapes, à Le Ferriere di Conca, dans l'Agro Pontino. Malgré les problèmes liés à la pauvreté, la petite Marie vit dans un milieu familial uni, animé par la foi chrétienne, où les enfants se sentent accueillis comme un don et sont éduqués par leurs parents dans le respect d'eux-mêmes et des autres, ainsi qu'au sens du devoir accompli par amour de Dieu. Cela permet à la petite fille de grandir de façon sereine, en nourrissant en elle une foi simple, mais profonde. Dans ce contexte familial, Marie acquiert une solide confiance dans l'amour providentiel de Dieu, une confiance qui se manifeste en particulier au moment de la mort de son père, frappé par la malaria. « Maman, ne perds pas courage, Dieu nous aidera », dit la petite fille dans ces moments difficiles, réagissant avec force au profond vide laissé en elle par la mort de son père. Assunta, sa mère, confie la garde des petits à Maria, âgée alors de neuf ans. La petite fille d’une maturité précoce devient très vite une parfaite ménagère. Le jour de la Fête-Dieu, elle communie pour la première fois avec une ferveur angélique. Elle s’applique avec délices à la récitation quotidienne du chapelet. La pauvreté et l’éloignement du village empêchent Maria de fréquenter l’école et donc d’apprendre à lire.

ANNIVERSAIRE DES SAINTS ANNIVERSAIRE DES SAINTS

SAINTE MARIA GORETTI

Mais elle ne tient aucun compte des difficultés et des distances à parcourir lorsqu’il s’agit de recevoir Jésus dans le Saint Sacrement. « Je puis à peine attendre le moment où demain j’irai à la communion », dit-elle l’après-midi même où elle va sceller de son sang sa fidélité au Seigneur. Les Serenelli, proches voisins de la famille Goretti, sont des gens serviables et honnêtes, mais leur fils Alessandro se laisse entraîner par des camarades corrompus et des lectures pernicieuses. Comme il vient aider la famille Goretti pour des travaux agricoles trop pénibles, Maria l’accueille, reconnaissante, trop pure pour se méfier. Il ne tarde pas à lui tenir des propos abjects, en lui défendant de les répéter. Sans bien comprendre le péril qui la menace et craignant d’être en faute, Maria avoue tout à sa mère. Avertie d’un danger qu’elle ignorait, elle promet de ne jamais céder. Alessandro Serenelli devient de plus en plus pressant, mais prudente, l’adolescente évite le plus possible de se tenir en sa présence. Furieux de cette sourde résistance, le jeune homme guette le départ d’Assunta pour pouvoir réaliser son dessein.

L’occasion tant attendue se présente le matin du 6 juillet. Alessandro se précipite brutalement sur Maria, alors seule et sans défense. Brandissant sous ses yeux un poinçon dont la lame acérée mesurait 24 centimètres, il la menace : « Si tu ne cèdes pas, je vais te tuer ! » La

jeune chrétienne s’écrie : « Non ! c’est un péché, Dieu le défend ! Vous iriez en enfer ! » Déchaîné par la passion, n’obéissant plus qu’à son instinct, l’assassin se jette sur sa proie et la laboure de quatorze coups de poinçon. Lorsqu’Assunta est mise au courant du drame, Maria gît mourante à l’hôpital de Nettuno. Le prêtre, au chevet de la martyr, lui rappelle la mort de Jésus en croix, le coup de lance et la conversion du bon larron : « Et toi, Maria, pardonnes-tu ? lui demanda-t-il. — Oh, oui ! murmure sans hésitation la douce victime, pour l’amour de Jésus, qu’il vienne avec moi au Paradis. ». « Que fais-tu Alessandro ? Tu vas en enfer ! » sont les dernières paroles que la sainte prononce au milieu d’atroces douleurs, et comme elle se détourne dans un ultime effort, son cœur cesse de battre. Alessandro se convertira en prison. Quarante-cinq ans après la mort de Maria, il assistera à son procès de

béatification avant de finir ses jours comme jardinier dans un monastère franciscain. Le 24 juin 1950, le pape Pie XII canonisait Maria Goretti, martyre à douze ans pour avoir défendu sa pureté jusqu’à la mort. Dans son allocution, le Saint-Père déclarait : « Elle est le fruit mûr d’une famille où l’on a prié tous les jours, où les enfants furent élevés dans la crainte du Seigneur, l’obéissance aux parents, la sincérité et la pudeur, où ils furent habitués à se contenter de peu, toujours disposés à aider aux travaux des champs et à la maison, où les conditions naturelles de vie et l’atmosphère religieuse qui les entouraient les aidaient puissamment à s’unir à Dieu et à croître en vertu. Elle n’était ni ignorante, ni insensible, ni froide, mais elle avait la force d’âme des vierges et des martyrs, cette force d’âme qui est à la fois la protection et le fruit de la virginité. »

Message du pape Jean-Paul II à l'évêque d'Albano àl'occasion du centenaire de la mort de sainte Maria Goretti

« Quel exemple lumineux pour la jeunesse! La mentalité privée d'engagements, qui envahit une grande partie de la société et de la culture de notre temps, a parfois du mal à comprendre la beauté et la valeur de la chasteté[…] Face à une culture qui accorde trop d'importance à l'aspect physique de la relation entre homme et femme, l'Église continue à défendre et à promouvoir la valeur de la sexualité comme un élément qui touche chaque aspect de la personne et qui doit donc être vécu selon une attitude intérieure de liberté et de respect réciproque, à la lumière du dessein originel de Dieu. Dans cette perspective, la personne se découvre être à la fois la destinataire d'un don et appelée à devenir, à son tour, un don pour l'autre. » « […] Il est indéniable que l'unité et la stabilité de la famille humaine doivent aujourd'hui faire face à de nombreuses menaces. Mais, heureusement, à côté de celles-ci, on constate une conscience renouvelée des droits des enfants à être élevés dans l'amour, protégés de tous les types de dangers et formés de façon à pouvoir, à

leur tour, affronter la vie avec force et confiance. Dans le témoignage héroïque de la sainte de Le Ferriere, le pardon offert à l'assassin et le désir de pouvoir le retrouver, un jour, au paradis est également digne d'une attention particulière. Il s'agit d'un message spirituel et social d'une importance extraordinaire pour notre temps. […] Le pardon, dans la pensée de l'Église, ne signifie pas relativisme moral ou permissivité. Au contraire, il exige la pleine reconnaissance de la faute et la prise en charge de ses propres responsabilités, comme condition pour retrouver la paix véritable et reprendre avec confiance son chemin sur la route de la perfection évangélique. Puisse l'humanité avancer de façon décidée sur la voie de la miséricorde et du pardon! Ceux qui connaissaient la petite Maria dirent le jour de ses funérailles: "Une sainte est morte!". Son culte s'est diffusé sur tous les continents, suscitant partout l'admiration et la soif de Dieu. En Maria Goretti resplendit le caractère radical des choix évangéliques, qui ne connaît pas d'obstacles, mais au contraire est soutenu par les sacrifices inévitables requis par l'appartenance fidèle au Christ. Je montre l'exemple de cette sainte en particulier aux jeunes, qui sont l'espérance de l'Église et de l'humanité. Je désire leur rappeler ceci : "Au plus fort de la nuit, on peut se sentir apeuré et peu sûr, et l'on attend alors avec impatience l'arrivée de la lumière de l'aurore. Chers jeunes, il vous appartient d'être les sentinelles du matin (cf. Is 21, 11-12) qui annoncent l'arrivée du soleil qui est le Christ ressuscité!" Marcher sur les traces du divin Maître comporte toujours une prise de position décidée en Sa faveur. Il faut s'engager à le suivre partout où il va. Toutefois, les jeunes savent qu'ils ne sont pas seuls sur ce chemin. Sainte Maria Goretti et les nombreux adolescents qui, au cours des siècles, ont payé par le martyre l'adhésion à l'Évangile se trouvent à leurs côtés pour communiquer à leurs âmes la force de rester fermes dans la foi. C'est ainsi qu'ils pourront être les sentinelles d'un matin radieux, illuminé par l'espérance. Que la Très Sainte Vierge, Reine des Martyrs, intercède pour eux! »

Du Vatican, le 6 juillet 2002

4544 ENTREPRENDRE «UNE DIVINE EXIGENCE» II ENTREPRENDRE « UNE DIVINE EXIGENCE» II

ENTREPRENDRE... «UNE DIVINE EXIGENCE»- II

Christophe Rimbault, curé de la paroisse St-Marc à Joué-lès-Tours, professeur de théologie à l'Institut catholique de Paris.

Saint Paul met l'Église en chantier

Au service de l’Évangile, saint Paul s’engage, voyage, fonde de nombreuses communautés, s’entoure de collaborateurs…Un modèle d’entrepreneur?

À bien y regarder, la figure de l'apôtre des Nations n'est pas sans évo quer celle d'un entrepreneur, tant du point de vue de l'homme que de sa mission. Cela dit, est-il unentrepreneur comme les autres ?

Au service de l'Évangile La mission de Paul est entièrement consa crée à l'annonce de l'Évangile, la Bonne nouvelle de Jésus-Christ : « Malheur à moi si je n'annonce pas l'Évangile ! » Toute sa mission vise à annoncer le Christ crucifié et ressuscité aux Nations. Cette annonce se fait à temps et à contretemps. Ainsi, il vient encourager et soutenir ce que vivent les hommes. Mais en même temps, il vient renverser les valeurs et dénoncer ce qui entrave la libertéet la vie. À l'encontre d'une survalorisation de la sagesse et de la connaissance humaine dans la culture grecque, ou d'une course à l'honneur effrénée dans l'Empire romain, Paul annonce le royaume d'amour-agapè révélé dans le mystèrepascal.

Un tempérament de leader Annoncer l'Évangile comporte des risques. Il assume ces défis avec courage et déter mination en payant de sa personne. Les épreuves sont nombreuses et doivent être surmontées dans l'adversité et sans compter (2 Corinthiens 11). Paul compare sa mission à un combat, comme pour tout croyant d'ailleurs. Il doit faire preuve d'équilibre entre action (voyages, prédication, activité épistolaire) et prise de recul (médi tation, prière). Il fait œuvre de discernement pour agir avec clairvoyance. Et, s'il s'engage personnellement, avec la solitude propre à toutentrepreneur, il agit toujours en équipe, en Église, pourrait- on dire. Il s'entoure de collaborateurs (Barnabé, Timothée, Tite...), tout en adaptant son « équipe » : il change parfois de collaborateurs. Et il compose avec les autres apôtres :Pierre, Jacques...

Totalement dévoué et efficace Paul, l'entrepreneur, est motivé par un vrai sens des autres. Il cherche à connaître, à aimer et à servir ceux auxquels il est envoyé. Il fait siens leurs soucis. Il discerne leur situation dans ses prières avant même de leur écrire ou de les visiter. Ainsi, par exemple, il repère les besoins des

Corinthiens confrontés aux divisions internes, mais aussi à la pensée grecque qui les éloigne du vrai message de l'Évangile. Il peut alors leur indiquer un chemin de vie etd'unité à reconstruire. L'efficacité de son action se mesure aux nombreuses communautés qu'il a fondées, à l'unité réalisée entre judéo-chrétiens et pagano-chrétiens après l'accord arraché à Jérusalem avec les autres apôtres, ou encore à la collectefinancière de solidarité organisée entre les communautés.

Un entrepreneur à part entière Tout d'abord, toute sa mission répond à un appel, à une vocation reçue sur le

chemin de Damas. Comme Jérémie ou Isaïe, il a été choisi par Dieu pour être son porte-parole. C'est le sens du mot «apôtre » il est appelé et envoyé aux Nations. Il est l'agent,l'instrument du Christ, et agit guidé par l'Esprit. Ensuite, non seulement il annonce le Christ, mais il conforme toute sa vie au Christ, son modèle. Toute sa mission l'amène à s'effa cer devant le Christ pour le donner à voir : « Ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit enmoi ». Son ministère est un vrai culte rendu à Dieu. Enfin, sa mission a pour effet d'instaurer un nouveau type de relations entre l'apôtre et ceux qui bénéficient de son entreprise. Il développe avec chacun une relation non pas de supériorité, mais une relation filiale, une relation non pas de paternalisme, mais une relation à la fois de paternité et de maternité. Comme il le dit lui-même, il vise à ce que ses destinataires, qu'il appelle « mes bien-aimés », soient conformés au Christ. « Mes petits-enfants, que dans la douleur, j'enfante à nouveau, jusqu'à ce que Christ soitformé en vous » (Galates 4,19).

Mais entièrement à part… Au total, on peut dire que saint Paul présente toutes les caractéristiques d'un entrepreneur. Le service des autres, la détermination, la mise en œuvre de moyens et la prise de risque pour remplir la mission font de Paul un véritable entrepreneur de l'Évangile. Mais il est un entrepreneur entièrement à part. Paul agit au nom du Christ et n'a d'autre ambition que celle de Le servir et de servir les autres. Son entreprise est de faire advenir le royaume de l'agapè du Christ, de l'agapè de la Croix, qui instaure un nouveau type de relations entreles hommes. Un modèle pour tout entrepreneur ?

Paul agit au nom du Christ et n'a d'autre ambition que celle de Le servir

et de servir les autres

4746 SE LIBÉRER DE L’ARGENT – II SE LIBÉRER DE L’ARGENT – II

Clé nº 1Acceptez de vous laisser bousculer

« S’assurer le lendemain, penser à l'avenir, mettre de côté, travailler pour ses vieux jours: ces immuables et sûrs préceptes des familles, cette solide morale des écoles, ne sont-ils pas à bon droit l'idéal le plus constant de tout être normalement bâti, désireux de remplir dignement sa place en ce monde? [...] Or Dieu défend qu'on amasse. [...] Malédiction sur celui qui veut plus qu'il ne lui faut, qui rassemble autour de lui pour les jours à venir le bien qui était aujourd'hui la part de ses frères!»

Clé nº 2Relisez les Ecritures

« Dans l'Ancien comme dans le Nouveau Testament, nous verrons que rien n'irrite Dieu à l'égal de cette préoccupation d'amasser, de cette peur d'‘‘être à court’’, nous verrons que non seulement Il ne commande point, mais qu'Il désapprouve, mais qu'expressément Il interdit le souci du lendemain, l'économie, la réserve sous quelque forme matérielle ou spirituelle que ce soit, dès qu'ils ne sont que l'hypocrite prétexte de la méfiance et de l'avarice du cœur. Plus encore: qu'Il les punit. »

SE LIBÉRER DE L’ARGENT-II

Isabelle Rivière, sœur de l'écrivain Alain-Fournier et épouse de Jacques Rivière, a publié en 1933 « Sur le devoir d'imprévoyance ». Dans ce livre prophétique et assurément évangélique, elle rappelle que « Dieu défend qu'on amasse ». Pour le moins dérangeant...

8 CLÉS POUR OBEIR AU DEVOIR D’IMPRÉVOYANCE….

Clé nº 3Économisez en vérité

« Économiser ne veut pas dire : mettre de côté - c'est par abus, par mauvaise habitude, par déviation, que l'on applique le mot à ce qui est la déformation, la caricature de la chose. Économiser, cela veut dire utiliser au mieux, faire rendre aux ressources dont on dispose le maximum, avec le minimum de perte. C'est donc éviter le non-emploi au même titre que le gaspillage, qui est le mauvais emploi. La véritable économie, c'est d'employer ce que l'on a. »

Clé nº 4Ayez confiance en Dieu

« Jette ta pensée dans le Seigneur et Lui-même te nourrira » (Psaume 54, 23). [...] Rien jamais ne manque à celui qui a Dieu pour intendant. Dieu est la seule banque qui soit à l'abri du krach, le seul coffre-fort que les voleurs ne percent ni ne dérobent. Qui s'abandonne à Lui ne peut périr, même dans la catastrophe. « Dieu ne fait plus de miracles », écrivait Jacques Rivière [l'époux d'Isabelle, NDLR], parce qu'il n'y a plus de gens qui l'aiment assez pour en attendre. Ayez seulement cette confiance en Lui, d'en attendre : et le miracle se produira... »

Clé nº 5Dépensez vite votre argent !

« C’est l'obsession, la hantise de notre lendemain qui paralyse notre aujourd'hui [...]. Il faut, selon le mot de saint Vincent de Paul, ‘‘côtoyer la Providence'', lui montrant ainsi que l'on se sait mené par elle en bon chemin. [...] Se soucier de l'argent, lui accorder une importance quelconque en tant qu'argent, il ne suffit pas de dire que cela ne sert à rien, cela sert à mal. Au lieu que l'oublier, c'est lui ouvrir la porte. L'argent est comme les femmes coquettes, il ne recherche que ceux qui ne se soucient pas de lui. Si vous voulez être sûrs de n'en jamais manquer, dépensez celui que vous avez. »

Clé nº 6Osez le don

« Il y a un principe qu'il faut retenir parce qu'il a fait ses preuves; c'est ce qu'on pourrait appeler "le principe de l'appel d'air": Quand vous n'avez presque plus d'argent, qu'il va vous manquer pour demain, donnez ce qui vous reste. Je vous affirme, je vous promets, je vous garantis que vous aurez demain l'argent qu'il vous faut! Il n'en coûte pas beaucoup d'essayer au moins une fois; cela ne peut pas conduire à la ruine d'un seul coup! [...] Notre réserve, notre boire pour la soif, c'est elle qui empêche Dieu de nous venir en aide.»

Clé nº 7Servez-vous de l'argent sans y être asservi

« Servons-nous donc de l'argent, puisqu'il est là pour nous servir, mais ne lui soyons point asservis. Et qu'il soit le dernier dans notre maison [...]. Car cette faim d'argent [...], cette passion aveugle et sourde qui fait de tant d'hommes une chose méchante, têtue, acharnée, toute furieuse et bornée entre les brancards de l'avidité et de l'ambition, regardons-y bien: c'est d'elle que naissent les trois quarts des maux de cette terre [...]. L'amour qu'on a pour l'argent, la vénération qu'on lui porte, la préoccupation de n'en point manquer, tue l'humain en la créature, ôte l'homme à lui-même, et lui cache jusqu'à Dieu. »

Clé nº 8Laissez Dieu gérer vos biens

« Bienheureux les pauvres en esprit », a dit Jésus (Matthieu 5, 3). C'est-à-dire bienheureux ceux-là - qu'ils possèdent ou non de l'argent - qui ne sont point possédés par lui. [...] Plutôt que de nous user à discuter avec Dieu de l'emploi de ces biens périssables, pourquoi ne pas Lui en remettre dès aujourd'hui la libre disposition? [...] Ses impéris-sables greniers sont le seul lieu où nos sacs de mérites et nos sacs de vertus (Péguy) et les âmes immor telles de nos bien-aimés soient à l'abri des entreprises dangereuses de notre ignorance, de notre égoïsme, de notre perversité, de notre avarice, le seul lieu où tout ce que nous possédons de valable et de cher soit à jamais préservé du mal et de l'anéantissement. C'est toujours le même calcul: donnons-Lui tout, pour qu'Il nous garde et nous rende tout.»

(Famille chrétienne suppl. 1933)

Isabelle Rivière(1889-1971).

4948 DOSSIER MARIAGE -I DOSSIER MARIAGE -I

LA TRAVERSÉE DE L’IMPOSSIBLE -I

On ne s’étonne pas assez devant le lien conjugal. Qu’aujourd’hui encore, au sein d’une culture qui porte tellement à la pluralité, à la précarité et à la rupture, tant d’hommes et de femmes acceptent de s’engager à partager une vie entière, dans un lien voulu comme définitif, oui, cela a vraiment quelque chose d’étonnant. Un être a-t-il la capacité de vivre une vie entière avec un autre être? Un homme et une femme peuvent-ils ainsi lier leur existence l’une à l’autre sur une longue durée?Découvrir de plus en plus que l’autre est autre, et en même temps, avancer sur le chemin de l’unité, quel paradoxe!

Un des intérêts de la remise en cause actuelle du mariage et de l’engagement sur une longue durée est de nous inviter à prendre conscience que le pari de vivre ensemble « jusqu’à ce que la mort nous sépare » est un pari singulièrement audacieux, qui a un côté déraisonnable, un côté de folie.Sociologiquement, notre culture ne porte guère à la durée, à l’engagement sur le long terme. Elle est plutôt une culture de la rupture, de la précarité et de la multiplicité. Un paradoxe existe entre les valeurs liées à la modernité, telles la liberté, l’épanouissement de l’ego, la primauté du désir, et celles liées à la durée qui ne peut pas ne pas comporter une part de renoncement, effort, patience, souffrance même.

Premier défi : Comment concilier les images contemporaines du bonheur avec les exigences de la longue durée.Second défi : Comment constituer une unité - harmonie, entente, communion, connaissance- entre deux êtres séparés, différents? Différents par leur sexe, leur histoire, leur complexion psychique? À mesure que le temps avance, ces mêmes différences qui, dans un premier temps, semblaient au service de la complémentarité, apparaîtront dans un temps ultérieur comme des obstacles.Le défi devient alors : comment concilier les apports des sciences humaines qui mettent en lumière les déterminismes, les limites, le comment et le pourquoi des mécanismes de l’échec d’une part ; et, d’autre part, la fidélité à l’éthique chrétienne traditionnelle en affirmant que l’engagement définitif est sensé et qu’il est même une chance pour les personnes et pour leur famille?

« Sommes-nous capables de nous lier pour la vie ?» Il y aurait deux manières de ne pas se poser la question :-La première serait de croire que la rencontre ou l’alliance va de soi, qu’elle est facile, naturelle. C’est le point de vue que je qualifierai de « romantique », qui croit en la toute-puissance du sentiment.-La seconde manière de ne pas se poser la question est tout simplement d’avoir renoncé à construire une relation pour toute la vie. Je qualifierai ce point de vue de désabusé ou résigné.

La démarche que je propose plutôt consiste à regarder en face la difficulté de la rencontre, allant même jusqu’à la désigner comme impossible, tout en continuant à parier sur elle, à l’affirmer comme désirable, comme un bien fondamental, et même comme nécessaire.

Nécessaire, l’alliance conjugale l’est au moins pour trois raisons :Première raison : elle correspond à une aspiration très profonde de l’homme et de la femme : il y a en nous un attrait irrésistible, lié à la vie même de notre intériorité, vers la proximité, l’unité, le don et l’accueil mutuel, c'est-à-dire vers une victoire sur la division et l’extériorité.

Une deuxième raison est que la fécondité est un horizon majeur de cette union. Pour les enfants qui en naîtront, c’est un bienfait sans équivalent que de pouvoir compter sur la solidité du lien qui unit leur père et leur mère. Dans le cadre des débats qui, dans plusieurs pays, ont lieu autour de la

famille, il faudra bien un jour affirmer que la meilleure fondation pour celle-ci n’est ni la seule harmonie du couple, ni la seule reconnaissance du lien de filiation, mais l’établissement d’un pacte conjugal clair entre les parents.

Troisième raison : pour les époux aussi, il est une source de sécurité intérieure, de certitude, d’assurance, que de se savoir aimé inconditionnellement, c'est-à-dire tout entier, par un autre. Quelle joie de ne pas avoir tous les jours l’impression de passer un examen, d’être accepté tel que l’on est, et pas seulement pour ses qualités. Quelle joie aussi de faire ce même cadeau à l’autre!

Nous voici donc face à « l’impossible nécessaire ». Faut-il, en ce domaine, croire aux miracles? C’est une bonne question, à laquelle il ne faut pas répondre trop rapidement.

(À suivre)(Xavier Lacroix, édition Vie Chrétienne)

LA DÉMARCHE QUE JE PROPOSE CONSISTE À REGARDER EN FACE

LA DIFFICULTÉ DE LA RENCONTRE, ALLANT MÊME JUSQU’À LA

DÉSIGNER COMME IMPOSSIBLE, TOUT EN CONTINUANT À PARIER SUR ELLE, À L’AFFIRMER COMME

DÉSIRABLE, COMME UN BIEN FONDAMENTAL, ET MÊME COMME

NÉCESSAIRE

5150 LA VIE INTÉRIEURE DE NOS ENFANTS – I LA VIE INTÉRIEURE DE NOS ENFANTS – I

LA VIE INTERIEURE DE NOS ENFANTS

Le cœur du tout-petit dès le sein de sa mère s’éveille à l’intimité. Dès ce moment, il perçoit tout, de l’intérieur. Demeure au cœur de son être ce lien

unique qu’il a avec son Créateur. Cela s’accélère après sa naissance, et l’enfant s’ouvre au monde qui l’entoure tout en se découvrant lui-même.

...Mais l’enfant a besoin de ses parents pour stimuler cet éveil qui se poursuit. Il fait confiance naturellement, se laisse guider et répondra avec élan aux sollicitations de l’Esprit si toutefois nous ne l’en empêchons pas. Le rôle des parents ou des éducateurs, devient alors celui de permettre que cet éveil se réalise, de nourrir cette vie intérieure qui ne cesse de s’approfondir. Et cela par la prière, par la lecture de la Parole de Dieu vivante et efficace, par les sacrements et tout particulièrement par l’eucharistie.

...À l’heure où de plus en plus elle est fragilisée, il semble nécessaire de retrouver le sens de l’importance de la famille fondée sur le mariage d’un homme et d’une femme. Ce sens, c’est en tout premier lieu les parents qui le transmettent, par leur exemple et par l’éducation dès le plus jeune âge de l’enfant. Par le baptême, l’enfant est incorporé à l’Église dont il devient un membre. Il reçoit en même temps le patrimoine commun de la foi.

L’éducation ne consiste pas alors seulement en la transmission du dépôt de la foi, mais encore à susciter et à permettre l’éveil de l’enfant à la vie intérieure. En se développant, celle-ci suscite une attention au vrai, au bien et au beau. Cette vie intérieure, nourrie et entretenue, convoque les vertus qui permettent d’agir en vue du bien et en vue, finalement, de ce bien qui est au-dessus de tout bien et qui est Dieu lui-même.

...Avec l’éveil à la vie intérieure se creuse la conscience du péché qui vient obscurcir le cœur. Mais plus fondamentalement encore, c’est l’action de Dieu en lui que l’enfant découvre. Cette double prise de conscience doit être éduquée puis accompagnée par les parents et les éducateurs.

...Les parents sont souvent démunis devant l’ampleur de leur mission. Mais cette charge éducative, si elle est difficile, est également une source de joie et d’espérance pour les enfants, les jeunes et le monde.

A LA VIE INTERIEURE

5352

PAS FACILE AVEC LES ADOS SECRETS

Nos ados grandissent, ils ne nous parlent quasiment plus... Ce qu'ils vivent, ce qu'ils

espèrent nous échappe en grande partie, surtout à moi qui suis en déplacement professionnel régulièrement. Les années d’enfance où les échanges sont faciles et nom breux passent trop vite! »

Henri

COMMENT RÉPONDRE AUX QUESTIONS COMPLIQUÉES

Mon fils de 8 ans passe son temps à me poser des ques-tions existentielles : "Pourquoi on meurt, maman?", "Dieu peut-Il vrai ment tout faire?", "À quoi ça sert de prier si Dieu sait tout?", etc. Au début, ça me

décontenançait parce que je n'avais pas toujours la réponse et que je ne me suis jamais posé ce genre de questions... Alors j'ai décidé de créer un petit rituel: chaque matin, il me pose une question et je lui réponds le soir dans son lit. Comme ça, j'ai le temps de réfléchir ou de trouver la bonne réponse dans un livre ou sur Internet. Récemment, j'ai fait une trouvaille: le livre de Juliette Levivier, Dieu a-t-il créé les poux? et autres vraies questions d’enfants sur Dieu, l'Église et la foi (éd. aime). J'ai compris que c'est une chance de répondre à ses interrogations pour ouvrir le cœur de mon enfant à la vie de Dieu en lui. »

Pauline(Tiré de Famille Chrétienne, Hors Série, pages 6 à 12)

LA VIE INTÉRIEURE DE NOS ENFANTS – I LA VIE INTÉRIEURE DE NOS ENFANTS – I

D'ABORD ENTRETENIR NOTRE VIE SPIRITUELLE

Parents, nous avons la res ponsabilité d'éveiller nos enfants à une vie intérieure, d'abord par la prière en famille bien sûr, mais aussi par le développement de leur prière personnelle. Au long de la semaine,

quand des occasions se présentent, je les invite à prier: "pour untel qui a des problèmes de santé" ou encore certains soirs, quand c'est trop la course, nous ne prions pas en famille. Je leur rappelle : "n'oublie pas ta prière avant de t'endormir". »

Isabelle

SOIRÉES SANS ÉCRANS J'ai fait le compte, nous avons plus de dix écrans à la maison, avec trois enfants. Certains soirs, une à deux fois par mois, nous faisons "jeûne d'écrans", et ce, du plus petit au plus grand, y

compris pour les parents, ce qui n'est pas le plus simple. Et nous les rem plaçons par la découverte de musique en famille, un dîner crêpes, une soirée jeu... Histoire d'être disponibles les uns aux autres et de découvrir la joie de ces moments tout simples. »

Yves et Anne

ET VOUS COMMENT FAITES-VOUS AVEC VOS ENFANTS?

LA TÉLÉVISION REND LES ENFANTS ÉLECTRIQUES

Mon mari et moi venons de prendre une décision, mettre la télévision dans un placard fermé pour qu'elle ne soit plus immédiatement acces sible à longueur de semaine, sinon, comme notre logement est petit, nous avions un peu trop

tendance à l'allumer pour qu'elle canalise les enfants. Et c'est vrai qu'avec les chaînes thématiques on trouve toujours un programme qui leur est adapté. Si, sur le moment, ils sont plus calmes, une fois le poste éteint, je les trouve à fleur de peau et ils se chamaillent de plus belle. Mesure complémentaire, j'insiste main tenant pour qu'ils aillent régulièrement dehors s'oxygéner et se défouler. Les dîners sont plus sereins depuis que nous avons pris cette décision.»

Clotilde et Jean

AU MILIEU DE LA NATURE, NOUS RECENTRER SUR L'ESSENTIEL

Lors des camps scouts, nous proposons chaque jour

"un quart d'heure Lumière" aux jeunes. Nous faisons silence, puis chacun s'isole et s'assoit dans l'herbe

quinze minutes. C'est un moment privilégié d'intimité pour le jeune pendant lequel il peut réfléchir ou prier. Le camp au milieu de la nature, loin des sollicitations quotidiennes, aide à nous recentrer sur l'essentiel dans nos vies.»

Marie, cheftaine scoute

Ordinateurs, tablettes, télévision, activités non scolaires…Nos enfants sont sollicités de toutes parts. Il n’est pas facile de résister à la course à la consommation, de s’arracher aux écrans, de prendre le temps de s’arrêter. Si nous n’y prenons garde, la société contemporaine nous disperse plus qu’elle ne nous ressource. Et vous, comment faites-vous avec vos enfants? Dans ce contexte, comment les aider à

développer leur vie intérieure?

Quelques expériences de parents peuvent nous éclairer…

« «

«

«

«

«

5554 SAINT LÉON LE GRAND... ...LES PERES DE L'ÉGLISES

SAINT LÉON LE GRAND, PÈRE ET DOCTEUR DE L’ÉGLISE (PAPE DE 440 À 461)

Déposons le vieil homme, avec ses œuvres, et, devenus participants de la génération du Christ, renonçons aux œuvres de la chair. Reconnais, ô chrétien, ta dignité ! Associé à la nature divine, ne retourne pas à ton ancienne bassesse par une manière de vivre dégénérée. Souviens-toi de quel Chef et de quel Corps tu es membre ! (sermon de Noël)

Cet extrait contient en peu de mots l’essentiel du message du pape S. Léon, dont l’Eglise célèbre la fête le 10 novembre. Il est connu pour ses nombreux sermons prononcés pour les fêtes du Seigneur, dont 5 pour Noël, où il met en valeur le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu, mystère central dans sa pensée, sa louange et son ministère pastoral. Pour sa fête, l’Eglise prie ainsi :

Dieu qui ne laisses pas les puissances du mal prévaloir contre ton Eglise fondée sur le roc inébranlable des Apôtres, fais qu’à la prière du pape saint Léon, elle reste ferme dans ta vérité, et, sous ta garde, soit pour toujours en paix.

Cette prière met en valeur le ministère pastoral du successeur de Pierre, son souci constant de préserver la foi transmise par l’Eglise depuis les origines, et son engagement pour que les fidèles vivent dans la sécurité, la paix. En effet, au milieu du Vème siècle, « les puissances du mal » menaçaient l’Eglise, au niveau de la foi et de l’unité, et ébranlaient la paix et la sécurité de l’empire. Léon se sent concerné par tout cela dès avant son élévation sur le trône de saint Pierre en 440.

S. Léon un berger selon le cœur de Jésus, présent sur tous les fronts

On ne dispose d’aucun élément concernant la date et le lieu de naissance de Léon. Il est très probablement romain et, vu l’élégance et la concision de sa langue latine, on peut dire qu’il appartient à une famille aristocratique, soucieuse de faire acquérir à un enfant intelligent au caractère bien trempé un bagage culturel digne d’un futur chef à la hauteur des défis de l’époque.

Quand il est appelé à succéder à Sixte II, le 29 septembre 440, Léon est en Gaule, où il s’est rendu pour réconcilier deux généraux dont les désaccords affaiblissaient l’empire romain d’Occident face aux envahisseurs barbares. Menés par Alaric ils

avaient déjà envahi l’Italie et pris Rome en 410, prêts à profiter de la faiblesse de cette partie de l’empire où certains s’étaient déjà installés. Durant son pontificat, en 452, Léon se porte à Mantoue, au nord de l’Italie, au-devant des barbares renommés les plus cruels, les Huns. Son courage, sa dignité et sa diplomatie convainquent Attila, le Fléau de Dieu, de se retirer sans causer de dégâts. En 455, un autre barbare, chrétien arien, Genséric, avec ses hordes, se présente aux portes de Rome ; Léon intervient mais trouve un barbare inflexible et assoiffé de richesses. Le pape obtient à grand peine que les envahisseurs s’abstiennent des incendies, des meurtres et des supplices inutiles.

Les dangers qui menacent alors la chrétienté concernent aussi la foi et l’unité de l’Eglise. Avant son pontificat, Léon est au service des papes Xyste et Célestin dans leur lutte, en Occident, contre le pélagianisme, une hérésie qui niait la nécessité de la grâce et fut réfutée par saint Augustin, et, en Orient, contre le nestorianisme, qui met en cause l’unité de la personne du Christ. Vers 430, Léon demande à un de ses amis, Cassien savant moine installé à Marseille et excellent connaisseur de l’Orient, d’écrire une réfutation du nestorianisme. Cet ami estime déjà que Léon, encore diacre, est « l’honneur de l’Eglise romaine et du ministère divin », ce qu’il réalisera comme successeur de Pierre.

Léon, le pape du IVème concile œcuménique, Chalcédoine, 451

La crise déclenchée par Nestorius, alors patriarche de Constantinople, est partiellement résolue au concile d’Ephèse, en 431, sous la direction du patriarche d’Alexandrie, S. Cyrille. On affirmait l’unité de la Personne du Christ, Dieu et homme. Mais Cyrille adopta une formule ambiguë qu’il croyait être de S. Athanase : « une seule nature du Verbe incarné ». Le terme nature, physis en grec, pouvait recevoir plusieurs acceptions, soit essence, substance, ce qui répond à la question : « qu’est-ce que c’est ? Quoi ? » ; soit à la question : « qui est-ce ? Qui ? » une personne, un tel. L’ambiguïté de la formule cyrillienne entraîna

Eutychès, un moine obtus mais influent à la cour, à affirmer que le Christ est vraiment Dieu, mais que sa nature humaine n’est pas parfaite, il ne serait pas vraiment homme comme nous. Il n’a qu’ « une seule nature, physis » parfaite, la divine, d’où le nom donné à sa théorie : le monophysisme.

La question est fort débattue en Orient, entre les évêques et théologiens d’Alexandrie et ceux d’Antioche ; les fidèles de Constantinople sont divisés. Le pape Léon, au courant, envoie des lettres au patriarche de Constantinople, Flavien, et aux membres de la cour. Pour régler la question, l’empereur convoque un concile à Ephèse, en 449, où le successeur de Cyrille, Dioscore, veut imposer de force la formule cyrillienne comme la comprend Eutychès. Les légats du pape doivent s’échapper pour ne pas être roués de coups ; le patriarche de Constantinople meurt suite aux mauvais traitements. Le pape Léon, outré du comportement de Dioscore et de ses partisans, dénonce la réunion d’ Ephèse ; c’est « un brigandage » et bien sûr il n’en reconnaît aucune décision.

Peu après, l’empereur meurt et son successeur, Marcien, soucieux de maintenir la communion avec Rome, convoque un concile, selon les vœux du pape, à Chalcédoine, tout près de Constantinople, en 451. Les Pères du concile, sous la direction des légats romains, élaborent un texte doctrinal où sont reprises des affirmations d’Alexandrie, d’Antioche, de Constantinople et surtout de Léon, dans sa lettre à Flavien. En voici le passage plus important :

A la suite des saints Pères, nous enseignons tous à l’unanimité un seul et même Fils, Notre Seigneur Jésus-Christ, complet quant à sa divinité, complet aussi quant à son humanité, vrai Dieu et en même temps vrai homme, composé d’une âme raisonnable et d’un corps, consubstantiel au Père par sa divinité, consubstantiel à nous par son humanité, né pour nous dans les derniers temps de Marie, la Vierge et la Mère de Dieu ; nous confessons un seul et même Jésus-Christ, Fils unique, que nous reconnaissons être en deux natures, sans qu’il y ait ni confusion, ni transformation, ni division, ni séparation entre elles, car la différences des deux natures n’est nullement supprimées par leur union, tout au contraire, les attributs de chaque nature sont sauvegardés et subsistent en une seule personne. (Décret dogmatique de Chalcédoine)

Tous les termes sont bien pesés pour affirmer que Jésus-Christ est une seule et même personne, à la fois Fils de Dieu et notre frère en humanité, un frère à part entière et à jamais solidaire de toute l’humanité. Malheureusement, les disciples de Dioscore d’Alexandrie ne souscrivent pas à cette affirmation essentielle pour notre vie chrétienne et notre salut. Ils font schisme et constitue une Église à part, qui existe encore en Égypte et en Ethiopie.

De plus, l’immense majorité des évêques sont des orientaux et veulent exalter le siège épiscopal de Constantinople, « la Nouvelle Rome », au détriment des sièges d’origine apostolique, Alexandrie, Antioche et Rome, liant cette promotion à la situation politique de Constantinople, résidence de l’empereur d’Orient. Le pape Léon, successeur de Pierre, refuse le canon 28 qui introduit cette nouveauté qui lie Eglise et empire, les réalités ecclésiales à des situations temporelles et étrangères à la foi, qui risque d’être dangereuse pour l’Eglise ! Il savait bien ce que produisait l’ingérence des autorités impériales dans les affaires de l’Eglise ! De Constantin à Théodose, (de 330 à 380) l’Église

de la partie orientale de l’empire dut adopter les hérésies des empereurs successifs au détriment de l’orthodoxie nicéenne et de l’unité de l’Eglise.

Léon, le pasteur témoin du Mystère de l’Incarnation et de la miséricorde de Dieu

S. Léon est essentiellement un pasteur, conscient de ses responsabilités comme évêque et successeur de Pierre. Il ne laisse pas de traités, seulement des Lettres et des Sermons. Le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu est le pivot de sa pensée et de son enseignement ; il ne l’aborde que rempli d’admiration, d’action de grâce. L’Incarnation est l’expression de la miséricorde de Dieu pour l’humanité, créée à son Image et à sa ressemblance, qui a perdu le sens de sa dignité, ayant terni et enfoui cette image, dans l’ignorance et le mal. Son salut ne peut être réalisé que par un Sauveur, pleinement Dieu et en même temps pleinement homme.

En vertu de la grande miséricorde du Dieu d’Amour, le Fils unique assume la condition humaine, dans tous ses conditionnements biologiques, psychologiques, culturels et autres, depuis la conception jusqu’à la mort. Il connaît ainsi tout de notre vie, excepté le péché. Il assume cette condition d’esclave en toute liberté et fidélité à la volonté du Père, qu’il fait triompher contre toutes les tentatives du démon menteur. Vrai Dieu et vrai Homme, il réalise pleinement l’Image et la ressemblance dans sa divinité et son humanité !

En s’incarnant, le Fils unique de Dieu devient solidaire de toute l’humanité et personne n’est exclus de cette solidarité ; il est devenu l’Aîné d’une multitude de frères, si bien que toute personne humaine est concernée, appelée à l’adoption filiale dans le Christ, qui s’est fait homme pour que l’homme, tout être humain, devienne fils de Dieu. Selon une image biblique chère à S. Léon, le Christ est la tête du corps dont nous sommes les membres. Ainsi, tout ce qui concerne la tête concerne le corps, surtout les moments clés de l’histoire de Jésus, sa naissance, les tentations au désert, sa mission, sa Transfiguration, sa Passion, sa Résurrection et son Ascension. En toutes choses il fait triompher la volonté d’amour du Père et il donne à ses frères en humanité l’exemple d’une vie filiale et fraternelle authentique et l’espérance de le rejoindre dans la plénitude du Mystère de la Gloire de Dieu.

En s’incarnant, le Fils de Dieu, par son union à tous ses frères, leur communique aussi la force de l’imiter, de vaincre le tentateur et les forces du mal, de grandir à l’image et à la ressemblance du Père des miséricordes, spécialement par les sacrements de la foi, la vie en Eglise, image de la communion d’amour du Père, du Fils et de l’Esprit, par l’aumône, le support mutuel et le pardon.

Pour que tous les hommes puissent réaliser le plan d’amour de Dieu, le Fils de Dieu fait homme a fondé son Eglise, sous la responsabilité première de Pierre et de ses successeurs, avec ses ministres-serviteurs et ses sacrements, spécialement le baptême et l’eucharistie. Ils sont la source d’une communion vivante et intime avec la Tête et avec le Corps, qui dans l’unité de la foi et de l’action de grâce ne doit pas cesser d’évangéliser les profondeurs du cœur humain et des relations entre les hommes et de s’étendre à toute l’humanité.

P. Jean Louis Lingot

5756

Beaucoup plaident pour que les chrétiens d'Orient restent sur place. Dans la situation présente, qu'en pensez-vous ?J'étais parmi ceux qui plai daient en effet pour que les chrétiens restent dans leur pays. C'était aussi ce que leur disait l'Église locale. Mais personne, et encore moins la hiérarchie ecclésiale de ces pays, n'a pu protéger ces chrétiens. Et ceux-ci le reprochent aujourd'hui vivement à leurs évêques. Il faut les comprendre. Pendant des décennies, on leur a dit qu'ils étaient un pont entre l'Orient et l'Occident et qu'à ce titre, ils devaient rester sur place. Or personne n'a été capable de les protéger, et maintenant ils le vivent comme une trahison. C'est le rôle de l'Église de protéger cet héritage magni fique qui remonte à deux mille ans. En tant que prêtre, je me sens responsable de la sauvegarde de la particularité de ce peuple. Mais ce n'est pas en les lais sant sur place qu'on y arrivera.

Que conseillez-vous ?La plaine de Ninive est convoitée aujourd'hui par les Kurdes car c'est un territoire pétrolifère non encore exploi té, et par le pouvoir central de Bagdad. Les sunnites ravagent tout le pays. Les chrétiens sont donc pris en étau, sans échappatoire. Ils n'ont rien, sinon leur foi qui leur dit de ne pas jeter la pierre à ceux qui les persécutent. Comment prôner un tel discours dans de telles circonstances ? Cela ne tient pas. Je plaide donc pour une émigration collective organisée par l'Église et l'Onu. Il faudrait que ces chrétiens puissent être regroupés dans un lieu paisible, sûr, et qu'ils gardent ainsi leurs particularités orientales, leur liturgie, leur langue. Mais comment organiser une telle émigration pour 120 000 personnes ? Les évêques sur place ne sont pas en mesure de traiter la question sérieusement. Ils endorment les consciences. Rester ne sert à rien.

L’exil est donc irrémédiable ?Lors des deux récents synodes des évêques irakiens, à Erbil puis à Rome, ceux-ci ont affirmé que l'Église institu tionnelle ne pouvait rien faire contre l'émigration individuelle. Cette affirmation est très attristante, car émigrer individuellement, c'est déchirer une famille entre la Suède, l'Australie, la France, le Canada. Or, ce peuple veut que l'Église tienne un discours cohérent avec son message chrétien. Et la cohé rence voudrait que les familles émigrent ensemble. N'y aurait-il pas au Canada, aux USA, des lieux à investir? Après tout, cela ne représente que 110 000 habitants de la plaine de Ninive!Pour moi, il n'y aurait qu'ainsi que l'on pourrait sauvegarder la foi et l'unité de ces chrétiens, la langue du Christ avec laquelle nous célébrons nos liturgies. Comment préserver cette richesse si nous sommes dispersés en diverses communautés de par le monde, dont la plupart se retrouveront sans prêtre oriental pour célébrer? C'est très cruel.

L'avenir des relations entre chrétiens et musulmans peut-il être compromis dans cette situation ?Oui et non. Les musulmans sont de bonne volonté. Beaucoup té-moignent de la sympathie envers les chrétiens et je garde des amitiés magni fiques avec des musulmans modérés, qui ne se reconnaissent absolument pas dans Daech.Mais que se passera-t-il sur place quand les chrétiens voudront revenir ? Je suis convaincu qu'il y a aura un retour. Mais ce sera diffi cile. Comment vivre à nouveau ensemble ?

Comment gagner les musulmans modérés à la cause humanitaire des chrétiens d’Orient ?Ils savent que cet islam prôné par Daech n'a rien à voir avec la vraie nature de l'islam. Ils doivent forger un islam qui se conforme à la modernité et je suis certain que cela sera possible. Beaucoup de musulmans comprennent la souffrance des chré-tiens et des yazidis.

Y aurait-il une nouvelle lecture du Coran à entreprendre?Dans le Coran, on trouve toutes les contradictions. Le lire, le comprendre reste un exercice difficile. J'ai des amis musulmans modérés qui ne lisent pas le Coran sous sa forme fanatique, qui en font une lecture différente, ou alors qui ne le lisent que très peu. J'ai l'impression que ceux qui lisent le Coran se radicalisent vite...

La situation des chrétiens d'Orient peut-elle avoir un impact sur le dialogue œcuménique?Tout le Moyen-Orient est une mosaïque d'ethnies. Les chrétiens sont divisés entre arméniens, chaldéens, sy riaques et il est parfois regrettable de constater qu'il n'y a pas toujours de cause commune. Dans cette catastrophe, ce sont les Églises syriaque catholique et orthodoxe qui sont les plus mena cées de disparition. Les chaldéens sont moins concernés, car ils sont plus nom breux et vivent à Bagdad qui n'a pas été touchée, contrairement à la plaine de Ninive. J'espère qu'il y aura une unité de l'Église irakienne, afin qu'elle puisse s'affirmer devant de telles catastrophes, qu'elle puisse parler d'une seule voix, indiquer une seule direction, sans compromis.

Comment envisagez-vous l'avenir ?Il se présente mal. Bien sûr, je voudrais être optimiste mais je suis aussi pragmatique et réaliste. Les chré tiens de Syrie étaient peu nombreux et sont complètement oubliés. Je crains que les chrétiens d'Irak ne subissent le même sort et sortent des consciences internationales. Plus le temps passe sans aucune solution, plus on en arrive à oublier les personnes qui traversent cette épreuve.

Vous semblez dire que c'est une cause perdue ?Je le crains et j'en suis triste. Il y aura toujours des chrétiens qui reste ront en Irak.

La libération rapide de leurs territoires, à laquelle tous aspirent, ne se fera pas dans l'immédiat. Ils veulent rentrer chez eux mais s'épuisent en ce moment, financièrement et psycholo giquement. À Erbil, ils vivent difficile ment et la colère remonte. Ils gardent la volonté de tout reconstruire, pensent beaucoup à leur retour mais sont pleins d'amertume.

Les cahiers croire

LES CHRÉTIENS D'ORIENT LES CHRÉTIENS D'ORIENT

IRAK:LES CHRETIENS S’ÉPUISENT

Chassés de leurs foyers par l’avancée de l’État islamique, de nombreux chrétiens d’Irak ont été accueillis en France ou ailleurs. Mais ceux qui sont restés sont très menacés…

P. Anis Maezina Hanna,Dominicain, irakien

5958 LES CHRÉTIENS D'ORIENT LES CHRÉTIENS D'ORIENT

FEMMES DE L’ANCIEN TESTAMENT

Images, figures, prophéties...Le parcours proposé ici voudrait rendre compte de la lecture des textes bibliques appliqués à Marie et à son rôle dans la foi de l'Église et dans sa prière. C'est en effet non seulement dans le lectionnaire des fêtes de la Vierge, mais aussi dans les chants et les prières de la liturgie, que le texte biblique trouve sa résonance mariale. La tradition patristique et médiévale n'a pas manqué d'exploiter un grand nombre de textes en les appliquant à la Vierge Marie. Il semble bien que le travail de révision de la liturgie catholique ait un peu canalisé la lecture des textes bibliques, non pas en cherchant tel ou tel verset déterminé, mais bien plutôt en essayant de cerner un thème ou une figure qui s'étende sur de nombreux textes tant dans la littérature prophétique que sapientielle.

Avec les pères de l'ÉgliseLes théologiens se sont attardés en premier lieu sur les prophéties. Mais ces textes ne sont plus considérés comme une annonce anticipée de l'avenir, mais comme le déchif frement d'une espérance dont les évangiles découvrent l'accomplissement. C'est donc avec les évangélistes et la catéchèse patristique que nous pouvons découvrir une esquisse de la Vierge Marie en trois textes : Genèse 3, 15 : « Je mettrai l'hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance. Celle-ci te meurtrira à la tête, et toi tu la meurtriras au talon » : le protévangile de la victoire de la descendance de la femme sur celle du serpent.

En Isaïe 7, 14 : «Voici que la jeune femme est enceinte et enfante un fils, et elle lui don nera le nom d'Emmanuel » : la naissance de l'enfant royal, l'Emmanuel, de la Vierge, mère du Messie (Matthieu 1, 22-23). Et, en Michée 5, 1-2: « Et toi Bethléem Ephrata, trop petite pour compter parmi les clans de Juda, de toi sortira pour moi celui qui doit gouverner Israël. Ses origines remontent à l'antiquité, aux jours d'autre fois. C'est pourquoi Dieu les abandonnera jusqu'aux temps où enfantera celle qui doit enfanter... »: la naissance de celui qui doit gouverner Israël par celle qui doit enfanter (Matthieu 2, 6).

Avec les femmes de la BibleLa figure de la femme tient une place importante et même irremplaçable dans la structure de la foi et de la piété de l’Ancien Testament. Cette figure a été bien étudiée dans les dernières, que ce soit la figure d’Ève, celle des matriarches, des messagères de Dieu, des femmes sages ou de Dame Sagesse, ou de celles qui ont eu une mission libératrice en Israël. Joseph Ratzinger a retenu dans cette dernière catégorie les figures d'Esther et de Judith : « L'une est veuve, l'autre est dame de harem à la cour du roi de Perse. La femme qui apporte le salut, incarnation de l'espoir d'Israël, chemine au côté des mères bénies et de celles qui sont privées de la bénédiction, la femme sté rile, la femme impuissante devient porteuse de salut parce que là se trouve le lieu de la révélation de la puissance de Dieu. Après toutes les chutes du péché, la femme reste mère de la vie (Genèse 3) ». Il convient de souligner que ces figures féminines de l'Ancien Testament ne sont pas toutes, tant s'en faut, des personnages historiques. Elles peuvent être des person nages de roman, comme précisément les héroïnes des livres de Judith ou d'Esther, ou des personnifications métaphoriques comme celles de la Sagesse divine en Proverbes 8 ou Siracide 24, ou l'épouse royale du Cantique des Cantiques et l'épithalame du Psaume 45 (44). Ou même la personnification de la fille de Sion, de Jérusalem.Dans l'église de la Dormition à Jérusalem

Le lieu biblique de la théologie marialeAu centre de la crypte de l’église, le gisant de la dor mition de la Vierge. Il fait face sur la coupole au Christ en médaillon qui semble l'appeler avec la citation du Cantique 2,13 : «Lève-toi, ma mie, ma belle, et viens ». Ce médaillon est entouré de six portraits de femmes:— Eve, et le serpent de la tentation (Genèse 3,1-13) ;— Myriam, la sœur de Moïse, conduisant la danse avec son tambourin (Exode 15,20 21), après le passage de la mer Rouge par les Israélites ;— Yaël, juge d'Israël (Juges 5,21-22), avec son maillet enfoncé dans la tempe de Siséra ;— Judith, la jeune et riche veuve, astucieuse, _ vertueuse et séduisante, tenant en main la tête du général Holopherne (Judith 13,1-10), officier de Nabuchodonosor, assurant ainsi la victoire de Béthulie et de Jérusalem ;— Ruth, la Moabite, glanant dans les champs de Booz, et devant l'ancêtre du Messie (Ruth 4,13-22 ; Matthieu 1,5).— Esther, héroïne israélite, épouse d'Assué rus (Xerxès) et reine de Perse qui, par sa foi et son courage, sauve ses compatriotes de l'extermination décidée par Haman.Les six figures de cette coupole semblent un bon échantillon de cette théologie de la femme dans l'Ancien Testament, de ce que Joseph Ratzinger a caractérisé comme le lieu biblique de la théologie mariale.Enfin, dans la littérature prophétique, c'est le peuple d'Israël ou Jérusalem sa capitale qui est personnifié symboliquement sous une figure féminine, symbole de la Sion messia nique, spécialement dans les chapitres 55 à 66 du livre d'Isaïe. Cette femme est à la fois épouse, mère et vierge. La liturgie puise abondamment dans cet ensemble pour célébrer la Vierge Marie.

La femme de l’Apocalypse« Un signe grandiose apparut au ciel : une Femme ! Le soleil l'enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête ; elle est enceinte et crie dans les douleurs et le travail de l'enfantement. Puis un second signe apparut au ciel : un énorme Dragon rouge feu, à sept têtes et dix cornes. En arrêt devant la Femme en travail, le Dragon s'apprête à dévorer son enfant aussi tôt né. Or la Femme mit au monde un enfant mâle, celui qui doit mener toutes les nations avec un sceptre de fer ; et son enfant fut enlevé jusqu'auprès de Dieu et de son trône, tandis que la Femme s'enfuyait au désert, où Dieu lui a ménagé un refuge (...) Alors, il y eut une bataille dans le ciel : Michel et ses Anges combattirent le Dragon. Et le Dragon riposta, avec ses Anges, mais ils eurent le dessous et furent chassés du ciel. (...) Se voyant rejeté sur la terre, le Dragon se lança à la poursuite de la Femme (...). Le Serpent vomit alors de sa gueule comme un fleuve d'eau derrière la Femme pour l'entraîner dans ses flots. Mais la terre vint au secours de la Femme : ouvrant la bouche, elle engloutit le fleuve vomi par la gueule du Dragon. Alors, furieux contre la Femme, le Dragon s'en alla guerroyer contre le reste de ses enfants, ceux qui gardent les commandements de Dieu et possèdent le témoignage de Jésus » (Ap 12,1-12 ). Ce texte utilise le langage

codé typique de ce genre littéraire abondant à l'époque troublée où il fut écrit. C'est un texte à clés. Faut-il voir dans cette Femme l'image de Marie, comme nous y invite la

tradition catholique et surtout les papes ? Ou alors l'Église, selon une lecture courante dans le protestantisme et présente aussi dans le catholicisme ? Sans doute les deux, Il s’agit d’une allégorie qui vises au-delà des vicissitudes du présent, à alimenter notre foi et à nourrir notre espérance.

Jean-Pierre Rosa

D’où viennent les litanies de la Vierge ?L’origine des litanies de la Sainte Vierge Marie est inconnue. Elles sont appelées de Lorette à cause d'une légende du XIII siècle qui prétend que la maison de la Vierge au rait été transportée à Lorette, petite ville d'Italie de la province d'Ancône et devenue aujourd'hui la destination d'un pèlerinage important. Le texte de la prière a été approu vé par un décret pontifical promulgué par le pape Sixte V en 1587. Ces litanies s'organisent à partir de trois longues séries d'invocations qui tel un ostinato associent au nom de Marie des titres dont les origines sont bibliques ou qui sont issus de la tradition spirituelle. Ainsi par exemple, en mémoire de sa lignée davidique, elle est nommée : Tour de David ; parce qu'elle a porté en son sein le Christ, le don précieux de Dieu, elle est aussi appelée Arche d'Alliance. Les autres titres des lita nies permettent d'évoquer des passages de l'Évangile et de la vie du Christ. Car même si la prière concerne la Vierge Marie, elle est éminemment subordonnée à la personne de son Fils. Le parcours des invocations révèle une identité de mère : Mère du Christ, Mère de la divine grâce, Mère de l'Église... Ce titre de mère tient moins à une affirmation de « maternité imposée » qu'à l'adhésion de Marie à son appel et son projet de vie (elle était fiancée à Joseph avant que sa vie ne bascule). Dans un deuxième temps, c'est le mystère de sa virginité qui est mis en lumière : Vierge vé nérable, fidèle... S'agit-il d'un idéal de virginité pour elle-même ou l'affirmation d'une liberté de femme préservée et à respecter ? Enfin c'est le qualificatif de Reine qui est décliné : Reine des anges, des patriarches, des pro phètes, des apôtres... non une reine devant laquelle tout le monde s'anéantirait, mais une reine selon la Bible qui, comme le roi biblique, prend soin de ceux qui ne lui appartiennent pas mais qui se confient à elle. S.A.

Les Cahiers Croire/le Cahier Bible

« Après toutes les chutes du péchés, la femme reste mère de la vie » (J. Ratzinger)

Les figures de femmes tiennent une place importante dans l’Ancien Testament. Elles annoncent Marie, mère de Jésus.

Marie de Nazareth n’est évidemment pas mentionnée dans les écrits de l’Ancien Testament. Mais, fille d’Israël, sa vie et son destin sont marqués par la foi et l’histoire de son peuple. Et la liturgie chrétienne va puiser abondamment dans la tradition biblique pour célébrer la Vierge Marie, la mère de Jésus.

Daniel Doré, Eudiste, professeur d’exégèse biblique à

Issy-les-Moulineaux

60 LE « NOTRE PÈRE » - X

Pour la traduction de ce verset, les biblistes disent que nous avons le choix entre « Délivre-nous du mal » et « Délivre-nous du Mauvais», le terme grec poneiros pouvant s'interpréter soit au neutre (ce qui est mauvais, le mal), soit au masculin (le Mauvais, Satan, le Mal personnifié). Le Catéchisme de l'Église catholique opte nettement pour le masculin et la majuscule : «Dans cette demande, le Mal n'est pas une abstraction, mais il désigne une personne, Satan, le Mauvais, l'ange qui s'oppose à Dieu». Mais la prière de la messe qui prolonge le Pater et en développe la der nière demande nous indique qu'il n'est peut-être pas nécessaire de choisir : « Délivre-nous de tout mal, Seigneur! » Libère-nous de toute forme de servitude et de toute forme de mal. Rappe lons-nous les engagements du baptême : ils nous demandent de rejeter «le péché», «tout ce qui conduit au péché » et «Satan qui est l'auteur du péché ». Ici, encore, nous demandons à Dieu qu'il nous donne la force et la liberté face à l'attrait du mal et aux tentations de l'Esprit mauvais.

Choisis la vie...Le chrétien sait qu'il a été délivré de tout mal par le Christ «une fois pour toutes», et pourtant il est invité à prier en disant au Père : «Délivre-nous du mal. »Le vieux choix du Deutéronome est encore et toujours placé devant eux : «J'en prends aujourd'hui à témoin contre vous le ciel et la terre : j'ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta descendance, pour aimer l'Éternel, ton Dieu, pour obéir à sa voix et pour t'attacher à lui» (Deutéronome 30,19-20).Le choix de suivre Jésus qui est «le chemin, la vérité et la vie » (Jean 14,6) est une décision de liberté. D'abord parce que ce choix, démarche personnelle et autonome, ne peut être imposé par personne. Et aussi parce que la suite du Christ exige le détachement de tout ce qui fait obstacle au service de Dieu et des autres.

Demander au Père : «Délivre-nous du mal » sans vouloir la liberté qu'il nous donne et sans en accepter les exigences serait manquer de cohérence et faire une prière insignifiante.

Une vie chrétienne est, dans la liberté de l'Esprit, une vie risquée sur le Christ. Les personnages des deux paraboles du trésor découvert dans un champ et de la «perle d'un grand prix» (Matthieu 13,44-46) misent sur le Royaume - sur le Christ - tout ce qu'ils ont. «Demandez-vous si, le Royaume disparaissant, vous devriez changer quelque chose dans votre vie ; si vous ne voyez rien à y changer, c'est que votre vie n'est pas risquée sur le Christ et sur le Royaume».Telle est «la liberté des enfants de Dieu » : «Vous avez été appelés à la liberté, dit saint Paul. Laissez-vous conduire par l'Esprit» (Galates 5,13... 16).

« Mais délivre-nous du mal »

Le comité de rédaction, Nawal Arcache et Jean-Louis Mainguy, remercie tous les bénévoles qui contribuent à cette parution.La saisie du texte est assurée par Michella Al-Aya et Judy Abou Haidar

La mise en page et le graphisme sont assurés par Jimmy Papas et Jean-Louis Mainguy.