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Mise au point Kinésithérapie après réparation chirurgicale des fléchisseurs des doigts par la techniques de Kleinert Ann, Kinésithér .• 1982, 9, 357-361 P. CLÉM ENT 1, M. ISEL 2 La réparation des tendons fléchisseurs selon Kleinert permet la répara- tion chirurgicale des deux tendons, notamment en zone II de Verdan et Michon, c'est-à-dire la zone comprise entre la deuxième phalange et le col du métacarpien pour les quatre doigts et en zone III, zone comprise entre l'interphalangienne et le col du métacarpe pour le pouce, ce qui a une réper- cussionfonctionnelle très importante en ce qui concerne laforce de préhen- sion. La technique de Kleinert se caractérise: 1) Du point de vue chirurgical: par une suturefine avec une technique atraumatique réalisable grâce aux progrès de la microchirurgie. 2) Du point de vue rééducation: par une mobilisation précoce du ten- don (ou des tendons) sans tension sur la (ou les) suture(s) en post-opératoire précoce permise par la technique d'immobilisation particulière avec rappel élastique, Ces deux éléments associés permettent d'éviter au mieux les échecs dus aux adhérences post-opératoires, de conserver une bonne mobilité articu- laire et de garder l'intégrité corticale, le schéma moteur du doigt concerné. DESCRIPTION DU PANSEMENT POST-OPÉRATOIRE (RÉALISÉ PAR LE CHIRURGIEN) 1) Pansement légèrement compressif, recouvrant la plaie palmaire et remontant jusqu'au tiers supérieur de l'avant-bras. 2) Une attelle plâtrée postérieure recouvre le pansement et s'étend donc des IPP non comprises jusqu'au tiers supérieur de l'avant-bras. 1. Kinésithérapeute-moniteur, Hôpital Sainte-Barbe, F 57600 Forbach, 2, Kinésithérapeute-chef, Hôpital Jeanne-d'Arc, F 54200 Dommartin-lès-Toul. 357

Kinésithérapie après réparation chirurgicale des

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Page 1: Kinésithérapie après réparation chirurgicale des

Mise au point

Kinésithérapieaprès réparation chirurgicaledes fléchisseurs des doigtspar la techniques de Kleinert

Ann, Kinésithér .• 1982, 9, 357-361

P. CLÉM ENT 1, M. ISEL 2

La réparation des tendons fléchisseurs selon Kleinert permet la répara­tion chirurgicale des deux tendons, notamment en zone II de Verdan etMichon, c'est-à-dire la zone comprise entre la deuxième phalange et le coldu métacarpien pour les quatre doigts et en zone III, zone comprise entrel'interphalangienne et le col du métacarpe pour le pouce, ce qui a une réper­cussionfonctionnelle très importante en ce qui concerne laforce de préhen­sion.

La technique de Kleinert se caractérise:1) Du point de vue chirurgical: par une suturefine avec une technique

atraumatique réalisable grâce aux progrès de la microchirurgie.2) Du point de vue rééducation: par une mobilisation précoce du ten­

don (ou des tendons) sans tension sur la (ou les) suture(s) en post-opératoireprécoce permise par la technique d'immobilisation particulière avec rappelélastique,

Ces deux éléments associés permettent d'éviter au mieux les échecs dusaux adhérences post-opératoires, de conserver une bonne mobilité articu­laire et de garder l'intégrité corticale, le schéma moteur du doigt concerné.

DESCRIPTION DU PANSEMENT POST-OPÉRATOIRE

(RÉALISÉ PAR LE CHIRURGIEN)

1) Pansement légèrement compressif, recouvrant la plaie palmaire etremontant jusqu'au tiers supérieur de l'avant-bras.

2) Une attelle plâtrée postérieure recouvre le pansement et s'étenddonc des IPP non comprises jusqu'au tiers supérieur de l'avant-bras.

1. Kinésithérapeute-moniteur, Hôpital Sainte-Barbe, F 57600 Forbach,2, Kinésithérapeute-chef, Hôpital Jeanne-d'Arc, F 54200 Dommartin-lès-Toul.

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3) Le poignet est fléchi à 450 ainsi que les MP.4) Un élastique est mis en place et sa tension est réglée.

Il s'agit d'un élastique type «Jokary» qui est fixé à l'ongle: c'est lepoint d'amarrage distal.

Le point d'attache proximal sera placé le plus haut possible sur le tierssupérieur de l'avant-bras.

Pour assurer un axe de traction correct, respectant l'axe des doigts,on place une poulie de réflexion au niveau de la paume de la main sousforme d'une épingle de sûreté garnie d'une petite tubulure plastique.

Cette poulie, qui assure une meilleure constance dans la fonction derappel de l'élastique lors du retour à la flexion, est placée en direction duscaphoïde pour les quatre doigts.

Pour le pouce, elle est placée au bord cubital du poignet.Il faut noter que dans le cas du pouce la flexion du poignet est moins

importante car la position est douloureuse, mais il convient de préserverl'écartement de la première commissure en plaçant le pouce en antépulsionet abduction.

LA KINESITHÉRAPIE

Elle se caractérise par 2 phases:1) La mobilisation précoce durant le temps d'immobilisation d'une

durée de trois semaines.

2) La rééducation « classique ».

LA MOBILISATION PRÉCOCE

Elle commence le lendemain de l'intervention. Elle nécessite la partici­pation et donc l'éducation du patient. Elle est basée sur le principe de tra­vail de l'extension sub-maximale contre résistance (de l'élastique) et duretour absolument passif (assuré par l'élastique) (fig. 1).

Position du sujet: dite en «col de cygne ».

Coude fléchi à 900, avant-bras en pronation, le poignet et les métacar­pophalangiennes étant déjà en flexion dans l'attelle plâtrée.

L'efficacité de cette position a été confirmée par une étude électro­myographique menée par Paquin : il n'y a pratiquement pas de boufféesmotrices dans les fléchisseurs.

Du 1er au 4e jour

a) Importance de la surveillance quotidienne du pansement par lekinésithérapeute: les bandes Velpeau maintenant le pansement compressif

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FIG. 1. - Position du poignet et desdoigts imprimée par la pose d'unecontention de Kleinert. Ici le patientexécute une extension contre la résis­tance de la bande élastique; la tensionde cette dernièrele ramènera passive­ment en flexion.

se détendent et de ce fait le point d'accrochage de l'élastique se déplaceet celui-ci n'est plus suffisamment sous tension pour assurer le rappel laflexion de la M P à 40-50°, position indispensable pour qu'il n'y ai pas detraction sur la suture.

Le pansement ne doit pas aller au-delê des 1PP, ceci permettant aucours de la rééducation de vérifier l'efficacité du mouvement d'extension.

Il convient aussi de vérifier la qualité et la bonne tension de l'élastique,car il peut exister un risque d'inflammation de la matrice unguéale si cettetension est trop forte.

b) Sous contrôle du kinésithérapeute, le sujet doit étendre les inter­phalangiennes (la M P restant fléchis dans le plâtre) contre résistance del'élastique, en restant submaximale grâce à une tension appropriée del'élastique, afin d'éviter une tension trop forte sur la suture. Le retour estassuré par l'élastique qui rend toute tentative de flexion active inefficaceet donc, tout en protégeant la suture, assure la mobilisation du tendon parrapport aux plans voisins.

Cette course tendineuse a été étudié par Merle, elle est détaillé dansla thèse de Robin. Évaluée à 3 à 4 millimètres en moyenne. Cette coursepermet au tendon de se créer de petites adhérences périphériques néces­saires à sa cicatrisation, mais de qualité lâche et se clivant plus facilementà 3 semaines.

L'exercice sera effectué dix fois dans la séance, séance renouvelée à

chaque heure. On ne sollicite pas les autres doigts afin d'éviter le phéno­mène du quadrige. Sur le plan pratique, le sujet a tendance à réaliser uneextension des M P contre l'attelle plâtrée par le travail des extenseurs plutôtque d'assurer une extension des IPP et IPD par l'action des interosseux,ce qui explique la position fléchie de la MP qu'il faut au besoin contrôlermanuellement.

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Du 48 au 108 jour

Durant cette période on diminue les séances à 2 fois par jour, une lematin et une l'après midi. Car c'est à cette période qu'existe une baissede résistance de la suture.

Du 108 au 218 jour

Reprise des exercices comme dans la première phase de rééducation.On va ajouter, en cas de suture des deux tendons, une rééducation sélec­tive en mobilisant analytiquement, en extension P2 sur P1 et surtout, enbloquant l'IPP en flexion, P3 sur P2. On demande aussi une sollicitationactive en extension de P3. Ceci assure un glissement des tendons l'un parrapport à l'autre, sans risque de rompre les sutures.

Ce travail actif de P3 est réalisé en plaçant l'épingle servant de pouliede réflexion dans la paume au niveau du pli palmaire distal afin d'assurerun angle de traction de l'élastique de 90° par rapport à P3. Ce travail estréalisé sous contrôle du kinésithérapeute, car il est difficile à réaliser maisnécessaire à rechercher, afin de limiter au maximum le risque d'adhérenceentre les tendons. Il impose donc une très bonne éducation du patient, cequi explique les contre-indications de la technique de Kleinert:

- les enfants (aussi parce que le pronostic de la suture est plus favora-ble),

- les sujets frustres, débiles,- les sujets non motivés, indisciplinés ou au contraire trop zélés.

La rééducation après immobilisation

Elle débute donc à la fin de la troisième semaine.

Elle consistera jusqu'au 308 jour en un travail:1) Passif de prise de conscience du mouvement de flexion.2) Actif (le plus important), en analytique, de flexion et d'extension

alternée.

L'extension sera encore submaximale.

Au 30B jour, on confectionne un appareil en Verplex" type Levame,avec les M P fléchies et les 1 PP et 1 PD tendues par la lame de clinquant.

Progressivement on passe à un appareillage en extension complète dudoigt, c'est-à-dire extension des M P-I PP et 1 PD. C'est donc une recherchede l'extension complète, non traumatisante pour la suture par l'élasticitéde la lame.

Iselin a calculé une formule simplifiée qui donne la force approchéede la lame. La force de traction en kg est proportionnelle à la flexion etégale à la moitié de la distance entre la position de flexion et la position

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indifférente. Soit pour une flexion de 45° abaissant la lame de 2 cm, laforce est de 1 kg si la lame a 10 mm de large et 0,3 mm d'épaisseur etune longueur sur le doigt de 50 mm, ce qui est la longueur moyenne desdeux dernières phalanges. La formule simplifiée est F kg = 1/2 h cm.

Cet appareil sera rapidement porté seulement la nuit, mais pour unedurée d'environ 6 mois, à cause d'un flexum résiduel de 1'1 PD fréquent etaussi parce qu'il existe à long terme un risque de rétraction tendineuse.

La rééducation sera progressivement globale pour inclure le doigt lésédans les gestes fonctionnels et les activités de la vie courante, Pour celal'ergothérapie sera un appoint précieux.

La résistance du tendon et sa force pourront être considérées commenormales à partir de la 69 semaine post-opératoire.

CONCLUSION

La technique de réparation micro-chirurgicale atraumatique préconiséepar Kleinert associée à une rééducation précoce, permet une bonne récupé­ration des sutures des tendons fléchisseurs, en évitant au maximum lesadhérences post-opératoires et diminuant donc les ténolyses fréquentesdans les autres techniques (35 % d'après Michon),

On peut affirmer que la valeur des résultats est directement liées à laqualité de la mobilisation précoce.

Pour en savoir plus ...

1. ROBIN (E.-M,). - Réparation des tendons fléchisseurs selon la technique de Kleinert, Thè-se, 74, 1978, 79 p" Nancy.

2. MICHON (J.). MERLE (M.). FOUCHER (G.). - Chirurgie, 1977, 103, 956-963.3. MICHON (J.). MERLE (M,!. FOUCHER (G.). - Médecine praticienne, 1980, 43, 39.4. MICHON (J,!. MERLE {M.!. FOUCHER (G.). - Technique de Kleinert pour la réparation pri­

maire des tendons fléchisseurs dans le « No Man's Land n. Ann. Chir" 30, 1976.

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