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page 1 La force de la tsédaka ROCH HACHANA 5770 ROCH HACHANA 5770

Koupat Hair 4

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Koupat Hair 4

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ROCH HACHANA 5770

TABLE DES MATIERES Chers lecteurs,Vous ouvrez cette brochure et vous en tournez les pages. Vos yeux parcourent les lignes et votre cœur commence déjà à battre.

Vous n’avez pas commencé votre lecture, vous n’avez pas encore terminé la première histoire, mais votre cœur s’est ouvert ! Un sentiment d’exaltation enveloppe la pièce où vous vous trouvez, le bulletin que vous lisez, vous-mêmes.

Comment ? Pourquoi ?

Car lire cette brochure, c’est différent. Ceux qui aiment lire des histoires de miracles en trouveront de meilleures ailleurs. Ceux qui apprécient les histoires d’aventures ne s’approcheront pas de ce bulletin. Les adeptes de la littérature se seront déjà munis d’ouvrages célèbres.

Celui qui ouvre la brochure biannuelle de Koupat Ha’ir avec l’intention de se plonger pendant une demi-heure dans sa lecture le fait parce qu’il désire voir les bienfaits divins dans sa vie, parce qu’il veut se sentir lié et dépendant du Maître du monde qui étend Sa surveillance directe sur chacun des pas de l’homme, parce qu’il désire être enveloppé une fois de plus par le sentiment unique qu’un lien direct l’unit à son Père céleste.

Et cette brochure remplit bien son rôle.

Des personnes différentes, des histoires différentes. Le point commun : tous ont cherché une voie vers le Maître du monde, à un moment difficile et délicat, et tous l’ont trouvé grâce à Koupat H’air.

Passez de bonnes fêtes, emplies du sentiment rassurant de votre proximité avec D.

Koupat Ha’ir

p. 16

p. 19

p. 3Pour aider ses parentsRaconté par la famille K.:

Tel............................................................. +972-50-4112434

Raconté par la famille P.:

Tel.......................................................... +972-52-7615846

p. 6

Raconté par les protagonistes:

Tel............................................................. +972-73-2219754

La grand-mère de Koupat Ha’ir

Le nom est tenu confidentiel

pour des raisons évidentes

Trop beau pour être vrai !

Pour entendre l'histoire racontée par

le protagoniste : ...... +972-52-7638388

Des chances nulles…

p. 10

Raconté par la famille D.:

Tel. ....................................................... +972-52-7623558

Comme dans les contes p. 13

Une Koupa en or

3Suisse

6Israël

10

Et

ats-Unis

3

Pologne

6Israël

9r

Israël

Koupat Ha’irLa principale Caisse de Tsédaka d’Israël

0800-525-523

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Pour aider ses parents

Suisse

La forte pluie continuait à tomber sans interruption comme si elle ne s’arrêterait jamais. Dans la petite voiture, quatre personnes étaient assises, serrées, sans savoir que faire. « Nous allons passer toute la nuit comme cela ? » demanda le fils, trempé jusqu’aux os et tremblant de froid. Son père secoua la tête : « Maman a besoin de ses médicaments pour son cœur, tu le sais. A part cela, après ce voyage en avion, le passage des bagages, et tout le reste, nous avons besoin d’une bonne nuit de sommeil. Nous avons dépassé l’âge des aventures. »

Leurs yeux se portèrent à nouveau vers les fenêtres sombres, tentant de trouver un chemin à travers l’obscurité, mais en vain.

Leur avion s’était posé quelques heures plus tôt. Ils avaient l’habitude de prendre quelques jours de vacances d’hiver en Suisse. Les parents n’étaient ni jeunes ni en bonne santé, surtout la mère. Leur fils marié les emmenait chaque année pour quelques jours de vacances et de repos dans l’un des villages pittoresques de Suisse. « Ces quatre jours font pour la santé de Maman ce qu’aucun médicament et aucun médecin ne peut faire, disait le père à son fils avec reconnaissance. Je sais que ce n’est pas facile pour toi, et que ta femme doit rester seule à la maison pour s’occuper de vos enfants. Mais si tu savais combien Maman et moi attendons ces

vacances et combien de temps nous vivons sur les forces qu’elles nous donnent, tu saurais que ce voyage est la plus grande mitsva de kiboud av vaem que tu puisses faire. »

Leur fils poursuivait donc cette tradition : il les emmenait chaque année à un appartement de vacances qu’il avait retenu, et organisait des randonnées convenant à leur âge et à leurs forces. En fait, il ne s’agissait que de quatre jours mais ceux-ci leur redonnaient des forces.

Et cette année… cette année, les choses ne s’étaient pas bien passées.

C’était peut-être une erreur d’avoir atterri de nuit. Ils avaient prévu leur voyage ainsi afin de pouvoir dormir en Suisse et gagner la journée du lendemain. La pluie battante qui les avait accueillis à leur arrivée leur avait rendu l’organisation difficile. La voiture de location qu’ils avaient réservée les attendait. Ils roulèrent prudemment vers l’hôtel où, comme ils s’étaient entendus d’avance, la clé de l’appartement qu’ils avaient loué les attendrait à la réception. L’hôtel était ouvert 24 heures sur 24. A priori, tout devait bien se passer.

A priori seulement. La clé les attendait comme convenu mais le concierge regarda attentivement le papier où était inscrite l’adresse qu’ils cherchaient, et haussa les épaules. « Cette maison

Raconté par la famille K.: Tel. +972-50-4112434

se trouve dans un coin retiré. Je ne sais pas. Je n’y suis jamais allé. » Il ne savait pas leur dire quelle route suivre pour arriver à leur appartement. Ils regardèrent les plans et observèrent les routes sans parvenir à trouver une indication claire ; toutes les maisons se ressemblaient.

« J’ai une idée ! s’écria le fils à l’employé de l’hôtel. Commandez-nous un taxi et nous le suivrons en voiture ! » Mais cette idée géniale n’était pas réalisable : dans ce petit village où les gens allaient dormir tôt, les chauffeurs de taxi n’ont pas répondu à leurs coups de téléphone. La seule station de taxis était fermée depuis longtemps. Ce n’était pas la saison touristique et les habitants vivaient de façon très organisée. Aucun chauffeur

de taxi n’avait de raison de travailler de nuit.

« Bon, nous allons essayer de chercher un peu » dit le fils, inquiet. La pluie et l’obscurité dehors ne lui facilitaient pas les choses.

La voiture avança dans les rues sombres alors qu’ils scrutaient les environs. Les mêmes rues revenaient sans cesse. « Nous tournons en rond » remarqua la mère. Le fils s’éloigna de ce quartier et, de temps à autre, sortit du véhicule pour regarder les noms des rues inscrits sur les maisons.

« Peut-être devrions-nous aller à un autre hôtel dont le concierge saura nous indiquer le chemin? » Ils tentèrent leur chance. Cela leur paraissait être la dernière option. Ils trouvèrent sur la

carte le deuxième hôtel et, arrivés devant, trouvèrent la porte fermée et le concierge tranquillement endormi. Leurs sonneries impatientes le réveillèrent. Il bondit et se précipita dehors, dans la pluie. Le fils lui expliqua en quelques mots leur situation délicate. Son père et sa mère, ainsi que son fils qui s’était joint à leur voyage, restèrent dans la voiture.

Ce concierge savait où se trouvait la rue tant cherchée. Il prit un bout de papier et y dessina un

Le sentier continue à travers la forêt.

Ce chemin étroit ne conduit qu'à la maison solitaire qu'on voit derrière.

Après dix minutravers une épa

min mène à

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plan. Le fils poussa un soupir de soulagement.

« Excusez-nous de vous avoir réveillé, dit-il, gêné. Vous comprenez, mes parents ne sont plus jeunes et ma mère a le cœur malade. Ses médicaments sont dans la valise et je ne peux même pas les y chercher à cause de la pluie ». Le concierge était aimable et le fils sortit de l’hôtel le cœur léger. Il n’imaginait pas à quel point le chemin qui l’attendait serait long…

A présent, la route fut courte et sans histoires. Le fils garda le plan sur le volant et il en suivit précisément les indications. Il repassa par les mêmes rues qu’avant mais cette fois-ci, il ne manqua pas le petit tournant si important. Ils trouvèrent la bonne rue et furent soulagés de voir la plaque portant son nom.

« Nous allons enfin sortir de cette voiture, dit la mère qui avait peu parlé jusque là. Je suis éreintée.

– A quel numéro devons-nous aller, Papa ? demanda le petit-fils.

– Au numéro quatre.

Il repéra facilement le numéro deux et s’apprêtait à garer sa voiture devant la maison suivante.

– Mais Papa, ici c’est six ! » s’écria le petit-fils, le plus éveillé de tous.

Le fils leva les yeux et plissa le front. C’était vrai : numéro six. Où était la maison

numéro quatre ?

Dans la rue étroite et sombre, les maisons étaient éparpillées en désordre. Il sortit à nouveau dans la pluie pour vérifier de près les numéros des maisons. Chaque villa était entourée de végétation et les aboiements des chiens s’entendaient de loin.

« J’espère que je ne vais pas ouvrir la mauvaise porte, se dit-il, de plus en plus inquiet. Mais il faut absolument que nous nous installions. Quelle aventure ! »

Il trouva le 1, le 3, le 5, le 9, le 13. Il trouva aussi le 2, 6, 10, 12, 16. Mais le 4 était introuvable. Il parcourut la rue dans les deux sens, trempé malgré le parapluie qu’il tenait en main. De temps à autre, il revenait à la voiture, mettait ses parents au courant de ses piètres trouvailles, restait quelques minutes à se réchauffer, puis ressortait.

« Il faut bien que cette maison se trouve quelque part ! se dirent-ils à plusieurs reprises. Les autres numéros existent, celui-ci doit exister aussi ! Il n’est pas possible qu’on nous ait donné la clé d’un appartement qui n’existe pas ! »

Mais la logique ne leur était d’aucune utilité. Absolument aucune.

A un certain moment, mû par le désespoir et l’impuissance, le fils se mit à pousser toutes les portes qu’il trouva, sans prêter attention à leur numéro.

« Ou quelqu’un m’ouvrira et me dira où est cette maison que nous cherchons, ou ils appelleront la police, et tant mieux ! Les policiers arriveront et nous aideront ! » Pour comble de surprise, personne ne se réveilla. Même cet espoir-là se volatilisa dans la pluie.

La mère se sentait de plus en plus mal ; le père âgé aussi commença à éprouver un certain malaise. Le fils était de plus en plus angoissé. Dans le silence profond, seul le battement de la pluie, qui n’avait pas cessé un seul instant, continuait à se faire entendre. Ils veillèrent à ne pas faire de bruit. Avant leur arrivée, on les avait prévenus que tous les habitants étaient des non-Juifs, certains même antisémites. « Ne faites pas d’histoires, leur avait dit l’agent immobilier. Il ne faut pas causer de commotion. Soyez polis et agissez avec délicatesse. Tous les villageois sont des Suisses rigoureux. Respectez-les et ne dérangez pas leur repos ».

Ces avertissements étaient superflus car ils n’étaient pas venus avec de jeunes enfants turbulents et n’étaient pas des gens impolis. Mais s’ils avaient à présent eu l’idée de frapper aux portes, ils la mirent de suite de côté : tout le monde dormait à cette heure-là depuis longtemps.

« Je vais faire une dernière tentative » dit le fils, trempé et épuisé. Combien n’avait-il pas couru aujourd’hui ? Combien ne s’était-il pas démené ?

x minutes de marche à ne épaisse forêt, le che-ène à la maison n°4.

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Ses forces et sa patience avaient elles aussi des limites ! S’ils ne trouvaient pas la maison, il ne savait pas que faire. Mais continuer à chercher comme cela dans la pluie, c’était hors de question.

« Vous savez ce que je vais faire ? Je fais un don de cent chékels à Koupat Ha’ir ! »

Il sortit une deuxième fois. Il passa d’une porte à l’autre, scrutant de près les numéros et lisant dans l’obscurité les numéros : 2, 6, 8. Le 4 est absent ! 3, 5, 7. Non, pas de numéro 4 !!!

Soudain, la lumière se fit à l’une des fenêtres et un homme en pyjama à carreaux regarda à travers la vitre.

« Que se passe-t-il ? demanda-t-il en allemand.

– Nous ne trouvons pas la maison numéro 4 de cette rue ! répondit le fils en anglais.

– Attendez un moment.

Oh ! Est-ce que cet homme va pouvoir nous aider ? S’est-il levé de son lit ? Heureusement qu’il n’a pas l’air fâché. La porte s’ouvre et l’homme apparaît pieds-nus, en pyjama.

– Quel est le problème ?

– Nous ne trouvons pas la maison 4. J’ai observé toutes les maisons de la rue et elle est introuvable ! J’ai mes parents ici dans la voiture. Ils sont âgés et malades. Il faut qu’ils prennent leurs médicaments et qu’ils dorment !

– La maison n°4 est introuvable ? Impossible ! J’habite ici depuis des années et je n’ai jamais entendu dire cela.

Il fit un signe de l’attendre et ferma la porte. Le fils attendit au dehors, étonné. Quelques minutes plus tard, la porte s’ouvrit à nouveau. L’homme était habillé, chaussé de bottes et enveloppé dans un manteau épais. Il tenait en main un parapluie et une lampe de poche.

– Allons-y ! Allons chercher la maison n°4 !

– Je suis gêné de vous déranger. Il pleut si fort ! Dites-moi seulement où elle se trouve !

– Elle peut se trouver partout ! Allons voir où elle est vraiment.

L’homme ne tint pas compte de son embarras.

Il ouvrit son parapluie et éclaira de sa lampe de poche chaque maison devant laquelle ils passaient.

– C’est bizarre, murmura-t-il. Mais si elle n’est pas sur la route principale, elle doit être sur le chemin de côté !

Il se fraya un chemin sur un sentier étroit, à peine praticable, qui zigzaguait entre les arbres. Le fils écarquilla les yeux de surprise. Il était passé ici vingt fois sans voir ce sentier qui avançait tortueusement, entouré d’une épaisse forêt.

– Où me conduisez-vous ? osa-t-il demander après quelques minutes de marche dans les ténèbres.

– Vous cherchez le numéro 4, non ? Je vous amène là où il y a encore quelques maisons qui se rattachent à cette rue !

Ils firent le tour de la montagne sur laquelle étaient éparpillées plusieurs maisons. Entre les arbres apparurent quelques toits en pointe. Les maisons étaient enfoncées dans la forêt, invisibles entre les arbres. De loin, il était impossible de les distinguer. Mais de près… de près, elles étaient bien là ! L’homme leva sa lampe de poche : la maison n°4 était la première !

– Voilà ! Nous l’avons trouvée ! dit-il, soulagé. Voilà le n°4, c’est cela qui est important. »

Il fit demi-tour, le fils fatigué le suivant à grand peine. Dix minutes de marche dans le noir, dix minutes pour revenir, et la voiture réapparut, ainsi que les visages inquiets de ses passagers. Son accompagnateur rentra chez lui sans même attendre les remerciements qu’il tenta de lui adresser.

« Vous avez trouvé, Papa ? demanda son fils en sortant la tête par la fenêtre du véhicule.

– Oui, nous avons trouvé ! Nous l’avons trouvée, vous ne croirez jamais où. J’aurais pu chercher cette maison pendant un an sans la trouver. Sans ce non-Juif qui est sorti de son lit pour nous et m’a accompagné dans la pluie, nous ne l’aurions pas trouvée jusqu’au matin.

Ce n’est pas pour nous qu’il est sorti, dit son père. Ce n’est ni pour toi ni pour moi… Il t’a accompagné pour Koupat Ha’ir ! »

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Israël

Israël

Une Koupa en orRaconté par la famille P.: Tel. +972-52-7615846

« Et n’oublie pas d’apporter le verre en or ! »

Moché n’allait sûrement pas oublier. Son épouse Minda le lui rappelle malgré tout car ce verre est une partie si importante de la soirée qu’il est im-possible de sortir de chez eux sans le mentionner. Deux jours plus tôt, elle l’avait astiqué avec amour, l’avait fait briller jusqu’à ce qu’il étincelle. Elle avait lu avec plaisir chacun des noms gravés sur le verre précieux : le nom de ses parents et de ceux de son mari en bas, près du pied, à l’intérieur des racines, le nom de son mari et le sien à l’intérieur du tronc et ensuite, des branches s’étendant de toutes parts: ses chers enfants et leur époux, leurs enfants et leurs époux, et même leurs petits-enfants gravés dans de petites feuilles. Un rare travail d’artiste. Une coupe qui valait très cher.

(Un gobelet en or ! Minda soupire avec satisfaction. Certes, si on avait fait ce travail sur un verre en ar-gent, qui coûte beaucoup moins cher, elle aurait aussi remercié ses enfants du fond du cœur en pen-sant qu’il ne pourrait y avoir de meilleur cadeau que celui-ci. Mais ses enfants, que D. les protège, cherch-ent toujours à lui faire plaisir au-delà des conven-tions. « Nous avons acheté un verre en argent pour vos noces d’argent. Pour vos noces d’or, il faut une coupe en or ! » leur expliquèrent-ils lors de la soirée émouvante de leurs noces d’or, dont l’apogée fut ce cadeau spectaculaire. Une coupe en or, ce n’est pas quelque chose qu’on voit tous les jours, sûrement pas de cette taille, et sûrement pas gravée de cette façon élaborée !)

La vieille dame conserve précieusement ce verre sans se lasser de le regarder et de repasser ses doi-gts tremblants sur les noms qui y sont gravés. Sans cesse, elle remercie intérieurement le Créateur de l’avoir fait sortir du Bloc 4, et son mari de la forêt, pour les amener en Israël et les aider à fonder une si belle famille.

La nuit du Séder, cette coupe en or sert de verre d’Eliahou. Plus élancée que tous les verres d’argent qu’ils avaient reçus et achetés au fil des années, plus belle et plus brillante qu’eux, elle se tient fièrement dressée au milieu de la table. Tous les petits-en-fants qui viennent participer au Séder lui lancent des regards étonnés. A chaque mariage de l’un de leurs petits-enfants, ils l’apportent avec eux, envel-oppée dans un linge propre, et on fait les kiddouchin sur cette coupe de vin. Autrement, ils la gardent ca-chée au fond d’une armoire protégée contre le feu, dissimulée parmi divers objets, afin qu’aucun œil malveillant ne la trouve.

Avant les mariages, Minda la sort de l’armoire et l’astique, puis rappelle à Moché de l’emporter. Quelques bonnes années ont passé depuis leurs noces d’or, et à chaque mariage, on bénit le jeune couple sur cette coupe. Elle les a même ac-compagnés à un mariage à l’étranger, et en est revenu heureusement sans dom-mage.

Elle est devenue pour eux plus qu’un symbole, plus que l’expression de l’amour et du souci de leurs enfants. Elle représente davan-tage que de la succes-sion des générations qui ne se sont pas éteintes avec la mort de toute leur famille pendant l’Holocauste. Cette coupe fait partie du décor, de l’essence de leur fa-mille.

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Lorsque se termine la ‘houpa en plein air de leur petit-fils à la salle Wagshal de Bnei Brak, et que le jeune couple se retire dans la salle du yi’houd, Mo-ché se met à chercher le verre. Tous les membres de la famille sont choqués de voir que la coupe a disparu, comme si la terre l’avait engloutie.

« Comment disparu ? demande Minda, étourdie, avant de chercher une chaise pour s’asseoir. Je ne comprends pas. Elle était à la ‘houpa ou non ?

– Elle y était, Mamie.

– On a fait les kiddouchin dessus ou pas ?

– On les a faits.

– Et celui qui a fait les kiddouchin était un homme ou le prophète

Eliahou en personne ?

– C’était le Roch Yéchiva

du marié !

– Alors où a-t-il posé la coupe en-suite ?

– On a fait boire la

mariée, puis les parents, et après… après cela, on ne sait pas qui !

– Alors allez demander ! Ce n’est pas une épingle. On peut facilement voir où elle est ! On a terminé la ‘houpa à l’instant, à l’instant même ! Allez demand-er qui a bu dans la coupe et qui l’a posé quelque part ensuite ! Vite, avant qu’elle ne se perde vraiment ! »

Ils demandent, ils posent la question à tout le monde. Au lieu de s’installer à table, tous les mem-bres de la famille sont affairés à chercher le verre en or. Les parents de la mariée entendent parler des recherches et tentent de recevoir aimablement les invités qui continuent à arriver. Seuls le grand-père et la grand-mère refusent de se consoler.

Ils suivent attentivement les recherches, les ef-forts, les questions posées, puis voient ceux qui font ces tentatives baisser les bras les uns après les autres. La coupe a disparu...

Les mariés sortent déjà du ‘héder yi’houd, entourés par les rondes de danseurs, et l’orchestre joue avec entrain. L’inquiétude ne disparaît pas mais, au con-traire, elle s’intensifie au fur et à mesure de la soi-rée. Minda refuse de participer aux danses et dis-simule à peine ses larmes. Moché danse, contraint et forcé, tout en inspectant la salle des yeux. Leur coupe en or !

Des conversations fiévreuses entre ses fils et ses gendres conduisent le fils aîné à lui

murmurer : « Nous avons discu-té entre nous. N’aie pas de peine,

Papa. Nous vous achèterons une nouvelle coupe, exactement la même. Vous ne sentirez pas la différence ! » Mais Moché secoue la tête.

« Sur ce verre, nous avons fait les kid-douchin de vingt-et-un de nos petits-

enfants. Et nous avons célébré sept Pessah. Et de toute façon, ce n’est jamais la même chose. Si elle est

perdue, ce qu’elle représente est perdu aussi…

– Pourquoi dis-tu cela, Papa ? D. merci, la fa-mille est bien vivante, les enfants aussi. Rien n’est perdu. Quant à la coupe, nous en achèter-

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ons une nouvelle ! Ne sois pas si triste. »

Mais Moché est triste, très triste même. Il leur con-seille de demander à Minda son avis et n’est pas étonné d’entendre qu’elle a réagi exactement com-me lui, presque dans les mêmes mots. Cinquante-sept ans de vie commune font que les gens sentent et pensent la même chose.

Le mariage est sur le point de se terminer. Les in-vités quittent peu à peu la salle, l’orchestre range ses instruments. Minda s’assied de côté, coupée du monde. Moché est lui aussi assis sur une chaise, sans forces, et serre distraitement la main de ses petits-enfants qui lui disent au revoir.

« Il faut absolument faire quelque chose, mur-murent leurs filles. Regardez Maman ! On ne peut pas les laisser rentrer chez eux comme cela !

– Dites-nous que faire ! On dirait que Papa a vieilli de vingt ans. Nous n’aurions pas dû acheter un cadeau pareil auxquels ils se sont tant attachés.

– Que dites-vous ? intervient la plus âgée des belles-filles. A mon avis, il faut leur dire que nous appel-lerons demain la police. En attendant, nous com-manderons chez un orfèvre un verre identique. Qu’il travaille toute la nuit ! Nous le paierons bien, comme la dernière fois ! Et lorsqu’il aura terminé, nous dirons que nous avons retrouvé la coupe.

– Tu rêves ! D’abord, Maman connaît par cœur chaque trait et chaque lettre de cette coupe. C’est un travail artisanal, et elle se rendra tout de suite compte du subterfuge. A part cela, l’artisan avait mis trois semaines à la graver. Comment pourrait-il la terminer en un jour ou deux ? »

Minda reste indifférente, sans voir les concerta-tions ni entendre les conversations. Moché pense à elle et son cœur se brise. C’est vrai, il faut remer-cier D. que ce n’est qu’une perte matérielle et qu’il n’est rien arrivé de grave à personne, mais quelque chose dans l’harmonie est absent.

Accompagnés de quelques petits-fils dynamiques, les fils fouillent chaque endroit dans les différentes salles et dans la cour, sans négliger le moindre cen-timètre. Peut-être trouvera-t-on la coupe en or ? Peut-être…

Lorsque toutes les possibilités sont épuisées, quelqu’un se rappelle soudain de Koupat Ha’ir.

« Eh ! Où avions-nous la tête jusqu’à présent ? Kou-pat Ha’ir est là aussi pour ce genre de situations ! Si nous retrouvons la coupe en or ce soir même, je donne la somme de… »

Il donne la somme que donne un fils inquiet du chagrin de ses parents et qui veut faire tout son possible pour les consoler…

Après sa déclaration, les membres de la famille at-tendent… Les derniers invités ont quitté les lieux et la famille s’est rassemblée. Moché et Minda sont assis côte à côte, attendant le taxi qui doit les ramener chez eux.

« Pourquoi tout le monde se tait ? dit le fils qui a fait le don. Qu’est-ce qu’il se passe ? Vous oubliez qu’il ex-iste un Créateur qui peut faire des miracles ! Vous oubliez que si la charité sauve de la mort, elle peut rapporter une coupe en or perdue ?

– Une coupe en or, vous dites ? » intervient un in-connu debout à l’entrée de la salle.

Il a entendu le discours enthousiaste du fils et son attention se porte sur les derniers mots.

– Une coupe en or ? Elle est peut-être à vous, alors ? » dit-il en leur tendant la coupe perdue.

Cela n’aurait pas pu se passer de façon aussi ex-acte. A la minute près, comme une pièce répétée à l’avance…

Cet homme est sorti de la salle de mariage voisine et a traversé sans savoir pourquoi (sans savoir pourquoi !) la troisième salle qui était vide ce soir-là. Un paquet posé à un endroit bizarre attire son attention. Il jette un coup d’œil à l’intérieur et dé-couvre un objet précieux dont il se met à chercher le propriétaire.

Peut-être l’un des employés non-juifs s’en est em-paré et l’a caché là en attendant de terminer son travail. Peut-être est-il arrivé là par d’autres moy-ens. Qui sait ? Et quelle importance, d’ailleurs ?

Seule la question d’un petit-fils à l’esprit vif les fait réfléchir…

« Dites-moi. Cette chose toute simple, vous n’auriez pas pu la faire tout de suite, dès que vous avez vu que la coupe avait disparu ? N’était-ce pas dom-mage de gâcher à Papy et Mamie le mariage ? »

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« En été ? Jamais de la vie ! Que D. en préserve ! Il ne viendrait pas à l’esprit d’emmener une famille en Amérique en été ! » La réponse sans équivoque du Gaon Rav Steinman laisse son disciple perplexe.

« En été, nous pensions partir pendant les vacances. Si nous faisons le voyage en hiver, il me faudra manquer quelques jours du Collel » répond-il faiblement.

« En été, c’est impossible. Cela n’est absolument pas envisageable » répète Rav Steinman.

Son disciple P. sort pensif de chez lui. Auparavant, il avait demandé à son Rav son opinion sur un voyage aux Etats-Unis pour faire obtenir à ses enfants la nationalité américaine, ce qui leur assure le droit à une somme importante chaque année, une aide pour le financement des études de ses filles au séminaire et quelques autres bénéfices. Le Rav lui avait recommandé de faire les démarches nécessaires. Personne ne sait si ce sont les rentrées supplémentaires, dont les avrékhim des Collelim en Israël ont tant besoin aujourd’hui, qui ont justifié la décision du Grand Maître, ou la possibilité de donner aux enfants une nationalité supplémentaire, une mesure bien utile en période de danger, D. en préserve.

Quoi qu’il en soit, M. P. prépara les documents nécessaires, envoya sa demande, et traversa la longue et épuisante procédure nécessaire pour une famille entière. L’été était le moment le plus commode pour entreprendre ce voyage. En effet, l’hiver à venir devait être bien rempli d’activités diverses : la sœur de sa femme devait se marier, son fils devait passer les examens d’entrée à la yéchiva pendant Hanoucca et, peu de temps après cela, sa fille aîné atteindrait ses dix-huit ans, ce qui lui

ferait perdre l’opportunité d’obtenir la nationalité américaine. Le séjour est prévu pour durer au moins deux semaines ; trouver deux semaines disponibles pendant cet hiver chargé lui semblait presque impossible.

« Et tu penses que si tu trouves tes deux semaines, le bureau des Etats-Unis te convoquera justement à ce moment-là ? lui demande sa femme en souriant. Parle-en un peu aux gens qui ont déjà fait ces démarches. Ils présentent une demande et, six mois plus tard, ils reçoivent une date quelconque et adaptent leurs projets en fonction de cela. Quelqu’un peut-il dire aux autorités que faire ? On vient, on fait la queue pendant quelques jours, on regrette mille fois d’être venu, et on ressort avec les papiers et l’identité américaine. C’est comme cela. Va demander à des amis et tu verras. »

Il a vu, effectivement. A priori, il est déjà trop tard. L’été est près de se terminer. Il n’a pas encore présenté de nouvelle demande et la plupart des dates de l’hiver qui suit ne lui conviennent pas. Pourquoi traverser ce parcours épuisant ?

« Attends ! ajoute Mme P. Et nous n’avons pas encore parlé du fait de faire un si long voyage en avion avec neuf jeunes enfants. Combien de biberons vont-ils renverser sur nous en chemin ? Combien de vêtements devrons-nous essuyer après qu’ils aient vomi ? Combien de jouets seront cassés et causeront des hurlements ? Arrivés sur place, il faudra descendre d’avion avec des enfants fatigués qui ne veulent qu’une chose, c’est dormir, et arriver à un hôtel inconnu avec des lits inconfortables, et nos enfants gâtés…

– Je t’en prie, arrête !

– Ensuite, il faudra subir l’enquête scrupuleuse des quête scrupuleuse des

Etats-Unis

Raconté par les protagonistes: Tel. +972-73-2219754

La grand-mère de Koupat Ha’ir

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employés qui ne veulent qu’une chose, c’est que tu te trompes et sortes du bureau humilié. Dans le meilleur des cas, ils te donneront une liste de documents manquants qui te fera envoyer tous tes beaux-frères à l’appartement que nous avons laissé en désordre, pour chercher dans toutes nos armoires… En fin de compte, ils trouveront les mauvais documents et te les enverront par fax en Amérique… »

Elle a le sens de l’humour, on ne peut pas dire le contraire, mais ce n’est pas le bon moment pour plaisanter. Toute cette affaire lui semble trop lourde, trop fatigante, trop laborieuse.

– Qui dit que nous devons faire cet effort-là, cette hichtadlout ? dit-il, cherchant l’issue la plus facile.

– Il me semble que Rav Steinman t’avait dit de le faire, non ?

– Oui, c’est vrai. Il avait certes dit de commencer la procédure mais cela semble me tout à fait hypothétique, sans aucune chance de réussite.

– Peut-être devrais-tu joindre à ta lettre de demande quelques pièces pour Koupat Ha’ir ? dit-elle en cachant un sourire.

Il est tenté de répondre : « Je ne vais pas faire de don afin que le bureau en Amérique ne me donne pas de réponse et que je sois exempt de faire ce voyage ». Mais il se retient. Il faut ce qu’il faut.

Un coup de téléphone à son frère, qui prévoit de faire exactement le même voyage, lui apprend que son frère termine en ce moment même de présenter une nouvelle demande. P. n’y a pas le choix. Il se sent pressé de tous les côtés… Il termine de mettre tous

les documents dans une enveloppe, copie scrupuleusement l’adresse et va mettre la lettre à la poste. En route, il dépose cent dollars dans une boite de tsédaka de Koupat Ha’ir. « Que ce soit pour le bien » murmure-t-il, espérant de tout son cœur qu’il en sera ainsi. Faire le voyage ou non ? Si cela est bon pour lui, il espère que les choses s’arrangeront pour le mieux.

Sur son chemin de retour, il rencontre un ami auquel il raconte sa nouvelle tentative. Celui-ci se met à rire : « Comment ? Tu envoies maintenant les documents nécessaires et tu veux pouvoir faire le voyage avant Hanoucca? Dis-moi, ta grand-mère est directrice du bureau là-bas ? Qu’est-ce que tu crois ? Que tous les employés du pays se tiendront prêts à attendre la lettre de demande de Sa Majesté? Tu penses qu’ils mettront de côté toutes les autres demandes et te ménageront les dates qui t’arrangent ? »

Il rougit un peu, avale sa salive et dit aussi calmement que possible : « J’ai fait ce que je devais faire, j’ai fait un don à Koupat Ha’ir. Ce qui arrivera, je ne le sais pas et ce n’est pas important. »

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Son ami lui tape sur l’épaule et lui propose de parier 100 $ que sa fille aînée perdra la nationalité… P. ne parie pas, ce n’est pas dans ses habitudes. Il rentre chez lui lentement et tente d’oublier toute l’affaire. Jusqu’à que passent six mois et que la lettre arrive, de toute façon il sera trop tard.

Trois semaines plus tard, il reçoit une lettre. Il déchire l’enveloppe impatiemment, juste pour voir la date impossible à laquelle il est convoqué. Un instant, quel mois sommes-nous maintenant ? Mais oui, il a bien lu ! Il est convoqué en Amérique dans deux semaines et demie !!!

Il entre chez lui en courant et consulte le calendrier. Le mariage est avant, les examens après, Hanoucca encore loin… C’est la meilleure date possible !

Un coup de fil rapide à son agence de voyage, et bientôt, ils commencent à faire leurs bagages et à emballer les biberons et les sacs de plastique au cas où…

« Pour une de mes amies, cela a pris quatre jours ! Pendant quatre jours, ils sont arrivés le matin au bureau et repartis l’après-midi, après des heures à faire la queue debout » lui raconte Mme P. dans l’avion.

Des paquets de lingettes sont enfoncés dans chacun de leurs sacs, des bombes de déodorant et des boites de Kleenex. Les enfants sont hypnotisés par l’avion, les sièges confortables, les lumières et les ceintures, et ils ne cherchent même pas dans les sacs pour voir ce qu’ils peuvent grignoter.

« Et bien, nous resterons debout pendant quatre jours. Que faire ? D. nous a conduits jusqu’ici, et Il continuera à nous conduire.

– Bon, d’accord. J’ai préparé un tas de choses pour occuper les enfants. Lorsqu’on est prévenu, tout est différent. »

L’hôtel est agréable, les coussins sont doux et les lits bien faits. Les enfants sombrent sans difficulté dans le monde des rêves. Incroyable! Mais la plus grande surprise les attend le lendemain, au bureau.

Ils arrivent à l’heure dite et sont accueillis gentiment par un employé prévenu de leur rendez-vous. Lorsqu’il leur demande d’attendre, la mère de famille commence à ouvrir ses sachets. Mais la directrice arrive moins d’une minute plus tard en s’excusant de les avoir fait attendre. Elle rassemble leurs documents, jette un coup d’œil sur les feuilles et les signe sans tarder. Ensuite, elle fait rapidement connaissance avec tous les enfants, pince la joue des petits, s’assure qu’ils étaient tous là et… leur accorde la nationalité américaine en leur offrant ses meilleurs souhaits !

« Mettez vos cartes d’identité dans votre sac à main. Ne les déposez pas dans vos bagages qui iront dans la soute. Des valises se perdent parfois, ce serait dommage. Très bien ! Soyez les bienvenus dans notre pays. J’ai été contente de vous connaître. Au revoir ! »

Et voilà, ils se retrouvent dehors, avec leurs cartes d’identité !

Quatre jours plus tard, ils sont de retour en Israël, un peu désorientés, se demandant s’ils avaient fait ce voyage ou non.

« Je ne comprends pas, lui dit son frère, découragé. J’ai envoyé les documents au même endroit, le jour même où tu les as envoyés, et je n’ai pas encore reçu de réponse ! Dis-moi, la directrice du bureau est donc bien la grand-mère de ta femme ?

Ce n’est pas la grand-mère de ma femme, répond-il en riant. C’est la grand-mère de Koupat Ha’ir ! Ecoute-moi, va mettre cent dollars dans la boite de Koupat Ha’ir et les choses commenceront peut-être à avancer…"

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Pologne

Pologne

Comme dans les contesRaconté par la famille D.: Tel. +972-52-7623558

Lizhensk

La pureté s’étend sur tout, d’un côté de l’horizon à l’autre. La neige balayée par le vent s’amoncelle à la porte des maisons et sur les branches des arbres. Pourtant, dans le cœur, un autre vent souffle: un vent d’élévation et de lien avec D., un vent de purification et de sanctification. Le petit village est empli de Juifs, des Juifs de toutes origines, vêtus de costumes de toutes sortes. Tous se dirigent vers le même endroit : la tombe de Rabbi Elimélekh de Lizhensk. L’émotion les étrangle, leurs mains tremblent et leur cœur bat très fort. Visiter la tombe de l’auteur du « Noam Elimélekh » le jour anniversaire de sa mort, le 21 Adar, est un privilège dont peu bénéficient. Le Rabbi a promis que quiconque prierait sur sa tombe ne quitterait pas le monde chargé de faute. Qui ne désire pas une promesse pareille ? Les histoires de délivrances emplissent ce lieu d’un éclat particulier, des délivrances extraordinaires qui émeuvent. Presque chaque visiteur a quelque chose à raconter – une histoire personnelle ou un récit qu’on lui a rapporté.

Mme G. a elle aussi fait le voyage en Pologne. L’inquiétude courbant ses épaules, elle a pleuré sur la tombe comme elle n’a jamais pleuré de sa vie. Elle est sortie du bâtiment différente: encouragée, renforcée, dotée d’un calme intérieur nouveau. Son cœur s’est ouvert, les choses sont sorties telles quelles, blessantes et douloureuses. Mais à présent, il semble que tout appartient au passé. Désormais,

tout ira bien, tout ira mieux. Elle a déposé sa charge sur le Maître suprême.

Elle cherche maintenant un endroit pour se reposer et manger quelque chose avant de prendre l’avion de retour à l’aéroport provisoire installé pour les besoins des pèlerins. La salle à manger prévue pour les femmes est agréable. Quelques volontaires y travaillent bénévolement et offrent généreusement des boissons chaudes et froides, des assiettes de soupe etc. Elle s’assoit à une table dans un coin de la pièce, heureuse de cette pause et de l’endroit chaud qu’on lui propose après le froid glacial qui règne dehors. Des femmes entrent et sortent, s’assoient un instant après ou avant d’avoir prié. L’émotion se lit sur les visages, la pureté dans les cœurs. Elle voit des traces de larmes dans les yeux des femmes assises autour d’elle, comme elles peuvent le voir dans ses yeux à elle. Toutes sont des sœurs.

L’heure passe. Un regard sur sa montre lui fait

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comprendre qu’elle ferait bien de se dépêcher. Elle prend ses affaires et sort après avoir remercié pour leur gentillesse les femmes qui travaillent là.

L’autobus en partance pour l’aéroport est presque plein. Elle entre par la porte arrière et se fraie un passage vers une place libre. Vingt minutes de route, puis le voyage en avion. Dans quelques heures, avec l’aide de D., elle sera de retour en Israël. L’autobus traverse les étendues enneigées alors qu’elle se plonge dans ses pensées. L’apaisement qu’elle ressent lui fait beaucoup de bien. Un sentiment nouveau d’espoir et de paix intérieure. Une larme se forme au coin de son œil. Il lui faut un mouchoir.

Elle palpe sans y penser les sacs de voyage posés sur ses genoux pour y prendre son paquet de mouchoirs. Son sac n’est pas là. Affolée, elle soulève son deuxième sac, essayant de voir si elle n’a pas fourré son sac à main dedans – mais non. Elle cherche par terre près d’elle, sur le siège voisin, dans l’allée… Son sac à main a disparu !

« Qu’est-ce qu’il se passe ? Qu’est-ce que vous avez perdu ? » Les femmes autour d’elle cherchent à l’aider. En quelques minutes, elles ont fouillé l’autobus entier, et ont fait passer l’information à l’avant du véhicule, du côté des hommes qui procèdent aux mêmes recherches. Rien. Le sac est introuvable.

« Vous aviez des objets importants dans votre sac ? lui demandent ses voisines.

– Qu’est-ce que j’avais ? Mon portefeuille empli de documents, mes papiers d’identité, 1500 $, mon passeport et mon billet d’avion. Qu’est-ce que je vais faire sans tout cela maintenant ?

– Vous vous êtes rendue ailleurs que dans le monument surplombant la tombe ?

– Oui. Je suis restée quelques minutes dans la salle à manger. Peut-être l’ai-je laissé là-bas ? »

Elle se rappelle clairement avoir rassemblé ses affaires et avoir pris son sac. Lui serait-il tombé des mains ? Qui sait ?

Des coups de téléphone urgents sont donnés. Dans le bus se trouvent quelques hommes débrouillards qui connaissent le numéro de portable du monde entier.

« Quelqu’un va demander qu’on cherche dans le bâtiment de prière des femmes, annonce un homme. Comment est votre sac ? A-t-il un détail caractéristique ?

Elle donne quelques indications qui permettront de le reconnaître.

– Dans une minute, ils me donneront une réponse de la salle à manger » poursuit-il un moment plus tard.

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L’autobus est déjà arrivé à l’aéroport mais les passagers ne sont pas pressés de descendre. Que va faire cette dame sans son billet d’avion ? Sans son passeport ? Où pourra-t-elle habiter jusqu’à ce qu’on lui prépare de nouveaux papiers ? Personne n’a le cœur de la laisser seule et désarmée.

Quelqu’un sort parler au responsable des vols. Les gens ne regardent pas leur montre pour ne pas se montrer pressés ou préoccupés, et faire monter la tension qui est déjà suffisamment haute. Même dans leurs gestes, ils sont sensibles à l’inquiétude de cette dame.

Mme G. reste assise, toute tremblante. Elle n’ose pas penser à ce qu’il va se passer dans quelques instants, quand tous les passagers monteront dans l’avion et poursuivront leur voyage. Rester en Pologne, à Lizhensk qui se sera vidée de tous les Juifs, jusqu’à ce qu’on lui fasse des documents provisoires ? Ce n’est pas une perspective encourageante – pas du tout.

« Le vol va attendre un peu, dit le passager à son retour. Il m’a dit qu’ils peuvent attendre jusqu’à une heure et demie. Plus que cela, cela serait une trop grande perturbation pour eux. Pendant cette heure-là, il faut absolument retrouver le sac de la passagère. »

Du bâtiment de prière, on reçoit une réponse négative, ainsi que de la salle à manger. On cherche une nouvelle fois dans l’autobus. En vain. Pas de sac. Il est difficile de trouver les mots pour réconforter Mme G. Personne ne voudrait être à sa place.

Lorsque toutes les réponses s’avèrent négatives et que la montre avance vers l’heure et demie dite, un passager propose :

« Mes frères ! Des Juifs doivent faire tout ce qu’ils peuvent ! Nous n’avons pas encore fait de don à Koupat Ha’ir, alors nous ne pouvons pas encore dire que nous avons fait tout notre possible. Je propose que chacun de nous donne maintenant 18 chékels à Koupat Ha’ir, et que D. nous aide ! »

Les passagers hochent la tête.

Certains commencent à fouiller dans leur porte-monnaie. D’autres tirent leur portable et passent un coup de fil à Koupat Ha’ir pour faire un don par carte bancaire. Un homme dynamique tire un sac de plastique et passe dans l’allée pour recueillir les dons. Il dépose l’argent dans le sac et rend la monnaie. Le sachet se remplit progressivement. Il termine la moitié de l’autobus occupée par les hommes puis une femme se lève pour passer parmi les dames.

Dans le bus, il règne un silence d’attente et d’impatience.

Tout le monde sait qu’on n’a pas trouvé le sac dans la salle à manger ni dans le lieu de prière. Tout le monde sait que l’avion doit bientôt décoller. La dernière femme au fond du bus tire de son porte-monnaie le 18ème chékel. La sonnerie d’un portable rompt le silence.

« Quoi, vraiment ? Où ? Je n’en crois pas mes oreilles! Bien sûr, qu’ils l’envoient ici tout de suite ! Bien entendu qu’on va l’attendre, évidemment ! »

Il ferme son appareil et annonce à voix haute : « Un non-Juif vient à l’instant de rapporter le sac… Il l’a trouvé dans la rue, près de la station où nous avons pris le bus. Ils en ont vérifié le contenu. Tout y est: le portefeuille, les documents, le billet d’avion, le passeport, et même les 1500 dollars »reçoit une réponse

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« Ce n’est pas aussi terrible que vous le croyez ! dit la sage-femme pour consoler la jeune accouchée en larmes. Ce n’est pas agréable au début, il faut apprendre à faire avec. A un jeune âge, on opère et ensuite, on continue à vivre tout à fait normalement. Ce sera une enfant normale, et mignonne même. Son cerveau n’a pas été touché, c’est l’essentiel. »

Mais l’accouchée continue à pleurer, refuse de laisser sa mère entrer et ne lève même pas les yeux vers son mari. On emporte tout de suite le bébé pour des examens approfondis. Quand on révèle un problème, on craint toujours d’en trouver d’autres.

« Elle est encore épuisée après l’accouchement. Elle n’a pas la force de parler maintenant ». L’accouchée entend la sage-femme parler à sa mère et à sa belle-mère qui attendent dehors. « Je pense qu’il vaut mieux que vous reveniez demain. Bientôt, on va l’amener à sa chambre. C’est déjà la nuit, ce n’est plus l’heure des visites. Elle se sentira mieux demain. »

La nuit, la jeune femme continue à pleurer. Inquiètes, ses voisines de chambre vont prévenir les infirmières.

« Non, son bébé est vivant ! dit l’infirmière. Mais il a un petit problème : un bec-de-lièvre. Je vous le dis pour que vous la souteniez un peu moralement. Quelquefois, ce sont justement les mots dits apparemment au hasard par quelqu’un d’extérieur qui arrivent à encourager et à remonter le moral. »

Mais rien à faire. Elle continue à pleurer

le lendemain lorsque sa mère et sa belle-mère viennent lui rendre visite. Ses larmes recommencent à couler avec chaque nouvelle visite, et chaque fois qu’elle prend son bébé, sa fille aînée, dans les bras. Les femmes lui parlent, lui expliquent, lui racontent des cas qui se sont très bien terminés. Elles ont même cherché des photos d’enfants charmants dont la lèvre a été opérée et qui sont devenus tout à fait normaux.

La femme refuse de se consoler.

« Elle est très jeune. Après une première naissance, tout problème qui surgit fait peur. Après deux semaines, elle s’en remettra » dit-on.

Elle s’en remet, effectivement, peu à peu, mais pas tout à fait.

« Tant que l’opération ne se sera pas passée, je ne serai pas tranquille » répète-t-elle à son mari. Il est aussi jeune et désemparé qu’elle et, avec l’attention que tout le monde déverse sur sa femme en larmes, personne ne se rend compte de son angoisse à lui. Un jeune homme de vingt-deux ans qui doit brusquement mûrir. Non. Il ne parvient pas à dominer la situation.

Quelques mois passent. La jeune mère apprend à nourrir son bébé avec un biberon spécial et obéit aux instructions des médecins. Sa confiance en elle lui revient peu à peu. Le bébé est développé et intelligent ; ses yeux brillent lorsqu’elle aperçoit son père ou sa mère. Ses cris de joie apportent dans leur foyer le bonheur d’être parent.

Seule l’opération plane au-dessus d’eux comme un sombre nuage.

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Le nom est tenu confidentiel pour des raisons évidentes

Trop beau pour être vrai !

Israël

« L’opération doit avoir lieu à l’étranger, disent les experts. Dans un grand centre médical et par un certain chirurgien expérimenté. Il est particulièrement expert dans la rectification de ce genre de défauts. Mieux vaut ne pas se contenter de moins. Une bonne opération la rendra tout à fait normale, sans le moindre souvenir de son défaut de naissance. Une opération de moins bonne qualité lui fera avoir l’air différent, avec tous les problèmes que cela entraîne. »

Les grands-parents du bébé prennent en charge l’organisation complexe du voyage à l’étranger et de l’opération. Une correspondance médicale étendue est échangée entre les grands-parents et le centre médical. Une date pour l’opération est fixée et on trouve une famille prête à les accueillir. Tout est prêt.

Deux jours avant le vol, après des nuits d’insomnie, le jeune père éclate soudain en sanglots. « Je ne sais pas comment je pourrai faire ce voyage, dit-il à sa femme. Je ne connais pas l’anglais. Chaque blouse de médecin me fait rougir, pâlir et bégayer… Je ne suis pas capable de cela, j’ai peur. C’est une chose de voyager en

tant que mère, de protéger sa fille et de s’occuper d’elle, et tout autre chose de vous amener dans un pays étranger dont je ne connais pas la langue. Je devrai prendre des décisions face aux médecins et être responsable de votre bien-être et de l’opération. »

Il est si inquiet, si tourmenté... Elle met ses parents au courant.

« Deux jours avant le vol ?! s’écrie son beau-père. Nous aurions dû penser nous-mêmes qu’il faudrait que vous soyez accompagnés par quelqu’un de plus âgé. Vous êtes encore très jeunes… Mais maintenant ? Comment pourrais-je trouver quelqu’un ayant un passeport valide, et qui peut partir du jour au lendemain ? Et qui dit qu’il y aura de la place dans l’avion ?

Je ne peux pas donner de réponse, dit le malheureux gendre. Je suis prêt à faire tous les efforts nécessaires. Comprenez-moi bien : je ne me dérobe pas, je ne fuis pas mes responsabilités. S’il fallait y aller à pied, j’irais… Mais d’aller dans un pays étranger sans une connaissance minimale de la langue, de faire face à des médecins sans savoir décider, cela me

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paraît terrible. Cela me semble irresponsable vis-à-vis de ma famille. J’aurais aimé sentir les choses autrement mais telle est la situation. Que puis-je faire ? »

Son impuissance, son inquiétude et sa souffrance sont presque insupportables. Il ne reste que deux jours avant le voyage. Que faire ?

« Je donne cent chékels à Koupat Ha’ir, dit le jeune papa à sa femme. Je ne sais pas si cela fera quelque chose. C’est là ma hichtadlout. D. a de nombreuses façons d’aider et Il peut faire des miracles.

Tu espères que sa lèvre se rectifiera toute seule cette nuit, sans opération ? lui demande sa femme, stupéfaite. Je pense que c’est un espoir qui n’est pas raisonnable.

Peut-être, mais ce n’est pas cela que j’ai dit. J’ai dit que je fais un don et que D. fasse ce qui est bon à Ses yeux. S’il est bon que nous partions comme cela, sans rien savoir, nous partirons comme cela et nous mettrons notre confiance en Lui. S’il est bon aux yeux de D. que quelque chose d’autre arrive, il arrivera autre chose. D. peut tout faire ! »

Le lendemain, veille du départ, le téléphone sonne. Le traducteur du centre médical américain est au bout du fil. C’est avec lui qu’ils ont mis tous les détails au point.

« Le médecin qui devait opérer votre fille a

quitté le pays aujourd’hui en urgence, explique-t-il. Il a été appelé à la bande de Gaza à cause de la guerre qui s’y déroule. Notre centre médical offre de l’aide aux Palestiniens blessés pendant la guerre. Comme vous habitez en Israël, nous lui avons parlé de votre cas. Il est d’accord de venir au centre médical de la ville israélienne d’Hertsélia, qu’il connaît déjà, et d’y opérer votre bébé. Ce n’est pas officiel. Vous lui donnerez son salaire en espèces sans faire de bruit, mais nous vous conseillons de sauter sur l’occasion. »

Ils reposent le combiné dans un état de choc.

Le chirurgien expérimenté va opérer leur fille ici, en Israël, à Hertsélia ! Est-ce possible ? N’est-ce pas une plaisanterie inventée par quelqu’un qui est au courant de leur crainte du voyage ?

Il se met à rire, puis à pleurer, puis se remet à rire.

« Tu te rends compte ? dit-il. Tu comprends ? Je t’ai dit que D. a de nombreuses voies mais je n’aurais jamais pensé qu’avec mes cent chékels, Il ferait venir le chirurgien jusque chez nous ! C’es tout à fait illogique, tout à fait inattendu ! C’est trop beau pour être vrai ! »

Le bébé est donc opéré en Israël. L’opération réussit.

Le don à Koupat Ha’ir a réalisé son but une fois de plus…

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Israël

Israël

Des chances nulles…Pour entendre l'histoire racontée par le protagoniste : +972-52-7638388

« Nous n’avons pas de quoi finir le mois… »

Son cahier était ouvert sur la table et elle y crayonnait sans y penser.

« Toutes les sommes qui devaient arriver sont déjà arrivées. Il n’y a eu aucune dépense inhabituelle. J’ai fait les courses avec économie. J’ai inscrit toutes mes dépenses jusqu’au dernier sou. Mais la semaine prochaine, deux prélèvements automatiques pour l’école et le gan doivent être effectués sur notre compte alors qu’il est presque vide. Il reste dix jours avant que tu reçoives ta bourse du Collel. Je pourrai acheter à crédit chez l’épicier jusque là mais je n’ai pas de solution pour ces prélèvements. Aucune solution.

– Tu sais que D. peut nous aider de multiples façons…

– Je le sais. Mais en attendant, il faut que nous les payions.

– D. s’en chargera sans doute.

– Bon, termina-t-elle en se levant. Je peux être tranquille à ce sujet ? Tu t’en occupes ? Je peux enlever ce souci de mes épaules ?

– En fait, oui, si nous étions à un niveau de confiance en D. suffisamment élevé. Mais comme nous ne le sommes pas, essaie de remettre une annonce dans le bulletin d’informations du quartier. Peut-être pourras-tu trouver un travail à temps partiel. »

Une semaine est passée. Il a emprunté une petite somme pour la mettre dans son compte en banque et ils ont attendu une réponse à

leur annonce. Dans la situation économique si difficile d’aujourd’hui, il n’y a pas beaucoup de chances. Mais peut-être, peut-être quand même…

Elle a reçu un seul appel en réponse à son offre. « Un appel suffit, si c’est le bon » a-t-elle tenté de se dire, chagrinée d’avoir dû payer 40 chékels (8 euros) pour son annonce. Après une longue conversation, on lui a fixé une interview en lui précisant qu’il y avait plusieurs candidates pour le poste.

Il a récité quelques chapitres de Téhillim, et elle encore davantage. Elle est entrée le cœur battant dans le bureau d’une petite fabrique. Trois employés travaillaient à l’atelier. Le propriétaire était un homme âgé qui donnait l’impression d’une personne facile à vivre. Il lui a demandé des détails sur sa formation, sur sa vie, sur sa situation familiale. Il a écouté avec intérêt lorsqu’elle lui a raconté la raison qui l’a poussée à chercher du travail. Elle avait l’impression que ses réponses honnêtes lui faisaient bonne impression.

« Lorsque le téléphone sonnera, prenez l’appel, s’il vous plaît. Dites que vous êtes la secrétaire et qu’il faut me rappeler plus tard. Ce sera l’examen d’embauche. »

Les paumes de ses mains se sont mises à transpirer. Une mélodie agréable se faisait entendre dans la salle de production ; les ouvriers parlaient d’une voix calme. Cet endroit lui plaisait. Le propriétaire lui avait parlé du salaire et des conditions de travail. Le salaire lui convenait tout à fait, et il y avait une possibilité

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d’augmentation dans le futur. Les heures de travail l’ont étonnée.

« De neuf heures du matin à cinq heures et demie, sauf le mardi jusqu’à une heure, et le vendredi libre… »

– Il n’y a pas de pause pour le déjeuner ?

– Vous pourrez manger ici quand vous le voudrez. Il n’y a pas de problème. D’ailleurs, le bureau sera entièrement à votre disposition. Vous devez faire un travail de bureau et apporter des sommes à la banque à la fin de vos heures de travail. Quant à ce que vous ferez à part cela, peu m’importe. Je viens au travail tous les jours, mais j’ai surtout à faire avec les ouvriers. Je surveille leur travail et réponds à leurs questions. Je ne reste pas au bureau.

– Mais j’ai trois jeunes enfants… Je dois m’occuper d’eux lorsqu’ils rentrent à une heure de l’après-midi. Une heure de pause me rendrait la chose possible.

– Non, ce n’est pas possible. Cette heure-là est très

importante au bureau. »

La sonnerie du téléphone a interrompu leur conversation. Elle a décroché, un peu mal à l’aise, sachant qu’il écoutait chaque mot et chaque intonation. Elle a décidé de faire abstraction de tout et s’est mise à parler comme elle le faisait toujours. Son interlocutrice

était entêtée: elle voulait parler au

d i r e c t e u r tout de suite. La

marchandise qu’elle

avait reçue était abîmée et elle n’en voulait pas. Le livreur se trouvait en ce moment même à la porte et elle avait besoin de parler au directeur immédiatement.

Elle a eu un moment de vertige. A priori, la meilleure chose à faire était de transmettre l’appel au patron, il se trouvait juste à côté d’elle. N’était-il pas dommage de payer deux fois le transport ? Mais il avait demandé de ne pas être dérangé. S’il prenait une secrétaire, c’était pour ne pas avoir à répondre sans arrêt aux appels…

Elle est restée sur ses positions, avec finesse et fermeté. « Je regrette, il n’est pas possible de parler au directeur pour l’instant. Non, pas sur son portable non plus. Je comprends que vous êtes mécontente et je pense que cette affaire sera bientôt réglée au mieux. Non, vous déciderez vous-même si vous voulez renvoyer la marchandise ou la garder chez vous. Lorsque vous parlerez au directeur, vous clarifierez ce point-là aussi. Le directeur ne peut répondre au téléphone en ce moment. Y a-t-il autre chose que vous voudriez me dire ? Je m’en souviendrai et je le lui transmettrai aussi. »

Le directeur l’écoutait attentivement. Elle a reposé le combiné, tendue, mais il était satisfait. « C’était Chimonovitch, n’est-ce pas ? Une rouspéteuse chronique, cette femme, mais une bonne cliente. On ne peut rien faire, elle est comme cela. Vous lui avez très bien répondu. »

Elle a poussé un soupir de soulagement. A présent, il ne restait que la question des heures de travail. Il ne pouvait pas renoncer à la présence d’une secrétaire à l’heure du déjeuner et elle ne pouvait pas abandonner ses enfants sur le palier de son immeuble. Ils se sont mis d’accord de se rencontrer à nouveau en fin de semaine et elle a quitté les lieux, épuisée.

« Les conditions sont vraiment excellentes, le salaire est très satisfaisant, l’endroit est agréable… Il n’y a aucun problème de ce côté-là. C’est un bureau privé où je n’aurai de contact avec personne. Le travail me convient. Peut-il y avoir mieux ? »

Son mari savait où la conversation les conduisait et était aussi déçu qu’elle.

– Si tu me disais que ton collel à Jérusalem te

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convient, je n’aurais même pas envisagé quoi que ce soit. Tu sais que, bien qu’il soit difficile pour moi que tu étudies hors de la ville, je n’ai jamais rien dit à ce sujet. La Torah passe avant tout. Mais tu te plains que ton partenaire d’étude est très souvent absent, qu’il t’est difficile d’étudier seul. Tu m’as dit plusieurs fois que si tu avais une alternative, tu aurais changé de collel depuis longtemps. Alors peut-être devrais-tu essayer de trouver un collel ici ? Si tu rentres à midi et que tu t’occupes des enfants, je pourrai accepter ce poste sans aucun problème…

– Tu sais combien de chances j’ai d’être accepté au collel ici ? Il y a des dizaines d’hommes qui sont inscrits sur la liste d’attente. Voici deux ans, quand nous sommes venus habiter ici, je me suis adressé au Roch Collel et je lui ai demandé de m’inscrire. Aujourd’hui encore, je le lui rappelle de temps en temps. Il n’y a aucun moyen : ils n’acceptent pas de nouveaux avrékhim. Le collel de Jérusalem, avec tous ses inconvénients, est malgré tout un collel. Si je le quitte, même pendant ta période d’essai, ils ne me prendront plus à mon retour. Là-bas aussi, de nouveaux avrékhim cherchent à être acceptés. C’est la même chose partout. Qu’est-ce que nous allons faire si ton emploi ne dure pas ? De quoi vivrons-nous ?

– Le Roch Collel est ton partenaire d’étude… Raconte-lui notre dilemme, demande-lui conseil !

– C’est justement parce qu’il est le Roch Collel qu’il est si souvent absent. Il doit fréquemment voyager pour recueillir des fonds. Je ne peux pas lui dire combien ses absences me sont difficiles. Crois-moi qu’il aurait bien aimé être présent régulièrement…

– Je ne sais pas quoi dire. J’aurais proposé de faire un don à Koupat Ha’ir. Peut-être que le miracle se produira… »

Il a accepté sa proposition. Ils ont fait un don de leurs maigres ressources, ont prié et ont attendu. Jusqu’à la fin de la semaine, il y avait beaucoup de temps pour que des miracles interviennent. Après son interview et sa

réussite à l’examen, le travail lui plaisait encore

plus qu’avant. Et un salaire supplémentaire

leur manquait cruellement… Allaient-ils

bénéficier d’un miracle ? Elle priait en silence,

sans abonder en paroles. Lui aussi. Il se

rendait bien compte combien il était difficile

de vivre en se serrant si fort la ceinture et

savait que la charge reposait principalement

sur sa femme. Bien qu’il ne serait pas facile

pour elle de travailler de longues heures

chaque jour, elle était décidée à le faire. Cela

montrait que la situation actuelle lui était

encore plus difficile. Il espérait lui aussi être

accepté dans un bon collel sur place, avec un

partenaire d’étude régulier qui venait tous

les jours. A part cela, les trajets en bus étaient

très fatigants. A priori, toutes les solutions en

une fois... Mais les chances d’être acceptées

dans un collel de la ville étaient si minces,

presque nulles.

« Des chances nulles lorsqu’on fait un don

à Koupat Ha’ir ? Non, impossible. D. peut

tout faire, Ses possibilités sont illimitées.

La charité nous ouvre les portes et nous

recevrons peut-être par ce mérite un cadeau

gratuit… »

Ce n’était pas à lui qu’elle parlait, mais à elle-

même.

« Demain, je dois donner une réponse ». Elle

tentait de renforcer sa confiance en D.,

d’approfondir sa foi. Tout dépendait de D.

et ils allaient accepter avec amour ce qu’Il

déciderait.

Le soir même, il a reçu un coup de téléphone.

Le Roch Collel de sa ville l’a mis au courant

qu’un des membres avait brusquement

quitté le collel et qu’il avait donc une place

disponible pour lui. Il lui semblait convenir

particulièrement comme partenaire pour

l’avrekh qui était resté seul. Il lui proposait

de se joindre au collel dès le lendemain, s’il le

désirait…

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Il est possible de s’adresser à Rav Avraham Deitch pour entendre les

détails de cette conversation. N° de portable : +972-52-7644507, le soir.

-

Rav ‘Haïm Kaniewsky : « Pour écarter un mauvais décret, il faut faire un don à Koupat Ha’ir ».

Israël

Rav Avraham Deitch, Chef de la communauté orthodoxe de la ville d’Ofakim dans le sud d’Israël, est venu consulter Rav ‘Haïm Kaniewsky à propos d’un problème communautaire urgent.

Soudain, le secrétaire entre, un portable en main, et soumet une question pressante.

Dans l’une des communautés juives de l’étranger, pendant la prière de Chemini Atséret, dernier jour de Souccot, alors que les fidèles récitaient la prière pour la pluie, une grave méprise se produisit… Le ministre-officiant voulut chanter les mots « Livrakha velo liklala » (Donne la pluie… pour la bénédiction et non pour la malédiction) et malheureusement, il énonça le contraire… et tous les fidèles répondirent « Amen ! » L’instant suivant, un silence dramatique se fit dans la synagogue. Les membres de la communauté furent saisis d’une lourde appréhension : n’était-ce pas le signe que quelque chose de grave planait sur eux ? N’était-ce pas une allusion à un terrible événement à venir ?

Dès l’issue du Chabbat (la fête tombait jeudi et vendredi), les responsables de cette communauté téléphonèrent au secrétaire de Rav ‘Haïm Kaniewsky. Tremblants, ils racontèrent ce qu’il s’était passé et demandèrent comment annuler le mauvais décret. Rav Kaniewsky sourit : « Il n’y a là aucun problème, dit-il. Ce cas est décrit explicitement dans la Guemara, au Pérek Elou Metsiot ». La Guemara (Bava Metsia 26b) parle

du cas d’un homme qui fit venir des témoins en sa défense

mais ceux-

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La dernière page, et un sentiment doux de

satisfaction envahit notre cœur.

Pourquoi, au fait ?

Est-ce nous qui avons effectué ces

délivrances ? Se sont-elles passées chez

nous ? Les lecteurs viennent de les lire pour

la première fois ! Malgré tout, le sentiment

est doux et agréable, comme si c’était notre

miracle à nous.

Mais oui ! C’est notre miracle à nous !

Le Père miséricordieux qui a fait tout cela

est notre Père à nous. Ces personnes qui

ont vu de leurs yeux ces délivrances sont

nos frères ; nous avons le même Père.

Cette caisse de charité grâce à laquelle ces

événements se sont produits est la nôtre.

Chacun de nous y a une part ; chacun de

nous la porte sur son épaule. Elle fonctionne

grâce à nous.

Cette brochure de Koupat Ha’ir, à part le

fait qu’elle rappelle à chacun les délivrances

privées qu’il voit lui-même, est la brochure

des délivrances qui sont les nôtres.

Au-delà des mérites, au-delà de ce qui

nous revient de droit, au-delà des limites

de la nature et de la logique, au-delà des

statistiques, Koupat Ha’ir est un autre

chemin par lequel s’adresser au Créateur.

C’est une voie pour éveiller Son amour,

Sa pitié, Sa bonté. Comme une persienne

toujours ouverte, comme une ouverture ne

dépendant pas de notre situation…

Comme est doux ce sentiment, comme il

est agréable ! Il nous rapproche du Créateur

qui, dans Sa bonté, nous a donné ce précieux

cadeau, Koupat Ha’ir…

ci témoignèrent contre lui. Ensuite, ils se reprirent et affirmèrent qu’ils ne voulaient pas dire cela, et voulurent témoigner en sa faveur. La Guemara dit qu’il n’y a pas là d’interdiction de « ‘hozer oumaguid » (rétractation des témoins) parce qu’il est évident qu’un homme ne fera jamais venir des témoins à son désavantage. « Ici aussi, montra le Rav, il est certain que le ministre-officiant ne voulait pas dire ces mots-là mais le contraire, et il n’y a donc aucun problème. »

Mais le secrétaire revint et dit au nom du représentant de la communauté que les gens ont très peur et qu’ils ont l’impression qu’un mauvais décret pèse sur eux. Quand Rav Kaniewsky vit que ses paroles n’avaient pas rassuré les fidèles et que la communauté voulait faire quelque chose pour écarter la colère divine, il déclara : « Si on veut écarter un mauvais décret, il faut faire un don à Koupat Ha’ir. »

La principale caisse de Tsédaka d’Israël