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Cœur et sport Si l’on en croit le dictionnaire, le mouvement peut se définir par l’action ou la manière de se mouvoir, de déplacer le corps, une partie du corps ; il se définit encore par : “ensemble des gestes, des déplacements du corps”. Si on admet cette définition, il va de soi que le mouvement repose avant tout sur la contraction et la décontraction musculaire, contraction qui dépend de l’énergie qui est fournie aux muscles. Cette énergie, le muscle la tire de substrats, essentiellement les glucides et les lipides, prélevés in situ, ou amenés par la circulation sanguine. Cette circulation est constituée d’un système de « tuyauterie » dans lequel une « pompe », le cœur, envoie un débit qui s’adapte en permanence au besoin de la périphérie et en particulier des muscles. Le cœur est ainsi un organe central au cours de l’exercice musculaire, donc au sein du mouvement et il est tout à fait logique que notre observatoire s’intéresse à son fonctionnement chez le sportif. En cela, l’ODM colle à l’actualité puisque récemment, les problèmes cardiologiques chez le sportif ont été abondamment médiatisés. La mort subite de sportifs jeunes, footballeurs ou cyclistes a interpellé le milieu sportif mais aussi les médecins qui se sont posés un certain nombre de questions : faillite de la prévention ? Conséquences du dopage ? Déficit dans les systèmes de prise en charge des urgences ? Ainsi de nombreux congrès ont choisi le thème « cœur et sport » fin 2005. En novembre, c’est la Conférence Médicale Interfédérale du Comité National Olympique et Sportif Français qui a consacré à ce sujet toute une demi-journée. LETTRE D’INFORMATION (3 numéros par an) janvier 2006 N°17 L A L E T T R E Editorial Adaptations cardio-vasculaires à l’exercice musculaire : F. Carré 1 L’électrocardiogramme de l’athlète : particularités et limites : L. Corneloup 5 La mort subite du sportif: L.Chevalier 8 Opinion : D. Rivière 10 Brèves 4 SOMMAIRE Ces adaptations cardiovasculaires sont de deux types :aiguës,dont le but est l’apport suffisant d’oxy- gène aux muscles en activité et chroniques,en répon- se à la pratique sportive répétée dont le but est d’améliorer l’efficacité des réponses aiguës. Ces adaptations cardio-vasculaires sont importantes à connaître pour le médecin car d’une part leur pertur- bation explique de nombreux symptômes d’effort et car d’autre part les limites des adaptations chro- niques avec la pathologie peut parfois être difficile à préciser. Les adaptations cardiovasculaires aiguës Le système cardio-vasculaire apporte l’O 2 aux muscles actifs en mobilisant les réserves de sa fonc- tion“ pompe”et en facilitant le transport et la redis- tribution du débit sanguin.Les adaptations dépen- Adaptations cardio-vasculaires à l’exercice musculaire Pour fonctionner durablement et de manière optimale,nos cellules réclament la présence d’oxygène. Ce métabolisme aérobie est analysable et quantifiable par la mesure de la consommation d’oxygène (VO 2 ,l/min) qui au repos est voisine de 3,5 ml O 2 /min/kg.Cette valeur correspond à 1 MET,pour metabolic equivalent task.Si au repos les muscles squelettiques ont une activité métabolique faible, lors d’un exercice d’intensité maximale celle ci peut-être multipliée par 10.Les augmentations d’apport en O 2 par le sang et d’extraction d’O 2 par le muscle permettent de répondre à cette demande accrue.L’apport sanguin dépend surtout du débit cardiaque (DC,l/min) et de la vascularisation en particulier locale ; l’extraction ou différence artério-veineuse en O 2 dépend de la qualité musculaire. Le rôle des adaptations cardiovasculaires aux contraintes de l’exercice musculaire est donc majeur. suite en page 10

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Cœur et sportSi l’on en croit le dictionnaire, lemouvement peut se définir par l’action oula manière de se mouvoir, de déplacer lecorps, une partie du corps ; il se définitencore par : “ensemble des gestes, desdéplacements du corps”. Si on admet cette définition, il va de soique le mouvement repose avant tout sur lacontraction et la décontraction musculaire,contraction qui dépend de l’énergie qui estfournie aux muscles. Cette énergie, lemuscle la tire de substrats, essentiellementles glucides et les lipides, prélevés in situ,ou amenés par la circulation sanguine.Cette circulation est constituée d’unsystème de « tuyauterie » dans lequel une« pompe », le cœur, envoie un débit quis’adapte en permanence au besoin de lapériphérie et en particulier des muscles. Lecœur est ainsi un organe central au coursde l’exercice musculaire, donc au sein dumouvement et il est tout à fait logique quenotre observatoire s’intéresse à sonfonctionnement chez le sportif. En cela, l’ODM colle à l’actualité puisquerécemment, les problèmes cardiologiqueschez le sportif ont été abondammentmédiatisés. La mort subite de sportifsjeunes, footballeurs ou cyclistes a interpelléle milieu sportif mais aussi les médecinsqui se sont posés un certain nombre dequestions : faillite de la prévention ?Conséquences du dopage ? Déficit dans lessystèmes de prise en charge des urgences ?Ainsi de nombreux congrès ont choisi lethème « cœur et sport » fin 2005. Ennovembre, c’est la Conférence MédicaleInterfédérale du Comité NationalOlympique et Sportif Français qui aconsacré à ce sujet toute une demi-journée.

L E T T R E D ’ I N F O R M A T I O N ( 3 n u m é r o s p a r a n ) j anv ier 2006

N°17

L A L E T T R E

Edi tor ia l

Adaptations cardio-vasculaires à l’exercice musculaire : F. Carré 1

L’électrocardiogramme de l’athlète : particularités et limites : L. Corneloup 5

La mort subite du sportif: L.Chevalier 8Opinion : D. Rivière 10Brèves 4

SOM

MA

IRE

Ces adaptations cardiovasculaires sont de deuxtypes :aiguës,dont le but est l’apport suffisant d’oxy-gène aux muscles en activité et chroniques,en répon-se à la pratique sportive répétée dont le but estd’améliorer l’efficacité des réponses aiguës.Cesadaptations cardio-vasculaires sont importantes àconnaître pour le médecin car d’une part leur pertur-bation explique de nombreux symptômes d’effortet car d’autre part les limites des adaptations chro-niques avec la pathologie peut parfois être difficileà préciser.

Les adaptations cardiovasculairesaiguës Le système cardio-vasculaire apporte l’O2 auxmuscles actifs en mobilisant les réserves de sa fonc-tion “ pompe”et en facilitant le transport et la redis-tribution du débit sanguin.Les adaptations dépen-

Adaptations cardio-vasculaires à l’exercice musculaire

Pour fonctionner durablement et de manière optimale,nos cellules réclament la présence d’oxygène.Ce métabolisme aérobie est analysable et quantifiable par la mesure de la consommation d’oxygène(VO2,l/min) qui au repos est voisine de 3,5 ml O2/min/kg.Cette valeur correspond à 1 MET,pourmetabolic equivalent task.Si au repos les muscles squelettiques ont une activité métabolique faible,lors d’un exercice d’intensité maximale celle ci peut-être multipliée par 10.Les augmentationsd’apport en O2 par le sang et d’extraction d’O2 par le muscle permettent de répondre à cette demandeaccrue.L’apport sanguin dépend surtout du débit cardiaque (DC,l/min) et de la vascularisation enparticulier locale ; l’extraction ou différence artério-veineuse en O2 dépend de la qualité musculaire.Le rôle des adaptations cardiovasculaires aux contraintes de l’exercice musculaire est donc majeur.

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ble circulatoire régulée de l’organisme.Elle estégale au produit du DC par les résistances péri-phériques (RP). Ses adaptations dépendentdonc des modifications de ces deux paramèt-res.Malgré la baisse majeure des RP, l'impor-tance de l'augmentation du DC et les phéno-mènes de “balance circulatoire”entre les diffé-rents organes expliquent l'élévation modéréede la PA moyenne avec l’intensité de l’exerci-ce.Comme la PA systolique (PAs) augmentelinéairement avec l'intensité de l'effort et la PAdiastolique (PAd) varie peu, la différentielle(PAs - PAd) s‘élargit à l’exercice.Des chiffres maximaux de PA « acceptables »sont proposés (PAs 250 mm Hg et PAd130 mmHg).Il faut en connaître les limites enparticulier chez le sujet sain et sportif. Si uneélévation de la PAd,malgré la difficulté de samesure à l’exercice intense,est supérieure à10 mm Hg, elle est sûrement anormale, lesvaleurs limites de PAs sont plus discutables card’origine multifactorielle (âge, sexe,puissan-ce développée,…).

Adaptations lors de la phase de récupération.

La récupération post-exercice est pas une phasehémodynamiquement instable.D’où l’intérêtd’une récupération active en particulier chezles sédentaires et les patients porteurs d’unepathologie cardiaque.Dés l’arrêt de l’effort, laFC diminue par restauration immédiate du freinvagal puis par levée retardée de l'action dusympathique et des catécholamines. Le DCretrouve plus lentement son niveau basal,carle VES diminue plus lentement (retour veineuxgrâce à la récupération active et action des caté-cholamines). Les RP remontent lentementjusqu’à leur niveau initial. La PAs s’abaisseprogressivement et retrouve sa valeur de reposen moins de 6 minutes. Dans les heures quisuivent l’exercice les chiffres tensionnels,du faitde la persistance de la vasodilatation,restentsouvent inférieurs aux valeurs pré-effort.

Variations du schéma général desadaptations cardio-vasculairesLes adaptations cardio-vasculaires décrites précé-demment varient selon les conditions de réali-sation de l’exercice.Ces différences d’adapta-tion sont importantes à connaître pour le méde-cin du sport car elles aident à comprendrecertains symptômes et à conseiller une activi-té physique adaptée à l’état de santé des patients.Les effets d’une pathologie intercurrente et destraitements pharmacologiques ne seront pasabordés ici.

Caractéristiques de l’exercice

Exercice dynamique réalisé avec les mem-bres supérieurs

L’importance de la masse musculaire mise enjeu joue un rôle majeur dans les adaptations

dent des caractéristiques de l’exercice (type,durée, intensité,environnement) et du sujet(sexe,âge,niveau d’entraînement,pathologie).

Schéma général des adaptationscardiovasculaires Il est classique de décrire les adaptations obser-vées chez un jeune adulte sédentaire sain lorsd’un exercice dynamique (vélo, course àpied,…).progressivement maximal au niveaude la mer.L’intensité est définie en pourcentagede la VO2 maximale (VO2 max.) individuelle.

Le débit cardiaque et ses composantesLe débit cardiaque (DC) augmente propor-tionnellement avec l’intensité de l’exercice. Ilest important de retenir que chez tous les sujetspour une élévation de la VO2 de 1 litre/min leDC augmente environ de 6 litres/min.Pour unexercice d’intensité maximale,le DC plafonne,le DC de repos (5 l/min) est multiplié par unfacteur 4 - 5 (DC maximal = 20 - 25 l/min).Le DCmaximal représente,chez les sédentaires sains,le facteur limitant principal de la VO2 max.Le DC est la résultante du produit de la fréquen-ce cardiaque (FC,bpm) par le volume d’éjec-tion systolique (VES,ml).Ces deux composan-tes évoluent différemment à l’exercice.Au début de l’exercice la FC augmente vite puis,au delà de 40-50 % de la VO2 max.son éléva-tion devient linéaire.L’accélération initiale dela FC est surtout liée à la levée du frein vagal ;les effets du système nerveux sympathique etde l'adrénaline médullo-surrénalienne sontretardés (50-60% de la VO2 max.).La FC maxi-male (FC max.) dépend essentiellement del’âge et peut être approximée par la formuleclassique,FC max.= 220 - âge ± 10 bpm qui aété établie sur ergocycle. Il existe cependantdes variations individuelles importantes et lesFC max.mesurées lors de la course à pied sontsouvent plus élevées.Au repos, le VES en position couchée (100-120 ml) est environ le double de celui observéen position assise ou debout (60-80 ml) en posi-tion couchée.Il augmente dès le début de l'exer-cice puis plafonne pour une intensité voisinede 40-50 % de la VO2 max.Il est assez bien reflé-

té par le pouls d’O2 (rapport VO2/FC).Le VES estégal à la différence du volume de fin de dias-tole (volume télédiastolique,VTD,ml) et du volu-me de fin de systole (volume télésystolique,VTS,ml).Le VTD qui augmente au début grâce auretour veineux accru (action de la pompemusculaire) et au meilleur remplissage diasto-lique a tendance à diminuer l'effort maximal àcause du raccourcissement du temps de dias-tole et de la contrainte péricardique.Le VTSdiminue tout au long de l'effort grâce à l’aug-mentation de la contractilité cardiaque (loi deFrank et Starling et catécholamines)et à la bais-se des résistances périphériques.Ainsi à l’exer-cice, le cœur se remplit plus en diastole et sevide mieux en systole ; les pressions ventricu-laire et auriculaire gauches augmentent peu.

Les adaptations vasculairesElles varient selon les organes.Au niveau desmuscles squelettiques sollicités,la diminutiondes résistances périphériques est graduée enfonction de l’intensité de l’exercice.Ainsi tousles capillaires ne sont pas dilatés simultané-ment mais alternativement et le débit sanguinmusculaire n'atteint jamais ses capacités maxi-males (300-400 ml/min/100g).Au repos le débitmusculaire représente 15% du DC et à l’effortmaximal 85 % !Au niveau des organes inactifs,une vasocons-triction générale est observée au début de l’ef-fort.Quand l’exercice se prolonge, les adapta-tions varient selon les organes.Le débit sanguindiminue au niveau du tube digestif,foie,rate etrein.Au niveau cutané,une vasodilatation succè-de à la vasoconstriction initiale.Ces ajustementscirculatoires,on parle de “balance circulatoire”,permettent d’assurer un apport suffisant de sangaux muscles sollicités tout en maintenant unepression sanguine de perfusion efficace et enluttant contre la chaleur.Certains organes ont des adaptations particuliè-res qui peuvent en cas de pathologie associéeêtre dépassées.Au niveau de la circulation pulmo-naire,les résistances pulmonaires baissent rela-tivement moins que les résistances périphériques.La pression artérielle (PA,mm Hg) moyenne dansl’artère pulmonaire augmente proportionnelle-ment plus que la PA systémique.Ainsi,à l’exer-cice, le travail du ventricule droit est propor-tionnellement supérieur à celui du ventriculegauche.Au niveau de la circulation coronaire,l’adaptation à la demande myocardique en O2se fait par l'augmentation du débit,car l'extrac-tion d'O2 est déjà presque maximale au repos.Grâce à une vasodilatation importante,le débitcoronarien peut être multiplié par 4 à 5.Au niveaucérébral,le débit sanguin reste stable en valeurabsolue tout au long de l'exercice,grâce à l’au-torégulation circulatoire de cet organe.

Adaptations de la pression artérielle

La pression artérielle (PA) moyenne est la varia-

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cardio-vasculaires.Lorsqu’un exercice est réali-sé avec les bras, les composantes nerveuse etcatécholergique jouent un rôle majeur alorsque l’influence de la “pompe”musculaire estrelativement faible.À intensité d’exercice sous-maximale égale, la FC est plus basse et les PAsystolique et diastolique sont plus élevéeslorsque l’exercice est réalisé avec les bras quelorsqu’il est effectué avec les jambes.Pour unexercice dynamique d’intensité maximale, lesvaleurs de VO2, FC et DC sont d’autant plusélevées que la masse musculaire sollicitée estimportante (tapis roulant > ergocycle > ergo-mètre à bras). Les valeurs maximales de PAvarient peu.

Exercice statique et mixte.Parfois aussi appelé isométrique,ce type d’exer-cice sollicite des masses musculaires moinsimportantes que les exercices dynamiques.Lemouvement est réalisé à vitesse nulle (contrac-tion musculaire constante sans modification delongueur du muscle) contre une résistance fixeet la ventilation est souvent restreinte.En réali-té, les exercices statiques purs sont rares dansla vie courante et sportive ;même les exercicesdits de “musculation”sont le plus souvent mixtes,dynamique et statique.Lors de ce type d’exercice la contrainte est ditebarométrique en opposition à la surcharge volu-métrique de l’exercice dynamique.Les adap-tations cardio-vasculaires dépendent de la massemusculaire sollicitée,du pourcentage de la forcemaximale volontaire (FMV,équivalent de la VO2

max.pour les exercices statiques) utilisée et dutemps de maintien de la contraction.Si l’inten-sité est faible (< 20-40% FMV) et si l’exercice estbref,la FC s’élève modérément,le VES ne variepas, le DC et la PA augmentent donc peu. Sil’exercice est plus intense et surtout s’il estprolongé (>1-2 minutes),le VES varie peu mais

la FC et surtout les RP augmentent.Ainsi, lesdeux composantes de la PA augmentent beau-coup sans élargissement de la différentielle.Cette charge tensionelle est majorée par le bloca-ge de la respiration (manœuvre de Valsalva).Dans la circulation pulmonaire aussi les pres-sions s’élèvent proportionnellement plus quelors d’un exercice dynamique.L’effort purementstatique intense risque donc d’être mal tolérépar les “cardiaques”. Lors d’un exercice mixte,statique et dynamique (aviron,cyclisme inten-se ou en côte), les adaptations sont intermé-diaires et la contrainte tensionnelle est atténuée.

Position de l’exerciceLorsque l’exercice est réalisé en positioncouchée,le volume sanguin séquestré dans lesmembres inférieurs est plus faible qu’en posi-tion assise ou debout.Le VTD est plus élevé,lesRP sont plus faibles, le VES est plus importantet la FC plus basse.

Intensité de l’exerciceLors d’un exercice supra-maximal (> VO2 max.),comme le sprint court ou les sports explosifs,c’est le métabolisme anaérobie qui est surtoutsollicité.Du fait de leur inertie,les variations dela FC,du VES et du DC dépendent surtout de ladurée de l’exercice.Les modifications de la PAdépendent de la part statique de l’exercice etdu type de ventilation qui l’accompagne.

Durée de l’exerciceLes adaptations varient aussi avec la durée del’exercice.Le rendement mécanique de l’exer-cice musculaire est médiocre et plus de 75% del’énergie produite par la contraction musculaireest dissipée en chaleur.Lors d'un exercice sous-maximal constant et de courte durée (45 min.),après une adaptation progressive liée à l’iner-tie du système aérobie (3-4 min.) un état d'équi-libre s'installe si l’intensité est inférieure au« seuil » ventilatoire.Si l'effort se prolonge (> 30-80 min.),l’élimination de la chaleur devient un

problème majeur.La déshydratation et la redis-tribution du volume sanguin dans les plexusveineux sous-cutanés entraînent une baisse duvolume plasmatique efficace donc du VES.Celle-ci associée à la relative fatigue myocardique età la baisse de l’“efficacité”du geste explique lephénomène de “dérive cardio-vasculaire”avecélévation progressive de la FC qui compense labaisse du VES et maintient le DC constant.LaPA moyenne se stabilise à un niveau inférieurà celui du début d’effort.

Caractéristiques individuelles

L’âgeLa sensibilité des récepteurs adrénergiques,lacompliance ventriculaire et surtout celle desgros vaisseaux diminuent avec l’âge.A l'effort,chez le sujet âgé la pente d’accroissement de larelation DC-intensité de l'exercice s’aplatit.Lesvaleurs maximales de la FC,du VES donc du DCsont diminuées,ce qui ajouté à la baisse de lamasse musculaire explique la diminution de laVO2 max.avec l’âge.Au-delà de 45-50 ans,les pres-sions dans la circulation pulmonaire déjà plusélevées au repos augmentent beaucoup plus àl’exercice que chez le sujet plus jeune.La PAsystolique augmente plus et plus vite.

Le sexePour un exercice sous-maximal,à intensité égale,la PA est plus basse et la FC plus élevée chez lafemme que chez l’homme. Ces différencessemblent dues aux réponses différentes dessystèmes sympathique et catécholergique dansles deux sexes.

Caractéristiques environnementales

La météorologieEn ambiance chaude l’hypoperfusion splanch-nique et la déshydratation augmentent.Si l’hu-midité ambiante est importante,l’évaporationde la sueur,donc l’élimination de la chaleur sontlimitées.Pour un niveau d‘effort donné la FC est

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Brèves

Classification des Dysplasies et autrescardiopathies du ventricule droitFontaine G, Cardinale Tome XVI fév 2004, P 8

Guy Fontaine est un pionnier de l’électrophysiologiecardiaque. Il a identifié en 1997 la D.A.V.D qu’il a isolédu cadre des Tachycardies ventriculaires résistan-tes du sujet jeune.Il s’agit d’une maladie primitive du myocarde ( cardio-myopathie ventriculaire droite arythmogène).Cette article fait le point sur les différentes formesde C.M.D.A.À côté de la forme pure du DVDA avec sa traductionélectrique et ses lésions (remplacement fibroadi-peux du myocarde de la paroi du ventricule droit)d’autres formes sont évoquées.- La D.V.D.A avec extension au ventricule gauche- La forme non arythmogène.- Syndrome de dissociation adipeuse du ventriculedroit.- La D.V.D.A avec myocardite superposée.- Tachycardie infundibulaire et extrasystoles béni-gnes.- Prolapsus valvulaire mitral.- Maladie de Uhl- Syndrome de Brugada

La plupart de ces atteintes myocardiques à traduc-tion électrique peuvent être responsables d’une mortsubite chez des sujets jeunes lors de la pratique spor-tive.

Cet article très documenté fait le point sur cettepathologie du myocarde et insiste sur le rôle impor-tant de l’ECG dans le bilan du cœur du sportif. (impor-tante bibliographie).

ECG dans le diagnostic de la DVDAFontaine G, Cardinal Tome XVI fév 2004, P 12

Le remplacement fibreux et adipeux du myocardedu VD a une traduction électrique très caractéris-tique.- Inversion des ondes T- Prolongation de la durée des QRS- Ondes epsilon- Potentiels tardifs

Ces éléments peuvent induire des troubles de laconduction au niveau du VD ce qui explique les consé-quences cliniques possibles.

Place de l’IRM cardiaque dans la DVDA.Azarine Arshid, Cardinale Tome XVI, Fév 2004 p 20

L’hypersignal de la paroi du ventricule droit est latraduction de l’infiltration graisseuse myocardique.L’IRM permet également de faire une étude fonc-tionnelle de l’ensemble des cavités cardiaques enparticulier du VG.Article très clair et précis apportant des élémentsobjectifs important dans la connaissance de cettepathologie.L’étude échocardiographique (Ivana Vranic) appor-te également des renseignements précis et indis-cutables dans les formes frustres (même revuep. 22).

plus élevée qu’en ambiance neutre pourcompenser la baisse du volume plasmatique.Une déshydratation,même modeste,diminue laperformance en particulier myocardique.Dansdes cas extrêmes ou en cas de susceptibilité indi-viduelle particulière, les phénomènes d’adap-tation peuvent être dépassés et un collapsuscirculatoire (« coup de chaleur » peut survenir.En ambiance froide,pour une intensité d'effortdonnée,la FC est plus basse et le VES plus élevéqu’en ambiance neutre.

L’altitude

En altitude,FC et DC augmentent plus vite à l’ef-fort.Les RP diminuent moins et la PA s’élèveplus.Si les valeurs maximales de ces paramè-tres sont les mêmes qu’en plaine,la puissancemaximale de l’exercice et la VO2 max.sont dimi-nuées.En très haute altitude (> 3500m), la FCmaximale peut être diminuée.Après acclima-tation,pour des exercices d’intensité sous-maxi-males ces différences s’amenuisent,mais le DCmaximal reste diminué à cause d’une baisse duvolume plasmatique et de la FC maximale.

Adaptations cardio-vasculaireschroniquesL’entraînement physique améliore les adapta-tions cardio-vasculaires à l’exercice.Des effetsbénéfiques sont observés dés qu’une activitéphysique régulière est réalisée à raison de 3 séan-ces hebdomadaires de 30-45 minutes avec uneintensité d’effort comprise entre 60-80% de laVO2 max.L’activité sympathique basale est dimi-nuée et la sensibilité des récepteurs adréner-giques est accrue.Ainsi au niveau cardiaque,leremplissage diastolique et la vidange systoliquesont améliorés ,ce qui se traduit par une brady-cardie et un VES augmenté au repos.Malgré des variations individuelles liées en partieau capital génétique,la VO2 max.augmente enmoyenne de 20 à 30%,après un entraînementsuffisamment intense.Cette amélioration est liéeà des adaptations cardio-vasculaires et muscu-laires.Chez le sportif de haut niveau d’entraî-nement ( > 8-10 heures à plus de 60 % de la VO2

max.) une hypertrophie-dilatation harmonieu-se des quatre cavités cardiaques (« cœur d’ath-lète ») peut-être observée par l’échographie.L’hypervascularisation musculaire anatomiqueet fonctionnelle avec capacité de filtrationaméliorée facilite l’apport d’O2 aux muscles.Chez le sportif,le DC maximal est plus élevé etpeut atteindre 30 à 40 l/min.Lors d'un exercicedynamique progressivement croissant, sa FCs’accélère moins vite.Sa FC maximale est géné-ralement non modifiée,parfois un peu dimi-nuée.Ainsi,si le sédentaire accroît son DC enaugmentant surtout sa FC, l’athlète majored’abord son VES,et « épargne » sa FC pour lesniveaux d'effort les plus élevés.Cette « hyper-adaptation » est due aux modifications anato-miques cardiaques,à l’augmentation du volu-

me sanguin (+20-25%),à l’efficacité accrue dela pompe musculaire squelettique (hypertro-phie et hypertonie musculaire) et à la meilleu-re conductance vasculaire.Lors de la récupé-ration,la baisse de la FC est plus rapide.

Régulations des adaptationscardio-vasculairesLes ajustements étroits de la circulation auxbesoins métaboliques de l’organisme au coursde l’exercice restent incomplètement expliqués.Lors d’un exercice dynamique,la demande enoxygène est le stimulus majeur et c’est le main-tien d’une PA efficace qui est le facteur de régu-lation principal.Le DC et la balance vasodila-tation/vasoconstriction sont donc au centre desmécanismes de régulation.Le système cardiovasculaire a une régulationintrinsèque.Ainsi,la loi de Frank et Starling ditque la force de contraction d’une fibre myocar-dique est proportionnelle à son niveau d’éti-rement.De même,au niveau vasculaire le degréde dilatation dépend de la réponse endothé-liale locale (libération de monoxyde d’azote,NO,par exemple) aux contraintes pariétalesdues à l’élévation du débit sanguin.

La régulation extrinsèque des adaptationscardiovasculaires est nerveuse et humorale.Larégulation nerveuse est double, centrale etréflexe.Le système nerveux central est respon-sable du recrutement des unités motricesmusculaires. Il initie les adaptations cardio-vasculaires immédiates et détermine les modi-fications du système nerveux autonome sur lecœur et les vaisseaux.Les centres de régulationcardiovasculaires qui sont en permanencerenseignés sur le niveau d‘activité musculairerépondent par des mécanismes réflexes afind’adapter l’apport d’O2 aux besoins.Les infor-mations issues des récepteurs mécaniques etmétaboliques musculaires et articulaires sontacheminées aux centres par des fibres nerveu-ses afférentes et renseignent sur le type et l'in-tensité de l'exercice.Les voies efférentes sontessentiellement les fibres sympathiques.La régu-lation humorale aussi est double,générale parl'intermédiaire des catécholamines et loco-régionale grâce à l'action de métabolites muscu-laires (ADP,protons) et endothéliaux (NO).

Lors des exercices statiques,le pourcentage deFMV mis en jeu est le stimulus principal.Lesadaptations dépendent de la levée du frein vagalet de l’activation du sympathique par les chémo-réflexes (ischémie musculaire).

● FrançoisCarréExplorations Fonctionnelles - [email protected] Université Rennes 1 - Hôpital Pontchaillou

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L’électrocardiogramme de l’athlète :particularités et limites

L’électrocardiogramme (ECG) de repos tient une place essentielle dans le bilan médicald’aptitude au sport de compétition.

Cette bradycardie peut également favoriserune activation ectopique.Des ondes P négati-ves dans les dérivations D2,D3,aVF suivies deQRS fins évoquent un rythme du sinus coro-naire. Si la forme de l’onde P varie sur unemême dérivation électrocardiographique,onparle d’un « pacemaker vagabond » (ou« wandering pace-maker » pour les anglo-saxons).Des complexes QRS fins non précé-dés d’ondes P correspondent à un rythme jonc-tionnel (fig.1).Enfin,des complexes QRS largesnon précédés d’ondes P signent un rythmeidioventriculaire.

Fig.1 :Alternance rythme sinusal etéchappement jonctionnel chez un cyclisteprofessionnel

Ces aspects disparaissent rapidement à l’effort,ce qui témoigne de leur bénignité.

On peut constater également l’existence d’ex-trasystoles supraventriculaires isolées,asymp-tomatiques.Elles disparaissent à l’effort et sontconsidérées comme bénignes.

Onde P L’élargissement et l’augmentation d’amplitu-de des ondes P ne sont pas significativementplus fréquents chez les jeunes sportifs que chezles sédentaires du même âge.Par contre,chezles coureurs de grand fond et les sportifs plusâgés, on retrouve souvent des critères d’hy-pertrophie auriculaire droite (voltage des ondesP > 2,5 mV) et gauche (élargissement des ondesP avec un aspect en double bosse).Ces parti-cularités électriques sont probablement enrapport avec la dilatation du massif auriculai-re fréquemment observée en échocardiogra-phie chez ce type de sujets.

Conduction auriculo-ventriculaire La conduction auriculoventriculaire correspondà l’intervalle de temps séparant l’activation auri-culaire de l’activation ventriculaire et est mesu-rée sur l’ECG par l’intervalle PR.

De par sa simplicité de réalisation et son coûtmodique,cet examen est couramment utiliséen consultation,permettant d’orienter les athlè-tes ayant des tracés pathologiques vers unbilan cardiologique complémentaire (épreu-ve d’effort, imagerie cardiaque, explorationsrythmologiques…).Sa réalisation est notam-ment obligatoire depuis avril 2000 pour lessportifs inscrits sur les listes de haut niveaupar leur fédération.Si l’ECG de repos est banal chez 50 à 55 % dessportifs,la pratique intensive et régulière d’unsport peut induire des modifications électro-cardiographiques significatives.Celles-ci n’ap-paraissent que chez des athlètes ayant un hautniveau d’entraînement avec au moins 8 à 10heures hebdomadaires à une intensité dépas-sant le seuil ventilatoire,soit au moins 70 à 75 %de la fréquence cardiaque maximale indivi-duelle.Il faut,bien sûr,éviter de déclarer inapte un athlè-te,avec toutes les conséquences qui en décou-lent,devant des particularités ECG secondairesà la pratique sportive.A l’opposé, il existe, lerisque de passer à côté d’une cardiopathiemenaçant le sportif en attribuant trop facile-ment des anomalies ECG à l’entraînement.Or,la mort subite du sportif est,dans plus de 90 %des cas,d’origine cardiovasculaire…

L’ECG de l’athlète :particularités

Rythme cardiaque Une bradycardie est fréquente bien quesouvent modérée (seuls 2 % des sportifs ontune bradycardie inférieure à 40 batte-ments/min).Elle est essentiellement observéechez les athlètes pratiquant un sport d’endu-rance. Cette bradycardie est principalementliée à une modification de la balance auto-nomique avec une hypervagotonie et une hypo-sympaticotonie.Corrélée avec le niveau d’en-traînement, elle peut être importante, avecparfois des valeurs inférieures à 30/min aurepos. Il s’agit, le plus souvent, d’une brady-cardie sinusale,avec une onde P positive quiprécède un complexe QRS.Malgré cette brady-cardie de repos, la fréquence cardiaque suitles variations physiologiques du rythme nycthé-méral avec une majoration de la bradycardiela nuit et des accélérations normales en pério-de de stress,en particulier lors des exercicesphysiques.

Fig.2 : Bradycardie sinusale à 37/min avec unBAV du premier degré (durée de PR à 320 ms)chez un marathonien.

Elle est plus fréquemment ralentie chez lessujets pratiquant assidûment des sports d’en-durance que chez les sédentaires.Ces modifi-cations, observées chez les sportifs au repos(fig.2),peuvent correspondre à un bloc auri-culo-ventriculaire (BAV) du premier degré(durée de PR > 0,20 secondes) voire à un BAVdu second degré de type Mobitz 1,encore appe-lé type Lucciani Wenckebach (allongementprogressif de l’intervalle PR jusqu’au blocaged’une onde P, c’est-à-dire une onde P isoléenon suivie de complexe QRS). Ces aspectsdisparaissent à l’effort.

Complexe QRS La conduction intraventriculaire correspondau temps de dépolarisation des ventricules etest mesurée par la durée des complexes QRS.Le bloc de branche droit incomplet (durée deQRS entre 0,10 et 0,11 secondes avec aspectRSR’dans les dérivations V1 ±V2 et une onde Sprofonde dans les dérivations D1 et aVL) estplus fréquent chez les sujets sportifs,et parti-culièrement chez ceux pratiquant des sportsd’endurance.Les critères électriques habituels d’hypertrophieventriculaire droite ou gauche (tels que l’indi-ce de Sokolow : amplitude de S en V1 + ampli-tude de R en V5 ou V6) sont peu sensibles et peuspécifiques chez le sédentaire et encore moinschez le sportif.En cas de signe ECG en faveurd’une hypertrophie ventriculaire gauche,il fauttoujours demander un bilan complémentaireavec une échocardiographie avant de se pronon-cer sur l’aptitude sportive de l’athlète.

Repolarisation L’intervalle QT peut être allongé chez certainssportifs présentant une bradycardie secondai-re à leur entraînement aérobie.Pour pouvoircomparer cet intervalle aux valeurs considé-rées comme normales, il existe des formulestenant compte de la fréquence cardiaque pourcalculer le QT corrigé (QTc).Cependant,cesformules ne sont pas exactes en cas de brady-cardie inférieure à 55/min.En pratique,on peutretenir que la valeur moyenne de QTc accep-tée chez le sportif est de 420 ms avec une valeurextrême de 470 ms.Au-delà de ces chiffres,unbilan spécialisé sera nécessaire.

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Une onde delta disparaissant brutalement(d’un battement sur l’autre) lors d’un test d’ef-fort plaide en faveur d’une période réfractai-re longue et, donc, d’un syndrome de Wolff-Parkinson-White peu dangereux.En l’absencede signe de bénignité, une étude électro-physiologique doit être réalisée pour mesurerla période réfractaire de la voie accessoire.Sicette période réfractaire est courte (corres-pondant à une perméabilité importante et àun risque de mort subite) ou si le sportif estgêné par de fréquentes crises de tachycardiepar réentrée, un traitement radical peut êtreproposé en réalisant une ablation endocavi-taire de la voie accessoire par radiofréquen-ce. Le sportif sera ensuite considéré commeguéri et l’aptitude à la compétition pourra êtredélivrée.

Complexe QRS Si le bloc de branche droit incomplet est banal,surtout chez les spécialistes d’endurance, lesautres types de bloc (blocs de branche completsdroit ou gauche avec une durée de QRS 0,12secondes,hémiblocs) ne font pas partie desparticularités du cœur du sportif.Leur décou-verte nécessite un bilan cardiologique pourrechercher une cardiopathie sous-jacente.Devant des ondes Q de nécrose (larges etamples) associées à des anomalies du segmentST (en particulier un sous-décalage),à des ondesT négatives et/ou à un bloc de branche gauche,il faudra évoquer une cardiomyopathie isché-mique.Elle touche préférentiellement des spor-tifs de plus de 35 ans,ayant des facteurs de risqued’athérosclérose,qu’ils soient asymptomatiquesou qu’ils décrivent un angor,voire une dyspnéed’effort.Dans ce cas de figure,on rechercheraune coronaropathie,soit par des méthodes noninvasives dans un premier temps (épreuve d’ef-fort, scintigraphie myocardique ou échocar-diographie de stress), soit d’emblée par unecoronarographie si la suspicion est forte.

D’autre part,on note souvent sur l’ECG des athlè-tes une élévation du point J (jonction entre lecomplexe QRS et le segment ST) avec un susdécalage du segment ST,le plus souvent conca-ve vers le haut,suivi d’une grande onde T posi-tive.Cet aspect est appelé syndrome de repola-risation précoce (fig.3).

Fig.3 :Aspect de repolarisation précoce chezun cycliste maillot jaune du tour de France

Les ondes T positives,qu’elles soient amples,aplaties ou déformées (aspect bifide positif endouble bosse) sont fréquemment rencontréeschez les sportifs pratiquant l’endurance, enparticulier lors des périodes d’entraînementintense.Certaines modifications sont peu inquiétantes.On peut notamment retrouver des ondes T platesou négatives dans les dérivations D2,D3,VF etV1 (l’onde T est toujours négative en VR).Il fautgarder en mémoire que,physiologiquement,chez l’enfant de moins de 11 ans, les ondes Tpeuvent être négatives en V1-V2- V3 et en V1-V2chez l’enfant de moins de 13-14 ans.Des ondesT négatives chez un adulte,dans d’autres déri-vations que celles précédemment citées, inci-tent,par contre,à compléter le bilan pour véri-fier l’absence de cardiopathie sous-jacente.Enfin,on peut fréquemment noter chez les spor-tifs une onde U qui suit l’onde T.

L’ECG de l’athlète : les limitesdu physiologique

Rythme cardiaqueEn dehors des extrasystoles auriculaires isolées,l’existence de troubles du rythme supraventri-culaires plus complexes (salves d’extrasystoles,tachycardies,accès de fibrillation auriculaire)nécessite un bilan cardiologique.La prévalence des arythmies ventriculaires chezles sportifs n’est pas supérieure à celles dessédentaires.Si des extrasystoles ventriculaires(ESV) asymptomatiques,disparaissant à l’effortsont moins inquiétantes que des ESV majoréespar l’effort, un bilan cardiologique complé-mentaire est nécessaire dans tous les cas avec,en première intention : épreuve d’effort,écho-cardiographie et Holter ECG.

Conduction auriculo-ventriculaire La découverte de BAV de haut degré tels queles BAV du second degré de type Mobitz 2(blocage occasionnel d’ondes P sans allon-

gement préalable de l’intervalle PR) et les BAVdu troisième degré (dissociation complète desondes P et des complexes QRS), doit fairesuspecter des troubles conductifs organiquessurajoutés à l’hypervagotonie et nécessite,même s’ils sont asymptomatiques, un bilancardiologique complémentaire.On peut également observer un syndrome deWolff-Parkinson-White qui est défini par l’as-sociation d’un raccourcissement de l’espacePR au-dessous de 0,12 seconde avec un empat-tement à l’origine du complexe QRS appeléonde « delta » (fig.4).Ces modifications ECGcorrespondent à l’existence d’une voie deconduction supplémentaire, appelée voieaccessoire ou faisceau de Kent, doublant lavoie de conduction normale entre le massifauriculaire et les ventricules.Ce syndrome peutêtre latent et découvert lors d’un ECG systé-matique ou bien être symptomatique,se tradui-sant par des crises de palpitations plus oumoins bien tolérées.Cette voie accessoire expo-se à 2 types de troubles du rythme.Il peut s’agirde crises de tachycardie par réentrée typemaladie de Bouveret,bénignes mais pouvantêtre invalidantes si le facteur déclenchant estl’effort.La voie accessoire peut également favo-riser un trouble du rythme plus grave,provo-qué par une fibrillation auriculaire paroxys-tique.L’influx électrique descend par la voieaccessoire,sans être ralenti par le nœud auri-culo-ventriculaire,accélère le rythme ventri-culaire à la fréquence des oreillettes, provo-quant une fibrillation ventriculaire,dégénérantrapidement en asystolie responsable d’unemort subite en l’absence de réalisation d’unchoc électrique externe.La mise en évidenced’un Syndrome de Wolff-Parkinson-White néces-site un bilan cardiologique complémentairepour évaluer la dangerosité de la voie acces-soire en appréciant sa perméabilité par voieantérograde (de l’oreillette vers le ventricule).

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Fig5 : Syndrome de Wolff-Parkinson-Whiteavec un PR court et une onde deltaélargissant le QRS

Fig.5 : Cardiomyopathie hypertrophique aveccritères d’HVG électrique et inversion desondes T chez un jeune footballeur

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Les critères électrocardiographiques d’hyper-trophie ventriculaire gauche sont nombreuxmais d’une fiabilité limitée dans ce domaine.La plupart sont calculés à partir de l’amplitu-de des complexes QRS dans certaines dériva-tions.L’indice de Sokolow-Lyon est le plus utili-sé en France.Malgré sa spécificité médiocre,si cet indice est supérieur à 35 mm,d’autantplus s’il est associé à des ondes Q de pseudo-nécrose et à une inversion des ondes T,il fautrechercher une cardiomyopathie hypertro-phique ou CMH (fig. 5). Cette pathologie estplus fréquente chez les sujets afro-américains.L’athlète,qui a parfois des antécédents fami-liaux de CMH ou de mort subite (transmissionautosomique dominante dans 50 % des cas),peut être asymptomatique ou décrire des symp-tômes souvent majorés par les efforts physiques(dyspnée,angor,palpitation,lipothymie,synco-pe).Toute suspicion ECG de CMH nécessiteune échocardiographie qui,si elle confirme lediagnostic de CMH (épaisseur des parois duventricule gauche supérieure aux valeursnormales), interdit la poursuite des activitéssportives intenses et de compétition du fait durisque de mort subite à l’effort.

Repolarisation :

Fig.6 : Syndrome de Brugada avec bloc debranche droit,élévation du point J et sus-décalage du segment ST de V1 à V3

Il faut penser à évoquer le syndrome deBrugada qui associe un bloc de branche droitavec une élévation du point J et un sus déca-lage du segment ST supérieur à 0,1 mV en V1,V2,V3 (fig.6). Cette pathologie, décrite pourla première fois en1986, se manifeste clini-quement par des syncopes à l’emporte-pièceou des morts subites survenant essentielle-ment en période vagale telle que les pério-des de récupération après un effort. Lespremiers symptômes surviennent en moyen-ne autour de 40 ans, et apparaissent plussouvent chez les hommes. Ils sont liés à destroubles du rythme ventriculaires secondai-res à un dysfonctionnement du canal sodiquedes cellules myocardiques .Le diagnostic est

parfois difficile car les signes ECG peuventêtre intermittents. Lorsque le syndrome estsuspecté,on réalise une exploration électro-physiologique avec injection d’une molécu-le bloquant le canal sodique.L’apparition oula majoration des anomalies électriques esten faveur du diagnostic. Cette pathologie,nécessitant souvent l’implantation d’un défi-brillateur automatique implantable, interditégalement la pratique sportive intense et decompétition.

Il faut également savoir reconnaître uneDysplasie Arythmogène du Ventricule Droit(DAVD) devant un potentiel de post-excita-tion après le QRS appelé onde « epsilon » avecun aspect de bloc de branche droit incom-plet et une inversion des ondes T dans lesprécordiales droites (fig.7).Cette pathologietouche préférentiellement les adultes de sexemasculin qui deviennent symptomatiques enmoyenne à l’âge de 20 ans avec des troublesdu rythme ventriculaire, notamment lors dela pratique sportive. Ces troubles du rythmeoccasionnent des palpitations, des lipothy-mies,des syncopes,voire une mort subite inau-gurale. Lorsqu’une DAVD est suspectée, unbilan à la fois rythmique et morphologique(recherche d’une infiltration adipeuse de laparoi du ventricule droit) est nécessaire pourconfirmer le diagnostic qui est une contre-indication définitive à la pratique sportiveintense et de compétition.Un traitement médi-camenteux,le plus souvent par béta-bloquant,est alors instauré et,dans les formes sévères,la pose d’un défibrillateur automatiqueimplantable (DAI) sous le muscle pectoral estnécessaire. L’implantation d’un DAI ne lèvepas l’inaptitude à la pratique sportive,en effetle DAI et ses sondes risquent d’être lésés lorsde la pratique sportive et l’effort peut égale-ment déclencher des orages rythmiques épui-sant rapidement la pile du DAI du fait dechocs électriques itératifs.

Comme nous l’avons vu précédemment, la

valeur du QT corrigé (QTc) acceptée chez lesportif est de 420 ms avec une valeur extrêmede 470 ms.Au-delà de cette limite,après avoiréliminé une prise médicamenteuse pouvantallonger le QT ou une anomalie ionique, unbilan rythmique et génétique doit rechercherun syndrome du QT long (Fig.8).Il s’agit d’uneanomalie génétique touchant le fonctionne-ment des canaux ioniques transmembranai-res des cellules myocardiques. Cette anoma-lie expose à un risque de mort subite par trou-ble du rythme ventriculaire sévère et contreindique les activités sportives.

Récemment, on a décrit le syndrome du QTcourt, anomalie génétique correspondant àun QTc inférieur à 300 ms avec une forte inci-dence de troubles du rythme ventriculairesévères.

Fig.8 : Syndrome du QT long

Conclusion L’électrocardiogramme de repos est unexamen de réalisation simple qui a, notam-ment dans le cadre des consultations d’apti-tude à la pratique sportive, un rôle de dépis-tage important.Son interprétation est le plussouvent simple. Des modifications ECGpeuvent être physiologiques chez l’athlète àpartir d’un certain niveau d’entraînement.Chez une minorité de sportifs, la limite estténue entre des modifications ECG liées à desadaptations physiologiques à l’effort et untracé orientant vers une cardiopathie sous-jacente.Un doute sur l’intégrité cardiovascu-laire de ces sujets n’étant pas acceptable, ilfaut savoir demander un avis spécialisé pourréaliser un bilan complémentaire et pouvoirstatuer sur l’aptitude sportive du sujet en s’ap-puyant sur un faisceau d’arguments cardio-logiques.

● L.CorneloupUnité de cardiologie du sport,clinique dusport de Bordeaux-Mérignac

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Fig.7 : Dysplasie Arythmogène du VentriculeDroit avec bloc incomplet droit,onde epsilonet inversion des ondes T de V1 à V3.

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La mort subite du sportif

La mort subite du sportif est un événement toujours choquant pour l’opinion publique.C’estun sentiment de surprise,voire d’injustice qui prédomine alors.Comment peut-on mouriralors que l’on était en « si bonne santé » pensent nos concitoyens qui assimilent sans granderestriction Sport et Santé ? Si,comme tout médecin du sport le sait, le risque zéro en lamatière n’existe pas, il convient pourtant de cerner du mieux possible ce dramatiqueproblème,d’autant que le discours médical, l’augmentation du temps libre, la pressionpublicitaire des équipementiers sont autant d’éléments qui mettent sur le « marché » duSport une population de plus en plus importante et de plus en plus âgée.

la matière,permet la plupart du temps d’asseoirdéfinitivement le diagnostic. Le ConseilGénétique,encore confidentiel,ne fournit pasune réponse claire et nette dans tous les cas.

La dysplasie arythmogène du ventricule droit La présence d’une plaque fibroadipeuse,aryth-mogène,prédominante au niveau du Ventriculedroit,reste de diagnostic délicat.L’ECG,commel’échocardiographie,ne sont pas toujours évoca-teurs.Il faut souvent le cumul de l’angio-scinti-graphie du Ventricule Droit,du scanner multi-barettes et de l’IRM myocardique pour appor-ter des certitudes.

L’anomalie de naissance des coronaires Indétectable par l’examen clinique et l’ECG derepos, le trajet anormal d’une coronaire n’estdépisté que dans un nombre insuffisant de caspar l’épreuve d’effort.L’échocardiographie peutêtre d’un apport interessant mais c’est le scan-ner cardiaque multibarrettes, encore confi-dentiel,qui semble être la technique de réfé-rence pour le dépistage.Malheureusement, lepremier symptôme est souvent la mort subiteelle-même.

Le commotio cordisSemble beaucoup plus fréquent outre-Atlantique.En rapport avec un impact direct surla zone cardiaque elle-même,en période vulné-rable de repolarisation,provoqué par un objetdense et arrivant à grande vitesse,comme unpalet de hockey sur glace ou une balle de base-ball,sports effectivement beaucoup plus répan-dus aux Etats-Unis qu’en Europe.

La MyocarditeEtiologie dont la prévalence est fort probable-ment sous-estimée.Un état inflammatoire dumyocarde, lors d’un épisode viral avec locali-sation myocardique, favorise la survenue detroubles du rythme ventriculaire à l’effort.D’oùles recommandations d’arrêt de toute activitésportive soutenue en période fébrile et dans lasemaine qui suit.

Chez les plus de 35 ans,outre les causes sus-citées,on retrouve évidemment au premier rangles décès en rapport avec le classique infarctusdu myocarde,d’origine athéroscléreuse cettefois-ci.Ce qui explique les recommandations habi-tuelles de bilan cardiologique incluant un testd’effort pour tout sujet de plus de 40 ans,prati-quant régulièrement le sport ou souhaitant débu-ter ou reprendre une activité physique intense.Il faudra être particulièrement vigilant chez lessujets sédentaires et/ou avec facteurs de risque.De même des pratiques très sollicitantes pourla sphère cardio-vasculaire parcequ’en atmos-phère hostile ( grand froid,grosses chaleurs,alti-tude,milieu sous-marin ) et/ou parce que néces-sitant d’importantes charges de travail ( Ultra-marathons,100 Km,raids,...) nécessiteront dessurveillances plus rapprochées.

EpidémiologieCe chapitre sera forcément très bref puisqu’en2005,aucun pays développé n’a encore été capa-ble de fournir des statistiques sérieuses sur laprévalence de la mort subite liée au sport .Seulsde rares travaux ont fourni des données partiel-les sur des tranches d’âge ciblées.Ainsi,desvaleurs de 1 décès/200 000 adolescents spor-tifs/an ou de 1décès/18 000 sportifs/an chez les25-75 ans ont été avancées.Mais il est clair que,pour des raisons méthodologiques,ces donnéessont loin d’être exhaustives et il est à l’heureactuelle impossible de comparer l’ampleur dece phénomène avec les morts au travail ou surla route qui,elles,font l’objet d’une comptabili-sation systématique.

Etiologies Chez les moins de 35 ans, les causes de mortsubite constituent une liste qui,de décennieen décennie,s’allonge.Ainsi, le syndrome deBrugada et,plus récemment,le QT court,sont

venus s’ajouter à la classique MyocardiopathieHypertrophique (MCH),à la dysplasie aryth-mogène du ventricule droit, à l’anomalie denaissance des coronaires,au QT long,au WolfParkinson White, au commotio cordis, à lamyocardite ou aux dissections aortiques(Marfan) déjà répertoriés au milieu desannées 90.La part respective de ces différentes étiologiesn’a bénéficié que de deux travaux sérieux,l’unaméricain,l’autre italien.Ces deux études appor-tent des résultats sensiblements différents.Cette divergence tient tout d’abord à la diffé-rence de méthodologie utilisée par les uns etles autres dans leur travail respectif.Les spécificités des équipes sont également encause : ainsi, il ne relève pas du simple hasardque Maron et ses collaborateurs,experts de laMCH,signalent cette pathologie comme premiè-re cause de mortalité,alors que Corrado et sonéquipe,éminents spécialistes de la dysplasiearythmogène du ventricule droit, retrouventcette dernière en tête des étiologies dans leurpopulation de morts subites.Pour finir,les populations étudiées ont un patri-moine génétique évidemment différent,avecune hétérogénéïté plus marquée dans le grou-pe américain, fruit du brassage de plusieurscolonies européennes saxonnes et latines,maiségalement de colonies afro-américaines et indo-américaines.Une troisième étude,menée en Chine ou enInde donnerait fort probablement des réparti-tions encore autres.

Les principales étiologies chez les moins de35 ans

La myocardiopathie hypertrophiqueD’origine génétique,avec un polymorphismeen cours d’évaluation, cette hypertrophie,souvent asymétrique,des parois du ventriculegauche peut apparaître parfois tard dans l’ado-lescence.L’interrogatoire recherchera la notionde mort subite chez des sujets jeunes dans lafamille.L’examen clinique peut objectiver unsouffle,mais c’est surtout l’ECG de repos qui,àpeu de frais,permet un dépistage très efficace.L’échocardiographie,examen de référence en

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hollandais, polonais ? Que l’Europe est enmarche…L’hormone de croissance favorise elle aussil’apparition de myocardiopathies sévères.N’oublions pas le Salbutamol qui peut avoirune action pro-arythmique lorsque consom-mée à fortes doses.Enfin, les diurétiques masquants, en têtedesquels on retrouve le furosémide,peuventgénérer, en cas d’hypokaliémie induite, destroubles du rythme létaux.

L’activité sportive intensive Le second grand point d’interrogation concer-ne le rôle que peut avoir une activité physiquerégulière et à haute intensité sur la survenued’accidents cardio-vasculaires aigus.En effet,le développement des centres de formation etdes filières Haut Niveau pour les adolescentsa amené une proportion non négligeable denotre jeune population sportive à soutenir desintensités de travail jamais atteintes jusqu’a-lors.Il en est de même pour la tranche des 20-35 ans pour lesquels l’escalade dans la prépa-ration physique est aussi une évidence,que lesport soit leur métier ou un simple hobby.Enfin,et cela touche plus au phénomène de socié-té, les quadra et quinqua,voire sexagénairessoutiennent maintenant des charges cardio-vasculaires très (trop ?) significatives,parfoisdans des conditions environnementales àrisque (plongée sous-marine,trek,altitude…).Ces lourdes charges de travail ont-elles des effetsdélétères sur le système cardio-vasculaire ? Laquestion mérite d’être posée.Souvenons-nousen effet des très nombreux asthmatiques dansles pelotons cyclistes qui faisaient sourire jusqu’àce que nos confrères pneumologues mettenten évidence de réelles atteintes de l’endothé-lium bronchique en rapport avec l’hyperdébitventilatoire que connaissent ces sportifs.Au niveau cardiaque,l’activité sportive est déjàconnue pour susciter des anomalies de réser-ve coronaire sur artère pathologique,des trou-bles ioniques induits par la déshydratation oudes effets pro-aggrégants très mal maîtrisés parles anti-aggrégants.Mais quelques hypothèsessupplémentaires peuvent être avancées :Ainsi, la modification parfois majeure de labalance sympathique peut favoriser la surve-nue de tachycardie ventriculaire en récupé-ration chez les sportifs porteurs d’un syndro-me de Brugada.De même,l’hypertrophie myocardique indui-te par l’activité sportive pourrait être suscepti-ble de comporter en son sein des micro zonesde fibrose arythmogène.Les catécholamines sont suspectées de facili-ter l’apparition de minimes zones de nécrosemyocardique,elles aussi arythmogènes.Il existe probablement des groupes génétiquesde sportifs dont le ventricule droit présente unseuil arythmique plus bas que d’autres en

condition de charge volumique intense etprolongée.Toutes ces questions et bien d’autres neconnaissent pas de réponse claire à l’heureactuelle,mais il est probable que les progrèsde la génétique et de l’immunohistochimieapporteront des éléments clés dans les annéesqui viennent.

Quelle prévention ?La lutte efficace contre la mort subite du spor-tif suppose des actions à plusieurs niveaux.

- Tout d’abord,un dépistage plus performant descardiopathies.Cela passe par des consultationsd’aptitude de qualité,avec interrogatoire orien-té,examen physique approfondi et réalisationsystématique d’un ECG de repos.Le test d’effortcardiologique doit également devenir une routi-ne à intervalle régulier chez les plus de 40 ansPar contre,l’échocardiographie,même si elle estprécieuse,ne peut pas trouver sa justificationmédico-économique en première intention.

- La population sportive doit être beaucoup plussensibilisée au caractère suspect des précor-dialgies,arythmies,palpitations et malaises àl’effort,même si un bilan préalable n’avait objec-tivé aucune anomalie.De même, les compor-tements à risque comme la cigarette avant ouaprès l’effort,le sport en période fébrile doiventêtre bannis.Une étude menée récemment mont-re que d’énormes progrès sont à accomplir dansce domaine,surtout chez les femmes et chezles sportifs ayant les plus grosses charges d’en-traînement.

- Les campagnes d’information contre le dopa-ge doivent se développer ,et ce,dès le plus jeuneâge puisque des études américaines mais égale-ment françaises objectivent des conduites addic-tives chez 10 à 15 % des adolescents sportifs.

- Enfin, la population sportive et son encadre-ment doivent bénéficier d’une formation effec-tive aux premiers soins d’urgence et à l’utilisa-tion du défibrillateur semi-automatique,straté-gie qui a déjà fait ses preuves dans d’autrescontextes.

Conclusion La mort subite du sportif relève donc d’un ensem-ble de mécanismes complexes,organiques et/oupharmacologiques,dont nous ne maîtrisons pastoujours les effets potentialisateurs.Cependant,une approche médicalisée de quali-té et des campagnes de sensibilisation cibléesdoivent permettre une diminution de ces évène-ments qui,s’ils sont relativement rares, restenttout de même,du fait du jeûne âge des victi-mes,coûteux en termes d’années de vie perdues.

● L.Chevalier Clinique du Sport Bordeaux-Mérignac

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Mais au-delà de la place respective de cestableaux nosologiques plus ou moins bien iden-tifiés, demeurent deux nébuleuses très malconnues et pourtant probablement à l’originede nombreux décès,à savoir le dopage et lapratique intensive et prolongée du sport.

Le dopageChapitre délicat à aborder de par l’infinie éten-due de nos ignorances…Ignorance vis à vis des substances utilisées,deleurs posologies du moment, de la quantitéglobale de produit absorbée et des différentesassociations ingurgitées.Aranesp,Pentohexal 300,PFOB,THG,RsR 13,Actovegin résonnent comme autant de gigan-tesques points d’interrogation pour les méde-cins du sport de terrain que nous sommes,d’autant que certaines de ces substances sonttoujours, à visée thérapeutique, en phase dedéveloppement chez l’être humain…Et même si le voile était levé,nous n’aurionspour autant à notre disposition aucune étuderandomisée,méthodologiquement solide,pourpréciser les conséquences rythmiques,vasospastiques ou thrombotiques de chaquesubstance en situation de grande sécrétioncatécholergique,de modification de la balan-ce sympathique,de poussée hypertensive oude déshydratation comme en connaissent lessportifs dans leurs activités habituelles.Revenons donc succintement sur le peu quenous connaissons tous.L’EPO et la surcharge en fer qui l’accompagnepeut générer des cardiomyopathies,vectricesde troubles du rythme dangereux. Elle peutégalement,de par l’augmentation de l’héma-tocrite, favoriser des thromboses artérielles,coronariennes ou cérébrales,mais aussi veineu-ses, avec son lot de phlébites et d’emboliespulmonaires.Les stéroïdes anabolisants prêtent à contro-verse quant à leurs responsabilités dans l’ap-parition d’hypertrophies pariétales du ventri-cule gauche.Mais leur influence sur l’appari-tion d’athérosclérose coronaire et de troublesdu rythme ventriculaire est établie.De même,les amphétamines,l’éphédrine et lacocaïne ont une responsabilité reconnue dansla survenue d’infarctus du myocarde et de trou-bles du rythme ventriculaire. Que dire alorsdes cocktails que sont les différents pots,belges,

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N° 17 - PAGE 10 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

La lettre de l’Observatoire du Mouvement est une publication de

L’Observatoire du Mouvement10 rue des Arts - BP38028 31080 Toulouse cedex 06

Téléphone : 05 61 25 87 24 - 06 26 36 81 71

Directeur de la publication : Etienne AndréConception et réalisation :

JB Conseil - 05 63 33 15 15Impression : SIA

N° ISSN : 1628-6898Dépôt légal : février 2006

L A L E T T R EProchain numéro de l’Observatoire du Mouvement :

Lettre n°18 : Traitement local

de l’arthrose

L E S I T E

www.observatoire-du-mouvement.com

Plus tard, c’est le Congrès National de la SociétéFrançaise de Médecine du Sport à Saint-Étienne endécembre, qui a également demandé aux cardiologuesdu sport de venir nous parler des nouvellesrecommandations et de l’électrocardiogramme dusportif. De nombreuses revues ont également consacrédes numéros à ce sujet, telles que Cardiologie Pratiquen°745 se poursuivant avec 3 articles de la revue n° 746 ettelles qu’un journal, peut être un peu plus grand public :Sport et Vie, qui a consacré tout un numéro spécial, leHors Série n° 23, au thème « Pour en finir avec les idéesreçues sur le cœur du sportif ». Nous espérons que les articles qui vont suivre, signés pardes grands spécialistes de la cardiologie du sport,participeront à éclairer vos idées sur le sujet.Ne manquez pas, par l’intermédiaire du site, de posertoutes les questions qui pourraient rester dans l’ombre. Enfin, n’oubliez pas non plus que le cœur est restélongtemps l’organe de base de la vie, que pour certains,c’est toujours le siège de l’amour est que cette lettreparaissant à une date très proche de la Saint Valentin,vous savez ce qu’il vous reste à faire.

Pr. Daniel Rivière

Conseil d’administrationPrésident : Christian MansatSecrétaire Général : Michel Mudet

Conseil scientifiquePPrrééssiiddeenntt :: Daniel RivièreSSeeccrrééttaaiirree :: Étienne AndréSScciieenncceess ffoonnddaammeennttaalleess :: Jean-Pierre Bali, DragoslavMitrovic, Jean-Pierrre Pujol, Pierre ValdiguiéTTrraauummaattoollooggiiee eett SSppoorrtt :: François Bonnel, Jean-PhilippeCahuzac, Michel Mansat, Pierre Mansat, Gérard SaillantMMééddeecciinnee pphhyyssiiqquuee RRéééédduuccaattiioonn:: Pierre ChâIImmaaggeerriiee :: Jean-Jacques RailhacHHéémmaattoollooggiiee :: Robert BierméGGyynnééccoollooggiiee :: Marie-Paule BersaniRRhhuummaattoollooggiiee :: Francis Blotman,, Bernard Fournié,Bernard Mazières, André Monroche, Jacques Rodineau,Éric VignonPPhhaarrmmaacciiee :: Christianne DupeyronPPooddoollooggiiee :: Isabelle Herbaux, Claude HuertasKKiinnééssiitthhéérraappiiee :: Alain LapêtrePPssyycchhiiaattrriiee :: Philippe MostGGéérriiaattrriiee :: Claude Jeandel, Yves RollandMMééddeecciinnee dduu SSppoorrtt :: Fabien Pillard, Daniel RivièreCCaarrddiioollooggiiee dduu SSppoorrtt :: Jacques Tricoire

Comment pratiquer une activité physique sans trop de risque pour sa santé ?

Après avoir éliminé les contre-indications possibles au cours d’un examen médical, une solutionest de « contrôler » son cœur pendant l’activité avec un cardiofréquencemètre et de se placer àune fréquence dite « cible », qui correspond à une puissance ou intensité d’exercice d’environ50 % de l’exercice maximal.

On peut, pour calculer cette puissance, utiliser la notion de réserve de fréquence cardiaque.Quand on veut faire un exercice à 100 % du maximal, la fréquence cardiaque va de la fréquencecardiaque de repos jusqu’à la fréquence cardiaque maximale. Celle-ci peut être donnée par larelation statistique : fréquence cardiaque maximale = 220 – l’âge en années. Ainsi, tout sujet peutcalculer sa réserve de fréquence cardiaque, qui est donc la fréquence cardiaque maximale – lafréquence cardiaque de repos. Pour travailler à 50 % de son « maximum », on a besoin de 50 % de sa fréquence cardiaque deréserve. On calcule donc ces 50 %, on rajoute la fréquence cardiaque de repos et on obtient lafréquence « cible » que l’on peut contrôler à l’aide du cardiofréquencemètre.

Prenons un exemple pour un sujet de 60 ans…

Sa fréquence cardiaque maximale théorique est de 220 – 60 = 160. Si ce sujet a une fréquencecardiaque de repos de 70, sa fréquence cardiaque de réserve ou réserve de fréquence cardiaqueest de 160 – 70 = 90, 50% de 90 = 45 ; la fréquence cardiaque de repos étant 70, 70+45 = 115.Lorsque le sujet travaille à une fréquence cardiaque de 115 batt/min, il travaille à 50 % de sa puis-sance maximale aérobie, un exercice qu’il peut faire longtemps sans danger pour sa santé, avecau contraire des avantages pour celle-ci. Il contrôlera cette fréquence cardiaque par un cardio-fréquencemètre, si possible avec une alarme haute qui se déclenchera quand la fréquencecardiaque la dépassera et une alarme basse qui se déclenchera quand la fréquence cardiaquedeviendra inférieure. Pour faire l’exercice à 115 batt/min, il faut régler l’alarme haute à 120, l’alar-me basse à 110 et il ne faut pas que cela sonne !!

Bon courage !

suite de la page 1 (Éditorial)

Opinion