L Affaire Dreyfus

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    La dgradation dAlfred Dreyfus, le 5 janvier 1895. Dessin d'Henri Meyeren couverture duPetit Journaldu 13 janvier 1895,

    lgend Le traitre 1.

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    Coll. part.

    Maximilian von Schwartzkoppen - Auguste MercierPhotographie Marius Neyroud Ordre des avocats de Paris - Le capitaineDreyfus lors du conseil de guerreL'illustration, n 2704, 22 dcembre 1894 Bibliothque de l'Assemble nationale

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    Notification de l'arrt du conseil de guerre Dessin de Germano d'Amato,L'illustration, n 2705, 29 dcembre 1894

    Bibliothque de l'Assemble nationale

    Le tratre. Dgradation d'Alfred Dreyfus Dessin d'Henri Meyer,Le Petit Journal illustr, n 217, 13 janvier 1895 Bibliothque de l'Assemble nationale

    Alfred Dreyfus dans sa cellule avant la dportation l'le du Diable Dessin de Lionel Royer,Le Petit Journal illustr, n 218,20 janvier 1895

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    Journal tenu par Alfred Dreyfus l'le du Diable. La publication en 1901 chez Eugne Fasquelle de Cinq annes de ma vie

    permet alors de relancer l'Affaire en vue d'obtenir justice. Bibliothque de l'Assemble nationale

    Alfred Dreyfus l'le du Diable. Dessin de F. Maulle.Le Petit Journal illustr, n 306, 27 septembre 1896 Bibliothque de l'Assemble nationale

    Bernard Lazare MAHJ Joseph Henry CMN mile Zola CMN Le lieutenant-colonel du Paty de Clam

    Francis de Pressens MAHJ Godefroy Cavaignac CMN Lucien Herr Centre d'histoire de Sciences Po, Archivesd'histoire contemporaine, fonds Lucien HerrAuguste Mercier Snat Le gnral Andr, Ministre de la guerre

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    Jeu de l'affaire Dreyfus et de la vrit Impression photomcanique, vers 1898 Bibliothque de l'Assemble nationale

    Photographie dubordereau date du 13 octobre 1894. L'original a disparu en 1940.

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    Le gnral Auguste Mercier, ministre de la Guerre en 1894Alphonse Bertillon n'est pas un expert en criture mais il invente la

    thorie de l'autoforgerie

    . Le commandant du Paty de Clam, chef d'enqute, procde l'arrestation du capitaine Dreyfus. Zurlinden

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    Une duPetit Journaldu 23 dcembre 1894 Une duPetit Journaldu 20 janvier 1895

    Une du Petit Journal du 27 septembre 1896 - Esterhazy

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    La case de Dreyfus sur l'le du Diable en Guyane

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    Le lieutenant-colonel Georges Picquart en tenue de chasseurs d'Afrique

    mile Zola en 1898 Portrait de Georges Clemenceau par le peintre Edouard Manet

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    Lieutenant-colonel Georges Picquart Photo Gerschel Photographie figurant dans l'ouvrage de Francis de Pressens, Un hros:

    le lieutenant-colonel Picquart. Bibliothque de l'Assemble nationale Bibliothque de l'Assemble nationale

    Jaccuse !... , lettre ouverte M. Flix Faure, prsident de la RpubliquePremire page deL'Aurore, 13 janvier 1898

    Bibliothque de l'Assemble nationale

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    la une deL'Aurore, J'accuse...! d'mile Zola

    Zola aux outrages, huile sur toile de Henry de Groux, 1898

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    meutes antismites dans une gravure duPetit Parisien. Les magistrats de la chambre criminelle dansLe Petit Journal

    Photographie anthropomtrique d'mile Zola au moment de ses procs

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    Photographie du faux Henry. L'entte (mon cher ami) et la signature (Alexandrine) sont de Panizzardi (quadrillage). Le reste est

    de la main d'Henry.

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    La Vrit sortant du puits Peinture d'Edouard Debat-Ponsan, muse de l'Htel de ville d'Amboise, dpt du muse d'Orsay Ville dAmboiseCaran d'Ache, Le Figaro, 14 fvrier 1898 Bibliothque de l'Assemble nationale

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    Port Haliguen Quiberon o Dreyfus dbarque en juin 1899.

    La dfense de Dreyfus Rennes : Edgar Demange et Fernand Labori

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    Le procs d'Alfred Dreyfus au Conseil de guerre de Rennes

    Nouvelle condamnation pourAlfred Dreyfus Le colonel Jouaust, prsident du Conseil de guerre, lit le verdict de condamnation, la une de l'hebdomadaireLe monde illustr.

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    Les obsques de Zola o Anatole France dit l'hommage son ami.

    Manuel Baudoin, procureur gnral au cur de la rhabilitation du capitaine Dreyfus Premire brochure de Bernard Lazare, Uneerreur judiciaire, publie en 1896 Bruxelles

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    L'ge du papier.Dessin de Flix Valloton,Le Cri de Paris, n 52, 23 janvier 1898.

    Gare la bombe ! Marianne.- Elle clatera, malgr ton vieux flair d'artilleur, tu l'as trop charge de sulfate de faux !Dessin de H.-G. Ibels,Le Sifflet, n 33, 15 septembre 1898 Bibliothque de l'Assemble nationale

    Ceci couvrira cela Dessin d'douard Couturier,Le Sifflet, n 19, 9 juin 1898 Bibliothque de l'Assemble nationale

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    Bagarre la Chambre des dputs,Le Petit Journal illustr, 6 fvrier 1898 Assemble nationale

    Le procs de M. mile Zola Les officiers leur sortie du palais de justice Dessin de Tony Beltrand,Le Petit Parisien illustr

    ,n472, 20 fvrier 1898 Bibliothque de l'Assemble nationale

    Le procs Zola, A bas Zola Dessin d'Hermann-Paul Assemble nationale

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    Le procs Zola, janvier 1898 Comme un seul homme... contre un seul homme Dessin d'Hermann-Paul Assemble nationale

    Ludovic Trarieux Bibliothque de l'Assemble nationale

    Arrestation du lieutenant-colonel Picquart Une duPetit Journal, 6 fvrier 1898 Bibliothque de l'Assemble nationale18 juillet 1898 : Zola est de nouveau condamn, cette fois par la cour d'assises de Seine-et-Oise.

    L'arrive de Zola, Labori, Clemenceau aux assises de Versailles

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    En voulez-vous des aveux ? En voil !!! Dessin d'douard Couturier,Le Sifflet, n 19, 9 juin 1898 Bibliothque de

    l'Assemble nationale

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    Avec celui-l au moins on est tranquille. Dessin d'Hermann-Paul Bibliothque de l'Assemble nationale

    Le 10 aot 1898, commence dansLa Petite Rpublique une srie d'articles, Les Preuves , Il marque un tournant de

    l'Affaire.Bibliothque de l'Assemble nationale

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    coll. Guy Crpin

    Le procs de Rennes : l 'arrive du dossier Alfred Dreyfus au procs de Rennes Dessin d'Hermann-Paul Bibliothque del'Assemble nationale

    Alfred Dreyfus devant le conseil de guerre de Rennes Protestation d'Alfred Dreyfus la fin de la dposition du gnral Mercier Bibliothque de l'Assemble nationale L'attentat contre Me Labori Dessin d'Eugne Damblans,Le Petit Journal illustr, n

    458, 27 aot 1899 Bibliothque de l'Assemble nationale

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    Vous trouvez que c'est long... mais on n'a pas encore le temps de trouver des preuves Dessin d'Hermann-Paul

    Bibliothque de l'Assemble nationale L'innocent Dessin d'Hermann-Paul Bibliothque de l'Assemble nationale

    Les tmoins dcharge : M. AndrLes tmoins dcharge : M. Trarieux

    Les experts : M. Bertillon

    Les gnraux : le gnral Deloye Les gnraux : le gnral de BoisdeffreLes savants : M. Painlev

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    Les ministres : M. de Freycinet Les ministres : M. Casimir-Perier

    Dessins d'Hermann-Paul Bibliothque de l'Assemble nationale

    Obsques d'mile Zola en prsence d'Alfred Dreyfus 5 octobre 1902 Archives du Panthon

    Jean Sarrienprsident du Conseil du 14 mars au 19 octobre 1906

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    Zola au Panthon Le dfil des troupes L'Assiette au Beurre n 374, 30 mai 1908

    Ce numro spcial a t prpar avant la crmonie de translation des cendres de Zola au Panthon.D'Ostoya reprsente le cortge des corps constitus : ministres, parlementaires, acadmiciens, militaires, membres des conseils

    de guerre et magistrats, au nombre des adversaires d'hier de Zola.Dreyfus est reprsent en uniforme d'aprs une photo de 1906, mme si celui-ci a depuis lors fait valoir ses droits la retraite

    et si c'est en civil qu'il assistera la crmonie.

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    Aprs la crmonie de la remise de la Lgion d'honneur l'cole militaire, le 21 juillet 1906 Photographie,La vie illustre, n

    406, 27 juillet 1906 Assemble nationale. Au centre, le capitaine Targe, enquteur et dcouvreur de nombreux faux. AlfredDreyfus en 1935, l'anne de sa mort.

    Bilan fin de sicle, caricature anti-rpublicaine parue dansLe Plerin en 1900 En famille de Flix Vallotton dansLe Cri de Paris.L'affaire Dreyfus coupe durablement la France en deux, jusque dans les familles.

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    Supplment illustr duPetit Journalen juillet 1898. La grande presse prend ses distances avec l'Affaire et observe le monde

    politique d'un il goguenard

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    La Revue blanche, revue des intellectuels dreyfusards partir de 1898.

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    Une presse antismite, violente, injurieuse, se manifeste tout au long de l'Affaire, dont le paroxysme est atteint en 1899, avec la

    rvision du procs Rennes.

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    La dgradation vue par l'hebdomadaireLe Monde Illustr en janvier 1895.

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    Caricature du quotidienLe Plerin. La presse catholique expose un engagement outrancier tout au long de l'Affaire.

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    La Libre parole d'douard Drumont

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    Affiche publicitaire du journalL'clairvers 1900

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    L'ge du papierparFlix Vallotton. Eau forte publie le 23 janvier 1898 dans le Cri de Paris.

    Theodor Herzl a cr le congrs sioniste suite l'affaire Dreyfus. Le Gnral Raoul Le Mouton de Boisdeffre artisan del'alliance militaire avec la Russie

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    Affaire DreyfusUn article de Wikipdia, l'encyclopdie libre.

    Laffaire Dreyfus est un conflit social et politique majeur de la Troisime Rpublique survenu la fin du XIXe sicle, autour delaccusation de trahison faite au capitaineAlfred Dreyfus, franais dorigine alsacienne et de confessionjuive, qui sera finalementinnocent. Elle a boulevers la socitfranaise pendant douze ans, de 1894 1906, la divisant profondment et durablement endeux camps opposs, les dreyfusards partisans de linnocence de Dreyfus, et les antidreyfusards partisans de sa culpabilit.La condamnation fin 1894 du capitaine Dreyfus pour avoir prtendument livr des documents secrets franais l Empireallemand tait une erreur judiciaire2,3 sur fond despionnage et dantismitisme, dans un contexte social particulirementpropice lantismitisme, et la haine de lEmpire allemand suite son annexion de lAlsace et dune partie de la Lorraine en1871. La rvlation de ce scandale en 1898, par mile Zola dans larticle de presse intitul JAccuse! , provoqua unesuccession de crises politiques et sociales uniques en France. son paroxysme en 1899, laffaire rvla les clivages de la Francede la Troisime Rpublique, o lopposition entre le camp des dreyfusards et celui des anti-dreyfusards suscita de trs violentespolmiques nationalistes et antismites, diffuses par unepresse influente. Elle ne sacheva vritablement quen 1906, par un arrtde la Cour de cassation qui innocenta et rhabilita dfinitivement Dreyfus. Cette affaire est le symbole moderne et universel deliniquit4 au nom de la raison dtat, et reste lun des exemples les plus marquants dune erreur judiciaire difficilement rpare,avec un rle majeur jou par la presse et lopinion publique.Rsum de l'affaire Dreyfus Article dtaill : Chronologie de l'affaire Dreyfus. la fin de l'anne 1894, le capitaine de l'armefranaise Alfred Dreyfus,polytechnicien, juif d'origine alsacienne, accus d'avoir livr aux Allemands des documents secrets, estcondamn aubagne perptuit pour trahison et dport sur l'le du Diable. cette date, l'opinion comme la classe politiquefranaise sont unanimement dfavorables Dreyfus. Certaine de l'incohrence de cette condamnation, la famille du capitaine,derrire son frre Mathieu, tente de prouver son innocence, engageant cette fin le journaliste Bernard Lazare. Paralllement, lecolonel Georges Picquart, chef du contre-espionnage, constate en mars1896 que le vrai tratre avait t le commandant FerdinandWalsin Esterhzy. L'tat-Majorrefuse pourtant de revenir sur son jugement et affecte Picquart en Afrique du Nord. Afin d'attirerl'attention sur la fragilit des preuves contre Dreyfus, sa famille contacte en juillet1897 le respect prsident du Snat AugusteScheurer-Kestnerqui fait savoir, trois mois plus tard, qu'il a acquis la conviction de l'innocence de Dreyfus, et qui en persuadegalement Georges Clemenceau, ancien dput et alors simple journaliste. Le mme mois, Mathieu Dreyfus porte plainte auprsdu ministre de la Guerre contre Walsin-Esterhzy. Alors que le cercle des dreyfusards s'largit, deux vnements quasisimultans donnent en janvier 1898 une dimension nationale l'affaire : Esterhzy est acquitt, sous les acclamations desconservateurs et des nationalistes ; mile Zola publie J'Accuse! , plaidoyer dreyfusard qui entrane le ralliement denombreux intellectuels. Un processus de scission de la France est entam, qui se prolonge jusqu la fin du sicle. Des meutesantismites clatent dans plus de vingt villes franaises. On dnombre plusieurs morts Alger. La Rpublique est branle,certains la voient mme en pril, ce qui incite en finir avec laffaire Dreyfus pour ramener le calme. Malgr les menes del'arme pour touffer cette affaire, le premier jugement condamnant Dreyfus est cass par la Cour de cassation au terme d'uneenqute minutieuse, et un nouveau conseil de guerre a lieu Rennes en 1899. Contre toute attente, Dreyfus est condamn unenouvelle fois, dix ans de travaux forcs, avec, toutefois, circonstances attnuantes. puis par sa dportation de quatre longuesannes, Dreyfus accepte la grce prsidentielle, accorde par le prsident mile Loubet. Ce n'est qu'en 1906 que son innocence estofficiellement reconnue au travers d'un arrt sans renvoi de la Cour de cassation5. Rhabilit, le capitaine Dreyfus est rintgrdans l'arme au grade de commandant et participe la Premire Guerre mondiale. Il meurt en 1935. Les consquences de cetteaffaire sont innombrables et touchent tous les aspects de la vie publique franaise : politique (elle consacre le triomphe de la IIIeRpublique, dont elle devient un mythe fondateur6 tout en renouvelant le nationalisme), militaire, religieux (elle ralentit la rformedu catholicisme franais, ainsi que l'intgration rpublicaine des catholiques), social, juridique, mdiatique, diplomatique etculturel (c'est l'occasion de l'affaire que le terme d'intellectuel est forg). L'affaire a galement un impact international sur lemouvement sioniste au travers d'un de ses pres fondateurs : Thodore Herzl et de par l'moi que ses manifestations antismitesvont provoquer au sein des communauts juives d'Europe centrale et occidentale.Confusions possibles Il ne faut pas confondre dreyfusards, dreyfusiens et dreyfusistes.

    Les dreyfusards sont les premiers dfenseurs de Dreyfus, ceux qui le soutiennent ds le dbut.

    Le terme dreyfusiste dsigne ceux qui rflchissent au-del de l'affaire et voient en celle-ci une ncessit de remettre encause la socit et la politique et, par extension, le fonctionnement de la Rpublique (certains dreyfusards furent parfoisaussi dreyfusistes par la suite).

    Quant aux dreyfusiens, ils n'apparaissent qu'en dcembre 1898, lorsque l'affrontement entre dreyfusards etantidreyfusards devient vraiment aigu et que l'affaire compromet la stabilit de la Rpublique. Les dreyfusiens, mme sicertains ont des sympathies pour Alfred Dreyfus, veulent liquider l'affaire en calmant le jeu, dans le but de sauver lergime rpublicain parlementaire alors en place. Ils sont l'origine d'une certaine conciliation entre les deux camps, grce un effort de mdiation, en prnant l'apaisement. Leur texte fondateur est L'Appel l'union , paru le 23janvier1899dans le journalLe Temps. Ils soutiennent gnralement la politique de Waldeck-Rousseau et prnent une lacisation de lasocit.

    Contextes de l'affaire DreyfusContexte politique rticle connexe : Antismitisme pendant la Troisime Rpublique. En 1894, la IIIe Rpublique est vieille devingt-quatre ans. Le rgime politique de la France vient d'affronter trois crises (leboulangisme en 1889, le scandale de Panam en

    1892, et la menace anarchiste, rduite par les lois sclrates dejuillet1894) qui n'ont fait que l'affermir. Les lections de 1893,centres sur la question sociale , ont consacr la victoire des rpublicains de gouvernements (un peu moins de la moiti dessiges) face la droite conservatrice, ainsi que la force des radicaux (environ 150 siges) et des socialistes (environ 50 siges).L'opposition des radicaux et des socialistes pousse gouverner au centre d'o des choix politiques orients vers le protectionnismeconomique, une certaine indiffrence la question sociale, une volont de briser l'isolement international, avec l'alliance russe etle dveloppement de l'Empire. Cette politique de centre provoque l'instabilit ministrielle, certains rpublicains de gouvernement

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    rejoignant parfois les radicaux, ou certains orlanistes rejoignant les lgitimistes, et cinq gouvernements se succdent de 1893 1896. Cette instabilit gouvernementale se double d'une instabilit prsidentielle : au prsident Sadi Carnot, assassin le 24juin1894, succde le modr Jean Casimir-Perierqui dmissionne le 15janvier1895 et est remplac parFlix Faure. Suite l'checdu gouvernement radical de Lon Bourgeois en 1896, le prsident nomme Jules Mline, homme du protectionnisme sous Ferry.Son gouvernement prend acte de l'opposition de la gauche et de certains rpublicains (l'Union progressiste notamment) et fait ensorte de toujours obtenir le soutien de la droite. Trs stable, il cherche apaiser les tensions religieuses (ralentissement de la lutteanticlricale), sociales (vote de la loi sur la responsabilit des accidents du travail) et conomiques (maintien du protectionnisme)en conduisant une politique assez conservatrice. C'est sous ce gouvernement stable qu'clate rellement l'Affaire Dreyfus7.Contexte militaire L'affaire Dreyfus se place dans le cadre de l'annexion de l'Alsace et de la Moselle, dchirure qui alimente tous

    les nationalismes les plus extrmes. La dfaite traumatisante de 1870 semble loin, mais l'esprit revanchard est toujours prsent. Denombreux acteurs de l'affaire Dreyfus sont d'ailleurs alsaciens8. Les militaires exigent des moyens considrables pour prparer leprochain conflit, et c'est dans cet esprit que l'alliance franco-russe, que certains considrent comme contre nature 9 du 27aot1892 est signe, sur la base d'une convention militaire. L'arme s'est releve de la dfaite, mais elle est encore en partie constitued'anciens cadres socialement aristocrates et politiquement monarchistes. Le culte du drapeau et le mpris de la Rpubliqueparlementaire sont deux principes essentiels l'arme de l'poque10. La Rpublique a beau clbrer son arme avec rgularit,l'arme ignore la Rpublique. Mais depuis une dizaine d'annes, l'arme connat une mutation importante, dans le double but de ladmocratiser et de la moderniser. Despolytechniciens concurrencent efficacement les officiers issus de la voie royale de Saint-Cyr, ce qui amne des dissensions, amertumes et jalousies parmi ceux des sous-officiers qui s'attendaient des promotions auchoix. La priode est aussi marque par une course aux armements qui touche principalement l'artillerie, avec desperfectionnements concernant l'artillerie lourde (canon de 120 court et de 155 court, Modles 1890 Baquet, nouveaux freinshydropneumatiques), mais aussi et surtout, la mise au point de l'ultra secret canon de 7511. Signalons ici le fonctionnement ducontre-espionnage militaire, alias Section de statistiques . Le Renseignement, activit organise et outil de guerre secrte, est

    une nouveaut de la fin du XIXe

    sicle. La Section de statistiques est cre en 1871 mais ne compte alors qu'une poigned'officiers et de civils. Son chef en 1894 est le lieutenant-colonel Jean Sandherr, saint-cyrien, alsacien de Mulhouse, antismiteconvaincu. Sa mission militaire est claire : rcuprer des renseignements sur l'ennemi potentiel de la France, et l'intoxiquer avecde fausses informations. La Section de statistiques est paule par les Affaires rserves du quai d'Orsay, le ministre desAffaires trangres, anime par un jeune diplomate, Maurice Palologue. La course aux armements amne une ambianced'espionnite aigu dans le contre-espionnage franais partir de 1890. Aussi, l'une des missions de la section consiste espionnerl'ambassade d'Allemagne, rue de Lille, Paris, afin de djouer toute tentative de transmission d'informations importantes cetadversaire. D'autant que plusieurs affaires d'espionnage avaient dj dfray la chronique d'une presse friande de ces histoiresmlant le mystre au sordide. Ainsi en 1890, l'archiviste Boutonnet est condamn pour avoir vendu les plans de l'obus lamlinite. L'attach militaire allemand Paris est en 1894 le comte Maximilien von Schwartzkoppen, qui dveloppe une politiqued'infiltration qui semble avoir t efficace. Depuis le dbut 1894, la Section de statistiques enqute sur un trafic de plans directeursconcernant Nice et la Meuse, men par un agent que les Allemands et les Italiens surnomment Dubois12. C'est ce qui l'amne auxorigines de l'affaire Dreyfus.

    Contexte social Le contexte social est marqu par la monte du nationalisme et de l'antismitisme. Cette croissance del'antismitisme, trs virulente depuis la publication de La France juive d'douard Drumont en 1886 (150 000 exemplaires lapremire anne), va de pair avec une monte du clricalisme. Les tensions sont fortes dans toutes les couches de la socit, attises par une presse influente et pratiquement libre d'crire et de diffuser n'importe quelle information, ft-elle injurieuse oudiffamatoire. Les risques juridiques sont limits si la cible est une personne prive. L'antismitisme n'pargne pas l'institutionmilitaire qui pratique des discriminations occultes. Jusque dans les concours, avec la fameuse cote d'amour , notationirrationnelle, dont Dreyfus a fait les frais l'cole d'application de Bourges13. Tmoin des fortes tensions de cette poque, la voguedu duel, l'pe ou au pistolet, provoquant parfois la mort d'un des deux duellistes. De brillants officiers juifs, atteints par unesrie d'articles de presse de La Libre Parole14, accuss de trahir par naissance , dfient leurs rdacteurs. Ainsi en est-il ducapitaine Cremieu-Foa, Juif alsacien et polytechnicien qui se bat sans rsultat. Mais le capitaine Mayer, autre officier juif, est tupar le marquis de Mors, ami de Drumont, dans un autre duel ; dcs qui dclenche une motion considrable, trs au-del desmilieux isralites. La haine des juifs est dsormais publique, violente, alimente par un brlot diabolisant la prsence juive enFrance qui ne reprsente alors que 80 000 personnes au plus en 1895 (dont 40 000 Paris), trs intgrs, plus 45 000 en Algrie.

    Le lancement de La Libre Parole, dont la diffusion estime est de 200 000 exemplaires15

    en 1892 permet Drumont d'largirencore son audience vers un lectorat plus populaire, dj tent par l'aventure boulangiste dans le pass. L'antismitisme diffus par La Libre Parole, mais aussi parL'clair, Le Petit Journal, La Patrie, L'Intransigeant, La Croix, en puisant dans les racinesantismites des milieux catholiques, atteint des sommets16. Article dtaill : Presse et dition dans l'affaire Dreyfus.Origines de l'affaire et le procs de 1894 l'origine : les faits d'espionnage L'origine de l'affaire Dreyfus, bien que totalement claircie depuis les annes 196017, a suscitde nombreuses controverses pendant prs d'un sicle. Il s'agit d'une affaire d'espionnage dont les intentions sont restes obscuresjusqu nos jours18. De nombreux historiens parmi les plus minents expriment plusieurs hypothses distinctes sur l'affaire19, maistous arrivent une conclusion unique : Dreyfus tait innocent de tout crime ou dlit. Article dtaill : Hypothses lies l'affaireDreyfus.Dcouverte du bordereau Les personnels du Service de Renseignements militaire (SR) ont affirm de manire constante 20 qu'enseptembre 1894, la voie ordinaire 21, avait apport22 au contre-espionnage franais une lettre, surnomme par la suite lebordereau . Cette lettre-missive, partiellement dchire en six grands morceaux23, crite sur du papier pelure, non signe et non

    date, tait adresse l'attach militaire allemand en poste lambassade dAllemagne, Max von Schwartzkoppen. Elle tablissaitque des documents militaires confidentiels, mais d'importance relative24, taient sur le point d'tre transmis une puissancetrangre.Recherche de l'auteur du bordereau Cette prise semble suffisamment importante pour que le chef de la Section destatistiques 25, le mulhousien26 Jean Sandherr, en informe le ministre de la Guerre, le gnralAuguste Mercier. Le SR souponne

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    en effet des fuites depuis le dbut de l'anne 1894, et recherche leur auteur. Le ministre, violemment attaqu dans la presse pourson action juge incomptente27, semble vouloir tirer parti de cette affaire pour rehausser son image28,29. Il diligenteimmdiatement deux enqutes secrtes, lune administrative et lautre judiciaire. Pour trouver le coupable, le raisonnement estsimple sinon grossier30 : le cercle de recherche est arbitrairement restreint un suspect en poste ou un ancien collaborateur ltat-Major, ncessairement artilleur31, et officier stagiaire32,33. Le coupable idal est identifi : le capitaine Alfred Dreyfus,polytechnicien et artilleur, de confession isralite et alsacien dorigine, issu de la mritocratie rpublicaine 34. Au tout dbut delaffaire, on insiste plutt sur les origines alsaciennes de Dreyfus que sur son appartenance religieuse. Celles-ci n'taient pourtantpas exceptionnelles, puisquon privilgiait les officiers de lest de la France pour leur double connaissance de la langue allemandeet de la culture germanique35,36. Mais lantismitisme, qui npargne pas les bureaux dtat-Major37, devient rapidement le centre

    de laffaire dinstruction, remplissant les vides dune enqute prliminaire incroyablement sommaire30

    . D'autant que Dreyfus tait ce moment-l le seul officier juif tant pass rcemment par l'tat-Major gnral. De fait, la lgende 38 du caractre froid etrenferm, voire hautain de lhomme, et de sa curiosit , jouent fortement contre lui. Ces traits de caractre, les uns faux, lesautres naturels, rendent plausibles toutes les accusations en transformant les actes les plus ordinaires de la vie courante dans unministre, en faits avrs despionnage. Ce dbut dinstruction partial et partiel amne une multiplication d'erreurs qui conduisentau mensonge dtat. Ceci au travers dune affaire o lirrationnel lemporte sur le positivisme pourtant en vogue cette poque39 : Ds cette premire heure sopre le phnomne qui va dominer toute laffaire. Ce ne sont plus les faits contrls, les chosesexamines avec soin qui forment la conviction ; cest la conviction souveraine, irrsistible, qui dforme les faits et les choses. Joseph ReinachExpertises en criture Pour confondre Dreyfus, les critures du bordereau et du capitaine sont compares. Personne nestcomptent en matire d'analyse d'critures ltat-Major40. Entre alors en scne le commandant du Paty de Clam41,42, hommeoriginal qui se pique dexpertise graphologique. Mis en prsence de lettres de Dreyfus et du bordereau le 5 octobre, du Patyconclut demble l'identit des deux critures. Aprs une journe de travail complmentaire, il assure dans un rapport que,

    malgr quelques dissemblances, les ressemblances sont suffisantes pour justifier une enqute. Dreyfus est donc l 'auteur probable du bordereau pour l'tat-Major43. Le gnral Mercier tenant un coupable, il met exagrment en valeur l'affaire, qui prend lestatut d'affaire d'tat pendant la semaine prcdant l'arrestation de Dreyfus. En effet, le ministre consulte et informe toutes lesautorits de l'tat44. Malgr les conseils de prudence45 et les objections courageusement exprims parGabriel Hanotaux lors d'unpetit conseil des ministres46, il dcide de poursuivre47. Du Paty de Clam est nomm officier de police judiciaire charg d'uneenqute officielle. Pendant ce temps plusieurs informations sont ouvertes paralllement, les unes sur la personnalit de Dreyfus,les autres consistant s'assurer de la ralit des identits d'criture. L'expert48 Gobert n'est pas convaincu, trouve de nombreusesdiffrences et crit mme que la nature de l'criture du bordereau exclut le dguisement graphique49 . Du, Mercier fait alorsappel Alphonse Bertillon, l'inventeur de l'anthropomtrie judiciaire, mais nullement expert en critures. Il n'est d'abord pas plusaffirmatif que Gobert, en n'excluant pas une copie de l'criture de Dreyfus 50. Mais par la suite, sous la pression des militaires51, ilaffirme que Dreyfus s'est autocopi et dveloppe sa thorie de l' autoforgerie .L'arrestation Le 13 octobre, sans aucune preuve tangible et avec un dossier vide, le gnral Mercier fait convoquer le capitaineDreyfus pour une inspection gnrale, en tenue bourgeoise , c'est--dire en civil. L'objectif de l'tat-Major est de gagner la

    preuve parfaite en droit franais : l'aveu. Cet aveu serait obtenu par effet de surprise, en faisant crire une lettre inspire dubordereau52 au coupable53 sous la dicte. Le 15octobre1894 au matin, le capitaine Dreyfus subit cette preuve, mais n'avoue rien.Du Paty tente mme de lui suggrer le suicide en plaant un revolver devant Dreyfus, mais l'accus refuse d'attenter ses jours,affirmant qu'il veut vivre afin d'tablir son innocence . L'espoir des militaires est du. Du Paty de Clam fait tout de mmearrter le capitaine54 et l'inculpe d'intelligence avec l'ennemi afin qu'il soit traduit devant un Conseil de guerre. Dreyfus estincarcr laprison du Cherche-midi Paris55.L'instruction et le premier Conseil de guerre Mme Dreyfus est informe de l'arrestation le jour mme, par une perquisition del'appartement du jeune couple. Elle est terrorise par du Paty qui lui ordonne de garder le secret sur l'arrestation de son mari, et luiaffirme mme : Un mot, un seul mot et c'est la guerre europenne ! 56. En toute illgalit57, Dreyfus est mis au secret dans saprison, o Du Paty l'interroge jour et nuit afin d'obtenir des aveux, ce qui choue. Le capitaine est soutenu moralement par lepremier dreyfusard : le commandant Forzinetti, commandant les prisons militaires de Paris55. Le 29 octobre, l'affaire est rvlepar le journal antismite d'douard Drumont,La Libre Parole , dans un article qui marque le dbut d'une trs violente campagnede presse jusqu'au procs. Cet vnement place l'Affaire sur le terrain de l' antismitisme, qu'elle ne quitte plus jusqu sa

    conclusion dfinitive58. Le 1er novembre, Mathieu Dreyfus, le frre d'Alfred, appel d'urgence Paris, est mis au courant del'arrestation. Il devient l'artisan du combat difficile pour la libration de son frre59. Sans attendre, il se met la recherche d'unavocat, et retient l'minent60 pnaliste Edgar Demange.L'instruction Le 3 novembre, contre-cur61, le gnral Saussierdonne l'ordre d'informer. Il a tous les pouvoirs pour arrter lamachinerie, mais il ne le fait pas, peut-tre par confiance exagre en la justice militaire62. Le commandant Bessond'Ormescheville, rapporteur auprs du Conseil de guerre, rdige un rapport charge dans lequel les lments moraux del'accusation (qui vont de ragots concernant les murs de Dreyfus et sa prtendue frquentation de cercles-tripots saconnaissance de l'allemand63 et sa mmoire remarquable ) sont dvelopps bien plus longuement que les lments matriels64, dont la raret mme sert la charge : c'est une preuve de culpabilit, car Dreyfus a tout fait disparatre . Le manquecomplet de neutralit de l'acte d'accusation conduit mile Zola le qualifier de monument de partialit65 . Le 4 dcembre, avecce dossier vide, Dreyfus est renvoy devant le premier Conseil de guerre. Le secret est lev et Me Demange peut pour la premirefois accder au dossier. Aprs sa lecture, la confiance de l'avocat, qui a pu constater le nant du dossier d'instruction, est absolue66.L'accusation ne repose en effet que sur l'criture d'une pice unique, le bordereau, propos de laquelle les experts se contredisent,

    et sur de vagues tmoignages indirects.Le procs : Le huis clos ou la guerre ! 67Pendant les deux mois prcdant le procs, la presse se dchane. La Libre Parole,

    L'Autorit, Le Journal, Le Temps racontent toute la vie suppose de Dreyfus au travers de mensonges et de mauvais romans68.C'est aussi l'occasion pour les titres extrmistes comme La Libre Parole ou La Croix, de justifier leurs campagnes pralablescontre la prsence de Juifs dans l'arme, sur le thme On vous l'avait bien dit ! 69. Cette priode longue est surtout le moyen

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    pour l'tat-Major de prparer l'opinion et de faire pression indirectement sur les juges 70. Ainsi le 8 novembre, le gnral Mercierva jusqu dclarer Dreyfus coupable dans une interview auFigaro71. Lui rplique le 29 novembre un article d'Arthur Meyerdans

    Le Gaulois, dans lequel est condamn le rquisitoire fait contre Dreyfus et demand : Quelle libert restera-t-il au Conseil deGuerre appel juger ce prvenu72 ? . Des joutes d'ditorialistes ont lieu au sein d'un large dbat propos de la question du huisclos. Pour Ranc et Cassagnac qui reprsentent la majorit de la presse, le huis clos est une manuvre basse dans le but depermettre l'acquittement de Dreyfus, car le ministre est un lche . La preuve c'est qu'il rampe devant les Prussiens enacceptant de publier des dmentis de l'Ambassadeur d'Allemagne Paris73. Mais pour d'autres journaux, comme L'clairdu 13dcembre, le huis clos est ncessaire pour viter un casus belli , alors que pour Judet dansLe Petit Journaldu 18, le huis closest notre refuge inexpugnable contre l'Allemagne ou le Chanoine deLa Croix du mme jour, il faut le huis clos le plus absolu

    74

    . Le procs s'ouvre le 19 dcembre treize heures75

    , le huis clos76

    tant presque immdiatement prononc. Ce huis clos n'estd'ailleurs pas conforme juridiquement puisque le commandant Picquart et le prfet Louis Lpine sont prsents certainesaudiences en violation du droit, mesure qui permet nanmoins aux militaires de ne pas divulguer le nant du dossier au grandpublic77 et d'touffer les dbats78. Conformment aux prvisions, le vide du dossier apparat nettement pendant les audiences. Lesdiscussions de fond sur le bordereau montrent que le capitaine Dreyfus ne pouvait pas en tre l'auteur79,80. D'autre part, l'accuslui-mme clame son innocence, et se dfend point par point avec nergie et logique81. Au surplus, ses dclarations sont appuyes par une dizaine de tmoignages dcharge. Enfin l'absence de mobile pour le crime est une srieuse pine dans le dossierd'accusation. Dreyfus tait en effet un officier trs patriote et trs bien not par ses chefs, et surtout trs riche 82, il n'avait doncaucune raison tangible de trahir. La justification par la judit de Dreyfus, seule retenue par la presse de droite, ne saurait pourtantl'tre par un tribunal. Alphonse Bertillon, qui n'est pas expert en critures, est prsent comme un savant de premire importance.Il avance la thorie de l'autoforgerie l'occasion de ce procs et accuse Dreyfus d'avoir imit sa propre criture, expliquant lesdiffrences graphiques par l'emploi d'extraits de l'criture de son frre Mathieu et de son pouse Lucie. Cette thorie, bien queconsidre plus tard comme farfelue et sidrante83 semble avoir un certain effet sur les juges. De plus, le commandant Hubert-

    Joseph Henry84

    fait une dclaration thtrale85

    en pleine audience. Il affirme qu'une suspicion de fuites existait depuis le mois defvrier 1894 propos d'une trahison l'tat-Major et qu'une personne honorable accusait le capitaine Dreyfus. Il jure surl'honneur que le tratre est Dreyfus, en dsignant le crucifix accroch au mur du tribunal86. Dreyfus sort de ses gonds et exiged'tre confront son accusateur anonyme, ce qui est refus par l'tat-Major. L'incident a un effet incontestable sur la Cour,compose de sept officiers qui sont la fois juges et jurs. Toutefois, l'issue du procs est incertaine. La conviction des juges a tbranle par l'attitude ferme et les rponses logiques de l'accus87. Les juges partent dlibrer. Mais l'tat-Major a encore unecarte en main pour faire pencher la balance dfinitivement contre Dreyfus.Transmission d'un dossier secret aux magistrats Les tmoins militaires du procs alertent le commandement sur les risquesd'acquittement. Dans cette ventualit, la Section de statistiques avait prpar un dossier, contenant, en principe, quatre preuves absolues de la culpabilit du capitaine Dreyfus, accompagnes d'une note explicative. Le contenu de ce dossier secret estincertain encore de nos jours, car aucune archive dressant la liste des pices ne nous est parvenue. Des recherches rcentes 88indiquent l'existence d'une numrotation induisant la prsence d'une dizaine de documents. Parmi ceux-ci, des lettres caractrerotico-homosexuel (Lettre Davignon entre autres) posent la question des mthodes d'intoxication du Service de statistiques et de

    l'objet de ce choix documentaire. Le dossier secret est remis au dbut du dlibr, en toute illgalit, au prsident du Conseil deguerre le colonel milien Maurel, sur ordre du ministre de la Guerre, le gnral Mercier89. Plus tard, au procs de Rennes de 1899,le gnral Mercier a expliqu que la nature mme des pices soumises interdisait leur divulgation dans l'enceinte du tribunal90. Cedossier contenait, outre des lettres sans grand intrt, dont certaines taient truques91, une pice reste clbre sous le nom de Canaille de D . C'tait une lettre de l'attach militaire allemand, Max von Schwartzkoppen l'attach militaire italienAlessandro Panizzardi intercepte par le SR. La missive tait cense accuser dfinitivement Dreyfus, puisque d'aprs sesaccusateurs, il tait dsign par l'initiale de son nom92. En ralit, la Section de statistiques savait que la lettre ne pouvait pas treattribue Dreyfus, et si elle le fut, ce fut par intention criminelle93. Le colonel Maurel a affirm au second procs Dreyfus94 queles pices secrtes n'avaient pas servi emporter l'adhsion des juges du Conseil de guerre. Mais il se contredit en affirmant qu'il alu un seul document, ce qui fut suffisant .Condamnation, dgradation et dportation Le 22 dcembre, aprs plusieurs heures de dlibration, le verdict tombe. l'unanimit des sept juges, Alfred Dreyfus est condamn pourtrahison la destitution de son grade, la dgradation militaire, et la dportation perptuelle dans une enceinte fortifie , c'est--dire aubagne en Guyane. Dreyfus n'est pas condamn mort,

    celle-ci ayant t abolie pour les crimes politiques depuis 1848. Pour les autorits, la presse et le public, les quelques doutesd'avant procs sont dissips. La culpabilit est certaine ; droite comme gauche, on regrette l'abolition de la peine de mort pourcrime de trahison, et on rappelle qu'il aurait pu tre condamn celle-ci en vertu de l'art. 76 du Code de justice militaire, qui taitalors frquemment appliqu. L'antismitisme atteint des sommets dans la presse et se manifeste dans des populations jusquprsent pargnes95. Jean Jaurs regrette la douceur de la peine dans une adresse la Chambre, et crit : un troupier vient d'trecondamn mort et excut pour avoir lanc un bouton au visage de son caporal. Alors pourquoi laisser ce misrable tratre en vie? Clemenceau, dansLa Justice, fait une remarque similaire96. Le 5janvier1895, la crmonie de la dgradation se droule dansla Cour Morlan de l'cole militaire Paris : alors que les tambours roulent, Dreyfus est accompagn par quatre artilleurs quil'amnent devant un huissier qui lui lit le jugement. Un adjudant de la Garde rpublicaine lui arrache les insignes, les fines laniresd'or de ses galons, les parements des manches et de la veste. Les tmoins signalent la dignit de Dreyfus, qui continue de clamerson innocence tout en levant les bras : Innocent, Innocent ! Vive la France ! Vive l'Arme . L'adjudant brise le sabre ducondamn sur son genou puis Dreyfus dfile au ralenti devant ses anciens compagnons 97. Un vnement, que l'on surnomme lalgende des aveux 98, s'est droul avant la dgradation. Dans le fourgon qui l'amenait l 'cole militaire, Dreyfus aurait confi sa

    tratrise au capitaine Lebrun-Renault99. Il apparat qu'en ralit, le capitaine de la Garde rpublicaine s'tait vant et que Dreyfusn'avait fait aucun aveu100. Du fait de la nature de l'affaire, touchant la scurit nationale, le prisonnier est mis au secret dans unecellule en attendant son transfert. Le 17 janvier, il est transfr au bagne de l'le de R, o il est maintenu plus d'un mois. Il a ledroit de voir sa femme deux fois par semaine, dans une salle allonge, chacun un bout, le directeur de la prison au milieu 101. Le21 fvrier, il embarque sur le vaisseau Ville-de-Saint-Nazaire. Le lendemain, le navire fait cap vers la Guyane. Le 12 mars, aprs

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    une traverse pnible de quinze jours, le navire mouille au large des les du Salut. Dreyfus reste un mois au bagne de l'le Royale,puis il est transfr l'le du Diable le 14 avril. Avec ses gardiens, il est le seul habitant de l'le, logeant dans une case de pierre dequatre mtres sur quatre102. Hant par le risque de l'vasion, le commandant du bagne fait vivre un enfer au condamn alors queles conditions de vie sont dj trs pnibles103. Dreyfus tombe malade, secou par les fivres qui s'aggraveront d'anne enanne104. Dreyfus est autoris crire sur un papier numrot et paraph. Il subit la censure du commandement de mme quelorsqu'il reoit du courrier de sa femme Lucie, par lequel ils s'encouragent mutuellement. Le 6septembre1896, les conditions devie d'Alfred Dreyfus s'aggravent encore : il est mis la double boucle, supplice obligeant le forat rester sur son lit, immobile,les chevilles entraves. Cette mesure est la consquence de la fausse information de son vasion, rvle par un journal anglais.Pendant deux longs mois, elle plonge Dreyfus dans un profond dsespoir. ce moment, il est persuad que sa vie s'achvera sur

    cette le lointaine105

    .La Vrit en marche (1895-1897)La famille Dreyfus dcouvre l'affaire et agit Mathieu Dreyfus, le frre an d'Alfred Dreyfus, est convaincu de l'innocence ducondamn. Il est le premier artisan de la rhabilitation de son frre, et passe tout son temps, toute son nergie et sa fortune rassembler autour de lui un mouvement de plus en plus puissant en vue de la rvision du procs de dcembre 1894, malgr lesdifficults de la tche106 : Aprs la dgradation, le vide se fit autour de nous. Il nous semblait que nous n'tions plus des trescomme les autres, que nous tions comme retranchs du monde des vivants107. Mathieu essaie toutes les pistes, y compris lesplus tonnantes. Ainsi, grce au docteur Gibert, ami du prsident Flix Faure, il rencontre au Havre une femme qui, sous hypnose,lui parle pour la premire fois d'un dossier secret 108,109. Le fait est confirm par le prsident de la Rpublique au docteur Gibertdans une conversation prive. Petit petit, malgr les menaces d'arrestation pour complicit, les filatures, les piges tendus par lesmilitaires110, il russit convaincre divers modrs. Ainsi, le journaliste libertaireBernard Lazare se penche sur les zones d'ombrede la procdure. En 1896, Lazare publie Bruxelles le premier opuscule dreyfusard111. Cette publication n'a que peu d'influencesur le monde politique et intellectuel, mais elle contient tant de dtails que l'tat-Major suspecte le nouveau chef du SR, Picquart,

    d'en tre responsable. La campagne en faveur de la rvision, relaye petit petit dans la presse de gauche antimilitariste112

    ,dclenche en retour une vague d'antismitisme trs violente dans l'opinion. La France reste alors trs majoritairementantidreyfusarde. Le commandant Henry, la Section de statistiques, est de son ct conscient de la fragilit du dossierd'accusation. la demande de sa hirarchie, le gnral de Boisdeffre, chef d'tat-Major gnral, et le gnral Gonse, il est chargde faire grossir le dossier afin d'viter toute tentative de rvision. Incapable de trouver la moindre preuve, il dcide d'en fabriquerune a posteriori.La dcouverte du vrai coupable : Picquart passe l'ennemi Le vrai coupable de la trahison est dcouvert par hasard dedeux manires distinctes ; par Mathieu Dreyfus d'une part, en recueillant la dnonciation du banquier Castro, et par le SR d'autrepart, la suite d'une enqute. Le colonel Sandherr tant tomb malade, le lieutenant-colonel Georges Picquart est affect la ttedu SR en juillet 1895. En mars1896, Picquart, qui avait suivi laffaire Dreyfus ds son origine113, exige dsormais de recevoirdirectement les documents vols l'ambassade d'Allemagne, sans intermdiaire114. Il y dcouvre un document surnomm le petitbleu : une carte tlgramme, jamais envoye, crite par von Schwartzkoppen et intercepte lambassade dAllemagne dbutmars 1896115. Celle-ci est adresse un officier franais, au commandant Walsin-Esterhzy, 27 rue de la Bienfaisance - Paris116.

    Par ailleurs, une autre lettre au crayon noir de von Schwartzkoppen dmontre les mmes relations d'espionnage avec Esterhazy117

    .Mis en prsence de lettres de cet officier, Picquart s'aperoit avec stupfaction que son criture est exactement la mme que celledu bordereau qui a servi incriminer Dreyfus. Il se procure le dossier secret remis aux juges en 1894, et devant sa vacuit,acquiert la certitude de linnocence de Dreyfus. Trs mu par sa dcouverte, Picquart diligente une enqute en secret, sans l'accordde ses suprieurs118. Elle dmontre qu'Esterhzy avait connaissance des lments dcrits par le bordereau et qu'il tait bien encontact avec l'ambassade d'Allemagne119. Il est tabli que l'officier vendait aux Prussiens de nombreux documents secrets dont lavaleur tait cependant assez faible120. Ferdinand Walsin Esterhazy est un ancien membre du contre-espionnage franais121 o ilavait servi aprs la Guerre de 1870. Il avait travaill dans le mme bureau que le commandant Henry de 1877 1880122. Homme la personnalit trouble, la rputation sulfureuse123, cribl de dettes, il est pour Picquart, un tratre probable anim par un mobilecertain : l'argent. Picquart communique alors les rsultats de son enqute l'tat-Major, qui lui oppose l'autorit de la chosejuge . Dsormais, tout est fait pour l'vincer de son poste, avec l'aide de son propre adjoint le commandant Henry. Il s'agit avanttout, dans les hautes sphres de l'Arme, de ne pas admettre que la condamnation de Dreyfus puisse tre une grave erreurjudiciaire. Pour Mercier, puis Zurlinden, et l'tat-Major, ce qui est fait est fait, on ne revient jamais en arrire124. Il convenait alors

    de sparer les affaires Dreyfus et Esterhzy.La dnonciation de Walsin-Esterhzy et les progrs du dreyfusisme La presse nationaliste lance une violente campagne contrele noyau dur naissant des dreyfusards. En contre-attaquant, l'tat-Major se dcouvre et rvle des informations, ignores jusque-l,sur le dossier secret 125. Le doute commence s'installer et des figures des milieux artistiques et politiques s'interrogent 126.Picquart tente de convaincre ses chefs de ragir en faveur de Dreyfus, mais l'tat-Major semble sourd. Une enqute est instruitecontre lui, il est surveill, loign dans l'Est, puis mut en Tunisie dans l'intrt du service 127. C'est le moment que choisit lecommandant Henry pour passer l'action. Le 1ernovembre1896, il fabrique un faux, le faux Henry 128, en conservant l'entteet la signature129 d'une lettre quelconque de Panizzardi, en rdigeant lui-mme le texte central : J'ai lu qu'un dput va interpeller sur Dreyfus. Si on demande Rome nouvelles explications, je dirai que jamais j'avais lesrelations avec ce Juif. C'est entendu. Si on vous demande, dites comme a, car il ne faut pas que on sache jamais personne ce quiest arriv avec lui. C'est un faux assez grossier. Les gnraux Gonse et Boisdeffre, sans se poser de questions, amnent cependant la lettre leurministre le gnral Billot. Les doutes de l'tat-Major concernant l'innocence de Dreyfus s'envolent130. Fort de cette trouvaille,

    l'tat-Major dcide de protger Esterhzy et de perscuter131 le colonel Picquart, qui n'a rien compris . Picquart, qui ignore toutdu faux Henry, se sent rapidement isol de ses collgues militaires. Littralement accus de malversations par le commandantHenry132, il proteste par crit et rentre Paris. Picquart se confie son ami, l'avocat Louis Leblois, qui il fait promettre le secret.Ce dernier en parle pourtant au vice-prsident du Snat, l'alsacien Auguste Scheurer-Kestner, lequel est son tour touch par ledoute. Sans citer Picquart, le snateur rvle l'affaire aux plus hautes personnalits du pays. Mais l'tat-Major souponne quand

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    mme Picquart d'tre l'origine des fuites. C'est le dbut de l'affaire Picquart133, une nouvelle conspiration de l'tat-Major contrel'officier.Le commandant Henry, pourtant adjoint de Picquart, mais jaloux134, mne de son propre chef, une opration d'intoxication afin decompromettre son suprieur. Il se livre diverses malversations (fabrication d'une lettre le dsignant comme linstrument du syndicat juif voulant faire vader Dreyfus, truquage du petit bleu pour faire croire que Picquart a effac le nom du reldestinataire, rdaction d'un courrier nommant Dreyfus en toutes lettres). Paralllement aux investigations du colonel Picquart, lesdfenseurs de Dreyfus sont informs de l'identit de l'criture du bordereau avec celle d'Esterhzy en novembre 1897. MathieuDreyfus avait fait afficher la reproduction du bordereau, publie parLe Figaro. Un banquier, Castro, identifie formellement cettecriture comme celle du commandant Walsin-Esterhzy, son dbiteur, et prvient Mathieu. Le 11novembre1897, les deux pistes

    se rejoignent, l'occasion d'une rencontre entre Scheurer-Kestner et Mathieu Dreyfus. Ce dernier obtient enfin la confirmation dufait qu'Esterhzy est bien l'auteur du bordereau. Le 15 novembre, sur ces bases, Mathieu Dreyfus porte plainte auprs du ministrede la Guerre contre Walsin-Esterhzy135. La polmique tant publique, l'arme n'a plus d'autre choix que d'ouvrir une enqute. Fin1897, Picquart, revenu Paris, fait connatre publiquement ses doutes sur la culpabilit de Dreyfus, du fait de ses dcouvertes. Lacollusion destine liminer Picquart semble avoir chou136. La contestation est trs forte et vire l'affrontement. Afin dediscrditer Picquart, Esterhzy envoie sans effet des lettres de plainte au Prsident de la Rpublique137. Le mouvement ditdreyfusard, anim par Bernard Lazare, Mathieu Dreyfus, Joseph Reinach et Auguste Scheurer-Kestner s'largit138. mile Zola,inform mi-novembre 1897 par Scheurer-Kestner du dossier, est convaincu de l'innocence de Dreyfus et s'engageofficiellement139. Le 25 novembre, le romancier publie M. Scheurer-Kestnerdans Le Figaro, premier article d'une srie qui encompte trois140. Devant les menaces de dsabonnements massifs de ses lecteurs, le directeur du journal cesse de soutenir Zola 141.De proche en proche, fin novembre-dbut dcembre 1897, les crivains Octave Mirbeau, dont le premier article parat trois joursaprs celui de Zola142, et Anatole France, l'universitaire Lucien Lvy-Bruhl, le bibliothcaire de l'cole normale suprieure LucienHerr, qui convainc Lon Blum et Jean Jaurs, les auteurs de La Revue blanche143, dont Lazare connat bien le directeurThade

    Natanson, les frres Clemenceau Albert et Georges s'investissent dans le combat pour la rvision du procs. Blum tente finnovembre de faire signer son ami Maurice Barrs une ptition demandant la rvision du procs, mais ce dernier refuse, romptavec Zola et Blum dbut dcembre, et commence populariser le terme d intellectuels 144. Cette premire rupture est leprlude une division des lites cultives, aprs le 13 janvier. Si l'Affaire Dreyfus occupe de plus en plus les discussions, lemonde politique ne le reconnat toujours pas, et Jules Mline dclare en ouverture de sance de l'Assemble nationale, le 7dcembre : il n'y a pas d'affaire Dreyfus. Il n'y a pas en ce moment et il ne peut pas y avoir d'affaire Dreyfus145. Procs et acquittement du tratreLe gnral de Pellieux est charg d'effectuer une enqute. Celle-ci tourne court, l'enquteur tant adroitement manipul par l'tat-Major. Le vrai coupable, lui dit-on, est le lieutenant-colonel Picquart146. L'enqute s'achemine vers un non-lieu, quand l'ex-matresse d'Esterhzy, Mme de Boulancy, fait publier dans Le Figaro des lettres dans lesquelles il exprimait violemment, unedizaine d'annes plus tt, toute sa haine de la France et son mpris de l'Arme franaise. La presse militariste vole au secours dutratre au travers d'une campagne antismite sans prcdent. La presse dreyfusarde rplique, forte des nouveaux lments en sapossession. Georges Clemenceau, dans le journalLAurore, se demande :

    Qui protge le commandant Esterhzy ? La loi s'arrte, impuissante devant cet aspirant prussien dguis en officier franais.Pourquoi ? Qui donc tremble devant Esterhzy ? Quel pouvoir occulte, quelles raisons inavouables s'opposent l'action de lajustice ? Qui lui barre le chemin ? Pourquoi Esterhzy, personnage dprav la moralit plus que douteuse, est-il protg alorsque tout laccuse ? Pourquoi un honnte soldat comme le lieutenant-colonel Picquart est-il discrdit, accabl, dshonor ? S'il lefaut nous le dirons ! Bien que protg par l'tat-Major et donc par le gouvernement, Esterhzy est oblig davouer la paternit des lettres francophobespublies parLe Figaro. Ceci dcide le bureau de ltat-Major agir : une solution pour faire cesser les questions, les doutes et lesdbuts de demande de justification doit tre trouve. L'ide est d'exiger d'Esterhzy qu'il demande lui-mme passer en jugementet tre acquitt afin de faire cesser les bruits et de permettre le retour de l'ordre. C'est donc pour le disculper dfinitivement, selonla vieille rgle Res judicata pro veritate habetur147, qu'Esterhzy est prsent le 10janvier1898 devant un Conseil de guerre.Le huis clos retard 148 est prononc. Esterhzy est prvenu des sujets du lendemain avec des indications sur la ligne de dfense tenir. Le procs est peu rgulier : les constitutions de parties civiles demandes par Mathieu et Lucie Dreyfus149 leur sontrefuses, les trois experts en critures ne reconnaissent pas l'criture d'Esterhzy dans le bordereau et concluent la contrefaon150.

    L'accus lui-mme est applaudi, les tmoins charge, hus et conspus, Pellieux intervenant pour dfendre l'tat-Major sansqualit lgale151. Le vritable accus est le colonel Picquart, sali par tous les protagonistes militaires de l'Affaire152. Esterhzy, estacquitt l'unanimit ds le lendemain, aprs trois minutes de dlibr153. Sous les vivats, il a du mal se frayer un chemin vers lasortie o l'attendent 1 500 personnes. Par erreur, un innocent a t condamn, mais par ordre, le coupable est acquitt. Pourbeaucoup de rpublicains modrs, c'est une atteinte insupportable aux valeurs fondamentales qu'ils dfendent. L'acquittementd'Esterhzy amne donc un changement de la stratgie dreyfusarde. Au libralisme respectueux de Scheurer-Kestneret Reinach,succde une action plus combative et contestataire154. En raction l'acquittement, d'importantes et violentes meutesantidreyfusardes et antismites ont lieu dans toute la France. On attente aux biens et aux personnes. Fort de sa victoire, ltat-Major arrte le lieutenant-colonel Picquart sous l'accusation de violation du secret professionnel, suite la divulgation de sonenqute son avocat qui l'aurait rvle au snateur Scheurer-Kestner. Le colonel, bien qu'il soit mis aux arrts au fort du Mont-Valrien, n'abdique pas et s'engage de plus en plus dans l'Affaire. Mathieu qui le remercie, il rplique schement qu'il ne faitque son devoir 153. Le commandant Esterhzy, est mis rapidement la rforme, et devant les risques qui psent son gard,s'exile en Angleterre o il termine ses jours confortablement dans les annes 1920155. Esterhzy a bnfici, au moment de

    L'Affaire , d'un traitement de faveur de la part des hautes sphres de l 'Arme qui s'explique assez mal, sinon par le dsir de l'tat-Major de vouloir touffer toute vellit de remise en cause du verdict du Conseil de guerre qui avait condamn le capitaineDreyfus en 1894.L'affaire explose en 1898 J'accuse! : l'affaire Dreyfus devient l'Affaire

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    Article dtaill : mile Zola dans laffaire Dreyfus. Article dtaill : J'accuse...!. Zola donne le 13janvier 1898 une nouvelledimension l'affaire Dreyfus, qui devient l'Affaire. Premier grand intellectuel dreyfusard, il est alors au sommet de sa gloire : lesvingt volumes des Rougon-Macquart ont t diffuss dans des dizaines de pays. C'est une sommit du monde littraire, et en apleinement conscience. Au gnral de Pellieux, il affirme pendant son procs : Je demande au gnral de Pellieux s'il n'y a pas diffrentes faons de servir la France ? On peut la servir par l'pe ou par laplume. M. le gnral de Pellieux a sans doute gagn de grandes victoires ! J'ai gagn les miennes. Par mes uvres, la languefranaise a t porte dans le monde entier. J'ai mes victoires ! Je lgue la postrit le nom du gnral de Pellieux et celuid'mile Zola : elle choisira156 ! Scandalis par l'acquittement d'Esterhzy, Zola dcide de frapper un coup. Il publie en premire page deL'Aurore, un article de 4

    500 mots sur six colonnes la une, en forme de lettre ouverte auprsidentFlix Faure. Clemenceau trouve le titre : J'Accuse!. Vendu habituellement trente mille exemplaires, le journal diffuse ce jour l prs de trois cent mille copies. Cet article faitl'effet d'une bombe. Le papier est une attaque directe, explicite et nominale. Tout ceux qui ont complot contre Dreyfus sontdnoncs, y compris le ministre de la Guerre, l'tat-Major. L'article comporte de nombreuses erreurs, majorant ou minorant lesrles de tel ou tel acteur157, mais Zola n'a pas prtendu faire uvre d'historien158. J'Accuse! apporte pour la premire fois la runion de toutes les donnes existantes sur l'Affaire 159. Le but de Zola est des'exposer volontairement afin de forcer les autorits le traduire en justice. Son procs servirait d'occasion pour un nouvel examenpublic des cas Dreyfus et Esterhzy. Il va ici l'encontre de la stratgie de Scheurer-Kestner et Lazare, qui prnaient la patience etla rflexion160. Devant le succs national et international de ce coup d'clat, le procs est invitable. partir de ce momentcritique, l'Affaire suit deux voies parallles. D'une part, l'tat utilise son appareil pour imposer la limitation du procs unesimple affaire de diffamation, afin de le dissocier des cas Dreyfus et Esterhzy, dj jugs. D'autre part, les conflits d'opiniontentent de peser sur les juges ou le gouvernement, pour obtenir les uns la rvision et les autres la condamnation de Zola. Maisl'objectif du romancier est atteint : l 'ouverture d'un dbat public aux assises. Le 15 janvier,Le Temps publie une ptition rclamant

    la rvision du procs161

    . Y figurent les noms d'mile Zola, Anatole France, mile Duclaux, le directeur de l'Institut Pasteur,Daniel Halvy, Fernand Gregh, Flix Fnon, Marcel Proust, Lucien Herr, Charles Andler, Victor Brard, Franois Simiand,Georges Sorel, puis le peintre Claude Monet, l'crivain Jules Renard, le sociologue mile Durkheim, l'historien Gabriel Monod,etc. Le 20 janvier, suite une intervention la Chambre des dputs du catholique Albert de Mun contre Zola, celle-ci dcide lespoursuites par 312 voix contre 122162. Dans L'Aurore du 23 janvier, Clemenceau, au nom d'une pacifique rvolte de l'espritfranais , reprend positivement le terme d' intellectuels . Le 1er fvrier, Barrs fustige ceux-ci dans le Journal. L'anti-intellectualisme devient un thme majeur des intellectuels de droite, qui reprochent aux dreyfusards de rflchir au-del desintrts de la nation, argument qui se retrouve tout au long des annes qui suivent, et qui constitue le fond du dbat public : laprfrence entre Justice et Vrit ou dfense de la nation, prservation sociale et raison suprieure de l'tat163. Cette mobilisationdes intellectuels ne se double pas dans un premier temps de celle de la gauche politique : le 19 janvier, les dputs socialistesprennent leurs distances face aux deux factions bourgeoises rivales .Les procs Zola Le gnral Billot, ministre de la Guerre, porte plainte contre Zola et Alexandre Perrenx, le grant de L'Aurore,qui passent devant les Assises de la Seine du 7 au 23fvrier1898. La diffamation envers une autorit publique est alors passible

    des Assises, alors que l'injure publique profre par la presse nationaliste et antismite n'amne que trs peu de poursuites, etsurtout quasiment aucune condamnation. Le ministre ne retient que trois passages de l'article 164, soit dix-huit lignes sur plusieurscentaines. Il est reproch Zola d'avoir crit que le Conseil de guerre avait commis une illgalit [] par ordre 165. Le procssouvre dans une ambiance de grande violence : Zola fait l'objet des attaques les plus ignominieuses 166, tout commed'importants soutiens et flicitations167. Fernand Labori, lavocat de Zola, fait citer environ deux cents tmoins. La ralit del'Affaire Dreyfus, inconnue du grand public, est diffuse dans la presse. Plusieurs journaux168 publient les notes stnographiquesin extenso des dbats au jour le jour, ce qui difie la population. Celles-ci constituent pour les dreyfusards un outil primordial pourles dbats postrieurs. Cependant, les nationalistes, derrire Henri Rochefort, sont alors les plus visibles et organisent des meutes,forant le prfet de police intervenir afin de protger les sorties de Zola,169 chaque audience170. Ce procs est aussi le lieu d'unevritable bataille juridique, dans laquelle les droits de la dfense sont sans cesse bafous171. De nombreux observateurs prennentconscience de la collusion entre le monde politique et les militaires. l'vidence, la Cour a reu des instructions pour que lasubstance mme de l'erreur judiciaire ne soit pas voque. Le prsident Delegorgue prtextant l'allongement de dure desaudiences, jongle sans cesse avec le droit pour que le procs ne traite que de la diffamation reproche Zola. Sa phrase la

    question ne sera pas pose , rpte des dizaines de fois172

    , devient clbre.Zola est condamn un an de prison et 3 000 francs d'amende174, la peine maximale. Cette duret est imputable l'atmosphrede violence entourant le procs : La surexcitation de l'auditoire, l'exaspration de la foule masse devant le palais de Justicetaient si violentes qu'on pouvait redouter les excs les plus graves si le jury avait acquitt M. Zola175. Cependant, le procs Zolaest plutt une victoire pour les dreyfusards176. En effet, lAffaire et ses contradictions ont pu tre largement voques tout au longdu procs, en particulier par des militaires. De plus, la violence des attaques contre Zola, et l'injustice de sa condamnationrenforcent l'engagement des dreyfusards : Stphane Mallarm se dclare pntr par la sublimit de [l']Acte [de Zola]177 etJules Renard crit dans son journal : partir de ce soir, je tiens la Rpublique, qui m'inspire un respect, une tendresse que jene me connaissais pas. Je dclare que le mot Justice est le plus beau de la langue des hommes, et qu'il faut pleurer si les hommesne le comprennent plus178. Le snateurLudovic Trarieux et le juriste catholique Paul Viollet fondent la Ligue pour la dfensedes droits de l'homme. Plus encore que l'affaire Dreyfus, l'affaire Zola opre un regroupement des forces intellectuelles en deuxcamps opposs. Le 2 avril, une demande de pourvoi en cassation reoit une rponse favorable. Il s'agit de la premire interventionde la Cour dans cette affaire judiciaire. La plainte aurait en effet d tre porte par le Conseil de guerre et non par le ministre. Le

    procureur gnral Manau est favorable la rvision du procs Dreyfus et soppose fermement aux antismites. Les juges duConseil de guerre, mis en cause par Zola, portent plainte pour diffamation. Laffaire est dfre devant les assises de Seine-et-Oise Versailles o le public passe pour tre plus favorable lArme, plus nationaliste. Le 23mai1898, ds la premire audience, MeLabori se pourvoit en cassation en raison du changement de juridiction. Le procs est ajourn et les dbats sont repousss au 18

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    juillet. Labori conseille Zola de quitter la France pour l'Angleterre avant la fin du procs, ce que fait l'crivain, accompagn desa femme. Les accuss sont de nouveau condamns. Quant au colonel Picquart, il se retrouve nouveau en prison.Henry dmasqu, l'Affaire rebonditL'acquittement d'Esterhzy, les condamnations d'mile Zola et de Georges Picquart, et la prsence continue d'un innocent aubagne, ont un retentissement national et international179 considrables. La France expose un arbitraire tatique contredisant les principes rpublicains fondateurs. L'antismitisme fait des progrs considrables, et les meutes sont courantes pendant toutel'anne 1898. Cependant, les hommes politiques en restent encore au dni de l'Affaire. En avril et mai 1898, ils sont surtout proccups par les lections lgislatives, aprs lesquelles Jaurs perd son sige de dput de Carmaux180. La majorit restemodre, et un groupe parlementaire antismite apparat la Chambre. Cependant, la cause dreyfusarde est relance. En effet,

    Godefroy Cavaignac, nouveau ministre de la Guerre et anti-rvisionniste farouche, veut dmontrer dfinitivement la culpabilit deDreyfus, en tordant le cou au passage Esterhzy, qu'il tient pour un mythomane et un matre chanteur 181. Il estabsolument convaincu de la culpabilit de Dreyfus, renforc dans cette ide par la lgende des aveux, aprs avoir rencontr le principal tmoin, le capitaine Lebrun-Renault182. Cavaignac a l'honntet d'un doctrinaire intransigeant183, mais ne connatabsolument pas les dessous de l'Affaire, que l'tat-Major s'est gard de lui enseigner. Il avait eu la surprise d'apprendre quel'ensemble des pices sur lesquelles l'accusation se basait n'avaient pas t expertises, Boisdeffre ayant une confiance absolue en Henry. Il dcide d'enquter lui-mme, dans son bureau avec ses adjoints, et rapatrie le dossier secret qui compte alors 365pices184. Le 7juillet1898, lors d'une interpellation la Chambre, Cavaignac fait tat de trois pices accablantes, entre mille ,dont deux n'ont aucun rapport avec l'Affaire, et l'autre est le faux d'Henry 185. Le discours de Cavaignac est efficace : les dputsl'ovationnent et votent l'affichage du discours avec la reproduction des trois preuves dans les 36 000 communes de France 572voix186. Les antidreyfusards triomphent, mais Cavaignac a reconnu implicitement que la dfense de Dreyfus n'avait pas eu accs toutes les preuves : la demande en annulation formule par Lucie Dreyfus devient recevable. Le lendemain, le colonel Picquartdclare dansLe Temps au prsident du Conseil : Je suis en tat d'tablir devant toute juridiction comptente que les deux pices

    portant la date de 1894 ne sauraient s'appliquer Dreyfus et que celle qui portait la date de 1896 avait tous les caractres d'unfaux. , ce qui lui vaut onze mois de prison. Le 13 aot au soir, le capitaine Cuignet, attach au cabinet de Cavaignac, qui travaille la lumire d'une lampe, observe que la couleur du lger quadrillage du papier de l'entte et du bas de page ne correspondent pasavec la partie centrale. Cavaignac tente encore de trouver des raisons logiques la culpabilit et la condamnation de Dreyfus 187mais ne tait pas sa dcouverte188. Un conseil d'enqute est form pour enquter sur Esterhzy, devant lequel celui-ci panique etavoue ses rapports secrets avec le commandant du Paty de Clam. La collusion entre l'tat-Major et le tratre est rvle. Le 30aot, Cavaignac se rsigne demander des explications au colonel Henry, en prsence de Boisdeffre et Gonse. Aprs une heured'interrogatoire men par le ministre lui-mme, Henry s'effondre et fait des aveux complets 189. Il est plac aux arrts de forteresseau Mont-Valrien et se suicide190,191 le lendemain en se tranchant la gorge avec un rasoir. La demande de rvision dpose parLucie Dreyfus ne peut plus tre repousse. Pourtant, Cavaignac affirme : moins que jamais ! 192, mais le prsident du Conseil,Henri Brisson, le force dmissionner. Malgr son rle, apparemment totalement involontaire, dans la rvision du procs de 1894,il reste un antidreyfusard convaincu et fait une intervention mprisante et blessante envers Dreyfus au procs de Rennes193. Lesantirvisionnistes ne se considrent pas comme battus. Le 6 septembre, Charles Maurras publie un loge d'Henry dansLa Gazette

    de France, qu'il qualifie de serviteur hroque des grands intrts de l'tat194

    .La Libre Parole, journal antismite de Drumont,propage la notion de faux patriotique . Le mme journal lance en dcembre une souscription au profit de sa veuve, afin d'rigerun monument la gloire d'Henry. Chaque donation est accompagne de remarques lapidaires sur Dreyfus et les dreyfusards,souvent injurieuses. 14 000 souscripteurs195, dont 53 dputs, envoient 131 000 francs196. Le 3septembre1898, le prsident duConseil, Brisson, incite Mathieu Dreyfus dposer une demande en rvision du Conseil de guerre de 1894. Le gouvernementtransfre le dossier la Cour de cassation, pour avis sur les quatre annes de procdures passes. La France est rellement diviseen deux, mais aucune gnralisation n'est possible : la communaut juive s'engage peu, les intellectuels ne sont pas tousdreyfusards197, les protestants sont partags, des marxistes refusent de soutenir Dreyfus198. Le clivage transcende les religions etmilieux sociaux, comme l'illustre la clbre caricature de Caran d'Ache Un dner en famille .Crise et recomposition du paysage politique Henry est mort, Boisdeffre a dmissionn, Gonse n'a plus aucune autorit et duPaty a t trs gravement compromis par Esterhzy : pour les conjurs, c'est la dbcle 199. Le gouvernement est dsormais prisentre deux feux : la loi et le droit contre la pression nationaliste de la rue et du commandement suprieur qui se reprend.Cavaignac, dmissionn pour avoir continu rpandre sa vision antidreyfusarde de l'Affaire, se pose en chef de file

    antirvisionniste. Le gnral Zurlinden qui lui succde, influenc par l'tat-Major, rend un avis ngatif la rvision le 10septembre, confort par la presse extrmiste pour laquelle, la rvision, c'est la guerre . L'obstination du gouvernement, qui votele recours la Cour de cassation le 26 septembre, amne la dmission de Zurlinden, remplac aussitt par le gnral Chanoine 200.Celui-ci, lors d'une interpellation la Chambre, donne sa dmission, la confiance tant refuse Brisson, contraint lui aussi ladmission. L'instabilit ministrielle entrane une certaine instabilit gouvernementale. Le 1ernovembre, le progressiste CharlesDupuy est nomm la place de Brisson. En 1894, il avait couvert les agissements du gnral Mercier aux dbuts de l'affaireDreyfus201 ; quatre ans plus tard, il annonce qu'il suivra les arrts de la Cour de cassation, barrant la route ceux qui veulenttouffer la rvision et dessaisir la Cour202. Le 5 dcembre, la faveur d'un dbat la Chambre sur la transmission du dossiersecret la Cour de cassation, la tension monte encore d'un cran. Les injures, invectives et autres violences nationalistes fontplace aux menaces de soulvement. Paul Droulde dclare : S'il faut faire la guerre civile, nous la ferons. 203Une nouvellecrise survient au sein mme de la Cour de cassation, ds lors que Quesnay de Beaurepaire, prsident de la chambre civile, accusela chambre criminelle de dreyfusisme par voie de presse. Il dmissionne le 8janvier1899 en hros de la cause nationaliste. Cettecrise aboutit au dessaisissement de la chambre criminelle au profit des chambres runies. C'est le blocage de la rvision 204. En

    1899, l'Affaire occupe de plus en plus la scne politique. Le 16fvrier1899, le prsident de la Rpublique Flix Faure meurt205.mile Loubet est lu, une avance pour la cause de la rvision, le prcdent prsident en tant un farouche opposant. Le 23fvrier, la faveur des funrailles de Flix Faure, Droulde tente un coup de force sur l'lyse. C'est un chec, les militaires ne seralliant pas. Le 4 juin, Loubet est agress sur le champ de course de Longchamp. Ces provocations, auxquelles s'ajoutent lesmanifestations permanentes de l'extrme-droite, bien qu'elle ne mettent jamais rellement la Rpublique en danger, crent un

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    sursaut rpublicain qui conduit la formation d'un gouvernement de dfense rpublicaine autour de Waldeck-Rousseau le 22 juin. Les rpublicains progressistes antidreyfusards, tel Mline, sont rejets droite. L'affaire Dreyfus a conduit unerecomposition claire du paysage politique franais.La cassation du jugement de 1894 La Cour de cassation examine l'affaire, dans un contexte de campagnes de presse l'encontrede la chambre criminelle, les magistrats tant constamment trans dans la boue dans les journaux nationalistes depuis le scandalede Panam206. Le 26septembre1898, aprs un vote du Cabinet, le garde des Sceaux saisit la Cour de cassation. Le 29 octobre, l'issue de la communication du rapport du rapporteur Alphonse Bard, la chambre criminelle de la Cour dclare la demanderecevable et dit qu'il sera procd par elle une instruction supplmentaire207 . Le rapporteur Louis Loew prside. Il est l'objetd'une trs violente campagne d'injures antismites, alors qu'il est protestant alsacien, accus d'tre un dserteur, un vendu aux

    Prussiens. Malgr les silences complaisants de Mercier, Billot, Zurlinden et Roget qui se retranchent derrire l'autorit de la chosejuge et le secret d'tat, la comprhension de l'Affaire augmente. Cavaignac fait une dposition de deux jours, mais ne parvient pas dmontrer la culpabilit de Dreyfus. Au contraire, il le disculpe involontairement par une dmonstration de la datationexacte du bordereau (aot 1894)131. Louis Picquart dmontre l'ensemble des rouages de lerreur puis de la conspiration208. Dansune dcision du 8dcembre1898 en reprsailles au dessaisissement qui s'annonce, Picquart est cart du Conseil de guerre par lachambre criminelle209. C'est un nouvel obstacle aux volonts de ltat-Major. Une nouvelle campagne de presse furieusementantismite clate l'occasion de cet vnement, alors queL'Aurore du 29 octobre titre Victoire dans les mmes caractres que J'Accuse! 210. Le travail d'enqute est tout de mme repris par la chambre criminelle211. Le dossier secret est analys partir du 30 dcembre, et la chambre demande la communication du dossier diplomatique, ce qui est accord. Le 9 fvrier, lachambre criminelle rend son rapport en mettant en exergue deux faits majeurs : il est certain qu'Esterhzy a utilis le mme papierpelure que le bordereau212 et le dossier secret est totalement vide. Ces deux faits majeurs anantissent toutes les procdures l'encontre d'Alfred Dreyfus eux seuls. Mais paralllement, pour faire suite l'incident de Beaurepaire, le prsident Mazeauinstruit une enqute sur la chambre criminelle, qui aboutit au dessaisissement de celle-ci afin de ne pas la laisser porter seule

    toute la responsabilit de la sentence dfinitive , ce qui prive la chambre criminelle de la poursuite des actions qui dcouleraientde son rapport. Le 28 fvrier, Waldeck-Rousseau s'exprime au Snat sur le fond et dnonce la conspiration morale au sein dugouvernement et dans la rue. La rvision n'est plus vitable. Le 1ermars1899, le nouveau prsident de la chambre civile de laCour de cassation, Alexis Ballot-Beaupr est nomm rapporteur pour l'examen de la demande de rvision. Il aborde le dossier enjuriste et dcide d'un supplment d'enqute. Dix tmoins complmentaires sont interrogs, lesquels affaiblissent encore la versionde l'tat-Major. Dans le dbat final et par un modle d'objectivit, le prsident Ballot-Beaupr dmontre l'inanit du bordereau, laseule charge contre Dreyfus. Le procureur Manau abonde dans le sens du prsident. Me Mornard qui reprsente Lucie Dreyfusplaide sans aucune difficult ni opposition du parquet213. Le 3juin1899, les chambres runies de la Cour de cassation cassent lejugement de 1894 en audience solennelle214. Laffaire est renvoye devant le Conseil de guerre de Rennes. Les consquences sontimmdiates : Zola, exil en Angleterre, revient en France, Picquart est libr, Mercier est accus de communication illgale depices. Par cet arrt, la Cour de cassation s'impose comme une vritable autorit, capable de tenir tte l'arme et au pouvoirpolitique215. Pour de nombreux Dreyfusards, cette dcision de justice est l'antichambre de l'acquittement du capitaine ; ils oublientde considrer que c'est de nouveau l'arme qui le juge. La Cour, en cassant avec renvoi, a cru en l'autonomie juridique du Conseil

    de guerre sans prendre en compte les lois de l'esprit de corps216

    .Le procs de Rennes 1899Droulement du procs Le prisonnier n'est en rien au courant des vnements qui se droulent des milliers de kilomtres de lui.Ni des complots ourdis pour que jamais il ne puisse revenir, ni de l'engagement d'innombrables honntes hommes et femmes sacause. L'administration pnitentiaire filtre les informations qu'elle jugeait confidentielles. la fin de l'anne 1898, il apprend avecstupfaction la dimension relle de l'Affaire, dont il ne sait rien : l'accusation de son frre contre Esterhzy, l'acquittement dutratre, l'aveu et le suicide d'Henry, ceci la lecture du dossier d'enqutes de la Cour de cassation qu'il reoit deux mois aprs sapublication217. Le 5juin1899, Alfred Dreyfus est prvenu de la dcision de cassation du jugement de 1894. Le 9 juin, il quitte l'ledu Diable, cap vers la France, enferm dans une cabine comme un coupable qu'il n'est pourtant plus. Il dbarque le 30 juin PortHaliguen, sur lapresqu'le de Quiberon, dans le plus grand secret, par une rentre clandestine et nocturne 218. Aprs cinq annesde martyre, il retrouve le sol natal, mais il est immdiatement enferm ds le 1er juillet la prison militaire de Rennes. Il est dfrle 7 aot devant le Conseil de guerre de la capitale bretonne. Le gnral Mercier, champion des antidreyfusards, intervientconstamment dans la presse, pour raffirmer l'exactitude du premier jugement : Dreyfus est bien le coupable. Mais

    immdiatement, des dissensions se font jour dans la dfense de Dreyfus. Ses deux avocats sont en effet sur des stratgiesopposes. Me Demange souhaite se tenir sur la dfensive et obtenir simplement l'acquittement de Dreyfus. Me Labori, brillantavocat de 35 ans, offensif, cherche frapper plus haut ; il veut la dfaite de l'tat-Major, son humiliation publique. MathieuDreyfus a imagin une complmentarit entre les deux avocats. Le droulement du procs montre l'erreur, dont va se servirl'accusation, devant une dfense si affaiblie. Le procs souvre le 7aot1899 dans un climat de tension extrme Rennes est en tatde sige219. Les juges du Conseil de guerre sont sous pression. Esterhzy, qui a avou la paternit du bordereau, en exil enAngleterre, et du Paty, se sont faits excuser. Dreyfus apparat, lmotion est forte. Son apparence physique bouleverse sespartisans et certains de ses adversaires220. Malgr sa condition physique dgrade, il a une matrise complte du dossier, acquiseen seulement quelques semaines221. Tout l'tat-Major tmoigne contre Dreyfus sans apporter aucune preuve. On ne fait quesentter et on considre comme nuls les aveux dHenry et dEsterhzy. Le procs tend mme draper, dans la mesure o lesdcisions de la Cour de cassation ne sont pas prises en compte. On discute notamment du bordereau, alors que la preuve a tapporte de la culpabilit dEsterhzy. Pourtant, Mercier se fait huer la sortie de l'audience. La presse nationaliste etantidreyfusarde se perd en conjectures sur son silence propos de la preuve dcisive (le pseudo bordereau annot par le

    Kaiser, dont personne ne verra jamais aucune preuve), dont il n'avait cess de faire tat avant le procs. Le 14 aot, Me Labori estvictime d'un attentat sur son parcours vers le tribunal. Il se fait tirer dans le dos par un extrmiste qui s'enfuit et ne sera jamaisretrouv. L'avocat est cart des dbats pendant plus d'une semaine, au moment dcisif de l'interrogatoire des tmoins. Le 22 aot,son tat s'tant amlior, il est de retour. Les incidents entre les deux avocats de Dreyfus se multiplient, Labori reprochant Demange sa trop grande prudence. Le gouvernement, devant le raidissement militaire du procs, pouvait agir encore de deux

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    manires pour inflchir les vnements ; en faisant appel un tmoignage de l'Allemagne ou par l'abandon de l'accusation222.Mais ces tractations en arrire-plan sont sans rsultats. L'ambassade d'Allemagne adresse un refus poli au gouvernement. Leministre de la guerre, le gnral Gaston de Galliffet, fait envoyer un mot respectueux au commandant Louis Carrire, commissairedu gouvernement. Il lui demande de rester dans l'esprit de l'arrt de rvision de la Cour de cassation. L'officier feint de ne pascomprendre l'allusion et aid de l'avocat nationaliste Auffray, me vritable de l'accusation, il fait un rquisitoire contre Dreyfus.Du ct de la dfense, il faut prendre une dcision, car l'issue du procs s'annonce mal, malgr l'vidence de l'absence de chargescontre l'accus. Au nom du prsident du Conseil, Waldeck-Rousseau, aid de Jaurs et Zola, Me Labori est convaincu de renoncer sa plaidoirie pour ne pas heurter l'arme. On dcide de jouer la conciliation en change de l'acquittement que semble promettrele gouvernement. Mais c'est un nouveau jeu de dupes223. Me Demange, seul et sans illusions, assure la dfense de Dreyfus, dans

    une atmosphre de guerre civile. Paris, les agitateurs antismites et nationalistes dAuteuil sont arrts. Jules Gurin et ceux qui se sont enfuis et retranchs dansle Fort Chabrol sont assaillis par la police.Nouvelle condamnation Le 9septembre1899, la Cour rend son verdict : Dreyfus est reconnu coupable de trahison mais aveccirconstances attnuantes (par 5 voix contre 2), condamn dix ans de rclusion et une nouvelle dgradation. Contrairementaux apparences, ce verdict est au bord de l'acquittement une voix prs. Le code de justice militaire prvoyait en effet le principede minorit de faveur trois voix contre quatre224. Ce verdict absurde225 a les apparences d'un aveu coupable des membres duConseil de guerre. Ils semblent ne pas vouloir renier la dcision de 1894, et savent bien que le dossier ne repose que sur du vent.Mais on peut aussi interprter cette dcision comme un verdict habile, car les juges, tout en mnageant leurs pairs ainsi que lesmodrs angoisss par les risques de guerre civile, reconnaissent implicitement l'innocence de Dreyfus (peut-on trahir avec descirconstances attnuantes ?)226. Le lendemain du verdict, Alfred Dreyfus, aprs avoir beaucoup hsit, dpose un pourvoi enrvision. Waldeck-Rousseau, dans une position difficile, aborde pour la premire fois la grce. Pour Dreyfus, c'est accepter laculpabilit. Mais bout de force, loign des siens depuis trop longtemps, il accepte. Le dcret est sign le 19 septembre et il est

    libr le 21 septembre 1899. Nombreux sont les dreyfusards frustrs par cet acte final. L'opinion publique accueille cetteconclusion de manire indiffrente. La France aspire la paix civile et la concorde la veille de l'exposition universelle de 1900et avant le grand combat que la Rpublique s'apprte mener pour la libert des associations et la lacit. C'est dans cet esprit quele 17novembre1899, Waldeck-Rousseau dpose une loi damnistie couvrant tous les faits criminels ou dlictueux connexes lAffaire Dreyfus ou ayant t compris dans une poursuite relative lun de ces faits . Les dreyfusards sinsurgent, ils ne peuventaccepter que les vritables coupables soient absous de leurs crimes d'tat, alors mme que Zola et Picquart doivent toujours passeren jugement. Malgr d'immenses protestations, la loi est adopte. Il nexiste alors plus aucun recours possible pour obtenir quelinnocence de Dreyfus soit reconnue ; il faut dsormais trouver un fait nouveau pouvant entraner la rvision.Ractions Les ractions en France sont vives, faites de stupeur et de tristesse dans le camp rvisionniste 227. Pourtant d'autresractions tendent montrer que le verdict d'apaisement rendu par les juges est compris et accept par la population. LesRpublicains cherchent avant tout la paix sociale, pour tourner la page de cette longue affaire extrmement polmique. Aussi, lesmanifestations sont trs peu nombreuses en province, alors que l'agitation persiste quelque peu Paris228. Dans le monde militaire,l'apaisement est aussi de rigueur. Deux des sept juges ont vot l'acquittement229. Ils ont refus de cder l'ordre militaire implicite.

    Ceci est aussi clairement peru. Dans une apostrophe l'arme, Galliffet annonce : l'incident est clos . Des manifestations anti-franaises ont lieu dans vingt capitales trangres ; la presse est scandalise 230. Les ractions sont de deux ordres. Les Anglo-saxons, lgalistes, se focalisent sur l'affaire d'espionnage et contestent assez violemment ce verdict de culpabilit sans argumentspositifs son dification. ce titre, le rapport duLord Chief Justice d'Angleterre, Lord Russell of Killowen, la reine Victoria le16septembre1899, est un symbole de la rpercussion mondiale de l'Affaire en Grande-Bretagne. Le magistrat anglais, qui s'taitrendu en observateur Rennes, critique les faiblesses du Conseil de Guerre : Les juges militaires n'taient pas familiers de la loi []. Ils manquaient de l'exprience et de l'aptitude qui permettent de voirla preuve derrire le tmoignage. [] Ils agirent en fonction de ce qu'ils considraient comme l'honneur de l'arme. [] ilsaccordrent trop d'importance aux fragiles allgations qui furent seules prsentes contre l'accus. Ainsi conclut-il : il paraitcertain que si le procs de rvision avait eu lieu devant la Cour de cassation, Dreyfus serait maintenant un homme libre. En Allemagne et en Italie, les deux pays largement mis en cause par les procs contre Dreyfus, c'est le soulagement. Mme sil'Empereur d'Allemagne regrette que l'innocence de Dreyfus n'ait pas t reconnue, la normalisation des relations franco-prussiennes qui s'annonce est vue comme une dtente bienvenue. Aucune des nations n'a intrt une tension permanente. La

    diplomatie des trois puissances, avec l'aide de l'Angleterre, va s'employer dtendre une atmosphre qui ne se dgradera nouveau qu' la veille de la Premire Guerre mondiale. Cette conclusion judiciaire a aussi une consquence funeste sur lesrelations entre la famille Dreyfus et la branche ultra des dreyfusistes. Fernand Labori, Jaurs et Clemenceau, avec le consentementdu gnral Picquart, reprochent ouvertement Alfred Dreyfus d'avoir accept la grce et d'avoir mollement protest la loid'amnistie. En deux ans aprs cette conclusion, leur amiti se finissait ainsi, avec de sordides calculs231.La longue marche vers la rhabilitation - 1900-1906 Prfrant viter un troisime procs, le gouvernement dcide de gracierDreyfus, dcret que signe le prsident Loubet le 19septembre1899, aprs de multiples tergiversations. Dreyfus n'est pas pourautant innocent. Le processus de rhabilitation ne sera achev que six annes plus tard, sans clat ni passion. De nombreuxouvrages paraissent pendant cette priode. Outre les mmoires d'Alfred Dreyfus232, Reinach fait paratre sonHistoire de l'Affaire

    Dreyfus, et Jaurs publieLes Preuves. Quant Zola, il crit le troisime de sesvangiles : Vrit. Mme Esterhzy en profite pardes confidences et vend plusieurs versions diffrentes des textes de sa dposition au consul de France233.Mort de Zola Le 29septembre1902, Zola, l'initiateur de l'Affaire, le premier des intellectuels dreyfusards, meurt asphyxi par lafume de sa chemine. Son pouse, Alexandrine, en rchappe de justesse234. C'est le choc dans le clan des dreyfusards. Anatole

    France, qui a exig que Dreyfus soit prsent aux obsques, alors que le Prfet de police souhaitait son absence pour viter lestroubles , lit sa clbre oraison funbre l'auteur de J'Accuse! : Devant rappeler la lutte entreprise par Zola pour la justice et la vrit, m'est-il possible de garder le silence sur ces hommes

    acharns la ruine d'un innocent et qui, se sentant perdus s'il tait sauv, l'accablaient avec l'audace dsespre de la peur ?

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    Comment les carter de votre vue, alors que je dois vous montrer Zola se