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LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN - FRANCK BARREAU 1 La Chenille processionnaire du pin est un insecte de l’ordre des Lépidoptères. Connues pour leur mode de déplacement en file indienne, les larves se nourrissent des aiguilles de diverses espèces de pin, provoquant un affaiblissement important des arbres et des allergies aux personnes exposées aux soies des chenilles. Description L’insecte adulte est un papillon de 35 à 40 mm d’envergure, aux antennes pectinées 1 . Les ailes antérieures sont grises, avec deux bandes foncées parallèles chez le mâle, les postérieures blanches marquées d’une tache sombre à l’extrémité postérieure. La larve est une chenille de quelques millimètres (stade L1) à 40 mm de long (stade 4 ou 5), brune noirâtre avec des taches rougeâtres sur le dessus et les flancs. Sa face ventrale est jaune Le corps est fortement velu et couvert de soies urticantes et allergisantes. Les chenilles marchent en procession et construisent des cocons de soies dans certains arbres résineux. Biologie Les papillons qui éclosent durant l’été, entre juin et septembre selon le climat, pondent leurs œufs déposés en rangées parallèles par paquet de 150 à 220 sur les rameaux ou les aiguilles de diverses espèces de pin, mais aussi sur les sapins et cèdres en second choix. L’éclosion a lieu cinq à six semai nes après la ponte. Elle donne naissance à des chenilles qui muent cinq fois. La vitesse de croissance des larves dépend de la température (et donc de l'altitude et de la longitude). Les chenilles tissent des nids de soie dans lesquels elles restent cachées pour s'alimenter. Lorsqu'elles changent de nid, elles se déplacent en « procession ». La cohésion de la file en déplacement est assurée par le contact direct entre les chenilles. Au printemps, toutes les chenilles d'un même cocon quittent leur nid, toujours en procession, pour s'enfouir dans le sol. Chacune des chenilles va tisser un cocon avant de se transformer en chrysalide 2 . Au bout de plusieurs mois, les chenilles se métamorphosent en papillons adultes qui sortent de terre et s'envolent. Le cycle recommence par l'accouplement de la femelle et du mâle. Ce dernier meurt un ou deux jours après, alors que la femelle s'envole vers la branche d'un arbre résineux pour pondre jusqu'à 300 œufs avant de mourir à son tour. Les petites chenilles émergent 30 à 45 jours après la ponte. 1 Qui a la forme d’un peigne. 2 Stade de développement entre la larve et l’adulte.

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LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN

LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN - FRANCK BARREAU 1

La Chenille processionnaire du pin est un insecte de l’ordre des Lépidoptères. Connues pour leur mode de déplacement en file indienne, les larves se nourrissent des aiguilles de diverses espèces de pin, provoquant un affaiblissement important des arbres et des allergies aux personnes exposées aux soies des chenilles.

Description

L’insecte adulte est un papillon de 35 à 40 mm d’envergure, aux

antennes pectinées1. Les ailes antérieures sont grises, avec deux

bandes foncées parallèles chez le mâle, les postérieures blanches marquées d’une tache sombre à l’extrémité postérieure.

La larve est une chenille de quelques millimètres (stade L1) à 40 mm de long (stade 4 ou 5), brune noirâtre avec des taches rougeâtres sur le dessus et les flancs. Sa face ventrale est jaune

Le corps est fortement velu et couvert de soies urticantes et allergisantes.

Les chenilles marchent en procession et construisent des cocons de soies dans certains arbres résineux.

Biologie

Les papillons qui éclosent durant l’été, entre juin et septembre selon le climat, pondent leurs œufs déposés en rangées parallèles par paquet de 150 à 220 sur les rameaux ou les aiguilles de diverses espèces de pin, mais aussi sur les sapins et cèdres en second choix. L’éclosion a lieu cinq à six semaines après la ponte.

Elle donne naissance à des chenilles qui muent cinq fois. La vitesse de croissance des larves dépend de la température (et donc de l'altitude et de la longitude). Les chenilles tissent des nids de soie dans lesquels elles restent cachées pour s'alimenter. Lorsqu'elles changent de nid, elles se déplacent en « procession ». La cohésion de la file en déplacement est assurée par le contact direct entre les chenilles.

Au printemps, toutes les chenilles d'un même cocon quittent leur nid, toujours en procession, pour s'enfouir dans le sol.

Chacune des chenilles va tisser un cocon avant de se

transformer en chrysalide2.

Au bout de plusieurs mois, les chenilles se métamorphosent en papillons adultes qui sortent de terre et s'envolent. Le cycle recommence par l'accouplement de la femelle et du mâle. Ce dernier meurt un ou deux jours après, alors que la femelle s'envole vers la branche d'un arbre résineux pour pondre jusqu'à 300 œufs avant de mourir à son tour. Les petites chenilles émergent 30 à 45 jours après la ponte.

1 Qui a la forme d’un peigne. 2 Stade de développement entre la larve et l’adulte.

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LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN

LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN - FRANCK BARREAU 2

Schéma du cycle biologique

Le cycle biologique de cet insecte est annuel. On peut le présenter schématiquement en 8 étapes : ETAPE 1 : A partir de mi-juin, les papillons de la processionnaire sortent de terre. Mâles et femelles s'accouplent, puis les mâles meurent un ou deux jours après.

ETAPE 2 : La femelle s'envole et dépose entre 70 et 300 œufs sur les aiguilles de pin. Puis elle meurt à son tour.

ETAPE 3 : Les chenilles éclosent 30 à 45 jours après la ponte. Elles se nourrissent avec les aiguilles du pin, et sont reliées entre elles par un fil de soie.

ETAPE 4 : Au cours de leur croissance, les chenilles changent de couleur et se couvrent de plus en plus de poils (jusqu'à 1 million).

ETAPE 5 : Les chenilles construisent un abri en soie en automne, sur la branche d'un pin. Elles passent l'hiver dans cet abri, et ne sortent que la nuit pour entretenir leur nid et se nourrir.

ETAPE 6 : Au printemps, la colonie conduite par une femelle quitte l'abri et se dirige vers le sol. C'est la procession de nymphose : toutes les chenilles se tiennent les unes aux autres et se déplacent en longue file. Une file peut compter quelques centaines de chenilles. Au bout de plusieurs jours, elles s'arrêtent dans un endroit bien ensoleillé et s'enfouissent dans le sol.

ETAPE 7 : Deux semaines plus tard, toujours dans le sol, les processionnaires tissent des cocons individuels et se transforment en chrysalides. Elles restent dans cet état pendant plusieurs mois (ou parfois plusieurs années selon les régions).

ETAPE 8 : Au bout de quelques mois, chaque chrysalide se métamorphose en papillon, toujours sous la terre. Et puis, un soir d'été, les papillons sortent de terre...

Dégâts

Les chenilles se nourrissent des aiguilles des pins entrainant un affaiblissement important des arbres et pouvant ouvrir la voie à d'autres éventuels parasites.

Les espèces attaquées sont le pin Parasol, le pin d’Alep, le pin Maritime, le pin noir d’Autriche, le pin Blanc, le pin Laricio et le pin Sylvestre. Le cèdre de l'Himalaya est également parasité.

Un animal dangereux

Ces chenilles possèdent au troisième stade larvaire des poils urticants qui sont projetés en l’air lorsque la chenille se sent menacée.

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LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN

LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN - FRANCK BARREAU 3

Leur très fort caractère urticant peut provoquer d'importantes réactions allergiques (mains, cou, visage) mais aussi des troubles oculaires ou respiratoires. Les atteintes à l'œil peuvent avoir d'importantes conséquences si les poils ne sont pas rapidement enlevés. Il est dangereux de manipuler un nid même vide.

Le danger est aussi important pour les animaux de compagnie : un chien atteint à la langue (qu'il peut avoir utilisé pour lécher les démangeaisons sur son corps) s'il n'est pas soigné rapidement par des fortes doses de cortisone, risque alors la nécrose de la langue. Il peut s’en suivre de grosses difficultés pour se nourrir. Il est important de rincer la langue et la bouche du chien avec de l'eau propre, sans frotter, ce qui briserait les poils urticants de la chenille et qui libérerait ainsi plus de toxines, aggravant l'état de l'animal.

Répartition en France

La chenille progresse vers le nord depuis les années soixante. Cette progression est suivie par l'équipe de

modélisation de l’INRA3 d'Orléans.

Pour disposer de données à l'échelle communale et pour évaluer les besoins des gestionnaires d'espaces verts et pour produire des préconisations plus pertinentes en matière de lutte, une enquête élaborée par Plante et Cité et l’INRA avec l’Association des Maires de France (AMF), a été lancée en 2009 auprès de toutes les communes de France. Le technicien responsable ou l'élu chargé des espaces verts ont été invités à compléter un questionnaire en ligne sur Internet du 11 mai au 11 juin 2009.

En 2010, la chenille progresse vers le nord et notamment en Île-de-France, probablement en raison du réchauffement climatique et de l'activité commerciale du bois dont le transport pourrait favoriser sa dispersion.

Les gros noyaux de populations sont situés dans les forêts de pins, mais des nids sont observés le long des

alignements de pins le long des route et dans l'openfield4 (ex dans la Beauce) là où des petits boisements de

pins épars sont présents, même en l'absence de haie, ce qui montre une bonne capacité de ce papillon à coloniser de nouveaux habitats (jusqu'à 5 à 6 km de son lieu de naissance en milieu ouvert, alors qu'ils se reproduit plutôt sur place en forêt). La chrysalide (enterrée) peut en outre aussi être véhiculée par les transports de terre. Le réchauffement semble favoriser la remontée de l'espèce vers le nord. Source INRA Orléans

3 Institut National de Recherches Agronomiques 4 Paysage à champs ouverts

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LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN

LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN - FRANCK BARREAU 4

Ennemis naturels et moyens de lutte

Ennemis naturels

Chaque stade de vie de ce papillon a son cortège d'ennemis naturels, c'est à dire aux stades œuf, chenille, chrysalides et papillons. Ces ennemis naturels sont des champignons, des virus, des bactéries, des insectes prédateurs ou hyperparasite, quelques oiseaux, des rongeurs…

Des études sont en cours sur la prédation par les mésanges, le coucou ou la huppe fasciée.

Une expérience réalisée en Belgique au début des années 1950 a démontré que l'installation massive de nichoirs à mésanges (un nichoir tous les 30 m) était parvenue à éradiquer localement les chenilles processionnaires dans un massif boisé d'une dizaine d'hectares.

Il a également été montré dans le sud-ouest de la France (Landes) que certaines espèces de chauves-souris

chassent les papillons adultes et pourraient agir comme régulatrices des populations de processionnaires.

Moyens artificiels de lutte

Pour les petites surfaces :

Lutte mécanique dite « échenillage » : pour les surfaces réduites (parcs et jardins), elle consiste à enlever et à détruire à la main ou à l'aide d'outils (échenilloir) les pontes et les nids. Les nids sont généralement incinérés, en évitant tout contact direct avec les poils urticants des chenilles. Un chalumeau est parfois utilisé pour brûler les nids.

Piégeage :

o un piège appelé « éco piège » et correspondant à une gouttière reliée à un sac peut être installé pour intercepter les chenilles lorsqu'elles descendent de l'arbre. La suppression par incinération des insectes capturés doit s'effectuer un mois après leur descente, lorsqu'elles sont au stade de chrysalides.

o un piège à base de phéromones sexuelles de synthèse (molécule libérée par les papillons femelles pour attirer les partenaires), suspendu dans les pins, attire de fin juin à mi-septembre les papillons mâles. Le piégeage de masse serait efficace à condition que le nombre de pièges soit suffisant pour la surface à traiter. De plus ces pièges ont un coût élevé.

Pour les grandes surfaces :

Lutte chimique : par pulvérisation aérienne d'insecticides, avec le défaut d'affecter d'autres espèces, voire des espèces prédatrices naturelles de la processionnaire du pin.

Lutte biologique : la méthode la plus utilisée est la pulvérisation de biotoxines (produites par une bactérie, le Bacillus thuringiensis var. kurstaki), sur les aiguilles des pins, ce qui est efficace contre les chenilles de lépidoptères. L'ingestion de ces toxines provoque la mort des larves par intoxication. Les spécialités commerciales homologuées en France ont une faible persistance, et une très bonne efficacité sur les stades âgés. L'utilisation en fin d'automne permet ainsi une bonne protection contre ce ravageur des forêts, tout en ayant un impact minimal sur d'autres chenilles du fait de leur absence.

Des expériences ont montré que l'odeur du bouleau a un effet répulsif sur la processionnaire.

La meilleure lutte biologique (réussie en Belgique au milieu du XXe siècle par les Réserves Ornithologiques de Belgique), serait le placement massif de nichoirs à mésanges (environ 1 nichoir tous les 30 m). En France 20 nichoirs/ha testés sur une parcelle expérimentale de la forêt domaniale du Mont-Ventoux par l'INRA ont permis « une régulation sur du long terme, une régulation durable - plus efficace que l'ancien traitement microbiologique effectué par hélicoptère - et qui permet de maintenir [la colonisation] à un niveau qui peut être tolérable. Si on veut un risque zéro, il faut combiner avec d'autres méthodes, par exemple le piège à chenille ou le piège à papillon » selon Jean-Claude Martin de l'INRA.

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LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN

LA CHENILLE PROCESSIONNAIRE DU PIN - FRANCK BARREAU 5

Contexte réglementaire de lutte contre les chenilles processionnaires

Il n'existe pas actuellement de réglementation nationale de lutte obligatoire.

Localement, la lutte contre l'insecte peut être imposée par arrêté préfectoral ou municipal.

Certaines villes ont pris conscience de l'impact de ce nuisible sur notre environnement et appliquent un arrêté municipal obligeant chaque année, avant la fin de la première quinzaine du mois de mars, les propriétaires ou les locataires à supprimer mécaniquement les cocons élaborés par les chenilles processionnaires du pin et à les incinérés ainsi qu'à un traitement annuel préventif à la formation de ces cocons avant la fin du mois de septembre sur les végétaux susceptibles d'être colonisés par les chenilles.

Le produit préconisé est le Bacillus thuringiensis sérotype 3a ou 3b ou un équivalent, en raison de sa spécificité et de son innocuité pour les espèces non ciblés. Entre le début du mois de septembre et le milieu du mois d'octobre, compte tenu de la biologie et de la sensibilité des larves, des traitements à l'aide de produits homologués dans cette indication devront être épandus dans les règles de l'art.