20
octobre - novembre 2011 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours Bureau de la SOFOP Président : C. BONNARD - 1 er Vice-Président : C. ROMANA - 2 e Vice Président : J. LECHEVALLIER - FUTUR 2 e Vice Président : C. KARGER Ancien Président : C. MORIN - Secrétaire Général : J.L. JOUVE - Trésorier : P. LASCOMBES Membres du Bureau : B. de BILLY, F. CHOTEL, A KAELIN, P MARY, J. SALES DE GAUZY (SOFCOT), P WICART la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse www.saurampsmedical.com Fondateur J.C. POULIQUEN † Editorialiste H. CARLIOZ (Paris) Rédacteur en chef C. MORIN (Berck) Membres J CATON (Lyon) P CHRESTIAN (Marseille G FINIDORI (Paris) J L JOUVE (Marseille R KOHLER (Lyon) P LASCOMBES (Nancy) G F PENNEÇOT (Paris) M RONGIERES (Toulouse) J SALES DE GAUZY (Toulouse) R VIALLE (Paris) et le GROUPE OMBREDANNE” Correspondants étrangers M BEN GHACHEM (Tunis) R JAWISH (Beyrouth) I. GHANEM (Beyrouth) Editeur SAURAMPS MEDICAL S.a.r.l. D. TORREILLES 11, boulevard Henri IV CS 79525 34960 MONTPELLIER Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SO ciété F rançaise d’ O rthopédie P édiatrique N°34 Editorial SO.F.O.P. L’ARC EN CIEL C’est le drapeau du GEOP, comme dirait Nelson Mandela ! Ouvert aux enfants de tous les pays, de toutes origines reli- gieuses ou ethniques. Les Anciens, ceux qui ont créé le GEOP avaient défini sa feuille de route à Palavas : développer l’orthopédie pé- diatrique, lui donner une légitimité scientifique et enseigner cette disci- pline à tous, non seulement aux étu- diants francophones mais aussi aux étudiants étrangers. Ces fondateurs, à qui nous devons tout, ont sillonné le monde d’Abidjan à Téhéran, d’Alger à Lima, de Beyrouth à Montévidéo. Les relations internationales sont la force motrice de notre société. Il s’agit de faire connaître les travaux scien- tifiques mais aussi de développer un savoir faire chirurgical singulier. Notre discipline est au cœur de l’essentiel, au cœur de la vie et de l’avenir de nos enfants. C’est dans cet esprit qu’est née la mis- sion au Vietnam. Le Docteur Desgrip- pes a eu le grand mérite d’initier cette mission. Après La Chaîne De l’Espoir, Children Action, grâce au soutien précieux, in- faillible de Mr Bernard Sabrier, cette mission a pu se poursuivre. Elle est de- venue Franco-Suisse. Ce partenariat a enrichi nos relations. Mais rien de tout cela n’aurait été possible sans Mme Phi et Mme Giang, ces combattantes de l’armée de l’ombre, qui toujours entou- raient familles et enfants d’un amour quasi maternel. Il s’agit d’une mission humanitaire unique au monde, exemplaire : elle s’appuie sur des chirurgiens de haut niveau, un support logistique très élaboré et surtout, ce qui fait sa force et son originalité, une continuité sans relâche. Avec Yersin et Pasteur, avec Dunant et Eiffel, la France et la Suisse, se sont retrouvées au Vietnam. Avec nos amis vietnamiens, nous avons fait plus que travailler ensemble. Nous avons partagé des émotions, des fêtes et aussi de grands chagrins après le décès du père de l’orthopédie pé- diatrique vietnamienne le professeur Phung. Avec le temps, nous sommes devenus une famille. Chaque année, notre retour est un ri- tuel chaleureux et fertile en échanges. Le Vietnam fait partie de notre espace affectif. Autour de cette mission, des amitiés très fortes se sont construites. Quel bonheur de constater chaque année les progrès de l’orthopédie pé- diatrique vietnamienne. Quelle satis- faction d’assister au développement spectaculaire de ce pays. Avec André Kaelin, l’année dernière, nous avons partagé une grande émotion. Nous avons été invités à consulter et opérer des enfants à Nhi Dong2 : un hôpital magnifique, un très long rectangle de trois étages, avec des couloirs lumi- neux ouverts sur de grands jardins, des salles d’opérations spacieuses. Un hô- pital avec une architecture moderne, d’avant garde. Quelle n’a pas été notre surprise d’apprendre que cet hôpital avait été construit il y a plus d’un siè- cle par Eiffel ! Après la Poste de Saïgon, après le pont sur le Mékong, Eiffel avait donc marqué de son empreinte ce pays… ! Et après tant de turbulences historiques, la vie, l’amitié, la fraternité ont repris leurs cours avec les chirur- giens de Children Action. Mille mercis à Bernard Sabrier de sou- tenir moralement, financièrement cette mission Franco -Suisse. Mais les actions humanitaires de notre société sont multiples, elles ne s’arrêtent pas au Vietnam. Certains se sont investis en Côte d’Ivoire, d’autres à Kaboul, d’autres en Birmanie, d’autres à Gaza, à Haïti, d’autres en Afrique du Nord. Combien de chirurgiens étrangers ont été accueillis et formés dans nos ser- vices ? Ces actions sont nos plus belles lettres de noblesse. Ensemble, nous partageons les mêmes valeurs morales, les mêmes idéaux, nous puisons notre énergie dans la fra- ternité, l’humanisme et la solidarité. Ensemble, nous regardons dans la même direction. Notre métier nous élève. Il fait de nous des citoyens du monde. Les enfants sont notre préoc- cupation quotidienne, notre obses- sion permanente. La Société Française d’Orthopédie Pédiatrique a fait sienne cette citation de Saint-Exupéry: « Etre homme, c’est être responsable, c’est sentir en posant sa pierre que l’on contribue à bâtir le monde ». Pr A. Diméglio Sommaire Trois rencontres avec Alexandre Yersin ......2 par P.-Y. Zambelli Missions orthopédiques au Vietnam Comment ça marche ? ......................................5 par M. Dutoit Mission «Children Action» au Vietnam .......8 par A. Kaelin Des opérations pour guérir et apprendre à soigner Missions orthopédiques au Vietnam........ 13 par B. Sabrier, S. Kolly Chirurgie de la scoliose au Myanmar ....... 15 par J. Sales de Gauzy, JL Jouve, Zaw Wai Soe Mission pédiatrique en Bulgarie ................ 17 par B. Fragnière Orthopédie pédiatrique à l’hôpital Mère Enfant «Le Luxembourg» à Bamako (Mali)................................................ 18 par C. Bronfen, L. Marcucci, G. Pierrard, B. Her, P. Cuny, P. Besnard, A. Simaga MSF et l’activité chirurgicale traumatologique ............................................. 19 par P. Hérard

La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

octobre - novembre 2011 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours

Bureau de la SOFOPPrésident : C. Bonnard - 1er Vice-Président : C. romana - 2e Vice Président : J. LeChevaLLier - Futur 2e Vice Président : C. Karger

Ancien Président : C. morin - Secrétaire Général : J.L. Jouve - Trésorier : P. LasComBes Membres du Bureau : B. de BiLLy, F. ChoteL, a KaeLin, P mary, J. saLes de gauzy (soFCot), P WiCart

la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse www.saurampsmedical.com

FondateurJ.C. POULIQUEN †

EditorialisteH. CArLIOz (Paris)Rédacteur en chef C. MOrIN (Berck)

Membres J CATON (Lyon)

P CHrESTIAN (MarseilleG FINIDOrI (Paris)

J L JOUVE (Marseille

r KOHLEr (Lyon)P LASCOMBES (Nancy)G F PENNEÇOT (Paris)

M rONGIErES (Toulouse)J SALES DE GAUzY (Toulouse)

r VIALLE (Paris)et le GrOUPE OMBrEDANNE”

Correspondants étrangersM BEN GHACHEM (Tunis)

r JAWISH (Beyrouth)I. GHANEM (Beyrouth)

EditeurSAUrAMPS MEDICALS.a.r.l. D. TOrrEILLES

11, boulevard Henri IVCS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80Fax : 04 67 52 59 05

La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

N°34

Editorial SO.F.O.P.

L’ARC EN CIEL

C’est le drapeau du GEOP, comme dirait Nelson Mandela ! Ouvert aux enfants de tous les pays, de toutes origines reli-gieuses ou ethniques.Les Anciens, ceux qui ont créé le GEOP avaient défini sa feuille de route à Palavas : développer l’orthopédie pé-diatrique, lui donner une légitimité scientifique et enseigner cette disci-pline à tous, non seulement aux étu-diants francophones mais aussi aux étudiants étrangers. Ces fondateurs, à qui nous devons tout, ont sillonné le monde d’Abidjan à Téhéran, d’Alger à Lima, de Beyrouth à Montévidéo.Les relations internationales sont la force motrice de notre société. Il s’agit de faire connaître les travaux scien-tifiques mais aussi de développer un savoir faire chirurgical singulier. Notre discipline est au cœur de l’essentiel, au cœur de la vie et de l’avenir de nos enfants.C’est dans cet esprit qu’est née la mis-sion au Vietnam. Le Docteur Desgrip-pes a eu le grand mérite d’initier cette mission.

Après La Chaîne De l’Espoir, Children Action, grâce au soutien précieux, in-faillible de Mr Bernard Sabrier, cette mission a pu se poursuivre. Elle est de-venue Franco-Suisse. Ce partenariat a enrichi nos relations. Mais rien de tout cela n’aurait été possible sans Mme Phi et Mme Giang, ces combattantes de l’armée de l’ombre, qui toujours entou-raient familles et enfants d’un amour quasi maternel.Il s’agit d’une mission humanitaire unique au monde, exemplaire : elle s’appuie sur des chirurgiens de haut niveau, un support logistique très élaboré et surtout, ce qui fait sa force et son originalité, une continuité sans relâche. Avec Yersin et Pasteur, avec Dunant et Eiffel, la France et la Suisse, se sont retrouvées au Vietnam.Avec nos amis vietnamiens, nous avons fait plus que travailler ensemble. Nous avons partagé des émotions, des fêtes et aussi de grands chagrins après le décès du père de l’orthopédie pé-diatrique vietnamienne le professeur Phung. Avec le temps, nous sommes devenus une famille.

Chaque année, notre retour est un ri-tuel chaleureux et fertile en échanges. Le Vietnam fait partie de notre espace affectif. Autour de cette mission, des amitiés très fortes se sont construites.Quel bonheur de constater chaque année les progrès de l’orthopédie pé-diatrique vietnamienne. Quelle satis-faction d’assister au développement spectaculaire de ce pays. Avec André Kaelin, l’année dernière, nous avons partagé une grande émotion. Nous avons été invités à consulter et opérer des enfants à Nhi Dong2 : un hôpital magnifique, un très long rectangle de trois étages, avec des couloirs lumi-neux ouverts sur de grands jardins, des salles d’opérations spacieuses. Un hô-pital avec une architecture moderne, d’avant garde. Quelle n’a pas été notre surprise d’apprendre que cet hôpital avait été construit il y a plus d’un siè-cle par Eiffel ! Après la Poste de Saïgon, après le pont sur le Mékong, Eiffel avait donc marqué de son empreinte ce pays… ! Et après tant de turbulences historiques, la vie, l’amitié, la fraternité ont repris leurs cours avec les chirur-giens de Children Action.Mille mercis à Bernard Sabrier de sou-tenir moralement, financièrement cette mission Franco -Suisse. Mais les actions humanitaires de notre société sont multiples, elles ne s’arrêtent pas au Vietnam. Certains se sont investis en Côte d’Ivoire, d’autres à Kaboul, d’autres en Birmanie, d’autres à Gaza, à Haïti, d’autres en Afrique du Nord. Combien de chirurgiens étrangers ont été accueillis et formés dans nos ser-vices ? Ces actions sont nos plus belles lettres de noblesse.

Ensemble, nous partageons les mêmes valeurs morales, les mêmes idéaux, nous puisons notre énergie dans la fra-ternité, l’humanisme et la solidarité.Ensemble, nous regardons dans la même direction. Notre métier nous élève. Il fait de nous des citoyens du monde. Les enfants sont notre préoc-cupation quotidienne, notre obses-sion permanente. La Société Française d’Orthopédie Pédiatrique a fait sienne cette citation de Saint-Exupéry:« Etre homme, c’est être responsable, c’est sentir en posant sa pierre que l’on contribue à bâtir le monde ».

Pr A. Diméglio

SommaireTrois rencontres avec Alexandre Yersin ......2par P.-Y. zambelli

Missions orthopédiques au VietnamComment ça marche ? ......................................5par M. Dutoit

Mission «Children Action» au Vietnam .......8par A. Kaelin

Des opérations pour guériret apprendre à soignerMissions orthopédiques au Vietnam ........ 13par B. Sabrier, S. Kolly

Chirurgie de la scoliose au Myanmar ....... 15par J. Sales de Gauzy, JL Jouve,zaw Wai Soe

Mission pédiatrique en Bulgarie ................ 17par B. Fragnière

Orthopédie pédiatriqueà l’hôpital Mère Enfant «Le Luxembourg»à Bamako (Mali) ................................................ 18par C. Bronfen, L. Marcucci, G. Pierrard,B. Her, P. Cuny, P. Besnard, A. Simaga

MSF et l’activité chirurgicaletraumatologique ............................................. 19par P. Hérard

Page 2: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

2

Trois rencontres avec Alexandre Yersinpar Pierre-Yves Zambelli

Alexandre Yersin (1863-1943)Photo de Pierre Lanith Petit (Coll. Musée d’Orsay)

Fig. 1: la rue du Docteur Yersin à Morges,commune suisse du canton de Vaud

Gamin, je me souviens alors, un de mes meilleurs amis habi-tait, tout comme moi, la charmante ville de Morges (Fig. 1). Son père vétérinaire résidait à la rue du Dr Yersin. Mon esprit d’enfant, et naturellement simplificateur, fit l’amalgame en-tre le Dr Willi, le vétérinaire, et le Dr Yersin. Cela devait être le grand-père me disais-je !Plus tard au fil de ma scolarité, je compris que le Dr Yersin n’avait pas grand-chose à voir avec le père de mon ami et je compris que A. Yersin avait dû être un grand médecin et de plus une figure Morgienne notable. Il faut dire que nos parents, à l’époque, s’occupaient de politique locale et que tout ce qui était Morgien était par axiome au dessus de la norme. Durant notre éducation secondaire, l’histoire nous enseigna le cataclysme des grandes épidémies de peste qui ravagèrent l’Europe ; la peste noire du milieu du 14ème siècle puis la peste de Londres au 17ème et celle de Marseille au dé-but du 18ème laissant des édifices au Tessin et au sud de la France qui bornaient les limites de la contagion. Pas trop at-tiré par la précision historique, j’avais résumé dans mon es-prit que la bonne ville de Morges avait été affectée par une de ces épidémies et j’imaginais que Yersin avait contribué à la découverte de l’agent causal de cette maladie, ainsi que son traitement. La différence de date entre les épidémies du Moyen âge et la vie beaucoup plus contemporaine de A. Yersin (1863-1943) ne m’avait pas particulièrement inter-pellé. Ma première rencontre avec le personnage s’arrête là, A. Yersin avait été un grand homme, médecin et de surcroît de Morges, ville de mon enfance et de mes origines.Il ne m’en fallait pas plus.

Ma seconde rencontre avec A. Yersin, fut durant mes études de médecine. Pas tant grâce aux bases de microbiologie en-seignées durant le cursus, qui par ailleurs ne me fascinaient guère, mais principalement car la faculté de médecine de Lausanne comptait un auditoire A. Yersin. Je m’étais souvenu de ce médecin Morgien qui, non seulement avait son nom sur une plaque d’une rue de la ville de mon enfance, mais qui en plus avait un auditoire qui portait son nom. Cepen-dant, mes études me passionnaient et dans les innombra-bles notions et concepts ingurgités pour la préparation des examens propédeutiques, il y avait une petite place pour Yersinia Pestis, la bactérie ou plutôt le bacille découvert par A. Yersin. Je crois que mes souvenirs qui remontent à une trentaine d’années, gardaient l’idée assez imprécise que la peste n’était certes plus un problème de santé publique ac-tuelle, que Yersin l’avait découverte en Indochine. Je m’étais en ce temps interrogé sur ses conditions de travail là-bas, me demandant dans quel laboratoire il avait pu œuvrer et avec quel microscope et qualité d’image il avait pu travailler. Yersin ne m’avait pas trop marqué comme personnage, mais il devenait associé clairement à Yersinia Pestis, l’agent causal de la peste. La peste, dont les formes cliniques buboniques pulmonaires et septicémiques, ne laissait que peu de chan-ce de survie au patient en ces temps reculés. Le bacille est un coccobacille à la coloration bipolaire. On le retrouve en grande quantité dans les bubons qui correspondent à l’in-flammation aiguë d’un ganglion situé sur le premier relais de drainage. Les bubons sont localisés classiquement à l’aine voire dans le creux axillaire. C’est au niveau de cette lésion ganglionnaire que l’on trouve, dans une purée de pus, des germes en grande quantité. Les formes cliniques pulmonai-res ou septicémiques conduisent rapidement au décès du patient dès que le relais ganglionnaire est dépassé. Yersinia pestis est hautement pathogène pour les petits rongeurs, notamment les rats. C’est d’ailleurs le réservoir principal. La propagation de l’infection est le fait des ectoparasites du rat soit les puces (Xenopsylla cheopsis). Lorsque les rats attei-gnent un état de surpopulation en déséquilibre, ils meurent en grand nombre et les puces, aidées par des conditions d’hygiène très précaires à l’époque, pouvaient alors conta-miner de manière massive les populations des villes portuai-res où les rats pullulaient. L’homme devenait alors un hôte inhabituel pour ces puces en mal de rats survivants.

Page 3: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

3

Ainsi les grandes épidémies de peste purent se déclarer avec les conséquences que l’histoire nous conte, d’autant que la mortalité de l’infection non traitée est de l’ordre de 80-90 %. Par la suite, dans le cadre de ma formation en chirurgie or-thopédique, je dois avouer que la peste ne fut qu’un vague souvenir de bachotage et je n’imaginais pas être confronté à nouveau à A. Yersin, autrement que lors de cours que je don-nais dans l’auditoire portant son nom (Fig. 2) ou en passant, sans trop y penser, par la rue A. Yersin à Morges.

Plus tard, lors de missions en collaboration avec Children Action où j’ai accompagné Christian Morin à 7 reprises au Vietnam, Alexandre Yersin est revenu au présent, surpris de rencontrer une large avenue portant son nom à Hô-Chi-Minh City (Fig. 3) et apprenant qu’il était mort à Nah-Trang une ville localisée plus au Nord.

De plus cette ville possède un musée à son effigie. En plai-santant avec Ch. Morin, je lui disais alors ma fierté de savoir que Yersin était de Morges tout comme moi et en se bala-dant en fin de journée dans Hô-Chi-Minh City, je suis tombé sur le Livre de roux qui, par son intitulé, semblait donner une vision un peu différente ou originale du personnage. Je l’ai dévoré lors de notre retour dans l’avion et deux ans plus tard, j’ai eu l’envie de corriger mon ignorance du passé et de vous parler de ma troisième rencontre avec A. Yersin.

D’abord contrairement à ce que l’on peut lire dans le texte de Pierre Le roux, Yersin n’est pas né dans le Lavaux, mais à Aubonne une ville de La Côte sur les berges du Léman à une dizaine de kilomètres de Morges. Sa famille maternelle protestante, originaire des Cévennes, était venue s’y instal-ler à la révocation de l’édit de Nantes. Son père, prénommé aussi Alexandre, était intendant des poudres de la Suisse romande et professeur de sciences naturelles aux collèges de Morges et d’Aubonne. Le père d’Alexandre décédera peu avant sa naissance et sa mère s’installera à Morges pour y élever ses trois enfants. A 19 ans en 1882, il obtient son bac-calauréat es lettres et débutera ses études à Lausanne à la faculté de médecine, il les poursuivra à Marburg puis à Paris. Sous l’égide d’Emile roux, il intègre l’institut Pasteur et s’il-lustre par des découvertes en collaboration sur la diphtérie. En 1889, il défend sa thèse sur la tuberculose expérimentale et obtient la nationalité française l’année suivante. Il suit le cours de bactériologie de robert Koch à Berlin et, promis à un brillant avenir au sein de l’institut Pasteur, de manière assez surprenante, il obtient un titre de médecin des Messa-geries Maritimes et quitte Paris pour l’Indochine française. Nul ne sait exactement les raisons de ce revirement, certains arguent qu’il était tombé amoureux de la mer lors d’un sé-jour en Normandie, mais il est fort possible que cet homme jeune de 27 ans était un passionné, à l’esprit inventif et très ouvert, certainement très indépendant et qu’il eut besoin de prendre un peu de distance. Il dut ressentir le besoin d’in-connu, de mener sa barque de manière libre, peu attiré par les honneurs de la science ou de la capitale.Yersin n’était certainement pas très facile à vivre et surtout très têtu dans la volonté de réaliser ses idées en soit nom-breuses.

Après des péripéties tant administratives que pratiques, il obtient de se lancer dans des expéditions qui lui permet-tront de découvrir les terres inconnues de la région centrale de Vietnam. Lors de la première expédition en terrain très difficile, composé de fleuves tumultueux et d’une jungle hostile, il découvre Nha-Trang auquel il s’attache. Lors de ces expéditions, il observe, note, consigne des données scienti-fiques très diverses. Il se montre un scientifique ouvert aussi bien attiré par la cartographie, la géologie, l’étude de la fau-ne et de la flore. Mais, il analyse aussi les populations indigè-nes, leurs modes de vie avec de nombreuses réflexions sur l’agronomie et l’hygiène de ces peuples faisant de Yersin un anthropologue averti. Ses explorations sont saluées par les autorités et la corporation scientifique. Médecin-explorateur, il se rend à Hong Kong pour tenter d’apporter quelques lumières et une aide face à l’épidémie de peste descendue de Mongolie touchant les côtes sud de la Chine. On ne sait si il a été envoyé comme il le prétend

Trois rencontres avec Alexandre Yersinpar Pierre-Yves Zambelli

Fig. 2 : l’auditoire A. Yersin à la faculté de médecine de Lausanne

Fig. 3 : rue Yersin à Hô-Chi-Minh-Ville; le seul francophone avec Pasteur à « posséder » sa rue dans la capitale du Vietnam

Page 4: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

4

Trois rencontres avec Alexandre Yersinpar Pierre-Yves Zambelli

par la France pour protéger les intérêts nationaux face à cette épidémie ou si c’est lui, qui attiré par ce fléau et sa compréhension, a suscité son voyage à Hong Kong. En tous les cas, sur place sa collaboration initiale avec l’armée britannique fut assez difficile, et il dut s’installer dans une paillote proche de l’hôpital militaire où il mènera ses recherches. Il parle peu d’un concurrent direct sur place, Kitasato pionnier de l’école de microbiologie japonaise. La découverte du germe responsable de la peste aurait pu être attribuée au deux mais Yersin, grâce à son installation précaire sans étuve ni matériel scientifique sophistiqué, a joué de chance car la culture de Yersinia pestis s’est avérée plus aisée à température ambiante (28°). Il faut absolument lire le compte rendu scientifique de la découverte du bacille de la peste, il montre le génie de Yersin, l’acuité de son sens de l’observation et la rigueur de sa démarche scientifique. Il décrit les symptômes, il met en évidence le germe causal, précise sa mise en culture et démontre sa virulence en l’inoculant à des petits rongeurs… Il ne mettra par contre pas en évidence le rôle des puces comme vecteur inter-espèce laissant ce soin à Simond.

Après cette étape clé de sa carrière, un retour à Paris où il initie la sérothérapie de la peste, il exprime le souhait de repartir et fondera à Nha-Trang une succursale de l’Institut Pasteur de Saigon. Cette station de recherche dépasse le domaine de la microbiologie, Yersin y mènera certes des tra-vaux de sérothérapie et dans le domaine vaccinal, mais son esprit ouvert et ses idées profuses le poussent à s’intéres-ser à l’agronomie toujours soucieux du rapport de l’homme avec son milieu. Il introduira l’Hévéa en collaboration avec les entreprises françaises du caoutchouc, pour donner à ses dires un potentiel économique aux autochtones. Il s’intéres-se aux zoonoses du bétail. Il a le projet d’un Sanatorium sur le plateau de Dalat, station d’altitude pour les tuberculeux, loin des anophèles du paludisme.

Yersin est un homme, moderne, il a une des premières voi-tures d’Indochine, il s’intéresse à l’astronomie et installe une coupole à Nah-Trang…

Cet homme, sans doute pas facile, comme j’ai pu le décou-vrir semble n’avoir jamais été attiré par les honneurs, les fou-les et les distinctions, il n’a jamais porté sa croix de la légion d’honneur et s’est toujours caché des multiples titres et dis-tinctions qu’il a reçus. Je pense que son acte le plus « mé-diatique » est d’être resté président d’honneur de l’Institut Pasteur à Paris où il s’est rendu à la séance annuelle jusqu’à 77 ans… Il décédera à l’âge de 80 ans à Nah-Trang où il est enterré.

Bien sûr tout n’est pas clair ni transparent dans cette dé-couverte du personnage, mais j’ai été fasciné par son côté scientifique avant-gardiste. Il a ce côté protestant, individua-liste et indépendant. Il n’aimait pas les honneurs ni la foule, étonnamment il est bien plus connu et populaire au Viet-nam qu’en Helvétie ou en France. Je crois qu’il fut un grand médecin au sens large, utilisant le terrain « vierge » de l’Indo-chine inexplorée pour y parfaire ses réflexions et expérimen-tations sur l’interaction de l’homme avec la nature. Yersin, qui se considérait chercheur avant d’être médecin, par son approche anthropologique et sa vision avant-gardiste de la santé et de l’hygiène des populations, a contribué à dessiner les bases d’une médecine humaniste soucieuse de la santé publique. J’ai aimé découvrir ce personnage au cours de ces trois ren-contres et si Yersin fut incontestablement un médecin scien-tifique voyageur et explorateur, on ose espérer que les plus jeunes s’en inspirent et soient poussés à aller voir ailleurs pour aiguiser leur curiosité et étendre leurs connaissances. Mais que les moins jeunes se rassurent, car si les voyages forment la jeunesse, ceux réalisés plus tard, parfois, permet-tent de corriger l’ignorance, et donnent un sens au chemin parcouru.

l’ORTHOPÉDISTE PÉDIATRE ET lA JUSTICEL. Geffroy, S. Guillard, A. Hamel, E. Mayrargue,J.- M. Rogez

Isbn : 978 284023 722 8184 pagesmai 2011

30 €

La prise en charge de l’enfant grand handicapé en milieu hospitalier, relève d’une étroite collabora-tion interdisciplinaire, au centre de laquelle les infirmières ont un rôle majeur.Le polyhandicap est un état morbide de poly-déficience, maintenant reconnu par la société, en par-ticulier sous la pression des associations de famille. Il est heureusement passé le temps de la conno-

tation péjorative que le vocabulaire qualificatif comportait : aliéné, boiteux, arriéré, débile, difforme, estropié, idiot, incurable, taré, conduisant à une souffrance de la famille et à une exclusion de ces personnes.La prise en charge de l’enfant grand handicapé en milieu hospitalier est un problème complexe qui demande des compétences spécifiques et bien souvent une présence de tous les instants. C’est une charge de travail infirmière très lourde que l’on affronte avec d’autant plus de sérénité que l’on possède une véritable compétence dans ce domaine. La compétence s’acquiers par la connaissance et permet un soin efficace, rigoureux, sobre, respectueux de l’enfant, de l’accepter avec ses différences et sa person-nalité sans jugement.

Page 5: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

5

Missions orthopédiques au VietnamComment ça marche ?

par M. Dutoit

IntroductionL’activité de Children Action (CA) a débuté en 1996 et à ce jour plus de 43 000 consultations ont été réalisées (toute étiologie confondue). L’auteur du texte participe aux mis-sions depuis l’an 2000, et est chef de projet depuis 2004. A fin 2010 plus de 3700 interventions orthopédiques ont été réalisées par les chirurgiens européens en mission ainsi que par les chirurgiens vietnamiens. Dans le cadre des 7 missions orthopédiques annuelles de CA nous réalisons environ 175 opérations et 1000 consultations (anciens et nouveaux cas). De plus, près de 2872 appareillages orthopédiques ont été prescrits et plus de 700 chaises roulantes délivrées. Une telle activité nécessite une bonne organisation tant au niveau de CA que sur le terrain. Elle est riche d’enseignement, nous permettant non seulement de progresser, mais aussi d’amé-liorer la qualité de la prise en charge de nos patients. Avec le temps, en particulier dans les grands centres, la situation s’est sensiblement améliorée, mais le nombre de démunis, sans accès réel aux soins, demeure important dans tout le pays.

L’efficacité ainsi que la qualité d’une activité chirurgicale hu-manitaire programmée impliquent un certain nombre de conditions :• Organisation humanitaire structurée : statuts, program-

mes….• Chirurgiens formés, compétents et expérimentés (réfé-

rences pour nos collègues locaux, mais aussi pour les malades et leur famille)

• Organisation et ancrage local : recrutement des mala-des, choix des hôpitaux, collaboration avec nos collè-gues (formés ou en formation)

• Coordinatrice (teur) local• Suivi des malades• Autorisation des autorités sanitaires (« permis de travail »)

Le groupe CA des chirurgiens orthopédistes engagés au Vietnam est formé essentiellement de membres de la SO-FOP qui se connaissent bien et qui ont, très souvent, le même langage. Cette communauté d’idées est importante pour assurer le suivi de malades opérés par d’autres et pour réellement prendre charge les malades et leur famille. Ainsi la qualité de notre action dépend non seulement des indica-tions opératoires, de la réalisation de la chirurgie, mais aussi et surtout du suivi des malades ; plus de 60 % des cas sont revus ce qui représente pour les conditions locales un taux de revue important. Notre prise en charge est particulière-ment appréciée par les parents des enfants qui la compare à celle d’autres organisations humanitaires qui opèrent ou font opérer beaucoup d’enfants sans en assurer le suivi.La qualité de notre suivi est appréciée non seulement par les parents des patients atteints d’affections orthopédiques, mais aussi pour les patients neurologiques faute de structu-res adéquates locales et pour lesquels les traitements occi-dentaux ne sont pas envisageables. L’expert étranger dans l’esprit des familles vietnamiennes est souvent l’ultime re-cours : « on a tout fait pour l’enfant, même l’expert ne peut rien faire ». L’abstention thérapeutique fait appel à la connais-sance non seulement de l’histoire naturelle des pathologies, mais aussi à l’appréciation des possibilités thérapeutiques locales qui ont, en 10 ans, en particulier dans les grands cen-tres, fait de grands progrès.

Organisation pratique Recrutement des malades-coordination localeLe recrutement des malades s’est fait, pendant de nombreu-ses années par un groupe de volontaires locaux se rendant dans les provinces et prenant en charge les enfants dému-nis, sans vrai tri des malades. Depuis quelques années le re-crutement se fait de plus en plus avec la collaboration des hôpitaux dans lesquels nous opérons ce qui contribue à la formation médico-chirurgicale de nos collègues vietna-miens. Les actions de recrutement dans les provinces (an-nonce presse, TV, demande spécifique, etc.) peuvent être fai-

Fig. 1 : hôpital de Thanh Hoa situé à 150 Km au sud ouest de Hanoi et avec lequel nous collaborons régulière-ment à raison de 2 à 3 missions par an depuis 2009

Page 6: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

6

Missions orthopédiques au VietnamComment ça marche ?

par M. Dutoittes par des médecins délégués des hôpitaux dans lesquels nous opérons, dans le cadre des missions chirurgicales ou de consultation de CA. L’organisation et la mise sur pied dès 2007 de missions de consultation (3 par an actuellement) permet à CA de se dé-placer auprès des plus démunis, loin des grands centres et de les faire bénéficier d’un traitement chirurgical. Ces mis-sions, sans stress chirurgical, permettent d’examiner les malades, d’expliquer aux parents l’intervention et ses sui-tes. Nos collègues vietnamiens en formation assistent à ces consultations et ils sont ainsi formés à l’examen clinique et au raisonnement médical, souvent encore fragmentaires. La langue reste malheureusement un obstacle important pour la communication non seulement avec les familles, mais aussi avec les internes qui n’ont le plus souvent que des connaissances très partielles de l’anglais. Ces difficultés linguistiques existent aussi au bloc opératoire et la collabo-ration d’une traductrice ou d’un traducteur est impérative (le plus souvent la coordinatrice locale).Notre action ciblée permet de par la collaboration avec un nombre restreint d’hôpitaux d’assurer la formation et à terme, mais toujours pour l’instant, sous contrôle des chirur-giens de CA (indication opératoire, suivi) une prise en charge locale d’abord pour des cas simples, puis plus complexes

Coordinatrice localeElle joue un rôle essentiel dans l’existence et la pérennité de nos missions tant au niveau du recrutement, de la chirurgie que du suivi des malades. Elle est en relation étroite avec les autorités politiques nationales et locales. Elle joue un rôle primordial de traductrice pour les parents, les infirmières du bloc et les internes. Un dossier est établi pour chaque malade. Il est dans la règle dactylographié et accessible par Intranet (voir plus loin). Il est régulièrement mis à jour. La coordinatrice doit être particulièrement efficace, ses tâches sont multiples : organisation et réalisation du recrutement, de l’hospitalisation, du voyage éventuel des patients et de leur famille, de l’intendance. De plus il faut veiller à avoir en suffisance le matériel chirurgical, les plâtres, les médica-ments. Elle est en relation régulière par Internet avec le chef de projet et les chirurgiens.

Interventions chirurgicalesElles se déroulent dans un nombre limité d’hôpitaux afin d’as-surer une gestion des risques et complications la meilleure possible (le Vietnam est un grand pays !). Ainsi nous opérons dans 3 hôpitaux au Sud Vietnam à Ho Chi Minh ville et ses environs, dans 1 hôpital au nord à Thanh Hoa à 150 km de Hanoi (Fig. 1) et vraisemblablement dès l’an prochain dans un hôpital au centre. L’amélioration de la couverture médi-cale au Sud a permis au cours du temps de diminuer le nom-bre de missions et de développer notre action dans d’autres provinces défavorisées. La qualité du matériel chirurgical très simple, voire primitive au début a progressé, ce d’autant plus que CA fournit ses propres boîtes, des moteurs électri-ques et leurs accessoires pour nombre d’indications spéci-fiques. Néanmoins, dans certains hôpitaux l’entretien du matériel local peut réserver quelques surprises lors de la chirurgie. Au bloc opératoire l’obstacle linguistique est tou-jours là, atténué en raison de l’apprentissage « manuel » par compagnonnage.

Avant de passer à la description du déroulement d’une mis-sion il importe de souligner quelques éléments essentiels à la qualité de notre action : • Indication chirurgicale, on ne peut tout opérer dans

le cadre d’une action humanitaire (sélection lors de la consultation).

• Conditions locales adéquates : hygiène, stérilité, maté-riel chirurgical anesthésie, soins post op

• Technique chirurgicale adaptée, simple, pas d’acroba-tie

• Soins et surveillance postopératoire• Suivi des malades• Antalgie et prophylaxie antibiotique fixés par des direc-

tives écrites des experts de CA• Prévention et traitement des complications. Le Vietnam

c’est loin !

Déroulement de la missionLa mission débute en général par une journée de consulta-tion au cours de laquelle sont examinés les nouveaux cas, soit sélectionnés lors de mission de consultation de CA afin de préciser l’indication opératoire, soit sélectionnés par nos collègues vietnamiens.Un certain nombre de consultations sont des contrôles, soit suivi à court et moyen terme de patients opérés par l’équipe actuelle lors de missions antérieures, soit suite de traitement de patients opérés récemment par d’autres chirurgiens. Bien entendu les patients au bénéfice d’un traitement conserva-teur sont également revus (Fig. 2).

Lors des consultations il est actuellement possible pratique-ment dans tous les hôpitaux d’avoir rapidement des inves-tigations complémentaires : labo, rx, échographie, CT scan et IrM ce qui permet de préciser l’indication et la tactique opératoire.

Fig. 2 : consultation d’un nourrisson avec atteinte neurologique sévère ( arthrogrypose). En collaboration avec la coordinatrice locale (Mme Giang), démonstrations pour le père et les assistants de quelques ma-nipulation simples des pieds à effectuer tous les jours et visant à éviter un enraidissement rapide des pieds.

Page 7: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

7

Missions orthopédiques au VietnamComment ça marche ?

par M. Dutoit

Le programme chirurgical débute dans la règle dès le 2ème jour, souvent en parallèle sur 2 tables, dans la même salle, et avec l’aide de nos collègues vietnamiens que nous aidons aussi suivant les cas (Fig. 3). Si l’on opère, durant la même mission, dans plusieurs hôpitaux la consultation précède toujours le programme chirurgical. Par ailleurs tout au long de la mission un certain nombre de consultations « spon-tanées et inattendues » sont assurées ! Le dernier jour de la mission est consacré à la revue de tous les patients opérés : contrôle clinique et rx, pansements, réfection ou renfor-cement des plâtres. Le traitement ultérieur est clairement défini.

Dossier Children ActionPour chaque malade un dossier est constitué. Il comporte identité du patient, date de naissance, lieu de consulta-tion, code CA, noms des chirurgiens, ainsi qu’une photo et d’éventuelles rx. La première fiche comporte une brève des-cription de l’histoire du malade, de l’examen clinique et des propositions thérapeutiques. Le groupe diagnostique de la pathologie traitée y est schématiquement défini en co-chant une des cases proposées (Fig. 4a). Une deuxième fiche comporte le rapport opératoire, les ordres postopératoires (Fig. 4b) et dans une troisième le résumé de la consultation de suivi ainsi que le plan de traitement (Fig. 4c).Ce dossier est en grande partie dactylographié, puis mis en ligne sur le site intranet de CA dans les jours qui suivent la mission. Cette façon de faire est la seule qui permet de retrouver les cas, de suivre leur évolution, les complications et d’établir des statistiques d’activité .Elle permet aussi, avec l’aide de notre coordinatrice locale dans une certaine mesure, de « court-circuiter » les problèmes de langue. Les contacts di-rects avec les chirurgiens vietnamiens sont possibles, mais plutôt rares et davantage de type demande d’avis que liés au suivi d’un patient opéré.En conclusion, le Vietnam change. Les enfants les plus jeu-nes sont assurés, il est possible de souscrire une assurance pour un traitement .Ces progrès restent cependant encore inégalement répartis dans la population et les plus dému-nis, surtout en dehors des grands centres demeurent sans prise en charge thérapeutique.CA a déjà commencé sa mue comme en témoignent le soutien à l’hôpital de Thanh Hoa, l’action à venir au centre, proche des ethnies minoritaires.

Fig. 3 : bloc opératoire de l’hopital de Thanh Hoa,construction termi-née en 2007. Deux tables opératoires par salle

Fig. 4 : fiches sont d’abord remplies à la main, puis dactylographiée et mises sur le site intranet de CAa) fiche diagnostic, b) fiche CRO, c) fiche de suivi

En orthopédie pédiatrique quand on a commencé la prise en charge d’une pathologie avec retentissement fonction-nel durable il est difficile, voire impossible de s’arrêter. Le relais complet par les structures locales prendra encore du temps.L’organisation du travail dans les hôpitaux se modifie, des impératifs d’horaire apparaissent et la question de la pro-longation de la durée des missions va se poser : 2 semaines par exemple permettrait non seulement de mieux prendre en charge plus de malades, mais aussi d’améliorer la trans-mission du savoir et favoriser le relais local. Un bon mis-sionnaire doit non seulement être très expérimenté, mais aussi connaitre l’histoire naturelle des pathologies orthopé-diques, connaître et appliquer les traitements conservateurs qui dans des conditions précaires gardent toute leur valeur. Pas d’acrobatie chirurgicale.

Le chef de projet est le répondant et le consultant auprès de CA et de la coordinatrice locale pour tout ce qui concerne les missions. Il participe activement aux missions. Il définit et coordonne la répartition des missions dans l’année en étroi-te collaboration avec la coordinatrice locale et la directrice de CA. Il s’occupe également en partie de la logistique du matériel chirurgical et non chirurgical, etc. Il a surtout l’hon-neur et la chance de participer à un programme chirurgical cohérent, animé par des collègues compétents œuvrant, dans un même état d’esprit, pour la guérison ou le soulage-ment des enfants qui nous sont confiés.

Page 8: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

8

Mission «Children Action» au VietnamLes prises en charge en orthopédie pédiatrique :

expérience des missionnairespar A. Kaelin

Children Action, organisation humanitaire destinée prin-cipalement aux enfants, organise et prend en charge des missions orthopédiques au Vietnam, depuis de nombreu-ses années. Environ tous les 2 mois, une équipe de deux chirurgiens orthopédistes pédiatres expérimentés séjourne une semaine au Vietnam. Leurs activités de consultations, de chirurgies et de contacts auprès des médecins orthopé-distes locaux sont organisées par la coordinatrice locale de Children Action.Chaque groupe de missionnaires est stable depuis de nom-breuses années et l’organisatrice locale, connaissant les compétences spécifiques de chacun des groupes, va sélec-tionner les patients qui pourront être pris en charge de la manière la plus efficace, selon la mission en cours.Chaque mission, au fil des années, trouve sa spécificité et, dans cet article, je décrirai plus particulièrement l’expérien-ce clinique que nous avons eue avec Alain Dimeglio, lors de nos dix missions communes.La typologie des patients qui nous sont présentés lors d’une mission dépendra, non seulement de la composition médi-cale de celle-ci mais également de son lieu d’action. En effet, si une partie de l’activité se déroule à Ho Chi Minh City, les moyens diagnostiques, chirurgicaux, anesthésiques et de suivis post-opératoires seront plus performants qu’une ac-tivité en province, loin des grands centres.Les patients sont également vus en contrôle d’évolution et en contrôle post-opératoire, de même qu’à titre d’avis et de confirmation de diagnostic. Le triage des patients qui seront vus en consultation est réa-lisé dans les provinces et confirmé par la coordination de Children Action, de même que par des chirurgiens mission-naires expérimentés.La pratique de l’orthopédie pédiatrique lors de missions Chil-dren Action au Vietnam demande, de la part des chirurgiens, une grande flexibilité et beaucoup d’expérience. Nous nous retrouvons, pour un temps limité, dans un environnement dont nous ne contrôlons qu’une partie des éléments. Les pa-tients ont souvent des anamnèses succinctes, les renseigne-ments donnés par les parents ou les grands enfants néces-sitant toujours une traduction. Il y a peu de documents qui supportent l’évolution, lors de l’analyse de nouveaux cas.Les consultations sont limitées en temps et l’expérience per-sonnelle de chacun permet de diriger l’attention sur un pro-blème spécifique pour lequel une prise en charge efficace serait la plus utile au patient. Lors des consultations en pro-vince, il est possible d’obtenir, lors de la consultation, des ra-diographies simples ou des analyses de laboratoire de base. Si la consultation a lieu à Ho Chi Minh City ou dans un hôpi-tal équipé de moyens d’imagerie plus sophistiqués, CT-scan ou résonnance magnétique seront disponibles dans des dé-lais relativement rapides. Notre démarche est parfois frus-trante : à plusieurs reprises, nous avons eu, lors des missions, à examiner des garçons âgés de 5 ou 6 ans, avec difficultés de marche, pour lesquels une myopathie de Duchenne est suspectée et confirmée par l’analyse de la créatinine phos-phokinase; la prise en charge de tels patients est malheureu-sement impossible, dans le cadre de nos missions.Par contre, les consultations de suivis post-opératoires et de suivis de contrôles à long terme sont extrêmement uti-les et permettent d’assurer aux patients, qui ont été opérés

par nos collègues de missions précédentes, une prise en charge optimale par le contrôle des plaies, des plâtres, de la consolidation, des progrès fonctionnels et d’ajustements thérapeutiques à moyen ou long terme. Les consultations à long terme sont hautement utiles pour juger du respect de certaines consignes de rééducation ou de suivi et permet-tent de doser les indications opératoires de futurs patients venant de provinces dont nous connaitrons mieux les possi-bilités de prise en charge, grâce à ces contrôles.

L’acte chirurgicalLes blocs opératoires dont nous disposons sont équipés de manière très différente. Le bloc opératoire de l’hôpital de traumatologie et d’orthopédie de Ho Chi Minh City est équipé de manière satisfaisante. Les salles sont de grande taille, l’hygiène et les procédures sont de standard « orthopé-dique », les anesthésistes sont compétents pour de la chirur-gie lourde, exceptés pour des petits enfants. Les implants standards sont disponibles, les instrumentations plus spé-cifiques, plus particulièrement pour la chirurgie du rachis, doivent être prévues d’avance et payées par Children Ac-tion. Les médecins orthopédistes du CTO, que tous les mis-sionnaires connaissent bien, sont intéressés et participent volontiers aux actes chirurgicaux, ce qui permet des échan-ges de l’enseignement et, surtout, d’impliquer ces médecins dans le suivi post-opératoire. Les blocs opératoires des hôpitaux d’enfants ont l’avantage d’avoir des équipes d’anesthésistes habitués à la prise en charge de « petits » et d’avoir des soins post-opératoires et des soins intensifs adaptés aux enfants. Par contre, ils possè-dent des équipements techniques limités dans le domaine orthopédique. Les actes chirurgicaux, réalisés dans les hôpitaux de provin-ce, nécessitent beaucoup plus d’adaptation de la part des chirurgiens en mission. L’hôpital nous prête une salle d’opé-ration, durant un week-end entier. L’équipe de Children Action, qui comprend des anesthésistes volontaires, instru-mentistes, aides administratifs, arrive avec tout le matériel nécessaire pour de la chirurgie simple.Deux tables d’opération sont installées dans la même salle, les anesthésistes, extrêmement efficaces, endorment et sur-veillent leurs patients avec des moyens très simples et sont très astucieux pour donner aux patients un confort opéra-toire maximal, tenant compte des conditions.Le matériel à notre disposition est un ma-tériel de base, pincet-tes, ciseaux, bistouris, clamps, rugines, ci-seaux à frapper (Fig. 1).

Fig. 1 : plateau d’instru-ments dont nous dispo-sons pour la majorité des interventions : allonge-ments tendineux, cure de pieds bots, malformations simples des extrémités.

Page 9: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

9

Mission «Children Action» au VietnamLes prises en charge en orthopédie pédiatrique :

expérience des missionnairespar A. Kaelin

Au fil des années, le matériel, qui appartient et qui est géré par Children Action, est beaucoup plus important : nous pouvons disposer de fixateurs externes, de moteurs pour faire les trous de vis et des ostéotomies ainsi que de certains moyens simples d’ostéosynthèses. Il reste cependant néces-saire de s’assurer, avant toute chirurgie, de savoir quel est l’implant ou l’outil disponible pour réaliser le geste prévu. Il y a 10 ans, nous disposions d’un matériel de plâtres très friable et qui se dégradait rapidement, actuellement les bandes plâtrées sont de standard européen. Les antibioti-ques sont disponibles et utilisés en prophylaxie pour tous les cas, les infections post-opératoires, qui ont un impact sur le résultat final de la chirurgie, sont très rares. Par contre, l’antalgie post-opératoire est difficile à obtenir. Il est parfois également compliqué de s’assurer que les ordres, donnés par les chirurgiens en fin d’intervention, sont respectés dans ce domaine.Chaque missionnaire devra donc, tenant compte de ses compétences, du geste à réaliser et de l’endroit dans lequel il se trouve pour l’effectuer, décider si le traitement est possi-ble ou si l’enfant devrait être transféré dans un centre mieux équipé ou, éventuellement, convoqué lors d’une mission ultérieure durant laquelle du matériel adéquat sera dispo-nible.

Les soins post-opératoiresLes suites post-opératoires immédiates sont réalisées dans l’hôpital où la chirurgie a été pratiquée. Le chirurgien opéra-teur revoit l’enfant entre le 2ème et 4ème jour post-opératoire. Il peut contrôler la plaie, refaire le pansement, changer le plâ-tre et ajuster les ordres. La plupart des patients rentrent dans leur province, qui peut être très éloignée d’un lieu de soins. Lorsqu’une rééducation est nécessaire, Children Action pos-sède un centre à Bien Hoa (40 km au nord de Ho Chi Minh City) où les enfants peuvent résider, ainsi que leur famille, et bénéficier de rééducation spécialisée durant quelques se-maines. Ce sont principalement des enfants neurologiques qui bénéficient de ce type de prestations.Les enfants sont contrôlés à moyen ou long terme par les missions Children, si possible le contrôle s’effectuera par la même équipe qui a réalisé la chirurgie. Les pansements post-opératoires et le traitement des plaies sont effectués de manière tout à fait satisfaisante. La rééducation dépend beaucoup de l’endroit d’origine du patient et, malheureu-sement, des traitements kinésithérapiques suivis et effica-ces ne peuvent être proposés, avec le risque de perdre une partie importante du bénéfice chirurgical. Les changements de plâtres sont effectués de façon adéquate, s’il s’agit d’un plâtre d’immobilisation simple ; par contre s’il s’agit d’un plâ-tre de contention avec effet de réduction ou de plâtres plus compliqués, comme des culottes plâtrées, après une réduc-tion ouverte de hanche, il est très difficile de savoir quel est le niveau de connaissance et de compétence des personnes qui doivent changer ces appareils plâtrés.

Efficacité et limites des missions orthopédiquesChildren Action au VietnamDe façon indiscutable, le système de santé vietnamien, dans son organisation actuelle, ne peut pas prendre en charge toutes les pathologies de l’appareil locomoteur de sa jeune population en croissance.

Il existe de nombreux médecins orthopédistes vietnamiens bien formés en Europe, qui exécutent, principalement dans les hôpitaux de Ho Chi Minh City, des actes chirurgicaux comparables à ceux que l’on pratique dans des hôpitaux européens. Cependant, l’accès à ce type de prestations est difficile car une participation financière est exigée des familles et que les coûts sont particulièrement élevés lors d’actes chirurgicaux sous anesthésie générale et nécessitant des matériaux d’ostéosynthèse. Children Action trouve ainsi sa vraie place comme organisation de prestations de soins caritative car elle permet l’accès aux soins à des enfants qui, principalement pour des raisons financières et géographi-ques, n’y ont pas droit.

4 exemples de situations cliniques illustreront, de façon plus explicite, notre action sur place : Gestes simples, efficacité garantie (Fig. 2)

Fig. 2a : correction de duplication du pouce (WASSEL IV)

Fig. 2b : correction de pieds bots varus équins non traitésà l’âge de 11 ans

Page 10: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

10

Mission «Children Action» au VietnamLes prises en charge en orthopédie pédiatrique :

expérience des missionnairespar A. Kaelin

La majorité de nos interventions chirurgicales, dont la réali-sation est possible et le résultat très favorable, concerne des pathologies malformatives localisées nécessitant des gestes simples comme la résection de doigts surnuméraires, les os-téotomies de correction axiale pour des rachitismes caren-ciels traités, les cals vicieux, les épiphysiodèses asymétriques ainsi que la prise en charge de pieds bots varus équin, soit dans leur phase précoce (rare) ou dans une phase séquel-laire, à un âge plus avancé. Ces gestes chirurgicaux peuvent être pratiqués, même dans les hôpitaux de province, dans de bonnes conditions d’anesthésie, la stabilisation par bro-ches ou plaques, vis si disponibles, suivie de plâtres, permet d’obtenir d’excellents résultats. La correction arthrodèse de pieds bots varus équins invétérés redonne à ces patients une capacité de marche meilleure et un statut social diffé-rent car la déformation n’est plus pénalisante, du point de vue extérieur. Les allongements tendineux, principalement au niveau du tendon d’Achille, chez les enfants hémiplégiques marchant, rentrent également dans cette catégorie. Exemple, la main simple, le cal vicieux, l’ostéotomie de fémur.

Les situations limites ou à risques d’échec (Fig. 3)

Fig. 3: traitement tardif d’une luxation congénitale de la hanche par une réduction sanglante et ostéotomie pelvienne. En fin d’interven-tion la hanche est réduite correctement. Les plâtres de maintien seront confectionnés par des jeunes internes inexpérimentés avec comme conséquence une luxation secondaire.

La chirurgie des malformations complexes, les réductions sanglantes avec ostéotomie de bassin pour luxation de han-che de l’enfant âgé, la prise en charge d’enfants spastiques, quadriplégiques représentent des challenges dans nos ins-titutions européennes.

L’application de ces techniques dans l’environnement viet-namien ne fait qu’augmenter les risques. Ces patients et leur famille ont une forte demande de prise en charge et le chirurgien qui va décider, souvent en collaboration avec son collègue de mission, porte là une lourde responsabilité. Dans le cas d’une réduction sanglante de hanche, associée à une ou des ostéotomies de réorientation pelvienne et fé-morale, il devra faire face, non seulement aux complications habituelles qu’il pourrait avoir en Europe, c’est-à-dire trou-bles trophiques et nécrose de la tête fémorale et comme il ne dirigera pas le suivi post-opératoire, il y a des risques de re-luxation lors d’un changement de plâtre, d’ankylose de hanche dans une position peu fonctionnelle. Les allonge-ments simples peuvent être réalisés relativement facilement et le suivi effectué sur place. Les allongements avec correc-tion axiale ou des fixateurs externes de correction de défor-mations de pieds varus équins invétérés sont plus difficiles à appliquer et, surtout, à confier à des collègues locaux pour le suivi d’évolution d’une correction multiplanaire. Les chirurgies à temps multiples nécessitant des techniques compliquées demanderont une organisation particulière-ment précise afin que le patient puisse être convoqué au moment nécessaire et qu’un chirurgien compétent soit pré-sent dans cette mission.

Organisation programmée (Fig. 4)Le roulement des missions dans le courant de l’année, la connaissance des compétences et des spécificités de cha-cun des chirurgiens et participants nous permettent de pla-nifier des chirurgies particulières pour des missions précises. Cette organisation est surtout valable pour les interventions du rachis où il est possible, à l’avance, d’organiser, par exem-ple, que des chirurgiens locaux effectuent une libération antérieure, la pose d’un halo et de traction et qu’un mission-naire, avec compétences spécifiques dans le rachis, vienne effectuer l’instrumentation et la spondylodèse par voie pos-térieure.

Fig. 2c : déformation en valgus du fémur distal secondaire à une épi-physiodèse latérale, correction chirurgicale et ostéosynthèse avec du matériel de récupération disparate.

Fig. 4a : scoliose très sévère (plusieurs temps opératoires, instrumentation)

Page 11: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

11

Mission «Children Action» au VietnamLes prises en charge en orthopédie pédiatrique :

expérience des missionnairespar A. Kaelin

Les chirurgies des malformations complexes de la main ne sont pas effectuées par tous et seront reconvoquées pour des missions spécifiques, de même pour les traitements nécessitant la mise en place de fixateurs externes, avec cor-rection complexe. Les missions spécifiques prennent égale-ment en charge des enfants spastiques, réalisant des injec-tions de toxine botulinique.

Les prises en charge impossibles (Fig. 5)Certains patients présentent des pathologies impliquant divers organes, des pathologies complexes comme les syn-dromes arthrogrypotiques, des myopathies, des atteintes métaboliques, des atteintes neurologiques sévères et ils ne peuvent malheureusement pas être pris en charge dans le cadre de ces missions. L’efficacité limitée dans la qualité de vie, le suivi de rééducation et l’encadrement social sont par-fois également des contre-indications. Ce sont là toujours des situations tragiques où l’on doit agir avec compassion et prendre le temps d’expliquer et de consoler ces familles qui se déplacent souvent sur de longues distances, pleines d’es-poir que les médecins venant de si loin pourront résoudre les problèmes de leur enfant.

Fig. 4b : malformation complexe de la main(spécialiste chirurgien de la main)

Fig. 4c : Cal vicieux du fémur (intervention dans un bloc opératoire avec fluoroscopie, implants pour ostéosynthèse)

Fig. 5a : malformation congénitale du rachis,agénésie sacrée, paraplégie

Fig. 5b : syndrome de Cornelia de Lange,la tristesse de la maman reflète notre impuissance, mais nous lui de-vons explications et compassion

Page 12: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

12

Mission «Children Action» au VietnamLes prises en charge en orthopédie pédiatrique :

expérience des missionnairespar A. Kaelin

ConclusionNos missions d’orthopédie pédiatrique au Vietnam organi-sées par Children Action sont un outil extrêmement efficace de prise en charge d’enfants présentant des pathologies de l’appareil locomoteur qui ne pourraient pas accéder aux soins dans leur pays. Le médecin en mission doit s’adapter aux conditions locales, tout en gardant présent à l’esprit qu’il trouvera des patients à pathologies compliquées, rares et difficiles, qu’il n’a peut-être pas l’occasion de traiter dans sa pratique habituelle. Les gestes devront être adaptés, de façon précise, aux conditions techniques disponibles, plus particulièrement dans le domaine de l’imagerie préopéra-toire et des moyens techniques et d’instrumentation dis-ponibles pour le geste chirurgical. Souvent, ce seront les conditions de suivi postopératoire et plus particulièrement de rééducation qui conditionneront une prise en charge. Il est également primordial de garder, avec nos collègues vietnamiens, une communication riche et bidirectionnelle.

Souvent, ils ont des solutions à nous proposer, compte tenu de leur expérience du terrain. Ils ont, pour la majorité d’entre eux, une très bonne formation chirurgicale. Par contre, nous pouvons leur apporter une méthode de réflexion, d’appro-che diagnostique et d’indication opératoire. L’enseignement est dispensé par le compagnonnage et les discussions lors des consultations ou des chirurgies, de même que par l’organisation de cours plus formels rassem-blant des orthopédistes pédiatres de Ho Chi Minh City, voire même de tout le Vietnam, comme cela a été le cas à quatre reprises.La situation des soins médicaux au Vietnam s’améliore de manière significative, cependant il reste encore de très nom-breux enfants qui n’ont pas accès à des soins médicaux dans notre domaine, pour lesquels nos missions orthopédiques restent nécessaires.

Page 13: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

13

Des opérations pour guérir et apprendre à soignerMissions orthopédiques au Vietnam

par B. Sabrier et S. Kolly

Chaque année, depuis 1996, la Fondation suisse Chil-dren Action organise une douzaine de missions chirurgi-cales au Vietnam dont six sont consacrées à la chirurgie orthopédique. Faciliter l’accès aux soins mais également transmettre un savoir-faire sont les buts de ces mis-sions.

Au Vietnam, des milliers d’enfants touchés dans leur santé physique ne peuvent accéder aux traitements adéquats par manque de moyens financiers, de compétences nécessaires ou encore de structures appropriées. Faute de soins, ces en-fants sont privés d’une insertion normale dans la société et pour certains condamnés à une existence de vie très cour-te. C’est ce constat qui, dès 1996, a poussé Children Action, dans un premier temps en collaboration avec une associa-tion humanitaire française, puis dès 2000 de façon autono-me, à mettre en place, à Hô Chi Minh Ville et dans les Pro-vinces avoisinantes un programme chirurgical afin d’opérer des enfants souffrant de diverses pathologies et de former le personnel soignant local.

L’implication de chirurgiens de haut niveau Le programme chirurgical que mène Children Action au Vietnam s’est développé notamment grâce à l’engagement et l’implication de chirurgiens européens de haut vol. Une douzaine de chirurgiens orthopédistes partent chaque an-née, en binôme, et offrent 10 jours de leur temps.Children Action attache une importance particulière au choix des chirurgiens.

Les familles qui viennent aux consultations accordent aux praticiens étrangers une confiance aveugle. Elles confient leur enfant pour des opérations parfois très lourdes, souvent sans poser aucune question, convaincues qu’il s’agit d’une opportunité unique d’offrir les meilleurs soins à leur enfant. Les médecins vietnamiens sont quant à eux demandeurs de nouvelles techniques et avides de connaissances.Face au crédit sans faille que les familles portent à Children Action et aux attentes des équipes locales, il est du devoir et de la responsabilité de la Fondation de s’entourer de prati-ciens expérimentés et aguerris aux techniques de pointe.

Opérations et compagnonnage Comme se déroule une mission ? Deux journées sont consa-crées aux consultations des enfants qui ont été présélec-tionnés à l’occasion d’une mission précédente et pour qui un acte chirurgical a été recommandé. Ensemble avec les médecins vietnamiens, les « missionnaires » posent les diagnostics et les indications opératoires. Les malades souffrent de pieds-bots, de suites de fractures, de scolioses et autres malformations des membres inférieurs et supérieurs. Un grand nombre d’infirmes moteurs cérébraux se présen-tent pour lesquels, si malheureusement peu de choses peu-vent être faites, il est quand même possible par de petites interventions, l’apport d’une chaise roulante, de conseils de prise en charge aux parents, d’améliorer leur quotidien. Le bloc opératoire est réservé pour 3 à 4 jours. Chirurgiens, anesthésistes, instrumentistes et infirmières locaux assistent les deux experts européens. L’objectif est de donner, par le biais du compagnonnage chirurgical un support pédagogi-que pratique aux chirurgiens locaux afin qu’ils puissent par-faire leurs méthodes et par la suite exploiter ces nouvelles notions.

Privilégier la qualité à la quantitéChildren Action privilégie la qualité au nombre et, plutôt que d’opérer le plus grand nombre d’enfants possible, la Fondation assure une prise en charge structurée, une atten-tion particulière étant donnée à la phase post opératoire. La succession régulière des missions, au rythme d’une visite tous les 2 mois, permet d’instaurer un suivi de qualité. 62 % des enfants opérés reviennent au moins une fois pour une consultation de contrôle et parmi eux 44 % se représentent à plusieurs reprises, permettant ainsi de suivre leur évolu-tion.

Bernard Sabrier et un jeune aveugle vietnamien

En février 1994, Bernard Sabrier, Président d’une importante Société de gestion institutionnelle, décide à titre strictement personnel de fonder Children Action, Fondation suisse, dont il devient le Président. Sa démarche est initialement motivée par le pourcentage élevé des frais administratifs ponctionnant trop souvent les dons qu’il effectuait à diverses associations et le manque de rigueur dont faisaient preuve certaines d’entre elles. Il décide ainsi, dès le premier jour, de couvrir personnellement l’intégralité des frais de fonctionnement de Children Action, permettant que chaque franc donné soit alloué à 100% à un projet sur le terrain. Mesurer l’impact, intervenir de façon rigoureuse, veiller à ce que l’éthique soit respecté avec un souci constant d’apporter les meilleurs soins font partie de ses préoccupations principales. Pour ce faire, il s’entoure d’un Conseil de Fondation et d’un Comité d’éthique aux compétences multiples ainsi que d’équipes scientifiques et médicales de premier plan.Active aujourd’hui dans huit pays (Argentine, Cameroun, France, Pérou, Roumanie, Suisse, Sri Lanka, Vietnam) la Fondation concen-tre plus particulièrement son action dans les domaines médicaux/chirurgicaux et le soutien psychologique. Chacun des projets menés vise à apporter un réel changement dans la vie des enfants.

Page 14: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

14

Des opérations pour guérir et apprendre à soignerMissions orthopédiques au Vietnam

par B. Sabrier et S. Kolly

Grâce à un site intranet sur lequel sont enregistrés tous les dossiers des patients, les différents opérateurs ont la possi-bilité de consulter les fiches des enfants opérés, facilitant le suivi essentiel à la qualité de la prise en charge.

Un accès aux soins qui reste parfois difficile,malgré l’évolutionAu cours des 10 dernières années le Vietnam a connu un es-sor économique considérable. Si les structures hospitalières situées dans les grandes villes que sont Hô Chi Minh et Ha-noi se sont nettement améliorées tant au niveau de la qua-lité de prise en charge que des équipements à disposition, les hôpitaux de provinces manquent encore de savoir-faire et de matériel de pointe.

L’écart entre les riches et les pauvres s’est également creusé et accéder aux soins reste encore problématique pour les indigents, trop pauvres pour pouvoir payer une assurance médicale ou des soins médicaux.

Face à cette évolution et soucieuse de ne pas se substituer au gouvernement ou de ne pas devenir uniquement un ap-porteur de fonds, Children Action a décidé de décentraliser son action et de concentrer de plus en plus ses interventions vers les hôpitaux de provinces, privilégiant le transfert de connaissances et l’accès à des soins appropriés pour de pe-tits patients vietnamiens ne pouvant pas se rendre dans les établissements des grandes villes.

1-3 décembre 2011 Tozeur, Tunisie43ème réunion du GES(Groupe d’Etude de la Scoliose)[email protected]

11-13 janvier 2012 Nice11èmes journées de la SOFAMEAwww.technimediaservices.fr

14-16 mars 2012 Le Corum, MontpellierLes journées de la Sofop(Séminaire d’enseignement, séminaire de rechercheet séminaire paramédical)[email protected]

18-21 avril 2012 HelsinkiEPOS meetingwww.epos.efort.org

16-19 mai 2012Denver, ColoradoPOSNA meetingwww.posna.org

6-9 juin 2012Palais des Congrès, BordeauxCongrès SFP (Société Française de Pédia-trie)www.sfpediatrie.com

7-9 juin 2012Palais des Congrès, Strasbourg7ème congrès de la SFCRwww.sfcr.fr

Réunions à venir

Page 15: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

15

Chirurgie de la scoliose au Myanmarpar J. Sales de Gauzy, J.-L. Jouve et Zaw Wai Soe

En 2005, sur l’instigation du Pr Patel (président de l’AMFA ; association médicale Franco-Asiatique), nous avons débuté un programme de formation de chirurgie de la scoliose au Myanmar. Le Pr zaw Wai Soe (chef du service de chirurgie du rachis au Yangon Orthopaedic Hospital), avec qui nous collaborons dans ce projet, a présenté le bilan des 5 premiè-res années au congrès d’Orthopédie du Myanmar en 2009. Nous présentons des extraits sa communication traduite en français qui permet d’apprécier le ressenti de ces missions par nos collègues Birmans.

Depuis cette communication, 4 nouvelles missions ont été réalisées. Au cours de chaque mission, nous constatons des progrès constants de l’équipe chirurgicale qui est devenue pratiquement autonome sur le plan technique. La formation actuelle est plus centrée sur la stratégie et les indications opératoires. Le succès de ce programme repose, d’une part sur la très grande implication et la volonté de connaissance de l’équipe chirurgicale birmane qui s’est investie à fond dans ce projet et d’autre part, sur le soutien de l’AMFA qui a battit les structures permettant de réaliser ces interventions et qui permet la logistique et le financement de ces mis-sions. Enfin, la société Medtronic nous aide beaucoup par les dons de matériel nécessaire à la poursuite des interventions chirurgicales.Dans l’avenir, ce programme de coopération s’orientera vers le développement de la chirurgie de la scoliose à Mandalay qui est la 2ème ville universitaire du pays et une extension du programme de formation à d’autres pathologies, notam-ment sur la prise en charge et la chirurgie de la luxation congénitale de hanche.Ces missions scolioses s’intègrent dans le cadre des actions multiples de l’AMFA (construction de dispensaires, équipe-ments d’hôpitaux, missions de chirurgie cardiaque et de dermatologie…) dont on peut retrouver l’ensemble des pro-jets sur le site www.amfa-france.org.

Communication présentée par le Pr Zaw Wai Soe et l’équipe d’Orthopédie du Yangon Orthopaedic Hospital au congrès de la société d’Orthopédie du Myanmar en 2009

La chirurgie de la scoliose au Myanmar n’en est qu’à son dé-but. Avant 2005, les patients scoliotiques étaient traités or-thopédiquement par plâtres ou corsets par les équipes d’or-thopédie et de médecine de rééducation. Les corsets étaient réalisés au National rehabilitation Hospital.

Période préparatoireEn 2005, un nouveau chapitre s’est ouvert avec l’aide de l’AMFA (Association Médicale Franco-Asiatique). Le pro-jet de chirurgie de la scoliose au Myanmar a été bâtit par le professeur Kyaw Myint Naing (Professor and Head of the department, Orthopaedics and Traumatology Department, Institute of Medicine I, Yangon) et le Professeur Alain Patel (President de l’AMFA, Paris, France). La chirurgie de la scolio-se est un travail d’équipe. Avant de débuter la chirurgie, tous les éléments nécessaires à sa bonne réalisation ont été dé-veloppés au sein du Yangon Orthopaedic Hospital, création d’une unité de soins intensifs, programme de training pour les infirmières et les anesthésistes, matériel anesthésique, salle d’opération, implants chirurgicaux et ancillaire (dons de la société Medtronic), sélection des patients, chambre de suite postopératoire et programme de rééducation. A cette époque, il n’y avait pas d’unité de soins intensifs au Yangon Orthopaedic Hospital. Tous ces moyens ont été développés à partir de 1999 lors de l’arrivée du Professeur Kyaw Myint Naing en provenance de l’institut de Médecine de Manda-lay. Deux équipes chirurgicales françaises spécialisées dans la chirurgie de la scoliose sont venues alternativement au Myanmar, le professeur Jérôme Sales de Gauzy de Toulouse et le professeur Jean-Luc Jouve de Marseille avec leurs anes-thésistes (docteurs Jean-Pierre Couvely, Jean-François Trin-chero et Isabelle Suprano). L’objectif était de développer la chirurgie de la scoliose au Myanmar, former les chirurgiens orthopédistes, les anesthésistes et l’ensemble de l’équipe, transférer la technologie et bâtir une unité de chirurgie du rachis.

Matériel et méthodeDe 2005 à 2009, 31 patients, 16 filles et 15 garçons, ont été opérés au Yangon Orthopaedic Hospital. 15 scolioses idio-pathiques, 10 scolioses congénitales, 3 neurofibromatoses, 2 poliomyélites et 1 syringomyélie.

Sélection des patientsUne première sélection des patients est effectuée avant l’ar-rivée de l’équipe française. Tous les dossiers sont adressés et discutés par E mail. A l’arrivée de l’équipe française, les indi-cations sont finalisées et les bilans préopératoires vérifiés.

Préparation préopératoireAu bilan préopératoire de routine sont associés une IrM, une exploration fonctionnelle respiratoire, une échographie cardiaque.Le test de réveil est expliqué au patient.

Fig. 1: Yangon Orthopaedic Hospital à Yangon (ex Rangoon) en Birma-nie (actuelle République de l’Union du Myanmar)

Page 16: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

16

Chirurgie de la scoliose au Myanmarpar J. Sales de Gauzy, J.-L. Jouve et Zaw Wai Soe

Technique opératoire • 1° tempsDans la majorité des cas un temps antérieur de discectomie a été réalisé par thoracotomie ou thoraco-phréno-laparoto-mie. La durée opératoire est de 2 à 3 heures.

• 2° tempsréalisé le même jour. L’instrumentation utilisée a été du CD 1ère génération ou du CD Horizon (don de la société Med-tronic). Un test de réveil a été effectué systématiquement. L’arthrodèse a été réalisée par greffons iliaques. La durée opératoire a été en moyenne de 4 heures.

Transfusion sanguineL’intervention se déroule sous Exacyl. Deux poches de sang sont mises en réserve. Une transfusion est réalisée en cas de taux d’hématocrite inférieur à 20 % et de taux d’hémoglo-bine inférieur à 8g en période postopératoire.

Suivi postopératoireLes patients sont surveillés pendant 3 jours en soins inten-sifs. La douleur postopératoire est traitée par Nabuphine, Profenid et Paracetamol. Le Patient est assis au 2ème jour, levé au 3ème jour et débute la marche au 4ème jour. Un corset plâtré ou thermoformé est mis en place pour 2 mois. Les patients sont renvoyés chez eux à la 3ème semaine postopératoire.

Complications• Une brèche durale réparée, sans complication

ultérieure. • Une infection profonde traitée par débridement et anti-

biothérapie. • 2 cas de ruptures d’implants pour lesquelles le matériel

a été retiré à la 2ème année postopératoire.

Projets futursCette communication avait pour but de présenter les pre-mières scolioses opérées au Myanmar et n’a pas de valeur scientifique. Dans le futur, des études scientifiques sur la chirurgie de la scoliose au Myanmar devront être effectuées. Un programme de surveillance et de dépistage scolaire de la scoliose doit être développé afin d’aider les enfants présen-tant une scoliose. La chirurgie de la scoliose est coûteuse et techniquement compliquée. La poursuite de ce programme de formation doit permettre de réaliser ces interventions en routine au Myanmar.

Fig. 2 : L’équipe du Pr Zaw Wai Soe (2° en partant de la gauche) et l’anesthésiste madame le Dr Thin (4°)

PRISE EN CHARGE DE l’ENfANT GRAND HANDICAPÉ MOTEUREN MIlIEU HOSPITAlIERP. Peyrou, D. Moulies

Isbn : 978 284023 730 3162pagesmars 2011

30 €

Cet ouvrage est le premier du genre dans les monographies de la SOFOP, entièrement consacré à l’étude du cadre juridique dans lequel évolue le chirurgien orthopédiste de l’enfant. Le sujet est dif-ficile sur un terrain qui ne nous est pas familier mais notre environnement a changé et nous devons nous adapter avec dignité. Notre responsabilité médicale est particulière car nous prenons en charge

des mineurs dans un contexte hautement affectif, et, si la doctrine ainsi que la jurisprudence semblent assez clairement établies pour les malades majeurs, cela ne me semble pas tout a fait le cas pour les mineurs. L’évolution de notre société conduit à une aug-mentation de la sinistralité et à un accroissement du nombre de demandes de réparation à laquelle nous n’échappons pas. Notre responsabilité peut être mise en cause sur le plan pénal, civil ou disciplinaire et le cadre juridique s’est trouvé fortement modifié depuis 1997. Cet ouvrage se veut très didactique, destiné aux jeunes et moins jeunes, afin qu’ils puissent repérer et déjouer toutes les embûches secrétées par l’environnement de l’orthopédiste de l’enfant. Nous méconnaissons bien souvent le cadre juridique dans lequel nous travaillons: cadre administratif, judiciaire, pénal ou civil, ainsi que les nouvelles obligations professionnelles de formation et de prévention des risques.

Page 17: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

17

Mission pédiatrique en Bulgariepar B. Fragnière

La Fondation Swissclinical (http://www.fondationswissclinical.org/bienvenue.html) est constituée d’un petit groupe familial suisse et qui a été fondée en 2007.

Sa mission est d’apporter une aide médicale orthopédique aux enfants défavorisés dans la région de Stara zagora en Bulgarie. L’appareillage en orthopédie étant quasiment inexistant dans ce pays, elle y développe une activité de technique orthopédique à l’aide de techniciens et bottiers orthopédistes suisses qui produisent différents moyens auxiliaires sur place tout en formant des candidats bulgares pour assurer une réussite de son engage-ment sur le long terme.Les enfants bénéficiant de ces appareillages sont identifiés par le Dr Bruno Fragnière, membre de la SOFOP et médecin de la Fondation. Certains enfants sont aussi opérés en collaboration avec le Dr Peter Bratoev dans une petite clinique de Stara zagora. Cette prise en charge orthopédique concerne dans environ 80 % des cas des enfants avec des pathologies d’ordre neuro-orthopédique et dans 20 % des cas congénitaux. Depuis le début de son engagement en Bulgarie, plus de 150 enfants ont bénéficié d’un traitement par appareillage, opération ou les deux. L’équipe de la Fondation se rend en Bulgarie 5 à 6 fois par année durant une semaine.

Page 18: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

18

Orthopédie pédiatrique à l’hôpital Mère Enfant« Le Luxembourg » à Bamako (Mali)par C. Bronfen, L. Marcucci, G. Pierrard, B. Her,

P. Cuny, P. Besnard, A. SimagaA l’instigation d’une collègue chirurgien de la main j’inter-viens depuis 2001 en orthopédie pédiatrique à l’hôpital « Mère enfant » à Bamako .

Cet hôpital dépend de La fondation pour l’Enfance qui est en partie financée par le Duché du Luxembourg. Il s’agit d’un séjour par an de 10 à 15 jours.Au début seuls un ou deux chirurgiens intervenaient, main-tenant une équipe s’est constituée avec chirurgiens, anes-thésistes, infirmiers- anesthésistes et infirmières de bloc opé-ratoire et depuis deux ans des pédiatres. Nous travaillions initialement avec l’association « Santé et Développement », puis en 2003 nous avons fondé l’association « Amadou » pour faire venir à Caen un jeune Malien drépanocytaire ayant une pandiaphysite du fémur et pour continuer à opérer au Mali.

L’hôpital et le bloc opératoire se sont améliorés au fil des années. Voici comment est organisé le séjour : le premier jour, une grande consultation permet de sélectionner les patients qui pourront être opérés (en fonction du matériel disponible, des conditions locales et du suivi envisagea-ble). Le programme opératoire ainsi établi, la consultation d’anesthésie est faite au fur et à mesure. Nous bénéficions des compétences des chirurgiens et des infirmiers Maliens en place et depuis 2 ans des internes du service d’orthopé-die qui nous sont envoyés par le Professeur Sidibé attaché à l’hôpital Mère Enfant.

Les suites opératoires (précisément consignées sur un ca-hier) sont assurées par le Dr Simaga et les infirmiers de bloc opératoire de l’hôpital. Nous restons en contact avec eux par mail et téléphone. Une kinésithérapeute américaine qui habite à Bamako où son mari est en poste prend en charge certains patients à titre gracieux.En orthopédie pédiatrique 70 à 80 patients sont vus en consultation et une trentaine de patients sont opérés par sé-jour. Il s’agit de pieds bots varus équin congénitaux comme ce pied bot dans le dos de sa maman (Fig. 1), de déforma-tions d’origine neurologique : séquelles de poliomyélite ou d’injections intramusculaires au niveau de la fesse ou de la cuisse (varus équin du pied, raideur de genou), d’infections ostéoarticulaires et d’ostéomyélites au stade aigu ou au sta-de de séquelles comme l’ostéomyélite bilatérale avec frac-ture des deux fémurs (Fig. 2), de séquelles de traumatologie de déformations des membres inférieurs (varus, valgus).Certains patients sont opérés plusieurs fois au fil des séjours. Nous essayons dans la mesure du possible de laisser aux familles les médicaments nécessaires aux soins après notre départ (pansements, antibiotiques) et de les revoir au cours des séjours suivants. Ces séjours réguliers, toujours dans la même structure nous ont permis d’établir une coopération et des liens d’amitié avec les médecins de l’hôpital et cer-tains patients.

Fig. 1 : le pied bot dépasse du pagne porte bébé

Fig. 2 : séquelles en traumatologie

Page 19: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

19

MSF et l’activité chirurgicale traumatologiquepar P. Hérard

Longtemps parent pauvre de l’action humanitaire la chirurgie, particulièrement la traumatologie, a connu depuis quelques années une importante évolution tant en qualité qu’en nombre de programmes à Médecins Sans Frontières (Nigeria, Yémen, rDC, Jordanie, rCA, Tchad, Sri Lanka, Haïti, Somalie).Selon un rapport de l’OMS d’Avril 2008 la traumatologie repré-sente en Afrique la plus importante proportion de pathologies chirurgicales ignorées suivie par les complications obstétrica-les, les cancers et les anomalies congénitales. Les traumatismes emportent plus de vies que le Sida, la tuberculose et le palu-disme réunis chez les enfants de moins de 5 ans (PLoS Medi-cine, June 2008, Vol5,Issue 6,e121). Seul la coïnfection VIH, chez les adultes, tue plus que les accidents de la voie publique, mais pour chaque tué combien de dizaines de patients sont aban-donnés avec des infirmités permanentes. Cet état de fait connu depuis longtemps à MSF nous a conduits à modifier nos programmes en donnant une part plus large à la chirurgie et en particulier à la traumatologie. C’est ainsi que de-puis 2007 le nombre d’interventions pratiquées augmente de 8 à 10 % par an. En 2010 sur 25 516 interventions pratiquées, la traumatologie représentait 48 % de l’activité chirurgicale (dont 18 % pour les soins aux brulés), l’obstétrique 19 % la chirurgie viscérale 6 %. Le reste pouvant être qualifié de chirurgie « mi-neure ». L’essentiel des interventions a été pratiqué en urgence (86 %) dont 35 % en urgences vraies et 51 % en urgences diffé-rables (à moins de 48h).Les actes de violence (4 082 interventions) ont été à l’origine de 16 % de nos interventions.La nature de l’activité traumatologique est cependant extrême-ment variable d’un projet à l’autre :

Contexte de chirurgie de guerre comme en rDC, Yemen, Côte d’Ivoire ou Lybie. Nous y appliquons les principes de base de ce type de chirurgie avec débridement des plaies et mise en place de fixateurs externes ou traitements conservateurs par traction.Nos collègues viscéraux reçoivent, avant leur départ, une for-mation à une nouvelle génération de fixateurs externes d’uti-lisation simple.

Chirurgie mixte de guerre et de traumatologie de la voie pu-blique ou de catastrophes naturelles comme à Haiti. L’impor-tance des lésions rencontrées, les mauvais résultats des trai-tements par traction, l’encombrement des services nous ont conduits à créer des centres de traumatologie et à introduire la pratique de l’ostéosynthèse sur deux sites (Nigéria, Haiti) en dépit de l’avis défavorable pour cette pratique d’autres organi-sations. Tous nous promettaient des taux d’infection catastro-phiques. La mise en place de pré requis et de protocoles stricts

nous a permis d’éviter au maximum ce type de complications. Le développement d’hôpitaux gonflables nous a permis d’opé-rer dans deux salles opératoires au 12ème jour du séisme dans d’excellentes conditions d’hygiène et de stérilisation (Fig1 et 2).

C’est ainsi que sur les 3 années de 2007 à 2009, 1 793 ostéo-synthèses ont été pratiquées sur des fractures fermées avec un taux d’infection moyen précoce de 2.3 %. L’ostéosynthèse nous a permis d’abaisser la durée moyenne de séjour à 8 jours. Le suivi au long terme de ces patients est particulièrement difficile en raison des contextes d’insécurité et des difficultés de dépla-cement. La mise en place d’un système de suivi avec le dévelop-pement de la téléphonie mobile devrait nous permettre dans le moyen terme de mieux appréhender les résultats en termes de consolidation osseuse et de récupération fonctionnelle.

Chirurgie reconstructive comme à Amman en Jordanie pour les blessés civils du conflit irakien. La nature des lésions nous a conduits à structurer un centre chirurgical avec une associa-tion orthopédie, chirurgie plastique et maxillo-faciale du fait de l’impossibilité de traiter les patients à Bagdad. L’activité y est proche de celle de grands services européens de chirurgie os-seuse infectée.Les 2/3 des patients se présentent avec des lésions d’ostéites (évidentes ou cachées) évoluant depuis 2 ou 3 ans.C’est ainsi que sur une série de 60 patients ayant présenté initia-lement une fracture ouverte de jambe Gustillo 2 ou 3, 43 étaient infectés (30 % avec 1 germe, 27 % avec 2, les autres avec 3 à 6 germes souvent multi résistants en raison d’une antibiothéra-pie aveugle, anarchique et souvent de dernière génération ad-ministrée en Irak. Un quart des patients avaient subi une intervention en Irak, un autre quart deux et la moitié trois ou plus.Les résultats à 2 ans sont très satisfaisants dans 69 % des cas dans le groupe infecté et dans 78 % des cas du groupe non in-fecté.En conclusion nous pouvons affirmer que si la chirurgie est devenue une composante majeure des programmes de MSF c’est essentiellement à travers la chirurgie traumatologique. La mise en place de protocoles (douleur, prévention thromboem-bolique, antibiothérapie) tant en chirurgie qu’en anesthésie et l’observation de règles strictes d’hygiène et de stérilisation nous ont non seulement permis d’améliorer notablement les soins chirurgicaux mais aussi d’en faire bénéficier plus largement l’ensemble des projets.

Fig. 1 : tente gonflable à Haïti

Fig. 2 : intervention sous tente gonflable à Gazza

Page 20: La Gazette N°34 · 2011-11-04 · CS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

20

CAHIERS DU CERClE NICOlAS ANDRY N°5Y. Asencio, F. Bonnel, P. Candoni, P. Cronier & alIsbn : 978 284023 752 5238 pagesnovembre 2011

Cette année 2011 nous offre l’occasion de saluer le premier lustre d’existence du Cercle Nicolas Andry. Ce qui n’était, à l’origine, qu’une idée quelque peu décalée dans le climat ambiant d’une Société savante connue pour son sérieux et sa rigueur scientifique, s’est transformé, au fil des ans, en un moment fort du congrès de la SOFCOT.Chacun est surpris de constater qu’en cette période de turbulences de tous ordres, l’esprit orthopédique se révèle à lui même, ouvert à l’aventure de la pensée. La perte des repères et la recherche de sens sont les motifs habituellement avancés pour rendre compte de l’intérêt que portent des professionnels de santé à des horizons insoupçonnés, en réalité, la recher-che de sens, avant tout, la prise de conscience plus ou moins nette de l’épuisement d’un mo-

dèle à fournir du sens. Car nul ne peut désormais le nier : la médecine actuelle, qui englobe naturellement la chirurgie, est en crise, et nous sommes au seuil d’un nouveau paradigme dont les éléments structurants n’ont rien à voir avec l’édifice mis en place par un lent processus de quatre siècles. Les chirurgiens de la fonction que nous sommes, davantage préoccupés par la maintenance de la vie que par son maintien à tout prix, sont peutêtre plus aptes à s’emparer des problématiques globales qui agitent et pertubent une société dans son ensemble.C’est sans doute dans cette position d’avant poste, pour ne pas dire d’avant garde, que réside l’engouement pour les manifestations du Cercle Nicolas Andry. Ce Cercle n’a rien de mystérieux ni d’initiatique, et vous êtes tous invités, Amis de la SOFCOT, à participer au grand rassemblement de l’automne et à proposer, d’ores et déjà, le condensé de vos réflexions pour l’an prochain.

Alain C Masquelet

NOUVEAUTÉ

CAHIER DU CERClENICOlAS ANDRY N°2F. Dubrana, P. Gleyze,J. L. Husson, R. Kohler,P. Liverneaux,A. C Masquelet,P.-O. Pinelli, J. Puget, M. Rongières,J.-L. Tricoire

Isbn : 978 284023 597 2140 pagesnovembre 2008

CAHIERS DU CERClENICOlAS ANDRY N°1F. Dubrana, A. Fabre, P. Gleyze,J. L. Husson,D. Le Nen,A. C Masquelet

Isbn : 978 284023 541 580 pagesnovembre 2007

20 €

CAHIERS DU CERClE

NICOlAS ANDRY N°3L. Obert, J.M. Crolet,C. Meyer, B. de Billy

Isbn : 978 284023 645 0134 pagesnovembre 2009

20 €

CAHIERS DU CERClE NICOlAS ANDRY N°4I. Ausset, M. Caillol, J. Ca-ton, C. Charpail et al.

Isbn : 978 284023 707 5212 pagesnovembre 2010

30 €

20 €

30 €