26
Mécanique Physique (S2) 6 ème partie – page 1 6 ème partie La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout est parti de l’observation des planètes par les Grecs qui placèrent la terre comme centre de l’univers. La première hypothèse était que les planètes décrivaient des cercles concentriques autour de la terre. Sauf pour la lune, ça ne marchait pas très bien et Ptolémée proposa que les planètes se déplaçaient sur des cercles dont le centre lui-même se déplaçait sur un grand cercle concentrique autour de la terre. Les trajectoires obtenues étaient des épi- cycloïdes : Les trajectoires vues de la terre sont donc complexes et aucune loi simple n’émergeait pour expliquer ce mouvement. Le déclic vint de Nicolas Copernic (1473-1543) qui proposa de décrire le mouvement des planètes non plus pour un observateur terrestre mais relativement au soleil qui serait le centre du nouveau repère du système. Effectivement le mouvement des planètes vu par un observateur situé sur le soleil est bien plus simple. De plus comme la masse du soleil est très grande par rapport à celle des planètes, le soleil bouge peu (beaucoup moins que la terre en tous cas) et peut constituer un référentiel inertiel acceptable pour discuter de la dynamique. Kepler (1571 – 1630) travaillant sur les observations astronomiques de Tycho Brahé (1546 – 1601) utilisa ce référentiel solaire de Copernic et montra que toutes les planètes connues se déplaçaient précisément en suivant 3 lois : Loi 1 : Les planètes décrivent des orbites elliptiques, avec le soleil à un des foyers. Loi 2 (dite loi des aires) : Le rayon vecteur d’une planète par rapport au soleil balaie des aires égales en des temps égaux. Loi 3 : Le carré des périodes de révolution est proportionnel au cube des « rayons moyens » des trajectoires autour du soleil.

La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

  • Upload
    others

  • View
    6

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 1

6ème partie La gravitation universelle

Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière

Introduction

Tout est parti de l’observation des planètes par les Grecs qui placèrent la terre comme centre de l’univers. La première hypothèse était que les planètes décrivaient des cercles concentriques autour de la terre. Sauf pour la lune, ça ne marchait pas très bien et Ptolémée proposa que les planètes se déplaçaient sur des cercles dont le centre lui-même se déplaçait sur un grand cercle concentrique autour de la terre. Les trajectoires obtenues étaient des épi-cycloïdes :

Les trajectoires vues de la terre sont donc complexes et aucune loi simple n’émergeait pour expliquer ce mouvement. Le déclic vint de Nicolas Copernic (1473-1543) qui proposa de décrire le mouvement des planètes non plus pour un observateur terrestre mais relativement au soleil qui serait le centre du nouveau repère du système. Effectivement le mouvement des planètes vu par un observateur situé sur le soleil est bien plus simple. De plus comme la masse du soleil est très grande par rapport à celle des planètes, le soleil bouge peu (beaucoup moins que la terre en tous cas) et peut constituer un référentiel inertiel acceptable pour discuter de la dynamique. Kepler (1571 – 1630) travaillant sur les observations astronomiques de Tycho Brahé (1546 – 1601) utilisa ce référentiel solaire de Copernic et montra que toutes les planètes connues se déplaçaient précisément en suivant 3 lois :

• Loi 1 :

Les planètes décrivent des orbites elliptiques, avec le soleil à un des foyers.

• Loi 2 (dite loi des aires) :

Le rayon vecteur d’une planète par rapport au soleil balaie des aires égales en des temps égaux.

• Loi 3 :

Le carré des périodes de révolution est proportionnel au cube des « rayons moyens » des trajectoires autour du soleil.

Page 2: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 2

Voici des données actuelles pour les 9 planètes du système solaire (plus la lune)1 :

Basic Data about the Solar System

Body Mean radius, m

Mass, kg

Period of rotation, s

Mean radius of orbit, m

Period of orbital

motion, s

Eccentricity of orbit

Sun 6.96 × 108 1.99 × 1030 2.3 × 106 - - - Mercury 2.44 × 106 3.30 × 1013

5.10 × 106 5.79 × 1010 7.59 × 106 0.206 Venus 6.05 × 106 4.87 × 1024 2.1 × 107** 1.08 × 1011 1.94 × 107 0.067 Earth 6.37 × 106 5.97 × 1024 8.62 × 104 1.50 × 1011 3.17 × 107 0.017 Mars 3.39 × 106 6.42 × 1023 8.86 × 104 2.28 × 1011 5.95 × 107 0.093 Jupiter 6.98 × 107 1,90 × 1027 3.54 × 104 7.78 × 1011 3.75 × 108 0.048 Saturn 5.82 × 107 5.68 × 1026 3.68 × 104 1.43 × 1012 9.34 × 108 0.056 Uranus 2.37 × 107 8.70 × 1025 3.85 × 104** 2.87 × 1012 2.65 × 109 0.046 Neptune 2.24 × 107 1.03 × 1026 5.69 × 104 4.50 × 1012 5.21 × 109 0.010 Pluto 2.5 × 106 6.63 × 1023 5.51 × 105 5.90 × 1012 7.81 × 109 0.248 Moon* 1.74 × 106 7.35 × 1022 2.36 × 106 3.84 × 108 2.36 × 106 0.055 *Orbital data of the moon are relative to Earth. **Venus and Uranus exhibit retrograde rotation.

La Loi 2 paraît assez incroyable à trouver a partir d’observations. Examinons ce qu’elle veut dire avec la figure où S est le soleil et P une planète.

Pendant l’intervalle de temps dt, le point P se déplace en P’ et l’aire dA du triangle balayé SPP’ est donc comprise entre :

21 r2 dθ < dA <

21 (r + dr)2 dθ

où SP = r et SP’ = r+dr. Donc lorsque dt tend vers 0 :

dtdr

21

dtdA 2 !

= = cste

d’après la Loi 2.

Maintenant supposons comme sur le dessin que la force F qui agit sur la planète P est dirigée vers S. D’après ce que nous avons vu dans la partie 5, le moment de F par rapport à S est nul et donc le moment cinétique (angulaire) J de la planète obéit à:

J& = 0 1 Apparemment Pluton a été dégradée récemment de ce statut.

P’ v

F

S

P

x

θ

Page 3: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 3

et donc J = Cste.

Comme J = r × mv, (avec SP= r), J est perpendiculaire au plan du dessin (et dirigé vers le lecteur) et son module J est simplement :

J = m r uθ

en utilisant les coordonnées polaires r, θ : dans cette représentation les composantes de la vitesse radiales ur (la direction selon les r croissants) et azimutales uθ (la direction selon les θ croissants) sont r& et !&r .

Ainsi : J = m r2 dtdAm2

dtd

=! !

On voit tout de suite que si « on observe » un mouvement planétaire où dA/dt est constant, alors J est constant et si J est constant alors la force est dirigée vers S et donc centrale ! De plus la trajectoire est évidemment plane puisque la direction de J est aussi constante. On voit le contenu puissant de la loi des aires qui conduit naturellement au résultat que la force entre le soleil et la planète considérée est centrale.

Pour montrer que les forces de gravité sont en 1/(distance)2, l’intuition remarquable de Newton a fait le reste. Il pensa que la force d’attraction qui faisait tomber les pommes sur la terre avait la même origine que la force qui existait entre la terre et la lune. Cette intuition n’a rien d’évident car le mouvement de la pomme et de la lune sont très différents et en particulier la lune ne tombe pas sur la terre. En fait si elle tombe mais elle ne se rapproche pas. Galilée avait déjà mesuré l’accélération de la chute libre des corps (entre autres des pommes) à la surface de la terre : g = 9.81 m s-2.

Maintenant si la lune est également soumise à cette force de gravité terrestre, on doit pouvoir à partir d’observations astronomiques mesurer son accélération. Si la lune au point L ne subissait aucune force de la part de la terre, elle continuerait tout droit et arriverait en L’ pendant le temps Δt. Mais une force existe et pendant Δt, la lune tombe vers le centre de la terre de L’ à L". Ce faisant elle ne se rapproche pas de la terre car la trajectoire est quasi-circulaire. Ainsi selon Newton l’accélération centripète de la lune serait de même nature que l’accélération de la pesanteur à la surface de la terre. Mais on sait calculer

L

L"

L’

Lune

Terre

trajectoire circulaire de la lune autour de la terre

Page 4: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 4

l’accélération d’un mouvement circulaire et ici l’accélération radiale de la lune aL (vers la terre) vaut :

aL = ω2 R = 2

2

T4! R

où R est le rayon de l’orbite de la lune autour du centre de la terre et T sa période. Avec les données astronomiques de la table page 2 on obtient aL ≅ 0,27 10-2 m s-2.

Distance au centre de la

terre

accélération (m s-2)

pomme 6 377 km 9,81

lune 384 000 km 0,27 10-2

L’accélération de la lune est 3 633 fois plus petite que celle d’une pomme mais est située 60,3 fois plus loin du centre de la terre. Cela n’a pas dû prendre longtemps2 à Newton pour réaliser que (60,3)2 est suffisamment peu différent de 3 633 pour que ce soit une coïncidence et il en a déduit que lune et pomme étaient attirées vers le centre de la terre par une force de même origine physique qui variait comme 1/(distance au centre de la terre)2.

Restait la dépendance des masses en présence dans la force gravitationnelle. Galilée avait montré que la chute des corps s’effectue de façon indépendante de la masse d’une part et Newton, par sa 2ème loi, que cette accélération était égale à la force divisée par la masse donc la force devait être proportionnelle à la masse. A cause de la 3 eme loi, le principe de l’action et de la réaction, il n’est pas difficile de se convaincre que la force doit dépendre en fait du produit des masses des deux corps en interaction. La conclusion de tout ceci fut de proposer qu’entre deux masses quelconques m1 et m2 séparées d’une distance r, il existe une force d’attraction universelle qui s’écrit :

OA = r

!

F = "G m1m2

r2er (er vecteur unitaire // OA) (6.1)

où F est ici la force exercée par la masse 1 sur la masse 2 (sachant que 2 exerce sur 1 une force égale et opposée).

2 En fait ça a pris un peu de temps (6 ans quand même) car la valeur de la « distance » R à la lune fournie par les astronomes était suffisamment erronée pour que Newton retarde la publication de sa théorie.

O F

A

m1 m2

er

Page 5: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 5

La formule (6.1) fait apparaître une constante G la constante de gravitation universelle dont la mesure beaucoup plus tard en 1798 par Cavendish est une des belles pages de la physique expérimentale (voir plus loin).

G = 6,67 10-11 N m2 kg-2

Energie potentielle et vitesse d’échappement

La relation (6.1) donne la composante radiale (selon r) de la force exercée par la particule 1 sur 2 :

Fr = - G

!

m1m2

r2

Comme Fr ne dépend que de r, l’énergie potentielle U est simplement3 :

Fr = -

!

dUdr

soit U = - G

!

m1m2

r + C (une constante)

Note 1 : Cette relation généralise l’énergie potentielle à la surface de la terre m2gz trouvée au chapitre 4 pour une particule de masse m2 à une hauteur z de la surface de la terre lorsque que g l’accélération de la pesanteur ne varie pas. En effet si on écrit r=R+z avec R le rayon de la terre, on a :

U =

!

"Gm1m2R + z

# "Gm1m2R

1" zR

$

% &

'

( ) quand z<<R

L’expression simplifiée ci dessus coïncide avec m2gz pourvu que g =

!

Gm1R2

avec m1 la masse

de la terre. Si on connaît g et R, on voit que G n’est connu que si on connaît la masse de la terre mais elle est inconnue. C’est l’expérience de Cavendish qui en déterminant G en laboratoire permettra de déterminer la masse de la terre. L’ approximation d’un g constant est donc valable pour des déplacements petits par rapport au rayon de la terre, l’échelle de longueur naturelle qui apparaît.

Note 2 : On peut toujours définir l’origine de l’énergie potentielle comme il nous plaît. L’habitude est de prendre U = 0 lorsque les deux particules sont infiniment éloignées, ce qui implique C = 0.

L’énergie totale (cinétique + potentielle) de ces deux particules en interaction gravitationnelle est donc:

E = 21 m1 2

1v + 21 m2 2

2v -

!

G m1m2r

3 Seule la composante du gradient de U dans la direction radiale est non nul.

Page 6: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 6

On va d’abord s’intéresser au cas où m1 >> m2. En l’absence de forces extérieures la quantité de mouvement est conservée et ce centre de masse peut être pris comme origine d’un repère inertiel et ce centre de masse coïncide quasiment avec la position de m1. Comme m1v1+m2v2

=0, on voit que 21 m1

!

v12=

!

m2m1

"

# $

%

& ' 12

m2 22v . Dans ce cas l’énergie cinétique de la particule

la plus massive est négligeable devant celle de la particule légère dans le rapport m2/m1 et:

E ≈ 21 m2 2

2v -

!

G m1m2r

(6.2)

où v2 est proprement la vitesse mesurée par rapport au centre de masse du couple des deux particules.

La nature du mouvement de la particule 2 dans le domaine d’influence de 1 peut être décrit qualitativement en fonction de son énergie totale E (= EC + U). On a tracé en vert sur la figure l’énergie potentielle U en fonction de r.

(i) E = 0 (en noir sur la figure)

Si la particule 2 s’éloigne (par exemple) alors EC (en rouge) décroit mais lorsque r → ∞, EC → 0 et la vitesse de la particule tend vers zéro : on montrera que l’orbite est ouverte et correspond à une parabole et donc la particule s’échappe du champ gravitationnel de la particule massive ; si E > 0 (en bleu), l’orbite est aussi ouverte et la particule part à l’infini avec une énergie cinétique (et donc une vitesse) finie.

Si on prend 1 comme une planète de rayon R, un petit objet (m2) peut donc se libérer du champ gravitationnel de la planète si :

21 m2 2

2v ≥

!

G m1m2R

ce qui fournit la limite ve =

!

2 G m1R

"

# $

%

& ' 1/2

où ve est la vitesse d’échappement d’autant plus grande que la planète est massive. Si on fait

intervenir la masse volumique ρ de la planète, on voit que

!

m1R

"

# $

%

& ' 1/2

=4(3)

"

# $

%

& ' 1/2R et que pour

des planètes de masse volumique similaire c’est juste la taille (R) qui compte. Pour la terre ve ∼ 11.3 km s-1. Une molécule de gaz dont la vitesse est supérieure à ve peut se libérer de la gravité d’une planète. Les vitesses moyennes sont de l’ordre de 500 m s-1 pour l’atmosphère terrestre pour les gaz lourds (O2, N2) et donc assez faibles devant ve ce qui explique pourquoi la terre a gardé une atmosphère. Apparemment ce n’est pas le cas sur la lune qui n’est pas assez grande pour garder son atmosphère (ve ∼ 2⋅38 km s-1).

E = 0

U

EC

r E > 0

Page 7: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 7

(ii) E < 0 : considérons le cas d’une orbite circulaire qui est un cas particulier important.

Dans ce cas, l’accélération centripète de m2 s’obtient de la 2ème loi dans la direction radiale :

!

m2v22

r=

!

G m1m2r2

et donc l’énergie cinétique de 2 devient: =222vm21

!

G m1m22r

Si on reporte dans (6.2) on voit que l’énergie totale E : E = - 21

!

G m1m2r

est juste l’opposé de

l’énergie cinétique.

Cas général du problème dit à deux corps

Fait assez rare en physique, ce problème peut être résolu analytiquement de façon complète. Le problème à 3 corps, lui, n’est pas intégrable.

Les équations des deux particules m1 et m2 sont :

m1

!

˙ ̇ r 1 = -F et m2

!

˙ ̇ r 2= F

avec F la force gravitationnelle (6.1). La partie V nous indique comment procéder en considérant le centre de masse R = (m1r1 + m2r2) / (m1 + m2) qui obéit à :

0M =R&& (M = m1 + m2).

En l’absence des forces extérieures, le centre de masse n’accélère pas. On peut le choisir comme référentiel inertiel et donc comme origine des positions. D’autre part, on a vu comment faire apparaître une équation pour r = r1 – r2 en introduisant la masse réduite µ.

Soit : µ

!

˙ ̇ r = -F avec µ = m1m2/(m1 + m2)

avec (6.1) :

!

µ ˙ ̇ r =G m1m2

r2 er

soit encore :

!

˙ ̇ r =G Mr2 er (6.3)

On voit ici que le problème à deux corps a été ramené à celui d’un problème à un corps. En effet (6.3) s’identifie à l’équation gouvernant le mouvement d’une particule autour d’une autre, fixe. Cette équation différentielle est vectorielle et donc équivalente à trois équations différentielles du second ordre. Elle est non linéaire à cause du terme en r2. A priori un problème mathématique difficile mais aussi surprenant que cela puisse paraître, on peut

m1

m2

r1

r2

r

E < 0

U

EC

r

Page 8: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 8

trouver les solutions exactes de (6.3). Mais la recherche de ces solutions ne procède pas directement de 6.3 mais est guidée par la physique du moment cinétique et de l’énergie déjà introduite.

Supposons que l’on ait reussi à résoudre (6.3) et trouver r(t). Pour revenir aux positions des particules 1 et 2, on utilise :

r1 – r2 = r

m1r1 + m2 r2 = 0

r1 = Mm2 r et r2 =

Mm1! r (6.4)

Maintenant le moment angulaire total des deux particules est :

J = r1 × m1 1r& + r2 × m2 2r&

et en remplaçant r1 et r2 au profit de r via (6.4) :

J = µ r × r& (6.5)

L’énergie cinétique totale des deux particules est par ailleurs:

EC = 21 m1 | 1r& |2 +

21 m2 | 2r& |2

qui peut aussi se réécrire via (6.4) : EC = 21 µ |

!

˙ r |2

(i) L’équation (6.3) est celle du mouvement d’une particule soumis à une force centrale. Le moment de cette force est donc nul car F // r et J le moment angulaire est donc conservé. Comme J est perpendiculaire au plan (r,

!

˙ r ), cela veut dire que la trajectoire se déroule dans le plan fixe donné par les conditions initiales de (r,

!

˙ r ) à t=0.

La suite se déroule en coordonnées polaires r, θ vitesse radiale et azimutale ur , uθ sont données par :

ur =

!

˙ r

uθ = r !&

⇒ J = µ r2 !& (6.6)

(ii) L’équation de l’énergie procède de (6.3) en multipliant scalairement des 2 cotés

par r et en identifiant l’énergie cinétique et potentielle:

(puisque l’origine a été prise au centre de masse).

r θ

v uθ ur

Page 9: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 9

!

12

µ ˙ r 2

E C

1 2 4 3 4 "G

m1m2r

U potentielle1 2 4 3 4

= E (énergie totale)

soit :

!

12

µ(˙ r 2 + r2˙ " 2) #G m1m2r

= E (6.7)

On peut éliminer !& dans (6.7) à l’aide de (6.6) puisque J est constant :

!

12

µ˙ r 2 +J2

2µr2 "G m1m2r

V(r)1 2 4 4 3 4 4

= E (6.8)

Le premier terme est l’énergie cinétique du mouvement radial mais l’ énergie cinétique du mouvement azimutal apparaît maintenant comme une nouvelle énergie potentielle en 1/r2 qui s’ajoute à l’énergie potentielle gravitationnelle pour former une nouvelle énergie potentielle V(r). Il faut voir que dans la direction radiale, l’accélération peut changer car ur peut changer. Mais s’il existe un mouvement pour lequel θ varie aussi, alors il y a aussi accélération centripète donc radiale r 2!& . Si on passe cette accélération du coté des forces, elle devient une force (par unité de masse). Comme -µ r 2!& = - J2/µr3 ceci est donc la force conservative associée dont l’ énergie potentielle est justement le terme J2/2µr2 qui apparaît dans (6.8). La discussion du mouvement à l’aide de 6.8 peut commencer. Premièrement comme

!

˙ r 2 est positif, le mouvement est limité aux valeurs de r pour lesquelles :

V(r) ≤ E

Les valeurs possibles minimales et maximales de r sont donc données par V(r) = E.

On réécrit V(r) = G m1m2

!

L2r2

"1r

#

$ %

&

' (

où L = J2/(µ G m1m2) est une échelle de longueur. La courbe de la fonction V(r) est tracée. (vérifiez que V(r) a un minimum pour r = L).

r1 r

V(r)

L/2 L

E=-G

!

m1m22L

r2

E > 0

-G

!

m1m22L

< E < 0

Page 10: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 10

On peut discuter qualitativement du type du mouvement selon la valeur de E (en noir sur la figure) comme on l’a fait dans la partie IV.

(a) E = - G

!

m1m22L

: C’est le minimum de V(r) donc

!

˙ r = 0 , ce qui implique que r = cst

et la particule se déplace sur un cercle de rayon r = L. On retrouve le cas particulier de l’orbite circulaire déjà traitée.

(b) - G

!

m1m22L

< E < 0 : La distance radiale est limitée entre deux positions r1 et r2. En

ces points la vitesse radiale est nulle et donc le mouvement est entièrement azimutal (⊥ au rayon vecteur). Le mouvement est périodique entre ces deux positions. On montrera plus loin que la trajectoire est une ellipse.

(c) E = 0 : Il y a une distance minimale L/2 mais pas de maximum. La particule a juste assez d’énergie pour s’échapper à l’∞ avec une vitesse ≠ 0. C’est la limite d’échappement déjà calculée. On montrera que la trajectoire est une parabole.

(d) E > 0 : Il y a toujours une distance minimale mais maintenant la particule peut atteindre l’∞ avec une vitesse non nulle : l’orbite est une hyperbole.

(iii) Détermination des orbites des planètes

La bonne idée ici est d’obtenir l’équation de la trajectoire en coordonnées polaires r, θ en éliminant le temps entre les deux équations (6.6) et (6.8) traduisant la conservation du moment cinétique et celle de l’énergie totale. On introduit la variable u = 1/r et on va déterminer l’équation gouvernant u(θ) :

!

dud"

= #1r2drd"

Maintenant :

!

˙ r = drd"

˙ " = #r2˙ " dud"

= #Jµ

dud"

et en reportant dans 6.8,

Ekuu2J

dduJ

21 2

222=!

µ+"

#

$%&

'(µ

(6.9)

où k = G m1m2. Ainsi l’équation de l’énergie 6.9 fournit une équation différentielle ordinaire à une seule variable en lieu et place de (6.3)…

Avec L= J2/µk, (6.9) se réécrit :

L 2

ddu

!"

#$%

&'

+ Lu2 – 2u = kE2

ou L2 2

ddu

!"

#$%

&'

+ L2 u2 – 2 Lu + 1 =

!

2ELk

+1

Page 11: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 11

Si on pose z = Lu – 1, !ddz = L

!ddu

Soit :

!

dzd"#

$ %

&

' ( 2

+ z2 = e2 = 2 ELk

+1 (6.10)

Comme le membre de gauche est > 0, une solution existe si

!

2 ELk

+1 ≥ 0 soit E ≥ -k/2L

comme trouvé précédemment dans la discussion de la figure précédente. La solution de 6.10 est z = e cos (θ - θ0) où θ0 est une constante d’intégration arbitraire. Cette solution en cos n’est pas surprenante car si on dérive 6.10 par rapport à θ, on retrouve la forme d’une équation linéaire du second ordre dont les solutions sont en cos et sin. Soit en repassant à la variable r :

!

r =L

1+ ecos(" # "0)

avec L > 0, et e ≥ 0, où e définit l’excentricité de la trajectoire. Cette équation en coordonnées polaires est l’équation des coniques, courbes planes donnant la forme de la section d’un cône ou d’un cylindre par un plan. Leur équation en coordonnées cartésiennes contient des termes quadratiques en x et y :

Ax2 + 2 Bxy + C y2 + 2 Dx + 2 Ey + F = 0

Il y a trois formes canoniques de cette équation qui correspondent à trois trajectoires type:

1) L’ellipse d’équation 2

2

2

2

by

ax

+ = 1

e : excentricité = (1 – b2/a2)1/2 OA = a : demi grand axe OB = b : demi petit axe F’ et F sont les foyers d’abscisse –ae et +ae. Pour tous les points P la distance PF’ + PF = 2a (constante !).

2) L’hyperbole d’équation 2

2

2

2

by

ax

! = 1

3) La parabole d’équation y2 = 2 Lx

y B

x F’ F A O

P

y

x a b

L L/2 x

y

Page 12: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 12

Maintenant la forme polaire r (1 + e cos θ) = L (avec θ0 = 0 pour simplifier) peut s’écrire :

r = L – ex puisque x = r cos θ.

Soit en élevant au carré : x2 + y2 = (L – ex)2

On peut mettre cela sous une des formes canoniques ci dessus selon la valeur de e :

• 1) e = 0 : c’est l’orbite circulaire de rayon L.

• 2) Si e < 1, on montre que : 1by

a)aex(

2

2

2

2

=++

L’ellipse est centrée en (-ae, 0)

avec a =

!

L1" e2

et b =

!

L(1" e2)1/2

, a = E2k , b2 = aL =

E2J2

µ

C’est le cas E < 0.

• 3) Si e > 1 alors :

!

(x " ae)2

a2"y2

b2=1

L’hyperbole est centrée en (ae,0).

avec a =

!

Le2 "1

et b =

!

L(e2 "1)1/2

, a = E2k , b2 = aL =

E2J2

µ

C’est le cas E > 0.

• 4) Si e = 1 l’équation est :

y2 = L2 – 2Lx, parabole de sommet en (L/2,0).

C’est le cas E = 0.

Dans tous ces cas, l’origine est un foyer de la conique. Dans les cas 2 et 3 il y a un second foyer symétrique par rapport au centre. Les mots foyers viennent de l’optique : si l’ellipse est un miroir parfait, les rayons lumineux issus d’un foyer convergent vers le deuxième. Dans le cas de la parabole, les rayons issus de la source à un foyer forment après réflexion un faisceau parallèle.

F1 F2

Page 13: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 13

Dans le cas elliptique ou circulaire, on peut calculer la période pour faire un tour :

On sait que : µ

=2J

dtdA

Comme l’aire de l’ellipse est πab, la période T vaut :

T = 2µ Jab

En utilisant les définitions de a, b et L :

!

T2"#

$ %

&

' ( 2

=µka3 =

a3

G M

ce qui, assez remarquablement, fournit la 3ème loi de Képler. Clairement la solution du problème à deux corps valide bien la loi en 1/(distance)2 pour le mouvement des planètes. Attention ici M est la somme des masses des deux corps (m1 + m2) et donc T dépend de la masse que l’on fait tourner autour du corps massif. Dans le cas des planètes autour du soleil, M est à une très bonne approximation proche de la masse du soleil (voir table des propriétés des planètes). On peut alors se servir des estimations de T et a pour estimer la masse du soleil supposant G connu.

Les saisons, solstices et équinoxes. Aux équinoxes, l’axe de rotation de la Terre et la droite Soleil – Terre sont perpendiculaires. Aux solstices, le plan formé par l’axe et la droite est perpendiculaire au plan de l’écliptique.

Descriptif de la trajectoire de la Terre autour du Soleil.

Prenons maintenant le couple Terre – Lune en isolation (en fait terre, lune et soleil forment un problème à 3 corps en interaction). La théorie précédente nous indique que Terre et Lune

Page 14: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 14

exécutent chacune une ellipse autour du centre de masse terre-lune en vertu de la relation (6.4) de demi grand axe :

a1 = Mm2 a et a2 =

Mm1 a

Ainsi la terre exécute t’elle aussi une petite ellipse autour du centre de masse :

a2 = a/82.3

avec a = 3.84 105 km, on trouve a2 = 4670 km (le centre de masse est à l’intérieur de la terre).

Cet effet crée une petite oscillation dans la direction apparente du Soleil (vu de la Terre) d’amplitude α = a2/d ∼ 6.4". Si on connaît la distance moyenne d entre terre et soleil (= 1.5 108 km), une telle observation permet de remonter à la masse de la Lune (via a2).

Note : Il y a une confusion à dissiper : lorsque l’on jette un caillou en l’air on a vu précédemment que la trajectoire est une parabole. Maintenant dans ce chapitre « gravitation » on trouve finalement que la trajectoire du caillou est une ellipse. Qu’en est il exactement ? Quand on prend la forme exacte de la force gravitationnelle en 1/(distance)2, la trajectoire est une ellipse et il faut donc bien admettre que la parabole de la chute libre n’est qu’une approximation provenant de l’hypothèse d’un vecteur g constant.

L’expérience de Cavendish

Il a fallu attendre 1798 pour réaliser une mesure en labo de la force gravitationnelle. Si cette force est à l’origine du mouvement des planètes, elle est très-très faible à notre échelle et sa mesure requiert beaucoup d’ingéniosité.

m2 m2

m1

m1

fibre élastique

Lune

Soleil

Terre

a2 α

d

Page 15: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 15

Deux masses identiques (m1) jointes par une tige légère sont suspendues par un long fil fin en rouge attaché au milieu de la tige. Deux autres masses identiques (m2) sont amenées à proximité des masses m1 et fixées. La force d’attraction entre les masses m1 et m2 fait tourner la tige portant les masses m1 vers les masses fixes m2. La force est mesurée à partir de la torsion du fil et donc des propriétés élastiques de la fibre composant ce fil.

Voici la situation vu de dessus: Le moment de F par rapport au point O est F d cos θ mais les forces F apparaissent comme un couple donc le moment total τ est 2 F d cos θ ou :

τ = 2

!

Gm1m2r2

"

# $

%

& ' d cos θ

Si on connaît les propriétés de ce pendule de torsion, on peut mesurer τ à partir de l’angle de torsion β depuis la position initiale (en l’absence des masses m2). En fait la théorie de l’élasticité nous indique que τ est proportionnel à β et inversement proportionnel à la longueur du fil :

τ = k β/l

Note : C’est une loi « type Hooke » exactement comme pour le ressort. On voit tout de suite que pour mesurer un petit couple on aura intérêt à prendre un long fil. La constante k doit d’abord être déterminée mais pour cela on peut faire une expérience de torsion préalable avec un fil court (et donc des moments de force plus grands).

Finalement G est obtenu de :

G = !

"cosdmm2

rk

21

2

l

Pour se rendre de la difficulté de l’expérience, l’attraction entre deux masses de 1 kg distantes de 10 cm est moins de 10-9 fois le poids d’une des masses ! C’est un des tours de force de la science expérimentale du 18ème siècle qui permit de déterminer :

G = 6.67 10-11 SI

m2

m1

F m2

θ

m1

O

F

β

Page 16: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 16

Remarquez que si on ne connaît pas G , l’observation des mouvements des planètes, ne permet de trouver que le rapport des masses des corps en orbites (mterre/msoleil, mlune/mterre, etc…).

Si on mesure la gravité g à la surface de la terre (avec des expériences de chute libre à la Galilée) on a vu la relation :

g = G 2terre

RM

où R est le rayon terrestre moyen ∼ 6370 km et g ≈ 9.81 m s-2. Maintenant l’expérience de Cavendish permet de déterminer la masse de la terre, soit avec les valeurs ci-dessus :

Mterre = 5.97 1024 kg

Ce n’est pas vraiment très parlant mais si on compare au volume V = 4/3 π R3 on va obtenir la masse volumique moyenne de la terre :

Avec V = 1.08 1021 m3 , ρ = M/V = 5.5 103 kg m-3

La masse volumique de l’eau est de 103 kg m-3 (1 kg/litre) et donc la masse volumique moyenne du matériau terrestre est un peu plus de 5 fois plus grande que celle de l’eau. (On définit la densité d d’un corps comme le rapport de la masse volumique à celle de l’eau donc dterre = 5.5). Maintenant la densité des roches à la surface de la terre est facilement mesurée et les géologues nous indiquent des valeurs de 2 à 3,5 assez nettement inférieures à cette densité moyenne. Pour arriver à cette moyenne, cela veut dire que le matériau terrestre a une densité plus forte que la moyenne dans l’intérieur. La densité des métaux lourds fer, nickel, plomb, chrome, est appropriée et le fer (d = 8 mais plus encore sous pression) est un candidat raisonnable pour le noyau terrestre compte tenu de sa présence assez commune dans le système solaire.

Et la densité des autres planètes ? Elles se divisent en deux familles :

• les planètes telluriques (dont la densité ressemble à celle de la terre) : Mercure, Vénus, Mars.

• les planètes géantes plus éloignées du soleil : Jupiter, Saturne, Uranus dont la densité est O(1). Les éléments légers H2, He peuvent rester sur ces dernières pour deux raisons : la planète étant plus massive, la vitesse d’échappement est plus élevée et étant aussi plus éloignée du soleil, les vitesses moléculaires [proportionnelles à (température)1/2] sont aussi plus faibles.

Gravitation et particules massives

La plupart des corps dont on a discuté ne sont pas des particules dont la masse peut être assignée à un point mais la terre, la lune et des planètes. On a admis implicitement que la force causée par ces corps massifs peut être calculée comme celle de masses ponctuelles situées au centre de masse et munie de la masse totale. Ce problème, (déterminer la force due à une sphère massive comme la terre) a causé pas mal de soucis à Newton et on va l’aborder ici.

Page 17: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 17

On a déjà défini l’énergie potentielle d’une particule de masse m située en r au voisinage d’une autre m’ à r’ :

U(r) = - G ''mmrr !

Si on a plusieurs masse mj en rj, l’énergie potentielle est la somme due à chacune (la somme des énergies potentielles vient de ce que la force résultante est elle-même la somme des forces individuelles).

U(r) = -

!

Gj"

mmjr # rj

Comme la masse m apparaît comme un facteur global, on définit le potentiel gravitationnel comme l’énergie potentielle par unité de masse, φ (r) = U(r)/m ou :

!

"(r) = # Gj$

mj

r # rj (ici φ est < 0) (6.11)

Comme la force est le gradient « ∇ » du potentiel, le mouvement de la masse m determiné par ses interactions avec les masses mj obéit a:

!

m ˙ ̇ r = "m#$

L’accélération de la particule s’écrit :

!

˙ ̇ r = "#$ (6.12)

Comme son accélération est indépendante de m, on définit le champ gravitationnel, un vecteur g(r) par :

!"#=g

(6.11) et (6.12) permettent de déterminer l’accélération d’une particule arbitraire dans le champ créé par d’autres masses.

Voici la situation pour une masse isolée :

Supposons que l’on ait maintenant une sphère massive homogène. La généralisation de (6.11) à une distribution continue de masse est :

φ(r) =

!

"G #(r')r " r'$$$ dV

L’effet de chaque masse élémentaire ρ dV en r’ où ρ est la masse volumique est additif. Considérons d’abord le cas d’une coque mince sphérique de rayon a, d’épaisseur da et de

φ =cste

direction de g

Page 18: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 18

masse volumique uniforme :

φ(r) =

!

"G #a2dasin $' d$'d%'

r2 " 2ar cos $'+a21/2&&

θ’ (0 < θ’ < π) latitude et φ’ (0 < φ’ < 2π) longitude.

φ(r) = - G ρ a2 da 2π

4444 34444 21I

a'cosar2r

'd'sin0 2/122!"

+#$

##

En posant t = - 2 ar cos θ, l’intégrale I devient :

!

I =12ar

dtr2 + a2 + t

="2ar

+2ar# 1

arr2 + a2 + t[ ]

"2ar

+2ar=r + a " r " a

ar"2ar

+2ar#

Deux cas sont à examiner à cause de la valeur absolue :

(i) r > a I = 2/r et φ(r) = - G ρ

!

4"a2

r da

mais ρ4 πa2 da n’est pas autre chose que la masse de la coque sphérique.

donc φ(r) = - G

!

Mr

Le potentiel à l’extérieur de la sphère est bien identique à celui d’une masse ponctuelle placée en r = 0 et affectée de la masse totale M .

(ii) r < a I = 2/a et φ(r) = - G aM

Le potentiel est constant et donc le champ de gravité (et l’accélération) est nul .

Pour une sphère pleine de densité uniforme, il suffit de sommer les contributions d’une infinité de coques sphériques minces :

Si r > a :

θ’ a

r

Page 19: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 19

φ(r) = - G ρ

!

0

a

" 4# r'2

rdr' = -

!

G "r4#3

a3 = -

!

GMr

où M = ρ × 4 π a3/3.

Si r < a : il faut distinguer r’ < r et r’ > r.

φ(r) = - G ρ

!

4"r'2

r0

r# dr’ - G ρ

!

4"r' dr'r

a#

Après calculs : φ(r) = - G 3a2M (r2 – 3a2)

Voici le potentiel de la sphère massive : Ce calcul justifie l’application de la loi de la gravitation universelle valable pour une masse ponctuelle à une sphère massive comme si la masse totale était concentrée au centre de la sphère. Attention si la forme du corps massif n’est plus sphérique, des termes nouveaux apparaîtront. Mais à propos la terre est-elle sphérique ?

Forme de la terre et marées

La pesanteur est définie comme étant la résultante dans un référentiel géocentrique (terrestre) des accélérations exercées sur un corps au repos à la surface de la terre. En un point, trois causes sont à l’origine des variations de cette pesanteur :

(a) évidemment la gravité terrestre dont nous venons de parler,

(b) la rotation de la terre,

(c) les attractions gravitationnelle dues aux autres astres, lune et soleil en particulier.

(i) gravité terrestre

On conçoit tout de suite que la pesanteur puisse varier avec l’altitude compte tenu de la loi en 1/r2 . Si g0 est la gravité à la surface de la terre, à une altitude z, la gravité vaut :

g(z) = g0 R2/(R + z)2 ≅ g0 (1 – 2z/R) pour z petit.

Maintenant on conçoit assez facilement que l’hétérogénéité des masses de la terre conduise à des variations latérales de g :

r r = a

φ(r)

Page 20: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 20

Ici à cause de la montagne, g (en vert) ne pointe plus vers le centre de la terre mais est dévié vers la montagne voisine : le champ de gravité est complexe et dépend de la répartition des masses tant à la surface qu’à l’intérieur de la terre. La « gravimétrie » est une méthode géophysique importante pour essayer de connaître cette distribution interne des masses à partir de mesures de gravité en surface.

(ii) la rotation terrestre

Prenons un objet au repos à une certaine latitude θ et suposons qu’il n’y a aucune force de frottement. Comme on l’a déjà vu (partie 2), il est soumis à une accélération centripète Ω2R dirigée vers l’axe de rotation terrestre.

Si la forme de la terre est sphérique la gravité (en bleu) est radiale et dirigée vers C sur le dessin. En l’absence de frottement la réaction N du sol sur l’objet est aussi radiale et dirigée vers l’extérieur :

L’égalité vectorielle ci-dessous permet de comprendre l’origine des difficultés :

mΩ2 R = m g + N

On peut aussi voir le problème sous l’angle de la « statique » dans le référentiel terrestre :

O = mg + N – m Ω2 R (6.13)

où on passe m Ω2R du coté des forces. Le terme -m Ω2R dirigé vers l’extérieur, est appellé force centrifuge. On peut la voir comme une force additionnelle, qui s’introduit parce qu’on utilise un référentiel qui n’est pas inertiel : le référentiel terrestre tourne et donc on ne peut pas lui appliquer la 2ème loi. Si on tient compte de cette force centrifuge alors, la 2ème loi ainsi « corrigée »4 peut être utilisée. On dit souvent que c’est cette force centrifuge qui tend à nous pousser vers l’extérieur d’un virage pris à bonne allure. En fait la réaction du fauteuil s’y oppose et nous permet de rester immobile dans le référentiel de la voiture. Mais la situation est finalement plus simple à décrire dans le référentiel de la route : la réaction du fauteuil vers l’intérieur du virage crée l’accélération centripète qui nous permet de tourner (avec la

4 La correction est incomplète car il existe une autre force très importante lorsque le corps est aussi en mouvement dans le référentiel en rotation, la force de Coriolis (initialement découverte par Laplace). Elle domine la dynamique de l’atmosphère et des océans.

g g

Montagne

Centre de la terre

C

Ω N

g

R

θ

Page 21: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 21

voiture). A défaut de cette réaction du fauteuil, on continue tout droit comme indiquée par la première loi et donc on sort du virage.

Revenant à (6.13), on voit que si N et g sont dans la direction radiale, il n’y a pas moyen d’opposer une force (dirigée selon R) à la force centrifuge ou de façon équivalente une force centripète est absente de sorte que la masse m ne peut pas tourner comme la terre mais part dans l’espace en ligne droite ! La seule sortie de ce paradoxe est de sortir de l’hypothèse d’une terre sphérique et de permettre à la sphère de se déformer. On peut voir que le fluide terrestre va avoir tendance à sortir du virage et donc partir vers l’équateur (sous l’effet de la force centrifuge). Ca peut prendre des millions d’années, mais c’est inéluctable jusqu’au moment où la relation statique (6.13) sera satisfaite en tous points. On peut voir assez rapidement que si la sphère ressemble à un ellipsoïde renflé à l’équateur et aplati aux pôles, ça peut coller :

Le dessin montre assez bien que la déformation de la surface permet à N (normal à la surface) de s’écarter de la direction radiale et du coup fournit avec mg une résultante dirigée vers l’axe de rotation et équilibrant la force centrifuge (ou fournissant l’accélération centripète). C’est donc la réaction du sol sous nos pieds qui nous empêche de ne pas continuer en ligne droite dans l’espace à une vitesse ΩR ! L’ellipsoïde imposé par la rotation a un rayon équatorial 21 km plus grand que le rayon polaire.

Le facteur d’aplatissement ε de la terre vaut : ε = 3001

aca!

"

Maintenant quelle direction donnerait un fil à plomb ? A l’équilibre le fil sera orienté sous l’effet combiné de la gravité et de la force centrifuge c’est a dire dans la direction de N sur le dessin : il ne pointera donc plus vers le centre de la terre (sauf au pôles et à l’équateur). De vives controverses (émanant de la famille Cassini) se développèrent autour de cette forme de la terre aplatie aux pôles proposée par Newton. Elle fut vérifiée par un travail de géodésie (géodésie : détermination de la forme de la terre). Si la terre était aplatie aux pôles, à un degré de méridien ( cad de latitude) devrait correspondre une distance plus grande aux pôles qu’à l’équateur. Deux expéditions de l’Académie des Sciences (Maupertuis en Laponie, Bouguer au Pérou) en 1776 confirmèrent que le degré méridien était plus long en Laponie qu’au Pérou, validant l’hypothèse de Newton. Voltaire se permit d’écrire à Maupertuis : « Vous avez confirmé en des lieux pleins d’ennui ce que Newton conçut sans sortir de chez lui. ». Reste que le travail expérimental de terrain est essentiel pour confirmer les prédictions théoriques.

En première approximation le potentiel corrigé de cet effet de rotation s’écrit :

φ(r) = - G

!

Mr

+ G 3

2

r2Ma J2 (3 cos2 θ - 1)

où a rayon équatorial et J2 = 1.1 10-3 pour coller aux observations.

Ω N

-mΩ2R

mg C

a : rayon équatorial c : rayon polaire.

Page 22: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 22

La surface φ ainsi définie s’appelle « géoïde » dans le jargon des Sciences de la Terre. Ce serait la surface d’un liquide au repos sur la terre. Le géoïde montré dans la figure ci-contre montre des détails correctifs O(100 m) par rapport à la formule précédente. Ces détails sont dûs à la structure interne de la distribution des masses à l’intérieur de la terre (et aussi au fait que l’océan n’est pas au repos mais ces anomalies océaniques sont seulement de l’ordre de quelques mètres).

(iii) attractions dues aux autres astres : les marées

Nous avons vu en détail comment l’orbite quasi-circulaire de la lune autour du centre de masse est associée à une orbite beaucoup plus petite de la terre autour de ce même centre de masse. La période de rotation de ce couple terre – lune est 27.3 jours. Tous les points de la terre vont subir une même accélération ω2r où ω = 2π/27.3 jours et r est le rayon de l’orbite autour du centre de masse : cette accélération est bien entendu équilibrée par la force gravitationnelle entre terre et lune, soit G m1m2/R2 où R est la distance entre les centres de la terre et de la lune et la force est parallèle à la droite joignant les centres. Maintenant considérons un point particulier tel que A : il est soumis d’une part à l’attraction gravitationnelle vers le centre de la lune (flèche noire). D’autre part à la force centrifuge -mω2r (flèche bleue) uniforme et constante qui maintient les deux astres en rotation l’un par rapport à l’autre. Pour ce point à droite du centre de la terre, la flèche solide est plus grande que la flèche pointillée et les points subissent une nette force en vert. Pour un point tel que B c’est l’inverse : la force centrifuge est plus grande que l’attraction directe (B est plus loin de la lune que A). On s’attend en réponse à ces forces (en vert) à ce que la surface terrestre développe l’allure suivante (pointillés).

Une représentation cartographique du géoïde.

Les courbes de niveau indiquent les écarts en mètres positifs ou négatifs par rapport à la surface de l’ellipsoïde de référence d’aplatissement 1/298, 25.

C Lune

A B

PM

BM

PM

BM

Lune

Page 23: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 23

Ce qui est décrit ici c’est la théorie à l’équilibre des marées où l’on suppose que la surface libre prend à chaque instant la forme imposée par les forces gravitationnelles dues à l’astre perturbateur. À cause du mouvement relatif de la terre et de l’astre, ces forces varient dans le temps et un ajustement instantané de l’océan à ces forces pour trouver son nouvel équilibre n’est pas possible. En fait ce qui est décrit ici est la force génératrice des marées et l’eau va se mettre en mouvement sous l’action de cette force. Les deux bourrelets d’eaux situés symétriquement par rapport au centre de la terre, correspondent à une pleine mer (PM) et les 2 creux dans la direction perpendiculaire à une basse mer (BM). On s’aperçoit que la force responsable des marées vient de ce que la force gravitationnelle due à la lune varie sur la surface de la terre. Maintenant il ne faut pas oublier la rotation propre de la terre qui déplace toute la figure avec une période d’un jour. Compte tenu de la symétrie des bourrelets on voit que la période ainsi forcée va être plutôt la moitié du jour, on parle de période semi-diurne : on a donc 2 PM et de 2 BM par 24 heures. En fait pas exactement 24 heures car la lune tourne aussi autour de la terre en 27,3 jour dans le même sens de rotation que la terre (prograde).

Pour que le point x sur la terre se retrouve au bout d’un tour à nouveau avec la lune au zénith il faut que :

ϕL = ωt (lune)

ϕT = Ωt (terre)

et donc : ϕL = ϕT – 2 π

soit : t = !"#$2

la vitesse angulaire relativement à la lune est maintenant Ω - ω. La période correspondante Tterre Tlune / (Tlune – Tterre) est de 24 h 55’. C’est la raison pour laquelle les heures de PM sont décalées d’environ 1 heure par 24 h.

Ce qui est discuté pour la lune peut l’être également pour le soleil. Lorsque les effets lune – soleil s’ajoutent, on obtient les marées de vives-eaux respectivement mortes-eaux si les effets sont en quadrature (voir figure).

Lune Lune

Lune

x x x

t = 0 t = 24 h t = 24 h 55’ (jour lunaire)

Page 24: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 24

Page 25: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 25

Computer-generated diagram of world-wide amphidromic systems for the dominant

semi-diurnal lunar tidal component. Co-tidal lines are in red co-range lines are in blue. L’océan comme un pendule a ses propres modes d’oscillation qui peuvent être excités par les forces de marée. Des résonances locales sont alors possibles lorsque la période du forçage de marée correspond à la période des modes d’oscillation de bassins ou des baies. Par exemple la Manche où le marnage à St Malo a atteint 12.60 m en vives eaux le 1 Mars 2006 ou la Baie de Fundy en Nouvelle Ecosse (Canada) où ça peut atteindre 18 m !

En plein océan (voir figure) les oscillations sont beaucoup plus petites. Les contours comme 0,25 m représente les contours d’égale hauteur. Les contours (sans unités) sont les lignes cotidales (c'est-à-dire d’égale phases) labellés en heures de 0 à 12.

A cause de la dissipation dans les océans le bourrelet est toujours déphasé par rapport au forçage et les PM de vives eaux sont toujours un peu en retard par rapport aux pleines lunes (nouvelles lunes). On appelle cela « l’âge de la Marée ». Paradoxalement ceci ralentit la rotation de la terre (le jour augmente de 2 millisec/siècle) : Il y avait 400 jours/an il y a 350 millions d’années – c’est connu par les fossiles de coraux marins).

Comme le moment cinétique du couple terre – lune est constant, si la rotation diminue, la distance terre – lune augmente de 3,7 cm/an (en analogie avec le mouvement de rotation de la patineuse sur glace).

Couple s’opposant à la rotation de la terre.

lune

Page 26: La gravitation universelle - stockage.univ-brest.fracolindv/tele... · La gravitation universelle Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Introduction Tout

Mécanique Physique (S2) 6ème partie – page 26

Remarques

Il est remarquable que le mouvement des planètes autour du soleil soit si régulier. A l’ordre zéro, les trajectoires sont à une bonne approximation dues à l’interaction de 2 corps (la planète et le soleil ou la planète et son satellite). Nous avons vu que le problème à deux corps se réduit à celui d’un mouvement plan pour un seul corps : c’est donc un mouvement à deux degrés de liberté , les coordonnées du plan x,y (ou r, θ en coordonnées polaires). Avec deux degrés de liberté un système dynamique n’a que deux possibilités: soit trouver une position d’équilibre (un point fixe), soit tourner en rond (solution périodique). A cause des forces centrales, c’est ce dernier cas qui est observé. Lorsqu’il est petit, l’effet des autres planètes sur un couple particulier planète - soleil par exemple peut se calculer comme une petite perturbation de l’orbite elliptique du couple. Mais est-ce que le mouvement à toujours été si régulier ? Le fait que les planètes du système solaire tournent à peu près toutes dans un même plan suggèrent une origine commune à partir d’un nuage de gaz interstellaire déjà organisé au départ en forme de disque aplati. Le moment cinétique du système solaire est largement dû aux planètes (alors que sa masse est due au soleil). On peut imaginer que ce disque, la nébuleuse primitive avait déjà un moment cinétique et que si les forces extérieures du reste de la galaxie sont faibles, il a été conservé : les planètes se sont formées par accrétion gravitationnelle de petits corps mais leurs orbites d’aujourd’hui doivent être compatibles avec le moment cinétique d’origine.

En 1977 la sonde « Voyager I » a été lancée pour explorer le voisinage de Saturne. Une lune de Saturne, Hypérion, a été observée et possède un comportement étrange : la trajectoire autour de Saturne est bien elliptique mais l’orientation d’Hypérion dans l’espace est complexe : la plupart des planètes roulent, comme des ballons de football sur un stade mais Hypérion ressemble davantage à un ballon de rugby. La position d’un point (par rapport au centre de masse) se balance au hasard dans toutes les directions possibles. Les culbutes d’Hypérion (un ellipsoïde dont les axes sont 190 km, 145 et 114 km) sont-elles dues à des causes externes ? Aux erreurs des lois de Newton lorsque les vitesses ne sont pas négligeables par rapport à la vitesse de la lumière ?

Il n’y a pas de causes externes envisageables, d’autre part les vitesses sont faibles de sorte que les corrections relativistes sont négligeables. Alors ? On sait depuis Lorenz (1963) qu’un système à 3 degrés de liberté (3 équations différentielles couplées) est suffisant pour créer des solutions chaotiques, imprévisibles. C’est visiblement ce qui se passe pour Hypérion à cause de sa forme particulière. Ce comportement au hasard de systèmes déterministes simples a ouvert la voie à l’étude de la physique des systèmes dynamiques, une branche de la physique (et des mathématiques) qui irriguent la mécanique des fluides, les marchés financiers, la biologie des populations, les réactions chimiques…