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Tous droits réservés © Les Éditions Cap-aux-Diamants inc., 2009 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 11 août 2021 22:36 Cap-aux-Diamants La revue d'histoire du Québec La guerre de sept ans Un conflit international Raymonde Litalien La guerre de la conquête Numéro 99, 2009 URI : https://id.erudit.org/iderudit/6708ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Les Éditions Cap-aux-Diamants inc. ISSN 0829-7983 (imprimé) 1923-0923 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Litalien, R. (2009). La guerre de sept ans : un conflit international. Cap-aux-Diamants, (99), 10–15.

La guerre de sept ans : un conflit international · LA GUERRE DE SEPT ANS UN CONFLIT INTERNATIONAL PAR RAYMONDE LITALIEN La guerre de Sept Ans (1756-1763) a été une lutte féroce

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Tous droits réservés © Les Éditions Cap-aux-Diamants inc., 2009 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation desservices d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politiqued’utilisation que vous pouvez consulter en ligne.https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/

Cet article est diffusé et préservé par Érudit.Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé del’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec àMontréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche.https://www.erudit.org/fr/

Document généré le 11 août 2021 22:36

Cap-aux-DiamantsLa revue d'histoire du Québec

La guerre de sept ansUn conflit internationalRaymonde Litalien

La guerre de la conquêteNuméro 99, 2009

URI : https://id.erudit.org/iderudit/6708ac

Aller au sommaire du numéro

Éditeur(s)Les Éditions Cap-aux-Diamants inc.

ISSN0829-7983 (imprimé)1923-0923 (numérique)

Découvrir la revue

Citer cet articleLitalien, R. (2009). La guerre de sept ans : un conflit international. Cap-aux-Diamants, (99), 10–15.

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Déportation des Acadiens par les Britanniques, en 1755.

Carte postale Ern. Thill, Bruxelles, sans date.

(Coll. Yves Beauregard).

LA GUERRE DE SEPT ANS UN CONFLIT INTERNATIONAL

PAR RAYMONDE L I T A L I E N

La guerre de Sept Ans (1756-1763) a été une lutte féroce entre souverains d'États

européens pour la maîtrise de territoires situés aussi bien en Europe que sur les autres conti­nents. D'une part, l'Autriche tenait à reprendre la Silésie à Frédéric II de Prusse et, d'autre part, l'Angleterre, puissance alliée à la Prusse, voulait s'approprier l'empire colonial français de l'Inde et de l'Amérique du Nord. Dès 1755, l'amiral anglais Edward Boscawen attaqua les côtes françaises de Saint-Malo, Rochefort et Cherbourg puis, sans déclaration formelle de guerre, captura plus de 300 navires de commerce et 6 000 matelots. Pa­rallèlement, en Amérique, plusieurs importants points de friction, indépendants de ce qui se pas­sait en Europe, apparurent aux frontières des co­lonies anglaises et de la Nouvelle-France, notam­ment sur la rivière Ohio et à Louisbourg. Il n'en fallait pas autant pour qu'un conflit, impliquant tous les continents, soit officiellement déclenché, au printemps 1756.

L 'ORIGINE DU CONFL IT , EN A M É R I Q U E DU N O R D

Si on revient sur les faits antérieurs, on peut observer que, par l'exploration et l'occupation pro­gressive de l'Amérique du Nord, les Européens avaient importé avec eux les gènes des conflits ar­més qui devaient secouer le continent au cours des XVIF et XVIIIe siècles. Pendant plus de deux siè­cles, en précisant leur connaissance de l'intérieur du continent, Français et Anglais se disputèrent peu à peu chaque bande de territoire, leur objec­tif ultime étant l'accès à la côte du Pacifique où ils situaient la « mer de l'Ouest ». De plus, tout en progressant, les colonisateurs devaient préserver leurs acquis territoriaux, toujours fragiles et plus ou moins dispersés. La Nouvelle-France, d'abord implantée sur les rives du golfe et du fleuve Saint-Laurent, au plus près de l'Europe, était une proie particulièrement accessible et convoitée. L'Aca­die fut ainsi le premier point de friction entre les

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deux grandes puissances qu'étaient la France et l'Angleterre. Elle fut plusieurs fois prise par les Anglais puis rétrocédée à la France au gré des chartes royales ou des traités mettant fin aux conflits, jusqu'à ce que les Acadiens, insoumis au gouvernement colonial anglais, soient déportés et dispersés à partir de 1755. Les établissements de la vallée du Saint-Laurent, pourtant moins exposés, sont néanmoins agressés, soit par les Iroquois, soit par des attaques partant de la Nou­velle-Angleterre. Il s'agit, pour les commerçants hollandais et anglais de contrôler le commerce des fourrures provenant des Grands Lacs, de le diriger vers Albany et New York et d'entraver les convois vers Montréal et Québec.

LES P R E M I E R S A F F R O N T E M E N T S

Les conditions furent alors réunies pour qu'éclatent les conflits. À la fin du XVIF siècle, le déclenchement, en Europe, de la guerre de la ligue d'Augsbourg (1688-1697) fournit l'occa­sion d'un affrontement franco-anglais en Amé­rique. Obligée de se battre sur tous les fronts à la fois, la colonie française arriva tout de même à conserver l'intégrité de son territoire grâce au traité de Ryswick qui confirma les victoires fran­çaises. Cette première guerre inter-coloniale mit en évidence la difficulté, pour les Canadiens, de défendre un territoire aussi étendu. D'autant que les explorations menées vers le sud conduisant jusqu'au bassin hydrographique du Mississippi, offraient de nouvelles possibilités d'approvision­nement en pelleteries et de débouchés par le golfe du Mexique.

Au cours du XVIIF siècle, de nouvelles guer­res franco-anglaises donnèrent lieu à des combats entre la Nouvelle-France et les colonies anglaises, chaque fois selon le même scénario : des points de friction, foyers de guerre larvée, justifièrent de violents affrontements en Amérique, autorisés par la guerre déclenchée en Europe, entre les métropoles coloniales. De guerre en guerre, la France perdait chaque fois quelques-uns de ses territoires. Le traité d'Utrecht, en 1713, met­tant fin à la guerre de Succession d'Espagne, lui retira Terre-Neuve, l'Acadie et la plus gran­de partie du bassin hydrographique de la baie d'Hudson. Pour protéger l'espace, tout de même considérable qui lui restait, la France décida de fortifier l'île du Cap-Breton en y construisant Louisbourg. La ville-forteresse, « clé du Saint-Laurent », devint aussi une plaque tournante du commerce avec les Antilles.

L 'EXPANSION T E R R I T O R I A L E , U N E

R É P O N S E À L 'AGRESSION A N G L A I S E

Pour pallier la perte des réserves de fourru­res de la baie d'Hudson, l'administration coloniale lança un vaste programme d'expansion. Prenant appui sur Detroit fondé en 1701, elle établit plu­sieurs nouveaux postes de traite aux Grands Lacs,

ouvrit des établissements en Louisiane à partir de 1717 et entreprit d'ériger une chaîne de forts dans la vallée de l'Ohio. Plus encore, le Canada s'engagea dans une entreprise exploratoire d'une envergure sans précédent. Une première enquê­te, sur le terrain, par le jésuite François-Xavier de Charlevoix, incita fortement le gouverneur Charles de Beauharnois de la Boische à repren­dre la recherche de la « mer de l'Ouest ». Cette demande, appuyée par les milieux scientifiques gravitant autour du ministre de la Marine, obtint son accord pour une grande expédition, à partir de 1731. Pierre Gaultier de La Vérendrye, offi­cier de marine et commerçant de fourrures, fut mandaté pour diriger la découverte de la « mer de l'Ouest ». C'est le début d'une aventure de plus de deux décennies, qui le conduira avec ses fils, au sud et à l'ouest des Grands Lacs. Les explora­teurs recueillirent les informations géographiques indispensables auprès des nations amérindiennes qui procurèrent, de plus, tout le soutien logistique aux déplacements et à la subsistance. La « mer de l'Ouest », ne fut pas trouvée, et pour cause, mais cette vague d'explorations rapporta des données géographiques et ethnologiques d'une grande

Pierre de Rigaud de Vaudreuil (Québec, 1698-Paris, 1778). Il fut le premier Canadien de naissance à devenir gouverneur général de la Nouvelle-France, le 1" janvier 1755. Carte postale sans date. (Banque d'images de Cap-aux-Diamants. Ph 2003-0933).

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En 1757, le marquis de Montcalm s'empare et brûle le

fort William Henry à l'entrée du lac George. Carte postale Dean Color, Glens Falls, vers

1965. (Coll. Yves Beauregard).

Au cours de l'été 1756, les Français s'emparent

du fort Oswego (Chouaguen), sur le lac Ontario. Gravure de

J. Walker. (Bibliothèque et Archives Canada).

richesse sur les plaines centrales et le réseau hy­drographique de la baie d'Hudson. Des postes fortifiés y furent érigés, attirant alors une partie des pelleteries autrement destinées à la Compa­gnie de la baie d'Hudson.

NOUVELLE VAGUE D'ASSAUTS EN AMÉRIQUE ET EN EUROPE

Après un demi-siècle d'expansion et de paix relative, une autre guerre, celle de la Succession d'Autriche, ramena la colonie à des préoccupa­tions militaires, à l'extrémité opposée de son territoire. La chute de Louisbourg en 1745, bien que rétrocédée par le traité d'Aix-la-Chapelle en 1748, affaiblit la colonie qui n'aura pas le temps de recouvrer ses forces avant le déclen­chement de la guerre de Sept Ans. En priorité,

pour endiguer l'avancée des colonies anglaises vers l'Ouest, le Canada choisit alors de conso­lider ses positions chez les Illinois de la région de l'Ohio; les faits lui donneront raison puisque c'est là que les Français connaîtront leurs plus belles victoires.

En Europe, affaiblie par la longue guerre de Succession d'Autriche (1740-1748), la France chercha quelque renfort en confirmant et déve­loppant ses alliances par des traités avec l'Autri­che, la Russie, la Suède, la Saxe et l'Espagne. Son champ de bataille obligé était alors l'Europe où l'armée française dut se déployer sur plusieurs fronts avec quelques succès en 1756 et 1757. En Amérique, la France envoya de nouveaux ba­taillons pour renforcer les troupes de la marine, les milices et les alliés amérindiens. Grâce à l'ex­cellente connaissance de leur propre terrain sur lequel se déroulaient les combats, des officiers français de grande valeur comme François-Charlesde Bourlamaque, Antoine de Bougainvil­le et le chevalier François de Lévis surent définir une stratégie efficace. Le gouverneur général de la Nouvelle-France, Pierre de Rigaud de Vau­dreuil, né au Canada et auparavant gouverneur de la Louisiane, était particulièrement compé­tent sur tout ce qui touchait les frontières franco-anglaises en Amérique, ainsi que la position des nations indiennes. Avec le commandant des troupes françaises, Louis-Joseph de Montcalm, les Canadiens passèrent rondement à l'attaque et s'emparèrent du fort Oswego sur le lac Ontario (1756), lancèrent des raids « à l'indienne » contre les établissements anglais, prirent le fort William Henry sur le lac Saint-Sacrement (1757) et gagnè­rent, de façon spectaculaire, la bataille de Carillon sur le lac Champlain (1758) avec 3 500 hommes contre 15 000 de l'armée anglaise.

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UN AFFRONTEMENT DE GIGANTESQUES EMPIRES

Le conflit qui avait éclaté en Amérique en 1754, et en Europe en 1756, opposait deux em­pires coloniaux en lutte pour la suprématie com­merciale dans le monde. En Amérique du Nord, la disproportion était évidente : plus de 1 500 000 habitants dans les colonies anglaises face à 85 000 en Nouvelle-France. De plus, la marine anglaise était devenue la plus puissante d'Europe. Les for­ces militaires en cause étaient inégales. Malgré les précieux alliés amérindiens, l'Amérique française était un territoire trop vaste à défendre. Après la belle et dernière victoire de Carillon, en 1758, Louisbourg fut la première place forte à tomber. Toutes les autres la suivirent, dont Québec la ca­pitale de la Nouvelle-France, en 1759, jusqu'à la capitulation de Montréal, en 1760. La guerre de Sept Ans, point culminant des tensions franco-an­glaises en Amérique du Nord, aboutit à une supré­matie quasi totale de l'Angleterre, sauf sur quel­ques vestiges des empires coloniaux de la France, de l'Espagne et des Pays-Bas.

Pour la France, l'Amérique n'était qu'une partie du front qu'elle voulait et devait défendre. Mais, hors de l'Europe, c'était le plus convoité. Surtout quand le premier ministre William Pitt re­prit les commandes en Angleterre, en 1757, avec l'objectif principal de s'approprier l'empire colo­nial français. Il y consacra des ressources fabuleu­ses, envoyant des troupes, du matériel militaire, du ravitaillement de toute nature. Latout principal de l'Angleterre était sa flotte de 107 gros navires de guerre qui lui permettait de mener une impitoyable guerre de course sur l'Atlantique. Avec sa cinquan­taine de vaisseaux, la France faisait piètre figure sur les mers. Le ministre de la Marine avait relancé la construction navale depuis 1748, mais il manquait de bois d'œuvre et une quinzaine de vaisseaux

Fort Carillon ou Ticonderoga près du lac Saint-Sacrement, défendu victorieusement par Montcalm et ses troupes lors de l'attaque des Britanniques de juillet 1758. Le fort tombe aux mains de ceux-ci en 1759. (Banque d'image de Cap-aux-Diamants, Ph 2002-2266).

William Pitt (1709-1778) est l'âme dirigeante du cabinet du duc de Newcastle. Secrétaire d'État depuis 1756, il dirige la participation de son pays dans la guerre de Sept Ans. (Coll. privée).

Carte postale Genuine Curteich-Chicago, vers 1965. (Coll. Yves Beauregard).

seulement avaient pu être mis à eau. De plus, les effectifs vieillissants, l'administration sclérosée et le népotisme omniprésent freinaient considérable­ment l'armement des navires de guerre français.

Malgré le triste état de sa marine et le har­cèlement des corsaires anglais sur l'Atlantique, la France envoya, chaque année au Canada, plusieurs navires chargés de troupes et de ravitaillement. L'effort était considérable, compte tenu des obli­gations auxquelles elle était engagée en Europe. Il faut reconnaître cependant que l'effet de ces expéditions était dérisoire face à la flotte an­glaise présente dans le golfe et le fleuve le Saint-Laurent, d'autant que cette dernière parvint

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Ces deux gravures illustrent en haut la prise du fort

Frontenac (août 1758) sur la rivière Cataraqui (Kingston

aujourd'hui) et en bas la prise du fort Duquesne (novembre 1758) sur la rivière Mononga-hela (Pittsburgh, Pennsylvanie

aujourd'hui). (Coll. privée).

souvent à intercepter les convois avant leur arrivée à Québec. Un événement tragique, indépendant de la guerre, affaiblit encore la marine française : en 1757, l'escadre d'Emmanuel-Auguste Dubois de

La Motte, qui avait repoussé l'attaque anglaise de Louisbourg, fut dé­

cimée, à son retour à Brest, par une épidémie de ty­

phus : 6 000 matelots en furent victimes.

Les armements de­vinrent de plus en plus aléatoires.

En 1758, la France fait frapper une somptueuse médaille

en argent pour célébrer la prise du fort Oswego

deux ans plus tôt. (Biblio­thèque et Archives Canada).

On peut même s'étonner que les 85 000 habi­tants de la Nouvelle-France aient tenu aussi long­temps face à près de deux millions de puissants colons anglais. Au Parlement britannique, le chef de l'opposition, George Grenville, était d'avis que « Ce n'est pas la guerre en Allemagne, mais le manque de marins qui a empêché les Français de poursuivre les opérations en Amérique et de dé­barquer en Grande-Bretagne ». Si on ajoute qu'en France, le secrétaire d'État à la Marine disposait d'un budget de 30 millions de livres, alors qu'au même moment, son homologue britannique en avait 150 millions, on n'a plus d'illusions sur les capacités françaises de victoire. D'ailleurs, après la célèbre victoire anglaise du 13 septembre 1759 sur les plaines d'Abraham à Québec, capitale de la Nouvelle-France, puis la victoire françai­se du chevalier de Lévis au printemps de 1760, c'est l'arrivée de navires anglais devant Québec qui entraîna le repli des troupes françaises vers Montréal. Les chiffres sont éloquents : toutes les forces maritimes françaises réunies n'auraient pu réussir à contrer la Royal Navy et à protéger ses possessions dispersées en Amérique du Nord, aux Antilles en Afrique et dans l'océan Indien.

DES NÉGOCIATIONS DIPLOMATIQUES ENTRE PARTIES INÉGALES

La guerre en Amérique se termina avec la capitulation générale de Montréal le 8 septembre 1760, qui accorda aux Canadiens la protection de leurs biens et le libre exercice de leur religion tout en les obligeant à rendre les armes. En at­tendant que les hostilités prennent fin dans les autres parties du monde, les Anglais mirent en place un régime militaire provisoire pour diri­ger le pays, sous la direction du général Jeffery Amherst, de 1760 à 1763. Pendant ce temps, les diplomates négocièrent longuement en vue de la paix. La France, grande perdante, ne put guère faire valoir d'exigences et abandonna toute idée de retour en guerre. « Je pense comme le public », écrivait Voltaire. « J'aime beaucoup mieux la paix

que le Canada et je crois que la France peut être heureuse sans Québec ». La préoc­

cupation des négociateurs britanniques était d'abord d'assurer la protection des

anciennes colonies contre une éven­tuelle attaque; pour cela, ils avaient besoin du Canada. Ils tenaient aussi à conserver les territoires qui offraient des marchés de consommation pour les produits fabriqués en Angleterre. Pour les Français, il fallait d'abord conserver le marché européen, très friand de produits tropicaux,

notamment du sucre des Antilles dont la production s'était multipliée

par dix au cours du XVIIF siècle, gé­nérant d'importants revenus pour les

négociants et pour la France.

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Finalement, par le traité de Paris du 10 fé­vrier 1763, l'Angleterre, l'Espagne, la France et le Portugal mirent fin au conflit de la guerre de Sept Ans. La France perdit l'Hindoustan moins cinq comptoirs, le Sénégal moins l'île de Gorée qu'elle conserva pour la traite négrière. Elle récupéra la Martinique, la Guadeloupe, Sainte-Lucie et l'ouest de Saint-Domingue (Haïti). La France donna en outre la Louisiane à l'Espagne en dédommage­ment de la Floride cédée par l'Espagne à l'Angle­terre. Le 15 février 1763, Marie-Thérèse d'Autri­che, Frédéric de Prusse et leurs alliés signèrent la paix à Hubertsbourg et prirent pour base de cet arrangement le statu quo ante helium. On s'était donc battu sept ans en Allemagne pour se trouver à la fin de cette guerre meurtrière au même point qu'au début. La France, elle, était exsangue; elle avait perdu sa marine, son meilleur poste sur la côte occidentale d'Afrique et plusieurs des peti­tes Antilles, toutes ses possessions de l'Amérique du Nord, sauf les îles de Saint-Pierre et Miquelon « pour servir d'abri aux pêcheurs français ».

L'Angleterre sortait appauvrie de cette lut­te, mais elle avait gagné, avec un accroissement énorme de territoire, un prestige qui lui permet­tra jusqu'à la guerre d'Indépendance américaine, d'être l'arbitre de l'Europe. En Amérique du Nord, elle exerçait un contrôle total du territoire, y compris de la plupart des possessions antérieu­res de la France et de l'Espagne. Tout le sud et l'ouest du continent seraient bientôt ouverts à l'implantation britannique. Le sort en était ainsi jeté : l'Amérique serait anglaise. •

Pour en savoir plus : Michel Mollat du Jourdin. L'Europ Paris, Éditions du Seuil, 1993, 348 p. Etienne Taillemite. L'histoire ignorée de la marine française. Paris, Librairie académique Perrin, 1988, 460 p. (Coll. « Passé simple »).

Raymonde Litalien est conservateur honoraire de Bibliothèque et Archives nationales du Canada.

Paris fête la signature du traité de Paris (1763) par un grand feu d'artifice. (Nos racines, n" 31, p. 604).

La chute de Louisbourg vue par un caricaturiste anglais. On y souligne les revendications de l'Angleterre et l'affaiblissement de la France. Gravure de J. June et L. Boltard. (Bibliothèque et Archives Canada).

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