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ROAD TRIP 048 décembre 2014-janvier 2015 ROAD TRIP 049 décembre 2014-janvier 2015 SUR LES TRACES DE GENGIS KHAN LA MONGOLIE CARNET DE VOYAGE I LA MONGOLIE Quand le besoin de partir devient plus fort que la raison qui vous pousse à ne jamais faire de vos rêves une réalité, reste à trouver la bonne destination. La Mongolie fait partie de ces choix idéaux, absolus qui pourraient alors vite devenir incontournables. Par Erick Courly

La MongoLie Sur leS traceS de GenGiS Khan · les rives du lac Ogii Nuur et son camp de yourtes qui participe au dépaysement total et assure malgré tout un confort très appréciable

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    048décembre 2014-janvier 2015

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    049décembre 2014-janvier 2015

    Sur leS traceS de GenGiS Khan La MongoLie

    CaRneT De VoYage I la mongolie

    Quand le besoin de partir devient plus fort que la raison qui vous pousseà ne jamais faire de vos rêves une réalité, reste à trouver la bonne destination.

    La Mongolie fait partie de ces choix idéaux, absolus qui pourraientalors vite devenir incontournables.

    par Erick Courly

  • Il en va de même pour les voyages que pour les cartes postales. Elles font rêver le temps de fantasmer sur une belle image. On les affiche dans son bureau ou sur le frigo pour s’évader par procuration, avant de replonger dans l’ennui

    du quotidien en se promettant, qu’un jour, on sera celui qui les envoie et plus seulement celui qui les reçoit. Si vous me demandiez ce qui motive mes choix en matière de destinations (et de cartes postales), je vous répondrais qu’il y a des pays exotiques, des pays romantiques, des pays historiques ou encore des pays qui vivent si bien de leur réputation touristique que l’on peut les identifier d’un seul coup d’œil, sans l’ombre d’une hésitation. Et puis il y a ceux mystérieux dont le seul nom suffit à solliciter l’imagination, mais que

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    Se déplacer au Guidon de cette anGlaiSe “Made in india”, c’eSt un éloGe de la lenteur.

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    devenir un éléMent du décor qui Se fond danS le paySaGe, plutôt que d’être un SiMple objet qui S’y déplace.

    La Royal Enfield 500 Bullet qui m’a servi de

    monture pendant deux semaines.

    Les troupeaux de chevaux et de yaks

    peuplent les steppes.

    celles du monocylindre antique vous plongent dans un autre mode de réflexion. Et si l’idée du voyage n’était plus seulement d’aller d’un point à un autre ? Se déplacer au guidon de cette anglaise “Made in India”, c’est un éloge de la lenteur. Apprendre à percevoir le temps et à appréhender les distances de façon différente. Devenir un élément du décor qui se fond dans le paysage, plutôt que d’être un simple objet qui s’y déplace. Accepter humblement que le temps reprenne sa place, celle qui nous rend éternels. Se faire à l’idée qu’il va falloir cinq heures pour parcourir 250 km et que votre vitesse de croisière ne doit jamais excéder 70 km/h (en descente), sous peine de voir la mécanique vous rappeler son grand âge et ses limites. Un peu comme un catarrheux que l’on forcerait à courir le cent mètres contre Usain Bolt…

    Au milieu coule une rivièreLa suite du parcours accentue encore ce sentiment de voyage au ralenti dans le temps et l’espace, avec cette fois 150 km de pistes pour atteindre les rives du lac Ogii Nuur et son camp de yourtes qui participe au dépaysement total et assure malgré tout un confort très appréciable. Surtout

    le soir autour du poêle lorsque la température approche zéro degré. à l’heure du repas, impossible d’échapper au “geimontoi huurga”, un plat de pâtes avec des légumes et de la viande de yak, de mouton ou de cheval, servi avec des “Bin” (des galettes de blé) en guise de pain. à moins que vous ne goûtiez des “Khuushuur” ou des “Buuz” (beignets de viande ou de légumes), le plat national mongol, largement arrosé de bière ou de vodka Russe, avant de terminer par un verre de lait de jument fermenté qui risque de vous mettre la tête à l’envers si vous en abusez. Après le franchissement de plusieurs cols, l’arrivée aux sources d’eau chaudes de Tsenher est un moment très attendu pour se relaxer et prendre une douche. Question hygiène, il faut être “proche” de la nature et aussi aimer l’eau froide, surtout lorsqu’il a de l’eau… Hors des cités, de petites motos chinoises servent de moyen de transport aux familles. Elles font partie du paysage et du mode de vie mongol, au même titre que les troupeaux de chevaux ou de yaks qui peuplent les steppes que nous traversons en direction des monts du Khangaï. Au milieu de la vallée de l’Orhon coule une rivière. Pour la pêche à la truite, ça ne le fait pas, mais pour découvrir

    l’on est incapable de placer sur une carte. Pour moi, la Mongolie, c’était ça. Au mieux, le pays de Gengis Khan et de ses redoutables cavaliers Tatars, bâtisseurs, au XIIIème siècle, d’un empire plus vaste que celui des Romains, allant de Pékin à Moscou, en passant par Istanbul. Un pays vaguement situé quelque part en Asie centrale, peut-être entre la Chine et… Quoi d’autre déjà ? Je donne ma langue au Yak.

    voir oulAn-BAtor et pArtirDepuis toujours, la Mongolie fait partie de ces lieux magiques qui me fascinaient lorsque j’envisageais un nouveau voyage car incapable de deviner ce que j’allais y découvrir. Le hasard d’une rencontre dans les allées du salon de la moto avec Alexandre

    Zucher sur le stand Vintage Ride, quelques copains décidés à changer d’air, un beau-frère en manque d’aventure, et voilà comment on se retrouve sur le tarmac de l’aéroport de Oulan-Bator, avec son casque à la main, un beau jour de juin. S’il vous prenait l’envie de faire la même chose, que ce soit clair, il ne faut pas aller en Mongolie que pour visiter sa capitale. C’est, comment dire ? Essayez d’imaginer une ville post-guerre froide à l’architecture stalinienne de la grande époque, mais qui tomberait partiellement en ruine. Au milieu, ajoutez quelques yourtes, beaucoup de circulation, pas mal de pollution, saupoudrez d’immeubles high-tech et de centres commerciaux aussi déprimants de banalité que partout dans le monde et vous aurez une vague idée de l’ambiance. Dans une société où

    être soi c’est d’abord ressembler aux autres, Oulan-Bator peut être citée en exemple. D’un autre côté, ce n’est pas que pour ça qu’on fait le déplacement. Alors, entre une visite indispensable au musée d’Histoire de la Mongolie, une autre au Monastère de Gandan pour s’imprégner de l’esprit bouddhiste omniprésent tout au long de notre parcours, pour finir par un tour sur la place centrale de Sükhbaatar Square devant l’immense statue de bronze Gengis Khan, le « souverain universel », et l’heure du départ sonne.

    l’esprit de lA BulletDans l’arrière-cour d’un garage de banlieue, béquillée entre une yourte, un Hummer H3 flambant neuf, je découvre la Royal Enfield 500 Bullet qui va me servir de monture pendant deux semaines. Pas vraiment impressionnant. Une tasse de Hiran (thé noir au lait salé), quelques coups de kicks, le son rauque “gros mono” se fait entendre et c’est avec un plaisir certain que je quitte la civilisation en direction des grandes plaines du Sud. “Bayartai” (au revoir) Oulan-Bator, “Sanbona” (Bonjour) Dashinchilen. Les 230 km de bitume rectiligne qui séparent les deux villes sont un préambule qui permet de se familiariser avec le paysage démesuré ainsi qu’avec la Bullet qui, pour moi, élevé aux multicylindres japonais, n’a rien d’une “balle”. Pourtant, au fil des kilomètres, la magie “noire” opère. Ne plus sentir les vibrations de son portable dans sa poche, mais seulement

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    la vie des nomades qui viennent s’y installer de mai à septembre avec leurs troupeaux, c’est là qu’il faut être. Une journée à cheval remplace une journée de moto. L’histoire ne dit pas qui est le plus “tape-cul” des deux… Toujours plus au Nord, la piste qui traverse un champ de lave nous amène aux portes de Qaraqorum l’ancienne capitale de l’empire Mongol. à la laideur d’Oulan-Bator succède l’imposant monastère Zen de Eredene Zuu rappelant un autre temps. Celui où les temples bouddhistes fleurissaient à travers tout le pays. Mais en 1935, Lénine décida de le détruire, avec beaucoup d’autres, avant d’interdire cette religion dans le pays. Malgré cela, devant l’entrée des trois temples ayant survécu à la folie du “petit père des peuples”, quelques moulins à prière en cuivre continuent à tourner pour exaucer les vœux des voyageurs de passage. Les moteurs des Royal Enfield continuent eux aussi à tourner comme des mécaniques parfaitement huilées pour nous emmener découvrir les dunes

    à la laideur d’oulan-bator Succède l’iMpoSant MonaStère Zen de ”eredene

    Zuu” rappelant un autre teMpS.

    Repas sous une yourte autour du poêle alors que la température approche de zéro degré.

    Découvrez le reportage vidéo de ce raid en Mongolie avec Alexandre Debanne sur www.vintagerides.com.L’immense statue de bronze

    Gengis Khan, le “souverain universel”.

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    de Khogno Khan qu’on appelle ici le “petit Gobbi”. Après les steppes verdoyantes et les montagnes enneigées, le contraste avec ce désert miniature est saisissant. Le râle de nos “Yamaan Dugui” (chèvre-vélo) comme on appelle les motos ici, n’effraie pas les quelques chameaux que nous rencontrons sur le bord de la piste. C’est tout juste s’ils daignent nous accorder un regard démuni du moindre intérêt. L’état indescriptible de la route qui nous ramène

    vers notre point de départ fait vivre un calvaire aux suspensions de nos Bullet. Ce ne sont plus des nids de poule, mais des nids d’autruche qui transforment le bitume en terrain de moto-cross mal entretenu. Pour les éviter, la meilleure option consiste à rouler sur les bas-côtés. C’est d’ailleurs là que l’on trouve le plus de circulation. Un signe qui ne trompe pas. Après un ultime plein d’essence à 1 700 Tugrug le litre (0,70 euros), la magie des grands espaces empreints du sentiment grisant de liberté absolue qui nous a accompagnés pendant presque 2 000 km, laisse place aux réalités d’une circulation chaotique lorsque l’on rejoint les grands axes qui mènent à Oulan-Bator. Pour un peu, on (en) oublierait que la Mongolie est seulement peuplée de 3 millions d’habitants pour une surface 2 fois et demi plus grande que celle de la France. De quoi vous donner l’irrépressible envie d’y revenir au plus vite pour assouvir vos envies d’infini et au-delà.

    Au milieu de la vallée de l’Orhon coule une rivière. Il faut alors franchir le gué avec minutie et un guide.

    apprendre à percevoir le teMpS et appréhender leS diStanceS de façon différente.

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