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La « polymérase chain reaction(PCR) chez les sujets séronégatifs à haut risque d'infection par le VIH (Compte-rendu du congrès de San Francisco, juin 1990)

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Page 1: La « polymérase chain reaction(PCR) chez les sujets séronégatifs à haut risque d'infection par le VIH (Compte-rendu du congrès de San Francisco, juin 1990)

Rev. Fr. Transfus. H6mobiol., 1990, 33, 291-293 291

ACTUALITES- Note de synthOse

La ~ polym6rase chain reaction )> (PCR) chez les sujets s6ron6gatifs

/t haut risque d'infection par le VIH

(Compte-rendu du congr6s de San Francisco, juin 1990)

I.N.T.S., Paris.

p a r J . J . L e f r 6 r e

Le d6pistage des dons de sang infect6s par le virus de l 'imunod6fi- cience humaine (VIH) repose sur l 'entretien m6dical pr6c6dant le don et la pratique d 'un test ELISA fi la recherche des anticorps sp6cifiques. I1 existe donc, sur le plan biologique, une , fen~tre ,, d'ind6tectabilit6, situ6e entre le premier contact infectant du virus avec l 'organisme et l 'apparition des premiers anticorps que r6v~le le test s6rologique effectu6 syst6matiquement au niveau de chaque don de sang. Certes, la pratique du test antigone permettrai t sans doute de d6tecter un certain nombre de ces sangs encore s6ron6gatifs mais infect6s (et donc infectants). Pour des raisons que nous ne d6velopperons pas ici, ce test n 'est pas actuellement appliqu6 au niveau des dons de sang.

La dur6e de cette p6riode de silence s6rologique a 6t6 le sujet de publications contradictoires, certains auteurs tenant pour une dur6e br~ve, de l 'ordre de quelques semaines, d 'autres pour une p6riode beaucoup plus longue, pouvant ~tre m~me de quelques ann6es. On se souvient que dans les jours qui avaient pr6c6d6 le congr6s international sur le sida de 1989 (Montr6al), le New England Journal of Medecine avait publi6 un article sign6 Imagawa, selon lequel 23 % des homosexuels s6ron6gatifs pr6sentaient une culture virale positive, ce qui confirmaient certains r6sultats de PeR.

La possibilit6 de d6tecter di rectement le g6nome viral a pu faire dire que la P e R allaitconsti tuer tm nouveau test de d6pistage des dons de sang

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292 LEFRERE J.J.

infect6s par le VIH. I1 est vite apparu que la longueur et la lourdeur relatives de cette technique la rendait peu compatible avec les imp6ratifs de la transfusion sanguine. Elle a n6ammoins son importance dans le domaine de la s6curit6 transfusionnelle, car eUe doit permettre de v6rifier ou d'infirmer l'existence de sujets s6ron6gatifs et porteurs de s6quences du g6nome du VIH.

Le dernier congrbs international sur le sida (San Francisco, juin 1990) a 6t6 l'occasion de nombreuses communications ayant pour th6me l'application de la PCR chez des sujets s6ron6gatifs ,, paradoxaux ,,, c'est-/t-dire d6pourvus d'anticorps anti-VIH en d6pit d 'un haut risque d'infection par le virus. C'est le cas notamment de sujets homosexuels ayant eu des rapports sexuels avec un ou plusieurs partenaires infect6s par le VIH, ou d'h6mophiles polytransfus6s avant l'application des mesures pr6ventives de l'infection VIH transfusionnelle. Le nombre de communications au congr6s de San Francisco atteste que de plus en plus de laboratoires d6veloppent aujourd'hui cette technique dans le contexte de l'infecfion VIH. Les r6sultats sont toutefois loin d'6tre d6pourvus d'ambiguit6.

La pr6sentation sur la PCR qui a 6t6 le plus remarqu6e lors du congr6s fut incontestablement celle de Moncany (laboratoire du Pr Montagnier, Institut Pasteur), qui a utilis~ dans son 6tude dix paires de primers, localis6es dans les r6gions, gag, pol, env, ne[ 1, ne[ 2, vi i 1, vii 2, vpr, vpx et vpu. Dans la s6rie 6tudi6e par cet auteur, la majorit6 des sujets s6ron6gatifs h risque furent trouv6s porteurs de s6quences g6no- miques du VIH : chez 29 femmes s6ron6gatives h risque d'infection VIH, la PCR 6tait positive chez 23. Darts cette 6tude, qui sugg~re ainsi l'existence d'une longue p6riode de silence s6rologique chez les sujets infect6s, les gbnes de r6gulation du virus apparurent en premier, suivis par les g~nes de structure. Le m~me auteur, ~tudiant en PCR 28 h6mophiles s6ron6gatifs, observe une r6ponse positive dans 23 cas, tandis qu'il obtient sept r6ponses positives chez sept partenaires s6ron6- gatifs d'h6mophiles s6ropositifs. Chez 35 thalass6miques s6ron6gatifs polytransfus6s avant la mise en route du d6pistage syst6matique des dons de sang, 32 furent trouv6s dans cette s6rie positifs en PCR.

Cette 6tude soulbve cependant certaines restrictions. Outre la per- plexit~ qu'elle a soulev~e quant au nombre de paires de primers utilis6es (dix, alors que la totalit6 des autres 6quipes en utilisent au plus quatre), il faut signaler que, sur les 34 t6moins n6gatifs de cette 6tude, quatre pr6sentaient une r6ponse positive en PCR (avec, dans trois cas, deux paires de primers). Ceci entache la cr6dibilit6 que l'on peut accorder ~t ces r6sultats, dont les leqons ~t tirer seraient lourdes de cons6quences, en particulier sur le risque transfusionnel actuel, car le diagnostic biologique d'infection VIH repose aujourd'hui sur le s en test sfrologique.

Certes, certains auteurs ont 6galement rapport6 des r6sultats positifs en PCR chez des sujets s6ron6gatifs ~t risque, avec toutefois une fr6- quence beaucoup plus faible : Quinn (USA),-utilisant deux paires de primers dans les r6gions gag et env, constate trois T6sukats positifs chez 90 toxicomanes s6ron6gatifs ; Yogi (USA), avec trois paires de primers

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LA . POLYMERASE CHAIN REACTION . (PCR) 293

dans les r6gions gag, env, LTR, trouve cinq r6sultats positifs parmi 38 sujets s6ron6gatifs h risque ; Neumann (USA) observe, avec deux sondes dans les r6gions gag et env, deux r6sultats positifs chez 125 sujets s4ron6gatifs/: risque.

D'antres 6tudes, cependant, n'ont retrouv6 aucune PCR positive chez les sujets s6ron4gatifs h risque : celle de Ward (USA), avec deux paires de primers dans la r6gion gag, chez 80 toxicomanes s6ron6gatifs ; celle de Sullivan (USA), avec deux sondes (gag, env), chez 60 femmes s4ron6gatives partenaires d'h6mophiles s6roconvertis entre 1982 et 1984 ; celle du Khayam-Bashi (USA), avec une paire de primers dans la r6gion gag, chez 23 sujets s6ron6gatifs h risque : celle de Mariotti (INTS, Paris), avec trois paires de primers darts les r6gions gag, pol , LTR, chez 128 sujets s6ron6gatifs h risque (39 homosexuels et 89 h6mophiles).

Le tableau ci-dessous rbsume l'ensemble de ces r6sultats :

Autettrs Sondes utiIis6es Nombre de sujets s6ron6gatifs R6sultats positifs (pays) ~t risque 6tudi6s en PCR

(pourcentage)

Moncany 29 femmes h risque (France) 28 h&nophiles

Quinn (USA) Yogi (USA) Neumann (USA) Ward (USA) Sullivan (USA) Khayam (USA) Mariotti (France)

gag, pol , env, ne f 1 ne[ 2, r i l l , vii2,

vpr, vpx, v p u

gag, env

gag, env, LTR

gag, env

gag, gag

gag, env

gag, gag

gag, pol , L T R

7 partenaires de s6ropositifs 35 thalass4miques 90 toxicomanes

38 sujets h risque

125 sujets h risque

80 toxicomanes

60 femmes partenaires d'h6mophfles s6ropositifs

23 sujets h risque

39 homosexuels 89 h6mophiles

23 (79 %) 23 (82 %)

7 (100 %) 32 (91%)

3 (3,3 %)

5 (13 %)

2(1,6%)

0 (0 %)

0 (0 %)

o (o %)

0 (o %)

I1 existe donc une nette contradiction quant aux r6sultats de la PCR chez les sujets s6rondgatifs h risque. En dehors de l'6tude de Moncany, qui, nons l'avons vu, n'est pas exempte de critiques, les diff6rents travaux pr6sent6s ont sugg6r6 que l'infection VIH s6rologiquement silencieuse sur une longue pbriode est un ph6nom6ne rare.

Ce ph6nom6ne existe-t-il r6ellement ? Des amplifications non sp6cifi- ques, des contaminations de laboratoires peuvent &re responsables de faux positifs. D'un autre c6t6, une insuffisance d'amplification peut entrainer des r6sultats faussements n6gatifs. Tant qu'un contr61e de qualit6 entre les diff6rents laboratoires de PCR, bas6 sur l'6change d'6chantillons cod&, n'aura pas 6t6 mis en place, il n'est gu6re possible de tirer une conclusion d6finitive. L' impor tance que rev&rait en transfu- sion sanguine l'existence de sujets porteurs du virus en d6pit d'une s6ron6gativit6 persistante n&essite que ce contr61e de qualit6 soit rnis en place au plus t6t.