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La Première guerre mondiale1. La violencePassé les premiers mois de 1914 (chocs brutaux mais brefs), la notion de champ de bataille a évolué :
ce sont désormais des sièges (p.39) : la profondeur des arrière-fronts larges de plusisieurs
dizaines de kilomètres permet de résister efficacement à toutes les poussées adverses. Sur la
Somme, de juillet à novembre 1916, une masse énorme de 4 millions d'hommes qui ont pu se relayer
de part et d'autre pour alimenter un front de 40 km de long. Plus d'1/4 ont été tués, blessés, faits
prisonniers ou ont disparu. Ces « sièges » laissent des lieux stérilisés sur des milliers de kms carrés.
Avec les progrès immenses de la puissance de feu, les savoir-faire des combattants comptent pour peu
; la disproportion est écrasante entre les moyens de tuer et de se protéger. La croix rouge existe
(accords de La Haye 1907) et pourtant on tire sur les blessés et on achève les prisonniers dans
certains cas (rupture avec le siècle précédent) ; les trèves étaient trop courtes pour évacuer et soigner
tout le monde d'où (aussi) le très grand nombre de morts (c'est le cas d'1/3 des 20 000 morts de la
Somme le 1.07.1916). Il existe par contre des trèves tacites entre soldats. La brusque radicalisation
guerrière fut provoquée par les conditions techniques nouvelles de combat, mais pas seulement.
✗ « Civilisation des moeurs » ou « brutalisation » ?
1914-1918 est un recul de civilisation par rapport à la « civilisation des moeurs » du XIX° s. La
violence de la 2° G.M. Face aux populations désarmées sera issue de la 1° « brutalisation » (notion de
G. Mosse). Les hommes font très rarement état de leur vilence personnelle ; l'exemple suivant est
assez rare.
Blaise Cendrars : Et voilà qu'aujourd'hui j'ai le couteau à la main […] J'ai bravé la torpille, le
canon, les mines, le feu, les gaz, les mitrailleuses, toute la machinerie anonyme, démoniaque,
systématique, aveugle. Je vais braver l'homme. Mon semblable. Un singe. Oeil pour oeil, dent pour
dent. A nous deux maintenant. A coup de poing, à coup de couteau. Sans merci. Je saute sur mon
antagoniste. Je lui porte un coup terrible. La tête est presque décollée. J'ai tué le Boche. J'étais plus
vif et plus rapide que lui. Plus direct. J'ai frappé le premier. J'ai le sens de la réalité, moi, poète. J'ai
agi. J'ia tué. Comme celui qui veut vivre
✗ Les civils : atrocités et ocupations
Les empires centraux pensaient que l'alliance « contre-nature » des Français-Anglais et Russes
justifiait la volonté de leur faire la guerre. Il semble que partout un darwinisme social issu de la
pensée du XIX° s. soit à l'oeuvre. Racisme, mépris ethnique et social, hygiénisme, autant d'éléments
qui une fois catalysés ont consciemment ou non intoxiqué les systèmes de représentations des soldats.
Les exactions contre les civils leurs permettaient de s'affranchir de leurs propres peurs.
14-18 Retrouver la guerre, Stéphane Audouin-Rouzeau et Anette Becker, Gallimard, 2000.
1. Quels moyens sont utilisés (ci-dessous) par Otto DIX pour dénoncer la guerre ?
2. Quelles oppositions de genre et de moyen sont utilisées par l'affiche de
propagande allemande (gauche) et la lithographie de DIX (droite) ; dans quels
buts ?
Toutes ces Affiches se trouvent à l'Historial de la Grande Guerre à Péronne
Soldat mourant (Bapaume 1916), Otto Dix.
Les mitrailleurs, Otto DIX
« Un soldat allemand ne craint pas la mort. »
Un commando charge sous les gaz, 1924. O. Dix,
EXERCICE
LE DOCUMENT ET LE COMMENTAIRE HISTORIQUE
« discours de notre camarade Brana, directeur d'école
à Bayonne à l'occasion de la remise de la rosette qui lui
était faite », 1936. Cité par l'historien Antoine PROST.
Contexte : ce que fait l'auteur à une
certaine date. Celle-ci nous donne
généralement une explication sur l'intérêt
du document. Ici on comprendra qu'un
lettrré (notable) reçoit la légion
d'honneur vingt ans après la guerre.Ligne 1 La guerre a fait de nous, non seulement des
cadavres, des impotents, des aveugles. Elle a aussi, au
milieu de belles actions, de sacrifice et d'abnégation,
réveillé en nous et parfois porté au paroxysme, d'antiques
instincts de cruauté et de barbarie.
Quel problème ? Il commence par le
bilan de la guerre, sû et accepté de tous.
[Abnégation : don de soi sans attendre qqq ch en
retour.] Dès la fin de la phrase il passe au
vrai sujet qui lui tient à coeur : dénoncer
ce dont personne ne parle, les actes de
cruauté perpétrés par eux-mêmes quand
ils étaient réduits à l'état de « barbares ».Il m'est arrivé […] à moi qui n'ai jamais appliqué un coup
de poing à quiconque, à moi qui horreur du désordre et
de la brutalité, de prendre plaisir à tuer. Lorque au
cours d'un coup de main, nous rampions vers l'ennemi, la
grenade au poing, le couteau entre les dents comme des
escarpes, la peur nous tenait aux entrailles, et cependant
une force inéluctable nous poussait en avant. (...)
L'aveu : « à moi » signifie « tel que vous
me voyez : civilisé, cultivé,
responsable », alors qu'il confesse avoir
eu du plaisir bestial (comme les autres
dailleurs). Escarpes : il veut parler des soldats
qui rampent pour miner les défenses ennemies.
Description et questionnement : qu'est-
ce qui donne cette « force » ? La
propagande, l'amour de la patrie ?Surprendre l'ennemi dans sa tranchée, sauter sur lui, jouir de
l'effarement de l'homme qui ne croit pas au diable et qui
pourtant le voit tout à coup tomber sur ses épaules ! Cette
minute barbare, cette minute atroce avait
pour nous une saveur unique, un attrait morbide, comme chez
ces malheureux, usant de stupéfiants, mesurant l'étendue du
risque, mais ne pouvant se retenir de prendre du poison.
Le but : La suite de son discours est
l'aveu de sa participation personnelle à
cet acte barbare dans le but de faire
comprendre à la génération des années
trente que la 1° G.M n'était pas quelque
chose de civilisé mais une horreur
dépassant tout ce que l'on avait pu ou
bien voulu raconter. Essai d'explication
: est-ce le déchainement de la tension qui
fait l'homme civilisé de nouveau
l'homme barbare ?
EXERCICE
LE DOCUMENT
VOTRE
COMMENTAIRE HISTORIQUE
« discours de notre camarade Brana, directeur d'école
à Bayonne à l'occasion de la remise de la rosette qui lui
était faite », 1936. Cité par l'historien Antoine PROST.
Contexte :
Ligne 1 La guerre a fait de nous, non seulement des
cadavres, des impotents, des aveugles. Elle a aussi, au
milieu de belles actions, de sacrifice et d'abnégation,
réveillé en nous et parfois porté au paroxysme, d'antiques
instincts de cruauté et de barbarie.
Quel problème ?
Il m'est arrivé […] à moi qui n'ai jamais appliqué un coup
de poing à quiconque, à moi qui horreur du désordre et
de la brutalité, de prendre plaisir à tuer. Lorque au
cours d'un coup de main, nous rampions vers l'ennemi, la
grenade au poing, le couteau entre les dents comme des
escarpes, la peur nous tenait aux entrailles, et cependant
une force inéluctable nous poussait en avant. (...)
L'aveu :
Escarpes : il veut parler des soldats qui rampent
pour miner les défenses ennemies.
Description et questionnement :
Surprendre l'ennemi dans sa tranchée dans sa tranchée,
sauter sur lui, jouir de l'effarement de l'homme qui ne croit
pas au diable et qui pourtant le voit tout à coup tomber sur
ses épaules ! Cette minute barbare, cette minute atroce avait
pour nous une saveur unique, un attrait morbide, comme chez
ces malheureux, usant de stupéfiants, mesurant l'étendue du
risque, mais ne pouvant se retenir de prendre du poison.
Le but :
Essai d'explication :
GEORGES LEROY. Journal d'un instituteur.
Fait prisonnierLes camarades qui sont près de moi crient et se lamentent. J'entends parler les Allemands
qui à ma grande surprise sont autour de nous. Nous sommes prisonniers au nombre de sept dont six
soldats et un lieutenant. Les grenades que nous lançaient les Allemands sont des grenades offensives
qui ne sont guère dangereuses, elles font grand bruit et n'ont d'autre but que d'étourdir l'adversaire (tôle
mince en forme d'oeuf ). Les Allemands nous emmènent et nous font suivre un boyau qui me paraît bien
long et dans lequel, hélas, je rencontre beaucoup de cadavres que je dois enjamber. La plupart sont
effondrés, la tête transpercée d'une balle. Et toujours cette odeur fade des cadavres en décomposition. La
grande préoccupation des Allemands est de s'informer si nous avons du chocolat dans nos musettes. Les
combattants sont tout à fait convenables à notre égard, l'un d'eux cause un peu le français et se montre
fort aimable. Il nous laisse nous reposer car pour moi je suis si fatigué que je ne sais si je pourrai sortir de
ce lieu. Cependant les balles françaises nous menacent sans cesse. L'un de nous reçoit dans la tête une
balle qui l'étend raide mort. Le Lieutenant prisonnier avec nous et blessé précisément d'une balle au
côté se trouve très mal. Un Allemand lui fait un pansement. Enfin, nous ne pouvons rester où nous
sommes, nous devons aller vers l'arrière. Quelques pas plus loin, nous trouvons deux blessés français
dont l'un a la jambe cassée. Je ne sais comment cela se fit, mais je me trouvai seul avec ce dernier et je
dus l'aider à gagner le poste de secours le plus proche. Je fis des efforts inouïs car fatigué comme je
l'étais, il était une tâche bien difficile de transporter un homme si gravement (...). Enfin, je ne pouvais
abandonner un camarade si malheureux, bien que les balles tombassent drus et qu'elles vinssent siffler à
nos oreilles, j'ai traîné ce pauvre blessé, tantôt le portant sur mon dos, tantôt le faisant appuyer sur mon
épaule, il sautillait d'une jambe. Ainsi pendant plus d'une heure nous restâmes en pleine campagne
exposés aux balles. Exténués, n'en pouvant plus ni l'un ni l'autre, souvent nous nous couchâmes le long
des fossés de la route. Je coupai même la branche morte d'un arbre pour en faire une béquille à mon
blessé. Enfin nous fîmes ainsi peut-être un kilomètre quand, tout à coup, une rafale d'obus tombe
devant nous à quelques centaines de mètres sur la route que nous suivons. Mon blessé, voyant combien
il est dangereux pour nous de rester si longtemps sur cette route me demande de le coucher dans le
fossé et d'aller demander du secours au poste voisin. Je suis de son avis car je sens que jamais je ne
pourrai le conduire seul jusque là. La route est bien dangereuse, notre artillerie fait un vacarme
épouvantable, devant moi sur la route que je dois suivre, les obus tombent sans discontinuer ; pourrai-je
traverser ce barrage de mort ? Evidemment, je n'hésite pas une seconde, je marche d'abord, puis je
cours, les obus éclatent de toutes parts, enfin j'arrive au poste de la Croix rouge. Celui-ci est installé au
fond d'une profonde sape qui débouche au ras de la route sous le talus. Mes camarades faits prisonniers
avec moi y sont déjà. Une sorte d'indisposition causée par la faim, la soif et mon immense fatigue me
prend, je suis obligé de me coucher sur les marches de la sape. Un camarade me donne un morceau de
pain que je ne puis manger. Le médecin qui dirige ce poste va envoyer des brancardiers au secours des
blessés. Quand tout à coup, levant la tête, je vois deux Allemands ramenant mon blessé. Comme je fus
content ! Dès ce premier contact avec les Allemands, je constate combien leur moral est bas, je
m'attendais à les voir arrogants et belliqueux, mais tous les jeunes soldats qui sans doute formeront la
prochaine relève et qui attendent là la venue de la nuit, sont tristes. Ils ont la mine pleine d'ennui et
parlent à peine. Il est vrai que les obus viennent à toute minute les arroser de leurs éclats et rappeler à
tous les sombres réalités de la guerre. Et puis, de temps en temps, arrivent des brancardiers rapportant
des hommes affreusement mutilés. Que vont-ils faire de nous ? Nous attendons à l'entrée de cette sape.
Souvent, souvent nous reculons en hâte, un obus s'annonce et par son sifflement nous distinguons sa
dangereuse direction, mais pourquoi craint-on si peu la mort ! Enfin, le médecin nous fait un signe, il
nous emmène vers le front pour y ramasser des blessés que nous rapporterons ici. Je suis les camarades
et je refais en sens inverse le trajet que je viens d'accomplir mais cette fois sur une partie de la route
nous empruntons un boyau boueux et peu praticable. Alors, je suis à bout, je tombe, dans l'impossibilité
d'aller plus loin, je reste ainsi seul, pendant un certain temps, quand un soldat allemand revient et
m'accompagne jusqu'au poste de secours où j'étais précédemment. Pendant ce retour, je suis obligé de
m'asseoir nombre de fois, le bombardement est formidable, si terrible qu'à un certain moment ce soldat
m'entraîne dans une sape où nous nous abriterons. A la porte un soldat allemand gît dans une mare de
sang. Dans cette sape nouvelle, un officier allemand me demande des renseignements et est visiblement
consterné quand je lui dis que les combattants américains sont alors en France au nombre de un million.
Cependant cet officier me fait enlever mes guêtres et mes souliers par son ordonnance lequel me donne
en remplacement des souliers usés dont les clous me blesseront les pieds. Je vois là un signe de la triste
situation de nos ennemis. Sans doute, je m'efforce de conserver mes chaussures mais que faire dans la
situation où je me trouve. Enfin, le bombardement s'apaisant, je regagne le poste de secours. Quelques
temps après, mes camarades rentrent avec des blessés. L'un d'eux a reçu un éclat d'obus, un Allemand a été
tué. Quelle heure est-il alors, je ne saurais le dire. J'ai perdu la notion du temps. (…) Sur la route, au fur et à
mesure que s'apaise le bruit infernal, malgré ma tristesse d'être aux mains des boches, j'éprouve une sorte
de satisfaction de me sentir presque en paix dans cette campagne remplie d'obscurité et si calme. Ainsi
que mes compagnons, je ne puis comprendre comment j'ai pu échapper à la mort surtout au cours de cette
terrible journée du 29. Mais ce n'est pas encore la paix définitive, quelques obus sifflent au-dessus de nos
têtes dans la nuit silencieuse et vont éclater bien loin devant nous. (...). On nous donne du pain KK, le
fameux pain allemand noir et si désagréable que je ne puis manger malgré ma faim, puis de la viande et de
l'eau. Ma fatigue est si grande qu'au lieu de manger, je m'allonge vite sur la planche d'un lit provisoire et
bientôt le sommeil arrive. Malheureusement, le repos ne fut pas long, la guerre n'est pas finie ; vers 10
heures je suis réveillé en sursaut, des obus éclatent dans la rue, des éclats atteignent violemment la porte de
notre cantonnement, j'entends des Allemands blessés qui se plaignent dans la rue. Je sors avec quelques
camarades, mais nous jugeons prudent de demeurer ensuite dans notre cantonnement, quand notre
gardien vient nous chercher et nous emmène dans une profonde cave voûtée où nous passerons
tranquillement le reste de la nuit cependant que les obus continueront de tomber sur le village.
30 septembre. Dès le matin nous partons vers l'arrière, au cours de notre route nous sommes étonnés
de ne voir aucun travail de défense, nous voyons peu de troupe et nous pensons que l'ennemi est décidé,
le moment venu, de se retirer loin de ses positions actuelles.
LES CARNETS DE GUERRE DE VICTOR CHRISTOPHE
L'armistice
11 novembre. Ce matin est le dernier de la guerre. Les Allemands ont signé l'armistice et la fin des
hostilités a été fixée ce matin 11 du 11° mois 1918 à 11 heures. A l'arrivée, la musique joue et
l'acclamation des civils criant : Vive la France ! est des plus impressionnantes. 12
novembre. Contrairement à cette espérance, nous partons ce matin 8 heures pour Crémerie. Dans chaque
pays, nous sommes les bienvenus. J'ai aujourd'hui 27 ans! Et voilà la guerre qui se termine au moment où
le recul ennemi atteint nos régions. M. le médecin Marteau, de notre régiment, a hier, accouché une
jeune fille de 16 ans 1/2 d'un petit Allemand ! Nombreux sont les cas semblables. Aujourd'hui, premier
jour de la paix, hier était le 1561°de la guerre ! On n'y croit pas encore ! Comme la vie de misères, celle
de bien-être reviendra peu à peu. Mais la physionomie de tous se déride : on s'aborde le sourire aux
lèvres. 13 novembre. Nous
partons à 9 heures et repassons Tanna, Pont-Bar (les ponts ici sont rétablis), (…) des vergers ici ont été
détruits, les arbres sciés, les écluses sur le canal sont sautées. Puis, par Semuy où subsistent des
abattoirs allemands, nous gagnons Voncq. (…) En ces derniers jours, le ravitaillement n'arrive pas
normalement, empêché, dit-on, par celui de la population civile. (…) 17
novembre. Somme-Py qui fut un pays important n'est que ruines. Nous sommes logés comme à Sugny
dans des baraquements allemands (à Sugny, camp de prisonniers), les officiers occupent des abris, de
toute solidité, comme sont tous les travaux des Allemands. La voie ferrée ici n'existe plus. Nous pensons
être embarqués bientôt. Il serait temps : jusqu'à présent, nous ne nous apercevons pas beaucoup de la
fin des hostilités ; seule, la raison nous le fait concevoir ; marchant presque tous les jours dans cette zone
dévastée, nous nous figurons aller au repos habituel succédant à la période d'action. Mais quelle joie ce doit
être à l'Intérieur ! 18 novembre. Nous
repartons à 10 heures, reprenant la route de Châlons par Souain et Suippes. Quel aspect de désolation ici !
Quel bouleversement de la terre sur semblable largeur ! Toute cette craie a été retournée par la mitraille
et les obus. La route sur laquelle il n'aurait pas fallu se montrer à pareille heure dans les années
précédentes est semée de bouts de fer, de cuivre incrustés en elle. Quand donc finiront ces marches ?
Tous, nous nous le demandons. Depuis presque un mois, nous portons le même linge, pas moyen de se
changer. Ah ! cette Division ! 16
décembre. Séjour à Faulquemont. On trouve ici beaucoup de choses encore ; les magasins sont
approvisionnés. Les prix varient avec ceux de France suivant que l'objet ou la marchandise sont plus ou
moins rares. Une habitante nous raconte qu'à leur départ les soldats allemands malmenaient leurs officiers,
les dégradant, etc., tous n'avaient qu'un but, rentrer chez eux.
17 décembre. Réveil à 6 heures. Départ à 7 heures. Nous traversons à présent les pays à orthographe
allemande. Nous arrivons à Hammern (La Chambre) vers midi, par la pluie. Concert malgré ce mauvais
temps, de 14 h 30 à 15 h 30. Albert et Achille couchent chez des habitants voisins de notre cantonnement.
Une jeune dame de 23 ans (Mélanie) nous raconte son petit roman. D'origine alsacienne, elle sait encore
un peu de français. Mariée à un sous-officier allemand depuis septembre dernier - qui faisait son service
à Saint-Avold où elle habitait -, ce dernier est en ce moment près de Dusseldorf. Le mariage fait contre la
volonté de ses parents la force d'habiter ici chez une tante. Sa sceur, mariée à un sous-officier de carrière, a
toujours eu une tenue « très noble ». De nature sentimentale allant de pair avec un caractère « loustich »
(lustig), elle nous amuse entre les minutes où elle nous apitoie.
18 décembre. Réveil à 5 heures. : 20 km nous conduisent à Forbach ; nous logeons dans une
caserne. Contrée industrielle, avec cités ouvrières.
La mondialisation de la guerre passe par son extension spatiale mais également par la diffusion de la
violence et de la cruauté. De façon scientifique on appellera les habitants juste à proximité du front :
« l'arrière-front ». Ils ont souvent été évacués vers la Belgique, l'Allemagne, la France. Puis l'évolution
technique permit de bombarder loin du front comme Londres (raids aériens en 1915), Paris en 1918 est
atteinte par le canon Kaiser Wilhelm. Cologne est bombardée par les avions anglais en 1918. On peut
donc agir sur la population civile arrière. A rapprocher du blocus pour casser le moral.