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PHARMACOLOGIE ET THI~RAPEUTIQUE la prdvention de I'intoxication au plomb : en est-on ? G. LENOIR L A communautd pddiatrique des grandes cites urbaines a ~t~, il y a trois ans, alert~e, en pattie par nos soins, sur l'intoxication au plomb chez l'enfant (1). Les diff&ents h6pitaux p~diatriques parisiens avaient en effet re~u simultan~ment un nombre non n~gligeable d'in- toxications aigu~s, dont certaines tr~s graves. La premiere analyse faisant ressortir les facteurs de risques majeurs comme: * l'enfant issu d'une famille d em~gres; plus volontiers africaine, et m~me malienne; vivant, ~i Paris, dans certains quartiers de la capi- tale (11% 18%..) ; ayant un comportement de PICA la plupart du temps ; enfin, il apparaissait que les peintures anciennes des logements (avant 1948) &aient la source la plus probable de l'intoxication. Les probl~mes soulev~s alors ~tant ~ l'dvidence multiples et complexes, un groupe de r~flexion et d'action s'est bient6t constitu~ sous la direction de nos coll~gues de l'h6pital Fernand-Widal, qui, fait exceptionnel ~ l'Assistance Publique de Paris, effectuent la totalit~ des dosages de plombdmie demand~s dans les h6pitaux et connaissent de ce fait l'ensemble des cas hospitaliers. Ce groupe, outre son existence, a 1 enorme avantage de reunlr des pddiatres d'horizons divers, dont ceux des PMI de Paris, en premiere ligne dans un probl~me de ce genre. Fait dgalement remarquable, une stratd- gie de d@istage et de traitement a dtd mise sur pied et effectivement suivie (2). Les effets et les rdsultats de nos coll~gues de PMI -- du 11~ arron- dissement notamment -- mentent d'etre c~tes" ' (3). Une table ronde est rdservde ~ ce sujet lors des journdes nationales des centres de pharmaco-vigi- lance franfais, en septembre 1989 (4). Elle permet- tra sfirement de faire le point sur des sujets aussi importants que les crit~res de d@istage ou les effets d'une chdlation prolongde, que nous traite- font avec Ph. Hubert et A. Saint Raymond. Mais est-ce suffisant ? G. LENOIR, p~diatre, professeur & I'Universit~ Paris V- Necker, membre de la Commission Nationale de Pharmaco-vigilance, secr~taire du Groupe de Pharmaco- Iogie P6diatrique. 460 quelles actions envisag6es ? Un certain nombre de points n'ont pas encore ~t~ abord~s ou n'ont re~u qu'une r@onse partielle. Leur approfondissement nous paratt ~tre une n~ces- sit~ parce qu'ils sont au centre de l'action dpidd- miologique, de l'action sociale et preventive et de l'amdlioration th&apeutique. compldter I'information I1 n'existe aucune information, ~ notre connais- sance, sur les grands centres urbains ayant accueilli en m~me temps que la capitale les m~mes popula- tions d'enfants ~t risque, mises dans ces conditions analogues de logement. Sfirement, les &udes sont en cours par nos coll~- gues, mais il sera bon, lorsqu'elles seront achev~es, qu'elles fassent l'objet de br~ves communications dans des journaux p~diatriques d'information. les mesures prdventives Un certain nombre de mesures sociales, destinies rendre la gratuitd des explorations et des soins, ainsi qu'~l am~liorer les conditions de vie, ont ~t~ prises concernant les populations d'enfants risque et rep~r~es. I1 convient de les appliquer et les faire appliquer d~s lors que la diffusion / de leur existence sera assurde par les autor:tes com- p~tentes. Le relogement ou la r~fection simple des peintures se heurte, on l'imagine, ~l un certain hombre de probl~mes : les uns de'pendent des pro- pri&aires, les autres des industriels et des artisans. I1 ne suffit pas de repeindre par exemple : il faut gratter et 61iminer enti~rement les vieilles couches et ne pas utiliser le minium ou te vernis, encore composd de plomb ; m~me s'il s'agit d'une forme a priori insoluble, on dolt rappeter la mdconnais- sance totale des phdnom~nes de lyse des dcailles de peinture dans l'estomac ~i pH acides et des Journal de PEDIATRJE et de PUERICULTURE n ~ 8 1989

La prévention de l'intoxication au plomb: où en est-on?

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PHARMACOLOGIE ET THI~RAPEUTIQUE

la p r d v e n t i o n d e I ' i n t o x i c a t i o n

a u p l o m b : e n e s t - o n ?

G. LENOIR

L A communautd pddiatrique des grandes cites urbaines a ~t~, il y a trois ans, alert~e, en pattie par nos soins, sur l'intoxication au plomb chez l'enfant (1). Les diff&ents

h6pitaux p~diatriques parisiens avaient en effet re~u simultan~ment un nombre non n~gligeable d'in- toxications aigu~s, dont certaines tr~s graves. La premiere analyse faisant ressortir les facteurs de risques majeurs comme: * l'enfant issu d'une famille d em~gres; �9 plus volontiers africaine, et m~me malienne; �9 vivant, ~i Paris, dans certains quartiers de la capi- tale (11% 18%..) ; �9 ayant un comportement de PICA la plupart du temps ; �9 enfin, il apparaissait que les peintures anciennes des logements (avant 1948) &aient la source la plus probable de l'intoxication.

Les probl~mes soulev~s alors ~tant ~ l'dvidence multiples et complexes, un groupe de r~flexion et d'action s'est bient6t constitu~ sous la direction de nos coll~gues de l'h6pital Fernand-Widal, qui, fait exceptionnel ~ l'Assistance Publique de Paris, effectuent la totalit~ des dosages de plombdmie demand~s dans les h6pitaux et connaissent de ce fait l'ensemble des cas hospitaliers. Ce groupe, outre son existence, a 1 enorme avantage de reunlr des pddiatres d'horizons divers, dont ceux des PMI de Paris, en premiere ligne dans un probl~me de ce genre. Fait dgalement remarquable, une stratd- gie de d@istage et de traitement a dtd mise sur pied et effectivement suivie (2). Les effets et les rdsultats de nos coll~gues de PMI -- du 11 ~ arron- dissement notamment -- mentent d'etre c~tes" ' (3). Une table ronde est rdservde ~ ce sujet lors des journdes nationales des centres de pharmaco-vigi- lance franfais, en septembre 1989 (4). Elle permet- tra sfirement de faire le point sur des sujets aussi importants que les crit~res de d@istage ou les effets d'une chdlation prolongde, que nous traite- font avec Ph. Hubert et A. Saint Raymond.

Mais est-ce suffisant ?

G. LENOIR, p~diatre, professeur & I'Universit~ Paris V- Necker, membre de la Commission Nationale de Pharmaco-vigilance, secr~taire du Groupe de Pharmaco- Iogie P6diatrique.

460

quelles act ions env isag6es ?

Un certain nombre de points n 'ont pas encore ~t~ abord~s ou n 'ont re~u qu'une r@onse partielle. Leur approfondissement nous paratt ~tre une n~ces- sit~ parce qu'ils sont au centre de l'action dpidd- miologique, de l'action sociale et preventive et de l'amdlioration th&apeutique.

c o m p l d t e r I ' i n f o r m a t i o n

I1 n'existe aucune information, ~ notre connais- sance, sur les grands centres urbains ayant accueilli en m~me temps que la capitale les m~mes popula- tions d'enfants ~t risque, mises dans ces conditions analogues de logement.

Sfirement, les &udes sont en cours par nos coll~- gues, mais il sera bon, lorsqu'elles seront achev~es, qu'elles fassent l'objet de br~ves communications dans des journaux p~diatriques d'information.

les m e s u r e s p r d v e n t i v e s

Un certain nombre de mesures sociales, destinies rendre la gratuitd des explorations et des soins,

ainsi qu'~l am~liorer les conditions de vie, ont ~t~ prises concernant les populations d'enfants risque et rep~r~es. I1 convient de les appliquer et les faire appliquer d~s lors que la diffusion

�9 /

de leur existence sera assurde par les autor:tes com- p~tentes. Le relogement ou la r~fection simple des peintures se heurte, on l'imagine, ~l un certain hombre de probl~mes : les uns de'pendent des pro- pri&aires, les autres des industriels et des artisans. I1 ne suffit pas de repeindre par exemple : il faut gratter et 61iminer enti~rement les vieilles couches et ne pas utiliser le minium ou te vernis, encore composd de plomb ; m~me s'il s'agit d'une forme a priori insoluble, on dolt rappeter la mdconnais- sance totale des phdnom~nes de lyse des dcailles de peinture dans l'estomac ~i pH acides et des

Journal de PEDIATRJE et de PUERICULTURE n ~ 8 1989

PHARMACOLOGIE ET THERAPEUTIQUE

Pas de traiternent ch~lateur

SusPiCion d'intoxicati0n Saturn'ine

Plombeiie provoqu~e I I

t Pb U (meg) < 0.7 EDTA Na2Ca (mg)

Pas de traitement chelateur

Repeter les dosages Pb B et Pb U

periodiquemenI

Pb U (meg) ~> 0.7

EDTA Na2Oa (mgl

Traitement ch~tateur = EDTA Na_Ca 1 000 rng/m=/j �9 V continue ou en 6 V ente dune heure

d6faut, en 6 IMii pendant 5 jours

�9 V [ Nouveau bilan 7 ~ 10 jours

apr~s le dernier jour de traitement

Traitement ch61ateur �9 BAL (300 mg/m2fj}

450 mg/m=/j si enc6phalopathie �9 EDTA Na2Ca 1 000 mcgtm=tj

1500 mcglm~/j si enc6phalo[0athie �9 HO BAL 50 ou 75 mcg/m 2 IM * H4 BAL 50 ou 75 mcg/m = IM d6but

perfusion EDTA Na2Ca Traitement pendant 5 jours

interactions avec les nutriments. Bien que d~mon- tr~e, la plus grande sensibilit~ des enfants ~t l'in- toxication au plan neuro-psychique n'est pas par- faitement expliqu~e. L'exposition au plomb est la somme d'une s~rie de circonstances particuli~res dans l 'environnement, la famille avec les traditions culinaires et le d~racinement. Chez les enfants, le comportement de PICA paratt jouer un r61e preponderant et son analyse ethno-psychologique serait la bienvenue. Quant aux parts respectives de l'eau, de l'air et de l 'alimentation dans de larges populations mises en conditions habituelles, elles sont ~valu~es r~guli~rement par I 'OMS et les ins- tances de chaque pays (5). A partir de ces donn~es, on peut pr~coniser des mesures preventives adaptees.

c o n d u i t e d u t r a i t e m e n t

I1 existe encore de nombreux points d'interroga- tion sur la meilleure fa;on de conduire le traite- ment des intoxications s~v~res. Un des phdnom~-

/ �9 �9 /

nes assez communement observe, mais mexphque, est la rdascension de la plomb~mie entre deux cures de chelation. Dans plusieurs cas, l eventua- Journal de PEDIATRIE et de PUERICULTURE n ~ 8-1989

lit~ d'une r~intoxication a pu ~tre evoquee' ' ; la soustraction temporaire de l'enfant au milieu fami- lial n'a pas pour autant modifi~ ce ph~nom~ne. I1 nous semble n~cessaire de refaire le point rdgu- li~rement sur l ' important probl~me de l'intoxica- tion au plomb chez l'enfant et de mobiliser nouveau les personnes int~ressdes dans tous les domaines cites iciet off nous stagnons trop encore.

Bibl iographie

1. CARLUS-MONCOMBLE C., ORZECHOWSKI C., LENOIR G. - - Le saturnisme chez I 'enfant. In : JPP 1987 ; 205 -12 . F lammar ion M6dec ine Sc iences Ed.

2. Pro toco le c i - jo in t (Cf. tab leau 1).

3. DELOUR M., SQUINAZI F. -- Intoxication saturnine chronique du jeune enfant. D6pistage et prise en charge m6dico-sociale. Proposition de Proto- cole. Rev Int Pediatr 1 9 8 9 ; t : 38 -47 .

4. SAINT RAYMOND A. , HUBERT P., LENOIR G. -- Intoxi- cation chronique au plomb : effets de la ch61ation prolong6e. XXVI I e Congr~s Cent res Ant i -Po isons. Septernbre 1 989 .

5. FESTY B., SQUINAZI F. -- Le saturnisme : une intoxication toujours d'actualit~. La Revue du Pra- t ic ien 1 9 8 9 ; 8 : 681-2 .

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