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-1- BARREAU DU CAMEROUN SEMINIAIRE CIFAF DU 05 DECEMBRE 2016 A YAOUNDE THEME : LA REALISATION DES NANTISSEMENTS EN DROIT OHADA PRESENTE PAR : MAITRE PAUL TCHUENTE AVOCAT AU BARREAU DU CAMEROUN

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BARREAU DU CAMEROUN

SEMINIAIRE CIFAF

DU 05 DECEMBRE 2016

A YAOUNDE

THEME :

LA REALISATION DES NANTISSEMENTS

EN DROIT OHADA

PRESENTE PAR :

MAITRE PAUL TCHUENTE

AVOCAT AU BARREAU DU CAMEROUN

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SOMMAIRE

INTRODUCTION

I- CONDITIONS DE REALISATION DES NANTISSEMENTS

A- LES PARTIES A LA REALISATION

1- Les parties traditionnelles d’une action en recouvrement

a. Le créancier ou l’agent des suretés Désignation dans l’acte Certificat d’inscription au RCCM

b. Le débiteur ou le constituant

2- Les parties propres aux nantissements

a. Parties contribuant à l’effectivité de la réalisation

Le teneur du compte La société émettrice des actions et obligations L’OAPI

b. Parties contribuant à l’efficacité de la réalisation

Le greffier (RCCM) Le bailleur d’immeuble

B- LA CREANCE GARANTIE REALISABLE

1- Condition commune : défaillance du débiteur

a. Notion de défaillance

Survenance du terme Déchéance du terme

b. Constat de la défaillance

2- Condition spécifique : Le titre exécutoire

II- MODALITES DE REALISATION DES NANTISSEMENTS

A- REALISATION PAR L’EXECUTION

1- Type d’exécution forcée applicable au nantissement 2- Mise en œuvre de l’exécution forcée

a. Conditions préalables Conversion en saisie vente (titre exécutoire) Absence ou échec de l’offre de vente amiable Absence ou rejet de la contestation

b. Formalités de vente

Cahier de charge Publicité (notification, annonces légales) Adjudication (mise à prix, enchères)

c. Contentieux de l’exécution forcée

B- REALISATION PAR ATTRIBUTION DU BIEN

1- Attribution en vertu de la loi 2- Attribution en vertu de la convention 3- Attribution par le juge

CONCLUSION

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THEME : LA REALISATION DES NANTISSEMENTS

EN DROIT OHADA

INTRODUCTION

Le nantissement est une sureté et comme telle sa vocation est de garantir le paiement du créancier au cas où le débiteur ne s’acquitte pas de son obligation de payer.

Comme nous le savons il existe en droit OHADA un Acte Uniforme spécifique qui régit les voies d’exécution des obligations qui n’ont pas été tenues par leurs débiteurs.

La question peut donc légitimement se poser de savoir pourquoi focaliser son attention dans un séminaire comme celui-ci sur la réalisation des nantissements alors que l’on pouvait s’en tenir aux dispositions de l’AUVE.

A première vue, on peut constater que les nantissements ne font pas partie des suretés les plus usitées. En effet en marge des suretés créées par la loi et les décisions de justice, les conventions des parties se focalisent sur le cautionnement, le gage et les hypothèques.

Les nantissements quand ils sont évoqués, ressemblent plutôt à des clauses de style dans les actes notariés.

En deuxième lieu quand on parcourt l’AUVE, on constate qu’il régit de manière limitative les exécutions sur les meubles corporels, les créances et rémunérations, les droits d’associés et valeurs mobilières et les immeubles.

Il ressort cependant de la définition du nantissement que son domaine de prédilection porte sur les meubles incorporels, non visés par l’AUVE.

En troisième lieu, si l’AUVE consacre l’exécution forcée, les nantissements offrent la possibilité d’attribution du bien au créancier en paiement.

Les constats ci-dessus nous amènent à conclure qu’il y a un intérêt certain à étudier de manière particulière la réalisation des nantissements et nous saluons ici les organisateurs de ce séminaire qui ont eu l’ingénieuse idée de retenir ce thème.

J’avoue d’entrée de jeu qu’il n’est pas facile à aborder et que lorsque le Bâtonnier m’a sollicité pour le présenter j’ai hésité, avant de m’y engager.

C’est que la question ne faisant pas partie des usages, il fallait se remettre à l’ouvrage afin de donner le meilleur de soi-même aux augustes participants à ce séminaire.

Vous aurez ci-dessous le fruit de nos pérégrinations.

Réaliser une sureté c’est la mettre en œuvre (II) pour permettre au bénéficiaire de ladite sureté de rentrer dans ses droits, mais cette mise en œuvre suppose réunies des conditions préalables (I).

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I- CONDITIONS DE REALISATION DES NANTISSEMENTS

Nous avons relevé supra que la réalisation du nantissement avait pour finalité le paiement d’une créance dont le nantissement constituait la sureté garantie.

La problématique ici est de cerner les parties qui concourent à l’opération d’une part et de déterminer les caractéristiques de la créance pouvant ouvrir droit à réalisation du nantissement d’autre part.

A- LES PARTIES A LA REALISATION

La réalisation des nantissements a pour objet l’extinction d’une dette que le débiteur n’a pas pu payer volontairement.

Cette opération est donc une action en recouvrement qui comme telle, engage les parties traditionnelles d’une telle action.

La spécificité des nantissements fait cependant intervenir dans la réalisation de cette sureté des parties propres qui y jouent un rôle de premier plan.

1- Les parties traditionnelles (Créancier et débiteur)

a/ Le créancier ou l’agent des suretés

Le créancier est le bénéficiaire du nantissement et qui a intérêt à le réaliser soit lui-même soit par un agent des suretés.

La qualité de créancier d’un nantissement dont la réalisation est poursuivie ressort du certificat d’inscription au greffe dressé à la suite de l’acte de nantissement.

- Désignation dans l’acte de nantissement

Le nantissement est tantôt d’origine conventionnelle tantôt d’origine judiciaire.

Dans les nantissements conventionnels, la désignation du créancier est une condition de validité de l’acte.

Cela ressort expressément des nantissements des droits d’associés et valeurs mobilières. (article 141), des comptes de titres financiers (article 147), des droits de propriété intellectuelle (article 157), des fonds de commerce (article 163).

Si l’article 127 de l’AUS qui s’applique aux nantissements de créance et de comptes bancaires ne prescrit pas expressément la désignation du créancier dans l’acte constatant lesdits nantissements, cette omission est suppléée par l’article 131 de l’AUS. Celui-ci prévoit en effet que le nantissement prend effet entre les parties à la date de sa conclusion, or s’agissant d’un acte synallagmatique, celui-ci suppose que le créancier en est signataire et de ce fait sa désignation doit y figurer.

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Lorsque le nantissement est d’origine judiciaire, la qualité de créancier ressort de la décision autorisant le nantissement. Il s’agit du requérant qui se prévaut selon l’article 54 de l’AUVE d’une créance fondée dans son principe :

Article 142 (2) : droit d’associés et valeurs mobilières Article 158 (2) : droit de propriété intellectuelle Article 164 (2) : fonds de commerce.

- Le certificat d’inscription au RCCM

Le nouveau droit des suretés OHADA a prescrit l’inscription au RCCM pour tous les nantissements à l’exception du nantissement des comptes de titres financiers.

Cette inscription condition de validité a pour but de rendre la sureté opposable aux tiers et de conférer au créancier nanti les droits de suite et de préférence attachés aux suretés en général.

En conséquence, le nantissement qui n’a pas été inscrit n’est pas opposable aux tiers ce qui expose le créancier à subir le concours des autres créanciers.

La CCJA retient d’ailleurs qu’un nantissement non inscrit au RCCM ne saurait donner lieu à réalisation.

Ainsi, chaque fois que la réalisation du nantissement donnera naissance à un litige, le certificat d’inscription au RCCM s’avèrera comme une pièce essentielle à fournir.

Toutefois comme pour toutes les suretés, cette mission peut être confiée à l’agent des suretés prévu par les articles 5 et suivants de l’AUS.

b/ Le débiteur ou le constituant

Le débiteur visé dans la procédure de réalisation du nantissement est celui dont le bien a été nanti.

Il peut s’agir du débiteur lui-même (l’emprunteur) ou d’un tiers appelé alors le constituant (article 141, 147, 157 et 163).

Sa désignation doit ressortir dans l’acte de nantissement à peine de nullité (article 127, 147, 157 et 163) ou de la décision judiciaire et comme pour le créancier, elle doit figurer dans le certificat d’inscription au RCCM.

Le dernier alinéa de l’article 104 de l’AUS met cependant en relief une catégorie dite de débiteur professionnel dont le bien nanti peut être attribué conventionnellement en paiement au créancier à défaut de paiement.

Cette catégorie est définie à l’article 3 de l’AUS qui dispose que :

« Est considéré comme débiteur professionnel au sens du présent acte uniforme tout débiteur dont la dette est née dans l’exercice de sa profession, ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles même si celle-ci n’est pas principale »

Cette précision permet de retenir que pour les débiteurs qui ne sont pas professionnels, la réalisation du nantissement par attribution conventionnelle n’est pas admise.

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2- Les parties propres aux nantissements

La constitution du nantissement implique souvent des tiers dont le rôle est

prépondérant soit parce que la réalisation effective de celui-ci leur incombe, soit parce

que leur participation est requise pour l’efficacité de l’opération.

a- Les parties contribuant à l’effectivité de la réalisation

Ce sont les tiers qui sans être intéressés personnellement, matérialisent la réalisation

du nantissement soit en procédant au paiement, soit en enregistrant le transfert de

propriété.

Le débiteur de la créance nantie

ou teneur du compte nanti

Il s’agit de la personne qui détient l’objet du nantissement et qui est chargée de

procéder au paiement dès que les conditions de réalisation du nantissement sont

remplies.

Elle doit à peine de nullité être désignée dans l’acte de nantissement (article 127, 137)

et en recevoir notification au cas où elle n’y a pas pris part.

La société émettrice des droits d’associés

et de valeurs mobilières

Les droits d’associés (actions et parts sociales) et valeurs mobilières (obligations) sont

des titres émis par des sociétés.

Comme le teneur de compte, ces sociétés émettrices doivent être visées dans l’acte de

nantissement pour une bonne identification de son objet et en être notifiées

formellement.

En effet il leur revient de concrétiser la réalisation du nantissement soit en payant le

créancier sur les sommes produites par les titres, soit en transférant les titres au

créancier attributaire.

L’OAPI (gestionnaire des droits de propriété

intellectuelle)

Les droits de propriété intellectuelle susceptibles de nantissement sont gérés à travers

l’OAPI.

Aucune transaction sur ces droits n’est valable tant que l’OAPI ne l’a pas prise en

considération.

Ainsi, seule la notification du nantissement à l’OAPI permettra au créancier d’obtenir

de l’OAPI la réalisation de sa sureté (article 170 AUS).

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b- Les parties contribuant à l’efficacité de la réalisation

Il s’agit des personnes auxquelles le créancier doit nécessairement recourir pour s’assurer d’une réalisation régulière de son nantissement.

Le greffier

Le greffe est l’institution chargée de la tenue du RCCM où doivent être inscrites toutes

les opérations de la vie des commerçants.

Dans le cadre de la réalisation de nantissements, cette inscription permet d’apprécier la validité de la sureté.

A ce titre, il a la responsabilité de délivrer les certificats d’inscription faisant courir le

délai de validité des nantissements ainsi que l’état des inscriptions.

En effet aux termes de l’article 58 de l’AUS, la durée maximale de validité de l’inscription est de 10 ans et l’inscription qui n’a pas été renouvelée avant l’expiration du délai pendant lequel elle produit effet, est alors périmée et radiée d’office par le greffe ou par l’organe compétent dans l’Etat partie.

En matière de nantissement des fonds de commerce, le recours au greffier est d’ailleurs une formalité substantielle puisqu’aux termes de l’article 173 de l’AUS, toute vente amiable ou judiciaire de fonds de commerce ou de l’un de ses éléments ne peut avoir lieu sans production par le vendeur ou l’auxiliaire de justice chargé de la vente,

d’un état des inscriptions prises sur le fonds.

Article 150 AUDCG, 151 et 152

Article 143 AUS (opposabilité aux tiers)

N.B. Inscription définitive

Le bailleur d’immeuble

Le bailleur de l’immeuble dans lequel est exploité le fonds de commerce objet de nantissement peut demander l’expulsion du débiteur pour des défaillances liées au

bail.

En matière de fonds de commerce, le bail est pourtant la plupart du temps un élément dont la perte a une incidence sur son évaluation.

Pour échapper à ce risque de dévaluation, le créancier nanti doit notifier son

nantissement au bailleur.

L’article 172 de l’AUS précise qu’à défaut de cette notification, le créancier nanti ne peut se prévaloir des dispositions de l’article 176 qui prévoit audit bailleur lorsqu’il entend poursuivre la résiliation du bail de notifier sa demande aux créanciers inscrits par acte extrajudiciaire.

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B- LA CREANCE GARANTIE A REALISER

Les suretés tendent à favoriser le crédit et leur pertinence ne peut être appréciée

que si à l’échéance convenue le débiteur n’a pas tenu ses engagements.

La réalisation du nantissement est donc envisagée lorsque le débiteur n’a pas

exécuté son obligation de payer. La défaillance de ce dernier est donc une condition

essentielle pour tous les nantissements.

Cette défaillance doit cependant être confortée par un titre exécutoire dans certaines

hypothèses.

1- La défaillance du débiteur : condition commune

En quoi consiste la défaillance du débiteur et comment la prouver ;

a- Notion de défaillance

La défaillance du débiteur est constatée soit par l’arrivée du terme, soit par la

déchéance du terme

Survenance du terme

Chaque acte de nantissement conventionnel doit préciser comme mention

substantielle l’échéance du paiement qui rend la créance garantie exigible.

A cette date, il est facile de savoir si le débiteur a honoré ou non ses engagements.

Dans le cadre du nantissement judiciaire, le recours aux dispositions de l’AUVE fait

intervenir l’article 28 qui ouvre les mesures conservatoires au créancier « à défaut

d’exécution volontaire», ce qui suppose aussi l’absence ou la survenance du terme

en marge desquels il faut examiner la déchéance du terme.

Déchéance du terme

Il y a déchéance du terme quand le créancier est admis à poursuivre le

recouvrement avant l’arrivée du terme.

Cette hypothèse a généralement pour but de sanctionner une attitude malveillante

du débiteur.

Tel est le cas lorsque le débiteur de la créance garantie déplace le fonds de

commerce sans le notifier aux créanciers ou sans leur indiquer le nouvel

emplacement (article 175-2° AUS) ou quand il vend séparément des éléments du

fonds nanti.

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b- Constat de la défaillance :

La mise en demeure

L’article 134 de l’AUS qui s’applique tant aux nantissements de créance que des

comptes bancaires prévoient que si l’échéance de la créance nantie est antérieure à

l’échéance de la créance garantie, et en cas de défaillance du débiteur, le créancier

nanti affecte les fonds au remboursement de sa créance « huit jours après une mise

en demeure restée sans effet ».

Pour les nantissements des comptes de titres financiers, l’article 152 de l’AUS prescrit

aussi au créancier nanti qui veut réaliser son nantissement une mise en demeure de

8 jours après l’échéance adressée au titulaire du compte à notifier au constituant (s’il

n‘est pas le débiteur) et au teneur de compte.

Bien que les dispositions relatives au nantissement des droits d’associés, des droits

de propriété intellectuelle et du fonds de commerce restent silencieuses sur la mise

en demeure, cet acte nous apparaît indispensable non seulement pour rappeler

l’obligation de payer au débiteur mais également pour établir sa mauvaise foi.

2- Le titre exécutoire : condition spécifique

Les dispositions relatives au nantissement des droits d’associés et valeurs mobilières

(article 144 AUS) au nantissement des droits de propriété intellectuelle (article 161

AUS) et au nantissement du fonds de commerce (article 178 AUS) renvoient pour

leur réalisation au respect des dispositions de l’article 104 de l’AUS sur le gage.

Selon ce texte, seul le créancier muni d’un titre exécutoire peut réaliser sa sûreté.

Il se trouve cependant que dans la constitution des nantissements conventionnels, le

nouvel acte uniforme sur les suretés exige tout simplement que l’acte sous passé par

un écrit. Un acte sous seing privé est donc suffisant.

Les parties qui s’en sont tenues à cette condition devront initier une procédure pour

obtenir un titre exécutoire alors qu’il leur aurait suffit de conclure l’acte par devant

notaire pour en faire l’économie.

En matière de nantissement judiciaire, l’inscription provisoire au RCCM doit être

convertie en inscription définitive résultant d’une action au fond constatant la

créance et la régularité de l’inscription.

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II- LES MODALITES DE LA REALISATION

DES NANTISSEMENTS

La réalisation des nantissements est marquée par la pluralité des modalités offertes

au créancier nanti pour y parvenir.

Les articles 104 et 105 de l’AUS relatifs au gage sont les textes auxquels le

législateur OHADA renvoi pour la réalisation des nantissements des droits d’associés

et valeurs mobilières (article 144 AUS) des droits de propriété intellectuelle (article

161) et du fonds de commerce (article 178).

En matière de nantissement de créance de compte bancaire et de compte de titres

financiers ce sont les articles 134, 154 et 155 qui sont concernés ;

De l’analyse de ces dispositions, il ressort que la réalisation des nantissements peut

procéder soit par l’exécution, soit par l’attribution du bien au créancier ;

A- REALISATION PAR L’EXECUTION FORCEE

La vente forcée préconisée par l’article 104 de l’AUS se fait dans les conditions

prévues par les dispositions organisant les voies d’exécution auxquelles le contrat de

gage ne saurait déroger. Il y a donc lieu de déterminer le type applicable avant d’en

aborder la mise en œuvre et le contentieux ;

1- Choix de l’exécution forcée

Dans l’AUVE, les ventes judiciaires sont distinctement réglementées selon qu’on est

en présence de biens meubles corporels, des droits d’associés et valeurs mobilières

ou des immeubles ;

A quelle procédure renvoie l’article 104 sus visé ?

L’exclusion de la saisie immobilière est acquise d’office dès lors que l’immatriculation

à la conservation foncière est impossible pour les meubles incorporels;

Au regard des articles 142, 158 et 164 de l’AUS qui soumettent les nantissements

judiciaires aux dispositions relatives à la saisie conservatoire des titres sociaux

réglementés par l’AUVE, l’exclusion des conditions de la vente des meubles corporels

doit aussi être actée ;

L’exécution forcée en matière de nantissement est donc régie par les conditions de la

vente des droits d’associés, notamment les articles 88, 89, 90, 240 à 244 de l’AUVE ;

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2- Mise en œuvre de l’exécution

L’exécution forcée s’accomplit par l’adjudication du bien nanti, ce qui suppose remplies des conditions et formalités ;

a- Conditions préalables

L’article 88 de l’AUVE prévoit expressément que la saisie conservatoire des droits d’associés doit être convertie en saisie vente et que dans l’acte de conversion, référence doit être faite à l’application des articles 115 à 119 de l’AUVE, lesquels prescrivent l’absence ou l’échec d’une vente amiable et l’absence ou l’échec d’une contestation du débiteur ;

Conversion du nantissement en vente

L’article 88 de l’AUVE prévoit que le créancier muni d’un titre exécutoire constatant l’existence de sa créance, signifie au débiteur un acte de conversion en saisie vente.

La référence au procès-verbal de saisie conservatoire devrait s’entendre comme renvoyant à l’acte de nantissement qui peut être la convention ou le procès-verbal de l’Huissier dans le nantissement judiciaire.

Cet acte de conversion a pour caractéristique principale de faire courir le délai d’un mois prescrit pour échapper à la vente forcée au moyen d’une vente amiable ;

Il doit selon l’article 89 de l’AUVE être signifié au tiers saisi qu’il faut comprendre en matière de nantissement comme le tiers responsable de l’exécution qui peut être la société émettrice des actions, l’OAPI, le teneur du compte de titres financiers ou le Greffier ;

Absence ou échec de l’offre de vente amiable

L’article 117 (5) de l’AUVE dispose que :

« Il ne peut être procédé à la vente forcée qu’après l’expiration du délai d’un mois prévu par l’article 116 ci-dessus augmenté s’il y a lieu de délai de quinze jours imparti aux créanciers pour donner leur réponse » ;

Quand il entend bénéficier de cette opportunité, le débiteur informe par écrit l’Huissier ou l’agent d’exécution des propositions d’achat qui lui ont été faites en indiquant les noms, prénoms et adresse de l’acquéreur éventuel ainsi que le délai dans lequel ce dernier offre de consigner le prix proposé.

Ces indications sont communiquées au créancier saisissant par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout moyen laissant trace écrite ;

Le créancier dispose d’un délai de 15 jours pour accepter la vente amiable, la refuser ou se porter lui-même acquéreur. En l’absence de réponse, il est réputé avoir accepté la vente amiable ;

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Le prix de vente est alors consigné entre les mains de l’Huissier, de l’agent d’exécution ou au Greffe au choix du créancier saisissant ;

A défaut de consignation du prix dans le délai convenu, il est procédé à la vente forcée ;

Tel est également le cas si aucune offre de vente amiable à l’expiration du délai d’un mois prévu par l’article 116 de l’AUVE augmenté s’il y a lieu du délai de quinze jours impartis au créancier pour donner sa réponse ;

Absence ou rejet de la contestation

L’article 240 de l’AUVE auquel renvoie l’article 90 sur la saisie des droits d’associés dispose que la vente forcée est effectuée à la demande du créancier « sur présentation d’un certificat délivré par le greffe attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le mois suivant la dénonciation de la saisie ou le cas échéant d’une décision judiciaire rejetant la contestation soulevée par le débiteur ;

En réalité, pour adapter cette disposition au nantissement on fera courir le délai d’un mois à compter de la notification de l’acte de conversion du nantissement en saisie vente.

b- Formalités de la vente

La vente forcée est effectuée par adjudication laquelle est précédée de la rédaction d’un cahier de charge qui doit être publié ;

Le cahier des charges soutient outre le rappel de la procédure des informations variant selon le type de nantissement ;

Une copie dudit cahier est notifiée à la société émettrice des droits d’associés ou à l’OAPI ;

Le même jour, sommation est faite aux créanciers opposants d’en prendre connaissance auprès de l’huissier et de formuler auprès de ce dernier leurs observations ;

Le créancier poursuivant doit ensuite par voie de presse et d’affiche publier (si nécessaire) les jour, heure et lieu de vente un mois au plus et 15 jours au moins avant la date fixée de la vente et notifier celle-ci au débiteur, à la société et aux créanciers opposants ;

Advenue ladite date, l’huissier procède à l’adjudication qui se fait au dernier enchérisseur ;

b- Contentieux de l’exécution forcée

Le contentieux de l’exécution en matière de réalisation forcée des nantissements est soumis au droit OHADA dès lors que seules les dispositions de l’AUVE sont applicables selon l’article 104 de l’AUS ;

La juridiction compétente est donc le Président du Tribunal de Première Instance dont les décisions sont exécutoires et contre lesquelles le délai d’appel de 15 jours court à compter de leur prononcé.

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B- REALISATION PAR ATTRIBUTION DU BIEN

La réalisation du nantissement par attribution du bien au créancier est la possibilité

offerte à ce dernier d’obtenir le bien objet du nantissement en paiement de sa

créance ;

Elle peut être légale, conventionnelle ou judiciaire ;

1- Attribution légale

Les dispositions relatives au nantissement de créance, à des comptes bancaires et

des comptes de titres financiers (article 154-1) prescrivent le transfert immédiat de la

créance nantie en faveur du créancier.

En effet dans le nantissement de créance, la survenance de l’échéance provoque

immédiatement le transfert de créance et quand bien même le débiteur de la créance

nantie n’est pas le créancier garanti, il doit procéder au transfert à la seule condition

d’en avoir été notifié ou d’avoir pris part à l’acte de nantissement.

Cette approche est valable pour le nantissement de compte bancaire en vertu de

l’article 136 de l’AUS.

S’agissant du nantissement des comptes de titres financiers, l’article 152 de l’AUS

dispose que :

« Le créancier nanti titulaire d’une créance certaine, liquide et

exigible peut, pour les titres financiers ainsi que pour les sommes en

toute monnaie figurant sur le compte nanti réaliser le nantissement

après mise en demeure du débiteur remise en main propre ou

adressée par courrier recommandé ».

L’article 153 de l’AUS précise que ladite mise en demeure fait mention de ce que le

nantissement pourra être réalisé par le créancier à l’expiration de ce délai. Il n’a donc

pas besoin de justifier d’un titre exécutoire.

Ce mécanisme s’apparente à la compensation légale qui opère de plein droit ;

L’objet nanti est ainsi mis à contribution pour la réalisation du nantissement ;

Le débiteur qui conteste le paiement fait au créancier en vertu de la loi peut

poursuivre le créancier en répétition de l’indu s’il estime que les conditions du

paiement n’étaient pas remplies.

Il peut également engager la responsabilité du teneur de compte.

Ces actions relèvent de la compétence des juridictions de droit commun.

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2- Attribution conventionnelle

Aux termes de l’article 104 (3) de l’AUS :

« Si le bien gagé est une somme d’argent ou un bien dont la valeur fait

l’objet d’une cotation officielle, les parties peuvent convenir que la

propriété du bien gagé sera attribué au créancier gagiste en cas de défaut

de paiement. Il en va de même pour les autres meubles corporels lorsque

le débiteur de la dette garantie est un débiteur professionnel. En ce cas le

bien gagé doit être estimé au jour du transfert par un expert désigné à

l’amiable ou judiciairement, toute clause contraire étant réputée non

écrite » ;

Cette opportunité ressort également de l’article 154 (2) de l’AUS selon lequel pour les

titres financiers admis aux négociations réglementées le nantissement peut intervenir

par attribution en propriété de la quantité déterminée par le créancier nanti, laquelle

est établie sur la base du dernier cours de clôture disponible sur ledit marché ;

Selon les dispositions ci-dessus, l’attribution du bien nanti est immédiate quand la

valeur est connue et dans le cas contraire les parties ont recours à un expert pour

fixer la valeur à prendre en considération ;

Cette attribution conventionnelle de propriété qui s’analyse en un pacte commissoire

est interdite en matière de nantissement de fonds de commerce ;

En effet, l’article 178 de l’AUS ne retient à ce sujet que l’article 104 (1) de l’AUS

comme voie de réalisation alors que c’est l’alinéa 3 qui autorise les pactes

commissoires ;

Aucun contentieux ne devrait être observé tant que la convention de parties est

respectée ;

Dans le cas contraire, les Tribunaux de droit commun seraient compétents ;

3- Attribution judiciaire

L’article 104 (2) de l’AUS dispose que :

« Le créancier peut aussi faire ordonner par la juridiction

compétente que le bien gagé lui sera attribué en paiement jusqu’à

concurrence du solde de sa créance et d’après estimation suivant les

cours ou à dire d’expert » ;

Ce mode de réalisation fait intervenir le Juge et prévoit une évaluation du bien par

un tiers.

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Intervention du Juge

Le texte de l’article 104 de l’AUS est muet quant à la désignation de la juridiction

compétente. S’agit-il du Juge des requêtes, du Juge des référés ou du Juge du

fond ?

Pour permettre le transfert de propriété qui résulte de l’attribution judiciaire, la

décision rendue doit être exécutoire c’est-à-dire non susceptible de recours ;

Le Juge des requêtes et le Juge des référés statuant au provisoire, leurs décisions ne

peuvent sans préjudicier au principal statuer sur la propriété ;

La juridiction compétente pour statuer sur la demande d’attribution judiciaire est

donc la juridiction du fond ;

Evaluation du bien nanti

La volonté du législateur communautaire a été d’interdire implicitement aux parties d’évaluer elles-mêmes le bien quelles que soient leurs compétences ;

Il n’admet que les valeurs établies suivant les cours ou à dires d’expert ;

La juridiction saisie aux fins d’attribution judiciaire doit donc soit prendre acte des cours en vigueur ou désigner par Avant-Dire-Droit un expert dont les dires lui

permettront d’apprécier la valeur à retenir pour l’opération ;

Une fois l’évaluation obtenue, la juridiction compétente devrait prononcer comme en matière de partage des biens de succession ou de liquidation de communauté entre

époux la décision d’attribution ;

Comme toute décision de droit commun elle est susceptible d’appel dans les délais

légaux ;

L’article 105 de l’AUS précise qu’en cas d’attribution judiciaire ou conventionnelle lorsque la valeur du bien excède le montant qui lui est dû, le créancier gagiste doit consigner une somme égale à la différence s’il existe d’autres créanciers bénéficiaires d’un gage sur le même bien, ou à défaut verser cette somme au constituant ;