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la Seduction Du Highlander - Lesmccabe 2 - Eklablogekladata.com/B7l86mGCqXbQuVWscj269BAkXlE.pdf · MAYA BANKS LA SEDUCTION DU HIGHLANDER LES MCCABE 2 Traduit de l’anglais par Daniel

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MAYABANKS

LASEDUCTIONDUHIGHLANDER

LESMCCABE2

Traduitdel’anglaisparDanielGarcia

Dansl’ÉcosseduMoyenÂge,lesmoeurssontparfoisimpitoyables.Rejetéeparlesmembresdesonclan,KeeleyMcDonaldaététrahiepartousceuxqu’elleaimait.Pourtant,soncoeurestpuretnoble.Aussi,quandelleaperçoitunguerrierentrelavieetlamort,ellelerecueille,lesoigne, puis succombe à la tentation.Caresses exquises, étreintes passionnées, le belHighlander l’ensorcèle.Et lui fait courir un immensedanger…

1AlaricMcCabecontemplaitlesvastesterresdesMcCabedansl'espoirdesurmonterl'indécisionquilerongeait.Levantlesyeuxauciel,ilrespiraunegrandegouléed'airglacé.Ilneneigeraitpasaujourd'hui.Maisbientôt.L'automnes'étaitinstallésurlesHighlands.Letempsavaitconsidérablementfraîchietlesjournéesraccourcissaient.Après des années de patients efforts, son frère aîné, Ewan, laird desMcCabe, avait presque réussi àrestaurerleclandanssonanciennegloire.Cethiver,lesMcCaben'auraientpasàsouffrirdelafaim.Etlesenfantsduclanporteraientdesvêtementschauds.Àprésent, lemomentétaitvenupourAlaricdes'acquitterdesapartie.Toutà l'heure, ilsemettraitenroute en direction des terres du clanMcDonald, afin d'y demander officiellement la main de RionnaMcDonald.Ce serait pure formalité. Le mariage était déjà arrangé depuis plusieurs semaines.Mais le laird desMcDonald, qui avançait en âge, voulait qu'Alaric passe un peu de temps au sein de son clan, quideviendraitlesiendèsqu'ilauraitépousélafilledeMcDonald-etsonuniquehéritière.Lespréparatifsduvoyageétaientachevés,et ladouzainedesoldatsdésignéspouraccompagnerAlaricdanssonpériples'étaienttousrassemblésdanslacourintérieuredelaforteresse.Ewanavait voulu lui déléguer sesmeilleurs hommes pour escorterAlaric,mais celui-ci avait refusé.Mairin,lafemmed'Ewan,étaitenceinte.Decefait,leclancouraitungranddanger.TantqueDuncanCameronvivrait,leclanMcCabeneconnaîtraitjamaisunetotalesécurité.CarCameronconvoitaitenmêmetempslafemmed'EwanetlesterresdeNeamhAlainn,quifaisaientpartiedeladotapportéeparMairin - fille duprécédent roi d'Ecosse.Et bien sûr,Cameronnepourrait pas supporterl'idéequeMairinengendreunhéritier.C'était en grande partie à cause de cettemenace queCameron faisait peser non seulement sur le clanMcCabe, mais aussi sur le trône du roi David, qu'Alaric avait consenti à ce mariage avec la filleMcDonald.Leurunioncimenteraitl'allianceentrelesMcCabeetleseulclanquiséparaitleursterresdecellesdeNeamhAlainn.Surlepapier,l'allianceétaitéquitable.RionnaMcDonaldn'étaitpasdésagréableàregarder,malgrésesmanières de garçonmanqué et samanie de vouloir s'habiller comme les hommes. Et par cemariage,Alaricdeviendraitunjourlaird,cequ'ilnepouvaitpasespérerenrestantauprèsd'Ewan.Ilseraitmaîtredesespropresterres,qu'ilpourraitensuitetransmettreàsesenfants.Maisalors,pourquoimanquait-ilautantd'enthousiasmeà laperspectivedemontersursonchevalpourgaloperverssadestinée?Unbruit,sursagauche,lefitsetourner.MairinMcCabe,unchâlesurlesépaules,gravissaitlacollineenpressantlepas,augranddamdeCormac,legardequiluiavaitétéassignépourlajournéeetquidevaitpresquecourirpourlasuivre.Dèsquelajeunefemmeatteignitlesommet,Alaricluitenditsesmainsetelles'yagrippa,larespirationhaletante.—Vousnedevriezpasêtrelà,luireprochaAlaric.Vousallezprendrefroid.—Silelairds'enaperçoit,ilserafurieux,renchéritCormac.Mairinrouladesyeux,avantdedemanderàAlaric:—Avez-voustoutcequ'ilvousfautpourvotrevoyage?Alaricsourit.—Largement.Gertieaprévudesvivrespouruntrajetdeuxfoispluslong.Mairin s'agrippait à lui d'unemain et de l'autre elle frottait son ventre qui s'arrondissait déjà.Alaricl'attiradanssesbraspourlaréchaufferdesoncorps.

—Nepourriez-vouspasdifférervotredépartjusqu'àdemainmatin?lesupplia-t-elle.Ilestdéjàpresquemidi.Restezencoreaujourd'hui.AlaricsavaitqueMairinsechagrinaitdesondépart.Elleaimaitvoirleclantoujoursréuniautourd'elle.—Jeneseraipasabsent longtemps,Mairin, répondit-ilavecdouceur.Pasplusdequelquessemaines.Ensuite,jereviendraiici,avantdememarieretderepartirvivrechezlesMcDonald.Mairin fit lamoue à l'idée qu'Alaric quitterait bientôt le clan demanière définitive, pour devenir unMcDonald.—Cessezdefairelatête,luiditAlaric.C'estmauvaispourlebébé.Etnerestezpasdanslefroid.La jeune femmesoupira, avantde l'enlacer.Alaricéchangeaun regardamuséavecCormac.Mairin semontraittrèsémotionnelle,depuisqu'elleétaitenceinte,etlesmembresduclandevaients'habitueràsesmanifestationsspontanéesd'affection.—Vousmemanquerez,Alaric.EtjesaisquevousmanquerezaussiàEwan,mêmes'iln'enditrien.—Vousmemanquerezégalement,luiréponditAlaricavecsolennité.Etnevousinquiétezpas.JeserairentréàtempspourassisteràlanaissancedunouveaupetitMcCabe!Le visage de la jeune femme s'illumina soudain. Elle recula d'un pas et lui donna une petite tapeaffectueusesurlesjoues.—SoyezbonsavecRionna,Alaric.Jesaisquevouspensez,commeEwan,qu'elleauraitbesoind'êtredisciplinée.Pourmapart,jecroissurtoutqu'elleabesoind'amour.Alarictressaillitdevoirlaconversationprendreuntouraussiintime.Mairins'esclaffa.—N'enparlonsplus,dit-elle.Jevoisquejevousmetsmalàl'aise.Maisn'oubliezpasmesparoles.—Milady,intervintCormac,lelairdvousarepérée,etiln'apasl'aircontent.Alaricreportasonregardsur laforteresse.Ewan,deboutdanslacour, lesbrascroisés,regardaitdansleurdirection.—Venez,Mairin,ditAlaricenluiprenant lamain.Jepréfèrevousrameneràmonfrèreavantqu'ilneviennevouschercher.Mairinmarmonnaquelquechose,maisellelaissaAlaricl'aideràredescendrelacolline.Lorsqu'ilspénétrèrentdans la forteresse,Ewan lançaun regardnoir à sa femme,avantdedemanderàAlaric:—As-tutoutcequ'iltefaut?Alarichochalatête.Caelen,lecadetdesfrèresMcCabe,lesrejoignit.—Tuessûrquetuneveuxpasquejet'accompagne?—Taprésenceseraplusutileici,réponditAlaric.Lespremièresneigestomberontbientôt,maisDuncanpourraitprépareruneattaquequandils'imagineraquenousnousyattendonslemoins.Mairinfrissonna.—Disons-nousadieutoutdesuite,suggéraAlaric.Ensuite,vousrentrerezvousréchauffer.Meshommessontprêts,etjeneveuxpasvousvoirpleurerindéfinimentsurmondépart.Commeils'yattendait,Mairinsejetadenouveauàsoncou,pourl'enlacertrèsfort.—QueDieusoitavecvous,luimurmura-t-elle.Alaricluicaressalescheveuxavecaffection,avantdelapousservers laportedudonjon.Ewanappuyasongested'unautre regardnoir,destinéàdissuader safemmedeprotester.Mairinluilançaunregardeffrontéavantdepasserlaporte.Cormaclasuivitàl'intérieur.—Situasbesoindemoi,fais-le-moisavoir,ditEwanàsonfrère.Jeviendraisur-le-champ.Alaricétreignitlebrasdesonaînéetlesdeuxfrèressedévisagèrentunlongmoment,avantqu'Alaricnelaisseretombersamain.PuisCaelenluidonnaunetapedansledos,tandisqu'ilpartaitverssoncheval.—C'estunebonnechosepourtoi,luiassuraCaelen,quandilfutenselle.

Alaricvouluts'enconvaincreégalement.—Oui,répondit-il.Il prit une profonde inspiration. Il deviendrait laird. Il posséderait ses propres terres.Oui, c'était unebonnechose.Alaric et la douzaine de soldats du clan McCabe qui l'accompagnaient chevauchèrent jusqu'au soir.Commeilsétaientpartistard,letrajetquin'auraitpudurerqu'uneseulejournéeenprendraitmaintenantdeux.Ilsn'atteindraientpaslesterresdesMcDonaldavantlelendemainmatin.Sachantcela,Alaricprenaitsontemps.Lesoleiln'étaitpasencorecomplètementcouchéqu'ilordonnaàseshommesdefairehalteetdemonterlecamppourlanuit.QuandilseurentdévorélanourriturepréparéeparGertie,Alaricséparaseshommesendeuxgroupesdesixetdemandaaupremierdemonterlagardeautourducamp;ledeuxièmeprendraitlerelaisplustarddanslanuit,aprèss'êtrereposé.Bienqu'Alaricsesoitinscritdansledeuxièmegroupe,ilneputtrouverlesommeil.Allongéàmêmelesol, il contemplait le ciel étoile. La nuit était claire, mais froide. Les vents avaient tourné au nord,annonçantunprochainchangementdetemps.Bientôt,ilseraitmarié...ÀRionnaMcDonald.Malgrétoussesefforts,Alaricéprouvaitdeladifficultéàsereprésentersafiancée.Ilserappelaitseulementsescheveuxblonds.Etaussiqu'elleétaitplutôtcalme,cequiconstituaitsansdouteunequalitéchezunefemme.Mairin,elle,n'étaitpasquelqu'undecalme,nidetrèsobéissantetpourtant,Alaricétaitconvaincuqu'Ewanl'aimaitainsi.MaisMairinétait la féminité incarnée,alorsqueRionnas'habillaitenhommeetaffichaitdesmanièresmasculines. Cependant, elle ne manquait pas de séduction, ce qui rendait son attitude d'autant plussurprenante.Illuifaudraitéclaircircemystère...Une légère vibration, dans l'air, l'alerta soudain.Alaric roula sur le côté - pas assez vite, hélas, pouréviterlecoupd’épéequiluientaillaleschairs,auniveaudesonflancdroit.Unedouleuraiguë luivrilla lecorps,mais il l'ignoraet, se saisissantde sonépée, il se redressad'unbond.Seshommess'étaientréveillésetlesilencedelanuitfutsoudainbriséparlebruitdeslamesquis'entrechoquaient.Alaricsebattaitcontredeuxagresseurs.Enreculant, ilbuttacontre lecorpsd'undessoldatssupposésmonterlagarde.Uneflècheétaitfichéedanssapoitrine,preuvequel'embuscadeavaitétésoigneusementourdie.Leurs agresseurs étaient très supérieurs en nombre.Aussi,malgré la vaillance de ses hommes,Alaricn'eutpasd'autrechoixquededéciderdebattreenretraite,pourleuréviterd'êtretousmassacrés.Asixcontreun,ilsn'avaientaucunechancedel'emporter.Ilcriaàseshommesderejoindreleurschevaux.Aussitôtqu'ilsefutdébarrassédesesdeuxassaillants,ilcourut lui-même vers sa propremonture. Sa blessure le faisait souffrir et l'odeur âcre du sang qui enjaillissait luimontait jusqu'aux narines. Sa vision commençait à se brouiller. Il avait conscience qu'ilmourraits'iln'arrivaitpasàremontersursonchevalpours'enfuirauplusvite.Justeaumomentoùilatteignaitenfinsonétalon,unautreassaillantlechargea.Affaiblipartoutlesangqu'ilavaitdéjàperdu,AlariccombattitsansladisciplinequeluiavaitinculquéeEwan.Maisilsebattaitpoursavie.Ilbranditsonépéeàdeuxmainsetl'abattitavecunénormerugissementsurlecoudesonadversaire,qu'ildécapitalittéralement.Alaricneperditpasuninstantàsavourersavictoire.Unautreassaillantapprochaitdéjà.Rassemblantsesdernièresforces,ilmontasursonchevaletlelançaaugalop.

Plusieurscorpsgisaientsurlesol.Alariccompritqu'ilavaitperdulaplusgrandepartiedeseshommes,sinontous,dansl'assaut.—Àlamaison!commanda-t-ilàsoncheval.Ils'agrippaità l'encolurede l'animal,s'efforçantcoûtequecoûtederesterconscient,maissavisionsebrouillaitdeplusenplus.Sadernièrepenséecohérentefutpoursonfrère:ildevaitl'avertirauplusvite.Enespérantqu'uneautreattaquesurprisen'avaitpasétélancéecontrelaforteresse.

2KeeleyMcDonald s'était levée avant l'aube pour ranimer son feu et se préparer à sa journée.Elle setrouvaitàmi-cheminentreletasdeboiset laportedesoncottagequandellefutrattrapée,unefoisdeplus,parl'absurditédesasituation.Lajeunefemmes'immobilisapourcontemplerlavalléequis'étendaitsoussespieds.DelafuméemontaitdudonjondesMcDonaldetdescottagesimplantésautourdelaforteresse,dessinantunpetitpanachedebrumequis'attardaitdansleciel.Quelleironiedusort!Keeleyjouissaitd'unevueimprenablesurl'endroitoùellen'étaitpaslabienvenue.Samaison.Sonclan.Ou,plusexactement,sonanciennemaisonetsonancienclan.Cartousluiavaienttournéledos.Elleétaitdevenueuneparia.Était-celàsonchâtiment?Êtreainsireléguéedanscecottagesituétoutprèsdelaterreoùelleétaitnée,maisoùellenepourraitjamaisretournervivre?Sansdoutedevrait-elleseréjouirdeposséderaumoinsuntoit.Sonsortauraitpuêtrepire.Elleauraitpuêtrechasséedechezellesansdisposerdelamoindreressource.L'épreuve était dure,mais ne l'anéantirait pas.Au contraire,Keeley se sentait très en colère. Elle nepouvait rien changer au passé,mais elle regrettait de ne pas avoir obtenu justice contre ce bâtard deMcDonald.Nicontresafemme,Catriona.CarCatrionaavaitdevinélavérité-Keeleyl'avaitludanssesyeux.Pourtant,lamaîtresseduchâteauavaitpuniKeeleypourlespéchésdesonmari.Aprésent,Catrionaétaitmortedepuisquatreans.MaisRionnan'avaittoujourspasfaitappelerKeeley.Pasplusqu'elleneluiavaitrenduvisite.Pourtant,sapluschèreamied'enfanceconnaissait,elleaussi,lavérité.Keeleysoupira.Elleétaitidiotederesterplantéelà,àruminersonamertume.Demêmequ'elleavaitétéidiotedepenserqu'aprèslamortdelamèredeRionna,elleseraitenfinréintégréedansleclan.Lerenâclementd'unchevallafitseretournerensursaut-etellelâchalesbûchesqu'elletenaitàlamain.L'animal s'approcha d'elle. Il était en nage. Ses yeux effrayés laissaient deviner qu'il avait vécu uneépreuve.MaisKeeleyremarquasurtoutleguerriercourbésurlaselledel'animal,etlesangquicoulaitgoutteàgouttejusqu'ausol.Avantqu'elleaitpuréagir,l'hommebasculaets'effondralourdementparterre.Keeleygrimaça.Sachuteavaitdûluifairetrèsmal.Le cheval rua de côté, abandonnant le guerrier inconscient aux pieds de Keeley. La jeune femmes'agenouillapourchercherlacausedesablessure.Ellerepéraunedéchiruresurlecôtédesatunique,etquandellevoulutenécarterlespans,elleneputreteniruntressaillement.Uneplaiecouraitpresquedesahanchejusqu'àsonaisselle.Heureusement,ellen'étaitpastropprofonde-deuxbonscentimètres,toutdemême-,sinonellen'auraitpasmanquéd'êtremortelle.Ilauraitbesoind'êtrerecousu.Etaussiqu'onpriepourlui,afinqu'ilnesuccombepasàlafièvre.Keeley lui palpa le reste du corps. C'était un solide guerrier, mince mais très musclé. II portait descicatrices - l'unesur leventreet l'autredans ledos -,maisellesétaientanciennes,etbeaucoupmoinsspectaculairesquesaprésenteblessure.Commentallait-ellefairepourletirerjusquedanssamaison?Ilétaitbeaucouptropgrandettroplourdpourqu'ellepuisseleporter.Uneidéeluitraversal'esprit.Ellecourutdanssoncottage,arrachaledrapdesonlitetl'apportadehors.

Aprèsl'avoirétenduparterre,àcôtéduguerrier,elleposadespierressurlescoins,pourl'empêcherdes'envoler.Puiselleessayadefaireroulerlesoldatdessus.Mais c'était commevouloir déplacer un rocher.Keeley serra les dents et poussa de toutes ses forces.Sanssuccès.—Bonsang,réveillez-vousetaidez-moi!s'exclama-t-elle,aucombledelafrustration.Jenepeuxquandmêmepasvouslaisserdanslefroid.Ilrisquedeneiger.Etvotreblessuresaigneencore.Elleluidonnaitdespetitestapesdanslescôtes,maiscommeilneréagissaittoujourspas,elleluiassénaunegifle.Leguerrierfronçalessourcilsetlaissaéchapperungrognementmenaçant.Keeleyfaillitdétalerpourseréfugierdanssoncottage.Maisellenecapitulaitpassifacilement.—Vousêtestêtu,hein?luisouffla-t-elledansl'oreille.Jevaisvousmontrerquejesuisencoreplustêtuequevous,guerrier.Vousferiezmieuxdevousrendretoutdesuiteetdem'aider.—Laissez-moi tranquille, grogna-t-il, sans rouvrir les yeux. Je ne vous aiderai pas àme conduire enenfer.—Poursûr,quevousireztoutdroitenenfer,sivousnevousbougezpas!ÀlagrandesurprisedeKeeley,ilgrommelaencore,maisselaissaroulerendirectiondudrap.—Jemedoutaisbienque l'enferétaitpeuplédefemmes,marmonna-t-il.Aumoins,ellesysontà leurplace.—J'aibienenviedevouslaissergelerici!répliquaKeeley,ulcérée.Quelingrat!Etvotreopinionsurlesfemmesestaussidéplorablequevosmanières.Contre touteattente, leguerriers'esclaffa,avantdegrimacerdedouleurquandKeeley le fit roulerunenouvellefois.Lajeunefemmeenoubliasacolère.Ildevaitsouffrirlemartyre,etellesedisputaitaveclui!Dèsqu'ilfutallongéenbonneposition,ellerassemblalescoinsdudrapàdeuxmainspourlescalersursonépaule.—Donnez-moidelaforce,Seigneur,pria-t-elle.Jen'arriveraipasàletirerjusqu'àlamaisonsansVotreaide.Elle serra les dents et tira aussi fort qu'elle put. En vain. Le guerrier ne s'était pas déplacé d'uncentimètre.—Bon,murmura-t-elle,aprèstout,Dieun'ajamaispromisàpersonneuneforcesurhumaine.Iln'acceptequedesrequêtesplusraisonnables.Keeley regardait autour d'elle, à la recherche d'une solution, quand elle vit le cheval du guerrier, quibroutaitl'herbeàquelquesmètresducottage.Elles'approchadel'animalets'emparadesesrênes.Audébut,ilrefusadebouger,maiselletiraplusfortenimplorantl'animald'obéir.—N'as-tudoncaucuneloyauté?Tonmaîtreestgravementblessé,ettunepensesqu'àteremplirlapanse?Lechevalneparutguèreimpressionnéparsatirade,maisconsentitàrevenirverssonmaître.SiKeeleyparvenaitàattacherlesextrémitésdudrapàlaselledel'animal,alorscelui-cipourraittirerleguerrier jusqu'à l'intérieurdesoncottage.Ellen'étaitpas trèsenthousiasteà l'idéeque l'animalsalissesonintérieur,maisdansl'immédiat,ellenevoyaitpasdemeilleuresolution.Son plan lui réclama plusieurs minutes de préparation. Quand elle se fut assurée que le drap étaitsoigneusement attaché et que le guerrier ne risquait pas de rouler au sol, elle poussa le cheval endirectionducottage.

Et,Dieusoitloué,toutfonctionnaàmerveille!Lechevalfranchitlaporte,tirantderrièreluileguerrierblessé.Keeleyfermaitlamarche.Unefoisàl'intérieur,Keeleyn'avaitpresquepluslaplacedebouger:lechevaletleguerrieroccupaienttoutl'espace.Aussis'empressa-t-ellededétacherledrapetderenvoyerlechevalbrouteràl'extérieur.Maisl'animalavaitdécidéqu'ilseplaisaitbien,auchaud.Keeleyeutbiendelapeineàledéloger.Quand il eut enfin franchi le seuil,Keeley ferma laporte et s'adossaquelques instants aubattantpourreprendresonsouffle.Seseffortsl'avaientexténuée.Maissonguerrieravaitencorebesoind'elle.« Son guerrier » ? Keeley s'esclaffa. Elle devrait plutôt dire « son fardeau ». Elle ne se faisait pasd'illusions:sijamaisilmourait,elleenseraitprobablementtenuepourresponsable.Toutefois,aprèsavoirinspectésesvêtementsdeplusprès,elles'aperçutqu'iln'étaitpasunMcDonald.Keeleyfronçalessourcils,perplexe.Était-il,alors,unennemidesMcDonald?Ellen'étaitplussupposéedevoirlamoindreloyautéàcesderniers,maisdanslamesureoùelleseconsidéraittoujourscommeuneMcDonald, les ennemis du clan étaient ses ennemis. Dans ce cas, risquait-elle de sauver la vie d'unguerrierquiseretourneraitensuitecontreelle?—Calme-toi,Keeley,semorigéna-t-elle.Sonimaginationunpeutropfertileetsatendanceàtoujourstoutdramatiserluijouaientsouventdestours.Les couleurs du plaid du guerrier ne lui évoquaient rien.Mais il faut dire aussi queKeeley ne s'étaitjamaisaventuréeendehorsdesterresdesMcDonald.Commeelleneréussiraitjamaisàl'installersursonlit,elleeutlabonneidéedefairevenirlelitàlui:elleglissaunoreillersoussatêteetlerecouvritd'unecouverture,pourqu'ilsoitbienauchaud.Puisellerajoutadesbûchesdanslefeu.Ensuite, elle inspecta ses réserves.Parchance,elleétaitdescendueauvillagequelques joursplus tôt,pour se réapprovisionner.Depuis sonbannissement,Keeley subvenait seule à ses besoins.Et, grâce àDieu,ellepossédaitdestalentsdeguérisseusequiluipermettaientdegagnerunpeud'argent.CarsilesMcDonaldl'avaientexclueduclan,ilsn'hésitaientpasàfaireappelàelledèsquequelqu'unréclamaitdessoins.Elleavaitainsil'habitudederecoudrelesguerriersblessésàl'entraînement.La forteresseMcDonald possédait bien sûr sa propre guérisseuse, mais elle se faisait vieille et ellen'avait plus la main très habile pour recoudre les chairs. On racontait même qu'elle causait plus dedommagesavecsonaiguillequ'ellen'enréparait.SiKeeley avait possédé plus d'audace, elle aurait tourné le dos auxMcDonald comme ils lui avaienttournéledos.D'unautrecôté,lesquelquespiècesqu'ellerécoltaitainsiluipermettaientdes'achetercequ'ellenepouvaitpasfabriquerelle-même,oudegarnirsatablesilachassenerapportaitrien.La jeune femmemélangeaquelquesherbesdansunmortier etyajoutaunpeud'eau,pour fabriquerunemplâtre.Quandlaconsistanceluiparutbonne,ellelaissalapâtereposeretdéchiradeslanièresdetissudansunvieuxdrapqu'elleréservaitprécisémentàdessituationsd'urgence.Sespréparatifs terminés,ellerevintauprèsduguerrierets'accroupitàcôtédelui.Iln'avaitpasreprisconsciencedepuisqu'ilavaitététirédanslamaison,maisKeeleynesongeaitpasàs'enplaindre.Ellen'avaitaucuneenviequecegéantsemontrecombatif.Ellecommençapartremperunlingepropredansunbold'eau,afindenettoyerlablessure.Elleprocédaméticuleusement, pour ne pas risquer de laisser lamoindre saleté à l'intérieur des chairs, quand ellerecoudraitlesbordsdelaplaie.C'étaitunevilaineblessure,quilaisseraitunegrandecicatricemaisiln'enmourraitpas-sauf,biensûr,s'ilcontractaitunemauvaisefièvre.Unefoislablessurebiennettoyée,Keeleys'emparadesonaiguille,danslaquelleelleavaitpassédufil.

Elle retint son souffle au moment de piquer pour la première fois dans les chairs. Mais le guerrierdormaitsiprofondémentqu'ilneseréveillamêmepas.Keeleyveillaàbientirersurlefil,etàfairedespointsbienserrés.Elletravaillaitàgenoux,penchéesursonlabeur.La tâche fut longue : la blessure devait mesurer dans les vingt-cinq centimètres de long, peut-êtredavantage.Ellenemanqueraitpasdefairesouffrirleguerrierpendantplusieursjours,chaquefoisqu'ilvoudraiteffectuerunmouvement.QuandKeeleyeneutenfinterminéavecl'aiguille,elles'assitparterreetsoupiradesoulagement.Leplusdurétaitfait.Maisellesesentaitépuisée.Ellesortitpours'étireretrespirerunegrandegouléed'airfrais.Puiselledescenditautorrentquicoulaitprèsdesamaison,remplitunbold'eauetlerapportaaucottage.Ellelavaunedeuxièmefoislablessure,avantd'appliquerl'emplâtrequ'elleavaitpréparésurleschairsrecousues.Aprèsquoi,ellebandalablessureavecsoin.Leguerriernes'étaittoujourspasréveillé.Keeleyvérifiaquel'oreillerétaitbienpositionnésoussatête.Attiréeparlabeautédesonvisage,elleneputs'empêcherdelaissercourirsesdoigtslelongdesajoue,jusqu'àsonmenton.C'étaitvraimentunbelhomme.Parfaitementproportionné.Unfieretsolideguerrier,aucorpsaiguiséparlescombats.Lajeunefemmesedemandadequellecouleurpouvaientbienêtresesyeux.Bleus,sansdoute.Avecsescheveuxnoirs,desyeuxbleusseraientfascinants.Maispeut-êtreétaient-ilstoutsimplementmarron?Leguerrierbattitsoudaindescils,commes'ilavaitdécidéderépondreàlaquestionmuettedelajeunefemme.Sonregardflottaitdanslevide,maisKeeleyfutfascinéededécouvrirdeuxprunellesvertpâlequiajoutaientencoreàlabeautédesonvisage.Etencore:lemotmêmedebeautésemblaiticibienfaible.C'étaitunhommeréellementmagnifique.—Unange,murmura-t-ilenfixantKeeleyduregard.Sijevoisunange,c'estquejesuismontéauciel.Keeleyrositdeplaisir,avantdesesouvenirquetoutàl'heure,ill'apparentaitplutôtauxenfers.—Non,guerrier,vousn'êtespasmontéauciel.Vousêtestoujoursdecemonde.—Cen'estpaspossible.Lesangestelsquevousnerésidentpasici-bas.Keeley,souriante,luicaressalajoue.Ilfermalesyeuxetuneexpressiondeplaisiréclairasonvisage.—Dormez,maintenant,murmura-t-elle.Vousaurezbesoindebeaucoupderepospourvousrétablir.—Vousnem'abandonnerezpas,n'est-cepas?—Non,guerrier.Jenevousabandonneraipas.

3Alaricpercevaitunedouleur,àsonflancdroit,quis'intensifiaitàmesurequ'ilreprenaitconscience.Lasouffranceétaitsiatrocequ'ilvoulutsetourner,dansl'espoirdel'atténuer.—Nevousagitezpas,luiditunevoixdoucecommedumiel.Vousallezrouvrirvotreblessure.La voix s'accompagnait de caresses sur sa peau en feu. La brûlure était à peine supportable, mais iln'avaitpasenviequel'angecessedeletoucher,carc'étaitsonuniquesourcederéconfort.Alaricn'auraitpassudirecommentilpouvaitendurerenmêmetempslesflammesdel'enferetjouirdescaressesduplusmerveilleuxdesanges.Peut-êtresetrouvait-ilàlaconfluencedesdeuxunivers,sansquequiconqueluiaitencoreindiquéladirectionqu'ildevraitsuivre.—J'aisoif,murmura-t-ild'unevoixrauque,avantdepassersalanguesurseslèvresdesséchées.—Jeveuxbienvouslaisserboireunpeu,ditl'ange.Maispastrop.Sinon,vousalleztoutrendresurmonplancher.Ellepassaunemainsoussanuquepourluisouleverlatête.Alaricavaithontedesesentirsifaibleaupointden'êtremêmepascapabledeboiretoutseul,maissansl'aidedelajeunefemmeiln'auraitpaspuseredresser.De son autremain, son bon ange approcha un gobelet de ses lèvres.Alaric but avec avidité.Mais lecontrasteentrelafroideurdel'eauetlachaleurdesoncorpsbrûlantluidonnadeviolentsfrissons.— Là, là, murmura l'ange. C'est assez pour maintenant. Je sais que vous souffrez, mais je vais vouspréparerunetisanepouratténuervosdouleurs.Ellevousaideraaussiàmieuxdormir.Alaricn'avaitpasenviededormir.Ilpréféraitdemeurerdanslesbrasdel'ange,latêtetoutprèsdesapoitrine.Unebellepoitrine,bienrebondie,commeauraientdûenpossédertouteslesfemmes.Ilrespiraunegrandegouléed'air,pours'enivrerdesonparfum,etsesdouleursparurent refluer,chasséesparunintensesentimentdepaix.Cettefois,c'étaitsûr:ilprenaitladirectionduparadis.—Comment vous appelez-vous ? demanda-t-il. Toutefois, il n'était pas certain que les anges aient unnom.—Keeley.Jem'appelleKeeley,guerrier.Maistaisez-vous,àprésent.Ilvousfautvousreposer,sivousvoulezrecouvrervosforces.Jenemesuisquandmêmepasdonnétoutcemalpourquevousvouslaissiezmourir.Non, iln'avaitpas l'intentiondemourir. Il avaitdeschosesà faire.Deschosesurgentes,mêmesi sonespritprovisoirementengourdil'empêchaitdeselesrappeleravecprécision.Peut-êtrel'angeavait-ilraison.Mieuxvalaitqu'ilsereposeunmoment.Avecunpeudechance,sesidéesseraientplusclairesàsonréveil.Il inspiraencoreungrandcoup,avantde sedétendre. Il sentitque sonange lui reposait la tête surunoreiller.Ilinspiradenouveau,pourserepaîtredesonparfum.C'étaitcommegoûterauplusdélicieuxdesnectars,etuneagréablesensationdebien-êtreirriguasesveines.Ilrenonçaàlutter.Sonangenelelaisseraitpasmourir.—Non,guerrier,dit-elle,commesielleavaitdevinésespensées.Jenevouslaisseraipasmourir.Etelleluiembrassalatempe.Alaric tournala tête,pour luioffrirses lèvres.Ilavait lacertitudequ'ilmourraitréellement,siellenel'embrassaitpassurlabouche.Ellehésitaquelques instants,qui luiparurentdureruneéternité,puis finitparposer ses lèvres sur lessiennes.Oh,trèsfurtivement.Etavecbeaucoupd'innocence-commeunbaiserd'enfant.

Alaricretintuneprotestation.Iln'étaitpasquestionqu'ilsecontented'unpetitbaiserderiendutout!—Embrassez-moi,l'ange.Embrassez-moivraiment.Alaricl'entenditsoupirer,maisellerestaprèsdelui.Ilsentaitsonsoufflechaudsursonvisage.Puisantdanssavolonté,ilréussitàleverunbraspourluisaisirlanuqueetl'empêcherdebouger.Puis,redressantlatête,ill'embrassaàpleinebouche.Dieu,queses lèvresétaientdouces!Alaricessayadeforcer leurbarrageavecsa langue,pourqu'elles'ouvredavantageàsonbaiser.Finalement,aprèsunautrepetitsoupir,ellesedécidaàluidonnercequ'ilréclamait.Elleentrouvritlabouche,etAlaricputyglissersalangue.Cettefois,ilétaitauparadis.Oualors,sic'étaitçal'enfer,n'importequelÉcossaisauraitétéprêtàs'yjeterlatêtelapremière.Mais, déjà, Alaric perdait le peu de forces qu'il avait pu rassembler. Lourdement, il laissa sa têteretombersurl'oreiller.—Vousaveztortdevouloirvoussurmener,guerrier,leréprimanda-t-elled'unevoixaltérée.—Celaenvalaitlapeine,murmura-t-il.Ilcrutlavoirsourire,maissavisionétaitsiflouequ'iln'auraitpaspulejurer.Puisilsentitqu'elleseredressaitets'éloignaitdulit.Ilétait tropfaiblepourprotester.Quelquesminutesplustard,cependant,ellerevintprèsdelui,pourapprocherunautregobeletdeseslèvres.Cettefois,cen'étaitplusdel'eau,maisuneboissonamère,etlapremièregorgéelefittousser.Maiselleinsista,versantleliquidedanssabouche.Quandelleeutterminédelefaireboire,ellereposasatêtesurl'oreiller.—Etmaintenant,dormezpourdebon,dit-elle.—Restezprèsdemoi,l'ange.J'aimoinsmal,quandvousêteslà.Il sentit qu'elle s'allongeait contre lui - du côté qui ne le faisait pas souffrir. Alaric se détendit. Unsentimentdepaixl'envahitànouveau.Oui,elleétaitsonbonange,descendutoutexprèsducielpourleprotégerdel'enfer.Maisaucasoùelleauraitvouluencores'éloigner,Alaric luienlaçala taille,pour laserrercontre lui.Puisilnichasatêtedanssachevelureetilinspirasonodeur.L'obscurités'emparadelui.Keeley se trouvait dans une situation délicate.Allongée contre son guerrier, dont le bras entourait sataille,teluncercled'acier.Ellen'avaitpasbougé,espérantqu'ilrelâcheraitsapressionunefoisendormi.Maispasdutout.Illaserraittoujoursaussifort.Soncorpsmuscléétaitagitédefrissonstrahissantunefortefièvre.Plusieursfois,ilgrommeladessonsinintelligibles.Danscesmoments-là,Keeleyluicaressaitlefrontetluimurmuraitdesparolesapaisantes.Savoixsemblaitavoiruneffetlénifiantsurlui.Elleseservitdesonbrascommeoreiller,etcalasonvisagecontresontorse.C'étaitpéché,biensûr,des'allongerainsi-auprèsd'unhomme-etd'yprendreduplaisir.MaispersonnenepouvaitlesvoiretDieunesauraitluienporterrigueur,sielleréussissaitàsauverlavieduguerrier.Uncoupd'œilendirectiondelafenêtrelafitgrimacer.Lesoirtombaitdéjàetl'atmosphèrefraîchissaitrapidement.Keeleydevrait se relever,pourcouvrir la fenêtreet ranimer le feu, s'ilsvoulaientprofiterd'unebonnenuitauchaud.Illuifallaitaussiréglerleproblèmeducheval-àsupposerquel'animaln'aitpaseulamauvaiseidéedes'enfuir.Lesguerriersnesupportaientpasqu'onmaltraiteleursmontures.Celui-cineferaitpasexceptionàlarègle:ilpardonneraitplusfacilementàKeeleydel'avoirmalsoignéqued'avoirnégligésoncheval.Leshommesavaientleurspriorités.Avecunsoupirderegret,lajeunefemmeselibéradel'étreinteduguerrier.Cequin'étaitpasfacile,car

mêmedanssonsommeil,ilsemblaitdéterminéàcequ'elleresteauprèsdelui.Il fronça les sourcils et grommela même quelques vagues protestations dans son sommeil. Maisfinalement,Keeleyréussitàselibérer.Elleserelevaets'étiraavantd'allercouvrirlafenêtreavecunvoletdebois.Dehors,lecielétaitplombé.Ilneigeraitsansdoutependantlanuit.Keeleys'emparadesonchâle,leserrasursesépaulesetserisquadehors.Asongrandsoulagement,lechevalétaitrestéprèsdelamaison,commes'ilattendaitsagementsonmaître.Lajeunefemmeluiflattal'encolure.—Jemedoutequetueshabituéàcequ'ons'occupemieuxdetoimaishélas,jen'aipasd'abriàt'offrir.Crois-tuquetupourraspasserlanuitàlabelleétoile?L'animalreniflabruyammentetagitalatêtedehautenbas,soufflantdelavapeurparsesnaseaux.C'étaitunsolidechevaletilavaitsansdoutedéjàconnudesconditionsplusextrêmes.Detoutefaçon,Keeleynepossédaitpasd'écurieetellenepouvaitpasdavantagel'accueillirdanssoncottage.Après une dernière caresse, elle abandonna l'animal pour collecter quelques bûches. Son tas de boiss'amenuisaitdangereusement.Illuifaudraitfendredenouvellesbûchesdèsdemainmatinpourcontinueràsechauffer.Levents'étaitlevé,soulevantlespansdesonchâleetlamordantauvisage.Keeleys'empressaderentrerà l'intérieur, pour déposer son bois près de l'âtre. Puis elle referma sa porte avant d'ajouter quelquesbûchesdanslefeu,qu'elletisonnapourluidonnerplusd'ardeur.Sonestomacgargouillait,luirappelantqu'ellen'avaitrienavalédepuissonpetitdéjeuner.Ellesortitdesongarde-mangerunetranchedepoissonséchéetunmorceaudepainetelles'accroupitsurleplancher,entreleguerrieretlacheminée,pourlesdégusterbienauchaud.Pendantqu'ellemastiquaitmachinalementsonrepas,Keeleyneputs'empêcherd'admirerànouveaulestraits duguerrier. Puis elle laissa dériver ses pensées, s'imaginant qu'elle appartenait à un tel homme.L'idée avait de quoi la séduire.Elle se voyait dîner avec lui tous les soirs, après une journée de durlabeur.Oubien,l'accueilliralorsqu'ilrevenaitd'unebataille-dontilserait,biensûr,sortivictorieux.Ilseraitsiravidelarevoirqu'illaserreraittrèsfortdanssesbrasetl'embrasseraitjusqu'àenperdrelesouffle.Puisilluidiraitqu'elleluiavaitmanquéetqu'ilavaitsouventpenséàelle.Keeleyneputretenirunsourirenostalgique.AvecRionna,ellesavaientsouventrêvé,enfants,aujouroùellesépouseraientleurguerrier.MaiscetespoiravaitétécruellementretiréàKeeleyet,dansledésastrequiavaitsuivi,sonamitiéavecRionna,sichèreàsoncœur,avaitvoléenéclats.Àprésent,Keeleyavaitpeudechancesd'épouserquiquecesoit.AucunMcDonaldnevoudraitd'elle.Orellenes'étaitjamaisaventuréeendehorsdesfrontièresduclan...Cebeauguerrier tombédevantsaporten'était-ilpasunsignedudestin?Peut-êtreincarnait-il l'uniquechance, pour elle, d'avoir un homme dans sa vie ? Certes, il n'était pas impossible qu'il cherchesimplementàprendredubontempspendantsaconvalescence,avantderepartircourir l'aventure.Quoiqu'ilensoit,Keeleynevoulaitpass'interdirederêver.Carsesrêvesl'aidaientàsupporterlaréalité.Elle sourit denouveau.Tout à l'heure, le guerrier l'avait appelée son ange. Il la croyait trèsbelle.Lafièvrel'aveuglait,biensûr.N'empêche:Keeleyétaitémuequ'unsibelhommeaitrassemblétoutessesforces,malgrésablessure,pourl'embrasser.Lajeunefemmepromenaundoigtsurseslèvres,làoùleguerrieravaitposélessiennes.Ellen'avaitpascherchéàlerepousser.Était-celapreuvequ'elleétaitbienlacatinquelesMcDonaldavaientbannie?Pourautant,Keeleyrefusaitd'éprouverlamoindreculpabilité.Detoutefaçon,pluspersonnenecroyaitensamoralité,alorsellenerisquaitpasdechuterdavantagedansl'estimedequiquecesoit.Etpuis,ellen'avaitpaseul'impressiondepécher.

Deuxoutroisbaisersvolésetdesrêvesdejeunefillenepouvaientfairedemalàpersonne.EtKeeleyétait lasse de toujours se répéter qu'elle devait renoncer à l'amour. Elle soignerait le guerrier de sonmieux.Ets'ildécidaitdel'embrasserencoredurantsaconvalescence...Unefoissonrepasterminé,elles'essuyalesmainsàsesjupesetdécidadeserallongerlàoùelleétaitsibien,toutàl'heure.Ellesoulevalebrasduguerrier,poursenichercontrelui.Aussitôt,ilrefermasonbrassursataille.—Monange,murmura-t-il,etKeeleyenéprouvauneondedechaleurdanstoutlecorps.Ellesouritetselovatoutcontrelui.—Oui,dit-elle.Votreangeestrevenu.

4Avec quelle rapidité l'ange pouvait se transformer en démon ! Le lendemain, le guerrier fut toute lajournéeenproieàunefortefièvre,alternantlesmomentsoùilvouaitKeeleyauxgémoniesetceuxoùill'attiraitdanssesbraspourluimurmurerqu'elleétaitl'angeleplusdélicieuxdelaCréation.Épuisée,Keeleynesavaitjamaiss'ilallaitessayerdel'embrasserouaucontraires'illarepousseraitavecviolence.Parchance,sonétatdefaiblessel'empêchaitdes'enprendretroprudementàelle.Keeleys'inquiétaitdesonétat.Sincèrement.Aussinequittait-ellepassonchevet.Elleépongeaitlasueurquicoulaitdesonfrontetelleenprofitait,detempsentemps,pourluiembrasserlessourcils.Ilsemblaitbeaucoupappréciercespetitsbaisers.Unefois,ils'emparadeseslèvresavecunetellefouguequ'elleenrestalesoufflecoupé.Ildevaitavoirungrandappétit pour les chosesde la chair, carquand il ne lamaudissait pas, il passait son temps àessayerdeluivolerdesbaisers.EtKeeley-Dieuluipardonne-necherchaitpasàl'endissuader.Aprèstout,ilétaittrèsmalade:l'excuseétaittoutetrouvéepourqu'elles'autoriseàtolérersesdébordementsd'affection.Dansl'après-midi,ellerecueillitunboldebouillonduragoûtdegibierqu'ellefaisaitcuireau-dessusdufeu.Cematin,elleavait eu lebonheurde trouverdevant saporteunedemi-carcassed'animal sauvagedéposéeparl'undesbénéficiairesdesessoins.Aveccetteviande,elleauraitdequoisenourrirpendantplusieursjours.Lebolàlamain,elles'agenouillaauprèsduguerrier,pourluifaireboirelebouillon.Heureusement, il n'était pas d'humeur belliqueuse. Keeley était redevenue son bon ange. Et il but lebouilloncommes'ils'agissaitd'unnectaroffertparDieuenpersonne.Sansdoutelecroyait-il,danssonespritenfiévré.Keeley faillit lâcher le bol quand quelqu'un frappa soudain à la porte. Prise de panique, elle cherchafrénétiquementdesyeuxunendroitoùcacherleguerrier.Hélas,c'étaitimpossible.Elleposalebolparterreetserelevapourallerentrouvrirsaporte.Lesoleildisparaissaitdéjàderrièrelacrêtedesmontagnesetlevents'engouffraavecviolencedansl'interstice.Keeleysoupiradesoulagementenreconnaissantunefermièredesenvirons.Puisellesesouvintque lechevalduguerrierpaissaitàcôtédelamaison.Lajeunefemmesortitsurlepasdesaporteetregardadedroiteetdegauche,maisellenevitpastracedel'animal. Où diable était-il passé ? Le guerrier serait furieux d'apprendre qu'il avait disparu. Et siquelqu'unl'avaitvolé?—Jesuisdésoléedetedérangerparcetempsglacial,Keeley,commençaJaneMcNab.Keeleyreportasonattentionsursavisiteuseets'obligeaàsourire.—Tunemedérangespasdutout,répondit-elle.Maistuferaismieuxdegardertesdistances.Jecroisquejecouvequelquechose,etjenevoudraispastecontaminer.JaneMcNabs'empressadereculerd'unpas.Aumoins,ellenes'étonneraitplusqueKeeleynel'invitepasàrentrerchezelle.—JevoulaistedemandersitupouvaismedonnerunpeudetonremèdepourAngus,dit-elle.Iltoussebeaucoup.Enfait,iltousseainsichaquefoisqu'ilyaunchangementdetemps.—Maisbiensûr,acquiesçaKeeley.J'enaijustementpréparéavant-hier.Attendsici,jevaist'enchercherunpeu.Elle rentrachezelleet fouilladans lesétagèresoùelleentreposait sesdifférentespotions,mixtureset

autres décoctions.Celle qu'utilisaitAngus était très recherchée, car elle servait à d'autres patients quisouffraientdelamêmeaffection.Ouvrantlegrandpotdanslaquelleellelaconservait,Keeleyenprélevauneportionsuffisantepourunesemaineetl'offritàJane,quitremblaitdanslefroid.—Merci,Keeley.Jeprieraipourquetusoisréintégréedansleclan.Elle glissa une pièce dans la main de la jeune femme et tourna les talons avant que celle-ci ait purépondrequoiquecesoit.Keeleyhaussalesépaules,refermasaporteetdéposalapiècedanslapetitebourseoùellerassemblaitsamaigrefortune.Avecl'hiverquiapprochait,elleauraitbesoindetoutcetargentpours'acheterdequoisenourrir,quandleslégumesdupotagerviendraientàmanquer.Leguerrierdormaittoujours,maisilnes'agitaitplusdanssonsommeiletilavaitcessédeproférerdesparolesincohérentes.Keeleysoupiradesoulagement.Ellen'avaitpaseuàmentirpourconvaincreJanequ'ellenesesentaitpastrèsbien.Elleétaitexténuéeetelleauraitdonnén'importequoipourunebonnenuitdesommeil.Elle s'agenouilla auprès du guerrier et posa unemain sur son front. Sa peau était toujours brûlante autoucher.Maislafièvreluidonnaitdesfrissons,commes'ilétaittransi.La jeune femme coula un regard en direction du feu. Elle devrait ressortir encore une fois pours'approvisionnerenboisavantlanuit.Autant le faire tout de suite, avant que le froid ne devienne encore plusmordant.Keeley resserra sonchâlesursapoitrineets'armadecouragepouraffronterlabise.Àsonretour,sonchâle,malmenéparlevent,avaitpratiquementglissédesesépaules.Lajeunefemmedéposasesbûchesàcôtédel'âtreets'affairaàranimerlefeu.Elleavaitfaim,maiselleétaittropfatiguéepourmanger.Ellen'avaitqu'uneenvie:s'allongeretfermerlesyeux.Cependant,siellevoulaitdormir,elledevaitd'abords'assurerqueleguerriernetroubleraitpassonsommeil.Ellepréparadoncunedécoctionsoporifiqueàsonintention.—Buvez,dit-elled'unevoixpersuasive,approchant leboldeses lèvres.Vouspasserezunemeilleurenuit.Vousavezbesoindedormirenpaix.Etmoiaussi.Ilbutdocilementlapotion,negrimaçantqu'aprèsladernièregorgée.Soulagée,Keeleyluireposaavecdouceur la tête sur l'oreiller, puis elle le recouvrit d'une fourrure pour qu'il ait bien chaud, avant des'allongercontrelui.Cen'étaitpastrèsconvenable,àl'évidence.Siquelqu'unlesavaitsurprisainsi,ilauraitétéscandaliséetKeeleyauraitdenouveauété traitéedecatin.Maispersonnen'était làpour ladécrier-detoutefaçon,ellenepermettraitpasqu'onlajugesoussonpropretoit.Puisqu'elleavaitrenoncéàsonlitpourleguerrier,aumoinspouvait-elleprofiterdesachaleur.La potion commençait à faire effet. Et peut-être aussi sa présence, songea Keeley, car le guerrierfrissonnaitmoins.Aunmoment,illaissamêmeéchapperunpetitsoupirdecontentement,avantd'enlacerlajeunefemmeàlataillepourlaserrercontrelui.Keeleybrûlaitd'enviede lui rendre lapareille,maisellen'osait,depeurde touchersablessureetderaviversesdouleurs.Aussisecontenta-t-elledeposerunemainsursontorse.—Vousêtes trèsséduisant,guerrier,murmura-t-elle.J'ignored'oùvousvenez,etsivos intentionssontpacifiques,maisunechoseestsûre:jen'avaisencorejamaisvuunaussibelhommedemavie.Elles'endormitpeuaprès,sansvoirqueleguerriersouriaitdansl'obscurité.

5Unmauvais pressentiment réveilla Keeley quelques instants avant qu'elle ne rouvre les yeux. Et elleauraitcriéd'effroisiunegrossemainnes'étaitpasplaquéesursabouchepourlafairetaire.Plusieurshommeslesentouraient,elleetleguerrierblessé.Àenjugerparleursmines,ilsn'avaientpasdutoutl'aircontents.Dans sonaffolement, c'est àpeine siKeeley remarquaquedeuxdes intrus avaientpresque lesmêmestraitsquesonguerrier.Detoutefaçon,ellen'eutpasletempsdes'attardersurlesujet,carunhommearméd'uneépéesigrandequ'elleauraitpufacilementlatrancherlamitdeboutsursespieds.La jeune femmevoulut lui demander cequ'ils faisaient tous là,mais l'homme lui jetaun regardqui ladissuadad'ouvrirlabouche.Enrevanche,ilsemblaitavoirluiaussidesquestionsàluiposer.—Quiêtes-vous,etqueluiavez-vousfait?demanda-t-il,désignantleguerrierblessé,toujoursétenduausol.Keeleyneputretenirsonindignation.—Cequejeluiaifait?Jeluiaitoutsimplementsauvélavie!L'hommeplissalesyeuxetluiserrasifortlebrasqu'ellefaillithurlerdedouleur.—Lâche-la,Caelen,ditceluiquisemblaitêtrelechef.Caelenlarelâcha,maispourl'envoyerboulercontreletorsed'unautreguerrier,quilasaisitluiaussiaubras-avecàpeinemoinsderudesse-pourl'empêcherdes'éloigner.Lechefs'agenouillaauprèsduguerrierblessé. Ilsemblait inquietet ilpromenasamainsursoncorps,commes'ilcherchaitàcomprendrelacausedesonétat.—Alaric!cria-t-il,assezfortpourréveillerunmort.Alaric?C'étaitunjolinom,pourunguerrier.MaisAlaric ne cillamêmepas.L'homme se tourna alors versKeeley et ses yeux - dumêmevert que ceuxd'Alaric-s'assombrirentdangereusement.—Queluiest-ilarrivé?Pourquoineseréveille-t-ilpas?Keeleyregardaleguerrierquilaretenaitprisonnière,avantdebaisserlesyeuxàl'endroitoùilluitenaitlebras.Leguerrierfinitparcomprendreetlarelâcha.Lajeunefemmes'agenouillaàsontourauprèsd'Alaric.—Ilalafièvre,expliqua-t-elle.—Jem'enétaisrenducompte,répliqual'homme.Maispourquoiest-ilmalade?Keeley repoussa la fourrure qui recouvrait Alaric et écarta les pans de sa tunique pour montrer lablessurequ'elleavaitrecousue.Lesautresguerrierss'approchèrentpourmieuxvoir.—J'ignorecequiluiestarrivé,expliquaencoreKeeley.Sonchevall'aamenéicietils'esteffondréàterre, juste devantma porte. Il avait une vilaine plaie, sur le côté. Je l'ai recousue demonmieux etdepuis,jem'occupedeluietjelegardeauchaud.—Ellel'abienrecousu,grommelaCaelen,demauvaisegrâce.Keeleyseretintderépliquer,maisellemouraitd'enviedeluidonnerunboncoupdepiedauderrière.Elleavaitencoremalaubras,làoùCaelenl'avaitserré.—Oui,elleafaitdubontravail,acquiesçalechef.Maistoutçanenousditpaspourquoiilestarrivéicidanscetétat.IlscrutaitKeeleyduregard,commes'ilcherchaitàsavoirs'ilpouvaitounonluifaireconfiance.

—Sijelesavais,jevousledirais,assuraKeeley.Àmonavis,ilesttombédansuneembuscade,parcequ'ilal'airtoutàfaitcapabledesedéfendretoutseuldansuncombatàlaloyale.UnelueurbrillafurtivementdanslesyeuxduchefetKeeleyauraitjuréqu'ilesquissaitunsourire.—JesuislelairdMcCabe,dit-il.Alaricestmonfrère.Keeleybaissalesyeuxensigned'allégeance.Iln'étaitpassonlaird,maisunhommedesonrangexigeaitdetoutefaçonlerespect.—Quiêtes-vous?luidemanda-t-ild'untonimpatient.—Keeley...justeKeeley.Aprèstout,lesMcDonaldnelarevendiquaientpluscommel'unedesleurs.—Ehbien,justeKeeley,ilsembleraitquemonfrèrevousdoivelavie.Keeleysesentitrougir.Ellen'étaitpashabituéeàdetelscompliments.LairdMcCabesetournaversseshommes,pourdistribuersesordresafinqu'Alaricpuisseêtreramenéchezeux.Keeleysedoutaitbienqu'ilsétaientvenuslechercher,maiselleneputs'empêcherd'éprouverdelatristesseàl'idéequ'Alaricnedormiraitplussoussontoit.—Son imbéciledecheval s'est enfui,précisa-t-elle,pournepasqu'on lui reprocheden'avoirpas sus'occuperdel'animal.J'aipourtantfaitcequej'aipupourleretenir.UneautreamorcedesourireéclairafurtivementlevisagedulairdMcCabe.—C'estcetimbéciledechevalquinousaprévenusqu'Alaricavaiteudesproblèmes,répliqua-t-il,nonsansironie.Keeleylesécoutaorganiserleurdépartd'uneoreilledistraite.Sidistraitequ'ellefaillitnepasserendrecompte qu'ils mentionnaient son nom dans leur discussion. Oui, c'était bien cela : ils venaient unedeuxièmefoisdefaireréférenceàelle.LajeunefemmesetournaversCaelen-probablementletroisièmefrèreMcCabe,carilressemblaitàs'yméprendreàAlaric.Àceciprèsquecedernierétaitplusagréableàregarder.Caelenavaitl'airsiférocequelesfemmesdevaientfuirsaprésence.—Jen'iraipasavecvous,protesta-t-elle,bienqu'ellenefûtpascertained'avoirbienentendu.Pourtouteréponse,Caelenlasaisitàlatailleetlafitbasculersursonépaule,telunvulgairesacdeblé.Etilsortitdelamaison.Keeleyétaitsistupéfaitequ'elleenrestad'abordsansréaction.Maisvoyantqu'il l'amenait jusqu'àsoncheval,ellecommençaàsedébattre.Caelenlareposaparterre.—Vousavezlechoix,exposa-t-il:Soitvousmelaissezgentimentvousasseoirsurmoncheval,soitjevousligoteetjevousbâillonnepourvousjeterentraversdemaselle.—Pourquoivoulez-vousm'enlever?Jen'airienfaitdemalàvotrefrère!Aucontraire,jeluiaisauvélavie.Oùestvotregratitude?—Nousavonsbesoind'unebonneguérisseusepournotreclan,expliquaCaelenaveccalme.Vousavezfaitdel'excellenttravailavecmonfrère.Désormais,voussoignerezlesMcCabe.—Jenepartiraipasavecvous,s'entêtaKeeley,affichantunairfarouche.Etellecroisalesbrassursapoitrine,pourdonnerplusdepoidsàsesparoles.—Trèsbien...Caelenlasoulevadenouveaudeterre,pourlaconfieràunautreguerrier,déjàenselle.—Vousvoilàcontente?luilançaCaelen.VousvoyagerezavecGannon.GannoninstallaKeeleydevantlui,maisilnesemblaitpasravid'avoiràsechargerd'untelfardeau.Lajeunefemmen'étaitpasdavantagesatisfaiteetelleentendaitlefairesavoiràCaelen.—Jevousdéteste!Vousn'êtesqu'ungrossierpersonnage.Ilhaussalesépaules,commes'ilsemoquaitéperdumentdecequ'ellepouvaitpenserdelui.Puisiltourna

lestalons,afind'inspecterlalitièreconfectionnéeparlesautresguerrierspourtransporterAlaric.—Prenezgardeànepasrouvrirsablessure!leurcriaKeeley.Ellevoulutdescendredechevalpourlesrejoindre,maisGannonl'enlaçafermementàlataille,pourl'enempêcher.—Àvotreplace,jemetiendraistranquille.—Jerefusedepartird'ici!protestaKeeley.Gannonhaussalesépaules.—Puisque le lairdadécidédevousemmener,vous feriezmieuxde l'accepterdebonnegrâce.Aprèstout,leclanMcCaben'estpassimauvais.Etnotreguérisseuseestmorteilyaquelquessemaines.Nouscherchionsjustementsaremplaçante.Keeley songea à lui répondre qu'on ne pouvait pas disposer des gens comme cela,mais elle préféras'abstenir,convaincuequ'ilresteraitsourdàsesarguments.Gannonsemblasedétendre,commes'ilétaitsoulagéqu'ellenechercheplusàsedébattre.Un clan.Keeley se voyait proposer d'intégrer un clan.Mais avec quel statut ? Serait-elle considéréecomme un membre à part entière, ou comme une vulgaire prisonnière privée de toute liberté demouvements?Etneserait-ellecorrectementtraitéequejusqu'àlaguérisoncomplèted'Alaric?Maiss'ilneguérissaitpas,lesMcCabelatiendraient-ilspourresponsable?Keeleyneputréprimerunfrissonàcetteidée.Maisnon.EllenelaisseraitpasmourirAlaric.Dureste,ellel'avaitdécidédèsl'instantoùelleavaitposépourlapremièrefoissonregardsurlebeauguerrierblessé.Gannondutlasentirfrissonner,carillançaàsescompagnons:—Trouvezquelquechosepourcouvrirlafille,sinonelleserageléeavantquenousarrivionscheznous.L'undesguerriersapportaunecouverturequeGannondrapasoigneusementsurlesépaulesdeKeeley,quienresserralesbordsets'adossaautorseduguerrier,bienqu'ilfûtsonravisseuretelle,sacaptive.Pasvraiment,en réalité. Iln'étaitpasson ravisseur,car ilnesemblaitpasdavantagese féliciterde lasituationqu'elle.Sielledevaits'enprendreàquelqu'un,c'étaitplutôtàCaelen.Etaulaird.Ellejetaunregardnoirdansleurdirection,pourqu'ilssachentbienqu'elleétaitfurieuseaprèseux.Maisilsneparurentmêmepass'enapercevoir,occupésàsuperviserl'installationd'Alaricsurlalitière.Quandtousfurentprêtsàpartir,lelairdpritlaparole.—Soyezvigilants,ordonna-t-ilàseshommes.Nous ignoronscequiestarrivéàAlaric,mais ilest leseulàenavoirréchappé.Toussescompagnonsontpéri.Nousdevonsdoncrentrercheznousleplusvitepossible.Keeleyfrissonnaàcesparoles.Ainsi,ellenes'étaitpastrompée:onavaitbeletbienvoulutuersonbeauguerrier.—Nevousinquiétezpas,luimurmuraGannon,seméprenantsursaréaction.Nousvousprotégerons.Ilnevousarriveraaucunmal.Bizarrement, elle le crut. S'il pouvait sembler ridicule d'accorder sa confiance à ces hommes quil'enlevaientdechezelle,Keeleyétaitconvaincuequ'elleseraitensécurité tantqu'elle resteraiten leurcompagnie.Aussi,àpeinesemirent-ilsenroutequ'ellecommençaàsedétendre.Sesdeuxdernièresnuitsblanches,passéesàveillersurAlaric,l'avaientépuisée.Enoutre,elleavaitfroidetfaim.Maispourl'instant,ellen'avaitaucunmoyend'yremédier.Alors,ellefitlaseulechosequiétaitàsaportée:elles'endormit.

6—Tuauraisaumoinsputrouverunefemmeplusaccommodante!marmonnaCaelen.Ewan sourit avant de jeter un regard aux deux cavaliers qui portaient la litière d'Alaric entre leurschevaux.Alaricnes'étaittoujourspasréveillé,maisdetouteévidencelajeunefemmeàl'espritvifs'étaittrèsbienoccupéedelui.Cequiladésignaitàmerveillepourcequ'ilavaitentête.—Elleparaîtdouéepourguérirlesgens,répondit-ilévasivement,afinqueCaelenneselancepasdansunediatribecontrelagentféminine,commeilenavaitsisouventl'habitude.Tandisqu'ilparlait,sonregards'étaitportésurGannon,quichevauchaitentenantlajeunefemmecontrelui.Elles'étaitendormieetelleballotaitentresesbras.—Ilsembleraitqu'ellenesesoitpasbeaucoupreposéependantqu'elleveillaitsurAlaric,ajoutaEwan.Nousavonsbesoindequelqu'uncommeelle,quiseconsacretoutentièreàsatâche.Avecl'accouchementde Mairin qui approche, je serai soulagé de savoir que nous pouvons compter sur une sage-femmecompétente.JeneveuxprendreaucunrisqueniavecMairinniaveclebébé.Caelenhochalatête.Ilnepouvaitqu'acquiescer.Soudain,Gannonralentitsoncheval,carlajeunefemmemenaçaitdetomberdeselle.Heureusement,ilréussitàlarattraper.Ellerouvritlesyeuxenseredressant.Leregardnoirqu'elleluilançadonnaàEwanl'envied'éclaterderire.Ellenemanquaitpasd'insolence!Etleplusamusant,c'estqu'ellenesemblaitpasdutoutseréjouirdel'honneurqu'illuifaisait.Pourêtrefranc,ilavaitdumalàcomprendrequ'ellepréfèrecontinueràvivremisérablement,dansuncottageisolé,alorsqu'illuioffraitunetrèsbellepositiondansleclanMcCabe.—Êtes-vousdéjàintervenueentantquesage-femme?luidemanda-t-il.Ellefronçalessourcils,interloquée.—Oui,celaadûm'arriveruneoudeuxfois,répondit-elle,surladéfensive.—Etêtes-vousdouéepourlesaccouchements?—Aucundesbébésque j'ai aidésàvenir aumonden'enestmort, si c'est cequevousvoulez savoir,répliqua-t-elled'untonsec.EwanrapprochasonchevaldeceluideGannonetvrillasonregarddansceluidelajeunefemme.—Écoutez-moibien,jeuneharpie:deuxpersonnestrèsimportantesàmesyeuxontbesoindevossoins.Monfrère,quiestgravementblessé,etmafemme,quiaccoucherapourlapremièrefoisdurantl'hiver.Jecompte sur votre compétence, et pas sur votre insolence.Une fois que vous serez surmes terres,maparoleaura forcede loietvousm'obéirez.Ousinon,vouspasserez l'hiverdehors,sans toitpourvousabriter!Keeleypinçaleslèvres,maisellehochalégèrementlatête.—Vousferiezmieuxdenepasmettrelelairdencolère,luimurmuraGannon.Lagrossessedesafemmel'arendutrèsnerveux.Vouscomprenez,c'estl'avenirduclanMcCabequiendépend.Keeley se reprocha son irrévérence. En revanche, elle n'éprouvait aucune culpabilité vis-à-vis desMcCabe.Ilsl'avaienttoutdemêmeenlevéedechezellesansluidemandersonavis!Silelairdluiavaitpatiemmentexpliquésonproblème,elleauraitsansdoutevolontiersacceptédelesuivre.MaisKeeleyétaitlassededevoirtoujourssubirsadestinée,sansjamaisavoirlechoix.—Entout,j'aiaidéànaîtreplusd'unevingtained'enfants,ettousenbonnesanté,précisa-t-elle.Jen'enaiperduaucun.Jeveilleraisurvotrefemmeetjenelaisseraipasmourirvotrefrère.J'aifaitdesasurvieuneaffairepersonnelle,etcroyez-moi,jen'aipasl'intentionderenoncer.

—Eh bien, pour une entêtée, c'est une entêtée ! marmonna Caelen. Je parierais qu'elle va très biens'entendreavecMairin.Keeleyhaussalessourcils.—Mairin?'—Lafemmedulaird,expliquaGannon.Keeley scruta le laird, car elle était convaincuequ'il avait dit vrai. Sa femmeet son frère comptaientbeaucouppourlui.Ellepouvaitd'ailleursvoir,àsestraits,qu'ilétaitsoucieux.Lecœurromantiquedelajeunefemmenepouvaitqu'enêtrebouleversé.Aprèstout,c'était trèsattentionnédesapartdekidnapperuneguérisseusepours'assurerquesafemmeauraitquelqu'undecompétentàsescôtéslorsqu'elleaccoucherait!Keeleygrimaça.Elle s'égarait.Le lairdMcCabe l'avait kidnappée,unpoint c'est tout. Il ne s'était passouciéuninstantdesesdésirs.—Quelleimbéciletufais!marmonna-t-elle.—Pardon?fitGannon,quisemblaitoffusqué.—Pasvous. Jemeparlais àmoi-même, réponditKeeley, avantdedemander, àhautevoix :Àquelledistancesetrouvevotreforteresse,laird?Lelairdreportasonattentionsurelle.—Àmoinsd'unejournéedecheval.MaiscommenousdevonsporterAlaric,letrajetprendradavantagedetemps.Nousn'arriveronsquedemain.Pourcesoir,nousessaieronsquandmêmedebivouaquerleplusprèspossibledesterresMcCabe.—Quandj'auraiguérivotrefrèreetdélivrél'enfantdeladyMcCabe,serai-jelibrederentrerchezmoi?Lelairdplissalesyeux.Caelensemblaitmourird'enviedecrier«Oui!»àsaplace.—J'yréfléchirai,réponditfinalementlelaird.Maisjenevousprometsrien.Notreclanabesoind'unebonneguérisseuse.Keeleyn'étaitqu'àmoitiésatisfaite.Toutefois,c'étaittoujoursmieuxqu'unrefusclairetnet.Commelafatiguelasaisissaitdenouveau,elles'adossadenouveauàGannon,sanssesoucierdesavoirsic'étaitconvenableounon.Detoutefaçon,elleavaitétéenlevéecontresongré,etpersonnenesongeraitàluireprochersaconduite.Elledécidades'intéresseraupaysage.Aprèstout,c'étaitlapremièrefoisqu'elles'éloignaitautantdulieuoùelleétaitnéeetoùelleavait toujoursvécu.Maisladifférencen'étaitguèreperceptible:àpertedevue,ellen'apercevaitquelesmêmescollinesrugueuses,hérisséesderochersetdebosquetsdeconifères,alternantavecdesvalléesplusverdoyantes.Avec,entoiledefond,lessommetsdesHighlands.C'étaitmagnifique,biensûr.Maistrèssemblableàcequ'elleconnaissait.Quandilsatteignirentlebordd'unruisseauquireliaitdeuxpetitslacs,lelairdMcCabeordonnadefairehalteetdemandaàseshommesdepréparerleurcampementpourlanuit.Chacun s'attela alors à une tâche précise, comme si lamanœuvre était savamment huilée. Bientôt, ungrandfeucrépitadansl'airetdesgardesfurentpostésàtouslescoinsducampement.Dèsqu'ondéposaAlaricnonloindufeu,Keeleys'empressadelerejoindrepourl'examiner.Elles'inquiétaitqu'iln'aitpasreprisuneseulefoisconnaissancedurantleurtrajet.Ellesepenchasursapoitrine,pourécoutersarespiration.Elleétait laborieuse.Sonfrontétait toujoursbrûlantautoucheretseslèvresdesséchées.Keeleysetournaverssesfrères,devinantqu'ilslaregardaient.—Apportez-moidel'eau.Etj'aibesoinquel'undevousm'aideàlefaireboire.Caelens'occupad'allerchercherl'eau,pendantqu'Ewans'agenouillaitdel'autrecôtéd'Alaricetpassaitunemainsous lecoudesonfrère. Il lui leva la têtedèsqueCaelenapportaungobelet remplid'eauà

Keeley.Lajeunefemmeportalegobeletauxlèvresd'Alaric,maisquandellevoulutverserl'eaudanssabouche,illarecrachaimmédiatement.—Montrez-vousunpeucoopératif,guerrier,legronda-t-elle.Sivousbuvez,nousdormironstousmieuxcesoir.Jecommenceàmelasserdepasserdesnuitsblanchesàcausedevous.—Diable,marmonnaAlaric,sansrouvrirlesyeux.Diable...Ewanhaussalessourcils.—Appelez-moicommebonvoussemble,répliquaKeeley.Jem'enmoque,dumomentquevousbuvez!—Qu'avez-vousfaitàmonange?marmonnaencoreAlaric.Keeleyprofitadecequ'ilavaitouvertlabouchepourleforcerencoreàboire.Iltoussaunpeu,maiscettefois,presquetoutel'eaudescenditdanssagorge.—Ah,voilàquiestmieux.Encoreunpeu.Vousverrezqueçavousferadubien.Alaricvidadocilementpresquetoutlegobelet.QuandKeeleys'estimasatisfaite,ellefitsigneàEwandeluireposerlatête.Puiselletrempaunmorceaudetissudanscequirestaitd'eaupourluiépongerlefrontetlessourcils.—Reposez-vous,maintenant,guerrier.—Monange,murmura-t-il,vousêtesrevenue.Jem'inquiétaisquelediablenevousaitjetéunsort.Keeleysoupira.—Jesuisbiencontented'êtreredevenueunange.—Restezprèsdemoi.KeeleyvitCaelenfroncer lessourcils.MaisEwansemblaitaucontraires'amuserdelasituation.Quoiqu'il ensoit, l'unet l'autrenedésiraientqu'unechose :que leur frère recouvre rapidement la santé.Etpourcela,ildevaitrestercalme,afindebiensereposer.S'ilfallaitqueKeeleydormeàcôtédelui,pourl'apaiser,ellen'hésiteraitpasuneseconde.Ewanavaitsansdoutecomprissonraisonnement,carildit:—Jevaisvouschercherdescouvertures,pourquevousayezchaudtouslesdeux.J'appréciequevousrestiezprèsdeluipourleveiller.À ces paroles, Keeley comprit que le laird n'était pas un mauvais homme. Concernant Caelen, elleréservaitencoresonjugement.Lelaird,enrevanche,cherchaitàlamettreàl'aise.Aprèstout,ilétaittrèsinconvenantqu'elledormeauprèsd'unguerrier,maisellelefaisaitpardevoir.Les autres guerriers ne paraissaient pas avoir prêté l'oreille à leur conversation, et encore moins sesoucierde savoiroùKeeleydormirait.Eux-mêmesne songeaientqu'à remplir leurpropredevoir : ilscommençaientàserassemblerencercleautourd'Alaricafindeleprotégerdurantsonsommeil.Deuxhommesapportèrentdescouvertures,dontunequ'ilsroulèrentsurelle-même.—Pourvotretête,expliquaunguerrier.Laterrevousparaîtramoinsdure.—Commentvousappelez-vous?demandaKeeley,touchéeparsasollicitude.Illuisourit.—Cormac.—Merci,Cormac.Keeley arrangea les couvertures et s'installa près d'Alaric, en veillant toutefois à garder une distanceentreeux.Unefoissatêteposéesurlacouverturequiluiservaitd'oreiller,ellesetrouvatrèsàsonaise.Malgrésasiestedurantlachevauchée,lajeunefemmesemitàbâillersitôtallongée.Ellerestaunlongmomentàveillerdansl'obscurité,enécoutantlarespirationd'Alaric.Quandlefeucommençaàmourir,des gardes le nourrirent pour la nuit.MaisKeeley, cette fois, n'était plus capable de garder les yeuxouverts.

Elle s'endormit en songeant qu'elle s'apprêtait à tourner une page de sa vie.Demain, elle ouvrirait unnouveauchapitre,maiselleignoraitencoredequoiilseraitfait.

7QuandKeeleyrouvritlesyeux,ellenevitqu'untorsed'homme.Etsentitunbrasd'acierluiencerclerlataille. Elle poussa un soupir d'exaspération.C'était bien la peine d'avoir voulu garder ses distances !Pendant la nuit, AlaricMcCabe l'avait attirée tout contre lui, si bien quemaintenant plus rien ne lesséparait.Résignée, Keeley dégagea un bras pour lui palper le front. Elle fronça les sourcils, inquiète. Il étaittoujoursbrûlant.Beaucouptropbrûlantàsongoût.Tournantlatête,ellevitquelespremièreslueursdel'aubeteintaientlecield'uneauragrisâtre.Autourd'elle,lecampements'éveillaitpeuàpeu.Desguerrierspréparaientdéjàleschevaux,tandisqued'autrescommençaientàrangerleurmatériel.KeeleyfitdiscrètementsigneaulairdMcCabedelarejoindre.—Nousdevonsnousdépêcher,luidit-elle.Ilabesoind'unechambrebienchaude.Ilneguérirapastantqu'ilresteradanscetairfroidethumide.Safièvren'esttoujourspasretombée.—Nouspartonsdansquelquesminutes.EtlesterresMcCabenesontplustrèsloin.Nousatteindronslaforteresseendébutd'après-midiauplustard.Dès qu'il eut tourné les talons,Keeley, plus détendue, se lova contreAlaric.C'était quandmême trèsagréabled'êtredanssesbras.Elleluicaressaletorse.—Ilfautvousressaisir,guerrier.Vosfrèresm'envoudrontterriblementsivousneguérissezpas.J'aidéjàeuassezd'ennuiscommecelaparlepassé.J'aimeraisbienunpeudetranquillité,désormais.—Madame,ilesttempsd'yaller.KeeleylevalesyeuxversCormacquiladominaitdetoutesahauteur.Ilsemblaits'impatienter,commesielleavaitl'intentionderesterallongéetoutelajournée!Elleluidésignalebrasd'Alaric,quiluientouraittoujourslataille.Cormacladégageadoucement,avantd'installerAlaricsurlalitièreavecl'aidedeCaelen.Keeleyeutàpeineletempsdeseleverqu'ellesetrouvasoulevéedeterreparGannon,quilajuchadevantlui,sursaselle.Elleprotesta.—J'aimeraisquevouscessieztousdemeconsidérercommeunevulgairemarchandise!Jesuistoutàfaitcapabledemontertouteseulesuruncheval.Gannonsouritd'unairamusé.—Oui,maiscetteméthodeestplusrapide.Maintenant,nebougezplus,ettoutsepasserabien.Levents'étaitlevéetKeeleysentaitlaneigearriver.Lecielétaitgris,chargédelourdsnuagesmenaçantsquisemblaientprêtsàsevideràtoutinstant.Voyantqu'elle frissonnait,Gannon,d'une seulemain,maintint fermement la couverture sur sesépaules,tandisqu'ilmanœuvraitlesrênesdel'autremain.Keeley,reconnaissante,s'appuyacontresontorse,pourabsorbersachaleur.Après une bonne heure de chevauchée, McCabe donna l'ordre à Cormac de partir en avant, afin deprévenirlaforteressedeleurarrivée.Aussitôt,lesguerrierspoussèrentdescrisdejoie.IlsvenaientdepénétrersurlesterresdesMcCabe.—Assure-toiquemafemmenemettepaslenezdehorsparuntempspareil!lançalelairdàCormac.Cormac soupira lourdement. Les autres guerriers lui jetèrent des regards apitoyés, tandis qu'il prenait

déjàdeladistance.Gannons'esclaffa.Keeley,intriguée,tournalatête,pourl'interrogerduregard.—NotrelairdachargéCormacd'unemissionimpossible.Etillesaittrèsbien.—LadyMcCabeneseplie-t-ellepasauxdésirsdesonmari?Plusieursguerrierséclatèrentderire.MêmeCaelenparuts'amuserdecetteinnocentequestion.Gannonpritunairsolennel.— Il serait déloyal de ma part de vous répondre, dit-il. Keeley haussa les épaules. Elle savait,d'expérience, que les femmes enceintes avaient souvent tendance à semontrer plus obstinées. Et ellecomprenaitquel'épousedulairdn'aitpasenviedepassertoutsontempsenferméedansuneforteresse.Danssonétat,ilyavaitdequoidevenirfolle.Entoutdébutd'après-midi,ilsatteignirentlesommetd'unecollineetKeeleydécouvritunevalléeaufondde laquelle miroitaient les eaux noires d'un loch. Il était surplombé d'une forteresse bâtie sur unepresqu'île.Labâtisse semblait avoir connudesheuresplusglorieuses.Certainsmurs étaient enpiteuxétat,d'autresétaientenréfection.LajeunefemmeendéduisitqueleclanMcCabetraversaitunepériodedélicate.Keeleyn'étaitelle-mêmepasriche,maisellen'avaitjamaiseufaimetelleavaittoujoursréussiàsubveniràsesbesoins.Lelairdsetournaverselle,commes'ilavaitsuivilecoursdesespensées.—VousnemanquerezderienchezlesMcCabe,assura-t-il.Tantquevousvousacquitterezdelatâchequenousvousavonsconfiée,vousaureztoujoursuntoitpourvousabriteretdelanourrituredansvotreassiette.Keeleyfaillitricaner.Al'entendre,onauraitjuréqu'ilavaitfaitappelàsesservicesentoutelégalité,aulieudel'enlevercommeunsoudard.—Travaillerez-vouspendantl'hiver?demanda-t-elle,alorsqu'ilsdescendaientlacollineendirectiondupetitpontdepierrequienjambaitunbrasdulochetmenaitàlapresqu'île.Ilneréponditpas.Sonattentionétaitfocaliséedroitdevantlui,commes'ilcherchaitquelquechosedesyeux-ouquelqu'un.Alors qu'ils approchaient du pont, quelques soldats s'étaient déjà rassemblés dans la cour de laforteresse.Desfemmesetdesenfantssurgirentàleurtour.Toussemblaientinquiets.Dèsquelapetitetroupefranchitlagrillequidonnaitsurlacour,Ewanfronçalessourcils.Keeleysuivitsonregard:unefemme,visiblementenceinte,jouaitdescoudespourarriveraupremierrang.Unhommelasuivaitdeprès,l'expressionhagarde.—Ewan!s'écrialajeunefemme.Qu'est-ilarrivéàAlaric?Ewanmitpiedàterretandisquelafemmeseprécipitaitverslalitière.—Mairin,tuétaiscenséeresteràl'intérieur.Ilfaitfroid,dehors!Mairinsetournaversluietfronçalessourcils,dumêmeairfarouchequesonmari.—Rentrez-letoutdesuite!Ilal'airenpiteuxétat.—J'aiamenéquelqu'unquis'occuperadelui,expliquaEwan,d'unevoixradoucie.Mairinscrutalesgardesquidescendaientdechevalunàun,avantdedécouvrirKeeley.Elleécarquillaalorslesyeuxdesurprise.—Crois-tuqu'ellesoitqualifiéepoursoignerlesblessuresd'Alaric?Àcesmots,Keeleyseraidit.Devinantqu'ellevoulaitse libérer,Gannonl'aidaàdescendredecheval.Dèsquesespiedseurenttouchélesol,lajeunefemmeallaseplanterdevantMairinpourlaisseréclatersonindignation.—Sachezquejesuistrèsrecherchéepourmesqualitésdeguérisseuse.J'ajoutequejenesouhaitaispasveniraveclelairdMcCabe.Maisjen'aipaseulechoix!Enfin,laquestionn'estpasdesavoirsijesuis

qualifiée,maissij'aienvieounondesoignerAlaric.Mairinclignadesyeuxetenrestaun instantbouchebée.Puiselledemandaàsonmari,dont le regardlançaitdeséclairsmeurtriers:—C'estvrai,Ewan?Tuasenlevécettefemme?L'airplusmenaçantquejamais,Ewans'avançaversKeeley,quicampasolidementsesdeuxpiedssurlesol.Pasquestiondeluimontrerqu'elleavaitpeurdelui!—Adressez-vousàladyMcCabeavecrespect,dit-il.Etchoisissez:soitvousacceptezvotresort,soitvousmourrez.Maissijamaisvousvousmontrezdenouveauinsolenteenversmafemme,jevousprometsquevousleregretterez.Jen'aipasdetempsàperdreenfutilités.Monfrèresebatpoursasurvie.Etvotredevoirestdel'aideràs'ensortir.Est-cebienclair?Keeleysemorditlalanguepourretenirunerépliquebiensentie.Ellesecontentadehocherlatête.Mairinlesregardaittouràtour,sonmarietelle.Ellesemblaittrèsembarrassée.—Ewan, tu n'aurais pas dû kidnapper cette femme. Pense à sa famille ! Il existait sûrement un autremoyen.D'un geste autoritaire, Ewan posa lamain sur l'épaule de son épouse -mais la douceur de son gesten'échappapasàKeeley.Déjà,sestraitsavaientperdudeleursévérité.Ilaimaitsincèrementsafemme!Keeleyauraitvoulusoupirer.—Pendant que nous nous disputons,Alaric reste exposé au froid, dit Ewan.Dépêche-toi de lui fairepréparersachambre,pourquemeshommespuissentleporterjusqu'àsonlit.D'autrepart,Keeleyaurabesoind'ingrédients.Assure-toi que les servantes lui fourniront tout cequ'elle réclamera. Il lui faudraaussi un endroit pour dormir. Donne-lui la chambre contiguë à celle d'Alaric, de façon qu'elle soittoujoursprèsdelui.Savoixdissimulaitmaluneexaspérationimpossibleàvoirsursonvisage.Mairin jeta undernier regard àKeeley, et celle-ci aurait juréque c'était un regardd'excuse.Puis elletournalestalonsetpénétradansledonjon,appelantunecertaineMaddie.Dèsquesafemmeeutdisparu,EwanreportasonattentionsurKeeley.—Désormais,vousm'obéirezsansposerdequestions.EtvousfereztoutcequiestenvotrepouvoirpoursoignerAlaricetensuiteaidermafemmeàaccoucher,quandsontermeseravenu.Keeleyhochalatête.QuandEwanluitournaledospourordonneràseshommesdeporterAlaricàl'intérieurdelaforteresse,ellerestaquelquesinstantsimmobile,sanstropsavoirquoifaire.Mais Gannon lui donna un petit coup de coude dans les côtes et lui fit signe de suivre les porteursd'Alaric.Lui-mêmeluiemboîtalepas,tandisqu'ilsgravissaienttousunétroitescalier.PuisGannonluidemandad'attendredanslecouloir,letempsquelesgardesinstallentAlaricsursonlit.Aprèsquoi,illapoussaàl'intérieurdelachambre.Mairin etuneautre femme,d'âgemûr, se tenaientdevant le feuqui crépitaitdans l'âtre.Lapièceétaitencoreglaciale,carlefeuvenaitjusted'êtreallumé.Ewansetrouvaitauchevetdesonfrère.IlfitsigneàKeeleydelerejoindre.—Demandez tout ce dont vous avez besoin àMaddie. Ensuite, vous examinerez sa plaie pour vousassurerqu'ellenes'estpasrouverte.Keeleyseretintencoredeluirépliquerqu'elleconnaissaitsondevoir,sansqu'ilsoitbesoindel'abreuversanscessed'ordres.Unefoisdeplus,ellesecontentad'acquiescerd'unsignedetête.Puiselles'approchad'Alaric,tandisquelelairdquittaitdéjàlapièce.Lefrontdublesséétaitmoinsbrûlant.Maisc'étaitpeut-êtresimplementparcequ'ilétaitrestédesheuresenpleinair,exposéaufroid.

—Va-t-ilguérir?demandaMairin,quisemblaitbeaucoups'inquiéteràsonsujet.—Oui,réponditKeeley.Detoutefaçon,jen'aipaslechoix.Maddiehaussalessourcils.—Vousêtesbienjeune,pourvousmontreraussiarrogante,mapetite,dit-elle.— Arrogante ? répéta Keeley, stupéfaite. Je ne me suis jamais considérée comme arrogante. Surtoutlorsqu'une vie est en danger et qu'elle dépend demoi. Dans ces cas-là, je me sens au contraire trèshumble.J'ai toujourspeurdenepasmemontreràlahauteur.Enrevanche,j'aiducaractère.Cequin'arienàvoiravecl'arrogance.Etjevousdénieledroitdemejugersansmeconnaître!Mairinsouritetvintluiprendrelamainpourl'étreindre.—Arroganceoucaractèrebientrempé,peum'importe,madame.Cequejesais,c'estquejelisdansvotreregardunedéterminationquimedonneàpenserquevousnelaisserezpasmourirAlaric.Etjevousenremercied'avance.SivousremettezAlaricsurpied,sachezquevousaureztoutemagratitude.Keeleysentitsoncœurseréchauffer.—Jevousenprie,appelez-moiKeeley.—Enretour,appelez-moiMairin.Keeleysecoualatête.—Ohnon,milady!Votremarin'aimeraitpascela.Mairins'esclaffa.—Ewanaboiesouvent,maisilmordtrèsrarement.Ets'ilestparfoisbourru,jevousassurequec'estunbravehomme.KeeleyhaussaunsourciltandisqueMairinrosissait.—Cequ'il vousa fait est répréhensible, reprit-elle,mais il n'apasdû réaliser toute laportéede songeste.SoninquiétudepourAlaricl'aveuglait.—Jecroisquesoninquiétudeàvotresujetentraitaussienlignedecompte,précisaKeeley.—Pourmoi?KeeleyabaissasonregardsurleventrerebondideMairin.—Ilveutquejevousaideàaccoucher.—Oh,monDieu!murmuraMairin.C'estdelafolie!Ilnepeutquandmêmepasenleverdesgensparcequ'ilapeurpourmoi!Ilestentraindeperdrelaraison.Keeleysourit.— Il agit simplement en bon mari qui s'inquiète pour sa femme. Et maintenant que j'ai fait votreconnaissance, je n'éprouve plus aucune répugnance à l'idée de rester ici jusqu'à la naissance de votrebébé.—Vous avezbon cœur,Keeley, intervintMaddie.Et vous tombez à pic.Lorna, notre guérisseuse, estmorteilyaquelquessemaines,etnousn'avionspasencoretrouvéàlaremplacer.Lelairdsaitrecoudrelesplaies,maisiln'yconnaîtrienenherbesmédicinales.Etiln'ajamaisassistéàunaccouchement.Keeleyétaitstupéfaite.—Lelairdsechargeaitlui-mêmederecoudrelesplaies?—Oui,réponditMairinavecfierté.Ilm'arecousue,quandj'aireçuuneflèche.Etilafaitdel'excellenttravail.—Dites-nouscedontvousavezbesoin,repritMaddie.Jeveilleraiàcequetoutvoussoitapportéleplusrapidementpossible.Keeleysetournaversleguerrierendormipourréfléchirquelquesinstants.Illuifaudraitdesherbesetdesracines,maisellepréféraitlesrécolterelle-même.Ellen'avaitpasconfiancedanslesautrespoursavoirreconnaîtrelesplantesdontelleseservait.Aussisecontenta-t-ellededemanderàMaddiedel'eau,desbandagesetdubouillon,pourqu'Alaricaitdequoisesustenter.Ilétaitimportantqu'ilneperdepassesforces.Unhommeaffaiblineluttaitpasaussi

efficacementcontrelamaladiequ'unguerrierdisposantdetoutesavigueur.PuiselledemandaàMaddiedeveillerAlaricensonabsence.Mairinfronçalessourcils.—Oùcomptez-vousaller?— Je vais sortir chercher les herbes et les racines qui me seront nécessaires. Si je n'y vais pasmaintenant,pendantqu'ilfaitencorebienclair,jedevrairemettremacueilletteàdemain,etilserapeut-êtretroptard.—Ewan n'aimera pas ça,murmuraMairin. Il interdit que nous nous aventurions loin desmurs de laforteresse.—S'ilveutquesonfrèresurvive,ilfaudrabienqu'ilfermelesyeux.Maddiegrimaçaunsourire.—J'ail'impressionquenotrelairdatrouvéàquiparler,dit-elle.—N'empêche, repritMairin. Il serait préférable que vous partiez avec une escorte. J'adorerais vousaccompagner-Dieusaitsiunebonnepromenademeferaitleplusgrandbien-,malheureusementEwannevoudrajamaisenentendreparler.—Vousn'avezmêmepasledroitdemarcherunpeuautourdelaforteresse?demandaKeeley,incrédule.Mairinsoupira.—Cen'estpasparsévéritédesapart,croyez-lebien.Monmariadebonnesraisonsdes'inquiéter.Nousavons des ennemis et tant que je n'aurai pas donné naissance à mon enfant, je constituerai une cibleprivilégiée.CommeKeeleylaregardaitsanscomprendre,Mairinsoupiraencore.—C'estunelonguehistoire.Jevouslaraconteraipeut-êtrecesoir,pendantquenousveilleronsAlaric.—Oh,non!milady.Votredevoirnevousobligepasàleveiller.Nevousinquiétezpas,jem'occuperaibiendelui.Unefemmedansvotreétatabesoindebeaucoupderepos.—Jevoustiendraiquandmêmecompagnieunpetitmoment.Celam'aideraàpasserletemps.Sinon,jesensquejen'arriveraipasàtrouverlesommeil.JemefaistropdesoucipourAlaric.Keeleyluisourit.—Trèsbien.Danscecas,jeserairaviedevousavoirauprèsdemoi.Maintenant,sivouslepermettez,jevaismedépêcherdesortiravantlatombéedusoir.—Maddie, suis les instructionsdeKeeley,ordonnaMairinà saservante. JevaisdescendreavecelledanslacouretdemanderàGannonetCormacdel'escorterpoursacueillette.Detoutefaçon,Ewannelalaisserajamaissortirseule.Maddies'esclaffa.—Vousconnaissezlelairdmieuxquepersonne,milady,lança-t-elleavantdes'éclipser.Keeleypalpaunedernièrefoislefrontd'Alaric,avantdesuivreMairinhorsdelachambre.Commeelle s'y attendait, le lairdneprotestapas longtemps.Dèsqu'il compritqu'elle avaitbesoinderécolterelle-mêmesesherbespoursoignerAlaric,ilordonnaàtroisdeseshommesdel'escorter.Aucundestrois,cependant,neparutseréjouird'unetellemission.—Ilsdétestentavoiràs'occuperdesfemmes,murmuraMairinàKeeley.Jeleurgâchelavie,carilssontàtourderôleassignésàmasurveillance.Keeleysourit.—J'aibeaucoupentenduparlerdevous,pendantmonvoyagejusqu'ici.Mairingrimaça.—C'estdéloyaldeleurpartdeparlerdemoidansmondos.— Ils se sont surtout exprimés par allusions, corrigeaKeeley. EtGannon a refusé de répondre à une

questiondemapart.Enarguantjustementdufaitqueceserait«déloyal».Mairin éclata de rire, ce qui provoqua quelques froncements de sourcils chez les gardes. Gannons'approchadeKeeleyd'unairrésigné.—Venez,madame.Dépêchons-nousd'allerdanslaforêtpourrentreravantlanuit.—Cen'estpaslapeinedevouscomportercommesivousétiezcondamnéàmort!raillaKeeley.Mairinsourit.—Jevousattendraidanslachambred'Alaric,Keeley.Etpendantvotreabsence,jem'assureraiquevosinstructionssontsuiviesàlalettre.Keeleyhocha la tête,avantde rejoindre les troisguerriersdésignéspoursaprotection.Toutà l'heure,elleétaitfurieuseàl'idéedenepaspouvoirs'aventurerseulehorsdelaforteresse.Maisàprésent,elleéprouvaitunecertainesatisfactiondesesavoirassezimportantepournécessiteruneescortedeguerrierschevronnés.Aussi,c'esten toutesécuritéqu'elle retraversa lepontdepierre,pourprendre ladirectiond'unmassifforestiersurlescollinesentourantleloch.Finalement, son séjour au sein du clanMcCabe ne serait sans doute pas aussi pénible qu'elle l'avaitimaginé. La femme du laird était plus aimable qu'elle ne l'avait craint. Et malgré les circonstancesparticulières de son arrivée à la forteresse, Keeley n'avait pas à se plaindre d'être maltraitée. Aucontraire.Avecunpeudechance,iln'étaitmêmeplusexcluqu'elleseplaiseici.Detoutefaçon,ellen'avaitpasàsepréoccuperderentrerrapidementchezelle:personnenel'attendait,là-bas.Sonclanl'avaitbannie.Keeley secoua la tête. Son imagination lui jouait encore des tours, et ellemettait la charrue avant lesbœufs.Lelairdnel'avaitpasenlevéepourluifaireplaisir.Etiln'avaitaucunementl'intentionqu'ellesesente ici chez elle, ni qu'elle devienneunmembre à part entièrede son clan. Il voulait recourir à sestalentsdeguérisseuse,riendeplus.Keeleyferaitbiendenepasl'oublier.Quandsaprésenceneseraitplusjugéeutile,elleseraitsansdouterenvoyée.L'expérience aurait dû lui servir. Si elle n'avait pas pu compter sur la loyauté de son propre clan,commentpourrait-ellefaireconfianceàdesétrangers?Mieuxvalaitdoncnepassefaired'illusions.Elleétaitprisonnière.Unpointc'esttout.

8Quand Keeley regagna la forteresse, le soleil avait déjà été avalé par l'horizon. Le froid la gelaitjusqu'auxos,sesdoigtsétaientgourdsetelleétaitépuiséed'avoirmarchédans la forêt, ledospliéendeuxpourrepérerlesplantesquil'intéressaient.Maissarécolteavaitdépassésesespérances.LesterresdesMcCabeétaient richesenherbeset racinesde toutessortes,etelle rentrait les jupespleinesd'unebellemoisson.Ellefaillittrébucherdansl'escalieretCormacdutluitenirlebraspourl'aideràrecouvrersonéquilibre.Keeleymarmonnaunremerciementetcontinuasonascension,impatientedeseretrouverauchaud.—Lasoirées'annonceglaciale,ditGannon.Jeneseraispasétonnéqu'ilneigecettenuit.—Çafaitdeuxjoursqu'oncroitqu'ilvaneiger,etiln'esttoujourspastombéunflocon,objectaCormac.—Gannonaraison,acquiesçaKeeley.Ilneigeracettenuit.—Heureusement,nosgrenierssontpleins,repritGannon.Mêmesil'hiverdoitêtrelong,cetteannéenousnemanqueronspasdevivres.Keeleyseretournaverslui.—Ques'est-ilpassé,ici?Laforteresseestentravauxetvousévoquezunepériodededisette.Gannongrimaça.—Ma langue est allée trop vite. Je n'aurais pas dû en parler à haute voix.Mon laird serait furieuxd'apprendrequej'aiditcela.Keeleyhaussalesépaules.—Cen'estpascommesivousm'aviezrévélévossecretsdebatailles!J'ailedroitdesavoiroùjemetrouve,toutdemême!—Cen'estplustrèsimportant,intervintCormac,quisetenaitjustederrièreGannon.Toutvabien,depuisquelelairdaépouséladyMcCabe.C'estunebénédictionpournotreclandepouvoircomptersurelle.Keeleyperçutunenotedesincèreaffectiondanssavoix.MairinMcCabeavaitbiendelachance:ellen'étaitpasseulementaiméedesonmari,maisduclantoutentier.—Pourquoivousattardez-vousdans l'escalier,pendantquemonfrèreabesoind'aide?aboyaCaelen,depuislehautdesmarches.Keeleylevalesyeuxdanssadirection.—Êtes-vousdoncobligédevousmontrertoujoursaussirevêche?J'aipassédeuxheuresàrécolterdesplantesmédicinalespourvotrefrère.Jesuisfatiguée.J'aifaim.Jen'aipasconnuuneseulevraienuitdesommeildepuistroisjours.Pourtant,celanem'empêchepasdememontrerpluspoliequevous.Caelen cligna des yeux avant de s'esclaffer. Puis il fit mine de lui répondre quelque chose, avant desagementseraviser.Ilnel'intimidaitpasdutout,etellen'étaitguèredisposéeàsupportersesmanièresgrossières.Épuisée,ellenesupporteraitpasqu'oncritiquesesmoindresfaitsetgestes.Parvenueenhautdel'escalier,ellepoussaCaelendecôté,avecunregardnoir.Puisellepénétradanslachambred'Alaricetrefermalaportederrièreelle.—Keeley,vousvoilàrevenue!s'exclamaMairin.Elle baignait le front d'Alaric avec l'aide deMaddie. Le feu crépitait dans l'âtre etKeeley se plantadevantpourseréchauffer.— Laissez-moi vous débarrasser, proposa Maddie en la rejoignant. Et dites-moi s'il vous faut autrechose.Keeleybaissalesyeuxsursarécolteamasséedanssesjupes.

—Oui,vouspouveztoutprendre.Jeferai le triquandmesdoigtsserontdégelés.J'auraisaussibesoind'unoudeuxbols,ainsiqued'unmortieretd'unpilon.—Vousavezentendu?lançaMaddieàGannon,quisetenaitsurleseuil.Allezluicherchercequ'elleréclame!Gannonne semblait pas apprécierde recevoirdesordresd'une femme. Il tourna cependant les talons,pours'exécuter,nonsansavoirmanifestésonmécontentementparunegrimace.— Keeley, demandaMairin, croyez-vous vraiment que vous pourrez veiller Alaric cette nuit ? Vousparaissezépuisée.Etvoustremblezdefroid.Keeleys'obligeaàluisourire.—Jevaisvitemeréchauffer.Maisj'aimeraisbienmangerquelquechose.—Biensûr,acquiesçaMaddie.JevaisvoircequeGertiepeutvousdonner.ÀpeineMaddieavait-ellequittélachambrequeGannonrevenaitdéjàaveclematérieldemandé.Keeleydisposasesherbesdanslesbolsavantderetournerréchauffersesmainsdevantlefeu.—Vousaurezbesoindevêtementspropres, sivous restez ici,grommelaGannon.Jevaisenavertir lelaird.—Oui,vousavezraison!s'exclamaMairin,duremordsdanslavoix.J'auraisdûypensermoi-même.Puisquemonmarivousaenlevée,j'imaginequevousn'avezpaseuletempsdepréparerquoiquecesoitavantdepartir.J'enparleraiauxautresfemmes.Anoustoutes,noustrouveronsbienunesolution.Keeleydansaitd'unpiedsurl'autredevantlacheminée.—C'esttrèsaimableàvousdeux.J'appréciegrandementvotresollicitude.—Désirez-vousautrechose?demandaGannon.Keeleysecoualatête.—Non,merci.J'aitoutcequ'ilmefaut.Gannonacquiesça,avantdetournerlestalonsetdequitterlapièce.Keeleyn'étaitpasfâchéequelachambresesoitvidéedelaplupartdesesoccupants.Elles'assitsuruntabouret,auchevetd'Alaric,tandisqueMairinlaregardait,àdistance,examinerleblessé.Laplaieétaitrougeetenflée.Keeleyfronçalessourcilsetretintunjuron.Puisellefermalesyeux.—Qu'ya-t-il?s'inquiétaMairin.Sonétataurait-ilempiré?Keeleyrouvritlesyeux,pourcontemplerdenouveaulaplaieenflammée.Ellesoupira.— Je vais être obligée de rouvrir sa blessure, pour la nettoyer du pus qu'elle contient. Ensuite, jerecoudraiunenouvellefois.Ceneserapasunetâchefacile,maiselleestindispensable.—Voulez-vousquejerestepourvousaider?KeeleycontemplaleventrerebondideladyMcCabe,avantdesecouerlatête.—Non. Je ne voudrais pas qu'Alaric vous fasse dumal, si jamais il se réveille et qu'il essaie de sedébattre.Jepréféreraislaprésenced'undesesfrères,pourletenirsolidementencasdebesoin.Mairinfronçalessourcils.—S'il se débat, il faudra plus d'un hommepour lemaîtriser. Je vais demander àEwan etCaelen demonter.Keeleyfitlagrimace,cequiamusaMairin.—Caelen est unbravegarçon.Vousverrez, quandvous serezhabituée à sesmanièresunpeu rustres,voustrouverezqu'iln'estpassiterriblequecela.—Sivousledites,marmonnaKeeley,visiblementpeuconvaincue.Mairinsouritdeplusbelle.—Jevousaimedéjàbeaucoup,Keeley.Maisaufait,quelestvotrenomdefamille?Keeley se figea et n'osa plus croiser le regard deMairin. Sentant que celle-ci la scrutait, elle croisanerveusementlesmains.

—McDonald,finit-elleparmurmurer.Enfin,j'étaisuneMcDonald,maisjenelesuisplus.Désormais,jem'appellejusteKeeley.—McDonald?répétaMairin.Oh,monDieu!JemedemandesiEwansaitqu'ilaenlevélaguérisseuseduclandontAlaricestdestinéàdevenirlelaird!Keeleyrelevalesyeux.—Laird?MaislesMcDonaldontunlaird.Elleétaitbienplacéepourlesavoir.Cebâtardétaitlepremierresponsabledesonbannissement.S'illuiétaitarrivéquelquechose,Keeleyl'auraitforcémentappris.Àmoins,biensûr,qu'ellenesoitcondamnéeàvivrepourl'éternitéséparéedesaproprefamille?Deslarmesmontaientàsesyeux,maisKeeleypréféraitencorerôtirenenferquedeleslaissercouler.Ilspouvaientbientouscrever,aprèstout!YcomprisGregorMcDonald.SurtoutGregorMcDonald.Mairinsoupira.—C'est une longue histoire, commença-t-elle. Il est prévu qu'Alaric épouse RionnaMcDonald. Il serendait à la forteressedesMcDonald,pourdemanderofficiellement lamaindeRionna,quand il a étéattaqué. Le laird McDonald, qui n'a pas d'héritier, a décidé que le mari de Rionna prendrait sasuccession.AlaricmariéàRionna,sonamied'enfance,saseuleamie!Rionnaqui,commelesautres,luiavaittournéledos.Depuisletemps,Keeleyauraitdûs'yhabituer,maislatrahisondesonamie-etcousine-luiétaittoujoursaussidouloureuse.KeeleyavaitbeaucoupaiméRionna,quioccupaitencoreaujourd'huiuneplaceàpartdanssoncœur.La jeune femme jetaun regard à songuerrier endormi.Non,pas songuerrier. Il appartenait àRionna.Quelleironiedusort!Cethommedontelles'étaitautoriséeàrêvercommeunegamineénamourée, luiétaitinterdit.SiunMcDonaldapprenaitqu'elleavaithébergéAlaric,elleseraitbannieunedeuxièmefoisduclan!—Ai-jeditquelquechosedemal?s'alarmaMairin.Keeleysecoualatête.—Ainsi,ildoitépouserRionna?—Oui.Auprintempsprochain.Avraidire,jenesuispasravieàl'idéequ'Alaricnousabandonne,maisc'estunebonneoccasion,pourlui,des'émanciper.Unjour,ildirigerasonclan.Ilposséderasespropresterresetpourralestransmettreàseshéritiers.Mêmesic'étaitridiculedesapart,Keeleyavaitdumalàcontenirsatristesse.Déjà,sonbeauguerriersortaitdesavie,aussivitequ'ilyétaitentré.—JevaisavertirEwandecequ'ilafait,repritMairin,visiblementtrèsinquiète.Ilfautqu'ilréparesonerreur.—Non!s'exclamaKeeley,bondissantsursespieds.Jen'appartiensplusauclanMcDonald.Croyez-moi,jenemanqueraiàpersonne,là-bas.LesMcDonaldfontsouventappelàmestalentsdeguérisseuse,c'estvrai,maisjenevisplusparmieux.Jesuisentièrementlibred'alleroùbonmesemble.Mairinlaregardaitmaintenantaveccuriosité.—Ilsseraientfousdenepasgarderuneguérisseuse.Pourquoinevousappelez-vousplusMcDonald?—Cen'estpasmoiquil'aidécidé,réponditKeeley,àvoixplusbasse.Jen'aipastournéledosàmonclan,c'esteuxquim'ontchassée.EllesfurentinterrompuesparleretourdeMaddie,quiapportaitunecollationpourKeeley.Elledéposasonplateausurunetable.—Mangez toutdesuite,mapetite,ditMaddie.Vousaurezbesoinde toutesvosforces,sivousvoulezveillerAlaricdurantlanuit.Tout à l'heure, Keeley avait faim. Mais elle avait perdu tout appétit depuis qu'elle avait appris le

prochainmariage d'Alaric.Elle s'obligea quandmême àmanger.Et elle trouva délicieux le ragoût deviandeparfuméetlatranchedepainfrais-envérité,ilyavaitbienlongtempsqu'ellen'avaitpasdégustéunaussibonrepas.—JevaischercherEwanetCaelen,ditMairin.Venez,Maddie.LaissonsKeeleysavourertranquillementsonrepas.Unetâchepéniblel'attend.Aprèsledépartdesdeuxfemmes,KeeleyseretrouvaseuleavecAlaric.Ellesetournaversleguerrierendormi.—Vousn'auriezpaspuapparteniràuneautre? lui lança-t-ellesurun tonde reproche.Rionnaestmasœurdecœur,mêmesiellem'atrahie.Aulieudemelaisserindifférente,lefaitdevoussavoirfiancéssusciteenmoiunecruelledéception.Jevousconnaisàpeineetpourtant,vousaveztrèsviteoccupéunegrandeplacedansmoncœur.Alaricouvritsesbeauxyeuxverts.Illadévisageaunlongmoment,commes'ilsedemandaitquielleétaitetoùilsetrouvait.Puisseslèvresremuèrent,etilmurmura,sifaiblementqueKeeleyl'entenditàpeine:—Ange.Monange...

9Keeley aurait juré n'être couchée que depuis cinq minutes, quand on frappa à sa porte. Ouvrant lespaupières,elleclignaplusieursfoisdesyeux,letempsderassemblersesesprits.L'aubenedevaitplusêtretrèsloin.Keeleyavaitpassédeuxbonnesheuresànettoyerméticuleusementlaplaied'Alaric,avecl'aidedesesdeuxfrères,avantdelarecoudre.Puiselleétaitrestéeunlongmomentàleveiller.Elletitubaitdefatigue,quandelles'étaitenfindécidéeàrejoindresachambrepourprendreunreposbienmérité.Keeleyavait envied'écraser l'oreiller sur sa têteetd'ignorer lescoups frappésà saporte,maisavantqu'elleaitpuesquisserlemoindremouvement,lebattants'ouvritàlavolée.Lajeunefemmeremontainstinctivementsescouverturesjusqu'àsonmenton,bienqu'ellesefûtcouchéetouthabillée,etjetaunregardirritéauxdeuxintrusquivenaientd'apparaître.EwanetCaelenMcCabes'étaientplantéssurleseuiletilsnesemblaientpasplusravisdelavoirqu'ellen'étaitheureusedeleurprésence.—Alaricréclamesonange,annonçaCaelend'untondédaigneux.KeeleyclignadesyeuxetsetournaversEwan.—Voussavezbienquedanscinqminutes,jeserairedevenuesondémon!Ewansoupira.—Ilesttrèsnerveux.J'aipeurqu'ilnerouvrelui-mêmesablessureàforcedes'agiterdanssonlit.Nousdevonsabsolumentl'apaiser.Etlemeilleurmoyen...c'estquevousrestiezauprèsdelui.Keeleyenrestauninstantbouchebée.—Cequevoussuggérezestparfaitementinconvenant.Vousavezbeaum'avoirenlevéesansscrupules,jene permettrai pas que ma réputation souffre davantage encore. Je n'ai aucune envie que votre clans'imaginequejesuisunefemmeimmorale.Ewanlevalamainpourl'arrêter.—Mon clan ne dira rien, pour la bonne raison que personne ne sera au courant. Je vais prendre desdispositionspourinterdirel'accèsdelachambred'Alaricàquiconque.Saufàmoi,àCaelen,àmafemmeet bien sûr, à vous.Et je ne vous demanderais pas une chose pareille si ce n'était pas très important,Keeley.Jevousassure,ilesturgentdecalmermonfrère.Keeleysemassalefront.—J'aibesoindedormir.Jen'aipasconnuuneseulevraienuitdesommeildepuisqu'Alarics'esteffondrédevantmaporte.Sijemerendsdanssachambre,pouvez-vousmejurerquejeneseraipasdérangée?Keeleynecherchaitpasàcachersalassitude.Acetinstantprécis,elleétaitprêteàn'importequoipourqu'onlalaissetranquille.—Enfait,reprit-elle,j'apprécieraisbeaucoupd'êtrelaseuleàm'occuperd'Alaric.Quandj'auraibesoindequelquechose,jevousleferaisavoir.Keeley rêvait déjà à plusieurs heures de sommeil ininterrompu. Si elle devait partager la chambred'Alaric,c'estentoutcaslecadeauqu'ellesepromettait.Ewanesquissaunsourire.—Oui,Keeley.Vouspourrezdormirtoutvotresoûl.Jeveilleraiàcequevousnesoyezpasdérangée.EtjevousdonnemaparolequenousnereviendronspasvoirAlaricavantledébutdel'après-midi.Keeleyrejetasescouverturesetsortitprécautionneusementdulit,pourgardersesjambesbiencouvertesparsesjupes.Unefoisdebout,elleremitdel'ordredanssescheveux.

—Allons-y,danscecas...Ewann'avaitpasmenti.Apeineeut-ellepoussé laportede lachambred'AlaricqueKeeley le trouvadansunétatd'agitationextrême.Ilavaitrejetésescouverturesenbouleaupieddesonlit,etiltournaitsanscesselatêted'uncôtéetdel'autre,toutenmarmonnantdesparolesinintelligibles.Sonvisageetsontorseperlaientdesueur.Etsesmouvementsdésordonnésmettaientàrudeépreuvelespointsdesuturedesaplaie.Keeleyseprécipitaàsonchevet.Ilsefigeaaussitôtetouvritlesyeux.—Ange?—Oui,guerrier.Votreangeestvenuvousapaiser.Dites-moiunechose:si jem'allongeprèsdevous,consentirez-vousàvousreposercalmement?—Contentdevousrevoir,murmura-t-il,d'unevoixfaible.Cen'estpaspareilquandvousêtesloin.Keeleysesentitfondre.Ellelelaissaluiprendrelebras.—Jenevousabandonneraiplus,dit-elle.Jevaisresterauprèsdevous.Illuienlaçalataille,l'obligeantàlarejoindresurlelit.—Etcettefois,jura-t-il,jenevouslaisseraipluspartir.Keeleypréféranepasregarderdansladirectiondesesdeuxfrères.Ellen'avaitaucuneenviedevoirdel'irritationoude la réprobationdans lesyeuxdeCaelen.De toute façon, s'il sepermettaitunseulmotdésagréable,aprèsl'avoirtiréesansménagementdesonlit,ellen'hésiteraitpasàlegifler,quellesqu'ensoientlesconséquences.Heureusement,ellen'entenditriendetel,sinonlebruitdelaportequiserefermait.Elleenconclutqu'ellesetrouvaitdésormaisseuleavecAlaric.Elleselovacontreluietposaunemainsursonventre.—Dormez,àprésent,guerrier.Votreangeseratoutprèsdevous.Illaissaéchapperunsoupirdecontentementetsoncorpssedétendit-àl'exceptiondesonbras,quilamaintenaitfermementcontrelui.Il s'endormit presque aussitôt. Keeley, en revanche, malgré sa fatigue, resta longtemps éveillée, àsavourerleplaisird'êtredanslesbrasdesonguerrier.Quandellerouvritlesyeux,lesrayonsdusoleilfiltraientàtraverslesfourruresquicouvraientlafenêtre.Le feu s'était presque éteint et il ne restait plus que quelques braises qui rougeoyaient encore.Probablement la chambre était-elle devenue glaciale, cependant Keeley baignait dans une chaleur siagréablequ'ellen'osaitpasfairelemoindremouvement.Lebrasd'Alaricl'enlaçaittoujoursàlatailleetlajeunefemmesetrouvaitcolléecontresonflanc,latêtenichéedanslecreuxdesonépaule.Keeley lui caressa la joue et fut heureusement surprise de constater que sa peau étaitmoins brûlantequ'auparavant.Trèsexcitée,elleselibéradesonétreintepourselever.Ilouvritaussitôtlesyeux.Ilsétaientd'uneclartéstupéfiante.Puisilsourit,et,àlastupéfactiondeKeeley,lafitbasculersurlui.—Vousêtesfou!serécria la jeunefemme,quisedébattaitpournepas touchersoncôtéblessé.Vousallezrouvrirvotreplaie!—Alors,monangeestbienréel,murmura-t-il,sanslarelâcher.—Jecroyaisquej'étaisundémon?Ils'esclaffa,avantdegrimacerdedouleur.—Vousvoyez?répliquaKeeley,exaspérée.Vousferiezmieuxdenepasbouger.—Maisj'aimevousavoirsurmoi,répliqua-t-il.J'aimevraimentbeaucoup.Maintenantquevousêteslà,

j'enaipresqueoubliémablessure.Toutcequejesens,c'estvotrepoitrinepresséecontremontorse,etc'esttrèsagréable.Keeley sentit un délicieux frisson courir sur son dos, et préféra s'absorber dans la contemplation del'épauled'Alaric,plutôtquederisquerdecroisersonregard.—Savez-vouscequiseraitencoreplusagréable?ajouta-t-il.Cettefois,lajeunefemmetournalesyeuxverslessiens.Illascrutaitavecattention.—Quoi?demanda-t-elle,avecnervosité.—Unbaiser.Ellesecoualatêteetvoulutselibérerdesonétreinte.Ignorantsesprotestations,Alariclaserracontreluiet,desamainlibre,illuipritlementon.Puis,redressantlégèrementlatête,ilpressaseslèvressurcellesdelajeunefemme.Àcetinstantprécis,ilétaitdifficilededirequi,deluioud'elle,avaitleplusdefièvre.CarKeeleyavaitl'impressionquesonsangs'embrasaitdanssesveines.Enmême temps, elle se sentait incroyablement légère, comme si elle s'était soudain envolée dans lesnuages.Alaric lui caressa ledos, avantde laisser remonter samainplushaut, jusqu'à sanuque,qu'il étreignitpourintensifiersonbaiser.—Alaric,murmuralajeunefemme,quandilrelâchaseslèvres.— J'aime vous entendre prononcer mon nom. À présent, dites-moi le vôtre, que je sache comments'appellemonbonange.—Keeley.—Keeley,répéta-t-il.C'estuntrèsjolinom.Ilvousvaàravir.—Vousdevriezme laissermerelever.Vos frèrespeuvent revenird'un instantà l'autre. Ils s'inquiètentbeaucouppourvotreblessure.J'aibesoinderegarderl'étatdevospointsdesuturepourm'assurerqu'ilstiennentbien.Ilfaudraitaussiquevousmangiezquelquechose,afindereprendredesforces.—Jepréfèrevousembrasser.Keeleyluidonnaunepetitetapesurlapoitrine.Iléclataderiremais,àsagrandesurprise,ilacceptadelalibérer.La jeunefemmeseredressaet remit tantbienquemalde l'ordredanssa toilette,puiselle reportasonattentionsurlapoitrinedénudéedesonguerrier.Elleavaitdéjàvuplusd'unhommetorsenu.Enfait,àforcedesoignerdesgens,ellen'ignoraitplusriendel'anatomiemasculine.Maiscelui-ciétaitdifférent.Ilétaittoutsimplementmagnifique.Keeleyledétaillaitsansgrandediscrétion,espérantqu'Alaricseraittropfiévreuxpours'enapercevoir.—Jevaisexaminervotreplaie,dit-elle,d'unevoixrauquequi,hélas,trahissaitsontrouble.Ilrouladocilementsurlecôté,pourmieuxexposersonflanc.—Jedoisvousremercier,Keeley,dit-il.Jenemesouviensplusdegrand-chose,sinonquej'avaisbesoind'aide.Quandj'aiouvertlesyeuxetquejevousaivuepenchéeau-dessusdemoi,j'aicomprisqueDieum'avaitdépêchél'undesesanges.—Jesuisdésoléedevousdécevoir,maisjenesuispasunange,répliqualajeunefemmed'untonléger.Je ne suis qu'une modeste guérisseuse, qui tient ses maigres talents du savoir transmis par d'autresguérisseusesquil'ontprécédée.—Non,objectaAlaric,luiprenantlamain,pourlaporteràseslèvresetlabaiser.Vousêtesbeaucoupplusquecela.Keeleyfrissonnadeplaisir.Commentnepasêtreémuedevantunsibeauguerrier,quisavaittournerlescomplimentsavecautantd'aisancequ'ilmaniait1epée?

Elle lui prit le bras pour le placer au-dessus de sa tête, puis elle se pencha pour examiner la plaierécemment recousue.Elle fut ravie de constater qu'elle avait désenflé, et qu'elle était beaucoupmoinsrouge.—Alors,quelestvotreverdict?demanda-t-il,d'untonamusé.Vais-jesurvivre?—Oui,guerrier.Vousallezguérir.—Jesuisbienheureuxdel'apprendre.Ellerelâchasonbrasetilenprofitapoursemasserleventre.—Vousavezfaim?—Oui.Monestomaccriefamine.Keeleyhochalatête.—C'estbonsigne.Jevaisdemanderqu'onvousmontequelquechoseàmanger.—Nem'abandonnezpas.Cen'étaitpasunerequête:àsonton,ilétaitclairqu'ils'agissaitd'unordre.Keeleyhaussalessourcils.—S'ilvousplaît,ajouta-t-il,d'unevoixpresquesuppliante,pourtempérersontonautoritaire.Denouveau,Keeleysesentitfondre.—Non,guerrier,jenevousabandonneraipas.Il la récompensa d'un grand sourire.Mais ses paupières se fermaient d'elles-mêmes et il était évidentqu'illuttaitpournepasserendormir.—Reposez-vous,guerrier.Jevaisvouschercheràmangeretjereviensaussitôt.Keeleyselevadulitetremitunenouvellefoisdel'ordredanssatoilette.Aumomentoùellesedirigeaitverslaporte,celle-cis'ouvritàlavolée.Lajeunefemmefusillal'intrusduregard,pourluisignifierquecen'étaientpasdesmanièresd'entrer.Caelenreniflaavecdédain,afinqu'ellesachebienqu'ellenel'impressionnaitpaslemoinsdumonde.—Commentva-t-il?Keeleytenditlebrasendirectiondulit.—Voyez-vousmême.Ils'estréveilléilyaquelquesminutes.Etmaintenant,ilafaim.Caelens'approchadulit.Keeleyluitiralalanguedanssondos,maisaumomentdefranchirlaporte,ellefaillitheurterEwan.—J'espèrequevousn'avezrienvu,marmonna-t-elle.Ewanesquissaunsourirecomplice.—Vuquoi?Keeleyhochalatête,soulagée,etsortitdanslecouloir.Elleignoraitoùaller,maiselleavaitbesoindeprendrel'air.Ellepouvaitencoresentirleslèvresd'Alaricsepressersurlessiennesetsoncorpsn'étaittoujourspasretombéàsatempératurenormale.

10Alaricsuivitlajeunefemmedesyeux,jusqu'àcequ'elleaitdisparudanslecouloir,avantdereportersonattentionsursesfrères.—Vousvouliezquelquechose?demanda-t-il,d'unevoixquicachaitmalsonirritation.—Eneffet,ironisaCaelen.Parexemple,savoirsituétaistoujoursenvie.—Commetupeuxleconstater,laréponseestoui.Quoid'autre?Ewans'assitsurletabouretauchevetdulit.—Oublieuninstanttafascinationpourcettefille,Alaric.Nousavonsbesoindeteposerdesquestions.Etpourcommencer,quit'afaitça?Alaric soupira. Sa blessure le faisait souffrir. Son crâne était douloureux comme s'il avait passé unesemaineentièreàrespirerdesrelentsdebièreetsonventrecriaitfamine.Iln'avaitaucuneenviedeseplieràuninterrogatoire.—Jel'ignore,répondit-ilsincèrement.Noussommestombésdansuneembuscadeaumilieudelanuit.Ilsétaientbeaucoupplusnombreuxquenous.C'estunechancequej'aieréussiàm'échappervivant.Ensuite,jenemesouviensplustrèsbiendecequis'estpassé.Quandj'aireprisconnaissance,unanges'occupaitdemablessure.Caelens'esclaffaavecdédain.—Parleplutôtd'undémon!Jeneseraispasétonnéqu'ellesoitparenteavecLucifer.—Ellem'asauvélavie,luirappelaAlaric.—C'estvrai,acquiesçaEwan.Ellesembledouéepoursoignerlesgens.JecomptesurellepouraiderMairinàaccoucher.CesquelquesmotsprovoquèrentchezAlaricunplaisirinattendu-ainsiqu'uneboufféededésircommeiln'enavaitpaséprouvédepuislongtempspourunefemme.Iln'étaitpourtantpasenmanque:ilavaitdusuccèsaveclebeausexeetiltrouvaittoujoursàsatisfairesespulsions.MaisKeeleyéveillaitsessenscommeaucuneautre.Etsonabsencelemettaitdemauvaisehumeur.— Elle est d'accord pour rester ici et devenir notre guérisseuse ? demanda-t-il, feignant presquel'indifférence.Caelens'esclaffaencore.—Pastoutàfait.Alaricplissalesyeux.—Queveux-tudire?—Ilveutdirequenousneluiavonspasvraimentlaissélechoix,expliquaEwanenhaussantlesépaules.Tuavaisbesoinqu'elle te soigne.Et jevoulaisunesage-femmecompétentepourMairin.Alors, je l'aiamenéeici.Alaric reconnaissaitbien làEwanqui,quand ilavaitprisunedécision, l'exécutait sanssesoucierdesdétails.Et,s'ilétaitbiencontentdesavoirqueKeeleyallaitrester,iln'approuvaitpaslesméthodesdesonfrèreaîné.Ilcomprenaitmieux,maintenant,pourquoiellesemontraitaussimordanteàsonégard!—Renonceàcettefille,luiditEwan,commes'ilavaitludanssespensées.Aurais-tuoubliéquetudoisépouserl'héritièreMcDonald?Non, Alaric ne l'avait pas oublié. Il l'avait juste momentanément occulté. En revanche, il n'avait pasoublié la raison de cette expédition au cours de laquelle il avait perdu quelques-uns de sesmeilleurshommes.—J'aireçutoutàl'heureunelettredeGregor,repritEwan.Ils'inquiétaitdenepastevoirarriver.Maisj'attendais,pourluirépondre,desavoiravecprécisioncequis'étaitpassé.

Alaricsoupiradelassitudeetsemassalefront.—Jenepeuxpast'endirebeaucoupplus.Nousnousétionsarrêtéspourlanuit.J'avaispostésixhommespourmonterlagarde.Nousavonsétéagressésavecunerapiditéetuneférocitéquejen'avaisplusrevuedepuisl'attaquedenotreforteresse,ilyahuitansdecela.—Ceseraitdoncl'œuvredeCameron?grommelaCaelen.Leregardd'Ewans'étaitfaitmenaçant.—Quid'autreauraitpuourdiruntraquenardaussivicieux?Lesagresseursd'Alaricnecherchaientpasàobtenirunerançon.Sinon,ilsn'auraientpasmassacrétoutlemonde.Caelens'adossaaumur.—Maispourquois'enprendreàAlaric?CameronconvoiteMairinetsonhéritage.Ilseraitpluslogiquequ'ilchercheàtetuer,Ewan.Sedébarrasserd'Alaricneluisertàrien.—Iln'apasintérêtàvoirnotreclans'allieràceluidesMcDonald,fitvaloirAlaric.Nousdeviendrionssipuissants,danslarégion,quelesautresclansserallieraientànousencasdeconflit.—JevaisavertirMcDonalddecequis'estpassé,etlemettreengardecontreunepossibleagressiondeCameron.NousdécideronsensuitedupartiàprendrepourtonmariageavecRionna.Caelenhochalatêtepoursignifiersonassentiment.—Dansl'immédiat,leplusurgentestdenousassurerqueMairinaccoucheradansdebonnesconditions.Toutlerestepeutattendre.Alaricacquiesçaàson tour, soulagéd'ungrandpoids.Cependant, ildemeuraitconscientque leurclanavait besoin de cette alliance avec les McDonald pour assurer son avenir. En outre, ce mariage luidonneraitlapossibilitédedevenirlaird.Maisiln'étaitpaspresséd'abandonnertoutcequ'ilchérissaitlepluspourépouserunefemmequineluiinspiraitrien.CelaexpliquaitsansdoutesonattiranceirrationnellepourKeeley.Outrequ'elleluiavaitsauvélavie,lajeune femme lui offrait un dérivatif bienvenu. En réalité, c'était tout simple : elle représentait unedistractionpourlui,etriendeplus.Alaricsesentaitdéjàbeaucoupmieux,maintenantqu'ilavaitcomprispourquoicettefillel'intéressait.Ilreportaalorssonattentionsursesfrères.—Jenegarderaipaslachambretrèslongtemps,assura-t-il.Mablessuren'estqu'unevilaineestafiladeauflanc.D'iciàunesemaine,auplustard,jedevraisreprendrel'entraînementàl'épée.Etdèsquejeseraitotalementrétabli,nousnousmettronsencampagnepourabreuverlaterredusangdeCameron!Caelens'esclaffa.—Uneestafilade?Tuasfaillienmourir.Tuvastereposerjusqu'àcequeKeeleyt'autoriseàtelever.Ousinon,jemechargeraimoi-mêmedet'attacheràcelit.Alaricfronçalessourcilsàl'intentiondesonfrèrecadet.—Entoutcas,mablessurenem'empêcherapasdet'infligerunesolidecorrection!Caelenrouladesyeux.—Arrêtezdevouscomportercommedesgamins,touslesdeux,intervintEwan.—Ah,écoutonslesconseilsd'unhommemarié!ironisaAlaric.Caelenhocha la tête, amusé.Et, dans le dos d'Ewan, il fit un geste grivois, pour signifier queMairintenaitleuraînéparlaculotte.Alaricseretintd'éclaterderire,maissoneffortlefitgrimacerdedouleur.—Ilestévidentquetudoisencoreresterquelquesjoursaulit,repritEwan,l'airsévère.Caelenaraison:s'illefaut,nousn'hésiteronspasàt'attacher.Alaricsoupira.—Jen'aipasbesoindevouspourmedorloter.Laissez-moidonctranquille.Jesortiraidecelitquandjemesentiraienétatdemarcher.Maisrassurez-vous,jenesuispastroppressé.Jepréfèresavourerencore

quelquetempslesattentionsdeKeeley.Caelensecoualatête,incrédule.—Jenevoispascequetutrouvesàcettefille.Elleestaussiattirantequ'unhérisson.Alaricsourit.—Parfait.Danscecas,jen'auraipasàt'interdiredet'enapprocher.—N'oubliepastonengagementmatrimonial,luirappelaEwan.Alaricredevintsérieux.—Jenepensequ'àcela,Ewan.Ewansereleva.—Nousallonstelaissertereposer.Keeleynedevraitplustarderàreveniravectonrepas.Ensuite,ceseraitbienqu'elleregagnesaproprechambre.Voilàdesjoursqu'elleteveille,sanspratiquementdormir.Alarichochalatête,bienqu'iln'eûtpasdutoutl'intentiondelaisserlajeunefemmedormirseuledanssachambre.Elleresteraitaveclui.Danssesbras.Keeley réapparut justeaumomentoùses frères s'apprêtaientà sortir.Alaric s'aperçutqu'elleavait lestraitstirés.Elleétaitvraimentfatiguée,preuvequ'ellen'avaitpasménagésapeinepourlesoigner.Alaricétaitencoreenconvalescence-lavérité,c'estqu'ilsesentaitbeaucoupplusfaiblequ'ilnel'avaitfaitcroireàsesfrères.Maisàpartirdedorénavant,ilprendraitgardeàcequeKeeleypuissesereposer.Lajeunefemmecoulaunregardirritéàsesfrères,cequil'amusabeaucoup.Quandilseurentdisparu,ellelerejoignitàsonchevet.—J'aide la soupe,dupainetde labière,dit-elle. Jevoulaisde l'eau,maisGertiea insistépourmedonnerdelabière.Elleprétendquelesguerriersdoiventboiredelabièrepourconserverleursforces.—Gertiearaison.Unebonnebièrepeutsoignerpresquen'importequoi.Keeleygrimaçamaisrenonçaàargumenter.—Pouvez-vousvousasseoir?Alaric planta vaillamment ses coudes sur lematelas, pour se redresser.Mais une douleur lui cisaillaaussitôtleflanc,luicoupantlarespiration.Keeley,voyantcela,seprécipitapourl'aider.Alaricsentitsadouleurrefluerdèsquelajeunefemmeletoucha.Elledisposaplusieursoreillersdanssondos,puisellelesoutintparlesépaulespourqu'ils'adosse.—Allez-ydoucement,guerrier,dit-elle.Jesaisquevousavezmal.Alaricavaitlesoufflecourt.Desgouttesdesueurperlaientàsonfrontetunenauséeluisoulevaitlecœur.DouxJésus!Cettemauditeblessureluifaisaitsouffrirlemartyre.Lajeunefemmes'éloigna.Ilvoulutprotester,maisavantqu'ilaitpuouvrirlabouche,ellerevenaitdéjà,aveclacollation.Elleluitenditlegobeletdebièrepuiselles'assitàcôtédeluisurlelit.—Buvezlentement,pournepasbrusquervotreestomac,murmura-t-elle.Par quelmystère savait-elle qu'il avait la nausée et envie de rendre ?Quoi qu'il en soit, il suivit sesconseilsetilgoûtaàsabière.Aprèsquelquespetitesgorgées,ilgrimaçaetreposalegobelet.— Je crois que c'est vous qui aviez raison, Keeley. De l'eau aurait beaucoup mieux convenu à monestomac.Labièreesttropamère.Keeleyluitenditleboldesoupe.—Mangezvotresoupependantqu'elleestencorechaude. Jevais redescendrevouschercherde l'eau.J'enaipouruninstant.Alaricluisaisitlebras.—Non,nebougezpas,dit-il.Et,renversantlatêteenarrière,ilappelaGannon.IlavaitcriésifortqueKeeleyneputs'empêcherde

sursauter.—Désolé,s'excusa-t-il.Jenevoulaispasvousfairepeur.Ilsn'attendirentquequelquesinstantsavantqueGannonn'ouvrelaportepourpassersatête.VoyantqueKeeleyétaitstupéfaite,Alarics'esclaffajoyeusement.—Samission est de rester toujours devantma porte, au cas où j'aurais besoin de quelque chose. Jesavaisqu'ilnepouvaitpasêtretrèsloin.—Était-cejustepourvérifier?grommelaGannon.—Non. Je voudrais de l'eau fraîche et je désirais éviter que Keeley descende la chercher. Elle estfatiguée,etelleadéjàassezcourudanslesescalierspouraujourd'hui.—Jerevienstoutdesuite,réponditGannon,quiseretiraitdéjà.—Sivousvousdécidiezàmangervotresoupe?suggéraKeeley,aulieudecrieraprèsvoshommes.Alarics'amusadesonironie.—Jecroisquej'auraibesoindevotreaide.Jemesenstropfaible.Keeleyrouladesyeux,maiselleapprochaleboldesoupedeseslèvres.—Nebuvezpastropvite.Laissezchaquegorgéecoulerdansvotreestomac,avantd'avalerlasuivante.Lasoupeétaitbonneetrevigorante.Alaric-ensavourachaquecuillerée.Maisplusencorequelasoupe,c'étaitleregardattendrideKeeleyquil'aidaitlemieuxàoubliersadouleurauflancdroit.Elles'étaitrapprochéedelui,pourlefaireboire,etdumêmecoupelleluioffraitunevueimprenablesursapoitrine.Fasciné,Alaricdevinaitdeuxseinsparfaitssousletissudesarobe.Lajeunefemmeluisoulevalementon,pourl'obligeràcroisersonregard.—Finissezvotresoupe,luiordonna-t-elle.Ils'exécuta.Ilaimait luiobéir.Àsongrandétonnement, ilsentitsonmembredurcir,cequ'ilauraitcruimpossiblealorsque,parailleurs, soncorps souffrait lemartyre.Ladouleurcauséeparcetteérectionétaitpresqueaussiintolérablequecelledesablessure.Quandileutterminélasoupe,Keeleyéloignaleboldeseslèvresetrecula.Alaricgrommelauneprotestation.—Vousenvoulezencore?—Oui,murmura-t-il.—Jevaisappelerpourqu'onvousapporteunautrebol.—Non.—Non?—Cen'estpaslasoupe,quejeveux.Elleledévisagea.—Quevoulez-vous,guerrier?Alaricluipritlamain,pourlaplaquercontresajoue.—Jevousveuxprèsdemoi.—Jevousaiditquejenevousquitteraispas.La porte se rouvrit, et Alaric étouffa un juron en voyant Keeley s'écarter prestement de lui. Elles'empressaderassemblerlegobeletdebièreetleboldesoupevidependantqueGannontendaitàAlaricungobeletd'eau.Illebutd'unetraite,poursedébarrasserdeGannonauplusvite.Dèsqu'ill'eutvidé,illeluirendit.—Assure-toiquenousnesoyonspasdérangés.Keeleyabesoindesereposer.Lajeunefemmeenrestauninstantbouchebée.—Moi?Mais...ilmesemblequec'estvousquiêtesblessé.Alarichochalatête.—Oui.Maisàcausedemablessure,vousmanquezdesommeil.

Elleneréponditrien.D'ailleurs,Alaricvoyaitbienqu'elleétaitfatiguéeetqu'elleavaitautantbesoinqueluidesereposer.IlfitsigneàGannond'approcher.—Qu'onluiprépareunbain,chuchota-t-ilàsongarde.Tuferasmonterletubici,ettuleplacerasdansuncoin,pourqu'elleaitunpeud'intimité.Gannonhaussaunsourcil,maisnediscutapas.Dèsqu'ileutquittélapièce,Alaricreportasonattentionsurlajeunefemme,quis'affairaitdanslapièce,commesiellecherchaitàtoutprixàl'éviter.Deuxminutesplustard,onfrappaitdenouveauàlaporte.Keeleyfronçalessourcils,maisallaouvrir.Alarics'amusadelavoirreculer,lesyeuxécarquillés,tandisquedeuxhommesinstallaientungrandtubdanslapièce.Ilsétaientsuivisd'unecohortedeservantesportantchacuneunseaud'eaufumante.KeeleysetournaversAlaric.—Cen'estpasraisonnabledevouloirprendreunbain.Vousnedevezpasmouillervotreplaie.—L'eauchaudenem'estpasdestinée.Lajeunefemmefronçalessourcils.—Maisalors,c'estpourqui?—Pourvous.Elle écarquilla de nouveau les yeux, regardant tour à tour Alaric et le coin de la pièce où le tub seremplissaitdéjà,commesiellenesavaitpasquoi répondre.Quandelleouvritenfin labouche,Alaricposaundoigtsurseslèvres,pourluifairesignedesetaire.Ellerevintverslelit.—Alaric!Jenepeuxpasprendreunbaindanscettechambre!—Jeneregarderaipas,assura-t-ild'unairdeparfaiteinnocence.Elle jeta un regard d'envie au tub d'oùmontait une épaisse vapeur, tandis qu'une servante y vidait ledernierseaud'eau.—Sivousnevousdépêchezpas,l'eauvarefroidir,plaidaAlaric.Gannondéployaunparaventdeboisdevantletub.—Jel'aiempruntéàMairin,expliqua-t-ilàKeeley.Alariclefusilladuregard,maisGannonfitminedenepass'enapercevoir.Keeleyfutraviedeconstaterqueleparaventobstruaitcomplètementlavue.—C'estparfait!s'exclama-t-elle.Gannonluirenditsonsourire,avantdeluitendreunpaquetdetissureplié.—Mairinvousprêtecetterobepourcesoir,etellevousfaitdirequedemainmatin, lesdamesaurontd'autresvêtementsàvousdonner.Keeleysesentitsubmergéedegratitude.—RemerciezMairinetlesautresdamespourmoi.Gannonhochalatête.Puisilsuivitlesservantes,quis'étaientdéjàéclipsées,etrefermalaportederrièrelui.Keeleycaressad'unairmélancoliquel'étoffedelarobe,avantdelanceràAlaric:—Jevaisfairevite.Alaricsecoualatête.—Non,preneztoutvotretemps,aucontraire.Jemesensmieux,maintenantquej'aimangé.Jevaismerallongeretvousattendreconfortablement.Mais la fièvre ne tarda pas à le reprendre : Keeley s’était glissée derrière le paravent et la minuted'après,elleyaccrochaitsarobe...Maintenant,elleétaitnuederrièrecettepetitecloisondebois!EtdirequeparlafautedeGannon,ilétaitcloué au lit, réduit à imaginer les longues jambes de la jeune femme, ses seins parfaits, ses hanchesgénéreusesetletriangle,entresescuisses,quidevaitêtredelamêmecouleurquesachevelure...Il ferma les yeux quand il l'entendit s'immerger dans l'eau chaude avec un soupir de contentement quiravivainstantanémentsonérection.

Ilglissaunemainsouslesdrapsetsedébattitaveclecordondesonpantalonpouraccéderàsonmembreetsecaresser.Derrièreleparavent,lajeunefemmefredonnaitavecinsouciance.Alaricl'imaginaentraindetendreunejambehorsdel'eaupourlasavonner.DouxJésus!C'étaitinsupportable.Ilauraitdonnén'importequoipourlarejoindredanslebainetlalaveravecautantdesoinqu'elleavaitnettoyésablessure.Ilserraplusfermementsonmembredanssamain,réprimantàpeinelesgémissementsdeplaisirqueluiarrachaient ses propres caresses. À présent, il imaginait Keeley agenouillée devant lui, lèvresentrouvertes,prêteàlerecevoirdanssabouche.Alaricluiempoignaitlescheveuxenmêmetempsqu'ilenfonçaitsonmembredanssaboucheetqu'ellelecaressaitavecsalangue.Ignorantladouleurquiluicisaillaitleflanc,ilsecaressadeplusenplusviteetdeplusenfort,impatientdelibérerlapressionquiletaraudait.Toutàcoup,sajouissanceéclataenfin.Ilarqualesreinsetcontractalesorteils,tandisquesasemenceserépandaitsursonventre.C'étaitlalibérationlaplusdouloureuse-tantelleavaitétéintense-qu'ilaitjamaisconnue.Etpourtant,iln'avaitmêmepastouchélajeunefemme!Queserait-ce,alors,s'illapénétrait?Un bruit d'eau qui cascadait l'avertit qu'elle sortait de son bain. Alaric s'empressa d'arracher lesdernièresgouttesdesemenceàsonmembre,avantdelelaisserpendrecontresacuisse,puisilremontasonpantalonqu'ilreferma.Keeleymontrasatêted'uncôtéduparavent.—Çava?J'aicruvousentendre.—Toutvatrèsbien,répliqua-t-il,d'unevoixétranglée.Sivousavezfini,j'aimeraismelaverunpeu,moiaussi.Nevousinquiétezpas,jeprendraigardeànepasmouillermaplaie.Ellefronçalessourcils,maisrenonçaàdiscuter.Elledisparutdenouveauderrièreleparavent,etAlaricl'entenditterminerdesesécher,puisserhabiller.Cinqminutesplustard,elleréapparaissait,vêtued'unerobepropreet lapeaurougied'avoirséjournédans l'eauchaude.Sa longuechevelure,encorehumide,retombaitdanssondosjusqu'àsesreins.—Pendantquevousvouslaverez,jesécheraimescheveuxdevantlefeu,dit-elle.Alaric voulut se redresser pour sortir du lit,mais la douleur le rattrapa et il s'arrêta àmi-chemin, lesoufflecourt.Lajeunefemmeseprécipitapourluioffrirsonbras.—Laissez-moivousaideràvouslever.Attrapez-moiparlatailleetjevaisvoustirerhorsdulit.Alaricn'avaitpasbesoind'uneautre invitationpour l'enlacer etpresser sa tête contre sonventre.Unedélicieusefragrancederoseluititillalesnarines.Elles'étaitlavéeaveclesavondeMairin,mais,surlapeaudeKeeley,sonparfumluiparaissaittoutàcoupplusenivrantquejamais.—Allons-y,maintenant.Elleletirahorsdulit.Alariclatenaitfermement,pourl'empêcherdetituber,carilpesaitbientroplourdpour elle. Quand ses pieds touchèrent enfin le sol, il marqua une pause, le temps de reprendre sarespiration,avantdesemettredebout.Dès qu'il se leva sur ses deux jambes, la pièce commença à tourner devant ses yeux.Alaric dut faireappelàtoutesavolontépournepasselaisserretombersurlematelas.Ilressentitalorsunbesoinpressant.—J'aibesoindupotdechambre,dit-il,s'appuyantsurl'épauledeKeeleypourresterdroit.Ilseraitpeut-

êtrepréférablequevoussortiezdelachambrequelquesinstants.Iln'avaitpasenviedeladégoûterenluiinfligeantcesmomentspénibles.Elleluisourit.— A votre avis, guerrier, qui vous a aidé à satisfaire vos besoins naturels, pendant que vous étiezinconscient?Alaricsentitlefeuluimonterauxjoues.Bontédivine!Ilrougissaitcommeungamin!—Jepréfèrenepaslesavoir.Elleritdeboncœur,avantdes'écarter.—Vousêtessûrqueçaira?Jevaisresterdanslecouloir.Sivousavezbesoindemonaide,n'hésitezpasàappeler.Jereviendraidèsquevousserezdansletub.Alaricacquiesçaetlaregardas'éloignerverslaporte.Arrivéesurleseuil,elleseretournapourluioffrirunsourirequiluiréchauffalecœur.Puisellesortitetrefermalaportederrièreelle.Alaricse renditd'abordaupotdechambre,aprèsquoi il sedirigeavers le tubavecunedémarchedevieillardetréussittantbienquemalàs'immergerdedans.Iln'avaitjamaiscomprisleplaisirquel'onpouvaitéprouveràselaverdanscesconditions.Ilpréféraitplongerdansleloch,avecsesfrères.Letubluiparaissaitbeaucouptroppetitpoursataille,etunefoisdedans,illuiétaitpresqueimpossibledebouger.Ilparvinttoutdemêmeàselaverdumieuxpossible.Quandils'estimasatisfaitdurésultat,ilposasesdeuxmainssurlesrebordsdutub,pourseredresser.Maislamanœuvreluiarrachaungrognement.—Alaric?LavoixdeKeeleyprovenaitdel'autrecôtéduparavent.Alaricsefigea,uneservietteàlamain.—Oui?—Çava?Vousn'avezpasbesoind'aide?Il avait très envie de répondre « si », mais il ne supportait pas l'idée d'être réduit à un tel étatd'impuissance.—Regardezdanslecoffreenboisaupieddemonlitetapportez-moiunpantalonpropre,jevousprie.Laminuted'après,ellepassaitsonbrasderrièreleparavent,pourluitendresonpantalon.—Vouspourrezl'enfilertoutseul?—Jevaismedébrouiller.Ilsedébrouilla,nonsansdouleuretenprenantdixfoisplusdetempsqu'ilneluienfallaitd'ordinaire.Quandilémergeaenfindederrièreleparavent,ilétaitconvaincud'êtrepâlecommeunlinge.Dureste,dèsqu'ellelevit,Keeleys'empressadepasserunbrasautourdesataillepourlesoutenir.—Vousauriezdûmelaisservousaider,leréprimanda-t-elle.Voussouffrezinutilement.Elleleraccompagnajusqu'aulit,oùilserallongeasurledos.Puisiltenditsamainàlajeunefemme.—Couchez-vousprèsdemoi,Keeley.Nousavonstouslesdeuxbesoinderepos.Jedormiraimieux,envoussachantàmescôtés.Ellerougitlégèrement.Maisellepritsamainets'étenditcontrelui.—C'estvraiquejesuisfatiguée,dit-elle.—Vousaveztouteslesraisonsdel'être.Alaricluicaressaledos,enmêmetempsqu'ilposaitsonmentonsurledessusdesatête.Illasentitsedétendrepeuàpeu.—Keeley?—Oui?demanda-t-elle,d'unevoixdéjàendormie.—Mercidem'aider.Etmercid'avoirsuivimesfrèrespourmesoigner.Ellerestasilencieuseunmoment,avantdeprendrelamaind'Alaricdanslasienne.

—Derien,guerrier.

11Keeleyserapprochadelasourcedechaleuravecunpetitsoupirdecontentement.Puisellebâilla,etils'en fallut de peu qu'elle se mît à ronronner en sentant une grande main lui caresser le dos. Quellemerveilleusefaçondeseréveiller!Tout à coup, elle se souvint qu'elle partageait le lit d'Alaric McCabe et que c'était donc lui qui luicaressaitledos.Lajeunefemmeouvritlesyeuxets'aperçutqu'Alariclacontemplait.Samainremontaplushaut,pourluimasserdoucementlanuque.Keeleyhésitaitàparler,depeurderomprelecharmedel'instant.Unpeudelumièrefiltraitparlesrebordsdelafourrurequiobstruaitlafenêtreetlefeus'étaitdenouveauréduitàquelquesbraisesrougeoyantes.Alaricsetenaitdressésuruncoude,salonguechevelureretombantsursesépaules.Ilsemblaitsatisfait.Plus aucune douleur n'assombrissait son regard et ses beaux yeux verts brillaient d'une lueur qui fitfrissonnerKeeley.Soudainnerveuse, elle s'humecta les lèvres, tandisque le regardd'Alaric se faisaitplusintense.Illuienserralanuqueet,avantqu'elleaitpuréagir,approchasabouchedelasienne.Cene futd'abordqu'uneffleurement très tendre - etôcombiendélicieux !Mais, après s'être retiréuninstant, il revint à la charge, avec plus de détermination, usant cette fois de sa langue pour l'inciter àouvrirleslèvres.Keeley, incapable de lui refuser quoi que ce soit, se soumit à son injonction muette. Leurs languess'entremêlèrent,dansunedanseenfiévrée.—Vos lèvres sontmerveilleuses,murmuraAlaric.De nouveau, sa voix rauque fit courir des frissonsdanstoutlecorpsdeKeeley,maisluifitaussiprendrepleinementconsciencedelasituation:ilsétaientcouchésensembledanslelitd'Alaricetill'embrassait.Alorsqu'ilétaitfiancéàuneautre!Keeleyrecouvrasesespritsaussisûrementquesielleavaitreçuunedouchefroide.—Qu'ya-t-il?demandaAlaric,alorsqu'ellesedégageaitdesonétreintepourmettredeladistanceentreeux.—Cequenousfaisonsestmal,dit-elle.Vousêtesfiancéàuneautrefemme.Alaricfronçalessourcils.—Quivousaracontécela?—Peuimportedesavoirquimel'adit,dumomentquec'estvrai.Vousappartenezàuneautre.Cen'estpasbiendevotrepartdem'attirerdansvotrelit.—Nousnesommespasencoreofficiellementfiancés.Keeleysoupira.—Cen'estpasuneexcusevalableetvouslesavezbien.Auriez-vousrenoncéàl'épouser?Alaricplissaleslèvres,maisilsecoualatête.—Non.C'estunmariaged'intérêt.DestinéàconsolidernotreallianceaveclesMcDonald.En principe, cela n'aurait pas dû affecterKeeley d'entendre la confirmation de ce qu'elle savait déjà.Aprèstout,quereprésentaitcethommepourelle?Iln'étaitqu'unblesséquiavaitbesoindesesservices.Riend'autre.Quelquesbaiserséchangésn'engageaientàrien,etsurtoutpasàl'avenir.Ellen'allaittoutdemêmepasrêveràunehistoire-d'amouravecceguerrier!Elle secoua la tête, pour chasser cette idée absurde de son esprit. Rionna était fille de laird.Keeleyn'étaitrien.Ellen'avaitrienàdonnerenmariage,sinonelle-même.Pasdetitre,pasdedotgénéreuse.Pasmêmelesoutiendesonclan.

—Danscecas,vousembrassezlamauvaisefemme,répondit-elle,d'unevoixqu'ellevoulaitlégère.Alaricsoupiraetlaissaretombersatêtesurl'oreiller.—Vousnepouvezpasme forcerà ignorer l'attirancequiexisteentrenous,Keeley.Ceseraitde toutefaçonimpossible.Jen'aijamaisdésiréunefemmeautantquevous.LagorgedeKeeleyétaitsoudainsisèchequ'elleavalapéniblementsasalive.Ellefermalesyeux.Quandellelesrouvrit,ceuxd'Alaricbrillaientdedésir.—Avez-vouspenséàcequ'iladviendraitdemoi,guerrier?Dois-jemedonneràvous,uniquementpourvous voir ensuite en épouser une autre ?Et que deviendrai-je, quandvous serez le nouveau laird desMcDonald?Alarictenditlamain,pourluicaresserlajoue.—Jeveillerai survotresort,nevous inquiétezpas. Jene ferai jamais rienquipourraitvousnuireoucauservotredisgrâce.Keeleyneputs'empêcherdesourireavecamertume.Ladisgrâce,elleconnaissaitdéjà.—Sivousnevoulezpasmenuire,alorsvousdevezrenonceràallerplusloinavecmoi.Ilvoulutprotester,maisKeeleyposaundoigtsurseslèvres,pourluiintimerlesilence.— Le jour se lève. Nous avons dormi toute la nuit. Je vais examiner votre blessure et ensuite jecommanderai votre petit déjeuner. Puis j'irai demander au laird quelle place il m'assigne dans cetteforteresse.—Ewans'occuperabiendevous,assuraAlaric,d'unairdéterminé.Sinon,ildevram'enrépondre.Pourtouteréponse,Keeleysepenchasursablessure.—L'inflammation a presque entièrement disparu, dit-elle. Encore quelques jours de repos, et je vousautoriseraiàquitter lachambre.Maisàconditionquevousmepromettiezdenepas reprendre toutdesuitel'entraînement.Elleavaitespérédétournerlaconversation,maisquandellerelevalesyeuxellevitqu'Alariclaregardaitavectristesseetregret.Keeleypréféradétournerlatêteetdescendredulit.Ellesedirigeaverslafenêtreetécartalafourrure,afindelaisserrentrerdanslachambreunpeud'airfrais avec le soleil du matin. Elle resta un moment immobile, à maudire le destin et ses griffesimplacables.ChezlesMcDonald,savie-etsonavenir-avaientétédéterminésparlesactionsdesautres.Elles'étaitjuréquecelanesereproduiraitplusjamais.Maisàprésent,elles'apercevaitquedéciderdesonpropredestinpouvaitvouslaisserungoûtdecendresdanslabouche.Pourtant,Keeleyétaitconvaincued'avoiragiavecraison.ElleavaitpréféréprendresesdistancesavecAlaric,pourseprotéger...Seprotégerdequoi,aujuste?D'unpossiblechagrin?D'unedisgrâceprobable?Elleauraitdû se sentir rassérénéed'avoir étécapabledemaîtriser toute seule la situation.Cependant,ellen'éprouvaitqu'unsentimentd'immensegâchis-etdevide.Lajeunefemmerisquaunregardendirectiond'Alaric.Ilavaitfermélesyeuxetsemblaitsereposer.Oui,c'étaitmieuxainsi.Detoutefaçon,ilneseraitjamaisàelle.Sielles'engageaitdansuneliaisonaveclui,leur rupture serait encore plus douloureuse.Dans ces conditions,mieux valait ne jamais connaître lesjoiesdel'amour.Keeleyprituneprofondeinspiration,carralesépaulesetpartitverslaporte.Ilétaitgrandtempsqu'elleprenne enmain son propre destin. EwanMcCabe s'était lourdement trompé en croyant kidnapper unefemme sans ressources.Keeley exigerait de lui des garanties solides, s'il voulait qu'elle reste jusqu'àl'accouchementdeladyMcCabe.Alorsqu'ellesortaitdelachambre,lajeunefemmefaillitheurterGannon,assisdanslecouloiràmêmele

sol,latêteappuyéecontrelemur.Ilnedormaitqu'àmoitiéetils'empressadeserelever.Alaricn'avaitpasexagéré,enprétendantqueGannonétaittoujourslàpourveillersurlui.—Désirez-vousquelquechose?s'enquitpolimentlegarde.Keeleysecoualatête.—Non.Alaricvabeaucoupmieux.Jevaisdescendreparleraulaird.J'enprofiteraipourdemanderqu'onmontelepetitdéjeunerd'Alaric.Gannonparutsoudainmalàl'aise.—Sivousavezunerequêteàformuleraulaird,ilseraitpréférablequejelatransmettemoi-même.Keeleyplissalesyeux.Elleneselaisseraitpasintimiderparceguerrier,malgrésastatureimposante.—Jenepensepasquecelasoitnécessaire.Maissivousvoulezvousrendreutile,descendezplutôtdansles cuisines, pour commander le petit déjeuner d'Alaric. Pendant ce temps, j'irai m'entretenir avec lelaird.Et,sanslaisseraugardeletempsderépliquer,ellepartitversl'escalier.Elle s'arrêta dans le grand hall du rez-de-chaussée, qui fourmillait d'activité, plusieurs servantes yvaquantàleurstâches.Malgréladéterminationqu'elleavaitaffichéedevantGannon,Keeleyignoraitoùtrouverlelaird.Etsabravadenel'empêchaitpasd'êtretrèsnerveuse.—Keeley!s'exclamaMaddie,quiarrivaitdescuisines.Puis-jevousaider?Keeleysetournaverselle.—Oùpourrais-jetrouverlelaird?—Ilestdanslacour,às'entraîneravecseshommes.Keeleyluisourit.—Merci!Elles'éloignaitdéjàquandMaddieluilança:—Lelairdn'aimepasêtredérangélorsqu'ils'entraîneaucombat!—Pourmapart,jen'aimepasêtredérangéequandjedorstranquillementchezmoi,marmonnaKeeley,assezbaspournepasêtreentenduedeMaddie.Cequin'avaitpasempêchéEwanMcCabedefaireirruptionchezelleetdelatirerhorsdesonlitpourl'amenerici!Elle ouvrit la porte donnant sur la cour intérieure de la forteresse et marqua une pause sur le seuil,impressionnéeparlavuedetouscesguerriersquis'entraînaientàcombattreà1’épéeouàmainsnues,ouencore à tirer à l'arc. Ils étaient plusieurs dizaines, peut-être une centaine, et le vacarme qu'ilsproduisaientétaitassourdissant.Lesmainsplaquéessurlesoreilles,lajeunefemmedescenditlesquelquesmarchesquimenaientdanslacouretellecommençad'enfaireletour,àlarecherchedulaird.Elles'immobilisaencroyantsentirunflocondeneiges'écraser sur sonnez.Elle leva lesyeuxaucieletvitqu'ilneigeaitvraiment.DanssapréoccupationàtrouverEwan,ellenes'enétaitmêmepasaperçue!Ellefrissonna,maisrepritsesrecherches.Au bout d'unmoment, elle finit par trouver le laird et son frère, côte à côte, occupés à surveiller lesmanœuvresdeleurshommes.Caelenfronçaaussitôtlessourcilsenlavoyant.Lelairdsemontraàpeinepluscivilisé.—J'espèrequ'iln'yariendegrave?demanda-t-il,sansmêmelasaluer.CommentvaAlaric?—Alaricvabien.Sablessuresecicatriseetsafièvreestretombée.Maisjenesuispasvenuepourvousparlerdelui.—Jesuisoccupé,répliquasèchementlelaird.Quelquesoitlesujet,çapeutattendre.Etilluitournaledos,pourlacongédier.Malgréletempsglacial,Keeleysentaitsonsangbouillirdanssesveines.

—Non,laird,çanepeutpasattendre.Et elle tapa du pied, pour donner plus de force à son propos,mais aussi pour s'assurer de couvrir levacarmeambiant.Le laird se raidit, avantde se retournerverselle.Tous lescombattants, àproximité, s'immobilisèrent,l'épéebaissée,pourregarderKeeley.—Qu'avez-vousdit?demandalelaird,d'unevoixsicalmequ'elleenétaitterriblementmenaçante.CaelendévisageaKeeleyavecincrédulité,avantderegardersonfrère,commes'ilavaitbesoindesevoirconfirmerqu'elleavaitosédéfierlelaird.Keeley redressa fièrement lementon.Sesgenoux tremblaient,maisellen'entendaitpasmontrerqu'elleavaitpeur.—J'aiditqueçanepouvaitpasattendre.—Danscecas,expliquez-moivotreproblème.Qu'ya-t-ildoncdesiimportant,quevousvouspermettiezd'interromprel'entraînementdemeshommes?Parlez,maintenantquevousaveztoutemonattention.Nesoyezpastimide.—Oh,onnem'ajamaisreprochéed'êtretimide,répliquaKeeley,amusée.Etcequiestsiimportant,cesontvosprojetsmeconcernant.Vousm'avezenlevéedechezmoipourque je soignevotre frère,maisvous attendez aussi que j'aide ladyMcCabe à mettre son bébé au monde. Je refuse d'être traitée enprisonnière,aussijeveuxconnaîtrelaplacequevousmeréservezauseindevotreclan.EwanMcCabehaussaunsourcil.—Auriez-vousétémaltraitée, jusqu'àprésent ?Quelqu'unvousaurait-ilmanquéde respect ?Croyez-moi,jen'accordejamaisdechambreàmesprisonniers.Leurplaceestdanslescavesdudonjon.Refusantdese laisser impressionnerpar laduretédeson ton,Keeleycherchabravementsonregardetcarralesépaules.—Jesouhaiteconnaîtremapositionexacte,laird,afinqu'iln'yaitaucunmalentenduparlasuite.J'aidûrenonceràmamaisonpourvoussuivre.J'étaishabituéeàsubveniràmespropresmoyensetàvivreselonmesrègles.Ilnem'estdoncpasfaciled'obéirauxordresdequelqu'un.Levisaged'Ewans'assombritetKeeleysedemandas'iln'allaitpasexploserdefureur.Mais,àsongrandétonnement,ilrenversalatêteenarrièreetiléclataderire.—Dites-moi,Keeley,avez-vousparléàmafemme?Neserait-cepasellequivousauraitinspirécettescène?Autour de lui, ses hommes se mirent à rire également. Même Caelen en oublia quelques instants sasévéritécoutumière.Keeleylesregardaittousavecstupéfaction.—PourquoiladyMcCabem'aurait-elleparlé?Jenel'aipasencorevuedelamatinée.EwanMcCabepoussaunsoupirthéâtral.—DouxJésus!Cen'étaitpasassezd'unefemmepourmedéfieràchaqueinstant.Voilàquej'hérited'unedeuxième.—Jeterappellequec'étaittonidée,marmonnaCaelen.Denouveau,lesguerrierséclatèrentderire.Ewanlevalamainpourlesfairetaire.Keeleycommençaitàs'alarmer.Ilssemblaient tousprendresesrécriminationssurle tondelaplaisanterie,sanss'apercevoirqu'elleétaitparfaitementsérieuse.Elleenrageaitàl'idéequ'ilspuissentriredelasituation,alorsqu'elleavaitétékidnappéedechezelleetprivéedesonindépendance.Lesdentsserrées,elletournalestalonspourrentrerdanslaforteresse.Elleavaittrèsenviedes'ouvrirdesesfrustrationsàAlaric,maisellecraignaitdeprovoquerunedissensionentreluietsesfrères-cequirisquaitdeseretournercontreelle.

Alorsqu'elle regagnait laportepar laquelle elle était sortie, unemain lui agrippa fermement l'épaule,pourl'obligeràseretourner.Keeley,aveugléeparsacolère,serralespoingsetfrappaaujugé.Caeleneutjusteletempsdepencherlatêtedecôtépourparerlecoup.—Bonsang,femme!s'exclama-t-il,ahuri.Calmez-vous!Illuisaisitlebraspourl'empêcherderecommencer.—Lâchez-moi!protestaKeeley.—Keeley,jevoudraisvousparler,intervintEwan,quiarrivaitderrièresonfrère.Keeleylibérasonbrasetsetournaverslui.—Jecroisquevousm'avezdéjàtoutdit,laird.—Cen'estpasmonavis.Rentrons.Nousparleronspendantque jeprendraimonpetitdéjeuner.Vous-même,avez-vousmangé?Jeprendstoujoursmesrepasavecmafemme,maisencemomentelleparesseau lit, à causede son état.Alors j'ai décalé l'horaire demonpetit déjeuner pour ne pas enfreindre latradition.Keeleyserésignaàhocherlatêteetemboîtalepasaulaird.Caelenleurjetaundernierregard,avantdepartirrejoindrelesguerriersàl'entraînement.Mairinétaitdéjàattabléedans legrandhall.Sonvisages'illuminadèsqu'ellevitarriverEwanetellevoulutselever.—Non,chérie,resteassise,dit-il,posantunemainsursonépauleavantdel'embrassersurlatempeetdeluioffrirunsourirequitouchaKeeleyaucœur.Puisils'assitàcôtédesafemmeetilfitsigneàKeeleydeprendreplaceenfaced'eux.—Bonjour,Keeley,ditMairin,avecungrandsourire.—Bonjour,Mairin.—CommentvaAlaric?Keeleylarassurad'unsourire.—Beaucoupmieux cematin. Sa fièvre est presque entièrement retombée.Mais je lui ai ordonné degarderlachambreencorequelquesjours.—Voilàuneexcellentenouvelle!s'exclamaMairin.Etc'estgrâceàvous.Ewans'éclaircitlavoixpours'adresseràKeeley,tandisquedesdomestiquesarrivaientpourlesservir.—Jesaisquelescirconstancesdevotrearrivéeiciontété...particulières,commença-t-il.Cependant,jesouhaitequevousrestiezavecnous,aumoinsjusqu'àcequeMairinaitaccouchédenotreenfant.Elleesttout,pourmoi,etjenevoudraispasqu'illuiarrivequoiquecesoit.—Votre sollicitudevoushonore, laird.Votre femmeabeaucoupdechanced'avoirunmari à cepointpréoccupéparsonbien-être.—J'ail'impressionqu'ilyaun«mais»quisecachederrièrevotreargumentation,devinaEwan.— Vous avez raison, acquiesça Keeley. Je veux des garanties sur mon statut chez vous. Notamment,j'exiged'êtrelibredemesdéplacements.Ewans'adossaàsonsiègeetladévisageaquelquesinstants.—Si jevousaccordecette liberté,medonnerez-vous, enéchange,votreparoledenepasquittermesterres?Keeleyprit son tempsavantderépondre.Unefoisqu'elleauraitdonnésaparole,ellenepourraitplusrevenirenarrière.Cequivoudraitdirequ'ellepasserait tout l'hiverchez lesMcCabe.Etdonc,qu'elleresteraitàproximitéd'Alaric,soumiseàunetentationcommeellen'enavaitjamaisconnu.LajeunefemmeregardaMairin,quisemblaitàlafoisdélicateetfatiguée,puisellelutdanslesyeuxdulairdl'amourqu'illuiportait.Ilétaitfoncièrementattachéàsonépouse.Etils'inquiétaitpourelle.KeeleyseraitraviedepouvoirallégersonfardeauenaidantMairinàmettresonenfantaumonde.—Oui,dit-elle.Jevousdonnemaparole.Ewanhochalatête.

— Il est important que vous ayez conscience que votre liberté s'accompagne de conditions. Vous nepourrezpassortirdelaforteressesansescorte.Nousavonsdesennemis,prêtsàtoutpournousnuireetquinereculerontdevantaucunexpédient.—Jesauraim'accommoderdecesconditions.— Parfait. Dans ce cas, Keeley, votre position au sein de notre clan sera tout à fait respectable etrespectée.D'autantque,commejevousl'aidéjàexpliqué,nousn'avonsplusdeguérisseuse.Endehorsd'Alaric et de Mairin, d'autres membres du clan auront besoin de vos services. J'espère que vousconsentirezàlessoigner.Quoiqu'ilensoit,sivousnousfaitesallégeance,voussereztraitéecommeuneMcCabe,cequiveutdirequevousnemanquerezjamaisderien.Sondiscoursrespiraitlasincérité.EwanMcCabenedupaitpassonmonde.Keeleyétaitconvaincuequec'étaitunhommed'honneur.—Jevousfaisallégeance,laird,répondit-elle.Mairinbattitdesmainspourmanifestersajoie.— Voilà qui est magnifique ! Je suis heureuse de savoir que vous allez rester, Keeley. Peut-êtreaccepterez-vous de m'enseigner quelques-uns de vos secrets médicinaux ? Quoi qu'il en soit, c'estagréabledesavoirqu'ilyauraunefemmedeplusdansnosmurs.—Comme s'il n'y en avait pas déjà assez, grommela Ewan.Vous êtes déjà plus nombreuses que leshommes.Mairinseretintd'éclaterderire.— Quand nous aurons fini de manger, reprit-elle, je vous montrerai les vêtements que Maddie arassembléspourvous.Ensuite,jevousferaivisiterlaforteresseetjevousprésenteraiauxmembresduclan.Toutlemondeseratrèsexcitéd'apprendrequenousavonsunenouvelleguérisseuse.Keeleyluisourit.—Celamesembleunexcellentprogramme.Lerepasterminé,Ewanselevadetablelepremieretilembrassasafemmesurlajoue.— Je dois rejoindremes hommes. PrendsGannon etCormac avec toi, pendant que tu feras visiter laforteresseàKeeley.Mairinlevalesyeuxauciel,alorsqu'Ewans'éloignaitdéjà.—Jet'aivue,lança-t-ilcependant.Mairinlesaluadelamain,avecunsourireespiègle,avantdereportersonattentionsurKeeley:—Voulez-vousmonter voirAlaric, pour vous assurer que tout va bien, avant que nous commencionsnotretour?—Ilnecourtaucundanger,assuraKeeley.Ilsereposait,quandjel'aiquitté,etGannons'occupaitdeluifairemontersonpetitdéjeuner.J'irailuirendrevisitequandnousauronsachevélavisitedelaforteresse.Mairinhochalatête.—Alors,allons-y,dit-elle,serelevant.Jevaiscommencerparvousprésenterauxfemmes.

12Mairinétaitbavarde.Duranttoutelavisitedelaforteresseetdescottagesnichésaupieddesesremparts,ellenecessadeparlerdechosesetd'autres.Keeleyavaitl'impressionquelatêteluitournait,cependantelles'efforçademémoriserlesnomsdetouteslespersonnesqueMairinluiprésentait.LaplupartdesMcCabel'accueillirentavecchaleur.Quelques-uns,cependant,semontraientcirconspects.SansdouteparcequeMairinnel'appelaitque«Keeley»,sansmentionnerlepatronymedesonclan.Christina, une jeune femmede l'âgedeKeeley àpeuprès - ellenedevait avoirqu'unoudeuxansdemoinsqu'elle-étaittrèsvive,avecunbeausourireetdesyeuxpétillantsd'intelligence.Keeleysentittoutdesuitequ'elles'entendrait trèsbienavecelle.Elleremarqua,aussi,queCormacetChristinaflirtaientensemble:ilssedévoraientlittéralementduregard,malgréleurairinnocent.Alors qu'elles revenaient vers la forteresse, par l'arrière, Keeley et Mairin tombèrent sur un grouped'enfantsquis'employaientvaillammentàmettreentaslaneigerépanduesurlesol.Lesfloconss'étaientarrêtésdetomber,maislecielmenaçantindiquaitqu'ilsnetarderaientpasàrevenir.L'undesgarçons,apercevantMairin,abandonnasescamaradespourcourirverslesdeuxfemmes.—Maman!Legarçonnetse jetadansles jupesdeMairin,qui leserra trèsfortcontreelle.Keeleyétaitstupéfaite.Mairinsemblaitbeaucouptropjeunepourêtrelamèred'unenfantdecetâge.Mairincaressalatêtedugarçonnet,avantdesourireàKeeley.—Crispen,j'aimeraisteprésenterKeeley.Ellevahabiterquelquetempsavecnousetnousfaireprofiterdesestalentsdeguérisseuse.Keeleytenditlamainavecsolennité.—Jesuisenchantéedefairetaconnaissance,Crispen.LegarçonnetpenchalatêtedecôtéetdévisageaKeeleyavecintensité.Lajeunefemmefutsurprisedediscernerdel'anxiétédanssesyeux.—Vousêtesvenueaidermamamanàaccoucher?Keeleysentitsoncœurfondredelevoirainsis'inquiéterpoursamère.Queladorablegarçon!Elleauraitvoululeserrerdanssesbras.—Oui,Crispen.J'aidéjàaidéplusieursbébésànaître,etj'assisteraitamèrequandlemomentseravenu.Lesyeuxdugarçonnettrahirentsonsoulagement.—C'estmerveilleux!s'exclama-t-il,avecungrandsourire.Papaabienraisondedirequemamanméritelemeilleur.Elleportedanssonventremonfuturpetitfrèreoumafuturepetitesœur!Keeleyluisourit.—Eneffet.As-tuunepréférence,Crispen?Garçon,oufille?Crispense frotta lenez,avantde jeterun regardendirectiondesautresenfantsqui lui criaientde lesrejoindre.— Ça ne m'embêterait pas d'avoir une sœur, du moment qu'elle n'est pas comme Gretchen.Mais ungarçon,c'estmieuxpourjouer.Mairins'esclaffa.—TusaisbienqueGretchenestunique.Maintenant,varetrouvertescamarades.JedoisterminerdefairevisiterlaforteresseàKeeley.Crispendonnaunedernièreétreinteàsamère,avantdecourirrejoindresesamis.KeeleycoulaunregardcurieuxàMairin-ellenesavaitpastropparquellequestioncommencer.MaisMairin,devinantsaconfusion,sehâtad'expliquer:

—Gretchenestunepetitefilleaucaractèrebientrempéquin'hésiterapasàconquérirlemonde.ElleestlabêtenoiredeCrispenetdesautresgarçonsdesonâge.Quandellenelesbatpasàleurspropresjeux,ellelesfaitenragerenleurassurantqu'elledeviendrauneguerrière.KeeleycherchadesyeuxGretchendanslegrouped'enfants.C'étaitprobablementcellequis'étaitassiseàcalifourchonsurl'undesgarçons,sanssesoucierdesesprotestationsvéhémentes.—QuantàCrispen, repritMairin, ilest le filsd'Ewan,nédesonpremiermariage.SamèreestmortequandCrispenn'étaitencorequ'unbébé.—Ilvousaimemanifestementbeaucoup.Mairinhochalatête.—J'attendsunenfant,maisdansmoncœurCrispenresteratoujourslepremier.Mêmes'iln'estpassortidemonventre.C'estluiquim'afaitrencontrerEwan.KeeleyétreignitlamaindeMairin.—Vousavezbeaucoupdechance.Votremarivousadore.Celasauteauxyeux.—Arrêtez,vousallezmefairepleurer!protestaMairin.Cesdernierstemps,jesanglotepourunouioupourunnon.ÇarendEwanfou.Etseshommesm'évitent,depeurdedireoudefairequelquechosequiferaitjaillirmeslarmes.Keeleys'esclaffajoyeusement.—Vous n'êtes pas la première futuremère à réagir ainsi. La plupart des femmes enceintes sont plusémotivesqu'àl'ordinaire.Surtoutàmesurequeleurtermeserapproche.Lesdeuxfemmes,suiviesdeCormac,poursuivirentleurtourdelaforteresse,pourrevenirdanslagrandecour intérieure,où lesguerrierspoursuivaient leur entraînement.Audébut,Keeleyn'yprêtamêmepasattention,tantlespectacleétaitordinaire.Lesguerrierspassaientleurtempsàsebattreentreeux.C'étaitlameilleurefaçond'êtretoujoursprêtsàsedéfendreencasd'attaque.Maisunguerrier,enparticulier,finitparattirersonattention.Ilnesebattaitpas.Ilnebrandissaitmêmepassonépée.Ilsetenaitdecôté,aveclelaird,etregardaitlesautressebattre.—Ilestfou!grommelaKeeley.Fouàlier!—Quoi?Qu'ya-t-il?demandaMairin.IgnorantMairinetCormac,Keeleyseprécipitaversleguerrier.Elleétaitsifurieusequ'ellenes'aperçutmêmepasqueleshommess'étaientimmobilisésenlavoyantcourir.Ewan leva les yeux au ciel, comme s'il implorait une grâce divine, tandis qu'Alaric tendait ses brasdevantluipourseprémunirdetouteattaque.—Yaurait-ilunproblème?demanda-t-ilavecungrandsourire,quandla jeunefemmes'arrêtadevantlui.—Oui!Vousavezperdularaison!Jevousavaisditdegarderlachambreetdevousreposer!Vousnedevriezpasêtredehors,parunfroidpareil.Vousnedevriezmêmepasêtredebout.Commentespérez-vousquejevoussoigne,sivousn'écoutezmêmepaslesconseilslesplussensés?Caelens'esclaffa.Alaricluijetaunregardnoir.—Jecroisqu'elleveutdirequetun'espasraisonnable,commentaCaelen.Finalement,jel'avaissous-estimée.Ellen'estpassibêtequecela!Alaric se tourna vers son frère, prêt à en découdre avec lui, mais Keeley le saisit par le bras pourl'obligeràluifaireface.Puiselles'adressasansménagementaulairdetàCaelen:—Vousdeux,vousêtesaussicoupablesquelui.Pourquoin'avez-vouspasinsistépourqu'ilremontedanssachambrequandvousl'avezvuarriver?—Cen'estplusunenfant,répliquaEwan,quiperdaitpatience.Arrêtezdeletraiterainsi.—Laquestionn'estpasdesavoirs'ilestencoreounonunenfant.C'estunequestionderèglement.Vous

êteslelaird,ilmesemble?Laisseriez-vousl'undevosguerriersmettreinutilementsasantéendanger?Etcomment justifieriez-vous samort, s'il succombaitdansunebataille?Endisantqu'iln'étaitplusunenfantqu'ilnefallaitpasgronder?—Ellemarqueunpoint,observaCaelen.J'ajoutequec'estmoiquiai traitéAlaricdechochotteparcequ'ilrestaitaulit.Ewan grimaça. Il détestaitmanifestement se faire réprimander par une femme.D'autant queMairin etCormaclesavaientrejoints...—Mairin,tunedevraispasresterdanslefroid,dit-il,d'unevoixsévère.Keeleyfaillitexploser.—Ah,c'estmagnifique!Vousvousenprenezàvotrefemme,quiestenpleineforme,maispasàvotrefrère,quirelèveàpeined'unegrossefièvreetquiseraencoreconvalescentplusieursjours!—QueDieumepréserve,marmonnaEwan.KeeleyreportasacolèresurAlaric:—Auriez-vousdécidédevoussuicider?N'avez-vousdoncaucunepréoccupationpourvotresanté?(Et,tapantdudoigtcontresontorse,elleajouta:)Sivousdéchirezvospointsdesuture,necomptezpassurmoipourlesrecoudre.Laplaies'infectera,maistantpis.Ceneseraplusmonproblème.Vousêtestropobtus!Alaricposasesdeuxmainssurlesépaulesdelajeunefemme.—Keeley,jevousenprie,calmez-vous.Jemesenstrèsbien,jevousassure.Mablessuremefaitencoreunpeusouffriret jesaisquejenesuistoujourspascomplètementguéri.Maisresterlajournéeentièredansmachambremerendfou.J'aibesoinderespirerunpeud'airfrais.—Eh bien, tu l'as eu, ton air frais !marmonnaEwan.À présent, remonte dans ta chambre, que nouspuissionsànotretourrespirerenpaix.IlsetournaversMairinetKeeley,avantdepoursuivre:—Vousaussi, rentrezà l'intérieur.Et toutdesuite.Quandj'aidonnémonaccordpourunevisitede laforteresse,jenevoulaispasparlerdetoutelacontréeenvironnante,Mairin.Mairinsouritavecsérénité.Ellenesemblaitnullementintimidéeparsonmari.—Etvous!s'exclamaKeeley,quis'enprenaitmaintenantàGannon,deboutàcôtéd'Alaric.N'était-cepasvotredevoirdesurveillerAlaricetdevousassurerqu'ilnecommettraitpasd'imprudences?Gannonouvritlabouche,maisaucunsonnesortitdesagorge.IlregardaEwan,commes'ilcherchaituneaide-quinevintpas.De toute façon,Keeley ne voulait plus perdre un instant.Reprenant le bras d'Alaric, elle entreprit del'attireràl'intérieurdelaforteresse.Alarics'esclaffa,maisselaissaentraînerjusquedansl'escalier.Duranttoutletrajetquimenaitjusqu'àsachambre,lajeunefemmel'admonestadeprendremieuxsoindelui.Ellevoulaitluifairecomprendrelagravitédesablessure.Cen'étaitpasunesimple«estafilade»,ainsiqu'ilsel'imaginait.Silablessureavaitétéplusprofonde,elleauraitpuatteindredesorganesvitaux.Etilauraitperdutellementdesangqu'ellen'auraitpaspulesauver.Ellelepoussadanslachambreetrefermalaportederrièreeux.— Vous êtes complètement fou, reprit-elle. Commençons par vous débarrasser de vos bottes. Je medemanded'ailleurscommentvousavezpulesenfiler.Vousavezdûsouffrirlemartyre!Alarics'assitauborddulitetluitenditunejambe.—Vousvoulezquejevouslesenlève?serécrialajeunefemme.Jamaisdelavie!Sivousavezréussiàlesmettre,vousréussirezbienàlesôter.—Quelqu'unvousa-t-ildéjàditquevousaviezlabouchelaplusdélicieusequisepuisserêver?—Je...quoi...?balbutiaKeeley,soudaindésarçonnée.Ilsourit,cequicreusaunepetitefossettedanssesjoues.Seigneur,ilétaitirrésistible!

—Approchez-vous,murmura-t-il.Keeleyétaitsitroubléequ'ellesesurpritàluiobéirsansbroncher.—Voilàquiestmieux,dit-il,quandelleseretrouvadeboutdevantlui.Maisapprochez-vousencore.Il luienlaçalataille,pourl'attirercontrelui, jusqu'àcequesabouchenesoitqu'àuncentimètredelapoitrinedelajeunefemme.Keeleysentitsestétonsdurciretpointersousl'étoffedesarobe.—Àprésent,vousnepouvezplusprétendrem'ignoreretfairecommesijen'étaispaslà,dit-il,suruntondereproche.Keeleyposasesmainssurlesépaulesd'Alaricetleregardaavecconsternation.—Est-cepourcelaquevousêtessortidevotrechambre?—C'étaitlaseulefaçondevousobligeràvousoccuperdenouveaudemoi.Vouscroyezquej'auraisétéenfilermesbottesjustepourrespirerunpeud'airfrais,alorsqu'ilgèledehors?Etvousaviezraison:j'aisouffertcommeundamnépourlespasseràmespieds.Keeleyéprouvaunpetitpincement aucœur.Elle secoua la têtepourchasser sonémotion,mais c'étaitpeineperdue.—Vousabusezdemapatience,guerrier.J'avaisdeschosesàfaire,cematin.Enparticulier, jevoulaisavoirunediscussionavecvotrefrèreaîné.EtMairintenaitàmemontrerlaforteresseetàmeprésenterauxmembresduclan.Ilestimportantquejeconnaisselesgensquejevaissoigner.—Votrepriorité,c'estmoi.Etjedétestenepassavoiroùvousêtes.Vousm'êtesdevenueaussiimportantequel'airquejerespire.Laprochainefois,nevousaventurezpassiloin.J'aipeurdefairen'importequoi,sijemeretrouvelivréàmoi-même.Keeleysoupira.—Jecroissurtoutquevousêtestropgâté.Personnenevousl'ajamaisdit?—Sansdoutequesi,maisjel'aioublié.—Jenevous lâcheraipas,guerrier.Du reste, jen'aipas lechoix, si jeveuxvousvoirguérir.Sinon,votreimpulsivitérisqueraitdevoustuer.Unelueurdetriomphes'allumadanslesyeuxd'Alaric.Saisissantd'unemainlanuquedelajeunefemme,ilapprochasonvisagedusien.—Jesaisquevousm'avezdemandédenepasvousembrasser,maisjepréfèrevousprévenirquejen'aijamaissuobéirauxordres.

13Alaric la sentit hésiter un bref instant, avant de capituler. Il en profita pour s'emparer de ses lèvres.D'abordavecbeaucoupdedouceur,puisplusfougueusement,jusqu'àenperdrelesouffle.Comme elle lui rendait son baiser avec la même ardeur, Alaric, enhardi par un sentiment de toute-puissance,luipénétraitlaboucheavecsalangue,commeilavaitenviedelefaireavecsonmembre.Saboucheétaitdélicieuse,maisilétaitconvaincuquesaféminitéleseraitdavantageencore.Ildevaitseressaisircoûtequecoûte,avantd'allongerlajeunefemmesurlelit,deretroussersesjupesetdelapossédersansautreformedeprocès.Maiscen'étaitpasunefaçondelatraiter.Elleméritaitunecour en bonne et due forme. Des baisers passionnés et de belles paroles. Elle méritait qu'il lui disecombienelleétaitbelle,etcombienillachérissait.Ilnevoulaitsurtoutpaslabrutaliser.Finalement,ils'obligeaàrenonceràseslèvres.— Si tu savais l'effet que tu me fais, murmura-t-il, d'une voix altérée, tant sa gorge serrée étaitdouloureuse.C'étaitcommes'ilavaitavalédesmorceauxdeverre.Etsonérectionlefaisaitpresqueautantsouffrirquesablessureauflanc.Cela ne lui ressemblait pas. Il était comme obsédé par cette femme. Il avait failli devenir fou, tout àl'heure,quandilavaitconstatéqu'ellenerevenaitpasdanslachambre.Ils'étaitalorslevé,transpirantetpestantàchaquemouvement,pourfairelescentpasdanslapièce,regarderparlafenêtreouécouterlesbruitsdanslecouloir,impatientderéentendrelespasdelajeunefemme.Auboutd'unmoment,nepouvantplussupporterd'attendre,ilétaitsortipourrespirerl'airfraisettenterdesereprendre.Cette femme l'émasculait. Elle le ravalait au rang d'un adolescent qui n'avait pas encore prouvé sabravoure.—Nousnepouvonspascontinuerainsi,murmura-t-elle.S'il teplaît,Alaric... J'ai troppeurdenepasêtrecapabledeterefuserquoiquecesoit.Ses prunelles pailletées d'or brillaient d'émotionsmêlées.Du regret.Dudésir.Et ses sourcils froncéstémoignaientdesaconsternation.Alaric souhaitait l'entendre avouer son attirance pour lui - mais pas ainsi, pas avec cette détresseperceptibledanssavoix.Ellesemblaitauborddeslarmes,etc'étaitentièrementsafaute.— Je suis désolé, Keeley, maismoi-même je neme sens pas capable deme priver du plaisir de tetoucher.Tues commeunedroguedont jeneparviendraispas àme sevrer. Je comprends trèsbien tesarguments, mais dès que nos regards se croisent, j'en oublie toute prudence et toute raison. Je saissimplementquesijenetecaressepas,ouquejenet'embrassepas,jedeviendraifou.Ellepritsonvisagedanssesmains,pourmieuxaccrochersonregard.—Tesparolesmevontdroitaucœur,Alaric.Maissiellesmecomblentdebonheur,ellesmesontaussidouloureusesàentendre.Carnotrehistoireestsansavenir.Tuneserasjamaisàmoi,pasplusquejeneseraiàtoi.Lavraiefolie,ceseraitdecontinuerànoustourmenterinutilement.— Je ne peux pas supporter l'idée que nous ne puissions pas être ensemble aumoins unmoment. Etmême,jem'yrefuse.Necrois-tupasquecelavaudratoujoursmieuxquerien?N'est-ilpaspréférabledegoûteraubonheur,neserait-cequ'untoutpetitpeu,plutôtquedegarderdesregretsjusqu'àlafindesavie?

—Non,c'estcommeuneplaie.Mieuxvautl'inciseretlanettoyertoutdesuite.Plusonattendra,etpluselledeviendradouloureuse.Ellesemblaitsiconvaincuequ'Alaricfermauninstantlesyeux.Ellecroyaitvraimentàcequ'elledisait.Dureste,sesargumentspouvaientsejustifier.Cependant, iln'étaitpasd'accord.Mieuxvalaitsavourerquelquesmiettesdefélicité,plutôtqueriendutout.Restaitàl'enconvaincre...Ilfinitparlarelâcher.— Je te rends ta liberté... pour aujourd'hui. Je ne voudrais pas te mettre au supplice. Encore moinst'attrister. Je préfère t'entendre me réprimander avec ton adorable petit sourire en coin. Souris-moi,Keeley.Seslèvresesquissèrentunsourire,maissonregarddemeuraitvoilédetristesse.PourAlaric,habituéàtoujoursobtenircequ'ilconvoitait,lasituationétaitentièrementnouvelle.Aucunefemmenes'étaitjamaisrefuséeàlui.MaisavecKeeley,c'étaitdifférent,etilétaitprêtàuserdetoutelapatiencepossiblepourlaconvaincre.Carilvoulaitqu'ellevienneàluidesonpropregré.Qu'ellecapituleenconnaissancedecause.—Maintenant,sinousavonsfinideparlerdechosesdontnousnedevrionspasparler,tuferaisbiendeterecoucher,dit-elleunpeusèchement,commesielleavaitdéjàsurmontésondésarroi.Maissesyeuxnementaientpas.Ilsnementaientjamais.—Oui,maguérisseuseadorée.Jevaismerecoucher.Toutecetteactivitém'aépuisé.Ils'allongeaavecprécautionsurledos,attentifànepastirersursablessure.Àpeineeut-ilposélatêtesurl'oreillerquesespaupières,lourdesdefatigue,sefermèrentd'elles-mêmes.—Dorsbien,dit-elle,luiembrassantlefront.Jeserailà,quandtuteréveilleras.Ilsourit.Etilselaissasombrerdanslesommeil,réconfortéparsapromessequiluiréchauffaitlecœur.

14SavoirKeeleytoujoursàproximitélerendaitfou.Ilavaitbeauveilleràseteniràdistancerespectueusedelajeunefemme,lesimplefaitdesetrouverdanslamêmepiècequ'elle,oudemangeràlamêmetable,danslagrandesalle,tenaitdusupplice.Sablessureavaitréclaméplusieursjoursavantdevraimentcicatriseret,durantcetemps,Keeleys'étaitingéniée, non sans talent, à ériger des barrières entre eux.Plus il se rétablissait, plus elle semontraitdistanteetmoinsellepassaitdetempsavecluidanssachambre.Lesderniersjours,c'estlacertitudequ'ilauraitplusdechancesdel'apercevoirensortantdesachambrequ'enyrestantquil'avaitstimulépourladernièreétapedesaguérison.Saplaie,toutefois,demeuraittrèssensible.Ets'ilavaitlemalheurdesetournertropbrusquement,ilétaitaussitôtpuniparuneatrocedouleurauflancdroit.MaisAlaricétaitbiendécidéàneplusresterclouédanssonlitàcontemplerleplafondalorsqu'unappétitféroceluidévoraitlesentrailles.Mêmemaintenant,assisàcôtédesesfrères,danslagrandesalle,ilneprêtaitqu'uneoreilledistraiteàleur conversation. Son regard était rivé sur le groupe de femmes qui s'étaient assemblées devant lacheminée,pourcoudrelalayettedestinéeaubébédeMairin.Dehors,laneigetombaitabondammentetcommençaitdéjààs'accumulerenunecouchequinecesseraitdes'épaissirdurant lanuit.Touslesmembresduclans'étaientréfugiésà l'intérieurdelaforteresseoudanslescottagesenvironnants.Leshommesbuvaientdelabièreenparlantdeguerres,d'allianceset,biensûr,deleurpireennemi,DuncanCameron.MaisAlaric n'écoutait rien de tout cela. Il regardait Keeley bavarder avec animation avec les autresfemmes.Detempsentemps,elleriaitetsesyeuxpétillaientdejoie.Ewan,assisjusteàcôtédelui,jetaitdesregardsdiscretsendirectiondeMairin.Alarics'enétaitaperçu,bien sûr, et à unmoment, quandMairin releva les yeux et accrocha le regard de sonmari,Alaric sesurpritàenvierEwan.L'amourmanifestequelesdeuxépouxéprouvaientl'unpourl'autreluiserrait lecœur,etpourunpeu,ilseseraitlevédetableetilauraittoutenvoyévalser.—Secoue-toi,Alaric!Alaric clignadesyeux, avant de fusillerCaelendu regard.Dequel droit son frère sepermettait-il del'interrompredanssesrêveries?—Quemeveux-tu?—Que tu nous écoutes plus attentivement. Nous parlons de choses sérieuses, et monsieur contempleKeeley!Le poing d'Alaric le démangeait, mais il préféra ne pas répondre à la provocation. Ewan fronça lessourcils.—Jedisaisquej'aireçuunelettredulairdMcDonald.Ilregrettequetonvoyagesesoitinterrompuetilsouhaitescellernotreallianceleplusvitepossible.IlcraintlesmanœuvresdeCameron.Tousnosautresvoisins, d'ailleurs, s'inquiètent à son propos, et réclament des alliances. Alaric sentit la nervosité legagner.—McDonaldneveutpasattendreleprintempspourorganiserlemariage,repritEwan.Maisilsaitqueje ne quitterai pas la forteresse tant que Mairin n'aura pas accouché et qu'elle ne se sera pascomplètementrétablie.IIproposedoncdevenirici,avecRionna,dèsquelebébédeMairinserané,pourquelacérémonieaitlieucheznous.Alaric s'obligea à ne pas répondre impulsivement. Il se concentra sur sa respiration, en évitant de

regarderendirectiondeKeeley.Sondevoirluidictaitderenonceràsesdésirs,dèslorsquel'avenirdeleurclanétaitenjeu.—Alaric?lepressaEwan.Qu'endis-tu?—Quesonidéedeveniriciestbonne,réponditAlaricd'untonneutre.Nousnepouvonspasprendrelerisquededésarmerlaforteresseenlaprivantdetoutuncontingentd'hommespourm'escorter.Nousavonsdéjàperduunedouzainedevaillantsguerriers.Ewanledévisageaitd'unairsongeur.—J'endéduisquetuestoujoursd'accordpourcemariage?—Jen'aijamaisditquoiquecesoitquiauraitputelaisserendouter.—Laquestionn'estpasdesavoircequetudisoupas,répliquaEwanendirigeantsonregardvers legroupedefemmes.Jesaisquetuladésires.Alaricgardalesyeuxfixésdroitdevantlui.—Cequejedésiren'apasd'importance.J'aidonnémonaccordàcemariageetjenereviendraipassurmaparole.—Alors, l'affaire est entendue, acquiesçaEwan.Jevais répondre àMcDonald et l'informerquenousserons heureux de le recevoir aussitôt que mon fils, ou ma fille, sera né. Ce qui veut dire que tuterminerasl'hiverici,avectanouvelleépouse.McDonaldauradéjàbienducouragedeserendrejusquecheznous.Ilestinutiledeprévoirletrajetderetourtantquetoutelaneigen'aurapasfondu.Laperspectived'épouserRionnaétaitdéjàassezpéniblecommecela.Maisvivre iciavecelleetvoirKeeleytouslesjoursluiparaissaittotalementinsupportable.—Jelarenverraichezelledèsqu'elleauramislebébédeMairinaumonde,murmuraEwan,commes'ilavaitdevinésespensées.Alaricsursautamalgrélui.—Non.Ellene repartirapasenpleinhiver. Je luiaipromisqu'ellenemanqueraitde riencheznous.Promets-moiqu'ellepourraresterchezlesMcCabeaussilongtempsqu'elleledésirera.Ewansoupira.—Oui,jetelepromets.— Tu te tortures inutilement, Alaric, maugréa Caelen. Couche avec cette fille et délivre-toi de tonobsession.LetempsquelesMcDonaldarrivent,tuaurasperdutoutdésirpourelle.Alaricsetournaverslui.—Non,Caelen.Jecroisque jenepourrai jamaismedélivrerdudésirquem'inspireKeeley.Et jeneveuxpasmeservird'elle.Elleméritetoutmonrespect.N'oubliepasqu'ellem'asauvélavie.Caelensecoualatêtemaisrenonçaàdiscuter.Ilterminasabièreets'absorbadanslacontemplationduplafond.A l'autre bout de la pièce, du côté des femmes,Mairin se leva pour semasser le dos. Elle semblaitfatiguée, ce qu'avait bien sûr remarqué Ewan, qui se leva à son tour pour rejoindre sa femme et luimurmurer quelques mots à l'oreille. Elle lui sourit, et l'instant d'après il l'entraînait vers l'escalierconduisantàleurchambre.Alaricsesaisitdesongobeletetlecontemplaquelquesinstantsavantdelereposersurlatable.L'idéed'avaleruneautregorgéedebièreluidonnaitsoudainlanausée.—Jen'aimepas tevoirdanscetétat,marmonnaCaelen.Vaplutôt t'amuseravecunefemmeprêteà tesatisfaireau lit.Decettemanière, tuoublieras taguérisseuse.Celane teressemblepas,de laisserunefemmeavoirautantd'emprisesurtoi.J'aidumalàtecomprendre.Alariceutunpauvresourire.—C'estparcequetun'asjamaisdésiréaucunefemmecommejedésireKeeley.

Et, voyant le visage de Caelen s'assombrir, Alaric regretta aussitôt ses paroles. La vérité, c'est queCaelens'étaitfollemententichéd'unefemme,quelquesannéesplustôt.Illuiavaitdéclarésonamouretauraitétéprêtàmourirpourelle.Maisellelesavaittrahis,luietsonclan,auprèsdeDuncanCameronetilsavaienttoutperdu:lepèredeCaelen,d'Alaricetd'Ewan,etmêmelajeuneépoused'Ewan.Depuis,Caelennes'étaitplusjamaisautoriséàtomberamoureux.Alaricn'étaitmêmepascertainqu'ilaitcouchéavecunefemmedepuiscedrame.Entoutcas,sic'étaitlecas,ilsemontraittrèsdiscretsurlaquestion.—Jesuisdésolé,s'excusaAlaric.Cen'étaitpastrèsdélicatdemapart.Caelenhaussalesépaules.—Bah,çan'apasd'importance!Maismeserreurspasséesdevraienttemettreengardecontreledangerdelaisserunefemmetemenerparleboutdunez.Alaricsoupira.—ToutesnesontpascommeElspeth.RegardeMairin.ElleestparfaitementloyaleetdévouéeàEwan.EtelleestuneexcellentemèrepourCrispen.—Mairinestuneexception,s'entêtaCaelen.Ewanaeubeaucoupdechancedetombersurelle.—SiMairinestuneexception,Keeleyenestuneautre.Songequ'ellen'apashésitéàmesecourir,sanssedemandersijen'étaispasunmonstredisposéàlaviolenteràlapremièreoccasion.Elleaétéenlevéedechez elle pour se retrouver aumilieud'étrangers, et pourtant cela ne l'empêchepasde continuer àmesoigneraveclemêmedévouement.CefutautourdeCaelendesoupirer.—Tuesmordu,c'estévident.Maisgardemonconseilentête,Alaric,etprendstesdistancesaveccetteguérisseuse.Tuserasmariéavantlafindel'hiver.Uneliaisonavecuneautrefemmen'apporteraitriendebon. Les temps sont difficiles et tu ne peux pas te permettre d'offenserMcDonald. N'oublie pas queDuncanestenembuscade.Nousavonsbeauêtre forts,nousn'arriveronspasànousdébarrasserde luiseuls.Mairinestprochedesonterme.Unefoisqu'elleauramisaumondel'héritierdeNeahmAllainn,nos efforts se concentreront surDuncan. Il est impératif de lui réglerdéfinitivement son compte.Maisnousauronsbesoindenosvoisinspourcela.Alaricplissaleslèvres.Caelenluifaisaitlaleçoncommes'illejugeaitinconscientdesréalités.—Tun'aspasbesoindemerappelernospriorités,Caelen.Jen'ignoreriendesenjeuxdemonmariageavecRionnaMcDonald.Etj'aiditquej'honoreraismaparole.Tum'insulteseninsinuantlecontraire.Caelenhochalatête.—Excuse-moi.Jeneremettraipluslesujetsurlatable.—Parfait,marmonnaAlaric.Ilterminasabièreavecunegrimace.Puis,incapablederésisteràlatentation,ildirigeasonregardversKeeley,justeaumomentoùcelle-citournaitlatêtedanssadirection.Leursregardss'accrochèrent.AlariclutdansceluideKeeleylemêmedésirquelui.Lamêmetristesse,également.Ildétournalatêteenétouffantunjuron.Puisillevasongobeletbienhaut,poursignifieràuneservantedevenirleluiremplir.Tout à coup, il avait décidé qu'il n'avait pas assez bu. S'il avalait quelques gobelets supplémentaires,peut-êtreparviendrait-ilàsedébarrasserdel'obsessionquilerongeait.Peut-êtrearriverait-ilàoublier.15Keeleyresserralalourdecapedefourruresursesépaulespourmarcherdanslaneigejusqu'aucottagedeMaddie.Cet après-midi, le soleil brillait dans un ciel sans nuages et le paysage blanchi par la neigerenvoyaitsesrayonsaveuglants.LelairdavaitordonnéàMairindenepassortirdelaforteresse-cequecelle-cin'avaitguèreapprécié.

EtKeeley,mêmesiellesesentaitvaguementdéloyaleenverssanouvelleamie,approuvaitlelairdsurcepoint précis. Ewan avait peur queMairin ne se blesse en glissant sur une plaque de glace. Le bébécommençaitàpeserdans sonventre,etMairinavaitdéjà failli tomberdeux foisdans lesescaliers,etCormacquilasuivaitavaiteu,lesdeuxfois,unepeurbleue.Àprésent,ellen'avaitplusledroitdemonteroudescendrelesescalierssansquelqu'unpourluitenirlebras.PuisqueMairin était confinée dans la forteresse,Keeley s'était portée volontaire pour cette excursiondanslaneige,afind'allerchercherMaddieetChristina.CarMairin,quis'ennuyaitferme,réclamaitleurprésence.Keeleysourittouteseule.Cen'étaitpasunecorvéequed'allerchercherlesdeuxautresfemmes,carelleappréciaitleurcompagnietoutautantqueMairin.Ellesavaientpasséensembleplusieurssoiréesdevantlefeuàcoudre,bavarderetsemoquerdubéguindeChristinapourCormac.Dieumerci,aucuned'ellesnesemblait s'être aperçue de l'intérêt - réciproque - queKeeley portait àAlaric.Ou alors, si elles s'enétaientaperçues,ellesavaienteulabonneidéeden'enriendire.Désormais,Cormactrouvaittoujoursunbonprétextepours'attarderlesoirdanslagrandesalle.Ilbuvaitdelabièreaveclesautreshommesetdiscutaitdel'entraînementdujour,maissonattentionétaitfocaliséesurChristina.CejeuduchatetdelasourisamusaitKeeley.Ilsnesemontraientpasaussidirectsqu'elle-mêmeavecAlaric,maiscen'étaitpeut-êtrepasplusmal.Qu'avaient-ilsgagné,Alaricetelle,às'avouerleurattirancemutuelle,sinonduchagrinetdelatristesse?LajeunefemmefrappaàlaportedeMaddie,puisellesoufflasursesdoigtsengourdisparlefroid.Laportes'ouvritàlavolée.—Keeley!s'exclamaMaddie.Nerestezpasdanslefroid.Entrezvitevousréchaufferdevantlefeu.—Merci,réponditKeeley,quicourutseplanterfaceàlacheminée.—Qu'est-cequivousamèneparunfroidpareil?Keeleysourit.—Mairinestd'unehumeurdechien.Lelairdluiainterditdemettrelenezdehors.Elleaimeraitquevousveniezluitenircompagnie,ainsiqueChristina.—Lelairdaeuraison,assuraMaddie.Aveclaglacequis'estformée,Mairinpourraittomberetfairedumalàsonbébé.— Je crois qu'elle en a conscience, ce qui ne l'empêche pas d'être furieuse. Accepteriez-vous de luirendrevisite,sivousn'êtespastropoccupée?— Mais bien sûr. Laissez-moi enfiler mes chaussures et mettre mon châle. En chemin, nous nousarrêteronschezChristinapourlaprendreavecnous.Deuxminutesplustard,lesdeuxfemmesaffrontaientlabiseglaciale.—Avez-voustoutcequ'ilvousfautpourpasserl'hiver?demandaMaddie,alorsqu'ellesapprochaientducottagedesparentsdeChristina.Keeleysecoualatête.—Non. Ilmemanqueencorequelquesherbes. Il faudraque jecreusedans laneigepour les récolter,maisjesaisoùchercher.Aveclefroid,beaucoupvonttombermaladesdelapoitrine.Surtoutlesenfants.Jeprépareunemplâtrequisoulagecegenred'affections.Ilnousserabientôttrèsutile.Maddiefronçalessourcils.—Quandcomptez-vousramassercesherbes?—Pastantqu'ilcontinueradeneigeretqu'ilyauraduvent.Pourl'instant,ilfaittropfroidpourcreuserlaterre.—Jem'endoute.N'oubliezpasdeprendreunoudeuxguerrierspourvousaccompagner.—Vousmefaitespenseraulairdetàsesdiktats!laraillaKeeley.

MaddiefrappaàlaportedeChristina.—Lelairdestunhommeavisé.Jenemesenspasinsultéed'êtrecomparéeàlui.Keeleyrouladesyeux.—Loindemoil'idéedevousinsulter!C'estChristinaelle-mêmequiouvrit.Sonvisages'éclairadèsqu'ellereconnutMaddieetKeeley.Àpeineluieurent-ellesexpliquélaraisondeleurvenuequeChristinasautasurl'occasionpours'échapper.— J'aime beaucoupmamère, expliqua-t-elle, alors que les trois femmes se pressaient maintenant endirection de la forteresse. Mais Dieu me pardonne, elle me rend folle. Je crois que je n'aurais passupportéderesteruneheuredeplusensacompagnie.Maddies'esclaffa.—Jepariequ'elleseplaintdumauvaistemps.—Elle seplaint toujours ! s'exclamaChristina, exaspérée.Quandcen'estpasdu temps, c'estdemonpère,oudemoi,ouden'importequoid'autre.J'étaissurlepointdehurler,quandvousavezfrappéàlaporte.Keeleyluiétreignitlebrasavecunsourireentendu.—Jesuiscertainequel'opportunitédevoirCormacnevousapaseffleurél'espritunseulinstant.ChristinarougitetMaddieéclataderire.—Croyez-vousqu'ilessaieraunjourdem'embrasser?demandaChristina,d'unairrêveur.Maddieplissaleslèvres.—S'iln'apasencoreessayé,àmonavistudevraisprendrelasituationenmainetl'embrasser,toi.Christinaécarquillalesyeux.—Oh,maisjenepourraijamais!Ceseraittroposé.Ilmeprendraitpour...pourune...Elleneterminapassaphrase,commesiellenepouvaitmêmepasprononcerlemotqu'elleavaitentête.—Àmonavis,ilseraittropstupéfaitpourpenseràunechosepareille,assuraMaddie.Certainshommesontbesoind'êtreencouragés.Etcen'estpasunpetitbaiservoléquifaitd'unefemmeunecatin...quoiquepuisseprêchertamère.—Jesuisd'accordavecMaddie,approuvaKeeley.—C'estvrai?fitChristina,alorsqu'ellesatteignaientlaforteresse.Avez-vousdéjàembrasséunhomme?(Et,baissantlavoixpourêtresûrequepersonned'autren'entendrait,elleajouta)Jeveuxdire...avez-vousprisl'initiative?—Oui, réponditKeeley. J'ai embrassé et j'ai été embrassée.Cela n'a rien d'inconvenant,Christina, àconditiondenepasaller trop loin.Cormacestquelqu'undebien. Ilnechercherapasàprofiterde lasituation. Dans le cas contraire, criez très fort et j'accourrai pour lui donner un coup de pied dansl'entrejambe.Maddieéclataencorederire,tandisqueChristinaparaissaitsichoquéequeKeeleysedemandasiellesavaienteuraisondelaconseiller.Maisellefutrassuréeenvoyantunelueursongeuses'allumerdansleregarddeChristina.Dèsqu'ellespénétrèrentdans lagrandesalle,Mairinbonditde sachaise,devant lacheminée,pour seporteràleurrencontre.—Dieusoitloué,vousvoilà!Jecommençaisàpérird'ennui.Toutlemonde,ici,vaqueàsesoccupationsetjemeretrouveseule,confinéeàl'intérieur.Parvenueàleurhauteur,elleremarqual'expressionétrangedeChristina.—Christina!Quet'arrive-t-il?—Elleconspire!s'esclaffaMaddie.Mairinhaussalessourcils.—Jeveux tout savoir !Venez-vousasseoirdevant le feuet racontez-moi tout. Jeveuxconspirer,moi

aussi.—Bien sûr,marmonnaKeeley. Et le laird sera furieux aprèsmoi de vous avoir entraînée dans cettehistoire.Mairinserassitavecungrandsourire.—Ewannetoucherapasàunseulcheveudevotretête,assura-t-elle,caressantsonventrerebondi.Dumoins,tantquemonbébéneserapasné.—Oui,c'estensuite,qu'ilfaudravousinquiéter,ironisaMaddie.Keeleyperdittouteenviedesourire,caraprèslanaissancedubébédeMairin,sonavenirluiparaissaiteneffetpourlemoinsincertain.Ellenesavaitmêmepassiellepourraitrécupérersoncottage.Quelqu'un,voyantqu'ilétaitabandonné,auraitpeut-êtredécidédesel'approprier.EtKeeleyn'auraitaucunmoyendefairevaloirsesdroits.Lecottageneluiappartenaitpasenpropre.C'étaitunepossessiondesMcDonald.—Avons-nousditquelquechosedemal?s'inquiétasoudainMairin.Vousparaissezsi...triste.Keeleys'obligeaàsourire.—Cen'estrien.Jepensaisjusteàcequim'attendraitaprèslanaissancedevotrebébé.Sescompagnesparurentchoquéesdesaréponse.—Vousnecroyezquandmêmepasquenousirionsvousrenvoyer?s'exclamaMaddie.MairinsepenchapourétreindrelamaindeKeeley.—Ewannelepermettraitpas.Vouslesavez,n'est-cepas?— Il n'empêche que j'ignore tout demon avenir, objecta tranquillementKeeley. Je n'aurai sans doutemêmeplusdetoitoùretournerm'abriter.— Vous n'aimez pas vivre ici ? demanda Christina. Keeley hésita. Une fois qu'Alaric aurait épouséRionna, il lui serait peut-être moins douloureux de rester ici que de retourner sur les terres desMcDonald,oùelleseraitsansdouteappeléeauchevetdeRionnapourl'aideràmettresonpremierenfantaumonde.Cetteperspectiveluiétaittoutsimplementinsupportable.D'unautrecôté,restericil'obligeraitàcôtoyerAlaricetRionnachaque foisqu'ilsviendraientenvisitechez lesMcCabe.Ledilemmeétaitinsoluble:Keeleyétaitassuréedesouffrirquellequesoitlasolutionchoisie.— Si, j'aime vivre ici, répondit-elle. Je n'avais pas mesuré l'étendue de ma solitude, avant de vousrencontreretd'avoirleplaisirdeparleretderireavecvous.—Keeley, si vous nous racontiez ce qui vous est arrivé ? suggéraMairin. Je sais que cela ne nousregardepas,maisnoussommestrèsétonnéesquevousneportiezpluslenomdesMcDonald.Vousnousavezmêmeditquevotreclanvousavaittournéledos.Pourquoi?—C'estunehonte,commentaMaddie.Lafamille,c'est lafamille.Et leclan,c'estcommeunefamille.S'ilsnesontpasderrièrevous,quivoussoutiendra?—Oui,qui?murmuraKeeley,d'unevoixtriste.Elle s'adossa à son siège et prit une profonde inspiration. Elle était surprise d'éprouver encore de lacolèreaprèstantd'années.Maissonressentimentétaitintactetnecherchaitqu'às'épancher.—Jesuisuneamied'enfancedeRionnaMcDonald,l'uniqueenfantdulaird,commença-t-elle.Mairinsursauta.—LaRionnad'Alaric?—Oui,laRionnad'Alaric,acquiesçaKeeley,avecuneffortdevolontépournepastressailliràcesmots.J'avaisdoncl'habitudedevoirsouventlelairdetladyMcDonald.Ilsmeconsidéraientpresquecommeleurfille.Engrandissant,Rionnaetmoi,nousavonscommencéàprendredesformesplusféminines.Etlelairds'estmisàmeregarder.J'étaistrèsmalàl'aise.—Queldébauché!marmonnaMaddie.—J'étaissimalàl'aisequej'essayaislepluspossibledel'éviteretquejepassaisdoncmoinsdetemps

avecRionna.Cependant,unjouroùj'étaisvenuelachercheràlaforteresse,lelairdm'apriseàpartpourmediredeschoseshorriblesetm'embrasser.Jel'aimenacédecrier,maisilm'aréponduquepersonneneviendraitàmonsecours.Ilétaitlairdetilobtenaittoujourstoutcequ'ildésirait.J'étaisterrifiée,parcequejesavaisqu'ildisaitvrai.D'ailleurs,probablementm'aurait-ilviolée,siladyMcDonaldn'étaitpasarrivéesurcesentrefaites.—Oh,monDieu,Keeley!s'exclamaMairin,horrifiée.—Jepensaisavoirconnulepirequandlelairdm'avaitembrassée.Maisjemetrompais.Lepireétaitàvenir.LadyMcDonaldm'a traitéede catin et ellem'a accuséed'avoirvoulu séduire sonmari. J'ai étébannieduclanavecinterdictiondem'approcherdelaforteresse.Dansmonmalheur,j'aiquandmêmeeulachancequ'ilsm'autorisentàoccuperunpetitcottageisolé.Maiscen'estpasdrôle,quandonestjeune,d'êtrecondamnéeàuneexistencesolitaire.—C'esthonteux!serécriaChristina.Commentont-ilspuseconduireainsiavecvous?LestroisfemmesétaientsichoquéesqueleurréactionmitdubaumeaucœurdeKeeley.Ilétaitagréabledetomber,pourunefois,surdesgensquiprenaientsonparti.—Lepluspénible,cefutd'avoirperdul'amitiédeRionna,reprit-elle.Audébut,j'ignoraissiellecroyaitcequ'onracontaitsurmoi.Etpuis,ladyMcDonaldestmorteetRionnan'afaitaucuneffortpourmevoirnipourmerappelerdansleclan.J'aialorscomprisquetoutlemondes'étaitconvaincudelaversiondeladyMcDonald.Mairinsereleva,pourdonnerl'accoladeàKeeleyetlapressercontresoncœur.—Vousneretournerezpaslà-bas.VousresterezaveclesMcCabe.Cen'estpasdansl'habitudedenotreclandebannirunejeunefillevictimedelaconcupiscenced'unadulte.LelairdMcDonaldestvenunousrendrevisiteilyaquelquesmois.Sij'avaisconnucettehistoireàcemoment-là,jeluiauraiscrachéauvisage!KeeleyéclataderireensereprésentantMairincrachantsurlelaird.Elleriaitsifortquesescompagnesnetardèrentpasàl'imiter.Ellesessuyèrentleurslarmesetreprirentleurrespiration,avantd'éclaterànouveauderiredevantl'airfarouchedeMairin.—Vousnepouvezpassavoirlebienqueçamefait,confessaKeeley.Pourtoutvousavouer,jen'avaisjamaisracontémadisgrâceàpersonne.—Vousnevousêtespasdisgraciée,corrigeaMairin.ToutelahonteenrevientaulairdMcDonald.Maddiehochalatêteensigned'assentiment,tandisqueChristinaparaissaittoujourssouslechocdecequ'ellevenaitd'apprendre.—Quoiqu'ilensoit,vousresterezici, insistaMairin.Vousn'êtespeut-êtrepasnéeMcCabe,maisuneMcCabevousdeviendrez.Detoutefaçon,nousavonsbesoind'uneguérisseuse.Etpersonne,cheznous,nevoustraiteracommevousonttraitéelesMcDonald.Notrelairdnetoléreraitpasunetelleinjustice.— J'ai ruminéma colère pendant des années, avouaKeeley. C'est très agréable, de pouvoir enfin enparleràquelqu'un.Etmercidenepasm'avoirjugée.—Leshommessontdesporcs!lâchaChristina.Keeley,MairinetMaddiesetournèrentverselleavecsurprise.Christinaétaitrestéesilencieusejusque-là,maisàprésentsesyeuxbrillaientdecolère.—Jemedemandebienpourquoinouslestolérons,ajouta-t-elle.Mairinprotesta.—Ilsnesontpastousdesporcs!TonCormacalatêtesurlesépaules,parexemple.—Sic'estlecas,alorspourquoin'a-t-iltoujourspasessayédem'embrasser?Maddieritdeboncœur.—Tuvoisbienqu'il te fautprendre lesdevantset l'embrasser toi-même.Cepauvregarçondoitavoir

peurdefaireunmauvaispasetdet'effrayer.Leshommesontparfoisdesréactionsbizarres.—NelaissonspasMaddiesemettreàparlerdeshommes,protestaMairin.Sinon,ellevaappelerBerthaetellest'écorcherontlesoreillesavectoutcequ'ellessavent!—N'empêche, lui rétorquaMaddie d'un air suffisant.Vous et le laird, vous avez bien profité de nosconseils!Mairinpiquaunfardets'éventalevisageavecsamain.—Laconversationneportaitpassurmoi.Christina,jesuisd'accordavecMaddie.TudevraisembrasserCormac,pourvoircommentilréagit.Ces histoires de baisers et de premiers pas commençaient à peser à Keeley. Voir Christina aussiamoureuseetaussipleinedefoienl'avenirlarenvoyaitàsapropresolitude.—Maisquand?demandafinalementChristina.Iln'estpasquestionquequelqu'unpuissenousvoir.Sijamaismamèrel'apprenait,jen'osepenseràsaréaction.—Si tonbaisera l'effetque tuespères, tunedépendrasplus très longtempsde laresponsabilitéde tamère,assuraMaddie,avecunsourire.CelapourraitinciterCormacàtedemanderenmariage.Unelueurd'espoirs'allumadanslesprunellesdeChristina.—Vouscroyez?KeeleyetMairins'échangèrentunregard,avantdesourireàChristina.—J'ensuispersuadée,acquiesçaMairin.Ilestclairqu'ilalebéguinpourtoi.Faispreuved'audace.Etsituessuiesunerebuffade,jeluimontreraidequelboisjemechauffe.Maddie éclata de rire etKeeley esquissa un sourire tandis queChristina, très excitée, s'agitait sur sachaise.—Çanemedittoujourspasquand.Ilfautquecesoitunmomenttrèsprivé.—Cesoir,quandleshommesaurontfinideboireleurbière,jesuggéreraiqueCormacteraccompagnejusquecheztoi,proposaMairin.Tudevraisavoirletempsdetejeteràsatêteenveillantànepastefaireremarquerdesguerriersquimonterontlagarde.Etpourjustifiertaprésenceicicesoir,jediraiàtamèrequejet'aiinvitéeàdînerdanslagrandesalleavecmoi.—Oh,jesuissinerveuse!s'exclamaChristina.—Essaiedetecalmer,luiconseillaMaddie.Cormacseradéjàbienasseznerveuxpourdeux,quandilapprendraqu'ildevrat'escorterjusqu'àcheztoi.—Onvousentendriredepuislacour,intervintsoudainEwan,depuisleseuildelapièce.Meshommescraignentquevousnecomplotiezcontreeux.Mairingratifiasonépouxd'unsourireespiègle.—C'esttoutàfaitjuste.Tupeuxlesprévenir,d'ailleurs.Ewans'esclaffa.—Jenesuispasfou.Sijeleurdiscela,ilsvonttousallersecacherdansdestrousdelapins.Maisj'osecroirequetuplaisantais,Mairin?Jenepermettraispasquetudétournesmeshommesdeleurdevoir.—Biensûrquenon,réponditMairin,d'unevoixdouce.Ewanluijetaunregardsoupçonneux,avantdetournerlestalonsetderegagnerlacour.Dèsqu'ileutdisparu,lesquatrefemmeséclatèrentànouveauderire.

16Ledînerétaittoujourstrèsanimé,cartoutleclanmangeaitenmêmetempsdanslagrandesalle.Unfeucrépitaitdans l'immensecheminéeet toutes les fenêtres étaientoccultéespard'épaisses fourrurespourgarderlapièceauchaud.KeeleyétaitassiseàlagauchedeMairinetChristinaàlagauchedeKeeley.Cormacavaitétéplacéàdesseinen facedeChristina.Voircesdeux-làéviteravec soinde se regarderen face, touten s'épiantmutuellementétaitunspectacleassezréjouissant.Cormac était encadré parAlaric etCaelen.Malgré tous ses efforts,Keeley ne pouvait pas davantages'empêcher de regarder dans la direction d'Alaric. Ce soir, Ewan discutait avec lui de son prochainmariage,etlajeunefemmedevaitfaireappelàtoutesavolontépourrestersagementassise,unsourireplaquésurseslèvres,commesicetteconversationl'indifférait.Maissagorgelabrûlait.Etsapoitrineétaitoppressée.Keeley semoquait éperdument des alliances à conclure pour éviter une guerre. Elle ne voyait qu'unechose:AlaricenépouseraituneautreetilpartiraitbientôthabiterchezlesMcDonald.Lanourriture,d'habitudesigoûteuse,luiparaissaitsanssaveur.Keeleymangeaitquandmême,parcequ'iln'yavaitriend'autreàfaire.Etellesouriait.Unebouchée,unsourire.Unebouchée,unsourire...Ellepoussaunsoupirlas.Elleauraitaiméquelerepassoitdéjàterminépourpouvoirseretirerdanssachambreets'abîmerdansunsommeildequelquesheures.Ellerisquaunautreregardendirectiond'Alaricetfaillittressaillirenconstatantqu'illaregardaitaussi.Iln'essayamêmepasdes'encacher.Maisilnesouriaitpas.Keeleypouvaitlire,danssesprunelles,lesmêmes émotions qu'elle ressentait.Aussi ne détourna-t-elle pas la tête. S'il était assez brave pour luidonneràvoirlestourmentsquil'accablaient,alorsellepouvaitbienluiretournerlapareille.Mairins'éclaircitlavoix,tirantsoudainKeeleydesarêverie.—Ledîners'achève,dit-elle.IlesttempspourChristinaderentrerchezelle.Samèredoitcommenceràs'inquiéter,aveccetemps.EllesetournaversCormacetlegratifiadesonplusravissantsourire.—Cormac,seriez-vousassezaimablepourraccompagnerChristina?Jenevoudraispasqu'elleaffronteseulelefroid.Cormac semblait avoir avalé sa langue.Aprèsun furtif regard endirectiondeChristina, il se levadetable.—Biensûr,ladyMcCabe...Et il contourna la table,pourveniroffrir sonbrasàChristina, sous le regardsuspicieuxd'EwanetdeCaelen.ToutlemondeavaitfaitsilencepourregarderCormacaider,assezgauchement,Christinaàselever.Dèsqu'ilseurentquittélasalle,Ewanpointasonregardsursafemme.—Quemijotes-tuencore?MairinéchangeaunregarddeconspiratriceavecKeeleyavantdesourireàsonmari.— Tu aurais préféré que Christina rentre toute seule chez elle ? Au risque de tomber sur la glace ?Qu'aurions-nousétéraconteràsamère?Quenotrelairdenvoiedesjeunesfillesaffronterlesélémentssanslamoindreprotection?Ewanlevalesyeuxauplafond.—Pourquoiai-jeétéassezbêtepourposercettequestion?murmura-t-il.

—Allons,monchermari,ressers-toidelabièreetraconte-moitajournée!luisuggéraMairin,avecunsouriredepureinnocence.—Tusaistrèsbiencomments'estpasséemajournée.Jeviensjustementdelaraconter.—As-tu réponduau lairdMcDonaldque tuétaisd'accordavecsaproposition?demandaCaelen, lesyeuxrivéssurKeeley.Lajeunefemmerefusaderéagiràlaprovocation.—Oui.Maisjen'attendspasderéponseavantquelaneigeaitcessédetomber.—Alors,ildevraitarrivericidansmoinsdetroismois.AvecRionna.—Caelen!Alaricn'avaitprononcéqueceseulmot,maissontonétaitaussiglacialquelevent,àl'extérieur.C'étaitunemiseengardepouravertirsonfrèredeneplussemêlerdecequineleregardaitpas,maisKeeleynesesentitpasrassérénéepourautant.Caelen cherchait à l'intimider. Parce qu'il s'était rendu compte de l'attirance - réciproque - qu'ellenourrissaitpourAlaric.Keeleyauraitvoulusecachersouslatable,tantelleavaithonte.Au lieudequoi, elle redressa fièrement lementonetelle toisaCaelencommes'iln'étaitqu'un insectequ'elles'apprêtaitàécraser.Cetteimageluiredonnaaussitôtdel'assurance.Caelenhaussalessourcils.Ilparaissaitsurprisparsonaudace.Puisilesquissaunsourire-etcettefois,c'estKeeleyquifutsurprisedesaréaction-,avantdes'emparerdesongobeletetdel'ignorer.La jeune femme s'apprêtait à quitter à son tour la table, quandCormac revint, l'air hébété.Keeley setournaversMairin,quisemblaitravie.Ellepassamêmeunemainsouslatablepourluiétreindrelamain.Cormac se laissa lourdement retomber sur sa chaise. Il avait pris des couleurs et ses cheveux étaientdécoiffés.LesouriredeMairins'élargit.EwangrommelaquelquechosetandisqueCaelenroulaitdesyeux.Keeleysentitsesjouess'empourprerquandAlariclaregarda.—Laird,ditCormac,d'unevoixgrave,j'auraisbesoindevousentretenird'unsujetd'importance.Ewanjetaunregardrésignéàsafemme,avantdehocherlatête.—Jet'écoute,Cormac.Cormac s’éclaircit la voix et dévisagea nerveusement ceux qui étaient encore à table. La plupart desguerriers étaient retournésdans leursquartiers,maisGannon,Alaric,Caelen,Mairin etKeeley étaienttoujourslà.—JevoudraisvotreautorisationpourdemanderChristinaenmariage,lâcha-t-il.Mairinfaillitbondirdejoie.Keeleyeutelle-mêmebeaucoupdemalàretenirsonsourire,envoyantlastupéfactiondesautreshommes.—Jevois,fitEwan.As-tubienréfléchi,cependant?Es-tusûrquec'estbienellequetuveuxépouser?Etes-tusûrqu'elleveuillet'épouser?—Oui.Maisellem'aditquejenepourraisplusl'embrassertantquenousneserionspasofficiellementfiancés.Acesmots,KeeleyetMairinnepurents'empêcherdepouffer.—Dieunouspréservedesfemmesquijouentlesmarieuses,marmonnaEwan.Bon,c'estd'accord.Tuasmapermissionpourparleràsonpère,Cormac.Maisquecelanetedétournepasdetestâches.N'oubliepasquetudoisveillersurlasécuritédemafemme.Sijetesurprendsuneautrefoisàtelaisserdistraire,jetecongédie.—Biensûr,laird.Maloyautévousestacquise.Ainsiqu'àvotreépouse.

—Alors,préparetondiscourspoursonpère.Nousferonsvenirunprêtredèsqueletempslepermettra.Cormacseretintdesourire,maislesoulagementetlajoieselisaientdanssesyeux.Keeleyenéprouvaun pincement au cœur - et même unemorsure de jalousie.Mais elle était sincèrement heureuse pourChristina.Mairin,quantàelle,étaittoujourstrèsexcitée.EllesepenchaversKeeley:—IlfaudraquedemainnousinterrogionsChristinasurcebaiser,chuchota-t-elle.Keeleyplaquaunemainsursabouche,pours'empêcherdepouffer.—Çaadûêtrelebaiserdusiècle,chuchota-t-elleenretour.—J'aimoi-mêmegoûtéàquelquesbaisersmémorables,réponditMairin,avecunregardendirectiondesonmari.Keeley faillit lui répondre qu'elle aussi, elle avait connu ce bonheur, toutefois elle préféra garder lesilence. C'est alors qu'elle s'aperçut qu'Alaric la couvait des yeux. Sentant son pouls s'emballer, elledétournaleregardetselevadetable.—Avec votre permission, laird, j'aimeraisme retirer dansma chambre, dit-elle à Ewan. Jeme sensfatiguée.EwanhochalatêteetpoursuivitsaconversationavecAlaric.KeeleysetournaalorsversMairin.—Jevousreverraidemainmatin.Bonnenuit.Mairinlagratifiad'unregarddesympathiequiprouvaitqu'ellen'étaitpasindifférenteàcequisepassaitentreelleetAlaric.Keeleysedirigeaversl'escalier,bienconscientequ'Alaricnelaquittaitpasdesyeux-ellesentaitsonregard peser sur chacun de ses pas.Les autres aussi, devaient l'observer. Elle s'en voulait, à présent,d'avoirépiéAlaricduranttoutlerepas.Iln'yauraitplusdésormaisquelessourdsetlesaveuglespourn'avoirrienremarqué...Lamontéedel'escalierluiparutinterminable.Sachambreétaitglaciale,etelles'empressaderanimerlefeuquis'étaitpresqueentièrementéteint.Quandlesnouvellesbûchescrépitèrent,Keeleyrestaunmomentdevantl'âtre,àseréchaufferlesmains.Puiselleenfilasachemisedenuitetseglissasouslesfourruresquirecouvraientsonlit.Laseulesourcedelumièredelapièceétaitprodiguéeparlesflammesorangéesquiprojetaientdesombresmouvantessurlesmurs,rappelantàKeeleysasolitude.Dehors, le vent gémissait tel un vieil homme en train de se lamenter sur sondestin. Si seulement toutpouvaitêtreaussisimplequedevolerunbaiser!Siseulementellepouvaitprendreleschosesenmain,comme Christina ! Keeley eut un sourire triste. Hélas, un baiser ne pouvait pas résoudre tous sesproblèmes ! Et si Christina et l'homme qu'elle aimait rêvaient à présent d'un avenir commun,Keeley,hélas, ne pouvait pas envisager le futur avecAlaric. Tout ce qu'elle pouvait espérer, c'était savourerquelquesprécieuxmomentsdanssesbras.Ceconstatfitnaîtreenelleuneidéedesplusaudacieuses:etsielles'offraitàAlaric?Aprèstout,qu'est-cequecelachangeraitàsonexistence,dèslorsquetoutlemondelaprenaitdéjàpourunefemmesansvertu?Elle secoua la tête.Non, c'était impossible.Cependant, elle ne trouvait pas d'argument pour étayer cerefus.EllenepouvaitpasprétexterqueRionnaétaitsonamie:lesvraisamisnevoustournaientpasledosquandvousétiezendifficulté.Detoutefaçon,personnen'ensauraitjamaisrien.Justeunenuit...Pourquoipas?Alaric ladésirait. Il le luiavaitassezfaitcomprendre,etKeeleyledésiraitelleaussi,si fortquec'en

étaitpresquedouloureux.Elle savait qu'elle aurait beaucoup de mal à se séparer de lui. Elle souffrirait le martyre.Mais ellecommençait à penser qu'il avait raison.Mieux valait goûter au bonheur, ne serait-ce que furtivement,plutôtquedenourrirdesregretstoutlerestantdesesjours.EtKeeleyn'avaitaucuneenvied'êtreenterréevierge.Jusqu'ici, elle avait préservé sa vertu, preuve, à ses yeux, qu'elle n'était pas la catin qu'on prétendait.Maissonabstinenceneluiavaitpasrendujusticepourautant.Personnenes'étaitdressépourladéfendre.Personneneladéfendraitjamais,d'ailleurs.Elleseraitlaseuleàconnaîtrelavérité.Malheureusement,songea-t-elle,amère,cen'estpas lavéritéquivousréchauffait,par les froidesnuitsd'hiver.Elle faillit éclater de rire en constatant avec quelle implacable logique elle tentait de justifier le donqu'elles'apprêtaitàfaireàsonguerrierencédantaudésiranimalqu'illuiinspirait.Son guerrier... Il resterait toujours son guerrier - mais uniquement dans son cœur. Aucun autre neprendraitsaplace.Jamais.—Cessede toujours toutdramatiser,Keeley, semorigéna-t-elle.Sinon, tuvas finirpar te jeterpar lafenêtre.Aulieuderêver,elleferaitmieuxdesemontrerréalisteetdedécidercequiluiparaissaitacceptable.Parexemple,pourunefois,elledevaitplacersespropresdésirsau-dessusdeceuxdesautres.Carsielleneveillaitpasunpeuàsonbonheur,personnenes'enchargeraitàsaplace.Unenuitdanslesbrasd'Alaric...Àprésentque l'idéeavaitgermédans sa tête, ellen'arrivaitplus à l'enchasser.La tentationétait tropgrande.Tropenvahissante.AvantAlaric, personnene l'avait seulement embrassée - à part, bien sûr, la brutale agressiondu lairdMcDonald, qu'elle ne considérait pas comme un vrai baiser. Un baiser se donnait, or le laird s'étaitcontentédeprendre.Ellen'avaitpasunseulinstantconsentiàsongesteméprisable.Lajeunefemmeplongeasatêtedanssesmains.Il était trop tard, à présent, pour fairemachine arrière. Son idée s'enracinait dans son esprit, jusqu'àoccupertoutelaplace.Ellenesupporteraitpasd'attendreunjourdeplus.Cettenuit,toutseraitconsommé.

17Alariccontemplaitlanuitparlafenêtredesachambre.Lalunebrillaithautdanslecieletsesrayonssereflétaient sur lepaysage recouvertdeneige.A l'arrière-plan, le lochbrillait commeunmiroirdepurargent.C'étaitunspectacleapaisantetpourtant,Alaricbouillaitintérieurement.Les paroles de Caelen résonnaient avec insistance dans ses oreilles, s'insinuant à chaque instant plusprofondémentdanssonesprit.«Prends-la.Coucheavecelleetdélivre-toidecetteobsession!»...Maisc'était impossible.Carcequ'il ressentaitpourKeeleyn'étaitpasun simpledésir charnel.C'étaitautre chose,deplus complexeetd'entièrementnouveaupour lui, qu'il n'aurait pas sunommer. Il avaitl'impressiondesetrouveraubordd'unprécipiceeffrayantetcependant,d'êtretentédesejeterdedansencriantdebonheur.IldésiraitKeeley,biensûr,maisilserefusaitàprendrecequineluiétaitpasaccordédepleingré.Iln'avaitaucuneenviedecauserduchagrinàlajeunefemme.Encoremoinsdelafairesouffrir.Lebruitdelaportedesachambrequis'ouvraitlefitseretourner,lessourcilsfroncés,prêtàvitupérercontrel'intrusquisepermettaitd'entrersansfrapper.MaisquandilvitKeeleysetenir,hésitante,surleseuil,ilenoubliapresquederespirer.—Jecroyaisquetuétaiscouché,murmura-t-elle,d'unetoutepetitevoix.Ilesttard.Noussommesmontésdansnoschambresdepuisdéjàunbonmoment.—Etpourtant,noussommestoujoursdebout,incapablesl'unetl'autrededormir.Qu'enpenses-tu,Keeley?Allons-nouscontinuerencorelongtempsànousrefusercequenousdésironssiforttouslesdeux?—Non...Alaric se figea, et seul legémissementduvent troublait le silencede la chambre.Keeley frissonnaetserrasesbrasautourd'elle.Elleparaissaitsivulnérablequel'instinctd'Alaricluicriaitdevoleràsonsecourspourlaprotéger.Ilrabattitlacouverturedelafenêtreavantderejoindrelajeunefemmepourlaprendredanssesbras.— Viens sur le lit, dit-il. Comme cela, tu pourras t'envelopper dans une fourrure, pendant que jeranimerailefeu.Il l'entraîna doucement vers sa couche. Elle s'assit au bord, tendue et nerveuse, pendant qu'Alaric ladrapaitd'unefourrure.Puis,incapablederésisteràlatentation,illuiembrassalefrontetcaressaseslonguestresses.Maisilnevoulait pas encoregoûter à ses lèvres.S'il commençait, il nepourrait plus s'arrêter et elle aurait tropfroid.D'unemain tremblante, il remit des bûches dans le feu. Puis il se frotta lesmains devant l'âtre, dansl'espoirdevaincresesfrissons-envain.Iltremblaitdel'intérieuretlacraintedefaireunmauvaisgesteleparalysait.Ilfinitparseretourner.Keeleyn'avaitpasbougé.Elleleregardait.Alaricvints'agenouillerdevantelle.—Es-tusûredetoi,Keeley?Elleluicaressalajoue.—J'aienviedetoi,Alaric.Etjeneveuxplusm'aveuglerdavantage.Jesaisquetondestinestd'épouserl'héritièreduclanMcDonaldpourdevenirunjourleurlaird.C'estunenobledestinée,etjenechercheraipasàt'endétourner.Maisjeteveuxunenuitdansmesbras.Pourquejepuissem'ensouvenirquandtuneseraspluslà.Alaricluipritlamain,laportaàseslèvresetenembrassachaquedoigt.

—Moiaussi,j'aienviedetoi,Keeley.Àensouffrir.Etjevoudraisimprimertonsouvenirdansmachairpournejamaisl'oublier,mêmelorsquejeseraidevenuunvieillard.Ellesourit,maissesyeuxétaienttristes.—Alors,accorde-moicettenuit,etfaisonstouslesdeuxlepleindesouvenirs.—Oui,Keeley.Jevaistefairel'amour...Ilvoulutserelever,maisellel'arrêta.—Jevoudraistedirequelquechose,avantd'allerplusloin.Ellesemblaittoutàcoupplusnerveuse.Alaricluicaressalescheveuxd'ungesteapaisant.—Parle.Jet'écoute.Elle détourna brièvement la tête, avant d'oser regarder Alaric en face. Puis elle fui révéla son lourdsecret.—C'est importantque tu lesaches... J'aiétébannieduclanMcDonald.C'étaitmafamille.JesuisnéeMcDonald.Alaric,désarçonné,fronçalessourcils.UneMcDonald?Ilnes'étaitpasposélaquestiondesavoiroùilétaitarrivé,aprèssablessure.Ilétaittropcomateux,àl'époque.Etsesfrèresn'avaientrienditàcesujet.Elleavaitétébannieduclan?Pourquoi?sedemanda-t-il,sentantlacolèrelegagnersoudain.—Ques'est-ilpassé,Keeley.?demanda-t-il,luicaressantlajoue.Pourquoitafamillet'a-t-elletournéledos?—Lelairdmefaisaitdesavances,quandjen’étaisencorequ'unejeunefilleinnocente.Unjour,ilatentédeme violer. Sa femme est arrivée et ellem'a traitée de catin. J'ai été renvoyée pour avoir tenté deséduiresonmari.Alaricenrestaunmomentsansvoix.Illaissaretombersamain.—DouxJésus!murmura-t-ilfinalement.Ilserralespoingsens'imaginantsaKeeley-uneKeeleybeaucoupplusjeuneetplusvulnérable-essayantd'échapperauxgriffesd'unhommequivoulaitabuserd'elle.Ilenavaitlanausée.Etilétaitfurieux.—C'étaitfaux,murmura-t-elle.—Biensûr,quec'étaitfaux!s'exclama-t-il.Et,luicaressantdenouveaulescheveux,ilajouta:J'espèrequetun'imaginespasque j'aiepucroireunseul instantà taculpabilité?Jesuisoutréqu'on t'aitaussiinjustementtraitéeetquetuaiesdûpayerpourlespéchésdulaird.Sondevoirestdeprotégersonclan.Ildoitmériterd'enêtrelechef.S'enprendreàunejeunefilleinnocenteestuncrimeimpardonnable.Keeley ferma les yeux.Son soulagement se lisait sur ses traits, soudainplus détendus.Alaric avait lecœur serré à l'idée de ce qu'elle avait enduré. Mais il avait surtout envie de se précipiter chez lesMcDonaldpourfrapperlelairdjusqu'àcequ'ilnesoitpluscapabledecoucheravecaucunefemme.Direqu'ilavaitdînéavecluietl'avaitaccueillisursesterrescommesonfuturbeau-père!Malheureusement,soncrimeavaitbeau le révulser, iln'ypouvait rienchanger. Il luiétait impossiblede renonceràcetteallianceetdefairedeMcDonaldleurennemi.Queleffroyabledilemme!Cependant,iln'avaitpourl'instantaucunmoyendepesersurlesévénements.Aussipréféra-t-ilreportersonattentionsurl'uniqueélémentqu'ilpouvaitcontrôler.IlcaressalajouedeKeeley,puissoncou.Ilsentaitsonpoulsbattresoussesdoigts.Etill'entenditretenirsonsoufflequandilglissasamainplusbas,pourcaressersesseinsàtraverslafineétoffedesachemisedenuit.—Jemedemandesituasconsciencedetabeauté,Keeley.Tapeauestdouceautoucher,etaussiclairequelaneigemiroitantsouslalune.Jepourraispasserdesheuresàtecaresser.Leursbouchesétaientprochesl'unedel'autre.Alaricaccrochaleregarddelajeunefemme,justeavantde

plaquerseslèvressurlessiennes.Ileutsoudainl'impressionqu'uneviolenteboufféededésirluiincendiaitlesveines.—Jen'aijamaiscouchéavecaucunhomme,murmura-t-elle.Tueslepremieràmetoucherainsi.Son aveu éveilla chezAlaric des pulsions primitives, mais aussi une immense envie de tendresse. IlvoulaitqueKeeleynepuissejamaisoubliercettenuit.—J'iraitoutdoucement,chérie.Jetelepromets.Ellesouritetpritsonvisagedanssesmains.—Jesais.J'aiconfianceentoi,guerrier.Alaricl'attiradanssesbrasetlaserratrèsfortenenfouissantsonvisagedanssoncoupourrespirersonodeur.Ilvoulutaussilamarqueravecsesdents,parunpetitsuçon.—Tuesdélicieuseàcroquer,chérie.Ildevinaqu'ellesouriait.—Ettoi,guerrier,tuasdeslèvresmagiques,dit-elle.J'aimebeaucouplesbaisers,maismonpetitdoigtmeditqu'ilyaautrechoseàvenir...Alaricsouritetluiembrassalessourcils.—Oui,tuasraison.Maisnet'inquiètepas.J'aibienl'intentiondetouttemontrerendétail.Leurslèvressescellèrentdenouveau,maiscettefoisàl'initiativedelajeunefemme.Alariclalaissafaire.Jusqu'àprésent,ils'étaittoujourssatisfaitd'étreintesrapides.Ilavaitpourhabituded'entraînerdanssonlitdesfillesquinecherchaientqu'unepartiedejambesenl'air.MaisavecKeeley,ilvoulaitsavourerchaqueinstantetfairedurerleplaisir.Ilprendraittoutsontempsetilluirévéleraitlesdélicesdelachair.Seredressantdetoutesahauteur,ilobligealajeunefemmeàs'allongersurlelitetilposasesmainsdechaquecôtédesatête.Sachevelures'étalaitsurlesdrapsenunemassesoyeusequiprenaitdesrefletsdorésàlalumièredufeu.Keeleyleregardaitavecunabandonémouvant.Alaricétaitbouleverséà l'idéequ'elles'apprêtaità luioffrircequ'ellen'avaitencorejamaisaccordéàaucunhomme.C'étaitlaplusbellepreuvedeconfiancedontilpouvaitrêver.Ilsepenchapourluiembrasserlecouetlanaissancedesépaules.Puisilluimordillalelobedel'oreille,luiarrachantdesfrissonsdeplaisir.—Taboucheestdémoniaque,guerrier.—Cen'estqu'undébut.Ildélaça lehautdesachemisedenuit,pourdécouvrir ses seins.Lespectaclequi s'offrit à savue luicoupa le souffle.Sonmembreérigégonflait sonpantalon, impatientd'être libéréde sonécrinde tissupourgoûteràlaféminitédeKeeley.—Quelquechosenevapas?demandalajeunefemme,voyantqu'ilnebougeaitplus.Illuisourit.—Non,chérie,dit-il,l'embrassantsurleslèvrespourchassersesinquiétudes.Toutvabien,aucontraire.Toutvatrèsbien.Puisildélaçaunpeuplussachemisedenuit,pourdénuderentièrementsapoitrine.Sestétonsappelaientlesbaisers.Ilentitillaundelalangue,arrachantunpetitcrirauqueàKeeley.—Chut,chérie.Cen'estqueledébut.Laisse-moitefairel'amour.Alaricseredressapourladébarrasserdesachemisedenuit.Il déglutit en ladécouvrantnue. Il n'avait encore jamaisvuuneaussibelle femme.Sapeaucrémeuse,vierge de toute imperfection, baignait dans le chatoiement doré des flammes qui dansaient dans lacheminée.Seshanchesétaient rondes, sa taille fine,et sesseinsassezgénéreuxpour remplirunemaind'homme.Sonventreplatétaitornéd'uncharmantnombrilqu'ilavaithâtedecaresserdesalangue.Le regard d'Alaric descendit plus bas et s'arrêta sur le triangle de boucles soyeuses qui gardait

l'innocencedelajeunefemme.Acettevue,sonmembresedressa,plusdurencore.Alaric ne voulait pas effrayerKeeley,mais s'il n'enlevait pas rapidement son pantalon, il finirait paravoirmal.—Nebougepas,pendantquejemedéshabille,luimurmura-t-il.Elleleregardasedébattreaveclecordondesonpantalon.Laminuted'après,levêtementtombaitàterreetsonmembreétaitenfinlibérédesaprisond'étoffe.PuisAlaricpassasatuniquepar-dessussatête,s'aveuglantuncourtinstant.QuandilputdenouveauvoirKeeley, il s'aperçut qu'elle regardait son membre. Il n'aurait pas su dire si elle était fascinée ousimplementintriguée.Sonexpressionétaituncurieuxmélangedesdeux.Quandils'allongeaentresescuisses,ellelevalesmains,commepourl'obligeràreculer.Alaricluisaisitlespoignets.—Tun'aspasàavoirpeur,Keeley.Jeneteferaipasdemal.Jeseraiaussidouxqu'unagneau.Et,quoiqu'illuiencoûtât,ilétaitbiendécidéàtenirparole.

18Keeleyretenaitsonsouffle.Elleavaitdevantelleunguerriermagnifique-etentièrementnu.Soncorpsmuscléàlaperfectionétaitcouturédecicatrices,commeautantdemédaillesattestantdesbataillesqu'ilavaitgagnées.Ilétaitsiimpressionnantqu'iln'auraiteuaucunepeineàluifairedumals'ill'avaitvoulu.MaisKeeleyavaittouteconfianceenlui.Etsadouceuravivaitencoreledésirqu'illuiinspirait.Maislavuedesonmembrevirill'intimidait.Elleletrouvaitdémesuré.—Tu...tuessûrquecen'estpastropgros?neput-elles'empêcherdedemander.Elle s'envoulait de son innocence.Pourtant, elle avait vuplusieurs fois deshommesnus.Mais c'étaitpourlessoigner.Etleuranatomieétaitalorsaurepos.Elleneseseraitjamaisdoutéequeleurmembrevirilpouvaitprendredetellesdimensions.Alarics'esclaffajoyeusement.—Net'inquiètepas.Toncorpss'yaccommoderasansproblème.C'estsonrôle.Keeleyfutstupéfiéeparsonarrogance.—Sonrôle?Etquienadécidé?Ilsourit.—Tumouilleras,pourquejepuissetepénétrerplusfacilement.Etmonrôle,c'estdetefairemouiller.—Jevaismouiller?répétalajeunefemme,incapabledecontenirsacuriosité.Ilsepenchaàsonoreille.—Oui,murmura-t-il. Je t'en donnema parole.Quand il s'étendit de tout son long sur elle, ses longscheveuxretombèrentsursonvisage,semêlantàceuxdeKeeley.—C'estrare,pourunhomme,d'avoird'aussibeauxcheveux,dit-elle.Ils'esclaffa.—Cen'estpascourant,pourunhomme,des'entendredirequ'iladebeauxcheveux.Keeleyluisourit.—J'adoreyenfouirmesdoigts.Peut-être t'ensouviens-tu,mais je lesavais lavés,quand tuétaischezmoi.Ensuite,jelesavaisséchésetbrossés.Onauraitditdelasoie.—Jemesouviensd'uneenchanteressedontlesmainscaressaientmachevelure.C'étaitcommeunrêvedontjenevoulaissurtoutpasmeréveiller.Ellefitglisserunemècheentresesdoigts.—Etmaintenant,c'estàmoidevivreunrêvedontjenevoudraisjamaismeréveiller.Ilcapturaseslèvres.Cettefois,sonbaiserfutplusardent,pluspassionné.Plusexigeant.EtsoncorpsselovaàceluideKeeley.Elle sentait son érection, puissante, contre ses cuisses. Keeley les écarta instinctivement, mais elletressaillitquandellesentitsonmembresepresseràl'oréedesaféminité.Cependant, son désir ne cessait de s'aviver et, déjà, elle en voulait plus.Elle écarta les cuissesmaisAlaric,aulieud'enprofiter,selaissaglissersurelle.Quandilencerclasonnombrilavecsalangue,elleoubliatoutlereste.Pourtant,quandsalanguecommençades'aventurerplusbas,lajeunefemmeredressalatête,vaguementinquiète.Alariclevalesyeuxverselle.Sesprunellesbrillaientcommecellesdesprédateurss'apprêtantàfondresurleursproies.Keeleyfrissonnaàl'idéedecequil'attendait.Lui agrippant solidement les cuisses, Alaric déposa un baiser juste au-dessus du triangle de boucles

soyeusesquicachaientsaféminité.Keeleyfrissonnadeplusbelle.Puisseslèvress'aventurèrentencoreplusbas,jusqu'aucœurdesonintimité.Keeleyeutl'impressionquelachambredansaitdevantsesyeux.—Oh, gémit-elle, quand il lui titilla sonboutonde rose avec sonpouce, tandis que ses autres doigtss'immisçaientdanssafente.Puissalangueremplaçasonpouce.Keeleyeutl'impressionqu'unéclairlatraversaitdepartenpart.Sonplaisirfutsiintensequetoussesmusclessecontractèrent.Ignorantsesgémissements,Alariclasavouraitcommeunnectar.Keeleyavaitlesjambesquitremblaient.Toussessenssemblaientéchapperàsoncontrôle.Elleenfouitsesmainsdanslacheveluredesonguerrier.—Alaric!Ilcontinuait, imperturbable,sadiaboliquecaresse.Keeleyavaitbeau l'implorerd'arrêter, ilcontinuait.Alors,àboutderessources,elledécidades'abandonnercomplètement.Deluifaireconfiance.D'oubliertoutessesappréhensions.Ellen'auraitjamaisimaginéqu'uneétreinteentreunhommeetunefemmepuisseêtreaussimerveilleuse.Elleconnaissait lesmécanismesdelareproduction.Ellesavaitplusoumoinscequipouvaitsepasserdans un lit. Mais elle avait toujours pensé que c'était très rapide : une simple pénétration, quelquescaresses,etl'affaireétaitterminée.Mais Alaric, lui, explorait patiemment son corps avec ses mains, centimètre par centimètre. Ill'embrassaitetillacaressait,jusqu'àlarendrefolled'undésirdontl'assouvissementsemblaitsanscesseluiéchapper.—Jepréfère te ledire,expliqua-t-ilalorsqu'il seplaçaitànouveauentresescuisses, je risquede tefaireunpeumal,maisjeteprometsqueçanedurerapastrèslongtemps.Etjeseraiavectoiàchaqueinstant.Tout à coup, Keeley sentit son membre se presser contre son sexe. Elle frissonna d'excitation etd'appréhensionmêlées.—Serre-moifort,chérie,murmura-t-il.Trèsfort...Keeleynouasesbrasaucoud'Alaricetl'attiracontreellepourl'embrasser.Àl'instantoùleurslèvressescellèrent,ildonnauncoupdereins.Keeleyrouvritbrusquementlesyeux.—Tuasmal?Ellesecoualatête.—Non.C'estunesensationétrange.Deplénitude.Nousneformonsplusqu'un,désormais.Ilsourit.—Oui,c'estcela.Ilpoussaunedeuxièmefois.Keeleytressaillitlégèrement.—Encoreunpeu,etlepireserapassé,luipromit-il.—Lepire?Maisjusqu'ici,c'estmerveilleux,murmura-t-elle.Ilsouritencore,enmêmetempsqu'ill'embrassait.Puisilseretiralégèrement,avantdes'enfoncerplusavant.Keeleyadoraitcelaetelleenvoulaitdéjàdavantage.—Maintenant,Alaric,chuchota-t-elleàsonoreille,fais-moitienne.Ildonnaunnouveaucoupdereins,pluspuissant.Keeleysentaitsoncorpss’épanouir,maiselleéprouvaitdanslemêmetempsunesensationdebrûlurequilafitgrimacer.—Voilà,dit-il.Tuesàmoi,àprésent.Jerêvaisàcemomentdepuislongtemps.Ils'étaitimmobilisé,letempsqu'elles'accoutumeàsonintrusion.—Çava,maintenant?demanda-t-il.Ladouleurestpassée?

—Cen'étaitpasgrand-chose,lerassura-t-elle.J'aiàpeineeumal.Il se retira encore, pour la pénétrer de nouveau plus profondément. Et il la regardait, comme s'ils'inquiétaitqu'ellepuissesouffrir.—Prends-moi,Alaric.Çanefaitpasmal.J'aienviedetoi.C'étaittoutcequ'ilvoulaitentendre.Ildonnaunnouveaucoupdereins,sipuissantqueleurshanchessetouchèrent.Keeleyfermalesyeux.Àprésent,leursdeuxcorps,soudésl'unàl'autre,ondulaientaumêmerythme.EtKeeleysentaitgrandirenelleunplaisirquiexigeaitsalibération.Maiscomment?—N'essaiepasdeteretenir,luimurmura-t-il.Abandonne-toitoutentière.Fais-moiconfiance.Sesparolesapaisèrentl'anxiétédelajeunefemme.Ellesedétendit,ainsiqu'illeluidemandait.Etellesedonnatoutentièreàlui.Alaric la pilonnait toujours plus fort et toujours plus vite. Juste aumoment oùKeeley pensait ne paspouvoirensupporterdavantageetqu'elles'apprêtaitàlesupplierderalentir,cefutcommeuneexplosion.Savisionsetroubla.Soncorpsfutagitédespasmesviolentsetdélicieux.Unplaisirinsensélasubmergeaparvagues.Alarics'enfonçaunedernièrefoisenelle,avantdeseretirerbrutalement.Keeleyvoulutleretenir,maisils'effondrasurelleetellesentitunliquidetièdesursonventre.Ilrestaallongésurelle,àreprendresonsouffle.Keeleyn'enrevenaittoujourspasdecequ'ellevenaitdevivre.Était-cenormal?Celaseproduisait-ilchaquefoisqu'unhommeetunefemmefaisaientl'amour?C'étaitimpossible,sinonpersonnenevoudraitplusjamaissortirdulit!Finalement,Alaricroulasur lecôté, l'entraînantavec lui touten laserrant toujoursdanssesbras.Ellesentaitsonmembrepalpitercontresonventrehumide.Elle comprit tout à coup ce qui s'était passé, et elle en éprouva unmélange de reconnaissance et detristesse. Il avait pris garde à ne pas l'engrosser. Elle n'aurait pas à subir la honte d'une grossesseillégitime,tandisqu'ilépouseraituneautrefemme.Enmêmetemps,l'idéedegarderunepartiedelui-sonenfant-laséduisait.CarKeeleynecoucheraitplusjamaisavecaucunhommeaprèsAlaric.Ellen'auraitdoncpasd'enfants.Elle soupira.Nourrirde tellespenséesétait sansdouteunpeu tropmélodramatiqueetune foisAlaricsorti de sa vie, peut-être regarderait-elle différemment les autres hommes.Unevie entière de solituden'étaitpaslemeilleurmoyenderépareruncœurbrisé.Maiscesquestionsn'étaientpasd'actualité.Pourl'instant,ellenepouvaitpasimaginerdepartagerunetelleintimitéavecunautrehomme.Alaricluiembrassalefront.—Tuessûrequejenet'aipasfaitmal?Keeleysecoualatête.—Non,mon guerrier.Tu as tenu parole.Ta douceur était remarquable.C'est à peine si j'ai senti unebrûlure,quandtum'aspénétrée.—Tantmieux.J'auraisdétestétefairesouffrir.Keeleyneputs'empêcherdetrouverungoûtameràsesparoles.Carmalgrésesbonnesintentions,Alariclaferaitsouffrirenépousantuneautrefemme.Maiselle refusaitdegâcher l'instantprésentenpensantà l'avenir.Elledéposaunbaiser sur son torsemusclé.—Dis-moi,guerrier,danscombiendetempspouvons-nousrecommencer?Alaricaccrochasonregard.—Dèsquetumedirasquec'estcequetuveux.—Jeleveux,murmura-t-elle.

19Alaricseredressasursescoudes,clignadesyeuxetregardaendirectiondelacheminée,oùKeeleyavaitrajouté des bûches.Elle s'était assise sur un banc, devant le feu, et sa nudité se détachait sur un fondorangé.Pendantqu'illacontemplait,lajeunefemmecontemplaitlesflammes.Elleétaitmagnifique.Siféminine,etenmêmetemps,siforte.Àprésentqu'ilconnaissaitmieuxsonpassé,Alarics'émerveillaitdesadétermination.Peudefemmes,àsaplace,auraientsurvécuparleurspropresmoyensaprèsavoirétéchasséesdeleurclan.Une femmene disposait pas de beaucoup de possibilités pour s'en sortir toute seule, et pourtantKeeleyyétaitparvenuesanssedisgracier.Elletournalatêteversluietécarquillalesyeuxenconstatantqu'ilétaitréveillé.Puiselleluisourit.Alaricdéglutitavecpeine.Sabeautédépassaitl'entendement.—Viens,dit-il,luitendantlamain.Elleselevadubancetcouvritsesseinsavecsesmains,dansungestepuérildepudeurqu'Alarictrouvacharmant.Dèsqu'ellel'eutrejointsurlelit,illaserratrèsfortdanssesbras.—Commenttesens-tu?Elledéposaunbaiserdanssoncou.—Merveilleusementbien.Tum'asdonnébeaucoupdeplaisir.—Jesuisravidel'entendre.Il voulut lui embrasser chastement les lèvres, mais leurs langues se mêlèrent avec fièvre. À mesurequ'elle gagnait en assurance, Keeley se montrait plus passionnée et elle n'hésitait pas à prendre desinitiatives.—Ilnousresteencorequelquesheuresavantl'aube,dit-il.Nelesperdonspas.Elleluisourit,etsonsourireilluminatoutelapièce.— Oui, mon guerrier. Mais cette fois, c'est moi qui vais conduire les opérations. Je n'ai pas tonexpérience,maisjesuisconvaincuequejepeuxtedonnerautantdeplaisirquetum'enasdonné.—Trèsbien.Montre-moicequetusaisfaireetnousverronssituavaisraisond'êtreaussisûredetoi.Lajeunefemmes'assitàcalifourchonsurlescuissesd'Alaricetellerefermasesdoigtssursonmembredéjàérigépourlecaresser.Leplaisird'Alaricétaitàlalimitedeladouleur.Chacunedesescaresseslerendaitfou.Elles'yprenaitavecuneinfiniedouceur,commesielleavaitpeurdeluifairemal.Finalement,n'ytenantplus,ilenserralamaindelajeunefemmedanslasienne,pourluimontrer.—Commeça,dit-il.Etilsecaressadebasenhautetdehautenbasenserrantfortementsonmembre.—C'estbon?demanda-t-elle,prenantlerelais.—C'esttrèsbon.Sonmembretoujoursenmain,Keeleysoulevaseshanches,avantdeleslaisserretomber,commesiellene savait plus quoi faire ensuite. Elle avait de bons instincts, mais elle manquait d'expérience.Heureusement,Alaricétaitravidejouerlesprofesseurs.Keeleyn'avaitpasconnud'autrehommeavantluietilseflattaitdeluimontrercommentprocéder.Illuisaisitleshanches,pourl'aideràseplacerau-dessusdesonmembre.—Voilà,dit-il.Etillafitredescendre,endouceur.

—C'estbien,dit-il.Maintenant,recommencetouteseule.Trèslentement,audébut.Ellerépétalamanœuvreens'appliquant.Alaricétaitàl'agonie.Ilavaitl'impressionqu'ilallaitmourirdeplaisir.Ilbrûlaitd'agiretenmêmetemps,ilvoulaitqu'elles'habitueàlechevaucher.Defait,auboutdequelquesminutes,elles'enharditet,plaquantsesdeuxmainssurletorsed'Alaric,elles'entraînaàdesmouvementsplusvifs.—Tuesunetentatricediabolique,murmura-t-il.—Ah?L'anges'estévaporé?Serais-jeredevenueundémonsortittoutdroitdesenfers?—Ouunangedémoniaque.Cesontlesplusredoutables.Ellesepenchasurluiets'emparadeseslèvres.Alaricétaitmédusé-etcomblé-delavoirsemontreraussipossessive.Commes'iln'appartenaitqu'àelle.Etdureste,àcetinstantprécis,c'étaitlapurevérité.Aucuneautrefemmen'existaitàsesyeux.Mais ilvoulait luimontrerqu'il ladésiraitetqu'elleétait sienne.Alors, ilarqua leshanches,pour luidonnerdescoupsdereins.Ellegémitdeplaisir.—J'étaissupposéetefairel'amour,luifit-elleremarquer,quandelleeutreprissonsouffle.—Oui.Ettut'yestrèsbienprise.Maispourquoinepaspartagerl'effort?Et tandisqu'elle continuait de le chevaucher,Alaric luidonnait des coupsde reins.Tout à coup, il seraidit.—Jecroisquejenevaispaspouvoirmeretenir!—Alors,laisse-toialler,guerrier.Alaric eut juste le temps de l'empoigner par les hanches, pour la soulever et se retirer, avant que sasemenceneserépandesursonventre.Alorsqu'ilreprenaitlentementsonsouffle,lajeunefemmecontemplaitsonmembre,àl'extrémitéduquelperlaitunegouttedesemence.Ellelacueillitavecsondoigtqu'elleportaàseslèvres.Lemembred'Alaricseraiditaussitôt.—J'avaisenviedetegoûter,expliqua-t-elle.Tum'asbiengoûtée,toi,quandtum'asfaitl'amouravectalangue,toutàl'heure.Et,aprèsuninstantderéflexion,elledemanda:—Pourçaaussi,leshommesaimentquelesfemmesleurrendentlapareille?—Oh,oui!D'imaginertaboucheserefermantsurmonmembresuffitàm'égarerl'esprit.—Hmm...C'estbonàsavoir.Jen'auraisjamaispenséquedetelleschosesétaientpossibles.Ils'esclaffa.—Jel'espèrebien!Oùaurais-tupuapprendrecela?Lajeunefemmeluisourit.—Aprèsquelquesheuresentacompagnie,jemesensdéjàcomplètementdébauchée.Celam'étonneraitquelesautresfemmesexprimentdetelsdésirs.—Jememoquedesautresfemmes,murmura-t-il.Pourl'instant,iln'yenaqu'uneseulequim'intéresse.Etjesuiscombléqu'elleaitenviedemedonnerduplaisiravecsabouche.Elleparuthésiter.—Cen'estpastroptôt?Jeveuxdire,après...—Laisse-moid'abordmenettoyer.Ensuite,jemerallongerai,pourquetusoisplusàtonaise.Appuyéesuruncoude,lajeunefemmeleregardasedirigerverslacuvetteetlebrocd'eauposésprèsdelafenêtre,pourselaverlemembreetleventre.Bizarrement,lespectacleavaitquelquechosed'excitant.Baissantlesyeuxsursonpropreventre,elleeutenviedel'imiter.Elles'apprêtaitàseleveràsontour,maisAlaricrevenaitdéjà,unlingehumideàlamain.Ils'allongeaà

côtéd'elleetsechargealui-mêmed'épongerlesgouttesdesemencesursapeau.Sonmembreétaitfièrementérigé.Keeleytenditlamainpourletoucher.—Je...jenesaispastropcommentprocéder,murmura-t-elle.Jenevoudraispasm'yprendremal.Alaricluisourit.—Jetegarantisqueceseratrèsbien.Àmoins,biensûr,quetun'ymetteslesdents!Keeley ne put s'empêcher d'émettre un petit rire, avant de laisser courir ses doigts sur son abdomenparfaitementplat.—Tupourraispeut-êtremeguider?—D'accord.Jevaistemontrercommentfaire.Ilsereleva,pourseplanterdevantlelit.Puisiltenditlamain.DèsqueKeeleys'enempara,ill'aidaàseredresser,aprèsquoiilluifitsignedes'asseoirjusteauborddulit,lesdeuxpiedsposésparterre.Ellecompritpourquoi:danscetteposition,saboucheétaitmaintenantjusteàhauteurdesonmembre.—Maintenant,ouvrelabouche,chérie.Laisse-moilapénétrer.D'unemain, il empoigna la base de sonmembre, pour le guider entre les lèvres ouvertes de la jeunefemme.La sensation émerveillaKeeley. Sonmembre était très dur, et enmême temps la peau en était doucecommeduvelours.—Détends-toi...Alaric lui prit le visage dans sesmains, tandis qu'il allait et venait dans sa bouche, de plus en plusprofondémentàchaquepoussée.Keeleyn'auraitjamaisrêvéàdetellespratiques.Celapouvaitsansdouteparaîtrevulgaireetn'êtredignequedescatins,maisellesesurprenaitàentirerduplaisiretdel'excitation.ElleétaitprêteàtoutpoursatisfaireAlaric,ordetouteévidence,ilaimaitbeaucoupcela.—Laisse-moientrerplusloin,Keeley.Voilà,commeça.C'estparfaitcommeça.Prends-leenentier.Keeleyobéit.Lemondeseréduisaitàsonmembre,quiluiemplissaitlabouche,etauxlourdstesticulesquibattaientcontresonmenton.Toutàcoup,ilseretira.Sarespirationhachéerésonnaitdanslesilencedelachambre.—Tourne-toi,ordonna-t-il.Keeley,interloquée,clignadesyeux,avantderegarderderrièreelle.Elleétaitassiseauborddulit.Quevoulait-ildire,exactement?—Mets-toiàquatrepattessurlelitettourne-moiledos.Il l'aidaàs'exécuter.Keeleyseretrouvaàquatrepattes,faceaumur,dansunepositioninattendue.Sonimagination battait déjà la campagne et elle se représentait certaines choses, sans savoir, toutefois, siellesétaientpossibles.Alaricluicaressalesfesses,avantd'introduiresesdoigtsdanssaféminité.Keeleysursauta.—Jevoudraisteprendredanscetteposition,dit-il.Commeunétalonquisaillitsajument.Crois-tuquetuaimeraiscela?Ellefermalesyeux.—Oui,murmura-t-elle,dansunsouffle.Sesgenouxtremblaientetmenaçaientdeluifairedéfaut.Ellesecramponnaaulitpournepasvaciller.Cette position lui donnait une sensationde vulnérabilité. Il pourrait faire ce qu'il voudrait d'elle, sansqu'elleaitlapossibilitédesedéfendre.Alaricluicaressadenouveaulesfesses,puis lesexe, jusqu'àcequ'ellesoupiredeplaisir.Puis,desamainlibre,illuiagrippaleshanches.Illapénétrad'uncoupsec.

Keeleyauraitcrié,s'iln'avaitpasplaquéunemainsursabouche.—Chut,chérie.Détends-toi.Ellelaissaéchapperungémissement,tandisqu'ils'enfonçaitplusprofondémentenelle.—Jevaistemontercommeunepouliche,Keeley...Laisse-moifaire.Ellen'avaitpaslechoix,detoutefaçon.Lesdoigtsagrippésauxcouvertures,elleétaitofferteàlui,quilapilonnaitsansrelâche.Keeleyavait l'impressionqu'il s'enfonçaitplus loinque lesdeuxpremières fois.En toutcas,elleétaitplussensible,àprésent.Auboutd'unmoment,cependant,leplaisirqu'elleéprouvaitcommençaàsedissiper,pourcéderlaplaceàunsentimentd'inconfort.Sonmembreétaittropgros.Etcettefois,ill'enfonçaitvraimenttroploin.Lajeunefemmeneputretenirunpetitcridedouleur.Ilsefigea.—Keeley,qu'ya-t-il?Jet'aifaitmal?Ils'assitsurlelit,lafitseretourneretlaserradanssesbras.Sonregardtrahissaitsoninquiétude.—Jecroisquej'étaistroptendue.Illaissaéchapperunjuron.—C'estma faute. Tu étais vierge, et je t'ai prise comme si tu étais une femme expérimentée. Je suisinexcusable.Jetedésiraissifortquej'enaioubliétonbien-être.Keeleyluicaressalajoueavecunsourire.—Moiaussi,jetedésiraistrèsfort.Etc'esttoujoursvrai.J'aijusteauunmomentd'inconfort.Alaricsecoualatête.—Unbonbainchaudteferadubien.Jevaism'occuperdelefairemonterdanstachambre.Ellesouritdenouveau.—Unbainseraitmerveilleux.Maispourl'instant,ilnousresteunepetiteheureavantl'aube.Etjeveuxlapasser dans tes bras. Je préférerais que nous nous allongions tranquillement, pour goûter à un peu derepos.Alaricluirepoussaunemèchedecheveuxderrièrel'oreille.—D'accord.Jenepeuxriensouhaiterdeplusbeauquedeteserrerdansmesbras.Quandl'aubeseralevée,jem'occuperaidetonbain.Maisjeleferaimonterdanstachambre,pourquetaréputationn'aitpasàsouffrirdecequenousavonsfaitensemble.Keeleyluiétreignitlesmains.—Maréputationpouvait trèsbiens'accommoderquejeprennelerisquedepassercettenuitavec toi,Alaric.Sachequejen'aiaucunregret.Celaenvalaitlargementlapeine.—Moinonplus,jen'aipasderegrets.Jemesouviendraidecettenuitpourlerestantdemesjours.Ilss'allongèrentàplatdossurlelit,puisAlarictiralescouverturesetilsseblottirentl'uncontrel'autre.—Jecroisque jenevaispasdormir,dit-elle.Jen'aipasenviedeperdreuneseuleminuteduplaisird'êtredanstesbras.Alaricluiembrassalessourcils.—Jeneprétendraipasqu'ilnes'estrienpasséentrenous,Keeley.Pasenpublic,biensûr.Jeneferairienquipourraittenuire.Maisdansl'intimité,jesauraiterappelerquetum'asdonnétoninnocence.Ellesourittristement.—Jeneprétendraipasdavantagequ'ilnes'estrienpassé,Alaric.Maisjecroisqu'ilestpréférabledenepasnousappesantirsurlesujet.N'oubliepasquenousn'avonspasd'avenirensemble.—Tuasraison.Cetteconversationmebrisedéjàlecœur.—Alors,contente-toidemetenirchaud,avantquejeneretournedansmachambreglacée.—Oui,chérie.Ça,c'estàmaportée.

20Lespremièreslueursdel'aubefiltraientdéjàparlesrebordsdelafourrureobstruantlafenêtre.Lanuit-leurnuit-s'achevait.Keeley s'était assoupie dans les bras d'Alaric, unemain posée sur son ventre, comme unemarque depossession.Alaric lui caressait doucement le bras, tandis qu'il s'enivrait du parfum de sa chevelure. Il aimait lacaresser.Ilaimaitsentirsonodeur.Ilaimaitlasavoirprèsdelui.Etilauraitaiméqueceladuretoutesavie.Aulieudecela,ilseraitcondamnéàpartagersonlitavecuneautrefemme.EtcettefemmeneposséderaitsansdoutepaslanaturepassionnéedeKeeley.Nisontempéramentardent.Nisoncaractèrebientrempé,quileséduisaittant.Alaricenfouitsonvisagedanslacheveluredelajeunefemme,quis'étiraaveclangueurdanssesbras.Justeaumomentoùils'écartaitunpeu,pourlacontempler,ellebattitdescilsetsespaupièress'ouvrirent.Sonregardétaitencoreendormi,maiselleluisourit.—Bonjour,murmura-t-ilenluicaressantlajoue.Elleselovacontrelui.—Jecroisquejevaisdétestercettejournée.Alaricdéglutitpéniblement.—Moiaussi.Maisdépêche-toideregagnertachambre,avantqu'onnes'aperçoivedetaprésenceici.La jeunefemmesoupiraetse redressasuruncoude.Sescheveuxcascadaientdepartetd'autredesesépaules,recouvrantsesseins.Incapablederésisteràlatentation,Alariclapritparlatailleetlaforçaàserallongersouslui.Puisill'embrassacommeiln'avaitencorejamaisembrasséaucunefemme,mettantdanssonbaisertoutelaforcedesondésirettoutlepoidsdesesregrets.—Tuessanségale,Keeley,dit-il,quandilabandonnaseslèvres.Jevoulaisquetulesaches.Elleluisourit.—Toinonplus,tun'aspasd'égal,guerrier.Ilsoupira.L'heureétaitvenue.Elledevaitpartir,avantquelaforteressenes'éveilleetquelescouloirsneseremplissentdemonde.—Habille-toivite,lapressa-t-il.JevaisdonnermesinstructionsàGannon.Pendant que la jeune femme récupérait sa robe pour la passer, Alaric alla entrouvrir la porte. Pourl'instant,seulGannonsetrouvaitdanslecouloirencoreplongédansl'obscurité.—Gannon,murmuraAlaric.Habituéàréagiraumoindrebruit,Gannonselevaaussitôt.—Vousavezunennui?demanda-t-il.—Non,non,toutvabien.Maisj'aibesoind'unservice.—Avosordres.—Prendsletubquiestdansmachambreetporte-ledanscelledeKeeley.Etqu'onluiapportedel'eauchaude.Soisdiscretetassure-toiquepersonnenesacheoùelleapassélanuit.Pendantquetuserasenbas,jel'escorteraijusqu'àsachambre.GannonacquiesçaetAlaricseretournapours'assurerqueKeeleyavaitfinides'habiller.Commeilnevoulait pas qu'elle soit gênée par la présence du garde, il la rejoignit, pour faire écran de son corps,pendantqueGannonportaitletubhorsdelapièce.DèsqueGannoneutdisparu,Alaricpritlajeunefemmeparlamain.—Viens.Jevais te raccompagner jusqu'à tachambre. Il fautque tusoisau litavantque lesservantes

montentl'eaudetonbain,pourdonnerl'illusionquetuviensjustedeteréveiller.Ellesemordillala lèvreinférieuremaishochalatête.Avantdecéderàl'enviedel'embrasserencore,Alaricl'entraînaverslaporte,puisdanslecouloir.Ilspénétrèrentdans lachambrede la jeunefemmejusteaumomentoùGannonensortait.Alaric lui fitsignedel'attendre,letempsqu'ilfassesesadieuxàKeeley.Keeleys'empressadeseglissersoussescouvertures.—Jechériraicettenuitpourlerestantdemesjours,ditAlaricavantdeluiembrasserlefront.—Moiaussi,murmura-t-elle.Maismaintenant,va-t'en.L'hésitationestmauvaiseconseillère.Alaricseredressabrusquement.Elleavaitraison.Plusils'attardait,etplusilméditaitdetoutenvoyeraudiable.Il quitta la pièce sans un regard en arrière. Gannon l'attendait dans le couloir. Alaric lui donna sesinstructionsd'untonsec.—Occupe-toi de sonbain.Assure-toi qu'elle ne sera pas dérangée. Informe tout lemondequ'elle estfatiguéeetqu'ellegardera lachambreunegrandepartiede la journée.De toute façon,aucune tâchenel'attendaujourd'hui.—Bien,acquiesçaGannon.Alaric le regarda s'éloigner vers l'escalier avant de regagner sa propre chambre. Une fois le battantrefermé,ils'yadossaunmoment.Cette nuit avec Keeley l'avait comblé.Mais avoir possédé la jeune femme et savoir qu'elle lui étaitinterditeétaitunsuppliceautrementplusdouloureuxquen'importequelleblessuredeguerre.Keeleys'enfonçadansl'eauquicommençaitdéjààrefroidiretrepliasesgenouxsoussonmenton.Lebainavaitapaisélatensiondesesmuscles,maisriennepouvaitsoignerladouleurquiluivrillaitlecœur.Ellesoupira.Cettenuitavaitétélaplusbellenuitdesavie.Ellevoulaits'enrappelerjusqu'àsonderniersouffle.Aprèsuntelémerveillement,latristessen'étaitpasdemiseetpourtant,Keeleyn'arrivaitpasàsedéfairedusentimentd'oppressionquil'assaillait.Quelqu'unfrappaàlaporte.Lajeunefemmefermalesyeux.Siellenerépondaitpas,l'intrusfiniraitparselasser.Mais,àsagrandesurprise,elleentenditlaportes'ouvrir.Alorsqu'ellecherchaitdésespérémentunmoyendepréserversapudeur,Maddiefitirruptiondevantelle.Keeleyappuyasanuquesurlereborddutub.—Oh,c'estvous!Vousm'avezfaitpeur.—Gannonaexpliquéquevousnevoussentiezpasbien.J'aivouluvoirsijepouvaisvousaider.Keeleys'efforçadesourire.Maisc'était tropdemander.Sesyeuxs'embuèrentetelleneputretenirunepremièrelarme,trèsvitesuiviedebeaucoupd'autres.Maddieparaissaiteffondrée.—Oh,mapauvrepetite!Quevousarrive-t-il?Sortezdoncdevotrebain.L'eauestpresquefroide!Keeley la laissa l'aiderà sortirdu tub,puis ladraperdansun linge.Ensuite, elle s'assitdevant le feupendantqueMaddieluiséchaitlescheveuxetlesbrossait.—Maintenant,racontez-moicequinevapas,l'encourageaMaddie.—Oh,Maddie!J'aibienpeurd'avoircommisuneépouvantableerreur.Pourtant,jeneregretterien.—Aurait-ceunrapportavecAlaricMcCabe?Keeleytournalatête.—C'estdoncsiévident?Toutlemondeest-ilaucourantquej'aifauté?Maddieluiétreignitlamain.—Non,rassurez-vous.

—Jemesuisdonnéeàlui,murmuraKeeley.Ildoitenépouseruneautre,maisj'aiquandmêmecouchéaveclui.Jen'aipaspurésister.—Vousl'aimez.—Oui,jel'aime.Maddiehochalatête.—Iln'yapasdehonteàsedonnerà l'hommequ'onaime.Maisêtes-voussûrequ'iln'apascherchéàprofiterdevous?— Non ! se récria Keeley, indignée. Il est aussi torturé que moi. Nous avons tous les deux essayéd'ignorernotreattirancemutuelle,maisc'estmoiquisuisalléeletrouverhiersoir.Maddieluicaressalescheveuxpourl'apaiser.—Lespeinesdecœur sont lespires. J'aimeraisvousconsoler,mais je saisquec'est impossible.Parcontre,jepuisvousassurerquevousn'avezpasàvousinterrogersurvotremoralité.Vousêtesquelqu'undebien,Keeley.LesMcCabeontdelachancedevousavoir.KeeleyserelevapourserrerMaddiedanssesbras.—Merci,Maddie.Avantd'arriver ici, jen'avais aucuneamie. Jen'oublieraipasvotregentillesse.Nivotrecompréhension.Maddieluiretournasonétreinte.—Gannonaditàtoutlemondequevousaviezbesoinderepos.Celan'aétonnépersonne.Vousvousêtesbeaucoup sacrifiée, ces derniers jours, pour soigner Alaric. D'ailleurs, vous devriez reprendre desforces.JevaisdescendredemanderàGertiedevousfaireporterunecollation.Jereviendraivoustenircompagnie, si vous le souhaitez,mais quandvous aurezmangé, vous feriezmieuxdedormir quelquesheures.Keeleyhochalatête.—Oui,c'estunebonneidée.Jemesensfatiguée,maissurtouttrèstriste.Etjecroisquejen'auraipaslecouragededonnerlechangeaujourd'hui.Maddieluitapotaaffectueusementlamain.—Mettez-vousaulit,jem'occupedetoutlereste.N'ayezaucunecrainte,jenetrahiraipasvotresecret.Jen'endiraimêmepasunmotàladyMcCabe.C'estàvousdesavoiràquivoussouhaitezenparler.—Merci,répétaKeeley.Maddieluidésignalelit:—Allez-vouscoucherbienauchaud,enattendantque jevousapportedequoimanger.Aprèsunenuitd'amour,j'imaginequevousmourezdefaim?Keeleyrougit,avantd'éclaterderire.—C'estmafoivrai.Maddieluisouritetquittalapièce.Aprèssondépart,Keeleyenfilasachemisedenuitetseglissasousles couvertures. La journée s'annonçait glaciale et sa chambre était froide, malgré le feu allumé parGannon.Elle était déjà impatiente de voir revenirMaddie.Depuis des années,Keeley s'était habituée à vivreseule.Maisàprésentqu'elleavaitgoûtéàl'amitié-etàlacamaraderie-d'autresfemmes,laperspectivederetournerunjourdanssoncottageisolél'effrayait.Elledésiraits'intégrerauclanMcCabe.Mêmesielleaurait toujours ladouleurdesavoirqu'Alaricnepourraitjamaisêtreàelle.Lavérité,c'estqu'ellenesupportaitpluslasolitude.Quelquesminutes plus tard,Maddie revint accompagnée deMairin et de Christina. Les trois femmesfirentjoyeusementirruptiondanslachambredeKeeley.Christina rayonnait de joie en racontant la demande enmariage que lui avait faiteCormac.Keeley selaissagagnerparsonbonheurcontagieux,quil'aidaitàsurmontersonproprechagrin.Maddie,pendantcetemps,entretenaitlefeuenyrajoutantdesbûches.Puisdesservantesarrivèrentavecdelanourritureetdelabière,etlestroisamiescontinuèrentdeconverseravecinsoucianceetbonnehumeur.

Depuisleseuildesachambre,AlaricécoutaitleséclatsderireenprovenancedelachambredeKeeley.Ilfermalesyeuxuninstant,puiss'empressadegagnerl'escalierpournepass'appesantirsursonhumeur.

21—Keeley!Keeley!Keeleyse trouvaitdans lagrandesalle.Elle se retournapourvoirCrispenaccourirdanssadirection.Habituéeauxdébordementsd'affectiondugarçonnet,ellesepréparaàrecevoirsesassauts.Commeelles'yattendait,Crispens'agrippaàsesjupesavecunetelleénergiequ'elleseraittombéesiellen'avaitpassolidementplantésesdeuxpiedssurledallage.—Qu'ya-t-il,Crispen?demanda-t-elle,avecungrandsourire.—Venezjoueravecnousdanslaneige,Keeley!Allez,venez!Mamannepeutpas.Papaluiainterditdemettre le nez dehors.Maman est furieuse, maisMaddie dit que papa a raison, parce qu'elle pourraitglissersurlaglace.Keeleys'amusaitdudébitprécipitédugarçonnet.Maisellehésitaitàdonnersaréponse.—Latempêteestfinieetlesoleilbrille,insistaCrispen.C'estunebellejournée.Nouspourrionsallerjouersurlacolline.GannonetCormacnousaccompagneront.Keeleys'esclaffa.—Calme-toi,tuvast'époumoner,dit-elle,avantd'ajouter:Aprèstout,pourquoipas?Unpeud'airfraismeferaitleplusgrandbien.LevisagedeCrispens'illumina.—Alors,c'estd'accord?Vousvenezpourdevrai?Etilsemitàdansersurplace.—Accorde-moiuneminute,quejeprenneunvêtementchaud.Maisjenesortiraiavecvousquesivousavezlapermissiondulaird.Crispenhochalatête.—Jevaisallerluidemandertoutdesuite.—Trèsbien.Retrouvons-nousicidansquelquesminutes.Crispen partit ventre à terre trouver son père, tandis que Keeley remontait dans sa chambre pours'habillerpluschaudement.Quandelleredescendit,GannonetCormacattendaientdanslagrandesalle,avecCrispenetunedizained'autresenfants.Keeleymitunpointd'honneuràsaluerchaqueenfant,puislapetitetroupesortitdanslacour.—Cequ'ilfaitfroid,aujourd'hui!s'exclamaKeeley.—Oui,marmonnaCormac.Unpeu trop froidpour resterplantédehorsàsurveillerdesenfantsqui selivrentàunebatailledeboulesdeneige.Keeleyluisourit.—JeneseraispasétonnéequeChristinaviennesejoindreànous.LevisagedeCormacs'éclairaaussitôt,maissesouvenantqueGannonlesaccompagnait,ils'empressadereprendreuneattitudeplusréservée.—Dépêchez-vous!lespressaCrispen,tirantKeeleyparlamanche.Ilsgravirentlacollinepresqueaupasdecourse,jusqu'àlapetiteaireoùlesenfantsavaientl'habitudedejouer.HeureusementpourKeeley,Gretchen se retrouvadans lamêmeéquipequ'elle.CarGretchenmanquaitrarementsacible.Augranddamdesgarçons,quicriaientleurfrustrationchaquefoisqueGretchenleurécrasaitunebouledeneigeenpleinefigure.Aprèsunebonnedemi-heuredebataillerangée,Keeley,àboutdesouffle,réclamaunetrêve.

CrispenetGretchenenprofitèrentpourse lancerdansunconciliabule.Toutenparlant, ilsobservaientGannonetCormac.—C'esttoiquidemandes,ditCrispen.—Non,c'esttoi,répliquaGretchen.Cesontleshommesdetonpère.Ilsleferontplusvolontierspourtoi.Crispensecoualatête.—Tuesunefille.Toutlemondesaitbienquelesfillesobtiennenttoujoursplusfacilementcequ'ellesveulent.Gretchenrouladesyeux,avantdeluipincerlebras.—Aïe ! protestaCrispen, semassant le bras. (Et il finit par concéder :)Bon, nous allons demanderensemble.Gretchensouritd'unairsatisfaitetlesdeuxenfantscoururentversGannonetCormac.Keeley,intriguée,vitlesdeuxguerriersd'abordsursauter.Puisilssecouèrentlatête,avecdesgestesdedénégation.Maislesenfantsinsistaient.Auboutd'unmoment,Gretchenchangeadetactique:ladéterminationcédalaplaceàl'humblesupplique.Lesdeuxgardes,àprésent,dansaientd'unpiedsurl'autre.LesyeuxdeGretchenétaientembuésdelarmes.—Oh,murmuraKeeley,ilsn'ontplusaucunechance.Ellevagagner.Christinalarejoignitàcetinstant.Elleavaitobservélascèneavecamusement.— Gretchen n'hésite pas à recourir à des armes toutes féminines si cela peut servir ses desseins,commentaChristina.Cettefilleestredoutablementintelligente.—J'aimeraissavoircequ'ilsmijotent,touslesdeux,avouaKeeley.—Quoiqu'ilensoit,ilssemblentenbonnevoiedel'obtenir.Cormac tourna la tête dans leur direction et son visage s'illumina dès qu'il vit Christina. GannonredescenditverslaforteresseetlesdeuxenfantsentraînèrentCormacaveceuxpourrejoindreKeeleyetChristina.—Gannonestpartichercherunbouclier!criaCrispen,toutexcité.—Unbouclier?répétaKeeley.—Oui,confirmaGretchen.Pourglissersurlaneige.—C'estunehontedeseservird'unbouclierdeguerriercommed'unvulgairejouet,marmonnaCormac.—N'empêchequeçaglissetrèsbien,objectaCrispen.Gannonrevintauboutdequelquesminutes,tenantàlamainunboucliermétalliquequimiroitaitausoleil.Lesenfantsl'accueillirentpardeshourras.Keeley, intriguée, sepenchapour examiner l'objet. Il était effectivement assez largepour accueillir unenfant,oumêmeunadulteunpeufrêle.—Commentfait-on?— Il faut le placer comme ça, expliqua Gannon, qui posa la face bombée du bouclier sur la neige.Ensuite,quelqu'unmontedessus.Etunautrelepoussepourluidonnerdel'élan.Keeleyécarquillalesyeux.—Cen'estpasdangereux?Gannonsoupira.—Non.Saufninousleslaissonsdévalerlacollineendirectiondulochoudelaforteresse.Sijamaislelairdlesaperçoit,ilserafurieux.—Alors,allonsplutôtsurl'autreversant,suggéraKeeley.Cormachochalatête.—Keeleyaraison.Nousseronsplustranquillesdel'autrecôté.—Oui!approuvaCrispen,avecenthousiasme.Enplus,lapenteestplusraide.Keeley,Christina,lesenfantsetlesdeuxgardesfranchirentlacrêtedelacolline,pourrejoindrel'autre

versant.—Moilepremier!crialepetitRobbie,dèsqu'ilsseretrouvèrentfaceàlavalléeboiséequis'étendaitencontrebas.—Non,c'étaitmonidéeetc'estmoiquiaidemandé,protestaGretchen.C'estàmoidecommencer.—Laissons-lafaire,marmonnaCrispen.Commeça,sic'estdangereux,ellemourralapremière.Robbiesouritdetoutessesdents.—Ahça,c'estunebonneidée!C'estd'accord,Gretchen.Vas-ylapremière.Gretchen jeta un regard soupçonneux aux deux garçons, avant de prendre position sur le bouclier queGannonavaitdéjàposésurlaglace.—Maintenant,agrippe-toibienauxcôtés,luiconseillaChristina.—Tuesprête?demandaCormac.—Oui,réponditGretchen,lesyeuxbrillantsd'excitation.Gannonnedonnaqu'unetoutepetitetape,maislasurfacepoliedubouclierglissaittrèsbiensurlaglaceetGretchenpritrapidementdelavitesse.Elledévalabientôtlapenteentouchantàpeinelesol.Auboutd'unmoment,ellesedirigeaversladroiteoulagauche,enjouantsimplementaveclepoidsdesoncorps.—Elleest trèshabile,commentaGannon,d'unair résigné. Je suis sûrqu'un jour,ellecommanderasaproprearmée.ChristinaetKeeleyéchangèrentunregardpleindefierté.Gretchens'arrêtaaubasde lacolline,àquelquesmètresdesgrandsarbresquigardaient l'entréed'uneforêt.Elleagitalamain,pourfairesavoirquetoutallaitbien,cequisedevinaitdéjààsongrandsourireravi.Puis,tirantlebouclier,elleentrepritderemonterlacolline,jusqu'àcequeGannonvienneàsonaide.Crispenfutledeuxièmeàdescendre,etilcriadeplaisirtoutdulong.Robbieluisuccédaavecmoinsdechance:iltombadubouclieràmi-parcoursetterminaladescenteenroulantsurlui-même,commeunebouledeneige.Jugeant l'exercice trèsamusant,CrispenetGretchendécidèrentde l'imiteretdescendirent lacollineenroulades.—Voulez-vousessayer,Keeley?proposaGannon,désignantlebouclieràprésentdéserté.Sonpremierinstinctfutderefuseravecvéhémence.MaiselleeutlesentimentqueGannonlamettaitaudéfi,aussiplissa-t-ellelesyeux.—Vousmecroyeztropcouardepouressayer?Gannonhaussalesépaules.—Jemedoutequeçaadequoifairepeuràunefrêlejeunefemmecommevous.Christinafaillits'étrangler.—Bon,ditKeeley,puisquevousmemettezaudéfi,jevousenproposeunautre:sij'arriveenbassansavoirversédubouclier,vousessaierezvousaussi.EtCormacégalement.Cormacs'esclaffa.—Lesguerriersnes'amusentpasàdesjeuxd'enfants.—Sivousavezpeur...,murmuraKeeley,d'unairdepureinnocence.Gannonparaissaitincrédule.—Douteriez-vousdenotrecourage?—Pourl'instant,jen'enaipasencoreeuladémonstration.Gannonluidésignalebouclier.—Installez-vousdessus.Etattendez-vousàêtreridiculisée.Keeleys'accroupitsurlebouclierenlevantlesyeuxauciel.

—C'estbienleshommes,àtoujoursvendrelapeaudel'oursavantdel'avoirtué!Avantqu'elleaitpuajouterunmot,Gannondonnaunesolidepousseaubouclier.Keeleys'agrippaauxrebordsetprialeciel,tandisqueleboucliers'élançaitrapidementsurlapenteverglacée.L'exercice se révéla un peu plus délicat qu'elle ne l'avait imaginé, et elle fut obligée de déployerbeaucoupd'effortspournepasverser.Enbas,lesenfantscriaientsonnom,prêtsàfêterjoyeusementsavictoire.L'ennui,c'estqu'ellearrivaitdroitsureux.Etsurlesarbresquisedressaientderrière.Keeleyfermalesyeuxetseprotégealatêteavecsesbras,àl'instantoùelles'envolaitdanslesairs.Elleatterritdansunpetittasdeneige,aumilieudesarbres,etelleseretrouvamêmeavecdelaneigedanslabouche.Mais,Dieumerci,ellenes'étaitpasécraséecontreuntroncd'arbre!—Keeley!Keeley!Elleavaitdumalàcomprendrequicriaitsonnom.LesappelssemblaientmêlerlesvoixdesenfantsetcellesdeCormacetGannon.Levantlesyeux,ellevitlesdeuxguerriersdévalerlacolline.Mueparunmauvaispressentiment,Keeleyseretournajusteàtempspourvoirplusieurshommessurgirducouvertdesarbres.—Noussommesattaqués!cria-t-elle.Noussommesattaqués!Intrigué d'avoir vu Gannon prendre un bouclier dans la pile de ceux qui nécessitaient certainesréparations,Alaricdécidadelesuivrejusquesurlacollineoùlesenfantsavaientpourhabitudedes'amuser.Maisilne trouvapersonne.Alaric savaitpourtantqueKeeleyétaitpartie jouer avec les enfants, carEwanenavaitdonnélapermissionàCrispen.Alaricpressalepas,pournepasperdreGannondevue.Quandilatteignitlesommetdelacolline,ilvitKeeley,Christina,Cormacetlesenfantsrassembléssurl'autreversant.Etilcompritcequ'ilétaitadvenudubouclierquandilvitGretchendévalerlapentedessus.Alarics'assitpourcontempler lespectacleavecunsourire.Celafaisaitdesannéesqu'ilnes'étaitplusamuséàdescendreunepenteverglacéesurunbouclier.Quandlesenfantseurenttousfaitunedescente,cefutautourdeKeeley.AlaricfutchoquédevoirGannonla pousser avec force. La jeune femme descendait à une telle vitesse qu'elle ne pourrait bientôt pluscontrôlersatrajectoire.Alaricseleva,anxieux.Keeleydisparutdans lesbois justeaumomentoùGannonetCormacse retournèrentenvoyantarriverAlaric.Lesdeuxgardes,soudaintrèsinquietspourlajeunefemme,crièrentsonnomavantdes'élancerenbasdelapente.Lesenfantsavaientdéjàdisparudanslesarbres,pourlachercher.Alaricsemitluiaussiàcourir.ToutlemondesefigeaquandlavoixdeKeeleycria:—Noussommesattaqués!Sansperdreuneminute,lesdeuxgardesetAlaricdégainèrentleurépée.Cormaccriaendirectiondelaforteresse,dansl'espoird'êtreentendu,puisilordonnaàChristinad'allerchercherdel'aide.Dèsqu'ilsatteignirentlalisièredesarbres,ilscroisèrentRobbieetGretchen,quiressortaientenpleurant.Commeilsbalbutiaientdesparolesincohérentes,Gannonlesserradanssesbraspourlesapaiser.—IlsontenlevéKeeleyetCrispen,expliquafinalementGretchen.Dépêchez-vous!Ilsontdeschevaux.—ParleChrist!juraAlaric.Nousn'arriveronsjamaisàlesrattraperàpied.Ilssuivirentcependantlestracesdepasquiserepéraientfacilementdanslaneigeets'enfonçaientdanslaforêt.

Alaricétaitpartagéentre lacolèreet l'effroi.Unefois,déjà, ilavait failliperdre lefilsd'Ewan.Maisaujourd'hui,ilnerisquaitpasseulementdeperdreungarçonnetchéripartoutleclan,maisaussilafemmedesoncœur,qu'ilaimaitplusquesavie.Audétourd'unbosquettouffu,AlariceutlagrandesurprisedevoirCrispensurgirdederrièreunarbrepoursejeterdanssesbras.—OncleAlaric,dépêchez-vous!IlsontenlevéKeeleyetilscroientquec'estmamère.Ilsvontlatuer,quandilsdécouvrirontlavérité!—Commentas-tufaitpourtelibérer?demandaAlaric,médusé.CarsiCameronpensaitdétenirlafemmed'Ewanetsonfils-c'est-à-diretoutcequ'ilconvoitait-,AlaricnecroyaitpasqueleurpireennemiauraitlaisséCrispens'échapper.—C'estgrâceàKeeley,expliqualegarçon.Elleafrappédeuxdesguerriersàl'entrejambeetellem'acriédem'enfuir.Elleavoulufairepareil,maisletroisièmeguerrierl'aattrapéeparlescheveux.Ellem'aditquejedevaiscontinuer.—Elleluiasauvélavie,murmuraCormac,admiratif.Alarichochalatête.—Oui.Ondiraitqu'elleapourhabitudedesauverlesMcCabe.Et,saisissantCrispenparsatunique,ildemanda:—Situn'espasblessé,j'aimeraisqueturetournesàlaforteressepourexpliqueràtonpèrecequis'estpassé.Dis-luiquenousavonsbesoind'hommesetdechevaux.Mais il devra en laisser suffisamment pour défendre la forteresse. Précise aussi que Mairin ne doitsurtoutpassortir.—Oui,acquiesçaCrispenavecdétermination.Sacolèreétaitsiperceptiblequesestraitsavaientpresqueperduleurcaractèreenfantin.—Venez,ordonnaAlaricàGannonetCormac.Nousallonscontinueràpied, jusqu'àceque lesautresnousrejoignentavecleschevaux.Ilnefautsurtoutpasperdreleurstraces.22Plusieurs longues minutes plus tard, Ewan apparut sur son cheval. Il tenait les rênes d'un deuxièmeanimal,destinéàAlaric.Caelenl'accompagnait,ainsiqu'unedemi-douzainedeguerriers.Alaricsauta immédiatementsursamonture, ignorant ladouleurqui luicisailla leflancdroit.C'était lapremièrefoisqu'ilremontaitenselledepuissablessure.GannonetCormacl'imitèrent,pendantquelesautresguerrierssechargeaientderamenerlesenfantsàlaforteresse.Alaricpartitdroitdevant,sansmêmeattendrelesordresd'Ewan.Laneigeleurfacilitaitletravail,carilsn'avaientqu'àsuivrelestraces.—Restesurtesgardes,luicriaEwan,derrièrelui.Aucasoùilsvoudraientnoustendreuneembuscade.Alaricseretournaverssonfrère.—IlscroientavoirenlevéMairin.Penses-tuquetumeconseilleraisd'êtreprudent,sic'étaitellequiétaitendanger?Ewangrimaçamaisneréponditrien.— Ils ne pouvaient pas espérer s'enfuir vite, avec toute cette neige,marmonnaAlaric. Les conditionsétaientplutôtrisquées,pourunenlèvement.—Oui.Ilssontauxabois.Ilsaurontvoulufrapperaumomentoùnousnousyattendionslemoins.Caelenrapprochasonchevaldesesdeuxfrères.—Nousn'aurionspasdûlaisserlaforteresseavecunegarnisonréduite.C'estMairinetlebébé,quisontimportants.Alaricauraitvolontierstirésonfrèreàbasdesonchevalpourlefrapper.Maisiln'étaitpasquestiondeperdreuneminutes'ilsvoulaientretrouverKeeley.

—Çasuffit!tonnaEwan.Keeleyesttoutaussiimportante.Etlaforteresseestbiengardée.Seulunfouoseraitlanceruneattaqueenpleincœurdel'hiver.—Cameronadéjàprouvéqu'il était fou, fitvaloirAlaric.Dépêchons-nousde retrouverKeeleyavantqu'ilnesoittroptard.Malgrél'assurancequ'iltentaitd'afficher,iln'enmenaitpaslarge.Ilsavaitpertinemmentquedèsquesesravisseurss'apercevraientqueKeeleyn'étaitpasMairin,savienevaudraitplusrien,carlajeunefemmene leur serait plus d'aucune utilité. Cameron ne poursuivait qu'un seul but, et il n'était pas homme às'embarrasserdedétails.Ilpressal'alluredesoncheval,quitteàl'épuiserrapidement.S'ilsavançaientplusvitequelesravisseurs,ilsavaientunechancederattraperleurretard.—Tunedevraispasêtreici,grommelaCaelen.Tun'étaispasencoreenétatderemontersurunchevaletencoremoinsdetebattre.Alaricsetournaverssonfrère.—SijenemebatspaspourKeeley,quis'enchargera?—JenelalaisseraipasàCameron,réponditCaelen.Jenecomprendspastafascinationpourcettefille,maisjenel'abandonneraipasàsonsort.Tudevraisretourneràlaforteresse.Ignorantsonfrère,Alariccontinuad'avancer.Auboutd'uneheuredepoursuite,oupeut-êtredavantage-Alaricavaitperdulanotiondutemps-,lesoleilcommençades'enfoncerderrièrelescrêtesdescollines.Fautedetorches,ilsseraientobligésd'abandonnerleursrecherchesdèsquelanuittomberait.Ilschevauchaientensilence,scrutantl'horizonduregard,pourtenterd'apercevoirleursennemis.Ilsfaillirentluipasserdessus.C'estCaelenqui, le premier, remarquaune formedans laneige. Il tira sur ses rênespour stopper sonchevalet,avantqu'Alaricn'aitpuréalisercequisepassait,ilavaitdéjàmispiedàterre.—Alaric,c'estelle!s'écriaCaelen,quandilsefutpenchésurlaforme.EwanetAlaricdescendirentenmêmetempsdeleurcheval.Alaricavaitlesjambesquitremblaient.Caelen s'agenouilla, pour ôter la neige qui recouvrait le corps deKeeley. Alaric le rejoignit. Il aidaCaelenàenlevercequ'ilrestaitdeneige,pourserrerlajeunefemmedanssesbras.—Keeley,murmura-t-il.Keeley!répéta-t-il,plusfort,voyantqu'ellenerépondaitpas.Elleétaitglacée.Alariccollasonoreillecontresonvisageetilfutsoulagédel'entendrerespirer-bienquetrèsfaiblement.—Elleauneblessureàlatête,remarquaCaelen,quil'examinaitsoustouteslescoutures.—Dépêchons-nous,lespressaEwan.Sesravisseursrôdentpeut-êtreencoredanslesparages.Etlanuitvatomber.CommeAlaricserelevait,lajeunefemmegrimaçadedouleur.—Keeley?Elleouvritlespaupières.Sonregardsemblaitperdu.—Alaric?—Oui,chérie,c'estmoi.Tum'asfaitunebellepeur,maistoutvabien,maintenant.Nousallonsrentreràlaforteresse.Caelenrécupéralajeunefemmedanssesbras,pendantqu'Alaricremontaitenselle.PuisilrenditKeeleyàsonfrère.Et,àlagrandesurprised'Alaric,celui-cipritunecouverturesursonchevaletlaluioffritafinqu'ilpuisseyemmitouflerKeeley.—Merci,Caelen.Caelen hocha la tête,monta à son tour en selle et semit aussitôt en route.Alaric le suivait et Ewanfermaitlamarche.

Aprèsquelquescentainesdemètres,ilsfurentaccueillisparuncontingentdeguerriersMcCabequilesescortèrentjusqu'àlaforteresse.Dèsqu'ilspénétrèrentdans lacour,Caelensautaàbasdesonchevalet tendit lesbraspour récupérerKeeley.— Je peux marcher, protesta la jeune femme. Caelen ne répondit rien. Il souleva Keeley et refusaqu'Alaricprennelerelais.—Tun'espasenétatdelaporter.Turisquesderouvrirtablessure,alorsqu'ellevientenfindecicatriser.Voyantquelajeunefemmetremblaitdefroid,Alaricpréféranepasdiscuter.Ilseprécipitapourouvrirlaporteetlivrerpassageàsonfrère.Caelen lança une série d'ordres à l'intention des domestiques, avant de s'engager dans l'escalier quiconduisaitàlachambredelajeunefemme.Plusieursservantesmontèrentàsasuite,pourrallumerlefeuetrajouterdesfourruresàlagarnituredulit.QuandCaelendéposaKeeleysursacouche,lajeunefemmetremblaittoujoursdespiedsàlatête.Elleclaquaitmêmedesdents.AlaricpoussaCaelendecôtépourmontersurlelitetlaserrerdanssesbras.—Je...j'ai...j'aifroid,balbutia-t-elle.Très...froid.Alaricluiembrassalefront.—Jesais,chérie.Niche-toibiendansmesbras,tunevaspastarderàteréchauffer.—Crispen!s'exclama-t-elle,soudainpaniquée.Oùest-il?L'avez-voustrouvé?Etlesautresenfants?—Crispenestsainetsauf.Ainsiquetouslesenfants.Raconte-moiplutôtcommenttuasput'entirer.Àsagrandesurprise,elleréussitàsourire.—Ilsm'avaientprisepourMairin.Dèsqu'ilsontcomprisleurerreur,ilsontvoulumetuer.Alaricétouffaunjuron.C'étaitexactementcequ'ilavaitcraint.Caelenfronçalessourcils.—Pourtant,vousavezsurvécu.Fallait-ilqu'ilssoientbêtes!—Ehoui!Malheureusementpourvous!ironisaKeeley.J'imaginevotredéceptiondemevoirencoreenvie.Enfait,j'airéussiàlesconvaincrequej'étaisunesorcière,etqu'ilsseraientmaudits,ainsiqueleurprogéniture,s'ilsmetuaient.Caelensecoualatête.—Jen'aijamaissouhaitévotremort,Keeley.Vousêtesinjustedelesuggérer.Keeleyhaussaunsourcil,tandisqu'Alaricdemandad'unairimpatient:—Unesorcière?Etilsontcruàcesfadaises?—Tout à fait. Je leur avais causébeaucoupde souci, pourpermettre àCrispende s'enfuir.Et j'avaismordu celui qui me tenait sur son cheval. Ils étaient donc déjà à moitié convaincus que j'étais undangereuxdémon.Caelens'esclaffa.—Vousnemanquezpasderessources,dit-il,admiratif.Beaucoupd'hommesn'enauraientpasfaitautantpoursauverleurvie.LajeunefemmeselovatoutcontreAlaricetfermalesyeux.—Non, chérie, reste éveillée, s'alarmaAlaric. Et, se tournant vers Caelen, il implora : Dis quelquechose...Moque-toid'elle.Oumets-laencolère.Ilnefautpasqu'elles'endormeavantd'êtrecomplètementréchaufféeetquenousayonspusoignersablessure.Caelensemblaits'inquiéter,luiaussi.Ilsepenchasurlajeunefemme,blottiedanslesbrasdesonfrère.—Jeregrettedevousavoirtrouvéedanslaneige,Keeley,dit-il.J'aiététropgentilavecvous.Vousmerécompensezbienmaldemagénérosité!Ellerouvritunœil.—Jen'aipasl'intentiondemourir,Caelen.Alors,gardezvosinsultespourvous!Caelenseredressaenriant.

—J'auraisdûm'endouter.Vousêtestropméchantepourmourir.Nousavonsaumoinsunpointcommun.—QueDieumevienneenaide ! se récriaAlaric. J'avaisdéjà assezd'unCaelencommecela.Alors,deux...—Vousserezplusgentilavecmoi,désormais?murmuraKeeley,d'unevoixensommeillée.—Uniquementsivousrestezéveilléeetquevouscessezd'angoissermonfrère,répliquaCaelen.Alaricressembleàunemèrequis'affolepoursonenfant.—Nesoyezpastropgentilnonplus.Sinon,jevaiscroirequejememeurs.Savoixs'affaiblissait,à lagrandecrainted'Alaric.Oùdiableétaientpassées lesservantesquiavaientreçul'ordredemonterdel'eauchaude,d'autrescouverturesetdelasoupe?CaelenetAlaricéchangèrentunregardsoucieux.PuisCaelenserelevabrusquementetquittalachambre.Quelquesminutesplustard,MaddiesurgissaitavecChristina.BerthaetMairinlessuivaientdepeu.—Mairin,lagrondaAlaric.Vousnedevriezpasêtreici,dansvotreétat.Laissez-nousnousoccuperdeKeeley.Mairinpointaundoigtdanssadirection.—Taisez-vous,AlaricMcCabe.Keeleyestmonamie,etelleasauvémonfils.Jevaisresteràsonchevetautantqu'ilseranécessaire.Le tub et les seaux d'eau arrivèrent peu après.Dès que le tub fut plein, les femmes demandèrent auxhommesdequitterlapièce.Alaric se releva à contrecœur. Il ne voulait pas abandonner Keeley, mais il sortit, craignant que saprésencesoulèvedesquestionsetrendelasituationplusdélicateencore.Cependant,une foisdans lecouloir, il seplantadevant laporteet refusad'enbouger.Caelen resta luitenircompagnieetEwannetardapasàlesrejoindre.—Jesupposequemafemmeestàl'intérieur?lançaEwanavecunsoupirrésigné.—Oui,réponditAlaric.EllesfontprendreunbainàKeeley,pourlaréchauffer.—J'ai fait doubler les rondes, et les enfants n'ont plus le droit d'aller jouer sur la colline.Quant auxfemmes,aucunenepourraquitterlaforteressesansescorte.Caelenapprouvacesmesures.—Aussitôtqueleprintempsreviendraetquenouspourronsscellernosalliances,nousnousmettronsencampagnepouranéantirCameron.Notreclanneconnaîtrajamaislapaixtantqu'ilseravivant.Alaricdéglutit et s'adossa aumur. Il était conscient que sonmariage avecRionnaMcDonaldpressait.Cependant, il redoutait l'arrivée de sa fiancée et il priait pour que l'hiver n'en finisse pas et que lestempêtesdeneigesuccèdentauxtempêtesdeneige.ToutcequipourraitretenirlesMcDonalddansleursmursseraitbonàprendre.LaportedeKeeleyserouvritetMairinseglissadehors.Ewanlapritaussitôtdanssesbrasetlajeunefemmeposasatêtesursonépaule.Maisc'estàAlaricqu'elles'adressa:—Keeleyvamieux.Nous l'avonsbien réchaufféeetmaintenant, elle est au lit.Sablessure, aucrâne,n'étaitpastrèssérieuse.Iln'amêmepaséténécessairedelarecoudre.Alariclaissaéchapperunsoupirdesoulagement.Lesautresfemmessortirentégalementdelachambre.Maddie,aupassage,luijetaunregardinterrogateurqu'ilpréféraignorer.Maisdèsquetoutlemondefutsorti,ils'empressadesefaufilerdanslapièce.—Assurez-vousquenousnesoyonspasdérangés,lança-t-ilàsesfrères,avantderefermerlaporte.

23KeeleyouvritlesyeuxetvitAlaricdeboutàsonchevet.—Commenttesens-tu?demanda-t-il.—Mieux.Maintenant,j'aibienchaud.Maistandisqu'elleluirépondait,elleneputréprimerunfrissonquiluiparcouruttoutlecorps.Alarics'allongeaàcôtéd'ellepourlaserrerdanssesbras.Son corps était délicieusement chaud etKeeley se lova contre lui pour absorber sa chaleur.C'était sidélicieuxqu'elleengémitd'aise.—Tun'aspasmal?s'inquiétaAlaric.—Non,aucontraire.C'estmerveilleux.Tuessichaudquejen'aiplusenviedebouger.Illuiembrassalessourcils.—Sij'avaislechoix,tunebougeraispas.—Jepeuxdormir,àprésent?Maddieassurequemablessuren'estpastrèsgrave.Etj'aidumalàgarderlesyeuxouverts.—Oui,Keeley.Endors-toi.Jevaisresterici,pourveillersurtoi.Sapromesseréchauffaencoreunpeupluslecœurdelajeunefemme.Elleavaitbeausavoirqu'iln'auraitpasdûêtrelà,ellen'avaitnil'envienilaforcedelechasser.Ellefrottasajouecontresontorseetsoupiradecontentement.Ellepasseraitlanuitdanslesbrasdesonguerrier,etellenesongeaitnullementàs'enculpabiliser.Ilseraitbienasseztôt,demain,poursepréoccuperdelasuite.Durant la nuit,Alaric fut réveillé par lesmouvements deKeeley. Il se redressa sur un coude pour laregarder.Elles'agitaitanormalement.Inquiet,ilposaunemainsursonfront.Ilétaitbrûlant.—Ilfaitfroid,dit-elled'unetoutepetitevoix.Jen'arrivepasàmeréchauffer.Rallumelefeu,s'ilteplaît.Ellefrissonnaitetbienqu'ellefûtbrûlante,ellesemblaitgelerintérieurement.—Calme-toi,chérie.Jevaisteréchauffer.En même temps qu'il disait cela il se souvint que trop de chaleur aggravait la fièvre. Devait-il ladébarrasserdesfourruresquilarecouvraientetlabaigneràl'eaufroide,outoutaumoinspasserunlingehumidesursonfront?Alaricsesentaitimpuissant.Ilignoraitcommenttraiterlafièvre.Ilsavaitsebattre.Ilsavaittuerpoursedéfendre.Maissoignern'étaitpasdanssonregistre.Ilrepoussalajeunefemmeavecdouceur,pours'extrairedulit.Lapièceétaitfroideetc'étaitsansdoutepréférableainsi.—Jerevienstoutdesuite,murmura-t-ilenluiembrassantlefront.Jetelepromets.Elle laissa échapper un petit gémissement qui serra le cœur d'Alaric,mais il tourna quandmême lestalonspourquitterlachambre.Laforteresseétaitencoreendormie.Ilsedirigeaverslachambred'Ewan.Il frappadoucementaubattant, sachantqu'Ewannedormait jamaisqued'uneoreille,mais iln'osapasentrer,depeurd'interromprelelairdetsafemmedansuneétreinte.Maisdèsqu'ilentenditgrommeler,ilpoussalaporte,pourpassersatêteàl'intérieur.—C'estmoi,murmura-t-il.Ewans'assitdanslelitenprenantsoindecouvrirMairinaveclesfourrures.—Alaric?murmuralajeunefemme,d'unevoixensommeillée.Quesepasse-t-il?C'estKeeley?

—Rendors-toi,luiditgentimentEwan.Tuasbesoinderepos.Jem'enoccupe.—Toutvabien,larassuraAlaric.JesouhaitaisjusteparleràEwan.Ewans'habillaenvitesseetlerejoignitdanslecouloir.—Qu'ya-t-il?—JenevoulaispasparlerdevantMairin,parcequejemedoutaisqu'ellevoudraitselever.Keeleyadelafièvreetjenesaispasquoifaire.—Jevaisl'examiner,proposaEwan.Les deux frères retournèrent dans la chambre de la jeune femme. À leur entrée, Alaric s'aperçut queKeeleyavaitrepoussétouteslesfourruresaupieddulit.Elles'agitaitdeplusenplus,enpoussantdespetitscrisdedétresse.Ewans'approchadulit.Ilposaunemainsurlefrontdelajeunefemme,puissursesjoues.—Elleestbrûlante,constata-t-ilavecinquiétude.Alaricsentaitlapeurlegagner.—Commentest-cepossible?Ellen'estpratiquementpasblessée.Justeuneégratignureàlatête.—Elleestrestéeplusieursheuresdanslaneige,fitvaloirEwan.C'estsuffisantpourrendremaladeleplusvaillantdesguerriers.—Alors,cen'estpastrèsgrave?Ewansoupira.—Jenevoudraispastedonnerdefauxespoirs,Alaric.J'ignoreàquelpointsonétatestsérieux.Seulletempsnousledira.Pourl'instant, ilfaut luirafraîchir lapeau,sanssesoucierdelavoirfrissonner.Jevaisallerchercherunecuvetted'eauetdeslingespourluibaignerlefront.Maisilfaudrapeut-êtrequetul'immergesdansl'eaufroide.Aussiétonnantquecelaparaisse,notrepèreavaitrecoursàceremèdepoursoignerlesgrossesfièvres.Jemesouviensd'unefoisoùilavaitordonnéqu'onremplisseuntubdeneige,pouryplongerunguerrierquisouffraitdepuisplusieursjours.L'expériencenefutpastrèsagréablepourleguerrier,maisilsurvécut.Etilesttoujoursvivantaujourd'hui.—Jeferaitoutcequ'ilfautpourlasauver.Ewanhochalatête.—Je sais.Reste avec elle. Jem'occuped'aller chercher l'eau.Soispatient,Alaric.Çapourrait durerplusieursjours.—Ellem'aveilléquand j'étais souffrant. Jepeuxamplement lui rendre lapareille.Ellen'apersonne.Nous sommes sa famille, à présent.Notredevoir est denousoccuperd'elle commeden'importequelmembreduclan.Ewann'hésitaqu'uncourtinstant,avantdehocherencorelatête.—Jesaisquejeluidoistavie.Etcelledemonfils.Madetteenversellesecreuseraencore,sielleaideMairinàaccoucher.Net'inquiètepas.Jeprendraisoind'elle.Alaric se sentit soulagéd'ungrandpoids. Iln'auraitpasvouluentrerenconflit avecson frère.Keeleycomptait beaucoup pour lui etmême s'ils n'avaient pas d'avenir ensemble, il était prêt à tout pour lasauver.Dès qu'Ewan fut reparti, Alaric reporta son attention sur la jeune femme. A présent, elle dormaittranquillement,sanspluss'agiter.Il s'allongea près d'elle et lui caressa les cheveux. Elle se lova contre lui. Même ses lèvres étaientbrûlantes.—J'aifroid,murmura-t-elle.Trèsfroid.Alaricluiembrassalatempe.—Jesais,chérie.Jesaisquetuasfroid.Maisjevaisprendresoindetoi.Ellesoupira,puisluiembrassaletorse.Aucontactdeseslèvresbrûlantes,Alaricsentittoutsoncorpsseraidir.Keeleyentrelaçasesjambesauxsiennes,luicaressantl'entrejambeavecsongenou.Lemembred'Alaric

yréponditensegorgeantaussitôtdedésir.—J'adoregoûtertapeau,murmura-t-elle.Etpourleprouver,elleentrepritdeluilécherlabaseducou.Alaricn'osaitplusbouger.Nimêmerespirer.Dieuavait-ildécidédelemettreàl'épreuve?Ilmouraitd'enviedeposséderKeeleyetdeleurdonnerceplaisirqu'ilsdésiraienttousdeux,maisàcetteidée,ilsentaitlesflammesdel'enferluilécherlespieds.Outrequ'Ewannetarderaitpasàrevenir,ilserefusaitàprofiterdelasituationalorsqueKeeleyn'étaitpasdanssonétatnormal.La jeunefemmecontinuaitde l'embrasserets'apprêtaitàgrimpersur luiquandEwanrevintavecdeuxseauxd'eaufroideetdeslingespropres.—Ilfautquetuladéshabillespourqu'ellenegardequ'unelégèreétoffesurelle,dit-ilàAlaric.Riennedoitaugmenterlachaleurdesoncorps,nil'emprisonner.Alaricleregardad'unairoutragé.—Jetournerailatête,grommelaEwan.Tusemblésoublierquej'aimemonépouse.Jen'aiplusaucuneattirancepourlecorpsdesautresfemmes.Dèsqu'Ewans'occupaderemplird'eaulacuvette,prèsdelafenêtre,pourytremperleslinges,AlaricentrepritdedébarrasserKeeleydesarobe.Maislajeunefemmen'étaitpasd'accordetellelefitsavoir.—Non!cria-t-elle,avecvéhémence.Deslarmesobstruaientsagorge,rendantsavoix,déjàaltéréeparlafièvre,encoreplusrauque.—Non!répéta-t-elle.Nefaitespasça!C'estmal!Elleagitaitlesmainstoutenparlantetelleluifrappalajoue.Maiscommeellen'avaitpasplusdeforcequ'unchaton,ilnesentitrien.—Calme-toi,chérie.Jenevaispastefairedemal,jetelepromets.Net'inquiètepas.C'estmoi,Alaric.Tonguerrier.Ilcontinuadeluienleversarobe.Cettefois,aulieudeserévolter,lajeunefemmefonditenlarmes.Etsaposture évoquait la résignation. Comme si elle avait renoncé à lutter contre un quelconque démoninvisible.—Jesuischezmoi,dit-elled'unevoixbrisée.Vousnepouvezpasm'enchasser.Jen'airienfait.Alaricavaitdumalàcontenirsacolère.Ilréalisaitàprésentqu'ellerevivaitsonagressionparlelairdMcDonald,etlebannissementquiavaitsuivi.IlauraitvouluseprécipiterdansleclanMcDonaldpourtouslesmassacrer.—Jésus,queluiest-ilarrivé?demandaEwan.—Ellen'ajamaisconnuquel'injustice.Maiss'iln'entenaitqu'àmoi,jetejurequeceuxquiluiontfaitdumalnepourraientqueleregretter.—Alaric,commençaEwan,ellenedoitpastomberamoureusedetoi.Ceseraittropcruel.Ellenourritdéjà des sentiments trop forts à ton égard. Il faudrait être aveugle pour ne pas s'en apercevoir. Nel'encouragepasdanscettevoie.Ellen'enauraqueplusdechagrinlejouroùtuépouserasRionna.Situtiensàelle,tâchedeluiévitercettepeineetcettehumiliation.—Tumedemandesl'impossible,Ewan.Jenepeuxpasrenonceràellejusteparcequec'estlameilleuresolution.Bien sûr, que c'est lameilleure solution ! Je ne veux surtout pas lui faire demal,mais je ladésiretrop.—Celanepourraquemalseterminer,murmuraEwan.Soitpourtoi,soitpourKeeley,soitpourRionna.Quelqu'unsouffriraforcément.Amoinsquetunemettesdèsàprésentuntermeàcettehistoire.—Pourrais-turenonceràMairin?Si leroi t'avaitdemandéderenonceràelleparcequ'elledevaitenépouser un autre afin de sceller une alliance profitable au trône d'Ecosse, aurais-tu pu accepter sansbroncherdenejamaisl'avoirpourtoi?

—Tacomparaisonestridicule.— Je n'ai pas l'intention de me soustraire à mon devoir.Mais pour l'heure, Keeley vit avec moi, etj'entendsbienprofiterdechaqueinstantquenouspouvonspartager.Commecela,aumoins,quandnousdevronsnousséparer,nousauronsbeaucoupdesouvenirsàchérir.—C'estdel'inconscience,objectaEwan.Suismonconseil:éloigne-toid'elleavantqu'ilnesoittroptardetquetunesoistropimpliqué.Alaricsourittristement.—Ilestdéjàtroptardpourmedemanderdenepastropm'impliquer.—Montre-toidiscret,danscecas.NousnepouvonspasnouspermettredefâcherGregorMcDonald.Ilest une clé indispensable pour nous permettre de nouer d'autres alliances avec les clans qui nousentourent.—Jecroisplutôtquec'estàGregordenepasmefâcher,répliquaAlaric.Ilauraunegrossedetteàpayer,sursonlitdemort,pourcequ'ilafaitsubiràKeeley.EtjeneseraispasfâchédehâtersacomparutionauJugementdernier.Keeleyrecommençaàgémir,às'agiteretàbalbutierdesphrasesincohérentes.EwantenditàAlaricunlingehumidequecelui-ciappliquasurlefrontdelajeunefemme.Keeleys'apaisaquelquesinstants.MaisquandAlaricposaundeuxièmelingesursoncou,ellesemitàfrissonnerviolemment.—C'est...c'estfroid,Alaric.S'ilteplaît!Jeneveuxpasavoirfroid.—Chut,chérie.Jesuislà.—Veux-tuquejereste?demandaEwan.Alaricsecoualatête.—Non.Mairinvasedemanderpourquoitunerevienspastecoucher.Sij'aibesoind'eaupourletub,oudeneige,jeferaiappelàGannonetCormac.Ewanluiétreignitl'épauleetquittalachambre.AlariccontinuadebaignerKeeley.Chaquefoisqu'ilcaressaitsapeauavecunlingehumide,lajeunefemmeétaitagitéedenouveauxfrissonsetrecommençaitàgémir.Auboutd'unmoment, ilneputpasensupporterdavantage.Dureste, lapeaudeKeeleyétaitbeaucoupmoinsbrûlante.Lalaissantdéshabillée,ilserallongeaàcôtéd'ellepourlaprendredanssesbras.Ellesenichaaussitôtcontrelui,pourcaptersachaleur.Peuàpeu,ellecessadefrissonneretsesmusclessedétendirent.Alaricattrapaalorsl'unedesfourruresrepliéesaupieddulitetlatiraversluipourqu'ellelesrecouvretouslesdeux.Puisilluiembrassalefront.—Dors,àprésent.Jerestelàpourveillersurtoi.—Monguerrier,murmura-t-elle.Ilsourit.S'ilétaitsonguerrier,elleétaitsonange.

24Keeleyseréveillatrèsoppressée.Mêmerespirerluifaisaitmal.Etsatêteétaitsilourdequ'elleétaitincapabledelasoulever.Ellepassalalanguesurseslèvressèches,puistentadebouger.Sanssuccès.Impuissante,ellesentitdeslarmescoulersursesjoues.Commentpouvait-elleêtreréduiteàuntelétat?Que lui était-il arrivé ?Elle n'était pourtant jamaismalade.Elle s'était toujours enorgueillie d'être enparfaitesanté.—Keeleychérie,nepleurepas...Lavoixd'Alaric,d'ordinairesiagréableàentendre,résonnaitdouloureusementdanssoncrâne.Avecseslarmesquiluibrouillaientlavue,Keeleydistinguaitàpeinesestraits.—Jesuismalade,dit-elle.—Oui,chérie.Jesais.—Jen'aijamaisétémalade.Ilsourit.—Ehbien,maintenant,tul'es!—DemandeàMaddiemonemplâtrepourlapoitrine.Ildevraitsoulagerlabrûluredemespoumons.Alaricluicaressalajoue.—Net'inquiètepas.Maddieestdéjàvenuetroisfoisterendrevisitecematin.Unevraiemèrepoule!Mairin,enrevanche,s'estvurefuser l'accèsdetachambre.Elleestfurieuseetelle lefaitsavoiràquiveutbienl'entendre.Keeleyesquissaunsourire.—J'aifaim,seplaignit-elle.—Gertievat'apporterdelasoupe.Keeleyclignaplusieursfoisdesyeux,dans l'espoirdemieuxvoirAlaric.Savisionrestait floue,maiselledistinguaitsonbeauregardvert.—J'adore tesyeux,murmura-t-elle,avantd'ironiser : jedoisavoirbeaucoupde fièvre,pourdivaguerainsi.—Oui,tuasdelafièvre.— Pourtant, je n'ai plus froid. En principe, la fièvre s'accompagne de frissons glacés. Or j'ai plutôtl'impressiond'avoirtropchaud.—Maistapeauesttoujoursbrûlante.C'estbienlapreuvequetuesmalade.—Jedétesteêtremalade.Elle avait conscience de se montrer puérile, mais elle ne pouvait pas s'empêcher d'être d'humeurrenfrognée.Elleétaithabituéeàsoignerlesmalades,pasàgrossirleursrangs.Alaricsouritetlaserradanssesbras.—Pourquoiveilles-tusurmoi,etdansmachambre,enplus?demanda-t-elle.Cen'estguèreconvenable.—Jenecroispasquenousayonsétéuneseulefoisconvenables,depuisquenousnousconnaissons.Ellesourit.—Maisquevontpenserlesautres?Etquevont-ilsdire?—S'ilstiennentàleursabattis,ilsnedirontrien.Pourlereste,qu'ilspensentcequ'ilsveulent!Nousnepouvonspaslesenempêcher.Keeley fronça les sourcils. Il avait raison, et elle le savait.Mais elle savait aussi que les soupçonsalimentaient toujours des ragots et que les ragots conduisaient souvent à des accusations, lesquelles

provoquaientdesréactions...Alaricdéposaunbaisersursonfront.Ellefermalesyeux,pourmieuxsavourersatendresse.—Ewanvoudrasavoircequis'estpasséexactement.Tesens-tuenétatderépondreàsesquestions?Keeleyn'avaitguèreenviederepenserauxpéripétiesdesonenlèvement.Cependant,elleétaitconscienteque le lairdavaitbesoind'informations. Ildevaitprotégersa femme,son fils, son futurbébéet tout leclan.—Dumomentquej'aidel'eauàboire,jepourraim'entreteniraveclui.—Jem'assureraiqu'ilneteretiennepastroplongtemps.Laportes'ouvritaumêmeinstantetMaddiepassasa têtepar l'entrebâillement.Bienqu'elleconnût lessentimentsdeKeeleypourAlaric,lajeunefemmetressaillitetvouluts'écarter.MaisAlaricrefusadelalâcher.—Jevousapportede lasoupeetde l'eau,expliquaMaddieens'approchantdu lit.Lasoupeapaiseravotremaldegorgeetl'eauferabaisservotrefièvre.Vousdevezbeaucoupboire.C'estimportant.AlaricpritleboldesoupefumanteetleportaauxlèvresdeKeeley.—Doucement,dit-il.C'estchaud.Keeley avala une gorgée. Elle se sentait toujours aussi faible et elle était reconnaissante àAlaric del'aider.Ilsemontraitd'unepatienceinfinie,luitenantlebolpendantqu'ellebuvaitlentement.Maiselleavaitdumalàdéglutir,tantsagorgelafaisaitsouffrir.Quandellefutincapabled'enabsorberdavantage,elles'appuyaaubrasd'Alaricetfermalesyeux.—Jereviendraitoutàl'heure,ditMaddie.Sivousavezbesoindequelquechoseentre-temps,n'hésitezpasàm'appeler.Jemonteraiaussitôt.Keeley hocha péniblement la tête. Avaler la soupe avait épuisé toutes ses forces. Et elle n'avait pasencoreparléaulaird.Ellegardalesyeuxfermésetseconcentrasursarespiration.QuandAlaricluiembrassalatempeetlaserracontrelui,ellelaissaéchapperunsoupirdecontentement.Satendresselaréconfortait.Auboutdequelquesminutes,elleentenditfrapperàlaporte.Alaricrépondit,maissavoixluiparuttrèslointaine,commes'ilsetrouvaitsousl'eau.Amoinsquecesoitelle?Puis elle entendit Alaric se disputer avec le laird. Il lui demandait de repartir, et de différer soninterrogatoire.—Non,çaira,assuraKeeley,mêmesisagorgelabrûlaitchaquefoisqu'elledevaitprononcerunmot.Ewans'assitsur le lit,aupiedd'Alaric.Keeleytrouvacelaunpeucavalier,maisaprès tout, ilétait lelairdetilétaiticichezlui.—Voussentez-vousenétatdemeracontercequis'estpassédanslaforêt?demanda-t-il.J'aiparléavecCrispenetlesautresenfants,maisleursversionsnesontpasconcordantes.Ellevoulutsourire,maiscelalafaisaitsouffrir.—Jenecomprendspaspourquoijemesenssifaible.Lestraitsd'Ewanseradoucirent.—Jenevousremercieraijamaisassezd'avoirsauvémonfils.Ilm'aexpliquécommentvousvousétiezbattuepour lui.Jevousensuis infinimentreconnaissant.Et j'aipeurdenepaspouvoirremboursermadetteàvotreégard.Keeleysecoualatête.—Vousm'avezdéjàremboursée.Ewanfronçalessourcils.—Quevoulez-vousdire?—Votreclan,expliquaKeeley.Vousm'avezadmisedansvotreclan.Celamesuffitamplement.Alaricluiposalamainsurl'épaule.

—Vousserezicichezvousaussilongtempsquevouslesouhaiterez,assuraEwan.Jevousendonnemaparole.Keeleyléchaseslèvresparcheminéespourleshumecter.Sesfrissonsrevenaientdéjà.—J'aipeurdenevousêtred'aucuneaide,dit-elle.Touts'estpassésivite.Jesaisjustequ'ilsm'ontprisepourvotrefemme.Etqu'ilsvoustraitaientd'idiotpouravoirlaisséladyMcCabesanssurveillance.Ewanfronçaencorelessourcils.Sonvisages'étaitbrutalementassombri.—Enfait,ajoutaKeeley,ilssevantaientd'avoirréussiàcapturervotrefemmeetvotrefils.Ewansepenchaverselle.—Ont-ilsditautrechose?Leursnoms?Avez-vousreconnuleursarmoiries?Keeleysecouad'abordlatête,avantdeseconcentrersursessouvenirs.—Oui,ilsontditquelquechose.QueCameronlesrécompenseraitgénéreusementpourleurprise.C'esttoutcequejemerappelle.Maisquandilssesontaperçusquejen'étaispasenceinteetqu'ilsontcomprisleurerreur,ilsontvoulumetuer.— Des mercenaires ! cracha Alaric. Cameron a promis une récompense à quiconque lui apporteraitMairin.Ewanproféraunebordéedejurons.—Oui,cesontdesmercenaires.Cequiveutdirequ'ilssontprêtsàtout.—Etqu'ilsn'appartiennentàaucunclan,renchéritAlaric.Donc,ilsn'ontpasdeforteresseoùretourner.Sansdouterôdent-ilstoujoursdanslesparages.Ewanplissaleslèvres.—Eneffet.Jecroisqu'ilesttempsdelancerlatraque.—Jevaist'accompagner,ditAlaric.Ewanhésita,avantdesecouerlatête.—Non.Jepréfèrequeturestesici,pourveillersurMairin.JeprendraiCaelenavecmoi.Surcesmots,ilselevaets'inclinadevantKeeley.—Jevousremercieencore.J'espèrequevousvousrétablirezrapidement.Keeley marmonna une réponse polie, mais, dès qu'il eut quitté la chambre, elle ne put réprimer unbâillement.Elleavaitdenouveaufroidetelleauraitaiméavoirdesfourruressurelle.PourquoiAlaricn'enavait-ilgardéqu'uneseule?—Tum'as fait unepeurbleue,dit-il.Quand j'ai apprisque tu avais été enlevée, j'ai craintdenepaspouvoirteretrouver.J'espèrebiennejamaisrevivreuntelmomentd'angoisse.—Jesavaisquetuviendrais.—Tafoienmoimebouleverse.Keeleyluicaressaletorse.Unjour...unjour,c'estRionna,qu'ilprotégerait.Etleursenfants.Keeleynepourrait plus s'en remettre à lui quand elle seraitmalade.Mais pour l'instant, elle voulait savourer leplaisirdel'avoiràsescôtés.—Tudevraistereposer,Keeley.Jesensbienquetuastoujoursdelafièvre.Elles'étaitdéjàassoupie.Alaricfaisaitlescentpasdanslagrandesalleobscure.Ewanétaitpartidepuisplusieursheuresavecuncontingentdeguerriers,pourtraquerlesmercenairesquiavaientagresséCrispenetKeeley,etàprésentl'aubenetarderaitplusàselever.L'impatienced'Alaricgrandissaitàchaqueminutequis'écoulait.Ilétaitfurieuxdedevoirresterici,alorsqu'ilauraitvoulusebattre.Unebonnebagarreluiauraitpermisd'assouvirsarage.Alaricn'envoulaitpasseulementàceshommesd'avoirosétoucheràcequiluiappartenait-carKeeleyétaitsienne.Ilavaitbesoindesedéfoulerpourtenterdeconjurerledestinquil'empêchaitdegarderlafemmequ'ilaimait.

Pourtant,aulieudesebattre,ilenétaitréduitàattendresesfrères.IlauraitpuremontervoirKeeley,cependantMaddies'occupaitdéjàd'elle.Lefeumouraitdanslacheminée,maisplutôtqued'appelerquelqu'unpourleranimer,ils'enchargealui-même.Bientôt,denouvellesbûchescrépitaientdansdegrandesflammes.Toutàcoup,Alaricentenditdesbruitsenprovenancedelacour.Ilseprécipitaverslaporteetdescenditlesmarches.EwanetCaelenrentraientàlatêtedeleurdétachementdeguerriers.Alarics'empressadelescompter.Leur nombre était lemêmequ'au départ et tous semblaient en pleine forme.Ce qui voulait dire qu'ilsavaientéchouédansleurmissionderetrouverlesagresseursdeKeeley-ouqu'ilsn'avaientessuyéaucunepertedanslabagarre.Ewanmitpiedàterreets'essuyadistraitementlamainsursatunique.Unetracedesangapparutaussitôtsurl'étoffe.Alarics'avançaàsarencontre.—Es-tublessé?Ewansecoualatête.—Non.Personnen'aétéblessé.—Ilssontmorts?—Oui,réponditCaelend'unevoixsombre.Ilsnenouscauserontplusd'ennuis.Alarichochalatête.—Parfait.—Ilsn'ontpasvouluparler,etjedoisreconnaîtrequejen'aiguèreétépatientpourlesinterroger,repritEwan.C'étaientbien leshommesquiavaientenlevéKeeleyetCrispen.EtcommeKeeleysesouvenaitqu'ilsavaientparlédeCameron,jen'avaispasbesoindepreuvesupplémentaire.—Combiendetempsallons-nousencoreattendreavantdenousoccuperdeCameron?demandaAlaric.LesautresguerriersfirentsilencepoursetournerversEwanetattendresaréponse.Lamêmequestionselisaitdansleursyeux.Ilsvoulaientlaguerre.Etilsyétaientpréparés.TousméprisaientCameronetluienvoulaient de ce qu'il avait fait subir au clanMcCabe.AucunMcCabene connaîtrait le repos tant queCameronetsessbiresneseraientpasrayésdelasurfacedelaterre.—Plus très longtemps, réponditEwan.Mais il fautnousmontrerpatients.Après lanaissancedemonenfant, nous réclamerons les terres de Neamh Alainn. Et ton mariage avec Rionna McDonald nouspermettra d'avoir le soutien de nos voisins. Alors, nous pourrons partir en guerre contre DuncanCameron.Lesguerriershurlèrent leurassentimentenbrandissant leursépéesbienhautdans lanuitétoilée.Leurslamesbrillaientàlalueurdestorches.Alaric croisa le regard de son aîné. Ewan semblait animé d'une détermination sans faille, et pour lapremièrefois,Alariceuthontederepoussersonmariage.Ewan était complètement dévoué à son clan. Bientôt, les McCabe seraient l'un des clans les pluspuissantsdesHighlands.SiAlaricpouvait,parcemariage,rendreserviceàsonclan-etaussiàsonfrèreetàMairin,quilesavaitsauvésdel'extinction-,alorsilétaitprêtàs'yengagerfièrement.Iltenditlamain.Ewans'enemparaetilsseregardèrentlongtempssansdireunmot.Rengainant son épée,Caelen donna l'ordre aux guerriers de descendre de cheval et de regagner leursquartiers.Puisilsetournaverssesdeuxfrères.—Quiaenvied'unplongeondansleloch?

25Quand Keeley se réveilla, son crâne était douloureux et sa bouche plus desséchée que jamais. Elles'humectalonguementleslèvres,avantdesetournersurlecôté.Lemoindremouvementluiétaitpénible,etellen'avaitaucuneénergie.Soudain,elles'aperçutquelesfourruresquilacouvraientavaientétérepousséesaupieddulit.Elleétaitcomplètementnue!Keeleysesentitrougirdeconfusion.Dieuseulsavaitquiavaitpuentreretsortirdesachambrependantqu'elledormait!Un soupir se formadans sapoitrine,mais elle se refusa à le laisser franchir ses lèvres.Elle en avaitassez.Ellen'allaitpas rester éternellementdanscet étatde faiblesse !Combiend'heures,oude jours,avait-elledéjàperdusàgarderlelitcommeunenfantmalade?Sagorgelafaisaittoujourssouffrir,maislafièvreétaitretombée.Ilétaitgrandtempsqu'ellequittelelit.Il lui fallut plusieurs longues et éprouvantesminutes avantdeparvenir à s'asseoir auborddu lit.Elleaurait aimé prendre un bon bain,mais elle n'avait pas la force d'attendre.Aussi se contenta-t-elle deplongerunlingedanslacuvetteréservéeauxablutionspourselaver.Aprèssatoilette,ellechoisitunerobeetellelaregardacommesielles'apprêtaitàlivrerbataille.C'étaitunpeucela,dureste,carelledutfaireappelàtoutessesforcespourpasserlarobeetlafermer.Quandelle eut enfin terminé, elle s'assit denouveau sur le lit, pour reprendre son souffle avant de serisqueràsortir.Ladescentede l'escalier fut laborieuse,maisKeeley s'enorgueillit denepas avoir trébuchéune seulefois.C'estdoncépuisée,maisassezfièred'elle,qu'ellearrivadanslagrandesalle.Mairinsursautaenlavoyant.—Keeley!Maisquefaites-vouslà?Vousdevriezgarderle lit.Alaricserafurieuxdevousvoirdéjàlevée.Keeleys'assitàcôtédeMairin.—J'aipeurdenepasêtreunemaladetrèspatiente.Etdenepassavoirrespectermoi-mêmelesconseilsquejedonneàceuxquejesoigne.Mairinéclataderire.—Commentvoussentez-vous?Jevoustrouveencoreunpeupâle.Keeleygrimaça.—Magorgeesttoujoursdouloureuse.Moncrâneégalement.Maisjen'auraispassupportéderesterpluslongtempsalitée.Jemesensdéjàbeaucoupmieux,maintenantquejesuisdebout.Mairinreposasespiedssurlecoussinplacédevantsachaise.—Personnellement,j'auraisvolontiersparesséaulitpouraujourd'hui.Lebébécommenceàmepeseretj'aidumalàtenirdebouttrèslongtemps.—Vousdevriezvouscoucher,eneffet.Ilnefautsurtoutpasvousfatiguer.Mairinsourit.—Vousditescelad'untonconvaincu,etpourtantvousn'enfaitesrienvous-même.—C'est le privilège des guérisseuses ! ironisaKeeley.Quelquesminutes plus tard, les deux femmesfurentstupéfaitesdevoirarriverEwanavecunmessagerduroi.Nesachantpastropquellemarquederespectelledevait témoignerà l'envoyédumonarque,Keeleys'empressadese redresserpourse tenirbiendroite,tandisqu'AlaricetCaelenlesrejoignaient.Mairinvoulutseleveràsontour,maisEwanseprécipitapourposerunemainsursonépaule.

—Non,nebougepas,dit-ilavantdefairesigneàKeeleydeserasseoir.Ilfronçalessourcilspourmarquersadésapprobation,maisilnefitaucuncommentaireetrevintverslemessager.—Jevousapporteunelettreduroi,ditcelui-ci.Etjedoisattendrevotreréponseavantderepartir.Ewaninvitalemessageràs'asseoiràlagrandetable.Puisilcommandadesrafraîchissementsencuisine.Aprèsquoiildéroulalamissiveetlalutensilence,avantdereleverlesyeuxpours'adresseràAlaric:—Cettelettreparledetonprochainmariage.AlarichaussalessourcilsetjetaunbrefregardàKeeleyavantdereportersonattentionsursonfrère.— Le roi nous témoigne sa satisfaction et exprime son impatience de voir cette alliance scellée. Ilaimeraitvenirassisterà lacérémonieet souhaiteraitquenous invitions tousnosvoisinsafinqu'ils luifassentallégeance.Lasalleétaitdevenueparfaitementsilencieuse.Keeleyavaitlagorgeserrée.Etcommeellen'osaitpasregarderAlaric,ellebaissalesyeuxsursesmainspourcachersonchagrin.—C'estungrandhonneurqueleroinousfaitlà,Alaric,commentaEwan.—Oui.Transmets-luimeshumblesremerciements,réponditpolimentAlaric.—Ildemandequejel'informedeladatedumariagedèsquenousl'auronsarrêtée.Ducoindel'œil,KeeleyvitAlarichocherlatête.PuisKeeleyentenditMairinsoupireretquandelletournalatêtedanssadirection,ellevitquecelle-cilaregardaitaveccompassion.Keeleys'obligeaàsourireetàredresserlementon.—J'aitoujoursdésirérencontrerleroi,dit-elle.Cesoir-là,Keeleyremontadanssachambreavantlafindurepas.Elleenavaitdéjàassezendurécommecelaetelleétaitimpatientedes'immergerdanslebainchaudqueMaddieluiavaitpromis.Elleétaitsifatiguéequ'ellemontal'escalieravecpeine,trébuchantplusieursfois.Quandelleentradanssachambre,ellefutsicontentedevoirlesservantesoccupéesàremplirletubd'eaufumantequ'ellefaillitsemettreàpleurer.Maddiearrivaquelquesminutesplustard,pours'assurerquetoutétaitenordre.Puiselles'assitsurlelit,àcôtédeKeeley.—Avez-vousbesoind'aidepourentrerdansletub?Keeleysourit.—Merci,maisnon,çaira.Vousêtesadorable,Maddie.Jesaisqu'iln'estpasfaciledemonterl'eaudanslesescaliers.Maddieluitapotaaffectueusementlegenou.—C'est bien lemoinsquenouspuissions fairepourvous.Si nousnenouspréoccuponspasdevotresanté,nousn'auronsplusdeguérisseuse!Lesdeuxfemmessurveillèrentlafindespréparatifs.DespanachesdevapeurmontaientdutubetKeeleyétaitimpatientedes'yplonger.—Jevouslaisse,ditMaddie.Gannonseradanslecouloir.Appelez-le,sivousavezbesoindequelquechose.Keeleysursauta.—Gannon!Jenevoudraispasqu'ilsurgissedansmachambrependantquejeprendsmonbain.Detoutefaçon,samissionestdeveillersurAlaric.Maddielarassura.—Ilneferapasirruptiondansvotrechambre.Sauf,biensûr,sivotrevieétaitendanger,auquelcasvotrenudité n'aurait plus grande importance. Mais si vous l'appelez à travers la porte, il descendra meprévenir,ouirachercherChristina.

—Trèsbien,murmuraKeeley.UnefoisMaddiepartie,Keeleyneperditpasuninstantpoursedéshabilleretseplongerdansl'eau.Chaquemouvement lui était encore pénible,mais elle réussit à s'immerger dans l'eau chaude jusqu'aumenton.Enfin!C'étaitleparadis.Elle ferma les yeux et détendit sesmuscles endoloris, pourmieux savourer la délicieuse sensation del'eau chaude sur sa peau. Si quelqu'un était assez aimable pour verser un nouveau seau dans le tub àintervalles réguliers, elle se verrait bien passer des heures ainsi.Voire des jours entiers. Elle n'avaitaucuneenviedesortirdehorspourl'instant.Keeleyappuyasesmainsetsanuquesurlesrebordsdutubetsoupiradecontentement.Lachaleurdufeu,toutproche,l'aidaitencoreàserelaxer.Elles'étaitpresqueassoupiequandlaportes'ouvrit.Keeleyseredressadansunsursautetdécouvritlasilhouetted'Alaric,quisedétachaitdanslalueurdesrareschandellesdisposéesautourdutub.Ilrestaunlongmomentsansbouger,àlaregarder,etKeeleyluiretournasonregard.Sonattitude,cesoir,étaitdifférente.D'ordinaire,quandillarejoignaitdanssachambre,ilsemontraittoujoursd'humeurlégère.Avantdefairel'amour,ilsdevisaientjoyeusement,seracontantlesévénementsdeleurjournée.Maiscesoir,sonregardétaitplusaigu,sonexpressionplusrésolue.Keeleyavalasasaliveenlevoyants'approcherdutubsanslaquitteruninstantdesyeux.Ellesesentait toutàcouptrèsvulnérablefaceàlui-etàlavérité,celal'excitait.Alaricdégageaituneautoritévirilequil'impressionnait.Ils'arrêtajustedevantletubetposasursanuditéunregarddepurepossession.Ellevoulutsecouvrirlesseinsdesesmains,maisilsebaissapourluiécarterlesbras.—Non.Ne tecouvrepasdevantmoi. Jesuisvenuprendrecequim'appartenait.Cettenuit, tuserasàmoi.Keeleypinçaleslèvres,poursurmontersanervosité.Ellen'avaitpaspeur.Aucontraire,elleétait trèsexcitée,plusqu'ellenel'avaitjamaisété.Alarics'emparad'unlingeposésurlereborddutubetcommençaàluifrotterdoucementlecou.Malgrélachaleurdesonbainetdufeutoutproche,elleneputs'empêcherdefrissonneràcettecaresse.Quandilpassalelingesursesépaules,Keeleysentitsestétonssedurcir.Ellefermalesyeux.Unparfumderosesluiflattalesnarineset,rouvrantlesyeux,ellevitqu'Alaricfrottaitlelingesursonmorceaudesavon.—Penche-toienavant,ordonna-t-il.Bienqueferme,sontonétaitrichedepromesses.Keeleyfrissonnadeplusbelle.Quandellesefutpenchée,ilcommençadeluisavonnerledosaveclelinge,trèslentement,endécrivantdelargescerclesavecsamain.—Oh,c'estmerveilleux,murmura-t-elle.Elleavaitdenouveaufermé lesyeux,pourmieuxs'abandonnerà ladélicieuse léthargiequis'emparaitd'elle.Maisquandill'obligeaàseredresserpourpasserlelingesursapoitrine,ellerouvritlesyeuxetsonsouffles'accéléra.Ilmarquaunlégertempsd'arrêt.PuisilreposalelingesurlereborddutubetilrefermasespaumessurlesseinsdeKeeley,agaçantleurstétonsdesespouces.Enmême temps, il se pencha pour déposer un baiser sur sa nuque - un tout petit baiser,maisKeeleytressaillit:elleavaitl'impressionqu'unéclairl'avaittraverséedepartenpart.Sescaressesensorcelantes la rendaient impuissante.Ellesesentaitentièrementà lamercid'Alaric,ce

quinefaisaitqu'accroîtresonexcitation.—Tuesbelle,sibelle,murmura-t-ildanssoncou.Quandjeteregarde,jesuisbouleversépartabeauté,toncourageettadétermination.Aucunefemmenet'égalerajamais.Keeleyavaitlagorgetropserréepourdireunmot.Qu'aurait-ellepurépondreàcela,detoutefaçon?—Cesoir,reprit-il,jevaism'occuperdetoicommetut'esoccupéedemoi.Savoixrauqueetsesdoucesparolesexcitaientl'imaginationdeKeeley.Il lui lava les cheveux, en prenant garde qu'elle n'ait pas de savon dans les yeux, puis il les rinçalonguement,mècheaprèsmèche.—Donne-moitamain,dit-il,quandilfutsatisfaitdurésultat.QuandKeeleyseleva,soncorpsruisselantbrillaitàlalueurdeschandelles.Alaricladévoralesyeux,avantdebaisserlatêtepourluiembrasserunsein.Quandilrefermaseslèvressursontéton,Keeleyvacilla,etelleseraitsansdouteretombéedansletubsiAlaricnel'avaitpasfermementtenueparlataille.—Jevaistemouiller,dit-elle.—Jem'enmoque.Ilcommençaàcaressersonautresein,faisantcourirdesfrissonsdanstoutsoncorps.Lespectaclequ'ilsformaient ainsi tous les deux, à la lumière conjuguée des chandelles et du feu, lui apparaissaitmerveilleusementromantique.Elleavaittoujoursrêvédemomentscommecelui-ci.Avecsonguerrier.Sonamour...—Fais-moil'amour,Alaric,murmura-t-elle.—Oui,chérie.Jevaistefairel'amourtoutmonsoûl.Cettenuit,tuesmaprisonnière.Ill'abandonnaquelquesinstants,pourreveniravecunecouverture.DèsqueKeeleyfutsortiedutub,illaposasursesépaulesetl'entraînadevantlefeu.Après quoi, il entreprit de lui sécher les cheveux. Puis il passa un peigne dans sesmèches, pour lesdémêler.Personne ne s'était jamais occupé de Keeley ainsi. C'était tout simplement délicieux ! Elle se sentaitimportante,aimée.Commesielleétaitladamedelaforteresse,honoréeparsonlaird.Alaricposaunbaisersursanuque.—Cettenuit,tuobéirasàmesordres,chuchota-t-il.Ettuteplierasàtousmesdésirs.Illuicaressalesbrasavantd'ajouter:—C'estd'accord?Keeleysentaitsonpoulss'affoler.Letondominateurd'Alaricetsasensualitél'excitaientau-delàdetoutemesure.Maispourquoiluiposait-ilunetellequestion?Nesedoutait-ilpasqu'elleétaitincapabledeluirefuserquoiquecesoit?Ellehochalatête,carsagorgeétaittropserréepourqu'ellepuissearticuleruntraîtremot.QuandAlaricl'obligeaàsetournerverslui,ellelutdanssonregardtoutesadétermination.—Taréponse,Keeley.Jeveuxl'entendredetabouche.Lajeunefemmeavalasasalive.—C'estd'accord...

26Alaric soulevaKeeley dans ses bras, pour la porter jusqu'au lit. La couverture dont il l'avait drapéeglissadesesépaules,larendantàsanudité.Illadéposasurlematelasetreculasanslaquitterunseulinstantdesyeux.Puisilentrepritdesedéshabiller.Keeleyleregardaitfaire,fascinée.Sesmusclesapparaissaientencoreplusdéliésdanslejeud'ombreetdelumièredeschandelles.—Écartelescuisses,Keeley.Montre-moitaféminité.Lentement,lajeunefemmefitcequ'illuidemandait.C'estalorsqu'Alaricsesaisitdeseschevillespourl'obligeràplierlesjambes.Danscetteposition,Keeleysesentaittotalementofferte,commesiellel'imploraitdelacaresser...Ils'agenouilladevantelleetglissalesdoigtsdanssonintimité,puisilapprochasonvisage.Keeleyretintsonsouffle,dansl'attenteducontactdesabouche.Pourtant,cen'estpasavecseslèvres,qu'illacaressa,maisavecsalangue.Keeleyneputs'empêcherdetressailliretilluiagrippafermementlescuissestandisqu'ilpoursuivaitsonensorcelantecaresse.SalangueétaitàlafoisdouceetrugueuseetKeeleysentitdelongsfrissonsdeplaisirlaparcourirtoutentière.Puisilsemitàsucersonboutonderose.Cettefois,c'enétaittrop:Keeleyneputretenirdavantagesajouissance. Submergée par une vague de plus en plus puissante, elle mit quelques instants avant depouvoirreprendresesesprits.—Alaric?Elleredressalatêtepourlequestionnerduregard,tantelleétaitstupéfiéeparl'intensitédesajouissance.Aulieuderépondre,ill'obligeadoucementàs'allongersurleventre.Puis,s'emparantd'uneserviette,ils'enservitpourluilierlespoignetsdansledos.Keeleys'yattendaitsipeuqu'ellesemitàfrissonner-d'excitationetd'appréhensionmêlées.Quandileutterminé,ils'assuradelasoliditédesesliens,puisilluisoulevalatailleafinqu'ellesemetteàgenoux.Lajeunefemmeseretrouvalajoueplaquéesurlematelasetlesmainsattachéesdansledos.Alaricluicaressalesfesses.—Lapremièrefoisquejet'aipriseainsi,tuétaisencorepresqueviergeetjet'aifaitmal.Maiscesoir,jeteprometsdenetedonnerqueduplaisir.Ellesentitqu'ilglissaitsonmembreentresescuisses,etn'eutpasletempsdes'alarmerqu'illapénétraitdéjà.Ellegémit.Lasensationétaitdélicieuse.—Jetefaismal?demanda-t-il.—Non.Ilseretira,pours'enfoncerplusprofondémentenelle.Ilrépétaplusieursfoisl'opérationetquandilsefutassuréqu'ellepouvaitlerecevoir,ilsemitàlachevaucheravecplusdevigueur,s'agrippantd'unemainàsespoignetsliés,commes'iltenaitdesrênes.Lesilencedelachambren'étaittroubléqueparleurshalètementsetlechocfeutrédeshanchesd'AlariccontrelesfessesdeKeeley.Ilbougeaitdeplusenplusvite.Deplusenplusfort.Maistoutàcoup,ils'immobilisaenelle.Keeley,aucomble de l'excitation, voulut bouger à son tour,mais il l'en empêcha, ce qui ne fit que décupler son

excitation.Auboutd'unmoment,ilrepritsescoupsdereins.Maispluslentement,cettefois,commes'ilvoulaitluiprouverqu'ilcontrôlaitlasituation.Keeleyprotesta.Elleenvoulaitdavantage,réclamaitplusdevigueur.—Jecroist'avoirditquec'étaitmoiquicommandais,cesoir,Keeley,luirappela-t-il.Tudoisteplieràmavolonté.Il donnaun coupde reinsplusviolent, commepour appuyer ses paroles.Keeley ferma les yeux.Oui,c'étaitluiquicommandait.Ellen'avaitaucunpouvoir.Ellesemorditleslèvrespournepasprotesterànouveauquandilseretiratoutàfait.Puisill'aidaàseretourner,sansdéfairesesliens,etillafitsemettreàgenouxparterre.Sonmembre,gorgédedésir,palpitaitdevantsonvisage.—Ouvrelabouche,Keeley.D'unemain,illuiagrippalanuquepourluimaintenirlatêteetdel'autre,ilempoignasonmembrepourl'approcherdesabouche.Keeleyouvritleslèvres.Audébut,elleeutdumalàs'accommoderdelagrosseurdesonmembre,maisAlaricsemontrapatient.Désireuse de le satisfaire, la jeune femme voulut aller et venir sur sonmembre,mais il lui pressa lanuque,pourl'endissuader.—Non.Contente-toideresterimmobile.Et,luitenantlevisageàdeuxmains,ils'enfonçadanssabouche.Lentement,audébut.MaisàmesurequeKeeleys'habituaitàsonintrusion,ilsefitplusexigeant,etcommençaàalleretvenir,commeill'avaitfaittoutàl'heureaprèsl'avoirpénétrée.Toutàcoup,ilsemitàgémiretKeeleysentitunegouttedesemencetouchersalangue.Ellesepréparaàenrecevoirplus,maisilseretirad'uncoupetcommençaàsecaresser.Soudain,sasemencechaudejaillitsurlesseinsdelajeunefemme.Ilsrestèrentunmomentimmobiles,luidebout,elleàgenoux,àreprendreleurrespiration.Keeleyn'auraitjamaisimaginéquedetelleschosespuissentêtrepossiblesentreunhommeetunefemme.Maiscequ'ilsvenaientdefaireavaitréveillédesinstinctsprimitifsprofondémentenfouisenelle.Elles'étaitsentiepleinementpossédéeparsonguerrier.Etc'estcequ'ellevoulait.Alaricpenchalatête,pourluiembrasserlefront,avantdel'aideràserelever.Puisill'entraînaverslacuvette,afindeluilaverlesseins.À la stupéfaction de Keeley, le membre d'Alaric était toujours érigé. Et à peine eut-il terminé de lanettoyerqu'illaramenaverslelit,sansluidélierlesmains,pourlaprendreencorepar-derrière.Maiscettefois, il lapénétraavecplusdedouceur.Commes'ilétaitrepuetqu'ilpouvaitmaintenantsemontrerpatient.Illapilonnajusqu'àcequ'ellecommenceàrépondreàsesassauts,pourenréclamerdavantage.Glissant unemain sous son ventre, Alaric entreprit alors de caresser son bouton de rose tandis qu'ilcontinuaitàalleretvenirenelleàunrythmeparfaitementmaîtrisé.Keeley avait presque envie de pleurer, tant sa jouissance exigeait d'être enfin libérée.MaisAlaric nevoulaitrienentendre.Ilpoursuivaitsescoupsdereinsavecunelenteurexaspérante.De sesdoigts agiles, il exacerbait la tensionde la jeune femme, luidonnant le sentimentd'êtreunarctenduàserompre...C'estalorsquel'arc,enfin,serompit.LajouissancedeKeeleyéclatad'uncoup,siviolentequ'ellesentitsa vision se troubler quelques instants.Elle cria le nomd'Alaric, plusieurs fois, avant que savoixnemeuredansunsanglot.

Quand elle eut repris ses esprits, elle réalisa qu'il était toujours en elle et qu'il n'avait pas cessé debouger.Maisellen'avaitplusaucuneforce,sinoncellederesteraccroupie,soumiseàsadomination.Cependant,ilsemontraitmoinspatient,àprésent.Sescoupsdereinsdevenaientplusviolents.Ettoutàcoup,ill'agrippaviolemmentparleshanches.—Tuesàmoi,rugit-il.Àmoi!Ilseretirad'uncoup,etKeeleysentitsasemenceserépandresursondos.Puis,quandilseurentreprisl'unetl'autreleursouffle,Alaricluidéfitsesliensetluimassalespoignets.—Nebougepas,dit-il,alorsqu'ils'éloignaitdulit.Il revint avec un linge humide, pour lui nettoyer le dos et les fesses, partout où il avait répandu sasemence.Aprèsquoi,ilsroulèrentenlacéssurlelit.—Jenem'étaisjamaiscomportécommecelaavecunefemme,avoua-t-il.Maisj'étaismuparunesorted'instinct,quimecommandaitdemarquermapossessiondanstachair.Keeleyluisourit.—J'aimebeaucouptafaçondemefairetienne.J'ignoraisquedetelleschosespouvaientsepasserentreunhommeetunefemme.—Moiaussi,confessaAlaric.C'esttoiquim'inspirestoutcela.Illaserraplusfortcontrelui,tandisqu'elledemandait:—Qu'allons-nousdevenir,Alaric?Nousétionssupposésnepasserqu'uneseulenuitensemble.Alaricluicaressalescheveux.—Chaquechoseensontemps.Pourl'instant,savouronsnotreplaisird'êtreensemble.Quandviendralemomentdenousséparer,toutescesnuitsnousrappellerontlaforcedelapassionquinousunissait.

27Keeleyétaitconvaincuequelanaissancedel'enfantdeMairinn'étaitpasseulementunévénementattendude tout le clanMcCabe, mais qu'il était aussi béni par le Ciel. En plein mois de janvier, alors qued'ordinairel'hiverétait leplusfroid,unedouceurs'installaunequinzainedejoursavantladateprévuepourl'accouchementdeladyMcCabe.C'étaitàcroireque lesHighlands toutentiers retenaient leur souffleavant lanaissancede l'héritierdeNeamhAlainn.Certes,latempératureétaitencorefroide.Maislaneigenetombaitplusetleventavaitcessé.Jouraprèsjour,lesoleilbrillaitdansuncieltoujoursbleu.Mêmelesnuitsparaissaientmoinssombres.Mairin semontrait demoins enmoins patiente. Chaque soir, Keeley,Maddie, Bertha et Christina luitenaientcompagniepourladistraireetl'empêcherdetroppenseràsaprochainedélivrance.MêmeEwansejoignaitparfoisàleurcercle,s'asseyantavecellesdevantlacheminéedelagrandesalle.C'étaitunepériodepaisible,détendue,etKeeleysesentaitdeplusenplusprocheduclanMcCabe.Enpublic,KeeleyetAlaricprenaientgardedenepasétalerleurliaison.Maislanuitvenue,unefoistoutlemondecouché,Alaricvenaitlaretrouverdansl'intimitédesachambreetilluifaisaitsouventl'amourjusqu'auxpremièreslueursdel'aube.Keeleynevoulaitpasluirefusersonlit.Ellesavaitqu'ilsdevraientbientôtsesépareretcetteperspectivelui brisait le cœur,mais elle tenait à profiter de tous lesmomentsqu'ils pouvaient partager ensemble,dansl'espoirquelesouvenirdecebonheurluitiendraitchaudpourlerestantdesesjours.Cematin-là, ils s'attardèrent au lit. D'habitude, Alaric regagnait sa chambre avant que le reste de laforteressenes'éveille,maispasaujourd'hui.—Jedevraismelever,murmura-t-ilsansconviction,avantd'embrasserlatempedeKeeley.—Oui,tudevrais,acquiesça-t-elle,sansdavantagedeconviction.Ilnefitpasunmouvement.—Àmesurequelesjourspassent,j'aideplusenplusdemalàquittertesbras.Keeleyfermalesyeuxpourtenterdevaincrel'oppressionquiluiserraitlecœur.—Tuvast'entraîner,aujourd'hui?demanda-t-elle.Ilgrogna.—Oui. Comme tous les jours. Ce n'est pas parce que c'est l'hiver qu'il faut nous endormir. Avec ladélivrancedeMairinquiapproche,nouscouronslerisqued'êtreattaqués.—PauvreMairin!Cen'estpasdrôle,commevie.Ils gardèrent le silence pendant quelquesminutes, avant qu'Alaric ne s'empare des lèvres de la jeunefemmepourunbaiserdévorant.Elles'yattendaitsipeuqu'ellen'eutpasletempsderéagir.Déjà,Alaricroulaitsurellepoursepositionnerentresescuisses.Contrairement à d'ordinaire, il la pénétra sans aucune douceur, comme s'il était mû par un sentimentd'urgence.Keeleyécarquillalesyeuxendécouvrantlalueursauvagequibrillaitdanssesprunelles.Onauraitditunfauves'apprêtantàfondresursaproie.—Jenemerassasieraijamaisassezdetoi,murmura-t-il.J'aibeaumerépéter,chaquefois,quec'estladernièrefois,jen'enaitoujourspasassez.Jen'enauraijamaisassez.Keeleysentitsoncœurfondre.Elles'apitoyaitsisouventsursonproprechagrinqu'ellenepensaitpasassezqu'ilétaitenproieaumêmedésespoirqu'elle.Elleluicaressalajoue.

—Jet'aime,murmura-t-elle.Jem'étaisjurédenepasteledire,maisc'estplusfortquemoi.Ilfallaitqueçasortedemabouche.J'avaisbesoinquetulesaches.Ilsemblaitsibouleverséqu'elleavaitenviedepleurer.Maisquandilvoulutparler,elleposaundoigtsurseslèvres,pourleréduireausilence.—Non,nedisrien.Cen'estpasnécessaire.Jetesensenmoi,etcelamesuffit.Neparlepasdechosesquinoussontinterdites.Laisse-moiseuleavecmespéchés.IlroulasurledospourqueKeeleyseretrouveau-dessusdelui.— Prends-moi, dit-il. Je veux t'appartenir. Plaquant ses deux mains sur le torse d'Alaric, Keeleycommençad'ondulersurluiavecsensualité.Oui, ilétaitàelle.Ilétaitsonguerrier.Personnenepourrait luiretirercela.C'estuneautrefemmequiprendraitsonnometquiporteraitsesenfants,maisKeeleyposséderaittoujourssoncœur,demêmequ'ilposséderaitlesien.—Jet'aime,répéta-t-elle.Jet'aime.Ce fut comme une litanie sur ses lèvres. Un chant qui montait du plus profond de son âme. Et sajouissance,quandellearriva,futpresquedouce,entoutcasbeaucoupmoinstumultueusequelesautresfois.Ellerestasur luiencorequelques instants,pendantqu'il luicaressait ledos.Ellesavaitqu'ilétait troptard-outroptôt.Ilauraitdéjàdûêtrereparti,cependantellen'avaitpaslecouragedelechasser.Alaric finit cependant par s'étirer. Puis il roula de nouveau sur le côté, pour se retrouver sur elle. Ettoujoursenelle,caràaucunmomentsonmembrenes'étaitrelâché.—Moiaussi,jet'aime,Keeley,dit-il,rivantsonregardàceluidelajeunefemme.Àdéfautdepouvoirt'offrirautrechose,accepteaumoinscesquelquesmotsdemapart.Keeleysemorditlalèvrepours'empêcherdepleurer,ets'efforçadesourire.—Ilfautquetupartes,àprésent.Sinon,nousallonsêtredécouverts.—Oui.Jevaistelaissertereposer.Mairinnedevraitpasavoirbesoindetoitoutdesuite.Ilsortitdulit,puiss'habillaensilenceetquittalachambre,nonsansluiavoirjetéundernierregardavantdefranchirlaporte.Cen'estquelorsqu'ileutdisparuqueKeeleys'aperçutqu'ilavaitdéversésasemencedanssonventre.La jeune femme ferma les yeux, à la fois émerveillée et effondrée. Elle n'avait pas envie de donnernaissance à un bâtard, cependant elle savait que si elle tombait enceinte, elle ne porterait aucun autreenfantaprèscelui-là.Elleroulasurlecôtéetagrippalesfourrures.—Jenesaispasquoifaire,murmura-t-elle,auborddeslarmes.Jel'aime.J'aienviedelui.Etj'aienviedesonenfant.Maistoutcelam'estinterdit.Maintenantqu'Alaricn'étaitplus là,elledonna librecoursàses larmes.Elles'était jurédesemontrercourageuseetdenepaspleurer.Maispluslemomentdeleurséparationapprochaitetpluselleprenaitconsciencequ'elles'illusionnait.Carlemariaged'AlaricavecRionnaladétruirait.

28Keeleypritsontempspours'habiller.Ellen'étaitpaspresséededescendreretrouverlacruelleréalité.Ellesecoiffaenfredonnant,puisellerefitsonlit.Aprèsavoirdonnéunedernièretapeauxoreillers,ellequittaenfinsachambre.Il était franchement tard pour se lever, cependant elle s'accorda un bâillement lascif pendant qu'elledescendaitl'escalier.Elle n'était plus qu'à quelquesmarches du bas, quand elle perçut une étrange agitation dans la grandesalle.PuiselleentenditunhérautannonceràEwan:—LordMcDonaldapprochedenosportes.Keeleyterminasadescented'unpaschancelant.AlaricetCaelensetrouvaienteuxaussidanslagrandesalle,etilsvenaientd'apprendrelanouvelle.—Ilestvenuavecsafille,précisalehéraut.Etilvousdemandedelerecevoirenallié.Ewanhochalatête.—Ilpeutfranchirlesportes,répondit-il.Dis-luiquejel'accueilleraidanslacour.Puisildistribuaquelquesordresauxservantesafinqu'ellespréparentdesrafraîchissements.Keeleyavaitl'impressionquelesolsedérobaitsoussespieds.Puisellecroisaleregardd'Alaricetellevit,danssesprunelles,qu'ilétaitenproieàlamêmepaniquequ'elle.Keeley avait beau se répéter qu'elle aurait dû semontrer forte et courageuse, elle ne s'en sentait pasl'énergie.Ellenesevoyaitpasaffronter l'hommequi l'avaitagressée.Pasplusqu'ellen'avaitenviederevoirsonanciennemeilleureamie,venuepourluiravirl'hommequ'elleaimait.Lajeunefemmeportaunemainàsabouche,pourretenirseslarmes,puiselletournalestalonsetremontal'escalier.Alariclaregardas'enfuiravantdedétournerlatête.S'ils'écoutait,illasuivraitpourlarejoindre.— Que vient faire McDonald maintenant ? grommela-t-il. Il n'était censé arriver qu'au début duprintemps,aprèsl'accouchementdeMairin.—Jel'ignore,réponditEwan.Maisnousn'allonspastarderàlesavoir.Ilestpossiblequ'ilaitreçuunelettreduroil'invitantàavancerladatedumariage.Alaricsepassa lamaindanslescheveux.Ilsefaisait l'effetdupenduquisentait lacordeseresserrerautourdesoncou.Cesdernièressemaines,ilavaitvécuenniantlaréalité.Maisàprésent,laréalitélerattrapait.EtKeeleyferaitbientôtpartiedesonpassé.Cependant,ils'obligeaàseressaisir.—Allonsl'accueillir,dit-il.EwanattiraMairindanssesbras.—Resteiciauchaud,monamour.Ilcaressasonventrerebondietl'embrassaunedernièrefoispoursuivreAlaric.Mairinfronçalessourcilsdansledosd'Alaric,tandisquelestroisfrèresquittaientdéjàlasallepourseporteràlarencontredulairdMcDonald.Enchemin,Alaricsedemandacommentilpourraitbiendissimulerleméprisqueluiinspiraitdésormaiscethomme. Il sevoyaitmal l'embrasseret luipromettredeprendresoindesa fille,alorsqu'ilbrûlaitd'enviedeluicracherauvisageetdeluienfoncersonépéedansleventre.Quelhommepouvaitêtreassezvilpourvouloirabuserd'unejeunefilleàpeinesortiedel'enfance,etensuiteluifaireporterleblâmedesaconduitepourcéderàlajalousiedesonépouse?Alaricpréféraitnepass'appesantirdavantagesurlaquestion,carsacolères'avivaitàchaqueinstantet

menaçaitdel'aveugler.—Détends-toi,etessaiedesourire,luimurmuraCaelen.Ondiraitquetuveuxtuerquelqu'un.—Cequ'ilafaitàKeeleyestinfâme.Caelenfronçalessourcils.—Queveux-tudire?—Çaneteregardepas.—J'aimeraisquandmêmesavoirquelgenred'hommejem'apprêteàsaluer,objectaCaelen.Lestroisfrèress'étaientimmobilisésàl'entréedelacour,pourattendrelesMcDonald.—Cen'estpastoi, le laird, intervintsèchementEwan.Etcen'estpastoiquidoisépousersafille.Et,pourAlaric,ilajouta:JesaisquetutiensàKeeley,maisoublietesdésirs.Cemariageesttropimportantàdenombreuxégards.Ewans'avançad'unpasdèsquelescavaliersdelatroupeMcDonaldapparurentdel'autrecôtédupontdepierre.Alaricvoulutlesuivre,maisCaelenleretintparlebras.—Maisdequoiparlais-tu,bonsang?Alaricplissaleslèvres.—McDonalds'enestprisàKeeleyalorsqu'ellen'étaitencorequ'unetoutejeunefille.Safemmelesasurprisavantqu'iln'aitpu lavioler,maiselle l'a traitéedecatinetelle l'aaccuséed'avoir séduit sonmari.Keeleyaétébannieduclanetréduiteàvivreparsespropresmoyens.Caelenserralesmâchoires,maisilneréponditrienetsecontentaderegarderlescavaliersapprocher.Alaricprituneprofondeinspiration.McDonaldetsafillechevauchaientcôteàcôte.Celle-cimitpiedàterrelapremièreetAlaricneputs'empêcherdehausserlessourcilsenconstatantqu'elleétaithabilléeenhomme.Etqu'ellenesemblaitpasconcevoirlamoindrehontedesonattitudescandaleuse.GregorMcDonalddescenditàsontourdecheval.—Bonjour,Ewan,dit-il,accompagnantsonsalutd'unsignedetête.—Bonjour,Gregor,luiretournaEwan.GregorsetournaensuiteversAlaric:—Voicimafille,Alaric.Tafuturefemme.—Bonjour,Rionna,ditpolimentAlaric.Rionnalegratifiad'unerévérencemaladroite.Sachantqu'ilétaitsupposéluifairelacouravantleurmariage,Alaricluitenditsamain.Rionnaleregarda,interloquée,avantdeluiaccordersamain,qu'ilportaàseslèvrespourlabaiser.—Soyezlabienvenueparminous,milady,dit-il.Visiblementmalàl'aise,lajeunefemmes'empressaderetirersamain.—Ma femme est impatiente de vous revoir, Rionna, assura Ewan. Elle vous attend au chaud. Elle abesoinderepos,maisellevousfaitdirequ'elleseraraviedevotrecompagnie.—Merci.J'aimoi-mêmehâtedelarevoir,réponditRionna.Ellecoulaunautreregardgênéendirectiond'Alaric,avantdesedirigerversl'entréedelaforteresse.Dèsqu'elleeutdisparuàl'intérieur,EwancroisalesbrasetreportasonattentionsurGregorMcDonald.—Vousnenousavezpasinformésdevotrearrivéeprématurée,dit-il.Jenevousattendaispasavantledébutduprintemps.Entoutcas,pasavantlanaissancedemonenfant.Gregoreutlabonnegrâcedeparaîtreétonnéparlasécheressedesonhôte.—Avec ce beau temps qui s'est installé, j'ai pensé que nous pouvions en profiter pour avancer notrevoyage. Le froid peut revenir et repousser l'arrivée du printemps. Or, j'avais hâte de sceller notrealliance. J'aientendudirequeCameronrassemblaitdes troupesetqu'ilprojetaitde les fusionneraveccellesdeMalcolm.LeroiDavidnepourrajamaisgagnercontrelesarméesconjuguéesdeCameronetdeMalcolm.EtsiCamerontournesesviséessurmesterres,oucellesdenosvoisins,nousnepourronspasespérer le vaincre à moins d'être unis contre lui. Je ne t'apprendrai pas, Ewan, que les Highlandsretiennent leur souffle avant la naissance de l'héritier de Neamh Alainn. Ces terres sont au cœur duproblème.DèslorsquelesMcCabeenaurontlecontrôle,nousformeronsunrempartquemêmeCameron

nepourrapasanéantir.Alaricavaitécoutélediscoursdulairdlecœurserré.ToutcequedisaitMcDonaldétaitvraietfrappéaucoin du bon sens. Son mariage avec Rionna revêtait une importance cruciale, car il scellerait nonseulementl'allianceentrelesMcDonaldetlesMcCabe,maisilpousseraitlesclansvoisinsàserangersousleursétendards.Ilscomprendraientqueleurintérêtn'étaitpasdechoisir lemauvaiscampdanslabataillepourletrône.—Alors,tuesvenupourprécipiterlemariage,conclutEwan.Gregoracquiesça.—Oui.Jecroisqu'ilfautallervite,àprésent.—Rionnaestd'accord?demandaEwan.Gregorplissaleslèvres.—C'estmafille.Elleconnaîtsondevoir.Elleserad'accord.Ewanscruta longuementAlaric, commes'il cherchait àdeviner sespensées lesplus secrètes.Furieux,Alariceutl'impressionquesonfrèreleprenaitenpitié.—Ettoi,Alaric,es-tud'accord?demandaEwan.Alaricavalasasalive.Puis il regardasonfuturbeau-père - l'hommequi lui transmettrait sonstatutdelaird.C'étaitlaréponselaplusdouloureusequ'ilauraitàdonnerdesavie.Maissonfrère,Mairin,sonclan...tousdépendaientdecequ'ilallaitdiremaintenant.Alors il fit laseule réponseque lui imposait ledevoir -maisqui l'obligeraitàseséparerde la femmequ'ilaimait.—Oui,jesuisd'accord.

29—Jenepeuxpasl'affronter.Paselle.Keeleyseretourna,pourregarderparlafenêtredesachambre.Maddiesoupira.Puisellevintseplanterderrière la jeunefemme,pour luipasserunbrasautourde lataille.— Je sais que c'est douloureux pour vous,ma petite.Mais vous ne gagnerez rien en vous cachant. Ilfaudrabien, tôtou tard,quevousvousmontriez.Mairindoitaccoucherd'iciàquelques jours.Vousnepourrezpasmanquercela.—Nonseulementjel'aicruemonamie,maismaintenant,jedevraissansbroncherlavoirépouserAlaric! protestaKeeley.Elle ferma les yeux et frissonna, avant d'ajouter :Et le lairdMcDonald !Commentpourrais-jeleregarderenface,aprèscequ'ilm'afait?Maddieluipritunbras,pourl'obligeràseretourner.—Venez-vousasseoir,mapetite.Jevoudraisvousparler.Keeleyacceptadelasuivreetlesdeuxfemmess'assirentcôteàcôteauborddulit.—Vous n'avez rien fait demal, lui ditMaddie.Et vous n'avez rien à vous reprocher. Seul le laird apéché.Etunjour,ildevraenrendrecompteàDieu.—Jenedevraispasêtreici,gémitKeeley.Quellesituationimpossible!Jemesuisdonnéeàunhommequejenepeuxpasavoir.Unhommequivaépousercellequejeconsidéraiscommeunesœur...Maddiel'enlaça,pourlabercerdanssesbras.—Quevotresituationsoitimpossible,jen'endisconvienspas.MaisvoussavezbienquelordMcCabenepermettrapasqu'onvousfassedumal.Alaricnonplus.Vousêtesensécurité,ici.LelairdMcDonaldnepeutplusriencontrevous.Jeneseraispasétonnéequ'ilfasseminedenepasvousconnaître.— Je sais que vous avez raison,murmuraKeeley, qui s'étaitmise à sangloter.Mais j'ai peur tout demême.Maddieluicaressaledos.—Ressaisissez-vous,mapetite.Jenepeuxpasvousblâmerd'avoirpeur,maisn'oubliezpasquevousaveztoutleclanMcCabederrièrevous.SivousaimezvraimentAlaric,facilitez-lui leschoses.Neluimontrezpasvotrechagrin.Celaneferaqu'ajouteràsonfardeau.Keeleys'écartaetséchaseslarmesd'unreversdemain.—Vousavezraison.Jemeconduiscommeuneenfantgâtée.Maddieluisourit.—Vousvousconduisezenfemmeamoureusequisaitcequ'elles'apprêteàperdre.Votreattitudeesttoutàfaitnormale.Keeleys'obligeaàsourire.—Demain, je serai courageuse, je vous le promets.Mais pour aujourd'hui, je préfère rester dansmachambre.—C'estd'accord.JevaisprévenirMairin.Ellecomprendra.Elles'inquiètebeaucouppourvous.—Prévenez-moi,aucasoùelleauraitbesoindemoi.Jedescendraiimmédiatement.Maddiehochalatêteetseleva,tandisqueKeeleyserenversaitsurlelitpourcontemplerleplafond.Cematin,encore,elleavaitfaitl'amouravecAlaricetelleluiavaitditqu'ellel'aimait.Illuiavaitréponduqu'ill'aimaitaussi.De nouvelles larmes affluèrent à ses yeux. Il n'était pas prévu que ce serait leur dernière journée

ensemble.LesMcDonaldétaientcensésprévenirdeleurarrivée.AlaricetKeeleyauraienteualorstoutletempsdesefaireleursadieux.Ellefermalesyeux.—Jet'aime,murmura-t-elle.Jet'aimeraitoujours.MairinMcCabe se trémoussa pour la centième fois sur son banc, en réprimant tant bien que mal lebâillement qui menaçait de lui décrocher la mâchoire. Courtois, sonmari écoutait GregorMcDonaldraconter-pourlacentièmefoiségalement-seshautsfaits.MaisMairinpréféraits'intéresseràRionnaetAlaric.Lejeunecouplen'avaitpaséchangéplusdequelquesmotsduranttoutledîner.L'indifférenced'Alaricàl'égarddesafiancéeinquiétaitMairin,cependantRionnasemblaitsesatisfairequ'ilneluiadressepourainsidirepaslaparole.Du reste, les quelques fois où Mairin essaya d'engager la conversation avec Rionna, elle se vitrécompenséeparunmutismeobstiné.Pourtant,ellesavaitqueRionnapouvaitsemontrerplusamicale,lorsque les femmes étaient entre elles. Rionna était déjà venue une fois à la forteresse, et elle s'étaitrévéléedebonnecompagnie.Quant à Alaric, il paraissait parfaitement malheureux. Oh, il se montrait stoïque, bien sûr, et il secomportaitenbonguerrier.MaisMairinsavaitàquois'entenir.Alaricn'avaitjamaisétéaussifroidqueCaelen, ni aussi orgueilleux qu'Ewan. C'était un homme très sociable, qui aimait la conversation etpourtant, ce soir, il restait silencieux la plupart du temps, se contentant de picorer dans son assiettecommes'iln'avaitpasd'appétit.Keeley,quantàelle,avaitpréférénepassemontrer.Mairinnepouvaitpaslablâmerdesonabsence.Sielleétaitdescendue,elleauraitétéforcéederegarderl'hommequ'elleaimaitfairesacouràuneautre.Detoutefaçon,lescirconstancesdesonbannissementduclanMcDonaldsuffisaientàjustifierqu'ellerestedanssachambre.Mairinbrûlaitd'enviedesesaisird'unplatpourl'écrasersurlecrânedulairdMcDonald.Dureste,seulelacertitudequ'Ewanl'empêcheraitdemettresongesteàexécutionladissuadaitdepasseràl'action.—Tuvasfinirpartomberdubanc,àforcedetetrémousserainsi,luimurmuraEwan.Quesepasse-t-il?Tunetesenspasbien?Sonmarisemblaitàlafoisinquietetexaspéré.—Jevaismeretirer,dit-elle.Jepeuxmontertouteseule.RestepourtenircompagnieaulairdMcDonald.Ewanfronçalessourcils.—Non.Jevaismonteravectoi.CeladonnerauneopportunitéàAlaricdes'entreteniraveclelairdetsafille.Enfin,s'illesouhaite.EtsansmêmeattendrelaréponsedeMairin,EwansetournaverslelairdMcDonaldetl'interrompitdanssaconversation.—Sivousvoulezbienm'excuser,mafemmedésireseretirer.Ellesefatiguevite,cestemps-ci,etjenevoudraispasqu'ellemontetouteseuledansnotrechambre.Mairin eut beaucoup de mal à réprimer une grimace de dégoût devant le sourire lubrique du lairdMcDonald.—Jevouscomprends.Si j'avaisune femmecomme lavôtre, croyez-moiqu'ellenemonteraitpasnonplussecouchertouteseule.PauvreKeeley!songeaMairin.Elleavaitdûbeaucoupsouffrir.Cethommen'étaitqu'undébauché.Etilmangeaittrop.—Viens,chérie,luimurmuraEwan.Etill'aidaàserelever.Ilestvraiqu'ellesesentaitfatiguée,maiscesdernierstemps,elleétaittoujoursfatiguée.Parfois,ellese

demandaitsielleneporteraitpascetenfantpendantuneéternité.Elle dut s'arrêter au milieu de l'escalier, pour reprendre son souffle. Ewan la soutint et attenditpatiemmentqu'ellepuisserepartir.—Jecommenceàmelasserd'êtreenceinte,avoua-t-elle,alorsqu'ilspénétraientdansleurchambre.Ewansouritetl'aidaàsedéshabiller.—Iln'yenapluspourlongtemps.Penseaubonheurqueceseradetenirenfinnotreenfantdansnosbras.Mairinsoupira.—Oui,tuasraison.Dèsqu'elle eut revêtu sa chemisedenuit, elle s'assit auborddu lit.Ewan sedéshabilla à son tour ets'empressadelarejoindre.—Qu'ya-t-il,Mairin?Tuparaissoucieuse.Tuaspeurdel'accouchement?Ellesourit.—Non.J'aitouteconfianceenKeeley.—Alors,qu'est-cequitepréoccupe?—C'estKeeley.EtAlaric,lâchaMairin.Ewansoupira.Quandilvoulutseglissersouslesfourrures,Mairinleretintparlebras.—Ilssontmalheureux,Ewan.Nepeux-tudoncrienfaire?Ewangrimaça.—Hélas,non.Cettealliancereprésentetropd'enjeux.Alaricestadulte.Ilafaitsonchoix.Mairinlaissaéclatersonexaspération.—Aurait-ilfaitlemêmechoix,sinotreclann'avaitpaseudésespérémentbesoindecettealliance?—Ilachoisid'êtrelaird,objectaEwan.Cedontilnepourraitjamaisrêvers'ilrestaitici.Cetteunionluiseraprofitable.—Est-ilàcepointnécessairedenousallierauxMcDonald?insistaMairin.Quejesache,ilsnesontpassipuissantsquecela.—Ilnes'agitpasseulementdepuissance,maisdepolitique,expliquaEwan.Leroitientàcettealliance.Nous ne pouvons pas nous permettre que McDonald se tourne vers Cameron. Ce serait un désastre.N'oubliepasquesesterresséparentcellesdesMcCabedecellesdeNeamhAlainn.Mairinhochalatête.—Alors,sijecomprendsbien,c'estd'abordunealliancestratégique?—Exactement,acquiesçaEwan.D'autantquesiMcDonalds'allieànous,d'autresclansseronttentésdel'imiter.Etalors,Cameronn'auraplusaucunechancedel'emporterdanssaconquêtedutrône.Mairinsoupira.—Toutcelamerendmalade.JevoudraisqueKeeleyetAlaricsoientheureux.Ewanl'attiradanssesbras.—Riennepermetdedirequ'Alaricne serapasheureuxavec sonépouse.Rionnaestunebelle jeunefemme.Elleluidonneradesenfantsvigoureux.—MaisKeeley?murmuraMairin.— Elle restera ici, avec nous. Les McCabe la protégeront. Et beaucoup d'hommes seraient ravisd'épouserunefemmecommeelle.—Àt'entendre,onjureraitquetoutestfacile.Aurais-tupensélamêmechose,sil'ont'avaitinterditdem'épouser?Ewansecoualatête.—Niriennipersonnen'auraitpum'empêcherdeteconquérir.—Oui,etc'estbienpourcelaquejet'aime.MaisjemedemandesiAlaricneserapastentédefairela

mêmechoseavecKeeley.

30Keeleyselevaàl'aube.Dehors,letempss'annonçaittoujoursclémentpourunmoisdejanvieretlaneigeavaitdésormaispresqueentièrementfondu.Lajeunefemmecontemplaitcepaysaged'unairmorose.Ellen'avaitpourainsidirepasdormidelanuitetsesyeuxétaientgonflésdefatigue.Maddieavaitraison.IlneservaitàrienqueKeeleycontinuedese terrerdanssachambre.Ellen'étaitpluslajeunefilleterrifiéed'autrefois,quinepouvaitmêmepascomptersurlesoutiendesonclan.Àprésent, lesMcCabe la soutenaient.Et elle avaitdes amis.Desamis loyaux.Rionnaet sonpèrenepourraientluifaireaucunmal.Quandbienmêmesouffrirait-ellelemartyre,elles'obligeraitàsourirelejourdumariaged'Alaric.Ellerenoncerait à lui sans pleurs. Leur histoire devait rester strictement privée, afin que nul ne puisse seservircontreAlaricdel'amourqu'elleéprouvaitpourlui.Ellese lava levisageavecsoin,afind’ôter toute tracedes larmesqu'elleavaitverséesdurant lanuit,puisellesecoiffa.Aprèsquoi,elleprituneprofondeinspirationpoursedonnerducourageetquittasachambre.Maisellen'avaitaucuneidéedecequ'elleferaitdesajournée.Cesdernierstemps,lesfemmesdelaforteresseavaientprisl'habitudedetenircompagnieàMairindanslagrandesalle,maislaprésencedeMcDonaldlesobligeraitsansdouteàréviserleuremploidutemps.La forteresse était silencieuse.Keeley comprit que la plupart desmembres du clan dormaient encore,aprèsavoirpassélasoiréeàdivertirlesMcDonald.Elle enprofiterait pour s'autoriser unepetite promenadedans la cour - à défaut de pouvoir sortir desremparts,puisquelelairdl'avaitinterdit.Keeley passa d'abord par les cuisines, pour saluerGertie et lui demander si elle avait besoin d'aide.Gertielarenvoyad'ungestedelamain,pestantcontrecesgensquivenaientl'interromprependantqu'elleessayaitderéfléchir.Keeley,amusée,sortitdanslacour.Unpetitventfraisl'accueillitaussitôtetsoulevasesjupes,maislajeunefemmenesongeapasàs'enplaindre.Aucontraire,ellefermalesyeuxetinspiraàpleinspoumons.L'airsemblaittoujourspluspur,enhiver.Etsamorsureétaitrevigorante.Lacourétaitpresquedéserte.Keeleydécidademontersurlesrempartspourjouird'unemeilleurevue.Lelochbrillaitausoleil,telunbouclierd'acier.La jeune femme était si absorbée par sa contemplation qu'elle ne s'aperçut qu'on l'avait rejointe quelorsqu'elleentenditappelersonnom.—Keeley?KeeleyMcDonald,c'estbientoi?Keeleytournalatête,unebouledanslagorge.Rionnalaregardaitavecstupéfaction.—Oui,c'estmoi,réponditKeeley,avecunmouvementderecul.Rionnaparutchagrinéedesaréaction.Sesyeuxpailletésd'ors'assombrirent.—Jetecroyaismorte,dit-elle.Jesavaisquetuavaisdisparudetoncottage.J'espéraistonretour,maiscommelessemainess'écoulaientetquetunerevenaispas...—Jesuistoujoursvivante,commetupeuxleconstater.Maisquit'aditquejen'habitaisplusmoncottage?—Lesfemmesquej'envoyaisrégulièrementtevisiter,pours'assurerquetuallaisbien.Commentes-tuarrivéeici?Quefais-tuchezlesMcCabe?Keeleynesavaitpastropquoiluirépondre.—Ilsm'ontrecueillie,lâcha-t-ellefinalement.

UnenouvelleombretraversaleregarddeRionna.Aumêmeinstant,unguerrierMcDonaldl'appela.—Tonpèretecherche,fitvaloirKeeley.Ildoitvouloirquetutemontresaupetitdéjeuner.Rionnaregardalegarde,puisKeeley.—Ilfautquej'yaille,dit-elle.Nousnousreverronsplustard.J'aibeaucoupdechosesàteraconter.Et sans rien ajouter,Rionna repartit vers le donjon.Keeley, l'estomacnoué, la regarda s'éloigner. Sesémotions étaient confuses.D'un côté, elle avait envie de serrerRionna dans ses bras pour fêter leursretrouvaillesetluidirecombienelleavaitembelli.Etcombien,aussi,leuramitiéluiavaitmanqué.Mais,del'autrecôté,elleattendaitdesexplications,etn'étaitpascertainedepouvoirpardonnerlemalqu'onluiavaitfait.Elle soupira et reporta son attention sur le loch et ses eaux cristallines. Elle avait toujours aimécontempler l'eau.L'eaune trichaitpas.Ellene renvoyaitque le reflet exactdecequi semontrait à sasurface.Keeleyn'auraitpassudirecombiendetempsellerestaainsiperduedanssespensées,avantqu'unevoixnelaramèneàlaréalité.—Ilfaitunpeutropfrais,cematin,pourresteraussilongtempsdehors,luiditGannon.Keeleysursauta.Ellen'avaitpasentenduapprocherleguerrier.—Jenesentaismêmepaslefroid,avoua-t-elleavecunsourire.—C'estcommecelaqu'onattrapedumal.Elleauraitvoululuidemandersic'étaitAlaricquil'envoyait,maiselleserefusaàprononcersonnom.Elles'étaitjurédedemeurerstoïque,quoiqu'illuiencoûtât.—C'estencoreunebellejournéequis'annonce,dit-elle,surletondelaconversationbadine.Laneigeapresqueentièrementfondu.C'estrare,àcetteépoquedel'année.—Oui,maisvousn'êtesquandmêmepasassezhabilléepourlatempérature,insistaGannon.Keeleysoupiraetjetaundernierregardauloch.Latranquillitédeseseauxl'apaisait.Siseulementelleavaitpus'enrevêtircommed'unearmure...—Voussaviezquej'étaisuneMcDonald?Ellen'auraitpassudirepourquoielleavaitdemandécela.Gannonn'étaitpaslegenredepersonnequ'onprenaitpourconfident.Leguerrierauraitpréférésecouperlebrasplutôtqued'écouterdesbavardagesdefemmes.—Oui,jelesavais,répondit-il.Sontonétaitétrange,maisKeeleyn'auraitpasétécapabledeledéfinir.—Jenelesuisplus.Gannonhochalatête.— Non. Maintenant, vous êtes une McCabe. Keeley se surprit à sourire. L'assurance avec laquelleGannonavaitditcelaluiréchauffaitlecœur.Pourunpeu,elleseseraitjetéeàsoncoupourl'embrasser.La jeune femme sentit ses yeux s'embuer.Mais Gannon parut si horrifié, à la perspective de la voirpleurerdevantlui,qu'elleéclataderire.—Merci, Gannon. Je crois que j'avais besoin d'entendre cela. Surtout ce matin. Je... je n'étais paspréparéeàleurarrivée.—Vousn'avezaucuneraisondepleurer,grommela-t-il.UneMcCabenepleurepas.Ellerelèvelatêteetelleneselaissepaspiétinerparlesautres.Cettefois,latentationfutlaplusforte.KeeleysejetaaucoudeGannon.—Que...que...?balbutia-t-il,avecunmouvementderecul.Keeleyluisourit.—Vousm'aimezbien,dit-elle.Ilreniflaavecdédain.—Jen'aijamaisditunechosepareille.

—Avouez-le,vousm'aimezbien.—Pourl'instant,jenevousaimepastrop.—Maisavant,si.Ilsecoualatête.—Vousferiezmieuxderentrer,àprésent.—Merci,Gannon,pourvotreaffection.Jevousavouequejen'avaispastroplemoral,cematin.MaislesMcCabeconnaissentl'importancedel'amitiéetdelaloyauté.Ilparutoffensé.—Maisévidemment!Iln'yapasplusloyalqueleclanMcCabe.Etnotrelairdestlemeilleurdetous.—Jesuistrèsheureused'êtreici,ditKeeley,alorsqu'ilsrepartaientversledonjon.Gannonhésita,avantdeluiglisser:—Jesuistrèsheureux,moiaussi,quevoussoyezlà,KeeleyMcCabe.

31Keeleyrevintdans lagrandesalle rassuréepar laprésencedeGannonàsescôtés.Toutefois,ellepritgardedenepasregarderendirectiondeRionnaetdesonpère.Gannonl'accompagnajusqu'aubancoùMairin avait pris place, puis s'assit près d'elle. La jeune femme coula un regard de remerciement augarde,enmêmetempsqueMairinluiétreignaitlamain,souslatable.Sa nervosité lui serrait l'estomac.Rionna avait probablement déjà averti son père de sa présence ici.Oserait-il latraiterdecatindevanttoutleclanMcCabe?Essaierait-ilderuinersapositionauseinduclan?EtquepouvaitbienavoirRionnadesiimportantàluiraconter?Elle mangea en silence, se contentant de hocher la tête quandMairin lui disait quelque chose. À unmoment,cependant,Gannonsepenchapourluimurmureràl'oreille:—LadyMcCabevientdevousdemandersielleseraitencoreenceintependantdesmois,etvousavezacquiescédelatête.Keeleyfermauninstantlesyeuxetseretintdesefrapperlefrontaveclepoing.PuisellesetournaversMairinpours'excuser.—Jesuisdésolée...Mairineutunsourireamusé.—Jevoulais justevous fairemarcher,dit-elle. Je savaisquevousnem’écoutiezpas !Et,baissant lavoix,elleajouta :Lerepasestpresqueterminé.Personnen'auraremarquéquevousn'étiezpasàvotreaise.Keeley lui sourit, degratitude,maisquandelle tourna la tête, elle s'aperçutque le lairdMcDonald laregardait.Ilavaitfroncélessourcilsetlajeunefemmecompritqu'ilvenaitdelareconnaître.IlécarquillalesyeuxettournalatêteendirectiondeRionna,interloqué,avantdereportersonattentionsurKeeley.Maiscen'étaitnidelacolèrenidelasurprise,quelajeunefemmelutdanssonregard.C'étaitdudésir.Etcelalaterrifiabienplusques'ils'étaitlevédetablepourluicrier«Catin!».Elleavaittoutàcouplesentimentdeseretrouveraussiimpuissantequebiendesannéesplustôt,quandelleavaitcruqu'ilallaitlavioler.La jeune femme, au bord de la panique, était sur le point de quitter la table pour s'enfuir, quand elleréalisaqu'ellese laissaitdominerparsesvieillespeurs.Elles'obligeaàsedétendreetrestasagementassisesursachaise.Ellen'étaitpluslafilletted'autrefois.Àprésent,elleétaitunefemmeadulte,capabledesedéfendretouteseule.Lelairdnepourraitpluslaprendrepourcible.—Vousn'êtesplusseule,luimurmuraGannon,commes'ilavaitludanssespensées.Afin de ne pas l'embarrasser en se mettant à pleurer, Keeley s'obligea à ravaler les larmes qui luimontaientauxyeux.—Non,jenesuisplusseule.Illuisourit.—Sivousavezterminé,jevousraccompagnejusqu'àvotrechambre.Keeley soupira de soulagement.Elle savait bienqueni le laird niRionnanepourraient la poursuivrejusque dans sa chambre sans causer d'esclandre, cependant elle avait peur de se faire remarquer enquittantlatable.—Mercidevotreproposition,Gannon.Mairin,quiavaitécoutéleurconversation,luipritlebras.

—Gannonaraison,Keeley.Vouspouvezvousretirer,àprésent.Keeleyserelevaleplusdiscrètementpossible,maisendépitdeseseffortspournepasattirerl'attention,touslesregardssetournèrentverselleetlesconversationss'interrompirent.Rionna,Alaric et le lairdMcDonald la regardaient différemment, bien sûr.Alaric semblait s'inquiéterpourelle.Rionnaparaissaitavoirduchagrin.Maislelairdlafixaitd'unairlubrique.—Venez,luiditGannon,àvoixbasse.Keeleylelaissal'entraînerversl'escalier.Usgravirentlesmarchesensilence,maisquandKeeleyouvritsaporte,Gannonluiannonça:—Jeresteraidanslecouloir,aucasoùvousauriezbesoindemoi.Keeleyfronçalessourcils,surprise.—Votredevoirn'est-ilpasdeveillersurAlaric?—Si.Maispourl'instant,vousavezplusbesoindemoiquelui.KeeleycompritqueGannonavaitdûêtremisaucourantdesonagressionpar le lairdMcDonald.Ellepiquaunfardetbaissalesyeux,n'osantpluscroiserleregardduguerrier.—Merci,dit-elle,d'unevoixfaible.Etavantqu'ilaitpurépondre,elles'engouffradanssachambreetrefermalaporte.Ellese trouvaitdevantunaffreuxdilemme.ElledésiraitqueRionnaetsonpèreretournent leplusvitepossiblechezeux.Maisquand ils repartiraient,Alaric, en tantquenouveaumarideRionna, serait luiaussiduvoyage.Lajeunefemmes'allongeasursonlitavecungrossoupir.Ellerestalongtempsimmobile,àregarderlesflammessemourirdanslacheminée,fauted'êtreranimées.Alaricpensait-ilàelle,encemoment,ousefamiliarisait-ilavecsafiancée?Keeley s'était assoupie sans s'en rendrecompte.Elle fut réveilléeen sursautparune intrusiondans sachambre.Lecœurbattant lachamade,elles'imaginad'abordquesoncauchemarétait réalité,etque lelairdMcDonaldvenaitl'agresser.—Keeley,c'estmoi,Ewan!Dépêchez-vous!Mairinadescontractions.Keeleyclignaplusieursfoisdesyeuxetsavisions’éclaircitenfin.C'étaitbienEwan.—Oui,biensûr.J'arrive!Ewanétaitdéjàreparti.MaisGannonpassasatêteparlaporte.—Jepeuxvousaider?La jeune femme s'assit au bord du lit pour se masser les tempes et chasser les lambeaux de soncauchemar.ElleavaitétéridiculedepenserquelelairdMcDonaldpourraitsurgirdanssachambre,alorsqueGannonmontaitlagardedanslecouloir.Illuiauraitdéfendud'entrer.Cetteassuranceluiredonnadel'énergie.Ellefermauninstantlesyeuxetprituneprofondeinspiration.—Oui,Gannon.DemandeàMaddieetChristinademonter,avecdel'eauchaudeetdeslingespropres.Jeprendsmesaffairesetjevaisdanslachambredulaird.Gannonhocha la têteet s'éclipsa tandisqueKeeleys'empressaitde rassembler toutcedontelleauraitbesoin.Quelquesminutesplustard,ellefrappaitàlaportedelachambredulaird.Ewanl'ouvritaussitôt.—Quiest-ce,Ewan?demandaMairin.C'estKeeley?Keeleys'engouffraàl'intérieur.—Oui,c'estmoi,dit-elleavecunsourire.Alors,vousêtesprêteànousledonner,cebébé?Mairinétaitassisedanslelit,lesmainsjointessursonventrerebondi.ElleparutsedétendreenvoyantKeeley.—Oui.J'avouequejeneseraispasfâchéedelevoirsortir...Keeleys'esclaffa.

—Vousn'êtespaslapremièreàmedirecela!Elledéposasonmatérielsurlatable,avantdevenirs'asseoiràcôtédeMairin.—Quandvoscontractionsont-ellescommencé?Etsont-ellesrégulières?MairinfronçalessourcilsetregardaEwand'unaircoupable.—Ellesontcommencéjusteaprèslepetitdéjeuner.Maisnon,ellesnesontpasrégulières.Ewanétouffaunjuron.—Pourquoinem'as-tupasprévenutoutdesuite?—Jen'avaispasenviedepassertoutelajournéeaulit,marmonnaMairin.—Depuisquandsont-ellesplusviolentes?demandaKeeley.—Depuisenvironuneheure.— Je ne peuxpas vous dire combiende tempsvotre travail va durer. Parfois, c'est très rapide.Maisd'autresfois,lebébés'ingénieàfaireattendretoutlemonde.Mairinsourit.—J'espèrequ'ilseraplutôtpressédenousvoir.Sonsouriresetransformaenungémissementdouloureux.Ewanseprécipitaaussitôtàsonchevet.—Mairin,çava?Cen'estpas tropdouloureux?demanda-t-il,avantdese tournerversKeeley :quepuis-jefairepourl'aider?Keeleycompritquelelairdallaittouteslesrendrefolless'ilrestaitdanslapièce.ElleposasamainsurlebrasdeMairinetseleva.—Jereviensdansuneminute,dit-elle.Ellesortitdanslecouloir,justeaumomentoùGannonarrivait.—AllezchercherAlaricetCaelen.Ilfautqu'ilsréussissentàconvaincrelelairddedescendreaveceux.Unefoisenbas,donnez-luidelabière,pourlecalmer.—End'autrestermes,vousvoulezquenousvousdébarrassionsdelui?répliquaGannon.Keeleysourit.—C'estexactementcela.Nouslerappelleronsaussitôtquelebébéserané.UnefoisGannonpartichercherlesdeuxfrèresdulaird,KeeleyrevintauprèsdeMairin.Ellevenaitjustede s'asseoir sur le lit, quandMaddie etChristina firent irruptionavec l'eauet les linges.Mairinparutsoulagéeparleurrenfort.—Apparemment,ditMaddie,cen'estpasencorepourtoutdesuite.Mairinpesta.Le regard fixé sur lesquatre femmes,Ewan semblait perdu. Il était de toute évidencepartagé entre ledésirdes'enfuiretceluideresterpouraidersafemme.L'arrivéed'AlaricetCaelenluiépargnad'avoiràprendreunedécision.Ilyeutunebrèvedisputeentre les trois frères,avantqueMairinnedemandefermementàEwande lalaisser.CaelenetAlaricprirentleuraînéchacunparunbras,pourl'expulserdelachambre.Avant de franchir la porte, cependant, Alaric se retourna pour lancer un regard à Keeley. Ses lèvresesquissèrentunsourire,etlajeunefemmefitdemême.Puislestroisfrèresdisparurent.—Sivousavezbesoindemoi,ditGannonàMairin,jeseraidanslecouloir.Mairinluisourit.— Merci, Gannon. Mais son sourire se mua une nouvelle fois en grimace de douleur et Gannons'empressades'éclipser.—Ah,voilàquiestmieux!s'écriaMaddie,d'unairsatisfait.Leshommesn'ontpasleurplaceici.Ilssontincapablesd'affronterladouleurdesfemmes.ChristinaeutunpetitrireetMairinacquiesça.

—Ewanvoulaitêtrelà,dit-ellecependant.C'étaitimportantpourlui.Ildoitêtredéçu.—Ilseralàlemomentvenu,assuraKeeley.J'aiditàGannondedemanderàsesfrèresdenepastropl'enivrer.Pendantlesdeuxheuresquisuivirent,lesfemmesbavardèrentetplaisantèrentavecMairin.Detempsàautre,l'uned'ellesessuyaitavecunlingelasueurquiperlaitàsonfront.—Ce qu'il fait chaud, ici ! se plaignitMairin, alors queChristina venait justement de lui essuyer levisage.—Vous ne voudriez pas que le bébé ait froid quand il sortira du ventre chaud de sa mère, objectaMaddie.—Jepensequ'ilesttempsd'enlevervotrerobeetdevousallonger,suggéraKeeley.Voscontractionsserapprochentetjevoudraism'assurerquelebébéestbienpositionné.—Ets'ilnel'estpas?demandaMairin,avecanxiété.—Nevousinquiétezpas,larassuraKeeley.Elles aidèrent Mairin à se déshabiller puis à s'installer confortablement sur une couverture propre.Mairinétaitunefemmesvelte,maisseshanches,augrandsoulagementdeKeeley,étaientlarges.Ellenedevraitdoncpasrencontrerdedifficultésparticulièrespouraccoucher.Unedemi-heureplustard,lescontractionsétaientpourainsidirecontinues.—Allezchercherlelaird,ditKeeley.Lemomentapproche.Christinaécarquillalesyeux.—J'yvais,dit-elleenseprécipitantverslaporte.Àpeineplusd'uneminuteplustard,Ewanfaisaitirruptiondanslachambre.Ils'agenouillaauprèsdulitetpritlamaindeMairindanslasienne.—Çava,chérie?Tun'aspastropmal?—Non,c'estparfait,réponditMairin,quiserraitlesdents.C'estjusteinsupportable!—Jevoissatête!s'exclamaKeeley.Àlaprochainecontraction,prenezvotrerespirationetpoussez.Pastropfort...Mairinhochalatêteetserraplusfortlamaind'Ewan.—Oh!gémitMairin.—Oui,voilà.Allez-y,maintenant!MairinpoussacommeleluiavaitrecommandéKeeley,avantdelaisserretombersatêtesurl'oreiller.—Reposez-vous,àprésent.Etattendezlaprochaine.Vousreferezexactementlamêmechose.—C'estinsensé,marmonnaEwan.Pourquoilebébén'est-ilpasencoresorti?Maddierouladesyeux.—Ah,leshommes!Ilss'imaginentqu'illeursuffitd'apparaîtrepourquetoutsoitterminé.Pendantlesminutessuivantes,MairinetKeeleyœuvrèrentdeconcert.MairinrespiraitquandKeeleyleluidemandaitetellepoussaitdèsqu'elleenrecevaitl'ordre.LatêteétaitàprésententièrementsortieetKeeleylatenaitdanssesmains.—Nousysommespresque,Mairin!s'exclama-t-elle.Encoreunepoussée,etceserabon.Mairin se redressa, avec l'aide d'Ewan qui lui tenait le dos, puis elle ferma les yeux, pourmieux seconcentrer.—Allez-y!luiordonnaKeeley.Mairinpoussa.LebébéglissadanslesmainsdeKeeley.—C'estunefille!s'écria-t-elle.Vousavezunefille,Mairin!DeslarmesroulaientsurlesjouesdeMairin.Mêmelesyeuxdulairdétaientmouillés.—Unefille...répéta-t-il,d'unevoixaltéréeparl'émotion.

Keeleycoupaetnoualecordon.Puisellenettoyalebébéetsespleursrésonnèrentdanslachambre.Lesdeuxparentsparurenttétanisésparcepremierson.Fascinés,ilsregardèrentKeeleyemmailloterlebébédansunecouvertureavantdeletendreàMairin.—Elleestmagnifique,murmuraEwan.IlembrassalefrontdeMairin,etluicaressalescheveux,avantd'ajouter:—Aussibellequesamère.Mairinapprochalebébédesonseinetaussitôt,ilsemitàtéter.KeeleyétaitémueauxlarmesdevoirEwansiheureux.Ilserraitsafemmedanssesbraspendantquelebébététait.Nil'unnil'autredesdeuxparentsn'étaitcapablededétournersonregarddunouveau-né.MaddieétreignitKeeley.—Vousavezétéparfaite,lafélicita-t-elle.Jen'avaisencorejamaisvuunaccouchementaussipaisible.Keeleyluisourit.Puislesdeuxfemmessechargèrentderassemblerleslingessouillés.Ellestravaillèrentensilence,pournepastroublercesinstantsdetendresseentrelelairdetsafamille.Ellespartaientverslaporte,quandcelui-ciseredressasoudain,pourlesrattraper.—Merci,dit-ilàKeeley.Mafemmeesttoutpourmoi.Jen'auraispassupportédelaperdre.Niqu'elleperdesonbébé.Sachezquemagratitudevousestéternellementacquise.Keeleyluisourit.—Jereviendrailavoirtoutàl'heure.Ewanhochalatêteetsehâtaderejoindresafemme.Alaric,CaelenetGannonattendaientdanslecouloir.—Alors,demandaCaelen.C'estfini?—Oui,réponditKeeley.Lelairdaunefille.Alaricsourit.—Unefille!Voilàquiestparfait.Ellevalerendreaussigagaquesamère.Gannons'esclaffa.—Etnousaussi.—EtMairin?voulutsavoirCaelen.Touts'estbienpassépourelle?Keeleyhaussalessourcils.—Mafoi,Caelen,jevaisfinirparcroirequevousavezuncœur!Oui,Mairinvabien.Ewanestavecelles,ettoutcedontilsontbesoin,touslestrois,c'estd'unmomentd'intimité.Caelenmarmonnaquelquechosed'inintelligible,maissonsoulagementselisaitdanssesyeux.—Maintenant,messieurs,sivousvoulezbiennousexcuser,nousaimerionsdescendredonnerceslingesànettoyer,ditKeeley.Etpourmapart,j'aimeraisbienrespirerunpeud'airfrais.Sansmêmeattendrederéponse,ellepartitversl'escalier,Maddiesursestalons.—Donnez-moitousleslinges,ditMaddie,quandellesarrivèrentenbas.Etallezrespirerdehors.Vousl'avezbienmérité.Keeley acquiesça.Elle était ravie depouvoir sortir dans la cour et sentir la fraîcheur de l'air sur sesjoues.Épuiséeparl'épreuve,elles'assitsurlesmarches.Unaccouchementlaterrifiaittoujours.Tantdefemmesmouraientencouches!Ellen'auraitpasvouluquecelaarriveàMairin.Maissielleavaitsu,elleseseraitmoinsinquiétée.Pourunefois,touts'étaitpasséremarquablementbien.—Keeley?Çava?Lesoirtombaitdéjà,maislajeunefemmen'eutaucunepeineàreconnaîtreAlaricdanslapénombre.—Oui,çava,murmura-t-elle.Ils'approchad'elle,maiss'arrêtaàdistancerespectueuse.—Keeley,je...Ellesereleva,intriguéeparlanervositéqu'ellepercevaitdanssavoix.—Non,nedisrien,lecoupa-t-elle,posantundoigtsurseslèvres.Jesavaisdepuisledébutquelserait

tondestin.Etlemien.N'aieaucunregret,Alaric.Toutsepasserabien.Tudeviendrasungrandlaird.Etjeseraifièredet'avoireupourmoi,mêmesicelan'auraduréqu'untemps.Alaricluicaressalajoue,avantdesepencherlentementpourposerunbaisersurseslèvres.—Tuesmerveilleuse,KeeleyMcCabe.Monclanabeaucoupdechancedet'avoir.Lajeunefemmeluirenditsonbaiser,avantdesereculer,pourmieuxfermersoncœurauchagrinquilaguettait.—Jedoisyaller.IlfautquejeremontevoirsiMairinetlebébén'ontbesoinderien.Alarictenditlamainpourluicaresserlescheveux.—Jet'aime.Nel'oubliejamais.Keeleyluisourit.—Jenel'oublieraipas.Elletournalestalonsetrentradanslaforteressesansunregardenarrière.Mais,alorsqu'ellemontaitlapremièremarche,unelarmecoulasursesjoues.

32LelairdMcCabesetenaitenhautdesmarchesdominantlacourdelaforteresse,lebébéserrédanssesbras.—Jevousprésentemafille!proclama-t-il,brandissantbienhautl'enfant.Le clan, rassemblé au grand complet, cria sa joie. Le bruit en résonna jusque dans les collinesenvironnantes.Ewan serra de nouveau le bébé dans ses bras, et son expression était si tendre queKeeley en avalapéniblementsasalive.Maddie,àcôtéd'elle,souriaitauxanges.—C'estungrandjourpourleclanMcCabe,dit-elle,avantdes'essuyerlesyeux.Keeley réalisa tout à coup que la joie du clan était aussi la sienne. Elle était vraiment devenue uneMcCabe.Etc'étaitmerveilleux,parcequ'ellesesentaitenfinacceptée.L'ovation terminée, Ewan rentra à l'intérieur et chacun retourna vaquer à ses occupations. Maddiedisparutdanslescuisines,etKeeleydécidaderendreunepetitevisiteàMairinpours'assurerquetoutallaitbien.La jeune femme gravit l'escalier en fredonnant. Le couloir, étrangement, était désert. Pour une fois,Gannonnemontaitpaslagarde.Keeleyn'avaitpasfaittroispas,depuislepalier,qu'unemainsurgitpourluiattraperlebrasetl'attirerdansunechambre.Avantqu'elleaitpucrier,ousedéfendre,deslèvress'emparèrentdessiennespourunbaiserbestial.Puislaporteclaquaderrièreelleetlajeunefemmeseretrouvaviolemmentplaquée,doscontrelebattant.Elle comprit que ça recommençait.Le lairdMcDonaldne se souciait pasplus, aujourd'hui qu'hier, desavoirsielleétaitconsentante.Dèsqu'illibéraseslèvres,ellevoulutcrier,maisillaréduisitausilenceenlabâillonnantd'unemain.—Jen'enaid'abordpascrumesyeux,quand je t'aivue ici, dit-il, la respirationhaletante.C'étaitunsigne du destin. J'ai toujours su que tum'appartenais. J'ai attendu cemoment des années,Keeley.Desannées.Cettefois,tunemediraspasnon.SamainlibrecaressaitlesseinsdeKeeleyavecrudesse.Puisilôtalamainquilabâillonnait,maiscefutencorepourl'embrasser.Rassemblanttoutessesforces,lajeunefemmeluidonnauncoupdegenoudansl'entrejambe.Ilsepliaendeuxdedouleur,etKeeleylerepoussaalorssiviolemmentqu'iltombalederrièreparterre.Elleseretournaensuitepourouvrirlaporte,maiselleétaitverrouillée!Elleeuttoutdemêmeletempsdecrieràgorgedéployée,avantquelelairdnel'attrapeparlescheveuxpourlajeteràtraverslapièce.Elleatterritsurleplancher.Lelairdseplantaau-dessusd'elle,lesyeuxbrillantsdecolère.—Petitegarce!Tuvasmelepayer.Keeley,aveugléeparsarage,seredressad'unbondpourlefrapperviolemment.Ilbattitenretraite,sousl'effetdescoups,maisaussidelasurprise.Pendant des années, il avait terrorisé Keeley. Elle se l'était représenté comme une sorte de démonbeaucouptroppuissantpourelle.Maisàprésent,illuiapparaissaitdanstoutesaréalitépathétique.—Vousn’êtesqu'unmisérablepourceauquis'attaqueauxenfants!luicracha-t-elleauvisage.Elle le frappaitavecsespoings,sanss'interrompre.Àunmoment,elle luiécrasamêmelenez, faisantjaillirlesangdesesnarines.Ilfinitcependantparsereprendreetcontre-attaquer.

Keeley reçut un coup de poing en pleinemâchoire.Reculant sous l'impact, elle heurta le lit et tombadessusàlarenverse.—Ah,tevoilàenfinàtaplace,grogna-t-il.Etils'avançaverslelit.Au même instant, la porte vola en éclats. Le laird écarquilla les yeux de terreur, avant de volerlittéralementàtraverslapiècepourallers'écrasercontreunmur.Keeley,médusée,regardaCaelen,écumantderage,sejetersurluipourl'obligeràseredresseravantdeluiassénerunevoléedecoupsdepoing.Ellen'avaitencorejamaisvuunhommeaussifurieux.Siellen'intervenait pas, Caelen tuerait le laird. Oh, sa mort ne la chagrinerait pas outre mesure, mais lesconséquencesdugestedeCaelenseraientterriblespourluietpourleclan.Ignorantsadouleuràlamâchoire,lajeunefemmecourutversCaelenpourretenirsonbras.—Caelen,arrêtez!Caelenlâchalelairdetseretourna.—Vousprenezsadéfense,maintenant?Keeleyétaitauborddeslarmes.Ellesecoualatête.—Non.Maislaissez-le,s'ilvousplaît.Pensezauxconséquencesdevotreacte.Ilreportasonregardsurlelairdécrouléàterreeteutunegrimacededégoût.Soudain,Keeleyaccusabrutalementlechocdecequivenaitdesepasser.Elledéfaillit.Caelenlarattrapaàtempsdanssesbras,puislaportajusqu'àsachambreetladéposasursonlit.—Voulez-vousquej'appelleMaddie,ouChristina?Ellesecoualatêteetmassasamâchoireendolorie.—J'auraisdûletuer,marmonnaCaelen,avantdetournerlestalonsetdelancer:JevaischercherAlaric!Àcesmots,lajeunefemmebonditdulitpourleretenir.—Non,Caelen!Neditessurtoutpasunmotdetoutceci!Caelenlaregardaavecincrédulité.—Réfléchissez.SivousenparlezàAlaric,ilserafurieux.Ilétaitdéjàtrèsfâchédecequis'étaitpasséautrefois.S'ilapprendquelelairdavoulurecommenceraujourd'hui,jen'oseimaginersaréaction.—Etçapeutsecomprendre.Aucunhommenedevraittolérerqu'unefemmepuisseêtremaltraitéeainsi.McDonaldméritaitlamort.Envousagressant,ilainsultétoutleclanMcCabe.Ewanneluipardonnerapas.—C'estbienpourcelaqu'ilnefautriendire.Cetteallianceesttropimportantepourvotre...pournotreclan.Songezaudilemmed'Alaric.Ilnepeutpassepermettredes'enprendreaupèredesafutureépouse.N'oubliezpasqu'AlaricestdestinéàdevenirlairddesMcDonald.Caelensepassaunemaindanslescheveuxetsoupirad'exaspération.—Alors,vouspréférezquejegardelesilence?Keeleysecontentadehocherlatête,depeurdefondreenlarmes.Caelensoupiraencore,avantdes'asseoiràcôtéd'ellesurlelit.Puis,aprèsunmomentd'hésitation,illuienlaçalataille.—Voussavez,jecomprendraisquevouspleuriez,dit-ild'untonbourru.Soulagée, Keeley s'abandonna dans ses bras et éclata en sanglots. Elle pleura, pendant qu'il tentaitmaladroitementdelaconsolerenluitapotantledos.Ellepleurajusqu'àenavoirlamigraine.Peuàpeu,seslarmesseréduisirentàunesériedepetitshoquets.Elleseredressaalors,pours'essuyerlesyeuxd'unreversdemain.Puiselleéclataderire.Caelenlaregardaitbizarrement,maisellenepouvaitpasl'enblâmer.Ildevaitsedemandersiellen'étaitpasdevenuefolle.

—Jel'aifaitsaignerdunez,dit-elle.Caelensourit.—Oui,j'aiconstatécela.Vousm'avezimpressionnée,Keeley.Vousnemanquezpasdecourage.—Jel'aiaussifrappéentrelesjambes.Ilhochalatêteengrimaçant.—Aveccequenousluiavonsfaitsubir touslesdeux, jecroisqu'ilneserapasenétatd'agresseruneautrefemmeavantunbonmoment.—Tantmieux!Àdéfautdeletuer,nouspouvonsaumoinslefairesouffrir.Caelens'esclaffa.—Merci,Caelen,soupiraKeeley.Jesuisdésoléed'avoirpleurésurvotreépaule.Votretuniqueesttoutemouillée,àprésent.— Je pouvais bien vous apporter ce réconfort, après tout ce que vous avez fait pour notre clan. Jereconnaisqu'audébut,jememéfiaisdevous.J'estimaisqu'Alaricavaittortdes'intéresseràvousetqu'iln'ensortiraitriendebon.Maisj'aieutort.Mêmemaintenant,alorsquevouspourriezchercheràsaccagerson mariage avec Rionna, vous ne pensez qu'au bien du clan. Vous êtes une sacrée femme, KeeleyMcCabe!Keeleysentitsesyeuxs'embuerdenouveau.—Oh,arrêtez!Jememetsàpleurerchaquefoisqu'onm'appelleMcCabe.Caelenluisoulevadoucementlementon,pourl'obligeràcroisersonregard.—Çaira?Ilnevousapasfaittropmal?—Jecroisquec'estplutôtmoi,aucontraire,quil'aifaitsouffrir.Ilajusteréussiàmedonneruncoupdepoingdanslamâchoire.—Parfait.Voulez-vousquejedemandeàl'unedesfemmesdemontervousvoir?—Non,toutirabien.Vouslesavezparfaitementremplacées.Ilparutsidésarçonnéqu'elleeutenvied'éclaterderire.—Jeplaisantais.Maisjenevousremercieraijamaisassezd'avoiraccouruàmonsecours.Ellevoulutserelever,maisvoyantqu'ellechancelaitsursesjambes,Caelenluipritlebraspourl'obligeràserasseoir.—Vousdevriezresterunpeusurcelit.Vousavezsubiunchoctrèséprouvant.—Jedois allervoirMairin et sonbébé.De toute façon, jepréfèrem'occuper,quede rester ici touteseule.—D'accord,allezvoirMairin.Maisensuite,vousreviendrezicipourvousreposer,dit-ild'untonferme.Sinon,jeraconteraiàAlariccequis'estpassé.Keeleycompritqu'ilneplaisantaitpas.—C'estentendu.Jemereposeraitoutàl'heure.Caelenlaregardaquitterlachambred'unedémarchemalassurée.Elles'illusionnaitbeaucoupsielles'imaginaitqu'ilgarderait lesecretsurcequis'étaitpassé.Ewan devait être informé qu'une vipère logeait sous son toit. En revanche, elle avait raison de ledissuader d'en parler à Alaric. Si son frère apprenait l'agression dont Keeley avait été victime, ildeviendrait fou de rage contreGregorMcDonald. Ce serait la guerre, et tous les patients efforts desMcCabepourscellercetteallianceseraientréduitsànéant.Pourlapremièrefois,Caelens'attristaitdusortdesonfrère.Ilétaitévidentqu'AlarictenaitbeaucoupàKeeleyetquecelle-cipartageait ses sentiments.Et la jeune femmeavait gagné toute sonestimeenneprofitantpasdecetincidentaveclelairdMcDonaldpoursaboterlemariagedel'hommequ'elleaimait.Alaricnesauraitjamaiscequis'étaitpassé,maisdésormais,CaelenveilleraitàlaprotectiondeKeeleyjusqu'àcequelesMcDonaldsoientrepartis.Etleplustôtseraitlemieux.CaelensevoyaitmalcôtoyerlelairdMcDonaldsansavoirenviedeluisauterencoreàlagorge.

33—Keeley,quevousest-ilarrivéàlamâchoire?demandaMairin.Keeleymassasamâchoireendolorie.—Çasevoittantqueça?Mairinfronçalessourcils.—Vousavezunbleu. Il se remarqueplusoumoinsselonquevousprenez la lumière.Quevousest-ilarrivé?— Oh, rien, répondit Keeley, d'un ton léger. Sinon ma maladresse. J'ai trébuché dans l'escalier.Heureusement,personnen'aassistéaudésastre.Mairinneparutpasconvaincueparl'explication,maisellen'insistapas.—Commentvoussentez-vous?voulutsavoirKeeley.— Fatiguée, mais sinon, tout va bien, assura Mairin. J'ai hâte de sortir du lit. Et, jetant un regardimplorant à Keeley, elle précisa : Ewan vame rendre folle. J'ai beau lui répéter que la plupart desfemmesserelèventtrèsviteaprèsleurscouches,ilrefused'entendreraison.Keeleysourit.—Jenevoispasenquoiilseraitmauvaisdevousétirerunpeu.—J'aimeraism'asseoirdevantlefeupourdonnerleseinàIsabel.Jen'enpeuxplusd'êtreallongée.—Ainsi,vousl'avezappeléeIsabel...C'estvraimentuntrèsjoliprénom.Mairinbaissalesyeuxsursonbébéendormidanssesbras.—Oui,dit-elle,levisagerayonnantdefiertéetd'amour.Ewanl'annonceraofficiellementàl'arrivéeduroi.Keeleyavalasasalive.—Leroivavenirici?—Oui.Ewanl'ainformédelaprésencedesMcDonald.Commeilvoulaitassisteraumariaged'Alaric,ilnedevraitplustarder.S'efforçantdegardercontenance,Keeleytenditlesbras.—Confiez-moiIsabel,quejelamettedanssonberceau.Ensuite,jevousaideraiàvousinstallerdevantlefeu.Sivouslesouhaitez,nouspourrionsaussienprofiterpourfairevotretoiletteetvouschanger.—Oh,ce seraitmerveilleux ! s'extasiaMairin.Aprèsavoir couché lebébédans sonberceau,KeeleyaidaMairinàsortirdulit,puisàselaveretàchangerderobe.—Finalement,jetienstrèsbiensurmesjambes!décrétaMairin,d'unairdetriomphe.—Jecroisquejevaisêtreobligédeposterungardedanslachambre,pourm'assurerquetunecommetspasd'imprudences,intervintEwan,depuislaporte.MairinsursautasiviolemmentqueKeeleyluipritlebras,avantdesetournerverslelaird.—Entrezousortez,maisfermezlaporteetparlezmoinsfort,luiintima-t-elle.Lebébédort.Ewann'aimaitvisiblementpasrecevoird'ordres,maisils'exécutacependant,refermantlaportederrièrelui,avantdes'approcherdeMairinetdecroiserlesbras.—Neprenezdoncpascetairmartial!luiditencoreKeeley.Aidez-laplutôtàs'asseoirdevantlefeu.Ellevoudraitallaiterlebébéàsonaise.—Elleferaitmieuxdesereposerdanssonlit,grommelaEwan.Mais il pritMairin avec lui et il l'installa avecbeaucoupdedouceurdevant la cheminée.AprèsquoiKeeley récupéra le bébé pour l'apporter à samère. Puis elle s'affaira à nettoyer le lit et remettre del'ordre.

—Cessedefroncerlessourcils,ditMairinàEwan,pourfaireéchoauxreprochesdeKeeley.Jemesenstrèsbien.Maissijedevaispasserunejournéedeplusdanscelit,jedeviendraisfolle.—Jem'inquiétaispourtoi,sejustifiaEwan.Jeteveuxenbonnesanté.EtIsabelaussi.Mairinluitapotaaffectueusementlebras.—Net'inquiètepas.Noussommestouteslesdeuxenpleineforme.Ewan s'assit à côté d'elle et la regarda donner le sein à Isabel avec un mélange d'amour etd'émerveillementdanslesyeux.—Tuasfaillimefaireoublierlaraisondemavenue,dit-ilsoudain.Tevoirdeboutm'aégarél'esprit.Mairins'esclaffa.—Çanet'arrivepassouvent.— Le roi arrive dans deux jours. Sonmessager vient de me l'apprendre. Il sera ravi de célébrer lemariaged'AlaricenmêmetempsquelatransmissiondeNeamhAlainnànotrefille.Keeleytressaillit,maisellecontinuadevaqueràsonnettoyage.—Jenepeuxquandmêmepasêtreaulitquandleroiseralà!protestaMairin.—Jeneveuxpasquetut'épuisesinutilement,insistaEwan.—Iln'estpasquestionquejemanquelemariaged'Alaric.Detoutefaçon,j'enaiassezd'êtrecouchée.—Vousnedevriezéprouveraucunedifficultéàdescendrepourlemariaged'Alaric,intervintKeeley.Àconditionquevousvousreposiezbiend'icilà.Ewantriomphait.MairinseretournapourfusillerKeeleyduregard.—Traîtresse!Soudain,onfrappaàlaporteetEwanselevapourallerouvrir.EndécouvrantRionnaMcDonald,Keeleyse figea et détourna le regard, tout en ayant conscience de la stupidité de sa réaction. Rionna l'avaitforcémentvue.—Pardonnez-moi,laird,ditRionna,maisjesouhaitaissaluerladyMcCabeetsonbébé,sidumoinsellereçoitdesvisites.MairinfitàEwanunegrimaceimpuissanteavantd'adresseràKeeleyunregardd'excuse.—J'aipresquefinidenettoyer,ditcelle-ciàhautevoix.Jereviendraiterminerplustard.EllesaluaEwanetMairinetcroisaRionnaàlaporte.—S'ilteplaît,Keeley,ditRionna,luiprenantlebras.J'aimeraisteparler,toutàl'heure.Keeleyluisourit.—C'est inutile.J'aiapprisqueleroiserait làdansdeuxjours.Félicitationspourtonmariage.Tudoisêtretrèsimpatiente.Etelles'éclipsasurcesmots.Rionnalasuivitduregardjusqu'àcequ'elleaitdisparudansl'escalier.Alaricfitdécrireàsonépéeunarcdecercle,avantdel'abattresurlebouclierdesonadversaire.C'étaitlequatrièmehommedont il sedébarrassaitenquelquesminutes,et il se tournaitdéjàversunéventuelprochainagresseur.Maisc'estCaelenquisurgitdevantluiavecunregarddedéfi.—Tuchercheslabagarre,frangin?Alaricpesta.—Jenesuispasd'humeuràplaisanter,répliqua-t-il.Et sans sepréoccuperde savoirpourquoiCaelendésirait l'affronter,Alaric le chargeaavec sonépée.Caelensautadecôtéetparahabilementlecoup.Lebruitdesdeuxlamesquis'entrechoquaientrésonnaitdanslacourdelaforteresseetbientôtuncercledeguerriers-McCabeetMcDonaldconfondus-seformaautourdesdeuxbelligérants.Audébut,Alariclepritàlalégère.Ilmesuraitsesattaquespournepasfrappertropfort.MaisilréalisatrèsvitequeCaelennevoulaitpassecontenterd'unsimpleentraînement.

Lesyeuxdesonfrèrebrillaientderageetilsebattaitsansjamaisdesserrerlesmâchoires.Alaricsejetaalorsàcorpsperdudanslabataille,heureuxdepouvoirenfinlibérertouteslesfrustrationsaccumuléesaucoursdesdernièressemaines.Detoutefaçon,iln'avaitpasàs'inquiéter.Sonfrèreétaitungladiateuraussiendurciquelui:ilsauraitsepréserverdescoupsréellementdangereux.Leur affrontement fit bientôt l'objet de paris. Deux clans se formèrent, parmi les spectateurs, chacunencourageantsonchampionpardescris.Unpeuenretrait,Ewanobservaitlecombatensilence.Iln'interviendraitpas.Iln'étaitpasstupide.Sesdeuxfrèresavaientbeauêtrefurieuxl'unetl'autre,ilsavaitqu'ilsnes'entretueraientpas.Sansdouteseblesseraient-ils, mais c'était une autre histoire. Ewan ne voulait pas risquer de prendre bêtement unmauvaiscoupens'interposant.IlignoraitcequiavaitprovoquélacolèredeCaelen.Maisilfiniraitbienparledécouvrir.Acetteheuretardive,toutlemondeoupresqueauchâteaudormaitàpoingsfermés.Cependant,Keeleyveillaitdansson litet revivait lesévénementsde la journée.Nerveusementépuisée,ellenesavaitpascombiendetempsellepourraitencoretenirsanscraquer.Commeellen'avaitentenduparlerd'aucunedispute impliquant le lairdMcDonald,elleendéduisitqueCaelenavaittenuparoleetqu'iln'avaitpasébruitécequis'étaitpassé.Keeleyse raidit instinctivementausouvenirde sonagressionetelledut faireappelà toute savolontépoursedétendreetcalmersacolère.Elleauraitaimétuercemonstre.Elleétaitheureuse,entoutcas,den'avoirpasétéparalyséeparlapeuretdes'êtredéfendueaveccourage.Detoutefaçon,elleauraitencorepréférésejeterparlafenêtre,plutôtquedelaisserlelairdMcDonaldlavioler!Descoupsdiscrètementfrappésàsaportelafirentseredresserdanssonlit.Craignantqu'ilnesoitarrivéquelquechoseàMairin,ouaubébé,ellesedrapadansunchâleetsedépêchad'allerouvrir.Maisc'estunesurprisequil'attendaitderrièrelaporte.—Rionna?—Keeley,murmuraRionna,d'unevoixdouce,jepeuxentrer?Keeleys'agrippaàlaportepoursesoutenir.Ellenesouhaitaitpasavoird'explicationavecRionna.Ellenevoulaitmêmepasluiparler.Savoirqu'elleépouseraitAlariclesurlendemainluisuffisaitamplement.D'unautrecôté,ellenepouvaitpaséviter l'inévitable.Etmieuxvalaitavoircetteexplicationenprivé,pendantquepersonnenepourraitlesentendre.Lajeunefemmeouvritlebattantengrand.—Oui,entre.DèsqueRionnaeutfranchileseuil,Keeleyrefermalaportederrièreelleetallas'asseoirsursonlit.Ellenevoulaitpasdonnerl'avantageàRionnaenluimontrantquesavisitelarendaitnerveuse.Dureste,c'étaitRionnaquiparaissait laplusgênée.Sesdoigts trituraient lescouturesdesonpantalond'homme.—Jevoudraistediretantdechoses,Keeley.D'abord,quejesuisheureusequetusoisenvieetenbonnesanté.Quandj'aiappristadisparition,j'airedoutéqu'iltesoitarrivéquelquechosedeterrible.Keeleyneputs'empêcherderépliquer.Sonamertumeétaittropforte.—Voilàunétrangediscours,quandonsaitcommentj'aiétéchasséedechezmoietobligéedesurvivreparmespropresmoyens!Rionnasecoualatête.— Non. Pas uniquement par tes propres moyens. Keeley se releva d'un bond. Mais ses jambestremblaient.

—Tu n'as jamais cherché àme revoir,même après lamort de tamère. Pourtant, tu savais la vérité,Rionna.Tusavais.—Oui,jesavais.Depuisledébut.C'estterrible,pourunefille,dedécouvrirlavéritablenaturedesonpère.Pourquoicrois-tuquejepréféraistoujoursallerjoueràl'extérieurdelaforteresse,plutôtquedansla cour ? Parce que je voyais bien la façon dont mon père te regardait, Keeley. Je savais, et je leméprisaispourça.Keeleyenrestabouchebée.Elleétaitsistupéfaitequ'ellenesavaitpasquoirépondre.Rionnaluipritlebras.—Assieds-toi,s'ilteplaît,etécoutecequej'aiàtedire.Keeleyhésita.—S'ilteplaît,insistaRionna.Keeleyselaissaretombersurlelit.Rionnas'yinstallaelleaussi,àdistancerespectueuse.—J'étaisanéantie,quandmamèret'atraitéedecatinett'achasséeduclan.Jesavaiscequis'étaitpasséréellementetjeluienvoulaisdet'enaccuser.C'étaitunefemmeorgueilleuse.Ellen'auraitpassupportéquequelqu'unapprenne lavérité.Maiscelan'excusaitpaspourautant sonattitude. Jemesuis souventdemandéquelleauraitétésaréactionsijem'étaistrouvéeàtaplace?M'aurait-elletraitée,moiaussi,decatin?Aurait-ellepréférétournerledosàsaproprefilleplutôtquedesacrifiersonorgueil?Keeleyavalapéniblementsasalive.EllelisaituntelchagrindanslesyeuxdeRionnaqu'elleavaitenviedelaserrerdanssesbraspourlaréconforter.—Tunepeuxpassavoircombienjemesuisinquiétéepourtoi,ajoutaRionna.—Pourtant,tun'asrienfait,mêmeaprèslamortdetamère,luirappelaKeeley.Rionnasoupira.—Les gens qui venaient réclamer ton aide et te laissaient ensuite quelques pièces ou unmorceau degibier,étaienttousenvoyésparmoi.C'étaitmonseulmoyendem'assurerquetudisposaisdetoutcedonttuavaisbesoin.—J'auraissurtouteubesoindetonamitié,etdusoutiendemonclan!rétorquaKeeley.As-tuseulementidéedecequel'onressentlorsqu'onestchassédechezsoisanspossibilitéderetour?Rionnaluipritlamainavecbeaucoupdedouceur,commesiellecraignaitqueKeeleyneluiopposeunerebuffade.—Jenepouvaispastelaisserrevenir,Keeley.Keeleyhaussalessourcils.—Pourquoi?— Parce que tu l'obsédais, Keeley. Il ne t'aurait pas laissée tranquille un seul instant. La meilleuresolutionpourteprotégerdemonpère,c'étaitdetetenirleplusloinpossibledelui.Keeleyaccusalechoc.ElleréalisaitqueRionnadisaitvrai.Ellel'avaitvu,toutàl'heure,dansleregarddulaird.Il ladésiraitavecunesortededésespoir.Commesi toutescesannéesn'avaientpasexisté,etqu'iln'avaitpascesséd'attendresachancedelaposséder.—Oh,Rionna!murmuraKeeley.—C'estenpartiepourcelaquej'aiacceptécemariageavecAlaricMcCabe,poursuivitRionna.Dèslorsquemonpèren'auraitplusétélaird,j'auraisputefairerevenirdansnotreclan.LesMcCabesontdesgenshonorables.Alaricn'auraitpaspermisquemonpèretefassedumal.Nousserionsredevenuesdessœurs,commeautrefois.Keeleysentitdeslarmesmonterdanssagorge.Elleavaitenviedepleurersurl'innocenceperduededeuxjeunesfillesrattrapéesparledémondeshommes.—Jenet'aijamaisoubliée,Keeley.Ilnes'estpasécouléunseuljoursansquejepenseàtoi.Maisj'aibienconsciencequetuavaistouteslesraisonsdumonded'êtrefâchéecontremoi.Etjenet'envoudrai

passitunemepardonnespas.Maissachequej'aifaitcequimeparaissaitpréférablepourtasécurité.KeeleyattiraRionnadans sesbras.Lesdeux femmes s'étreignirentde longuesminutes, ravalant toutesdeux leurs larmes.Keeley ne savait pas quoi dire,mais elle comprenait, à présent, queRionna avaitsouffertautantqu'elle.—Commentt'es-turetrouvéechezlesMcCabe?finitpardemanderRionna.Keeleysesentitgagnéeparlaculpabilité.EllenepouvaitévidemmentpasraconteràRionnalavéritablenaturedesarelationavecAlaricetnevoulaitpaslablesserenluiapprenantquesonfuturmarienaimaituneautre.Aussipréféra-t-elleinventerunmensonge.Elleenauraitmoinsderemords.—LelairdMcCabeavaitbesoind'uneguérisseuseenprévisiondel'accouchementdesafemme.Ilm'aoffertuntoitetunepositiondanssonclan.Jenepouvaispasrefuserunetelleopportunité.Rionnafronçalessourcils.—Es-tuheureuse,ici?Etbientraitée?Keeleysourit.—Oui.LesMcCabesontdevenusmanouvellefamille.— Je suis contente que tu sois là pour assister àmonmariage avecAlaric. Je n'aurais pas voulu demeilleurtémoinquetoi.KeeleypritsurellepournepasréagiraucommentaireinnocentdeRionna.—Cettefois,jeneveuxplusteperdre,repritRionna,avantdeserrerdenouveauKeeleydanssesbras.Promets-moidevenirsouventnousrendrevisite.Etd'êtrelàpourl'accouchementdemonpremierenfant.Keeleyrenditl'accoladeàsonamie.—Oui,dit-elle,d'unevoixétranglée.Jetelepromets.

34Depuislafenêtredesachambre,KeeleyregardaitAlaricsepromeneravecRionnaenbordureduloch.Ilsauraientpurêveràplusd'intimitépoursefairelacour:desguerriersMcCabeetMcDonaldétaientpostésensentinellenonloind'eux.Latempératurecontinuaitd'êtreclémentepourlasaison,favorisantlesoccupationsextérieures.Lacourdelaforteressecommençaitd'ailleursdebruisserd'activités,envuedespréparatifsdumariage.La nouvelle de l'arrivée du roi s'étant vite répandue à travers les Highlands, les clans voisinscommençaientd'accouriretdeserassembleraupieddesmursdelaforteresse.Gertie et les autres femmes travaillaient donc d'arrache-pied pour pouvoir nourrir tout cet afflux devisiteurs.L'excitationétaitpartoutpalpableàtraverslesHighlands.Laguerresemblait imminenteetchaqueclanvoulaits'assurerdescellerlabonnealliance.Par sa venue, le roi manifestait son approbation au mariage d'Alaric et de Rionna. Cette cérémonieassoirait la nouvelle suprématie des McCabe, encore renforcée par la naissance de la fille d'Ewan,désormaishéritièredeNeamhAlainn.KeeleyobservaitattentivementAlaric.Celui-citendaitl'oreillepourécoutercequeluidisaitRionna,quisemblaitluifairelaleçon.Keeleysavaitdepuisledébutqu'Alaricétaitappeléàunegrandedestinée.DevenulairddesMcDonaldils'imposerait,avecEwan,commel'undesmeilleursdéfenseursdutrôned'Ecosse.Àunmoment,AlarictournalatêteverslaforteresseetsonregardaccrochaceluideKeeley.Ilgrimaça,commeenproieàunviolentchagrin.Lajeunefemmes'écartadelafenêtreafinquepersonnenesoittémoindeleuréchange.Soncœuravaitbeauêtrebriséenmillemorceaux,ellenevoulaitsurtoutpascauserlamoindregêneàRionna.Quelqu'un frappa à sa porte, la tirant de ses rêveries. Elle s'empressa d'aller ouvrir, ravie de cettedistraction.C'étaitCaelen.Keeleyfutsisurprisequ'ellenesutpasquoiluidire.Caelennesemblaitpasplusàl'aisequ'elle.—J'aipenséque...enfin,jemesuisditquevouspréféreriezpeut-êtredescendreaccompagnée,pourledîner.—Vousm'offrezvotreescorte?—Oui.Jemedoutequelesnocesdedemaindoiventvouspréoccuper,maisceneseraitpasunebonneidéedepasserlasoiréeseuledansvotrechambre.Keeley,trèsémue,luisourit.—J'espèrequevousn'allezpaspleurer!marmonna-t-il,effrayéàl'idéed'affronterunenouvellecrisedelarmes.LesouriredeKeeleys'élargit.—J'acceptevolontiersvotreescorte.Caelenluitenditsonbras.Ledînerfuttrèsaniméetseprolongeatarddanslasoirée.Lagrandetableétaitoccupéeparleslairdsdesclansvoisins,accouruspourrendrehommageauroietsefaireremarquerdelui.Rionna, assise entreAlaric et son père, semblait s'ennuyer.Mairin tombait visiblement de fatigue, aupointqu'Ewan,peusoucieuxdesconvenances,lapritdanssesbraspourlasoutenir.AssisprèsdeKeeley,Caelenobservait tout lemonde.Quoiquepeu loquace, ilsepenchaitde tempsà

autreversKeeleypourluidemandersitoutallaitbien.La jeune femme luiétait reconnaissantedesasollicitude.Soussesdehorsbourrus,Caelencachaitunegrandeattentionauxautres.Keeleyignoraitcequil'avaitrendusiméfiantpourmanifestersesémotions,maiselleétaitconvaincuequequiconquegagnaitsaloyautépourraitcomptersurunedévotionsansfaille.—J'aipeurquelasoiréenes'éterniseunpeutroppourMairin,chuchotaKeeleyàCaelen.Maisàcausedelaprésenceduroi,elleveutresterauprèsdesonmarietellen'admettrajamaisqu'elleestépuisée.CaelenregardaendirectiondeMairinetfronçalessourcils.—Ewanauraitdûl'envoyersecoucherdepuislongtemps.—Jepourraispeut-êtrem'enmêleretdirequelebébéréclamesamère?—Oui. Et je vous accompagnerai toutes les deux là-haut, pour qu'Ewan n'ait pas à quitter la table,décrétaCaelen.Keeleysourit.—Excellenteidée.—Iln'aurapasd'autreoccasiondese retrouverseulavecvous,ajoutaCaelen,désignantdu regard lelairdMcDonald.Keeley se releva de table.Elle sourit àRionna, sansmêmeparaître voir sonpère, puis elle coula unregardfurtifendirectiond'Alaric,avantdedétournervivementlatêtedecraintequesesémotionsnelatrahissent.Caelenl'escortaauboutdelatableetKeeleyfitsarévérenceauroi,avantdes'adresseraulairdMcCabe:—Sivouslepermettez,laird,j'aimeraisconduireladyMcCabeauprèsd'Isabel.Ewanlaremerciaduregard.PuisilselevapouraiderMairinàfairedemême.MêmeMairinsemblaitsoulagéedequitterlatable.Keeleys'apprêtaitàgagnerl'escalierquandleroilevalamainpourl'arrêter.Lajeunefemmesefigea,angoissée.Avait-elleoffensélemonarqueenl'interrompantdanssaconversation?—Ewanm'aditquevousétiezlaguérisseusequiavaitprésidéàl'accouchementdemanièce?—C'estexact,VotreMajesté.—Ilm'aaussipréciséquevousaviezsauvélavied'AlaricMcCabe.Keeleyhochala tête.Elleétaithorriblementmalà l'aise,caràprésent tout lemonde,autourd'eux, lesécoutait.—LesMcCabeontbeaucoupdechancedevousavoir.SiEwann'étaitpasunalliésiprécieux,jevousdemanderaisd'êtremaguérisseusepersonnelle.Keeleyn'encroyaitpassesoreilles.—Mer...merci,VotreMajesté,balbutia-t-elle.Vosparolesm'honorent.Leroilevadenouveaulamain,cettefoispourlacongédier.—Vouspouvezdisposer.Manièceabesoindesereposer.Jevouschargedesasanté,etdecelledesafille.Keeleyfituneautrerévérence,avantdesuivreCaelenetMairin,quipartaientdéjàversl'escalier.—Commentvoussentez-vous?demandaMairinàKeeley,quandlesdeuxfemmesseretrouvèrentdanslachambredeMairin.Keeleyécarquillalesyeux.—C'estplutôtàmoidevousposercettequestion.Vousparaissieztrèsfatiguée,durantledîner.Mairingrimaça.—C'estvrai,jel'étais.Etjevousremercied'êtrevenueàmonsecours.Mairins'assit.Keeleypritlebébéàlaservantechargéedeveillersurluipourletendreàsamère.Mairin

congédialaservanteetreportasonattentionsurKeeley.—Vousnem'avezpasrépondu.Commentvoussentez-vous?Jemedoutequecedoitêtretrèspéniblepourvous.Keeleys'obligeaàsourire.—Çava.Sincèrement. J'ai eu la chancedepouvoir parler avecRionna.Toutes ces annéesont été sidouloureusespourelle!Elleestmasœurdecœuretjen'aiaucuneenviedeluinuire.—Vouspréférezsouffrirtouteseule,murmuraMairin.Keeleysoupira.— Je souhaite le bonheur deRionna.Et celui d'Alaric.Elle fera une épouse loyale et lui donnera debeauxenfants.Ellemérited'épouserunlaird.—Vousaussi,Keeley.Keeleysouritencore.—Peut-êtretrouverai-jeunjourunlairdrienquepourmoi?Maisenmême tempsqu'elledisaitcela,ellesavaitpertinemmentquepersonnene remplacerait jamaisAlaricdanssoncœur.—Restezavecmoi,luisuggéraMairin.Ewanmonterasecouchertrèstard,cesoir.Jeneseraismêmepasétonnéequ'ilnemerejoignequ'àl'aube.Keeley acquiesça d'autant plus volontiers qu'elle ne se voyait pas se morfondre toute seule dans sachambre.Lacompagnied'uneamiel'aideraitàsurmontersonchagrin.Keeleyfutréveilléepardescoupsfrappésdoucementàlaportedesachambre.Désorientée,ellesefrottalesyeux.Cenepouvaitpasdéjàêtrel'aube.Ellevenaitàpeinedesecoucher,aprèsêtrerestéeauprèsdeMairinunebonnepartiedelanuit.Espérantqueriendegraven'étaitarrivé,lajeunefemmesortitdulitetentrouvritsaporte.Maisdèsqu'ellereconnutCaelen,elleouvritlebattantengrand.—Caelen?Quesepasse-t-il?Il porta un doigt à ses lèvres, pour lui signifier de ne pas faire de bruit. Puis il se pencha, pour luichuchoter:—C'estAlaricquim'envoie. Il aimeraitvousvoir.Mais iln'apasvouluprendre le risquedemonterjusqu'àvotrechambre.Keeleyavalasasalive.—Oùest-il?—Habillez-vouschaudement.Ilestaubordduloch.—Accordez-moiuninstant.Jevaisfairevite.Elle s'habilla à la hâte, retrouvaCaelendans le couloir et le suivit vers l'escalier.Puis, soudain, elles'arrêtaaumilieudesmarches.—Vousêtesconscientquesiquelqu'unnousvoit,nousdonneronsl'impressionde...enfin,vousetmoi...—Oui,réponditCaelen.Jesais.Keeleysemorditlalèvreetrepritsadescente.Ilssortirentdiscrètementdelaforteresseetgagnèrentunamasderochersenvironnéd'arbressurplombantleloch.—Merci,Caelen,ditAlaric,surgissantdel'obscurité.Caelentournaitdéjàlestalons.—J'attendraiKeeleyàlalisièredesarbres,dit-il.Keeleyétaitnerveuse.Elleavaitl'impressiondenepasavoirvu-nitouché-Alaricdepuisuneéternité.Alaricpritlesmainsdelajeunefemmeetlesserradanslessiennes.—Jetenaisàtevoircesoir.Unedernièrefois,avantmonmariage.Caraussitôtquej'auraiprononcémesvœux,j'yresteraifidèle.Jenetrahirainimafemmenimonclan.

Keeleyrivasesyeuxembuésdelarmesàceuxdel'hommequ'elleaimaitplusquetoutaumonde.—Oui,jesais.Ilportaunemainàseslèvres.—Jeveuxquetusachesquejet'aime,KeeleyMcCabe.Etjet'aimeraitoujours.Maisjesouhaiteaussitonbonheur. J'espèreque tu trouverasunhommequi t'aimeracomme je t'ai aiméeetqui tedonnera lafamillequetumérites.Keeleyneputpasretenirdavantageseslarmes.— Je ne désire,moi aussi, que ton bonheur,Alaric. Rionna est parfaite. Elle fera une bonne épouse.Essaiedel'aimer.Elleméritedel'être.Alaricl'attiradanssesbrasetlaserratrèsfortcontrelui.—Jeferaitoutcequetumedemanderas,Keeley.—Alors, sois heureux,murmura-t-elle.Maisgarde-moidans tamémoire.Pourmapart, je n'oublieraijamaiscesquelquessemainesdontnousavonspuprofiterensemble. Je leschérirai toujoursdansmoncœur.Tuesunfierguerrier,etunhommemerveilleux,Alaric.LesMcDonaldaurontbeaucoupdechancedet'avoirpourlaird.AlaricrelâchasonétreinteetKeeleycompritqu'elledevaitàprésentlelaisserpartir.Sapoitrineétaitsioppresséequ'ellerespiraitavecdifficulté.Maiselles'obligeaàtenirbonetàvivrecetteséparationavecdignité. Alaric le méritait. Il n'avait assurément pas besoin qu'une ancienne maîtresse sombre dansl'hystérieàlaveilledesonmariage.Elleluicaressalajoue.—Vislongtempsetsoisheureux,monamour.Alaricluirepritlamain,pourluiembrasserlapaume.Quandlajeunefemmeretirasamain,elles'aperçutqu'ilyavaitverséunelarme.Cefutplusqu'ellenepouvaitensupporter.Elles'enfuitverslesarbres.—Caelen!appela-t-elledoucement.—Jesuislà,ditCaelen,surgissantdederrièreunarbre.—Raccompagnez-moi,s'ilvousplaît.Caelenluipritlebrasetl'escortaverslaforteresse.Àchaquepas,ladouleurdeKeeleysefaisaitplusaiguë.Ils rentrèrent dans la forteresse en silence. Caelen la conduisit jusqu'à sa chambre et ouvrit la porte.Keeleyrestaplantéesurleseuil.Ellenesesentaitmêmepaslaforcedegagnersonlit.—Ça ira ? lui demanda gentimentCaelen.Comme elle ne répondait pas, il la poussa à l'intérieur etrefermalaportederrièreeux.Puisillaserratrèsfortdanssesbras.—Pleurez,sivouslesouhaitez.Personnenevousentendra,àpartmoi.Alors,Keeleyenfouitsonvisagedanssatuniqueetéclataensanglots.

35—Keeley, dépêchez-vous ! Le prêtre vamemarier avec Cormac juste avant de célébrer lemariaged'AlaricetdeRionna,annonçaChristina.Keeleysefrottalesyeux,priantlecielpourqu'ilsnesoientpastropgonflés.Ellen'avaitpasputrouverlesommeil,aprèssesadieuxàAlaric,etellen'avaitaucuneenviedequittersachambre.MaisellenevoulaitpasnonplusgâcherlajoiedeChristina.SonamieétaitsiexcitéeparsonmariageavecCormacqu'elle jaillissait presquede la jolie robequeMaddie etBertha lui avaient offertepourl'occasion.—Vousêtesmagnifique,assuraKeeley,seforçantàsourire.Etc'étaitlapurevérité.Christinarayonnaitdebonheur.—Merci,réponditChristina.Maintenant,dépêchez-vous!JenevoudraispasfaireattendreCormac.ChristinapritKeeleypar lamainet l'entraînavers l'escalier.Keeleys'étaitvêtueavecsoin.Elleavaitmêmenattésescheveux.Ellenevoulaitsurtoutpasquequiconquesedoutequ'elleétaitanéantie.CormacattendaitdéjàChristinadanslagrandesalleetsonsoulagement,quandillavitapparaître,amusaKeeley.Ewanétaitlà,aussi,commetémoindeCormac.ChristinapritKeeleyàpart.—Mairin se repose avant lemariage d'Alaric,murmura-t-elle.Alors, j'aimerais que vous soyezmontémoin.Keeleyluiétreignitlamain.—Avecgrandplaisir.Christinas'approchatimidementdeCormac,maissonvisages'illuminadèsqu'illuipritlamain.Puisilsse placèrent face au prêtre pour échanger leurs vœux. Leur amour était évident. Ils se dévoraient duregard,commesipersonned'autren'existaitàleursyeux.QuandfinalementCormacembrassaChristina,toutelapiècecriasonenthousiasme.Profitant de ce que les nouveauxmariés étaient félicités de toutes parts,Keeley recula pour regagnerdiscrètementsachambre.MaisEwanl'arrêta.—J'aimeraisvousdireunmot,Keeley,murmura-t-il.Etill'entraînaversunealcôve.—Caelenm'aappriscequis'étaitpasséaveclelairdMcDonald.Keeleytressaillit.—Iln'auraitpasdû.—Aucontraire.Jesuisdésolée,Keeley.Lelairdneseraplusjamaislebienvenuchezmoi.Keeleyhochalatête.—Merci.—Pourmapart,jevoulaisvousremercierden'avoirrienditàAlaric.Jesaiscombieniltientàvous.Maiscemariageesttrèsimportant.Caelenm'aracontéquevousl'aviezsuppliédenepasalerterAlaric,depeurquecelanuiseàl'allianceentrenosdeuxclans.Keeleyhochaencorelatête.—Vousêtescourageuse,Keeley.Etmafemmevousaimebeaucoup,ainsiquetoutleclan.Sijepuisfairequoiquecesoitpourassurervotrebonheurici,n'hésitezpasàmeledemander.—JesuisheureusedepouvoirmeréclamerduclanMcCabe.Celamesurfit.J'ensuistrèsfière.Ewansourit.

—Vouspouvezdisposer,àprésent.Jenevousretienspasdavantage.Keeleydécidafinalementderejoindrelacour,oùdevaitêtrecélébrélemariaged'Alaric.Lajeunefemmeresserrasonchâlesursesépaulesetelles'assitavecd'autresdansl'herbe,quin'étaitplusrecouvertedeneigedepuisdéjàplusieursjours.Le soleil brillait dans le ciel et lui réchauffait lesos.C'était une journée idéalepourunmariage.LesconditionspresqueprintanièressemblaientsignifierquecetteunionétaitbénieparDieuenpersonne.Lafoules'étaitamasséeennombre.Lesbannièresd'unedouzainedeclansflottaientauvent.Aujourd'hui, tous les regards seraient braqués sur Alaric et Rionna. Quand Keeley et Rionna étaientpetites,ellesaimaientrêverqu'ellesépouseraientchacuneunprincecharmant.Finalement,Rionnaavaitvusonrêveseréaliser.Elleleméritait.Alaricseraitlemeilleurdesmaris.KeeleyretintsonsouffleenvoyantapparaîtreAlaric,magnifiquementvêtupoursesnoces.IlportaitunetuniquedeveloursbleuauxarmesdesMcCabe.Sescheveuxtombaientjusqu'àsesépaulesetleventlessoulevaitdetempsàautre,luidonnantl'airdésinvolte.Ils'arrêtadevantleprêtreetattenditRionna.Deuxminutesplustard,lamariéeapparutàsontourdanslacour.Keeleyfutfrappéeparsabeauté.Sachevelureblondemiroitaitausoleil.Sarobeétaitunchef-d'œuvredecouture,etdeuxfemmeslasuivaientpour tenir la traîne.Ainsiparée,Rionnaavaittoutd'unereine.QuandRionnanefutplusqu'àquelquesmètresd'Alaric,celui-cicoulaunregardendirectiondeKeeley.Malgrélafoulequilesentourait,ellefutcertainequ'ill'avaitrepérée.Lajeunefemmerivasesyeuxsurluietportaunemainàsoncœur.Alaricimitadiscrètementsongeste,avantdereportersonattentionsurRionna.Quandilpritsamain,etqu'ilsse tournèrentensemblevers leprêtre,Keeleysentitsoncœursebriser.Cettefois, lemomentétaitvraimentvenu.Dansquelquesminutes,Alaricenauraitépouséuneautre,etKeeleyl'auraitperdupourtoujours.Douze tambours, alignés de part et d'autre desmariés, semirent à battre enmesure, pour annoncer ledébutdelacérémonie.Lebruitenrésonnajusquedanslescollinesenvironnantes.Unmouvement,àlapériphériedesavision,intriguatoutàcoupKeeley.Elletournalatêteetdistinguaune silhouette sur les remparts. L'homme tenait quelque chose qui brillait au soleil. La jeune femmefrissonnad'horreurenréalisantquec'étaitunarc.Ellebonditsursespiedsetcria.Maislestamboursbattaientdeplusenplusfortetcouvraientsavoix.Alors,Keeleysemitàcouriràperdrehaleine,bousculanttoutlemondesursonpassage.Elle ignorait quelle était la cible de l'archer. Peut-être le roi, puisqu'il était là. Ou Ewan.Ou encoreMairin.Enrevanche,ellesavaitqu'elledevaittouslesalerter,avantqu'ilnesoittroptard.Lestamboursrésonnaientsinistrementauxoreillesd'Alaric.Chaquenouveauroulementluisignifiaitquel'échéanceserapprochait.Il glissa un regard vers sa future femme. Elle était superbe. Elle serait une bonne épouse. Elle luidonneraitdevigoureuxenfantsetgrâceàelle,ildeviendraitlaird.PuisAlaricregardasonfrère,deboutentreleroietMairin.Sonfrère,quis'étaittantsacrifiépendantdesannéespourassurerlasurviedeleurclan.CommentAlaricnepourrait-ilpassuivresonexemple?Ilfermalesyeux.Dieucequesasituationluipesait!Les tambourscessèrentbrutalementet le silencequi suivit fut sidensequ'il enétaitpresque terrifiant.PuisAlaricentenditcriersonnom.Rionnasetournaversladroite.Alaricl'imita.JusteàtempspourrecevoirKeeleydanssesbras.Sesyeux

étaientécarquillés-desurpriseetdedouleur.Elleouvritlaboucheetlareferma.Sonvisageavaitperdutoutecouleur.Alaricnecomprenaitpascequiarrivait.Maisilentenditqu'oncriaitderrièreKeeley.Puisdesguerriersdégainèrentleurépée.MaisAlaric ne voyait que le visage de la jeune femmedéformé par la douleur, tandis qu'il la serraittoujoursdanssesbras.PuisKeeleys'affaissalégèrement,etalorsilvit laflècheplantéedanssondos.Alaricsentitsesjambesdéfaillir.Ilselaissatomberausol,enserranttoujourslajeunefemmecontrelui.—Keeley!Non!Oh,monDieu,Keeley,non!Il laissa échapper une larme, mais il n'en avait cure. Il n'avait plus ni honte ni orgueil. Alaric avaitsouventvulamortdanslesyeuxdeguerriersblessésaucombat.EtilretrouvaitcetteexpressiondansleregarddeKeeley.Rionnas'agenouillaàcôtédelui.ElleavaitpratiquementlemêmeteintdecendrequeKeeley.—Keeley?appela-t-elle,d'unevoixquireflétaitl'angoissed'Alaric.Uneintenseagitationrégnaitautourd'eux.Desguerriersappelaientauxarmes.EwanentraînaitleroietMairinenlieusûr.CaelenetGannons'étaientpostésprèsd'Alaric,leursépéesdégainées,pourprévenirtouteattaque.—Keeley,nem'abandonnepas,monamour,murmuraAlaric.Tiensbon,s'ilteplaît.Jevaism'occuperdetoi.Elleessayadesourire.Maissestraitsétaientdéformésparladouleur.—Celaenvalaitlapeine.Tuavaisundestinàaccomplir.Jenepouvaispas...Lasouffrancel'obligeaàs'interrompreuninstant,avantdecompléter:—Jenepouvaispaspermettrequetumeuresaujourd'hui.Alariclaberçaitdanssesbras.Maisleregarddelajeunefemmeperdaitdesonéclatàchaqueinstant.Alors,AlaricsoutintlevisagedeKeeleyd'unemain,pourl'obligeràleregarderetdel'autre,ilentrelaçasesdoigtsàceuxdelajeunefemme.—Moi,AlaricMcCabe,jet'épouse,KeeleyMcDonaldMcCabe.Jeteprendspourépouseetcelajusqu'àmonderniersouffleetjusqu'àcequenosâmessoientréuniesauciel.LeregarddeKeeleyseranima-pourexprimersasurprise.Elleouvritlabouche.—Dis-le,Keeley.Disquetuacceptesdem'épouser,devanttouscestémoinsréunis.Lajeunefemmefermalesyeux,commepourrassemblersesforces,puiselle lesrouvrit.Ellesemblaitavoirretrouvéunpeudesadétermination.—Moi,KeeleyMcDonald,désormaisMcCabe,jet'épouse,AlaricMcCabe.Jeteprendspourépouxetcelajusqu'àmonderniersouffle.Savoixs'étaitaffaiblieàchaquemot,maiselleavaitprononcésesvœux.Etdescentainesde témoinspourraientl'attester.Désormais,Keeleyétaitsafemme.ElleluiappartiendraitaussilongtempsqueDieuaccepteraitdeluioctroyercesifabuleuxcadeau.Alaricpenchalatête,pourluiembrasserlefront.—Jet'aime,murmura-t-il.Nem'abandonnepas,Keeley.Pasmaintenant,alorsquej'aitrouvélecouragedefairecequiétaitjuste.—Alaric...LavoixdoucedeRionnas'étaitinvitéedanssonchagrin.Alaric leva les yeux vers la femmequ'il avait failli épouser et il ne vit, dans son regard, ni effroi nihorreur.Nijugementniressentiment.Simplementunchagrinégalausien.—Nousdevonslarentreràl'intérieurpourlasoigner,dit-elle.AlaricserrabienfortKeeleydanssesbrasetsereleva.Laflèchedépassaittoujoursdudosdelajeune

femme,commepourrappelerlesacrificequ'elleavaitconsentipourlui.—Parici,Alaric,l'appelaEwan.Jevaisregardersablessure.Alarics'avançatrèslentement.Sesmouvementssemblaientsuspendusdansletemps.CaelenetGannonl'entouraient,leursépéesàlamain.LesangdeKeeleygouttaitàchaquepas,s'écrasantausol.Alaricfermalesyeux.«Nemel'enlevezpas,Seigneur!Pasmaintenant.Faitesensortequ'ilnesoitpastroptard.»

36LachambredeKeeleyétaitdéjàpleinedemondequandAlariclaportaàl'intérieur.Ewan se tenait près du lit, lamine sinistre.Mairin etMaddie avaient les yeux rouges d'avoir pleuré.CormacréconfortaitChristina tandisqueGannonetCaelenmontaient farouchement lagardeprèsde laporte.Alaric déposa la jeune femme sur le lit, l'allongeant de côté, pour que la flèche ne s'enfonce pasdavantagedanssoncorps.Puisilsetournaverssonfrère.—Peux-tuquelquechosepourelle,Ewan?Ewansepenchasurlablessure.— Je vais essayer, Alaric, mais tu dois te douter que ce n'est pas très bon. La flèche a pénétréprofondémentdansseschairs.Iln'estpasimpossiblequ'elleaitatteintunorganevital.Alaricfermalesyeuxpourdominerlaragequimenaçaitdesubmergersessens.Keeleyavaitbesoinqu'ilgardetoutsoncalme,mêmes'ilavaitenviedehurleretdegesticulercontrelesort.—Jevaisdevoirséparerlatêtedelaflèchedureste,ditEwan.C'estlaseulesolution.Alaricseretournaenpercevantdel'agitationàlaporte.Rionna,débarrasséedesabellerobedemariée,essayaitd'entrer,maisGannonl'enempêchait.—Laissez-moipasser!protesta-t-elle.Keeleyestmonamie.Jeveuxl'aider.—Laisse-laentrer,ditAlaricàl'intentiondeGannon.(EtquandRionnaeutrejointlelit,illuidemanda:)Pouvez-vouslasecourir?Avez-vousdestalentsdeguérisseuse?— Pas spécialement, mais j'ai une solide constitution. La vue du sang ne m'effraie pas et je suisdéterminéeàcequ'ellesurvive.—Qu'ellereste.Ellepourram'aider,intervintEwan,avantdelanceràCaelen:Éloignez-led'ici.Ilvautmieuxqu'ilnerestepas.Alaricneréalisapastoutdesuitequesonfrèreparlaitdelui.MaisquandGannonetCaelenvoulurentleprendrechacunparunbras,ilcompritqu'ilsavaientl'intentiondelesortirdelachambre.IldégainasonépéeetlapointasurCaelen.—Jetueraiquiconqueessaierademeséparerd'elle.—Alaric,soisraisonnable,letançasonfrère.Quittecettechambre.Tugênestoutlemonde.—Jenepartiraipas!Mairindécidades'enmêler.—Alaric, s'il vous plaît.Venez avecmoi. Je sais que vous l'aimez.EtKeeley sait que vous l'aimez.LaissezEwantenterdelasauver.Vousneluirendezpasserviceenvousconduisantainsiàsonchevet.Vous savez, ce ne sera pas un beau spectacle, quand Ewan tranchera la flèche. Ne vous torturez pasinutilement.Alaricrestauninstantinterdit.Ilavaitconscienceduchagrindesabelle-sœur.—Jenepeuxpasl'abandonner,murmura-t-il.Jeneveuxpasqu'ellemeureseule.—Bonsang,Alaric, sorsd'ici ! tonnaEwan.Si ça tournemal, je t'appellerai immédiatement,mais sinousvoulonsavoirunechancedelasauver,ilfautagirvite.Mairinluipritlamain.—Venez,Alaric.Laissons-lesfaire.Les épaules d'Alaric s'affaissèrent. Il se tourna vers Keeley et s'agenouilla devant le lit. Puis il luicaressalevisage.—Je t'aime,Keeley.Sois forte.Vis.Pourmoi.QuandGannonetCaelen le soulevèrentchacunparunbras,ilneleuropposaplusaucunerésistance.

Maisquandilseretrouvadanslecouloir,ilabattitsonpoingsurlemur.—Non!Bonsang,non!Caelenlepritparlesépaulespourl'entraînerverssaproprechambre.Ilouvritlaporte,lepoussasansménagementàl'intérieuretl'obligeaàs'asseoirsursonlit.—Tun'arriverasàriendebonentecomportantainsi,dit-il.Alaric regarda son poing, qu'il avait écorché sur la pierre du mur. L'envie de frapper encore ledémangeait.Etenpremierlieu,ilauraitvoulus'enprendreaubâtardquiavaitoséfairecelaàKeeley.—A-t-onappréhendéceluiquiatirélaflèche?demanda-t-ilàCaelen.—Oui,réponditGannon,depuislaporte.Ilestdéjàenchaînédanslescavesdudonjon.—A-t-ilagiseul?voulutsavoirAlaric.—Nousl'ignoronspourl'instant.Nousattendonsquelelairdl'interroge.Alaricrespiraparlesnarines.—C'estàmoideletuer.Caelens'assitsurlelit,àcôtédesonfrère.—Net'inquiètepas.Quandnousluiauronsextorquécequenousavonsbesoindesavoir, ilseraàtoi.Personneneterefuseracedroit.—Ellem'aencoresauvélavie,murmuraAlaric.Laflèchem'étaitprobablementdestinée.MaisKeeleyn'apashésitéàrisquersa-viepourmeprotéger.—Elleesttrèscourageuse.Etellet'aime.QueCaelenpuisseparlerd'amoursanslamoindrenotededérisiondanslavoixnemanquaitpasd'êtresurprenant.Pourtant,ilétaitmanifestementsincèreetdetouteévidence,iladmiraitKeeley.Alaricenfouitsonvisagedanssesmains.—J'aitoutcompromis.—Cesse de te torturer, Alaric ! Tu étais dans une situation impossible.Mieux valait renoncer à tonmariageavecRionna.—J'aiépouséKeeley,murmuraAlaric.—Oui,jesais.Toutlemondeenaététémoin.—Maiscelanemeserad'aucunréconfortsielledoitmourir.—Nebroiepasdunoir,Alaric.Keeleyestsolide.J'avouequejen'aijamaisrencontrédefemmecommeelle.Elleasugagnertoutmonrespect.Alaricsereleva.—Jenepeuxpas rester assis ici, à ignorer cequi sepasse là-bas.Si elle est assez courageusepourprendreuneflècheàmaplace,lemoinsquejepuissefaireestd'êtreàsescôtéspendantqu'elleendurelepire.Jesaisqu'Ewanvoulaitbienagir,maisKeeleyabesoindemoi.Caelensoupira.—Sic'étaitmafemme,jenelaisseraispasnonplusquelqu'unm'écarterd'elle.Gannonhochalatêtepourmanifestersonassentiment.Alaricgagnalaporte.Maisavantdelafranchir,ilseretournaverssonfrère.—Jenet'aipasremerciéd'avoirveillésurKeeleycesderniersjours.Jesaisquec'étaitdurpourelle.J'auraisdûêtrelà.Désormais,iln'yaurapersonned'autrequemoi.Alaric quitta la pièce sur cesmots. Arrivé devant la porte de Keeley, il s'arrêta, effrayé à l'idée depousserlebattant.Aucunsonrieprovenaitdel'intérieur.Pasmêmelemoindrecridedouleur.Rienquilaissaitsupposerqu'ellerespiraitencore.Ilmurmurauneprière,avantd'entrer.Ewanétaitpenchésurlelit,levisagecrispéparlaconcentration.RionnacaressaitlescheveuxdeKeeley

etluimurmuraitdesparolesréconfortantes.Ewanjetaunbrefregardendirectiond'Alaricsanss'interrompredanssatâche.QuandAlarics'approchadulit,ilconstataqu'Ewanavaitinciséleschairsautourdelapointedelaflèche,afindel'extraireplusfacilement.Leslingesentourantl'incisionétaientimbibésdesang.—Laisse-moilatenirpourquetupuissesteconsacreràlaflèche,proposaAlaric,quireconnutàpeinesavoix.—Tiens-labien.Ellenedoitsurtoutpasbouger.Alaric hocha la tête et grimpa sur le lit. Ewan attendit qu'il se soit allongé à côté d'elle et qu'il l'aitagrippéesolidementauxhanchesetàlanuque.—Pouvez-vousessuyerlesang,quejevoiecequejefais?demandaEwanàRionna.Keeley respirait faiblement. Mais quand Ewan retourna la pointe de la flèche dans ses chairs, elletressaillitetungémissementdedouleurs'échappadeseslèvres.—Chut,monamour,murmuraAlaric.Jesuislà,avectoi.Jesaisqueçafaitmal,maissoiscourageuse.Bats-toicommetum'asdemandédemebattre.Ewans'affairaencorependantprèsd'uneheure. Il s'inquiétaitqueKeeleyneperde tropdesang,aussiprocédait-il avec précaution pour extraire la flèche. Mais quand il réussit enfin à libérer le fer, lablessuresemitàsaignerabondamment.Keeley avait depuis longtemps perdu connaissance et elle ne réagit même pas quand Ewan retira laflèche.Lesangcoula jusquesur leplancher, tandisqu'EwanetRionnaappuyaient tous lesdeuxsur lablessure,pourlacomprimer.Alaricpréféraignorerl'expressionrésignéedesonfrèrepourseconcentrersurKeeleyetluiordonnerderespirer,devivre...Aprèscela,ilfallutencoreplusd'uneheureàEwanpourrecoudrelaplaie.Latâcheétaitd'autantplusmalaiséequelesangcoulaittoujours.Ledernierpointdesutureposé,Ewans'assitparterre,épuisé.— Continuez d'appuyer sur la plaie, dit-il à Rionna. La blessure saigne un peu moins, mais sil'hémorragienes'arrêtepastrèsvite,ellevaperdretoutsonsang...Alaricauscultalepoulsdelajeunefemme.Ilétaitaussifaiblequ'unbattementd'ailesdepapillon,maisellevivait.Quandlablessurenesaignapresqueplus,Rionnalarecouvritd'unbandagepuiselleseredressa.—Maintenant,jevoudraistoutnettoyer,Alaric,dit-elle.—Non,jevaislefaire!Jeneveuxpasl'abandonner.C'estmondevoirdem'occuperd'elle.Rionnahochalatête.—Jesuisdésolée,Alaric.J'ignoraisquevousl'aimiez.Etqu'ellevousaimait.—Allez-vousreposer,luiditgentimentAlaric.Jem'occuperaid'elle.AprèsledépartdeRionna,Ewanselavalesmainsdanslacuvette,puisilrevintverslelit.—J'aifaittoutcequej'aipu,Alaric.Àprésent,elleestdanslesmainsdeDieu.—Oui,jesais.—Jevaistelaisser.J'aideschosesàrégler.Alarichochalatête.—Mercidel'avoirsauvée...Ewanseforçaàsourire.—Nem'accordepastropd'importance.Siellesurvit,c'estparcequ'ellel'auradécidé.MaddiearrivaaumomentoùEwanquittait lachambre.Alaric lui fut reconnaissantdesonaide.Aeuxdeux,ilslavèrentKeeleyetchangèrentlaliterie.—Ilseraitsansdoutepréférablede la laisserdénudée,suggéraMaddie.Lablessureest importanteetnousauronsbesoindel'examinerrégulièrement.Allongez-lasurlecôté,etnousdisposeronsdesoreillers

derrièreellepourqu'elleneroulepassurledos.Alaric suivit les conseils de Maddie. Quand il estima que Keeley était confortablement installée, ils'allongeaàcôtéd'elleetlapritdanssesbras.—Jet'aime,murmura-t-ilenluiembrassantlefront.

37Durantlesjourssuivants,AlaricnequittapasunseulinstantlechevetdeKeeley.Lajeunefemmen'avaitpasreprisconnaissance,malgrétousleseffortsd'Alaricpourlaréveiller.Illasuppliait.Illamenaçait.Illuipromettaitlalune.Toutcelaenvain.Ils'inquiétaitdenepaslavoiravalerquoiquecesoit.Avectoutlesangqu'elleavaitperdu,elleavaitforcémentbesoindereprendredesforces.Puislafièvres'installa.LapeaudeKeeleydevintbrûlante.Lajeunefemmes'agitaitdanssonsommeil,commesidesdémonslapourchassaient.Alaricessayaitdel'apaiser.Illatamponnaitavecdeslingesetill'immergeamêmeunefoisdansuntubd'eaufroide.Au bout d'une semaine, Alaric commença de perdre espoir. Keeley ne se réveillait toujours pas, enrevancheelles'affaiblissaitdejourenjour.Elleétaitsiimmobilequ'onauraitpucroirequ'elleétaitdéjàmorte.Leseptièmejour,EwanetCaelenvinrentlechercher.Alaricrefusadebouger,etilfallutqueCormacetGannonjoignentleurseffortsàceuxdesdeuxfrèrespourl'obligeràquitterlachambredeKeeley.MaddieetRionnaprirentsaplaceauchevetdelajeunefemme.—Oùm'emmenez-vous ? pesta Alaric, alors que les quatre hommes l'entraînaient à l'extérieur de laforteresse.Laréponseluiarrivadeuxminutesplustard:sesfrèreslejetèrentdansleloch.L'eauglacialelesaisitetils'enfonçaverslesprofondeursduloch.Ilsongeauninstantàselaissercouler,pour rejoindreKeeley. Il enrageait de la savoir seuledansunenuit sans fin, à la foismorte et encorevivante.Maiscefutl'instinctdeviequil'emporta.Alaricbattitdespiedsetdesmainspourremonteràlasurfaceetunefoislatêtehorsdel'eau,ilinspiraunegrandegouléed'air.—Contentquetuaiesdécidéderesteravecnous,luilançaEwan,depuislerivage.Alaricfusillasesfrèresduregard.—Pourquoim'avez-vousjetéàl'eau?—Tonattitudenerimeàrien,luirépliquaCaelen.Tun'espassortidelachambredeKeeleydepuisunesemaine.C'estàpeinesitutenourris.Tunetelavesplus.Tunetechangesmêmeplus.SiKeeleysurvitàsablessure,tonodeurlatueraàcoupsûr!Alaricnageajusqu'aurivageetsortitdel'eaupoursejetersurCaelen.Lesdeuxfrèresroulèrentsurlabergeensecriblantdecoupsdepoing.Profitantd'unmomentoùlesdeuxcombattantsétaientséparés,Ewandécidad'intervenirpourplaquerAlaricausol.—Bonsang,auriez-vousdécidédemetuer?pestaAlaric.—Non,nousessayonssimplementde te faireentendre raison, lui réponditEwan.Es-tudécidéànousécouter,cettefois?Alaricdonnauncoupdetêteàsonaînéetrenversalasituationenroulantsurlui.—Tutefaisvieux!raillaAlaric.Caelensejetadanslamêléeetlabagarresepoursuivitfurieusemententrelestroisfrères.Auboutdequelquesminutes,ilsétaienttouslestroisallongésparterre,àreprendreleursouffle.—Ah,zut!grommelaEwan.AlariclevalesyeuxetvitMairinquitoisaitsonmari,lesmainsplaquéessurleshanches.—Tudevraistereposer,luiditEwan.—Ettoi,tun'aspasmieuxàfairequedetebattrecommeunvulgairechiffonnier?luirépliquaMairin.

—Jecroisqueçanousarudementfaitdubienàtouslestrois,intervintCaelen,allongéprèsdesonfrère.Alaricseredressa.—Ya-t-ildunouveau,avecKeeley?L'expressiondeMairinseradoucit.—Non,elledorttoujours.Alaricfermauninstantlesyeux,avantdesetournerversleloch.Peut-êtrequ'unbonplongeonfiniraitdeluichangerlesidées.Ilpourraitaussienprofiterpourselaver.Ewanavaitraison.Ildevaitréagir.—Ewan,leroietlesautreslairdscommencentàs'impatienter,ditMairin.Ilsveulentsavoircequetuvasdécider.—Jesais,Mairin,répliquaEwan,d'untonimpatient,commes'ilétaitcontrariéquesafemmeabordelesujetenprésenced'Alaric.Les ignorant tous les deux, Alaric plongea dans l'eau glaciale. Il se doutait que le roi et les lairdsattendaient que Keeley meure pour qu'il puisse épouser Rionna et sceller l'alliance prévue avec lesMcDonald.Gannon lui tendit unmorceau de savon et attendit sur la berge qu'il ait terminé de se laver. Ewan etCaelenrentrèrentdanslaforteresse,avecMairin,laissantCormacetGannonderrièreeux.QuandAlaricrevintdanslaforteresse,unedemi-heureplustard,Rionnaseprécipitaàsarencontre.Elleavaitlesyeuxrougis.Alarics'alarmaaussitôt.—Quesepasse-t-il?— Venez vite ! Elle vous réclame. C'est mauvais signe, Alaric. J'ai peur qu'elle n'en ait plus pourlongtemps.Elleestsifaiblequ'ellenepeutpasgarderlesyeuxouverts.Etlafièvrelafaitdélirer.Alaric gravit l'escalier en courant.Quand il pénétra dans la chambre deKeeley, il sentit son cœur seserrer.Lajeunefemmeétaitsiimmobilequ'ilcraignitqu'ilnefûtdéjàtroptard.Maistoutàcoup,seslèvresbougèrentetellemurmurasonnom.Alaricseruaàsonchevet.—Jesuislà,Keeley.Jesuislà,monamour.Illuicaressalevisagepourlarassureretluiprouverqu'ellen'étaitpasseule.Ellesemblaitsifragile,sivulnérable!MaisAlaricserefusaitàl'idéedelaperdre.—Alaric?murmura-t-elledenouveau.—Oui,chérie,jesuislà.—J'aifroid.Alaricfrissonna.Ellesetourna,commesiellecherchaitsonvisage.Sespaupièressesoulevèrent,maiselleneparutpaslevoir.Sonregardparaissaitsansvie.—J'aipeur,dit-elleencore.Cetaveuglaçalessangsd'Alaric.Ilserratrèsfortlajeunefemmedanssesbras,sanspouvoirretenirseslarmes.—Jesuisavectoi,Keeley.N'aiepaspeur.Jenetelaisseraipaspartir.—Em...Emmène-moi...commença-t-elle,maissavoixmourutdanssagorge.—Oùcela,chérie?—Làoù...nousnoussommesditadieu.Làoùtu...m'asembrasséepourladernièrefois.Alaricsanglotait,àprésent.—S'ilteplaît...—Oui,Keeley.Jevaist'yconduire.Elleesquissaunsourireetfermalesyeux,commesi lesquelquesmotsqu'elleavaitprononcésavaientépuisésesmaigresforces.

Alariclasoulevadoucementdanssesbras.Ilsortitdelachambreetremontalecouloir,serrantlajeunefemmecontrelui,tandisquedeslarmesruisselaientsursesjoues.Personnen'essayadel'arrêter.MairinetRionnanepurentretenirleurssanglotsàsonpassage.Maddieavaitl'aireffondréetGannoninclinalatêteavecrespect.Caelensetenaitenhautdel'escalier,lesbrasballants,lespoingsserrés.IlabandonnaquelquesinstantssaposerigidepourcaresseravectendresselescheveuxdeKeeley.C'étaitlapremièrefoisqu'Alariclevoyaitmanifesterpubliquementsonaffectionpourunefemme,depuisqu'ilavaitététrahi.—Soisenpaix,murmuraCaelen,avantdesereculerpourlaisserpasserAlaric.Leclans'étaitrassemblédanslacour.Alarictraversalafouleensilence,sortitdesrempartsetsedirigeaverslesrochersbordantleloch.Ils'arrêtajusteauborddel'eauetdéposalajeunefemmesurl'undesrochers.—Nousysommes,Keeley.Sens-tuleventsurtonvisage?Respires-tul'airfrais?Ellebattitdespaupièresetprituneprofondeinspiration.Maisceteffortluiarrachaaussitôtunegrimacededouleur.—Oui,répondit-ellequandelleeutreprissonsouffle.C'estmerveilleuxdesentirlesoleilsurmapeau.Maisjesuisfatiguée,Alaric.J'aiessayédemebattre,maisjesuisfatiguée.Ellesavaitquec'étaitlafin.Etsonchagrins'entendaitàsavoix.—Jeveuxque tu sachesque jemourraiheureuse, reprit-elle cependant. Jenepouvaispas rêverplusgrandbonheurqued’êtretafemme.Mêmepourquelquesjours.Alaric,accablédechagrin,levalesyeuxversleciel.—Aucunefemmen'avaitjamaiscapturémonâmeetmoncœurcommetul'asfait,Keeley.Etaucuneautreneteremplacera.—Serre-moidanstesbras.Etrestonsicijusqu'àcequelemomentsoitvenu,pourmoi,dem'enaller.Jesensquejem'affaiblis.Çanedevraitplusêtrelong.Lapoitrined'Alariclebrûlaitcommes'ilavaitavalédesbraises.—Oui,Keeley,jevaistegarderdansmesbras.Net'inquiètepas,jenet'abandonneraipas.Nousallonsregarderensemblelesoleilsecouchersurleloch.Ellesourit.Puisellerestalongtempssilencieuseavantdeseredressersuruncoude,commesielleavaitunedernièrechoseàluidire.—Jet'aime,AlaricMcCabe.Jet'aiaimédèsl'instantoùtonchevalt'adéposédevantmoncottage.J'aipassé des années àme lamenter surmon sort et à ruminermon bannissement.Mais aujourd'hui, je nevoudraisrienchangeràmavie,carsinon,jen'auraisjamaiseulachancedeterencontrer.Alaricpenchalatêtepourl'embrasser.Leurslarmessemêlèrentsurleurslèvres.Puis il ferma les yeux et il berça la jeune femme dans ses bras. Quand le soleil déclina et que latempératurecommençadefraîchir,Gannonleurapportadesfourrures,pourlesenvelopperchaudement.Puisilrepartitaussitôt,leslaissantseuls.Dans la forteresse, tout le monde se préparait déjà à l'inévitable. Personne ne pensait que Keeleypasseraitlanuit.Alaric,pendantcetemps,necessaitdefairelaconversationàKeeley.Illuiexpliquaittoutcequ'ilaimaitchezelle.Commentellel'amusait,avecsoncaractèrebientrempéetsesrepartiescinglantes.Combienill'admiraitpoursavoirtenirtêteàsesdeuxfrères.Illuiparlaaussidesenfantsqu'ilauraitaiméavoiravecelle.Desgarçonscourageuxcommeelle.Etdesfillesquiauraientsabeauté.Lanuittombaetlecielsecouvritd'étoiles.Lalunebrillaitau-dessusduloch,leséclairantdesalumièreargentée.AlariccontinuaitdetenirKeeleydanssesbras,serefusantàlalâcherunseulinstant.

Auboutd'unmoment,ilabandonnasonfrontcontreceluidelajeunefemmeetfermalesyeux.Quandillesrouvrit,unelueurgrisâtre,annonciatricedel'aube,éclaircissaitdéjàleciel.Alaricsentitlapaniquelegagner.Combiendetempsavait-ildormi?Iln'osaitpasregarderKeeley.Etsielleétaitmortedanssesbraspendantqu'ildormait?Ilneselepardonneraitjamais.—Keeley?murmura-t-il,seredressant.Asagrandestupéfaction, la jeunefemmes'agitasur lerocher.Alaricapprochaunemaintremblantedesonfront.Sapeauétaitmoinsbrûlante,signequelafièvrecommençaitàretomber.ParDieu !Alaricétait si saisi,qu'ilnesavaitplusquoi faire. Ilauraitdû rentrerà la forteresse,pourqu'EwanexamineKeeley,mais il n'osaitpas laporterdans sesbras. Il était si excitéqu'il aurait sansdoutetrébuchéenchemin.Illuicaressafébrilementlevisage.—Keeley!Keeley,réveille-toi!Dis-moiquelquechose.N'importequoi.Elleouvritleslèvres.Ellevoulaitdirequelquechose,maisellen'enavaitpaslaforce.Sespaupièressesoulevaient,maiselleneparvenaitpasàgarderlesyeuxouverts.—Tantpis,dit-il.Tafièvreestretombée.Tum'entends?Tafièvreestretombée.C'estbonsigne,Keeley.Tunevaspasmourirmaintenant.Tum'entends?Jerefusequetutelaissesmouriraprèsm'avoirredonnéespoir.Ellemurmuraquelquechose,qu'ilneputpascomprendre.Ilsepencha,pourcollersonoreillecontreseslèvres.—Qu'as-tudit?—Espècedebrute,marmonna-t-elle.Alaricrenversala têteenarrièreetpartitd'unénormeéclatderire.Puissonriresemuaenlarmesdesoulagement.—Alaric?appelaEwanenseprécipitantverslui.Ils'arrêtaàquelquesmètres.IlregardaKeeley,parfaitementimmobile,puisilvitleslarmescoulersurlesjouesd'Alaric.—Jesuisdésolé,Alaric.Sincèrementdésolé.Alaricsourit.—Elleestvivante,Ewan.Elleestvivante!Safièvreestretombéeetellevientdemetraiterdebrute.C'estlapreuvequ'ellen'apasl'intentiondemourir!Ewansouritàsontour.—Oui,c'esttrèsbonsigne,eneffet.—Jenepeuxpaslasoulever,Ewan,confessaAlaric.Jesuistellementgriséquejen'auraipaslaforcedemarcherdroit.Ewan se pencha pour soulever Keeley et la prendre dans ses bras. Puis Alaric se releva et, d'unedémarchetitubante,ilsuivitsonfrèreverslaforteresse.—Ilscroienttousqu'elleestmorte,expliquaEwan.Lanouvelles'estrépanduequetul'avaisportéeauborddulochparcequ'elleavaitréclaméd'ymourir.—C'est unmiracle,Ewan !Unmiracle que je ne peuxpasm'expliquer,mais quim'enchante.Elle semourait.Jelesentaisbien.Elleétaitdeplusenplusfaible.Jeluiaiparlépendantdesheures,etpuisj'aifiniparm'endormir.Quandjemesuisréveillé,safièvreétaitpartie.—Jevaisexaminersablessuredèsquenousl'auronsrecouchéedanssonlit,promitEwan.Ensuite, ilnousfaudradécidercommentréglernotreallianceaveclesMcDonald.Leroiattendnotredécision.Nousnepouvonspasladifférerdavantage.Alarichochalatêteavecgravité.Ilsavaitquel'avenirdeleurclanétaitenjeu.—AussitôtqueKeeleyseraconfortablementinstallée,jetesuivraipourvoirleroi,répondit-il.

38Alaric confia Keeley aux bons soins de Maddie et de Christina. Mairin aurait voulu les aider maisCormac,quigardaitlaporte,luiinterditderesterplusdequelquesminutesdanslachambre.MaddieéclataensanglotsenapprenantquelafièvredeKeeleyétaitretombée.— Je vais bien prendre soin d'elle, promit-elle àAlaric.Allez voir le roi sans crainte.D'ici à votreretour,jel'aurailavéeetnourrie.Alaricluisourit.—J'aitouteconfianceenvous,Maddie.Il posa undernier baiser sur les lèvres deKeeley avant de quitter la chambre et de gagner l'escalier.Caelenl'accueillitenbasdesmarches.—Jeviensd'apprendrequeKeeleyallaits'ensortir.Alaricsourit.—Oui.—Sachequetupeuxcomptersurmonappui,quoiqu'ilsoitdécidéaujourd'hui.Alaricrepritunairgrave.—Tonsoutienestimportantpourmoi,Caelen.Plusquetunepeuxl'imaginer.Caelenhochalatête.—Allonsvoircequesouhaiteleroi,dit-il.Alaricentralepremierdanslagrandesalle,suivideCaelen.Lesilencesefitimmédiatement.Ewanetleroiétaientassisàlatabled'honneur,ainsiquelelairdMcDonaldetRionna.Lesautreslairdsavaientprisplaceautourdedeuxtablespluspetites,quiflanquaientlatabled'honneur.LeroifitsigneàAlaricd'approcher.—VotreMajesté,saluaAlaricavantdes'immobiliserdevantlesouverain.—AlaricMcCabe,noussommesenfaced'unesituationquenousdevonstranchersansdélai,ditleroi.Alaricattenditlasuite.—Vousavezeuraisond'épouserlafemmequevousaimiezalorsqu'ellevenaitdevoussauverlavieetqu'ellesemouraitdansvosbras.Leproblème,c'estqu'ellevaapparemmentsurvivre.—Non,pas«apparemment»,corrigeaAlaric.Ellevasurvivre.—Vousvoustrouvezdoncmariéàlamauvaisefemme.LelairdMcDonaldselevad'unmouvementbrusqueetabattitsonpoingsurlatable.—Toutceciestuneinsulteànotreclan.IldevaitépousermafilleRionna.PasunecatinquiaétébannieduclanMcDonaldilyaplusieursannéesdecela!Alaricvoulutsejetersurlelaird,maisCaelenfutplusrapide.IlsaisitMcDonaldaucoletl'obligeaàserasseoir.Celui-ci,visiblementintimidé,n'osaplusriendire.Alaric fronça les sourcils.PourquoiCaelen semblait-il si furieuxaprès le laird?Etpourquoi le lairdparaissait-ilcraindreCaelen?Ques'était-ilpasséentreeux?—Taisez-vous,McDonald, le tança le roi.Cette « catin » dont vous parlez a sauvé deux fois la vied'Alaric et elle amisma nièce aumonde. Ellemérite le respect et je veillerai personnellement à cequ'ellenemanquederien.Puis,reportantsonattentionsurAlaric,ilajouta:—Commejeledisais,vousavezeuraisondel'épousercomptetenudescirconstances.Maisàprésent,vous devez la répudier afin d'épouser Rionna. Nous avons ici une douzaine de lairds prêts à faireallégeanceàlacouronneetàs'allierauxMcCabeaussitôtquevousserezdevenulairddesMcDonald.Alaric n'en croyait pas ses oreilles. Comment le roi pouvait-il lui suggérer aussi tranquillement derépudierKeeley?Ilsetournaverssonfrère,pourtenterdedevinersonavis.Maisl'expressiond'Ewan,assis à côté du roi, était indéchiffrable. Espérait-il, lui aussi, qu'il répudierait Keeley pour épouser

Rionna?Alaricsongeapourlacentièmefoisàtouteslesconséquencesdecetteunion:lasécuritépoursonclan,poursesfrèresetpourMairin,l'assurancedepouvoirbattreCameron...Toutcelareposaitvraimentsursonseulmariage?Ilsecoualatête.—Non,jenelarépudieraipas.Leroiécarquillalesyeux,etcefutunbeauvacarmedanslasalle.LelairdMcDonaldétaitsifurieuxqu'ilsemblaitauborddel'apoplexie.Alariccriapourappeleraucalme.Quandlebrouhaharetombaenfin,iltoisal'assistanceduregard.— Seul un homme sans honneur répudierait la femme qu'il aime pour en épouser une autre. Seul unhommesanshonneurrépudieraitsafemmealorsqu'elleafaillimourirpourluisauverlavie.Jenesuispasetjeneseraipascethomme.Jel'aime.Etelleméritetoutemaloyauté.PuisilseretournaversEwan:—Jesaisquemongestepeutmecoûter l'estimedemafamille.Demonclan.Demonroi.Mais jeneseraisplusl'Alaricquevousaveztoujoursconnusijen'agissaispasainsi.Hdoitbienexisteruneautrefaçond'alliernosdeuxclans.Leroilaissaéchapperunlongsoupir.Ilparaissaitfurieux.—Réfléchissezbien,AlaricMcCabe.Camerona faillidétruirevotreclan.Vousaviezuneopportunitéd'enfinirunefoispourtoutesaveclui.—Avecousansalliance,Cameronestunhommemort,répliquaAlaric,d'unevoixdéterminée.Enfait,vous cherchez à favoriser cette allianceuniquementparcequ'elle vouspermettrait d'écarter lamenacequereprésenteMalcolmpourvotretrône.Lesprunellesduroiétaientdevenuesnoires.—Jerefusedeparticiperàceplan,repritAlaric.Et,setournantversRionna,ilajouta:Pardon,Rionna.Jenevoudraissurtoutpasvoushumilier.Vousméritezd'épouserunmariquinesoitpasdéjàéprisd'uneautrefemme.—Moi,jevaisl'épouser!Ungrandsilences'abattitdanslasalle.Alaricsetourna.Ilavaitmalentendu.CenepouvaitpasêtrelavoixdeCaelen.Pourtantsi,c'étaitbiensonfrèrequiavaitparlé.Rionna,médusée,portaunemainàsabouche.Ewanfixasonfrère.—Jepenseavoirmalcompris,Caelen.—J'aiditquej'allaisépouserRionna,répétaCaelen.C'estlameilleuresolution.Ainsi,c'estunMcCabequi deviendra laird desMcDonald et scellera notre alliance. Tous ensemble, nous aiderons le roi àvaincreCameron etMalcolm.Alaric resteramarié àKeeley, et ainsi tout lemondeobtiendra ce qu'ilsouhaite.—Sauftoi,marmonnaAlaric.Caelenhaussalesépaules.—Peuimporte!DumomentqueRionnamedonnedebeauxenfants,celamesuffira.Rionnaavaitblêmi.Sonpèreétaitàpeuprèsaussiblancqu'elle.—Non,c'estimpossible,dit-il.L'accordstipulaitquec'étaitAlaricMcCabequidevaitépouserRionna.Leroisecaressaitlementond'unairsongeur.—Ewan,quepensez-vousdetoutceci?EwanrivasesyeuxsurCaelen,maiscelui-cinecillamêmepas.— Je pense, commença Ewan, que c'est une issue raisonnable, dès lors que les deux parties en sont

d'accord.—Jenesuispasd'accord!hurlalelairdMcDonald.—Père,asseyez-vous,luiditRionna,d'unevoixdontl'autoritéstupéfiatoutlemonde.PuiselleselevadetableetrejoignitAlaricetCaelen,quisetenaientdeboutdevantleroietEwan.—Quellessontvosconditions?demanda-t-elleàCaelen.—Bravo!lafélicitaCaelen.Ilyadesconditions,eneffet.D'abord,quevotrepèrequitteimmédiatementlaforteresseMcCabeetqu'iln'yreviennejamaistantqueKeeleyyvivra.Ensuite,quevotrepèrerenoncesur-le-champàsontitredelairdquandnousnousrendronssurlesterresdesMcDonald,aussitôtaprèsnotremariage.—C'estune insulte ! cria le lairdMcDonald.PlusieursguerriersMcDonald, assemblés au fondde lasalle,protestèrentavecvéhémence.Mais,àlagrandesurprised'Alaric,Rionnarestaparfaitementsereine.—Vosconditionsmeparaissentraisonnables,approuvaleroi.Caelenhaussalesépaules.—Raisonnablesoupas,cesontmesconditions.—Jenesuispasdisposéàrenonceraussiviteàmontitre!insistalelairdMcDonald.L'accordprévoyaitquejecéderaismonpouvoiraprèslanaissancedupremierenfantdeRionna.Caeleneutunsouriremauvais.—JepuisvousassurerqueRionnadonneranaissanceàunpremierenfantneufmoisaprèsnotremariage.Quesontneufmoisdeplusoudemoins?Rionnapiquaunfard.LelairdMcDonaldsemblaitprêtd'exploser.Caelenreportasonattentionsurleroi:— J'avais promis de ne pas divulguer un incident qui s'est produit voici quelques jours, mais lescirconstancesayantchangé,jenemesensplustenuparcettepromesse.Etjecroisutilequevoussachieztousquelgenred'hommeestlelairdMcDonald.Celavouspermettrademieuxcomprendrepourquoij'aiimposédetellesconditionsleconcernant.Leroifronçalessourcils.—Parlez...— Quand Keeley était plus jeune, elle était une McDonald. Cousine de Rionna et nièce du lairdMcDonald.Unjour,lelairdaessayédelavioler.Safemmelesasurpris.ElleatraitéKeeleydecatinetl'a bannie du clan.De ce jour,Keeley fut obligée de subvenir elle-même à ses propres besoins, sansaucuneprotection.C'estunmiraclequ'elleaitsurvécu.—Cenesontquedessornettes!serécrialelairdMcDonald,bondissantdesonsiège.Touts'estpassécommel'aditmafemme.Cettecatinacherchéàmeséduire.Rionnasetournaverssonpèreetluijetaunregardquilefitpâlir.Ilserassit.—Cen'est pas tout, repritCaelen.Peu après son arrivée ici, quand il a découvert queKeeleyvivaitdésormaischeznous,ill'aattiréedanssachambre,pourtenterànouveaudelavioler.Alaricsautapar-dessuslatableetsejetasurlelairdMcDonaldavecunetelleforcequelelairdtombaàlarenversesursachaise.—Espècedemonstre!luicriaAlaric.Tuasosérecommencer!Jevaistetuer!Ilobligealelairdàsereleveretilluidonnauncoupdepoingenpleinvisage.Lelairdsemitàsaignerdelabouche.Alarics'apprêtaitàfrapperencore,maisCaelenluiretintlebras.—Çasuffit,dit-il.Désormais,lelairddépenddemoi.—C'esttoiquilesastrouvés,n'est-cepas?devinaAlaric.Ettunem'asriendit!C'étaitàmoi,deladéfendre.

Caelensourit.—Keeleys'estplutôtbiendéfenduetouteseule.Jemesuiscontentédeterminerletravail.Leroiselevadetable,laminesévère.—Est-cevrai,lairdMcDonald?Avez-voustentédeviolerunejeunefilleplacéesousvotreprotection?Lelairdneréponditrien.—Oui,c'estvrai,ditRionna.J'étaislà.—Garce!luilançalelaird.Ingrate!Caelens'avançaverslui.—Vousinsultezmafutureépouse.Jenesauraistropvousconseillerdemesurervosparoles,àl'avenir.Leroisemassalestempes.—Quepensez-vousdetoutceci,Ewan?Pouvons-nousencoresauvercettealliance?Ewan désigna l'assemblée, devant eux, qui semblait compter les points entre les McCabe et lesMcDonald.—Pourquoineleurdemandez-vouspas?Lerois'esclaffa.—Pourquoipas,eneffet?Leroilevalamainpourappelerausilence.—Qu'endites-vous, lairds?SiCaelenMcCabeépouseRionnaMcDonald,vous joindrez-vousànouspourdéfaireDuncanCameronetMalcolm?—Jerefusedem'allieràquelqu'unquis'enprendauxenfants,ditl'undeslairds.MaissiCaelenMcCabeleremplaceaprèssonmariageavecRionna,alorsoui,vouspouvezcomptersurmonallégeance,VotreMajesté.Lesautreslairdsmanifestèrentbruyammentleurassentiment.—Ilresteunedernièrequestionàrégler,intervintCaelen.Touteslestêtessetournèrentdanssadirection,tandisquelui-mêmesetournaitversRionna:—Êtes-vousdisposéeàm'épouser,plutôtqu'AlaricMcCabe,RionnaMcDonald?RionnacroisaleregarddeCaelen.—Oui,CaelenMcCabe.VousvenezdeprouverlaloyautédevotreamitiéenversKeeley,ainsiquevotreloyautéenversvotrefrère.—Etacceptez-vousquejedeviennelairdaussitôtaprèsnotremariage?Ellen'hésitamêmepasuneseconde.—Jeneveuxplusdeluisurnosterres,répondit-elle,désignantsonpèreduregard.Denouveau,levacarmeenvahitlasalle.Blême,lelairdMcDonaldselevadetable.—Petiteingrate!Etoùveux-tuquej'aille?—Peum'importe.Maisvousn'êtespluslebienvenuchezlesMcDonald.Caelen,surpris,haussalessourcils,avantd'échangerunregardavecAlaric.Ni l'unni l'autrenes'étaitattenduàcequeRionnarépudiesonpèreavecaussipeud'émotion.—Alors,c'estentendu,conclutleroi.Finalement,jeseraiquandmêmevenupourassisteràunmariage!

39AlariccroisaCaelenjusteaumomentoùils'apprêtaitàentrerdanslachambredeKeeley.—Transmets-luitoutemonaffection,ditCaelen.Etdis-luiquejen'aijamaisdoutéd'elle.—Jen'ymanqueraipas,réponditAlaric.Pourmapart,jevoulaisteremercier,Caelen.Jenesaismêmepasquoidire.NousnepourronsjamaisassezteremercierpourcequetuasfaitpourKeeleyetpourmoi.Caelensourit.—J'aibeaucoupapprisauprèsdeKeeley,Alaric.Jen'avaisjamaisrencontréquelqu'und'aussiloyaletaltruistequ'elle.Ellerefusaitquejet'informedel'agressiondulairdMcDonaldparcequ'ellesedoutaitde ta réactionet elle savait que cela ruinerait tonmariageavecRionna.Ellemesurait l'importancedecettealliancepournotreclanetcommeelleseconsidéraitdésormaiscommeuneMcCabe,ellenevoulaitsurtoutpasnuireàsanouvellefamille.—PrendsbiensoindeRionna,Caelen.Mairins'inquièteàsonsujet.Ellevoudraitquenousrespectionssadifférence.Jenesaispascequ'elleentendparlà,maisjesupposequecelaaunrapportaveclamaniedeRionnades'habillerenhommeetdebrandirl'épéecommeunguerrier.—Rionnaseconduiracommejeleluidemanderai,assuraCaelen.—Jevoudraisêtrelàpourvoirça!—VaretrouverKeeley,àprésent.Alaricclaqual'épauledeCaelenetentradanslachambredeKeeley.QuelnefutpassonétonnementdedécouvrirGannonassisauchevetdelajeunefemme,luiépongeantlefrontavecunlinge.Alaricfaillitéclaterderire.Keeleyavaitsuconquérirtoutlemondeetiln'auraitpasétésurprisdevoirtoutleclanserelayerpourlasoigner.Gannons'aperçutdesaprésence.—Maddie s'occupe du bébé avec Mairin alors j'ai pris le relais, en attendant que l'un de vous nerevienne.AlarichochalatêteetfitsigneàGannondeluicédersaplace.—Commentva-t-elle?—Safièvreestencoreimportante.Etelledortlaplupartdutemps.—Tupeuxdisposer,àprésent.Jevaism'occuperd'elle.Gannons'arrêtaàlaporte.—Ques'est-ildécidé,enbas?J'aientendudirequeleroivousavaitdemandéderépudierKeeley?Alaricsourit.—Oui,ilmel'ademandé.Gannonfronçalessourcils.Ilsemblaitprèsd'exploser.—Maisj'airefusé,s'empressadepréciserAlaric.Gannonécarquillalesyeux.—Vousavezditnonauroi?—Oui,etças'estrévélébeaucoupplusfacilequejenelepensais.—Queva-t-ilsepasser,alors?—Ceseraitunpeulongàraconter,maisjesuissûrqueCaelenseraravidetoutt'expliquer.Pourmapart,jepréfèredansl'immédiatmeconsacreràmafemme.Gannonsouritets'éclipsasansrienajouter.Alarics'allongeaauprèsdeKeeleyetlaserracontrelui,émerveillédelasentirvivantedanssesbras.C'étaitunmiracle.UnmiracledontilremercieraitDieupourlerestantdesesjours.

—Alaric?murmura-t-elle.—Oui,chérie?—As-tu l'intentiondemerépudier?Jepréfère teprévenirque jene te laisseraipas faire.Tuesmonmari,etjenesuispasdisposéeàrenonceràmonmaripourqu'ilenépouseuneautre.La virulence de ses propos le fit sourire. Elle semblait sincèrement ulcérée à l'idée qu'il puisse larépudier.—Non,monamour,dit-ilenluiembrassantlenez.Turestesavecmoi.J'aidéfiéleroi,monfrère,unedouzainedelairdsetmêmecebâtarddeMcDonald.—Tuasfaittoutçapourmoi?—Oui,chérie.Ellesouritdanssoncou.—Je t'aime.Tu sais, j'ai envisagédemourir,mais je n'ai pas pume résoudre à la perspectivedenejamaisterevoir.Mêmesitudevaisenépouseruneautre.Alaricluisoulevalementon,pourl'obligeràleregarderdroitdanslesyeux.—Jet'interdisdemourir,c'estentendu?—Bon,danscecas,jevaism'efforcerdeguérir.Ils'esclaffa.—Jet'aime,KeeleyMcCabe.TuesvraimentuneMcCabe,désormais.NoussommesmariésdevantDieuetdevantleclan.Ilnenousresteplusqu'àconsommernotreunion.Keeleypoussaunsoupirdefrustration.—Jecroisqu'ilvafalloirattendreencoreunpeupourcela.Alariclaserratrèsfortdanssesbras,savourantànouveauleplaisirdelasavoirvivante,maisaussileplaisirdepouvoirluidirequ'ill'aimait.— J'attendrai aussi longtempsqu'il le faudra, chérie.Nous avons tout le tempspour consommernotremariage.En fait, je pense que nous pourrions le consommer chaque jour.Quand tu seras parfaitementrétablie,biensûr.Ellesoupiraetsenichacontrelui.—Jet'aime,AlaricMcCabe.—Moiaussi,jet'aime.Ellebâillaetfermalesyeux.Alariclaregardas'endormirdanssesbras.Ilnepouvaitpasrêverplusbeauspectacle.