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Page | 1 Tout ce qu’il faut savoir pour transformer sa vie et aller de l’avant Phrase-résumée de “La vérité sur ce qui nous motive” : ce livre n’est pas un n- ième livre sur la motivation et le management, mais un ouvrage novateur et décoiffant : depuis l’ère préhistorique où survivre était notre principale motivation, le taylorisme a fait la part belle au concept de la carotte et du bâton encore largement utilisé aujourd’hui. L’auteur nous explique avec beaucoup d’humour et preuves scientifiques à l’appui, pourquoi ce modèle est maintenant dépassé : il nous délivre les 3 ingrédients indispensables pour obtenir une recette motivante à tout coup et propose des outils pour passer à l’action dans tous les domaines de notre vie ! Par Daniel H. Pink, 2011, 245 pages. Titre en anglais : “Drive” Note : cette chronique est une chronique invitée écrite par Aude Bara du blog "un cheval dans mon pré” , faisant le pari de marier deux sujets qui n’ont à priori pas grand chose en commun, “l’équitation et le développement personnel”. Chronique et résumé de “La vérité sur ce qui nous motive” : L’auteur décrit une expérience scientifique menée par Harlow en 1949 sur des singes devant résoudre un casse-tête et qui a permis de mettre en évidence untroisième type de motivation. Jusque-là, les motivations biologique (faim, soif…) et extérieure (récompense, punition) étaient les deux seules reconnues. Or Harlow se rend compte

La vérité sur ce qui nous motive - Daniel Pink

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Tout ce qu’il faut savoir pour transformer sa vie et aller de l’avant

Phrase-résumée de “La vérité sur ce qui nous motive” : ce livre n’est pas un n-ième livre sur

la motivation et le management, mais un ouvrage novateur et décoiffant : depuis l’ère

préhistorique où survivre était notre principale motivation, le taylorisme a fait la part belle au

concept de la carotte et du bâton encore largement utilisé aujourd’hui. L’auteur nous explique

avec beaucoup d’humour et preuves scientifiques à l’appui, pourquoi ce modèle est maintenant

dépassé : il nous délivre les 3 ingrédients indispensables pour obtenir une recette motivante à

tout coup et propose des outils pour passer à l’action dans tous les domaines de notre vie !

Par Daniel H. Pink, 2011, 245 pages.

Titre en anglais : “Drive”

Note : cette chronique est une chronique invitée écrite par Aude Bara du blog "un cheval dans

mon pré”, faisant le pari de marier deux sujets qui n’ont à priori pas grand chose en commun,

“l’équitation et le développement personnel”.

Chronique et résumé de “La vérité sur ce qui nous motive” :L’auteur décrit une expérience scientifique menée par Harlow en 1949 sur des singes devant

résoudre un casse-tête et qui a permis de mettre en évidence untroisième type de motivation.

Jusque-là, les motivations biologique (faim, soif…) et extérieure (récompense, punition) étaient

les deux seules reconnues. Or Harlow se rend compte que la réussite de la tâche, le plaisir de

la résolution du casse-tête constituent la récompense intrinsèque du singe. D’ailleurs

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l’introduction d’une récompense extérieure comme motivation a mené à davantage d’erreurs et

moins d’intérêt pour la résolution !

Cette expérience est confirmée par Deci, 20 ans plus tard, avec un groupe d’étudiant et des

puzzles en 3D : le groupe auquel une récompense extérieure est promise, met davantage de

temps et se désintéresse plus rapidement du jeu que le groupe auquel rien n’a été proposé…

Pink explique ici comment et pourquoi trop d’organisation (y compris dans nos écoles)

fonctionnent sur la base de suppositions erronées concernant la motivation de leurs employés,

et finalement prennent des mesures inefficaces et contre-productives ! Et l’auteur décortique

ensuite les composantes de ce troisième type de motivation et propose des pistes pour l’utiliser

tant en entreprise que chez soi ou pour soi.

PARTIE 1: ET SI NOUS ENVISAGIONS UN NOUVEAU SYSTÈME D’EXPLOITATION ?

Chapitre 1 : Motivation 1.0, des origines à la chute

Le triomphe de la carotte et du bâton

Pink compare la motivation à un système d’exploitation informatique, le système 1.0 étant la

version la plus primitive qui a permis à l’homme préhistorique de survivre. Ce système, pas très

subtil, n’avait pour seul but que de nous permettre de répondre à nos besoins vitaux et

d’assurer la perpétuation de l’espèce.

L’être humain étant davantage que la somme de ses pulsions biologiques, un système plus

perfectionné a vu le jour, Motivation 2.0. Continuant à prendre en compte la motivation

biologique initiale, il suppose également que nousrecherchions les récompenses et évitions

les punitions. Le taylorisme a fait la part belle à ce système de motivation, en découpant les

tâches et en assujettissant l’homme à des processus répétitifs sous couvert de la nécessité

decontrôler l’homme, considéré par nature comme peu fiable…

Une version à peine plus évoluée, Motivation 2.1, naît sous l’impulsion de Maslow et Mc Gregor,

qui estiment que l’être humain a d’autres motivations plus élevées. Ceci donnera lieu à un

assouplissement des horaires et des codes vestimentaires, ainsi que davantage d’autonomie et

de possibilités de progression.

Trois problèmes d’incompatibilité

Néanmoins, notre mode de fonctionnement s’écarte toujours plus de Motivation 2.0 :

Au niveau organisationnel, l’exemple de l’opensource, dont sont issus entre autres Firefox ou Linux, montre que pour nous faire une réputation, aiguiser nos compétences et

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accroître notre valeur sur le marché du travail, nous sommes capables de travailler et développer gratuitement des projets ! Une enquête de Lakhani et Wolf montre que ces collaborations apportent le sentiment d’être créatif, et un état d’implication et de réussite optimal (Flow). Outre le défi de résoudre le problème logiciel, ces personnes ont le désir d’offrir un cadeau à la communauté des programmeurs.

De nouveaux types juridiques de société apparaissent, comme les sociétés à faible profit et

responsabilité limitée (L3C, Law-profit Limited Liability Companies) ou les entreprises sociales

(For- Benefit Organization), qui privilégient la valeur à long terme et l’impact social, avant les

profits économiques.

Sur un plan conceptuel, Pink relève que nos actions sont parfois issues de comportements bizarres. Nous pouvons passer des heures à essayer de maîtriser un instrument de musique, tout en ayant très peu d’espoir d’en tirer un jour un bénéfice matériel (Motivation 2.0) ou de rencontrer la compagne idéale par ce biais (Motivation 1.0) ! Le psychologue Kahneman, prix Nobel 2002 en économie, souligne ainsi que “nous n’agissons pas toujours selon un calcul économique rationnel et égoïste, et tout ne converge pas toujours vers la maximisation de la richesse”.

Enfin, la nature des activités par elles-mêmes n’est plus en adéquation avec Motivation 2.0. L’auteur démontre que si pour une tâchealgorithmique, le système 2.0 est efficace, ce dernier compromet gravement l’efficacité dans les activités heuristiques. Les tâches algorithmiques consistent à répéter la même suite d’instructions qui amène toujours au même résultat (cf Taylorisme), et selon Motivation 2.0, ces tâches ennuyeuses nécessitent une surveillance des employés pour éviter qu’ils ne se dérobent à leurs obligations. Les activités heuristiques consistent à expérimenter différentes possibilités pour déterminer une solution, et sont par nature plus créatives et moins routinières, et remettent en cause les hypothèses sur lesquelles sont fondées Motivation 2.0. Or, les premières ne représentent plus que 30% de la croissance des emplois aux États-Unis, tandis que les secondes 70% ! Les quelques 18 millions d’entreprises “non-employeuses” (constituées de leur seul créateur) que comptent les Etats-Unis, sont aussi une preuve que l’homme peut être autonome et n’a pas besoin d’encadrement ni de motivation extérieure.

Notre façon d’organiser ce que nous faisons, de le concevoir et de le faire n’est donc plus en

adéquation avec Motivation 2.0. Et voici pourquoi…

Chapitre 2 : Sept raisons pour lesquelles la carotte et le bâton sont (souvent) inefficaces

Une récompense permet-elle d’obtenir tout ce que l’on veut ?

Pink assimile Motivation 2.0 et sa confrontation avec le troisième type de motivation, à la

rencontre entre la physique newtonienne et la physique quantique. Motivation 2.0 devrait

permettre de prédire la trajectoire du comportement humain, sauf que la carotte et le bâton

aboutissent parfois à l’exact contraire du résultat voulu. Les récompenses et les punitions

peuvent libérer lescomportements négatifs et donner naissance “à la triche, à l’accoutumance

et à une pensée dangereusement myope”.

Les aventures de Tom Sawyer, de Mark Twain, nous donnent une importante leçon de

motivation humaine.

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“Lorsque Tom se voit assigner par sa tante Polly la tâche ennuyeuse de blanchir à la chaux

trente mètres de palissade, cela ne l’enthousiasme pas. Pourtant, alors que son copain Ben,

passant par là, commence à se moquer de lui, Tom [a une idée de génie : il lui fait croire que la

possibilité de] passer une palissade au lait de chaux est à ses yeux un privilège ! Il se montre

passionné par ce travail au point de refuser de laisser Ben peindre lui-même un petit moment,

lorsque celui-ci lui demande. Tom continue de refuser de céder, jusqu’à ce que Ben lui offre

finalement sa pomme en échange de cette faveur. Bientôt arrivent d’autres garçons qui vont

tomber eux aussi tomber dans le piège de Tom et badigeonner finalement eux-mêmes la

palissade à sa place, jusqu’à la couvrir d’une triple couche.”

La morale de cette histoire selon Mark Twain, c’est “que travailler c’est faire tout ce qui nous

est imposé, et s’amuser exactement l’inverse”.

L’auteur appelle l’effet Sawyer, le fait qu’une tâche intéressante peut devenir un travail ennuyeux,

sous le coup de la récompense extérieure, celle-ci tuant la motivation intrinsèque et les notions

de performance, de créativité et même de distinction qui peuvent y être rattachées.

Une étude menée sur des enfants de maternelle par les psychologues Lepper, Greene et Nisbett,

montre qu’”en agissant pour obtenir une récompense, l’individu renonce en partie à son

autonomie. (…) Il n’exerce plus un contrôle total sur le cours de sa propre existence. C’est ce qui

peut compromettre sa motivation et ôter à son activité son côté plaisant”.

Deci, revenant sur plus de 30 années d’expérience sur le sujet, confirme que des récompenses

concrètes influencent négativement la motivation intrinsèque. Des chercheurs de la London

School of Economics ont analysé les résultats dessystèmes de rémunération à la

performance de grandes entreprises et en sont arrivés à la conclusion que “les incitations

financières (…) peuvent avoir un impact négatif sur la performance globale” !

Gluksberg, psychologue, observe que les récompenses réduisent le champ de

réflexion (manque de perception des tenants et aboutissants notamment) et obscurcissent la

pensée au lieu de la clarifier et de stimuler la créativité. Amabile, chercheur, a observé que des

artistes oeuvrant sur commande se sentaient moins libres et faisaient preuve de moins de

créativité. A terme, lorsque le plaisir de l’activité, son intérêt ou le défi qu’elle représente, ou

encore le fait qu’elle absorbe l’esprit, sont la source de motivation plutôt que la rémunération,

l’artiste est finalement socialement beaucoup mieux reconnu et perçoit ces récompenses

extrinsèques qu’il ne recherchait pas.

Un économiste, Titmuss, a cherché à savoir si l’incitation financière pouvait accroître les dons du

sang. Et il s’est aperçu que celle-ci “dénature l’acte altruiste et chasse le désir intrinsèque de faire

une bonne action”. Toutefois, si la récompense est donnée à une organisation sociale, alors les

dons augmentent.

La récompense extrinsèque limite l’action car elle nie les composantes de la motivation

véritable de l’être, qui sont l’autonomie, la maîtrise des choses et la finalité de ce qu’il fait.

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Les dérives entraînées par des récompenses

Les dérives de la politique de la carotte et du bâton sont de 3 ordres :

D’abord, elle peut favoriser une mauvaise conduite : si les objectifs que nous nous fixons nous-mêmes sont généralement sains, ceux imposés par les autres ne sont pas forcément perçus comme tels. Certes, en réduisant le champ de réflexion, ils peuvent permettre une meilleure concentration. Néanmoins, lorsque la récompense devient l’objectif en lui-même, le chemin le plus court pour l’obtenir peut être parfois privilégié, même s’il nécessite un comportement contraire à la morale, une prise de risque accrue, ou une moindre coopération. L’auteur illustre ces propos par des exemples tristement célèbres comme Enron dans le milieu des affaires, ou les athlètes dopés. Quand la récompense est l’activité elle-même, nul ne cherche à faire simple ou à aller vite…

Pink tient à préciser que la récompense extrinsèque et les objectifs ne sont pas corrupteurs par

nature, mais qu’ils sont plus néfastes que ce que Motivation 2.0 veut bien l’admettre.

Et le bâton ne réussit pas forcément à corriger un comportement inadapté ! Gneezy et Rustichini

ont observé le fonctionnement de crèches en Israël : une amende imposée aux parents

retardataires a eu l’effet inverse de celui escompté, en augmentant le nombre des retards

déplorés. Dans ce cas, la sanction a enlevé l’obligation morale des parents envers celles qui

gardent leurs enfants, en réduisant le service à une simple transaction commerciale !

Ensuite, la récompense fait naître une accoutumance : le plaisir de la récompense est rapidement dissipé et nécessite, pour entretenir l’effet, desdoses toujours plus fortes et plus fréquentes. Svourov, économiste russe observe que “si vous payez votre fils pour qu’il vide les ordures, vous pouvez être sûr qu’il ne le refera jamais gratuitement, et l’effet de la rémunération initiale se réduisant, vous serez obligé d’augmenter la somme pour perpétuer le même résultat”. Propos confirmés par Knutson, chercheur en neurosciences, qui démontre, en faisant appel à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), que “le cerveau réagit de la même façon, qu’on lui promette une rémunération ou qu’on lui donne cocaïne, nicotine ou amphétamine” ! De plus, cela n’incite pas à prendre de meilleures décisions !

Enfin, la récompense incite à raisonner à court terme aux dépens du long terme. Elle nous incite à focaliser sur ce qui se présente immédiatement devant nous, et notre réflexion s’en trouve réduite et moins profonde. À titre d’exemple, les entreprises en bourse concentrées sur leur résultats trimestriels ont un taux de croissance plus faible à long terme, entre autres parce qu’elles investissent moins dans la recherche et le développement.

“Les sept défauts fatals de la carotte et du bâton sont donc :

1. ils peuvent annihiler la motivation intrinsèque,

2. ils peuvent réduire la performance,

3. ils peuvent empêcher la créativité,

4. ils peuvent décourager une bonne conduite,

5. ils peuvent inciter à tricher, à simplifier et à agir contrairement à la morale,

6. ils peuvent engendrer une accoutumance,

7. ils peuvent favoriser un raisonnement à court terme.”

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Chapitre 3 : … et les circonstances particulières dans lesquelles ils sont efficaces

Pink veille à être transparent et honnête avec le lecteur, c’est pourquoi il revient explicitement sur

les circonstances dans lesquelles les récompenses sont efficaces. Et le premier précepte en la

matière est que la récompense soit juste et adéquate. Sans cela, la récompense aura un effet

tout autre   .

La première question à se poser concerne la nature de l’activité pour laquelle une récompense

est envisagée : la tâche est-elle mécanique ? D’après Glucksberg, “si la tâche n’est pas très

intéressante et ne nécessite pas de pensée créative, la récompense peut motiver la personne

sans effet secondaire préjudiciable.” Deci, Ryan et Koestner précisent que dans ce cas, de toute

façon il n’y a guère de motivation intrinsèque à saper…

Une expérimentation menée en Inde par Ariely confirme cette analyse et précise que tant que la

tâche est purement mécanique, plus la récompense est importante et meilleure est la

performance.

En fait, pour utiliser la carotte avec succès, il faut respecter trois critères :

justifier la nécessité de la tâche (ennuyeuse) en la replaçant dans le contexte global,

reconnaître que la tâche est ennuyeuse, c’est-à-dire faire preuve d’empathie envers les personnes chargées de la réaliser,

et laisser les gens travailler à leur façon : leur présenter clairement l’objectif à atteindre mais pas la méthode, pour leur donner l’autonomie indispensable à la motivation intrinsèque plutôt que de les contrôler.

Pink donne l’exemple d’un envoi en masse de tracts qui doit être réalisé au plus vite, nécessitant

la mobilisation de personnel durant un week-end. D’après lui, utiliser la coercition n’amènerait

qu’à saper le moral des collaborateurs et saboter leur implication à long terme. Chercher des

volontaires pourrait être une solution mais leur nombre risque d’être limité ! La récompense

conditionnelle constitue alors le remède efficace, en promettant une grande fête ou en payant

au nombre de tracs envoyés, avec un tarif stimulant.

Lorsque la tâche est créative, comme dans le cas des artistes observés par Amabile, s’ils

travaillent sur commande, leur créativité reste entière lorsque la demande est intéressante ou

enthousiasmante, ou encore lorsqu’elle permet de les valoriser.

L’auteur poursuit avec l’exemple de la création d’une affiche publicitaire. Ici, larécompense

fondamentale doit suffire, pourvu qu’elle corresponde aux rémunérations pratiquées dans les

organisations similaires et pour des tâches semblables. La meilleure méthode pour motiver passe

par la création deconditions de travail favorables : proposer un lieu de travail agréable, rendre

les collaborateurs autonomes, leur donner la possibilité de maîtriser les processus, et inscrire

leurs obligations quotidiennes dans un objectif plus global.

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Ensuite, expliquer clairement le contexte de la commande, et notamment ses degrés d’urgence

et d’importance, et leur laisser exprimer librement leurs talents !

Le recours aux récompenses extrinsèques est possible, mais plus subtil : pour Pink, il est

essentiel qu’elle soit inattendue et a posteriori (proposée après que le travail soit fini). Dans le

cas contraire, les collaborateurs risquent de se focaliser sur l’obtention de la récompense au

détriment de la créativité nécessaire pour la tâche à réaliser.

Ces récompenses stimulent davantage les tâches suivantes, surtout si elles ne se répètent pas,

sinon elles deviendraient attendues…

L’auteur révèle deux autres astuces : privilégier les récompenses non matérielles, comme les

compliments, et donner une information utilepermettant de valoriser l’effort ou la méthode, ou

encore donnant des éléments sur les résultats obtenus grâce à ce travail.

Chapitre 4 : Le type I et le type X

Le comportement humain est souvent décrit de façon réductrice à la réaction vive à un stimulus

positif ou négatif, ou encore le calcul de notre intérêt, ou au pire des conflits psychosexuels !

La théorie de l’autodétermination (TAD) fondée par les chercheurs Deci et Ryan repose sur

l’idée que l’être humain est motivé par des besoins psychologiques, universels et innés : être

compétent, être autonome et entretenir des liens. Si ces besoins sont satisfaits, l’homme est

motivé, productif et heureux. Mais si par malheur, ils sont contrecarrés, alors l’homme est

contrarié, et sa motivation et sa productivité s’en ressentent.

Notre nature a pour fondement notre capacité d’intérêt : certaines choses la stimulent pendant

que d’autres l’inhibent. C’est le troisième type de motivation.

Or les principaux fondements de Motivation 2.0 ne sont pas favorables à l’émergence de ce type

de motivation. Lorsque les salariés ne sont pas assez productifs, trop souvent le système

récompense / sanction est actionné sans passer par la case “dialogue” qui permettrait de déceler

d’où vient le problème. Pourtant, c’est seulement en concentrant nos efforts sur la création de

conditions favorables à ces besoins psychologiques universels que nous serons productifs !

“L’être humain est naturellement enclin à cultiver autonomie, autodétermination et relations avec

ses semblables. Quand cette pulsion est libérée, il réussit mieux et son existence est plus

riche”, affirme Pink.

La TAD est un élément important d’une vaste école de pensée récente sur la condition humaine.

Au sein de ce courant, nous retrouvons Seligman pour qui “la résignation est un

comportement acquis et non inné” et Csikszentmihalyiavec ses expériences

autotéliques et sa notion de Flow.

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Le pouvoir de l’alphabet

A la fin des années 50, Friedman et Rosenman, cardiologues, ont associé lesmaladies

cardiovasculaires à deux types de comportements. Le type Aprésentait notamment une

tendance excessive à la compétition, del’agressivité, de l’impatience et le besoin irrépressible

de se comporter comme s’il était toujours dans l’urgence. Au final, c’est une lutte vaine et sans

fin contre lui-même à laquelle il se livre, mais aussi contre les autres, les circonstances, le temps

et parfois la vie ! Ces personnes présentaient davantage de risques de développer une

maladie cardiovasculaire, toutes choses étant égales par ailleurs (physique, sédentarité,

habitudes alimentaires, antécédents familiaux).

Les gens relevant du type B, par contre, vivaient leur vie de façon bien plusapaisée, tout en

étant aussi intelligents et souvent aussi ambitieux que la première catégorie. La personnalité de

type B est stable, et sa confiance en lui suffisante pour affronter la vie sans l’irritation et

l’exaspération dont fait preuve le type A. Ainsi, “pour réduire le nombre de décès par maladie

cardiovasculaire (…),il suffit d’aider les personnes de type A à ressembler davantage aux

personnes de type B.”

De la même façon, Mc Gregor, psychologue, définit les théories X et Y à partir de sa perception

du psychisme humain et de son expérience de dirigeant. Lathéorie X suppose que “l’individu

moyen éprouve une aversion innée pour le travail et qu’il fera tout pour l’éviter s’il en a la

possibilité”. Elle fait la part belle à lamédiocrité des masses et à l’impossibilité de la dépasser.

Par contre, les adeptes de la théorie Y considèrent que l’homme peut aimer son travail aussi

naturellement qu’il aime s’amuser ou se reposer. Cette théorie est basée sur l’observation

fréquente des qualités d’inventivité et de créativité parmi la population, et le fait que dans

des conditions favorables, les responsabilités sont acceptées voire même désirées ! Cette fois,

les possibilités sont vastes, tant pour l’individu que pour l’entreprise… Et les dirigeants n’ont

plus qu’à abandonner la théorie X au profit de la théorie Y pour que les entreprises

améliorent leur façon de travailler et deviennent plus rentables.

Le type I et le type X

Pink s’inspire de ces 2 exemples pour définir les types I et X. Pour lui, le système d’exploitation

2.0 est basé sur le comportement de type X, c’est-à-dire l’être humain motivé par des moyens

extrinsèques. Au contraire, Motivation 3.0 est lié au comportement de type I, celui qui est

davantage motivé par des désirs intrinsèques. Et donc, “si nous voulons renforcer nos

organisations, dépasser les mauvaises performances actuelles et comprendre ce qui ne

fonctionne pas bien dans nos entreprises, dans notre vie et dans notre monde, il nous faut

passer du type X au type I”. CQFD

Bien sûr, dans la réalité les comportements ne sont pas aussi tranchés. Néanmoins, les

personnes à tendance type X ont pour principal moteur les récompenses extérieures : même si

elles peuvent prendre du plaisir à leur tâche, ceci leur apparaît comme secondaire. Pour les

personnes de type I, leurs motivations reposent sur la liberté, le défi et l’objet même de

l’entreprise. Évidemment, elles ne sont pas réfractaires aux récompenses extérieures mais elles

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les considéreront plutôt comme un avantage supplémentaire (si tant est qu’elles sont bien

employées, cf. Chap. 3).

Élément important : le type I est acquis et non inné. En effet, ces caractéristiques ne sont pas

des traits de personnalité invariables, mais des tendances acquises suite à des expériences et

dans des circonstances particulières. Ainsi toute personne de type X pourra devenir de type

I si, placée dans un contexte favorable, l’occasion lui est donnée de développer des pratiques et

attitudes fondamentales en lien avec les besoins universels du système Motivation 3.0.

L’histoire montre que les personnes de type I sont mieux équipées pour réussir que celles de

type X. Même si elles ne recherchent pas directement le succès, ledésir intérieur qui les anime

leur permet de traverser les moments difficiles et les aide à faire les efforts nécessaires. Cette

flamme intérieure est alimentée par le besoin de garder le contrôle de leur propre existence,

de mieux connaître le monde qui les entoure et de réaliser quelque chose de durable.

Toutefois, le type I a besoin d’une rémunération équitable, sous peine de voir sa motivation

décliner comme tout salarié de type X. Mais au-dessus d’un certain seuil, l’argent n’aura plus le

même effet, alors que le type X en fait sa priorité et en veut toujours plus. S’il aime voir ses

efforts reconnus, le type I n’en fait pas une fin en soi, tandis que le type X est toujours à la

recherche des honneurs.

Pink compare le type X au charbon, et le type I à l’énergie solaire renouvelable ! Pendant

longtemps peu cher, facile à utiliser et rentable, le charbon a des effets néfastes lors de sa

combustion et son exploitation devient de plus en plus difficile et coûteuse avec le temps. Le type

X présente les mêmes inconvénients, les récompenses induisant des effets secondaires néfastes

et sa motivation devenant de plus en plus coûteuse !  De son côté, le type I est une ressource

inépuisable puisqu’il se renouvelle lui-même et engendre peu de dégâts…

Le comportement de type I est indiscutablement un facteur de bien-être physique et mental.

L’estime de soi est favorisée par le besoin d’autonomie satisfait et la motivation intrinsèque.

Leurs relations avec les autres sont aussi meilleures que les types X. Deci a même observé que

les personnes de type X sont généralement moins à l’aise en public, davantage sur la défensive,

et plus susceptibles de présenter un comportement de type A !

Enfin, la personne de type I n’a pas besoin de pression extérieure pour progresser :

autonomie dans l’activité, maîtrise de l’activité et identification au but poursuivi sont ses moteurs

dans la vie ! Ceci n’est pas une nouvelle théorie utopique car de nombreuses études

scientifiques en apportent les preuves. Aussi, à nous de voir si nous voulons continuer à végéter

dans nos anciennes habitudes ou en tenir compte et intégrer Motivation 3.0 pour construire le

monde de demain !

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PARTIE 2 : LES TROIS ÉLÉMENTS : AUTONOMIE, MAÎTRISE ET FINALITÉ

Chapitre 5 : L’autonomie

L’auteur aborde l’autonomie avec de nombreux exemples tirés d’entreprises principalement

américaines.

Ressler et Thompson, anciens cadres RH du groupe Best Buy, ont inventé le concept

de ROWE (Results-Only Work Environment) ou NETPRO en français (pour Nouvel

Environnement de Travail Pour Résultats Optimisés) : les salariés n’ont pas d’horaires fixes, ils

se rendent au bureau quand ils veulent, voire n’ont pas besoin de s’y rendre, l’important étant

que le travail soit fait : à eux de décider comment, à quel moment et où.

Gunther, PDG, a tenté l’expérience pendant 3 mois dans une de ses entreprises, Meddius. Sur

22 salariés, seuls 2 n’ont pas réussi à s’adapter et ont quitté l’entreprise. Pour les autres, la

productivité a augmenté tandis que leur stress diminuait. Gunther a donc décidé d’opter

définitivement pour cet environnement où les employés ont toujours des objectifs à

atteindre en termes de volume de ventes ou de date butoir pour des projets, mais choisissent

leurs horaires. Ainsi, les conditions de base sont satisfaites : bien rémunérés, les salariés ont la

possibilité de s’occuper de leur famille, par exemple en étant disponibles pour le match de foot de

leur fils le vendredi après-midi ! Pour Gunther, “le management ne consiste pas à faire le tour des

bureaux pour vérifier que les gens y sont !”. Il considère les employés comme des partenaires et

non des ressources. Et un partenaire a besoin de diriger lui-même sa propre vie…

Les salariés sont-ils des joueurs ou des pions ?

Rappelons-nous que le management n’est pas “naturel”, c’est une invention de l’homme, “une

technologie” comme en parle Hamel, conseiller en stratégie. Or il repose sur les hypothèses

que les personnes à gérer ont besoin d’un stimulantpour agir et aller de l’avant (en l’absence de

carotte et de bâton, les gens resteraient inertes et prendraient plaisir à ne rien faire) et qu’à partir

du moment où ils s’activent, ils ont besoin d’être guidés faute de quoi ils s’égareraient !

“Est-ce vraiment là notre nature ?”, se demande Pink. Sommes-nous voués à la passivité et à

l’inertie ? La réponse se trouve en observant le comportement d’un bébé de 6 mois : nous

sommes naturellement portés à être curieux et autonomes ! L’action et l’implication, voilà

notre réglage par défaut, pour reprendre le langage informatique cher à Pink. Et si à 15 ou 40

ans nous sommes inertes, c’est qu’un paramètre est venu modifier ce réglage… L’auteur évoque

la possibilité que le management (dont la philosophie déborde largement la sphère

professionnelle) soit une des forces qui ont déréglé cet état !

La réussite économique dans un monde comme le nôtre ne peut plus reposer sur le contrôle des

gens, ce qui revient à les inhiber, leur comportement étant alors fonction de pression et

exigences externes à eux-mêmes. L’autonomie, c’est agir en faisant des choix dans le sens

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de l’interdépendance. Les effets sur les performances et l’attitude de la personne sont

bénéfiques : meilleurs résultats scolaires, meilleure compréhension des concepts, davantage de

persévérance en classe et en sport, moins d’échecs, sentiment de mieux-être psychologique…

Malheureusement dans la tête des cadres, elle est souvent confondue avec l’indépendance

ou l’individualisme, où il s’agit de ne compter sur personne d’autre que soi.

Au passage, Pink relève que les horaires flexibles ne relèvent pas de l’autonomisation des

salariés, mais simplement d’une forme légèrement plus civilisée du contrôle !

Les quatre conditions essentielles de l’autonomie

Autre exemple de la mise en pratique de l’autonomie : celui de Cannon-Brooks, créateur de

logiciels, qui a introduit le “jour spécial de créativité” dans son entreprise Atlassian. Ainsi, les

employés consacrent une journée à un problème de leur choix même s’il est en dehors de leur

champ d’activité habituel, et une fois par trimestre, 24 heures sont dévolues à la résolution de

problèmes, toujours hors de leur domaine, pour casser la routine ! Ces journées ont été

nommées les FedEx Days, car il faut livrer quelque chose en 24 h ! Le PDG en conclut que le

comportement de type I se développe quand les employés prennent de l’autonomie sur 4 plans :

ce qu’ils font,

quand ils le font,

comment ils le font,

avec qui ils le font.

Précurseur, la société 3M a lancé dans les années 50 sous la houlette de Mac Knight, des

moments de “gribouillage expérimental” : les personnels techniques passaient 15% de leur

temps sur des projets de leur choix. Les Post-Itsont nés à cette occasion, entre autres ! Pour

Mac Knight “si ces hommes et femmes à qui nous déléguons autorité et responsabilité sont des

gens compétents, ils voudront faire leur travail à leur propre manière.” Google a repris ce concept

: 1 journée par semaine est consacrée à l’amélioration de produits existants ou à la création

d’autres (sans en réclamer la propriété intellectuelle)… Plus de la moitié des innovations,

dont Gmail, est issue de ces périodes créatives !

Côté centres d’appel, l’heure est aussi à l’autonomie, à l’image de celui de la société Zappos. Ni

contrôle du temps de travail, ni utilisation de script : les employés sont libres de répondre aux

appels de la façon qui leur convient, à eux de décider comment bien servir les clients ! Résultats :

un service client très bien noté, et peu de rotation du personnel alors que le turn-

over avoisine les 100% dans certains centres d’appel… La pratique du homeshoring, soit la

répartition des appels vers les domiciles des employés, permet aux téléagents de se sentir

encore plus libres de leurs choix et de s’approprier les demandes qu’ils traitent.

Enfin, des recherches montrent que les personnes qui ont participé à la formation de leur équipe

de travail ont plus de satisfaction que les autres. Chez Gore & Ass., celui qui veut diriger une

équipe rassemble les employés qui auront envie de travailler avec lui. Whole Foods fait

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recruter les cadres par leurs futurs subordonnés, avec un vote à l’issue d’une période d’essai

d’un mois !

L’art d’être autonome

Pink,toujours plein d’humour, prend l’exemple des grands peintres comme Pablo Picasso…

Personne ne leur a jamais dit “Vous allez peindre tel tableau, vous vous y mettrez chaque

matin à 8h30 précises. Vous devrez peindre avec les collaborateurs que nous avons

choisis pour travailler avec vous. Et vous devrez peindre selon la technique suivante…”.

L’idée vous paraît loufoque ?  Si elle l’est pour les artistes, elle l’est pour vous aussi !

Note d’Olivier : cependant Picasso a bien dû apprendre la peinture, avec son père tout d’abord,

puis à l’école de peinture de la Llotja… Donc si effectivement il était libre quand il a créé ses

tableaux, quelqu’un lui a bien dit quelque chose de similaire, sans doute de nombreuses fois,

quand il a appris la peinture ! Cela fait partie du processus d’apprentissage d’apprendre d’abord

selon une méthode éprouvée. Ensuite seulement, pour les plus doués, il sera possible de

s’affranchir de cette méthode et de dépasser le maître pour créer son propre style. 

La difficulté réside dans le fait que tout le monde n’accorde pas la même importance aux

différents aspects de l’autonomie. A chaque cadre de chercher à savoir ce qui est important aux

yeux de chacun de ses salariés ! Une certitude pour Pink : “quelle que soit la manière dont

s’exprime à la surface les désirs individuels, ils naissent des mêmes racines : par nature nous

sommes des joueurs et non des pions.”

Chapitre 6 : La maîtrise

Comment passer de la soumission à l’implication ?

Exercer un contrôle sur quelqu’un aboutit à sa soumission, tandis que laisser l’autonomie à cette

personne la mènera à s’impliquer et donc à la maîtrise. L’Institut Gallup a relevé lors d’une

enquête que plus de 50% des salariés américains ne s’impliquent pas dans leur travail…

Dans la vie privée, le constat est identique : la soumission à des ordres et règles est une

stratégie efficace pour survivre physiquement, mais elle ne donne rien en matière

de développement personnel ! Comme le dit si bien Pink : “Vivre une vie digne de ce nom

implique davantage que satisfaire simplement ceux qui exercent un contrôle sur vous”. Et

pourtant, dans nos bureaux et salles de classe, la soumission reste la règle !.

Csikszentmihalyi a étudié le jeu et remarqué qu’en jouant, nous éprouvons des expériences

autotéliques : le moyen est la fin. Les objectifs sont clairs et la récompense immédiate. De plus,

le rapport entre ce que nous devons faire et ce que nous pouvons faire est parfait. Et si nous

franchissons quelques petits paliers de plus par rapport à nos capacités habituelles, l’effort lui-

même est la récompense !  En observant des artistes, il remarque que ceux-ci sont pratiquement

en transe tant ils sont pris par ce qu’ils font : ils ne voient plus le temps qui passe

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et leur conscience d’eux-mêmes s’efface. C’est l’état mental du Flow, dans lequel le moment

présent est vécu intensément.

Les tâches doivent être idéalement équilibrées

Chez Ericsson, le géant suédois des télécommunications, la réorganisation du travail s’est faite

au profit d’objectifs clairs et de feedbacks rapides. Green Cargo et Thatgamecompany

s’attachent à offrir des tâches idéalement équilibrées : des problèmes à résoudre ni trop

faciles ni trop difficiles. En effet, le décalage trop fréquent entre ce que nous devons faire et ce

que nous pouvonsfaire, est une source courante de frustration, et en corolaire d’ennui ou

d’anxiété. Enfin, Wrzesniewski et Dutton, professeurs en faculté de gestion, ont observé des

employés pouvant introduire eux-mêmes un peu de Flow dans leurs activités souvent

rébarbatives. Ainsi, au lieu de faire uniquement le minimum exigé, des personnes chargées du

nettoyage dans un hôpital se sont consacrées également à faire la conversation aux patients, ou

à aider les infirmières. Au final, elles en retiraient une plus grande satisfaction et une

meilleure image de leur travail.

Les trois lois de la maîtrise

Le Flow, essentiel pour la maîtrise, en est pourtant temporellement éloigné : il se vit sur le

moment, tandis que la maîtrise ne s’acquiert que progressivement et sur la durée. Alors comment

allier les deux ?

La maîtrise est un état d’esprit, car comme dit Dweck, professeur de psychologie, “ce que les

gens croient conditionne ce qu’ils accomplissent”. Pour Dweck, deux possibilités : soit

l’intelligence est considérée comme une quantité définie et fixe (théorie de l’entité), soit

l’intelligence peut croître (théorie incrémentielle). En découlent deux types d’objectifs :

deperformance pour le premier et d’apprentissage pour le second. Dans le premier cas, qui se

rapproche du type X, l’effort est un signe de faiblesse et travailler dur rime avec nullité ! Pas

d’acquisition de la maîtrise possible ! Par contre pour le type I, l’effort est un moyen de

progresser utilement. Sa logique est celle de l’apprentissage, il n’est pas là pour prouver son

intelligence et considère l’échec comme une balise sur le chemin…

La maîtrise est une souffrance, issue de la persévérance et de la passion pour les objectifs à

long terme. C’est ce qu’il ressort de l’étude des facteurs de réussite à West Point, académie

militaire américaine. C’est un chemin difficile qui demande efforts, difficultés, peine et énergie sur

une période prolongée. Pink précise que“si les gens sont conscients de ce qui leur permet

d’atteindre l’état de Flow, ils auront une idée plus claire de ce qu’ils doivent consacrer leur temps

et leur énergie à maîtriser.” Bien sûr, la progression est irrégulière, et les moments de Flow

alternent avec les périodes de stagnation. Deck conclut en expliquant que“l’effort fait partie de

ce qui donne un sens à la vie” : nous sommes prêts à travailler dur pour ce qui compte pour

nous.

Dernière loi, la maîtrise est une asymptote : nous allons nous en rapprocher au fil des efforts

mais nous ne pourrons jamais l’atteindre ! D’après l’auteur, “la maîtrise nous attire précisément

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parce qu’elle nous échappe”. Là aussi “le plaisir est davantage dans la quête que dans la

réalisation”.

L’oxygène de l’âme

Le trouble d’anxiété généralisée touche environ 3% de la population adulte, et la présence de 3

des 6 symptômes suivants constitue une alerte à ne pas négliger :

agitation ou nervosité

fatigabilité

difficultés de concentration

irritabilité

tension musculaire

troubles du sommeil

Or, dans les années 70, Csikszentmihalyi a fait l’expérience de priver quelques volontaires de

leurs moments de Flow, préalablement identifiés par chacun dans leur vie quotidienne. La

détérioration de leur moral était telle au bout de 48 h qu’il était inutile de poursuivre

l’expérimentation ! Le Flow n’est donc pas un luxe mais une nécessité ! Et le travail présente,

en principe, structurellement les conditions pour atteindre cet état : objectif clair, retour immédiat,

tâches idéalement équilibrées…

J’aime particulièrement la parole de Csikszentmihalyi : “Il n’y a aucune raison de continuer à

croire que seul un “jeu” inutile peut être amusant et que les affaires sérieuses doivent être

nécessairement une lourde croix à porter.Une fois que nous avons réalisé que la frontière

entre travail et jeu était artificielle, nous pouvons prendre les choses en main et nous atteler à la

tâche difficile qui consiste à rendre notre existence plus vivable”. Prenant l’exemple de l’enfant,

Pink explique qu’il passe son temps d’un moment de flow à un autre, ouvert au plaisir comme à

l’effort, utilisant corps et cerveau pour expérimenter autour de lui et apprendre. Il est en constante

recherche de la maîtrise. Pourquoi finit-il par cesser cette recherche ? “On commence à avoir

honte de faire quelque chose de puéril” conclut Csikszentmihalyi !

Chapitre 7 : La finalité

“Quand l’air froid de la croissance démographique rencontre l’air chaud des rêves non réalisés,

cela donne un orage comme le monde n’en a jamais vu”, prédit Pink face à la vague de retraite

des baby-boomers, et à l’ancienne vision du management qu’ils ont vécue !

La motivation de la finalité

L’être humain est un chercheur de sens. Csikszentmihalyi rajoute même que “la finalité procure

une énergie pour vivre, (…) [et qu’une] sélection naturelle a dû avoir lieu au profit des individus

engagés dans une activité qui les portait au-delà d’eux-mêmes.”

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Hamel, spécialiste en stratégie, explique l’envolée du travail bénévole par le fait qu’il permet aux

gens d’obtenir quelque chose que leur travail rémunéré ne leur apporte pas. Comme quoi la

motivation du profit ne suffit pas toujours !  TOMS Shoes en est un bel exemple, à tel point

qu’elle se définit comme “une société commerciale fondée sur le don” : elle offre une paire de

chaussures à un enfant d’un pays en voie de développement pour toute paire achetée.

L’augmentation (plus du double) du nombre de membres de coopératives est également un signe

qui ne trompe pas..

L’heure est au développement d’un nouveau type d’hommes d’affaires, qui cherchent avec

ferveur à donner du sens à leur activité, comme leurs ancêtres cherchaient à maximiser les

profits. Et il ne s’agit pas de faire dans le “socialement responsable” d’il y a quelques années, où

le profit était coloré d’une éthique parfois non vérifiable.

Des étudiants d’Harvard, suite aux dérives d’entreprises et crises économiques à répétition, ont

inventé le “serment du MBA”, un engagement à servir le bien commun et à créer de la

prospérité dans le monde économique, mais aussi social et environnemental !

Hamel, encore lui, estime que les entrepreneurs de toutes sortes doivent imprégner leur

activité “d’idéaux plus profonds et plus stimulants pour l’esprit”.

De nombreux psychologues et économistes ont remarqué qu’au-delà d’un certain seuil de

rémunération (très modeste), un revenu plus élevé n’implique pas un niveau de satisfaction

plus haut. Des chercheurs en sociologie et psychologie, Dunn et Norton, apportent un éclairage

précieux : “la façon dont les gens dépensent leur argent pourrait bien avoir au moins autant

d’importance que les sommes qu’ils gagnent”. Ainsi ils proposent que les entreprises allouent une

somme à chaque salarié, charge à eux de choisir l’association caritative à laquelle la reverser !

Autre exemple concret : des médecins  à qui la possibilité est accordée, un jour par semaine, de

se consacrer à ce qui compte le plus à leurs yeux dans leur travail, sont moins épuisés

physiquement et émotionnellement que leurs collègues n’ayant pas ce privilège.

Une vie excellente

Deci, Ryan et Niemec, chercheurs, ont suivi des étudiants pendant et après leur sortie de

l’Université de Rochester. D’un côté, ceux qui avaient des objectifs de finalité et qui estimaient

les réaliser, ressentaient une satisfaction et un bien-êtresupérieurs à ce qu’ils vivaient pendant

leurs études, et la dépression et l’anxiété étaient rares. De l’autre côté, ceux qui avaient

des objectifs de profit et déclaraient les atteindre, avaient un sentiment de satisfaction et de

bien-être égalà celui observé pendant leurs études, et étaient davantage sujets à la dépression

et à l’anxiété.

Deci ajoute “même lorsque nous obtenons ce que nous voulons, ce n’est pas toujours ce dont

nous avions besoin”. Et Pink de renchérir “En ne comprenant pas que pour être satisfaits, il faut

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non seulement avoir des objectifs mais encore avoir les bons objectifs, on risque de se retrouver

dans un cycle autodestructeur.”

Pour l’auteur, la science a montré qu’être brillant ne s’obtient pas à coup de carottes ou de

bâtons, mais grâce à un désir profond qui nous anime, celui de diriger notre propre vie,

d’améliorer et diversifier nos capacités, et de donner un sens à tout cela, un sens qui résonne en

nous et qui s’inscrive dans une réalisation plus grande et de plus permanente que nous-

mêmes !

Mais il ne sera pas aisé de faire changer les mentalités, de désapprendre ce qui a été longtemps

érigé en vérités : heureusement, Motivation 3.0 a été prouvé scientifiquement ;-) ce qui

augmente considérablement ses chances de voir le jour ?! Pink assure qu’il en va

de l’affirmation de notre humanité…

PARTIE 3 : LA BOÎTE A OUTILS DU TYPE I

Rien que pour cette boîte à outil, vous devriez acheter ce livre !

Appliquez le type I pour vous seul : neuf méthodes pour éveiller votre motivation

Pink délivre des outils précieux, indispensables à mettre en oeuvre avant de tenter quoi que ce

soit d’autre dans notre environnement familial ou professionnel !

Ce sont de véritables outils de développement personnel, utiles notamment pour qui se pose

des questions sur sa vie. Depuis le test du Flow, qui permet de déterminer les activités qui vous

mettent dans cet état mental et d’identifier vos véritables sources de motivation intrinsèque,

jusqu’à prendre une année sabbatique pour vous ressourcer et vous renouveler, tout un panel

de petits jeux et de grandes questions (nouvelles) vous permettra de faire le point et de

progresser sur le chemin de l’autonomie, de la maîtrise et de la finalité !

Appliquez le type I à votre organisation : neuf moyens de faire progresser votre entreprise,

votre administration ou votre équipe

Des idées, parfois déjà citées dans le livre, pour faire bouger votre entreprise dans le sens de

Motivation 3.0, que vous soyez salarié ou PDG.

Le test de Reich peut être amusant, puisqu’il s’agit d’observer avec quel pronom les employés

parlent de leur entreprise. “Ils” et “eux” dénotent d’un manque d’implication, “nous” montre le

contraire; facile pour prendre le pouls de vos collaborateurs !

La création de jours “FedEx” est une autre des propositions, moins facile à mettre en oeuvre en

tant qu’employé !

A vous de jouer !

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Faites abstraction de la compensation : rémunérez les gens selon le type I

L’auteur développe les 3 principes de base à appliquer dans votre entreprise, pour que l’argent

n’y soit plus un problème :

1. veillez à l’équité interne et externe,

2. payez plus que la moyenne,

3. si vous évaluez la performance, utilisez des critères larges, pertinents et avec lesquels il est difficile de tricher.

Là encore, il y a matière à réflexion et à bousculer les habitudes !

Appliquez le type I avec vos enfants: neuf idées pour les motiver autrement

Et si nous parvenions à ne pas tuer cette recherche incessante de moments de Flow chez

nos enfants ?

Pink adapte son discours à l’éducation de nos chérubins et nous invite à nous poser des

questions sur les devoirs scolaires, à proposer l’auto-évaluation ou les journées FedEx, à ne pas

mêler argent de poche et tâches ménagères, bref à considérer notre famille comme une

organisation où Motivation 3.0 a bien sûr toute sa place.

Une priorité si nous voulons faire changer le monde du travail de demain ? Et une action

chargée de sens…

L’auteur fait aussi une revue de systèmes scolaires différents : en France, nous retrouvons

principalement les écoles Montessori et quelques initiatives plus locales comme la Living

School ou le Lycée Autogéré de Paris.

La bibliographie du type I : 15 livres essentiels

Une revue de livres traduits en français (ou pas), pour tous ceux qui veulent aller plus loin.

Une révélation sur la nature humaine et la vie !

Conclusion d’Aude Bara du blog un cheval dans mon pré :J’ai lu ce livre très rapidement, parce que captivée par le sujet et la façon de le traiter de

Daniel Pink. Et j’ai vraiment apprécié de le lire et relire pour écrire cette chronique. Il est vraiment

très agréable, bourré d’exemples concrets et d’humour !

Il a fait écho en moi avec une force inouïe : l’auteur met enfin des mots sur ce que je ressentais

depuis des années dans mon travail sans réussir à le clarifier. A savoir que la nature humaine

n’est pas passive et inerte comme beaucoup de cadres le pensent ! Il me paraissait tellement

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clair que la carotte et le bâton n’étaient pas une solution, que j’en passais souvent pour une

“peace and love” ou utopiste… aux yeux de ma hiérarchie.

Et puis, je me suis battue pendant 12 ans contre moi-même, en me disant qu’il fallait que je fasse

contre mauvaise fortune bon coeur et que ce travail ou un autre, ce serait pareil ! Mais non, le

concept de Flow est le deuxième élément qui m’a énormément parlé. Or j’ai pu constater a

posteriori que rares étaient ces expériences dans mon travail !

Inconsciemment, ce livre m’a aidée/renforcée pour prendre la décision de quitter mon travail et

de me mettre en disponibilité de la fonction publique (la fameuse année sabbatique proposée par

Pink !) pour réfléchir et commencer à expérimenter d’autre choses puis me consacrer à ce que

j’aime vraiment (grâce notamment à sa description des "expériences gratifiantes intrinsèques") :

bloguer, tisser, sculpter, apprendre, partager,…

La force de l’auteur est de réussir à nous titiller gentiment l’esprit, comme par la boutade vis-à-vis

du travail de Pablo Picasso. Je pense que tout lecteur va trouver son compte dans ce livre : voir

sa vie différemment professionnellement ou personnellement, initier des

changements,comprendre les autres… Il y en a vraiment pour tout le monde ! Et c’est

uneremise en cause totale du management : alors même si vous n’adhérez pas, vous allez

forcément vous poser des questions !

Points forts :

Rapide à lire et concis

Beaucoup d’exemples de tous horizons

Richement documenté

Énormément d’humour

Des outils concrets

Points faibles :

Après plusieurs lectures, non, je n’en vois toujours pas !