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La ville au risque de ses usines Developpement industriel et risques technologiques en Seine-Maritime, 1800-1940 avoriser le développement industriel et économique d’une région tout en protégeant l’intérêt et la sécurité de ses habitants représente, dès les premières années du XIX e siècle, un enjeu majeur pour les autorités locales et nationales. L’élan formidable que connaissent alors les activités industrielles en Seine-Inférieure, l’essor et la concentration des nouveaux établissements dans les centres urbains déclenchent l’inquiétude et l’hostilité des populations avoisinantes. Se trouve dès cette époque posé le débat actuel sur la périlleuse coexistence entre la ville et l’usine. L’exposition itinérante « La ville au risque de ses usines, 1800-1940 : des établissements dangereux, insalubres et incommodes en Seine-Inférieure » présente l’histoire de la mise en place d’une politique nationale de contrôle et de prévention pour laquelle notre département a joué un rôle d’avant-garde. Autour de quelques sites et types d’activités choisis dans l’ensemble du département pour leur caractère exemplaire, elle invite à découvrir comment, depuis l’Empire, sont implantés les établissements industriels les plus innovants et les plus divers. Elle montre le contrôle qui leur a été progressivement imposé pour en limiter les inconvénients, la mobilisation des multiples partenaires sur le terrain et les difficultés rencontrées pour faire réellement appliquer cette surveillance. www.seinemaritime.net Archives départementales de Seine-Maritime 1 - www.pixell.fr Vue générale de la ville d’Elbeuf vers 1860, ADSM 1 Fi 410. F

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La ville au risque de ses usines

Developpement industriel et risques technologiquesen Seine-Maritime, 1800-1940

avoriser le développement industriel et économique d’unerégion tout en protégeant l’intérêt et la sécurité de ses

habitants représente, dès les premières années du XIXe siècle, unenjeu majeur pour les autorités locales et nationales. L’élanformidable que connaissent alors les activités industrielles enSeine-Inférieure, l’essor et la concentration des nouveauxétablissements dans les centres urbains déclenchent l’inquiétudeet l’hostilité des populations avoisinantes. Se trouve dès cette époque posé le débat actuel sur la périlleusecoexistence entre la ville et l’usine. L’exposition itinérante« La ville au risque de ses usines, 1800-1940 : des établissementsdangereux, insalubres et incommodes en Seine-Inférieure »

présente l’histoire de la mise en place d’une politique nationalede contrôle et de prévention pour laquelle notre département ajoué un rôle d’avant-garde. Autour de quelques sites et typesd’activités choisis dans l’ensemble du département pour leurcaractère exemplaire, elle invite à découvrir comment, depuisl’Empire, sont implantés les établissements industriels les plusinnovants et les plus divers.

Elle montre le contrôle qui leur a été progressivement imposépour en limiter les inconvénients, la mobilisation des multiplespartenaires sur le terrain et les difficultés rencontrées pour faireréellement appliquer cette surveillance.

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Vue générale de la ville d’Elbeuf vers 1860, ADSM 1 Fi 410.

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Rapport du préfet Beugnot au ministre de l’Intérieursur la réclamation des habitants de Saint-Sever, 1er jourcomplémentaire an XIII (18 septembre 1805).ADSM, 5 M 763.

Developpement industriel et decouvertes scientifiques : innovations, peurs et incertitudes

la fin du XVIIIe siècle, le chimiste Lavoisier découvre le rôlede l'oxygène dans la combustion des gaz et dans la

formation des acides. La transformation du soufre en acidesulfurique trouve des applications dans l'industrie : blanchimentdes cotons, teinture et impression des étoffes. Ceci entraîne lacréation de nombreuses fabriques d'acide sulfurique et de soude.

La 1ère fabrique d’acide sulfurique en France est installée à Rouen par John Holker, unanglais naturalisé. Il fonde en 1766-1769 une manufacture « d’huile de vitriol » quipermet de fabriquer un acide jusqu’alors importé à prix fort et que l’on peut désormaisproduire sur place à moindre coût.

La multiplication et la concentration de fabriques dans le faubourg Saint-Sever au débutde l’Empire, une quinzaine sont créées entre 1806 et 1810, provoquent unemétamorphose du paysage, la recrudescence des plaintes et des réclamations,l’intervention des préfets et du gouvernement.

Description topographique et statistique de la France, département de la Seine-Inférieure, Rouen, 1810. La mise en œuvrede la Statistique générale de la France correspond avec celle du cadastre, à l’un des premiers grands travaux initiés parBonaparte pour obtenir une description complète et régulière de la France. Les différents secteurs de l’activité industrielle sont précisément présentés, ainsi que le nombre des ouvriers et les chiffresde la production annuelle. ADSM, BHSM 268/14.

« A M. le préfet du département de la Seine-Inférieure », pétition imprimée des habitants et propriétaires du faubourg Saint-Sever, 1806.

ADSM, 5 M 763.

Réponse du ministre de l’Intérieur au préfet de la Seine-Inférieure, 19 vendémiaire an XIV (11 octobre 1805) : les plaintes des riverains n’ont pas de fondement scientifique mais il faut veiller à faire monter les vapeurs désagréables bien haut dans l’atmosphère.

ADSM, 5 M 763.

« Travail du soufre, manière de l’extraire des pirites », gravure à l’eau-forte dans Recueil des planches sur les sciences, les arts libéraux et les arts méchaniques avec leur explication, Paris, 1768.

ADSM, D 182.

Lettre de Pierre Pelletan au préfet annonçant son intention de transférer ses ateliers de fabrication de soude artificielle de Paris à Rouen au faubourg Saint-Sever, 20 février 1806.ADSM, 5 M 766.

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Vapeurs sur la ville

endant des siècles, l’Homme utilise l’énergie produite par levent, l’eau ou la force animale. Le rendement de ces sources

d’énergie reste limité malgré tous les perfectionnements techniquesqui leur sont apportés.

La découverte de la vapeur comme sourced’énergie artificielle remonte à la fin du XVIIesiècle. Son application au fonctionnement desmachines motrices pendant les deux sièclessuivants, va largement contribuer au formidableessor de l’industrie. La Seine-Inférieure fait partiedes départements où le développement de lamachine à vapeur est en 1840 l’un des plusimportants du pays. La cheminée d’usinecrachant sa noire fumée devient, de fait, lesymbole de la vitalité et de la modernité del’industrie du Département.

Toutefois, son expansion engendre de nombreux inconvénients liés à la production de vapeursous pression : risques d’incendie, fumées produites par la combustion du charbon de terreutilisé pour chauffer l’eau, risque d’explosion des chaudières. La diffusion de la machine àvapeur aux différentes branches de l’industrie du département de la Seine-Inférieures’accompagne de la mise en place, par les pouvoirs publics, d’une réglementation encadrantson installation et son utilisation (ordonnance du 29 octobre 1823).

Avec la première guerre mondiale, la toute puissance de la machine à vapeur est remiseen cause par l’essor de l’électricité dont l’expansion, entre les deux guerres, contribuelargement à la disparition des cheminées fumantes du cœur des villes.

L’implantation de la cité de Rouen en fond de vallée a pour inconvénient de faciliter lastagnation des fumées industrielles au-dessus de la ville. Conscient des dangers pour lasanté publique et l’environnement, la municipalité rouennaise est, en 1899, la premièredu département à prendre des mesures visant à limiter les rejets de fumée par lescheminées des usines.

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La ville de Rouen et ses cheminées d’usines vues par Guy de Maupassant dans les années 1880.

« On dominait l’immense vallée, longue et large, que le fleuve clair parcourait d’un bout àl’autre, avec de grandes ondulations. On le voyait venir de là-bas, taché par des îles nombreuseset décrivant une courbe avant de traverser Rouen. Puis la ville apparaissait sur la rive droite,un peu noyée dans la brume matinale, avec des éclats de soleil sur des toits, et ses mille clocherslégers, pointus ou trapus, frêles et travaillés comme des bijoux géants, ses tours carrées ou rondescoiffées de couronnes héraldiques, ses beffrois, ses clochetons, tout le peuple gothique des sommetsd’église que dominait la flèche aiguë de la cathédrale, surprenante aiguille de bronze, laide,étrange et démesurée, la plus haute qui soit au monde.Mais en face, de l’autre côté du fleuve, s’élevaient rondes et renflées à leur faîte, les mincescheminées d’usine du vaste faubourg de Saint-Sever. Plus nombreuses que leurs frères les clochers, elles dressaient jusque dans la campagne lointaineleurs longues colonnes de briques et soufflaient dans le ciel bleu leur haleine noire de charbon.Et la plus élevée de toutes, aussi haute que la pyramide de Chéops, le second des sommets dus autravail humain, presque l’égale de sa fière commère la flèche de la cathédrale, la grande pompeà feu de la Foudre semblait la reine du peuple travailleur et fumant des usines, comme sa voisineétait la reine de la foule pointue des monuments sacrés. »

Maupassant (Guy de ), Bel Ami, Gallimard, Bibliothèque de la Pléïade, Paris, 1987, p.356.

Explosion d’une grande chaudière à air libre, ayant la formed’une moitié d’œuf, chez le sieur Dumesnil, fabricant de savonà Sotteville-lès-Rouen. Rapport de l’ingénieur en chef del’arrondissement minéralogique de Rouen, 6 septembre 1845.ADSM, 5 M 313.

Arrêté du maire de Rouen concernant l’installationd’appareils fumivores dans les établissementsindustriels, 11 juillet 1899.ADSM, 5 M 313.

Vue générale de la ville de Rouen vers 1880, lithographie.ADSM, 1 Fi 446.

Extrait du nouveau plan de Rouen monumental industriel et commercial, vers 1890.ADSM, 12 Fi 484.

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Principe de fonctionnement d’une machine à vapeurDessin par Sébastien VUE.L’eau contenue dans la chaudière est chauffée parl’intermédiaire d’un foyer afin d’être transformée en vapeur.

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nstallée depuis le XVIe siècle à Elbeuf, l’industrie textileconnaît à partir de 1667 un essor important grâce à la création

par Colbert d’une Manufacture royale qui facilite lacommercialisation de la production. La fabrication du drap assureainsi pendant trois cent ans la fortune de la cité elbeuvienne quireçoit de la Seine les matières premières (laine, ingrédients de lateinture, houille indispensable au fonctionnement desteintures…) nécessaires à son industrie.

Entre 1800 et 1940, Elbeuf compte près de 70 établissements travaillant pour l’industriedrapière. Ces établissements, même s’ils donnent du travail à une grande partie de lapopulation elbeuvienne et ses alentours, ne font pas le bonheur de tous. En effet, lesfumées et les odeurs nauséabondes qui en ressortent, mais aussi les risques d’explosion dusà l’utilisation des machines à vapeur, inquiètent les habitants.

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Elbeuf, une ville drapiere

Les habitants « déclarent être très incommodéspar la grande quantité de fumée qui sort descheminées de l’établissement à usage desécherie. Attendu qu’il est nécessaire de porterà l’industrie toute la production désirable etqu’il convient toutefois d’assurer les garantiesque réclament la conservation des propriétés etla salubrité publique ; sommes d’avis qu’il y alieu d’autoriser définitivement MM.Faucheux et Bastien à établir leur sécherie ».

Vue générale de la ville d’Elbeuf vers 1860, (extrait) ADSM 1 Fi 410.

« Teinture des Gobelins, atelier du séchoir », gravure à l’eau forte dans Recueil des planches sur les sciences, les arts méchaniques et leur explication, Paris, 1768.ADSM, D 182.

Pétition des habitants voisins en faveur de la sécherie des draps de MM.Faucheux et Bastien à Elbeuf, 21 avril 1843.ADSM, 5 M 449.

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a brique d’usage fort ancien dans la construction, connaît auXIXe siècle un formidable essor. La création de bâtiments de

taille importante pour l’industrie, la mise en place d’ouvrages d’artpour les chemins de fer ou la construction de logements en sérieentraînent la production d’énormes quantités de briques. Poursatisfaire à cette demande, de nombreuses briqueteries à l’activitéplus ou moins éphémère voient le jour à proximité des chantiersde construction là où le sous-sol offre des carrières facilementexploitables.

Entre 1820 et 1910, la préfecture de Seine-Inférieure recense près de 166 communesaccueillant ce type d’installation pour la cuisson des briques.

Les fours représentés sur cette gravure dessinée par Ferat sont du type flamand. Cesinstallations temporaires sont construites en plein air à l’endroit même où l’argile estextraite. Dans ce système de cuisson, il n’y a pas de four proprement dit puisque ce sontles briques disposées en lits superposés et séparés par du poussier de charbon qui entiennent lieu. Une cavité aménagée à la base du four permet de disposer des fagots de boisnécessaires à l’allumage de la poudre de charbon répartie dans l’ensemble du four. Lorsqueau bout de 20 à 25 jours, la cuisson est terminée, le monticule de forme carrée estdémonté, les briques sont dès lors prêtes à être utilisées.

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De terre et de feu, la cuisson des briques

Dessin de Morin représentant l’extraction de pavés après leur cuisson dans un four à briques vers 1860.ADSM, 84 Fi Le Havre.

Avis favorable du conseil d’hygiène et de salubrité de l’arrondissement du Havre sur la seconde demandeprésentée par l’entrepreneur Collé pour faire fonctionner trois fours à briques, 25 septembre 1856.

ADSM, 5 M 522.

Pétition d’habitants de Graville-Sainte-Honorinefavorables à l’implantation de la briqueterie Collé, 8 et 9 juillet 1856.ADSM, 5 M 522.

Gravure représentant la cuisson des briques en plein air dans Figuier (L.),Merveilles de l’industrie ou description desprincipales industries modernes, 1876.BHM 834/1.

Avis défavorable du Conseil d’hygiène et de salubrité del’arrondissement du Havre à la demande présentée parl’entrepreneur Collé, extrait du registre des délibérations,31 juillet 1856.ADSM, 5 M 522.

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pparu à la fin du XVIIIe siècle simultanément en France eten Angleterre, la distillation du charbon pour la production

de gaz hydrogène d’éclairage semble rapidement une alternative àl’utilisation des chandelles produites à base de suif, des bougies encire ou de l’huile pour l’éclairage des villes.

Si le gaz d’éclairage rencontre un grand engouement dans les villes, sa fabrication susciteune forte hostilité. L’emploi du charbon de terre pour la fabrication de gaz hydrogènegénère en effet de nombreuses nuisances pour les populations habitant auprès des usines

de production : fumées, vapeurs ammoniacales et odeurs fétides dues aux rejetsd’hydrogène sulfuré. Afin de pallier ces inconvénients, une circulaire du ministre del’Intérieur du 15 décembre 1852 recommande de mettre les usines à gaz en dehors desvilles et de les éloigner le plus possible des habitations, ce qui augmente les coûts dedistribution.

D’autres solutions peuvent également contribuer à la réduction des nuisances : en 1847,est mis au point un nouveau procédé de fabrication du gaz, non plus à partir de la houillemais basé sur la décomposition en vase clos de la vapeur d’eau par du charbon de boisincandescent.

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La production du gaz d eclairage

AElévation et coupe du four à deux cornues pour la production en vase clos de gaz d’hydrogène à partir de l’eau.

ADSM, 5 M 564.

Rapport d’un médecin d’Elbeuf sur les dangers de la production du gaz en ville, 23 décembre 1833.ADSM, 5 M 451.

« … Sous le rapport de salubrité … le gaz forméd’hydrogène et de carbone en excès est considéré par tous leschimistes comme aussi délétère et nuisible à la santé que legaz azote et le gaz hydrogène carboné qui se dégage desmarais en putréfaction »

Demande présentée au préfet de Seine-Inférieure par Théodore Cormier, exploitant l’usine à gaz à Passyprès de Paris, pour installer au Havre, sectiond’Ingouville, une usine pour l’exploitation du gazd’hydrogène provenant de la décomposition de l’eau, 18 avril 1855.ADSM, 5 M 564.

Affiche annonçant l’ouverture, à la mairie du Havre, de l’enquête de Commodo et Incommodo sur le projet

de Théodore Cormier d’établissement d’une usine pour la fabrication du gaz provenant de la décomposition de l’eau,

28 avril 1855. 5 M 564.

Rapport du conseil de salubrité de Paris sur l’absence de danger du gaz d’éclairage produit par la décompositionde l’eau, août 1849.ADSM, 5 M 564.

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ien que connu depuis la plus haute Antiquité en Egypte et en Mésopotamie et utilisé comme mortier, agent d’étanchéité, lubrifiant,voire pour ses vertus médicinales, le pétrole ne connaît de véritable exploitation qu’à partir de 1859 avec la découverte fortuite

d’importants gisements en Pennsylvanie aux Etats-Unis.

Rapidement, on s’aperçoit que cette huile, composée de carbures d’hydrogène, est de composition chimique analogue à celle obtenue par distillation de la houille et que l’on peut après raffinage,en obtenir un excellent combustible pour l’éclairage. En 1863, la société parisienne A. Cohen et Cie décide d’implanter sur les bords de la Seine, à Rouen, une usine pour la distillation de l’huile de pétrole.

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De nouvelles sources d energie Le petrole : distillation, stockage et distribution

Gravure représentant la fabrique de Luciline de MM. Cohen et Cie, située au bord de la Seineavenue du Mont-Riboudet à Rouen, 10 juin 1863.

ADSM 5 M 576.

Rapport du conseil d’hygiène publique et de salubrité surl’implantation de l’usine Cohen et Cie, 1er août 1863.

ADSM, 5 M 576.

Pétition de vingt-trois propriétaires et voisins favorables au développementéconomique qu’apportera la nouvelle distillerie, 1er juillet 1863.ADSM, 5 M 576.

Demande d’autorisation d’installer par la société A. Cohen et Cie, une distillerie pour la rectification des huiles de pétrole à Rouen, 10 juin 1863.ADSM, 5 M 576.

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Le petrole : distillation, stockage et distribution

Plan du projet d’implantation de l’usine de la Luciline à Rouen, 10 juin 1863.5 M 576.

Registre d’enquête ouvert pour l’installation à Rouen de la distillerie Cohen, 26 juin-4 juillet 1863 : les riverainss’inquiètent de la proximité des habitations, des risques de pollution de la Seine, des dangers d’incendie augmentés par la présence de chantiers de bois.ADSM, 5 M 576.

Avis du maire de Rouen favorable à l’installation, d’autant que la principale activité économique de la ville, le textile, est alors en crise, 7 juillet 1863.ADSM, 5 M 576.

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es activités humaines et animalesproduisent des déchets organiques qui

sont évacués dans les égouts et les coursd’eau, produisant ainsi des élémentsd’infection.

Longtemps utilisés par les agriculteurs comme engraisnaturel, ces déchets animaux sont à partir du XIXe siècle,traités par l’industrie, traitements qui répandent des odeursdésagréables dans les rues, inquiétant les habitants qui lessubissent quotidiennement.

L’engrais obtenu à partir des déchets humains et animauxconstitue la « poudrette ». Sa fabrication commence às’établir dans les villes de France à la fin du XIXe siècle.Les vidanges et autres déchets notamment les matièresfécales, sont rassemblés dans des dépotoirs, grands bassinsde fermentation, qui peuvent être à ciel ouvert.

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Rien ne se perd, tout se transforme la valorisation des dechets organiques

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Extraits de journaux : le « Petit Rouennais » du 29 mars 1901 et le « Travailleur normand »

du 31 mars 1901. ADSM, 5 M 515.

Enquête de commodo et incommodo, protestations enregistrées contre le projet d’installation d’une fabrique de poudrette à Grand-Quevilly,

11 avril 1901.ADSM, 5 M 515.

Registre de protestations contre le projet d’établissement d’un dépôt de vidange et d’une fabrique de poudrette, avril et juillet 1901.ADSM, 5 M 515.

Avis favorable du conseil central d’hygiène publique et de salubrité du département de la Seine-Inférieure au projet de M. Lecomte, 4 juin 1901.

ADSM, 5 M 515.

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epuis 1805, le ministre de l’Intérieur demande un projet deréglementation sur les établissements insalubres. Celle-ci

permettrait de définir un périmètre minimal entre l’industrie etles habitations voisines, afin de garantir l’absence de danger pourles voisins ainsi que pour leurs cultures.

Il est alors préconisé la répartition des industries en deux classes, selon leur nocivité, et ilest également nécessaire de demander une autorisation préalable au préfet.

La nécessité de définir une nomenclature de tous les établissements jugés dangereux,incommodes ou insalubres conduit le ministre de l’Intérieur à rédiger un décret, le 15octobre 1810. Deux mises à jour récapitulatives interviennent au cours du XVIe siècle en1866 et 1886.

Les manufactures et ateliers qui répandent une odeur insalubre ou incommode nepeuvent être établis sans autorisation : ils sont répartis en trois classes selon qu’ils doiventêtre éloignés des habitations particulières (1ère classe), admis à proximité des habitations(2ème classe), autorisés auprès des habitations (3ème classe).

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Naissance d une legislationnationale et departementale

Arrêté préfectoral concernant les manufactures de produits chimiques, 10 octobre 1809, affiche.

ADSM, 5 M 316

Fermeture des manufactures qui procèdent à des manipulations la nuit, 2 janvier 1809. minute d’une circulaire préfectorale aux manufacturiers.ADSM, 5 M 316

Décret impérial relatif aux manufactures et ateliers qui répandent une odeurinsalubre ou incommode, au Palais de Fontainebleau le 15 octobre 1810.

ADSM, 5 M 307

Nomenclature des établissements insalubres, dangereux ou incommodes annexée au décret du31 décembre 1866, avec annotations manuscrites inscrivant les modifications.ADSM, 5 M 307

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ès le milieu du siècle, les limites de la réglementationimpériale relative aux établissements dangereux,

incommodes ou insalubres sont patentes : aucune pénalité n’aété prévue en cas d’infraction, aucune surveillance régulière desétablissements autorisés n’a été imposée. La classification serévèle désuète au regard des progrès de l’industrie, aucunedisposition, enfin, n’a été prévue pour assurer l’hygiène et lasanté des ouvriers.

Ce n’est qu’en 1917, alors que la Première guerre mondiale a profondément bouleversé lepaysage industriel du pays, qu’est enfin adoptée une nouvelle législation modernisant laréglementation régissant les établissements dangereux insalubres ou incommodes.

La loi maintient la division des établissements en trois classes mais la nécessité d’uneautorisation législative n’existe plus que pour les établissements des deux premières classes ;ceux de la troisième pourront se former sur simple déclaration faite par les industriels.

Elle organise l’inspection desétablissements classés qui peut-êtreconfiée par le préfet soit à unfonctionnaire de l’Etat, du départementou des communes, soit, si le nombre desétablissements classés est considérable, àun service départemental après avisconforme du conseil général. Les contraventions sont constatées parprocès-verbaux et donnent lieu àplusieurs sortes de pénalités : amendes,obligation d’exécution des travaux,mais aussi suspension ou fermeture del’établissement.

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Un siecle et demi d implantationet de reglementation

Vue de Déville-lès-RouenADSM, 11 Fi 429.

Loi du 19 décembre 1917.ADSM, 5 M 309.

Vœu du Conseil général de la Seine-Maritime transmis au préfet, demandant la création d’une inspection départementale des établissements classés, 1er octobre 1913.ADSM, 5M 311.