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LA VILLE D'ALGER "La protégée de Dieu" Préfacé par “la Lettre” de M. TAYEB ZITOUNI APC ALGER CENTRE

La Ville d'Alger 2004

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Page 1: La Ville d'Alger 2004

LA VILLE D'ALGER

"La protégée de Dieu"

Préfacé par “la Lettre” de M. TAYEB ZITOUNI

APC ALGER CENTRE

Page 2: La Ville d'Alger 2004

Rédaction des textes : Nadia ZAID - Samira AMOKRANE - Kamel TAZAIRTDirecteur Artistique : Djalil ZAID • Conception Graphique : Hamid MAHMOUD BACHA

Photographies : Djamal HADJ AISSA • Secrétariat : Mme Assia BELAIDRéalisation et Impression : CDSP

Copyright d’ouvrage ©2004 CDSP > Copyright textes ©2004 CDSP

_____________________________________________________________Tous droits de traduction, de réédition, d’impression et d’adaptation, sont réservés pour tous pays

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SOMMAIRE

Lettre du président d’APC 7

I - Cadre physique 11•Localisation géographique •Délimitation administrative

•Relief •Cimat •Infrastructures hôtelières •Artisanat

•Art culinaire •Fêtes et festivals

II - Histoire 18•ORIGINE DE L’APPELLATION •ORIGINE DE LA POPULATION

•ALGER, AU TOUT DEBUT •IKOSIM LA PUNIQUE

•ICOSIUM LA ROMAINE •LA PERIODE ISLAMIQUE

•LA FONDATION D’EL DJEZAÏR BENI MEZGHENNA

•LES HAMMADITES •LES ALMORAVIDES •LES ALMOHADES

•LES FRERES IBN GHANIA •LES HAFCIDES •LES THAALEBA

•LA REBELLION D’EL DJEZAÏR •IBN ALLAN ET LES MERINIDES

•LES ABDELOUADIDES A EL DJEZAÏR •LES DEBUTS DE LA COURSE

•CHEÏKH SALEM, GOUVERNEUR D’EL DJEZAÏR

•LE REGNE DES THAALEBA •L’ARRIVEE DES ANDALOUS

•LA PRISE D’EL DJEZAÏR PAR LES ESPAGNOLS

•LES FRERES BARBEROUSSE •ARROUDJ •KHEIR EDDINE BARBEROUSSE

•EL DJEZAÏR, SOUS LES BEYLERBEYS •HASSAN AGHA

•HASSAN IBN DE KHEIR EDDINE •SALAH RAÏS •HASSAN CORSO ET LE PACHA TERKERLI

• LE RETOUR DE HASSAN IBN KHEIR EDDINE •MOHAMED IBN SALAH RAIS

•EULDJ ALI •LES JANISSAIRES •LES KOULOUGLIS ET LES KABYLES EN REVOLTE

•LA TAÏFA DES RAÏS •ALI BITCHIN •LA FIN DE LA REGENCE •LE REGNE DES AGHAS •LA

PERIODE SOMBRE D’EL DJEZAÏR •LE RAÏS HAMIDOU •LA PERIODE COLONIALE

•CONSEQUENCES URBANISTIQUES DE LA PRESENCE FRANCAISE A ALGER

III -Patrimoine culturel 59L’ARCHITECTURE D’ALGER DE L’ANTIQUITE A NOS JOURS

•LA LIBRAIRIE (EX-SIEGE DE LA DEPECHE ALGERIENNE) •LA GRANDE POSTE

•SIEGE DE LA WILAYA D’ALGER •L’AERO-HABITAT •ECOLE DES BEAUX ARTS

•IMMEUBLE LA FAYETTE •LA CATHEDRALE DU SACRE CŒUR •LA CITE DES SCIENCES

•L’HOTEL EL AURASSI •L’UNIVERSITE D’ALGER •LE MUSEE NATIONAL DES

ANTIQUITES ET DES ARTS ISLAMIQUES •LE PALAIS ZIGHOUD YOUCEF

•SIEGE DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

Alger Centre en images 71

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LA VILLE D'ALGER "La protégée de Dieu"

La lettre du président

Al’orée du nouveau millénaire, au moment où les

frontières sont abolies, où la mondialisation n’est

pas un vain mot, où les interconnexions entre pays

sont renforcées, où le multimédia intègre sans complexe le

quotidien de tout un chacun aux quatre coins du monde,

l’Assemblée populaire communale d’Alger Centre refuse de

rester à la traîne au risque de se voir engouffrer au fin fond

du sous-développement et de la régression, car elle veut

s’ouvrir au monde qui l’entoure. C’est dans cette optique que

s’inscrit l’initiative de cet ouvrage qui se veut un outil de communication aussi utile

que plaisant. Car la ville d’Alger Centre n’est pas une ville quelconque, n’est pas

banale. On dit d’elle qu’elle est pudique car elle ne se livre pas d’emblée. Il faut

mériter son bonheur, flâner à travers ses rues, gravir ses escaliers, découvrir ses

atouts, s’offrir le temps d’une pause dans le moindre recoin de son architecture qui

témoigne d’un passé glorieux et de la succession de plusieurs civilisations depuis

l’antiquité jusqu'à nos jours.

Alger Centre est une ville millénaire qui peut se targuer de posséder un riche

patrimoine culturel et artistique, où l’histoire est partout présente. Alger Centre ne

craint pas les défis car la politique de ses gestionnaires s’inscrit à juste cause

dans l’air du temps, l’ère de l’ouverture. Elle veut et désire être reconnue parmi les

grandes métropoles du monde.

Alger Centre, la belle, veut être aimée avec passion.

M.TAYEB ZITOUNIPRESIDENT DE l’APC

D’ALGER CENTRE

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CADRE PHYSIQUE

Blottie au sein de la légendaire baie d’Alger, l’APC d’Alger Centre partage ses frontières administratives avec 4 communes, en l’occurrence Sidi M’hamed au sudet à l’ouest, Belouizdad au sud-est, la Casbah-Oued Koriche au nord et nord-ouest.Sa façade orientale est exposée face à la mer Méditerranée.

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LOCALISATION GÉOGRAPHIQUE

L’Assemblée populaire communale(APC) d’Alger Centre, relevantadministrativement de la wilaya

d’Alger et de la daïra de Sidi M’hamed, occupeun territoire s’étalant sur 3.7 km2 de superficie.Elle abrite une population de 88 909 habitants.Blottie au sein de la légendaire baie d’Alger,l’APC d’Alger Centre partage ses frontièresadmin i s t r a t i ve s avec 4 communes , en l’occurrence Sidi M’hamed au sud et à l’ouest,Belouizdad au sud-est, la Casbah-Oued Koricheau nord et nord-ouest. Sa façade orientale estexposée face à la mer Méditerranée.

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Cadre physiqueI

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DÉLIMITATION ADMINISTRATIVELe parcours de la dél imita t ion de la

commune d’Alger Centre prend naissance à partir des Halles aux poissons (pêcherie) auniveau du quai n° 3 ; on longe la clôture du portpar le prolongement de la rue d’Angkor jusqu'àla passerelle piétonne qui mène à l’ascenseurde l’ETUSA (ex-RSTA) qui remonte jusqu’auboulevard Zighoud Youcef qu’on traverse. Delà, on continue par la rue Ksantini Rachid pourarriver au niveau du rond-point d’où on s’enga-ge par la rue Ali Boumendjel qu’on emprunteen poursuivant par les rues Patrice Lumumba et Debbih Cherif jusqu'à l’avenue TalebMohamed pour remonter celle-ci jusqu'à la rueGoethe qu’on suit jusqu’au chemin (escaliers)Mouillard ; on traverse celui-ci pour aboutir à larue Messaoudi Abdelouahab, de là on remontejusqu'à la rue Gharbi Saïd, prolongée par lechemin Aknouche Moussa, puis on coupe par lechemin Sfindja pour ressortir au niveau de ladouche du boulevard colonel Bougara qu’ondescend jusqu'à la place Addis Abéba, à partirde laquelle on emprunte la rue FranklinRoosevelt. En arrivant au niveau du siège duministère des Travaux publics, on descend lesescaliers situés à proximité de cet édifice pouraboutir à la rue Didouche Mourad qu’on suitjusqu'à la place du Pérou, puis la rampe GherbiSalah pour inclure toutes les installations portuaires jusqu’en face du jardin d’Essai.

RELIEFLa géomorphologie caractéristique de la

commune d’Alger Centre est un ensemble deformes en échine à sommets plats et de collinesaux formes douces dont l’altitude varie duniveau de la mer à plus de 120 m sur les hauteurs d’Alger. La pente, atteignant dans certains quartiers près de 35%, est de directionnord. L’ensemble du territoire de la communerepose essentiellement sur un terrain à base deroches schisteuses avec une présence de granitet de grès. La pédologie de la région est représentée par des sols saturés, souventcaillouteux et de profondeur variable. On y noteégalement la présence de tuf, une roche calcaire.

CLIMATDe type méditerranéen littoral, avec une

période sèche estivale et une autre fraîche etarrosée hivernale, le climat de la communed’Alger Centre est caractérisé par une faibleamplitude thermique et peu de gelées. Les ventsdominants qui soufflent sur l’Algérois sont dedirection ouest, de plus la région est traverséepar des siroccos, des vents chauds et secs venantdu Sud, avec une moyenne de 20 jours/an.

La température moyenne annuelle et lesdeux extrêmes thermiques, les températuresmoyennes maximale du mois le plus chaud etminimale du mois le plus froid sont, respective-ment, de 18. 44 et 0.5°C. Quant aux précipita-tions, elles varient entre 600 et 700 mm depluies/an avec un cumul de 100 mm pour lesmois de novembre, décembre et janvier. Lenombre de jours de pluies oscille entre 80 et 100 jours/an.

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CADRE PHYSIQUE

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INFRASTRUCTURES HÔTELIÈRES

A l’instar des autres grandes villes, AlgerCentre est dotée d’infrastructures à même d’agrémenter le séjour à longue ou courte duréede voyageurs occasionnels ou de touristes.

En effet, la commune enregistre plus d’unetrentaine d’hôtels non classés totalisant près de650 lits. Quant aux hôtels classés (1 ou 2étoiles), on en recense 14 correspondant à unedisponibilité de 737 chambres ou 1 213 lits.

Les hôtels-restaurant classés ne sont pas enreste ; quatre établissements allant de 3 étoilesaux 4 étoiles (hôtel Es-Safir) et 5 étoiles (hôtel Aurassi) offrent un total de 606 chambres,40 appartements et 1 384 lits, avec une capacitétotale de couverts servis évaluée à 783 couverts.Concernant les restaurants classés, où de nombreuses spécialités tant nationales qu’internationales y sont préparées, ils sont aunombre de 21 avec une capacité de couverts de1 311.

ARTISANAT

La commune d’Alger Centre est connuepour la diversité de ses métiers artisanaux quitraduisent la multitude des origines de la population algéroise. Ces métiers octroient unlabel particulier à la ville d’Alger comme ilssont une source de vie pour certains.

Parmi les corps de métier qui alimentent lemarché de l’artisanat, on peut citer le travail desmétaux (dinanderie, la sculpture sur cuivre,bijoux en argent,...), le travail sur bois et papier(bibelots en bois sculpté, cadres, coffrets, petit mobilier,...), le travail de la laine, du tissu,du cui r e t ass imi lés (broder ie , couture traditionnelle, maroquinerie,...) et activitésdiverses (céramique, poterie, peinture,...).

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CADRE PHYSIQUE

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ART CULINAIRE

La cuisine traditionnelle algéroise s’appré-cie plutôt à l’occasion d’une invitation familia-le. Les convives auront le privilège de sentir fré-tiller leurs glandes olfactives et gustatives pourle plaisir du palais. En effet, une kyrielle deplats et de pâtisseries s’offrent à vous.

On peut, entre autres, déguster la chorba,une soupe traditionnelle préparée notamment àl’occasion du mois de ramadhan avec du vermi-celle (m’qatfa) ou des grains de blé concassés(frik, d’chicha) ; l’ham lahlou, plat de viande demouton agrémentée d’amandes, de fruits séchés(abricot, pruneaux, raisins) et de fruits frais(pomme, poire) ; dolma ; couscous ; méchoui,etc. La pâtisserie, quant à elle, se décline à basede semoule, d’amandes, de dattes et de miel. Onpeut en citer quelques-unes : maqrout, samsa,tcharak, qnidlat, griouèche, baqlawa,...

FETES ET FESTIVALSLa commune d’Alger Centre est une ville

d’art et de culture. Afin de créer à travers l’ensemble des communes de la wilaya d’Alger,en général, et de la commune d’Alger Centre enparticulier, une vie culturelle aux dimension etambitions d’une métropole internationale, unprogramme de manifestations à caractères

culturel, artistique, éducatif, sportif et de loisirsa été élaboré. Ce programme s’articule autourde plusieurs volets tels que le théâtre, les expo-sitions, la musique (chaâbi, hawzi, moderne,classique universel, classique andalous,...), lefolklore, le spectacle pour enfants, les confé-rences, les tournois sportifs interquartiers,... ets’adresse aux artistes, aux créateurs, au grandpublic et, bien sûr, à la jeunesse.

L’objectif étant d’ouvrir la ville et ses quartiers aux arts et à la culture et contribuer àstimuler et encourager tous ceux qui œuvrent à l’épanouissement des différentes formes d’expression.

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CADRE PHYSIQUE

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HISTOIRE

Il était une fois les îles... Notre histoire commence ainsi. Une histoire empreinte deréalités, de mythes et légendes. C’est l’histoire d’Alger dont le nom dérived’El Djezaïr, désignant en arabe les îlots rocheux qui baignent, en contrebas, dansla mer Méditerranée.

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II

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ORIGINE DE L’APPELLATION

Il était une fois les îles... Notre histoire commence ainsi. Une histoire empreintede réalités, de mythes et légendes. C’est

l ’ h i s t o i r e d ’Alge r don t l e nom dér ive d’El Djezaïr, désignant en arabe les îlotsrocheux qui baignent, en contrebas, dans la merMéditerranée. Traversant des millénaires d’évé-nements, au gré de colonisations, d’occupa-tions, d’expansions, de constructions, de destructions, de guerres et paix, les origines de l’appellation actuelle remontent à un millierd’années avant l’ère chrétienne, à l’arrivée desPhéniciens qui donnèrent à cette contrée le nomd’Ikosim. A ce propos, trois théories sont avan-cées pour tenter d’interpréter le sens donné àl’appellation Ikosim.

La première est une légende rapportée dansle texte de Solin-Solinus au IIIème siècle avant J.-C. qui voulait que la ville ait été fondée, auxâges fabuleux de la mythologie grecque, parvingt (en grec eikosi) compagnons d’Herculequi abandonnèrent celui-ci en chemin lors deleur traversée de la Méditerranée. Ayant décou-vert cet endroit dont l’emplacement montraitdes avantages certains, ils décidèrent de s’y ins-taller et entamèrent la construction d’unemuraille. Et pour qu’aucun d’eux ne revendiquele privilège de donner son nom, en signe degloire, à ce lieu providentiel, ils décidèrent, dansun souci d’équité, de donner à cet endroit l’ap-pellation formée du nombre de ses fondateurs,en l’occurrence vingt. La deuxième explicationse trouve dans la décomposition du mot«Ikosim» qui se scinde en deux sens :

Histoire

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le premier, «I», désignant «îles» et le second, «kosim», désignant «épines». Et pour cause.Les navigateurs rapportent dans leurs récits quede loin cet ensemble insulaire est constitué demontagnes se dressant telles des épines. Oualors, l’aspect physionomique de la végétationdense qui s’y développe montre une texture épineuse. Ou que, tout simplement, l’aspect épineux de la végétation recouvrant ces mon-tagnes exprime une végétation à base d’épineux sensu stricto. La dernière théorie est celle émisepar le célèbre chroniqueur Hassan El WazzanEzzayati, alias Léon l’Africain, qui cite queIkosim signifie l’«île aux oiseaux impurs» ou l’«île aux mouettes». Mais au milieu du IIème siècle avant J.-C., vers 146, c’était le débutde la colonisation romaine : un tournant décisifdans l’histoire du Maghreb et de laMéditerranée. Cela a été marqué par la chute etla destruction de Carthage. En l’an 42 après J.-C., l’empereur Claude 1er divisa le royaumeen deux provinces impériales : la Maurétanietingitane et la Maurétanie césarienne. Ikosim,dont le nom fut hellénisé en Icosium, passa sousdomination romaine. L’appellation d’Icosiumdemeura jusqu'à l’arrivée d’une nouvelle peu-plade venant de l’Arabie, ce qui constituera ledébut d’une vague déferlante de l’Islam. C’estainsi qu’au XXème siècle, Ziri Ben Menad fondale royaume des Zirides et son fils, le princeBologhine, fut autorisé vers l’an 960 à fondertrois villes dont El Djezaïr-Béni-Mezghenna(désignant en arabe les îlots). Le site choisi pourEl Djezaïr-Béni-Mezghenna correspondaitexactement à l’emplacement de l’antique citéromaine d’Icosium et dont ne subsistaient quedes ruines éparpillées dans un vaste champ etqui faisaient partie du territoire occupé par lestribus sanhadjies. Puis, El Djezaïr devint Alger(pour les Français) lorsque cette appellation futeuropéanisée en devenant, tour à tour, Argel(pour les Espagnols), Algieri (pour les Italiens),Algier (pour les Allemands), Algiers (pour lesAnglais et les Hollandais) et ce, selon ce qui aété relaté par le chroniqueur Stephen d’Estry, en1841, dans ses lettres « Histoire d’Alger, de sonterritoire et de ses habitants, de ses pirateries,de son commerce et de ses guerres, de ses

mœurs et usages, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours » qu’il envoya, pourrendre compte de ses voyages, à Monseigneur

Dupuch, évêque d’Alger.

ORIGINE DE LA POPULATIONLa tentative de remonter aux origines de la

population d’El Djezaïr est basée exclusivementsur une bibliographie aussi exhaustive que pos-sible. Il est un fait que certaines d’entre elles nerecèlent pas les critères de rigueur qu’exige unedémarche scientifique objective. Néanmoins,elles constituent une base de départ dont lesquelques éventuel les «déviat ions» sont rectifiées et corrigées par l’appréciation impar-tiale, juste, objective et logique, en conformitéavec les vérités historiques avérées, du rédac-teur. Jusqu’au VIIème siècle avant J.-C., l’Afriqueseptentrionale, correspondant au Maghreb, évoluait dans un certain isolement par rapportau reste du monde. Ces immenses espaces sertisentre la mer Méditerranée au nord et le Saharaau sud étaient habités par des peuplades queHérodote, historien grec, appelait Libyens etdont, quelques siècles plus tard, l’historienSalluste distinguaient les Libyens à l’Est, et lesGétules au Centre et à l’Ouest. L’origine de cespopulations remonte aux Capsiens qui, venus del’est de l’Afrique, envahirent par déferlantescette partie du continent et ce, au cours du XXème millénaire. Ils constituèrent la souche originelle d’une population maghrébine. Selonune hypothèse unanimement admise par les préhistoriens, les Capsiens seraient les ancêtresdes Berbères. Au fil des siècles, la population aévolué parallèlement aux multiples civilisationset brassages inter-éthniques qui se sont succédédans cette région de l’Afrique du Nord. Lesréférences ayant trait à l’évolution de la popula-tion au cours des différentes époques (phéni-cienne, romaine, berbère) sont inexistantes.Tout au plus en 1150, Edrizzi en parle commed’une «ville très peuplée dont le commerce estflorissant». Ce n’est qu’à partir de 1450 que desobservateurs commençaient à donner des évaluations avec une première estimation de 20 000 habitants.

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HISTOIRE

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En effet, dès la fin du XIème siècle, les richesses qui continuaient à affluer attiraient deplus en plus de gens qui arrivaient aussi bien del’intérieur que de l’extérieur du pays. En 1518,Hassan El Wazzan Ezziati, dit Léon l’Africain,lors de sa visite à El Djezaïr, estima la populationde celle-ci à 4 000 feux, soit l’équivalent de prèsde 30 000 âmes. En 1580, Haëdo, pour sa part,parla de 60 000 habitants. Pour Père Dan, en1634, la population d’El Djezaïr avoisinait les 15 000 «immeubles», correspondant à près de100 000 personnes. En un peu moins d’un siècle,la population d’El Djezaïr a été triplée. Cet affluxconsidérable d’habitants fut déterminé, selonGramaye , par p lus ieurs causes dont les principales s’articulaient autour de :

• L’arrivée des Maures andalous rejetésd’Espagne en 1609. Ils occupèrent près de 300 constructions nouvelles. •L’apport des popu-l a t i o n s p a r s u i t e d e l a d é m o l i t i o n d u quartier Bab Azzoun pour motifs militaires en1573 sur ordre d'Arab Ahmed. •La natalité

dépassant la mortalité. • L’arrivée de nombreuxet fréquents renforts turcs. La population, danssa globalité, est structurée, selon le critère d’origine, en trois classes :

Les baldis (les autochtones), les baraniyas(venus de l’intérieur du pays) et les étrangers(venus de l’extérieur du pays). Les baraniyasétaient originaires, pour la plupart, du M’zab, deLaghouat, de Biskra, de certaines contrées duSahara et, enfin, de la Kabylie. A l’exception desKabyles, les autres formaient des groupes homo-gènes et s’étaient constitués en corporationsayant à leurs têtes des « amines », responsablesdevant le beylik pour toute affaire concernantleurs communautés respectives. Les Mozabitesavaient le monopole de l’exploitation des ham-mams, des boucheries, des moulins et des bou-langeries. Ce privilège commercial dont a étégratifiée la communauté des Béni M’zab s’expli-querait, d’après une tradition locale rapportée parHenri de Grammont, par l’exploit réalisé par lesMozabites qui s’étaient illustrés en 1541 lors dusiège de la ville par Charles Quint.

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HISTOIRE

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En effet, ils s’étaient déguisés en femmes ets’étaient présentés aux soldats chrétiens quicampaient au sommet de la colline. En sedécouvrant aux soldats ils en firent un carnage.

Les Biskris, quant à eux, fournissaient lesportefaix, les porteurs d’eau et les gardiens denuit qui étaient postés aux portes qui fermaientles différents quartiers de la ville haute. LesNoirs affranchis étaient employés aux travauxde maçonnerie et chargés, tous les ans, du blan-chiment des maisons. Quant aux Laghouatis, ilsn’avaient pas de spécialité particulière : ils ser-vaient parfois de manutentionnaires dans lessouks et aidaient les Kabyles à transporter et àépurer l’huile d’olive que ces derniers rame-naient de la montagne. Les Kabyles, outre l’huile d’olive, commerçaient exclusivement lesproduits frais (les fruits et légumes, les poulets,les œufs, les herbages,...). Quant à la populationvenue de l’extérieur du pays, il y avait en pre-mier les Janissaires recrutés dans les provinceslointaines de l’empire et qui grossissaient régu-lièrement la population d’El Djezaïr. Vers la findu XVIème siècle, leur nombre était estimé à 6 000 pour atteindre le chiffre de 22 000 vers1634. En second lieu, il convient de citer lesrenégats, toutes nationalités confondues, qui élirent domicile de leur propre gré dans la capi-tale barbaresque, ainsi que les Maures andalous qui débarquèrent par milliers après avoir été

chassés d’Espagne aux XVIème et XVIIème siècles. Au nombre de 30 000, ces derniers jouèrent

un rôle important dans la colonisation agricoledans les régions où ils furent installés, mais éga-lement dans les villes où ils excellèrent dans lesmétiers de tailleur en couture, de broderie, detissage, de teinture, de cordonnerie et d’archi-tecture. Lors de la famine de 1611-1612, lesMaures tagarins furent expulsés de la ville.Certains trouvèrent refuge sur les hauteurs au-dessus de la Casbah et s’y établirent (cetendroit conserva d’ailleurs l’appellation de «quartier des Tagarins» jusqu'à nos jours). Lesautres, ceux qui restèrent en ville, furent massa-crés par la milice. Par ailleurs, il y avait égale-ment au sein de la population d’El Djezaïr uneimportante communauté juive qui exerçait lesmétiers d’orfèvres, de bijoutiers, de changeursde monnaie, etc.

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La diversité des origines de la populationd’El Djezaïr a donné naissance à une mosaïqueculturelle et ethnique ainsi qu’une richesse multiforme qui confèrent à cette ville le statut decarrefour méditerranéen. La cohabitation decette population cosmopolite a induit une occupation spatiale d’El Djezaïr dans laquelleon distinguait deux parties : la ville haute et laville basse. Vers le haut (ville haute), sont loca-lisés les quartiers résidentiels qui abritaient laclasse moyenne, en l’occurrence les baldis et lesbaraniyas qui progressaient sur les pentes durelief et où on dénombrait près de 50 quartiersséparés les uns des autres par des grillesfermées et gardées par des Biskris.

Chaque quartier (houma) disposait de sa ouses boutique(s) (hawanit) où se vendent les produits de première nécessité. Plus près de lamer, la ville basse, qui occupait une zone plusou moins plane et qui se développait de part etd’autre de l’artère reliant Bab Azzoun à Bab El Oued. C’est dans cette partie de la villequ’étaient concentrés les sièges du pouvoir politique et militaire (Dar el sultan, lescasernes), les centres d’activité économique(souks, les commerces spécialisés, le marchéa u xesclaves,...), les principaux édifices religieux(mosquées, zaouïas) ainsi que les résidences etpalais des hauts dignitaires turcs et raïs.

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ALGER, AU TOUT DEBUT L’histoire d’Alger Centre se fond, tel

une pièce d’un puzzle géant, dans celle de lacapitale Alger et, partant, celle de l’Algérie. Lesorigines remontent à plus de 10 000 ans avant J.-C. avec la civilisation ibéro-maurusienne correspondant à l’Homme de Mechta El Arbi.

Ce fut, ensuite, les civilisations capsiennequi se confond avec l’apparition des protomédi-terranéens (7 000-5 000 av. J.-C.), et néolithique(6 500-2 000 ans av. J.-C.) correspondant à l’ar-rivée des premiers Méditerranéens au Saharaseptentrional vers 3 000 ans av. J.-C.

Les premiers Phéniciens débarquèrent auNord de l’Afrique vers 1 000 ans av. J.-C. Il estclair que cette chronologie primaire est baséesur des «dires» récoltées auprès de chroni-queurs, navigateurs et voyageurs qui se limitè-rent à «narrer» les différentes et multiples odyssées qu’ils vécurent au cours de leurspériples. Les premières preuves matérielles(notamment des pièces de monnaie frappées àl’effigie de rois et dirigeants vivant à leurépoque) recueillies lors de fouilles archéolo-g i q u e sviennent confirmer que les premiers à avoir laissé leurs empreintes de précurseurs dans lafondation d’El Djezaïr furent les Phéniciens.

IKOSIM LA PUNIQUEDe nombreux écrits relatifs à l’extension de

la civilisation des Phéniciens au-delà de leursfrontières originelles situent l’arrivée de ces derniers sur les côtes de l’océan atlantique vers2 000 ans av. J.-C. Il est un fait avéré que les Phéniciens excellaient dans la navigationmarine, car ayant compris que la prospérité, la fructif icat ion de leurs richesses et le développement économique ne pouvaient provenir qu’au-delà des limites marines.

Il fallait donc traverser océans et mers pourassouvir leurs velléités expansionnistes. Maisles distances lointaines entre la ville mère,Phénicie, et les grands centres commerciaux oules grandes villes situées le long de la façademarine du continent poussèrent les Phéniciens àétablir des «emporia » ou comptoirs commer-ciaux. C’est dans ce cadre que, vers 1 100 av. J.-C., fut fondé le premier comptoir commercialdans la ville d’Utique en Afrique antique(Tunisie actuelle). Plus tard, en l’an 814 av. J.-C., les premières incursions des navigateurs

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phéniciens en Méditerranée furent à l’origine dela fondation de Carthage ou Qarthadesh plaçantle Maghreb sur le devant de la scène permettantainsi à cette région d’inscrire les premières pagesde son histoire. Afin d’asseoir sa suprématiecommerciale sur la région et faire fructifier sesrichesses, Carthage entreprit de mettre sur pied lelong des côtes méridionales de la Méditerranée,d’est en ouest, un ensemble d’escales appelées «échelles puniques », permettant aux navigateursde s’abriter et de se ravitailler. Au fur et à mesure que la domination de la «Ville nouvelle» s’imposait sur le pourtour méditerranéen, cesesca les dev in ren t des compto i r s où lesCarthaginois commerçaient, sous forme de troc,avec les populations locales. Mais pour fonder unrelais et mettre en place une « échelle punique »,il fallait que certains critères soient satisfaits. Eneffet, pour qu’un comptoir soit efficace, desconditions naturelles doivent s’y prêter, en l’oc-currence l’existence d’un bon mouillage, soit àl’abri d’une île, soit d’un cap, soit encore d’unestuaire. Le site, qui devint la ville berbère d’El Djezaïr des siècles plus tard, ne manqua pasd’attiser la convoitise des navigateurs carthagi-nois. En effet, il offrait une panoplie d’avantagesgéostratégiques : une vaste plage soustraite àl’action des vents violents d’ouest (le rivage deBab El Oued), une baie bien dégagée (la baie del’Agha), et, au milieu, un important groupe d’îlots peu éloigné de la terre permettant ainsiune position de repli facile à défendre et unexcellent mouillage pour les navires. En 1940, lenom de ce comptoir fut livré. En effet, un lot decent cinquante-huit pièces de monnaie puniqueen plomb et en bronze et remontant au IIème siècleav. J.-C. fut mis au jour dans le quartier de LaMarine. Sur ces pièces figure une inscriptioncomposée de plusieurs signes dévoilant le nomdu compto i r punique Ikos im , s ign i f ian t l’« île aux mouettes ».

Cette inscription accompagne, sur le côté facedes pièces, la première personnif icat ion d’El Djezaïr sous les traits d’une victoire auxailes déployées couronnant Isis. Quelques annéesplus tard, une autre découverte tout aussi importante fut faite non loin de la première. Ils’agissait d’un puits de près de vingt mètres de

profondeur où étaient enfouies des reliques devases campaniens dont les plus anciens dataientdu IIIème siècle av. J.-C., faisant remonter la fondation d’Ikosim au IVème siècle av. J.-C., ettémoignant de l’existence d’échanges commer-ciaux entretenus entre ce comptoir et l’Italie duSud, les colonies grecques du sud de la Gaule, ouencore de la partie orientale de l’Espagne. Ikosimparticipait ainsi à la prospérité de Carthage qui, àl’orée du IVème siècle av. J.-C., régnait sur ungrand empire maritime et terrestre.

Dès le IIIème siècle av. J.-C., naissait un empire romain. Jeune mais redoutable, le nouvelempire nourrissait des velléités d’expansion etvint disputer à Carthage la prépondérance enMéditerranée. La rivalité entre les deux puis-sances donna lieu à un long conflit. Cependant,en 202 av. J.-C., l’armée du général carthaginoisHannibal est vaincue lors de la bataille de Zama(Tunisie actuelle) dans de violents affrontementsqui l’ont opposé à l’alliance scellée entre lesRomains dirigés par Scipion l’Africain, et lacavalerie numide menée par le chef des NumidesMassyles, Massinissa. Durant cette période, lesnombreux comptoirs numides localisés le long dela façade maritime méditerranéenne connurentun niveau de développement des plus prospères.A cet effet, ils contribuèrent de façon notable àpromouvoir et améliorer les relations bilatéraleset commerciales avec le principal siège desRomains, à savoir la grande ville de Rome.Seulement, cette coopération numido-romaineest loin d’être un havre de paix, car les intentionsbelliqueuses des Romains commencèrent àpoindre à l’horizon. En effet, pendant plus d’un siècle, trois guerres puniques se succédèrent et seterminèrent en l’an 146 av. J.-C. par la prise deCarthage et sa destruction par Scipion l’Africain.Ikosim, qui faisait partie des conquêtes du roiberbère Massinissa, se trouvait alors comprisedans le royaume de Numidie qui s’étendait deVaga (Béja en Tunisie) à la Mulucha (actuelleMou louya ) , r i v i è r e f ron t a l i è r e avec l aMaurétanie tingitane (Maroc actuel). La gran-deur du royaume numide a attisé les visées hégé-moniques autour du pouvoir. C’est ainsi que lesconflits et guerres intestines ont amené Jugurtha,en l’an 112 av. J.-C., à recouvrer son trône sur la

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Numidie et ce, après avoir lancé un assaut, en 113 av. J.-C., contre son ennemi juré Aderbalet assiégé Cirta (actuelle Constantine) pendant unan au terme duquel la capitale de Carthage tombaet Aderbal tué. Un vent de panique gagna alorsles Romains qui virent en Jugurtha un hommemenaçant leurs intérêts en Afrique du Nord. C’estainsi que de multiples campagnes de guerrefurent menées contre la Numidie. Rome dûtmobiliser des moyens colossaux qui aboutirent àla victoire finale. En 105 av. J.-C., Jugurtha futarrêté et Cirta devenait la capitale de la nouvelleconfédération romaine. Plus tard, le généralPompée, rival de Jules César dans la lutte pour lepouvoir, est vaincu avec son allié Juba 1er, roi deNumidie. Suite à cette débâcle, ce dernier sedonna la mort. Au terme de cette victoire, en l’an47 av. J.-C., après la réorganisation territoriale del’Afrique du Nord par César, Ikosim intégra lenouveau royaume de Maurétanie qui hérita d’unegrande partie de la Numidie. En l’an 25 av. J.-C.,l’empereur Auguste installa sur le trône duroyaume de Maurétanie, dont la capitale était Iol-Caesarea (l’actuelle Cherchell), le jeune Juba II, fils de Juba 1er. Il faut rappeler que JubaII fut élevé dans la cour de Rome et fut marié àCléopâtre Sélène, fille d’Antoine et de la reineCléopâtre d’Egypte, à la gloire de laquelle sonmari érigeât le «Tombeau de la chrétienne». Enl’an 40, l’assassinat de son fils Ptolémée par

l’empereur Caligula aboutit à l’annexion duroyaume par Rome. Deux ans plus tard, l’empe-reur Claude 1er divisa le royaume en deux provinces impériales : la Maurétanie tingitane etla Maurétanie césarienne. Ikosim, dont le nom futhellénisé en Icosium, passa sous dominationromaine.

ICOSIUM LA ROMAINEEn tant que colonie relevant directement du

droit latin, Icosium était gérée par le même systè-me d’institutions qui prévalait à Rome, mais seshabitants n’avaient pas les mêmes prérogativesauxquelles y avaient droit les citoyens du siègeprincipal à Rome. En effet, ils ne bénéficiaientpas de droits politiques et il leur était interditd’intégrer les fameuses Légions romaines, niaccéder aux fonctions d’Etat. Les premiersmagistrats (Praefectus) et décurions d’Icosiumfurent donc imposés et envoyés directement deRome. Un nommé Flavius fut sans doute l’un despremiers magistrats de la nouvelle colonie, dontil fut par ailleurs le premier pontife. Plus tard, surles ordres de l’empereur Claude les privilèges dudroit latin furent accordés à Tipasa et Vespasien,dont le règne dura de 69 à 79 ap. J.-C., octroya lamême faveur à Icosium. Durant de très longuesannées, la ville d’Icosium connut une existencerelativement calme. Elle préserva sa réputationde ville-phare et de centre commercial importantpar où transitent de nombreux navires venant detoutes les contrées avoisinantes et lointaines etservit, pendant une longue période, de plaquetournante économique dans l’approvisionnementet les échanges commerciaux entre Rome et sescolonies en Afrique. Mais cette embellie économique ainsi que cette relative accalmieconnurent une fin tragique avec les multiplesrévoltes des Berbères et l’arrivée des Vandalessur les côtes de l’Afrique du Nord. Les Numides,après leur défaite face aux Romains, n’abdiquè-rent jamais. Des poches de résistance s’organi-saient çà et là et de continuelles frappes sont por-tées à l’ennemi romain. Plusieurs tentatives derecouvrement de leur souveraineté sont menéespar les Numides dont les assauts militaires désta-bilisaient le régime en place et affaiblissaient lesforces romaines. C’est cette ambiance de tension

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et cette situation belliqueuse qui constituèrent,plus tard, pour les Vandales, un terrain propice à leurs velléités expansionnistes danscette région du continent. Vers 371, le princeFirmus, fils de Nubel, puissant roi d’un petitEtat indépendant berbère, mena une révoltecontre les Romains. Il rassembla sous son éten-dard toute une armée composée de Berbères, dedonatistes dissidents et de déserteurs romains etmarcha con t r e l e s c i t é s cô t i è r e s de l aMaurétanie césarienne. Le prince s’empara deIol-Caesarea et la livra au pillage et au feu. Ilpoursuivit son avancée et lança l’assaut contreIcosium dont il se rendit maître après un courtsiège. Rome, craignant l’extension de la révolteaux autres provinces d’Afrique, chargea le général Théodose de mener la guerre contrele prince berbère et tenter de récupérer les villesprises. Théodose remporta des victoires déci-sives et contraigna son adversaire à capituler.Firmus rendit la ville d’Icosium, libéra les prisonniers et restitua les enseignes militairesainsi que tout le butin qu’il s’était approprié. Legénéral romain remit la ville entre les mains de ses magistrats qui s’employèrent aussitôt àeffacer les traces de la destruction et du chaoscommis par Firmus et ses hommes. Par la suite,ce fut un moment de répit qui permit de nou-veau à la ville d’Icosium de retrouver son calmed’antan et de se réorganiser. Icosium était entou-rée de villas rurales, mais elle comportait, au-dessus d’une ville basse où la population étaitdense, des quartiers résidentiels sur les premières hauteurs. Entourée de vastes plaineset bien irriguées, elle tirait une partie de sesrichesses de l’agriculture et de l’élevage. Elleentretenait des relations commerciales avec certains pays du pourtour méditerranéen, telsl’Espagne, la Gaule du Sud et l’Italie et envoyaitp r o b a b l e m e n t d u b l é e t d e l ’ h u i l e àRome. Icosium était reliée aux principales villesde la Province par deux routes : l’une partaitvers l’ouest en suivant le littoral, traversaitTipasa pour aboutir à la capitale Iol-Caesarea,l’autre la reliait, vers l’est, à la colonie deRusguniae (actuelle Tamentfoust). Vers lesIIIème et IVème siècles, le christianisme fut introduit à Icosium. Au Vème siècle, des écrits

ecclés ias t iques y ci tent t rois évêques : un donatiste et deux catholiques. L’évêquedonatiste Crescens episcopus Icositanus figuraità la conférence de Carthage en mai 411 ;l’évêque catholique Laurentius fut l’un des troislégats de la Maurétanie césarienne au concile deCarthage organisé par l’évêque Aurelius en 419;l’évêque Victor est signalé parmi les quatre cent

soixante-dix prélats de la Maurétanie césariennequi se réunirent à Carthage sur l’ordre du roivandale Genséric, en 484. L’invasion vandalebouleversa la vie d’Icosium, comme celles detoutes les cités romaines d’Afrique. En 429, uneimportante armée, à sa tête le roi vandaleGenséric, déferla sur l’Afrique et envahit laterre numide. Toutes les villes qui se trouvaientsur son passage furent pillées et saccagées. Enquelques mois, une grande partie de l’empireromain d’Afrique passa sous domination vandale.

Les Vandales infligèrent une lourde défaiteaux Romains. En 431, un premier traité fut paraphé entre les deux parties. Mais cela ne futqu’une ruse de la part des Vandales, car, pources derniers, ce traité représenta un moment de répit, un sursis, pour leur permettre de rassembler leurs forces et de mieux se réorgani-

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ser et affiner leur stratégied’attaque.D’ailleurs, cette tactique a porté ses fruits

puisqu’en 439, Carthage est passée sous domina-tion vandale. Avec cette dernière prise, le dernierrempart de l’occupation fut franchi permettantaux vandales d’asseoir leur suprématie enAfrique du Nord. En 442, un autre traité, signéentre Genséric et le général romain Théodose,confirma le partage des provinces romainesd’Afrique entre les deux puissances. Rome secontenta des Maurétanies césarienne et sitifienne,d’une partie de la Numidie avec Cirta et laTripolitaine. Quant à Genséric, il reçut laProconsulaire avec Carthage, la Byzacène et unepartie de la Numidie avec Hippone (l’actuelleAnnaba). Icosium continua donc d’exister sous la souveraineté de Rome pendant les cent ans que dura la domination vandale. Sous le règnevandale, c’était le début d’une nouvelle ère pourIcosium et les autres villes passées sous la régence vandale. Nouvelle mais néanmoinsfuneste, ce fut même une période des plus destructrices. C’était le commencement de la fin.Avec l’arrivée des Vandales aucun changementpositif n’a été apporté à leurs nouvelles colonies.

En fait, ils ont maintenu en place tous les systèmes de gouvernance et économiques, à l’exception du mode de gestion immobilière quise traduisit notamment par l’expropriation violente des terres fertiles et cultivables. Lesactes de répression étaient le lot quotidien deshabitants. L’anarchie, la décadence et la dégrada-tion des conditions de vie n’augurent rien de bon.La création de sites militaires était le jeu prisé desVandales, ce fut, d’ailleurs, le seul domaine danslequel ils excellaient. Pour mettre fin à la domi-nation vandale en Afrique, l’empereur Justinienconfia au général byzantin Bélisaire le comman-dement d’un corps expéditionnaire. En 533,Bélisaire s’empara de Carthage et infligea unecinglante défaite au roi Gelimer, l’arrière-petit-fils de Genséric. L’empereur Justinien entrepritalors la réorganisation de l’Afrique. Mais,quelques années plus tard, l’anarchie s’installadans le pays. Les chefs ne contrôlaient plus l’armée romaine et les Maures ravageaient impunément les provinces. Livrée aux attaquesdes tribus maures et berbères, Icosium sombra

dans le chaos.

LA PERIODE ISLAMIQUELa vague déferlante de l’Islam, en provenan-

ce de l’Arabie, marqua la fin d’une ère et annon-ça les prémices d’une nouvelle page de l’histoireau Maghreb en la débarrassant du joug colonia-liste. Avec l’avènement de cette nouvelle reli-gion, la langue arabe fut introduite et facilementassimilée car les autochtones maîtrisaient déjàl’usage de la langue punique, parallèlement aulatin et au berbère. Les premières incursions desMusulmans eurent lieu au début du VIIème siècle,mais c’est avec Okba Ibn Nafa que commença lavéritable conquête de cette région. En 670, cedernier fonda, en plein cœur de la Byzacène(actuelle Tunisie), la ville de Qaïrouane dont il fitla base de l’expansion de l’Islam au Maghreb.Entre 683 et 702, les rés is tances contre l’«islamisation» de cette portion de l’Afrique duNord furent multiples. Les Byzantins furentacculés, battus et rejetés à la mer et vers 702, le

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dernier foyer de résistance berbère, entretenupar Koceila et La Kahina, fut étouffé.

La fin du VIIIème siècle fut caractérisée pardes troubles qui ont conduit à l’instabilité de larégion. En effet, un vaste mouvement insurrec-tionnel conduit par des Kharrijites embrasa toutl e pays . Ce n’es t que vers le débu t du IXème siècle que le Maghreb retrouva la paix et laprospérité. Les premiers royaumes berbèresislamisés virent alors le jour.

A cette même époque, deux grandes confé-dérations de tribus berbères islamisées, voisineset rivales, les Sanhadja et les Zenata, cohabi-taient sur un immense territoire qui englobait leMaghreb central, une partie de l’Ifriqiya et lesud du Maghreb extrême. Les deux groupes setrouvèrent, très tôt, mêlés à la rivalité qui oppo-sait, à quelques milliers de kilomètres, deuxgrandes dynasties, les Omeyyades de Courdoueet les Fatimides de Qaïrouane. Parce queproches du royaume fatimide et, probablement,recherchant un allié puissant, les Telkata, tribusanhadjienne, se tournèrent vers Qaïrouane, tan-dis que les Zenata se rallièrent aux Omeyyades.

LA FONDATION D’EL DJEZAIR BENI MEZGHENNA

El Djezaïr entre dans l’histoire bien aprèsl’expansion de l’Islam et l’avènement au pouvoir des Fatimides venus d’Orient au débutdu Xème siècle. C’est alors que les califes fati-mides ayant fondé leur première capitale Ikjan(près de Aïn Kebira, dans la wilaya de Sétif),ont conquis une grande partie du Maghreb, maisessentiellement pour en faire un point de départde leur expédition pour la conquête de l’Egypte.A leur départ pour l’Orient, les Fatimides laissent le soin de gouverner leur empired’Afrique du Nord à Bologhine «Abulfoutouh »,le conquérant, surnommé aussi «Seif el dewla»,le glaive de l’Etat. Ainsi naquit en 972 la dynas-tie ziride qui régna près de deux siècles. En fait,les Zirides avaient commencé à s’imposer bienavant cette date lorsque le père de Bologhine,Ziri Ibn Mened, chef des Telkata, engagea lalutte contre Abu Yazid, l’homme à l’âne, poursauver le calife fatimide. Il donna alors une

capitale à son royaume en faisant construire,vers 935, la ville d’Achir localisée au niveau duDjebel El Kaf Lakhdhar au sud-est de la ville deBerrouaghia et envoya, plus tard, son fils et suc-cesseur fonder, selon un axe stratégique, troisvilles : l’une sur le bord de la mer appeléeDjezaïr Beni Mezghenna, l’autre sur la riveorientale du Chelif ayant pour appellationMiliana, la troisième porte le nom de Médéa,trois grandes vil les à la tête desquellesBologhine fut investi par son père pour les gouverner.

Pour fonder El Djezaïr Beni Mezghenna,Bologhine jeta son dévolu sur un site qui correspondait exactement à l’emplacement del’antique cité romaine d’Icosium et dont ne sub-sistaient que des ruines éparpillées çà et là dansun vaste champ. Il faut préciser que la dénomi-nation Beni Mezghenna fait référence, selon IbnKhaldoun, à une tribu des Sanhadjas au seindesquels vivaient plusieurs peuplades ayant lesmêmes origines et dont sont issus les BeniMezghenna. Le territoire de ces derniers couvri-rait toute la zone du Sahel d’El Djezaïr ainsiqu’une par t i e des p la ines de Met teg ia

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(la Mitidja) dont les dimensions étaient de prèsde 45 miles de longueur et 36 miles de largeur.

Le choix de ce site n’est pas fortuit. En effet,il est reconnu que la particularité des construc-teurs des villes berbères consistait surtout, pourse libérer du souci de la recherche de l’eau, dechoisir un emplacement sur une montagne ou unecolline d’où jaillissait une source qui devait êtreutilisée pour l’alimentation en eau de la ville.Cette source alimentait cette dernière par gravitéet la traversant de part en part. Ce système d’ali-mentation en eau avait l’avantage d’alimenter laville sans trop de difficultés, hormis celle decanaliser l’eau et de mettre cette source à l’abrid’une éventuelle attaque. D’ailleurs, si l’on com-pare la colline sur laquelle s’édifia la ville d’ElDjezaïr à la colline d’Achir, ville fondée par lepère de Bologhine quelques années auparavant,on constate que les profils sont presque iden-tiques. Pour El Djezaïr beni Mezghenna, la sour-ce choisie est celle de Aïn N’Zaouza qui fut utili-sée jusqu’à 1830 par les Turcs. Le plus souventégalement, d’autres sources se trouvaient à l’in-térieur de l’enceinte. Cela permettait auxBerbères, souvent attaqués, d’assurer l’alimenta-tion en eau de leur cité et d’éviter d’aller jusqu'àla rivière située en contrebas de la colline. Cettepremière condition de disponibilité d’eau étantsatisfaite, l’eau y coulait à profusion.

La seconde condition qui avait permis àBologhine de choisir ce site se rapportait à la dis-ponibilité sur place d’une importante quantité dematériaux de construction (pierres, colonnes,dalles,...) provenant des ruines de l’ancienneIcosium et qui ont servi à l’édification de la villeet ses remparts. De plus, ses murs d’enceinteantiques, même s’il se sont partiellement effon-drés, offraient une excellente protection contreles agressions externes après avoir été renforcéset reconstruits à certains endroits. En outre, lesrues déjà existantes à l’époque romaine et quin’ont présenté, au fil des siècles, que de légèresdéformations ont nécessité juste quelques aména-gements. Ainsi naquit en l’an 960 la ville berbè-re d’El Djezaïr Beni Mezghenna.

Durant les siècles qu’a duré le règne desZirides, la ville d’El Djezaïr Beni Mezghennaconnut une période de prospérité, de développe-

ment et de stabilité des plus enviables. Al’origine, la ville berbère ne devait s’étendre qu’àl’emplacement de la cité romaine, la partie hautedu djebel comprise entre les remparts devant ser-vir à des jardins permettant d’alimenter, en partiedu moins, la population qui devait pouvoir vivreen vase clos en cas d’attaques venant de l’arrièrepays. Mais l’expansion rapide de la population,des constructions et la prolifération de com-merces et rues commerçantes de toutes naturesétirèrent la ville d’El Djezaïr en dehors deslimites de l’ancienne Icosium. Le chroniqueurbaghdadi, Ibn Hawqal, qui sillonna au Xème sièclel’Afrique du Nord dans tous les sens, décrivita i n s iEl Djezaïr Beni Mezghenna : « La ville est bâtiesur un golfe et entourée de murailles. Elle renferme un grand nombre de bazars et quelquessources près de la mer. C’est à ces sources limpides que les habitants vont puiser l’eauqu’ils boivent. Dans les dépendances de cetteville se trouvent des campagnes très étendues etdes montagnes habitées par plusieurs tribus berbères. Leurs richesses sont en grande partiedes troupeaux de bœufs et de moutons. Le miel, le beurre et les figues sont en telle abondancequ’on les exporte.» En effet, la zone du Sahel seprêtait aux cultures les plus riches et les plusvariées. Les Beni Mezghenna y cultivaient le blé,l’orge et de nombreuses plantes maraîchères. Lesterres les moins arables étaient couvertes defiguiers et d’oliviers.

LES HAMMADITESA sa mort, Bologhine Ibn Ziri laissa derrière

lui deux successeurs, Badis et Hammad. Pour desraisons de leadership, une lutte intestine opposaces deux derniers qui finirent par rompre leursrelations. Lassé de cette situation conflictuellequi envenima les relations des deux côtés,Hammad se résolut à sonner le glas de ce duel etdéclara son indépendance et sous d’autres cieuxil fonda une nouvelle ville fortifiée, la Qalâa desBeni Hammad, devenant ainsi la capitale de lanouvelle dynastie des Hammadites en 1007. Maisl’accalmie entre les deux personnages ne revenaitpas pour autant. Au contraire, la tension alla crescendo entre les deux capitales et la guerre

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devint inéluctable. Après de nombreusesbatailles, stériles, car il n’y eut ni vainqueur nivaincu, Hammad et Badis finirent par signer unpacte de la paix qui scella la fin des hostilités.Pour se libérer du joug fatimide, El Moezz IbnBadis, fils et successeur de Badis, renia, vers1045, la souveraineté des Fatimides sur cetterégion. Suite à cet acte considéré comme uneoffense, le calife décida de châtier cette initiative d’«indépendance» en chargeant les tribus arabes des Beni Hillal et Beni Soleim delancer des assauts contre le Maghreb central.Leurs attaques furent meurtrières. Le pays futmis à feu et à sang. Fuyant devant l’ennemi, lesBerbères abandonnèrent terres et habitations etse réfugièrent dans les zones montagneuses.

Abdiquant face à l’envahisseur, le princeziride El Moezz se réfugia, en 1057, à Mahdiya,l’ancienne capitale fatimide. Au même moment,le Hammadite El Nacer remettait de l’ordredans son royaume du Maghreb central et confiala gouvernance des principales villes à desmembres de sa fami l l e . Quan t au so r t d’El Djezaïr, il fut mis entre les mains de son

fils Abdallah. La ville berbère vivait alors uneère de prospérité : «son port bien abrité, écrivitle géographe El Bekri, est très fréquenté par lesmarins de l’Ifriqiya, d’Espagne et d’autrespays, et duquel on va en Espagne en six jours ».

LES ALMORAVIDESPendant que les tribus arabes des Beni Hillal

et des Beni Soleim livraient le pays à la des-truction et l’anarchie, les fondations de ce quiallait devenir un grand empire commençaient àvoir le jour au sud du Maghreb extrême. Eneffet, l’imam Abdallah Ibn Yassin, dont la souche originelle était formée par les Berbèresnomades Lemtouna, fonda la dynastie desAlmoravides (El Mourabetine). En peu det e m p s , s o u s l a h o u l e t t e d e l e u r c h e f Youssef Ibn Tachefin, les Almoravides conqui-rent tout le Maghreb extrême. Leur dévolu futporté ensuite sur le Maghreb central. AprèsTlemcen, Oran et Ténès, El Djezaïr tomba entreleurs mains en 1082. Sous le règne desAlmoravides, la ville d’El Djezaïr connut une

nouvelle période de prospérité et devint certainement une vil le et un port d’une importance capitale.

A la fin du XIème siècle, Youssef IbnTachefin y fit construire la première grandemosquée de rite malékite au Maghreb central,connue aujourd’hui sous le nom de Djamâa ElKébir et dont on dit qu’il n’y a de semblablequ’à Tlemcen et Nedroma.

LES ALMOHADESLa réaction des tribus berbères sédentaires

contre la puissance des Almoravides, tribusnomades du Saha ra , ne t a rda pas à se manifester. Elle prit naissance au sein d’unetribu du Haut Atlas marocain, les Masmouda,puissante branche des Sanhadjas. La tête pensante de ce mouvement de résistance fut unhabile réformateur en la personne de l’imam IbnToumert. Se déclarant chef spirituel de la com-munauté qu’il venait de fonder, les Almohades(El Mouwahidine), l’imam et ses fidèles formèrent le noyau d’une armée fanatisée.Ibn Toumert confia le commandement des troupes almohades à son disciple et ami Abdel Moumène et le désigna comme son successeur. En 1128 , après la mor t du Mahdi, Abdel Moumène, devenu calife, entreprit la conquête du Maghreb extrême puisdu Maghreb central. Après avoir traverséTlemcen, Abdel Moumène arriva en 1152devant les portes d’El Djezaïr qui était gouvernée par le prince hammadite El Kaïd, fils de Abdel Aziz Ibn Badis. A cette époque, encette ville se trouvait El Hassan, le dernier prince ziride, qui s’y était réfugié après la prisede sa capitale par les Siciliens en 1148. La villeassiégée ne put résister longtemps à la formi-dable armée almohade. Toute la garnison almo-ravide fut massacrée, seul le gouverneur ElKaïd et son hôte El Hassan furent épargnés etlaissés en liberté.

Sous les Almohades, El Djezaïr fut une villeprospère. Elle possédait de nombreux marchéset son commerce avec les villes du Maghrebétait très actif ; elle ouvrit même son port auxnavires européens. Au XIIème siècle, El Idrissiécrivait entre autres que «les tribus qui occupent

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ce pays sont puissantes et belliqueuses». A lamort de Abdel Moumène, le pouvoir passa entreles mains de son fils Abou Yacoub Youssef, surnommé plus tard El Mansour. En 1163, ce dernier rappela le prince ziride El Hassan Ibn Alià El Djezaïr. Il lui confia la charge de conseillerdu gouvernement almohade qui s’y trouvait enplace.

LES FRERES IBN GHANIAVers 1185, venus des îles baléares, les frères

Ibn Ghania, descendants d’une princesse almoravide, débarquèrent au Maghreb central etdéfièrent la puissance almohade. Cette nouvelleincursion signa le retour des Almoravides à El Djezaïr. Béjaïa fut la première ville à êtrereconquise en infligeant une lourde défaite auxAlmohades. Fort ambitieux, Ali Ibn Ghania, à latête d’une forte armée, marcha ensuite sur El Djezaïr qui fut attaquée par mer et par terre.La résistance fut de courte durée. Les portes d’El Djezaïr ne purent contenir les multiplesassauts de l’armée d’Ibn Ghania, elles cédèrentsans difficulté. Toutes les personnes faisant partiedu gouvernement ainsi que les hommes de garni-son almohades qui contrôlaient El Djezaïr furentmassacrés et la ville fut livrée au pillage. Le prince almoravide y installa, en qualité degouverneur, l’un de ses fidèles compagnons, enl’occurrence Yahia Ibn Akhi Talha. Face à cetteagression et violation de ses possessions duMaghreb, le sultan almohade El Mansour nommal’émir Abou Zeïd, petit-fils de Abdel Moumène,gouverneur du Maghreb central et lui intima l’ordre d’aller punir les frères Ibn Ghania. L’émir Abou Zeïd prit la tête d’une partie de l’ar-mée et se dirigea vers l’est, tandis que la flottealmohade appareillait pour la même destination.

La ville d’El Djezaïr, assaillie de toutes parts,se livra sans coup férir, comme le rapporte Ibn Khaldoun qui cite : «Les habitants d’El Djezaïr, avertis de l’approche des secours,tant par la mer que par la terre, se soulevèrentcontre Yahia Ibn Akhi Talha et le livrèrent, lui etses compagnons, au caïd Abou Zeïd.» Abou Zeïdrecouvra la souveraineté d’El Mansour à El Djezaïr et y avait mis en place un gouverne-ment almohade. Mû par cette victoire glorieuse,

il poursuivit sa marche contre les Ibn Ghanialibérant Béjaïa et Constantine. Fuyant AbouZeïd, les deux frères se réfugièrent à Tripoli.

Ne s’avouant pas vaincu, le prince almoravi-de revint à la charge, en 1225, au Maghreb central. Ayant perdu son lustre d’antan, il ne subsiste de la puissance almohade qu’un empireen déclin et en pleine décadence. C’est dans cesconditions qu’Ibn Ghania s’empara, de nouveau,d’El Djezaïr qui fut livrée au pillage. Il se tournaensuite contre les Maghraoua qu’il écrasa dans les plaines de la Mitidja, il tua leur émirMendil Ibn Abderrahmane et mit son cadavre encroix contre les murs d’El Djezaïr. Ibn Ghaniacontinua à semer la terreur dans cette partie duMaghreb jusqu'à sa mort en 1233.

LES HAFCIDESEn 1228, Abou Zakaria, fondateur de la

dynastie hafcide, monta sur le trône de Tunis.Quelque temps après, il réfuta la souveraineté desAlmohades et décida de leur disputer leurs possessions du Maghreb central. Il s’assura l’alliance de la puissante tribu nomade Beni Soleim. Il s’empara de l’ancienne capitalehammadite, Béjaïa, et poursuivit sa route en longeant le littoral. Arrivé devant El Djezaïr, iltrouva une ville ruinée par les razzias et lesdéprédations de l’armée d’Ibn Ghania. Ses habi-tants incapables de se défendre lui ouvrirent lesportes et se mirent sous sa protection. Une partiede la tribu Beni Yezid, branche de Beni Soleim,qui furent aux côtés du prince hafcide dans sonexpédition, fut autorisée à s’installer dans lesriches plaines du Sahel d’El Djezaïr. Les plainesde la Mitidja étaient alors occupées par une autretribu arabe de la famille des Beni Hillal, lesThaaleba.

LES THAALEBA

Les Thaaleba, branche de la puissante tribuMakil, faisaient partie des nomades arabes BeniHillal qui envahirent le Maghreb au milieu duXIème siècle. D’après l’historien Ibn Khaldoun, «les Thaaleba forment une tribu sœur des ObeïdAllah et descendent de Thalek Ibn Ali Ibn Sakil ...Etablis d’abord sur la limite du Tell, dans lequel

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ils avaient pénétré en passant par le Ghezoul,les Thaaleba s’avancèrent graduellement jus-qu’aux plaines de Médéa et se fixèrent dans lamontagne

du Titteri, appelée aussi montagned’Achir parce qu’elle renfermait la célèbre villede ce nom ». Plus tard, les Beni Toudjin entrè-rent en guerre avec les Thaaleba et envahirentl e u rterritoire, les contraignant à se replier dans lesplaines de la Mitidja où ils s’établirent sous laprotection des Beni Melikich, tribu sanhadjienne.«Quand les Beni Merin (les Mérénides), ajouteIbn Khaldoun, se furent emparés du Maghrebcentral et qu’ils eurent mis fin à la puissancedes Melikich, les Thaaleba demeurèrent maîtres

de la Mitidja.»

LA REBELLION D’EL DJEZAÏRA sa mort, en 1249, le souverain hafcide

laissa à son fils El Mostancir un puissant empire. Sous l’autorité du nouveau calife, leroyaume connut ses années fastes. Mais laseconde moitié du règne d’El Mostancir futnoircie par les révoltes de nombreuses tribusarabes. Ayant profité de cette ambiance deconfusion, quelques villes du Maghreb centraltentèrent de se libérer de la souveraineté hafcide, comme ce fut le cas de Miliana, en1261, mais dont la rébellion fut étouffée et sesauteurs sévèrement punis. Vers 1265, la popula-tion d’El Djezaïr se souleva contre le pouvoirhafcide et déclara son indépendance. «Les habitants d’El Djezaïr, rapporte Ibn Khaldoun,s’étant aperçus que l’autorité du sultan hafcideavait cessé de se faire sentir chez les Zenata et les autres peuples du Maghreb central,secouèrent le joug de l’Empire afin d’établirleur indépendance». Ils installèrent leur gouvernement, où apparurent, probablementpour la première fois, des cheïkhs de la tribuarabe des Thaaleba, et purent ainsi jouir de leurliberté pendant près de cinq ans au terme des-quels le calife El Mostancir envoya contre euxune puissante armée qui ne put forcer lesdéfenses de la ville. Deux ans plus tard, le géné-ral hafcide Abou Hillal Eid, gouverneur deBéjaïa, se porta à nouveau contre El Djezaïr. La

ville fut assiégée de tous les côtés, mais lesa s s a u t srépétés de l’armée hafcide furent vains face à larésistance héroïque des Algérois. Le généraldécida alors de lever le siège ; il reprit le cheminde sa capitale et mourut en cours de route en1274. Le calife El Mostancir, excédé par cetterésistance, décida de mobiliser l’armée et lamarine hafcides et de les envoyer contre la villerebelle. Le général El Haceb Ibn Yassin prit lecommandement des forces terrestres et, en pas-sant par Béjaïa, s’adjoignit les contingents hafcides stationnés dans cette ville. Dans lemême temps, la flotte hafcide appareillait pour El Djezaïr. D’après Ibn Khaldoun, « la ville setrouva bientôt étroitement bloquée par terre etpar mer ; puis, ayant été emportée d’assaut, ellevit massacrer ses habitants, piller ses maisons,déshonorer ses mères de familles et violer sesvierges. Les cheïkhs (qui formaient le gouverne-ment) d’El Djezaïr furent chargés de chaînes etconduits à la citadelle de Tunis, où ils restèrentprisonniers jusqu'à la mort du sultan. El Ouathec monta alors sur le trône et ordonnaleur mise en liberté.» En 1275, les vainqueursinstallèrent à El Djezaïr un gouvernement ayantà sa tête le cheïkh Ibn Akmazir, et laissèrent àses côtés une garnison de soldats almohades.

IBN ALLAN ET LES MERINIDESAprès une période de stabilité, synonyme de

puissance et d’accalmie, sonna l’heure de déclinet l’empire hafcide se désagrégea. Et pourcause, les rivalités intestines entre ses succes-seurs minèrent l’empire de l’intérieur. Danscette course effrénée pour le leadership, ce futl’émir Abou Acida qui, en usurpateur, monta surle trône de Tunis et ce, en 1295. Au mêmemoment, la ville d’El Djezaïr perdit son gouver-neur, le cheïkh Ibn Akmazir, qui gérait les affaires de cette ville au nom de l’émir deBéjaïa. A sa mort, le cheïkh ne laissa pas de suc-cesseur, ce qui fut une aubaine pour Ibn Allan,l’un des membres les plus influents du conseildes cheïkhs et gendre de l’ancien gouverneur,qui accapara le pouvoir et fit exécuter, le soirmême du décès de son maître, toutes les per-sonnes susceptibles de contrecarrer ses desseins

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hégémoniques. Le lendemain, il annonça auxhabitants d’El Djezaïr son intention de renier lasouveraineté hafcide et proclama l’indépendancede la ville. Mais cette indépendance ne dura pasl o n g t e m p s , c a r q u e l q u e t e m p s a p r è s ,les Mérénides arrivèrent au Maghreb central.Leurs premières conquêtes furent les villes deTénès et Miliana, avant de poursuivre leur avan-cée sur la plaine de la Mitidja où les Melikich etles Thaaleba firent allégeance au nouveau maître.Forts de leur armée et de leurs nouveaux alliés,les Mérénides marchèrent sur El Djezaïr et l’as-siégèrent. Acculé et voyant que sa ville allait certainement tomber entre les mains desMérénides, Ibn Allan s’empressa d’engager desnégociations avec le souverain mérénide : enéchange de sa soumission il demanda de garderle poste de gouverneur. Ce qui lui eut été accor-dé. Sitôt la menace mérénide écartée, Ibn Allanse retrouva confronté à un autre danger qui souf-fla de l’est. En effet, pour rétablir la souverainetédes Hafcides dans cette ville, l’émir de Béjaïa,Abou El Baka Khaled, mena, en 1307, une expé-dition punitive contre Ibn Allan. Ce dernier,ayant eu vent de l’imminence d’une attaque hafcide, prit toutes les dispositions pour assurerla défense de sa ville. Selon Ibn Khaldoun, « unefoule de cavaliers et de fantassins, les uns venusde pays éloignés, les autres, fournis par la tribudes Thaaleba, arabes de la Mitidja, accourutsous ses drapeaux. Ayant bientôt rassemblé ungrand nombre d’archers et d’autres troupes, il setrouva assez fort pour repousser les armées, qui,à diverses époques, partaient de Béjaïa pourfaire le siège de la ville». Tous les assauts lancéspar l’armée d’El Baka contre la Citadelle furentvoués à l’échec. Face à cette résistance inébran-lable, l’émir de Béjaïa abdiqua et dut se résoudreà lever le siège et regagner sa capitale. Cette vic toire redora le blason du gouverneur d’El Djezaïr Ibn Allan dont le prestige s’accrutconsidérablement. Les habitants de la ville ainsique les chefs des tribus alliées lui renouvelèrentleur confiance.

LES ABDELOUADIDES A EL DJEZAÏRUne nouvelle fois, la ville d’El Djezaïr

changea de destinée avec l’arrivée du Sultan deTlemcen. En 1313, Ibn Allan fut vaincu et sa villeoccupée et annexée à l’empire d’Abou Hammou.Le gouverneur de la ville conquise fut envoyé àTlemcen où il fut interné jusqu'à sa mort.

En effet, deux années auparavant, vers 1311,le sultan Abdelouadide Moussa Ibn Othman, ditAbou Hammou, débarqua au Maghreb centralavec, dans sa sacoche, des visées expansion-nistes. Il entama la conquête de cette région enc o m m e n ç a n t p a r m e t t r e s o u s s a c o u p eles Maghraoua et les Toudjine pour, ensuite, fairemain basse sur les plaines de la Mitidja où il ins-talla son bivouac. Cette station fut le point dedépart de sa marche sur El Djezaïr. Pour accomplir cette tâche, le sultan y envoya sonlieutenant, l’affranchi Meçameh, à la tête de l’armée abdelouadide à laquelle furent intégrésd’importants contingents de Maghraoua et deToudjine. En riposte, Ibn Allan s’enferma dans saville et soutint un long siège au terme duquel ilépuisa toutes ses vivres le contraignant alors àcapituler sous des conditions. La Citadelle futconquise. Succédant à Abou Hammou, l’émirAbou Tachefin entreprit un vaste chantier d’embellissement confirmant la réputation nonusurpée de la ville d’El Djezaïr qui était considérée comme l’une des villes les plusimportantes que comptait le royaume. Parmi lesoeuvres qu’il réalisa, la rénovation de la GrandeMosquée qu’il dota d’un minaret. Pour preuve, laplaque de marbre qu’on peut trouver à l’intérieurde ce monument qui porte l’inscription : «Leminaret a été bâti en 1324 par Abou Tachefin, roide Tlemcen». En 1370, Abou Hammou II,deuxième du nom, rétablit pour la troisième foisla souveraineté abdelouadide sur tout le Maghrebcentral. C’est l’un de ses fils qu’il désigna pourgouverner, sous la tutelle de Salem, chef desThaaleba, la ville d’El Djezaïr qui renoua alorsavec le commerce européen et recouvra son statut de ville stratégique dans cette région de laMéditerranée.

LES DEBUTS DE LA COURSEL’ u s a g e d e l a c o u r s e m a r i t i m e e n

Méditerranée fut probablement établi vers 1360 à

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partir de ports du Maghreb central de l’empirehafcide. Le port de Béjaïa fut le berceau decette pratique maritime. Selon Ibn Khaldoun,u ncertain nombre de corsaires qui s’organisaientautour d’une association entreprennent la construction d’un navire à bord duquel un équipage constitué d’hommes de la mer à la bravoure avérée est choisi. Ces guerriers se lancent à l’assaut des côtes et îles occupées parles Francs. Les navires des infidèles constituentégalement une de leurs cibles préférées. Lorsdes accostages et des abordages qui se déroulentà l’improviste, les corsaires s’emparent de tout.De retour chez eux, ces derniers reviennentchargés de leur butin constitué d’hommes captifs, de navires et de biens. Quant à El Djezaïr, son entrée dans la course maritimefut entamée dès le XIIIème siècle. Son repaireoffrait toutes les conditions de retrait des navires musulmans. En effet, El Bekri rapportaà ce propos que «le port est bien abrité ; l’îleporte le nom de Stofla et le mouillage situé entreelle et le continent est très bon et offre un bonhivernage.» Mais la course dans cette ville neprit son véritable essor qu’au XVIème siècle avecles frères Barberousse.

CHEÏKH SALEM, GOUVERNEURD’EL DJEZAÏR

La ville d’El Djezaïr avait pour gouverneurle cheikh Salem, l’émir des Thaaleba. La tran-quillité du règne de ce dernier fut troublée parune injonction émanant du sultan abdelouadidelui intimant l’ordre de lui remettre les impôtsque l’émir prélevait dans sa vil le et les territoires qui en dépendaient. Bien que froissépar cette intimation, l’émir des Thaaleba duts’exécuter avec, néanmoins, des arrière-penséesvindicatives. L’heure de mettre à exécution sonprojet de vengeance sonna et l’occasion lui futdonnée par la révolte des Beni Amer qui se soulevèrent contre le sultan Abou Hammou.Profitant de cette aubaine, le cheikh Salem serallia aux révoltés et tenta de se défaire de lasouveraineté des Abdelouadides. Cette indépen-dance prit forme lorsque le cheikh Salem réunit,

en 1376 à El Djezaïr, l’émir Abou Zyane,Khaled Ibn Amer, chef des Beni Amer, et leschefs d’autres tribus insurgées et qu’il proclamala souveraineté d’Abou Zyane. Le sultan Abou Hammou ne l’entendit pas de cetteoreille. Il réagit aussitôt contre les tribus insurgées. Dans un premier temps, il vainquitles Beni Amer, les Attaf et les Dialem et les dis-persa dans le désert . Puis arrivé devant E l D j e z a ï r , i l r e ç u t l a s o u m i s s i o n d u cheikh Salem et de ses compagnons. Le sultanaccepta leurs conditions mais exigea l’exil del’émir Abou Zyane. Salem conserva ainsi sonposte de gouverneur d’El Djezaïr. Ce salut futde courte durée, car peu de temps après, le sultan abdelouadide entreprit d’envahir àl’improviste la Mitidja, repoussant les Thaalebadans les montagnes. Salem dut se réfugier chezles Beni Meceira dans les montagnes desSanhadja. Usant du subterfuge d’une « faussepromesse », le sultan le fit sortir de sa retraite, lefit venir à Tlemcen où il ordonna son exécutionà coup de lance. Le cadavre du cheikh desThaaleba fut attaché à un poteau à l’entrée de laville pour servir d’exemple. Pour gouverner El Djezaïr, Abou Hammou nomma son vizirMoussa Ibn Berghout, ancien gouverneur de laville de Médéa. Plus tard, le sultan rappela lesdirigeants des principales villes du Maghrebcentral et les remplaça par ses propres fils. A latête de Miliana, il plaça El Montacir, AbouZyane fut nommé à Médéa. Quant à AbouTachefin, il se fit donner par son père la souveraineté pleine et entière de la ville d’El Djezaïr et y installa comme gouverneurYoussef Ibn Ez Zabia, «le seul de tous sesfrères qui lui avait montré de l’attachement et

auquel il avait accordé son amitié», écrit Ibn Khaldoun. Continuant sur sa lancée expan-sionniste, le sultan abdelouadide empiéta sur leterritoire des Mérénides. En représailles à cetteincursion, ces derniers marchèrent sur Tlemcenqu’ils dévastèrent entièrement à telle enseigneque Abou Hammou songea alors à transférer sacapitale à El Djezaïr où il installa aussitôt sonf i l s E l M o n t a c e r , é v i n ç a n t d e c e f a i t Abou Tachefin qui s’opposa à ce projet.Exaspéré, ce dernier s’empara de son père et le

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fit enfermer à Oran. Ayant réussi à s’évader,Abou Hammou se réorganisa en ralliant à sacause de nombreuses tribus arabes qui lui étaientrestées fidèles et déclara la guerre à son fils qui,entre-temps, s’était assuré la protection desMérénides.

Abou Hammou mourut au combat lors de la

bataille d’El Ghaïran et l’émir Abou Tachefinrecouvra à nouveau son autorité sur le Maghrebcentral. Il rétablit son frère Youssef Ibn Ez Zabiaà la tête du gouvernement d’El Djezaïr. Dès lors,les princes abdelouadides gouvernèrent sous lasouveraineté des Mérénides.LE REGNE DES THAALEBA

A l’orée du XV ème s ièc le , l es pr inces abdelouadides recouvrèrent leur souveraineté,mais la r ival i té qui sommeil la entre eux envenima davantage leurs relations et raviva laflamme de la lutte pour le pouvoir. Soutenu parles hafcides, Abou Zyane Mohamed, un princeabdelouadide, quitta Tunis, en 1437, et, à la têtede son armée, prit la direction du Maghreb central. Il envahit les villes de Médéa, Ténès etMiliana. La prise de la Mitidja lui fut facilitée parla soumission des tribus qui habitèrent cetterégion. Abou Zyane Mohamed réussit à établirson autorité sur la ville d’El Djezaïr où il se fit proclamer roi. Un an plus tard, il mourutassassiné. Son fils et successeur désigné, l’émir

El Moutaoukel, menacé de subir le même sort,s’enfuit à Ténès et en fit sa capitale. Les cheikhsdes Thaaleba restèrent alors seuls maîtres de laMitidja et d’El Djezaïr. La ville si longtempstiraillée entre les influences contraires de Fès,Tlemcen ou de Tunis recouvra son indépendance.

Une certaine stabilité, sous l’autorité de lapuisante tribu arabe de la Mitidja, caractérisacette période. Le royaume de Ténès, fondé parl’émir El Moutaouakel, réalisa des progrès consi-dérables, ce qui permit au sultan d’accroître sonprestige et de rallier sous son drapeau de nom-breuses tribus arabes du Maghreb central.

En 1461, se sentant assez fort pour reconsti-tuer le royaume de ses ancêtres, il lança sonarmée à l’assaut des anciennes colonies abde-louadides. Après Tlemcen, toutes les autresplaces fortes abdiquèrent. Les cheikhs qui gou-vernaient la ville d’El Djezaïr firent leur soumis-sion au nouveau sultan ; en échange, ils gardèrentleur poste de gouverneur de la ville. La fin dusiècle fut marquée par des changements impor-t a n t sau Maghreb, et la ville d’El Djezaïr fut parmi les premières à en subir les conséquences.

L’ARRIVEE DES ANDALOUSA la fin du XVème siècle, les trois puissantes

dynasties mérénides, abdelouadides et hafcides,connurent une autre ère qui allait sonner le glasde leur règne car affaiblies et sombrant dans unetotale décadence.

Le rapport de force, longtemps à l’avantagede ces trois dynasties, allait basculer et se pencher du côté des tribus arabes nomades quiimposaient peu à peu leur autorité sur certainesparties du pays. Cet état de fait aboutit au mor-cellement de tout le Maghreb central et de toutl ’Ifr iqiya. En outre , cet te décadence fut précipitée par la chute de Grenade, tombée entreles mains de Ferdinand, roi d’Aragon, etd’Isabelle, reine de Castille, en 1492.

En conséquence, des milliers d’Andalouschassés d’Espagne se ruèrent sur les principalesvilles côtières du Maghreb où ils s’établirent. Cesnouveaux émigrés , an imés d’une ha ine indéfectible contre les chrétiens, apportèrentavec eux la connaissance des côtes de leur ancien

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pays ; ils se mirent au service des corsaires maghrébins et armèrent à leur côté de petits bâtiments qu’ils lancèrent à l’assaut des navireschrétiens en Méditerranée. Ils allèrent même jusqu'à débarquer sur les côtes d’Espagne etd’Italie dont ils ravagèrent les villes d’où ilsramenèrent un butin considérable et de nom-breux esclaves. La course maritime connut alorsun nouvel essor et les corsaires algériens devin-rent en peu de temps la terreur de laMéditerranée.

LA PRISE D’EL DJEZAÏR PAR LES ESPAGNOLS

Les royaumes d’Espagne, d’Italie et duPortugal furent lentement ruinés par les incessantes attaques des corsaires maghrébins.En effet, les côtes de ces pays du pourtour médi-terranéen subissaient de multiples incursions dela part des corsaires qui ravageaient tout sur leurpassage. Il faut dire qu’à l’instar de nombreusesvilles côtières du Maghreb central, El Djezaïrprenait activement part à la course maritime quise déroulait en Méditerranée et son port consti-tuait un refuge d’une importance capitale etstratégique pour les navires pirates. Las de cettesituation catastrophique et compromettante auvue des nombreuses déprédations qui leur sontcausées, les Espagnols et les Portugais décidè-rent d’unir leurs forces et de pourchasser lesagresseurs jusque dans leurs ports d’attache oude retranchement. En 1501, la première expédi-tion portugaise fut conduite par Don Manueldont la flotte fut mise en déroute par les naviresalgériens. Quatre ans plus tard, Don Diego deCordoue renouvela l’expédition qui aboutit à laprise de Mers El Kébir. En 1509, le cardinal deXimenès s’empara d’Oran et, à son tour, Pierre Navarre occupa Béjaïa, berceau de lapiraterie en Méditerranée. Ayant appris la chutede Béjaïa, les gouvernants d’El Djezaïr,convaincus que leur ville serait la prochainecible, s’empressèrent de dépêcher à Béjaïa unedélégation ayant pour principale mission defaire acte d’allégeance au souverain espagnol.Le 31 janvier 1510, la capitulation d’El Djezaïrfut paraphée par les députés et par laquelle ils

reconnaissaient la suzeraineté de l’Espagne.Selon les conditions des vainqueurs, le sultand’El Djezaïr, Salem Etteumi, cheikh desThaaleba, et celui de Ténès se rendirent àBurgos pour présenter leurs hommages au roiFerdinand de Castille. Aussitôt après, le comtePierre de Navarre ordonna la construction, sur un îlot non loin de la ville, d’une forteresse,« le Pênon », où il installa une garnison destinéeà tenir en respect les habitants de la ville et àcontrôler le mouvement de tous les navires tran-sitant par le port. A cette même époque, les frères Barberousse faisaient déjà régner laterreur en Méditerranée. Ces derniers jouèrentd’ailleurs un rôle important dans les futurs événements qui vont jalonner l’histoire d’El Djezaïr.

LES FRERES BARBEROUSSELes frères Barberousse, on les dit natifs de

l’île de Metelin (Lesbos), étaient au nombre dequatre : Elias, Ishaq, Arroudj et Kheir Eddine.L’histoire n’a retenu que les deux derniers, etpour cause Elias et ishaq n’eurent pas le tempsd’immortaliser leur contribution à l’écriture del’histoire d’El Djezaïr car ils moururent jeunes.Les premiers à s’être investis très tôt dans lapiraterie furent Elias et Arroudj. Lors d’une rudebataille contre un navire de Rhodes, Elias perditla vie et Arroudj fut capturé et vendu commeesclave sur une galère chrétienne. Durant delongs mois de captivité, Arroudj connut les piresmoments de son existence. La souffrance et lesexactions qu’il endura pendant cette périoded’emprisonnement le marquèrent à jamais, ce qui eut pour effet de faire naître en lui ce sentiment de haine et d’aversion envers leschrétiens, sentiment qui le fera se jurer deconsacrer le reste de sa vie à se venger de sesgeôliers, en l’occurrence les chrétiens. Ayantréussi à s’échapper, il captura, peu de tempsaprès, un vaisseau français et l’envoya au sultande Constantinople. En récompense, il reçutdeux galères, ce qui lui permit de se lancer dansla course contre les navires chrétiens qui croisaient en Méditerranée.

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ARROUDJRégner en maître sur la Méditerranée ne

suffisait pas à Arroudj. Il manqua à ce dernier unendroit fixe où il pourra, lui et ses compagnons,s’établir. Il lui fallait donc un port qui sera à lafois un lieu de repli et une base pour ses opéra-tions maritimes. L’occasion lui fut offerte parl’émir Abderrahmane, dernier sultan hafcide àgérer les destinées de Béjaïa, qui fit appel à sonaide pour libérer sa ville de la domination espagnole. En effet, en 1512, au milieu de l’été,Arroudj et ses compagnons débarquaient sur lesplages voisines de Béjaïa qui fut assiégée de toutes parts. Après huit jours de siège, une brèche fut ouverte et au moment de donner l’assaut, un boulet tiré par l’ennemi fit perdre àArroudj le bras le contraignant à lever le siège età se replier. Deux ans plus tard, il revint à lacharge et dirigea une nouvelle expédition contreles Espagnols. Mais, encore une fois, son arméefut repoussée. Il se réfugia alors à Jijel, ville indépendante dont les habitants, presque touscorsaires, l’accueillirent en triomphe. Il y futrejoint par son frère Kheir Eddine. Ensemble, ilsfortifièrent la ville et en firent leur résidence ainsique le centre de leurs opérations maritimes. Sousle joug des Espagnols, les habitants d’El Djezaïrne désespérèrent pas de connaître un jour la liberté. En effet, leur espoir se ranima lorsqueFerd inand de Cas t i l l e mouru t en 1516 .Considérant que cette disparition rendit caduc defait l’engagement de soumission au souverainespagnol et se sentant donc libéré de son sermentd ’obéd ience v i s -à -v i s de ce dern ie r, l e cheikh Salem Etteumi fit alors appel aux frèresBarberousse dont le récit de leurs exploits luiétait parvenu. Arroudj répondit favorablement àl’appel. Il se mit alors à rassembler toutes les forces dont il pouvait disposer et marcha sur El Djezaïr. Il y fit une entrée triomphale. Il éparpilla ses hommes dans tous les recoins de laville, positionna ses canons en face du Pênon etsomma le commandant de se rendre. Mais celui-ci refusa d’obtempérer. Le raïs décida alorsde retarder l’assaut contre cette forteresse biengardée et jeta son dévolu sur les habitants quiétaient déjà mécontents du comportement brutalet arrogant des Turcs. Il mit un terme à ce mou-

vement de contestation en faisant assassiner lecheikh Salem Etteumi. Ensuite, il dispersa lesThaaleba, dont il craignit la vengeance, ainsi queles Beni Mezghenna dont certains éléments sub-sistaient encore dans la région, et se fit proclamer

roi d’El Djezaïr. Après l’échec cuisant subit faceà Arroudj, les Espagnols refusèrent d’abdiquer.C’est le cardinal de Ximenès qui, soucieux derétablir la souveraineté espagnole sur la ville d’El Djezaïr, mit sur pied une expédition contreleur possession en Afrique du Nord accaparée par le raïs. A la tête de l’armada espagnole, Diego de Vera arriva, le 30 septembre 1516, dansla baie d’El Djezaïr où il jeta l’ancre. Là, il multiplia les assauts qui furent énergiquementrepoussés car manquant de coordination. Erreurde stratégie. Arroudj entreprit alors de charger lesEspagnols et la victoire lui fut acquise. Certes, lapuissance armée du raïs concourra à porter uncoup dur à l’armada de Diego de Vera, mais ce nefut pas le seul facteur. Pendant les assauts, unetempête se déchaîna et provoqua un vent de panique chez les Espagnols. C’est ce moment-làque choisit Arroudj pour asséner son coup fatal ;les rares hommes qui réchappèrent au massacrefurent capturés et jetés dans les bagnes de laRégence. Suite à ses nombreux exploits, Arroudjétendit et confirma sa notoriété sur les places fortes du Maghreb Central. C’est fort de Ncetteréputation que les notables de Tlemcen, dont leshabitants subissaient les affres et la dictature duprince abdelouadide Abou Hammou, lui firentappel. Cette nouvelle demande répondait auxambitions du roi d’El Djezaïr désireux d’étendreson autorité à tout le Maghreb.

La confrontation entre les armées de Arroudjet d’Abou Hammou se déroula dans la plained’Arbal, aux environs d’Oran. Ce dernier subitune lourde défaite. Cette victoire écrasante permit à Arroudj de poursuivre sa marche surTlemcen où il fut accueilli en libérateur. Il fit sortir le jeune prince Abou Zyan de sa prison,l’assit sur le trône, mais le fit étrangler quelquesjours plus tard. La tradition dit qu’il fit noyer prèsde soixante-dix princes zianites dans un réservoir qui se trouvait dans l’enceinte du palais. Les nombreux succès accumulés par le roi d’El Djezaïr ne furent pas sans inquiéter le roi

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d’Espagne qui décida l’envoi de troupes à Oran.Abou Hammou, de son côté, reconstitua sonarmée. Dans un premier temps, le gouverneurd’Oran projeta de s’emparer de la Qalâa de BéniRached qui était défendue par Ishaq, frère deArroudj. La bâtisse fut encerclée. Ishaq futcontraint de rendre les armes. Il obtint, pour luiet ses compagnons, l’autorisation de se retirer àTlemcen. Mais ce fut une ruse, car à peine sortis de la forteresse qu’ils furent assaillis etmassacrés par les Espagnols et les hommesd’Abou Hammou. La seconde étape du plan dugouverneur d’Oran après la prise de la Qalâafut Tlemcen où, d’ailleurs, il fut rejoint par Abou Hammou. Là, ils entreprirent un siège quidura près de six mois. Lorsque l’assaut final futordonné, les Turcs se retranchèrent dans leMechouar. Dans le même temps, les habitantsde Tlemcen, exaspérés par cette guerre qui n’enfinissait plus et qui ruinait leur pays, décidèrentde passer à l’offensive. Après avoir obtenu l’autorisation de pénétrer dans le Mechouarpour la prière de l’Aïd Esseghir, qui correspon-dait cette année-là au 29 septembre 1518, ils seruèrent à l’improviste sur les Turcs. Arroudjréussit à repousser les assaillants après une sanglante bataille où il perdit une grande partiede ses hommes. Affaibli et diminué militaire-ment, Arroudj, persuadé alors qu’il ne pouvaitplus résister à un assaut des Espagnols, résolutde prendre la fuite avec ses compagnons. A lafaveur de la nuit tombante, il sortit du Mechouaren emportant avec lui le butin considérable qu’ilavait amassé. Il se dirigea vers l’est, probable-ment en direction de Mostaganem, l’une desvilles où il était assuré de trouver un abri sûr et un port d’où il pouvait embarquer pour El Djezaïr. Tard dans la nuit, le général espagnolfut informé de la fuite de son ennemi. Il partitaussitôt à sa poursuite et ne tarda pas à le rattra-per au gué de l’oued el Melah (Rio Salado).Arroudj essaya de ralentir ses poursuivants enjetant derrière lui une part de son butin, maiscette dernière ruse fut vaine. Epuisés par la faimet la soif, les Turcs se retranchèrent dans unevieille forteresse où ils succombèrent sous lenombre de leurs assaillants. Abou Hammou futrétabli sur le trône de Tlemcen et gouverna sous

la suzeraineté des Espagnols.En 1518, Arroudj fut décapité. Sa tête ainsi

que le vêtement de brocart d’or qu’il portait,furent rapportés à Oran et exposés aux portes dela ville. Il était alors âgé de quarante-quatre anset ne laissait pas de postérité. De l’occupationde Jijel jusqu'à la prise de Tlemcen, ce redou-table raïs avait mené une guerre impitoyable

aux chrétiens et à tous leurs alliés. De corsaire téméraire et redouté, il était devenu conquérantet fondateur d’empire. Malgré son allégeance ausultan de Constantinople, son pouvoir étaitabsolu. Il laissait à son frère Kheir Eddine lenoyau d’un empire.

KHEIR EDDINE BARBEROUSSEKheir Eddine, en succédant à son frère Arroudj,hérita d’une responsabilité pour le moins délicate. En effet, les exploits réalisés par sondéfunt frère furent à l’origine d’une réputationconsidérable. De plus, les acquis des frères

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Barberousse et leurs ambitions dépassent de loinl e s p o t e n t i a l i t é s t a n t m a t é r i e l l e s q u e militaires dont disposaient Kheir Eddine, il luifallait un appui, et pas des moindres. C’est versConstantinople que Kheir Eddine se tourna pourdemander protection. C’est le sultan Selim qui était destinataire de cette requête qu’il consi-déra d’ailleurs comme une marque de confianceet un immense honneur. Le sultan donna suite àla demande de Kheir Eddine en lui envoyantdeux mille soldats. De plus, il le mit à la tête dugouvernement d’El Djezaïr avec le titre de bey-lerbey. La Régence d’El Djezaïr fut par consé-quent annexée à l’empire ottoman. Fort de cetappui, Kheir Eddine reprit en main les destinées de la Régence. D’un autre côté, depuisla disparition de Arroudj, le roi Charles Quint necessa de nourrir ses velléités de chasser une foispour toutes les Turcs de tous les ports duMaghreb. Le roi Charles revint à la charge maiscette fois il confia à Don Hugo de Moncade,vice-roi de Sicile, la responsabilité d’organiserune expédition contre la Régence d’El Djezaïr.

Ce dernier échafauda une stratégie d’attaque quiprévoyait de lancer des assauts simultanés parmer et par terre. C’est ainsi que le 17 août 1519,la flotte espagnole arriva sur les côtes algéroises.Les Espagnols se positionnèrent sur la collinedénommée Koudia t Es Saboun d’où i l s canonnèrent les remparts de la ville. KheirEddine choisit ce moment pour lancer son offensive. Acculés de toutes parts et en fuite, les soldats espagnols tentèrent vainement des’embarquer sur leurs navires . Le pacha d’El Djezaïr ordonna alors de les achever tous,car rongé par le sentiment de vengeance de lamort de ses deux frères.

C e t t e é c r a s a n t e v i c t o i r e c o n f o r t a Kheir Eddine dans son autorité sur El Djezaïr et lui permit d’étendre sa domination sur les territoires au-delà de la Mitidja. Il s’occupaensuite de l’organisation défensive de sa ville. Il la fit fortifier en la dotant de solides remparts.Barberousse était alors le maître de tout leMaghreb central. La montée en puissance de lanotoriété de Kheir Eddine dont la domination territoriale s’étendit à la limite du royaume hafcide fit naître des craintes chez le sultan de Tunis qui prit la décision de devancer les événements en rétablissant l’autorité hafcide surle Maghreb central.

Il chargea alors des émissaires pour se rendreauprès du cheikh Ahmed Ben El Kadi, sultan deKoukou ; ils avaient pour mission de convaincrece dernier d’embrasser la cause du sultan et del’aider à se débarrasser du dernier Barberousse.La réponse fut positive. A la tête de son armée, le sultan hafcide marcha sur El Djezaïr. De soncôté, pour faire face à l’ennemi, Kheir Eddinerassembla ses janissaires auxquels se joignirentles troupes de son allié Ahmed Ben El Kadi. La confrontation entre les deux belligérants eutlieu sur le territoire des Flissa Oum El Lil. Dès que le combat se fut engagé, le cheikhAhmed Ben El Kadi lança ses hommes contre lesTurcs qui se trouvèrent pris entre deux feux.Surpris par cette trahison, ils furent mis en déroute ; Kheir Eddine réussit à prendre la fuitevers Jijel. Pendant ce temps, le sultan kabyle de Koukou traversait la Mitidja et arriva à El Djezaïr sans qu’on lui opposa une quelconque

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résistance. A son arrivée, Kheir Eddine trouva la ville

de Jijel embourbée dans une terrible famine ; il fournit à la population du blé et des provisions.Suite à cela, il se rendit compte que pour faireface à une situation de crise nécessitant lerecours à un approvisionnement à grande échel-le il fallait à tout prix reprendre la mer et lacourse qui fit, à partir de ce même port, la fortune de son frèreArroudj. De là, il reprit ses assauts contre lesnavires chrétiens qui passaient par la merMéditerranée et débarqua sur les côtes deTunisie, d’Espagne et d’Italie où il sema la terreur. En deux ans de course, il reconstitua sapuissance et ramena l’abondance dans le pays.De succès en succès, il se sentit assez fort pourenvisager la reconquête de son ancienne capitale. Barberousse rassembla toutes les forces dont il pouvait disposer et se mit en marche pour El Djezaïr. En 1527, il entrait triomphalement dans son ancienne capitale.Une fois El Djezaïr reconquise, il entreprit alorsde se débarrasser du Pênon espagnol qui contrô-lait toujours l’entrée du port. Il disposa unensemble de batteries en face de l’îlot et sommale commandant De Vargas de se rendre. Ce dernier opposa un rejet catégorique entraînantde ce fait le début des hostilités. Le 5 mai 1529,Kheir Eddine commença à bombarder la forteresse. Au terme de quinze jours de siège,une brèche fut ouverte.

Les Turcs débarquèrent sur l’îlot et prirentd’assaut le fort. La garnison, très éprouvée, serendit sans aucune résistance. La partie haute du Pênon fut entièrement détruite, seule futconservée la plate-forme circulaire sur laquelleles Turcs installèrent un fanal et une batterie. Kheir Eddine, qui avait plus que jamais besoind’un abri pour sa flotte, fit construire un môlelong de deux cents mètres, large de vingt-cinq ethaut de quatre. Cet imposant ouvrage reliait la ville aux îlots rassemblés par un terre-plein.La prise du Pênon et sa démolition consacrèrentl ’ indépendance du port d’El Djezaïr e t donnèrent une nouvelle impulsion à la course.

Ce succès des Turcs provoqua une viveémotion en Espagne et poussa les populations

des villes côtières à demander l’intervention duroi Charles Quint pour mettre un terme auxexactions commises à leur encontre par les corsaires algériens. En 1530, l’expéditioncontre El Djezaïr fut décidée et son commande-ment confié à l’amiral Doria. Ce dernier arrivaà E l D j e z a ï r a v e c u n e a r m a d a de mille cinq cents hommes qui entrèrent dansla capitale du pacha. Ils libérèrent les esclaveschrétiens qui envahirent toute la ville pour se livrer au pillage. Ayant mis à profit cettesituation de désordre, les Turcs se lancèrentcontre les Espagnols qui furent massacrés.L’amiral Doria en réchappa en prenant la fuite.A Constantinople, le sultan ottoman, contrariépar les incessantes incursions de l’amiral Doriacontre ses possessions en Grèce, fit appel au pacha d’El Djezaïr et le reçut avec tous les honneurs, l’élevant au rang dignitaire decapitaine-pacha, c’est-à-dire grand amiral de laflotte ottomane. Barberousse pourchassa alorsl’amiral génois, réussit à le battre et l’obligea àse replier dans son port d’attache. De retour à El Djezaïr, Kheir Eddine ordonna les préparatifsd’une expédition punitive contre Tunis, gouvernée alors par le sultan Moulay Hassen.

Surprise par cette attaque inopinée, l’armée

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tunisienne, rassemblée en toute hâte parle sultan, fut mise en déroute et les Turcs se répandirent dans Tunis qu’ils livrèrent aupillage. Barberousse prit possession de la ville aunom du sultan ottoman. Charles Quint, toujoursau fait des entreprises du capitaine-pacha auMaghreb, réagit aussitôt et mit sur pied une force redoutable. En juillet 1535, il repritTunis, contraignant Kheir Eddine à s’enfuir endirection de Bône où il avait laissé douze galères.Le pacha d’El Djezaïr regagna sa capitale sain etsauf et, en représailles contre sa défaite de Tunis,il débarqua à Majorque. Il prit d’assaut Mahonqu’il pilla et incendia.

Ce fut là sa dernière action d’envergure entant que beylerbey de la Régence d’El Djezaïr. Le 15 octobre 1535, il fut rappelé par le sultanottoman, dont il commanda la flotte jusqu'à samort en 1546. Il ne retourna plus sur cette terrequi avait fait sa gloire et sa fortune. A juste titre,Kheir Eddine Barberousse peut être considérécomme le véritable fondateur de la Régence d’El Djezaïr. Il hérita certes de son frère Arroudjd’une renommée et d’un noyau d’empire, maisson courage, son sens du commandement, ainsique sa légendaire fermeté lui permirent de faireface à tous ses ennemis, de gagner l’estime et la confiance du sultan ottoman et de bâtir uneformidable puissance maritime qui domina toutle bassin méditerranéen pendant plusieurs siècles.

EL DJEZAÏR, SOUS LES BEYLERBEYSKheir Eddine Barberousse fut le premier

à inaugurer le règne des beylerbeys au Maghreb.Ses successeurs adoptèrent dans cette région unegouvernance qui ne tolérait aucune opposition.Ils parvinrent à maintenir sous leur autorité les deux principales forces de la Régence : la redoutable milice des janissaires ou odjak, et lapuissante confédération des corsaires ou taïfa desraïs. Pendant toute la durée de leurs règnes, lesbeylerbeys eurent souvent à réprimer sévèrementles révoltes des janissaires qui tentèrent de s’emparer du pouvoir à El Djezaïr.

HASSAN AGHA

Durant cette période, les Espagnols étaientmaîtres des villes d’Oran, de Béjaïa, de Bône etde Goulette et leur vassal Moulay Hassen régnaità Tlemcen. A son départ, Hassan Agha succéda à Kheir Eddine et à la tête de ses terribles pirates,il parcourait la Méditerranée et y semait la terreur. En octobre 1541, sollicité de toutes parts,Charles Quint lança une expédition décisivecontre El Djezaïr, expédition qu’il dirigead’ailleurs lui-même. Pour faire face à cetteattaque, Hassan Agha organisait la défense etattendait, à l’extérieur de la ville, le renfort deplusieurs milliers de Kabyles. Le 24 octobre de la même année, Charles Quint prit position sur l e s o m m e t d ’ u n m o n t i c u l e a p p e l é Koudiat Es Saboun. Trois jours plus tard, en l’occurrence le 27, Hassan Agha, en meneur,lança ses troupes contre l’ennemi et assaillit de toutes parts une armée chrétienne affaiblie et démoralisée par des tempêtes et des pluies torrentielles. Ce fut un massacre : une grandepartie de la flotte fut coulée et douze mille hommes noyés, tués ou retenus prisonniers. Auprintemps de l’année 1542, le pacha envahit laKabylie et se porta contre Ben El Kadi, roi deKoukou, dont il obtint la soumission. Il marchaensuite sur Tlemcen où il imposa la souverainetéturque. De retour dans la capitale, il fut proba-blement victime d’une révolte des janissaires quiinstallèrent à sa place El Hadj Bechir BenAteladja. Contrarié par cette rébellion, le sultanottoman décida aussitôt d’envoyer un nouveaupacha à El Djezaïr.

HASSAN IBN KHEIR EDDINEPour succéder à Hassan Agha, le choix de la

Sublime Porte quant à l’homme qu’il va falloirplacer à la tête de la Régence d’El Djezaïr seporta sur Hassan, fils de Kheir Eddine. En juin1544, le nouveau pacha quitta Constantinople,avec une petite escorte. La crainte et le respectqu’inspirait jadis son père lui valurent un accueilchaleureux aussi bien de la part des janissairesque de la population de la capitale. Dès les premières années de son règne, Hassan orientases efforts en direction de l’ouest du pays dont lesprincipales villes étaient sous le joug espagnol.

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Sa priorité était donc de recouvrer la souveraine-té turque sur ces régions. Il ne tarda pas, par conséquent, à organiser une expédition contreTlemcen. Il se mit à la tête de ses janissaires auxquels se joignit un renfort de deux mille cavaliers commandés par le cheikh de Ténès. Lepacha d’El Djezaïr surprit l’armée espagnoleaux environs de Mostaganem. Après unebataille acharnée, le gouverneur d’Oran futv a i n c uet réduit à prendre la fuite avec ce qui resta de son armée. A son retour à El Djezaïr, Hassanapprit la triste nouvelle du décès de son pèreainsi que sa nomination au titre de beylerbey du Maghreb.

Quelque temps plus tard, la ville de Tlemcenfut à nouveau l’enjeu d’une bataille entre le chérif marocain Mohamed El Medhi etHassan. Les Marocains s’emparèrent de l’ancienne capitale abdelouadide. Mais immé-diatement après, l’armée marocaine fut mise en

déroute par les multiples assauts lancés par les Turcs sous le commandement de HassanCorso qui reprit possession de la ville au nomdu beylerbey en 1552.

Peu de temps après, Hassan Ibn Kheir

Eddine fut rappelé par le sultan ottoman. Il quitta El Djezaïr pour Constantinople et y laissale commandement par intérim au caïd Saffah.

SALAH RAÏSAu mois d’avril 1552, Salah Raïs débarqua

dans la capitale de la Régence avec le titre debeylerbey. Deux ans plus tard, il prêta mainforte au sultan marocain Abou Hassoun et l’aida à remonter sur le trône de Fès. En 1555, il entreprit de libérer Béjaïa de l’influence espagnole. Vers la fin de juin 1555, à la têted’une forte armée algéroise renforcée par unimposant contingent kabyle, Salah Raïs fitappareiller une flotte composée de vingt-deuxgalères chargées de matériel et partit en direction de Béjaïa. Le 27 septembre 1555, laville fut prise d’assaut, mettant fin à plus dequarante-cinq ans d’occupation espagnole. Dèsson retour à El Djezaïr, Salah raïs entreprit d’or-ganiser une autre expédition en direction d’unenouvelle cible, Oran. Il reçut du sultan ottomanun important renfort de troupes. Mais son projetfut contrarié par l’épidémie de peste qui éclata àEl Djezaïr en 1556. Il en fut lui-même atteint etmourut à l’âge de soixante-dix ans. Cette dispa-rition soudaine du pacha d’El Djezaïr ne mit pasfin pour autant aux préparatifs engagés dans lecadre de la libération de la ville d’Oran occupéepar les Espagnols. Sans attendre les ordres dusultan ottoman, le khalifat Hassan Corso prit lecommandement de l’armée et marcha sur Oran.Après avoir pris position autour de la ville, ilreçut de la Grande Porte l’ordre de lever le siègeet de renvoyer la flotte à Constantinople.

HASSAN CORSO ET LE PACHA TERKERLI

A son retour à El Djezaïr, Hassan Corsoapprit que le successeur de Salah Raïs avaitquitté la Turquie et faisait voile vers la capitalede la Régence. Lorsqu’il arriva aux abords de labaie d’El Djezaïr, le nouveau pacha, MohamedTerkerli, se vit interdire l’entrée du port par le corps de l’odjak qui soutenait la candidaturede leur chef Hassan Corso. Les raïs qui entendaient rester fidèles au sultan ottoman

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vinrent à son secours, et au beau milieu de la nuit,ils le firent débarquer dans le port qui était sousleur autorité. Ils réussirent à le faire entrer dans laville et à l’escorter jusqu'à la résidence despachas. Mohamed Terkerli ordonna l’arrestationde Hassan Corso et le fit empaler sur les crochets de Bab Azzoun où il agonisa pendant trois jours. Son complice, le gouverneurde Béjaïa, Ali Sardo, subit le même sort. Le règnede Mohamed Terkerli fut de courte durée. Alorsqu’il s’était isolé de la capitale pour fuir l’épidé-mie de peste qui ravageait encore les rues d’ElDjezaïr, il fut assassiné par le caïd Youssef, fidè-le partisan de Hassan Corso. Les janissairesentrèrent en rébellion ; ils mirent à mort les compagnons du pacha et installèrent provisoire-ment le caïd Yahia, ancien khalifat de Salah raïs,à la Jenina en attendant l’arrivée du nouveau beylerbey.

HASSAN IBN KHEIR EDDINE, LE RETOUR

Le souverain ottoman se tourna encore unefois vers Hassan Ibn Kheir Eddine dont l’influence était encore très forte au sein de lapopulation d’El Djezaïr et chez les vieux raïsavec lesquels il avait fait ses premières armes. Lebeylerbey quitta Constantinople avec vingt galères. En juin 1557, il jeta l’ancre dans le portd’El Djezaïr et prit possession de la ville sans yrencontrer de résistance. Dès son installation, ilconçut le projet d’affaiblir la redoutable milicedes janissaires pour mieux la contrôler. Il conclutdes alliances avec des cheikhs des tribus arabeset berbères, se constituant ainsi un vivier d’où ilpouvait recruter des auxiliaires pour son armée.Enfin, il accorda à leurs populations un privilègequi leur était refusé par ses prédécesseurs, en lesautorisant à se fournir en armes et munitions danssa capitale. Le beylerbey ne perdait pas de vuel’ouest de son pays où la province de Tlemcenétait à nouveau victime des attaques desMarocains. Pour mettre fin à cette menace, ilrésolut de faire assassiner le chérif Mohamed El Medhi. Il chargea de cette délicate opérationun de ses fidèles officiers, Salah Kahia. Celui-ciréussit à s’introduire auprès du sultan marocain

et, après avoir gagné sa confiance, il l’assassina.A la faveur des désordres qui suivirent l’assassinat du chérif, Hassan tenta grâce à unstratagème d’envahir le Maroc. En février 1558,il marcha sur Fès, mais il fut repoussé et contraintde regagner sa capitale. Au début de l’été de lamême année, il eut à intervenir contre lesEspagnols qui s’étaient rendus maîtres deMostaganem. Son expédition fut couronnée de succès et se solda par la mort du comted’Alcandete et par la déroute de l’armée chrétienne. Les janissaires, mécontents desmesures prises par Hassan Ibn Kheir Eddine enfaveur des Arabes et des Berbères, entrèrent enrébellion. Au cours d’une nuit de juin 1561, ilsfirent irruption dans le palais et s’emparèrent dubeylerbey et de tous ses compagnons. Ils le firentembarquer sur un vaisseau qui prit la direction deConstantinople. Le chef des insurgés, l’aghaHassan, exerça le pouvoir pendant près de troismois au bout desquels Ahmed Pacha arriva à El Djezaïr avec la mission de mettre fin à l’insurrection et d’en châtier les auteurs. Ceux-cifurent tous arrêtés et envoyés à Constantinopleoù ils eurent la tête tranchée. En mai 1562, le nouveau pacha était occupé à remettre de l’ordre dans sa capitale lorsqu’il décéda subite-ment, probablement empoisonné, laissant l’intérim au caïd Yahia. La Porte ne fit aucun casdes accusations portées par les janissaires contrele beylerbey Hassan et lui renouvela sa confian-ce en le nommant pour la troisième fois au pacha-lik d’El Djezaïr. En août 1562, le pacha, accom-pagné de plusieurs galères, fit son entrée dans leport d’El Djezaïr. La milice ne lui opposa aucunerésistance, les raïs et les Algérois lui firent unaccueil chaleureux. A peine installé dans sonpalais, Hassan se plongea à nouveau dans les pré-paratifs d’une grande expédition contre Oran. Il rassembla sous ses drapeaux des milliers decombattants turcs, espagnols, kabyles des tribusde Zouaoua et de Béni Abbès. Il fit partir sa flotte chargée de pièces d’artillerie, de munitionset de vivres, et, le 5 février 1563, il quitta la capitale en la laissant sous la garde de son khalifat Ali Chetili. Hassan porta ses premiersefforts sur Mers El Kebir. Après plusieurs joursde siège et de nombreux assauts, la garnison

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espagnole qui défendait cette place fut presquedécimée. Au moment où les Turcs allaient s’enrendre maîtres, une importante flotte chrétienne,composée de cinquante-cinq galères chargéesde troupes, fit son apparition dans la rade. Laflotte turque se dispersa aussitôt et Hassan, dont l’armée n’était pas préparée à affronter unepareille armada, se résigna à lever le siège et à reprendre le chemin d’El Djezaïr. A son arri-vée, il trouva la ville ravagée par la peste, lesm o r t sse comptaient par centaines. En mai 1565,Hassan Pacha participa, aux côtés du grand amiral Mustafa Piali, à l’expédition ordonnéepar le sultan ottoman contre les chevaliers deMalte. Les Turcs trouvèrent en face d’eux des adversaires déterminés et, malgré de nom-breuses victoires, l’entreprise turque n’atteignit

pas ses objectifs. Le 5 septembre, d’importantsrenforts chrétiens arrivèrent par la mer, le capi-taine pacha Piali, dont une partie des troupesluttait contre une épidémie de peste, choisit de lever le siège et ordonna la retrai te . Le beylerbey Hassan regagna sa capitale. Un an

plus tard, à la mort de Piali, le sultan Selim II lenomma capitaine pacha. Au début de 1567, il quitta le Maghreb pour Constantinople où ilmourut trois ans après.

MOHAMED IBN SALAH RAISL o r s q u e M o h a m e d I b n S a l a h R a ï s ,

le nouveau gouverneur, débarqua à El Djezaïr, il trouva la ville en proie à la peste et à la famine. Depuis quatre ans déjà, le terriblefléau ravageait le pays et avait décimé près de lamoitié de la population de la ville. La misère etle désordre avaient engendré le brigandage etl’insécurité s’était installée dans la ville et sesenvirons. Mohamed Ibn Salah Raïs s’employa àmettre un terme à cette confusion et à rétablir le calme et la sécurité. Mais la ville vécut à nouveau un événement tragique. Vers le milieude l’année 1567, un audacieux marin valencien,Juan Gascon, conçut le projet fou de s’emparerd’El Djezaïr. Avec ses deux galères, il s’appro-cha des côtes algéroises et, à la faveur de la nuitprofonde, il pénétra dans le port. A peine débarqué, il lança ses hommes à l’assaut desremparts, au moment où ils s’apprêtaient à forcer les portes, la garde turque donna l’alerte.Les soldats du pacha surgirent de tous les côtés.Les hommes de Juan Gascon eurent à peine letemps de rembarquer et de s’enfuir. Ils furentpourchassés et rattrapés par les corsaires turcs.L’audacieux capitaine et ses compagnons furentlivrés au pacha qui ordonna leur mise à mort.Mohamed Ibn Salah Raïs tenta ensuite de conci-lier les deux principales forces de la Régence,les raïs et les janissaires. Il autorisa ces derniersà s’embarquer sur les galères turques pour par-ticiper à la course et profiter de ses bénéfices.Mais l’opposition entre les deux parties était si

forte que le rapprochement s’avérait difficile.

EULDJ ALIAu début de 1568, rappelé à Constantinople,

le pacha Mohamed Ibn Salah Raïs fut remplacéà la tête du pachalik d’El Djezaïr par Euldj Ali,l’un des plus fidèles compagnons de Hassan IbnKheir Eddine. En mars 1568, le nouveau beylerbey arriva à El Djezaïr. Il prit ses fonc-

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tions avec la ferme intention de faire passer toute

l’Afrique septentrionale sous l’autorité de la

Porte. Contrairement à ses prédécesseurs, il se

désintéressa de l’ouest du pays et se tourna vers

la Tunisie. En octobre 1569, Euldj Ali prit le

commandement d’une puissante armée

composée de janissaires et de Kabyles et se mit

en marche, laissant la garde de sa capitale à son

khalifat Hassan Corso. Deux mois plus tard,

Tunis tomba entre ses mains presque sans

combat. Il y installa une garnison de trois mille

Turcs sous les ordres du caïd Ramdane.

Il soumit les villes du littoral et de l’intérieur,seule la Goulette échappait encore à son contrôle. Euldj Ali fut élevé à la dignité de grandamiral en remplacement de Hassan Ibn KheirEddine qui venait de mourir. Le gouvernementd’El Djeza ï r fu t conf ié à un au t re ra ï s , Arab Ahmed. En octobre 1573, la nouvelle de laprise de Tunis par l’armada de Philippe II, futtrès mal accueillie à Constantinople. Euldj Aliobtint du sultan ottoman l’autorisation de dirigerune expédition contre l’ancienne capitale del’Ifriqiya, Tunis, et d’en chasser à tout jamais les Espagnols. Le capitaine pacha prit le commandement de l’imposante flotte turque. Enjuillet 1574, il aborda les côtes de Carthage où ilf u t r e j o i n t p a r l e p a c h a d ’ E l D j e z a ï r ,Arab Ahmed. Dans le même temps, une impor-tante armée menée par Sinan Pacha quittaitTripoli en direction du nord ; en passant parKaïrouan, celui-ci s’adjoignit les troupes du caïdKheder. La Goulette, où s’était concentrée la plusgrande partie des forces espagnoles, fut prised’assaut par terre et par mer. Le siège dura plusd’un mois ; le 20 août, plusieurs brèches étaientouvertes et, trois jours plus tard, la forteressetombait entre les mains de Sinan Pacha. La villede Tunis ne tarda pas à subir le même sort. Lesultan Moulay Mohamed, le comte Serbilloni etplusieurs centaines de captifs espagnols, ainsiqu’un riche butin furent envoyés à la GrandePorte. Le caïd Kheder fut chargé du gouverne-ment de Tunis , l e ca ïd Ramdane ob t in t le Pachalik d’El Djezaïr en remplacement de Arab Ahmed qui partit à Constantinople encompagnie du grand amiral Euldj Ali. Après saprise de fonction dans la capitale de la Régence,le pacha Ramdane fut chargé par Euldj Ali deconduire une expédition contre le Maghreb extrê-me qui était alors gouverné par le chérif MoulayAbdellah. Le 15 janvier 1576, l’armée algéroisea r r i v a a u x p o r t e s d e F è s . La ville fut prise sans effusion de sang etMoulay Abdelmalek, protégé du grand amiralottoman, fut rétabli sur le trône. A son retour à El Djezaïr, Ramdane Pacha reçut la nouvelle desa nomination au pachalik de Tunis et son remplacement par Hassan Veneziano qui pritpossession de sa charge de pacha d’El Djezaïr

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en juin 1577. Le nouveau pacha était un hommecruel et cupide qui sut se faire craindre des janissaires et des raïs. Les habitants de la provin-ce subissaient avec résignation les charges qu’illeur imposait et les craintes qu’il inspirait à toutle monde étouffaient toute velléité de révolte.Pendant les années 1578 et 1579, la province,qui venait à peine d’être débarrassée de la peste,eut à souffrir d’une sévère disette causée parune sécheresse prolongée.

La famine fit des centaines de victimes, ceuxqui échappèrent à la mort quittèrent la ville et serépandirent dans les campagnes voisines avecl’espoir de trouver de quoi se nourrir. « Entrejanvier et février 1580, écrit l’écrivain espagnolHaëdo , i l mourut de faim dans les rues d’El Djezaïr cinq mille six cent cinquante-sixMaures ou arabes ». La révolte grondait par-tout, les tribus de l’intérieur refusèrent l’impôt,les janissaires envahirent les maisons vidées deleurs habitants et se livrèrent au pillage.

La Régence était livrée à l’anarchie et lepacha était réduit à l’impuissance. Hassan futrappelé par la Porte qui nomma à sa place un deses fidèles, Djafer Pacha. Celui-ci s’employa àcalmer la sédition et à rétablir l’ordre et la sécurité dans toute la province. Il châtia sévère-ment les mutins et attisa ainsi la colère de la mil ice . Les janissaires résolurent de l’assassiner et d’élire à sa place leur agha.Djafer, informé du complot, put se saisir desconspirateurs et leur trancher la tête. A la find’avril 1581, l’ordre étant rétabli, les citadinspurent rentrer chez eux et reprendre leurs activi-tés. Un mois après, Euldj Ali, qui avait reçul’ordre de partir à la conquête du Maghrebe x t r ê m e , a r r i v a àEl Djezaïr avec une flotte de soixante galères.

Pendant qu’il y préparait son expédition, ilfut rappelé par le sultan Mourad qui avait besoinde toutes les forces de l’empire pour faire face àla révolte qui venait d’éclater en Arabie. Audébut de l’année 1582, il reprit la mer en direc-tion de l’Orient et amena avec lui Djafer, lais-s a n tle gouvernement d’El Djezaïr à Ramdane.

Ramdane ne tarda pas à entrer en conflitavec la puissante taïffa des raïs qui s’opposait à

l’emprisonnement d’un de ses membres, le raïsMourad. Ramdane, qui ne pouvait pas faire faceà la révolte, fut contraint de s’enfuir pour seréfugier dans les environs de la ville. Le raïsMami Arnaute, chef des insurgés, s’empara dupouvoir et le conserva jusqu'à l’arrivée deHassan Veneziano. Le redoutable pacha revint à

El Djezaïr et reprit en main la destinée de laRégence.

La course reprit son essor et les raïs firent à nouveau régner la terreur en Méditerranée.Les côtes d’Espagne, des Baléares, de Sicile, de Sardaigne, de la Corse furent sans cesse visitées, pillées et rançonnées par les fameuxcorsaires, tels Mourad raïs, Mami Arnaute ettant d’autres. Le pacha Hassan lui-mêmen’hésitait pas à prendre part à ces expéditionsdont il rapportait de riches butins. En 1585,

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cette bonne fortune fut contrariée lorsque l’amiral Doria réussit à s’emparer de quelquesnavires algérois sur les côtes de la Corse. Les dernières années du règne de Hassan s ’ é c o u l è r e n t s a n s a u c u n é v é n e m e n t remarquable. En juin 1587, le plus grand et dernier beylerbey d’Afrique, Euldj Ali, mourut.Quelques mois plus tard, son fidèle raïs HassanVeneziano lui succéda comme grand amiral de la flotte turque. A la mort de Euldj Ali, laSublime Porte supprima la dignité de beylerbeyet divisa les possessions turques d’Afrique en trois pachaliks indépendants : El Djezaïr,

Tunis et Tripoli.

La Régence d’El Djezaïr fut placée sous l’au-t o r i t é d ’ u n g o u v e r n e m e n t n o m m é directement par Constantinople pour une duréede trois ans. Le pacha « triennal » était secondépar un Diwan composé d’officiers de la milicedes janissaires. Ces derniers ne tardèrent pas à mettre à profit la disparition des beylerbeys, dontl’autorité dictatoriale leur imposait crainte et res-pect, pour s’affranchir de ce nouveau pouvoir. Attirés par la réputation et les richessesde la capitale des raïs, les prétendants au poste depacha se disputaient les faveurs du sultan pourêtre envoyés à El Djezaïr. Les plus heureux obte-n a i e n t s o u v e n t l e u r n o m i n a t i o n p a r l’intrigue et la corruption, certains y employaientune partie de leur fortune. Dès lors, ils ne pen-saient qu’à s’enrichir, laissant la réalité du pouvoir entre les mains du Diwan donti l s s e c o n t e n t a i e n t d ’ e n t é r i n e r l e s décisions. Les actes officiels qui émanaient de ce gouvernement commençaient par cette for-mule : « Nous, Pacha et Diwan de l’invinciblemilice d’El Djezaïr ».

LES JANISSAIRESDe ce fait, le rôle joué par le corps de

janissaires fut déterminant pour les destinées dela Régence ; leur puissance ne cessa de s’accroître pour atteindre son apogée à la fin du XVIIème siècle. Le janissaire appelé à servir enAfrique était recruté dans les provinces d’Asie-Mineure et en particulier à Smyrne dans lesclasses les plus pauvres de la population. Dès son

arrivée à El Djezaïr, la nouvelle recrue, appeléeioldach, était inscrite sur le registre des janis-saires avec indication du nom des parents, de laville d’origine et de l’ancien métier.

Il était ensuite affecté à un groupe et aussitôtconduit dans une caserne de la ville où il allaitvivre pendant toute sa carrière militaire. Danscette redoutable milice, tous, officiers et ioldachsétaient égaux. Les conditions de promotions «égalitaires» furent établies sous les derniersbeylerbeys. Elles étaient fixées par des loisimmuables et fondées sur un sentiment d’égalitéabsolue. L’avancement dans le grade avait lieu àl’ancienneté, permettant ainsi au simple ioldachd’atteindre le plus haut grade de la hiérarchie dela milice. Pour loger leurs janissaires, les gouver-neurs d’El Djezaïr avaient fait construire plusieurs grandes casernes à l’intérieur de laville. La plupart furent établies dans la partiebasse, dans les quartiers de Bab Azzoun et Bab El Djezira. C’étaient de vastes bâtimentsavec une ou deux cours intérieures à arcades, surlesquelles donnaient les chambres (odas) oùlogeaient une quarantaine de janissaires. La tradition attribue la fondation de la premièrecaserne d’El Djezaïr au beylerbey Kheir Eddine.

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E l l e p o r t a i t l e n o m d e D a r Yenkcharia-m’ta-el-Kharratine, c’est-à-dire «maison des janissaires de la rue des tourneurs»; elle était située le long de la rue Bab Azzounface au souk El Kharratine dont elle tenait sonnom. Deux autres casernes furent construites àla fin du XVIème siècle sous les règnes des bey-lerbeys Hassan Ibn Kheir Eddine et Euldj Ali.Mais dès le début du XVIIème siècle, pour faireface au nombre sans cesse croissant de janis-saires, la ville fut dotée de cinq autres casernes.Deux d’entre elles furent bâties en 1627 et 1637par le maître architecte andalou Moussa et parson fils Ali. C’est aussi dans cette partie de laville, le long de la rue Bab Azzoun, que furentimplantés les deux plus grands bagnes du bey-lick.

LE REGNE DES PACHASLe règne des pachas, qui débuta en 1586

avec Dely Ahmed, et qui dura plus de soixante-dix ans, fut une ère de prospérité et, en mêmetemps, une longue période d’anarchie pour ElDjezaïr. De 1586 à 1659, plus de trente pachass esuccédèrent au pachalik d’El Djezaïr. Ils étaient confinés au rôle de «gouverneur de parade» avec quelques privilèges extérieurs, un palais,une garde personnelle, des chaouchs, la placed’honneur dans les cérémonies. Ils se mêlaientsurtout de la course, qu’ils encourageaient particulièrement car elle leur fournissait unegrande partie de leurs revenus. Ils conservaienten outre le droit de rendre justice aux baldis etde disposer des caïdats, autres sources de reve-nus non négligeables, laissant ainsi le gouverne-ment de la Régence entre les mains de la milice.Cette période se caractérisa par l’extension del acourse, mais elle fut aussi féconde en événe-m e n t stragiques qui, quelquefois, furent près de ruinerle pays. La ville fut, plusieurs fois, le théâtre desanglantes émeutes. Elle fut souvent frappée pardes épidémies de peste, suivies par de longuespériodes de famine qui ravageaient tout le pays.

En 1592, dès le début du règne de ChaabanPacha, une tempête d’une rare violence détruisit

une grande partie de la jetée Kheir Eddine et provoqua, à l’intérieur même du port, la perte deplusieurs navires. L’année suivante, la villesubit une terrible épidémie de peste, dite deTunis, à laquelle s’ajouta une longue période defamine. Ces deux fléaux, qui sévirent pendantprès de deux ans, firent des ravages dans tout lepays.LES KOULOUGLIS ET LES KABYLESEN REVOLTE

En 1595, Kheder Pacha revint pour ladeuxième fois à El Djezaïr. Il résolut de rétablirl’autorité du pacha en affaiblissant la milice. Iltrouva des alliés parmi la population desKoulouglis, ennemis jurés des janissaires. Il lesorganisa et les poussa à se révolter contre cesderniers. L’affrontement mit la ville à feu et à

sang, plusieurs centaines de Koulouglis furentmassacrés . A la su i te de ces t rag iques événements, le pacha fut rappelé en Orient etremplacé par Mustafa Pacha. Ce massacre et ledésordre qui s’ensuivit entraînèrent la révoltedes Kabyles qui prirent le parti des Koulouglis.Ils ravagèrent la Mitidja et installèrent leurcamp aux abords de Bab Azzoun, bloquant ainsila ville pendant onze jours. Ils furent ensuite

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repoussés par les Turcs. Cette rébellion fut lepoint de départ d’une insurrection qui allait durerplusieurs années. En 1611, sous le règne deMustafa Kouça, une sécheresse prolongée provo-qua une terrible famine dans tout le pays. L’annéesuivante, la situation empira, l’eau et les vivresvinrent à manquer à El Djezaïr. Le Diwan décidad’expulser les Maures tagarins. Quelques-uns

s’établirent au-dessus de la Casbah, dans unquartier qui conserve encore leur nom ; ceux quirefusèrent de partir furent impitoyablement mas-sacrés. En 1621, un nouveau fléau s’abattit surtout le pays. La peste de Tunis, nommée SidiBelkris, réapparut à El Djezaïr et emporta des milliers de personnes.Pendant ce temps, les Kabyles étaient toujours enrévolte. Le Diwan, attentif à rétablir l’ordre,envoya contre eux plusieurs expéditions. En1624, le pacha Khosrew entra en maître àKoukou et obtint la soumission de tous leurschefs. De son côté, la France, qui subissait d’énormes pertes du fait de la course, dépêcha àEl Djezaïr Sanson Napollon en qualité d’envoyéspécial du gouvernement de Louis XIII, en vuede négocier un traité de paix avec le pacha. Ala fin de l’année 1628, un traité par lequel les Turcs s’engageaient à vivre en paix avec la France, et à respecter sa flotte et son littoral,fut signé entre les deux pays. Peu de temps après,ce traité fut violé par des marins français, entraî-

nant aussitôt les représailles des raïs qui reprirentleurs attaques contre les navires français. Il estrapporté que de 1629 à 1634, les corsaires algé-riens s’emparèrent de 80 vaisseaux et 1331marins et passagers, faisant subir au commercefrançais des pertes qui s’élevaient à quatre mil-lions sept cent cinquante mille livres. Sur cesentrefaites, une révolte éclata à El Djezaïr ; levieux pacha Hossein fut maltraité et emprisonnépar la milice. L’anarchie était alors à son comble.Les Koulouglis, qui avaient été expulsés d’ElDjezaïr en 1629, s’étaient établis aux environs etattendaient le moment propice pour entrer enville et prendre leur revanche. Ils profitèrent du désordre qui régnait dans la cité et,le 1er juillet 1633, ils pénétrèrent en ville parpetits groupes déguisés en paysans.

Grâce à l’effet de surprise, ils réussirent às’emparer de plusieurs points forts, mais lesjanissaires reprirent vite le dessus. Après avoirfermé les portes de la ville, ils les repoussèrentvers le haut et les acculèrent dans la citadelle. Aucours de la bataille, qui fut acharnée de part etd’autre, les réserves de poudre emmagasinées àl ’ i n t é r i e u r d e l a C a s b a h p r i r e n t f e u , provoquant une terrible explosion.

La forteresse et quelque cinq cents maisonsqui se trouvaient alentour furent soufflées, provoquant la mort de près de six mil le personnes. Les rares Koulouglis qui échappèrentau désastre furent impitoyablement massacréspar leurs adversaires.

LA TAÏFA DES RAÏSLa milice sortit affaiblie de cette révolte et

perdit une grande partie de son autorité au profitde la taïfa des raïs. Ces derniers, dont dépendaitla survie d’El Djezaïr, résidaient dans les basquartiers autour du port, où certains possédaientde somptueuses maisons. En 1581, Diego deHaëdo parlait déjà d’une flotte de trente-cinqgaliotes et vingt-cinq brigantins dans le port d’El Djezaïr. Les raïs se contentaient alors d’écumer le bassin occidental de la Méditerranée.Ils visitaient et pillaient périodiquement les côtesd’Espagne, des Baléares, de Corse, de Sicile, deSardaigne et d’Italie. Sur mer, ils semaient la terreur et aucun bateau chrétien qui croisait dans

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cette zone n’était à l’abri de leurs attaques. Dèsle début du XVIIIème siècle, la flotte algérienne s’enrichit de grandes galères et surtout desfameux «vaisseaux ronds» introduits en 1606par le corsaire flamand Simon Danser, converti à l’islam sous le nom de Hamidou Houlanda. La course prit une autre dimension grâce à cesnavires plus grands et plus rapides.

Le champ d’action des raïs ne tarda pas àdéborder les limites de la Méditerranée occiden-tale. Ce furent des expéditions de plus en pluslointaines : les corsaires franchirent le détroit deGibraltar et pénétrèrent dans l’Océan où ils pouvaient surprendre les galions hollandais etles vaisseaux anglais qui revenaient des Indes.Ils n’hésitèrent pas à se porter contre les côtesd’Angleterre et à pousser des pointes jusqu’enIslande. En 1616, Mourad Raïs, qui laissa sonnom à un quartier d’El Djezaïr, connu sous laforme « Bir Mandreis », atteignit la côte ouestde cette « Ile de Glace » d’où il rapporta unriche butin et près de quatre cents captifs. Dansla même année, ces hardis corsaires débar-quaient à Madère et faisaient mille sept centsprisonniers ; en 1634, ils ravageaient les côtesanglaises et irlandaises. Les bénéfices de lacourse étaient considérables : de 1613 à 1621,neuf cent trente-six vaisseaux chrétiens furentramenés au port d’El Djezaïr et, pour les deuxseules années 1615 et 1616, la valeur des prises atteignit troismillions de livres. La ville entière vivait de lacourse : «Tout Alger, note Henri de Grammont,se mêlait de la course, les grands étaient armateurs, les petits marchands et les baldis secotisaient pour acheter et équiper un navire àfrais communs ; les femmes elles-mêmes, vendaient leurs bijoux pour prendre part à cesfructueuses opérations.» Après leurs auda-cieuses opérations en mer et sur les côtes euro-péennes, les raïs rentraient au port d’El Djezaïr, «rassasiés, écrivait Diego de Haëdo, et richessur des navires emplis jusqu’au fond d’objets detoutes valeurs». Dès leur arrivée au port, ilsétaient accueillis par une foule de marchands etde curieux, et quelquefois le pacha lui-mêmevenait à leur rencontre. La cargaison était aussitôt débarquée, les marchandises diverses se

vendaient sur place, tandis que les esclaves chrétiens étaient dirigés vers le badistan (marché aux esclaves) où ils étaient ensuite vendus aux enchères. Au moment du partage, le pacha recevait ses parts de prises qui constituaient l’essentiel de ses revenus. Une partie du butin était réservée à la ville pour l’entretien et la gestion des installations portuaires, des zaouias et des fondations pieuses; une autre partie revenait aux janissaires dont lasolde mensuelle dépendait partiellement desbénéfices de la course. Le reste était partagéentre le raïs commandant le navire, le ou lesarmateurs et, enfin, les marins qui touchaientune rétribution plus ou moins forte selon leurgrade et leurs fonctions. Les esclaves qui ne partaient pas chez les particuliers étaient alorsdirigés vers les bagnes du beylick. Leur nombreétait considérable ; la fin du XVIème siècle, Diego de Haëdo faisait état de vingt-cinq milleesclaves chrétiens à El Djezaïr, ville dont lapopulation était estimée à soixante mille habitants. Grâce à la course, la taïfa des raïsavait acquis une formidable puissance ; elle n’obéissait ni au pacha ni à «l’invinciblemilice», et se permettait même de discuter les décisions et les ordres de la Grande Porte. Elleapparaissait alors comme le véritable maîtred’El Djezaïr. Les raïs, ces audacieux capitainesqui firent leur fortune et celle de leur villed’adoption et servirent sous le drapeau ottoman,n’étaient pas, à de rares exceptions près, d’ori-gine turque. La plupart étaient des chrétiensconvertis, appelés renégats ; ils étaient origi-naires des pays d’Europe : l’Italie en avait four-ni un fort contingent, suivie de la Corse, deMarseille, du Portugal, de la Hollande, etc. ; lesuns étaient d’anciens esclaves, enlevés par lescorsaires algériens sur une côte ou un navirechrétien, les autres étaient des hommes libresqui avaient fui leur pays et qui étaient venus s’établir au Maghreb après avoir apostasié. L e s M a u r e s a n d a l o u s q u i , a u x XVI et XVIIèmes siècles, vinrent par millierschercher refuge à El Djezaïr, fournirent aussid’excellents marins qui consacrèrent parfoistoutes leurs richesses pour armer des navires et se lancer dans la course. Quelle que fut leur

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origine, les uns et les autres apportèrent auxTurcs les connaissances de tous les métiers se rat-tachant à la marine. Ils fournirent à la marinealgérienne ses plus prestigieux raïs : HassanCorso, Euldj Ali, Hassan Veneziano, MouradRaïs, Ali Bitchnin et tant d’autres. La puissancedes raïs atteignit son apogée dans la premièremoitié du XVIIème siècle. A cette époque, la milice, qui détenait encore l’autorité à El Djezaïr, était fortement affaiblie par la révolte des Koulouglis en 1633 et laissait peu àpeu l’anarchie s’installer dans la ville. La taïfades raïs, qui s’était tenue jusque-là en dehors desaffaires du gouvernement, saisit cette opportunité pour s’emparer du pouvoir.

ALI BITCHNINL’instigateur de ce mouvement ne fut autre

que le grand amira l e t chef de la ta ï fa , Ali Bitchnin. Ce raïs, qui en quelques années decourse avait amassé une fortune considérable,avait débuté sa carrière sur les bancs de la chiour-me. D’après Devoulx, « Ali Bitchnin était unaffranchi du caïd Fath-Allah-Ben-khodja-Biri etil était tadjer, c’est-à-dire négociant, titre qu’ondonnait d’ordinaire à cette époque aux arma-teurs de navires destinés à faire la course auxnavires chrétiens ». Il possédait deux somptueuses résidences, l’une dans la villebasse, près du port, l’autre sur les hauteurs, ainsiqu’un bagne où étaient retenus près de cinq centscaptifs chrétiens ; parmi ses libéralités, il avaitfait construire en plein cœur de la ville, à l’inter-section des rues Bab El Oued et de la Casbah,une grande mosquée à khotba, de rite hanafite, etqui portait son nom. Ali Bitchnin n’eut guère letemps de profiter de son nouveau pouvoir car ilmourut peu de temps après, probablement empoisonné par ses adversaires.La taïfa conserva cependant le pouvoir jusqu’en1659, date à laquelle les janissaires instituèrentun nouveau type de gouvernement à El Djezaïr.

LA FIN DE LA REGENCEA u c o u r s d e l a s e c o n d e m o i t i é d u

XVIIème siècle, El Djezaïr fut le théâtre de deuxrévolutions qui amenèrent successivement les

aghas et les deys au pouvoir. Le pacha qui avait,depuis longtemps, perdu toute autorité était sanscesse tiraillé entre les exigences des deux principales forces de la Régence : la taïfa et lamilice. La crise était latente et chacun des deuxpartis cherchait un prétexte pour se débarrasserde ces encombrants gouverneurs. D’autant plusque, de 1638 à 1660, la ville traversa une période noire.

Vers 1640, les Kabyles envahirent à nouveaula Mitidja et mirent le siège devant la ville ; les insurgés étaient à peine repoussés que la pestes’abattit sur le pays ; elle dura trois ans et tua plusde quinze mille personnes et un grand nombred’esclaves. L’anarchie régnait dans tout le pays,les impôts ne rentraient plus et les janissaires qui craignaient pour leur solde étaient en effer-vescence. Sur ces entrefaites, la peste réapparuten 1648, elle eut à peine le temps de s’apaiserqu’elle étendait encore le linceul de la mort ; cefut la plus meurtrière de toutes les épidémies, elledura trois ans et emporta le tiers de la population.

LE REGNE DES AGHASC’est dans ce climat de désolation que le

pacha Ibrahim s’illustra par sa cupidité et provoqua la colère des raïs. Il fut menacé de mortet jeté en prison. Les janissaires se révoltèrent àleur tour et, profitant de la confusion, ils s’empa-rèrent du pouvoir. Le bouloukbachi Khalil prit latête du mouvement et, en accord avec le Diwan,il proclama la déchéance des pachas et leur remplacement par des membres de la milice. Par égard pour la Grande Porte, le pacha futnéanmoins autorisé à conserver le titre, les hon-neurs et quelques revenus, mais en revanche iln’avait plus le droit d’intervenir dans les affairesdu beylick. Les nouveaux gouverneurs portèrentle titre d’aghas et leur règne dura jusqu’en 1671.Le premier agha, Khalil, se révéla trop ambitieuxet se fit assassiner par les raïs ; son successeurRamdane Agha se concilia les faveurs de la milice et de la taïfa, mais sa cupidité lui fut fatale, ainsi qu’à vingt de ses partisans. Le troisième, Chaaban Agha, renégat d’origine portugaise, gouverna avec plus de méfiance etencouragea la course qui atteignit là son apogée.Pendant que les richesses s’entassaient dans la

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ville, deux nouvelles catastrophes vinrentréveiller les mauvais souvenirs des habitants.En 1662, un terrible tremblement de terreaccompagné d’une violente tempête détruisit denombreuses maisons, ainsi qu’une partie dumôle et des installations portuaires, et entraînala perte de onze navires. Dans la même année, lapeste qui devenait endémique acheva de désolerle pays. Trois ans plus tard, dans la ville meur-trie, Chaaban Agha trouvait la mort sous le poi-gnard des janissaires. Il fut remplacé par AliAgha. Alors que la ville était livrée au désordre, la flotte anglaise parut devant El Djezaïr etcoula plusieurs navires. Les raïs exaspérés parcette suite de malheurs se retournèrent contreAli et le mirent à mort.

LE REGNE DES DEYSLes deys mirent, ainsi , un terme à la

confusion qui sévissait dans la Régence depuis

le début du règne des aghas. Ils remplacèrent l’agha par un délégué choisi parmi eux et l’appelèrent dey. Les quatre premiers deysfurent d’anciens raïs. Le Diwan cessa dès lorsd’être le conseil suprême et les janissaires per-dirent une partie de leurs prérogatives. Mais leschoses ne s’arrangèrent pas pour autant ; lesdeys étaient sans cesse occupés à réprimer lesrévoltes des Kabyles qui, périodiquement, des-cendaient de la montagne pour venir semer ledésordre dans la plaine de la Mitidja et parfoismettre le siège devant la ville. Les deys étaientaussi en guerre avec la Régence de Tunis et lesexpéditions se succédaient de part et d’autresans qu’il y eût de véritables vainqueurs. Enfin,les puissances chrétiennes, dont les royaumessouffraient de plus en plus des effets de la cour-se, venaient régulièrement bombarder ElDjezaïr. En 1682 et 1683, eurent lieu les deuxexpéditions menées par Duquesne. Elles se sol-dèrent par des échecs et les dégâts causés par lesbombardements furent minimes, quelques mai-

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sons détruites et une partie des défenses du frontde mer endommagées.

Un événement, auquel toute la populationétait accoutumée, eut alors lieu à El Djezaïr : le dey Baba Hassan, deuxième du nom, fut assassiné sur ordre du chef de la taïfa, le raïsHadj Hussein , surnommé Mezzo Morto , s’empara aussitôt du pouvoir. Sous son règne, El Djezaïr fut à nouveau la cible de la flotte française commandée cette fois-ci par le maréchal d’Estrée. Des négociations furent entamées, mais n’aboutirent pas à cause desrevendications françaises. Les bombardementsrecommencèrent ; El Djezaïr eut à nouveau desmaisons détruites, le môle et quelques batteriesendommagées, tandis que les Français subirentd’énormes pertes et furent contraints au retour.Tou te fo i s , ces expéd i t ions success ives aboutirent, en 1690, à des négociations de paixentre la Régence et la France. Entre-temps, Hadj Hussein fut rappelé en Orient où il fut élevéà la dignité de capitaine pacha. Ce fut donc sonsuccesseur Hadj Chaaban Dey qui conclut le trai-té de paix avec la France signé le 24 septembre 1690. Ensuite, le nouveau deyporta ses efforts contre la Régence de Tunis. Il y mena deux expéditions victorieuses, mais à son retour à El Djezaïr, il trouva la ville en plei-ne révolte, et c’est en essayant de rétablir l’ordrequ’il fut arrêté par ses anciens soldats et exécutéen 1695. Un nouveau dey fut aussitôt désigné etles choses continuèrent ainsi. Lorsque le deymourait de mort naturelle ou abdiquait, la suc-cession, qui était réglée par avance, se déroulaitdans de bonnes conditions ; si le dey était assas-siné, ses meurtriers installaient à sa place l’un des leurs. De 1683 à 1817, quatorze deys furent assassinéset ainsi remplacés. Cependant, la Porte continuait à envoyer des pachas à El Djezaïr,même si la plupart étaient refoulés avant mêmed’entrer dans le port. C’est ainsi qu’en 1711, sousle dey Ali Chaouch, un pacha nommé CharkanIbrahim arriva d’Orient. Les Turcs lui refusèrentl’accès au port ; il fut alors contraint de fairevoile vers Collo où il demeura jusqu'à sa mort.Dès lors, le sultan, qui n’avait plus aucune auto-rité sur les souverains d’El Djezaïr, cessa d’y

envoyer ses représentants. Ce renoncementconsacra l’indépendance des deys qui, ayantévincé le Diwan, concentraient dès lors toutel’autorité entre leurs mains. Peu de temps après,la ville subit un violent tremblement de terre quidétruisit une grande partie des maisons et desédifices. Les habitants quittèrent la ville, laissantleurs biens à la merci des maraudeurs. Lessecousses telluriques durèrent près de troissemaines durant lesquelles El Djezaïr fut livrée àl’anarchie et aux voleurs.LA PERIODE SOMBRE D’EL DJEZAÏR

Dans la seconde partie du XVIIIème siècle, El Djezaïr vécut encore une période sombre. De 1734 à 1737, la sécheresse et la famine ravagèrent le pays, suivies de près par une épidémie de peste, dite d’Alexandrie, qui duratrois ans et fit trois à quatre cents victimes parjour. Ce terrible fléau s’installa à nouveau en1752, pour quatre années consécutives, provo-quant la mort de près de mille sept cents per-sonnes en un mois. En 1755, un tremblement deterre d’une rare violence brisa les aqueducs etpriva la ville de son alimentation en eau pendant plusieurs semaines. En 1787, une nouvelle épidémie de peste, encore plus terrible, causa laperte de plus du tiers de la population d’Alger.L’abbé Raynal en témoigna en 1788 : «La popu-lation d’Alger est réduite à moins de cinquantemille habitants, depuis que, suivant le relevé faitaux portes de la ville, la peste de 1787 lui enleva14 334 musulmans, 1774 juifs, 613 chrétienslibres ou esclaves, sans compter ce qui dut périrdans les jardins de son territoire» L’épidémie sedéclara plusieurs fois encore à la fin du XVIIIème

siècle et reparut avec une rare virulence entre 1813et 1819. La Régence sortit ruinée par toutes cescalamités. Dans le même temps, les bénéfices dela course diminuaient ; les traités signés avec laHollande (1680), l’Angleterre (1682), la France(1690) limitaient le champ d’action des raïs. Lenombre des renégats avait considérablementdiminué et avec lui celui des navires. La marineavait en outre subit d’énormes pertes. La courseconnut cependant un regain d’activité vers la findu XVIIIème siècle. Comme les Français, lesHollandais ou les Anglais étaient protégés par les

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traités, ce furent les Espagnols, les Portugais,les Danois, les Grecs et les Napolitains qui enfirent les frais. A cette époque, la course étaitfaite au profit des deys et ces derniers s’avisè-rent, à partir de 1765, de faire tenir un registre oùfurent notées toutes les informations concernantla course : nom du navire, celui du raïs, la puis-sance d’armement, l’équipage, et la description sommaire du butin, dans laquelle apparaissaientparfois le nom des captifs chrétiens, ainsi que lasomme produite par la vente de l’ensemble.Cette période fut aussi marquée par l’accessionau pouvoir du dey Mohamed Ben Othman quirégna vingt-cinq ans et mourut de mort naturel-le. Son khaznadar Hassan lui succéda sanstrouble et conserva le pouvoir jusqu’en 1798.

LE RAÏS HAMIDOUC’est sous le règne de Hassan qu’apparut le

plus prestigieux des raïs d’El Djezaïr, le raïsHamidou. Celui-ci commandait alors la flotted’Oran. Ayant appris ses exploits, le dey le fitappeler et lui confia le commandement de la flotte d’El Djezaïr. Dès 1797, il est fait mentionsur registre des prises et des exploits du jeuneraïs. Ainsi, le 17 juillet 1797, est-il écrit : «Lacorvette de notre seigneur Pacha, commandéepar le raïs Hamidou, a capturé un navire génoisayant un chargement de potasse». La mêmeannée mourut le dey Hassan, il eut pour succes-seur Mustafa, ancien trésorier de la Régence. Le nom de ce dey est resté attaché à tout un quar t ie r d’El Djeza ï r, s i tué au-de là de Bab Azzoun, où il avait fait construire, au-des-sus de la fontaine bleue, une somptueuse pro-priété. Hamidou fut confirmé dans le comman-dement de la flotte algéroise par le nouveau dey.Cette période, aux lendemains des guerres de laRévolution, alors que la France et l’Angleterres’affrontaient encore en mer, fut particulière-ment favorable à la course. Les exploits du raïsHamidou se multiplièrent. Les prises étaientconsidérables. 1798 : il s’empara d’un naviregénois chargé de draps, de cuirs et de peaux, etd’un navire grec ; 1799 : prise de trois naviresnapolitains ; 1802 : le registre mentionne laprise d’une grosse frégate portugaise. «La fré-

gate de notre seigneur le raïs Hamidou a pris unnavire de guerre portugais armé de 44 canons,sur lequel ont été faits prisonniers 282mécréants.» Le raïs poursuivit ses exploits jus-qu’en 1805, année de l’assassinat du deyMustafa qui fut remplacé par Ahmed, lui-même abattu peuaprès par les janissaires. Son successeur Ali Dey

était un simple janissaire surnommé El Ghassal(laveur des morts), nom qui lui venait de son premier métier. Il retira le commandement àHamidou qu’il exila à Beyrouth. Cupide etcruel, Ali El Ghassal ne tarda pas à s’attirer lahaine de la population et de la milice. Quatremois après son élection, il subit le même sortque son prédécesseur. Le nouveau dey, Hadj Ali, rappela le raïs Hamidou qui reprit aussitôt lacourse. Il se distingua à nouveau par d’impor-tantes prises. La flotte algérienne comptait alorstrente navires, dont trois frégates de quarante-quatre canons. Le nombre des esclaves chré-tiens qui avait considérablement diminué aumilieu du XVIIIème siècle s’accrut de nouveaugrâce aux campagnes fructueuses menées de1790 à 1815. Dans le même temps, le nombredes janissaires avait chuté. A la fin du XVIIIème

siècle, la Régence n’en comptait plus que sixmille. En 1814, le dey Hadj fut égorgé dans son

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bain, son successeur subit le même sort dix-septjours plus tard. Le pouvoir échut alors à l’aghaOmar. Un an après, le raïs Hamidou trouva lamort dans un engagement avec une division amé-ricaine. Il est vrai que ce jour-là il était seul enmer. Les Américains imposèrent une paix humi-liante au nouveau dey et, en 1816, la flotteanglaise commandée par lord Exmouth vint bom-barder El Djezaïr. La peste réapparut dans lepays. Omar Dey fut assassiné et remplacé par AliKhodja en 1817. Le nouveau dey décida aussitôtd’abandonner la Jenina pour s’installer avec tousles services du gouvernement à la citadelle. AliKhodja mourut de la peste en 1818; son successeurdésigné, le khodjel El Kheil Hussein, hérita d’unpays ravagé par la peste et ruiné par les bombardements des Européens. A cette époque, El Djezaïr ne comptait plus quetrente mille habitants, chiffre où elle n’étaitjamais descendue tout au long de l’histoire de la cité. Le dey Hussein fut le dernier gouverneurturc de la Régence, il maintint le gouvernement àla citadelle qu’il aménagea et d’où il assista,presque impuissant, à la prise de la ville par l’armée française lorsqu’elle débarqua le 14 juin 1830 sur les côtes de l’ouest d’Alger, à

Sidi Ferruch.

LA PERIODE COLONIALEAprès de multiples tentatives de forcer la

défense des Turcs, Napoléon dut avoir recoursaux plans fomentés par le général Boutin, un finstratège du génie militaire français. Ce dernier futdéjà envoyé en 1808 à El Djezaïr par Napoléondans le but de prospecter la région et déterminerles points forts et faibles de la Citadelle à mêmede mettre en place une stratégie efficace d’at-taque qui assénera un coup fatal aux forcesturques que les Européens n’avaient toujours pasvaincues.

Au terme de cette expédition, il fut décidé demener des attaques par terre et que le premier sitequi sera visé sera la tour Moulay Hassan (connueaussi sous l’appellation de Fort l’Empereur), carstratégique de par sa position sur les hauteursd’El Djezaïr. En effet, du haut de cette tour impo-sante, les sentinelles avaient une vue panora-mique sur le tout Alger. Après avoir affiné leurstratégie, les forces françaises mirent à exécutionleur plan et le premier débarquement des troupes françaises avait eu lieu

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HISTOIRE

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le 14 juin 1830 sur le littoral de Sidi Ferruch, à14 miles à l’ouest d’El Djezaïr. La confrontationqui s’en suivit, le 19 juin 1830, entraîna la défai-te des forces du Dey Hussein au lieudit « labutte de Staouéli ». Une fois l’obstacle de résis-tance franchi, l’armée française marcha sur le Fort l’Empereur et y arriva le 29 du même mois ; une batterie de canons futengagée pour tenter de détruire et forcer le fort.A l’aube du 14 juillet 1830, les multiples tirs decanons parvinrent à détruire une partie de l’édi-fice de défense et à 10 heures de la même jour-née, les Français lancèrent l’assaut final et serendirent maîtres des lieux. Ce fut la chute quisonna le glas de la présence turque à El Djezaïr.L’empire ottoman se trouve ainsi dépossédé deson « joyau » méditerranéen. Le lendemain de laprise du fort, la capitulation du dey fut ponctuéepar la signature d’un acte dans lequel furentconsignées les conditions de reddition, acte éta-bli par le général De Bourmont. Ce fut le débutde l’occupation de la ville d’El Djezaïr et l’en-tame d’une nouvelle ère coloniale. La présencecoloniale française à El Djezaïr fut caractériséepar une gouvernance de type militaire et pourcause, les impératifs d’expansion et de préser-vation des acquis ne purent se concrétiser quegrâce à un maintien de l’autorité aux mains desmilitaires qui étaient aux premières loges desévénements. Ce n’est que lorsque l’assise d’oc-cupation fut un tant soi peu stabilisée que lesrênes de la gestion administrative de la nouvel-le colonie furent confiées aux civils et que futscellée la séparation entre les deux régimes.Suite à cela, la réaction des autochtones, mêmesi elle fut sporadique et pour certaines étoufféesdans leur cocon, fut sans relâche. Parmi les pre-miers à avoir organisé et dirigé des mouvementsde résistance fut El Mokrani qui tenta de recou-vrer la souveraineté de la ville en 1871, mais satentative fut vaine. Dès lors, des poches derévoltes déstabilisatrices s’organisèrent frap-pant par à-coups l’ennemi.

Parallèlement à l’action armée, des mouve-ments à caractère politique entrèrent dans l’arè-ne pour combattre sur un autre front le coloni-sateur. Parmi les précurseurs de cette forme del u t t e ,

le mouvement de l’Emir Khaled à l’époque dela Première Guerre mondiale. D’autres reprirent le flambeau de la guerre politique et de sensibi-lisation à l’instar notamment des activistes duParti du Peuple depuis 1936 ainsi que l’associa-tion des Oulémas dont les efforts sans ménage-ment furent déployés depuis 1931. Tous cesmouvement et d’autres encore activèrent à par-tir de la ville d’El Djezaïr. Plus tard, le premier noyau du Front de libération national (FLN) s’organisapour mener à bien dans l’Algérois le processus du déclenchement de la lut te armée, le 1er novembre 1954. Alger Centre, Belcourt, laCasbah, Bab El Oued,... connurent une activitéarmée sans commune mesure tant du point devue virulence que stratégie. Les actions histo-riques de fidayine et de moussebels portèrentdes coups durs à l’ennemi. Les affrontements etles combats que livrèrent les Algérois contre lesmilitaires des généraux français dépêchés àAlger furent sanguinaires pour les colons quiconnurent des pertes énormes tant humaines quematérielles. Siège du Comité de coordination etd’exécution (CCE) du FLN, Alger est érigée enZone Autonome (août 1956). Au cours de l’an-née 1957, Alger devint une zone opérationnelleet le théâtre d’une lutte sans répit. De janvier à

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octobre de la même année, elle connut les moisles plus sanglants de l’histoire de la guerre delibération ; c’est la dépression aveugle de masse:2 400 assignés à résidence, 4 000 disparus recen-sés officiellement, et des milliers d’autres introu-vables. Au demeurant, Alger fut, depuis le débutde la révolution, le lieu privilégié d’événementspolitiques importants, citons :

• 1er novembre 1954 : Actions contre les édifices de l’administration coloniale et des établissements économiques. • 19 mai 1956 :grève générale des étudiants et lycéens.• 28 janvier-4 février 1957 : grève patriotiquedes « 8 jours » • 13 mai 1958 : manifestationComité Salut Public • Janvier 1960 : semaine

des barricades par les activistes européens• 11 décembre 1960 : manifestations massives de lapopulation dans les rues.• Mars 1961-Juin 1962 : Période OAS. • Avril 1961 : Putschdes généraux. • 5 juillet 1961 : manifestationpour le FLN..

Toutes ces actions armées et politiques présagèrent de l’avènement de la libération qui seconcrétisa le 5 juillet 1962 et Alger entra deplain-pied dans une autre ère, celle de la liberté,du recouvrement de sa souveraineté et du développement.

CONSEQUENCES URBANISTIQUESDE LA PRESENCE FRANÇAISE

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…Autour de cette zone centrale économique, une zone péricentrale, où se trouvent les habitations, se dégage. Cet espace immédiat contigu à l’aire centrale était occupé par les citadins privilégiés (commerçants, nobles, savants, membres de la caste dirigeante,...).

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A ALGERLa première période de l’Algérie coloniale

(1830-1930) est consacrée au choc de deux civilisations et la naissance d’une deuxième villepour un même espace. De ce fait, la Médina subi-ra, à travers un long processus, des transforma-tions structurelles qui conduiront à sa marginali-sation. Avant juillet 1830, la ville d’Alger intra-muros s’étend sur plus de 50 hectares. Il n’y avaittoutefois ni grande place publique ni espace per-mettant des possibilités de nouvelles construc-tions et la ville est enserrée à l’intérieur de 3 200m de longueur. A la suite de l’occupation colo-niale, l’ancien Alger va changer. Dès les premiersmois, la ville va connaître des démolitions enchaînes pour permettre la réalisation d’une place d’arme : «La place royale» et des voies carrossables pourles engins militaires. Par ailleurs, les nouveauxoccupants cherchent à loger les troupes et les dif-férents services de l’armée ainsi que les «nouveaux arrivants». Durant la première décen-

nie, les transformations de la ville épousent unurbanisme de conquête : aucun plan d’aménagement n’est conçu ; occupation ettransformation des maisons qui se trouvent aubas de la ville notamment ; destruction des souks; alignement des rues Bab Azzoun, Bab El Oued et de la Marine ; aménagement dela Place Royale des rampes Rovigo et Vallée.

De nouvelles modifications ont lieu au cœurde la vieille ville de 1864 à 1890 : Destruction del’enceinte et des portes (1846), construction duFront de mer (1860), percement des rues telles que la place de Chartres, rue de la Lyre, rueRandon et la rue Marengo (1865-1892),construction du boulevard Gambetta (1870).Durant cette même période, une nouvelle encein-te est édifiée et de nouveaux espaces se consti-tuent dans les faubourgs Est (quartier Isly) etOuest (quartier Bab El Oued), pour créer la ville européenne. L’ancien Alger, pour sa part, perdson statut de ville et devint un quartier sous l’ap-pellation de « Casbah » prenant ainsi la dénomi-

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III Patrimoine culturel

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nation de la Citadelle qui la surplombe. Lapériode 1880-1920 est celle de la croissanceurbaine, l’image d’Alger change considérable-ment avec les nouveaux quartiers des hauteurs :Telemly, Michelet, Mustapha supérieur. C’estaussi la période de l’engouement pour le stylenéo-mauresque, édification de la préfecture, dela Grande Poste, du siège de la Dépêche algé-rienne et des Galeries, en plus des maisons par-ticulières. Entre 1920 et 1950, sont construitsplusieurs édifices officiels dont le siège duGouvernorat Général, l’Hôtel de Ville, et laMaison de l’agriculture. La période 1952-1962est celle de la politique des grands ensemblesHLM dont certains destinés à recevoir les habi-tants de la Casbah, cité Diar el Mahçoul, Diar el Saada, Climat deFrance, Diar el Kef, Diar el Djemaa, etc. Laville finit par atteindre les agglomérations sub-urbaines d’El Biar, de Bologhine, d’HusseinDey, de Bir Mourad Raïs et autres et le tout for-mera en septembre 1959 le Grand Alger.

L’ARCHITECTURE D’ALGER DE L’ANTIQUITE A NOS JOURS

La première période concerne l’architectureet l’urbanisme pré-islamiques qui se scindent endeux parties : la première a trait à l’architectureautochtone avant la colonisation romaine, com-prenant les deux grands territoires de l’époque,la Numidie et la Maurétanie, qui attestent l’exis-tence de structures politiques et économiques.

Même si le patrimoine relatif à cette époquereste peu connu et souvent au stade archéolo-gique, il n’en demeure pas moins que dansbeaucoup de cas, les villes romaines ont eucomme assises les villes numides. La secondepartie est l’héritage romain à travers des villescomme Timgad, Djémila, Tipasa,... qui restentparmi les plus importantes du Bassin méditerra-néen et qui témoignent du rôle joué par les citésafricaines dans ce cadre. La seconde périodeconcerne le début du VIIIème siècle qui marque led é b u tde l ’ i s l amisa t ion du Maghreb cen t ra l . Le fait essentiel à retenir, mis à part l’enjeu fondamentalement religieux, est le début d’un

nouveau processus d’urbanisation qui structure-ra le territoire de manière pérenne. Précisons enpremier lieu que les villes traditionnelles s’or-ganisent sur une aire géographique parfaitementdélimitée par un périmètre « urbain », le murd’enceinte, élément architectural à caractèredéfensif, assurant la sécurité de la médina. Lemur est percé de portes (bab) permettant lecontrôle des relations intra et extra-muros. Lesportes principales de la ville étaient reliées parun axe identifiant l’artère principale de la ville.C’est souvent par rapport à cet axe directionnelque se développe et se cristallise l’activité éco-nomique ; les principales institutions religieuseset culturelles sont également dans le voisinageimmédiat de ce parcours. C’est dans cette zoneaussi que s’organise le souk de la médina. Cetteaire commerciale est constituée de trois struc-tures différentes. Une première structureconcentrique formalise le « fondouk », abritantdes activités aussi bien productives que com-merciales.

Ces lieux représentaient principalement lecommerce de gros. Une deuxième structure

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concentrique non formalisée où s’identifie laplace souqaire ou «rahba» (place) est à vocationpurement marchande. Ces places ponctuaientsouvent l’intersection des rues à vocation écono-mique. La troisième et dernière structure trou-vait son interprétation dans la simple juxtaposi-tion des boutiques. Cette association topogra-phique des infrastructures du support écono-mique trouvait aussi son interprétation dans le «souk linéaire» où chaque rue était spécialiséedans un corps de métier ou type de commerce(rue des bijoutiers, rue des cordonniers,...). Cettezone commerciale représente souvent le cœur de lamédina.

Autour de cette zone centrale économique,une zone péricentrale, où se trouvent les habita-tions, se dégage. Cet espace immédiat contigu àl’aire centrale était occupé par les citadins privi-légiés (commerçants, nobles, savants, membresde la caste dirigeante,...). Au-delà de cette airepéricentrique, s’étendaient les zones résiden-

tielles jusqu’aux limites de la ville où résidait la population la plus pauvre de la médina et oùsont localisées les activités artisanales considé-r é e s c o m m e g ê n a n t e s o u p o l l u a n t e s (tanneurs,...).

Enfin, la dernière structuration de la médinaest le lieu de représentation des instances écono-miques, politiques et militaires. Palais et citadel-le (ou casbah) sont les structures identifiant cepouvo i r. Pour l ’ a rch i t ec tu re o t tomane , la médina d’Alger comme exemple reste unmodèle d’organisation de l’espace urbain carac-térisée par une architecture de grande qualité se

distinguant par sa sobriété et par un judicieuxordonnancement sur le site des maisons.

Elle offre ainsi à tous se habitants soleil, vuesur la mer et le ciel, dans un cadre qui assure la protection sociale tant individuelle que collec-tive, mais aussi par la générosité et la richesse deses espaces internes qui attestent d’une véritableculture urbaine. La première période de l’Algériecoloniale (1830-1930) est consacrée à la ren-contre de deux civilisations (l’une musulmane etl’autre occidentale) et la naissance d’une secondeville pour un même espace. L’une des consé-quences de cette confrontation architecturale estla perte de la médina de son statut de ville cen-trale autour de laquelle la vie s’organisa pourconnaître des modifications qui l’éloigneront deson rôle de ville incontournable et précipiter samarginalisation. Le nouveau projet met en pers-pective la nouvelle ville et procède à la mise enplace des concepts et des lieux de la représenta-tion de la puissance coloniale. Les grandes orien-tations urbaines, impulsées par l’Etat, vont don-ner naissance à un nouvel ordre urbain, caractéri-sé par les tracés, plans d’alignement (exigé parles militaires) et de gabarits, fondés par l’accessi-bilité mécanique, l’introduction de la façadeurbaine, le tout dans un système fortement hié-rarchisé. Alger coloniale va se développer paral-lèlement à la mer par la mise en place d’unearchitecture qui aura pour objectif d’unifier laville traditionnelle et la ville coloniale à traversune façade unique. L’exemple le plus frappantest celui de l’ex-boulevard de l’Impératrice, actuels boulevards

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Zighout Youcef et Ché Guevara, véritable balcon de la ville, entamé en 1860 à l’occasionde la visite de Napoléon III, achevé en 1866 et long de plus de un kilomètre. A la fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle, l’archi-tecture sera traversée par un courant culturel, l’« algérianisme », qui tentera d’initier unerecherche identitaire, à travers l’histoire et la culture locales. En faveur de cette conjoncture,émergeront un certain nombre d’édifices publics(la Medersa, la Grande Poste, les Galeries deFrance, actuelles Galeries algériennes). Ce cou-rant a été impulsé par le gouverneur généralJonnart, favorable à une architecture inspirée dulangage de l’architecture mauresque, fortementsoutenu dans cette tâche par le Comité du VieilAlger, association créée en 1905, animée par H. Klein et qui comptera parmi elle l’élite intellectuelle algéroise.

LA LIBRAIRIE (EX-SIEGE DE LADEPECHE ALGERIENNE)

Ce bâtiment, édifié au début du siècle dans la tradition du néo-mauresque, reste caractérisépar son minaret à base carrée qui constitue unélément de repère des deux avenues Khemisti etPasteur. Il a été réalisé en 1906 par l’architecte H. Petit pour abriter le siège du journal la Dépêche Algérienne avec la salle des rota-tives, de pliage et d’exposition à l’étage infé-

r i e u r .A l’étage supérieur se trouve la salle de rédac-tion et des typographes ainsi que la galerie en arcature donnant sur le boulevard Khemisti. Ilfut ensuite le siège du journal AlgerRépublicain. Actuellement, une librairie occupeles lieux.LA GRANDE POSTE

La Grande Poste reste un édifice emblèma-tique de l’art néo-mauresque en Algérie qui aconnu une impulsion remarquable sous l’autori-té du Gouverneur Général Jonnart nommé en

1903. Celui-ci s’intéressant tout particulière-ment à l’architecture locale demanda aux architectesVoinot et Tondoire de concevoir leurs projetsdans cette perspective. Ce qui donna la GrandePoste. La grande caractéristique de cet édificeremarquable transparaît à travers les deux coupoles qui marquent l’articulation des anglesde la façade principale. La promotion de cettearchitecture fut également soutenue par leComité du vieil Alger, une association quicomptait parmi ses éléments les personnalitésles plus influentes d’Alger culturel. Le caractè-re public du monument fait que l’architecturedevait tenir compte de la nécessité de dimen-sions assez grandes en étendue et en hauteur.

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Les travaux débutèrent en 1900 et s’achevèrenten 1908. L’entrée en haut d’un escalier, sous unparvis décoré de trois arceaux et la galerie supé-rieure à colonnes jumelées ne sont la reproduc-tion d’aucun monument arabe. En entrant, l’im-pression première qu’on éprouve résulte non seu-lement du charme du décor, mais aussi de l’am-pleur même de celui-ci. Ce qui attire de primeabord c’est la coupole dont la superbe décorationentrelacs rayonnant jaillit du centre où s’ac-croche un pendentif, pour s’épanouir ensuite surun premier cercle paré de pommes de pin, puissur un second constellé d’étoiles, et, enfin, sur cette admirable couronnede stalactites. L’architecte M. Voinot a su utiliser les jeux de lumière qui, bien qu’abondan-te parce que nécessaire, s’atténue à souhait encertains endroits, combinant ces jeux d’ombre etde lumière dans lesquels les architectes musul-mans sont passés maîtres. Suivant la formule his-pano-mauresque, le décor est polygonal, floral etépigraphique. L’épigraphe est particulièrementsomptueuse, on la retrouve dans la décorationextérieure de l’édifice. A l’extérieur, en panneauxverts courant le monument, sont gravés les nomsde la plupart des villes d’Algérie. Sous lep o r c h e , a u t o u r d e s t r o i s portes d’entrée, on peut y lire «le télégraphe et letéléphone l’ont créé». A l’intérieur, dans les car-touches, en caractères koufis imitant une brode-rie, sont transcrites les phrases suivantes : «Il n’ya de puissant qu’Allah», «Le pouvoir éternel Luiappartient». Enfin, au-dessus en hautes lettresclaires : «Allah est vainqueur». Cette dernièreinscription se renouvelle en haut du mur et aupourtour du hall. Ce décor oriental, commepresque toute l’architecture musulmane, recèleun sens religieux : les lignes de la polygonée évo-quent continuellement l’idée divine, le bouquetle symbole de la prière, le cyprès celui de la déli-vrance de l’Homme, l’étoile un symbole d’ado-ration.

SIEGE DE LA WILAYA D’ALGERLe siège de la wilaya d’Alger est un édifice

atypique du front de mer par la composition de ses formes architecturales, arcs et coupolesdonnant sur le boulevard et façade, plus austère

et de type colonial, sur la rue Asselah Hocine.L’organisation interne de l’édifice se fait

autour d’un patio qui distribue les espaces auxdifférents niveaux. Cette construction a étél’œuvre, en 1908, de l’architecte attitré du gouverneur général d’Alger Jonnar t , en l’occurrence H. Petit.

L’AERO-HABITAT

L’aéro-habitat reste le bâtiment paradigma-tique de l’influence directe de Le Corbusier àAlger, au moins au niveau des relations qui lientles auteurs du projet à ce dernier. Les autres faitsplus marquants sont les similitudes des conceptsutilisés et forts ressemblants qui existent auniveau de l’unité d’habitation de Marseille etl’aéro-habitat qui peuvent se résumer ainsi : lebâtiment ville, la fonctionnalisation spatiale, lerationalisme de l’espace, etc. Conçu par lesarchitectes P. Bourlier, J. Ferrer, Laloé et L. M.Miquel, cet édifice a été réalisé en 1955 pour lecompte de la Compagnie aérienne: Implantationjudicieuse et très discrète dans le site malgrés a h a u t e u r , a p p a r t e m e n t s e n d u p l e x , rue commerçante au 10éme étage offrant des vuesimprenables sur le panorama de la ville d’Alger.Le projet de l’«aéro-habitat» tire son nom d’unesociété d’habitat à loyer modéré (HLM) regrou-pant initialement des employés des ateliersindustriels de l’air ; par la suite, la société s’estétendue aux autres employés fonctionnairesd’autres administrations constitués principale-ment par des fonctionnaires et certains représen-

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tants des professions libérales. Quatre édificescomposent le groupe Aéro-habitat sur les hau-teurs d’Alger, dans le parc Nalglaise, caractéri-sé par un terrain fortement accidenté, mais ayantl’avantage d’avoir des vues panoramiques sur labaie d’Alger. Deux parmi ces quatre édifices lesplus hauts comptant vingt-deux et seize étages,se positionnent perpendiculairement auxc o u r b e sde niveau, sur une surface totale d’environ unhectare et demi, le bâti occupe 22.34 % de la surface totale. La concrétisation de ce projet nes’est pas faite facilement. En effet, celui-ci aopposé, par le fait de dérogations qui lui ont étéaccordées, un comité de défense des habitantsd’Alger et des futurs locataires par presse et mairie interposée, où le problème central étaitcelui de l’habitat vertical appelé à cette époquegratte-ciel.

ECOLE DES BEAUX ARTS L’école nationale des Beaux arts, située sur

le boulevard Krim Belkacem, présente uneorganisation spatiale en forme de H identifié pardeux ailes longitudinales et une aile transversa-le, encadrant une cour d’honneur desservie parun escalier assez imposant. Situé sur un terrain

à forte déclivité et afin que les bâtiments neviennent pas enterrer des cours anglaises, desmurs de soutènement séparant les murs du bâti-ment ont été aménagés. Les bâtiments se carac-térisent par de grandes ouvertures offrant de trèsbelles vues sur le panorama d’Alger. La qualitéde cet édifice, dont furent à l’origine en 1950 lesa r c h i t e c t e sL. Claro et J. Darbeda, est rehaussée par lesmatériaux utilisés et par sa pureté de lignes.Initialement, l’Ecole des Beaux arts était situéerue de la Mar ine , p rès de la Pêcher ie . La démolition du quartier jugé insalubre entraî-na le lancement d’un concours d’architecturepour une nouvelle école qui allait être le fleuronde la culture artistique à l’échelle africaine. Ence début des années 50, le concours fut rempor-té par l’architecte Claro et le projet fut adoptépour le site du parc Zyriab. Profitant du site for-tement incliné, l’architecte a parfaitement bienadapté les différents blocs selon leur fonction etleur accessibilité. Noyé dans un somptueux jar-din, l’édifice, de par son architecture modernis-te rigoureuse inspirée par les frères Auguste etGustave Perret et qui respecte la symétrie de l ’ a r ch i t ec tu re de l a Rena i s sance danssa composition et ses plans, est un joyau architectural.

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PATRIMOINE CULTUREL

IMMEUBLE LAFAYETTECet immeuble d’une hauteur de soixante-

quinze mètres est situé en plein centre d’Alger auflanc d’une colline surplombant le boulevardMeddad dont l’implantation est très prononcéesur le site d’Alger avec ses quinze étages. Celadémontre tout le génie des architectes à l’origine,

en 1950, de cet ouvrage. Il s’agit de M. Solivereset A. Cazalet. L’immeuble Lafayette prend assisesur un socle en béton armé de 2 700 mètres car-rés qui constitue sa base contenant commerces,studios et places de parking pour voitures dans lapartie centrale. Sur ce socle est aménagé un jardin d’enfants. L’autre partie de l’immeuble estcomposée de quatre blocs de bâtiments desservispar quatre escaliers et sept ascenseurs assurant lacirculation verticale pour les sept appartementspar étage. La caractéristique de cet immeuble estl’utilisation d’une ossature métallique, sa struc-ture est composée de deux IPN jumelés espacésde façon à recevoir les portes transversales et des IPN continus de façade à façade.

LA CATHEDRALE DU SACRE CŒUR

Le samedi saint du 5 avril 1958, les travauxcommençaient sous la direction de MM. Minet etPerret, gérants de l’entreprise de construction

Perret frères. Le 5 novembre1958, MonseigneurPerrin, archevêque de Cartage primat d’Afrique du Nord, bénissait les fonda-tions et posait la première pierre. Le 25 mars1961, la croix était hissée à l’extrémité de laflèche qui surmonte l’édifice. Le 13 décembre1962, l’église du Sacré Cœur était élevée au rangde cathédrale. L’idée exprimée par les architectespour la construction de cette cathédrale est baséesur le concept d’une tente. Dans cette optique,S a i n t - J e a n , d a n s l ’ E v a n g i l e , affirme : « Dieu a planté Sa tente parmi nous ».

D’ailleurs, lorsqu’on se place au centre del’église, on aperçoit nettement le voile qui estrelevé par les piliers. Le mouvement est plus netau-dessus et en arrière de l’autel où le majes-tueux et souple velum est sous-tendu par quatregracieuses colonnes au galbe étonnant. Le termetechnique est «poteaux ». D’ailleurs, cela fait penser à des roseaux, dont la coupe serait uneellipse, qui tendent une tente légère. La rosace det o u r s ’ é l è v e à 3 5 m è t r e s d u s o l . C e t t e immense coupole repose uniquement sur huitpiliers assis sur d’énormes champignons solide-ment fondés par des pieux de 18 à 20 mètres surle grès souterrain. La longueur totale de la nef estde 52 mètres sur une largeur de 35 mètres. Levitrail, une sublime décoration, court le long del’édifice le coupant en deux, si bien qu’on pour-rait abattre les murs, la coupole resterait soutenuepar ses piliers. L’ensemble du vitrail est unagréable jeu de couleurs (bleu, rouge, or, verts o m b r e , . . . ) . A u x q u a t r e a n g l e s d e l’ouvrage, entre les piliers, se dresse une figurerappelant une manifestation de l’amour de Dieupour les Hommes. Le travail le plus délicat etdont la finition rappelle le génie du maître del’œuvre, fut l’alternance presque parfaite despierres qui sont disposées alternativement dansles sens vertical et horizontal. L’œuvre artistiquela plus remarquable de la cathédrale est sansconteste celle se trouvant en face de l’orgue (donde la paroisse de Boufarik), en l’occurrence lamagnifique mosaïque datant du quatrième sièclequi orne le mur.

C’est la seule mosaïque d’Afrique du Nordqui fut datée (l’an 324). Elle provient de la première basilique de Castrum tingitanum

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LA VILLE D'ALGER "La protégée de Dieu"

PATRIMOINE CULTUREL

(Orléansville). Cette pièce unique de l’art chré-tien antique est la plus ancienne représentationde l’Eglise sous la forme d’un labyrinthe.

LA CITE DES SCIENCESPour ne pas rester en marge de la modernité

et à l’instar des grandes villes du monde, la commune d’Alger Centre a initié un projet degrande envergure à même de la faire entrer dansle troisième millénaire par la grande porte. Ils’agit de la Cité des sciences. Localisée sur leboulevard Frantz Fanon, cette cité englobe ungrand nombre d’activités scientifiques, dont leplanétarium. L’ensemble est doté d’équipe-ments et instruments de grande technologie telsque le Starmaster, un appareil à précision méca-nique et optique permettant la représentation duc i e létoilé, du soleil, de la lune et des planètes ; desprojecteurs de diapositives montrant douzepanoramiques ; d’un projecteur vidéo RGB pourla projection des scènes vidéo dont la source estun disk laser ou cassette vidéo ; d’un équipe-ment audio avec baffles, amplificateur de son etmixeurs ; d’un studio son où se déroulent les opérations d’enregistrement, de mixage, de filtrage et de synchronisation. Le planéta-rium est un simulateur d’étoiles étonnament réa-liste sous une voûte céleste et imposante surlaquelle un planétaire produit un ciel nocturnep u r .Le diamètre du dôme est de 17 mètres. Il permetà près de 200 spectateurs, initiés ou non à l’astronomie, de découvrir les mystères de l’uni-

vers. Il aide à connaître les mouvements des astres, les éclipses, les mouvements de la Terreet les rythmes des saisons, la voie lactée et laposition du soleil dans notre galaxie. Le specta-teur peut également observer les phénomènescélestes de n’importe quel point de la Terre,accélère les mouvements des astres du systèmesolaire et même lui donner l’impression de se dépla-cer dans l’espace et dans le temps.

L’HOTEL EL AURASSINiché sur les hauteurs de la capitale, l’hôtel

El Aurassi, du haut de ses 13 étages, domine labaie d’Alger. Espace de calme et de lumière, cejoyau de l’hôtellerie algérienne classé 5 étoilesest l’escale idéale pour les voyages d’affaires etd’agrément. En effet, l’hôtel est distant à 15 km

de l’aéroport international Houari Boumédienneet est situé à proximité des ministères, desbanques, de l’ensemble des commerces et dessites culturels. Occupant une superficie totale de125 850 m2 et une surface bâtie de 15 000 m2,l’hôtel El Aurassi est une société par actions aucapital de 1 500 000 000 DA. Disposant de 445chambres spacieuses et confortables dotées detoutes les commodités à même de rendre le

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LA VILLE D'ALGER "La protégée de Dieu"

PATRIMOINE CULTUREL

séjour des clients agréables, l’hôtel montre unecapacité en lits de 775. Le côté gastronomique

n’est pas en reste puisque trois restaurants proposent à l’appétit des voyageurs une gammede spécialités traditionnelle, internationale et de poissons et fruits de mer avec un total de 1 000 couverts servis. Des bars feutrés ne man-queront pas, en outre, de dépayser la clientèle.Pour agrémenter le séjour des clients, unensemble de loisirs et d’espaces détente sont misà leur disposition notamment une belle piscineentourée de magnifiques jardins, des courts detennis en plein air, un shopping center pour lespetites courses, etc. Par ailleurs, l’offre de based el’hôtel El Aurassi est l’organisation de banquets,conférences et congrès et ce, grâce à sa positionde leader de par sa capacité en salles de réunion.

Toutes les salles sont équipées en matériel desonorisation avec possibilité de traductionsimultanée en quatre langues.

L’UNIVERSITE D’ALGERLundi 2 janvier 1832. Au pied de la colline de

Bouzaréa, le jardin du Dey : une grande habita-tion luxueuse datant de la seconde moitié duXVIIIème siècle, l’armée fondait dans l’ancienneRégence le premier établissement français d ’ e n s e i g n e m e n t s u p é r i e u r. E n d a t e d u 10 juin 1833, une note du ministre de la Guerreautorisait les étudiants turcs, maures et juifs de la

colonie d’Afrique à suivre les cours de la nouvelle école de médecine. Dans ce mêmelocal, une chaire sera fondée pour l’enseigne-ment de la langue arabe pour les Europèens. Peuaprès la médecine, l’arabe obtenait droit de citédans l’enseignement supérieur algérien.

En mai 1835, le ministre de la Guerre nom-mait officiellement un corps professoral de troismédecins, quatre chirurgiens et trois pharma-ciens. On parvenait à créer un jardin botaniquede cinq à six cents plantes. La bibliothèque del’Ecole s’enorgueillissait de sept à huit centsvolumes. Mais au début de 1836, se répandait lebruit de sa suppression prochaine. En juin de lamême année, Clauzel supprimait l’hôpital d’ins-truction. Ainsi passèrent plus de dix ans au coursdesquels l’organisation militaire et administrati-ve absorba l’essentiel des activités.

Ce qui demeura des Ecoles changea delocaux passant d’une rue à une autre, mais l ’expansion et la reconnaissance de ces «institutions» prenaient de l’ampleur au fil desans prouvant par là leur efficacité et surtoutqu’elles pouvaient rivaliser en qualité et en quan-tité avec les Ecoles de France. Un nouvel espacedevrait leur être affecté. C’est ainsi que le campd’Isly, qui se trouvait dans la commune deMustapha à quelque deux ou trois cents mètres de la porte d’Isly qui, depuis 1850, sedressait non loin de la Grande Poste, fut choisipour l’érection du nouveau bâtiment. Fin 1884,les travaux commençaient en un lieu que lesAlgérois dénommaient «le champ de navets». Lebudget alloué à ce projet dépassa largement lesdeux millions et demi de francs. La constructiondonna lieu à un imposant corps de bâtiment de120 mètres de long sur 12 mètres de profondeuravec quatre ailes de 32.6 mètres de longueur sur9 de largeur.

L’inauguration eut lieu le 13 avril 1887. Et le 3 novembre 1887, c’était la première rentrée solennelle des quatre Ecoles sous la pré-sidence du recteur Jeanmaire qui allait dirigerpendant plus de vingt ans l’Académie d’Alger.L’évolution de l’effectif des étudiants ayant fréquenté cette nouvelle structure passa de 377en 1892 à 1605 en janvier 1909, c’est-à-dire laveille de la fondation de l’Université d’Alger.

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LA VILLE D'ALGER "La protégée de Dieu"

PATRIMOINE CULTUREL

LA BIBLIOTHEQUE NATIONALED’ALGER

Créée en 1835, par décision du ministre de laGuerre, la Bibliothèque nationale d’Alger setrouve être le plus ancien établissement culturelde l’Algérie. Après avoir été hébergée dans denombreux «locaux», la Bibliothèque nationalefut transférée, depuis 1863, dans l’ancienne rési-dence du Dey d’Alger, Mustapha Pacha, l’undes plus beaux spécimens de l’architecturemauresque du XVIIIème siècle. En 1947, il futdécidé la réorganisation de la Bibliothèquenationale. En effet, la modeste bibliothèque fon-dée en 1835 n’était plus à l’échelle des nou-velles circonstances. L’énorme croissancedémographique, le développement de la scolari-sation dans les trois degrès de l’enseignement,les changements culturel et économique del’Algérie contemporaine créent des problèmeset des besoins nouveaux sur le plan des biblio-thèque et de la lecture publique. De plus, lepalais du Dey Mustapha est peu adapté à lafonction qu’on lui attribua : pièces obscures etmal aérées, salle de lecture exiguë, manque deplace face à l’accroissement des collections et,enfin, taux d’humidité menaçant les ouvrages dedestruction. En 1949, la question de la construc-tion d’une nouvelle bibliothèque est à nouveau

reprise. C’est l’architecte de talent M. LouisTombarel qui élabore un plan prévoyant l’amé-nagement d’une vaste bibliothèque au Parc dessports des Tagarins. Après bien des péripéties, ce projet est enfin adopté et la pose de la première pierre de l’édifice eut lieu le 10 avr i l 1954. Quat re ans plus tard , le 12 mai 1958, la bibliothèque ouvre ses portesau public. Situé dans un site enchanteur avecune vue sur la baie d’Alger, le nouveau bâti-ment, orienté vers l’est et vers la mer, s’étendrasur une façade de 122 m de long sur 17 m dehaut. Les deux façades latérales mesurent 35 mde long. Bâti à flanc de coteau, l’édifice, cou-vrant une superficie de 4 800 m2, s’étend sur dixniveaux différents avec trois étages en sous-solet trois en superstructure. La Bibliothèquenationale d’Alger présente le double aspectd’une bibliothèque nord-africaine, embrassanttout ce qui a trait à l’Afrique du Nord et l’Islam,et d’une bibliothèque de documentation généra-le à caractère encyclopédique. Des sections

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LA VILLE D'ALGER "La protégée de Dieu"

PATRIMOINE CULTUREL

annexes lui sont également rattachées telles quela bibliothèque musicale et discothèque (12 000partitions musicales et disques : opéras, musiqued’orchestre, musique de chambre,...), service demicrofilm et photocopie, exposition,... LaBibliothèque nationale d’Alger peut accueillirdans ses salles de lecture jusqu’à 600 lecteurs etabrite plus de 2 millions de volumes dans unrayonnage totalisant près de 17 km de long.

LE MUSEE NATIONAL DES ANTIQUITES ET DES ARTS ISLAMIQUES

L’idée de la création d’un musée historiquequi préserverait l’héritage culturel de l’Algérier e m o n t e à 1 8 3 5 . M a i s c e n ’ e s t q u e l e 19 avri l 1897 que le musée nat ional des antiquités fut inauguré par le président françaisFélix. Néanmoins, le musée commença à acquérir ses premières collections islamiques dès1846, collection qui s’est enrichie au fil des ans.Le maréchal Bugeaud fut à l’origine, en 1846, dela création de la section islamique de ce musée.

Situé au sein même du parc de la Liberté, lemusée national des antiquités est le plus ancienmusée d’Algérie et d’Afrique. Avant l’indépen-dance, il porta les dénominations suivantes :musée des ant iqui tés class iques et d’ar t musulman, musée Stéphane Gsell (éminentarchéologue, spécialiste de l’Afrique du Nord, qui fut directeur du musée jusqu’à sa disparitionen 1932) , musée nat ional des ant iqui tés classiques et musulmanes et, enfin, musée natio-nal des antiquités. Mais l’inauguration du nou-v e a u b â t i m e n t q u i p o r t e l e n o m A r t s islamiques permettra la création d’une nouvelleinstitution : le musée national des antiquités etdes arts islamiques. Le musée national des anti-quités comprend deux sections : le départementdes antiquités classiques dont la collection datede 1835 et regroupe des sculptures , des

mosaïques et des bronzes découverts sur lesprincipaux sites archéologiques d’Algérie. Lereste du musée est occupé par les collections del’Occident musulman (Algérie, Tunisie, Maroc etEspagne) et du Proche-Orient (Egypte, Syrie,Turquie et Iran) qui sont venues s’ajouter à lasection antique à partir de 1846.

LE PALAIS ZIGHOUD YOUCEFLes études de cet édifice par l’architecte du

gouvernement général français M. Darbeda ontdébuté en 1912. La construction du palais, commencée en 1917, s’achèvera dans les annéesvingt. Ce sont les «Délégations financières»,organisme institué par le gouvernement françaisen août 1898, en concession à la revendicationd’autonomie financière des colons fortunés etpuissants, qui réclamèrent en 1911 la construc-tion de ce qui devait être leur siège, sous le nomde Palais Carnot. Après avoir abrité en 1945 l’« Assemblée financière de l’Algérie » qui avaitsuccédé aux «Délégations», l’édifice devint en

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ALGER CENTREEN IMAGES

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ALGER CENTRE VUE GENERALE

Vue du haut de l’hôtel Aurassi sur Alger Centre et sa légendaire baie

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ALGER CENTRE VUE GENERALE

≤Ed… ±s ≤e‰ «_˸«ßw Kv ±b¥MW «∞πe«zd Ë«∞LOMU¡

«∞πe«zd... ±b¥MW √“∞OW «∞∂MU¡

¥F∑∂d ±OMU¡ «∞πe«zd √ˉ ±OMU¡ ∞K∑πU… ≠w «∞IDd «∞πe«zdÍ

Alger... une ville à urbanisme caractéristique

Le port d’Alger, le plus important à l’échelle nationale

Page 72: La Ville d'Alger 2004

¢L∏U‰ «_±Od ∂b «∞IUœ¸√•b ±FU∞r ±b¥MW «∞πe«zd

La statue de l’EmirAbdelkader, l’un desjoyaux culturelsd’Alger Centre

Page 73: La Ville d'Alger 2004

APC ALGER CENTRE

L∂Mv «∞∂Kb¥W ±s «∞b«îq. Intérieur de l’APC

«∞NMbßW Ë«∞b¥Øu¸ °≤Lj´d°w ±ußØw.

Architecture et décoration de stylearabo-mauresque

Page 74: La Ville d'Alger 2004

APC ALGER CENTRE

±K∫IW °Kb¥W «∞πe«zd «∞ußDv °MU¥W •b¥∏W ±s îLf ©u«°o ¢MIh «∞CGj Kv «∞∂Kb¥W.

L’annexe de l’APC : un édifice de cinq étages au service du citoyen

Page 75: La Ville d'Alger 2004

LE SIEGE DE LA WILAYA

®Ob‹ UÂ 8091

¥∑Q∞o ±Id «∞uô¥W ØU∞IBdËßj «ùîCd«

Le siège de la wilaya s’étend tel un palaisau milieu d’une ambiance verdoyante

L’inauguration a eu lieu en 1908

Page 76: La Ville d'Alger 2004

APN

«∞u«§NW «∞dzOºOW ∞KL∂Mv Façade principale de l’édifice

«≤AU ≥c« «∞LId ≠w 0591∞OJuÊ ≤e‰ °KbÍ ≈∑Lb ≠w «∞∂MU¡ Kv «ù{U¡…«∞D∂OFOW °u«ßDW «∞u«§NU‹ «∞Le§πW Ë«∞Mu«≠b «∞u«ßFW

Ce siège avait été édifiéen 1950 pour abriterl’Hôtel de ville

L’éclairage naturel à travers des baies vitréesgéantes est la touche particulière de l’architecte

Page 77: La Ville d'Alger 2004

APN

√•b «∞Lb«îq «∞πU≤∂OW ∞KL∂MvL’un des accès latéraux du bâtiment

«ô{OW, «∞Le≥d¥WË«∞Ku•W£öÀ ¢∫n ¢∑MU≠f §LUô

Les décorations du solet des murs rivalisenten beauté

Page 78: La Ville d'Alger 2004

APN

œ¥Ju¸ «∞L∂Mv ¥e¥b ≥Mbß∑t Ë≤IU A architecture originale, décor somptueux : les deux offrant une parfaite harmonie

ÅUKu≤Us ∞ö§∑LUU X °b¥Ju¸ «∞Ids91Salles de réunion au décor du XIXème siècle

Page 79: La Ville d'Alger 2004

APN

∞u•W ¢L∏q «∞AπUW Ë«∞HdËßOWFresque murale représentant la bravoure et la cavalerie

≈î∑Od ∞Jq ¸Øs ±U¥KOo °t A chaque coin son ornement : une démonstration de goût et de finesse

§U≤V ±s «∞Ku•WUn détail de la fresque

Page 80: La Ville d'Alger 2004

CNA

«_Æu«” ≥w îUÅOW «∞u«§NW «∞∂∫d¥W

«∞∂U» «∞dzOºw ∞LπKf «_±W Accès principal duConseil de la nation

πe¡ ±s ∑e¥MU‹ «∞∂U»

Les arcades, principale caractéristiquedu côté de l’édifice donnant sur le front de mer

Détail d’un ornement de la porte

Page 81: La Ville d'Alger 2004

CNA

°Nu LπKf «_±WHall du siège du Conseil de la nation

«∞πb«¥W «∞∑w ¢F∑Kw «∞∂Nu ¢L∏q «∞∫OU… «∞Ou±OW °M∫X °U“

ÆKW ¢∑ußj «∞°Nu

˧t ∞d§q °IdËÊ Ø∂g ¥e¥s ©d≠w «∞IKW

Un vase ornant le centre du hall

Sculpture murale retraçant la vie quotidienne Un masque d’homme aux cornes de bélier ornant l’anse du vase

Page 82: La Ville d'Alger 2004

CNA

Ë«o ¥RœÍ ≈∞v «∞LπKf

“¥MX Øq §bd«Ê «∞BU∞uÊ °Ku•U‹ §b«¥W¢L∏q ±î∑K· ±MU Do «∞πe«zd

«∞BU∞uÊ «∞dzOºw ¥u§b ≠w «∞DU°o «_ˉ ∞KL∂Mv √≤AQ ≠w 7291ù´∑MU‚ «∞LR¢Ld«‹

Les toiles murales ornant le salon représentent différentes régions del’Algérie

Couloir menant à l’intérieur de l’hémicycle Le salon, situé au premier étage, fut inauguré en 1927 pour abriter des conférences

Page 83: La Ville d'Alger 2004

CNA

¢Uà Luœ Od ®b¥b «∞∂dË“

≤∂∑W ≠d¥b… ≠w ±JUÊ ≠d¥b

¢HUÅOq ±s «ô{OW

¢HUÅOq ±s «∞ºIn

Décoration en bas relief du sommet d’une colonne

Détail du revêtement du sol

Plante rare dans un lieu original Détail du plafond

Page 84: La Ville d'Alger 2004

LA GRANDE POSTE

«∞∂d¥b «∞LdØeÍ √•b √≥r ±FU∞r «∞Hs «∞LußJw «∞πb¥b

≠w Øq §e¡ ±s «∞MIu®U‹ ≥MU∞p ≈≤Hd«œ îU’

La Grande Poste : un témoin vivant de l’art néo-mauresque

A chaque motif des sculptures son originalité

Page 85: La Ville d'Alger 2004

LA GRANDE POSTE

±bîq ±s ±b«îq ±Id «∞∂d¥b±∏U‰ ≠w «∞bÆW Ë«∞∑MUßo

≥Mbß∑NU Ë¢e¥MU¢NU §FK∑NU ≈≤Hd«œ •IOIw ≠w Øq «∞FLU… «∞Fd°OW

¢Uà Luœ ¥e¥s ±Id «∞∂d¥bË«∞Lu«Åö‹... ≤Iu®t U¥W ≠w «∞bÆW

«≤πe‹ «∞MºuîU‹ «∞πb«¥W ±s ©d· ≠MUÊ ±Gd°wîe· ±eîd· ¥e¥s «∞πb¸«Ê

Son architecture et sa décoration confèrent à l’édifice une originalité

L’un des accès de la poste, un exemple de la complexitéet de l’harmonie

Revêtement mural aux couleurs chatoyantes

Décoration d’une colonne du siègedes télécommunications à la précision sans commune mesure

Les décorations calligraphiques ont été réaliséespar un artiste maghrébin

Page 86: La Ville d'Alger 2004

L’UNIVERSITE D’ALGER

°MOX §U±FW «∞πe«zd ≠w •Iq ≈ßKw œ®MX ≠w 31√≠d¥q 7881L’université d’Alger fut édifiée dans le champ d’Isly L’inauguration a eu lieu le 13 avril 1887

Page 87: La Ville d'Alger 2004

L’UNIVERSITE D’ALGER

œÃ ¥RœÍ ≈∞v «∞LJ∑∂W §U±FW «∞πe«zd °MU¡ {ªr ËË«ßl

°u«°W ±s «∞ªAV «_•Ld Ë∞ûîCd« ≤BOV Ø∂Od ≠w «∞πU±FW ¢e¥s ≠w §U±FW «∞πe«zd ¥L∏q √ßb

Escaliers menant à la bibliothèque Un édifice vaste et spacieux

Une sculpture décorative représentant une tête de lion

Portail en bois rouge Les espaces verts occupent unepart importante de l’édifice

Page 88: La Ville d'Alger 2004

LA CITE DES SCIENCES

±b¥MW «∞FKu ... ≈≤πU“ ¥º∑∫o «∞∑Ib¥d La Cité des sciences... une louable initiative

Page 89: La Ville d'Alger 2004

LA CITE DES SCIENCES

¢Il «∞Lb¥MW ≠w ®UŸ ≠dË≤f ≠U≤uÊ

§b« ∑Oo ±U ¥e«‰ ÅU±b¥u§b °U∞Lb¥MW, ¥Fuœ ≈∞vßMW 3581

Le bâtiment longe le boulevard Frantz Fanon

Un mur imposant datantde 1853 se dresse au seinmême de la Cité

Page 90: La Ville d'Alger 2004

LA CITE DES SCIENCES

∞KLb¥MW £öÀ ±∂U≤w : «∞L∂Mv «∞LdØeÍ, «∞LJFV Ë«∞MπLw

≥MbßW Bd¥W ±∂∑Jd… ≤Ed… Kv ±b¥MW «∞FKu ±s ≠Mb‚ «_˸«ßw

La Cité abrite trois édifices : un central, un cubique et un en forme d’étoile

Une architecture modernevisionnaire

Vue du haut de l’hôtel Aurassi sur la Cité des sciences

Page 91: La Ville d'Alger 2004

LA CITE DES SCIENCES

§b«¥W ¢L∏q ±ª∑Kn «∞FKu ±s ≈≤πU“ «∞HMUÊ œ¸°U‰ «∞Bb¥o

§e¡ ±s «∞πb«¥W «∞I∂W «∞HKJOW ≥w ≠CU¡ ¢EU≥dÍ ∞KMπu ...¢º∑L∑l ≥MU °d•KW ≠w «∞HCU¡

Gravure rupestre représentant différentes sciences universelles exécutée par l’artiste Derbal Sedik

Détail de la décoration murale

Le dôme : un espace de défilement pour les étoiles offrant un merveilleuxvoyage sidéral

Page 92: La Ville d'Alger 2004

LE CINEMA ALGERIA

¢∫∑Cs «∞ºMLU ¢EU≥d«‹ Ë≤AU©U‹ îUÅW °U∞Lb«” öË… Kv d÷ «_≠öÂ

≈ß∑GKX «∞LºU•U‹ «∞b«îKOW °Dd¥IW §LOKW Ë–ØOW ßKLUÊ ¥Rœ¥UÊ ≈∞v ÆUW «∞Fd÷

Outre la projection de films, le cinéma Algeria abrite également de nombreuses manifestations et activités culturelles scolaires

L’espace intérieur a été exploité de façon rationnelle alliantutilité et esthétique

Deux escaliers menant à la salle de projection

Page 93: La Ville d'Alger 2004

LES STADES

§U≤V ±s ±KFV Ë«ÆMu≤w

±KFV Os “°u§W √•b «ù≤πU“«‹ «∞πb¥b… ∞∂Kb¥W «∞πe«zd «∞ußDv, ≠CU¡ ¸¥U{w ∞KA∂U» Ë«∞JNu‰ √¥CU...

îBh ∞Jq ¸¥U{W §U≤V ±s «∞LKFV

Vue sur une partie du stade Ouaguenouni

A chaque discipline sportive son espace

Stade Aïn Zeboudja : un nouvel espace pour les jeunes parmitant d’autres dont fut à l’origine l’APC d’Alger Centre

Page 94: La Ville d'Alger 2004

LA BIBLIOTHEQUE NATIONALE

®d≠W ≠w «∞LJ∑∂W «∞u©MOW

DOX «_´Lb… «∞b«îKOW ∞KLJ∑∂W «∞u©MOW≤BHOU °U∞ªAV «_•Ld

≥wH{U¡ KLw Mw

Une des salles de lecture

Le revêtement des colonnes a été réaliséen bois rouge

Un riche espace scientifique

Page 95: La Ville d'Alger 2004

LE MUSEE DES ANTIQUITES

¥Fb «∞L∑∫n «_Æb ≠w

«∞πe«zd Ë≈≠d¥IOU

Le musée desantiquités est leplus ancienmusée d’Algérieet d’Afrique

Page 96: La Ville d'Alger 2004

LE MUSEE DES ANTIQUITES

¥u§b «∞L∑∫n œ«îq•b¥IW «∞∫d¥W

±bîq ±∑∫n «∞HMuÊ «ùßö±OW, °MOX «∞u«§NW °MHf ≤LjË«§NW «ü£U «∞Ib¥LW

Le musée est localisé au sein même du parc de la Liberté

Façade datant de l’époque coloniale à architecture de style arabo-musulman

Un style architectural identique pour la façade des deux musées

Page 97: La Ville d'Alger 2004

LE MUSEE DES ANTIQUITES

§U≤V √îd ±s «∞L∑∫n

∞u•W ≠ºOHºUzOW ±s ØMOºW ±ºO∫OW ¢d±e ∞Kd«w «∞BU∞, Ë®Iu≤OU (°dë∞∂∫dÍ), ¢Fuœ ∞KIdÊ «∞ªU±f Æ∂q «∞LOöœ

√≤πe‹ ≥cÁ «∞u«§NW ≠w «∞FNb «ùß∑FLUÍ Kv ≤Lj«∞NMbßW «∞Fd°OW «ùßö±OW

Vue du musée sous un autre angle

Mosaïque provenant d’une basilique chrétienne de Rusguniae(Cap Matifou) représentant la légende du bon pasteur (Vme siècle ap. J.-C.)

Page 98: La Ville d'Alger 2004

LE MUSEE DES ANTIQUITES

≤Ed… U ±W Kv ÆUW «∞Fd÷

¢U°u‹ ±s «∞dîU ¥πºb «∞LFπe«‹ «∞º∂l ∞KºOb «∞LºO,«∞IdÊ «∞d«°l ±OöœÍ, ˧b ≠w œ ∞f

¢U°u‹ ±s «∞dîU ≤Ig KOt √ßDu¸… °KKuË≠uÊ, «∞IdÊ «∞∏U∞Y ±OöœÍ,˧b ≠w √“≠uÊ

§d… KONU Åu¸… ≤BHOW ∞û∞NW¢U≤OX, ±BMuW ±s «∞HªU¢Fuœ ≈∞v «∞IdÊ «∞ªU±f Æ∂q«∞LOöœ, ˧b‹ ≠w «∞Iq

Sarcophage représentant la légende du hérosmythologique de la vaillance et de la force

Bellérophon (Azzeffoun, 3ème siècle ap. J.-C.)Cruche trilobée sur le col de la déesse Tanit datant de la période punique (Collo, Ve siècle ap. J.-C.)

Sarcophage représentant les sept miracles du Christ(Dellys, IVe siècle ap. J.-C.)

Une des salles d’exposition

Page 99: La Ville d'Alger 2004

LE MUSEE DES ANTIQUITES

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Escaliers de style néo-mauresquemenant à la salle d’expositionsection musulmane

Statue en marbre, datant de la période, représente Bacchus, dieu du vin et de l’immortalité, coiffé d’une grappe de raisin et appuyé sur un thyrse(Découverte à Constantine).

Mosaïque représentant le dieu Océanbarbu entouré par quatre néréides che-vauchant des animaux marins (Sétif,fin du IVe siècle ap. J.-C.)

Mosaïque représentant les quatre sai-sons par des personnages en bustes(Tebessa, IIe siècle ap. J.-C.)

Stèle dédiée à la déesseTanit (punique tardif)

Page 100: La Ville d'Alger 2004

ECOLE DES BEAUX ARTS

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Le siège de l’Ecole depuis 1881

Du haut de la principale place de l’Ecole, une vue imprenablesur la ville d’Alger et son port

Page 101: La Ville d'Alger 2004

ECOLE DES BEAUX ARTS

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Statue " les Orphelins "

Transcription datant de la période ottomane désignant un texte inaugural d’une mosquée

A chaque coin de l’Ecole, une statue orne les lieux

L’inscription est dédiée à l’empereur Hadrien (117-138 ap.J.-C.), fils de l’empereur Trajan, petit-fils de l’empereur

Nerva. Il est auguste et il est le grand pontife (prêtre), il a lapuissance tribunicienne pour la 16ème fois ; il est consul pourla 3ème fois et il est le père de la patrie. L’inscription est également dédiée à Lucio Vamo Ambibulo. Il est légatd’Auguste et propreteur (commandant) dans la 3ème légiond’Auguste.

Statue en pierre : œuvre de l’artisteBelmondo, ancien directeur de l’école

Page 102: La Ville d'Alger 2004

HOTEL EL AURASSI

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L’hôtel Aurassi domine les hauteurs de la capitale

Hall de réception au décor somptueux

La piscine, un lieu de détente et de loisirs

Les chambres sont dotées de toutes les commodités

Page 103: La Ville d'Alger 2004

HOTEL SAFIR

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Des personnalités politiques et artistiques ont séjourné dans cet hôtel

L’hôtel dispose de chambres dotées de grandes baies vitrées donnant

sur le hall central

Salle réservée aux amoureux des jeux d’échecs et de jeux de réflexion

Chambre ayant accueilli de nombreusescélébrités dont Charlie Chaplin

Page 104: La Ville d'Alger 2004

LA MOSQUEE EL WARTILANI

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Façade principale de la mosquée

Vue d’une partie de la mosquée

Salle des prières

Escaliers suspendus en boisLa coupole de la mosquée

au décor majestueux

Page 105: La Ville d'Alger 2004

LA MOSQUEE EL WARTILANI

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La mosquée fut bâtie dans un style architectural particulier

Fontained’eau aux

couleurs vives

Détail d’une mosaïqueornant une colonne à l’intérieur

Le somptueux lustre central illumine les lieux

de ses mille feux

Page 106: La Ville d'Alger 2004

LA CATHEDRALE DU SACRE CŒUR

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L’architecture de la cathédrale recèle un trait particulier

La Tente, une impressionnanteœuvre

Le siège du pape

Page 107: La Ville d'Alger 2004

LA CATHEDRALE DU SACRE CŒUR

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La lumière traversant la coupole confère à l’intérieur une ambiance particulière

A chaque coin des lieux, une représentation montrant la manifestation

de l’amour de Dieu pour Ses Hommes

L’orgue, un don de la paroisse de Boufarik

Cette mosaïque est la seule d’Afrique du Nord quifut datée (an 324)

Aigle portant un livre : un don de Napoléon Statue de la Vierge Marie et de Jésus

Page 108: La Ville d'Alger 2004

L’AERO-HABITAT & IMMEUBLE LA FAYETTE

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Du haut de ses 15 étages, l’immeuble Lafayette

se dresse tel un géant en béton

L’aéro-habitat domine sur 75 m de haut

Page 109: La Ville d'Alger 2004

LES JARDINS D’ALGER

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Vue sur unepartie du parcde la Liberté

Page 110: La Ville d'Alger 2004

LES JARDINS D’ALGER

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Jardin Khemisti ou jardin de l’horloge florale Le parc de la Liberté : sa conception particulière le distingue des autres parcs de la ville

Entrée du parc Sofia

Jardin Beyrouth : l’un des plus beaux espaces verts de la capitale