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L’ASSTSAS ET LE SOUTIEN AUX CHANGEMENTS Table des matières des publications LEGAULT, Lucie. « Une démarche, des repères et du sens au travail ! », Objectif prévention, vol. 33, n o 2, 2010, p. 7. 2 BRUN, Jean-Pierre. « Réduire le stress au travail : stratégies et méthodes d’intervention », ASSTSAS - Actes du colloque, 2010. 3 MORIN, Estelle M. « Qu’est-ce qui donne un sens au travail ? » Objectif prévention, vol. 31, n o 2, 2008, p. 10-12. 13 GRAVEL, Chantal. « Santé psychologique au travail : humaniser nos organisations », Objectif prévention, vol. 29, n o 4, 2006, p. 14-15. 16 BAREIL, Céline. « Une question gagnante pour mieux gérer le changement », Objectif prévention, vol. 28, n o 5, 2005, p. 28-29. 18 LEGAULT, Lucie. « L’adaptation aux changements : un long processus », Objectif prévention, vol. 28, n o 1, 2005, p. 23-24. 20 BIGAOUETTE, Michel. « Vaincre la résistance aux changements », Objectif prévention, vol. 26, n o 5, 2003, p. 14-15. 22 DAGENAIS, Bernard. « Gérer le changement par la communication », Objectif prévention, vol. 26, n o 4, 2003, p. 20-21. 24 AUROUSSEAU, Chantal. « Ceux par qui viennent les changements, ne sont pas toujours ceux qu’on croit », Objectif prévention, vol. 24, n o 3, 2001, p. 23-24. 26 LEGAULT, Lucie. « Se refaire une santé psychologique organisationnelle », Objectif prévention, vol. 23, n o 5, 2000, p. 6-7 et 9. 28

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  • L’ASSTSAS ET LE SOUTIEN AUX CHANGEMENTS

    Table des matières des publications

    LEGAULT, Lucie. « Une démarche, des repères et du sens au travail ! »,

    Objectif prévention, vol. 33, no 2, 2010, p. 7. 2

    BRUN, Jean-Pierre. « Réduire le stress au travail : stratégies et méthodes d’intervention »,

    ASSTSAS - Actes du colloque, 2010. 3

    MORIN, Estelle M. « Qu’est-ce qui donne un sens au travail ? »

    Objectif prévention, vol. 31, no 2, 2008, p. 10-12. 13

    GRAVEL, Chantal. « Santé psychologique au travail : humaniser nos organisations »,

    Objectif prévention, vol. 29, no 4, 2006, p. 14-15. 16

    BAREIL, Céline. « Une question gagnante pour mieux gérer le changement »,

    Objectif prévention, vol. 28, no 5, 2005, p. 28-29. 18

    LEGAULT, Lucie. « L’adaptation aux changements : un long processus »,

    Objectif prévention, vol. 28, no 1, 2005, p. 23-24. 20

    BIGAOUETTE, Michel. « Vaincre la résistance aux changements »,

    Objectif prévention, vol. 26, no 5, 2003, p. 14-15. 22

    DAGENAIS, Bernard. « Gérer le changement par la communication »,

    Objectif prévention, vol. 26, no 4, 2003, p. 20-21. 24

    AUROUSSEAU, Chantal. « Ceux par qui viennent les changements, ne sont pas toujours ceux qu’on croit »,

    Objectif prévention, vol. 24, no 3, 2001, p. 23-24. 26

    LEGAULT, Lucie. « Se refaire une santé psychologique organisationnelle »,

    Objectif prévention, vol. 23, no 5, 2000, p. 6-7 et 9. 28

  • Une démarche, des repèreset du sens au travail !

    O B J E C T I F P R É V E N T I O N – V O L . 3 3 , N O 2 , 2 0 1 0 – 7

    S a n t é p S y c h o l o g i q u e

    rois nouveaux documents sont maintenant dispo nibles. En voici une brève présentation. Bonne lecture !

    Une démarche stratégiqUe

    La Chaire en gestion de la santé et de la sécurité du travail (CGSST), avec le financement de l’Institut RobertSauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST), a produit un guide : Démarche stratégique de prévention des problèmes de santé psychologique au travail1, 2. Son intérêt se situe au niveau du processus d’intervention pour être proactif et agir efficacement en matière de prévention. Le guide présente cinq étapes d’intervention, des outils et des recommandations simples : préparation de la démarche ; évaluation de l’ampleur du problème et identification des risques ; identification des problèmes concrets ; élaboration des solutions ; implantation des actions et évaluation des impacts.

    des noUveaUx repères

    La CGSST a également conçu, en collaboration avec Les Productions NOVA Horizon Médias, une pochette de trois DVD : Les nouveaux repères : comprendre et agir avec succès sur les problèmes de santé mentale en milieu de travail2. Ce produit s’adresse particulièrement aux gestionnaires et aux personnes souhaitant poursuivre leur réflexion à ce sujet.

    Deux DVD présentent des capsules informatives suggérant une prise en charge des facteurs de risque : charge de travail, conciliation travail/vie personnelle, reconnaissance, respect, soutien, etc. De plus, vous y trouverez des liens Internet et de

    T

    Voici quelques suggestions de lecture ou d’autres ressources

    qui vous permettront d’approfondir vos connaissances en

    santé psychologique au travail. Si vous avez des questions, suggestions

    ou commentaires, n’hésitez pas à nous les communiquer.

    lucie legaultasstsas

    la documentation à imprimer. Un troisième DVD comporte des activités interactives : clients ou employés agressifs et un questionnaire pour tester vos connaissances.

    Un sens aU travail

    L’IRSST a également publié le document Donner un sens au travail – promouvoir le bien-être psychologique3. Outil de réflexion pour les responsables des ressources humaines, les comités paritaires de santé et de sécurité du travail, les représentants syndicaux et patronaux et les travailleurs, ce document met en lumière l’importance du sens donné au travail comme facteur déterminant de sa santé mentale, de son engagement et de sa performance. Le concept de « sens au travail » y est décrit à travers six ca ractéristiques : utilité socia le, autonomie, occasions d’ap pren tissage et de déve loppement, rectitude morale, qualité des relations et reconnaissance. •

    R é f é R e n c e S

    1. Ce guide est disponible sur le site de la Chaire (www.cgsst.com), de l’IRSST (www.irsst.qc.ca) ou auprès de l’ASSTSAS qui peut vous accompagner dans vos réflexions ou l’implantation d’une telle démarche.

    2. L’ASSTSAS se fera un plaisir de vous présenter cet outil : communiquez avec Lucie Legault (tél. : 514 253-6871, p. 248 ; courriel : [email protected]).

    3. Basé sur l’étude d’Estelle Morin, Sens du travail, santé mentale au travail et engagement organisationnel, ce document peut être téléchargé sur le site de l’IRSST (www.irsst.qc.ca/files/documents/PubIRSST/R-624.pdf).

    L’importance du sens donné au travail comme facteur

    déterminant de sa santé mentale.

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  • 1

    JEAN-PIERRE BRUN PROFESSEUR TITULAIRE

    CHAIRE EN GESTION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ DU TRAVAIL

    www.cgsst.com

    RÉDUIRE LE STRESS AU TRAVAIL: STRATÉGIES ET

    MÉTHODES D’INTERVENTION

    www.cgsst.com

    PRINCIPALE CONCLUSION

    LA RÉDUCTION DU STRESS

    AU TRAVAIL DÉPEND TOUT

    AUTANT DU PROCESSUS

    D’IMPLANTATION QUE DE

    L’ACTIVITÉ IMPLANTÉE

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    www.cgsst.com

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    La reconnaissance du stress au travail

    La préparation au changement

    Identification des risques et des solutions

    Identification des priorités et des ressources

    5 L’implantation des solutions

    6 Évaluation des interventions

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    LA RECONNAISSANCE DU STRESS AU TRAVAIL 1

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    DONNÉES ADMINISTRATIVES

    •  Pour s’assurer d’une vision globale et juste de l’ampleur des problèmes, il est essentiel d’obtenir le plus de données administratives (i.e. taux d’absence, type d’absences, coûts de cotisation d’assurance-salaire, etc.) possible avant le début de l’intervention. –  Les invalidités de courtes ou de longues durées; –  Les coûts d’assurance salaire; –  La consommation de médicaments; –  Les psychothérapies.

    •  Ces données administratives constituent des indicateurs de gestion qui éclairent les décisions au début et pendant les interventions.

    •  La production d’un tableau de bord de gestion permet de répondre objectivement et quantitativement aux doutes émis par des employées et des gestionnaires sur la véritable ampleur des problèmes de santé psychologique au travail.

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    SONDAGE SUR LE STRESS AU TRAVAIL

    •  Un sondage sur le stress au travail « stress audit » s’avère aussi un choix judicieux pour mobiliser la direction, les gestionnaires et les employés.

    •  Si aucune données administratives ou d’enquête par sondage n’est disponible, le recours à des informations subjectives peut aussi s’avérer un choix judicieux afin de cibler les unités plus à risque.

    •  Les gestionnaires connaissent bien leurs équipes et ils savent où sont les « points chauds » dans l’organisation.

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    LA PRÉPARATION AU CHANGEMENT 2

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    LA PRÉPARATION AU CHANGEMENT

    •  L’engagement ferme et concret de la direction est une étape qui demande toujours plus de temps que prévu: budget, ressources, volonté de changement, politique, etc.

    •  L’engagement de la direction doit être vu comme un processus qui doit être reconfirmé régulièrement tout au long du projet.

    •  Afin d’assurer la pérennité et un bon ancrage du programme d’intervention il faut le lier à la planification stratégique corporative:

    « fournir des emplois de qualité »; « promouvoir une culture de reconnaissance »; « accroître la cohésion interne et le sentiment d’appartenance ».

    •  Les employés expriment un « doute systématique » face aux actions envisagées en matière de prévention des problèmes de santé psychologique au travail;

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    IDENTIFICATION DES RISQUES ET DES SOLUTIONS

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    Facteurs de risque organisationnels

      Demandes relatives aux tâches et aux rôles

      Degré de participation aux décisions

      Reconnaissance au travail

      Autonomie décisionnelle au travail

      Relations

      Environnement et conditions physiques de travail

      Horaires de travail

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    CARTOGRAPHIE DES NIVEAUX DE RISQUE

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    IDENTIFICATION DES RISQUES ET DES SOLUTIONS

    •  Les organisations qui ont un programme pour mesurer les risques psychosociaux ont de meilleures démarches d’intervention sur le stress.

    •  Lors de l’identification des problèmes et des solutions il faut définir le « champ des possibles » et préciser l’étendue des actions qui peuvent être implantées.

    •  Quant vient le temps d’élaborer les solutions nous avons constaté une tendance à énumérer presqu’uniquement des éléments se rapportant à l’organisation du travail ou à la gestion, ce qui limite les interventions possibles.

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    IDENTIFICATION DES RISQUES ET DES SOLUTIONS

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    IDENTIFICATION DES PRIORITÉS ET DES RESSOURCES

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    IDENTIFICATION DES PRIORITÉS ET DES RESSOURCES

    •  Éviter d’introduire trop de changements simultanément.

    •  Cibler un ou quelques facteurs de risque plutôt que de tenter d’intervenir à tous les niveaux.

    •  Les solutions reviennent régulièrement à la mise en place de bonnes pratiques de gestion: l’ABC du management (réunion d’équipe, évaluation des employés, clarification des rôles, etc.).

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    IMPLANTATION DES SOLUTIONS 5

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    IMPLANTATION DES SOLUTIONS

    •  La connaissance des effets ne donnent pas automatiquement accès aux moyens d’intervention

    •  Critères de sélection des activités : 2000 heures/ année

    •  Le pilote de projet est un élément clef de la réussite des interventions: –  posséder des qualités de leader; –  être très efficace; –  détenir des compétences en gestion de projet; –  user de stratégies pour faire face aux résistances des employés et

    des gestionnaires; –  son réseau de contacts, les circuits de décisions auxquels il a accès

    doivent être solides et efficaces; –  éviter de changer de pilote en cours de projet.

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    ÉVALUATION DES INTERVENTIONS 6

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    Changement dans les niveaux d’exposition aux facteurs de risque

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    Changement des indicateurs de bien-être

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  • On a beaucoup écrit sur le travail et son importance dans le développement des personnes et des sociétés. On lui attribue aussi plusieurs fonctions : un moyen de gagner sa vie, de se réaliser, de se rendre utile, d’occuper ses journées, de réaliser quelque chose d’important, etc. Par ailleurs, un même travail peut être perçu différemment selon l’attitude de la personne qui l’accomplit.

    De plus, depuis les années 50, il est de bon ton de concevoir un travail qui a du sens comme celui qui offre autonomie, défis, occasions d’apprentissage, avancement de carrière, bonnes relations humaines, salaire équitable et bonnes conditions de travail. Le sens du travail peut être conçu comme un effet de co-hérence entre la personne et son travail et le degré

    d’harmonie ou d’équilibre qu’elle atteint dans sa relation avec le travail.

    Cette cohérence pro-cure un sentiment de sé-curité psychologique et

    de sérénité qui aide le travailleur à faire face aux épreuves que comporte inévitablement l’exercice même de ses fonctions.

    Bien sûr, le sens est une expérience éminemment subjective ! Dans nos travaux sur l’organisation du travail, le sens du travail est défini comme un effet de cohérence entre les caractéristiques qu’une personne recherche et celles qu’elle perçoit dans le travail ac-compli.

    Les caractéristiques d’un travail qui a du sens

    Par définition, la qualité de vie au travail (QVT) est un état général de bien-être ressenti par les personnes dans leur milieu de travail. On décrit

    Qu’est-ce qui donne un sens au travail ?

    D O S S I E R D O N N E R U N S E N S A U T R A V A I L

    Par définition, la QVT est un état général de bien-être ressenti par les personnes dans leur milieu de travail.

    Estel le M. MorinProfesseur t itulaire

    HEC Montréal

    1 0 – O B J E C T I F P R É V E N T I O N – V O L . 3 1 , N O 2 , 2 0 0 8

    > Cet article présente les résultats d’une recher-che financée par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST). MORIN, E. M., F. ARANHA, F. Sens du travail, santé mentale au travail et engagement orga-nisationnel. Rapport final 099-193, IRSST, Mont-réal, déc. 2007. Pour en savoir plus sur cette recherche, communiquez avec l’auteur par courrier électronique ([email protected]).

    Caractéristiques

    > Utilité du travail> Rectitude morale> Apprentissage et développement> Autonomie

    > Qualité des relations

    > Reconnaissance

    Définitions

    > Faire quelque chose qui est utile aux autres ou à la société, qui apporte une contribution à la société.> Faire un travail moralement justifiable, autant dans son accomplissement que dans les résultats qu’il engendre.> Faire un travail qui correspond à ses compétences, permet d’apprendre, de développer son potentiel et d’atteindre ses

    objectifs.> Pouvoir exercer ses compétences et son jugement pour résoudre des problèmes et prendre des décisions qui

    concernent son travail.> Faire un travail qui permet d’avoir des contacts intéressants, des bonnes relations avec ses collègues et de l’influence

    dans son milieu.> Faire un travail dont les efforts sont reconnus et récompensés équitablement et pour lequel on reçoit le respect qu’on mérite.

    1. Caractéristiques et définitions d’un travail qui a du sens

    Utiliser ses compétences et son jugement pour résoudre des problèmes contribue au sentiment d’autonomie.

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  • généralement la QVT à l’aide des indicateurs suivants : le sens du travail, l’engagement organisationnel ou le sentiment d’appartenance à l’organisation, le sentiment de dignité et d’accomplissement dans son tra-vail et l’atteinte de l’équilibre entre le travail et la vie privée.

    Depuis 1993, nous menons des enquêtes dans différents milieux afin de déterminer les caractéristiques d’un travail qui a du sens. Nous en avons déterminé six principales, décrites au tableau 1. Nous avons aussi constaté que de trouver un sens à son travail était associé à des états psychologiques positifs, comme le bien-être psychologique et l’engagement affectif. Ainsi, le sens du travail aurait des effets protecteurs voire bénéfiques pour la santé des personnes.

    Par ailleurs, les facteurs de souffrance au travail ont été clairement dé-terminés par des travaux sur le stress1, 2. Ce sont généralement : la charge et le rythme de travail inadéquats ; les horaires à risque (rotatifs, variables, imprévisibles, de nuit, nombre d’heures de travail) ; un futur d’emploi in-certain (l’absence de stabilité) ; le manque de reconnaissance et de soutien ;

    la faible autonomie et la possibilité d’utiliser ses compétences. Lorsqu’ils sont inadéquats, ces fac-teurs peuvent engendrer des problèmes de santé affectant la capacité des personnes à travailler.

    Ils constituent donc la cible des gestionnaires et des conseillers en santé au travail pour prévenir la maladie et la détresse psychologique.

    Les facteurs de plaisir au travail sont moins connus et reconnus dans les milieux de la recherche. Cependant, nos enquêtes sur la QVT nous ont per-mis d’en déterminer plusieurs : les occasions d’apprentissage et de dévelop-pement ; l’utilité sociale du travail ; la rectitude morale des processus, des pratiques et des résultats ; la qualité des relations (connections positives).

    Un modèle d’analyse de la qualité de vie au travail

    Nos enquêtes sur le sens au travail, la santé mentale et l’engagement des employés nous amènent à proposer un modèle (tableau 2) décrivant les relations entre le travail, le sens au travail, la santé et les indicateurs de performance comme l’engagement et la vigilance au travail.

    Dans ce modèle, l’organisation du travail est présentée comme un déter-minant de la santé des employés, de leurs attitudes et de leur performance.

    Son impact varie selon le sens que lui attribuent les employés. Si l’indi-vidu perçoit positivement son travail (activités quotidiennes concrètes), les conditions dans lesquelles il l’ac-complit (santé et sécurité, environne-ment physique, etc.) et les relations établies (avec son supérieur, ses collègues, la clientèle, etc.), alors il aura tendance à y trouver du sens. Par conséquent, il se sentira bien physiquement et mentalement. Il sera donc enclin à se présenter à l’heure à son travail, à s’engager dans ses activités, à se montrer vigi-lant dans l’exercice de ses fonctions, à coopérer avec les autres pour at-teindre les objectifs fixés et à donner le rendement attendu.

    À l’opposé, s’il perçoit négative-ment l’organisation du travail, il aura tendance à trouver que son travail n’a pas de sens, pas plus que le mi-lieu dans lequel il travaille, et à pré-senter des symptômes de stress, voire de détresse. Afin de maintenir sa présence au travail, son engagement et un niveau de performance accep-table, il devra mobiliser des straté-gies défensives. Lorsque celles-ci se-ront épuisées, ses résultats se détério-reront : absentéisme, désaffection, inattention, conflit, minimalisme.

    D O S S I E R D O N N E R U N S E N S A U T R A V A I L

    Si l’individu perçoit positivement son travail, les conditions dans les-quelles il l’accomplit et les relations établies, alors il aura tendance à y trouver du sens.

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    SU I T E À L A PA G E 14

    2. Modèle général de la qualité de vie au travail (Morin et Aranha, 2007)

    CARACTÉRISTIQUES DU TRAVAIL

    QUALITÉ DES RELATIONS

    SANTÉ ET BIEN-ÊTRE

    MALADIE ET DÉTRESSE

    PRÉSENCEENGAGEMENTVIGILANCECOOPÉRATIONHABILITATION

    SENS AU TRAVAIL

    Différences individuelles (âge, sexe, attitudes, etc.)

    Expérience optimale

    Stratégies défensives

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    Les marques de respect et de reconnaissance font du bien !

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  • D O S S I E R D O N N E R U N S E N S A U T R A V A I L

    1 2 – O B J E C T I F P R É V E N T I O N – V O L . 3 1 , N O 2 , 2 0 0 8

    Le sens que les individus donnent à leur travail et aux relations qu’il engendre dépend de plusieurs fac-teurs ou différences individuelles dont le sexe (âge, at-titudes, etc.), le trait affectif et le style d’attribution3.

    Le sens au travail affecte la santé psychologique

    Dans les enquêtes de CRITEOS4, deux facettes de la santé mentale sont examinées : le bien-être et la détresse psychologique. Plus précisément, le sens au travail au-rait un effet positif sur le bien-être psychologique et négatif sur la détresse psychologique.

    Les résultats obtenus dans les enquêtes canadiennes du CRITEOS indiquent que l’utilité sociale du travail et les occasions d’apprentissage et de développement ont un effet important sur le sens au travail. De plus, la

    rectitude morale a également un effet déterminant sur la détresse psychologique. Enfin, il semble tout à fait plausible que le sens au travail ait un effet médiateur sur l’état psychologique des employés ainsi que sur la nature de leur engagement envers leur employeur. •

    R É F É R E N C E S

    1. DEJOURS, C. Travail et usure mentale. Essai de psychopathologie du travail, (réédition), Paris, Bayard Éditions, 1993.

    2. KARASEK, R., T. THEORELL. Healthy Work: Stress, Productivity and the Re-construction of Working Life, New York, Basic Books, 1990.

    3. NELSON, D.L., B.L. SIMMONS. Health Psychology and Work Stress: A more Positive Approach, in QUICK, J.C., L.E. TETRICK, (Ed). Handbook of Occupa-tional Health Psychology, Washington, DC, US: American Psychological Associ-ation, 2003, p. 97-119.

    4. CRITEOS (Centre de recherche et d’intervention pour le travail, l’efficacité or-ganisationnelle et la santé) (web.hec.ca/criteos).

    Qu’est-ce qui donne... SU I T E D E L A PA G E 11

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  • Pour les gens qui accompagnent le chan- gement et qui reçoivent la détresse personnelle des individus, pour les gestionnaires qui servent d’interface entre une décision et son implantation, pour l’ensemble des preneurs de décision, il est souhaitable de développer de nouvelles façons de faire le changement. Il s’agit de susciter l’adhésion et de soutenir l’adap-tation pour que chacun en sorte épanoui et ragaillardi. Il est temps de considérer le changement dans sa double nature ra-tionnelle et humaine.

    Réussir le message humain du changementLa communication contient toujours le double message con-

    tenu et relation. Il en est de même pour le changement. En tant que message, il doit toujours être vu sur deux aspects, le ration-nel et l’humain.

    L’aspect rationnel, c’est le contenu, la justification managé-riale du changement. Tout changement doit normalement être basé sur la recherche d’une meilleure efficience et une meilleure

    efficacité de l’organisation. Les individus doivent comprendre qu’un changement est une vé-ritable valeur ajoutée à l’orga-nisation et à sa clientèle.

    L’annonce du changement devrait aussi contenir l’aspect

    humain de la reconnaissance : un message implicite sur la per-sonne et sa contribution à l’organisation, sa qualité, sa compé-tence, la valorisation de ses années de service et de dévouement. Malheureusement, l’implantation d’un changement passe souvent

    sous silence ce message de la valeur intrin-sèque des personnes qui le subissent.

    Annoncer un changement, c’est mettre fin à certaines habitudes, dire que ce qui était avant n’est plus approprié, que les compétences, les façons de faire, le regrou-pement des individus sont révolus, dépas-sés ou ne répondent plus aux attentes. Il n’y a qu’un pas pour créer la sensation d’in-compétence et laisser croire que les préoc-cupations humaines n’ont pas été considé-rées. Bref, que les personnes ne comptent pas pour les décideurs stratégiques.

    Une décision de changement, quelle que soit sa nature, envoie des messages impli-cites qui seront d’abord interprétés sous l’angle humain, sous l’angle du territoire individuel, sous l’angle de la place de cha-cun dans ce futur incertain. Voilà le véri-table enjeu du changement, là où réside le succès ou l’échec : réussir le message hu-main du changement.

    Gérer la phase de chocTout changement doit s’accompagner

    de messages très clairs sur l’option hu-

    Santé psychologique au travail : humaniser nos organisations

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    Les individus doivent comprendre qu’un changement est une véritable valeur ajoutée à l’organisation et à sa clientèle.

    C h a n t a l G r a v e l *

    U n i v e r s i t é L a v a l

    Réussir le message humain du changement

    Le rôle des professionnels en ressources humaines et en santé et en sécurité du travail, en collaboration étroite avec les gestionnaires concernés, est essentiel. Voici quelques éléments stratégiques à considérer.

    Phase de l’annonce et du choc• S’assurer du message humain du changement.• Rassurer les personnes sur leurs compétences.• Mettre en valeur le développement du potentiel

    des personnes à travers le changement.• Envisager des mécanismes de soutien et de

    valorisation.• Niveler les irritants au fur et à mesure qu’ils

    émergent.• Conserver l’estime de soi des personnes en

    cause.

    Phase de démobilisation• Soutenir la création de mécanismes d’encoura-

    gement et de feed-back.• Déculpabiliser les employés face à leurs difficul-

    tés de se donner de nouvelles façons de faire.• Insister sur les mesures de reconnaissance.• Favoriser les échanges sociaux.• Trouver des prétextes « à la fête » des réussites.• Promouvoir la vision et les valeurs organisation-

    nelles.• Centrer les plans de communication sur les

    succès du changement.• Favoriser des suivis individuels de qualité.

    À la croisée des chemins• Gérer les ressentiments, offrir le soutien psy-

    chologique.• Souligner les pas dans la bonne direction.• Favoriser la construction d’alliances positives.• Revivifier la vie sociale, briser l’isolement.• Outiller davantage les personnes face à leurs

    tâches.• Confronter pour renforcer la contribution au

    changement.• Développer des plans d’action concrets afin de

    réduire le sentiment d’impuissance.

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    maine des gens en cause, de l’appréciation et la fierté dont ils font l’objet et le souci de donner tous les outils nécessaires pour permettre à chacun de s’adapter le plus harmonieusement possible à ses nouvelles réalités. Il importe que des gestes concrets accompagnent les paroles pour créer l’effet de confiance et d’apaisement.

    Gérer la phase de démobilisationIl existe beaucoup de publications sur la résistance au changement. Le paradigme

    sur lequel elles reposent conforte la croyance que la personne a naturellement de la difficulté à s’adapter aux nouvelles réalités de son environnement de travail. Lorsque quelqu’un accuse un autre « de résister », il laisse planer un message implicite d’in-compétence face aux changements, de dépassement. Résister est devenu un symbole négatif de faiblesse qui amplifie encore la détresse de la personne en processus d’adap-tation, en freinant du même coup, son cheminement normal.

    Il est intéressant d’explorer la relation de l’être humain avec le changement sous un angle différent. À travers les époques, l’histoire de l’humanité tend plutôt à démontrer son extraordinaire capacité à s’adapter à son environnement. Les systèmes organisa-tionnels, de leur côté, lèguent le constat d’un important déficit face à leurs capacités de soutenir l’adaptation et l’épanouissement de la personne dans sa démarche de change-ment, déficit qui se traduit souvent par la démobilisation des troupes.

    La démobilisation est une phase cruciale d’adaptation de l’homme aux changements qui le bouleversent. C’est l’étape de la recherche d’un sens pour l’employé. À ce moment,

    il doit risquer de faire les choses autrement et il ne se sent pas à l’aise. À ce moment, il côtoie de nouvelles personnes et ne sent pas encore la complicité. À ce moment, il découvre, sous le re-gard d’un nouveau patron, sa place dans le futur organisation-

    nel. C’est la phase d’apprentissage, de découverte, où la vitesse de croisière s’installe inexorablement, avec l’essoufflement qui s’ensuit.

    Gérer la croisée des cheminsLa croisée des chemins, c’est la période de transition, là où l’ancien et le nouveau

    se côtoient, s’entremêlent et désarçonnent. C’est là où le point de non-retour s’amorce, où l’on comprend que l’on doit laisser des choses derrière soi, tourner la page. C’est l’étape où la contribution à la mission et à la vision organisationnelle se cristallise, où une nouvelle identité organisationnelle se définit. À cette phase, tout le momentum de l’adaptation prend sa puissance, le souffle entre les énergies du passé et du futur.

    Il est essentiel de faire basculer les hésitations vers le futur, de fixer le regard sur ce qu’on est en train de construire, de larguer les amarres. Toutes les énergies organisation-nelles doivent se concentrer sur le projet et ses résultats, sur la route déjà parcourue. Ceux qui conservent un lien avec le passé peuvent développer un ressentiment néfaste pour leur santé psychologique et pour ceux qui voudraient construire le futur.

    Se réconcilier avec le changementIl arrive parfois d’entendre « La fusion nous a été imposée... on ne nous a pas con-

    sultés pour telles décisions... ». Les décisions stratégiques ne sont pas démocratiques. Elles ne nécessitent pas de référendum, ni de vote universel. C’est une responsabilité exclusive au sommet stratégique : donner une direction à long terme et prendre les décisions qui s’imposent. Même si la démarche de réflexion peut faire l’objet d’une consultation, la décision revient aux instances stratégiques. Chaque niveau organisa-tionnel, chaque département, chaque unité (y compris la SST) possède un territoire de pouvoir, d’actions, de choix bien délimités. Ces limites territoriales permettent d’éviter le chaos organisationnel ou du moins, de le contenir.

    Les décisions stratégiques sont très difficiles à prendre. Elles demandent du courage,

    avec l’inquiétude et l’anxiété qui accom-pagnent le risque. Malgré les études, les consultants, les recommandations multi-ples, les débats sur le pour et le contre, des choix doivent être faits. Le moins que l’on puisse faire, c’est d’encourager les pre-neurs de risques plutôt que les lapider à la première occasion. L’humanisation commence là, aussi…

    Les décisions stratégiques n’ont rien de magique. Elles mènent à des tas d’autres incertitudes sur les impacts à court, moyen et long terme d’un changement : organi-grammes, postes, façons de faire, politi-ques, composition des équipes, définition des nouvelles tâches, clientèles, etc. Il peut parfois s’écouler des dizaines de mois en-tre une décision stratégique et son arrivée au niveau opérationnel.

    Il faut comprendre quelle est notre sta-tion sur l’itinéraire du changement afin d’éviter d’être sur le quai d’une gare à faire le pied de grue, surtout si on est à la mauvaise station. Combien de personnes condamnent une décision stratégique sur-tout parce qu’elles n’ont pas été consul-tées et qui, au moment où elles doivent l’être, ne sont pas au rendez-vous ? Et le train passe…

    Enfin, quand il est temps de prendre le train, trois choix s’offrent à nous : on le prend avec espoir ou, encore mieux, avec enthousiasme ; on le prend à reculons, bien décidé à freiner l’élan ; ou on ne le prend pas du tout. À vous de choisir ! •* Chantal Gravel est également l’auteur du livre Le défi de la santé. Comment humaniser les soins et les organisa-tions publié aux Presses de l’Université du Québec en 2005.

    R É F É R E N C E S

    CHAIRE EN GESTION DE LA SANTÉ ET DE LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL. La santé psychologique du travail... de la définition du problème aux solutions, Québec, Presses de l’Université Laval, 2003.

    COLLERETTE, SCHNEIDER. Le pilotage du changement, Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 1997.

    CORMIER, Solange. La communication et la gestion, Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 1995.

    GENET, Dominique. Manager dans la complexité, Paris, INSEP Éditions, 2001.

    VINET, Alain. Travail, organisation et santé, Québec, Presses de l’Université Laval, 2004.

    D O S S I E R C O L L O Q U E A S S T S A S 2 0 0 6

    Toutes les énergies organisation-nelles doivent se concentrer sur le projet et ses résultats, sur la route déjà parcourue.

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  • 2 8 – O B J E C T I F P R É V E N T I O N – V O L . 2 8 , N O 5 , 2 0 0 5

    Encore trop souvent, les gestion-

    naires semblent démunis pour

    gérer les réactions des individus

    durant un changement organisa-

    tionnel. Comment faire en sorte

    que leurs employés s’approprient

    rapidement ce changement et

    modifient leurs comportements ?

    Dans cet article, je propose une

    question gagnante et un modèle

    d’intervention pour leur per-

    mettre de mieux comprendre les

    inquiétudes et les besoins de leur

    équipe et d'intervenir judicieuse-

    ment.

    l’arrivée d’un changement organisation-nel dans leur établissement, la plupart des cadres désirent que le changement

    se fasse rapidement, de façon efficace, sans heurt, sans conflit, sans méfiance et sans cy-nisme. Malheureusement, la difficulté d’im-planter des transformations organisation-nelles est bien présente, comme le confirme le taux d’échec plutôt élevé qui varierait entre 20 % et 80 %, selon les niveaux de com-plexité des organisa-tions et du change-ment1.

    Souvent, les atten-tes des gestionnaires et des dirigeants sont irréalistes par rapport à la capacité de chan-ger tant des individus que des organisations. Ils sous-estiment, en-tre autres, les proces-sus humains pourtant nécessaires tels que :entendre, écouter, dé-coder, discuter, ques-tionner, accepter puis changer. Comment les cadres peuvent-ils avoir accès au vécu des personnes touchées par le changement dans le but de mieux les comprendre et les aider ?

    LA QUESTION GAGNANTE ETSES MODALITÉS : OBTENIR LES

    PRÉOCCUPATIONS DES DESTINATAIRES

    En fait, parmi plusieurs questions de re-cherche et d’intervention que j’ai personnel-lement testées au fil des ans, une seule per-met à tout coup d’obtenir un contenu inté-ressant sur le vécu des destinataires et sur lequel il est possible d’intervenir directement « Qu’est-ce qui vous (te) préoccupe le plus, actuellement, par rapport au changement (nom spécifique) ? »

    Cette question vise à faciliter le processus d’appropriation du changement par ceux qui le vivent et qui en sont touchés, les destina-taires. D’une part, elle informe le destinataire (employé) du désir de son gestionnaire à l’écouter véritablement, à démontrer son empathie face à ses réactions et finalement, sa volonté à répondre à ses besoins. D’autre part, pour le gestionnaire, la question est

    souvent gagnante puisqu’elle lui donne accès aux préoccupations, inquiétudes, besoins ou questions légitimes de la part de son équipe. Finalement, elle permet de créer un milieu d’ouverture, d’écoute et de respect.

    La question gagnante peut être utilisée lors d’une discussion informelle entre un ca-dre et un employé ou, plus formellement, lors d’une réunion d’équipe. Discuter du change-

    ment démontre de l’importance accor-dée au changement et la question gagnante encourage un dialo-gue véritable entre ceux qui sont touchés par le changement et ceux qui veulent le mettre en œuvre.

    L’important est de faire le suivi des pré-occupations, de répon-dre aux besoins et in-quiétudes au fur et à mesure qu’ils émer-gent et surtout, de ré-péter la question ga-

    gnante à différents moments durant la mise en œuvre du changement afin de suivre son évolution.

    MODÈLE INTERPRÉTATIF : SAVOIR DÉCODER LES PRÉOCCUPATIONS

    Le modèle des phases de préoccupation1

    permet d’interpréter les réponses obtenues et offre des repères pour comprendre les ré-actions humaines durant le changement. Ce modèle stipule qu’il existe sept catégories de préoccupations en regard d’un changement et que celles-ci auraient tendance à émerger en fonction de phases successives (tableau).

    Le modèle des sept phases de préoccupa-tion permet de classer les préoccupations. En dépit du fait qu’il existe souvent plusieurs pré-occupations à l’égard d’un changement, cer-taines d’entre elles sont souvent plus intenses, plus criantes dans le répertoire du destina-taire et méritent d’être adressées plus rapide-ment. On les appelle les phases dominantes. Il importe de savoir que différents groupes de destinataires vivent des préoccupations par-fois distinctes et d’intensité variable dont il faut tenir compte dans les interventions.

    Une question gagnante pour mieux gérer le changement

    C H A N G E M E N T O R G A N I S A T I O N N E L

    À

    C é l i n e B a r e i l

    P r o f e s s e u r eÉ c o l e d e s h a u t e s é t u d e s

    c o m m e r c i a l e s d e M o n t r é a l

    Il existe sept catégories de préoccupations en

    regard d’un changement et celles-ci auraient tendance à émerger

    en fonction de phases successives.

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  • O B J E C T I F P R É V E N T I O N – V O L . 2 8 , N O 5 , 2 0 0 5 – 2 9

    MODÈLE INTERVENTIONNISTE : SAVOIR COMMENT AGIR

    Le diagnostic des préoccupations donne accès à un contenu spécifique. Ainsi, le ges-tionnaire est en mesure de connaître les in-quiétudes et les préoccupations de ses diffé-rents groupes d’employés. À chacune des pha-ses correspondent des interventions ciblées.

    Ainsi, en fonction de la culture organisa-tionnelle d’un centre, établissement ou site, le gestionnaire peut offrir à son équipe, des réponses et des actions sur mesure. Il im-porte de mentionner que ce n’est pas unique-ment la responsabilité du gestionnaire d’y répondre. Certaines préoccupations requiè-

    rent davantage l’intervention de la direction générale ou de l’équipe de direction, du con-seil d’administration, de l’équipe de projet, des représentants syndicaux, de l’équipe de gestion des ressources humaines, de l’équipe des technologies et parfois même l’interven-tion d’agents externes (consultants, spécialis-tes) ou de collègues.

    DE SAINES RELATIONS DE GESTION

    En plus d’une nécessaire planification stratégique et opératoire du changement, souvent basée sur les principes du dévelop-pement organisationnel, j’ai proposé dans cet article, une démarche complémentaire sur

    mesure qui permet de récolter les préoccu-pations des personnes touchées.

    Mieux que les attitudes ou les variables de la personnalité, les préoccupations contri-buent à promouvoir des relations saines de gestion, basées sur le respect, l’échange réci-proque, l’entraide mutuelle, et ce, en période de turbulence et de changement organisation-nel. •

    R É F É R E N C E

    1. BAREIL, C. Gérer le volet humain du changement, Éditions Transcontinental et de la Fondation de l’entrepre-neurship, Montréal, 2004.

    InterprétationSouvent, en début de changement, les destinataires n’ont pas encore de préoccupations ; ils continuent leurs habitudes jusqu’à ce qu’ils ressentent une certaine pression à changer. Cette phase peut durer passablement longtemps, surtout lorsque les destinataires ne croient pas que le changement aura lieu.

    Les individus sont préoccupés par les impacts du changement sur eux et sur leur travail. Dans le contexte du secteur de la santé au Québec, les gens sont davantage inquiets par les types de poste, de responsabilités, d’environnement de tra-vail, de patron, de conditions de travail qui seront modifiés à cause du changement que par leur sécurité d’emploi.

    Les individus connaissent des préoccupations quant à la ca-pacité de l’établissement de santé (ou des établissements fusionnés) à réussir et à déployer le changement tel qu’annon-cé. Les multiples changements passés dans le secteur de la santé, qui ont connu plus ou moins de succès, ont tendance à accroître l’intensité de préoccupations de la phase 3. Le personnel doute souvent de l’atteinte des objectifs fixés et remet en cause la légitimité du changement.

    Les destinataires posent des questions quant à la nature du changement lui-même : la date, le scénario, le lieu, les acteurs impliqués, etc. Ils s’intéressent davantage au contenu de la mise en œuvre du changement et à leur contribution dans le changement.

    Les destinataires sont inquiets du temps disponible pour pra-tiquer les nouveaux comportements et faire des essais. Les gens se questionnent sur le temps accordé à l’apprentissage, le coaching et la formation.

    À un certain moment, les destinataires n’éprouvent plus de préoccupations ; c’est alors que le processus d’appropriation prend fin.Il arrive toutefois des cas où les gens éprouvent d’autres pré-occupations liées au transfert des acquis…

    …et à l’amélioration du changement lui-même, soit du pro-gramme ou de son exécution.

    InterventionIl importe de répéter l’importance du changement dans le contexte actuel et d’en discuter fréquemment.

    Les réponses quant à la relocalisation des effectifs, à leur horaire, lieu de tra-vail, collègues, patrons et environne-ment de travail doivent être cernées rapidement ; au moins, un délai ou une date de réponse doit être précisée.

    Les instances décisionnelles doivent prendre clairement position, situer le ou les changements parmi les orienta-tions stratégiques et clarifier les priori-tés. Le gestionnaire a souvent le devoir de traduire ces informations plus con-crètement pour son équipe.

    Il faut discuter du scénario du change-ment et faire participer les destinataires au plan de mise en œuvre dans leur secteur.

    Une période d’adaptation doit être prévue et les attentes du gestionnaire quant au temps d’apprentissage, aux ressources octroyées et aux objectifs de rendement doivent être clarifiées.

    Des façons originales de transférer les expertises peuvent être envisagées.

    L’innovation doit être encouragée. Les individus peuvent être responsabilisés face à leurs idées d’amélioration.

    Préoccupation Aucune préoccupation envers le changement : peu de préoccupations à l’égard du chan-gement ; ne se sent pas concerné ; pour-suit ses activités usuelles.

    Préoccupations centrées sur le destinataire : préoccupations sur les impacts du changement sur son travail : rôle, responsabilités, statut, appartenance, autonomie, pouvoir, etc.

    Préoccupations centrées sur l’organisation :capacité de l’organisation à changer ; légitimité du changement ; objectifs du changement.

    Préoccupations centrées sur le changement : nature du changement ; scénario de mise en œuvre ; implication du destina-taire.

    Préoccupations centrées sur l’expérimentation : capacités individuelles et/ou collectives ; temps, conditions et soutien.

    Préoccupations centrées sur la collaboration : transfert des apprentissages ; coopération.

    Préoccupations centrées sur l’amélioration du changement :amélioration de ce qui est en place ; innovation et pérennité du changement.

    PHASE 1

    PHASE 2

    PHASE 3

    PHASE 4

    PHASE 5

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    M O D È L E D E S P H A S E S D E P R É O C C U P A T I O N

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    Tout comme lors d’un nouvel emploi, il fautun certain temps d’adaptation pour se sentir à nouveau en « zonede confort » et en possession de ses capacités professionnellesface à cette multitude de transformations. Toutes les personnesrencontrées lors du bilan du transfert des activités au CH Pierre-Le Gardeur sont d’avis que, quelques mois après le déménage-ment, la majorité du personnel était bien adapté à son nouvelenvironnement de travail et, surtout, heureux d’y être !

    Une adaptation à multiples facettes Il n’existe pas de recette miracle : temps, optimisme, indul-

    gence, entraide et solidarité ont joué un rôle majeur. La présencedes équipes de démarrage a accéléré, ou à tout le moins facilité,le retour vers une zone de confort pour le personnel. Ainsi, toutchangement, même souhaité et vécu positivement, demeurenéanmoins exigeant, voire même éprouvant selon l’ampleur etla durée.

    Une fois les préoccupations d’ordre personnel passées (tempspour se rendre au travail, nouveau stationnement, compagnonde casier, orientation des lieux), le niveau de stress diminue.Alors, les énergies et ressources adaptatives s’orientent vers leschangements de nature professionnelle : aménagement despostes de travail, pratiques et façons de faire, collègues, dyna-

    mique d’équipe, mode d’enca-drement.

    Cette adaptation à multiplesfacettes doit pouvoir bénéficierdu facteur temps. Il s’agit d’ap-privoiser, stabiliser, intégrer,consolider, renoncer aux modesd’avant, faire le deuil de ce

    qui « était », accueillir ce qui « est », apprécier le « sera » etenfin se réinstaller dans le confort des sentiments de contrôle,de compétence, d’efficacité.

    Certains ont constaté une adaptation plus facile et rapideau sein des équipes où le sentiment d’appartenance, l’espritd’équipe, le soutien social, la complicité et l’efficacité d’uneéquipe « rôdée » avaient été préservés. L’écoute et l’ouverturedu chef de service à accueillir les préoccupations du personnelet à apporter rapidement les correctifs possibles étaient égale-ment déterminantes. Certes, il s’agit-là d’ingrédients favorablesà l’adaptation aux changements.

    Des défis pour l’adaptationQuand une transformation met en conflit deux réalités, par

    exemple amélioration de la qualité de service à la clientèle etpréservation de la qualité de vie hors travail, l’adaptation de-vient difficile et génère souvent plus de résistance.

    Les employés qui vivaient des transformations au niveau de

    l’organisation du travail qui affectaientégalement leur vie personnelle étaient at-teints négativement par la transformation.Ainsi en était-il du retrait d’acquis appré-ciés : travailler plus tard le soir ou les finsde semaine, ce qu’ils ne faisaient plus de-puis des années, et ce, à cause d’une rota-tion de postes, de l’ouverture du servicesur des plages plus longues, etc.

    L’adaptation à ce genre de changementnécessite plus de temps. Elle requiert unebonne capacité à lâcher prise, à renoncerà ce qui était pour faire face à l’incontour-nable et aller de l’avant. Dans un telcontexte, le défi consiste à maintenir lamobilisation des troupes.

    D’autre part, certaines situations en-traînent un risque de saturation au niveaudes capacités d’apprentissage : trop denouvelles connaissances et compétences àacquérir en peu de temps, crainte de nepas être à la hauteur, capacité de répondreà ces nouvelles attentes et exigences, etc.Au CH Pierre-Le Gardeur, les nouvellestechnologies ont transformé radicalementles pratiques de travail de certains dépar-tements. Elles ont nécessité formation surformation pour les travailleurs, ce qui ena stressé plus d’un.

    Quand l’évitable devient inévitablePar-dessus tous les changements incon-

    tournables, l’aspect le plus irritant est desubir des situations stressantes qui auraientpu être évitées ! Ainsi, tant pour le per-sonnel que pour les cadres, les délais delivraison d’équipements et les problèmesmultiples au niveau des systèmes de com-munication sont autant de sources majeuresde stress négatif. Elles ont grugé inutile-ment leurs ressources adaptatives et affai-bli leur mobilisation.

    Des gains importantsÉvidemment, tout changement com-

    porte son lot d’exigences. Pour permettre

    L’adaptation aux changements :un long processus

    DD O S S I E R D É M É N A G E R U N H Ô P I T A L - M I S S I O N A C C O M P L I E !

    L u c i e L e g a u l t

    a s s t s a s

    Tout changement, même souhaitéet vécu positivement, demeurenéanmoins exigeant, voire mêmeéprouvant selon l’ampleur et la durée.

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  • DD O S S I E R D É M É N A G E R U N H Ô P I T A L - M I S S I O N A C C O M P L I E ! une saine adaptation, le changement doit aussi offrir des avantages, des gains par rap-port à ce qu’on laisse derrière soi. Dans cette expérience de déménagement, au-delàdes exigences d’adaptation et des difficultés rencontrées, les gains sont innombrables.

    Pour en nommer quelques-uns, se retrouver dans une nouvelle bâtisse spacieuse etdéambuler dans un bel environnement harmonieux et calme offrent de nombreux effetsbénéfiques tant pour les employés que pour la clientèle. D’ailleurs, le personnel de

    psychiatrie attribue à cela ladiminution des séjours des bé-néficiaires depuis leur arrivéedans le nouvel hôpital.

    Les installations sophisti-quées, les technologies de finepointe sont des sources de fierté,de défis enrichissants et de dé-

    veloppement professionnel pour plusieurs. Elles fournissent également une visibilité etun pouvoir d’attraction indéniables. Le regroupement par clientèle permet à plusieursprofessionnels de vivre plus d’autonomie et de reconnaissance dans leur travail.

    Au cours de cette grande aventure, des liens se sont créés, des talents ont été décou-verts et des personnes sont sorties de l’ombre. Aussi, comment se plaindre d’un contextede croissance, surtout au sein du secteur de la santé ?

    Une bonne chose de faite !L’appropriation d’un nouvel hôpital aura donc été une expérience stimulante pour

    certains et stressante pour d’autres, dans les premières semaines du moins. Plusieursdiront que la possibilité de s’impliquer les a sécurisés et a facilité leur adaptation auxchangements.

    Déjà, quelques mois plus tard, la ma-jorité du personnel ne parle plus du démé-nagement, de l’avant et de l’après. L’inté-gration est réalisée et d’autres projets sepointent.

    Pour l’ensemble du personnel du CHPierre-Le Gardeur, il serait hors de ques-tion de retourner dans leur ancien envi-ronnement de travail. Cette grande trans-formation demeure une expérience excep-tionnelle à vivre, une source de fierté etde mobilisation. •

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    Par-dessus tous les changementsincontournables, l’aspect le plus irri-tant est de subir des situations stres-santes qui auraient pu être évitées !

    Lors du colloque 2005, Pour uneorganisation du travail en santé,des ateliers portent sur plusieursaspects reliés aux transferts desactivités au nouveau CH Pierre-LeGardeur. Entre autres, des donnéesde gestion concernant les impactssur le personnel du projet de dé-ménagement (absentéisme, acci-dents du travail, roulement de per-sonnel, etc.) seront présentées.

    Consultez le site Internetde l’ASSTSAS pour connaître

    le programme complet.

    w w w. a s s t s a s . q c . c a

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    P O U R E N S AV O I R P L U S

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  • L’implantation d’un milieu de viesubstitut offre la possibilité aux personnes hébergées et auxtravailleurs de construire des relations de qualité. Ces relationsne peuvent être pleinement vécues qu’à l’intérieur des contraintesde la vie en groupe. Inévitablement, les nouvelles règles et normesqui définiront ce milieu de vie engendreront des changements.Ils sont incontournables et auront des impacts importants surles soignants et sur les personnes hébergées. Comment planifierces changements ? Des solutions existent.

    Évaluer la capacité de changement de l’organisationMettre en place un milieu de vie substitut constitue tout un

    changement organisationnel. Et plusieurs centres d’hébergementet de soins de longue durée (CHSLD) n’en sont plus à leur pre-mier changement ! L’expérience montre que l’implantation d’unmilieu de vie n’est jamais facile à réaliser, car elle engage plu-sieurs facteurs personnels. En effet, établir des relations soignant/personne hébergée de qualité réfère à ces facteurs personnels.

    Le taux d’échec des changements organisationnels de tousordres se situerait entre55 % et 65 %1. Il convientdonc d’évaluer la capacitéde l’organisation à changer,et ce, dès le début du projet.L’exercice est essentiel. Ilpermet de s’assurer de lafaisabilité de l’implantationdu milieu de vie et deschances de succès.

    Inventaire des changementsQuels changements sont survenus en CHSLD au cours des

    cinq dernières années ? Quels efforts ont été mis en œuvre pourimplanter ces changements ? Quels sont les gains et les pertesobtenus ? Combien de changements sont encore en cours ?

    Rencontres des équipesRéaliser des rencontres avec les équipes d’employés et de

    cadres (environ 45 minutes) pour chercher à savoir ce qui vabien ou mal dans l’organisation. C’est le moment aussi de re-cueillir leurs suggestions et recommandations sur les façonsd’améliorer la qualité des soins et des services de même que lasanté et la sécurité du travail (SST).

    Des personnes-ressourcesConsulter des personnes-ressources permet d’obtenir un avis

    sur l’organisation et ses modes de fonctionnement. Il peut s’agird’organismes comme l’ASSTSAS, par exemple, ou de personnesd’autres CHSLD. C’est là un premier pas dans la mise en placed’un réseau de contacts qui pourra être sollicité au besoin.

    La résistance aux changementsLa petite histoire montre qu’en général

    les changements imposés donnent lieu àdes émotions désagréables. Quant auxchangements choisis, ils augmentent laprobabilité de ressentir des émotionsagréables. Bien que des émotions désagréa-bles puissent aussi être ressenties lors dechangements choisis, avec le temps, ellesse modifient et deviennent plus agréables.Pour leur part, les changements spontanésimpliquent plus d’émotions désagréablesque les changements planifiés. Ces préci-sions permettent de mieux comprendrel’origine de la résistance aux changements.Elle est inévitable et il faut l’anticiper.

    Qu’est-ce qui mène à résister aux changements ?

    La résistance des individus aux change-ments se mesure à partir des pertes et desgains. La force de cette résistance sera pro-portionnelle à la valeur que les personnesaccordent à ces pertes et gains. Il faudragérer plusieurs facteurs dans la démarchede changement vers le milieu de vie2.

    Les facteurs personnels Les nombreux changements déjà sur-

    venus ont pu entraîner des pertes écono-miques (ex. : pertes d’emploi), des pertur-bations dans les relations sociales (ex. :dissolution d’équipes de travail) et desmodifications dans la vie personnelle.

    Ce dernier point est important et mé-connu. Par exemple, en 2002, les résultatsdu sondage réalisé par l’ASSTSAS3 indi-quent que 18 % des soignants actifs dansun CHSLD occupent un deuxième emploi.Concilier un deuxième emploi et une viefamiliale ou sociale n’est déjà pas chosefacile ! Les changements qui mettent enpéril l’équilibre dans la vie personnelle ris-quent d’entraîner beaucoup de résistance.

    Les facteurs organisationnels Le manque d’information constitue

    un facteur très important de résistance.L’enjeu central est la mobilisation. Il est

    Vaincre la résistance aux changementsD

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    Les directions patronales etsyndicales doivent s’assurer quele porteur de dossier reçoive tout le soutien nécessaire.

    C H S L D : U N M I L I E U D E V I E , U N E A F F A I R E D E C ΠU R !

    M i c h e l B i g a o u e t t e

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    démontré qu’un changement organisationnel mal expliqué peut entraîner une démobi-lisation significative. En général, cette démobilisation est précédée d’une augmentationdu sentiment d’incertitude et d’une méfiance accrue envers la direction.

    Les facteurs associés au contenu même du changement vers le milieu de vie Le modèle de soins hospitaliers actuel dans plusieurs CHSLD ne comporte pas que

    des désavantages. Pour plusieurs, il convient parfaitement, car il tient compte d’uneréalité incontournable : beaucoup de personnes hébergées sont malades et requièrentdes soins de confort.

    Il apparaît alors plus simple de prendre en charge les personnes hébergées et deréaliser à leur place plusieurs activités de la vie courante. Il est indéniable aussi queplusieurs seront inquiets des impacts sur le temps de travail des nouvelles prescriptionsde soins prothétiques (ex. : laisser la personne hébergée exécuter elle-même certainsgestes pour sa toilette).

    Comment vaincre la résistance aux changements ?La gestion participativeUne véritable gestion participative permet de faire régner une attitude positive

    d’ouverture dans toute l’organisation. C’est le premier moyen à implanter.Les efforts déployés dans la démarche de changement « doivent créer le sentiment

    de partager les valeurs chez les participants »4. Cette gestion participative se structuresur la base des valeurs mobilisatrices qui favorisent l’estime de soi, la démocratie, l’éga-lité et l’équité : l’engagement de la direction générale5, le paritarisme, une entente entreles partenaires, des techniques incitatives pour permettre aux travailleurs d'adopterdes comportements en lien avec le nouveau milieu de vie.

    Un responsable de dossierLa nomination d’une personne respectée constitue un second moyen d’atténuer la ré-

    sistance aux changements. Il peut s’agir d’une ressource interne ou externe à l’organisation. Le porteur du dossier doit être capable d’apporter un soutien empathique : avoir

    de l’écoute, maintenir des contacts personnels étroits, fournir une possibilité de forma-tion, gérer les absences au travail avec discernement. Il aura plusieurs rôles à jouer :animateur de groupes, enseignant, communicateur, documentaliste, maître de jeu,conciliateur, mobilisateur, conseiller, etc.

    Afin de bien remplir son mandat, le porteur de dossier doit aussi posséder des con-naissances cliniques appropriées, des connaissances sur le travail et la prévention demême qu’une bonne connaissance du secteur de la santé et des ressources disponibles.Les directions patronales et syndicales doivent s’assurer que le porteur de dossier reçoivetout le soutien nécessaire à l’exercice de ses rôles.

    Un plan de communicationUn troisième moyen consiste à faire connaître la nature des changements qui décou-

    leront de la démarche milieu de vie. Trop souvent, des changements organisationnelsont été imposés sans aucune explication au personnel. Les résultats ont été plutôt négatifs :sentiment d’incertitude, méfiance accrue envers la direction, émergence d’individualismeet de compétition, méfiance entre les pairs, sentiment d’inutilité et désengagement dupersonnel.

    La formationVoilà une élément nécessaire pour consolider les connaissances et les compétences

    du personnel, du porteur de dossier et des membres des comités. La formation de for-mateurs sur l’approche relationnelle de soins disponible à l’ASSTSAS (voir p. 22,L’approche relationnelle...) est un bon moyen d’atteindre cet objectif. D’autres formationspeuvent s’avérer essentielles. Une formation sur les milieux de vie, la prévention descomportements agressifs et perturbateurs, ou encore, l’approche prothétique élargiesont des exemples pertinents. Participation des membres des comités de travail à descolloques, visite de sites de référence sont autant d’occasions de formation.

    La santé et la sécurité du travailS’assurer que les objectifs visés par la démarche intègrent les besoins du personnel

    constitue un quatrième moyen. Le personnel doit en retirer des avantages concrets. La

    prévention des maux de dos et des troublesde comportement de la clientèle démentesont des demandes récurrentes de la partdu personnel soignant. L’amélioration dutravail d’équipe, la diminution des impré-vus, la clarification des rôles et des res-ponsabilités, l’amélioration des relationsavec les proches de la personne hébergéepeuvent procurer plusieurs avantages aupersonnel.

    La clientèleFinalement, la participation des per-

    sonnes hébergées et des proches constitueun autre moyen. Il y a plusieurs avantagesà ce que le personnel puisse faire con-naissance avec les perceptions que lespersonnes hébergées et les proches ontdu travail accompli. Cela peut amener deprécieux échanges permettant de mettreen évidence les difficultés et les solutionsenvisagées.

    Relier les personnesau cœur du projet

    Ainsi, il appert que la santé et la sécu-rité du travail constituent un enjeu fonda-mental de l’implantation d’un milieu devie substitut.

    Il existe une relation entre les problèmesde SST vécus par le personnel et la qua-lité des soins et des services dispensés àla clientèle. Une conclusion préliminairenous permet d’établir que cette relationbénéficie de l’implantation d’un milieude vie. ◆

    RÉ F É R E N C E S

    1 ASSOCIATION DES HÔPITAUX DU QUÉBEC.L’organisation du travail en soins infirmiers, 2002.

    2 KUORINKA, I. La gestion du changement - Leslésions attribuables au travail répétitif, IRSST, 1995.

    3 ASSTSAS. « Et la santé comment ça va ? »,Objectif prévention, vol. 26. no 1, 2003, 14-24(www.asstsas.qc.ca).

    4 KUORINKA, I. Op. Cit.

    5 SIMARD, M., et al. Étude des stratégies de déve-loppement de l’implication participative des contre-maîtres en prévention des accidents du travail dansl’industrie manufacturière, Université de Montréal,GRASP, 1993.

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    Dans les organisations, on a tendance àcroire que la communication a des pouvoirs magiques sur laréalité. En écrivant un bulletin interne, en posant des affichesou en montant un stand d’exposition, on s’attend à ce que lemessage, par magie, s’immisce dans le cerveau des gens, tasseles autres préoccupations et s’impose comme un tyran pourcontrôler désormais le comportement d’autrui.

    Comment s’opère le changement ?Communiquer, ça ne veut pas dire diffuser de l’information,

    ça veut dire pratiquer un échange avec une autre personne.Or, trop souvent les stratégies de communication se bornent àexposer aux autres ce qu’ils devraient savoir, sans se demandersi les personnes visées voient le message, le lisent et l’intério-risent de façon adéquate.

    Chaque individu possède une personnalité, des valeurs, deshabitudes, des résistances au changement et peut même avoirdes raisons objectives et sincères de s’opposer à tout change-

    ment. Alors, la personne nechangera que si elle en a envie,que si elle est convaincue, quesi les efforts de changementsont moins lourds que les incon-vénients anticipés.

    La prise de décisionCertains services ont le pouvoir d’imposer des changements.

    Les services administratifs, par exemple, peuvent exiger l’uti-lisation d’un nouveau formulaire. Mais lorsque l’on vise lasanté et la sécurité des travailleurs, il faut avoir recours à laforce de la conviction. Il y a donc des services qui ont despouvoirs de coercition et d’autres, des devoirs de séduction.

    Dans tout groupe d’individus, il y en aura toujours qui com-prendront et accepteront les mesures du changement. Pour ceux-là, la séduction suffit. D’autres opposeront une fin de non-recevoir à tout changement. Pour eux, la coercition s’impose.

    Dans une vision réaliste de la situation, on constatera quela santé et la sécurité des travailleurs peuvent être des préoc-cupations de la haute direction, mais pas nécessairement unepriorité. Ainsi, toute personne engagée en santé et en sécuritédu travail est plus ou moins laissée à elle-même. Elle devradonc apprendre à gérer seule le changement. Sans autorité, ilne lui reste plus que le pouvoir de la parole, que la séductionpar la communication.

    L’analyse de la situationLe premier travail consiste à dresser un bilan de la situation.

    De quelles statistiques disposons-nous sur le nombre d’accidents,lesquels sont les plus graves, quelle est leur évolution, quels ensont les coûts humains et financiers, lesquels préoccupent le

    plus les travailleurs, la société ? Il n’est pas toujours facile de quanti-

    fier ces éléments ou de les exprimer parordre d’importance, mais tant que cetravail de base ne sera pas fait, vous nedisposerez pas des arguments rationnelset convaincants dont vous allez avoirbesoin pour provoquer des changements.

    Les ciblesÀ qui voulons-nous parler ? Aux auto-

    rités, pour qu’elles adoptent une attitudeplus proactive face à la santé et à la sécu-rité du travail ? Aux services administra-tifs, pour qu’ils facilitent l’affichage surles lieux de travail ? Aux services des res-sources matérielles, pour qu’ils disposentdes équipements utiles pour circonscrirecertaines blessures ? Aux employés, pourqu’ils développent une attitude plus posi-tive face à la sécurité et des comportementsplus adéquats pour éviter des accidents ?

    Les objectifsAvec en main un portrait assez juste de

    la situation, donnez des priorités. Il fautviser des changements de comportementconcrets. Formulez vos objectifs en tenantcompte des cinq éléments suivants.

    1. Quel changement précis aborder enpremier ?

    2. Quel public rejoindre ? 3. Quelle influence exercer sur lui ?

    Attirer son attention sur les principauxdangers qui le guettent, développer chezlui une attitude positive face à certainschangements ou provoquer un change-ment de comportement dûment identifié ?

    4. Quel degré de changement obtenir ?5. Quel délai pour y arriver ? Chaque objectif ne vise qu’un seul

    thème et ne s’adresse qu’à un seul publiccible. Pourquoi ? Parce que l’on n’utilisepas les mêmes arguments, la même dé-marche, les mêmes outils auprès de publicsdifférents. D’où la nécessité de réduire àdeux ou trois objectifs par année son plande changement.

    Gérer le changement par la communication

    Sans autorité, il ne lui reste plusque le pouvoir de la parole, que laséduction par la communication.

    B e r n a r d D a g e n a i s

    P r o f e s s e u r t i t u l a i r e

    D é p a r t e m e n td ’ i n f o r m a t i o n e t

    d e c o m m u n i c a t i o n

    U n i v e r s i t é L a v a l

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    DD O S S I E R C O L L O Q U E C A P S U R L A P R É V E N T I O NL’axe

    L’axe correspond au message précis que vous voulez entrer dans la tête de votrecible. Formulons quelques axes.

    La santé, c’est le bien le plus précieux que l’on puisse posséder. L’expériencenous a appris que ce type de discours n’incitera personne à changer de comportement,mais confortera ceux qui manifestent des comportements adéquats. Prêcher la vertun’a d’influence que chez les vertueux. Or, nous voulons parler aux délinquants.

    Se blesser, c’est entacher sa qualité de vie. Ce conseil est déjà plus près despréoccupations des individus. Mais ce conseil est-il suffisant pour amener les autres àchanger de comportement ?

    Il n’y a que les crétins qui se mutilent. La remarque est agressive, peut faireréfléchir, mais peut aussi avoir un effet négatif. Personne n’aime se faire dire sesvérités de façon directe.

    La stratégieN’ayant pas le pouvoir de coercition, il vous reste le devoir de séduction. Voici deux

    pistes réalistes d’action.La première repose sur la notion de novateur. Dans tous les milieux, il y a des

    individus mieux prédisposés à adopter les changements proposés. Soucieux de leurenvironnement et de leur santé, ils seront très attentifs à toute mesure pouvant lesinciter à protéger l’un et l’autre. Ces individus existent, mais ne sont pas toujoursidentifiés. Il faut donc avoir recours à des communications de masse pour rejoindretout le monde et pour que ces individus se manifestent, se démarquent et deviennentles partenaires de choix pour l’instauration de nouvelles attitudes.

    À ceux-ci, se greffent les leaders. Ce ne sont pas nécessairement les novateurs. Maisdès qu’ils sentent qu’ils peuvent s’illustrer en intégrant certains comportements, ilsexerceront alors un rôle dynamique dans la propagation des mesures à suivre. Cesleaders sont habituellement connus dans les différents milieux. Il faut donc apprendreà travailler sur de petits ensembles pour rejoindre tout le monde, plutôt que d’essayerde parler à tout le monde en même temps sans rejoindre personne.

    La deuxième piste se joue parallèlement à la première. Ce qu’on appelle la re-connaissance du problème est probablement la méthode la plus efficace pour favoriser

    des changements de comporte-ment. Cette méthode fonc-tionne de la façon suivante :avant d’amener quelqu’un àchanger de comportement, ilfaut l’amener à intérioriser leproblème. Donc, dans un pre-mier temps, la stratégie consisteà oublier la solution au pro-

    blème, pour ne parler que de celui-ci. Il faut, pendant des semaines et des mois, rap-peler les problèmes que causent les accidents et les inconvénients que ceux-ci peuventcauser. Il ne s’agit pas de culpabiliser, mais d’amener tout le personnel à reconnaîtrelui-même l’importance des errements à la santé et à la sécurité sur les lieux du travail.

    C’est ainsi que les statistiques recueillies dans l’analyse de la situation deviennentimportantes. Mettre un graphique ou un thermomètre à l’entrée de l’établissement avecl’évolution mensuelle du nombre d’accidents constitue un moyen d’attirer l’attention.Rappeler, au moyen de petites affiches, les accidents les plus fréquents sur les lieuxmêmes de leur occurrence en est un autre.

    Les moyensIl faut rappeler chaque objectif et pour chacun d’entre eux écrire : « pour réaliser

    cet objectif, nous allons entreprendre les activités suivantes ». Chaque activité doit collerdirectement à l’objectif et aider à réaliser le plus efficacement les buts poursuivis.

    Toutes les activités n’ont pas le même degré d’efficacité : un discours du directeur

    général, un mot dans les enveloppes dechèques de paie, une affiche sur les lieuxde travail, un article dans le journal in-terne peuvent être utiles. Mais quelle acti-vité est la plus efficace pour atteindre sonobjectif ? Facilement, vous éliminerez desactivités intéressantes, mais non priori-taires. La tâche est toujours très lourdeet les effectifs peu nombreux pour l’exé-cuter. Il faut donc s’en tenir à l’essentiel.

    Ainsi, lorsque nous voulons rejoindreles premiers adhérents et les leaders,comme on ne sait pas où ils se trouvent,il faut utiliser des moyens très larges,comme des dépliants et des articles dansle bulletin interne. Lorsque vient le tempsde proposer des changements de compor-tement individuels, il faut trouver desmoyens plus près des lieux de travail :des affiches, des démonstrations sur place.

    L’évaluationAu bout de la période prévue dans les

    objectifs, il faut voir si ceux-ci ont étéatteints. Cette évaluation permet de réflé-chir aux stratégies et aux outils utilisés,aux freins et résistances non prévus, auxattitudes positives qui ne débouchent passur un comportement adéquat. Ces élé-ments constituent les outils pour cons-truire le prochain plan de communication.

    Les vertus de la communicationPeut-on désormais gérer le change-

    ment sans communication ? Tout, dansla société, est communication. La santén’échappe pas à la règle du mot.

    Mais on ne doit pas prêter au verbedes vertus magiques. Il en possède certes,mais ces vertus n’existent pas dans lesmots, mais dans la tête de ceux qui lesreçoivent. Communiquer ne doit pas selimiter à diffuser une information, mais àessayer de pénétrer dans la tête de l’autreet de l’influencer. Et l’autre n’agira ques’il le veut bien. N’oubliez jamais de luifaire partager le problème que vousvoulez résoudre avant de lui imposer unesolution. ◆

    Note : le texte complet de la conférence est

    disponible sur le site Internet :

    www.asstsas.qc.ca

    Apprendre à travailler sur de petitsensembles pour rejoindre tout lemonde, plutôt que d’essayer deparler à tout le monde en mêmetemps sans rejoindre personne.

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    Dans un grand nombre d’ouvrages surle leadershipa ou la gestion du changement, les agents de chan-gement sont présentés comme des personnages quasi mythiquesdont les qualités particulières appellent une certaine glorification.Comme en témoignent d’autres articles du présent numérod’Objectif prévention, ces êtres qui rendent la vie au travail plusagréable, qui contribuent à donner un sens au travail, qui sefont les artisans de changements profitant aux collectivités detravailleurs, de cadres et de clients existent dans le secteur dela santé et des services sociaux. Il ne faudrait toutefois pasoublier, dans le sillage de ces personnes d’exception, la contribu-tion des collectifs aux changements dont ils bénéficient, ne pasoublier non plus les grandes transformations qui émanent depetits gestes ordinaires posés par tout un chacun.

    En somme, il faut se rappeler ici que chacun est, dans unecertaine mesure, un agent dechangement et que les groupessont, quand ils se permettentde vivre une certaine cohésion,les plus puissants agents dechangement. Cela ne doit pasoblitérer l’autre réalité, celle del’agent d’exception qui, par sesqualités de rassembleur, peutamener un groupe à se mobi-liser dans un changement ou

    est en mesure de savoir à quelle porte frapper pour obtenir leschangements nécessaires pour un collectif.

    Les petits gestes des agents de changement ordinairesLes efforts des uns pour adopter des comportements qui

    soient en accord avec leurs valeurs, la parole de reconnaissanceou le signe d’empathie témoigné au moment opportun, l’aideapportée afin d’alléger le fardeau d’un collègue, les efforts con-sentis à une relation pour surmonter les conflits ou les différends

    qui la minent sont autant depetits gestes qui contribuent àchanger, pour le mieux,l’environnement de travail.

    Ces gestes sont à la portéede chacun. Sans faire de ceuxou celles qui les posent despersonnes exceptionnelles, ilssont un peu comme ces batte-

    ments d’ailes de papillon qui peuvent expliquer des boulever-sements climatiques se produisant des kilomètres plus loinb. Ilfaut comprendre, ici, que les agents de changement ordinairessont ceux qui transforment, souvent à leur insu, le monde

    qui les entoure de près ou de loin, dansun temps présent ou à venir.

    Les changements ou leur évitementcpeuvent être prévisibles ou imprévisibles,mais ils viennent toujours des personnes.Le statut des agents est un facteur déter-minant dans l’exercice de leur influence.Par exemple, une personne haut placéedans la hiérarchie a généralement plus defacilité à fixer les buts et les objectifs àatteindre, à mobiliser les ressources néces-saires et à mettre en évidence le succès deson action. De même, certains travailleursont appris, dans le cadre de leur formationinitiale, comment influencer un groupe oucomment établir un plan d’action straté-gique. D’autres, encore, occupent unefonction qui les positionne de manièreidéale pour transmettre leurs idées ou pourorchestrer la concertation des acteurs enmesure de mettre en œuvre un changement.

    La capacité d’une personne de planifierun changement, d’en assurer le suivi et derendre observable le fruit de son actioncontribue à rendre le changement plusprévisible et plus facile à reconnaître. L’in-dividu peut plus facilement être louangépour son rôle d’agent de changement. Parcontre, un agent de changement « ordi-naire » peut plus difficilement envisagerle but à atteindre. Il n’a pas toujours letemps, le goût ou les connaissances néces-saires pour dessiner un plan d’action etdévelopper des indicateurs de succès. Enconséquence, la portée de ses actions de-vient davantage imprévisible.

    D’autres facteurs agissent également surle caractère prévisible ou non des actionsd’un agent de changement. Nous pensonsà la distance entre l’agent et l’objet de sonaction. Ainsi, une travailleuse peut contri-buer à l’achat d’un équipement sur sonunité. Il est alors plus facile d’établir unlien entre ses actions et le changement.Par contre, un travailleur expérimenté

    Ceux par qui viennent les changementsne sont pas toujours ceux qu’on croit

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    « Un événement microscopique au départpeut, à la suite d’une multiplication expo-nentielle de ses conséquences, déterminer,à l'arrivée, un écart gigantesque parrapport aux prévisions… ».« Le chaos » Intérieur Nuit, émission culturellede la RTBF (31-03-96)

    Prendre conscience des changements del’environnement interne et externe. Réagirde manière opportune et s’adapter demanière adéquate pour surmonter lesproblèmes opérationnels ; tirer parti desoccasions qui sont offertes pour atteindreles résultats souhaités par l’organisation.« Profil de l’agent ». Guide de ressources – Gestion duchangement, Gouvernement du Canada.

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    ayant un lien de confiance avec une coordonnatrice et qui lui offre des conseils, luiapporte de la documentation ou la met en lien avec des personnes-ressources capablesde la soutenir dans un changement est beaucoup plus en amont de la chaîne de transfor-mation qui conduit éventuellement à un allégement du fardeau de tâche. Il devientalors un agent de changement ordinaire, ayant peu ou pas de contrôle sur l’impact deses gestes. Pourtant, son rôle a été essentiel.

    Le groupe comme agent de changementJacobs et Spradlin1 ont contribué de manière spécifique à la vision du groupe comme

    agent de changement. Le groupe y est alors vu comme une entité plus forte et plusgrande que la somme de ses partiesd. Comme le faisait valoir Dyer2 , un individu « ordi-naire » peut plus facilement changer dans la mesure où la contrainte exercée par le

    groupe le lui permet… ou l’yincite ! Dans le même ordred’idées, la possibilité pour unepersonne de contribuer significa-tivement à un changement béné-fique pour le groupe dépend enbonne partie de la volonté dugroupe, ou de son ouverture, à ceque le changement s’actualise.

    Pour qu’un groupe soit ouvertau changement et devienne un

    agent organisationnel puissant, il lui faut développer une certaine cohésion, en d’autresmots, un sentiment d’appartenance qui s’observe par :

    ➤ des échanges sociaux ;➤ l’énergie consentie à la reconnaissance verbale ou comportementale des réussites

    du groupe et de ses membres ;➤ la capacité des membres d’exprimer leurs désaccords entre eux ou avec l’ensemble

    du groupe et la capacité du groupe de soutenir les discussions relatives à cesdésaccords ;

    ➤ le partage d’attitudes et de valeurs semblables ;➤ le niveau d’entraide entre les membres ;➤ la déférence aux personnes dont le statut est plus élevé ;➤ le partage de blagues communes (« inside jokes ») ;➤ la productivité du groupe ;➤ la présence quotidienne et la participation aux activitése.Pour qu’une telle cohésion puisse se développer, le groupe doit être relativement

    stable, il doit aussi connaître sa finalité, partager des objectifs et avoir les moyens deles réaliser. Sans ces conditions initiales, les meilleures idées ne pourront faire leurchemin. En ce sens, le groupe peut bénéficier de la présence d’un agent de changementd’exception dans la mesure où il est dynamique, vivant… cohésif. Un tel groupe ouvreégalement la voie à la réalisation des individus qui le composent et, par ricochet, à lamultiplication des effets bénéfiques des petits gestes posés par les agents ordinaires.

    L’union des forces pour un changement réussi !La notion d’agent de changement renvoie à plusieurs réalités, dont trois sont évo-

    quées ici : les agents d’exception, les agents ordinaires et les groupes. Les agents d’excep-tion sont l’objet d’une littérature plus abondante portant notamment sur le leadership.Nous avons ajouté les autres types d’agent pour deux raisons complémentaires :

    ➤ la première visait à démystifier le rôle d’agent de changement afin que lesagents ordinaires réalisent l’importance de leurs gestes quotidiens dans la trans-formation de leur milieu ;

    ➤ la seconde visait à contrer le caractère individualiste qui transparaît souvent desécrits sur les agents de changement. En effet, le changement organisationneltouche généralement la collectivité et les groupes. En agissant en tant qu’entités

    cohésives, ces groupes deviennentdes agents importants dans lesprocessus de transformation.

    Avant de conclure, nous tenons à pré-ciser que ces trois types d’agent de change-ment sont complémentaires et cohabitentdans les milieux de travail. Nous tenonségalement à distinguer la notion de chan-gement de la notion d’innovation. Lesagents de changement, qu’ils soient desindividus ou des groupes, ne sont pasnécessairement ceux par qui les change-ments arrivent, ils peuvent être ceux quiréorientent les changements en cours demanière à les rendre plus bénéfiques. ◆

    RÉ F É R E N C E S

    1 JACOBS, Alfred et Wilford W. SPRADLIN(dir.). The group as agent of change, New York,Behavioral Publications, 1974.

    2 DYER, William G. The sensitive manipulator :The change agent who builds with others, Provo,Utah, Brigham Young University Press, 1972.

    NO T E S

    a – À titre indicatif de ce qu’on peut apprendre dans les livresqui associent le leadership au rôle d’agent de changement,nous vous suggérons un article en français disponible sur lesite de la Ontario Prevention Clearinghouse [OPC] :www.opc.ca/fls/leadership.htm. On y lit, entre autres,que : le leader envisage le changement comme une occasiond’apprendre ; il élargit sa propre perspective ; il est innovateur ;il planifie la réussite ; il ajuste les changements prévus enfonction du système de valeurs préconisé par son organisme ;il travaille avec ses partenaires ; il fait preuve d’optimisme etde dynamisme et il estime et apprécie les membres de sonéquipe. Des références pertinentes sont données sur le site.

    b – Nous faisons allusion ici à la métaphore de l’effet papillonévoquée par le météorologue du MIT, Edward Lorenz, dansune conférence célèbre prononcée en 1972. Lorenz, expli-quant la manière dont l’onde produite par un battement d’ailespouvait participer à la formation d’une forte turbulence à deskilomètres de distance, a précisé que « si le papillon pouvaitdéclencher une tornade qui, sans lui, ne se serait pas formée,il pouvait tout aussi bien empêcher une tornade de se former.»Voir à ce sujet l’article fort intéressant de Nicolas Witkowski.« La chasse à l’effet papillon », Alliage, numéro 22, 1995.www.tribunes.com/tribune/alliage/22/witk.htm

    c – La notion de « contre-changement positif » devrait êtreinventée en reconnaissance de ses vertus ! En effet, l’agentde changement n’est pas seulement celui ou celle par quivient le changement, mais aussi la personne qui résiste à cer-tains changements ou les transforme de manière avantageusepour elle, son groupe, son organisation ou la société. À titred’illustration, le refus d’accomplir une nouvelle tâche qui pré-sente des risques certains pour la santé et la sécurité peutêtre perçu comme une résistance. Toutefois, cette résistanceest essentielle pour que des solutions offrant des bénéficespour tous – en termes d’amélioration des conditions detravail, par exemple – soient trouvées.

    d – L’aphorisme est souvent représenté par la formulemathématique : 1 + 1 = 3

    e – Outre différents chapitres du livre dirigé par Jacobs etSpradlin, le concept de cohésion est traité de manière intéres-sante dans le livre de Bormann E.G. et N.C. Bormann. Effec-tive small group communication, Minneapolis, Burgess, 1972.

    « Une société cohésive n'en est pas unedépourvue de conflits. Les sociétés cohésivestrouvent plutôt des moyens de renforcer lesentiment d'appartenance à la collectivitépar la gestion et le règlement constructifsdes conflits. »Réseau de recherche sur la cohésion sociale Gouvernementdu Canada, 1999

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  • 6 • O B J E C T I F P R É V E N T I O N • V O L . 2 3 – N O 5 – 2 0 0 0

    e quotidien La Presse du 10 septembre2000 publiait dans son cahier santéun article intitulé « Les soignants ont

    le moral à plat »1. Des questions sim-ples et pertinentes y éta