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L’accueil de l’enfant à l’école maternelle MME ELSO Myriam Psychologue Clinicienne Intervention du 17/04/2013

L’accueil de l’enfant à l’école maternelle · A partir des données de l’éthologie et de la psychanalyse, La théorie de l’attachement de John BOWLBY va mettre également

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L’accueil de l’enfant à l’école maternelle

MME ELSO Myriam

Psychologue Clinicienne

Intervention du 17/04/2013

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En guise de préambule

• Un seul point de vue ne peut suffire à appréhender une situation ni prétendre en comprendre les tenants et les aboutissants. Il m’a donc semblé intéressant, de participer à ce groupe de réflexion sur la scolarisation des enfants de moins de trois ans, pour faire valoir, avec les limites qui sont les miennes, le regard d’une psychologue de l’école sur les enjeux culturels, affectifs et émotionnels d’un accueil précoce en Maternelle de l’enfant et ses parents.

• Psychologue clinicienne en Clinique et Psychopathologie interculturelle, j’ajouterai que pour un clinicien, se définir dans une relation interculturelle, c’est considérer qu’on ne partage a priori aucun implicite avec l’autre, et c’est lui proposer un cadre qui permette de construire un espace commun de rencontre. En clinique interculturelle, il n’est pas utile de se convaincre qu’on sait tout sur l’autre, mais il est nécessaire d’apprendre à l’écouter dans la rencontre.

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Le ‘’choc’’ de l’entrée à l’école

Pourquoi la première rencontre de l’enfant avec l’école se vit-elle

sur le mode d’un choc qui peut être désorganisateur ? Au moment de son entrée à l’école, l’enfant se sépare de sa mère et du milieu de vie qu’il est parvenu à s’approprier jusque là, en intégrant un certain nombre de codes. Cette séparation secoue l’enfant dans ses tréfonds car il expérimente une perte tout en étant confronté à l’inconnu. Cette situation active ce qu’on appelle la problématique de séparation.

La séparation est un processus fondamental dans le développement affectif qui permet au bébé de se séparer de sa mère pour devenir un individu avec sa personnalité propre. Deux caractéristiques sont à retenir : 1) La distance avec l’objet d’amour s’accroît d’étape en étape : naissance, sevrage, marche, entrée à l’école… 2) Toute situation de séparation réactive les séparations antérieures selon le mode sur lequel elles se sont déroulées. ( Par exemple, une séparation nécessaire comme l’entrée à l’école peut renvoyer à une séparation accidentelle ou douloureuse comme maladie ou hospitalisation.)

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Grandir source de plaisir ou grandir source d’angoisse ?

• Le bon déroulement du processus de séparation va dépendre pour l’essentiel de la qualité de l’attachement mis en place car :

pour bien se détacher il est indispensable d’être bien attaché.

• Selon la théorie de John BOWLBY l’attachement est un besoin primaire qui se développe à partir de comportements innés ( pleurs, succion, agrippements…) qui servent à assurer la proximité physique avec la figure d’attachement (la mère ).

• La fonction de l’attachement c’est de procurer protection, réconfort et consolation quand l’individu perçoit des menaces extérieures

• ou internes.

• Si les réponses de l’entourage sont adéquates, elles vont

favoriser un attachement sécure. Si les réponses ne sont

pas suffisamment adaptées, l’enfant risque de développer

un attachement ambivalent, évitant, voire désorganisé.

La qualité de l’attachement a donc un impact fort sur le

développement affectif car la première relation à la mère

constitue le prototype et la base de toutes les relations sociales à venir.

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L’école s’articule autour de l’absence de la mère

S’assumer comme séparé de sa mère, donc différent, est une expérience douloureuse sans doute mais c’est l’essence même de l’aventure humaine. L’ humain est destiné à s’adapter à son environnement. Il doit parvenir à s’adapter pour survivre à l’angoisse , donc le choix de grandir ne se pose même pas .

Au moment de l’entrée à l’école maternelle, le stress de la séparation va désorganiser l’enfant. Le degré de désorganisation et la durée de cette période d’adaptation va varier selon chaque enfant.

Signe de cette désorganisation : la régression.

Temps et tolérance vont permettre à l’enfant

d’élaborer les affects contradictoires liés à la

séparation. Si l’école tolère cette régression et

verbalise l’absence de sa mère , l’enfant sera

réellement accompagné.

Permettre à l’enfant d’élaborer son angoisse et

l’aider à quitter le familier pour aller vers l’étranger,

c’est l’enjeu de la culture et c’est là qu’est toute la place de l’école.

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Mais à chacun son histoire !

• Tous les enfants ne vivent pas les situations à l’identique. • Chaque enfant est attendu dans un contexte psychique maternel particulier. Ce

qui se passe au moment de la naissance est très fort, et l’enfant est reconnu par sa mère sur un mode unique.

• L’histoire avec la mère est singulière pour chaque enfant, selon la culture familiale, la qualité du maternage, les évènements, mais aussi les capacités dont il dispose pour élaborer les situations.

• En effet, tous les enfants n’ont pas la même vitalité, la même impatience, la même résistance…le degré de vulnérabilité est propre à chacun et les mères ou leur substitut ne donnent pas toutes la même réponse.

• Quand il entre à l’école, l’enfant doit faire face à la séparation , pour cela, il va utiliser des comportements qu’il a déjà expérimentés et qui lui sont apparus pertinents pendant ses deux premières années d’existence .

• Ainsi à l’entrée à l’école, des réactions différentes d’un enfant à l’autre vont se manifester :

• - tel enfant demeurera silencieux, inhibé, sans larme, - tel autre va pleurer, - tel autre s’agitera, provoquera , agressera …

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Quelques rappels théoriques.

• Pour comprendre les phénomènes psychiques précoces :

Selon FREUD (1911) chez le jeune enfant, le psychisme prend sa source dans le corps: c’est donc avant tout du corps dont il s’agit: corps en construction, corps en relation…Il explique comment, pendant le stade anal en investissant le contrôle des sphincters, l’enfant accède à la maîtrise de sa relation avec sa mère. Découverte du dedans, dehors, rétention, expulsion , domination, soumission. Avec le passage progressif au stade phallique, il évoque ensuite le début de l’angoisse de castration avec l’apparition de la relation triangulaire.

A partir des données de l’éthologie et de la psychanalyse, La théorie de l’attachement de John BOWLBY va mettre également l’accent sur l’intérêt de l’enfant pour ce qu’il vit au niveau de ses relations affectives.

- GOLSE (1999) explique que les deux principes qui régissent la vie psychique: le principe de plaisir et le principe de réalité ne se dégagent l’un de l’autre que vers 5 ou 6ans. L’âge de 2ans correspond au fondement de l’identité. C’est le tout début du corps représenté avec l’apparition dans le graphisme des premières verticales. C’est la mise en place des acquisitions symboliques, la correspondance entre la chose et le mot (Mélanie KLEIN équation symbolique 1930) avec la reconnaissance passive: je montre, et la nomination active: je dis. Apparition dans le langage du oui, non.

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Rappels théoriques (suite)

• L’âge de 2ans correspond à l’apparition des premières phobies qui ponctuent l’avènement du monde fantasmatique, avec la peur du noir, des animaux, et autres, les premiers troubles du sommeil. C’est l’ébauche de l’espace interne. Les premières phobies sont des organisateurs essentiels de la vie psychique comme le premier sourire, l’angoisse de l’étranger et plus tard le conflit oedipien.

• Inquiétant l’enfant de 2ans qui n’a encore jamais eu peur de rien, qui dort d’un profond sommeil, et qui est prêt à s’aventurer n’importe où, avec le premier venu ! On peut en déduire qu’il lui manque l’essentiel, ce sur quoi se fonde la vie psychique: l’angoisse.

• Les caractéristiques à retenir de la vie psychique de l’enfant de 2ans :

1) Le manque de moyens dont dispose l’enfant pour réguler lui-même son équilibre interne et sa grande dépendance à la personne qui prend soin de lui.

2) son acquisition progressive de ces moyens de régulation par l’identification

et la symbolisation.

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Les apports théoriques les plus récents

• L’observation du très jeune enfant avec les moyens d’investigation actuels a montré que ce n’est pas seulement l’environnement concret comme a pu le décrire Piaget qui intéresse l’enfant mais d’abord ses partenaires humains.

• Muratori et Maestro (2007) ont montré que deux types d’attention se font concurrence : l’attention sociale tournée vers les humains et l’attention non sociale tournée vers les objets avec une prédominance quasi exclusive de la première les six premiers mois de la vie.

• Dès la naissance, l’être humain est donc programmé pour interagir et c’est à partir de ces interactions qu’il développe ses compétences. Définition du «¨Etre avec » selon l’expression de Daniel STERN.(2000)

• Le résultat de cette prédisposition c’est que pour l’enfant toute nouvelle situation d’apprentissage se teinte à son insu des significations affectives et imaginaires qui ont pris naissance dans les relations qu’il a établies avec ses partenaires privilégiés: mère, père, entourage familial…

• Il est donc inévitable qu’il éprouve tantôt de grandes satisfactions, tantôt de cruelles déceptions. Raison pour laquelle les apprentissages sont inévitablement chargés d’émotions plus ou moins fortes qui soit stimulent l’enfant à apprendre, soit inhibent ses capacités, soit font obstacle à toute motivation d’apprendre.

• Il convient donc de prendre en compte ce monde complexe des émotions pour mieux comprendre les difficultés d’adaptation ou d’apprentissage rencontrées en milieu scolaire.

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Mais qui est-il cet enfant de deux ans qui entre à l’école ?

A deux ans, l’enfant ne fait pas d’emblée la différence entre lui et l’autre.

Jusqu’à trois ans, il est d’ailleurs principalement occupé à construire son identité.

Selon MALHER cette construction progressive de l’identité s’opère à partir du processus psychique de séparation/ individuation et s’articule à ses acquisitions successives (objet transitionnel, déplacement autonome, exploration de l’environnement, utilisation du langage, jeu symbolique, différentiation des sexes…).

Entre deux et trois ans, deux aspects à retenir :

-1) L’enfant émerge progressivement de la relation

fusionnelle qui l’unit à sa mère, il se sépare peu à peu

et parvient à accepter l’absence ,ce qui lui permet de

s’éprouver distinct de sa mère.

-2) L’enfant s’individualise .Il se construit avec ses

caractéristiques propres, pour devenir un individu unique.

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Quelques repères dans le développement des émotions et des interactions sociales

Parler du développement affectif et social de l’enfant c’est décrire sa capacité à manifester ses émotions et apprendre à les maîtriser. La période entre 2et 3ans est celle de l’affirmation de soi. L’enfant découvre sa personne, l’autre et le monde. Son accès à plus d’indépendance s’exprime par une phase d’opposition. Par ce biais, il construit son estime de lui, Il s’affirme et devient capable d’empathie.

• L’âge du « non » • Dès 18mois l’enfant commence à s’opposer à l’adulte: de la voix, du geste, il dit « non »

refuse d’obéir, boude, simplement pour s’opposer. Le non a un vrai sens puisque l’enfant l’utilise délibérément.. En devenant peu à peu autonome, l’enfant se heurte à beaucoup d’interdits de la part de l’adulte. Il va donc l’imiter en lui empruntant le geste puis le mot « non »

• Les interdits engendrent des frustrations que l’enfant supporte difficilement mais qui vont le conduire à entrer dans un processus de socialisation marqué par des apprentissages comme la propreté, le respect de l’autre, le respect du cadre…etc.

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• L’âge du « Moi tout seul » • Vers 2ans et demi s’ajoute la phase du « Moi tout seul » L’enfant veut tout faire par lui-

même, ce qui engendre facilement colère ou crise de larmes s’il n’y parvient pas.. Tout est prétexte à repousser les limites de ses capacités motrices et à devenir autonome. Cette étape correspond à un besoin d’imiter l’autre, essentiellement l’adulte. L’enfant se lance des défis pour reproduire les actions de l’adulte. Il n’y parvient pas toujours et l’agressivité et l’opposition sont fréquentes.

• C’est l’acquisition plus complète du langage et des compétences motrices qui permettront d’en atténuer les manifestations.

En résumé, cet enfant de deux à trois ans : Exerce avec joie son besoin d’autonomie : ( il s’oppose et dit »non ») Exerce aussi son besoin de dépendance affective (il ne veut pas perdre l’amour de l’adulte même s’il s’oppose à lui ce qui se traduit par ex. par des résistances à s’endormir, un désarroi devant les interdits… S’identifie (il imite l’adulte) Entre en relation avec d’autres personnes que ses proches après parfois un temps d’observation, mais la mère reste son recours privilégié.

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• Ses comportements • Il réclame toute l’attention de la

personne qui s’occupe de lui.

• Il fait beaucoup de demandes.

• Il veut que ses besoins soient immédiatement satisfaits.

• Il est aimant et sensible. Il sait exprimer certains sentiments. Il est de plus en plus en mesure de comprendre ce que ressentent les autres (adulte et enfant).

• Il joue en parallèle à côté d’autres enfants. Il est possessif avec ses jouets et prend les jouets de l’autre. Il n’a pas encore le sens du partage. Il joue à faire semblant

• Ses besoins • Il est encore fondamentalement

dépendant de l’adulte. Mais il ne faut pas qu’il y ait trop d’adultes autour de lui. Il a besoin d’établir une relation de confiance avec un seul adulte qu’il connaît.

Il a besoin de proximité affective, d’un ancrage fort à l’adulte dans une relation stable et personnalisée.

Il a besoin de lieux à lui, faciles à identifier. Les autres enfants sont des rivaux dans la conquête de l’adulte et les jeux collectifs restent des activités parallèles car il ne peut communiquer qu’avec un seul partenaire à la fois.

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• Ses comportements • Il essaie d’être indépendant, il a

plaisir à faire de nouvelles choses seul. Il s’oppose, il impose sa façon de faire, il imite.

• Il fait parfois des crises de colère s’il est fâché ou frustré. Mais il apprend des stratégies qui vont lui permettre de faire face à ce qu’il ressent

• Il commence à communiquer ce qu’il ressent par le langage.

• Il est capable de représentation mentale.

• Ses besoins • Il a besoin d’activités individuelles

• Les excès de stimulation du groupe peuvent le gêner.

• Il a besoin de réconfort et de protection.

• Il a besoin de routine.

• Ce qui se passe doit rester prévisible et être ordonné.

• Il a besoin qu’on verbalise les situations.

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Les conquêtes de l’enfant

Entre 2 et 3 ans l’enfant va parvenir à accepter plus facilement d’être séparé de ses parents, entrer en interaction avec d’autres enfants et leur témoigner de l’empathie. L’école va instituer l’apprentissage des règles de vie commune, le respect de l’autre mais aussi ses limites. Peu à peu l’enfant parviendra à moins s’opposer aux limites et à la règle.

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Les enjeux de l’accueil

• L’entrée à l’école implique que l’enfant supporte de se séparer . Entre le moment où sa mère part et où elle revient, l’enfant est dans un vide qu’il va devoir combler Il doit pouvoir prendre le temps de vivre et expérimenter la séparation et les conditions de l’accueil doivent en tenir compte. Certains enfants vont se cramponner à l’adulte, c’est-à-dire à la représentation du parent., d’ autres à un lieu : c’est l’empreinte du parent qu’ils recherchent.

• Si le fonctionnement de l’école n’autorise pas cet espace à l’enfant , une part de sa vie psychique peut être niée au profit de son adaptation et plus tard dans le vécu scolaire, le désinvestissement peut apparaître. (Par exemple exhorter un enfant à cesser de pleurer peut l’inhiber totalement. Il peut ravaler ses larmes et ne plus rien manifester). Essentiel de faire la nuance entre « obliger l’enfant à » et « permettre à l’enfant de ».

• Ne pas perdre de vue que les failles des toutes premières années restent les plus difficiles à colmater et qu’ au cours du développement affectif les périodes de transition sont comparables à des crises puisqu’elles provoquent du désarroi, de l’inquiétude, voire de l’angoisse. L’accueil en maternelle doit donc favoriser la mise en confiance de l’enfant et sa famille car sa première expérience de l’école, l’enfant la modifiera peut-être, mais il ne la changera pas.

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L’approche interculturelle

. La clinique interculturelle privilégie la rencontre avec la famille et sa culture pour mieux comprendre l’enfant, sa nature et sa place au sein du groupe.

Les représentations culturelles de l’enfant existent avant l’enfant lui-même,

elles constituent une sorte d’image de l’enfant qu’il va venir habiter à sa naissance, elles déterminent de quelle manière l’enfant est perçu et investi, elles influent sur la manière dont on entre en relation avec lui. Les fonctions maternelle et paternelle varient selon les cultures, de même que la conception de la nature et de la place de

l’enfant. L’accueil à l’école du très jeune

enfant que la scolarisation va séparer de

son cadre familier rend incontournable à

mon sens, la réflexion sur la place faite à

la famille et à ses savoir-faire.

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A qui appartient l’enfant ?

• On sait que l’identification est le socle sur lequel se construit la personnalité. Dans le Complexe d’Œdipe FREUD a décrit ce processus d’identification, marqué par un amour intense teinté de désir sexuel et par une rivalité qui engendre de l’agressivité.

• Bien avant l’entrée à l’école, l’enfant modèle ses comportements, ses valeurs, ses intérêts, son mode de relation à autrui sur ce qu’il observe chez les adultes de son entourage, et d’abord chez ses parents.

• Le rôle de l’école est d’offrir à l’enfant des images identificatoires nouvelles, extérieures à sa famille pour permettre son émancipation, mais pas en opposition ou en rupture totale avec les images parentales. De nombreuses études l’ont montré, on ne peut pas transmettre des savoirs avec efficacité en s’opposant à la culture familiale ou en disqualifiant les parents.

• Chaque culture est porteuse de valeurs, de connaissances et de savoir-faire et toute hiérarchie d’une culture à l’autre est arbitraire. S’il y a conflit entre la culture de l’école et la culture familiale, l’enfant est confronté à un conflit de loyauté d’où la question fondamentale de l’appartenance de l’enfant.

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Faire une place à la famille

Une attention particulière doit être accordée à la relation à établir avec les parents: relation de confiance de respect et surtout de collaboration active pour éviter tout conflit d’appartenance de l’enfant.

• Solliciter la compétence de la famille concernant son enfant, sans la mettre en doute à priori: par ex. à propos d’un enfant qui montre des signes de fatigue

Ne pas dire : « est-ce que vous couchez bien votre enfant à 8heures? »

Mais plutôt « j’ai remarqué que votre enfant est rapidement fatigué le matin,

qu’en pensez-vous? »

• Etablir une collaboration sans ingérence de l’école dans l’espace familial du maternage (les injonctions intempestives sur l’alimentation, le sommeil, la propreté, la tenue vestimentaire, le mode de vie de la famille ne relèvent pas de l’expertise pédagogique. Des tiers extérieurs existent pour ces conseils, qui n’occupent pas auprès de l’enfant la place de l’enseignant)

• L’école s’approprie les apprentissages scolaires en rendant la culture de l’école accessible aux familles (l’enseignant informe la famille , s’assure de sa bonne compréhension du dispositif mis en place , de sa confiance pour éviter toute ingérence de la famille sur les programmes ou les choix pédagogiques.

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Accompagner la famille

• Pourquoi a première scolarisation est un moment éprouvant pour la famille ? • Il faut être assez fort pour accepter le regard social posé sur son enfant. Il est seul de

son espèce dans la famille, ils sont tout un groupe à l’école , on va les comparer les uns aux autres (je l’ai bien fait ou mal fait, bien éduqué ou mal éduqué, j’ai réussi ou échoué ?)

• Il faut être assez sûr de soi pour accepter que quelqu’un d’autre lui transmette des habitudes, des savoir-faire, des connaissances qui vont le transformer, peut-être l’éloigner de soi ?

• Il faut être assez confiant pour le laisser seul à la merci de tous les dangers sans que je sois là pour intervenir …confiant dans l’autre: est-ce qu’il saura veiller sur mon enfant…confiant en soi est-ce que je lui ai bien appris tout ce qu’il doit savoir pour être sans moi ?

• Accompagner la famille pour sécuriser l’enfant: • La famille doit avoir un espace institutionnel pour échanger: rencontre, entretien

institué, pas impromptu, pas entre deux portes…pour parler de son enfant, exprimer ses craintes ou ses incompréhensions.

• La famille doit être sollicitée, sur ses compétences, ses savoirs-faire et sa culture d’origine . Apporter sa contribution à la culture de l’école la confortera dans son rôle et sécurisera l’enfant.

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L’école n’est pas un lieu anodin

• Le parent a un passé , quand ce n’est pas un passif avec l’école. Tous les cas de figure existent et quand le parent pénètre dans l’école, c’est l’élève du passé qui transmet ses émotions à l’enfant d’aujourd’hui.

• L’école est un lieu institutionnel, avec une équipe pédagogique, des objectifs, un projet, un règlement un fonctionnement et des exigences ! Avec sa pression normative et évaluative, l’école d’aujourd’hui est-elle faite pour éduquer chaque enfant dans sa différence ou pour gérer un élève idéal auquel s’adresse un modèle pédagogique idéal lui aussi ?

Je ne me permettrai pas de trancher la question, je rappellerai juste que l’évaluation est un outil pertinent à condition d’évaluer une démarche, une situation d’apprentissage, pas un enfant! ( cf Vigotsky et sa notion de Zone proximale de développement…cet écart entre les connaissances initiales de l’enfant et celles qu’il peut acquérir , s’il est bien accompagné par le pédagogue…)

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Préconisations pour l’accueil à l’école du très jeune enfant

Avoir une connaissance des comportements , des besoins physiologiques et éducatifs du jeune enfant, ne suffit pas. Il est essentiel de prendre en compte les aspects émotionnels, relationnels et symboliques qui entrent en jeu au moment de la première scolarisation.

Réfléchir à un dispositif qui institutionnalise la collaboration de la famille pour que l’accueil du tout petit soit une passerelle entre la culture de la famille et la culture de l’école , entre la langue maternelle et la langue de l’école. ( on ne fait pas retour à la langue maternelle parce que l’enfant n’a pas compris, on communique avec lui dans sa langue maternelle d’abord pour s’assurer de sa compréhension et on introduit la langue de l’école en situation d’apprentissage. )

Les principes à retenir : s’appuyer sur ce que l’enfant sait faire, comprendre et dire pour lui faciliter l’accès à des apprentissages nouveaux. Ne pas disqualifier ses modèles familiaux mais les conforter pour lui faciliter l’accès à des identifications nouvelles qui vont lui permettre de s’autonomiser.

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Préconisations (suite)

• Concernant plus directement l’accueil de l’enfant , il serait inadapté de projeter les attitudes forgées à travers la scolarisation des 3/4ans sur les 2/3ans..

• La transition entre le maternage familial et les exigences scolaires devient un impératif, avec un déroulement dans le temps.

• L’enfant a besoin de retrouver à l’école un ancrage fort à l’adulte du même type que celui qu’il trouve en famille ( nécessité d’une relation personnalisée, durable, ritualisée avec un à deux adultes référents tout au plus.

• L’enfant a besoin de s’appuyer sur ses repères connus ( réfléchir aux modalités d’accompagnement de l’enfant par le parent, possibilité du recours à un objet transitionnel s’il existe…)

• L’enfant a besoin de poser de nouveaux repères ( nécessité d’attribuer à l’enfant des lieux qui lui sont personnellement dédiés à l’intérieur de la classe , à portée de regard et faciles d’accès : casier, ou autre)

• Pour le jeune enfant, le collectif d’emblée pourrait constituer une violence symbolique extrême Nécessité d’accueillir l’enfant d’abord, en le nommant , de lui assurer une guidance la plus individualisée possible avec une large possibilité d’activités individuelles et un accès au grand collectif très progressif.

• I

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Et pour conclure…

Les deux ans à l’école maternelle , oui ou non ?

• C’est la découverte de réelles compétences chez le très jeune enfant et de l’importance d’un environnement stimulant dans l’acquisition du langage, de l’autonomie et de la cognition qui ont ouvert la voie à ce projet de scolarisation précoce.

• Alors pourquoi ne pas relever ce défi, à condition de nous en donner les moyens :

• aucun enfant n’entre à l’école vide de connaissance ou de compétence,

• Il appartient à une histoire familiale…

• tous les enfants de 2ans ne sont pas les mêmes, ne serait-ce qu’au regard de leur date de naissance, entre autre…

• Mais ils ont tous besoin de protection, d’attention, de sécurité pour se développer à leur rythme.

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Eléments de bibliographie

• Freud S. (1919) L’inquiétante étrangeté • (1930) Psychanalyse et théorie de la libido • Wallon H. (1956) Les étapes de la personnalité chez l’enfant • Fanon F. (1971) Peau noire, masques blancs • BERGERET J. (1972) Psychologie pathologique • MALHER M. (1973) Symbiose humaine et individuation • Bowlby J. (1978) Attachement et perte. • KRISTEVA J. (1988) Etrangers à nous-mêmes • Calin D. ( 1999) De la mère à l’école • CIPRUT M. (2000) Interculturalité et tradition : l’exemple antillais. • MORO M.R. (1998) Psychothérapie transculturelle des enfants et des adolescents

(2002) Enfants d’ici, venus d’ailleurs • Xinyin Chen (2009) Influence de la culture sur le développement socio-affectif du jeune

enfant. •